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http://lib.uliege.be https://matheo.uliege.be La crise politico-économique vénézuélienne dans la Libre Belgique : Analyse de représentations politiques, sociales et idéologiques Auteur : Serraiocco, Fatira Promoteur(s) : Geuens, Geoffrey Faculté : Faculté de Philosophie et Lettres Diplôme : Master en communication multilingue, à finalité spécialisée en communication interculturelle et des organisations internationales Année académique : 2018-2019 URI/URL : http://hdl.handle.net/2268.2/7861 Avertissement à l'attention des usagers : Tous les documents placés en accès ouvert sur le site le site MatheO sont protégés par le droit d'auteur. Conformément aux principes énoncés par la "Budapest Open Access Initiative"(BOAI, 2002), l'utilisateur du site peut lire, télécharger, copier, transmettre, imprimer, chercher ou faire un lien vers le texte intégral de ces documents, les disséquer pour les indexer, s'en servir de données pour un logiciel, ou s'en servir à toute autre fin légale (ou prévue par la réglementation relative au droit d'auteur). Toute utilisation du document à des fins commerciales est strictement interdite. Par ailleurs, l'utilisateur s'engage à respecter les droits moraux de l'auteur, principalement le droit à l'intégrité de l'oeuvre et le droit de paternité et ce dans toute utilisation que l'utilisateur entreprend. Ainsi, à titre d'exemple, lorsqu'il reproduira un document par extrait ou dans son intégralité, l'utilisateur citera de manière complète les sources telles que mentionnées ci-dessus. Toute utilisation non explicitement autorisée ci-avant (telle que par exemple, la modification du document ou son résumé) nécessite l'autorisation préalable et expresse des auteurs ou de leurs ayants droit.

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http://lib.uliege.be https://matheo.uliege.be

La crise politico-économique vénézuélienne dans la Libre Belgique : Analyse de

représentations politiques, sociales et idéologiques

Auteur : Serraiocco, Fatira

Promoteur(s) : Geuens, Geoffrey

Faculté : Faculté de Philosophie et Lettres

Diplôme : Master en communication multilingue, à finalité spécialisée en communication

interculturelle et des organisations internationales

Année académique : 2018-2019

URI/URL : http://hdl.handle.net/2268.2/7861

Avertissement à l'attention des usagers :

Tous les documents placés en accès ouvert sur le site le site MatheO sont protégés par le droit d'auteur. Conformément

aux principes énoncés par la "Budapest Open Access Initiative"(BOAI, 2002), l'utilisateur du site peut lire, télécharger,

copier, transmettre, imprimer, chercher ou faire un lien vers le texte intégral de ces documents, les disséquer pour les

indexer, s'en servir de données pour un logiciel, ou s'en servir à toute autre fin légale (ou prévue par la réglementation

relative au droit d'auteur). Toute utilisation du document à des fins commerciales est strictement interdite.

Par ailleurs, l'utilisateur s'engage à respecter les droits moraux de l'auteur, principalement le droit à l'intégrité de l'oeuvre

et le droit de paternité et ce dans toute utilisation que l'utilisateur entreprend. Ainsi, à titre d'exemple, lorsqu'il reproduira

un document par extrait ou dans son intégralité, l'utilisateur citera de manière complète les sources telles que

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Université de Liège

Faculté de Philosophie et Lettres Département Médias, Culture et Communication

La crise politico-économique vénézuélienne

dans La Libre Belgique :

Analyse de représentations politiques, sociales et idéologiques

Mémoire présenté par SERRAIOCCO Fatira en vue de l’obtention du grade de Master en Communication multilingue

à finalité spécialisée en communication interculturelle et des organisations internationales.

Année académique 2018 / 2019

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Remerciements Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué à la réalisation de ce mémoire et qui

m’ont aidé lors de sa rédaction.

Je voudrais dans un premier temps remercier Monsieur Geuens, mon directeur de

mémoire, pour sa patience, sa disponibilité et ses judicieux conseils, qui ont contribué à

alimenter ma réflexion. Je lui suis reconnaissante pour le temps qu’il a consacré à m’apporter

les outils méthodologiques indispensables à la conduite de cette recherche.

Je remercie également ma famille, mes amis ainsi que mes collègues pour leurs

encouragements. Leur soutien inconditionnel m’a été d’une grande aide tout au long de ce

travail.

L’enseignement de qualité dispensé par l’Université de Liège a également su nourrir

mes réflexions et a représenté une profonde satisfaction intellectuelle, merci donc à l’ensemble

du corps professoral.

Enfin, je tiens également à remercier toutes les personnes qui ont porté un intérêt pour le

sujet de ce mémoire.

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1. Introduction

1.1. Objet de la recherche

Depuis toujours, le rôle de la presse est de transmettre de l’information de qualité pour

permettre à chacun de porter un regard sur le monde et d’avoir un avis en tant que citoyen du

monde sur une question internationale, en toute connaissance de cause. L’efficacité de la presse

repose primordialement sur la capacité à propager du contenu dans le plus de cerveaux possible.

Il est bien connu qu’aujourd’hui la presse est assez encline à détourner et manipuler l’opinion

publique par le biais de la communication d’informations soigneusement choisies. Les

journalistes ont tendance à exprimer l’angle d’un article de façon discrète mais pas toujours.

Parfois, ces derniers assument ouvertement leur opinion.

Ces dernières années, mais plus particulièrement depuis le 10 janvier 2019, le Venezuela

est exposé sous le feu des projecteurs. En mars 2013, Hugo Chavez, ancien président de la

République bolivarienne du Venezuela, est emporté par la maladie et laisse derrière lui son

héritier Nicolás Maduro au pouvoir. Toutefois, ce dernier peine à susciter la même ferveur que

son mentor. En 2018, sa réélection suscite la colère et un tollé dans le pays mais pas seulement.

Plusieurs pays d’Amérique latine, les États-Unis ainsi que d’autres pays étrangers refusent de

le reconnaître comme président du Venezuela et quelques jours après son investiture, qui eut

lieu en janvier, Juan Guaidó, membre du parti Volonté populaire (Voluntad Popular), s’est

autoproclamé président par intérim. Dès lors, le Venezuela qui était déjà enlisé dans une crise

économique et sociale, se retrouve de nouveau plongé dans le noir avec l’apparition d’une crise

politique présidentielle.

Le travail sera axé sur l’importance qu’occupe la crise vénézuélienne survenue ces dernières

années dans le journal La Libre Belgique. Le but de ce mémoire est de montrer comment

l’information d’un évènement international est traitée par la presse belge et de quelle façon elle

peut être réceptionnée par la sphère publique. Différents acteurs jouent un rôle important dans

le traitement médiatique et contribuent à la représentation des évènements vénézuéliens.

Tout d’abord, j’ai choisi ce sujet, car la désinformation et la manipulation médiatique sont,

selon moi, un peu trop négligées et minimisées par un nombre important de personnes qui

s’empressent de relater des faits à tout-va sans tenter de voir plus loin que ce qu’on cherche à

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leur montrer. Les représentations véhiculées de conflits internationaux similaires à celui du

Venezuela par les pays européens sont une thématique sur laquelle je m’interroge constamment.

Je ne suis en réalité pas toujours d’accord avec l’analyse que les médias européens en font et

avec la façon dont ces conflits sont présentés. Il y a comme l’impression que les médias

profitent, en quelque sorte, de l’innocence du public pour qui ces conflits sont au départ

inconnus puisqu’il est difficile de se rendre sur le terrain et d’observer et de juger par soi-même

le véritable déroulement des évènements. Il est dangereux de réduire l’importance des

mauvaises représentations, car elles peuvent engendrer la naissance de stéréotypes et de

préjugés à l’égard de personnes étrangères. C’est la raison pour laquelle, lorsque je suis

l’actualité, je tente constamment de porter un regard aiguisé sur les informations qui nous

parviennent, ou plutôt que l’on a choisi de nous transmettre, et sur les idées qu’on essaie de

nous faire assimiler indirectement. De plus, le choix de ce sujet a été motivé par le désir de

démontrer que la neutralité parfaite n’existe pas et qu’il faut dès lors sans cesse être plus vigilant

lorsque l’on réceptionne un discours ou des informations relatives à un sujet donné. Le domaine

des relations internationales et de la politique m’intéresse particulièrement, et donc j’étais très

avide et curieuse d’explorer en profondeur un nouvel évènement politique et d’en apprendre

davantage sur ce dernier. Mon attrait pour les évènements internationaux me pousse également

à entreprendre un master de spécialisation un peu plus orienté vers les relations internationales

une fois diplômée en Communication multilingue.

1.2. Le contexte des évènements

Le Venezuela compte parmi les plus grands pays producteurs de pétrole dans le monde. En

effet, il possède les plus importantes réserves de pétrole. Celles-ci représenteraient 296,50

milliards1 de barils selon une estimation de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole

(OPEP) et lui feraient devancer l’Arabie saoudite et obtenir ainsi la première place mondiale.

Les espaces de production pétrolière constituent encore aujourd’hui la base de l’économie du

Venezuela. L’importance du pétrole est très ancienne. Dans les années nonante, plus de la

moitié de la population vivait sous le seuil de pauvreté. Le 27 février 1989 eut lieu l’un des

évènements historiques les plus marquants de l’histoire du Venezuela : le Caracazo. Cet

1 Qabazard, Hasan. et Al-Zayer, Fuad. (2011) Annual Statistical Bulletin. Disponible sur: www.opec.org (consulté le: 28 juillet 2019).

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évènement désigne le moment où la ville de Caracas et ses alentours se sont retrouvés envahis

de manifestants qui protestaient contre l’application des mesures du Fonds monétaire

international (FMI) suite à la demande du président vénézuélien d’adopter des réformes qui

conduisaient à la libéralisation du marché. Les prix des produits de première nécessité avaient

augmenté. Les émeutes furent réprimées de façon extrêmement violente sous le commandement

du président de l’époque Carlos Andrés Pérez, qui ont fait presque 3000 morts2. Par la suite,

deux coups d’Etat eurent lieu dont l’un aurait été organisé par Hugo Chavez. Le 4 février 1992,

Chavez, qui était à l’époque un jeune militaire révolté par l’injustice et la corruption, décida de

perpétrer un coup d’Etat qui serait toutefois un échec. Il fut alors incarcéré pour insurrection,

mais le président qui succéda à Pérez prit la décision de l’amnistier. Les élections législatives

et présidentielles eurent lieu en 1998 et Hugo Chavez, fondateur du Mouvement révolutionnaire

bolivarien - 200, un mouvement politique et social au sein de l’armée, se fit élire

démocratiquement président par le peuple vénézuélien. Chavez était marqué d’un désir profond

d’améliorer la situation en apportant des réformes à la constitution et gagna même le soutien de

la population dans ce projet. Il lança, avec l’argent du pétrole, un projet de restructuration

sociale qui visait à aider les plus pauvres et contribuait à la diminution de la pauvreté au

Venezuela. Le taux de pauvreté recula donc de manière spectaculaire en chutant de 46 % à

28 %3. Le programme social comprenait également des moyens, entre autres, pour mettre fin à

l’analphabétisme, fournir un accès aux études universitaires gratuites ainsi que pour construire

de nombreux logements. De ce point de vue, la présidence de Chavez fut une réussite. Chavez

devait tout de même affronter les attaques de la droite vénézuélienne qui réclamait sa démission.

Le leader charismatique de l’époque continuait de recevoir le soutien d’une grande partie de la

population vénézuélienne et parvint même à déjouer un coup d’Etat organisé contre lui par les

États-Unis en avril 2002. Après 14 ans de présidence, Hugo Chavez, atteint d’un cancer, mourut

le 5 mars 2013. Nicolás Maduro, qui endossait le rôle de vice-président cette même année, lui

succéda et devint président par intérim de la république conformément à l’article 233 de la

2 Terrié, Julien. (2009) Venezuela : 27 février 1989, le jour où le peuple s’est réveillé, Mediapart. Disponible sur: https://blogs.mediapart.fr/oziel1996/blog/200709/venezuela-27-fevrier-1989-le-jour-ou-le-peuple-sest-reveille?fbclid=IwAR1HmiiX7e9YnhLpqhTz1rpXLdX7mw0ddYd6ISnqT5-txjhN6AcL8co1TO0 (consulté le: 28 juillet 2019). 3 Fontan, Sylvain. (2013) L’héritage économique contrasté de Chavez au Venezuela, L’économiste. Disponible sur: https://www.leconomiste.eu/decryptage-economie/6-l-heritage-economique-contraste-de-chavez-au-venezuela.html?fbclid=IwAR1I506h8E6RXSba9yTUjTbxLJYTBd3WvTcWiK-N2JqpCS_ptHBZEDiIvBo (consulté le: 28 juillet 2019).

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constitution vénézuélienne qui dit que lorsque le président meurt, c’est le vice-président qui

prend la relève. Une élection doit également être organisée dans un délai de 30 jours4.

Nicolás Maduro ne semble pas s’attirer autant de soutien que son prédécesseur. Son arrivée

à la présidence du Venezuela a directement suscité les controverses. Le 14 avril 2013 se sont

déroulées les nouvelles élections présidentielles au Venezuela afin de remplacer le président

décédé. Maduro a remporté de peu ces élections face à Henrique Capriles, qui faisait partie du

Comité d’organisation politique électorale indépendante (COPEI) dont le positionnement

politique se situe entre le centre et la droite. L’opposition n’a pas épargné Maduro et l’a attaqué

davantage. Elle était déjà présente à l’époque, mais ne pouvait rien contre Chavez, car ce dernier

était relativement doué en politique. Aujourd’hui, le pays est touché par une crise économique

due à une multitude de maux économiques et doit faire face à une inflation considérable. De

plus, sa monnaie nationale, le bolivar, ne vaut plus rien. Les bas salaires des Vénézuéliens ne

leur permettent pas de s’acheter grand-chose. Cette hyperinflation rend le quotidien de la

population très compliqué. Les produits de première nécessité se font très rares sur le territoire

et empêchent les gens de se soigner ainsi que de se nourrir. Par conséquent, les plus démunis

reçoivent ces produits depuis l’étranger par leur famille et ne parviennent même plus à se

soigner de maladies banales. D’autres choisissent l’option de quitter le pays et se rendent

généralement dans les pays voisins. Tout cela semble étonnant lorsque nous savons que le

Venezuela possède les plus grandes réserves pétrolières. Mais il ne faut pas oublier que le pays

ne dépend quasiment que de la rente pétrolière qui était utilisée à des fins sociales. Ainsi,

l’entretien des infrastructures a quelque peu été négligé et celles-ci se retrouvent aujourd’hui

en très mauvais état. Désormais, ce sont les États-Unis qui se chargent de traiter et raffiner le

pétrole vénézuélien. Il en résulte même que le Venezuela l’importe des États-Unis. Le

gouvernement n’a jamais réellement cherché à diversifier l’économie. Par conséquent, lorsque

les prix du baril diminuent, l’économie du pays se dégrade par la force des choses. C’est ce

qu’il s’est passé en 2014. La crise trouve également ses racines dans la corruption. Maduro a

laissé la tâche de gérer l’économie de la compagnie pétrolière nationale à des généraux qui ne

possèdent pas l’expérience requise, ce qui a empiré la situation. De nombreuses histoires liées

à la corruption continuent de planer. Plusieurs sommes d’argent seraient données en échange

4 Assemblée Nationale Constituante (1999) Constitution de la République bolivarienne du Venezuela. Caracas. Disponible sur : http://mjp.univperp.fr/constit/ve1999.pdf?fbclid=IwAR1E5VJivIpaxTknmr5rjRjRHvLWYgF0Wp4lYnjOj7xKCT-E9oIDhYQvsNY (consulté le: 30 juillet 2019).

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de divers services. Cette crise économique qui affecte la population laisse place à de

nombreuses manifestations et l’opposition demande la démission de Nicolás Maduro.

Toutefois, cette guerre économique est vue comme suspicieuse aux yeux de certains. Elle

est souvent comparée au coup d’Etat de 1973 qui a marqué le Chili. En décembre 2015,

l’opposition vénézuélienne avait remporté les élections législatives à l’Assemblée nationale.

Les pouvoirs étaient alors séparés au Venezuela et la cohabitation n’était pas des plus faciles.

Trois députés ont prêté serment alors qu’ils n’avaient pas été élus de façon démocratique. En

2016, le tribunal suprême de la justice a déclaré alors que l’Assemblée nationale se trouvait

dans l’illégalité et que par conséquent, les décisions qu’elle prendrait ne seraient pas

considérées comme légitimes. Un an plus tard, Nicolás Maduro a fait part de sa volonté de créer

une Assemblée constituante afin de réécrire la constitution vénézuélienne datant de 1999. Les

membres de cette assemblée représenteraient des mouvements sociaux et détiendraient le

pouvoir de modifier les lois et les institutions. Le chef d’Etat aurait toutefois interdit à tout

candidat de partis politiques de se présenter. Lors des élections de cette assemblée, qui ont été

tenues le 30 juillet 2017, les partisans de l’opposition ont boycotté le scrutin, ce qui a donné

lieu à un faible taux de participations. Plusieurs acteurs ont décidé de condamner la création de

l’Assemblée constituante et l’ont dès lors jugée comme fondée sur aucune base légale. Le 10

décembre 2017, la coalition des partis et les organisations sociales, connues sous le nom de

Grand Pôle patriotique (GPP), ont gagné les élections municipales. Il s’avère que les deux clans

se radicalisent tous deux au fil du temps.

Le Conseil électoral a décidé que les nouvelles élections prendraient place le 22 avril 2018.

Selon l’opposition, cette décision sortirait du cadre constitutionnel et aurait empêché de

désigner le candidat qui la représenterait aux élections. Par conséquent, le vote a été reporté au

20 mai. Le chef d’Etat a annoncé que les personnes ayant boycotté les élections municipales de

l’an dernier ne seraient pas autorisées à se présenter aux élections présidentielles. Nicolás

Maduro remporta à nouveau ces élections face à Henri Falcón. Ce système électoral a dès lors

été contesté par de nombreux acteurs internes et externes. Ils dénonçaient, dans un premier

temps, le faible taux de participations ainsi qu’un processus électoral qui s’est déroulé de

manière frauduleuse. Quelques mois plus tard, les autorités sont parvenues à déjouer un attentat

contre le président dont les coalitions de droite et les États-Unis auraient été à l’origine selon

Maduro. Suite à cet incident, le gouvernement a décidé de sévir, et plusieurs opposants ont alors

été poursuivis en justice. Le deuxième mandat de Nicolás Maduro n’a cessé de faire polémique,

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et plusieurs pays ont refusé de le reconnaître. Le 10 janvier 2019, le président a prêté serment

et a marqué officiellement le jour de son deuxième mandat. Environ deux semaines plus tard,

Juan Guaidó s’est autoproclamé président par intérim du Venezuela et a prêté également

serment lors d’une manifestation à Caracas. Ce dernier a obtenu la reconnaissance rapide des

États-Unis ainsi que de plusieurs pays qui suivaient la puissance américaine dans cette

démarche. Le Venezuela se retrouve aujourd’hui enlisé dans une crise économique, sociale et

par-dessus tout politique. Les chavistes et les partisans de l’opposition ne cessent de s’affronter

et de se déchirer en organisant quotidiennement des manifestations qui sont souvent loin d’être

pacifistes comme ils le prétendent. De ce fait, le pays, qui était déjà connu pour son taux de

criminalité très haut, connaît parallèlement une escalade de la violence. Aujourd’hui, ce conflit

d’origine interne tend à devenir international puisque de nombreux acteurs étrangers appliquent

des sanctions au Venezuela et désirent même y intervenir physiquement.

1.3. Hypothèse

Ce que nous tenterons de démontrer dans ce travail, c’est que la ligne éditoriale La Libre

Belgique ne rend compte de la crise vénézuélienne que comme un problème gouvernemental,

une crise qui était prévisible et engendrée par un président médiocre et non pas comme un

véritable problème économique, politique et social. Bien qu’elle ne soit pas le seul journal à

présenter le sujet de la sorte, La Libre Belgique n’évoque tout de même que très rarement les

défauts et les erreurs des acteurs qui s’opposent au gouvernement de Nicolás Maduro et se

concentre au contraire majoritairement sur les points faibles du gouvernement vénézuélien. À

quelques exemples près, les côtés positifs du gouvernement socialiste ne sont pas mentionnés

dans les articles. La ligne éditoriale ne semble pas procéder à une enquête exhaustive afin de

déterminer s’il existe d’autres raisons ou acteurs qui participent à la détérioration de la situation

au Venezuela. Le questionnement de ce travail est également de savoir comment le journal La

Libre joue un rôle dans l’évolution du conflit, ce qui nous amène à considérer les journalistes

ainsi que les différents intervenants comme de réels acteurs prenant part au conflit depuis

l’extérieur. De fait, ils influent sur la perception et l’attitude du lectorat mais aussi des

institutions vis-à-vis du conflit et de sa résolution. Afin d’aboutir à ces objectifs, nous

analyserons et reconstituerons les arguments des acteurs ainsi que ceux des journalistes et

mettrons ainsi au jour ce que les discours occultent. Le travail ne sera pas particulièrement

focalisé sur le travail des journalistes, mais plutôt sur la couverture médiatique de la crise

vénézuélienne et les techniques de communication de crise employées. Il est important

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d’étudier le traitement médiatique non comme un simple reflet de ce dernier, mais davantage

comme une de ses composantes dans la mesure où, pour les protagonistes, un des enjeux sera

l'interprétation publique et politique qui en sera faite. L’hypothèse de ce mémoire est donc que

La Libre Belgique aurait tendance à accuser Nicolás Maduro d’être l’unique responsable des

malheurs du Venezuela en orientant justement le projecteur sur le mauvais côté du

gouvernement pour susciter dans la sphère publique un certain dégoût à son égard et

conséquemment favoriser un changement de gouvernement.

2. Corpus et méthodologie

Cette partie reprendra l’essentiel des méthodes utilisées lors de la réalisation de ce

mémoire. Elle visera à introduire les différentes recherches effectuées et les méthodes

employées pour analyser les nombreux articles sélectionnés et mener à bien ce travail.

Premièrement, une recherche bibliographique a été réalisée sur le site du journal La Libre

Belgique afin de dénicher des articles pertinents traitant la crise vénézuélienne. Nous avons

décidé de nous concentrer sur la presse en ligne du journal, car elle représente un vecteur de

référence de l’actualité belge, internationale, économique, politique et culturelle. Elle existe

sous plusieurs formes, mais nous avons choisi de nous focaliser sur la version numérique pour

une raison de facilité d’accès. Le journal La Libre a pour habitude de publier des articles

diversifiés sur les plus grands conflits internationaux allant des guerres à l’écologie. De plus, il

se revendique comme étant un journal indépendantiste et neutre. C’est la raison pour laquelle

nous l’avons choisi, car, comme explicité précédemment, l’un des objectifs est de démontrer

que même lorsqu’on tend à être le plus équitable possible, il est impossible d’être neutre à

100 %. Au total, notre corpus est composé de 52 articles parlant de la crise vénézuélienne et

ces derniers sont référencés à la fin du mémoire dans la partie des annexes. Ces articles

représentent la majorité du contenu présent sur le site du journal traitant la crise politique

vénézuélienne qui est relativement récente. Toutefois, nous avons choisi des articles recensant

des événements bien plus anciens, car la crise politique découle en réalité des précédentes crises

économique et sociale déjà présentes sous la gouvernance de Nicolás Maduro et donc nous

sommes par conséquent dans une même logique. Ainsi, la période qui a été choisie s’étend de

janvier 2013, année où Maduro devient président par intérim à la suite de la mort d’Hugo

Chavez, à mai 2019. Cette sélection d’articles n’est évidemment par exhaustive puisque chaque

jour de nouveaux articles sont publiés sur le sujet, car la crise est toujours en cours d’actualité.

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Après avoir examiné tous les articles choisis, il a été possible de formuler une hypothèse, que

ce mémoire se chargera de démontrer.

Ce travail se structurera autour des axes suivants : l’analyse des titres, l’analyse des

sources et des intervenants et l’analyse des positions et des argumentaires de la presse. Dans la

première partie consacrée aux titres, nous procéderons à un classement de ces derniers qui sera

suivi d’une observation de la fréquence de certains mots par rapport à d’autres et ce que cela

peut signifier. Cette partie se conclura par une analyse plus détaillée et linguistique de ces titres.

Dans la deuxième partie, les discours proférés par nos différents intervenants au sujet de la crise

vénézuélienne seront étudiés ainsi que le rôle de la presse dans le processus de co-construction

au débat. Enfin, la troisième partie s’articulera autour deux points essentiels : l’analyse du

contenu des articles rédigés par les journalistes de la rédaction et l’analyse de deux

contributions externes, les cartes blanches qui fourniront davantage d’éléments intéressants.

Plusieurs ouvrages ont été consultés dans le but de fournir l’analyse la plus riche,

diversifiée et détaillée possible. Le travail reposera entres autres sur le livre d’Alice Krieg-

Planque « Analyser les discours institutionnels » et sur celui d’Anne Morelli « Principes

élémentaires de propagande de guerre : utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède ... ».

L’ouvrage de Krieg-Planque se base sur une approche plus rhétorique et journalistique de

l’usage du langage. Il offre une description détaillée des implicites, des clichés, des différents

types de rhétoriques, de l’emploi des temps et des pronoms personnels, par exemple, ce qui

rend la compréhension et l’interprétation des discours plus simples. Le travail d’Anne Morelli

fournit, quant à lui, de nombreux éléments intéressants qui vont servir pour une analyse plus

approfondie des discours politiques dans un contexte bien précis. En effet, il permet de porter

un regard différent sur les discours proférés par les adversaires en situation de conflit et de

percevoir ainsi des détails qui sont difficilement percevables et interprétables. Les analyses se

baseront notamment sur de nombreux articles scientifiques et de presse qui seront à chaque fois

référencés lors de leur utilisation.

Les connaissances théoriques et les compétences acquises tout au long de mon parcours

universitaire m’ont également été d’une grande aide dans l’analyse des différents contenus.

Nous citerons des cours linguistiques comme Sciences du langage et

enseignement/apprentissage des langues, Analyse et typologie du discours, Questions de

pragmatique, Introduction à la linguistique générale, Introduction à la logique et à

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l’argumentation ou encore des cours tels que Représentations médiatiques et stéréotypes

socioculturels et Acteurs de la communication internationale. Le cours d’Introduction aux

relations internationales ainsi que le cours d’Introduction à la science politique, dispensés à la

faculté de Science politique, m’ont notamment servi pour de plus amples analyses et m’ont

fourni une compréhension plus claire du déroulement des événements politiques.

3. Première partie : Analyse des titres

3.1. Présentation de l’objet de travail

Ce chapitre sera consacré à l’analyse des titres du corpus sélectionné. Ce travail prend

appui sur l’exploration d’un corpus composé d’articles de presse portant sur la crise

économique et politique du Venezuela, parus dans le quotidien francophone belge La Libre

Belgique d’avril 2013 à mai 2019. Le choix de cette période se justifie par le fait qu’elle ait été

marquée par de violents heurts entre le gouvernement vénézuélien et l’opposition, par des crises

variées ainsi que par l’intervention extérieure dans ce conflit. Cette analyse des titres consistera

dans un premier temps à étudier la fréquence des mots et à relever les idées redondantes.

Ensuite, nous tenterons de déterminer les principales idées dégagées par les titres en analysant

leur structure, les champs lexicaux, les explicites et les implicites qu’ils contiennent. À l’issue

de l’analyse de ces différents éléments, les données récoltées vont constituer un bon début et

vont permettre d’interpréter les idées principales et d’une certaine façon de déterminer

l’orientation de la presse francophone La Libre Belgique simplement sur base de ses titres.

3.2. Classement des titres

Depuis l’année 2013, année durant laquelle la chute des cours du pétrole a débuté, la

presse francophone La Libre Belgique a commencé à porter plus d’intérêt au Venezuela et a

publié une multitude d’articles traitant les événements relatifs à sa crise économique et par la

suite politique. Dans cette partie, les titres du corpus seront classés dans des catégories

respectives selon leur caractère à dominante politique, économique, sociale ou encore juridique.

Une ultime rubrique nommée « autres » reprendra deux titres incitatifs jugés inclassables en

raison de leur caractère peu explicite et obscur. Ce classement visera à démontrer dans quels

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10

domaines ce journal est le plus impliqué. Il permettra également de donner un aperçu général

des causes dans lesquelles cette presse est spécifiquement engagée.

Le graphique réalisé ci-dessus montre que les titres concernant la crise vénézuélienne

sont majoritairement inscrits dans une tendance politique et sociale. Dans une moindre mesure,

les titres s’avèrent être économiques ou encore juridiques. Il n’est guère surprenant qu’ils soient

en grande partie politiques puisque cette crise politico-économique est caractérisée par de

nombreux enjeux politiques. En effet, les tensions au sein et autour du Venezuela ne sont qu’un

énième exemple de la volonté des États-Unis d’imposer un changement de régime dans un pays

de l’or noir, plus communément connu sous l’expression de pays exportateurs de pétrole. Les

États-Unis avaient déjà pour cible le Venezuela dans les années nonante lorsque le pays était

sous la gouvernance d’Hugo Chavez. Désormais, Donald Trump veut agir et intervenir afin

d’évincer le président actuel Nicolás Maduro pour laisser la place à son opposant Juan Guaidó

qui s’est depuis auto-proclamé président par intérim. À l’aide des gouvernements de droite, en

l’occurrence le Brésil et la Colombie, les États-Unis avaient planifié d’entrer sur le territoire

vénézuélien et d’intervenir militairement en passant par les frontières des pays de droite tout en

invoquant l’argument humanitaire. Cependant, le chef de la délégation du comité international

de la Croix rouge en Colombie a refusé. Sans surprise, les alliés des États-Unis n’ont pas hésité

à suivre le mouvement. De nombreux pays européens ainsi que le Parlement européen ont

reconnu l’opposant Juan Guaidó comme président légitime par intérim. L’avenir du Venezuela

Graphe 1: Classification des titres

Politique Économique Social Juridique Autres

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11

n’est pas très prometteur : le peuple vénézuélien est très préoccupé et l’opposant Guaidó reçoit

le soutien de la plupart des médias dominants, une situation peu encline de rétablir le calme.

Pour exercer davantage de pression sur Maduro, Washington a notamment révoqué des

centaines de visas d’individus vénézuéliens, de diplomates et de personnes proches du

président.

La catégorie politique est suivie par celle sociale qui regroupe également un bon nombre

de titres. Les titres sociaux évoquent en permanence le peuple ainsi que les souffrances qu’il

endure. Ils sont le reflet de la volonté d’une transition démocratique dans ce pays au régime

qualifié de dictatorial. Les cris de détresse du peuple vénézuélien semblent tourmenter les

journalistes belges de la rédaction désireux d’apporter leur soutien à de soi-disant rebelles en

lutte contre la dictature de Nicolás Maduro. Toutefois, cette inquiétude de l’Union européenne

face à une soi-disant autocratie vénézuélienne peut être qualifiée d’hypocrisie quand elle ne

voit aucun problème à établir des accords avec d’autres dictatures telles que l’Arabie Saoudite

par exemple. On en viendrait par conséquent à se demander si les pays européens ainsi que les

États-Unis ne se soucieraient pas plutôt des richesses naturelles de ce pays plutôt que du sort

des milliers de Vénézuéliens. Tout ce qui semble être potentiellement susceptible de préoccuper

l’Europe concerne ses propres intérêts ainsi que la possibilité d’un éventuel conflit avec les

États-Unis si elle ne va pas dans leur sens.

Alors que l’économie est également l’une des raisons principales de la crise au

Venezuela, elle n’est que très peu évoquée dans les titres. En effet, seuls cinq titres parlent des

problèmes, des aides et des répercussions économiques. Y aurait-il dans ce choix de laisser de

côté l’aspect économique alors qu’il est au centre du problème une certaine volonté de

dissimuler les diverses sanctions économiques infligées au Venezuela par d’autres pays qui ne

cessent de revendiquer leur compassion envers ce peuple en souffrance ? Il serait paradoxal de

leur part de mettre en avant des actes de sabotage quand le but est de donner une mauvaise

image à Nicolás Maduro. De fait, le lecteur se rendrait compte qu’une incohérence est présente

entre les discours portés et les actes réalisés, ce qui risquerait de remettre en cause toute la

campagne anti-Maduro. Comme dirait Maurice Lemoine, spécialiste de l’Amérique latine :

« D’un côté, il y a un étranglement économique du pays et, de l’autre, on annonce une opération

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humanitaire pour l’aider »5. Le lecteur prendrait donc l’initiative de faire de plus amples

recherches sur le sujet et pourrait ainsi se rendre compte d’une faille. Le doute serait dès lors

semé quant à une éventuelle manœuvre de la part des États-Unis pour renverser le

gouvernement actuel vénézuélien.

La catégorie juridique reprend, quant à elle, les titres présentant des champs lexicaux

relatifs à la juridiction. Les titres suivants : « Vol d’un hélico de la police, attaque de la Cour

suprême … Qui était l’homme le plus recherché par Maduro ? », « Venezuela : Juan Guaidó,

le président du Parlement contrôlé par l’opposition a été arrêté », « Venezuela : l’opposant

Juan Guaidó déclaré inéligible durant 15 ans », servent à accentuer et démontrer davantage

l’idée selon laquelle Nicolás Maduro serait un dictateur qui détient les trois pouvoirs, exécutif,

législatif et judiciaire, dans ses mains. Ici, le fait que le président Maduro ait également

l’emprise sur les pouvoirs judiciaires est clairement mis en évidence. Ces titres reflètent

l’insatiable soif de pouvoir d’un président à la recherche des pleins pouvoirs. Ce n’est que la

énième fois que sa légitimité est remise en question dans les titres.

5 Grasser, Fabien. (2019) « Venezuela : «Il est scandaleux de voir les Européens s’aligner sur Trump» », Le Quotidien, 4 mars. Disponible sur: http://www.lequotidien.lu/a-la-une/venezuela-il-est-scandaleux-de-voir-les-europeens-saligner-sur-trump/?fbclid=IwAR0Ut60jDcLlfwLvBsIUog0s5tA4FFR-HdFDou39vWxRJirQuws9VNu5GnA (consulté le: 30 juillet 2019).

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3.3. Analyse de la fréquence des mots

Cette partie sera consacrée à l’analyse de la fréquence des mots contenus dans les

différents titres du corpus sélectionné. Les résultats statistiques issus de cette analyse lexicale

permettront de montrer comment l’utilisation privilégiée de certains mots par rapport à d’autres

peut se révéler significative. Une fois les différents titres passés en revue et analysés, nous

pouvons constater que le mot Venezuela est à la tête du classement sur le graphique ci-dessous,

suivi des noms propres Maduro et Guaidó.

La répétition est une figure de style qui consiste à répéter plusieurs fois un même mot

dans un discours. Il s’agit d’un outil très puissant qui permet d’insister sur une idée. La

répétition est la plupart du temps intentionnelle dans le discours journalistique. Elle peut

également être utilisée à des fins idéologiques et contribuer à propager une idée sous différentes

formes. Le substantif Venezuela est le terme le plus récurrent au sein des titres analysés. Cette

répétition exerce une certaine influence sur la vision du lecteur. En effet, elle facilite le

processus de mémorisation d’un événement sous une dénomination choisie par la presse elle-

même. Rencontrer plusieurs fois le même mot permet au lecteur d’assimiler plus facilement et

rapidement un terme qu’il associera ensuite instinctivement à toute une série de péripéties

orchestrée autour d’un événement. Aujourd’hui, la simple évocation du mot Venezuela renvoie

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

Vénézuela Maduro Guaidó Crise Pays Avoir Vénézuélien

Graphe 2 : Fréquence des mots

Mots

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directement au chaos politique et économique qui caractérise la situation actuelle du pays, à la

violence qui affecte la population vénézuélienne et aux multiples controverses politiques quant

à la légitimé du président en place Nicolás Maduro.

Le second substantif mis en avant est le nom Maduro, qui apparaît deux fois plus que

celui de son adversaire Juan Guaidó. L’intérêt porté au président Nicolás Maduro n’est

certainement pas le fruit du hasard. Cette observation démontre que La Libre Belgique a

tendance à faire converger la crise politico-économique en cours vers le responsable, dans ce

cas-ci Nicolás Maduro. Ce dernier est présenté comme la source principale du chaos qui enlise

le Venezuela. Évidemment, Juan Guaidó est mentionné dans quelques titres, mais ce toujours

en étant dépeint comme une victime, une personne persévérante ou encore adulée par le peuple.

À l’exception d’un titre, il n’est jamais représenté comme le coupable des convulsions qui ne

cessent de secouer le pays. Un seul titre évoque le nom de Juan Guaidó en émettant une critique

quant à sa reconnaissance en tant que président.

Enfin, il est également important de se questionner sur la représentativité du président

Nicolás Maduro dans les titres d’articles sur le Venezuela de La Libre. Il est manifeste que de

nombreux titres se servent de Maduro comme bouc émissaire. En effet, lorsque le nom de

Nicolás Maduro est mentionné dans les titres, il est presque toujours accompagné d’un contenu

axé sur des aspects négatifs tels que l’obtention de pouvoirs dits spéciaux, le refus d’un

ultimatum, l’association à la dictature ou encore le recours à la violence. La redondance de cet

appariement (Maduro-négativité) dégage quelques informations relatives aux positions du

quotidien La Libre sur la crise au Venezuela. La représentation de Maduro est ternie et porte à

croire que le président serait l’unique responsable du déclin du pays. Certes, le gouvernement

a commis quelques erreurs qui ont nui au pays, mais le problème est bien plus ancien que ça et

remonte également à l’époque de Chavez. Les thèmes évoqués pour parler du président ne lui

sont jamais favorables contrairement à ceux évoqués lorsqu’il s’agit de son opposant Juan

Guaidó. La redondance du bouc émissaire sert d’outil d’orientation à la presse. De fait, elle

influence l’imaginaire collectif sur la situation au Venezuela et établit en quelque sorte une

règle de continuité. À force de ne lire que des titres où le nom de Maduro est suivi d’événements

bouleversants, le lecteur associe inconsciemment le président à des idées connotées

négativement. Ainsi, chaque fois que le lecteur rencontrera le nom de Maduro, il s’attendra

désormais à ce que ce nom soit suivi d’un événement perturbateur, créant le désordre. Le

récepteur développera un mauvais présage sur le président et l’assimilera dès lors

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automatiquement à la négativité, au mal. Cette tendance à diaboliser Nicolás Maduro pourrait

finalement être perçue comme une sorte de prosélytisme pro-Guaidó.

Un autre aspect important est la façon dont le sujet central est qualifié. La Libre a décidé

que la figure centrale de ces événements serait Nicolás Maduro. Son nom revient, comme

mentionné dans le point précédent, quinze fois et se situe en deuxième position sur le graphique

de la fréquence des mots. Se répètent aussi des anaphores lexicales comme « le président », «

le pouvoir vénézuélien », « le Venezuela », « le pouvoir » bien qu’il ne soit pas l’unique acteur

dans cet environnement tumultueux. Souvent, Venezuela est personnalisé. Il s’agit d’une autre

figure d’insistance pour lier implicitement le désastre qui est en train de se dérouler au

Venezuela à la personnalité politique Nicolás Maduro. Cependant, ce n’est autre que le contexte

qui va permettre au lecteur de comprendre de qui il s’agit.

L’utilisation du mot crise est certes légèrement moins fréquente que celle des termes

cités précédemment, mais elle s’avère tout autant digne d’intérêt. L’étymologie du terme crise

renvoie à un double sens : un sens médical et autre situationnel. D’une part, crisis, en latin

médiéval, réfère dans la sphère médicale à l’apparition d’une maladie dangereuse, c’est-à-dire

qu’elle renvoie à l’épisode le plus aigu de la maladie, celui où le médecin doit impérativement

prendre des mesures pour la traiter. Par extension, la crise est associée à une étape majeure qui

assure la dissolution de substances nocives provoquant des perturbations. Dès lors, une analogie

est établie entre la maladie, perçue comme une atteinte au bon fonctionnement, et la période

crise. Désormais, l’emploi du terme crise évoque une éventuelle notion de nettoyage et génère

donc une intention similaire à celle du médecin. Dans ce cas-ci, elle est d’expurger le Venezuela

de tout élément dommageable, en l’occurrence le président mis en place Nicolás Maduro, jugé

néfaste pour le pays par ses opposants. À cet égard, la notion de crise rappelle à la mémoire du

lecteur un rejet, une élimination.

Si l’on remonte plus loin dans le temps, on s’aperçoit que krisis du grec signifie

séparation et sélection6. Au niveau étymologique, le terme crise renvoie à un moment crucial

où doit s’effectuer une prise de décision, un changement. Par extension métaphorique, ce terme

6 Définition : Krisis (sans date) EmBible. Disponible sur: https://emcitv.com/bible/strong-biblique-grec-krisis-2920.html?fbclid=IwAR3saAD4QpstP5ZN2IvET-t5O8qnz0NPDIPmnLfNNuLeNBgJSfR2W1BRAwc (consulté le: 30 juillet 2019).

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fut longuement utilisé dans divers secteurs tels que l’économie et la politique entre autres. De

nos jours, le terme crise est utilisé pour parler de moments difficiles traversés par un individu,

un pays ou encore des institutions par exemple. Il ne cesse de se métamorphoser dans la langue

française et tend davantage vers la notion de trouble et de reconsidération. Désormais, il ne

véhicule que secondairement ses notions originelles. Par conséquent, les titres semblent pointer

une remise en question plus que nécessaire, non seulement de la gestion du pouvoir de Nicolás

Maduro mais de l’histoire de tout un gouvernement socialiste.

3.4. Analyse des titres

Dans leur ensemble, les titres du corpus sélectionné sont assez limpides quant au

contenu qu’ils renseignent. De prime abord, il est relativement facile de savoir de quoi l’article

va traiter. Bien que ces derniers aient pour sujet le même événement, ils contiennent différents

procédés stylistiques et rhétoriques qui permettent d’aborder la matière sous différents angles.

L’analyse approfondie des titres va nous permettre de déterminer quelle position le journal La

Libre adopte à l’égard de la crise économique, mais surtout politique du Venezuela qui suscite

de plus en plus la controverse un peu partout en Europe et dans le reste du monde.

Les mots ont toujours possédé un incroyable potentiel. Selon Confucius, « une image

vaut mille mots » et pourtant un même mot peut détenir à lui seul un énorme pouvoir, et lorsque

les mots s’unissent, l’effet est alors décuplé. Ils permettent de manipuler et d’influencer le

récepteur dans toute situation de communication, et le choix d’un lexique spécifique n’est guère

anodin. Comme le souligne le docteur Andrew Newberg, « le langage façonne notre

comportement et chaque mot que nous utilisons est imprégné d’une multitude de significations

personnelles »7. En effet, un journaliste va utiliser un vocabulaire ou encore des tournures

syntaxiques bien précises afin d’amener le lecteur dans une direction voulue. Le journaliste va

faire part du regard qu’il porte sur le monde, de ses orientations politiques et va porter des

jugements de valeur en détournant l’information. Le champ lexical joue un rôle déterminant

dans l’orientation du lecteur. Pour exprimer une idée ou un concept, il existe une multitude de

7 Bélorgey, Pascale. et Van Laethem, Nathalie. (2017) Le pouvoir des mots, Emarketing.fr. Disponible sur: https://www.e-marketing.fr/Thematique/academie-1078/fiche-outils-10154/Le-pouvoir-des-mots-326137.htm?fbclid=IwAR0WRxuNEsjBjlSz8rXLY73gHDBeqKvxmELXHZljCjxvxjNd5MHdjQGCtY#1s366DJIqayumBPV.97 (consulté le: 30 juillet 2019).

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mots dont le sens est identique, mais qui sont toutefois connotés différemment. Il existe des

connotations positives et négatives qui viennent s’ajouter à la dénotation, sens premier du mot,

pour lui donner un sens second. Il a donc été jugé opportun d’ examiner la structure des titres,

le réseau lexical, les explicites et les différents implicites présents dans les titres afin d’exposer

les idéologies que La Libre Belgique colporte consciemment ou inconsciemment.

Il est intéressant de souligner qu’une grande partie des titres du corpus présentent une

structure bisegmentale articulée par deux-points. Il s’agit d’une structure thème-rhème, en

d’autres termes ce dont on parle et ce qu’on en dit. Ce couplage permet d’établir un lien clair

et explicite entre le sujet et les informations apportées à propos de ce dernier. Cette formulation

répond également au principe de la pyramide inversée qui est « un concept rédactionnel qui

consiste à classer les informations dans un article. L’idée consiste à placer le contenu en

commençant par ce qui est général et important en haut, tout en détaillant et précisant au fur et

à mesure de l’article. »8 Ainsi, l’information, située le plus en haut sera la plus condensée. Tout

d’abord, la partie gauche de la majorité des titres bisegmentaux de notre corpus représente un

cadre spatial. Comme l’intitulé « Venezuela : rassemblement pro-Maduro dans le centre de

Caracas » l’illustre, le terme Venezuela désigne le lieu où toute une série d’événements

politiques se déroule en ce moment. Il joue aussi un rôle important dans la situation

d’énonciation dans la mesure où il est le contexte situationnel. Hors contexte, les propos n’ont

pas véritablement de sens. De plus, ce toponyme fait également référence aux catastrophes qui

se sont succédé depuis 2014 dans le pays. Cela va permettre de qualifier de nouveaux

événements faisant ainsi appel à la mémoire interdiscursive. L’ex-président du Venezuela,

Hugo Chavez, s’était déjà attiré les foudres de certains opposants, mais à l’accession au pouvoir

du président Nicolás Maduro, les passions et la colère se sont considérablement déchaînées. Le

toponyme « Venezuela » désignait jusque-là un état du nord de l’Amérique du Sud. Mais à la

suite d’une crise économique affectant l’entièreté du pays, le nouveau président a fait face à de

violentes manifestations et à une opposition qui revendiquait sa démission. En 2018, sa

réélection lui a attiré les foudres de son adversaire Juan Guaidó. Et depuis, le pays est plongé

dans une crise politico-économique. Ces diverses tensions ont fait l’objet de nombreux discours

dans la presse. Désormais, restent liés au mot Venezuela les différents propos qui ont été

véhiculés par la presse et qui ont contribué à la resémentisation du mot Venezuela. Par

8 Pyramide inversée (sans date) Glossaire InfoWebMaster. Disponible sur: http://glossaire.infowebmaster.fr/pyramide-inversee/ (consulté le: 30 juillet 2019).

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conséquent, ses emplois métonymiques se sont élargis et il peut désormais faire référence au

chaos politique ou économique ou encore à un exode important. Les titres suivants présentent

un premier terme qui classifie l’information et vont ainsi exemplifier ces notions : Crise au

Venezuela : un rare double veto russo-chinois enterre un projet américain et Venezuela :

l’opposant Juan Guaidó déclaré inéligible durant 15 ans.

Dans l’intitulé Venezuela : rassemblement pro-Maduro dans le centre de Caracas, nous

retrouvons le stéréotype langagier pro-Maduro. Cette formule repose sur un effet de déjà

entendu au niveau de la forme. Les mots pro et Maduro sont porteurs de cet effet de déjà-

entendu. Il n’est pas possible de remplacer le mot composé par un autre ou un seul des deux

pour garder le même sens.

De prime abord, certains titres semblent objectifs et impartiaux, mais il est sans rappeler

que l’information n’est jamais neutre et donc que tout article renferme un sens parfois

dissimulé. Après avoir décortiqué tous les titres du corpus un à un, ces titres au caractère

informatif s’avèrent contenir de nombreux messages implicites (non-dits). Il est entendu par

l’implicite qu’une partie de l’énoncé ne constitue pas en principe et en apparence l’objet premier

et véritable du dire. Il existe deux sortes d’implicites : le présupposé et le sous-entendu. Alice

Krieg-Planque, dans son ouvrage « Analyser les discours institutionnels », les définit

respectivement : « Le présupposé, en s’appuyant sur la matérialité même des formulations,

permet de présenter une thèse comme étant soustraite de la contestation »9 et « les sous-

entendus, en tirant leur force de la faculté d’interprétation des sujets parlants, rendent possible

ou suggèrent des thèses sans pour autant que celles-ci soient explicitées »10. Le présupposé peut

être utilisé à des fins manipulatrices, car l’énonciateur va influencer le décodage du co-

énonciateur. Ainsi, le journaliste présentera des idées comme évidentes et par conséquent

incitera le co-énonciateur à valider ces informations. Ce réflexe journalistique vise

principalement à propager l’information cachée, présupposée et non celle explicitement posée.

Lorsque le sens est dissimulé, ses probabilités d’être contesté sont alors très faibles. Pour ce

faire, le présupposé va s’appuyer sur des éléments de nature lexicale, syntaxique ou encore

grammaticale. Le contexte a un rôle prédominant dans l’interprétation du sous-entendu. À la

différence du présupposé, le sous-entendu se discerne grâce à la situation d’énonciation

déterminée par le locuteur : le moment, le lieu, le récepteur et le sujet de l’énonciation.

9 Krieg-Planque, Alice. (2012) Analyser les discours institutionnels. Icom. Édité par A. Collin. Paris. 10 Op. Cit.

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Toutefois, les implicites ne sont pas toujours compris comme ils devraient l’être. Lorsque le

discours implicite n’est pas compris par le destinataire, un malentendu se crée. Dans le cas de

la presse écrite, un implicite mal interprété peut se révéler dangereux et engendrer des effets

pervers. En effet, le quiproquo donne lieu à des informations erronées et véhicule ces dernières

dans l’imaginaire collectif et individuel. Et il s’avère que certaines personnes n’adhèrent qu’à

des opinions qui leur sont, d’une certaine façon, familières et vont en être partisanes. Ces

personnes vont confondre ces fausses informations avec des croyances partagées. Ainsi, la

situation se retournerait donc contre le journaliste, dont les intentions initiales n’étaient pas

d’aboutir à ce résultat non désiré. Plusieurs exemples de titres différents vont servir

d’illustration aux propos évoqués ci-haut.

Dans le titre Venezuela : le président obtient des pouvoirs spéciaux face à « l’agression

impérialiste », le premier présupposé se traduit par l’emploi du substantif président pour faire

référence à Nicolás Maduro. Son nom n’est pas mentionné, car une certaine connaissance est

supposée par la présence d’éléments contextuels dans le titre tels que le toponyme Venezuela

par exemple. L’énoncé présuppose également que le président possédait certes des pouvoirs,

mais pas des pouvoirs qualifiés de spéciaux. Le choix de cet adjectif est un sous-entendu. Il fait

allusion à des pouvoirs qui seraient, d’une certaine façon, illégitimes et que le président Nicolás

Maduro n’aurait pas dû obtenir, car l’usage des guillemets permet de pointer le désaccord du

journaliste quant au discours tenu par Nicolás Maduro dans ce cas-ci.

Dans le titre Recep Erdogan s’immisce dans la crise vénézuélienne et s’en prend à l’UE,

il est sous-entendu, à travers l’emploi du verbe s’immiscer, que la crise vénézuélienne ne

concerne pas le président turc. En effet, par définition, s’immiscer signifie « intervenir dans les

affaires de quelqu’un sans en avoir eu l’autorisation »11. De plus, le fait de s’en prendre à

l’Union européenne porte à croire que le président turc a l’Union européenne dans son

collimateur et qu’il serait sur le point de l’attaquer. Encore une fois, le journaliste a l’air d’avoir

choisi le camp adverse, celui soutenant l’opposition. Il est toutefois audacieux de reprocher à

la Turquie de se mêler de la crise vénézuélienne quand l’Europe et les États-Unis font de même.

11 Définition : s’immiscer (sans date) Linternaute. Disponible sur: https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/s-immiscer/?fbclid=IwAR1nukwwTDcVqX1CbirOutM49nfA3aCBsASeKhSQvLt2e2S_lXph3hs2Ffs (consulté le: 30 juillet 2019).

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Dans le titre Avec Maduro, le pouvoir prend un air de dictature, le présupposé est

qu’avant l’accession au pouvoir du président Nicolás Maduro, le pouvoir n’était pas une

dictature et n’en présentait aucune caractéristique. C’est une façon de mettre en exergue que

sous Maduro, le Venezuela risque de se transformer en dictature ou du moins qu’il est sur le

point de le devenir. Par dictature, on entend que Maduro s’arrogerait tous les droits et les

pouvoirs. Cette emphase s’explique aussi par la position en début de phrase du syntagme

prépositionnel Avec Maduro. Il s’agit d’une phrase emphatique qui permet donc bel et bien

d’insister sur l’idée que Maduro s’arrogerait tous les droits et les pouvoirs.

Ces différents exemples de titres démontrent qu’aussi bien le présupposé que le sous-

entendu sont porteurs de sens. Ainsi, l’interprétation d’un énoncé ne doit pas se limiter à la pure

et simple description de son sens littéral, mais doit également rendre compte des non-dits qui

se cachent dans les implicites.

Il est notamment important d’analyser les différents mots et syntagmes employés dans

les titres pour déceler les idées véhiculées par la presse. Il convient d’observer que les champs

lexicaux et les syntagmes utilisés ont une valeur connotative négative ou positive. C’est

pourquoi il a été jugé essentiel et pertinent pour l’étude du discours médiatique de la crise au

Venezuela de soumettre ces éléments à une analyse particulière. À cet effet, cette dernière

s’appuiera sur les différentes fonctions du langage établies par Roman Jakobson, un linguiste

russe figurant parmi les plus influents du 20e siècle. Dans un premier temps, il s’agira de repérer

la fonction émotive de Jakobson dans laquelle le message est centré sur l’émetteur. Dans le

discours, elle se traduit par la présence de termes évaluatifs, d’exclamations, de termes de

sentiments ou de jugement. Le journaliste manifeste des jugements, impressions, opinions sur

un sujet donné. Lors de la rédaction d’un article de presse, le journaliste accorde une attention

toute particulière au choix des mots qu’il emploie. En effet, il importe que ceux-ci traduisent le

plus fidèlement possible l’idée générale et l’orientation ciblées. La terminologie est

essentiellement au service du sens à véhiculer. Toutefois, il n’existe aucune règle d’or en

matière de vocabulaire. Dès lors, le journaliste veillera à ce que l’emploi des mots serve bien

les propos de son article. Dans un deuxième temps, nous nous intéresserons à la fonction

conative qui, elle, se focalise sur le récepteur. L’émetteur a également pour but de faire surgir

des réactions et des impressions chez son lecteur. Cette fonction se traduit généralement dans

le discours par la présence d’impératif, d’exclamation ou encore de tournures interrogatives.

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À la suite d’une analyse sémantique des données contenues dans les titres du corpus,

nous avons pu distinguer quatre types de contenu sémantique : le contenu sémantique négatif,

fort, positif et faible.

Force est de constater que les titres de notre corpus sont en majorité constitués de mots

dont le contenu sémantique est négatif. Les articles traitent d’une réalité négative, d’un sujet

douloureux : la crise économique et politique du Venezuela. Ce pays est à l’heure actuelle en

plein bouleversement, ainsi l’auteur va donc veiller à représenter dans un premier temps la

négativité de cette réalité déchirante au moyen de termes négatifs. Néanmoins, ces derniers ne

sont pas inoffensifs. De fait, ils permettent de porter un jugement négatif sur un individu, un

sujet ou un groupe. Ainsi, le choix d’employer des termes négatifs peut aussi témoigner d’une

dépréciation de la presse La Libre du président Nicolás Maduro. En effet, le président est

systématiquement diabolisé dans les titres. Il est présenté comme un autocrate incompétent dont

le gouvernement est néfaste pour le Venezuela : Avec Maduro, le pouvoir vénézuélien prend un

air de dictature, Maduro rejette l’ultimatum, le Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro.

Maduro est vu comme l’unique responsable du désastre économique et politique auquel est

confronté son pays. L’accent est notamment mis sur deux faits que soulèvent fréquemment les

opposants : le prétendu côté violent de Maduro, accusé d’avoir réprimé des manifestations dites

pacifiques par le recours à la violence, et son illégitimité à la tête du pouvoir. Plusieurs

syntagmes tels que le régime contre-attaque, Maduro appelle à combattre, ou encore violents

heurts à Caracas après l’échec du soulèvement militaire rappellent ces idées. Les titres La rue

en colère contre Maduro et Victoire de Maduro contestée portent à croire que la population

entière du pays ne porte pas Maduro dans son cœur et qu’il n’a donc rien à faire au pouvoir.

Pour finir, la Russie et la Turquie sont elles aussi prises pour cibles. Il est difficile de croire à

une simple coïncidence quand nous savons pertinemment que ces deux pays offrent

ouvertement leur soutien à Nicolás Maduro et font partie de ses alliés. La Russie est dénoncée

pour avoir violé la Constitution et Recep Erdogan, le président de la Turquie, est quant à lui

accusé de mettre le nez là où il ne devrait pas ou plutôt de s’immiscer dans la crise

vénézuélienne et de s’en prendre à l’Union européenne.

Il est ensuite à noter que les titres sont fortement imprégnés de mots emphatiques. Ces

derniers s’inscrivent en opposition aux mots sémantiquement faibles qui recouvrent des

expressions et des mots qui reflètent la réalité de façon vague et dont le sens est générique. Les

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mots au contenu sémantique fort tendent quant à eux à mettre en évidence et exacerber des

propos et ainsi des idées. Ils vont s’unir aux mots au contenu sémantique négatif, qui sont en

règle générale, eux aussi sémantiquement fort afin de conférer aux titres une intensité négative

plus forte. Dans le titre Venezuela : Maduro appelle à combattre « tous les putschistes », le

verbe combattre, de nature négative, met en lumière le caractère violent du président tandis que

le déterminant tous insiste sur la notion de totalité, de masse qui serait victime de cette brutalité.

L’utilisation de grands mots fait aussi partie des différents leviers permettant de convaincre,

voire de manipuler l’allocutaire. De par leur exagération sémantique, ils vont mobiliser les

émotions et ainsi toucher plus facilement le lectorat. Le pathos mis en circulation dans nos titres

est l’indignation, qui est incontestablement un instrument efficace lorsqu’il s’agit de politique.

Les mots chaos, paralyse, crise, rare, ou encore terrifié qui proviennent des titres suivants : Le

chaos continue au Venezuela : des manifestations fleurissent contre la panne de courant qui

paralyse le pays, Après la panne : le Venezuela sort de l’ombre, pas du chaos, Crise au

Venezuela : un rare double veto russo-chinois enterre un projet américain, « Qu’est-ce qui me

fait peur ? le bain de sang » : le Pape François se dit terrifié par la violence au Venezuela

présente une signification sémantiquement forte. Le vocabulaire est ici modulé de façon à ce

qu’il génère à la fois un sentiment de peur et de colère auprès du public. Enfin, si la clarté est

généralement perçue comme étant une qualité essentielle dans les écrits de nature scientifique

ou technique, certains écrits retirent quant à eux des avantages à rester vague et à ne montrer

aucun engagement clair. C’est notamment le cas des articles de presse. Bien que nos titres ne

soient composés de termes faibles que dans une moindre mesure, leur présence n’y est pas pour

rien. Il s’agit en effet d’une façon d’éveiller la curiosité chez le lecteur qui le poussera à

poursuivre sa lecture. Quelques-uns des titres restent imprécis. Ils n’ont de sens qu’après que

l’article ait été entièrement lu. En voici quelques exemples : « On a faim ! » : Maracaibo, la

capitale pétrolière du Venezuela, mise à sac, Venezuela : Guaidó compte mettre fin sous peu

au règne de Maduro, « Une guerre électrique visant à rendre fou le pays » : au Venezuela, on

rationnera l’électricité pour 30 jours, « La société n’a jamais été aussi individualiste au

Venezuela, parce qu’on est dans la survie, dans la misère » et Pence demande à l’ONU de

reconnaître Guaidó comme dirigeant du Venezuela. Le pronom personnel indéfini « on »

apparaît à plusieurs reprises. Ses limites sont floues, et il est difficile d’en déterminer les

frontières. Il peut se rapporter « aussi bien à une personne précise qu’à un générique, à un

collectif clairement identifiable qu’à un groupe de personnes à l’étendue et aux limites vagues ;

il peut inclure ou exclure le locuteur, renvoyer aussi bien aux interlocuteurs qu’à une tierce

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personne »12. Autrement dit, le « on » désigne tout le monde et personne à la fois. Il a une

valeur inclusive, c’est-à-dire qu’il peut désigner tout le monde à la fois et une valeur exclusive,

car il peut en exclure le destinataire. Dans les titres mentionnés plus haut, il est bien difficile de

savoir avec certitude à qui le « on » réfère sans avoir lu tout le contenu de l’article. La seule

déduction qui peut être faite est qu’il s’agit d’êtres humains. Par conséquent, le lecteur pris de

curiosité va continuer la lecture de l’article afin de pouvoir connaître qui se cache derrière le

« on ». Cette notion de flou viole le principe de bivalence selon lequel une proposition X est

soit vraie soit fausse et elle ne peut ni avoir les deux valeurs de vérité ni n’en avoir aucune.

Un mode de raisonnement rhétorique intéressant à relever est l’argument d’autorité qui

se retrouve dans quelques titres mentionnés par le journal La Libre. Cet argument consiste à

alléguer une autorité et à accorder de la valeur à ses propos non pas pour leur contenu, mais

pour l’origine de son énonciateur. Le journaliste recourt à ce stratagème afin de crédibiliser

l’orientation de son discours. En construisant son titre par citation directe ou indirecte des

propos d’une personnalité qui représente le pouvoir dans le domaine abordé, il place sa

communication sous l’autorité de cette dernière. Dans ce cas-ci, les dires de spécialistes du

Venezuela comme Antonio Ledezema, maire de Caracas, Frédéric Lévêque, diplômé en science

politique et fondateur et animateur du site Barril.info, site consacré à la situation au Venezuela

ou encore Heinz Dieterich sociologue et ancien conseiller de Chavez sont utilisés à bon escient

pour accréditer les idées choisies par la presse ou le journaliste : « Au Venezuela, des gens

meurent à cause des pénuries de nourriture ou de médicaments », « La société n’a jamais été

aussi individualiste au Venezuela, parce qu’on est dans la survie, dans la misère », Le

Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro selon un ex-conseiller de Chavez. Notons

également la présence de l’autorité religieuse invoquée comme suit dans les titres : « Qu’est-ce

qui me fait peur ? le bain de sang » : Le Pape François se dit terrifié par la violence au

Venezuela, Le Pape au Panama, attendu sur la crise vénézuélienne.

Un mode de raisonnement rhétorique intéressant à relever est l’argument de l’urgence.

Les titres déclarent une sorte d’état d’urgence qui se traduit par l’usage du discours rapporté de

citoyens vénézuéliens. Des titres tels que La menace d’une intervention américaine plane sur

le Venezuela : « Venez nous libérer ! » ou « On a faim ! » : Maracaibo, la capitale pétrolière

12 Landragin, Frédéric. et Tanguy, Noalig. (2014) « Référence et coréférence du pronom indéfini on », Langages, 195(3), p. 99-115. doi: 10.3917/lang.195.0099 (consulté le 30 juillet 2019).

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du Venezuela, mise à sac, ont pour but de cibler les sentiments du récepteur. Il y a comme une

volonté de transmettre l’appel au secours des habitants vénézuéliens au reste du monde. Le

discours direct va permettre de créer une proximité virtuelle entre le lecteur et le peuple

concerné, ce qui va d’autant plus participer au réalisme des faits mentionnés dans le titre. Ces

appels à l’aide dressent un état de la situation en mettant en exergue une situation économique,

alimentaire mais aussi politique qui ne cesse de se dégrader. Ces exclamations exercent une

pression sur le lecteur et de ce fait favorisent le développement d’un sentiment de colère chez

ce dernier. Encore une fois, les titres déparent d’une certaine façon le président Nicolás Maduro

en renforçant l’idée que le pays se meurt sous sa présidence et qu’il faut immédiatement agir

pour y remédier. Cela renvoie à une certaine forme de désapprobation quant au gouvernement

de Maduro de la part du journal La Libre.

De nombreux mots sont particulièrement entourés de guillemets dans les titres.

L’emploi des guillemets peut être une façon discrète de signifier que le dire est défectueux,

autrement dit que quelque chose ne va pas. Un mot ou un syntagme mis en lumière par des

guillemets va mettre le lecteur au défi de comprendre d’une certaine façon la raison pour

laquelle le journaliste a pris l’initiative de recourir aux guillemets. De plus, il va se voir octroyer

une liberté d’interprétation dans la mesure où le journaliste n’aura laissé aucune indication

concernant ce choix typographique. Pour faciliter le décryptage, il est essentiel que le

journaliste mette en place une complicité entre lui et son lecteur. Pour ce faire, il est impératif

qu’il connaisse le lectorat auquel il adresse son message afin que le réel message puisse être

décodé et d’éviter ainsi de ne pas être compris. Cette même condition vaut pour le lecteur qui,

pour réussir à déchiffrer avec succès le message de l’article, doit connaître la vitrine idéologique

du journal qu’il lit. Le journaliste ne mettra en évidence que les expressions que son lectorat

s’attendra à voir entre guillemets. Dans le discours journalistique, les guillemets peuvent entre

autres être une marque de distance des propos du journaliste par rapport à ceux mis entre

guillemets. Cette technique peut s’interpréter comme une façon de se dédouaner de toute

responsabilité quant aux dires et de décliner la responsabilité sur quelqu’un d’autre. Dans les

exemples ci-après : Venezuela : le président obtient des pouvoirs spéciaux face à « l’agression

impérialiste », Le Venezuela accuse les États-Unis de « terrorisme psychologique », « Une

guerre électrique visant à rendre fou le pays » : au Venezuela, on rationnera l’électricité pour

30 jours, Venezuela : Maduro appelle l’armée à combattre « tous les putschistes », le journaliste

met en évidence de façon péjorative des expressions propres à Nicolás Maduro et prend ses

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distances avec celles-ci. Il les ironise et son discours décrédibilise le président du Venezuela,

ce qui va concourir encore une fois à la déconsidération du président vénézuélien.

Au cours de l’analyse des divers titres, un réflexe journalistique a retenu notre attention :

l’appellation des personnalités presque exclusive par leur nom de famille. Ces titres témoignent

d’un penchant considérable des journalistes de La Libre pour l’utilisation de patronymes

lorsqu’ils évoquent des personnalités. En effet, dans de nombreux titres, les prénoms des

personnalités politiques telles que le président Nicolás Maduro ou encore de son opposant Juan

Guaidó sont omis. Ces hommes ne sont cités que par le biais de leur nom. Cette utilisation laisse

sous-entendre qu’ils sont inévitablement connus du public et qu’il n’est donc pas nécessaire de

mentionner leur prénom. Il s’agit d’un aspect familier conféré par le titre. Dès lors, nous

relevons déjà de la communication dans le titre. De plus, cette tendance suggère une certaine

nonchalance, voire un mépris de la part du journaliste. Les différents points analysés

précédemment et le centrage important des titres sur le président Nicolás Maduro attestent que

ce dédain lui est particulièrement dédié. Enfin, parler du président en ne mentionnant que son

nom de famille lui donne un air supérieur.

Dans les titres, l’auteur personnifie plusieurs des mots employés. Par définition, la

personnification est une figure de style qui consiste à prêter des propriétés humaines à une chose

inanimée ou à un animal. Elle est généralement le fruit d’une métaphore ou d’une comparaison.

Dans chacune de nos constructions, un référent est associé syntagmatiquement à une entité.

Tout d’abord, des noms de lieux sont personnifiés et renvoient à une entité individuelle ou

collective. D’une part, les toponymes figurant dans les titres La Russie aurait aidé le Venezuela

pour contrer les sanctions US et Le Venezuela accuse les États-Unis de « terrorisme

psychologique » réfèrent à une entité individuelle, plus précisément au président respectif du

pays cité dans le titre. Par métonymie, l’Etat se voit attribuer les caractéristiques de son

dirigeant et par conséquent est réduit à ce dernier. De toute évidence, le lecteur est conscient

que le référent fait allusion à une entité composée d’êtres humains. Ainsi, le lecteur va

transposer les caractéristiques de l’entité au référent présent dans le discours et inconsciemment

va se créer un stéréotype à l’égard de cette entité. D’une autre part, les noms de lieux contribuent

aussi à la construction des représentations d’entités collectives dans le discours comme

l’exemplifient les deux exemples suivants : La rue en colère contre Maduro au Venezuela et

Le Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro, selon un ex-conseiller de Chavez. Les

syntagmes « La rue » et « Le Venezuela » se rapportent au peuple vénézuélien. Dans le titre La

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rue en colère contre Maduro au Venezuela, il est évident que « La rue », comme mentionnée

précédemment, est intrinsèquement liée au peuple vénézuélien, et plus exactement aux partisans

vénézuéliens de l’opposition. La personnification va ici participer à la création d’une

généralisation, voire d’une idée erronée dans l’imaginaire d’un lecteur à qui les événements

sont étrangers. Il va apparenter les sentiments d’une partie de la population vénézuélienne qui

s’oppose au gouvernement actuel aux impressions de tout un peuple. D’autres titres font

référence à une entité collective, mais cette fois-ci, à des personnes impliquées dans le

gouvernement : Pourquoi le Venezuela veut expulser l’ambassadeur allemand, Le Venezuela

suspend l’expulsion des diplomates américains, Bras de fer entre Parlement et Cour suprême

à Caracas. Outre la personnification nominale, le titre ci-après : Venezuela, position à adopter

face à la Russie … Les divergences entre les pays font patiner la politique étrangère de l’UE,

illustre une forme verbale métaphorique. Techniquement, des divergences ne peuvent « faire

patiner » la politique étrangère de l’UE. Cette forme verbale renvoie par métonymie à l’idée de

faire avancer la politique étrangère de l’UE. Et bien que différente, la métonymie est souvent

subordonnée à la personnification.

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4. Analyse des éléments relevant de la communication des sources et des intervenants

4.1. Analyse des intervenants

Comme le montre le graphique ci-dessus, le corpus de notre recherche est composé d’un

panel assez varié d’intervenants dont des représentants américains, vénézuéliens et étrangers,

des citoyens vénézuéliens, des experts, le président Nicolás Maduro ainsi que son opposant

Juan Guaidó entre autres. Pourtant, certains intervenants sont plus privilégiés que d’autres. En

effet, le gouvernement américain, par exemple, ou une certaine tranche de la population

vénézuélienne et divers spécialistes occupent une plus grande place et monopolisent le discours

plus que d’autres intervenants lorsqu’il s’agit de parler des événements du Venezuela.

Les États-Unis, les spécialistes, les différents opposants et les citoyens vénézuéliens

tiennent un discours peu favorable à l’égard du président Nicolás Maduro. En effet, ces derniers

n’hésitent pas à qualifier maintes fois son gouvernement de régime dictatorial. À travers les

citations directes et indirectes des intervenants, il est à remarquer une volonté d’instaurer la

démocratie au Venezuela et un appel à la participation de tous pour mettre fin à cet

autoritarisme. Premièrement, les États-Unis, les spécialistes ainsi que l’opposition contestent

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Graphe 3 : Les intervenants

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l’installation d’un pouvoir « illégitime » à la tête du Venezuela. Déjà en 2013, lorsque Nicolás

Maduro gagna les élections de justesse face à son opposant Henrique Capriles, sa victoire fut

remise en cause et un doute émana quant à une éventuelle fraude électorale. Quelques années

plus tard, l’élection de 2018 a fait l’objet de nombreuses discussions, et certains se sont mis

d’accord pour dire qu’elle aussi ne pouvait être qualifiée d’élection démocratique. D’une part,

les candidats de l’opposition n’ont pas pu se présenter et le candidat en face de Nicolás Maduro,

Henry Falcón, n’était qu’un soi-disant chaviste soupçonné d’avoir été poussé par le pouvoir à

se présenter, et d’ autre part, parce que l’abstention électorale fut importante. Le 20 mai 2018,

Nicolás Maduro l’a emporté largement avec 67,84 %13 des voix et une participation de

46,07 %14, ce qui, selon les États-Unis, de nombreux pays européens et des experts, est

relativement faible. Toutefois, il est sans rappeler que le second tour des élections

présidentielles françaises de 2017 a également été marqué par un taux d’abstention record, du

jamais vu en France depuis 1969. Selon cette logique, le président de la République française

serait tout aussi illégitime et devrait recevoir lui aussi de nombreuses attaques, mais il

semblerait qu’Emmanuel Macron n’ait pas suscité autant d’intérêt lors de son élection pour on

ne sait quelle raison. Certains condamnent également l’utilisation de machines suspectes ayant

changé les résultats. De nombreux pays ont ainsi jugé non démocratique l’élection

vénézuélienne de Maduro étant donné le déroulement de cette élection. Dès lors, ces stigmates

ne cessent de lui coller à la peau.

Toutefois, des observateurs provenant des quatre coins du monde ont pu assister au

processus électoral et ont déclaré que les élections vénézuéliennes étaient loin d’être

frauduleuses. L’un de nos intervenants, Jimmy Carter, ancien président des États-Unis mais

également créateur de la fondation Carter qui est une institution surveillant les processus

électoraux dans de nombreuses régions, affirme que le système électoral vénézuélien est le

« meilleur du monde »15 et a été classé par conséquent comme l’un des plus sûrs et transparents

au monde. Dans une interview publiée par le Global Research Council, Eulalia Reyes de

Whitney, présente le 20 mai 2018 pour le vote présidentiel, a confessé qu’elle avait reçu toutes

13 Élection présidentielle vénézuélienne de 2018 (sans date) Wikipedia. Disponible sur: https://fr.wikipedia.org/wiki/Élection_présidentielle_vénézuélienne_de_2018?fbclid=IwAR1qLEoACOE9MgUynX_gpd1MKzoxJ_wEjb0uRXp8ZjzHNFh4ZVZkqZypKu4. 14 Ibidem. 15 MFC, Reuters et AFP (2013) « Victoire de Maduro contestée », La Libre, 16 avril. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/victoire-de-maduro-contestee-51b8fb63e4b0de6db9ca31e5?fbclid=IwAR0KzrVkACKCL7uQ8-T8RRfcJ3pS8wYYfWEMZWyRItk4kGvnwHezgQsW1Og (consulté le: 30 juillet 2019).

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les informations essentielles relatives aux procédures et qu’elle pouvait avoir confiance en la

crédibilité, la transparence et la sécurité du système électoral vénézuélien16. D’autres

observateurs des élections vénézuéliennes ont écrit une lettre à Federica Mogherini, haute

représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et faisant

également partie des intervenants de notre corpus. Cette dernière a déclaré : « le président

Nicolás Maduro entame aujourd’hui un nouveau mandat sur base d’élections non

démocratiques » et « les élections présidentielles tenues en mai dernier n’ont été ni libres ni

équitables et les résultats manquent de crédibilité »17. Les observateurs n’ont pas hésité à lui

faire part que les affirmations du communiqué de presse n’étaient rien d’autre que des

inventions scandaleuses basées sur des ouï-dire et non sur des preuves18.

Les mêmes intervenants ont aussi reproché au Venezuela de porter atteinte aux libertés

individuelles, et de ce fait de « violer les droits de l’homme »19. Selon ces derniers, Nicolás

Maduro intensifierait sa répression contre la liberté d’expression en interdisant l’exercice de la

critique et de la dissidence. La presse indépendante et d’opposition aurait été censurée, et de

nombreux médias auraient été fermés par le gouvernement. Dans l’article Venezuela : en

tournée nationale, Guaidó veut marcher jusqu’à la présidence, l’ONG Espacio Publico a relevé

plus de 50 arrestations dans la presse depuis le 1er février 201920. Les journalistes seraient

également muselés et tout journaliste qui couvrirait la crise politique et économique du

Venezuela serait susceptible de se faire arrêter et d’être détenu prisonnier dans des conditions

plus que déplorables. Il semblerait que l’arrestation ne soit qu’un danger parmi tant d’autres

16 Reyes de Whitney, Eulalia. et Fuentes, Federico. (2018) Venezuela Election Observer: ‘The Majority Have Chosen the Path They Want for Venezuela’, Green Left Weekly. Disponible sur: https://www.globalresearch.ca/venezuela-election-observer-the-majority-have-chosen-the-path-they-want-for-venezuela/5642050?fbclid=IwAR3j_7CF6N8tmT1Q-RGCfmdzN-oArsmmC-UlTLvYyears1z06ZqLwHC5Y-k (consulté le: 28 juillet 2019). 17 Belga (2019d) « Venezuela: les Etats-Unis et l’UE menacent Nicolas Maduro », La Libre, 10 janvier. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-les-etats-unis-et-l-ue-menacent-nicolas-maduro-5c376e6ad8ad5878f0f353ab?fbclid=IwAR0zjPdYyBI-ueveq9hduB2e9Lerdha9KAVvhpwXojzu6H3D0h_AlfSfd_g (consulté le: 30 juillet 2019). 18 Fox, J. et al. (2018) International Observers to Venezuela’s Election Pen Letter to the EU, Venezuela Solidarity Campaign. Disponible sur: https://venezuelanalysis.com/analysis/13899?fbclid=IwAR2-e5jUFT6LYL43scntzIpT1KgsViAGFq2Zpny-T0mmv6lUYhW-yhsKHMQ (consulté le: 28 juillet 2019). 19 AFP (2017b) « Venezuela: l’opposition soutient les sanctions américaines - », La Libre, 28 août. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-l-opposition-soutient-les-sanctions-americaines-59a3c8c6cd706e263fa4a92c?fbclid=IwAR1FGJRwB3pRGgWnMXcIQQxynlwbUXfeuuiQWGhfXd3idNpUTmOdQ702aNs (consulté le: 30 juillet 2019). 20 AFP (2019m) « Venezuela: en tournée nationale, Guaido veut marcher “jusqu’à la présidence” », La Libre, 16 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-en-tournee-nationale-guaido-veut-marcher-jusqu-a-la-presidence-5c8d7abcd8ad5878f014829e?fbclid=IwAR3p4Z4abQ_9m7_KSugAIEMkIawwCORAxfAYMiSU1lBitzctouEaVPhDSf8 (consulté le: 30 juillet 2019).

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qu’encoure un journaliste qui oserait évoquer la dégradation du pays. Les reporters seraient

victimes entre autres d’intimidation et de torture et par crainte de représailles, ceux qui ont

véhiculé des informations sensibles auraient été exilés ou auraient été contraints de prendre la

décision de fuir le pays. Les médias français ont tiré des informations de la presse SNTP sur la

censure et la fermeture de plusieurs médias. Il serait toutefois imprudent et négligent de ne pas

effectuer de plus amples recherches quant à la source de cette affirmation. SNTP s’avère n’être

autre qu’un média privé vénézuélien dirigé par Marco Ruiz, un militant de la droite. Il ne serait

donc pas insensé de s’interroger quant à la fiabilité de cette source et d’émettre l’hypothèse

d’une potentielle création d’information montée de toutes pièces. Ruiz aurait très bien pu

utiliser le non-renouvellement de deux radios, qui ont enfreint la loi en appelant les États-Unis

à envahir le Venezuela, pour ternir l’image du gouvernement socialiste. Comme n’importe où

dans le monde, les médias sont contraints de respecter un cahier de charges où des lois de

télécommunication y sont mentionnées. Un article de CONATEL, une organisation exerçant la

réglementation, la supervision et le contrôle des télécommunications au Venezuela, publié en

2017, atteste qu’au cours de ces 18 dernières années, 177 nouvelles stations de radio et 27

nouvelles stations de télévision privées ont été créées. Le Venezuela est passé de 304 radios

privées à 481 depuis l’arrivée de la révolution bolivarienne et de 36 chaînes de télévision à 6321.

Au vu de ces chiffres, il semblerait donc que le gouvernement bolivarien n’ait pas fermé des

médias, mais qu’il aurait plutôt augmenté leur nombre. Ajoutons à cela les réseaux sociaux

comme Twitter où y sont diffusés en permanence des messages de haine envers Maduro. Pour

un pays où la liberté d’expression des dissidents est violée, les informations transmises par ces

derniers semblent toutefois se propager assez aisément partout et en quantité. Le manque de

liberté d’expression au Venezuela n’est finalement peut-être pas celui que l’on imagine.

De plus, le Venezuela est accusé de recourir un peu trop souvent et de façon imprudente à

la violence, et de ce fait de l’avoir exacerbée. Une très forte augmentation de la population

carcérale aurait eu lieu au Venezuela en peu de temps, et ce, particulièrement sous le

gouvernement Maduro. Selon l’organisation de défense des droits de l’homme Foro Penal, une

21 Conatel (2017) En Revolución ha crecido número de emisoras privadas en el país, Conatel. Disponible sur: http://www.conatel.gob.ve/en-revolucion-crece-numero-de-emisoras-privadas-en-el-pais/?fbclid=IwAR0KzrVkACKCL7uQ8-T8RRfcJ3pS8wYYfWEMZWyRItk4kGvnwHezgQsW1Og (Consulté le: 30 juillet 2019).

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des sources utilisées par La Libre, plus de 900 détenus politiques seraient enregistrés au

Venezuela22. Si nous voulons nous appuyer sur cette organisation, il faudra également prendre

en compte qu’elle est financée par Freedom House, un organisme proche du ministère des

affaires étrangères des États-Unis. Il semblerait donc que les forces de l’ordre auraient pris

beaucoup plus d’ampleur qu’auparavant et sèmeraient la terreur au Venezuela. Dans un premier

temps, nos intervenants incriminent le gouvernement vénézuélien pour avoir bafoué la liberté

d’expression des individus et de réprimer ces derniers avec violence. Il semblerait que des

partisans de l’opposition seraient ou auraient été emprisonnés pour leurs opinions politiques et

subiraient injustement des tortures physiques et psychologiques. Mais il semble toutefois y

avoir un amalgame entre prisonnier politique et assassin du parti de l’extrême droite. Dans un

Etat de droit, tout individu se doit de respecter la loi et toute personne commettant un délit, quel

qu’il soit, se verra punie par la justice. De nombreux partisans de l’extrême droite ont certes été

incarcérés, mais ce, en raison des délits qu’ils ont commis et certainement pas pour leurs

idéologies politiques. Les intervenants dénoncent également la répression prétendument

systématique des opposants par le recours à la violence. À partir de 2018, le nombre de

manifestations, particulièrement dans les quartiers populaires, contre Nicolás Maduro s’est

multiplié. Au début, elles étaient liées à la crise économique, mais à partir de 2019, elles ont

pris un tournant politique. Lors de ces manifestations, toujours présentées comme pacifiques,

les manifestants se disent avoir été punis sans pitié et sans état d’âme par les soldats. Un de nos

intervenants vénézuéliens prénommé Lui a témoigné en disant que lors d’une manifestation,

beaucoup de militaires étaient présents, ces derniers n’avaient aucune compassion et étaient très

agressifs23. Quant aux arrestations, elles seraient sans mandat et les accusations seraient

toujours très vagues. Les détenus seraient embarqués dans des endroits inconnus où ils seraient

torturés, isolés et séquestrés en prison, même quand leur sortie est annoncée par le tribunal.

Enfin, les pénuries massives en termes de santé et d’alimentation, dont le président serait tenu

pour principal responsable, entraîneraient une hausse de la criminalité au Venezuela déjà connu

22 AFP (2019m) « Venezuela: en tournée nationale, Guaido veut marcher “jusqu’à la présidence” », La Libre, 16 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-en-tournee-nationale-guaido-veut-marcher-jusqu-a-la-presidence-5c8d7abcd8ad5878f014829e?fbclid=IwAR3p4Z4abQ_9m7_KSugAIEMkIawwCORAxfAYMiSU1lBitzctouEaVPhDSf8 (Consulté le: 30 juillet 2019). 23 Petit, Anne-Laure (2019) « La menace d’une intervention américaine plane sur le Venezuela: “Venez nous libérer !” », La Libre, 25 février. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/la-menace-d-une-intervention-americaine-plane-sur-le-venezuela-venez-nous-liberer-5c72f2657b50a60724fdd757?fbclid=IwAR3CSAz0fs0XuBESubBYf5u0c2EeObtLUjnv-on9oN8o_TQ-ul3lUoInBrI (Consulté le: 30 juillet 2019).

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comme étant l’un des pays les plus dangereux. Les produits de première nécessité ainsi que les

médicaments se font très rares sur le territoire vénézuélien et les Vénézuéliens se retrouvent

dans le dénuement. La famine pousse les gens à risquer leur vie et à faire tout et n’importe quoi

pour pouvoir se nourrir. Ils n’hésitent pas à piller et dévaster les supermarchés et bien plus

encore. Il semblerait également que le peuple profite de la situation du pays pour recourir à la

délinquance. Déjà connu dans le passé pour son nombre de crimes très élevé, le Venezuela

serait désormais devenu le pays le plus dangereux du monde. Les gens sont des plus en plus

agressés et volés à n’importe quel moment de la journée et n’importe où, la situation est devenue

incontrôlable. Il est bien beau de la part de nos intervenants de lancer des cris d’alarme face à

cette crise humanitaire, mais il est à se demander s’ils sont réellement préoccupés par cette crise

quand nous savons par exemple que les États-Unis émettent des sanctions contre le Venezuela

et appellent les autres pays à faire de même, ce qui plonge davantage le pays dans le noir. Ainsi,

ces dernières années dénoteraient une escalade de violence et de crimes contre l’humanité, car

elles seraient marquées par des assassinats, des disparitions, des tortures et des

emprisonnements injustifiés entre autres, et Nicolás Maduro serait le principal responsable de

ces atrocités.

Il est à constater un manque d’analyse et d’impartialité de la part des journalistes de La

Libre Belgique. Aucun article ne mentionne les violences engendrées par les manifestations de

2017 qui ont causé la mort de plusieurs policiers. Ces faits sont également de la répression de

masse, mais ils ne sont jamais évoqués. Par contre, on ne cesse de parler des mois de

manifestations ultra violentes où les manifestants sont eux aussi armés et de la répression

policière. La violence massive existe partout dans le monde et on en parle peu. Mais la violence

au Venezuela fait beaucoup parler d’elle, car elle est un élément clef. C’est tout à l’avantage de

la propagande de l’opposition de mettre en évidence le fait que le Venezuela est un pays très

violent et qui réprime sa population. Cela participe davantage à la perte de légitimité du

président élu et met l’accent sur la gravité de la situation.

Nous retrouvons à travers les différents arguments avancés par nos intervenants quelques-

uns des principes élémentaires de propagande de guerre évoqués par Anne Morelli. Le premier

que nous retrouvons s’intitule : « C’est une cause noble que nous défendons et non des intérêts

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particuliers »24. Selon le premier principe, les intervenants font croire qu’ils veulent la guerre

pour de bonnes causes. Il n’est presque jamais évoqué au peuple les réelles motivations de cette

guerre. Au contraire, ce sont des raisons héroïques et honorables qui sont mises en avant afin

d’obtenir le soutien et le consentement de son peuple, car sans le consentement de ce dernier,

aucune intervention n’est possible. Quant aux vrais mobiles, ils ne sont jamais mentionnés.

Dans le cas du Venezuela, les opposants au gouvernement de Nicolás Maduro travaillent

principalement sur l’opinion publique pour la faire adhérer à une ‘guerre’ ou plus proprement

dit, aux attaques proliférées contre Nicolás Maduro. Pour ce faire, ils recourent à des motifs

humanitaires tels que l’instauration de la démocratie, la défense d’un peuple vénézuélien qui

subit une répression violente et injustifiée de l’armée gouvernementale, la crise humanitaire ou

encore la forte hausse de violence quotidienne. Toutes ces raisons sont certes honorables, mais

sont malheureusement très éloignées des objectifs réels de la guerre. L’intention de ces discours

est de réveiller l’ardeur et le courage des citoyens qui eux vivent dans un pays où ces problèmes

n’existent pas. L’un des thèmes favoris de la propagande est la volonté de voler au secours des

populations opprimées, ce qui permet également de se façonner une image plus respectable et

ainsi faire gagner davantage l’estime d’autrui. Leur côté altruiste est mis en avant et démontre

ainsi qu’ils ne sont pas égoïstes, car ils sont prêts à prêter leurs armées à ceux qui en ont besoin.

À travers les divers faits cités par les intervenants, l’idée que nous nous battons pour les autres

et pas pour nous se réitère. En tenant de tels discours, les intervenants anti-Maduro tireront

honneur et seront vus comme des bienfaiteurs aux yeux de leur peuple. Toutefois, il est à noter

que la pénurie alimentaire dont souffre le peuple vénézuélien est en grande partie engendrée

par les sanctions économiques américaines. C’est un peu paradoxal de prétendre vouloir sauver

cette population de la misère quand d’une certaine façon on y contribue. En résumé, on dit

qu’on veut faire la guerre pour des buts humanitaires : pour faire cesser la terreur, l’injustice,

maintenir la liberté et instaurer la vraie démocratie. Ces nobles motivations en cachent

malheureusement bien d’autres comme les intérêts économiques et géopolitiques par exemple.

Il serait peu étonnant d’apprendre par la suite que tout compte fait, les États-Unis s’intéressent

au contrôle des ressources pétrolières comme à leur grande habitude même s’ils prétendent

attaquer le Venezuela uniquement pour venir en aide au peuple opprimé. Le prétexte

humanitaire a toujours été un bon alibi pour s’ingérer dans la politique d’un autre pays. Les

hommes politiques s’auto-persuadent de ces fausses raisons pour ensuite persuader le peuple.

24 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor.

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En s’adressant à l’opinion publique, on lui donne l’impression qu’elle va participer à une bonne

cause et donc elle va se sentir impliquée et active.

Ensuite, nous retrouvons le principe numéro cinq « L’ennemi commet des crimes

volontairement tandis que nous, nous y sommes contraints ». Il s’agit ici de créer des légendes

selon lesquelles le camp adverse, c’est-à-dire le gouvernement vénézuélien, perpétrait des

atrocités volontairement et que nous pas. Les médias occidentaux utilisent les actes de guerre

du camp adverse dans leur propagande mais jamais les leurs. Toutefois, il ne faut pas oublier

que l’essence même de la guerre est la violence et que donc nous faisons aussi usage de cette

violence pour nos propres intérêts. Il est juste question d’un bon moyen pour préserver une

bonne image. Faire croire que la guerre peut être pacifiste et modérée est une utopie complète.

Les intervenants ne parlent que très peu ou jamais des sanctions économiques que les États-

Unis ont émises et qui aliment cette crise humanitaire que beaucoup de pays défendent.

Enfin, nous retrouvons le principe numéro neuf intitulé « Notre cause a un caractère sacré »,

sacré peut signifier à la fois religieux et honorable. Le sens qui nous intéresse est le second.

Nous entendons continuellement dire que « la sainte démocratie de marché est en lutte contre

les Etats voyous et les forces du mal »25. La situation est un peu comparable à la religion : les

pays occidentaux tentent de reconvertir des pays à la démocratie. L’argument sacré est

fortement évoqué, car il sert, de façon considérable, à leur cause. Ils font croire que le

gouvernement vénézuélien est un régime qui refuse la démocratie, ce qui confère

automatiquement un caractère mauvais et despotique au président Maduro. Nombreux sont

ceux qui se servent de cet argument pour avoir un motif légitime de s’immiscer dans le

problème qui de base ne concerne que le Venezuela afin d’essayer de tirer profit des ressources

naturelles comme le pétrole par exemple.

Parmi les intervenants figurent également des personnalités notoires. Tout d’abord, nous

avons l’intervention de la personnalité religieuse Jorge Bergoglio, homme d’église argentin et

actuel évêque de Rome, qui est l’un des acteurs les plus influents sur la scène mondiale. Sa

popularité considérable est un atout énorme et permet de susciter l’adhésion ainsi que

l’enthousiasme des lecteurs religieux. Dans les articles « Le pape demande à l’ONU d’aider le

25 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor.

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Venezuela » et « Qu’est-ce qui me fait peur ? le bain de sang : le pape François se dit terrifié

par la violence au Venezuela », les propos du pape sur la situation au Venezuela sont utilisés

mot pour mot entre guillemets dans la construction de ces deux articles. Le pape argentin a fait

part de sa grande préoccupation quant à la situation urgente du Venezuela et a lui aussi lancé

un appel aux acteurs externes pour qu’ils viennent en aide au pays. Le pape a déclaré que « le

plus douloureux est le problème humanitaire. Il y a tant de gens qui fuient ou qui souffrent.

C'est un problème humanitaire auquel il faut répondre. Je crois que l'Onu doit se faire entendre

pour aider » et a ajouté que la situation était très difficile26. Le pontife s’est également dit très

effrayé par la violence qui affecte le Venezuela et voudrait qu’une solution soit trouvée tout en

respectant les droits de l’homme27. Dans l’article « Pourquoi la crise au Venezuela peut avoir

un impact sur la présidentielle américaine ? », nous retrouvons les dires d’un autre type de

personnalité publique. L’actrice vénézuélienne Bettina Grand, âgée de 53 ans, a précisé que

bien qu’elle ne soit pas républicaine, elle est très sensible au soutien apporté par Trump et le

gouvernement américain dans le conflit28. Ici, l’intention est de montrer que non seulement les

Vénézuéliens résidant au Venezuela sont contre le gouvernement, mais que les Vénézuéliens

émigrés le sont aussi. L’actrice vénézuélienne remercie Donald Trump, un personnage souvent

critiqué pour ses prises de décision improbables. Par ce propos, il est montré que même les gens

qui en général ne sont pas des adeptes du président américain sont tout de même d’accord avec

lui sur ses plans concernant le Venezuela. Comme le dit le proverbe : l’ennemi de mon ennemi

est mon ami.

La présence de célébrités parmi notre panel d’intervenants sur la crise au Venezuela illustre

également un autre principe de l’ouvrage de Morelli. En effet, il s’agit du principe numéro 8 «

Les artistes et les intellectuels soutiennent notre cause »29. Pour convaincre l’opinion publique,

26 Belga (2017) « Le pape demande à l’Onu d’aider le Venezuela », La Libre, 11 septembre. Disponible sur: https://www.lalibre.be/dernieres-depeches/belga/le-pape-demande-a-l-onu-d-aider-le-venezuela-59b69c95cd70fc627d76a92c?fbclid=IwAR2jiJWJzD0HzKRTN2YUidslaVRKp5jg5oD86ohWe5BMzk7l1t6f7gJIenY (Consulté le: 30 juillet 2019). 27 AFP (2019g) « “Qu’est ce qui me fait peur ? le bain de sang” : le pape François se dit terrifié par la violence au Venezuela », La Libre, 28 janvier. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/qu-est-ce-qui-me-fait-peur-le-bain-de-sang-le-pape-francois-se-dit-terrifie-par-la-violence-au-venezuela-5c4efc187b50a60724185096?fbclid=IwAR0KzrVkACKCL7uQ8-T8RRfcJ3pS8wYYfWEMZWyRItk4kGvnwHezgQsW1Og (Consulté le: 30 juillet 2019). 28 AFP (2019f) « Pourquoi la crise au Venezuela peut avoir un impact sur la présidentielle américaine », La Libre, 26 février. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/pourquoi-la-crise-au-venezuela-peut-avoir-un-impact-sur-la-presidentielle-americaine-5c7597d59978e2710e6a747b?fbclid=IwAR2f1n9Or0bG9kWrPrOBtqSz2Dl3IBH88ZVi7_x0vGsfPItzN2IUjvBqnUs (Consulté le: 30 juillet 2019). 29 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor.

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il est important de jouer sur l’émotion, elles vont constamment de pair. Pour créer l’émotion,

on ne va pas recourir à des fonctionnaires, mais plutôt à des professionnels tels que des artistes,

des intellectuels ou encore des analystes. Les professionnels contribuent parfaitement à la

diffusion des boniments de la ‘guerre’. L’actrice Bettina Grand, par exemple, participe à cet

effort de guerre en décrivant sa reconnaissance envers Donald Trump. Le statut d’artiste permet

de prendre la parole de façon visible. Le fait de voir une personnalité que l’on apprécie et admire

prendre position sur une question peut contribuer à notre engagement, même si ce n’est qu’un

élément parmi tant d’autres. Ainsi, le fait de choisir comme intervenante une artiste dont les

propos révèlent clairement sa position quant au gouvernement de Nicolás Maduro contribue à

orienter le jugement du lecteur vers une interprétation spécifique quant à la situation du

Venezuela.

Un peu plus haut, le graphique de l’analyse des intervenants montre que l’intervention

d’experts, d’analystes et d’universitaires est assez conséquente. De fait, bon nombre d’entre

eux participent à cet acte pour leurs propres intérêts et ameutent l’opinion en faveur d’une

intervention au Venezuela et d’un renversement du gouvernement actuel. En prêtant leur aide

aux médias, ils se servent à leur tour des médias pour se faire connaître. C’est en quelque sorte

un échange, chacun des partis y gagne. C’est également une certaine façon de remonter le moral

à l’opinion publique. En effet, lorsqu’un expert vous affirme que ce que nous sommes en train

de faire est bon, nous sommes rassurés, et cela nous enlève toute once de culpabilité. Leur

prestige d’informations est utilisé pour appuyer des idéologies. En bref, l’aboutissement de

cette propagande est de faire croire aux gens que le combat de l’opposition est sacré et qu’il se

distingue de celui du gouvernement vénézuélien.

Nos différents intervenants, provenant de tous horizons confondus, n’hésitent pas à

présenter sous un jour très négatif le président Nicolás Maduro. Par exemple, le sociologue

allemand Heinz Dieterich, ancien conseiller de Chavez, n’y va pas de main morte. Ce dernier

prétend que le président actuel du Venezuela ne fait que saboter le travail de son prédécesseur

Hugo Chavez en faisant vivre une « tragicomédie »30 à son peuple. Il ajoute à ses propos que

30 AFP (2013) « Le Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro, selon un ex-conseiller de Chávez », La Libre, 24 novembre. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/le-venezuela-vit-une-tragicomedie-avec-maduro-selon-un-ex-conseiller-de-chavez-5291b2be3570386f7f337d83?fbclid=IwAR1qLEoACOE9MgUynX_gpd1MKzoxJ_wEjb0uRXp8ZjzHNFh4ZVZkqZypKu4 (Consulté le: 30 juillet 2019).

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Maduro et son équipe seraient des incompétents qui mettent le pays au plus bas. Dieterich en

vient même à devenir insolent et attaque le président sur son passé en déclarant que Maduro

souffre d’un manque de « fond culturel31 », car ce dernier n’était auparavant qu’un simple

chauffeur de bus. De plus, le président est également le bouc émissaire de quelques citoyens

vénézuéliens. Ces derniers ne manquent pas de rappeler que Maduro pousse les gens à piller

les magasins et qu’il est donc le principal responsable de toutes les conséquences qui découlent

des dégradations du pays. Julio, de son nom d’emprunt, qui est un villageois de San Antonio,

n’hésite pas à pointer du doigt le fait que « les gens de Maduro32 », comme il les appelle, sont

des malfaiteurs néfastes pour les citoyens vénézuéliens. Selon ce dernier, « les gens de Maduro

» seraient envahissants et impassibles. « Des pro-Maduro, il n’y en a pas ici à San Antonio.

C’est pour ça qu’ils les ont fait venir33 » poursuit Julio. Encore une fois, on tente de prouver

l’impopularité du président mais également sa volonté de conquérir par la force. Dans l’article

La menace d’une intervention américaine plane sur le Venezuela : « Venez nous libérer ! », les

propos de Mike Pompeo, secrétaire d’Etat américain, qualifiant le président Nicolás Maduro

comme « le pire du pire des tyrans34 » sur la chaîne CNN, sont utilisés. Ces mots forts ne sont

évidemment pas repris pour contribuer à la bonne image du président, bien au contraire. Ces

discours montrent la volonté d’attribuer une étiquette particulière à Nicolás Maduro : celle d’un

tyran et d’un malfaiteur.

La diabolisation du président Nicolás Maduro repérée dans les propos cités par nos

différents intervenants rejoint le principe d’Anne Morelli « L’ennemi a le visage du diable35 ».

Il serait évidemment impensable de concentrer la haine sur tout un peuple, par conséquent elle

va être concentrée sur le leader du pays. Les intervenants ne sont pas en guerre contre les

Vénézuéliens, mais bien contre Nicolás Maduro. Pour amoindrir l’adversaire, il faut

notamment présenter son camp comme des incapables et semer le doute quant à leur fiabilité.

Mettre entre guillemets les dires du président ou de ses cohortes, par exemple, est une des

méthodes pour mettre en doute leur légitimité. Il faut absolument diaboliser le président, le

31 AFP (2013) « Le Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro, selon un ex-conseiller de Chávez », La Libre, 24 novembre. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/le-venezuela-vit-une-tragicomedie-avec-maduro-selon-un-ex-conseiller-de-chavez-5291b2be3570386f7f337d83?fbclid=IwAR1qLEoACOE9MgUynX_gpd1MKzoxJ_wEjb0uRXp8ZjzHNFh4ZVZkqZypKu4 (Consulté le: 30 juillet 2019). 32 Ibidem. 33 Ibidem. 34 Ibidem. 35 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor.

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présenter comme quelque chose de toxique dont il faut se débarrasser. C’est de ce monstre que

viendrait tout le mal. Cette diabolisation donnera un but acceptable à l’attaque qui est de

capturer ce monstre pour revenir à la paix et à la civilisation. On pourrait penser que cette

caricature de Maduro est justifiée, car il a commis des erreurs de parcours, mais, si l’on remonte

en arrière, nous pouvons nous apercevoir que cette caricature date de bien avant les erreurs

reprochées à Maduro et qu’elle persistera même après une victoire ou défaite. Maduro est

présenté comme l’aliéné. On véhicule l’idée que pour mettre fin aux problèmes du pays, il faut

changer de gouvernement. Il est constamment présenté sous un jour inhumain. La technique de

diabolisation est efficace, car elle permet au lecteur d’identifier les bons et les mauvais comme

dans tout scénario. Il serait cependant grandement temps que les médias des multinationales

arrêtent de diaboliser Nicolás Maduro et s’aperçoivent au contraire de ce qu’il est réellement,

le seul chef d’Etat latino-américain ayant encore le courage de tenir tête à l’empire américain.

Il est intéressant de s’attarder sur les qualités personnelles de Nicolás Maduro. Peu importe le

fait de savoir s’il est bon ou mauvais, s’attarder sur la bonté de tous les gouvernements ne

mènerait à rien de concluant. Le fait est qu’il faudrait plutôt refuser de légitimer la diabolisation

d’un gouvernement qui vise à le faire tomber. Cette pratique est lamentable et relève

évidemment de l’interventionnisme. Aucune raison n’est valable pour soutenir une telle

campagne agressive dont une seule et unique personne en serait la cible.

Les États-Unis et les pays européens se montrent ouvertement en faveur du président

auto-proclamé par intérim Juan Guaidó. Selon les discours qui dominent l’intervention des

représentants américains, la situation au Venezuela est une catastrophe tant du point de vue

politique qu’économique. Le président et son personnel sont tenus pour uniques responsables

de l’état désastreux de l’économie et du mode d’organisation dit autoritaire de l’Etat

vénézuélien. Il n’est donc pas étonnant que les médias européens se refusent de contester ces

postulats américains. La majorité des articles ne mettent pratiquement l’accent que sur la

corruption du président ou encore sur son incompétence ainsi que celle de ses cohortes, tout en

éludant les répercussions néfastes des sanctions économiques appliquées par l’administration

Trump. Après analyse de ces théories démontrant que Maduro n’est qu’un président incapable

et autoritaire, il n’est pas insensé de se demander pour quelle raison alors une partie du peuple

vénézuélien adhère au gouvernement de Maduro et s’oppose à toute intervention étrangère. Il

serait néanmoins plus indulgent de la part des médias d’examiner de plus près ces hypothèses

avant de les relayer à tout-va. Les discours tenus à l’égard du gouvernement de Maduro ne

peuvent pas être pris au premier degré même s’ils contiennent un fond de vérité. Les médias

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ont désespérément besoin de bonnes sources d’informations pour leurs articles sur le

Venezuela. Les messages à propos de la démocratie vénézuélienne dans les déclarations des

intervenants varient de fallacieuses à véridiques, mais la plupart se situent entre ces deux

extrêmes. Ceux qui accusent le président d’être un dictateur soulèvent deux points importants.

Dans un premier temps, les intervenants accusent le gouvernement d’avoir traité violemment

les partisans lors de manifestations pacifiques, aussi appelées la Salida, de 2014 à 2017 où ces

derniers témoignaient leur volonté pour un changement de régime. Il s’est toutefois avéré que

les manifestations n’étaient pas pacifiques comme elles le prétendaient l’être. Selon Maurice

Lemoine, spécialiste du monde caraïbe et latino-américain, les émeutes font des victimes dans

tous les camps : six policiers et gardes nationaux ont été tués mais pas seulement. L’expert

ajoute qu’il y a « des civils assassinés parce qu’ils tentent de dégager ou contourner une

barricade, jeunes hommes brûlés vifs parce que les opposants pacifiques les ont pris pour des

chavistes »36. Les nombreux décès survenus entre 2014 et 2017 nécessiteraient une analyse

impartiale au vu des différentes versions qu’il existe à ce sujet. Mais il semblerait que le journal

La Libre Belgique ne présente qu’une seule et même version des faits : celle des partisans de

l’opposition subissant les exactions des forces de l’ordre. Bien que l’usage excessif de la force

soit condamnable dans tous les cas, le contexte des événements mérite toutefois un peu plus

d’attention. En 2014, lorsqu’eut lieu La Salida, des manifestations destinées au changement de

pouvoir, le pays connut une marge de violence comparable à celle à laquelle il fait actuellement

face. Les émeutes ont fait 43 morts et plus de 800 blessés37. Il faut toutefois noter que parmi les

victimes comptabilisées, il y avait des chavistes et des policiers. D’autres victimes n’avaient

rien à voir avec les manifestations. Déjà à cette époque, l’opposition reprochait à Nicolás

Maduro de trop laisser faire les forces de l’ordre. Certains partisans de l’opposition qui

aujourd’hui dénoncent ces abus ne semblaient pas en être autant dérangés avant de changer de

camps. Luisa Ortega, la procureure générale, se faisait critiquer pour son laxisme à l’égard des

forces de l’ordre. Désormais, elle dénonce le gouvernement qu’elle qualifie de « dictature »38.

36 Lemoine, Maurice. (2017) « “Le journal LE MONDE expulsé du Venezuela” », Politique-actu.com, 30 juin. Disponible sur: http://www.politique-actu.com/dossier/chef-reseau-pressetitution-expulse-venezuela-maurice-lemoine/1686604/?fbclid=IwAR2D01DWaEbhQ5x971Kf4SEsddJ06VcLdmXLVTcNJFHNYZoZMZTnL1U8zLs (consulté le: 30 juillet 2019). 37 Ibidem. 38 CH. LY. et AFP (2017) « Avec Maduro, le pouvoir vénézuélien prend un air de dictature », La Libre, 7 août. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/avec-maduro-le-pouvoir-venezuelien-prend-un-air-de-dictature-598758e6cd70d65d2538ee62?fbclid=IwAR1LlYxVv8iWDvtseiJXb9J470C4boVpvUHyyEbIAZ0e4by2t2d7Q-K4L98 (consulté le: 30 juillet 2019).

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Dans un second temps, les intervenants avouent ne pas reconnaître le mandat de Maduro

à l’issue d’un scrutin controversé en mai 2018. En effet, l’Assemblée nationale constituante

(ANC) a décidé que la présidentielle, initialement prévue pour décembre 2018, aurait lieu en

mai 2018. Nombre de pays étrangers ainsi que l’opposition déclarent que son existence n’aurait

aucune base légale et par conséquent ne la reconnaissent, car cette constituante aurait été élue

le 30 juillet 2017 alors que la majorité de l’opposition s’était abstenue de voter, car elle rejetait

cette élection. Bien évidemment, chacun est libre de s’opposer à la création de cette

constituante, mais ce que le journal La Libre ne fait pas toujours c’est présenter dans ses articles

les deux visions possibles quant à cette situation. Les articles manquent d’objectivité. Il y a

certes des représentants vénézuéliens qui revendiquent la légalité de l’ANC, mais d’autres qui

la défendent comme Hermann Escarrà39 par exemple. Comme le rappelle Maurice Lemoine,

« à son terme, les travaux de l’ANC devront être approuvés par référendum, ce qui laisse tout

le loisir à l’opposition, à défaut d’y participer, de la sanctionner (si elle a la majorité) »40. Une

fois de plus, l’attitude de l’opposition est un peu contradictoire. Les membres de l’opposition

avaient participé aux élections législatives de 2017 qui avaient également été organisées par

l’ANC. Ce sont ces mêmes membres qui ont boycotté les élections présidentielles de 2018.

L’argument utilisé pour légitimer l’auto-proclamation de Juan Guaidó comme président était

fondé sur l’illégitimité de cette même ANC.

Enfin, la répression policière et le non-respect des normes démocratiques ne prouvent

en aucun cas qu’un gouvernement est dictatorial. Si ces deux conditions suffisaient à démontrer

qu’un gouvernement est autoritaire, alors, les États-Unis ne pourraient se revendiquer ni être

considérés comme démocratiques. La question à poser est « quand peut-on considérer qu’il y a

une fraude électorale quand les votes ne sont pas pris au sérieux par une certaine partie de la

population ? ». Dans nos articles, personne ne semble plancher sur cette question. Au contraire,

les intervenants qualifient sans scrupule Maduro de « dictateur », de « tyran », de « corrompu »

ou encore d’ « usurpateur ». Les problèmes économiques d’un pays ne devraient jamais motiver

39 Izarra, Sandra. (2018) Constituyente Hermánn Escarrá aclaró que «no hay un proyecto constituyente oficial», Correo del Orinoco. Disponible sur: http://www.correodelorinoco.gob.ve/constituyente-hermann-escarra-aclaro-que-no-hay-un-proyecto-constituyente-oficial/?fbclid=IwAR2QwgAylMTMfi6BWDCw2m6gswuOJUxgY3VlI17Ro8U_AB8nKahasP5JGrU (consulté le: 30 juillet 2019). 40 Lemoine, Maurice. (2017) « “Le journal LE MONDE expulsé du Venezuela” », Politique-actu.com, 30 juin. Disponible sur: http://www.politique-actu.com/dossier/chef-reseau-pressetitution-expulse-venezuela-maurice-lemoine/1686604/?fbclid=IwAR2D01DWaEbhQ5x971Kf4SEsddJ06VcLdmXLVTcNJFHNYZoZMZTnL1U8zLs (consulté le: 30 juillet 2019).

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41

l’intervention d’acteurs externes. Il reste tout de même surprenant de n’avoir aucun intervenant

qui remet en cause les commentaires, parfois tout de même contestables, faits par d’autres à

l’égard du gouvernement de Nicolás Maduro bien qu’il ne soit pas tout blanc.

Nous retrouvons un thème assez récurrent dans les discours des hommes politiques

américains et européens. Tous prétendent défendre le maintien de la paix et vouloir la rétablir.

Les intervenants lancent un appel d’aide internationale et demandent un appui diplomatique

mondial pour rétablir la paix et la justice au Venezuela. Si on ne connaissait pas la violence des

précédentes attaques américaines, leur discours serait presque touchant. C’est tout de même à

leur grand avantage de faire croire au public qu’ils sont épris de guerre et qu’ils se sentent

affectés par les conséquences calamiteuses même si ces dernières ne les touchent pas

directement. Juan Caguaripanoa, militaire et dissident vénézuélien, a répondu au gouvernement

qui considère l’opposition comme coupable d’« une attaque de terroristes » en rétorquant de la

sorte : « ce n’est pas un coup mais une action militaire et civile pour rétablir l’ordre

constitutionnel »41. Toutefois, plusieurs exemples contradictoires abondent dans leurs discours.

Les États-Unis et l’opposition contestent aussi l’assistance des Russes au Venezuela.

Washington ainsi qu’une cinquantaine de pays reconnaissent Juan Guaidó comme président par

intérim du Venezuela. Ces derniers demandent le départ de Nicolás Maduro. Moscou, elle,

dénonce la volonté de la puissance américaine qui est de générer un coup d’Etat dans ce pays

aux immenses réserves pétrolières. L’arrivée de deux avions russes à Caracas a suscité des

débats houleux entre Washington et Moscou, et les tensions ont alors été exacerbées. D’après

des médias vénézuéliens, dont on ne cite pas le nom dans l’article, « ces avions transportaient

99 militaires et 35 tonnes de matériel, sous le commandement de l’armée de terre russe, le

général Vassili Yonkochkourov »42. Donald Trump s’est alors exclamé : « La Russie doit partir

du Venezuela ». Mike Pompeo reproche également à la Russie d’alimenter les tensions en leur

venant en aide. La Russie s’est défendue et a quant à elle répondu que ce sont au contraire les

41 CH. LY. et AFP (2017) « Avec Maduro, le pouvoir vénézuélien prend un air de dictature », La Libre, 7 août. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/avec-maduro-le-pouvoir-venezuelien-prend-un-air-de-dictature-598758e6cd70d65d2538ee62?fbclid=IwAR1LlYxVv8iWDvtseiJXb9J470C4boVpvUHyyEbIAZ0e4by2t2d7Q-K4L98 (consulté le: 30 juillet 2019). 42 AFP (2019o) « Venezuela: l’opposant Juan Guaido déclaré inéligible durant 15 ans », La Libre, 28 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-l-opposant-juan-guaido-declare-ineligible-durant-15-ans-5c9d0dcfd8ad5874772d4c9e?fbclid=IwAR2sozF--N0m68JeMF_1SyflexefsxpFB8UTX44P6Q6Usk2J1I76yIl2Tak (consulté le: 30 juillet 2019).

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États-Unis qui exacerbent les tensions en vue de provoquer un coup d’Etat. Quant au chef de

file de l’opposition vénézuélienne, Juan Guaidó, il ne cesse d’invoquer différents articles de la

Constitution. Il donne fréquemment comme argument l'article 233 de la Constitution du

Venezuela. Cet article établit que le président de la République est inhabilité en cas de « défaut

absolu » et que par « défaut absolu », il est entendu que le président doit être « mort, avoir

démissionné ou avoir été destitué » ou être « incapable physiquement ou mentalement »

d'exercer sa charge43. Ce qui n’est visiblement pas le cas de Nicolás Maduro. Les opposants

considèrent que le « défaut absolu » se trouve dans l’élection de Nicolás Maduro qui se trouve

actuellement au Palais de Miraflores. En d’autres termes, pour Juan Guaidó et ses partisans,

Maduro n’est plus président. Cette fois, il fait référence à un autre article de la Constitution

vénézuélienne. Il considère que la présence de militaires russes au Venezuela est « une violation

de la Constitution »44. Selon lui, Nicolás Maduro aurait invité une armée étrangère dans le pays

sans le consentement du Parlement vénézuélien. Toutefois, selon le droit international,

l’intervention étrangère dans le conflit interne d’un pays est légale à partir du moment où cette

dernière est sollicitée par le président lui-même45. Il est toutefois tentant de dénoncer

l’hypocrisie des États-Unis, qui apportent aussi leur soutien le plus ferme à Juan Guaidó

concernant cette accusation. Comme nous l’avons vu dans le passé, les États-Unis sont eux-

mêmes intervenus dans plusieurs pays comme la Syrie ou encore l’Irak, et bien d’autres encore,

sans aucune base légale.

Par ces divers propos avancés, les États-Unis et l’opposition sous-entendent que le

gouvernement utiliserait des armes non autorisées. Ce principe est une suite naturelle des points

précédents. L’idée est que l’ennemi ne respecte pas les règles de la guerre contrairement à eux,

qui essaient tant bien que mal de toujours véhiculer une bonne image. Ici, il est question de

supériorité technologique. En effet, celui ne possédant pas des armes assez développées,

nouvelles se verra défavorisé. Ainsi, conformément aux propos d’Anne Morelli, le désavantagé

43 Fortin, Oscar. (2019) « Lettre ouverte au Premier Ministre du Canada », Reseau International, 1 février. Disponible sur: https://reseauinternational.net/lettre-ouverte-au-premier-ministre-du-canada/?fbclid=IwAR2NDb85MT0z9xzmfshwclwdOlt-tv8IfllQUqYm5jHgdsgbGyj9aM_5O7k (consulté le: 30 juillet 2019). 44 AFP (2019p) « Venezuela: la présence de militaires russes viole la Constitution », La Libre, 26 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-la-presence-de-militaires-russes-viole-la-constitution-5c9a68659978e263331e1259?fbclid=IwAR1nukwwTDcVqX1CbirOutM49nfA3aCBsASeKhSQvLt2e2S_lXph3hs2Ffs (consulté le: 30 juillet 2019). 45 Notes prises lors de la présentation du module 2 “Le cadre juridique et l’appicabilité du droit international humanitaire” par Toni Pfanner au séminaire d’introduction au droit international humanitaire le 25 mars au Collège d’Europe à Bruges.

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n’hésiterait pas à mettre en avant que son adversaire n’est pas loyal, car il ne se bat pas avec

des outils du même niveau, mais avec celui de la Russie, une des plus grandes puissances

militaires. Il ne s’agit encore une fois que d’une tactique pour s’attirer le soutien à l’élimination

de Maduro.

Derrière toutes ces allocutions éloquentes et travaillées se cachent invraisemblablement

de réels intérêts. Les Américains prétendent vouloir intervenir pour des raisons humanitaires,

mais il semblerait que cette intervention soit bien plus qu’humanitaire. Selon la Croix-Rouge

internationale, « ce convoi ne répond pas aux critères de l’aide humanitaire définis par

l’Onu »46. Les États-Unis accompagnés de plusieurs pays latino-américains et européens tentent

de justifier cette intervention d’un point de vue moral et prétendent vouloir venir en aide aux

Vénézuéliens et mettre un terme à la misère qu’ils endurent. Ils se servent de l’intervention

humanitaire comme prétexte, car les conditions humanitaires au Venezuela sont déplorables. Il

est bien connu que les États-Unis essayent constamment de contourner, par n’importe quel

moyen, les règles de l’Onu. Mais, ils sont également les premiers à toujours vouloir s’assurer

que les autres pays respectent ces mêmes lois.

De plus, l’administration Trump avance un autre intérêt pour défendre son

interventionnisme au Venezuela. Elle déclare que le Venezuela représente une menace à

l’encontre des Américains de par sa proximité. Nous pouvons presque entrevoir à nouveau le

scénario de la guerre préventive. Cet argument lui permet à nouveau d’appuyer sa théorie de

l’intervention humanitaire. Il a pour but de persuader l’opinion publique qu’il est question de

légitime défense. Je tiens à rappeler que mes propos ne sont pas d’attaquer les États-Unis, mais

de rappeler que ce scénario est constamment répété. L’insistance sur Nicolás Maduro n’est pas

un hasard.

Il reste tout de même bien fondé et relativement pertinent de s’interroger quant à la

volonté américaine et étrangère d’une intervention humanitaire au Venezuela. Il se pourrait tout

de même que derrière ce mobile, les États-Unis ainsi que plusieurs pays latino-américains et

46 Cros, Marie.-France. (2019b) « Le chaos continue au Venezuela: des manifestations fleurissent contre la panne de courant qui paralyse le pays », La Libre, 13 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/le-chaos-continue-au-venezuela-des-manifestations-fleurissent-contre-la-panne-de-courant-qui-paralyse-le-pays-5c880c729978e2710ead4510?fbclid=IwAR3Te-sRmK5AlYKybC6_58zuHggbtsCh3q2fIo3FYnFvurKDa9UaCkJ6izQ (consulté le: 30 juillet 2019).

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européens dissimulent une tentative de déstabilisation du gouvernement. La situation est

devenue tellement désastreuse que les citoyens en viennent à appeler à une intervention

étrangère dans leur propre pays. En réalité, les États-Unis interviennent déjà au Venezuela. Par

définition, l’interventionnisme d’un pays dans un autre se caractérise par l’« intervention de

l’Etat dans le domaine économique mais aussi dans certains conflits »47. L’interventionnisme

ne se limite donc pas une intervention physique d’un Etat dans un autre. Les États-Unis ont

effectivement appliqué des sanctions économiques destructrices mais pas seulement. Comme

expliqué précédemment, ils mènent une campagne diabolique qui vise à ôter la légitimité au

gouvernement de Nicolás Maduro. Comme nous avons pu le constater avec la Syrie, le simple

approvisionnement de matériel américain est tout à fait capable de susciter une guerre civile

qui serait susceptible de faire des milliers de victimes et d’entraîner l’exode de millions de

personnes. Et, au vu des relations actuelles entre le Venezuela et les États-Unis, on ne peut que

s’attendre au pire.

Les États-Unis et ses alliés certifient vouloir apporter leur soutien au peuple

vénézuélien. Mais là n’est pas le problème. La question est celle de savoir si les États-Unis et

ses alliés ont le droit de porter atteinte de cette façon à la souveraineté du Venezuela par des

sanctions dont le réel objectif est d’affamer le pays et par une propagande qui vise à délégitimer

le président entre autres. Certes, les Vénézuéliens qui ne rejoignent pas Nicolás Maduro et

n’adhèrent pas ce dernier existent bel et bien. Mais cette situation est également présente tant

aux États-Unis que dans de nombreux autres pays. Et ce n’est pas pour autant que cela y justifie

une quelconque opération externe.

Le discours que tient le chef d’Etat Nicolás Maduro n’est autre qu’une réponse à toutes

ces attaques proférées tant bien par les partisans de l’opposition vénézuélienne que par les

représentants étrangers. Ses propos s’opposent à ses détracteurs qui exercent une pression sur

lui et remettent constamment en cause sa légitimité au pouvoir. Dans ses interventions, il est à

noter un élément symbolique important : il tend toujours à se présenter comme le plus haut

représentant du Venezuela. Au vu des circonstances qui font que nombreux sont ceux qui ne le

reconnaissent pas, il est jugé important aux yeux de Maduro de rappeler qui il est vraiment pour

réaffirmer la position du Venezuela sur la scène mondiale. Le rappel qu’il fait à Juan Guaidó,

47 Définition : interventionnisme (sans date) Linternaute. Disponible sur: https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/interventionnisme/ (consulté le: 30 juillet 2019).

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qui est que ce dernier doit « respecter la loi » et « rendre des comptes à la justice »48 à son retour

au pays, illustre parfaitement cette volonté. Il s’adresse aussi indirectement au monde, mais

surtout à aux médisants en disant qu’il ne lâchera pas face aux pressions.

Désormais, le président semble être sur la défensive. Dans plusieurs de ses prises de

parole, il revendique ouvertement être victime d’attaques américaines mais aussi européennes.

De fait, il dénonce l’attaque terroriste psychologique et l’attaque cybernétique de la puissance

américaine qu’il qualifie à maintes reprises d’« impérialiste ». En d’autres termes, par

l’utilisation de ce terme, le président soupçonne clairement les États-Unis de vouloir réduire le

Venezuela à leur dépendance économique et politique. Il dit également s’être fait voler par

l’Europe. Par ces accusations, Nicolás Maduro tente à son tour de faire découvrir l’envers du

décor. Il n’est certes lui-même pas parfait, mais les autres sont loin de l’être également.

Toutefois, malgré toutes ses attaques à l’encontre des États-Unis et de l’opposition, une volonté

de redonner de l’espoir et d’apaiser les tensions est également à noter dans ses interventions. Il

informe tout de même que des discussions ont lieu entre les deux pays afin de trouver des points

d’entente. Il assure qu’ils sont un peu plus « proches » grâce à « des semaines de

conversations »49 entre eux. Il se montre notamment ouvert, en quelque sorte, à la discussion

avec l’ennemi, et par conséquent à certains changements comme à l’organisation d’élections

plus tôt que prévu par exemple.

Dans son discours, nous retrouvons un des principes de propagande de guerre qui n’a pas

encore été évoqué : « Ceux qui doutent manquent de patriotisme et sont des traîtres »50. Nicolás

Maduro déclare qu’il n’« hésiterait pas » à punir les « traîtres »51 qui tentent de générer un

48 AFP (2019b) « Acclamé à son retour au Venezuela, Guaido maintient la pression sur le régime », La Libre, 4 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/acclame-a-son-retour-au-venezuela-guaido-maintient-la-pression-sur-le-regime-5c7d8c2f7b50a607244190d7?fbclid=IwAR1NgmxU7pJdVVSV76SJDTkK4OZe8aVPg-ufxQbLL5VQOyhCnPnjTjqqyUI (consulté le: 30 juillet 2019). 49 AFP (2017a) « Le Venezuela accuse les Etats-Unis de “terrorisme psychologique” », La Libre, 25 septembre. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/le-venezuela-accuse-les-etats-unis-de-terrorisme-psychologique-59c9171bcd70a8c26d2750de?fbclid=IwAR3zlN0NhKuQMtL2s6jha7_F55PDnT73ARFiOff_2ckYemo7-CBq-HEdY6Q (consulté le: 30 juillet 2019). 50 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor. 51 AFP (2019j) « Venezuela : Maduro appelle l’armée à combattre “tous les putschistes” », La Libre, 2 mai. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/venezuela-maduro-appelle-l-armee-a-combattre-tous-les-putschistes-5ccaf2169978e25347cc7884?fbclid=IwAR1NgmxU7pJdVVSV76SJDTkK4OZe8aVPg-ufxQbLL5VQOyhCnPnjTjqqyUI (consulté le: 30 juillet 2019).

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soulèvement militaire. Le président maltraite Julio Borges de traître pour être complice de

l’organisation d’un attentat contre son gouvernement. La théorie met en avant le principe que

ceux qui doutent et trahissent se verront traiter différemment : ils deviendront les parias de la

société. Les traîtres de Maduro se verront ainsi rejeter par une partie du peuple qui le soutient.

Il est bien connu qu’en temps de conflit, une hausse du patriotisme se manifeste et devient un

signe de reconnaissance, d’amour et de soutien pour le pays. Ainsi, toute personne s’opposant

au gouvernement vénézuélien deviendrait un traître non patriotique, c’est-à-dire le méchant qui

ne soutient pas son pays et qui au contraire est un complice de l’ennemi qui tente de semer le

chaos.

Généralement, les journaux ne font pas appel à des intervenants aux idées contraires aux

discours qu’ils tiennent. À quelques exceptions près, au sein des articles de notre corpus, aucun

intervenant ne critique l’opposition. Toute personne prenant le risque de s’opposer à la vision

américaine et européenne, qui est de soutenir Juan Guaidó, devra en assumer les conséquences.

Son nom sera traîné dans la boue et fera l’objet de milliers de critiques. Par conséquent, bien

qu’il existe en Europe et aux États-Unis des personnes en faveur de Nicolás Maduro, elles ne

veulent pas risquer d’être diffamées et préfèrent ainsi garder leur opinion privée. Selon Anne

Morelli, « les médias dépendent si étroitement des autorités politiques qu’il leur est impossible

dans un moment délicat d’assurer un vrai pluralisme »52.

4.2. Le rôle de la presse dans le processus de co-construction au débat

Dans cette partie, nous allons tenter de comprendre comment la presse participe au débat

sur la crise politico-économique vénézuélienne et l’influence en analysant les différentes

questions posées par les journalistes à leur invité. Le journaliste joue un rôle important dans le

débat, car c’est lui qui l’anime à l’aide de questions bien déterminées qui ont pour rôle

d’orienter les réponses de l’interviewé dans une direction bien précise. Cette mission

d’information va également influencer la réception du discours chez le lecteur et préparer

l’opinion publique aux événements. La presse va ainsi participer à la création d’un mouvement

d’opinion publique et le contrôler.

52 Morelli, Anne. (2001) Principes élémentaires de propagande de guerre (utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède...). Labor.

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« Guerre d’usure au Venezuela »

Il s’agit d’une entrevue réalisée par le journaliste Jacques Besnard avec Frédérique Langue,

directrice de recherche au centre national de la recherche scientifique (CNRS) et spécialiste de

l’histoire sociale, politique et culturelle du Venezuela.

Depuis la tentative de viol d’une étudiante sur le campus de San Cristobal à l’ouest du pays, le

Venezuela est secoué par un mouvement de protestation. Quelles sont les causes de cette

révolte ?

Avant de poser sa question, le journaliste met en évidence l’événement d’un viol d’une

étudiante ainsi que le fait que ce n’est que depuis cet événement que le pays connaît un

mouvement de protestation. Le journaliste répond déjà d’une certaine façon à la question qu’il

pose par la suite à Frédérique Langue. Il sous-entend qu’avant cette tragédie, il n’y avait pas de

mouvement de protestation. Il y a ici une volonté de mettre l’accent sur le fait que le chaos n’a

commencé que sous la gouvernance de Nicolás Maduro et qu’avant ce dernier, le calme régnait,

ou du moins en grande partie. Toutefois, nous savons pertinemment que cela n’est pas

totalement vrai, car il existait déjà un mouvement de protestation sous Chavez. L’incapacité à

mener à bien sa mission de président socialiste est en quelque sorte pointée du doigt.

C’est compliqué pour Maduro de passer après Hugo Chavez ?

Le journaliste émet déjà un élément de réponse dans sa question. Cette dernière n’a pas

la structure syntaxique prototypique de la phrase interrogative. La façon dont il la pose est

similaire à la construction d’une phrase affirmative. En réalité, il n’a fait qu’ajouter un point

d’interrogation à celle-ci pour lui donner la tournure d’une phrase interrogative. Il insinue qu’il

est clairement difficile d’arriver au pouvoir après un leader aussi charismatique d’Hugo Chavez.

Le charisme de Maduro est remis en question.

Le Venezuela est pourtant l’un des plus gros pays producteurs de pétrole ?

À la lecture de cette question, celle-ci n’a pas non plus, a priori, aucune caractéristique

de la phrase interrogative à l’exception du point d’interrogation en fin de phrase. Encore une

fois, la question se fait par la modalité assertive : nous avons l’impression qu’au contraire, le

journaliste affirme quelque chose. Le propos de cette affirmation est assez polémique. Il

semblerait que le journaliste se cache derrière son rôle de porte-parole et en profiterait donc

pour évoquer des thèmes injurieux concernant le gouvernement vénézuélien. La présence de

l’adverbe pourtant est également à relever. Il marque l’opposition du journaliste face à la crise

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humanitaire qui touche le peuple vénézuélien. Cette utilisation de l’adverbe pourtant porte à

croire que le journaliste soupçonne Maduro de corruption par exemple.

Les deux questions suivantes : Qui sont les manifestants ? et Quelle figure s’impose en

face de Maduro ? semblent à première vue un peu plus neutres et objectives que les précédentes.

Certes, le journaliste laisse entrevoir une porte ouverte à une multitude de réponses possibles

par ces questions, mais le lexique utilisé a interpellé notre attention. Dans la deuxième question,

le verbe s’imposer est utilisé pour signifier se présenter. Par définition, s’imposer a pour sens

de « se faire accepter de force quelque part »53. Ainsi, le journaliste tenterait de rappeler derrière

ces questions faussement transparentes que le président Nicolás Maduro serait un dictateur et

fraudeur illégitime qui ne laisserait personne se présenter face à lui. Ces deux questions font

partie de la méthode empirique des cinq W (Who, what, where, when et why). Elles permettent

de mieux cibler dès le début de l’interview les informations et les circonstances importantes à

la construction du débat.

La presse a également été muselée ?

Le journaliste revient à la charge avec une question des plus implicites. La façon dont il

a rédigé son propos laisse penser qu’il affirme le fait que la presse a été empêchée de s’exprimer

et n’attend simplement qu’une confirmation de la part de son interviewée. Il tente de faire

ressortir l’atteinte aux libertés individuelles du gouvernement en l’accentuant par l’emploi de

l’adverbe également qui confère l’idée de surcharge, de trop d’atteintes aux libertés commises.

Les relations diplomatiques entre le Venezuela et les États-Unis se sont crispées. Trois agents

consulaires américains ont été expulsés accusés de « conspiration ». Récemment, Maduro a

accusé John Kerry d’encourager les manifestations. Les États-Unis restent toujours vus comme

l’ennemi ?

Selon Nowakowska et Bres54, la structure de cette question comporte, dans un premier

temps, un thème général suivi d’un jugement rapporté et d’une interrogation. Le journaliste

53 Définition : s’imposer (sans date) Larousse. Disponible sur: https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/s_imposer/41962?fbclid=IwAR0gT33EMPBzuLsYSXSO51d2i82xnxDzaebKE2xv-GZXBDfIUdrPGJ0ygX0 (consulté le: 30 juillet 2019). 54 Nowakowska, Aleksandra. et al. (2011) « Poser des questions ce n’est jamais un scandale ! Interview politique, question contrediscursive médiée et polémique », La parole politique en confrontation dans les médias. De Boeck Supérieur, p. 69-87. doi: 10.3917/dbu.miche.2011.01.0069ï (consulté le 30 juillet 2019).

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reformule les accusations et les présente comme des évidences. De plus, le mot conspiration est

mis entre guillemets, ce qui témoigne d’une prise de distance du journaliste par rapport à ce

propos et marque son désaccord. Dans sa question, il présente les États-Unis comme les

victimes d’une diabolisation organisée par le gouvernement vénézuélien.

Comment peut évoluer la situation ?

Cette question tend à montrer l’implication du journaliste dans la résolution du conflit

vénézuélien. Il veut montrer qu’il est possible de transformer cette situation désastreuse en une

situation nouvelle et meilleure. Par évoluer, il est sous-entendu un changement crucial dans le

pays, comme un changement de gouvernement, par exemple, qui va permettre au pays d’enfin

voir la lumière au bout du tunnel. Poser ce genre de question en fin d’interview va également

permettre au lecteur de considérer la réponse de la spécialiste du Venezuela comme une

conclusion et une solution à ces problèmes.

Dans l’article « Au Venezuela, des gens meurent à cause des pénuries de nourriture

ou de médicaments », l’invité du journal La Libre n’est autre qu’Antonio Ledezma, le maire

de Caracas mais également l’un des opposants le plus virulent du président Nicolás Maduro.

Antonio Ledezma a fui son pays, car il était en résidence surveillée.

Comment avez-vous réussi à fuir alors que vous étiez assigné à résidence et donc sous contrôle

policier ?

Avec cette question, l’intervieweur veut montrer que le gouvernement de Maduro

exerce réellement une pression sur les partisans de l’opposition en allant jusqu’à les surveiller

chez eux et en les privant ainsi de toute liberté. Ce propos sous-entend que le gouvernement

exerce une forme d’oppression sur son peuple et encore plus sur ceux qui oseraient le défier.

L’énorme bravoure et le courage d’Antonio Ledezma sont mis en lumière. Ce dernier aurait

tout de même pris le risque de mettre sa vie en péril en décidant de fuir pour retrouver la liberté

individuelle qui lui avait été ôtée.

Cela fait donc quatre mois environ que vous avez fui votre pays. Avez-vous eu des contacts avec

vos amis et votre famille au Venezuela ?

Dans un premier temps, l’emploi du verbe fuir sous-entend que le maire de Caracas a

quitté le Venezuela pour échapper aux obstacles qui auraient été dressés sur son chemin par le

gouvernement. Le journaliste poursuit en lui demandant s’il est parvenu à parler avec ses

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proches restés au Venezuela. Cette question laisse penser qu’il est relativement difficile d’entrer

en contact avec les Vénézuéliens et d’obtenir des informations relatives à la situation étant

donné les rumeurs qui courent concernant le gouvernement qui s’assurerait que les informations

sur la crise ne fuitent pas. Encore une fois, l’atteinte à la liberté d’expression est dissimulée

derrière une question implicite.

Comment faites-vous depuis l’extérieur pour essayer de changer la situation de votre pays ?

Le rédacteur se demande s’il existe une possibilité d’agir à distance. Cette question

suggère que même en étant hors du Venezuela, le maire de Caracas continue de mener à bien

son devoir d’opposant et d’être impliqué et qu’il se soucie de la situation de son pays même s’il

n’y réside plus. Il veut savoir s’il agit directement sur le Venezuela ou s’il fait appel à des

acteurs externes pour lui venir en aide.

Vous avez utilisé le mot « génocide » pour décrire la situation dans le pays. Est-ce le bon

terme ?

Le journaliste lui demande de revenir sur un terme fort qu’il a employé lors d’une

précédente prise de parole sur la situation au Venezuela. Le journaliste désire qu’Antonio

Ledezma revienne avec de plus amples détails sur le terme de « génocide » qu’il a utilisé pour

décrire ce qu’il se passait dans son pays, ce qui va permettre de frapper les esprits. Le journaliste

reprend ce mot très fort et lui demande s’il est approprié. Il prétend vouloir s’assurer de

l’exactitude du terme pour caractériser la situation du Venezuela. Toutefois, ce qui l’intéresse

est d’obtenir une explication plus détaillée de la notion de génocide afin que soient exposées

dans la réponse les similitudes de cette notion à la situation qui se déroule au Venezuela. En

ressortant ce mot, il essaie de sensibiliser les gens en mettant l’accent sur le mot génocide, un

mot qui ressasse toute une série d’événements sanglants. C’est aussi en quelque sorte une

question rhétorique, car le journaliste connaît au préalable les positions politiques de son invité

et sait pertinemment qu’il ne va pas répondre négativement à la question « est-ce le bon

terme ? ».

Depuis plusieurs années, il y a des manifestations monstres contre le pouvoir mais Nicolás

Maduro se maintient malgré tout. Pourquoi ?

Premièrement, l’utilisation du mot pouvoir pour qualifier le gouvernement est connotée

négativement et fait penser à un gouvernement dictatorial. Le fait de mentionner que les

manifestations durent depuis plusieurs années montre que cela fait longtemps que rien ne va

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dans le pays, et surtout que rien ne change pour améliorer cela. Le mot monstre est un terme

fort et négatif qui permet de renforcer l’idée de l’incapacité de Maduro. Le syntagme « Maduro

se maintient malgré tout » illustre l’image d’un homme de pouvoir autocrate qui refuse de

laisser sa place à quelqu’un d’autre malgré toutes les raisons qui le justifient. Le journaliste

dépeint l’image d’un président qui ne veut pas céder le trône. La question « pourquoi ? » vise

à diriger la réponse du maire vers le concept de dictature.

Pensez-vous que le pouvoir vénézuélien s’affaiblit ou se renforce ?

Encore une fois, il réfère au gouvernement vénézuélien en le qualifiant de pouvoir. Ici,

il s’agit d’une question à double sens : le journaliste veut montrer pourquoi le gouvernement

s’affaiblit mais également de quelle façon il essaie de se renforcer. En d’autres termes, par

affaiblissement il présume que le gouvernement sous Maduro est moins efficace et par

renforcement, qu’il s’est transformé en gouvernement autoritaire.

L’Union européenne a pris des sanctions contre sept responsables du régime de Maduro. Que

pensez-vous de ces sanctions ? Doit-on aller plus loin ?

Il est montré que même l’Union européenne est impliquée dans le conflit. Il affirme que

ces personnes sont coupables et le montre en utilisant instinctivement le terme « responsables

». Cette fois, il recourt au mot régime, qui est également très négativement connoté. Nous

sommes dans la même logique que pour le mot pouvoir, explicité précédemment. Il sous-entend

que les sanctions peuvent aller plus loin et que celles qui ont été émises à leur égard ne sont

peut-être pas assez efficaces et qu’il faudrait sévir. De plus, il emploie le « on » inclusif et met

dans le même sac tous les Européens. Il fait une généralisation et sous-entend que tous les

Européens, dont lui, sont opposés à Maduro et favorables aux sanctions contre lui.

Certains demandent une intervention militaire étrangère. Que pensez-vous de cette solution ?

Il utilise le terme « solution », ce qui implique qu’il considère la demande d’intervention

militaire étrangère comme bénéfique pour le Venezuela. Par ailleurs, il est à se demander s’il

ne poserait justement pas cette question pour venir à parler des interventions étrangères déjà

sur place qui semblent poser problème à certains. Le journaliste veut savoir si Ledezma désire

qu’une intervention militaire étrangère intervienne au Venezuela. Il suggère que la guerre est

peut-être la solution à ce conflit interne.

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52

« La société n’a jamais été aussi individualiste au Venezuela, parce qu’on est dans la survie,

dans la misère »

L’interview avec Frédéric Lévêque, spécialiste du Venezuela et fondateur du site Barril.info,

est considérablement plus longue que les autres. Par conséquent, nous allons tenter de regrouper

les idées principales du rôle de la presse dans le processus de co-construction au débat.

Au début de l’interview, le journaliste utilise la méthode de questionnement QQOQCCP

(Quoi, Qui, Où, Quand, Comment, Combien, Pourquoi). Elle est généralement utilisée par les

journalistes pour s’assurer que l’article qui sera rédigé à la suite de cette interview répondra à

la problématique de ce dernier.

La situation au Venezuela empire jour après jour. Comment les gens arrivent à survivre ?

Le journaliste pointe du doigt la gravité des événements et en vient à se demander

comment les citoyens parviennent à rester en vie malgré la crise alimentaire et humanitaire. La

vie n’est plus normale au Venezuela, c’est devenu la survie. Il est question de vie ou de mort.

Et c’est comme ça depuis quand ? Depuis Maduro ?

Le journaliste interroge Fréderic Lévêque en lui demandant depuis quand la situation

est désastreuse. Il poursuit en demandant si c’est « depuis Maduro ». Il y a comme une volonté

de la part du journaliste de décharger la responsabilité de ce chaos sur le président mis en place.

Il attend que le spécialiste confirme son hypothèse en fournissant de plus amples détails. Il

pointe du doigt Maduro et requiert une explication temporelle des événements afin de présenter

la dégradation du Venezuela. Il se demande si Maduro est l’unique coupable ou s’il existe

d’autres facteurs qui ont contribué à cette crise.

Mais pourquoi ces sanctions, alors que des gens meurent de faim ?

Avec cette question, le journaliste marque une opposition aux propos de l’intervenant. De

fait, il semble remettre en question les initiatives des acteurs étrangers visant à aider le peuple

vénézuélien. De plus, l’hyperbole « meurent de faim » est à relever. Cette figure de style

consiste à exagérer l’expression d’un sentiment extrême et permet de provoquer une réaction

forte parmi le public.

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53

C’est assez limité comme moyen de pression ?

Le journaliste considère que les mesures prises par l’Union européenne ne sont pas assez

sévères et n’amélioreront pas la situation. Il laisse sous-entendre que les sanctions de l’Union

européenne devraient être différentes, voire plus réfléchies.

« En plus, ça permet au gouvernement de pointer un ennemi, de fédérer autour d’une cause, de

désigner un coupable étranger »

Cette intervention montre que le journaliste n’a pas vraiment d’estime pour Nicolás

Maduro et qu’il le considère comme le principal et unique responsable de la crise économique,

car il rétorque en disant que Maduro va tenter de remettre la faute sur quelqu’un d’autre alors

que c’est la sienne. Ici, il accuse clairement Maduro de se dédouaner de toutes responsabilités

et de se faire passer pour une victime en pointant un ennemi. Il y a également l’idée que Maduro

pourrait manipuler son peuple. Il est important de préciser que le coupable serait « étranger »,

car c’est ce qui aiderait particulièrement Maduro. En effet, pour obtenir la confiance de son

peuple, il est toujours plus facile de pointer un étranger dont il faut se méfier. Maduro jouerait

sur le nationalisme.

« Mais même si c’est faux, ces sanctions légitiment les propos de Maduro… »

De façon générale, le journaliste prend clairement position en disant que les sanctions

économiques américaines ne sont pas les causes des problèmes économiques du pays. Il laisse

sous-entendre que Maduro serait à l’origine de ces problèmes. Il ajoute également que les

sanctions américaines aident Maduro à se faire passer pour une victime et que donc les sanctions

économiques ne sont peut-être pas un si bon moyen de pression contre lui.

« Et la crise, c’est depuis quand alors ? »

Désormais, le journaliste parle de « crise » économique. Dans son interview, il sépare

politique et économie et adopte des positions différentes selon le domaine. En scindant la crise

économique de celle politique, il veut certes montrer que la crise politique a explosé sous la

gouvernance de Maduro, mais que le problème de base est bel et bien la crise économique, qui

était présente bien avant la crise politique.

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54

« Alors que le pétrole était au plus haut, c’est assez paradoxal »

Le journaliste sous-entend la présence d’une faille quelque part dans la gestion du

système économique. Le terme « paradoxal » illustre très bien cette idée. Il semblerait qu’il

accuse indirectement le gouvernement d’éventuel vol ou de corruption.

« Et les États-Unis qui avaient recommencé à exporter du pétrole, mais si faiblement, n’ont-ils

pas maintenu un moment les prix assez bas, pour étrangler le pays ? »

Une fois de plus, il émet des doutes sur les États-Unis en demandant s’ils n’ont pas,

d’une certaine façon, cherché à étrangler l’économie du pays. « Recommencer » sous-entend

qu’ils avaient déjà fait de l’exportation auparavant. Cette question montre la concurrence et la

puissance des États-Unis.

« À leurs alliés, comme Cuba ? »

Il cite Cuba comme étant leur allié et montre indirectement la similitude entre les deux

gouvernements, qui sont tous deux socialistes. En effet, il a toujours existé une relation étroite

entre les deux gouvernements.

« Et à l’intérieur du pays, comment ça se passe ? »

Le journaliste revient sur les problèmes internes du Venezuela. Il suppose que le

spécialiste connaît très bien la situation au Venezuela puisqu’il y a vécu et a même des proches

qui y vivent encore.

« Et les opposants, dans le peuple ? »

Il incite ici l’expert à se focaliser sur les supporters de l’opposition qui résident au

Venezuela et plus sur ceux de l’étranger.

« Que répondez-vous à ceux qui rétorquent que le Venezuela est à la pointe, au niveau social ? »

Le journaliste encourage avec cette question le spécialiste à attaquer et à démontrer à

ceux qui défendent le gouvernement qu’ils se trompent totalement. L’utilisation de l’expression

« à la pointe » ressemble à une exagération. Elle sert à persuader que ceux qui ne sont pas contre

le gouvernement sont dans l’extrême en considérant que le social est au top niveau, ce qui va

faciliter la décrédibilisation de ces derniers. En précisant « au niveau social », il semblerait

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55

aussi que ceux qui défendent le gouvernement n’ont plus beaucoup d’arguments autres que

celui-ci.

« Et la violence, c’est dû à la pauvreté ? »

Il affirme que pays est bel et bien déstabilisé économiquement en parlant de pauvreté.

Il évoque la violence, ce qui laisse penser que le gouvernement n’est plus capable de contrôler

la sécurité des citoyens. Il semble affirmer que c’est lié. En posant cette question, il veut pousser

le spécialiste à parler d’autres raisons qui contribuent ou ont contribué à la violence avant et

pendant Maduro. Est-ce que seule l’époque de Maduro est marquée par la violence ou ça l’a

toujours été ?

« Au Venezuela, le pouvoir et l’opposition capitalisent sur l’attentat qui aurait visé Nicolás

Maduro »

Il s’agit d’un entretien avec Franck Gaudichaud, spécialiste de l’Amérique latine et chercheur

à l’université Grenoble-Alpes, où il analyse le « jeu de communication sur la véracité de

l’attentat ».

L’opposition pointe une mise en scène du gouvernement. Nicolás Maduro se dit victime d’une

tentative d’assassinat. Lequel de ces scénarios est plus vraisemblable ?

La journaliste fait part des arguments propres à chaque camp et sollicite Franck

Gaudichaud pour savoir lequel de ces deux scénarios serait le plus vraisemblable. En

demandant lequel semble vrai et en qualifiant ces affirmations de « scénarios », elle sous-entend

qu’aucune des versions n’est vraie et qu’elles ont été montées de toute pièce, cependant une des

deux est plus plausible que l’autre. Elle utilise également la formule « se dit victime » qui reflète

une certaine méfiance de sa part à l’égard des propos de Nicolás Maduro. Elle poursuit avec la

question suivante : « Quelle interprétation sera la plus convaincante aux yeux de la

population ? ». Encore une fois, elle joue sur la fiabilité des informations avancées par les deux

partis.

Comment les acteurs politiques vont-ils tirer un bénéfice de cette crise ?

Elle sous-entend que derrière cette crise, il y a des intérêts pour tous et que ce qui

intéresse les acteurs politiques n’est autre, en réalité, que les intérêts économiques et politiques.

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4.3. Analyse des interviewés

« Guerre d’usure au Venezuela »

L’entrevue a été menée auprès de Frédérique Langue, une spécialiste du Venezuela.

La spécialiste attribue le blâme de la crise au Venezuela à Nicolás Maduro. Bien qu’elle

précise à plusieurs reprises que la crise existait bel et bien avant son arrivée au pouvoir, elle

tient à insister sur le fait que cette dernière s’est « aggravée »55 sous sa présidence. Néanmoins,

elle semble légitimer les erreurs commises par Hugo Chavez, l’ex-président du Venezuela, sous

prétexte que lui était un leader charismatique. Elle affirme manifestement que Nicolás Maduro

est « peu charismatique »56, et que pour cette raison, il n’aurait pas droit à l’erreur. Elle parle

en chiffres notamment, car il est toujours bien vu d’ajouter des statistiques pour rendre valable

son discours

Dans l’ensemble, ses réponses contiennent de nombreuses phrases à la forme négative.

Nous pouvons considérer les actes négatifs comme de véritables actes de langage jouant un rôle

important dans la signification d’un discours. En donnant cette interview, Frédérique Langue

s’adresse au journaliste, mais plus particulièrement aux lecteurs. L’utilisation de propositions

négatives indique forcément le rejet de propositions positives et montre que la spécialiste

témoigne en faveur de l’opposition. « La population n’a plus de quoi vivre tout simplement »,

représente une opposition, un contre-argument à un propos proféré par des gens qui défendent

le gouvernement. La négation va mettre en exergue le caractère négatif de Maduro et va donc

influencer l’interprétation des lecteurs. Elle continue en déclarant que « Maduro n’a pas su

redistribuer à la population l’argent du pétrole » et que « des investissements n’ont pas été faits

»57. L’énonciation de ces phrases négatives permet d’atteindre le destinataire et d’attirer son

attention. Il va donc remettre en question les assertions auxquelles l’experte s’oppose. Enfin, la

présence abondante de phrases négatives témoigne d’une volonté de représenter la négativité

des événements.

55 Besnard, Jacques. (2014) « Guerre d’usure au Venezuela », La Libre, 17 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/guerre-d-usure-au-venezuela-5326fb3b35707711f4a768c3?fbclid=IwAR3Wuj4bnW0VOZKh4tT_IgTYey086ndsarhm4IgfHtmvcLuXwLyYK8dXyTU (consulté le: 30 juillet 2019). 56 Ibidem. 57 Ibidem.

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57

Le champ lexical employé par cette dernière est également alarmant. Les substantifs qui

se rapportent à la réalité qu’elle décrit sont connotés très négativement. Ils appartiennent tous à

cette même notion de désastre. Dans ses propos, nous pouvons relever des mots dépréciatifs

tels que « grogne », « crise », « aggravée », « problème » ou encore « mal » par exemple. Ce

repérage permet de comprendre et d’interpréter les sentiments ainsi que les intentions du

locuteur. Avec un réseau lexical négatif, il est possible de créer pour celui qui le lit un climat

de méfiance et d’hostilité. Les mots permettent de déformer le regard qu’on porte sur quelqu’un

ou sur une situation. Il y a de grandes chances de se retrouver avec un lectorat hostile à Nicolás

Maduro en ressassant le fait que Maduro est un incapable et un corrompu dépourvu de charisme.

Elle présente les États-Unis comme des victimes du gouvernement vénézuélien. Elle

prétend que ces derniers ont en fait toujours été diabolisés par le gouvernement socialiste

vénézuélien. Elle dit que c’est une stratégie mise en place par le gouvernement pour recruter

des adeptes. Selon elle, « c’est un discours convenu qui mobilise les partisans »58. Ici, il s’agirait

d’un contre-argument au discours anti-impérialiste qui serait, conformément à ses propos, de

« dénoncer le rôle des États-Unis dans la région »59.

Elle émet un jugement négatif sur le gouvernement et parle d’« entraves à la liberté de la

presse écrite »60. Elle affirme que les journaux de l’opposition ne sont que très peu publiés

contrairement à ceux proches du gouvernement. Il semblerait que la presse de l’opposition

doive recourir à Internet pour transmettre l’information. De plus, elle accuse la fermeture de

plusieurs maisons de presse qu’elle ne considère pas comme légitime et qui aurait été faite par

des moyens détournés. Enfin, madame Langue ne désire pas se prononcer davantage quant au

futur du Venezuela, mais laisse toutefois penser qu’il n’y aurait pas de solution au conflit en

raison d’un gouvernement omnipotent.

58 Besnard, Jacques. (2014) « Guerre d’usure au Venezuela », La Libre, 17 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/guerre-d-usure-au-venezuela-5326fb3b35707711f4a768c3?fbclid=IwAR3Wuj4bnW0VOZKh4tT_IgTYey086ndsarhm4IgfHtmvcLuXwLyYK8dXyTU (consulté le: 30 juillet 2019). 59 Ibidem. 60 Ibidem.

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58

« Au Venezuela, des gens meurent à cause des pénuries de nourriture ou de médicaments »

Il s’agit d’un entretien avec le maire de Caracas, Antonio Ledezma, exilé depuis maintenant

deux ans à Madrid. Dans le chapeau de l’article, le journaliste fait dès le début part des

intentions de son invité. En effet, il rappelle que monsieur Ledezma n’est autre que « l’un des

opposants les plus virulents au président Nicolás Maduro »61.

Pour faire dans l’originalité, Antonio Ledezma dénonce la dictature vénézuélienne au

pouvoir selon lui. Au début de l’interview, il pointe l’omnipotence du gouvernement en

expliquant comment il est finalement parvenu à s’échapper du Venezuela. Ce dernier fait

comprendre qu’il fut relativement compliqué de s’échapper puisqu’il était sous surveillance

dans sa propre résidence. Il qualifie cette étape d’« odyssée digne d’un film »62. La traversée

fut particulièrement longue et sous haute surveillance : il a passé 24 heures, précise-t-il, à se

faire contrôler par les militaires et paramilitaires du gouvernement. Toutefois, il serait parvenu

à sortir du pays grâce à l’aide de l’armée. Il veut montrer ici que même ceux qui travaillent pour

le gouvernement sont prêts à le trahir. Au fil des questions, il continue d’insister sur le fait que

le gouvernement de Maduro est une dictature. Il explique dans une de ses réponses que le

gouvernement se renforce et « devient de plus en plus féroce, violent et pervers »63. Le maire

de Caracas se dit préparer l’après-Maduro avec l’aide de ses compères en formant les gens afin

qu’ils soient prêts « le jour où la démocratie fera son retour ». Il veut clairement dire par cette

phrase qu’actuellement, il n’y a aucune démocratie au Venezuela et que bien au contraire, c’est

l’autoritarisme qui y règne.

Dans ses interventions, Ledezma attribue des intentions pernicieuses, négatives et

mauvaises à Nicolás Maduro et son gouvernement. Selon lui, les conditions de vie au Venezuela

sont devenues plus qu’insupportables et surtout très dangereuses. Il explique que sa famille a

été contrainte de fuir le Venezuela, car le gouvernement avait l’intention de s’en prendre à elle.

Il n’hésite pas à dénoncer le non-respect des droits de l’homme. De fait, il signale l’atteinte aux

61 Besnard, Jacques. (2018) « Au Venezuela, des gens meurent à cause des pénuries de nourriture ou de médicaments », La Libre, 24 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/au-venezuela-des-gens-meurent-a-cause-des-penuries-de-nourriture-ou-de-medicaments-5ab3962fcd702f0c1a755e92?fbclid=IwAR0WRxuNEsjBjlSz8rXL-Y73gHDBeqKvxmELXHZljCjxvxjNd5MHdjQGCtY (consulté le: 30 juillet 2019). 62 Ibidem. 63 Ibidem.

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59

libertés individuelles du peuple. Ce dernier serait en effet victime de l’abus de violence des

forces de l’ordre et privé de liberté d’expression. Se trouvant désormais à l’extérieur du

territoire, il nous informe qu’il communique « dans la mesure du possible »64 avec ses amis

restés au pays. Cependant, il essaie de rassurer le public et déclare qu’avec d’autres opposants

en exil, ils travaillent sur le changement de la situation en se focalisant sur des points importants

tels que la « diaspora », les hommes politiques corrompus et les droits de l’homme. Il demande

également à la communauté internationale d’appliquer des sanctions plus dures et réclame une

aide humanitaire internationale. Finalement, il utilise une multitude de termes dépréciatifs pour

parler de Maduro et de son gouvernement. Il dit de Maduro qu’il est « cynique » et « responsable

» de la crise et que ses hommes sont coupables de « terrorisme », « de corruption » et « de

crimes contre l’humanité »65. Et d’après lui, « les hommes au pouvoir ont volé de l’argent

public ».

Il parle également de la mauvaise gestion du président Nicolás Maduro. Comme

mentionné précédemment, selon Ledezma, le président est responsable de la descente aux

enfers du Venezuela. Il raconte que le gouvernement est devenu plus faible, car désormais il

doit faire face à une crise humanitaire, à des tensions entre les socialistes et au chantage de

l’opposition. Il crédibilise cet argument en disant que même les partisans du chavisme se sont

retournés contre Maduro. Il présente son camp comme les bons et celui de Maduro comme les

mauvais qui n’arrivent pas à résoudre les problèmes qui persistent et qui sont en réalité causés

par eux. Il planche sur l’élaboration d’un nouveau plan de gestion de l’économie, ce qui tend

clairement à montrer qu’il pense que Maduro est un incapable qui ne sait absolument assumer

son rôle de président.

« La société n’a jamais été aussi individualiste au Venezuela, parce que qu’on est dans la

survie, dans la misère »

Dans cette interview, Frédérique Lévêque, spécialiste du Venezuela, examine plus

particulièrement la situation économique du Venezuela.

64 Besnard, Jacques. (2018) « Au Venezuela, des gens meurent à cause des pénuries de nourriture ou de médicaments », La Libre, 24 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/au-venezuela-des-gens-meurent-a-cause-des-penuries-de-nourriture-ou-de-medicaments-5ab3962fcd702f0c1a755e92?fbclid=IwAR0WRxuNEsjBjlSz8rXL-Y73gHDBeqKvxmELXHZljCjxvxjNd5MHdjQGCtY (consulté le: 30 juillet 2019). 65 Ibidem.

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L’expert confronte souvent la situation du présent à celle du passé. En effet, il examine

scrupuleusement les rapports de différence et de ressemblance entre la présidence d’Hugo

Chavez et celle de Nicolás Maduro. Il confie au journaliste qu’auparavant, l’ensemble des

circonstances n’était pas aussi déplorable que maintenant. À présent, l’heure est grave au

Venezuela. Les biens de première nécessité sont devenus introuvables sur le territoire et

l’insécurité alimentaire affecte la grande majorité de la population. Mais encore, la crise s’est

muée en urgence sanitaire. Il existe une pénurie de médicaments vitaux qui empêche de guérir

même les maladies les plus communes. Ces conditions épouvantables forcent les gens à quitter

leur foyer et à partir à l’étranger pour survivre. Même les gens diplômés de l’université avec

théoriquement un avenir devant eux ne peuvent pas rester.

À son tour, il stigmatise Maduro lors de son entretien avec La Libre. D’après lui, le président

ne serait qu’en partie responsable, mais aurait envenimé les choses. Il ne cautionne pas la

mainmise du gouvernement Maduro sur le pouvoir. Il déclare que cela fait désormais « 20 ans

qu’ils sont au pouvoir avec un contrôle total de l’économie et des forces armées ». Ces propos

suggèrent la volonté de voir disparaître le socialisme mais aussi que le gouvernement a

véritablement la forme d’une dictature. Il insiste sur cette idée d’autoritarisme en allant jusqu’à

le distinguer de Salvador Allende, le président du Chili, à qui le gouvernement ne peut se

comparer, car lui n’est resté au pouvoir que pendant une durée de 3 ans. Il déclare qu’en 2015,

le gouvernement aurait fait les pires choses à l’Assemblée nationale, car celle-ci était contrôlée

par l’opposition. Dans une réponse à une question posée par le journaliste, il évoque les mots

forts et saisissants suivants : « renforcer leur radicalisme ». Il sous-entend par-là que le

gouvernement est déjà radical, mais qu’il va le devenir davantage. La question à se poser est

s’il est possible de devenir plus que radical. Il essaie de montrer que la situation peut toujours

devenir pire. Son idée rejoint les propos de Trump qui avait qualifié le gouvernement de gauche

de radical.

Monsieur Lévêque revient sur les relations entre les États-Unis et le Venezuela. Ce dernier

tient à mettre les choses au clair et à disculper les Américains. Il rappelle que les mauvais

rapports entre ces deux Etats ne datent pas d’hier. Le fait est qu’aujourd’hui le Venezuela ne

peut s’en prendre qu’à lui-même s’il reçoit des sanctions, car ce serait lui qui les aurait

cherchées. L’illégitimité du président a fourni une bonne raison à l’ennemi d’avoir mis en place

et appliqué des sanctions. Tandis qu’avant, même si les États-Unis n’entretenaient pas de

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bonnes relations avec le Venezuela, ils ne s’étaient tout de même pas permis de les sanctionner,

car ils n’avaient pas de vraie raison de le faire vu que Chavez était légitime. Selon le spécialiste

du Venezuela, le gouvernement vénézuélien ne peut se permettre en aucun cas de rejeter la

faute sur les Américains, car, certes, la guerre économique est récente, mais elle date toutefois

de bien avant les sanctions américaines. Frédéric Lévêque anticipe ici l’éventuel contre-

argument du discours anti-impérialiste. Il tient tout de même à préciser que les sanctions

économiques ne sont peut-être pas nécessaires et que Maduro se sert malheureusement de cela

pour manipuler son peuple.

L’un des principaux champs lexicaux qui caractérisent ses prises de parole est celui de la

guerre (« violence », « répression », « fronde », « explosion »). Lévêque parle à plusieurs

reprises de guerre plutôt que de crise, par exemple, comme le font en général les autres

intervenants. Il affirme que le pays est bel et bien touché par une « guerre économique » et que

cette « guerre » serait conduite par l’élite de la bourgeoisie d’après le gouvernement. Si nous

nous attardons sur la signification de l’expression « guerre économique », nous pouvons nous

apercevoir qu’elle est polysémique et peut donc prêter à confusion quand elle est utilisée. Elle

peut à la fois renvoyer à la concurrence entre les économies dans un conflit, à l’intervention

militaire à des fins économiques, à l’importance de la dimension industrielle dans le conflit lors

d’une guerre, à la pression infligée au peuple adversaire et finalement à la concurrence intense

entre les entreprises, caractérisée par des pratiques malveillantes comme le dumping par

exemple66. Toutefois, cette notion reste particulièrement vague. Le choix de parler de guerre

économique peut ainsi refléter la volonté du spécialiste à laisser le lecteur interpréter librement

les motifs de cette crise économique. Il poursuit en disant que les personnes de la campagne

soutiennent Maduro et le perçoivent comme un grand combattant qui affronte une attaque

extérieure, une « fronde internationale »67. Il utilise notamment beaucoup d’expressions

imagées telles que « l’explosion de l’inflation », « la perte de contrôle », « l’entreprise pétrolière

est par terre » qui reflètent un climat de guerre au sens propre du terme. En outre, le spécialiste

utilise le champ lexical de l’autorité (« dictature », « omnipotent », « contrôle », « arrestation »,

66 Guerre économique (sans date) Wikipedia. Disponible sur: https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_économique?fbclid=IwAR1FGJRwB3pRGgWnMXcIQQxynlwbUXfeuuiQWGhfXd3idNpUTmOdQ702aNs (consulté le: 30 juillet 2019). 67 Marsac, Anthony. (2018b) « “La société n’a jamais été aussi individualiste au Venezuela, parce que qu’on est dans la survie, dans la misère” », La Libre, 30 juin. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/la-societe-n-a-jamais-ete-aussi-individualiste-au-venezuela-parce-que-qu-on-est-dans-la-survie-dans-la-misere-5b36343e5532692547cd9729?fbclid=IwAR1qLEoACOE9MgUynX_gpd1MKzoxJ_wEjb0uRXp8ZjzHNFh4ZVZkqZypKu4 (consulté le: 30 juillet 2019).

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« intimidation », « menace », « enferme »). Ces mots à connotation très négative nous

communiquent indirectement des indices quant à la vision du spécialiste sur le gouvernement

de Maduro. Il semblerait que monsieur Lévêque ne voit pas d’un très bel œil ce gouvernement

qu’il considère comme une dictature dont la mauvaise politique aurait déclenché la décadence

du pays.

« Au Venezuela, le pouvoir et l’opposition capitalisent sur l’attentat qui aurait visé Nicolás

Maduro »

Il s’agit d’un entretien avec le spécialiste Franck Gaudichaud, également chercheur à

l’université Grenoble-Alpes en France.

Il dément l’accusation de l’opposition et du groupe de Lima et émet l’hypothèse qu’il y a

peu de chances que le gouvernement ait organisé son propre attentat, car ça nuirait fortement à

son image et en plus de ça, en termes d’argent, ça lui aurait coûté énormément. Il semble

soutenir discrètement l’accusation faite par Nicolás Maduro sur les États-Unis et la Colombie.

Il utilise l’argument de l’analogie fondé sur des précédents douteux. Il établit un parallèle entre

deux situations distinctes dans le temps : la situation récente de l’attentat et la situation

antérieure de l’intervention des États-Unis dans le pays, dont le résultat est transféré sur la

situation actuelle. Ainsi, selon lui, il n’est pas « fou »68 de penser qu’ils ont pu intervenir. Il

revient en précisant toutefois qu’il est difficile d’avancer cet argument sans preuve. Il émet

l’hypothèse que l’attentat aurait pu être organisé par un groupe d’officiers mécontents. Le

spécialiste semble vouloir rester vigilant quant à ce qu’il pourrait dire et avance donc plusieurs

possibilités pour ne pas trop se mouiller.

Il poursuit l’interview en essayant de paraître on ne peut plus neutre. Lorsque la journaliste

lui demande quelle interprétation pourrait être la plus convaincante aux yeux des gens, il fait

comprendre indirectement dans sa réponse que le scénario le plus crédible serait celui d’une

attaque provenant des sanctions économiques émises par les États-Unis, car « le drame c’est

68 Udrescu, Maria. (2018) « Au Venezuela, le pouvoir et l’opposition “capitalisent sur l’attentat” qui aurait visé Nicolas Maduro », La Libre, 6 août. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/au-venezuela-le-pouvoir-et-l-opposition-capitalisent-sur-l-attentat-qui-aurait-vise-nicolas-maduro-5b6873da5532692548875668?fbclid=IwAR2f1n9Or0bG9kWrPrOBtqSz2Dl3IBH88ZVi7_x0vGsfPItzN2IUjvBqnUs (consulté le: 30 juillet 2019).

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l’état de l’économie au Venezuela »69. En effet, il pourrait constituer un bon argument au

gouvernement pour justifier l’état de l’économie déplorable. La population est totalement

accablée de malheurs. Elle est déjà dans la déception totale, et donc il sera plus facile de lui

faire croire à un complot étranger. C’est pourquoi monsieur Gaudichaud considère que le

gouvernement va se servir de l’argument de l’ennemi extérieur et « jouer de la souveraineté

nationale »70. Enfin, il en vient également à parler de l’opposition. Selon lui, la stratégie de

celle-ci serait de jouer sur l’image du gouvernement. Elle viserait à ternir sa réputation en

pointant du doigt son incapacité à diriger le pays. Il met en opposition l’extrême droite

vénézuélienne et celle française. Il qualifie l’extrême droite vénézuélienne de « dure », ce qui

sous-entend que celle de Marine le Pen l’est moins. Il y a comme l’impression que l’expert

tente de mettre en garde contre quelque chose. Il rappelle également que c’est cette même droite

vénézuélienne qui a été complice de l’organisation du coup d’Etat contre Chavez en 2002.

Donc, il ne serait pas fou de penser qu’elle puisse l’être également pour celle de 2007.

4.4. Conclusion de l’analyse des intervenants

Une grande partie des interventions ont été accordées à des sujets peu favorables, voire pas

du tout, au gouvernement de Maduro comme les États-Unis, par exemple, ou encore des

citoyens vénézuéliens. Les spécialistes occupent également une grande place dans le discours.

Beaucoup témoignent ouvertement leur sympathie à l’opposant Juan Guaidó. Leurs

interventions revendiquent bel et bien la destitution de Nicolás Maduro. Effectivement, sa façon

de gouverner serait selon eux digne d’une gouvernance dictatoriale et non démocratique.

Malgré la présence de nombreux observateurs lors des élections de 2018, nombreux pensent

que Maduro occupe une place qui ne lui revient pas car, il aurait obtenu un deuxième mandat à

l’aide de moyens suspicieux. De plus, les droits primordiaux des individus ne sont pas respectés

dans cet Etat supposé être démocratique. La liberté d’expression au Venezuela semble bien

malade : des médias de l’opposition auraient fermé et le gouvernement menacerait les

journalistes de représailles. L’abus de violence des forces de l’ordre est également désigné

69 Udrescu, Maria. (2018) « Au Venezuela, le pouvoir et l’opposition “capitalisent sur l’attentat” qui aurait visé Nicolas Maduro », La Libre, 6 août. Disponible sur: https://www.lalibre.be/international/au-venezuela-le-pouvoir-et-l-opposition-capitalisent-sur-l-attentat-qui-aurait-vise-nicolas-maduro-5b6873da5532692548875668?fbclid=IwAR2f1n9Or0bG9kWrPrOBtqSz2Dl3IBH88ZVi7_x0vGsfPItzN2IUjvBqnUs (consulté le: 30 juillet 2019). 70 Ibidem.

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moult fois. Ils défendent toutes ces causes au nom de la démocratie et des droits de l’homme.

Le président est sans cesse diabolisé à travers leur expression. Mais les intervenant ne s’arrêtent

pas là. Ils s’attaquent également aux alliés du président, à savoir la Russie et la Chine entre

autres. Pour eux, la Russie n’a rien à faire au Venezuela. L’ouvrage « Principes élémentaires

de propagande de guerre » d’Anne Morelli a permis la réalisation d’une analyse plus

approfondie et de dévoiler les réels intérêts qui pouvaient être dissimulés derrière ces

témoignages.

Les journalistes semblent tous, à peu d’exceptions près, très peu favorables au

gouvernement vénézuélien. Certains semblent être conscients que les problèmes étaient déjà

présents bien avant la présidence de Nicolás Maduro. Mais ils ont tout de même tendance à

minimiser les tensions qui existaient sous Chavez et à exacerber celles sous le règne de Maduro.

En outre, les journalistes reviennent sans cesse sur des termes ou des événements péjoratifs

caractérisant la situation afin d’heurter davantage les esprits. Ils utilisent des figures de style

contribuant à l’exagération des faits ou encore des termes négatifs comme régime ou encore

pouvoir. Les questions qu’ils posent amènent à parler de la mauvaise gouvernance du président

et pas une seule fois n’est évoqué un acte favorable à son égard. Ils mettent en exergue le peu

de charisme de Maduro en le comparant constamment à Chavez, qui lui avait tout d’un leader

charismatique. La tournure de certaines questions porte à croire que Maduro serait un dictateur

corrompu qui abuse de son autorité et qui ne veut pas s’en aller. Les journalistes ne s’empêchent

pas d’évoquer l’atteinte aux libertés individuelles et s’empressent de demander davantage de

détails quant à la liberté d’expression des Vénézuéliens, car il semblerait que le peuple soit

victime d’oppression et d’abus de violence. Il est aussi à noter l’utilisation de guillemets quand

les propos de Maduro sont utilisés, mais pas pour ceux d’autrui. Cet usage montre encore une

fois la distance entre les journalistes et ce dernier. Aucun désaccord n’est clairement exprimé

envers les États-Unis ou l’opposition. Au contraire, ils sont présentés comme des bienfaiteurs

quelques fois victimes du gouvernement, et les journalistes ont tendance à prendre

indirectement leur défense. Lorsqu’on croit discerner une critique à leur égard, elle est toujours

rattrapée plus loin. Seule l’intervention étrangère pourrait changer quelque chose à ce désastre

persistant.

Après analyse des diverses réponses des personnes interviewées par La Libre, il n’est

difficile de savoir dans quel camp ils se rangent. Nicolás Maduro est tenu pour responsable de

la crise qui se déroule au Venezuela. Dans leur témoignage, on peut sentir la lourde négativité

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des événements à travers le vocabulaire violent employé. Maduro serait un grand stratège qui

aurait pour but d’amener habilement le peuple en lui proférant des mensonges sur les pays

étrangers qui ne lui sont pas favorables. Il serait coupable de maltraiter les dissidents et aurait

également provoqué la fermeture des médias de l’opposition. La situation serait invivable au

Venezuela pour un partisan de l’opposition et ses proches. Le Venezuela n’est plus un pays

démocratique où les droits de l’homme existent. Ce serait tout le contraire. Les intervenants ne

semblent pas tous hostiles à un gouvernement socialiste, mais à Maduro en particulier. Bon

nombre d’entre eux font l’éloge de l’ancien président Hugo Chavez et de la situation à son

époque. Les erreurs de Chavez sont peu importantes. D’ailleurs, ils n’en parlent jamais. Le

Venezuela est aujourd’hui en danger : c’est la crise à tous niveaux, ce qui a rendu la migration

presque obligatoire pour tous les Vénézuéliens. À travers le discours, il est facile de percevoir

une réelle volonté de changement de gouvernement. Les États-Unis n’y sont pour rien dans ce

désastre, ils n’ont fait que condamner l’illégitimité d’un gouvernement. L’invité Franck

Gaudichaud se distingue des autres en essayant de se montrer le plus neutre et impartial possible

dans ses réponses. Toutefois, il est possible de remarquer son petit penchant pour le

gouvernement vénézuélien. Il s’efforce de donner des explications des plus précises tant bien

sur l’opposition que sur le gouvernement de Maduro et tente également de démontrer

l’absurdité de certaines accusations.

Il ressort de l’analyse détaillée des éléments relevant de la communication des sources

et des intervenants des articles de La Libre un manque d’analyse et d’impartialité de la part de

celle-ci. En effet, il semblerait que certaines preuves avancées n’ont pas été creusées plus que

cela. Mais aussi, seule une infime partie des faits positifs relatifs au gouvernement vénézuélien

n’a été évoquée alors qu’il en existe malgré tout le désordre qu’il y a au Venezuela.

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5. Analyse des positions et des argumentaires

L’intérêt de cette partie portera sur l'analyse que des personnalités connues et des

journalistes de La Libre Belgique proposent des événements économiques et politiques du

Venezuela afin de retracer leurs discours. À cette fin, 52 articles de ce quotidien rédigés du 16

avril 2013 au 19 mai 2019 ont été étudiés. Les articles retenus sont représentatifs des différentes

étapes du déroulement des événements et permettent de vérifier l'évolution des idées des

journalistes parallèlement à l'évolution du contexte et des événements.

Cette partie sera divisée en trois catégories. La première portera sur le traitement des

informations consacrées aux événements et aux effets qu’ils peuvent produire sur le lecteur. La

seconde s’attardera sur l’analyse des personnes externes. Et pour finir, la troisième partie fera

office de conclusion des sections précédentes.

5.1. Analyse des éditoriaux

Cette partie fera l’objet d’analyse de tous les articles dans l’optique de définir

l’ensemble des idées du journal La Libre Belgique. Il est à noter que de nombreux éditoriaux

mis en ligne par La Libre proviennent d’agences de presse telles qu’Agence France-Presse

(AFP), Belga ou encore Reuters. Il a été décidé que ces articles ne feraient pas l’objet de

l’analyse de cette partie, car ils n’ont pas été rédigés par des journalistes travaillant à La Libre

et parce qu’ils ont été examinés de plus près dans la partie précédente. Ainsi, seuls les éditoriaux

des journalistes Samuel Grimonprez, Antonin Marsac, Marie-France Cros, Maria Udrescu,

Philippe Paquet et un journaliste anonyme se cachant derrière les initiales CH. LY seront

étudiés ici.

Le flux migratoire semble accaparer l’attention du journaliste Samuel Grimonprez. De

nombreux Vénézuéliens ont été forcés de migrer pour des raisons économiques, politiques et

sociales. Le journaliste écrit que le grand nombre de réfugiés vénézuéliens, estimé à deux

millions, dérange les pays voisins comme le Brésil ou encore l’Equateur. Il relate le vol et

l’agression d’un commerçant brésilien par des migrants vénézuéliens et explique que c’est pour

cette raison que les Brésiliens ont détruit les camps des migrants. Il légitime d’une certaine

façon la réponse violente des Brésiliens et met également en exergue le caractère violent de ces

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derniers. Son discours contribue à façonner une représentation de l’immigré vénézuélien assez

dégradante. Son article semble donner de bonnes raisons à l’apathie et justifie ainsi la panique

des étrangers face à la vague de migrants vénézuéliens. L’utilisation de « migrants » et

« réfugiés » montre toutefois que le Brésil, pays signataire de la convention de Genève, est

particulièrement attaché à la question des réfugiés et dissimule la réalité d’un populiste de

droite71. Son discours est caractérisé d’alarmisme. Les Brésiliens voient les Vénézuéliens

comme une menace. La présentation de cette peur dans la presse tend à renforcer les préjugés

à l’égard des migrants et des réfugiés vénézuéliens. Il fait une généralisation et utilise le terme

« Vénézuélien » pour référer aux migrants. Or, tous les Vénézuéliens ne sont pas des migrants.

Dorénavant, le terme « Vénézuéliens » fera référence à des voyous, à des personnes

problématiques qui mettent en danger la sécurité et la paix et qui volent les emplois des

Brésiliens. Le journaliste se nourrit de faits négatifs du discours de la droite brésilienne. Les

discours de rejet recouvrent ceux de solidarité. La perception du Brésilien par rapport à la

migration est déformée. Elle est très loin d’être celle qu’on essaie de montrer par « migrants »

et « réfugiés ». À cause des tensions entre migrants et Brésiliens, le gouvernement a envoyé

120 militaires à la frontière. Marie-France Cros contribue également à une représentation

négative des migrants vénézuéliens. Elle utilise des mots plutôt négatifs pour parler de la

migration vénézuélienne. Elle parle de pays « frappés » par « une crise » migratoire. Elle pose

en victime les pays voisins alors que la vraie victime, c’est plutôt le Venezuela chez qui des

Etats extérieurs alimentent le chaos alors qu’il n’a rien demandé.

Antonin Marsac se focalise quant à lui sur la Russie dans son article « La Russie aurait

aidé le Venezuela pour contrer les sanctions US ». Conformément à l’article, les Russes auraient

aidé le gouvernement dans la création de sa nouvelle monnaie le Petro. En faisant cela, la Russie

essaierait de diminuer l’efficacité des sanctions américaines qui ont pour but de punir un

dictateur qui affame un peuple innocent. Marsac poursuit ensuite en minimisant les sanctions

américaines et déclare que de toute façon, elles « ne sont qu’un nouveau coup dur pour le pays

». Ici, il soutient le fait que le mal est corrigé par le mal et veut dire par là que la situation est

tellement grave que ces sanctions ne peuvent avoir aucune mauvaise répercussion, ce qui est

complètement absurde. Il crée une représentation des Russes peu glorifiante bien qu’elle le soit

déjà en Occident. Au fil du discours, il donne une image du Russe comme une personne

71 Chiachiri, Roberto. et Victor, Cilene. (1988) « La représentation de l’immigré vénézuélien et le populisme de droite au Brésil », Hermes, La Revue. Hermès, 83(1), p. 223-226. Disponible sur: https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2019-1-page-223.htm# (consulté le: 28 juillet 2019).

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apathique. Ce dernier n’est pas envisagé individuellement. Au contraire, c’est la collectivité qui

prime. Son discours appelle en quelque sorte à la russophobie comme ceux de nombreux

journalistes européens. Il ne recense que les éléments négatifs, ou du moins les présente tels

quels, qui impliquent les Russes dans la situation du Venezuela alors qu’en réalité, la Russie ne

fait rien de plus choquant que les États-Unis ou d’autres pays par exemple. Il est également

possible qu’il s’agisse plutôt d’une ‘poutinophobie’ qui s’est cristallisée avec l’affaire

ukrainienne en Occident. Les amalgames faits par le journaliste sur la Russie servent à

discréditer davantage le gouvernement vénézuélien. En évoquant et mettant l’accent sur son

alliance avec la Russie, l’intention est de lui porter préjudice puisque cette dernière est vue d’un

mauvais œil en Europe.

L’auteur de l’article « Avec Maduro, le pouvoir vénézuélien prend un air de dictature »

se cache derrière les initiales CH. LY. Il dénonce la création de la Constituante qu’il qualifie

de « superpouvoir ». Selon lui, l’émergence de cette institution ferait virer le pays vers la

dictature. Mais il existe d’autres façons de raconter cette histoire. Cette institution permet à tous

les secteurs sociaux de faire leurs propositions, ce qui donnera lieu à un nouveau scrutin. La

vision que transmet le journaliste est simplement induite par une propagande qui se développe

dans toutes les directions. Il semblerait que la question n’est plus de savoir ce qui se passe

réellement au Venezuela ou de comment enquêter au mieux. Il s’agirait au contraire de savoir

comment soigner son image d’antitotalitaire dans son opinion. Porter des accusations à un

gouvernement auquel on est hostile n’est autre qu’une tentative de déstabilisation politique.

Cette dernière accompagne la déstabilisation économique. La presse justifie fréquemment la

crise économique par la chute du baril qui aurait chuté de plus ou moins 110 $ à 35 $72 vers

2015. Or, on oublie que lorsque Chavez est arrivé au pouvoir en 1999, le pétrole était à 7 $ et

il n’y avait pas de queue devant les supermarchés. Lorsqu’on accuse de totalitarisme un

gouvernement, on génère bien évidemment des revendications politiques. Le but étant de

pousser les citoyens à bout pour qu’ils se rebellent contre leur gouvernement. Ainsi, s’instaure

un climat d’anarchie. Les propos de Marie-France Cros, datant du 10 février 2019, rejoignent

cette idée de dictature. Selon elle, Maduro n’est plus démocratique depuis que la Cour suprême

s’est emparée des pouvoirs de l’Assemblée législative dominée par l’opposition. Elle ne s’arrête

72 Statistiques (sans date) Institut national de la statistique et des études économiques. Disponible sur: https://www.insee.fr/fr/statistiques?debut=0&idprec=4197125&theme=30&conjoncture=48&fbclid=IwAR2f1n9Or0bG9kWrPrOBtqSz2Dl3IBH88ZVi7_x0vGsfPItzN2IUjvBqnUs (consulté le: 30 juillet 2019).

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pas là et va jusqu’à qualifier cette action de « coup d’Etat institutionnel », un syntagme qui fait

sensation.

Marie-France Cros est la journaliste pour laquelle nous possédons le plus d’articles dans

le corpus traitant la crise vénézuélienne par La Libre Belgique. Après avoir examiné ses articles,

deux positions complètement paradoxales en ressortent. D’une part, nous retraçons les propos

d’une journaliste ouvertement hostile au nouveau gouvernement de Maduro, et d’autre part le

reste de ses articles constitue un vrai plaidoyer en faveur du gouvernement de Nicolás Maduro.

Le 10 janvier 2019 représente une date-clef dans la mesure où il s’agit du jour de l’investiture

de Nicolás Maduro mais aussi du début de la crise politique au Venezuela. Ce même jour, la

journaliste Marie-France Cros publie l’article « Venezuela : Un second mandat pour Maduro »

traitant de cet événement. Dans un premier temps, elle semble tout aussi révoltée que les

partisans de l’opposition face à ce deuxième mandat. Elle s’empresse de faire des

généralisations quant à la reconnaissance du second mandat de Maduro. Elle écrit littéralement

que « sa réélection n’est reconnue ni par ses voisins, ni par l’UE, ni par Washington ». Or, il

semble important de préciser que tous ses voisins ne lui sont pas hostiles. Seuls les pays

limitrophes au gouvernement de droite le sont. Il ne faut pas oublier que la Bolivie, Cuba et le

Nicaragua sont trois grands soutiens de Nicolás Maduro. Le Mexique et l’Uruguay ont affirmé

quant à eux être neutres73 face à la situation. En ce qui concerne l’Union européenne, elle tend

par ces propos à véhiculer l’image d’un bloc toujours en parfaite cohésion sur toutes les

questions. Mais il est bien connu qu’au sein de l’Union européenne, il a toujours été difficile

de parler d’une seule voix. Comme la journaliste Maria Udrescu l’explique dans son article

« Venezuela, position à adopter face à la Russie… Les divergences entre les pays font patiner

la politique étrangère de l’UE », les pays de l’Union européenne sont véritablement incapables

de se mettre d’accord sur des questions internationales, et la question vénézuélienne en est un

bon exemple. La Grèce est le seul pays à montrer ouvertement son soutien au président

vénézuélien. Quant à l’Italie, son gouvernement est divisé sur la question vénézuélienne. D’une

part, le mouvement cinq étoiles a refusé de reconnaître Juan Guaidó en déclarant que ce dernier

n’a pas été élu par le peuple, et d’une autre part la Ligue nord reconnaît Guaidó. L’Union

73 Saliba, Frédéric. et Legrand, Christine. (2019) « Venezuela : la position de neutralité du Mexique et de l’Uruguay », Le Monde, 8 février. Disponible sur: https://www.lemonde.fr/international/article/2019/02/08/venezuela-la-position-de-neutralite-du-mexique-et-de-l-uruguay_5421179_3210.html?fbclid=IwAR3Wuj4bnW0VOZKh4tT_IgTYey086ndsarhm4IgfHtmvcLuXwLyYK8dXyTU (consulté le: 30 juillet 2019).

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70

européenne ne se limite pas aux quatorze Etats, c’est-à-dire l’Espagne, la France, le Royaume-

Uni, le Danemark, les Pays-Bas, la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie, le Portugal, l’Autriche, la

République tchèque, la Suède, la Finlande et le Luxembourg qui reconnaissent Juan Guaidó

comme président par intérim. Son article dépeint la transition gouvernementale vers la dictature

avec Maduro. Un mois plus tard, elle revient sur la réélection de Maduro avec un tout autre

discours. Cette fois, elle affirme ne pas comprendre la reconnaissance de Guaidó par certains

pays européens. Ses argumentaires tendent désormais à présenter les partisans de l’opposition

de façon négative et à dresser un portrait plus positif du président Maduro. Elle met en avant le

manque de cohérence des Européens en disant qu’il n’est pas logique de condamner le mandat

de Maduro quand ces mêmes pays n’ont manifesté aucun déchaînement envers d’autres pays

dont la situation est similaire, voire pire que celle du Venezuela. De surcroît, elle démontre la

légalité de Maduro mais aussi l’illégalité de son opposant Guaidó en s’appuyant sur les articles

de la constitution vénézuélienne. Elle est l’une des seuls journalistes à préciser que Maduro

possède lui aussi un soutien et que tout le peuple vénézuélien n’est pas contre lui. Elle met en

avant des causes qui contribuent en la faveur de Maduro. Elle laisse entendre que le Venezuela

est en fin de compte une victime à plusieurs niveaux. Plusieurs banques refusent de donner

l’argent des fonds publics vénézuéliens à Maduro et bloquent les comptes par peur que celui-ci

ne s’en serve pas pour de bonnes raisons. Toutefois, cet argent pourrait servir à acheter des

médicaments et des biens premiers. La journaliste n’hésite également pas à évoquer les

détournements d’argent de personnalités qui désormais se sont rangées dans le camp de

l’opposition. Elle dénonce aussi la déstabilisation de pays étrangers. Elle mentionne l’ingérence

de l’ambassadeur allemand dans les affaires intérieures du pays et l’étranglement

économiquement des États-Unis. Elle décrédibilise l’entrée d’une aide humanitaire suspicieuse

et fait appuyer ses propos par la Croix-Rouge internationale. Il est sans rappeler que Madame

Cros tente de rester la plus objective possible. En effet, elle n’oublie pas de préciser à plusieurs

reprises que Maduro tout comme Chavez sont loin d’être parfaits et qu’ils auraient pu «

diversifier l’économie, entretenir l’outil de production pétrolier et consolider la production

électrique », par exemple, afin d’éviter ou du moins de réduire certains problèmes. Elle semble

ne pas avoir peur de s’engager et fait ouvertement part de son opinion sur Juan Guaidó. Elle

précise par une apposition au nom de Juan Guaidó que ce dernier s’est autoproclamé président

« sans disposer d’aucune base légale pour le faire » et que ce fut à « la surprise générale ». Cette

précision montre clairement qu’elle ne le reconnaît pas comme président par intérim. Elle

recourt souvent aux termes « contre » et « anti ». Ces deux éléments imputent des préjugés et

des accusations infondées à l’opposition, dont l’intention est d’éliminer la menace posée par

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71

l’administration de Maduro. Elle déclare que les États-Unis ont reconnu Guaidó cinq minutes

seulement après son auto-proclamation, ce qui laisse entendre qu’ils n’ont même pas pris le

temps d’analyser les enjeux et que cela ressemble plutôt à un coup monté.

L’article Vol d’un hélico de la police, attaque de la Cour suprême… Qui était l’homme

le plus recherché de Maduro ?, rédigé par Jacques Besnard, relate l’assassinat d’Oscar Pérez,

un des plus grands criminels du Venezuela. Jacques Besnard évoque son histoire de façon

tragique. Il essaie de sensibiliser le lecteur en ajoutant à l’annonce de la mort d’Oscar Pérez,

tué par les forces de l’ordre, qu’il était le père de trois enfants. Toutefois, il ne faut pas négliger

le fait qu’Oscar était un criminel et non un citoyen innocent. Ce dernier a lancé du haut d’un

hélicoptère des grenades sur la Cour suprême et tiré sur le ministère de l’intérieur. Cet homme

constituait en réalité un vrai danger. De plus, il précise que ce n’est que depuis l’arrivée de

Maduro que le pays est enlisé dans une crise économique importante notamment due à la chute

des prix du baril. Cependant, comme expliqué précédemment, on ne peut résumer tous les

problèmes du Venezuela à cette baisse de prix du pétrole. Dans son discours, nous pouvons

apercevoir une subjectivité de langage. En effet, il emploie des mots très forts. Il atteste que la

répression du gouvernement a été « sanglante ». Certes, il y a bel et bien eu des morts mais dans

les deux camps. Les partisans de l’opposition sont également armés lors des manifestations et

utilisent différentes sortes d’armes. Son article se conclut par quelques-uns des messages laissés

par le criminel au journal américain le New York Times. Les messages repris véhiculent l’image

d’un homme mort pour la liberté de son peuple. Encore une fois, le journaliste semble vouloir

rendre le lecteur sensible aux crimes du gouvernement de Nicolás Maduro.

Philippe Paquet tente de démontrer que les problèmes au Venezuela peuvent affecter

d’autres pays, et par conséquent que le Venezuela est une menace dans son article Comment le

Venezuela pourrait coûter à Trump sa réélection. À l’approche des élections américaines qui

auront lieu en 2020, le but est désormais de se focaliser sur l’électorat hispanophone, qui est

assez important aux États-Unis. Il faut séduire les Latinos à l’étranger, car aux précédentes

élections, ces derniers étaient peu envoûtés à l’idée de voir Trump présider aux États-Unis.

Donald Trump a pour but de s’attirer les voix des Latinos en les convainquant que ses décisions

prises par rapport au Venezuela ont été motivées par des causes légitimes comme la défense de

la liberté d’expression ou encore de la démocratie. Ces sanctions vont permettre de chasser le

monstre Maduro du Venezuela. Le fait de consacrer un de ses articles à l’impact que pourrait

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avoir le Venezuela sur les élections américaines montre une certaine volonté de vouloir

davantage justifier l’intervention américaine dans les affaires intérieures du pays.

5.2. Analyse des cartes blanches

Les cartes blanches de notre corpus ont été rédigées par Sébastian Santander, professeur

en sciences politiques à l’université de Liège (ULiège) et Frédéric Thomas, également docteur

en sciences politiques et chargé d’étude au centre tricontinental (CETRI).

Le titre de notre première carte blanche s’intitule : « Venezuela : l’armée a la main ».

Ce titre propose déjà un des angles que l’article va prendre. Le syntagme « l’armée a la main »

sous-entend que le gouvernement et les forces de l’ordre se sont emparés du pouvoir et que

l’opposition, elle, en est dépourvue.

Il admet que le conflit était déjà présent à l’époque de Chavez et n’oublie pas de mentionner

que celui-ci avait également été victime d’un coup d’Etat qui a cependant échoué. Selon

monsieur Santander, le pétrole serait l’une des causes ayant plongé le pays dans la crise.

L’argent provenant du pétrole a certes permis de diminuer le taux de pauvreté au Venezuela en

fournissant aux plus pauvres des aides sociales favorisant l’accès aux soins de santé gratuits et

à l’éducation et permettant également aux quartiers pauvres de pouvoir s’approvisionner pour

presque rien, mais cet argent a également été utilisé suspicieusement. Chavez aurait fait usage

de cet argent pour s’attirer les électeurs à qui il aurait rendu des services comme ceux cités plus

haut. Le professeur Santander parle de clientélisme. Ce dernier parle également du concept de

népotisme. Ce dernier n’est autre que l’acte de favoriser ses proches comme les membres de sa

famille ou encore ses amis à l’aide de son importante influence. Ces raisons auraient ainsi

participé à l’accroissement de la corruption, présente dans le pays depuis maintenant très

longtemps. Il reproche également au gouvernement de ne pas avoir saisi une occasion : celle de

la hausse des prix du pétrole. Cette dernière aurait pu permettre d’entretenir les infrastructures

pétrolières, de diversifier l’économie et de développer une industrie nationale. En effet, outre

le pétrole, le Venezuela ne produit rien. Tout au contraire, il importe et importer signifie

dépendre des autres. Cette occasion manquée va avoir de lourdes conséquences sur le

Venezuela, car en tant qu’importateur de biens, on subit les décisions des pays étrangers. C’est-

à-dire que si un pays décide d’augmenter les prix de ses ressources, on n’a rien à dire, on ne

fait que subir les conséquences. Enfin, le Venezuela est un pays qui ne vit que des revenus du

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pétrole. Ainsi, lorsque les prix du pétrole ont diminué, leurs rentes ont diminué. Par conséquent,

le Venezuela s’est retrouvé plongé dans une crise économique mais également sociale.

Les pays de droite latino-américains tentent d’isoler le chavisme. Pour ce faire, ils le mettent

à l’écart des événements, le suspendent d’instances régionales et témoignent leur énorme

soutien à Juan Guan, opposant de la droite vénézuélienne, et ne reconnaissent donc pas Nicolás

Maduro, héritier de Chavez. Le conflit ne s’arrête pas là, il devient mondial et regroupe les plus

grandes puissances telles que la Russie, la Chine et les États-Unis par exemple. Evidemment,

ce sont toujours les mêmes blocs qui s’affrontent : la Russie, la Chine et la Turquie d’un côté

et les États-Unis et l’Union européenne de l’autre. Le professeur met en évidence, de façon

neutre, les aides fournies par la Russie et la Chine au Venezuela, qui ne sont jamais présentées

de façon objective dans les éditoriaux de La Libre. Ici, les relations entre ces alliés sont

présentées plus sous la forme de coopérations que comme ingérences illégales dans les articles

précédemment analysés. Cependant, il veille bien à rappeler que ces pays soutiennent Maduro

également pour leurs propres intérêts tout comme le font les États-Unis ou d’autres pays hostiles

au gouvernement. L’ampleur n’est pas la même.

La puissance américaine semble toutefois prendre peur face à la présence russe et chinoise.

Le professeur utilise le verbe « prendre appui sur » pour dire qu’elle compte sur les

gouvernements latino-américains de droite et sur l’opposition pour déstabiliser le

gouvernement. Il déclare que Juan Guai ne s’est auto-proclamé président que lorsqu’il a eu le

soutien des États-Unis. Il sous-entend par là que ce n’était pas une pure coïncidence ou pour

des motifs valables évoqués dans la constitution que Guaidó s’est auto-proclamé président par

intérim. Il est probablement question d’un plan stratégique monté par l’administration de

Trump. Il appelle le lecteur à faire preuve de scepticisme. De fait, il remet en doute les raisons

évoquées par les États-Unis et renforce le doute en mettant en avant les intérêts économiques

et politiques de ces derniers. En montrant qu’ils se soucient des Vénézuéliens, ils vont séduire

une partie de ces derniers, opposés au gouvernement, qui se retrouvent désormais en Floride.

Trump utilise la cause vénézuélienne pour élargir son électorat.

Sebastian Santander veut montrer qu’en réalité tout le monde se moque du peuple

vénézuélien. Il conclut son article en pointant les intérêts, bien qu’ils soient différents, des deux

camps respectifs. Les États-Unis ne dépenseront certainement pas leur argent pour un peuple

qui leur importe peu et les républicains et les démocrates s’y opposeraient. Les puissances de

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l’autre bloc utilisent quant à elles le conflit vénézuélien pour un souci d’image. Il leur permet

de se réaffirmer en tant que grandes puissances sur la scène internationale face à leur pire

adversaire de tous les temps : les États-Unis. Ainsi, le professeur prédit au Venezuela un avenir

qui ne connaîtra pas d’affrontements militaires. Selon lui, les cartes sont dans les mains de

l’armée, et c’est elle seule qui peut décider de l’avenir du Venezuela. Il prédit deux scénarios

possibles : le renversement de Maduro par l’armée qui serait substituée par un autre socialiste

ou de nouvelles élections seraient organisées, engendrées par la pression internationale et

l’armée. Il conclut son article par la phrase suivante : « Raison pour laquelle tous les yeux sont

tournés vers elle (l’armée) »74. Il sous-entend par cette phrase que tout le monde a pour cible

l’armée et que pour arriver ainsi à la réalisation d’un des scénarios cités, où il y aurait de fortes

chances que le gouvernement change, l’opposition essaie par tous les moyens de faire en sorte

que l’armée se retourne contre le gouvernement de Maduro. Bien que des militaires se soient

déjà retournés contre lui, la majorité de l’armée est encore de son côté. L’armée vénézuélienne

est le pivot de la stratégie américaine. Ils profitent des conditions de vie déplorables dans

lesquelles se trouvent les soldats pour les amadouer. En effet, les États-Unis leur promettent de

meilleures conditions de vie en vue d’un soulèvement militaire. Ils offrent aux déserteurs un

logement, de la nourriture ainsi qu’un meilleur salaire, mais bien évidemment en attendant leur

soutien en retour. De plus, les États-Unis utilisent la technique du lavage de cerveau. Ils leur

vendent une image puérile du président Maduro et leur font croire que ce dernier se sert d’eux

pour rester au pouvoir. On tente de leur faire croire que les pires tâches leur reviennent ainsi

que la mauvaise image. Les États-Unis veulent leur montrer qu’ils font un effort et s’intéressent

à eux pour qu’ensuite ce soit aux militaires de faire un pas vers les États-Unis. De son côté, le

gouvernement aurait renforcé la surveillance des militaires par l’ingérence de soldats cubains.

Même ceux qui seraient susceptibles de retourner leur veste ne prennent pas le risque de le faire,

car ils ont peur que le gouvernement s’attaque à leur famille par la suite. En bref, nous avons

l’impression que le professeur dénonce indirectement les attentes américaines et la tentative de

manipulation de l’armée par l’opposition.

La deuxième carte blanche du corpus s’intitule : « Venezuela : l’humanitaire comme moyen

pour légitimer le recours à la force » est l’œuvre du docteur en sciences politiques Frédéric

74 Santander, Sébastian. (2019) « Venezuela : l’armée a la main », La Libre, 30 janvier. Disponible sur: https://www.lalibre.be/debats/opinions/venezuela-l-armee-a-la-main-5c5085b77b50a6072426319e?fbclid=IwAR2myJIMMm4OQ8nRbMcKJSONyugAPkrnRMCQElk_Ha7GJ4CAQvV8w94INYs (consulté le: 30 juillet 2019).

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Thomas. Le titre laisse entendre que le but de l’humanitaire ici n’est pas de venir en aide à un

peuple en besoin, mais plutôt de servir les intérêts de pays étrangers. Il sous-entend également

que le recours à la force n’est pas légitime puisqu’ils se servent d’un moyen pour faire admettre

qu’il est juste. Ces sous-entendus annoncent en quelque sorte la couleur de l’article : le jugement

de l’opposition vénézuélienne et américaine. Ce titre a été écrit par la rédaction de La Libre. Le

titre original de l’article est : « Venezuela : l’humanitaire entre gâchette et substitut ». La

gâchette est la pièce sur laquelle on appuie pour tirer à partir d’une arme à feu. Elle laisse penser

que quelqu’un s’apprête à tuer quelqu’un, quelque chose. Le terme substitut fait référence à une

chose utilisée pour remplacer une autre de jouer le même rôle. En d’autres termes, on parle ici

de l’aide humanitaire qui serait évoquée pour remplacer une intervention militaire étrangère

pour destituer le gouvernement.

Frédéric Thomas partage avec La Libre une critique acerbe de l’ingérence étrangère dans

le conflit vénézuélien. Il a pris le temps de s’attarder sur l’utilisation de l’argument humanitaire

dans un conflit étranger, ce que très peu ont fait jusqu’à présent. Il dénonce les manigances de

l’opposition contre le gouvernement de Nicolás Maduro. Il qualifie cette situation de « spectacle

» et d’« orchestration stratégique »75, ce qui ne laisse aucun doute planer quant à son opinion.

Selon lui, le déroulement des événements au Venezuela est suspect. Parmi ces événements, il

cite la reconnaissance précipitée de Juan Guaidó par les États-Unis et d’autres pays, mais

surtout la demande d’une intervention humanitaire étrangère. Derrière cette dernière se

cacheraient des intentions malveillantes. En effet, le spécialiste accuse l’opposition d’organiser

la déstabilisation de la politique au Venezuela en s’attaquant aux militaires. Nous avons pu

observer dans le chapitre consacré à l’analyse des intervenants que ces derniers n’hésitent pas

à ternir l’image des forces de l’ordre en allant jusqu’à leur mettre sur le dos des actes qu’ils

n’ont pas commis.

Les partisans de l’opposition se servent également de la misère des Vénézuéliens pour

justifier davantage cette intervention dite humanitaire. Frédéric Thomas tourne en ridicule la

puissance américaine dans son discours et dit que la somme qu’ils se vantaient d’avoir récoltée

75 Thomas, Frédéric. (2019) « Venezuela : l’humanitaire comme moyen pour légitimer le recours à la force », La Libre, 24 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/debats/opinions/venezuela-l-humanitaire-comme-moyen-pour-legitimer-le-recours-a-la-force-5c94f414d8ad5874770125ae?fbclid=IwAR1CcuW00PDCmRMgbOviocIJNXC_XUcBTX4wCIEd2Tq-OYCDzc4d9vyipCo (consulté le: 30 juillet 2019).

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était « ridicule »76, car ce n’est pas avec 100 millions de dollars qu’on va pouvoir relever le

Venezuela. Selon lui, il ne s’agissait que d’un moyen parmi tant d’autres pour encore une fois

faire bonne figure. Il poursuit sa critique en évoquant toute une série de différentes

organisations qui se sont opposées à cette intervention étrangère. Il veut montrer par là qu’il ne

s’agit pas seulement de son avis, mais que même les plus grands spécialistes de l’humanitaire

pensent que ce n’est pas nécessaire. Ces derniers se seraient particulièrement arrêtées sur les

dangers potentiels que cette ingérence pouvait causer. Or, une intervention humanitaire n’est

pas censée exacerber les dangers, mais plutôt les réduire. Monsieur Thomas s’efforce de

démontrer le caractère louche de ce plan.

Il met également en évidence la manipulation des médias. D’après ses dires, il en ressort

que ces derniers ne diffusent que ce qu’ils veulent bien montrer. Le spécialiste prend pour

exemple la diffusion des camions bloqués aux frontières du Venezuela, qui permet d’attiser la

haine envers un gouvernement qui refuserait toute aide alors que son peuple est vraiment dans

le besoin. Par contre, on n’entend pas parler des organisations humanitaires de l’Onu qui

travaillent avec le Venezuela pour leur venir en aide. Evidemment, médiatiser ce genre de fait

participerait à redorer l’image de Nicolás Maduro.

L’ambiguïté de l’intervention humanitaire serait en fait l’œuvre d’une stratégie de

l’opposition. Il s’avère difficile de savoir réellement si cette aide humanitaire, tant demandée,

a des visées politiques ou bien sociales. D’une part, nous pouvons penser qu’il s’agit réellement

d’une aide visant à aider les Vénézuéliens et que donc elle est inoffensive, mais d’autre part

nous pouvons croire qu’il s’agit d’un autre complot américain. Il tente de faire revenir à la

mémoire de ceux qui liraient son article la réelle définition de l’humanitaire. Ce faisant, le

spécialiste pointe à nouveau la trahison étrangère en faisant usage du conditionnel dans ses

propos. Dans la phrase suivante : « l’humanitaire serait cette action neutre et indépendante »,

le conditionnel exprime l’irréalité des faits. En d’autres termes, l’intervention humanitaire que

certains désirent tant pour le Venezuela est tout sauf neutre. Le passé des interventions

d’urgence humanitaire semble les rattraper. L’humanitaire est connu pour servir d’instrument

76 Thomas, Frédéric. (2019) « Venezuela : l’humanitaire comme moyen pour légitimer le recours à la force », La Libre, 24 mars. Disponible sur: https://www.lalibre.be/debats/opinions/venezuela-l-humanitaire-comme-moyen-pour-legitimer-le-recours-a-la-force-5c94f414d8ad5874770125ae?fbclid=IwAR1CcuW00PDCmRMgbOviocIJNXC_XUcBTX4wCIEd2Tq-OYCDzc4d9vyipCo (consulté le: 30 juillet 2019).

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depuis bien longtemps. Les États-Unis, par exemple, en ont fait grand usage et se retrouvent

désormais constamment sur la liste des suspects. Tous sans aucune exception se servent de

l’aide humanitaire pour des raisons politiques ou pour leurs propres intérêts. Plus loin, il tente

de montrer que même quand l’humanitaire n’est pas évoqué pour des raisons politiques, il l’est

pour d’autres motifs, les intérêts économiques en sont un parfait exemple. Il ne vise pas

seulement les États-Unis, mais tout pays qui prétendrait s’ingérer au Venezuela pour des raisons

humanitaires. Par la rédaction de cet article, le spécialiste veut faire comprendre au lecteur que

la neutralité de l’humanitaire n’existe pas, qu’il s’agit en réalité d’une fiction et que le passé le

prouve. Et que par conséquent, il se doit d’être constamment vigilant et prudent face aux

informations transmises par les médias.

Il met en lumière la duplicité des acteurs en faveur d’une intervention militaire. De fait,

pour atteindre leurs buts, les participants de cette stratégie doivent endosser un rôle d’acteur. Il

sous-entend que les acteurs de ce scénario font semblant d’être tous d’accord au sujet d’une

intervention humanitaire pour justement montrer qu’elle est nécessaire et la justifier. C’est en

quelque sorte cette mise en scène politique que notre spécialiste essaie de déconstruire en

essayant de montrer que de nombreux experts en la matière rejettent cette intervention

humanitaire.

Enfin, son discours dégage une volonté de déstabiliser le camp de l’opposition. En effet, il

ne cesse de discréditer leurs arguments, en particulier celui d’une crise humanitaire qui

toucherait le Venezuela. Il affirme ouvertement que la vie d’un grand nombre de personnes

n’est pas menacée au Venezuela contrairement à d’autres pays. Il dénonce le fait qu’on invente

une histoire au Venezuela. Il veut vraiment démentir cette fausse affirmation et ainsi faire

comprendre au lectorat ce qu’est réellement une crise humanitaire que l’on peut apercevoir dans

des pays. Il est dangereux d’utiliser à tort et à travers des notions de la sorte. Cela minimiserait

les conséquences des pays comme le Yémen touché par une réelle crise humanitaire. Il veut

également faire comprendre que les Vénézuéliens, contrairement à d’autres peuples réellement

dans le besoin, sont capables de se relever par leurs propres moyens, car il ne s’agit en réalité

que d’une crise économique et sociale et seuls eux peuvent changer le cours des choses. Tout

ce qui a été véhiculé sur le Venezuela n’est selon lui que politique. Son discours suggère par là

que cette pièce de théâtre a été montée dans l’unique but de faire tomber le gouvernement de

Maduro dans un premier temps et de pouvoir prendre le contrôle des ressources du pays.

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5.3. Conclusion des analyses

Pour conclure les analyses des positions et des argumentaires des journalistes de La

Libre ainsi que des cartes blanches, ces derniers ont démontré que les seuls articles qui se

libéraient réellement du contrôle médiatique étaient les deux cartes blanches. D’une part, le

professeur en sciences politiques Sebastian Santander dans son article « Venezuela : l’armée a

la main » responsabilise les deux camps, c’est-à-dire aussi bien le gouvernement vénézuélien

que son opposition. D’autre part, le docteur en sciences politiques, Frédéric Thomas,

approfondit la notion d’humanitaire et met en garde quant à l’utilisation de cette dernière. Il

propose une analyse critique de l’intervention humanitaire en mettant en parallèle plusieurs

exemples historiques qui poussent le lecteur à s’interroger. Il reste toutefois surprenant que le

journal La Libre Belgique ait accepté de publier ces deux cartes blanches, car celles-ci critiquent

plusieurs aspects que ses éditoriaux ne prennent même pas la peine d’évoquer.

D’un autre côté, les éditoriaux rédigés par les divers journalistes prennent à peu près la

même direction. Ils dénoncent dans la majorité les actes du gouvernement de Nicolás Maduro

et tentent de redorer le blason des États-Unis. Les discours des journalistes sur le flux migratoire

vénézuélien ont tendance à dramatiser la situation. En effet, ils ne cessent de pointer du doigt

l’énorme chiffre de Vénézuéliens qui ont été forcés de quitter le pays pour se rendre dans les

pays voisins. Ces voisins sont présentés comme les victimes d’une invasion devant subir contre

leur gré les conséquences d’un pays en crise où le gouvernement ne fait rien pour améliorer la

situation. Parmi ces conséquences figure la violence des migrants vénézuéliens qui est mise en

évidence. Un article presque entier lui a été consacré par un des journalistes de La Libre. La

représentation du migrant est ternie et porte préjudice à ce dernier. Désormais, le migrant

vénézuélien paie les pots cassés des quelques malfaiteurs qui ont causé des troubles et tout le

monde voit le migrant vénézuélien comme un danger. Or, il existe des voyous un peu partout,

ils ne sont pas propres aux migrants. De plus, Nicolás Maduro est présenté comme étant l’allié

de la Russie, une puissance dont l’image a été détériorée avec le temps par les Occidentaux. La

mise en lumière de cette alliance a pour but de causer du tort au gouvernement Nicolás Maduro.

On veut montrer qu’entre mauvais, ils se comprennent. Les éditoriaux lui collent l’étiquette de

dictateur. Sa réélection a fait controverse et lui a valu toutes les critiques possibles. D’énormes

généralisations ont été faites dès le jour où Maduro prêtait serment. Il a été affirmé que tout le

monde a refusé de le reconnaître et s’est opposé à lui, ce qui s’est avéré faux. Il lui est également

reproché la création de la Constituante, ce qui ferait de lui un dictateur voulant s’arroger tous

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les pouvoirs mais pas seulement. Dans les articles, il fait l’objet de nombreuses accusations de

crimes contre l’humanité. Certains propos laissent entendre qu’il lui est également reproché

d’être responsable de la mort d’un criminel. Enfin, son incapacité à gouverner est mise en

évidence et constituerait un problème majeur puisque les pays limitrophes pourraient en payer

le prix. Les journalistes relatent les faits à leur manière afin de convaincre et de persuader le

lecteur que Nicolás Maduro est un président autoritaire qui opprime le peuple vénézuélien. De

manière générale, les articles reflètent un énorme souci d’image de la part des journalistes qui

veulent par-dessus tout montrer qu’ils sont contre la dictature et qu’ils représentent les valeurs

d’une Union européenne démocratique.

Cependant, les discours d’une des journalistes prennent un tout autre tournant à l’égard

de Maduro à la suite des événements. Elle s’est mise à dénoncer les opposants à son

gouvernement et à les présenter sous un mauvais jour. Bien qu’elle tente d’être la plus

impartiale possible, ses discours reflètent une forte hostilité à l’égard des partisans de

l’opposition et des pays étrangers qui la soutiendraient.

6. Conclusion

Pour conclure, les éléments obtenus de l’analyse des titres, des sources et des intervenants

ainsi que des positions et des argumentaires de la presse La Libre se sont avérés être assez

intéressants et révélateurs en termes de position. Ces derniers vont nous permettre de tirer des

conclusions significatives et pertinentes de cette recherche et de répondre à la question

fondamentale qui était de savoir comment le journal La Libre Belgique présentait la crise

politico-économique vénézuélienne. L’objectif de ce travail était notamment de savoir si ce

quotidien décrivait les divers événements relatifs au Venezuela d’un point de vue objectif et

impartial puisque La Libre se présente comme un média indépendant et donc neutre.

L’interrogation portait plus précisément sur le fait de savoir sur qui la presse allait mettre la

faute et par conséquent de quel côté elle se rangeait.

La catégorisation des titres a permis de voir sur quels aspects de la crise le journal se

concentrait davantage. Les titres des articles sont principalement politiques et sociaux, ce qui

n’a rien de surprenant désormais puisque ce travail a permis de mettre en lumière de nombreux

enjeux politiques et les difficultés sociales dont la crise est caractérisée. Ils sont également le

reflet d’une volonté d’attirer le regard sur les événements négatifs du gouvernement tant bien

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sur le plan politique qu’économique. Les titres économiques ont été évités, ce qui a permis de

ne pas trop évoquer les questions économiques parmi lesquelles figurent les sanctions de

Donald Trump qui affaiblissent le pays et par conséquent la population. Les répétitions de mots

ainsi que l’analyse plus approfondie des titres ont également révélé des informations

intéressantes sur les effets qu’ils peuvent avoir sur le public et sur les tendances de La Libre.

L’analyse des sources et des intervenants a démontré qu’une grande partie du temps de

parole a été accordée aux représentants américains, au peuple vénézuélien, à différents

spécialistes ainsi qu’au gouvernement vénézuélien. Il s’agit essentiellement d’hommes et de

femmes politiques américains et vénézuéliens, de différents spécialistes et de citoyens

vénézuéliens issus de quartiers populaires. L’étude en question a permis de constater une forte

dépréciation envers Nicolas Maduro. Les intervenants tiennent effectivement le président du

gouvernement vénézuélien pour responsable de tous les événements désastreux qui ont lieu au

Venezuela. Il est constamment discrédité par ces derniers à tous niveaux et son opposant

bénéficie de leur appui. L’étude susmentionnée a permis de constater que ces prises de paroles

pouvaient représenter des stratégies de communication connues lors de situations de crise. Les

Etats-Unis sont complètement hostiles à Maduro et pas une seule fois ils ne parlent en bien de

lui. Il en est de même pour les quelques citoyens et les experts interrogés.

L’analyse du contenu des articles a révélé un lien étroit entre les journalistes et les

intervenants. L’étude a permis de montrer qu’ils partageaient des idées fortement similaires :

les mêmes reproches y sont mentionnés à l’égard de Nicolas Maduro ainsi que les mêmes

arguments pour justifier une position anti-Maduro. Ces similitudes pourraient révéler un choix

stratégique fait par les journalistes. Le fait de recourir à des experts qui vont dans le même sens

qu’eux pourrait leur permettre d’appuyer leurs idées, car dans l’esprit des gens, les spécialistes,

de par la possession de nombreuses connaissances, ne se trompent jamais. Ainsi, les journalistes

se positionnent eux aussi du côté de l’opposition, à l’exception de Marie-France Clos, l’unique

journaliste qui fait preuve d’une certaine sympathie envers le gouvernement vénézuélien.

Toutefois, une incohérence entre le premier article qu’elle a rédigé et ceux qui ont suivi a été

relevée. Le jour même de l’investiture de Maduro, elle semblait tout autant révoltée par

l’événement que l’opposition. Par la suite, ses articles ont dénoté une forte prise de parti pour

le président. Les journalistes accusent Nicolas Maduro d’être responsable de la crise

vénézuélienne. Le contenu des articles est en effet basé en grande partie sur les défauts, les

maladresses et les erreurs du président vénézuélien. Ils ne laissent pas de place aux doutes dans

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leurs discours. Or, le rôle d’un journaliste n’est pas de juger ni de porter des accusations. Il

semblerait que ces derniers se laissent emporter par leurs émotions et manquent ainsi de

prudence dans la rédaction du corps de leurs articles. Il ressort également de l’analyse que La

Libre ne colporte visiblement pas des informations complètes et pures. De fait, après avoir pris

connaissance des divers articles parlant de la crise vénézuélienne, il en ressort plus qu’évident

que les faits sont triés et clairement sélectionnés. Par conséquent, en privilégiant certains thèmes

par rapport à d’autres, ils en occultent certains. Cette action, plus communément connue sous

l’appellation de la « mise à l’agenda », détermine les faits que les gens mémoriseront et dont

ils parleront. Toutefois, la présence des deux cartes blanches dont les idées sont opposées à

celles des journalistes a été remarquée. Le fait de présenter les dires d’intervenants aux idées

différentes que les leurs peut constituer un moyen de rappeler que le journal La Libre est objectif

et neutre.

Les différentes analyses de la presse et des intervenants composés de responsables

politiques, d’experts et d’acteurs de la société civile ont démontré que seule une petite minorité

parle des côtés positifs du Maduro et met en avant le côté mauvais des partisans de l’opposition.

Il est susceptible qu’il s’agisse d’un moyen stratégique afin de déresponsabiliser la puissance

américaine aux yeux du public. Seuls Sébastian Santander, professeur en sciences politiques à

l’Université de Liège, Frédéric Thomas, aussi docteur en sciences politiques et la journaliste

Marie-France Clos se distinguent des autres. Ces derniers sont les seuls à prendre le risque de

se mouiller en dénonçant l’ingérence américaine et en mentionnant les torts de chacun des partis

et pas seulement ceux du gouvernement de Maduro.

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7.3. Sites électroniques

6 formulations de titres qui inciteront vos prospects à lire vos articles ! (2017) Http5000. Disponible sur: https://http5000.com/5-types-de-titres-inbound-13/?fbclid=IwAR3LociY_9Gc7thKzqdrEjywko059Lqba0ecOuXt3nEFqViqs8taT4q16ok (consulté le: 28 juillet 2019). Bélorgey, P. et Van Laethem, N. (2017) Le pouvoir des mots, Emarketing.fr. Disponible sur: https://www.e-marketing.fr/Thematique/academie-1078/fiche-outils-10154/Le-pouvoir-des-mots-326137.htm?fbclid=IwAR0WRxuNEsjBjlSz8rXL-Y73gHDBeqKvxmELXHZljCjxvxjNd5MHdjQGCtY#1s366DJIqayumBPV.97 (consulté le: 30 juillet 2019). Cobby, F. (2009) Stratégies discursives. Disponible sur: http://www.analyse-du-discours.com/strategies-discursives?fbclid=IwAR02Y_m9I3Lr0dOc4HvJ5_dJTc-hVyaXG-Te1AImn_gGf7xLObAyoF-uS0c (consulté le: 28 juillet 2019). Conatel (2017) En Revolución ha crecido número de emisoras privadas en el país, Conatel. Disponible sur: http://www.conatel.gob.ve/en-revolucion-crece-numero-de-emisoras-privadas-en-el-pais/?fbclid=IwAR0KzrVkACKCL7uQ8-T8RRfcJ3pS8wYYfWEMZWyRItk4kGvnwHezgQsW1Og (consulté le: 30 juillet 2019). Définition : Krisis (sans date) EmBible. Disponible sur: https://emcitv.com/bible/strong-biblique-grec-krisis-2920.html?fbclid=IwAR3saAD4QpstP5ZN2IvET-t5O8qnz0NPDIPmnLfNNuLeNBgJSfR2W1BRAwc (consulté le: 30 juillet 2019). Définition : s’immiscer (sans date) Linternaute. Disponible sur: https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/s-immiscer/?fbclid=IwAR1nukwwTDcVqX1CbirOutM49nfA3aCBsASeKhSQvLt2e2S_lXph3hs2Ffs (consulté le: 30 juillet 2019). Définition : s’imposer (sans date) Larousse. Disponible sur: https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/s_imposer/41962?fbclid=IwAR0gT33EMPBzuLsYSXSO51d2i82xnxDzaebKE2xv-GZXBDfIUdrPGJ0ygX0 (consulté le: 30 juillet 2019). Drouin, P. (2014) Comment écrire un titre irrésistible (résultats garantis). Disponible sur: https://www.alesiacom.com/blog/decouvrez-secrets-dun-titre-irresistible?fbclid=IwAR0OTirBcSpEaB-dme4_VJ48XaSkP-J-YDnMkKZLdrdy6VDU_kB9XX9clBU (consulté le: 28 juillet 2019). Élection présidentielle vénézuélienne de 2018 (sans date) Wikipedia. Disponible sur: https://fr.wikipedia.org/wiki/Élection_présidentielle_vénézuélienne_de_2018?fbclid=IwAR1qLEoACOE9MgUynX_gpd1MKzoxJ_wEjb0uRXp8ZjzHNFh4ZVZkqZypKu4. Guerre économique (sans date) Wikipedia. Disponible sur: https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_économique?fbclid=IwAR1FGJRwB3pRGgWnMXcIQQxynlwbUXfeuuiQWGhfXd3idNpUTmOdQ702aNs (consulté le: 30 juillet 2019). Julien (2014) Comment créer des titres accrocheurs et mieux convaincre? Disponible sur: https://www.leader-blogueur.com/comment-creer-des-titres-accrocheurs/?fbclid=IwAR1ch7vj3YWYmHdVKMq9c6WP6jEzNMB4pGEI-U_xjhdPgYcVz4zZTn40mMo (consulté le: 28 juillet 2019).

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Lecomte, J. (2012) Médias : censure, influence et pouvoir - Les médias nous manipulent-ils ? Disponible sur: https://www.philomedia.be/medias-censure-influence-pouvoir/?fbclid=IwAR1QdZZIfXC6sIcWEropOtenI06dgJg_Zo_y1b9K5lhb2WJmTLwe3ukwSUE (consulté le: 28 juillet 2019). Ministère de l’Intérieur (2017) Résultats de l’élection présidentielle 2017. Disponible sur: https://www.interieur.gouv.fr/Elections/Les-resultats/Presidentielles/elecresult__presidentielle-2017/(path)/presidentielle-2017/011/077/index.html?fbclid=IwAR3saAD4QpstP5ZN2IvET-t5O8qnz0NPDIPmnLfNNuLeNBgJSfR2W1BRAwc (consulté le: 30 juillet 2019). Mundschau, L. (2007) « Présenter un titre de presse », Communication. Editions Nota bene, 25(2), p. 212-228. doi: 10.4000/communication.881. La Plume D’Aliocha (2009) L’art du titre de presse. Disponible sur: https://laplumedaliocha.wordpress.com/2009/01/17/lart-du-titre-de-presse/?fbclid=IwAR272-dSsiIXkfqLzi04uG8K1JG1cuArd-BDGz4Iq1PZViROqfZDzxJjmXc (consulté le: 28 juillet 2019). Pyramide inversée (sans date) Glossaire InfoWebMaster. Disponible sur: http://glossaire.infowebmaster.fr/pyramide-inversee/ (consulté le: 30 juillet 2019). Que se passe-t-il vraiment au Venezuela ? (2019). Disponible sur: http://www.ecoloj.be/que-se-passe-t-il-vraiment-au-venezuela-retour-0?fbclid=IwAR0hVU6lK6n7g6DAicEEHrMUKaYWX-mTZXzcRX7PQzbD3DLQQcQmR9y7OKg (consulté le: 28 juillet 2019). Rievia, P. (2012) Pourquoi l’information n’est jamais neutre. Disponible sur: https://pablorievia.wordpress.com/2012/10/04/pourquoi-linformation-nest-jamais-neutre/?fbclid=IwAR31Xm02FMywQ1ougUetMVyoldEuceVCaKbFkcytz3o__KpjgxvHxeteNxM (consulté le: 28 juillet 2019). Roland, I. et Meurant, J. (sans date) IDD Presse et solidarité - Séance 5 : l’article de presse. Disponible sur: http://edwige.roland.pagesperso-orange.fr/cinquieme/pressesol/presse2.html?fbclid=IwAR2ubSVlb6x6l7bQ9OtDYPLpzSt34Kq_QxmPPdLHrldUaoAT_ues2npqj-A (consulté le: 28 juillet 2019). Statistiques (sans date) Institut national de la statistique et des études économiques. Disponible sur: https://www.insee.fr/fr/statistiques?debut=0&idprec=4197125&theme=30&conjoncture=48&fbclid=IwAR2f1n9Or0bG9kWrPrOBtqSz2Dl3IBH88ZVi7_x0vGsfPItzN2IUjvBqnUs (consulté le: 30 juillet 2019). Terrié, J. (2009) Venezuela : 27 février 1989, le jour où le peuple s’est réveillé, Mediapart. Disponible sur: https://blogs.mediapart.fr/oziel1996/blog/200709/venezuela-27-fevrier-1989-le-jour-ou-le-peuple-sest-reveille?fbclid=IwAR1HmiiX7e9YnhLpqhTz1rpXLdX7mw0ddYd6ISnqT5-txjhN6AcL8co1TO0 (consulté le: 28 juillet 2019). Wikipedia (sans date) Loi des titres selon Betteridge. Disponible sur: https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_des_titres_selon_Betteridge?fbclid=IwAR3L3Hkt8ewv88lIAmfhdHNyXDvCA73Zv-IcLIMC4Sgf6IHJPcg7sNcUO7Q (consulté le: 28 juillet 2019).

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7.4. Sources audiovisuelles

Lemoine, M. (2017) « “Le journal LE MONDE expulsé du Venezuela” », Politique-actu.com, 30 juin. Disponible sur: http://www.politique-actu.com/dossier/chef-reseau-pressetitution-expulse-venezuela-maurice lemoine/1686604/?fbclid=IwAR2D01DWaEbhQ5x971Kf4SEsddJ06VcLdmXLVTcNJFHNYZoZMZTnL1U8zLs (consulté le: 30 juillet 2019).

7.5. Communications orales Defays, J.-M. (2017) « Questions de pragmatique », à l'Université de Liège. Defays, J.-M. (2018) « Sciences du langage et enseignement / apprentissage des langues », à l'Université de Liège. Geuens, G. (2017) « Représentations médiatiques et stéréotypes socioculturels », à l'Université de Liège. Geuens, G. (2018) « Acteurs de la communication internationale : Relations publiques, think tanks, lobbies », à l'Université de Liège. Jamin, J. (2018) « Introduction à la science politique », à l'Université de Liège. Meunier, D. (2018) « Analyse et typologie du discours », à l'Université de Liège. Perrez, J. (2014) « Introduction à la linguistique générale », à l'Université de Liège. Pfanner, T. (2019) « Séminaire d’introduction au droit international humanitaire - Le cadre juridique et l’applicabilité du droit international humanitaire », au Collège d'Europe à Bruges. Santander, S. (2017) « Introduction aux relations internationales », à l'Université de Liège.

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8. Annexes

8.1. Victoire de Maduro contestée MFC (Avec Reuters et AFP) Publié le mardi 16 avril 2013 à 04h30 - Mis à jour le mardi 16 avril 2013 à 04h30

L’élection présidentielle de dimanche au Venezuela, destinée à choisir le successeur d’Hugo Chávez, décédé le 5 mars, s’est terminée sur le fil, par une très courte victoire du candidat officiel. La Commission électorale a annoncé que Nicolas Maduro - chef d’Etat ad interim depuis mars - l’emportait par 50,7 % des voix, contre 49,1 % au candidat de la coalition d’opposition, Henrique Capriles. Ce dernier n’a cependant pas accepté sa défaite, bien que le système électoral vénézuélien ait été qualifié de "meilleur du monde" par l’ancien président américain Jimmy Carter, dont la Fondation s’est spécialisée dans l’observation électorale. Le système adopté sous Chávez est un vote électronique doublé d’une copie papier, que l’électeur dépose dans l’urne. Un doublé qui permet un meilleur contrôle des résultats annoncés.

Alors que les deux candidats sont séparés par une différence de 235 000 voix, Henrique Capriles a affirmé que ses équipes avaient dénombré 3 000 irrégularités, allant du coup de feu à la réouverture de bureaux de vote.

L’opposant a exigé que "chaque bulletin de vote des Vénézuéliens soit recompté, un par un". Une demande qui ne semble pas gêner le candidat officiel, qui s’est dit prêt à accepter un recomptage en bonne et due forme, tout en affirmant le caractère "juste, légal et constitutionnel" de sa victoire, qu’il a présentée comme "un hommage à notre commandant Hugo Chávez".

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8.2. Le Venezuela vit une tragicomédie avec Maduro, selon un ex-conseiller de Chavez

AFP Publié le dimanche 24 novembre 2013 à 09h04 - Mis à jour le dimanche 24 novembre 2013 à 09h23

Le sociologue allemand Heinz Dieterich, ancien conseiller de l'ex-président vénézuélien Hugo Chávez, estime que Nicolás Maduro met "en péril" l'oeuvre politique de son prédécesseur en faisant vivre une "tragicomédie" à son pays, dans un entretien à l'AFP.

Dans son bureau de l'Université autonome métropolitaine (UAM) du Mexique, l'auteur du concept de "socialisme du XXIe siècle" pour qualifier le projet du président décédé Hugo Chávez (1999-2013) se dit préoccupé par l'orientation "chaotique" du gouvernement Maduro.

"J'observe le grand théâtre tragicomique d'un comédien, mais pas d'un révolutionnaire", estime cet universitaire de 70 ans, qui a exposé ses théories de militant de gauche dans une quinzaine de livres, dont certains écrits à quatre mains avec l'intellectuel américain Noam Chomsky.

Défenseur idéologique de première ligne du chavisme pendant plusieurs années, Dieterich a pris ses distances avec le processus entamé au Venezuela à partir de 2007, au moment de la destitution du ministre de la Défense Raúl Isaías Baduel, ancien compagnon d'armes de Chávez et artisan de son retour au pouvoir après la brève tentative de coup d'Etat de 2002.

Dans son bureau, l'unique vestige des liens de Dieterich avec le Venezuela est une affiche signée par son "ami" Baduel, emprisonné depuis 2009 après avoir critiqué Chávez et opposant de l'actuel gouvernement.

Le sociologue assure qu'il n'a pas changé de camp politique et que ses critiques sont suscités par l'angoisse devant le risque que Maduro "fait courir que se perde tout ce qui a été construit" par Chávez, en raison de son "manque de leadership et l'absolue médiocrité de son équipe".

"Cette gauche n'a plus de modèle de pensée ni d'orientation stratégique", selon lui.

L'auteur allemand avait considéré que Chávez était capable d'appliquer au Venezuela son concept de "socialisme du XXIe siècle", qui met en oeuvre une démocratie participative et une économie non fondée sur le marché. Mais il constate aujourd'hui que "rien de tout cela n'a été accompli au Venezuela ni ailleurs dans le monde". Selon lui, le modèle économique et politique de Chávez était déjà "structurellement épuisé" depuis 2010.

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"Chávez le savait, et s'il avait été en bonne santé, il aurait du changer qualitativement" ses orientations, comme il avait réussi à le faire avant de mourir avec des plans visant à une plus grande efficacité, comme l'impulsion de la construction de logements, estime cet intellectuel installé au Mexique depuis 40 ans.

Aujourd'hui, "Maduro n'est pas à la hauteur des besoins qu'exige le changement du modèle à notre époque", estime Dieterich qui pense que l'ancien chauffeur d'autobus, ex-syndicaliste, et ministre des Affaires étrangères du précédent gouvernement, souffre d'un manque de "fond culturel" et fait fausse route en tentant de "s'affubler des vêtements de Chávez".

Depuis sa victoire serrée aux élections d'avril devant l'opposant Henrique Capriles, Maduro dit s'inscrire dans la continuité des projets de Chávez en mettant l'accent sur la lutte contre la corruption et sur la "guerre économique" déclenchée selon lui par des secteurs de l'opposition avec l'appui de Washington.

Mais pour Dieterich, cette guerre économique est "fictive", avancée dans la perspective des élections locales du 8 décembre. Il s'agit "d'inventer un ennemi" pour tenter expliquer une inflation de 54% sur l'année, la plus forte d'Amérique latine, et la pénurie cyclique d'aliments.

Il y a deux semaines, Maduro a ordonné la baisse forcée des prix de plusieurs produits, accusant les importateurs de les vendre à des prix supérieurs - jusqu'à 1.000% - à leur valeur. Jeudi il a commencé à appliquer le pouvoir que lui a accordé le Parlement de gouverner par décret pendant un an, avec des lois qui augmentent les contrôles des entreprises et instaurent de nouvelles réglementations sur les importations.

"On ne peut pas faire baisser l'inflation avec une guerre, on doit la faire baisser en libérant le prix du dollar et en libérant les importations", affirme-il avec véhémence, en référence aux contrôle des changes mis en place au Venezuela depuis 2003.

Face à la stratégie de Maduro, le sociologue rappelle que Chávez, malgré des expropriations polémiques "avait compris qu'au Venezuela les conditions n'étaient pas réunies pour radicaliser le processus et commencer à enlever le contrôle de l'économie au capital privé".

Pour éviter que le pays ne s'engage dans un éventuel scénario de violence, Dieterich considère que le président n'est pas le seul problème. Pour lui "une rénovation profonde est nécessaire au sein du parti au pouvoir".

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8.3. Venezuela : rassemblement pro-Maduro dans le centre de Caracas

AFP Publié le dimanche 23 février 2014 à 23h35 - Mis à jour le dimanche 02 mars 2014 à 22h23

Des centaines de partisans du pouvoir, la plupart âgés, ont défilé dimanche à Caracas pour soutenir le président vénézuélien Nicolas Maduro, confronté depuis près de trois semaines à des manifestations au cours desquelles dix personnes ont été tuées.

Vêtus de rouge, couleur du chavisme (du nom du président défunt Hugo Chavez, prédécesseur et mentor de M. Maduro), brandissant des drapeaux du Venezuela et des pancartes soutenant M. Maduro et dénonçant la "violence fasciste", les manifestants se sont donné rendez-vous le matin sur la place Bolivar avant d'entamer à la mi-journée une marche qui les a menés au palais de Miraflores, où un discours du président était attendu.

Les partisans de M. Maduro ont organisé des rassemblements quasi-quotidiens en réponse aux manifestations que l'opposition -- et surtout les étudiants -- a convoqué au cours des trois dernières semaines, et qui se sont soldées par la mort de 10 personnes, dont cinq par balle.

Les manifestations ont commencé le 4 février dans la ville de San Cristobal pour dénoncer l'insécurité.

Elles se sont ensuite étendues à d'autres villes et ouvertes à de nouvelles revendications sur les thèmes de la crise économique, la pénurie de nourriture et de produits de base et la répression policière.

Les manifestants réclament aussi la libération des personnes arrêtées à l'issue des rassemblements, notamment la figure de l'opposition Leopoldo Lopez, détenu dans une prison militaire depuis mardi et accusé d'incitation à la violence.

Samedi, des centaines de milliers d'opposants et de partisans du pouvoir se sont mobilisés dans le calme lors de marches pour la paix.

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8.4. Guerre d’usure au Venezuela JACQUES BESNARD Publié le lundi 17 mars 2014 à 15h59 - Mis à jour le jeudi 27 mars 2014 à 12h48 8 morts, 365 blessés, des opposants arrêtés, la liberté de la presse bafouée. Depuis un mois, c'est la crise au Venezuela. Pour mieux comprendre ce qu'il se passe, La Libre.be a interrogé Frédérique Langue, directrice de recherche au CNRS et spécialiste de l'histoire sociale, politique et culturelle du Venezuela.

Depuis la tentative de viol d'une étudiante sur le campus de San Cristobal à l'ouest du pays, le Venezuela est secoué par un mouvement de protestation. Quelles sont les causes de cette révolte ?

Ce viol a été le déclencheur d'une mobilisation étudiante contre l'insécurité qui s'est ensuite propagée dans tout le pays. La principale cause de cette grogne, c'est la crise économique vécue par toutes les catégories sociales. Elle touchait déjà le pays sous Chavez mais elle s'est aggravée sous la présidence de Nicolas Maduro. La gestion des fonds publics a été hasardeuse. Le taux d'inflation est à 56%, il y a des pénuries alimentaires. La population n'a plus de quoi vivre tout simplement.

C'est compliqué pour Maduro de passer après Hugo Chávez ?

La crise est antérieure à ses années au pouvoir. Le charisme de Chávez faisait qu'il pouvait faire des erreurs. Maduro est plus pragmatique, peu charismatique. En fixant automatiquement les prix, il a mal géré la crise, il n'y a aucune flexibilité. Les petits commerçants ne font aucun bénéfice. Il y a également le problème du logement.

Le Venezuela est pourtant l'un des plus gros pays producteurs de pétrole ?

Plus des ¾ des revenus du pays reposent sur l'économie du pétrole. Avant, il y avait plus de diversification. Désormais, c'est quasiment leur seule source de revenu. Maduro n’a pas su redistribuer à la population l'argent du pétrole. Des investissements n'ont pas été faits. De même, le Venezuela finance les largesses des autres pays comme la Bolivie ou le Nicaragua via l'Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique. Cuba, par exemple, subsiste uniquement grâce à l'aide du Venezuela. Ce sont ces pays, justement, qui défendent le président Maduro.

Qui sont les manifestants ?

L'opposition est extrêmement diverse. Il y a des Chavistes repentis, des étudiants, des citoyens ordinaires, des militants politiques. La majorité défend la démocratie et la liberté d'expression. Le mouvement s'est étendu car les gens n'ont plus la peur qu'ils avaient face à une possible répression, ils n'ont pas grand chose à perdre. On

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a tendance à caricaturer en disant que ce sont les quartiers riches qui sont dans la rue mais l'électorat chaviste est aussi touché par la crise.

Quelle figure s'impose en face de Maduro ?

Il y en a plusieurs. Il y a Henrique Capriles qui était le candidat de l'opposition aux dernières élections présidentielles. En 2012, il y avait des suspicions de fraude lors de l'élection de Chavez. Beaucoup lui ont reproché de ne pas avoir protesté davantage. C'est le plus modéré. Leopoldo López (photo ci-dessous), le chef du parti Voluntad popular, un économiste formé à Harvard, est plus radical, il a défilé dans la rue, participé aux manifestations populaires. Il s'est rendu aux forces de l'ordre. Il se présente comme une sorte de martyr. Enfin, il y a la députée María Corina Machado à qui on veut lever l'immunité parlementaire. En clair, on laisse Capriles, le modéré, s'exprimer mais les plus radicaux sont muselés.

La presse a également été muselée ?

Ces entraves à la liberté de la presse écrite sont la conséquence du manque de papier pour imprimer les journaux. Sauf que les journaux les plus favorables au parti ont poursuivi leur activité. Les journaux de l'opposition ont, en revanche, dû passer en ligne, ou sortir une version papier réduite. Il n'y a pas eu de décisions judiciaires directes. Ces fermetures l'ont été par des moyens détournés.

Les relations diplomatiques entre le Venezuela et les Etats-Unis se sont crispées. Trois agents consulaires américains ont été expulsés accusés de "conspiration". Récemment, Maduro a accusé aussi John Kerry d'encourager les manifestations. Les Etats-Unis restent toujours vu comme l'ennemi ?

Comment peut évoluer la situation ?

C'est une guerre d'usure entre le gouvernement, les partisans et les manifestants. Le monopole de la force est du côté du gouvernement. L'armée est divisée, un point de non retour est atteint. La position des gouvernements latino-américains pourraient jouer en la faveur de Maduro. Le Brésil, notamment, est prudent. Le Venezuela lui doit de l'argent. Je ne me risquerais pas à faire des prédictions.

Ils ont expulsé des ambassadeurs américains mais ont rétabli leurs relations diplomatiques. Le lien fondamental entre les deux pays reste le pétrole. Bien-sûr, il y a un toujours un discours anti-impérialiste qui est de dénoncer le rôle des Etats-unis dans la région. Chavez le faisait devant l'ONU en les diabolisant comme le diable. Mais le pays reste l'un des partenaires commerciaux privilégiés des USA. C'est un discours convenu qui mobilise les partisans.

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8.5. La rue en colère contre Maduro au Venezuela AFP Publié le samedi 12 avril 2014 à 23h48 - Mis à jour le samedi 12 avril 2014 à 23h50

Environ 2.000 manifestants ont défilé samedi à Caracas à l'appel d'une opposante radicale qui rejette le dialogue ouvert jeudi entre la principale coalition de l'opposition et le gouvernement, ciblé depuis deux mois par une vague de protestation.

Les manifestants, partis de trois points disctincts de la capitale vénézuélienne, ont défilé dans le calme et devaient converger place Venezuela, dans le centre-ville, mais les forces de l'ordre les ont empêchés de pénétrer dans le quartier de Libertador, déclenchant quelques heurts.

Des manifestants ont lancé divers projectiles aux policiers, qui ont riposté avec du gaz lacrymogène et des canons à eau, a constaté un journaliste de l'AFP, qui a assisté à quelques interpellations.

Cette marche a été organisée à l'appel de Maria Corina Machado, députée destituée fin mars, qui a affirmé samedi dans un communiqué qu'une de ses collaboratrices avait été arrêtée "de façon arbitraire" par les forces de l'ordre.

Cette ingénieure de 46 ans est devenue l'une des figures de l'opposition radicale au président socialiste Nicolas Maduro, visé depuis début février par une contestation étudiante et d'opposants lui reprochant l'insécurité, les pénuries ou encore l'inflation et la répression policière dans le pays.

Selon le dernier bilan du ministère public publié vendredi, les violences autour des mobilisations ont fait 41 morts, en majorité des personnes tuées par des armes à feu, plus de 650 blessés, et 120 enquêtes ont été ouvertes contre des membres des forces de l'ordre soupçonnés d'atteintes aux droits de l'homme.

Mme Machado fait partie du mouvement de "La Salida"("La Sortie"), qui entend faire pression dans la rue pour obtenir la chute du gouvernement du président Maduro.

Comme le parti de droite Volonté populaire (VP, droite), dont deux maires et le dirigeant du parti, Leopoldo Lopez, sont détenus depuis plusieurs semaines, Mme Machado rejette les pourparlers ouverts cette semaine entre le gouvernement et les principaux responsables de la coalition de l'opposition Table de l'unité démocratique (MUD).

Ce dialogue amorcé sous l'égide de l'Union des nations sud-américaines (Unasur) n'a pas débouché sur des résultats concrets, mais a constitué une première prise de contact sans précédent depuis l'élection de M. Maduro il y a un an. Les parties doivent

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se retrouver mardi pour de nouvelles discussions dont les modalités n'ont pas encore été rendues publiques.

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8.6. Venezuela : le président obtient des pouvoirs spéciaux face à « l’agression impérialiste » des États-Unis

AFP Publié le dimanche 15 mars 2015 à 23h42 - Mis à jour le dimanche 15 mars 2015 à 23h42

Le président du Venezuela Nicolas Maduro a obtenu dimanche de l'Assemblée nationale à Caracas des pouvoirs spéciaux qui lui permettront de gouverner par décret jusqu'à la fin de l'année en matière de sécurité et de défense face à "l'agression impérialiste" des Etats-Unis.

"L'Assemblée déclare que cette loi (sur les pouvoirs spéciaux, ndlr) a été approuvée", a proclamé son président, Diosdado Cabello, le numéro deux du régime vénézuélien, à l'issue d'un vote à main levée après un peu plus de deux heures de débats.

Nicolas Maduro avait demandé mardi à l'Assemblée nationale de lui donner "des pouvoirs suffisants pour défendre la paix, la souveraineté et le développement du Venezuela face à la menace du gouvernement des Etats-Unis", qu'il a qualifiée d'"aberration historique"

"L'agression et la menace des Etats-Unis sont les plus graves qu'ait jamais subies le Venezuela", avait ajouté le président, après l'annonce la veille par Washington de sanctions contre de hauts responsables vénézuéliens, elles-mêmes prises en réaction à des violations des droits de l'homme au Venezuela.

"Vous n'avez pas le droit de nous agresser et de déclarer que le Venezuela est une menace pour le peuple des Etats-Unis, la menace pour le peuple américain, c'est vous", avait encore dit M. Maduro à l'adresse du président Barack Obama.

Celui-ci avait qualifié le 9 mars la situation au Venezuela de "menace extraordinaire et inhabituelle pour la sécurité nationale et la politique extérieure des Etats-Unis". Il avait annoncé des gels d'avoirs et des interdictions de visas contre sept responsables vénézuéliens impliqués dans la violente répression des manifestations contre le gouvernement entre février et mai 2014.

M. Maduro a déjà bénéficié des pouvoirs spéciaux à partir de fin 2013 en matière économique, permettant au gouvernement de légiférer directement par décret. Cela n'a pas empêché son pays de s'enfoncer dans une crise économique aigüe.

Mais si, dans les faits, le régime chaviste peut facilement légiférer puisqu'il dispose de 60% des sièges au Parlement monocaméral, c'est une façon, pour un président en mal de popularité (seulement 20% d'opinions favorables), de réaffirmer son pouvoir, estiment des analystes.

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L'annonce des sanctions avait déjà entraîné, le 9 mars, le rappel immédiat du plus haut représentant diplomatique du Venezuela aux États-Unis, un épisode qui est survenu après des années de frictions, les deux pays n'ayant plus d'ambassadeurs respectifs depuis 2010.

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8.7. Bras de fer entre Parlement et Cour suprême à Caracas MARIE-FRANCE CROS Publié le mardi 12 janvier 2016 à 20h37 - Mis à jour le mercredi 13 janvier 2016 à 13h00 La tension ne diminue pas au Venezuela, depuis l’installation du nouveau Parlement, issu de la victoire écrasante de l’opposition aux législatives du 6 décembre.

La Cour suprême a en effet annoncé lundi soir que toutes les décisions prises par ce parlement monocaméral étaient nulles et non avenues et le resteraient tant que le président de l’assemblée ferait siéger quatre députés (un du parti présidentiel chaviste PSUV, trois de la coalition d’opposition victorieuse), qui se présentaient tous dans l’Etat d’Amazonas (sud), et dont la validité du mandat est en cours d’examen par la chambre électorale de la Cour suprême.

Pas de "super-majorité"

Celle-ci avait été saisie par le PSUV, qui conteste des élections dans trois des Etats du Venezuela ; la Cour suprême n’a émis de suspension que pour les élus contestés de l’Etat d’Amazonas.

Le PSUV a perdu sa "super-majorité" (deux tiers des sièges) le 6 décembre, pour ne garder que 55 élus sur 167. La coalition d’opposition MUD a, elle, obtenu tout juste la "super-majorité" avec 112 élus. La priver de trois voix lui laisse une confortable majorité de plus des trois cinquièmes (nécessaires pour voter certaines décisions particulières) et plus que la majorité simple requise pour le vote des lois normales. Mais pas la "super-majorité" nécessaire pour révoquer les juges de la Cour suprême, nommer le procureur général et destituer constitutionnellement le chef de l’Etat chaviste, Nicolas Maduro. Or, c’est bien là le programme de la coalition MUD, qui s’est donné "six mois" pour chasser le Président.

Dans ses derniers jours de pouvoir, après sa défaite électorale, la majorité PSUV sortante avait nommé 13 juges et 21 substituts à la Cour suprême. Des opposants y voient une cause de "non- validité" de la Cour, celle-ci ayant "intérêt" à déclarer nulle l’élection des trois députés d’opposition afin d’empêcher l’assemblée nationale de destituer des juges. Et d’opposer la "non -validité" de la Cour à la "légitimité" de l’assemblée élue.

Mardi, le Parlement a suspendu ses travaux jusqu’à mercredi, apparemment pour consulter des juristes.

Loi d’amnistie

Outre cet explosif dossier, une deuxième pomme de discorde a surgi lundi. La MUD a présenté une proposition de loi d’amnistie de 76 personnes que l’opposition considère comme des "prisonniers politiques", dont l’opposant Leopoldo Lopez, condamné en septembre dernier à 14 ans de prison pour incitation à la violence lors

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des manifestations anti-chavistes de 2014 (43 morts). La proposition de loi concerne également 4 700 "persécutés politiques", qui font l’objet de poursuites judiciaires, et exilés en raison de leur opposition aux chavisme, selon la coalition MUD.

Si le président Maduro a annoncé son intention de s’y opposer, la législation ne lui donne que la possibilité d’en retarder l’adoption : le chef de l’Etat peut opposer son veto à une loi, mais un nouveau vote parlementaire, par 50 % des voix plus une, annule ce veto.

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8.8. Venezuela : le référendum anti-Maduro n’aura pas lieu en 2016 AFP Publié le jeudi 22 septembre 2016 à 08h40 - Mis à jour le jeudi 22 septembre 2016 à 08h41 Les autorités électorales vénézuéliennes ont annoncé mercredi que le référendum contre Nicolas Maduro n'aurait pas lieu cette année, mais après janvier 2017, faisant fondre les espoirs de l'opposition de voir le président quitter le pouvoir.

Pour que des élections anticipées aient lieu, le référendum doit avoir lieu d'ici le 10 janvier 2017 et être couronné de succès, mais selon le Conseil national électoral (CNE) le vote "pourrait avoir lieu au milieu du premier trimestre 2017".

Report après report, l'opposition, réunie dans la coalition de la Table pour l'unité démocratique (MUD, centre droit), majoritaire au Parlement, attendait depuis une semaine la fumée blanche au-dessus du CNE.

Cet organisme, accusé par le camp anti-Maduro de retarder le processus pour le protéger, a également annoncé que l'opposition devra réunir quatre millions de signatures (20% de l'électorat) en trois jours, ultime étape avant de pouvoir convoquer le référendum, du 26 au 28 octobre.

Ensuite, le CNE aura un mois pour les vérifier, puis jusqu'à trois pour convoquer le référendum.

L'opposition a prédit la "déroute" prochaine du président lors du recueil des voix. "Nous n'avons aucun doute (...) Des millions de Vénézuéliens vont se mobiliser, et infligeront une déroute électorale, mais aussi politique et morale sans appel", a réagi Jesus Torrealba, porte-parole de la MUD, lors d'une conférence de presse mercredi soir.

Il a réaffirmé que l'opposition demandait l'organisation du référendum en 2016 et annoncé un "un plan de lutte" pour définir les moyens de continuer à faire pression.

Selon l'opposition, le référendum est l'unique moyen de trouver une issue pacifique à la violente crise économique secouant le pays.

Si celui-ci avait eu lieu d'ici le 10 janvier 2017 et avait été couronné de succès, il aurait provoqué des élections anticipées.

Or s'il est organisé plus tard, comme l'a suggéré le CNE, une éventuelle révocation de Nicolas Maduro n'entraînera que son remplacement par son vice-président, du même parti, jusqu'à la fin de son mandat en 2019.

7,5 millions de voix à recueillir Au-delà des questions de dates, le niveau de mobilisation lors de l'ultime étape avant le référendum pourrait avoir un impact très négatif sur le gouvernement, en cas de forte participation, estiment les experts.

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Lors du précédent stade de ce fastidieux processus, l'opposition avait recueilli neuf fois plus que les 200.000 signatures nécessaires.

Si l'opposition parvenait à réunir près ou plus de 7,5 millions de voix, soit le score de Nicolas Maduro à la présidentielle de 2013, cela aurait un "impact indéniable" même si le référendum lui-même n'a pas lieu en 2016, avait déclaré à l'AFP Eugenio Martinez, expert en questions électorales.

Ce score symbolique de 7,5 millions de voix est le seuil requis pour destituer le président lors du référendum.

"Que huit millions de personnes signent (au cours de cette ultime étape) et ce serait une forme de référendum révocatoire", avait abondé l'analyste Hector Briceño.

Après 17 ans de chavisme (du nom du défunt président Hugo Chavez, 1999-2013), la population semble lassée et les analystes préviennent du risque d'explosion sociale alors que le pays a sombré économiquement.

Selon l'institut Datanalisis, 80% des Vénézuéliens exigent un changement de gouvernement dans ce pays pétrolier dont l'économie s'est effondrée avec la chute des cours du brut.

Les habitants patientent des heures devant les magasins et les pharmacies, désespérés face à une pénurie touchant huit produits de première nécessité sur dix.

L'inflation devrait exploser à 720% cette année selon le Fonds monétaire international (FMI).

Les modalités de la collecte de signatures sont aussi au coeur des débats entre l'opposition, le gouvernement et le CNE : la MUD exige que le seuil de 20% de l'électorat requis se fasse au niveau national et non pas dans chaque Etat, comme le souhaite l'autorité électorale. Car si un seul Etat ne dépassait pas ce seuil, tout le processus serait invalidé.

Autre point d'achoppement, le nombre de machines pour collecter les signatures. Le CNE en propose 4.300, quand l'opposition en demande 19.500.

Pour l'analyste Luis Vicente Leon, le camp gouvernemental "cherche à retarder, décourager et qu'il n'y ait pas de référendum en 2016. Avec peu de machines et 20% par Etat, c'est très difficile de collecter les signatures (nécessaires) et l'opposition va se diviser pour savoir s'il faut accepter ou pas".

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8.9. Avec Maduro, le pouvoir vénézuélien prend un air de dictature

CH. LY. (AVEC AFP) Publié le lundi 07 août 2017 à 07h32 - Mis à jour le lundi 07 août 2017 à 10h41

Acculé par la crise, le président Maduro neutralise l’opposition et noyaute le pouvoir. L’armée vénézuélienne affirme avoir maté dimanche une tentative de coup d’Etat menée par quelques militaires qui dénonçaient "la tyrannie assassine de Nicolas Maduro" dans le pays, épuisé après la chute des revenus pétroliers, la hausse vertigineuse (plus 53 %) de l’extrême pauvreté, des dizaines de morts et des mois de manifestations contre le président socialiste,

Le pouvoir a dénoncé dimanche "une attaque de terroristes" mais le chef des putschistes, un certain Juan Caguaripanoa, a indiqué que "ce n’est pas un coup mais une action militaire et civile pour rétablir l’ordre constitutionnel".

Il faisait référence à la décision du président vénézuélien de créer une "Constituante", un superpouvoir au-dessus du parlement et des autres institutions de l’Etat. Cette institution parallèle, qui a commencé ses travaux samedi, fait craindre à l’opposition et à l’étranger l’émergence d’une dictature dans ce pays pétrolier latino-américain de plus de trente millions d’habitants.

"Le pouvoir des pouvoirs"

Selon M. Maduro, c’est pour "apporter la paix" et "la démocratie directe" dans le pays que l’assemblée a été mise sur pied. Mais le leader socialiste a aussi déclaré que cette Constituante avait champ libre pour "tout régénérer, tout créer, c’est le pouvoir des pouvoirs".

La Constituante "est une mesure désespérée d’un gouvernement qui sait qu’il ne peut convoquer d’élections car il va perdre", a souligné Diego Moya-Ocampos, analyste d’IHS Markit à Londres, dans une interview à l’AFP.

Majoritaire au parlement, où elle a bloqué plusieurs projets de loi,l’opposition voit dans la manœuvre du Président une manière de contourner une Assemblée nationale qui lui échappe.

La plupart des dirigeants les plus influents du clan Maduro se retrouvent dans la Constituante, qui a le pouvoir de réécrire la Constitution. L’un d’eux est le vice-président du parti au pouvoir, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV), Diosdado Cabello, qui a annoncé dimanche que la rébellion avait été matée. C’est un connaisseur : en 1992, il avait participé comme lieutenant de l’armée à une tentative avortée de coup d’Etat contre le président d’alors, Carlos Andrès Perez, mené par Hugo Chavez.

Le président Maduro a succédé à Chavez lorsque ce dernier est décédé en 2013. Peu de temps après, les prix mondiaux du pétrole ont baissé, emportant le Venezuela

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dans une crise économique car 95 % des revenus de ses exportations dépendent de l’or noir. Tombant en disgrâce dans l’opinion publique, M. Maduro a tenté alors de concentrer les pouvoirs dans ses mains. Les choses ont empiré quand la Cour suprême a décidé de s’arroger les pouvoirs du parlement en mars dernier, avant d’y renoncer. Depuis, les manifestations sont quasi-quotidiennes.

Une ancienne chaviste limogée

A peine installée, la Constituante a limogé samedi la procureure générale Luisa Ortega, qui devenait trop gênante pour le pouvoir. Des unités de la Garde nationale bolivarienne l’ont empêchée d’accéder à ses bureaux et elle a dû quitter les lieux assise à l’arrière d’une moto. "C’est une dictature";, a dénoncé cette ancienne chaviste de 59 ans qui dénonce la dérive autoritaire du président et de son clan.

Par ailleurs, un des chefs de l’opposition, Leopoldo Lopez, a de nouveau été placé en résidence surveillée samedi soir. Le même sort a été réservé au maire de Caracas.

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8.10. Venezuela : l’opposition soutient les sanctions américaines AFP Publié le lundi 28 août 2017 à 09h58 - Mis à jour le lundi 28 août 2017 à 09h58 La coalition de l'opposition au Venezuela a apporté dimanche soir son appui aux nouvelles sanctions américaines contre le gouvernement de Nicolas Maduro.

"Nous soutiendrons toujours des sanctions contre ceux qui violent les droits de l'homme et pillent les ressources publiques, en l'absence d'une justice impartiale au Venezuela", a déclaré la Table pour l'unité démocratique (MUD) dans un communiqué.

"Nous demandons à toute la communauté internationale d'avertir les citoyens et les entreprises de chaque pays pour qu'ils s'abstiennent de toute opération financière ou contrat d'intérêt national", avec le Venezuela s'ils n'ont pas l'accord du Parlement --dominé par l'opposition-- "seul organe constitutionnel légitime pour les autoriser", ajoute le communiqué.

Le président américain Donald Trump a imposé vendredi de nouvelles sanctions au Venezuela --les premières frappant le pays en tant que tel-- visant à restreindre l'accès aux capitaux étrangers dont il a un besoin crucial face au spectre d'un défaut de paiement.

M. Trump a signé un décret qui prévoit l'interdiction d'acheter de nouvelles obligations émises par le gouvernement vénézuélien ou la compagnie pétrolière nationale PDVSA. Le Venezuela a dénoncé la "pire agression" qui soit contre le peuple.

Les précédentes sanctions américaines avaient visé M. Madudro et plusieurs de ses collaborateurs, accusés par Washington d'attenter à l'ordre démocratique et de violer les droits de l'homme alors que plus de 125 personnes ont été tuées dans des manifestations anti-régime d'avril à juillet.

Le dirigeant socialiste a accusé le président du Parlement, Julio Borges, d'avoir fait du "lobbyisme" pour les sanctions américaines lors de voyages à l'étranger et a réclamé qu'il soit jugé, ainsi que d'autres dirigeants de l'opposition, pour "trahison de la patrie".

La MUD, qui rassemble une trentaine de partis politiques, a demancé un "appui diplomatique mondial qui contribue au rétablissement de l'ordre constitutionnel et démocratique".

L'opposition accuse M. Maduro d'isoler le pays, notamment depuis l'installation d'une Assemblée constituante élue fin juillet et dotée des pleins pouvoirs.

Les Etats-Unis et une douzaine de gouvernements latino-américains ainsi que l'Union européenne n'ont pas reconnu la légitimité de cette nouvelle Assemblée.

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8.11. Le pape demande à l’ONU d’aider le Venezuela BELGA Publié le lundi 11 septembre 2017 à 16h23 à A BORD DE L'AVION PAPAL (ZZZ)

Le pape François a lancé lundi un appel à l'Onu pour aider le Venezuela à sortir de sa crise économique, politique et sociale, en parlant à la presse dans l'avion qui le ramenait de Colombie. "Le plus douloureux est le problème humanitaire. Il y a tant de gens qui fuient ou qui souffrent. C'est un problème humanitaire auquel il faut répondre. Je crois que l'Onu doit se faire entendre pour aider", a déclaré le pontife argentin. "Je crois que le Saint-Siège a parlé de manière forte et claire", a-t-il ajouté, interrogé sur les obstacles aux efforts pour faciliter le dialogue entre le gouvernement de Nicolas Maduro et l'opposition. "Ce que Maduro pense, il doit le dire lui. Je ne sais pas ce qu'il a en tête." "Le Saint-Siège a fait beaucoup (...). Je me suis exprimé, aussi bien en privé que plusieurs fois à l'angélus, en cherchant une voie de sortie, en offrant de l'aide pour sortir. Il semble que la situation est très difficile", a-t-il expliqué. La crise au Venezuela est l'une des grandes préoccupations du pape, qui a lancé pendant son voyage en Colombie un appel au dialogue et contre la violence dans le pays voisin. Revenant sur la Colombie, le pape a remercié l'ENL, la dernière guérilla guévariste ayant signé un cessez-le-feu la veille de son arrivée. "La guérilla, les paramilitaires, ceux de la drogue... La corruption a provoqué des péchés graves qui ont généré la haine. Mais il y a des étapes qui donnent de l'espoir et la dernière a été le cessez-le-feu de l'ELN, que je remercie", a-t-il déclaré. Le pontife argentin n'a pas semblé affecté par l'hématome qu'il s'est fait en se cognant dimanche à Cartagène contre la paroi vitrée de sa papamobile, quand le véhicule a brusquement freiné à cause de la foule. "J'étais tourné pour saluer les enfants, je n'ai pas vu la vitre et poum", a-t-il raconté. A la fin de son voyage, il a aussi salué l'attitude des foules qui se sont pressées à tous ses rendez-vous. "J'ai été touché par la joie, la tendresse, la jeunesse, la noblesse du peuple colombien, qui n'a pas peur de s'exprimer."

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8.12. Le Venezuela accuse les Etats-Unis de « terrorisme psychologique » AFP Publié le lundi 25 septembre 2017 à 16h51 - Mis à jour le mardi 26 septembre 2017 à 09h52 Le Venezuela a accusé lundi les Etats-Unis d'exercer un "terrorisme psychologique" après leur décision d'interdire l'entrée sur le territoire américain à certains de ses ressortissants.

Cette décision est "incompatible avec le droit international et constitue une forme de terrorisme psychologique et politique", a affirmé le ministère des Affaires étrangères vénézuélien dans un communiqué.

La Corée du Nord, le Venezuela et le Tchad ont été intégrés dimanche à la liste des pays visés par le décret migratoire américain pour des manquements à la sécurité sur leurs voyageurs et un manque de coopération avec Washington.

Le nouveau texte interdit ou limite l'entrée aux Etats-Unis des ressortissants étrangers de huit pays au total, avec l'Iran, la Libye, la Syrie, la Somalie et le Yémen. Le Soudan, l'un des six pays musulmans visés par le précédent décret, a été retiré de la liste.

Les mesures sont différentes selon les pays. Tous les citoyens de Corée du Nord et du Tchad sont interdits d'accès au territoire américain, alors que l'interdiction se limite aux membres d'une longue liste d'instances gouvernementales vénézuéliennes et à leur famille. Le décret entrera en vigueur pour les trois nouveaux pays le 18 octobre.

Le Venezuela, où sévissent crise politique, économique et violences, est visé en raison aussi de son manque de coopération dans les procédures de vérification des voyageurs.

Washington a déjà imposé des sanctions financières au Venezuela et le président américain a prévenu début août que les Etats-Unis étudiaient plusieurs options, y compris militaire, pour mettre fin à la crise.

Le Venezuela, pays producteur de pétrole, est ruiné par la chute des cours du brut. Excédés par les pénuries alimentaires et la hausse vertigineuse des prix, des milliers de ses habitants ont manifesté de façon quasi quotidienne, entre avril et juillet, pour exiger le départ du président socialiste Nicolas Maduro, élu en 2013 et dont le mandat s'achève début 2019.

Le mouvement de contestation, souvent émaillé de violences, a fait 125 morts en quatre mois et le gouvernement socialiste s'est attiré les foudres de la communauté internationale, qui l'a enjoint à nouer un dialogue avec le camp adverse pour trouver une solution pacifique à la crise.

Mi-septembre, Nicolas Maduro a assuré que, "après des semaines de conversations" entre délégués de son gouvernement et de l'opposition, les deux camps étaient "proches" d'un accord pour venir à bout de la crise qui secoue le pays.

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8.13. Vol d’un hélico de la police, attaque de la Cour suprême … Qui était l’homme le plus recherché par Maduro ?

JACQUES BESNARD (AVEC AFP) Publié le lundi 22 janvier 2018 à 16h28 - Mis à jour le lundi 22 janvier 2018 à 16h30 La semaine passée, Oscar Pérez, 36 ans, père de trois enfants, a été tué avec six autres hommes lors d'une opération de police. Il était considéré comme le "criminel le plus recherché" du pays.

Des hôpitaux sans médicaments, des bébés qui meurent de malnutrition. Depuis l'arrivée de Nicolas Maduro au pouvoir en 2013, le Venezuela s'est enfoncé dans une grave crise économique, politique et sociale, notamment en raison d'une chute des prix du pétrole dont le pays est très dépendant. Un mouvement de contestation a pris de l'ampleur dans les rues du pays. La répression a été sanglante. En août dernier, l'ONU dénonçait dans un rapport le comportement des forces de sécurité du pays et les groupes armés progouvernementaux. Parmi les opposants les plus virulents à Maduro figure Oscar Pérez, 36 ans, tué la semaine passée avec six autres hommes lors d'une opération de police.

Vol d'hélico, jet de grenades...

Ex-policier dans la police scientifique, plongeur de combat, pilote de l'ancien ministre de l'Intérieur et acteur dans un film (la "Mort suspendue"). Bien avant de rentrer dans la contestation politique, la vie d'Oscar Pérez avait déjà tout d'un film.

Le 27 juin, il va jusqu'à survoler Caracas à bord d'un hélicoptère dérobé à la police. Accompagné d'hommes armés, il lance quatre grenades sur la Cour suprême vénézuélienne et tire sur le ministère de l'Intérieur.

L'attaque surprise survient durant une vague de manifestations demandant la démission du président et au cours desquelles 125 personnes ont été tuées entre avril et juillet.

"Une guerre" au gouvernement

Dans ce pays très militarisé, il parvient à s'échapper après ce coup d'éclat et multiplie ensuite les apparitions furtives en public ou via les réseaux sociaux.

Malgré des avis de recherches placardés dans le pays montrant son visage, il étonne en refaisant surface deux semaines après son opération en hélicoptère, lors d'un hommage à des opposants morts pendant les manifestations.

Il revient au premier plan en décembre, lorsqu'un commando dérobe 26 Kalashnikov et des munitions dans une garnison de la Garde nationale à Laguneta de La Montana

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(nord). Devant les caméras, il promet alors "une guerre" au gouvernement qui a donc pris fin mi-janvier.

Une interview au New York Times

Le New York Times vient de publier le contenu de messages cryptés que le Vénézuélien échangeait avec la rédaction les deux derniers mois de sa vie. "Je me bats pour la liberté du pays, pour un avenir meilleur. La mort est ce qui m'effraie le moins, c'est la peur de l'échec, de l'échec du peuple."

Dans ces messages, l'ancien militaire a évoqué différents sujets et notamment le vol de l'hélicoptère. "Nous voulions qu'il y ait un appel dans les rues ce jour-là, qu'il y ait de grandes manifestations, que les gens réalisent qu'un mouvement avait commencé", a-t-il dit dans un de ses messages. "Mais malheureusement, il n'y en avait pas."

Considéré comme un terroriste par les autorités vénézuéliennes, il affirmait également que s'il avait voulu avec ses comparses tuer quelqu'un, ils l'auraient"déjà fait."

Il a été tué le 15 janvier après un siège qui a duré 9 heures près de Caracas en direct sur les réseaux sociaux en déclarant dans une vidéo avant de mourir : "Je veux demander aux Vénézuéliens qu’ils ne baissent pas les bras, qu’ils luttent, qu’ils sortent dans les rues, il est temps que nous soyons libres !"

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8.14. La Russie aurait aidé le Venezuela pour contrer les sanctions US ANTONIN MARSAC Publié le mercredi 21 mars 2018 à 13h29 - Mis à jour le mercredi 21 mars 2018 à 13h40 Des Russes auraient aidé Nicolas Maduro dans la création de la cryptomonnaie Petro, qui a pour but de se passer du dollar dans le calcul du cours de la matière première. Une monnaie virtuelle qui pourrait, selon Trump, viser à contourner les sanctions appliquées par les américains.

Donald Trump a publié un décret qui interdit "toutes les transactions associant" la devise virtuelle lancée par le Venezuela, le Petro, en raison de ses problèmes de liquidités. Pour le président américain, la cryptomonnaie représente une "tentative de contourner les sanctions américaines", des sanctions financières imposées par les Etats-Unis contre la politique du président socialiste Nicolas Maduro.

Pour rappel, les États-Unis avaient, en 2017, interdit l’achat d’obligations provenant de l’État vénézuélien.

"Persécution illégitime" Nicolas Maduro a réagi, ce 20 mars, à l’interdiction décrétée par Donald Trump.

"Je dénonce la persécution illégitime, immorale, absurde, du gouvernement impérialiste de Monsieur Donald Trump contre le peuple vénézuélien", a-t-il déclaré.

À travers cette interdiction qui vise le Petro, Trump s’en prend au Venezuela mais peut-être aussi la Russie indirectement.

Selon le Time, la création du Petro a été supportée par des hommes d’affaires et des fonctionnaires russes dans le but d’atténuer les sanctions américaines prises à l’encontre du Venezuela.

Toujours selon le magazine, les Russes impliqués dans la création et le développement du Petro essaieraient de minimiser leur rôle dans le projet « Petro ».

Deux conseillers de Nicolas Maduro, Denis Druzhkov et Fedor Bogorodsky, sont visés par le magazine. Ils auraient des liens avec les banques russes ainsi qu’avec des milliardaires proches du pouvoir. Et ils ne seraient pas les seuls.

Le ministère des Finances russe répond quant à lui qu’aucune instance ou autorité financière russe n’étaient impliquées dans la création du Petro.

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Un pays au bord du gouffre

Le Venezuela a vu son économie dégringoler depuis la chute du cours du pétrole depuis 2014, où il est passé de plus de 120 dollars le baril à moins de 46 dollars.

Malgré la stabilisation actuelle du prix du baril entre 55 et 70 dollars, le prix du baril reste insuffisant pour le pays. Son économie est basée principalement sur l’exploitation de cette ressource et représente plus de 90% de ses exportations.

Une inflation à 2.610 %

La pression sur les prix via, entre autres, l’augmentation de la production américaine de pétrole ainsi que les sanctions prises par Donald Trump ne sont qu’un nouveau coup dur pour le pays, qui a vu son inflation dépasser les 2.610 % en 2017.

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8.15. « Au Venezuela, des gens meurent à cause des pénuries de nourriture ou de médicaments »

JACQUES BESNARD (A GENÈVE) Publié le samedi 24 mars 2018 à 11h46 - Mis à jour le samedi 24 mars 2018 à 22h55 Avec son accent vénézuélien à tirer au couteau, ses cheveux blancs dégarnis et sa bonhomie, Antonio Ledezma a l'air d'un calme papy. Élu en 2013, le maire de Caracas vient pourtant, à 62 ans, de passer une année on ne peut plus tumultueuse. Assigné à résidence depuis 2015, l'un des opposants les plus virulents au président Nicolas Maduro s'est échappé de son domicile comme dans un film. Direction la Colombie puis Madrid où il a trouvé exil. Antonio Ledezma était l'Invité du Samedi de nos confrères de LaLibre.be.

Comment avez-vous réussi à fuir alors que vous étiez assigné à résidence et donc sous contrôle policier ?

Ce fut une odyssée digne d'un film... Pendant 24 heures, j'ai traversé plus de 29 points de contrôle entre les militaires et la police du gouvernement pour arriver jusqu'en Colombie mais Dieu est grand. C'est grâce à la complicité de l'armée que j'ai pu passer.

Cela fait donc quatre mois environ que vous avez fui votre pays. Avez-vous eu des contacts avec vos amis et votre famille au Venezuela ?

Ma famille proche a dû fuir avec moi. J'ai dit à mon épouse, mon fils et ma fille de ne pas retourner au Venezuela. C'est de cette façon que ce régime fonctionne, en essayant de s'en prendre à vos proches pour s'attaquer à vous. Je parle dans la mesure du possible à mes amis opposants restés au pays : Leopoldo López, Maria Corina, Richard Blanco. J'utilise aussi beaucoup les réseaux sociaux pour expliquer ce qui se passe à l'extérieur du Venezuela. Et puis, je voyage en Europe, aux Etats-Unis ou en Amérique du Sud pour témoigner.

Comment faites-vous depuis l'extérieur pour essayer de changer la situation de votre pays ?

Il y a cinq points sur lesquels les opposants en exil travaillent. Nous essayons tout d'abord de faire en sorte qu'il y ait des sanctions contre les responsables politiques corrompus et ceux qui collaborent avec les narcotrafiquants. La deuxième étape, c'est de promouvoir les droits de l'homme comme je le fais ici à Genève. La troisième, c'est de représenter, organiser la diaspora qui compte tout de même quatre millions de personnes disséminées partout dans le monde. Nous aimerions les aider à obtenir des permis de résidents dans des pays comme le Chili, l'Espagne ou l'Argentine. Nous préparons également déjà l'après-Maduro en essayant de former les gens afin qu'ils soient prêts le jour où la démocratie fera son retour. Ce jour-là, il faudra que

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nous ayons un projet bien articulé tant au niveau économique que social. Enfin, nous essayons de militer pour une intervention humanitaire internationale.

Vous avez utilisé le mot "génocide" pour décrire la situation dans le pays. Est-ce le bon terme ?

Oui, c'est le bon terme à utiliser quand des gens meurent à cause des pénuries de nourriture, de médicaments ou du manque de main-d'oeuvre dans les hôpitaux parce que les hommes au pouvoir ont volé de l'argent public pour le placer dans des paradis fiscaux. Nous avons 1,2 million de citoyens qui souffrent de malnutrition, huit enfants qui meurent chaque semaine dans le pays. Les cas de malaria explosent : 360.000 personnes ont été infectées l'an passé. La situation est telle que des gens qui souffrent d'asthme ou d'hypertension sont en danger de mort. Les salaires sont pratiquement nuls, un ouvrier ne gagne que quatre dollars par mois. Et n'oublions pas les citoyens tués dans des manifestations.

Depuis plusieurs années, il y a des manifestations monstres contre le pouvoir mais Nicolas Maduro se maintient malgré tout. Pourquoi ?

Notamment parce que nous vivons dans une dictature. L'armée est au service du gouvernement, les groupes paramilitaires s'en prennent violemment aux manifestants et aux citoyens. Depuis les dernières élections démocratiques, les législatives du 6 décembre 2015, nous avons démontré que nous souhaitions un dialogue avec le gouvernement. Maduro est à ce point cynique que le dialogue est impossible. Un des droits les plus élémentaires de l'humanité est devenu synonyme de gros mot dans ce pays. Les gens au Venezuela se sentent floués.

Pensez-vous que le pouvoir vénézuélien s'affaiblit ou se se renforce ?

Il est définitivement en train de s'affaiblir mais le régime devient du même coup de plus en plus féroce, violent, pervers. Pourquoi est-il plus faible ? Parce qu'il existe désormais des divisions entre les partisans du chavisme et ceux du madurisme. Ils commencent à se critiquer les uns les autres. Ils sont plus faibles car nous avons des preuves réelles de corruption, ils sont faibles en raison de la crise humanitaire dont Maduro est le responsable.

L'Union européenne a pris des sanctions contre sept responsables du régime de Maduro. Que pensez-vous de ces sanctions ? Doit-on aller plus loin ?

C'est un bon signal, c'est une bonne décision que l'UE ait sanctionné des individus pour des faits de terrorisme, de corruption et de crime contre l'humanité. Mais je crois que c'est aussi en quelque sorte une diplomatie timide. Je pense que l'on doit aller plus loin pour que ce soit efficace. Je pense aux pays latino-américains qui forment le groupe de Lima qui ont refusé la présence de Nicolas Maduro à leur sommet. Je demande donc à la communauté internationale une politique plus efficace et plus solidaire.

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Certains demandent une intervention militaire étrangère. Que pensez-vous de cette solution ?

On en a déjà une. Il y a en effet une présence militaire cubaine déployée dans le pays. Nous sommes victimes d'une colonisation cubaine. Ce que je demande c'est déjà une intervention humanitaire pour sauver ce pays et ses citoyens.

Cette interview s'est tenue durant le Sommet de Genève pour les Droits de l'Homme et la Démocratie organisé par UN Watch.

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8.16. « La société n’a jamais été aussi individualiste au Venezuela, parce qu’on est dans la survie, dans la misère »

ANTONIN MARSAC Publié le samedi 30 juin 2018 à 11h59 - Mis à jour le lundi 02 juillet 2018 à 15h24 Le salaire minimum au Venezuela a atteint la somme symbolique de 1 dollar mensuel. Une misère. Frédéric Lévêque, spécialiste du Venezuela, revient sur les raisons de l’hyperinflation, en se détachant des stéréotypes communément admis. Lui, qui a de la famille au Venezuela, a vu l’évolution du pays ces 20 dernières années au plus près. Licencié en Sciences politiques, chargé de communication du CNCD 11.11.11, fondateur du site Barril.info(https://www.barril.info/fr/), il est l’Invité du samedi de Lalibre.be. La situation au Venezuela empire jour après jour. Comment les gens arrivent à survivre ? C’est difficile. Alors qu’il y a quelques années, on ramenait des petites consoles, des petits ordinateurs à ma famille là-bas, maintenant, on leur ramène du dentifrice, des médicaments, des choses comme ça. La situation a bien changé. L'émigration est une chose bien concrète. Dans la famille de ma femme, cinq personnes ont fui le pays. Dont des cadres ou des personnes avec des doctorats…Mais c’est simple : il n'y a pas assez à manger sur la table. On n’a jamais vu une telle crise sur le continent. Les riches sont partis il y a quelques années. Une partie de la classe moyenne aussi. Et de plus en plus, on voit que même la classe moyenne inférieure et les pauvres quittent le pays. On voit véritablement toute une diaspora qui est en train de se créer. Et cette diaspora permet justement à une partie de la population de survivre, car les gens à l'extérieur envoient des médicaments et de l'argent vers leur famille dans le pays. D'ailleurs, avec 100 € par mois, on fait vivre plusieurs personnes de ma famille là-bas. Il faut savoir que cet argent est changé au marché noir. Même pour avoir du liquide, ça passe la plupart du temps par le marché noir.

Je ne faisais pas ça il y a quinze ans. Mais il y a une pénurie de cash. Il y a des files énormes aux distributeurs. On ne peut presque plus rien retirer. Juste de quoi

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s’acheter des chewing-gums, et encore. Le marché noir, c'est lui qui guide l'économie au Venezuela. On parle du salaire minimum à 1 dollar... concrètement, ça fait qu’un casier de bières, c'est devenu impayable. Et c’est comme ça depuis quand ? Depuis Maduro ? C'est progressif. Ce n'est pas que de la faute de Maduro, mais il a bien aggravé les choses. Pour le gouvernement, le pays est victime d'une guerre économique. C'est le patronat, allié à l'oligarchie et aux pays hostiles, qui mènent cette guerre. Ils se comparent souvent à Allende. Sauf que là, ça fait 20 ans qu'ils sont au pouvoir, avec un contrôle total de l'économie et des forces armées. Allende est resté trois ans (1970-1973, ndlr.). Ce n'est vraiment pas comparable. La guerre économique est réelle, mais assez récente. Il y a des sanctions américaines qui empêchent le Venezuela, très endetté, d'accéder aux marchés financiers, donc oui, maintenant, il y a des sanctions. Mais ça fait à peine un an. Alors que la crise date de bien avant. Mais pourquoi ces sanctions, alors que des gens meurent de faim ? Il y a une hostilité entre les Etats-Unis et le Venezuela depuis longtemps. George Bush a appuyé le coup d'Etat contre Chavez en 2002 par exemple. Les relations ont toujours été exécrables. Même avec Obama. Mais maintenant, la dérive autoritaire du gouvernement vénézuélien a permis à ses "ennemis" d'adopter des sanctions. Avant, le gouvernement était légitime, il ne pouvait pas être attaqué. A partir de 2015, il y a eu une rupture. L'opposition a été sabotée par les chavistes alors qu'elle avait mis la main sur l'Assemblée nationale. Les chavistes veulent à tout prix éviter toute forme de cohabitation. Depuis décembre 2015, le gouvernement a d'ailleurs mis hors d'état de nuire l'Assemblée nationale contrôlée par l'opposition et a retardé les élections. Il a tout fait pour invalider les référendums révocatoires (qui peuvent révoquer les élus à mi-mandat). Alors, si on a plus de voix électorale valable, on peut clairement commencer à parler de dictature.

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Les mesures rétroactives en sont un exemple… Il y a un pouvoir omnipotent, qui contrôle tout. Ils font les élections selon leurs règles. De plus, Maduro a mis en place l'Assemblée Nationale Constituante et lui a demandé à d'adopter un décret rétroactif, le 10 décembre, qui dit que les partis qui n'ont pas participé aux dernières élections doivent passer par un processus de revalidation de leur légalité. Il y a une rétroactivité pour définir quels partis sont légaux ou non. Si le parti a boycotté les élections, il se retrouve illégal après coup. Vous imaginez ? Il y a toute une série de dégradations. Les droits humains pour les prisonniers politiques ne sont plus respectés. Il y a les violences policières, la répression et autres. C’est ce qui a justifié les sanctions à l’international. L'UE s'est quant à elle cantonnée à imposer un embargo sur les armes vendues au Venezuela. C’est assez limité comme moyen de pression ? Oui, c'est très limité. Mais on isole tellement le pouvoir qu'ils n'ont plus de porte de sortie. Alors, ça va peut-être renforcer leur radicalisme, oui. Enfin, la société civile a fait un appel pour que les sanctions ne touchent pas la population. C'est ça qui est difficile. Et est-ce que ça va être efficace, ces sanctions ? Est-ce que ça l'a été avec Cuba, qu'on a étranglé pendant des années ? Pas nécessairement… En plus ça permet au gouvernement de pointer un "ennemi", de fédérer autour d’une cause, de désigner un coupable étranger… Le gouvernement a beaucoup joué là-dessus oui, pour souder sa base sociale. Et il dit que les problèmes économiques sont dus aux sanctions, alors que c'est absurde. Ça date depuis bien plus longtemps. Mais même si c’est faux, ces sanctions légitiment les propos de Maduro... Et beaucoup de gens y croient. Ils sont convaincus, surtout dans les zones rurales, que le gouvernement se bat comme un lion, qu'il fait face à une fronde internationale. Les militants en Belgique ont aussi cette vision. Or, si on analyse les politiques économiques menées, ce n'est pas crédible. Il y a plusieurs explications. Ne serait-ce que la dépendance au pétrole. Avec un tel modèle, il y a des problèmes structurels classiques. La "maladie hollandaise" (https://www.alternatives-economiques.fr/maladie-hollandaise/00079484)comme on

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dit, la "malédiction des ressources naturelles". On dépend trop de l'exportation de matières premières et d'importations de biens. La monnaie, avant de perdre sa valeur, était totalement surévaluée. C'était plus facile d'importer, plutôt que de produire sur place. Et ces problèmes structurels favorisent l'inflation. Et la crise, c'est depuis quand alors ? C'est un long processus. Mais l'explosion de l'inflation, la perte de contrôle, c'est à partir de 2012 environ. Il y avait déjà des signes. Alors que le pétrole était au plus haut, c’est assez paradoxal... Il y a une série de facteurs qui explique ceci. Par exemple, Chavez contrôle le pétrole à partir de 2003. Il y a à ce moment une explosion des prix. Ils vont avoir des revenus énormes pendant des années. Puis le prix du pétrole a chuté en 2014. Jamais l'Etat n'avait capté autant d'argent. Et pourtant, au sortir de cette extraordinaire explosion du prix du pétrole (entre 2011 et 2014, ndlr.), le Venezuela était très endetté. Un endettement qui était soutenable jusqu'à ce que le prix du baril chute, en 2014. Cette chute n'est pas la cause unique du problème vénézuélien, comme on peut le lire parfois. Mais ça a permis de révéler les problèmes. Car quand il n'y a plus d'argent, on voit tous les problèmes. Là, maintenant que les prix remontent, ils n'arrivent pas à en profiter. L'entreprise pétrolière est par terre. Les problèmes sont à trouver dans la politique fiscale, monétaire, pétrolière, et autres. Il y a énormément de critères. Un élément pour expliquer l'hyperinflation par exemple : une partie des entreprises nationalisées - ce qui a coûté de l'argent d'ailleurs - sont dans un état pitoyable, sont paralysées, et ne produisent même pas. C'est un échec patent. Ils ont nationalisé pour privilégier le marché interne, et au final, ils achètent à l'extérieur, ils importent. Et les États-Unis qui avaient recommencé à exporter du pétrole, mais si faiblement, n’ont-ils pas maintenu un moment les prix assez bas, pour étrangler le pays ? Toutes les conditions structurelles propre au modèle pétrolier ainsi qu'une mauvaise politique ont fait plonger le Venezuela, avec une hyperinflation. La création monétaire

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est délirante. Il y a tous les éléments qui ont mené au désastre actuel. Mais ce n'est pas seulement dû au prix du pétrole ou aux sanctions américaines. Ils ne savent même plus exporter correctement à leurs alliés des Caraïbes. À leurs alliés, comme Cuba ? Il y a différents pays qui reçoivent ce pétrole à des conditions intéressantes dans le cadre de PetroCaribe (https://fr.wikipedia.org/wiki/PetroCaribe), qui est un accord qui permet de fournir du pétrole aux îles et pays qui en sont dépourvus, en premier lieu à Cuba, à des conditions intéressantes. Ce qui permet d'avoir une grosse influence dans les Caraïbes. C’est la "diplomatie du pétrole", comme on dit. Mais maintenant, le rapport de force géopolitique a complètement changé, et différents pays du continent sud-américain ont fait un virage à droite politiquement. Et à l’intérieur du pays, comment ça se passe ? Au Venezuela, il y a toujours une tension entre un autoritarisme et une radicalisation de la "démocratie sociale". Mais c'est le côté le plus autoritaire qui est devenu dominant. Et il a pu se développer avec la polarisation du pays, depuis le coup d'Etat raté de 2002, les tensions, les conflits larvés... Des familles se déchirent même. De plus, la police politique (les services de renseignements) fait de plus en plus de perquisitions sans mandat. Elle devient un État dans l'État. Elle est juge et geôlière. Et les opposants, dans le peuple ? Il y a des arrestations, des intimidations, on les menace. Parfois on les enferme, sans les présenter à un juge. Et certaines familles ne savent pas où les personnes sont détenues. Et je ne parle pas de l’insécurité générale… Que répondez-vous à ceux qui rétorquent que le Venezuela est à la pointe, au niveau social ? C'était vrai. Pendant tout un moment, ils étaient très avancés. Mais maintenant, beaucoup d'enfants ont quitté l'école. Les universités se vident. Les cerveaux quittent le pays. Le pays avait un niveau de scolarisation extraordinaire, il y a eu des grands progrès, mais maintenant, sans l'argent, sans les transports, sans les infrastructures, il n'y a plus rien. Et la violence, c’est dû à la pauvreté ? En fait, l'insécurité est en croissance depuis les années 90. Le Venezuela est en crise

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depuis longtemps. Le système va mal. L'insécurité n'a cessé d'augmenter. Les plans contre l'insécurité s'enchaînent, mais ils n'arrivent pas à résoudre le problème. Et l'autre violence, c'est que le "socialisme", ça ne devrait pas être individualiste, à la base. Mais on n'a jamais eu une société aussi individualiste. Parce qu'on est dans la survie. Parce qu’on est dans la misère. Dans la difficulté, il y a un renforcement des liens de solidarité, dans la famille, entre voisins, mais en même temps, il y a une volonté de survie. Donc on arnaque tout le monde. On tente de corrompre à tous les niveaux de l'administration. On est dans un niveau de corruption fondamental. Tout le monde survit, et donc tout le monde essaye de s'en sortir, de profiter du marché noir. On est dans la violence du tous contre tous. Caracas, c'est désolant. On ne laisse pas sa voiture dehors. Avant, on le faisait sans problème. Maintenant, on la rentre tout de suite dans un garage. Sinon on se fait piquer les pneus ou la batterie. Les gens fouillent dans les poubelles. Il y a beaucoup de miséreux. On est dans une situation désastreuse. Le métro était l'un des meilleurs du monde. Maintenant, il tombe en ruine. C'est la survie. On est dans l'effritement de la société. On voulait construire un homme nouveau, et c'est tout le contraire qui se passe.

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8.17. Au Venezuela, le pouvoir et l’opposition « capitalisent sur l’attentat » qui aurait visé Nicolas Maduro

MARIA UDRESCU Publié le lundi 06 août 2018 à 18h25 - Mis à jour le lundi 06 août 2018 à 18h26 Nombre de doutes planent encore sur “l’attentat” contre le président vénézuélien Nicolas Maduro, survenu samedi dernier. Cette confusion permet tant au gouvernement qu’à l’opposition de faire dans la surenchère. Franck Gaudichaud, spécialiste de l’Amérique latine, chercheur à l’université Grenoble-Alpes, analyse le “jeu de communication sur la véracité de l’attentat”. L’opposition pointe une mise en scène du gouvernement. Nicolas Maduro se dit victime d’une tentative d’assassinat. Lequel de ces scénarios est plus vraisemblable ? L’opposition et les pays du groupe Lima, à savoir les pays latino-américains conservateurs, parlent d’un autogolpe, donc d’un attentat organisé par le pouvoir. Mais, en termes d’image internationale, les effets sont négatifs pour le gouvernement. Le coût politique d’un tel coup est élevé. Nicolas Maduro estime qu’il s’agit d’un attentat téléguidé par le gouvernement colombien de Juan Manuel Santos, avec le soutien des Etats-Unis. Historiquement, les Etats-Unis ont une tradition d’intervention dans la région. Ce n’est pas fou de penser qu’ils puissent intervenir. Mais il n’y a pas de preuves en ce sens. Il pourrait s’agir plutôt un groupe d’officiers mécontents voulant protester contre l’état du pays. L’été dernier, un collectif de militaires avait déjà attaqué le siège du tribunal suprême de justice et le ministère de l’Intérieur. Quelle interprétation sera la plus convaincante aux yeux de la population ? Le drame est l’état de l’économie au Vénézuela. La pauvreté explose, il n’y a plus d’accès à de nombreux médicaments ou à des produits alimentaires. L’inflation est hors de contrôle. En plus, ce pays pétrolier subit une chute brutale de la production pétrolière, qui serait divisée par trois. La population est donc dans une logique de survie et de désenchantement, même au sein de la base historique du chavisme. Comment les acteurs politiques vont-ils tirer un bénéfice de cette crise ? Pour le gouvernement, l’objectif est de rassembler, de faire jouer la carte de l’ennemi extérieur et de la souveraineté nationale. Tout en pointant du doigt, la droite, l’extrême droite, la Colombie.

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L’opposition, elle, va insister sur l’image d’un pouvoir qui n’est plus capable de gouverner. L’extrême droite vénézuélienne pense même qu’il n’y a plus d’autre option que le coup de force contre Maduro. Ce n’est pas une extrême droite au sens de Marine le Pen (présidente du Rassemblement national, en France, NdlR), mais plutôt une droite dure qui s’exprime depuis le début du processus bolivarien, qui a participé à l’organisation du coup d’Etat d’avril 2002 contre Hugo Chavez, qui était active en 2014 et 2015 au moment des guarimbas, des grandes manifestations de rue parfois violentes dont l’objectif était de faire chuter le gouvernement. Cette frange très hétéroclite de l’opposition avait perdu du terrain dernièrement, cet attentat sera peut-être une occasion pour elle de reprendre du poil de la bête. Cet “attentat” peut-il donc changer le jeu politique vénézuélien ? Chacun joue la même partition. Sur le plan international, la Colombie, les Etats-Unis, l’Union européenne, la France – les acteurs internationaux hostiles au gouvernement vénézuélien – se gardent de s’exprimer. Les alliés historiques du chavisme (Bolivie, Cuba, Russie) se sont empressés de condamner l’attentat. En interne, le pouvoir et l’opposition sont restés dans ce même jeu. Tandis qu’on continue à être dans une phase d’instabilité, où la grande inconnue est la position des forces armées, bastion du pouvoir de Nicolas Maduro. Cet acte semble confirmer que le président peut encore compter sur ses forces armées bolivariennes, ce qui lui procure un sacré pouvoir dans la situation actuelle.

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8.18. La crise au Venezuela provoque des tensions migratoires en Amérique latine

SAMUEL GRIMONPREZ Publié le mardi 21 août 2018 à 13h43 - Mis à jour le mardi 21 août 2018 à 14h44 Face à l’afflux de réfugiés vénézuéliens, les pays voisins durcissent leur politique d’accueil. Deux camps de migrants ont été détruits par des habitants d’une ville frontalière au Brésil. Le président Maduro a décidé de mettre en circulation de nouveaux billets pour effacer les signes de l’hyperinflation. Les Nations unies estiment à plus de deux millions le nombre de Vénézuéliens qui auraient fui leur pays à cause de la crise économique, sociale et politique qu’il traverse depuis 2014. Au Brésil, limitrophe du Venezuela, quelque 56 740 Vénézuéliens ont cherché à régulariser leur situation pour obtenir le droit d’asile au premier semestre 2018. Mais malgré l’intensification de l’aide aux migrants, les tensions s’intensifient. Dernier exemple en date : le vol et l’agression d’un commerçant dans la ville frontalière de Pacaraima, attribué à des Vénézuéliens, qui ont conduit les habitants à mener des représailles sur les camps de migrants, samedi dernier. "C’était terrible, ils ont incendié les tentes et tout ce qu’il y avait à l’intérieur", a témoigné une Vénézuélienne à l’AFP. Des coups de feu ont été tirés, les magasins fermés et des débris divers jonchaient les rues. Environ 1 200 migrants auraient regagné le Venezuela suite aux violences dans la nuit de samedi à dimanche selon le porte-parole du groupe multidisciplinaire brésilien (ONG, armée, organisations locales) opérant à la frontière avec le Venezuela.

Un rejet grandissant des pays voisins Une situation aggravée par la crise économique et sociale au Brésil, selon Christophe Ventura, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de l’Amérique latine : "La crise est de plus en plus rude, les Brésiliens vivent de moins en moins bien, ce qui fait qu’il y a une concurrence entre les locaux et les migrants pour avoir accès au peu de ressources et au peu de travail disponibles." Face à ces violences, le gouvernement brésilien a ordonné dimanche l’envoi de troupes, un contingent de 120 membres de la Force nationale, dans la région frontalière. D’autres pays latino-américains durcissent également leur politique migratoire. En Equateur, des migrants vénézuéliens sont bloqués à la frontière où on leur demande

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leur passeport, que la plupart n’ont pas, au lieu de leur carte d’identité. Un contrôle qui laisse craindre à la Colombie que des milliers de migrants ne restent bloqués dans leur pays. Le Pérou, qui a accueilli quelque 20 000 Vénézuéliens en une semaine, a annoncé que les passeports seraient exigés à partir du 25 août. Les conditions d’obtention d’un permis temporaire de travail ont aussi été revues, avançant la date butoir pour faire une demande. L’Argentine, quant à elle, où certains migrants vénézuéliens se rendent en traversant plusieurs autres pays d’Amérique latine, mettra en oeuvre en septembre un contrôle plus strict des flux migratoires, a indiqué le directeur national des services migratoires argentins, Horacio Garcia, cité par le journal "La Nacion". Exploitation et discrimination Un rejet qui laisse des centaines de milliers de Vénézuéliens sans papier ni permis de séjour légal dans les pays d’asile, et qui les rend particulièrement vulnérables à l’exploitation, la violence et la discrimination. Une sortie de crise au Venezuela semble par ailleurs encore lointaine du fait d’une polarisation encore très forte entre gouvernement et opposition et de l’ingérence des pays de la région, estime Christophe Ventura. Le spécialiste préconise le dialogue : "Les sanctions internationales créent des tensions qui ne permettent pas un vrai dialogue serein." Plan de relance Maduro lance une nouvelle monnaie pour tenter d’endiguer la crise Avec cinq zéros en moins, les nouveaux billets vénézuéliens sont entrés en vigueur lundi, première étape d’un plan de relance du président Maduro pour faire face à la crise économique. Le dirigeant socialiste promet un "grand changement" et assure que les nouveaux billets, dont la plus grosse coupure sera de 500 bolivars (50 millions de bolivars actuels, soit environ 7 dollars au marché noir, la référence de facto), en seront le point de départ. Mais les analystes et économistes ne jugent pas viable, voire "surréaliste" le programme du gouvernement, qui prévoit aussi une hausse du salaire minimum de près de 3 500 % (celui-ci étant multiplié par 34), l’assouplissement du rigide contrôle des changes ainsi qu’un nouveau système pour le prix de l’essence. Pour Christophe Ventura, spécialiste de l’Amérique latine : "La crise économique est multifacteurs et ces mesures ne répondent qu’à un aspect de la question : redonner confiance dans la monnaie nationale et diminuer l’emprise du dollar."

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8.19. Venezuela : Un second mandat pour Maduro MARIE-FRANCE CROS Publié le jeudi 10 janvier 2019 à 09h59 - Mis à jour le jeudi 10 janvier 2019 à 10h00 Sa réélection n’est reconnue ni par ses voisins, ni par l’UE, ni par Washington. Nicolas Maduro, 56 ans, entame ce 10 janvier un second mandat après sa réélection en mai dernier, lors d’un scrutin dont il avait exclu l’opposition et dont la légitimité n’a été reconnue ni par l’Union européenne, ni par Washington, ni par la majorité des pays d’Amérique latine. M. Maduro a quitté la voie démocratique en mars 2017 lorsque la Cour suprême (à sa dévotion depuis qu’il a nommé la majorité de ses membres à la veille d’une victoire de l’opposition aux législatives de décembre 2015) s’est attribué les pouvoirs de l’Assemblée législative, où les anti- Maduro avaient la majorité absolue. Devant le tollé suscité par ce coup d’État institutionnel, le pouvoir avait dû revenir sur sa décision mais, quelques mois plus tard, M. Maduro revenait à la charge en décrétant l’élection d’une assemblée constituante "en vue de transformer l’État et surtout cette Assemblée nationale pourrie qui est là". Assemblée doublée par une autre La nouvelle assemblée a été élue selon un mode inédit favorisant les pro-Maduro et les parlementaires élus en décembre 2015 ont cessé d’être payés en 2016. Toutes leurs décisions sont annulées par la Cour suprême. La violence et les divisions de l’opposition anti-Maduro lui ont valu une gifle lors de l’élection des gouverneurs, en octobre 2017. Les principaux partis de cette opposition se sont ensuite abstenus lors des municipales de décembre 2017. Nicolas Maduro a saisi cette occasion pour annoncer que "tout parti qui n’a pas participé aujourd’hui et qui a appelé au boycott des élections ne peut plus participer" à la présidentielle de 2018 - une annonce légitimée ensuite par la Cour suprême. Crise migratoire et isolement Durant ces passes d’armes politiques, la crise économique - créée par la chute de la production et des prix pétroliers, la mauvaise gouvernance et l’isolement croissant du Venezuela - s’est accentuée, suscitant une crise migratoire (2 millions de migrants économiques) qui a frappé les voisins de Caracas, surtout la Colombie et le Brésil, qui ont décidé de s’allier aux États-Unis pour combattre le régime Maduro. Ce dernier a quant à lui déposé mardi une plainte devant l’Organisation mondiale du commerce contre Washington en raison des sanctions américaines contre des dirigeants et entreprises vénézuéliens.

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8.20. Venezuela : les Etats-Unis et l’UE menacent Nicolas Maduro

BELGA Publié le jeudi 10 janvier 2019 à 17h14 - Mis à jour le jeudi 10 janvier 2019 à 18h56

Les Etats-Unis ne reconnaîtront pas la légitimité du président vénézuélien fraîchement réélu Nicolas Maduro et augmenteront la pression sur son régime, a déclaré jeudi le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche, John Bolton. "Les Etats-Unis ne reconnaîtront pas l'investiture illégitime de la dictature Maduro. Nous continuerons d'augmenter la pression sur ce régime corrompu, de soutenir l'Assemblée nationale démocratique et d'appeler à la liberté et la démocratie au Venezuela", a tweeté John Bolton.

Nicolas Maduro, réélu le 20 mai lors d'un scrutin boycotté par l'opposition, entame jeudi un deuxième mandat de six ans.

L'Union européenne (UE) et les pays du Groupe de Lima --qui rassemble depuis 2017 des pays d'Amérique latine et le Canada-- ont également annoncé qu'ils ne reconnaîtraient pas le deuxième mandat du président vénézuélien.

Washington a déjà annoncé de nouvelles sanctions financières contre des personnalités et des entreprises au Venezuela.

Nicolas Maduro, 56 ans, doit prêter serment jeudi devant le Tribunal suprême électoral (TSJ) et non devant le Parlement, seule institution aux mains de l'opposition.

Deux heures plus tard, à Washington, l'Organisation des États américains (OEA) tiendra une session extraordinaire sur la situation dans le pays sud-américain.

L'UE menace Nicolas Maduro de prendre de nouvelles sanctions

L'Union européenne a dénoncé jeudi le nouveau mandat donné au président du Venezuela Nicolas Maduro après des "élections non démocratiques" et a menacé de prendre des "mesures appropriées" en cas de nouvelles atteintes aux droits de l’ homme et à l'état de droit. "Le président Maduro entame aujourd'hui un nouveau mandat sur la base d'élections non démocratiques", a dénoncé la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini.

"Les élections présidentielles tenues en mai dernier au Venezuela n'ont été ni libres ni équitables et les résultats manquent de crédibilité", a-t-elle déploré.

"L'UE engage le président Maduro à reconnaître et à respecter le rôle et l'indépendance de l'Assemblée nationale, en tant qu'institution démocratiquement élue, à libérer tous les prisonniers politiques, à respecter l'État de droit, les droits de l'homme et les libertés fondamentales et à répondre immédiatement aux besoins urgents de la population", a rappelé Mme Mogherini.

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"L'UE continuera de suivre de près l'évolution de la situation sur le terrain et restera prête à réagir par des mesures appropriées aux décisions et actions qui portent davantage atteinte aux principes et institutions démocratiques, à l'État de droit et aux droits de l'homme", a-t-elle averti.

Les 28 pays de l'UE ont prolongé d'une année, jusqu'en novembre 2019, les sanctions imposées au Venezuela pour contraindre le président Nicola Maduro à respecter l'Etat de droit et la démocratie.

L'UE a imposé le 14 novembre 2017 un embargo sur les armes et les matériaux connexes susceptibles d'être utilisés à des fins de répression interne et a complété cette mesure par une liste noire de dignitaires du régime interdits de visas et dont les avoirs dans l'UE ont été gelés.

Cette liste compte dix-huit dignitaires, dont la vice-présidente Delcy Rodriguez et le numéro 2 du PSUV, le parti au pouvoir, Diosdao Cabello.

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8.21. Venezuela : Juan Guaido, le président du Parlement contrôlé par l’opposition a été arrêté

AFP Publié le dimanche 13 janvier 2019 à 17h47 - Mis à jour le dimanche 13 janvier 2019 à 17h51 Juan Guaido, le président du Parlement vénézuélien, la seule institution contrôlée par l'opposition, a été arrêté dimanche par les services de renseignement, au moment où il se rendait à une réunion publique à l'extérieur de Caracas, ont annoncé son épouse et des députés. "Le Sebin (Service bolivarien de renseignement national, ndlr) a arrêté Juan Guaido", a écrit sur son compte Twitter Fabiana Rosales, l'épouse du président du Parlement.

Des députés, qui attendaient M. Guaido sur les lieux de la réunion publique à Caraballeda, à 40 km de la capitale, ont confirmé cette arrestation.

Peu de temps après, le message suivant a été diffusé sur le compte Twitter officiel de Juan Guaido : "Nous alertons le monde et le pays qu'aujourd'hui #13 janvier un commando du SEBIN a intercepté le président de l'Assemblée nationale du Venezuela @jguaido et nous ne savons pas où il se trouve".

"Alors que nous nous trouvions sur l'autoroute (...) nous avons été interceptés par deux fourgons du Sebin, avec des hommes armés et encagoulés qui ont ouvert notre véhicule, nous ont obligés à descendre, ils ne l'ont pas frappé, mais ils nous ont dit qu'ils devaient procéder à son arrestation immédiatement", a précisé Fabiana Rosales, dans une conversation téléphonique rendue publique par la députée Larissa Gonzalez.

Vendredi, au lendemain de l'investiture de Nicolas Maduro pour un deuxième mandat contesté, Juan Guaido, 35 ans, avait rappelé devant un millier de personnes à Caracas que la Constitution vénézuélienne lui donnait la légitimité pour assumer le pouvoir dans le cadre d'un gouvernement de transition.

Il avait alors appelé se mobiliser le 23 janvier en faveur d'un tel gouvernement de transition.

Le 6 janvier, le Parlement avait déclaré illégitime le nouveau mandat du président Nicolas Maduro qui a commencé le 10 janvier.

M. Maduro été réélu le 20 mai pour un nouveau mandat de six ans à l'issue d'une présidentielle contestée. Les principaux partis d'opposition avaient boycotté ce scrutin marqué par une forte abstention.

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8.22. Le Venezuela suspend l’expulsion des diplomates américains BELGA Publié le dimanche 27 janvier 2019 à 08h32 - Mis à jour le dimanche 27 janvier 2019 à 08h33 Le Venezuela a suspendu l'expulsion des diplomates américains, a indiqué le ministre des Affaires étrangères à Caracas, samedi. Les diplomates restants peuvent rester à l'ambassade américaine dans la capitale vénézuélienne, a décidé son ministère.

Les Affaires étrangères ont annoncé l'ouverture de négociations avec les Etats-Unis pour ouvrir des "sections d'intérêts" dans chaque pays, afin de maintenir un niveau minimum de relations après la rupture des liens diplomatiques. Le président vénézuélien Nicolas Maduro avait donné 72 heures aux diplomates américains pour quitter le pays. Ils pourront désormais rester pendant ces négociations, qui doivent aboutir dans 30 jours. Si aucun accord n'est conclu, ils devront quitter le territoire. La section d'intérêts correspond au niveau minimum de relations entre deux pays: Cuba et les Etats-Unis ont gardé ce type de représentation jusqu'à la réouverture en juillet 2015 de leurs ambassades respectives. Des discussions "ont commencé avec M. Jimmy Story, chargé d'affaires de l'ambassade au Venezuela, afin d'établir une modalité de représentation des intérêts du Venezuela à Washington et des Etats-Unis au Venezuela", a expliqué M. Maduro dans un discours retransmis par la télévision. Le chef d'Etat avait annoncé mercredi mettre un terme aux relations diplomatiques avec Washington après que Donald Trump a reconnu le président de l'assemblée Juan Guaido comme président du Venezuela par intérim. Le département d'Etat américain avait ordonné aux collaborateurs diplomatiques non essentiels de quitter le Venezuela après l'imposition de la dead line de 72h par Caracas. Une poignée d'entre eux est toujours en poste.

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8.23. « Qu’est-ce qui me fait peur ? le bain de sang » : le Pape François se dit terrifié par la violence au Venezuela

AFP Publié le lundi 28 janvier 2019 à 14h00 - Mis à jour le lundi 28 janvier 2019 à 14h01 Le pape François, terrifié par la violence au Venezuela, a dit lundi redouter un "bain de sang" dans ce pays, au cours d'une conférence de presse dans l'avion le ramenant à Rome après son séjour au Panama.

"Qu'est ce qui me fait peur ? le bain de sang", a répondu le pape argentin à la question d'un journaliste sur la situation au Venezuela, où, a-t-il ajouté, "le problème de la violence me terrifie".

Jorge Bergoglio a également demandé "de la hauteur de vues pour aider ceux qui peuvent aider à régler le problème" dans ce pays en crise et au bord de la guerre civile.

"Je souffre pour ce qui est en train de se passer au Venezuela en ce moment et pour cela je voudrais qu'ils se mettent d'accord", bien que se mettre d'accord ne soit pas toujours la meilleure solution. Ce qu'il faut c'est "une solution juste et pacifique", a-t-il affirmé, sans vouloir se prononcer davantage car, a-t-il souligné, ce serait "une imprudence" dans ce contexte explosif.

Dans sa prière de l'Angélus, dimanche, François avait déjà réclamé une "solution juste et pacifique pour surmonter la crise (au Venezuela), en respectant les droits de l'homme".

Le Venezuela vit une des plus graves crises politiques de son histoire : le président socialiste Nicolas Maduro, qui a reçu le soutien de l'armée vénézuélienne, accuse les États-Unis d'inciter l'opposant de droite Juan Guaido, qui s'est autoproclamé président, à perpétrer un "coup d'État".

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8.24. Maduro se dit favorable à des législatives anticipées AFP Publié le mercredi 30 janvier 2019 à 08h06 - Mis à jour le mercredi 30 janvier 2019 à 08h26 Le président vénézuélien Nicolas Maduro s'est dit prêt mercredi, à l'aube d'une nouvelle journée de manifestations, à organiser des législatives anticipées et à négocier avec l'opposition, tout en rejetant la tenue d'une nouvelle présidentielle.

"Ce serait très bien d'organiser des élections législatives plus tôt, cela constituerait une très bonne forme de discussion politique, une bonne solution par le vote populaire", a déclaré le président socialiste à l'agence publique russe RIA Novosti.

En revanche, "les élections présidentielles ont eu lieu il y a moins d'un an, il y a 10 mois", a-t-il relevé : "Nous n'acceptons les ultimatums de personne dans le monde, nous n'acceptons pas le chantage. Les élections présidentielles ont eu lieu au Venezuela et si les impérialistes veulent de nouvelles élections, qu'ils attendent 2025".

L'opposition vénézuélienne manifeste mercredi pour convaincre l'armée de tourner le dos au président socialiste Nicolas Maduro et reconnaître à sa place l'opposant Juan Guaido, porté par un soutien international croissant.

Le risque de troubles civils est élevé dans ce pays de 32 millions d'habitants, l'un des plus violents au monde, en plein naufrage économique et déchiré par une crise politique qui se crispe autour de deux camps: les chavistes et les opposants.

"Je suis prêt à m'asseoir à la table des négociations avec l'opposition, pour parler pour le bien du Venezuela, pour la paix et son avenir", a assuré le président socialiste.

Interrogé sur une possible médiation internationale, il a assuré qu'il y avait "plusieurs gouvernements et organisations dans le monde qui montrent une préoccupation sincère", ajoutant souhaiter qu'"ils soutiennent le dialogue".

Il s'est également dit "prêt à discuter personnellement avec Donald Trump personnellement, en public, aux Etats-Unis, au Venezuela, où il voudra, quel que soit le programme". Il a cependant estimé que c'était "compliqué actuellement", notamment car le conseiller à la sécurité nationale John Bolton "a interdit à Trump d'entamer le dialogue".

Il a exprimé sa "reconnaissance" au président russe Vladimir Poutine, qui soutient dans cette crise Nicolas Maduro. Il a affirmé que le Venezuela continuait de recevoir "chaque mois" de l'armement russe, "le plus moderne au monde", dans le cadre des contrats en vigueur.

Le président vénézuélien a assuré que malgré la situation économique du pays, Caracas continuerait de payer ses dettes à la Chine et à la Russie, ses principaux créanciers: "Le Venezuela paye, toujours dans les temps".

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8.25. Venezuela : l’armée a la main CONTRIBUTION EXTERNE Publié le mercredi 30 janvier 2019 à 09h28 - Mis à jour le mercredi 30 janvier 2019 à 09h51 Le bras de fer entre Maduro et Guaidó, et entre Chine et Russie contre les États-Unis, a peu de chances de déboucher sur un conflit armé. Mais tous les yeux sont tournés vers l’armée vénézuélienne. Une opinion de Sebastian Santander, professeur en science politique (ULiège), directeur du Center for International Relations Studies (Cefir). Le Venezuela est face à une crise politique profonde qui se double d’une crise économique et sociale aiguë et d’un bras de fer diplomatique mondial qui envenime davantage les choses. La situation interne se détériore d’année en année. La société vénézuélienne est fort clivée. Gouvernement et opposition sont dans une surenchère constante et grandissante. Ce conflit remonte déjà à l’époque du gouvernement de Chavez (1999-2013) dont le projet politique et socio-économique de gauche provoquait un rejet absolu dans l’opposition au point que certaines forces conservatrices du pays iront jusqu’à fomenter un coup d’État (2002) contre le Président, qui finira par échouer.

La malédiction du pétrole

Les politiques sociales chavites viseront à développer un système de soins de santé gratuits à destination des plus démunis ainsi que des missions favorisant l’accès à l’éducation ou la mise en place, dans les quartiers populaires, de magasins subventionnés fournissant des produits alimentaires à prix cassés. Ces politiques sociales, financées par le pétrole, feront chuter le taux de pauvreté entre 2003 et 2010. Mais l’argent du pétrole servira aussi des objectifs clientélistes et népotistes alimentant la corruption qui existait déjà avant le chavisme. En outre, le Venezuela, qui détient les plus grandes réserves de pétrole au monde, ne profitera pas du cours élevé du baril pour entretenir ses infrastructures pétrolières, diversifier son économie et développer une industrie nationale. Résultat : le pays importera presque tout de l’étranger et devra raffiner son pétrole aux États-Unis (ÉU). La malédiction du pétrole ne s’arrêtera pas là : l’État qui tire plus de 90 % de ses revenus du pétrole sera frappé de plein fouet par la chute du prix de l’or noir entre 2014 et 2016, aggravant la situation économique et sociale, et poussant 3 millions de Vénézuéliens à fuir leur pays.

"Rébellion" de l’Assemblée

La crise prend un nouveau tournant en 2015 quand le président Maduro perd les élections législatives. La nouvelle Assemblée nationale décide alors de se déclarer en "rébellion totale" contre le gouvernement chaviste et manœuvre pour que se tienne

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un référendum révocatoire contre le Président. Ce dernier fait tout pour empêcher le bon fonctionnement de l’Assemblée nationale et incite la Cour suprême, qui lui est acquise, à s’arroger le pouvoir législatif. Quelques mois plus tard, M. Maduro organise des élections législatives pour élire une Assemblée constituante. Ces élections de 2017, qui se déroulent dans un climat de violence meurtrière, sont boycottées par l’opposition et débouchent sur l’établissement d’une Assemblée constituante composée des partisans du Président. L’année suivante, le président Maduro organise des élections présidentielles contestées et désertées par l’opposition, et se fait réélire jusqu’en 2025.

Mais ni l’opposition ni un certain nombre d’États dans le monde ne reconnaissent le résultat de ces élections. Le président de l’Assemblée nationale, Juan Guaidó, s’autoproclame alors président intérimaire en se basant sur plusieurs articles de la Constitution qui considèrent que quand le pouvoir est vacant, il revient au chef du législatif. Bien que cet épisode constitue une énième onde de choc dans le pays, il n’occasionne pas moins une situation rocambolesque puisque le Venezuela se retrouve avec deux présidents dont chacun jouit d’appuis nationaux et internationaux différents.

Bolivie, Cuba et Mexique

Ce bras de fer génère des conflits à l’échelle nationale, continentale et mondiale. Le gouvernement de Maduro est issu du "tournant à gauche" en Amérique latine (AL) qui a lieu entre 2000 et 2015. Durant ces années, le chavisme jouit du soutien de la majorité des pays du continent. Le Venezuela était même devenu l’un des plus ardents défenseurs de la gauche continentale. Mais depuis 2015, l’AL connaît un virage à droite. Le reflux des gauches modifie les rapports de force au détriment du chavisme dont les appuis se limitent dorénavant à la Bolivie, à Cuba et au Mexique. Les nouvelles droites au pouvoir en AL manœuvrent pour isoler le régime chaviste en le suspendant de certaines instances régionales, en refusant de l’inviter à des sommets de chefs d’État et de gouvernement, en refusant de reconnaître le nouveau mandat de Maduro et en appuyant le président autoproclamé.

Ce bras de fer se poursuit à l’échelle mondiale et met aux prises les grandes puissances. Depuis des années, la Russie et la Chine tout comme l’Iran et la Turquie sont à couteaux tirés avec les États-Unis et revendiquent une meilleure redistribution du pouvoir international. Elles se redéploient sur la scène mondiale et (re)prennent pied en AL en développant des relations avec des gouvernements en froid avec Washington. La Russie investit des milliards au Venezuela, lui vend des armes, rééchelonne une partie de sa dette, achemine des bombardiers et organise des exercices militaires conjoints dans la région. La Chine devient le principal investisseur dans la production de pétrole du Venezuela et le premier importateur de matières premières vénézuéliennes. Caracas rembourse d’ailleurs ses dettes à Pékin par l’envoi quotidien de pétrole. Russie et Chine craignent qu’un changement de régime

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hypothèque leurs alliances et intérêts respectifs dans le pays, et en appellent à soutenir Maduro au nom du "respect de la légalité et du droit international".

Rubio, le sénateur de Floride

Cette présence étrangère au Venezuela préoccupe les États-Unis et accroît l’animosité américaine ambiante contre la Russie et la Chine. L’administration Trump prend appui sur les droites d’AL et sur l’opposition vénézuélienne pour faire vaciller le chavisme. D’ailleurs, J. Guaidó a attendu d’avoir l’appui de l’administration Trump avant de s’autoproclamer président intérimaire. Inspiré par l’idéologie de la Destinée manifeste, les autorités américaines disent vouloir œuvrer en faveur de l’ordre et de la démocratie au Venezuela car ce pays se situe dans leur hémisphère. Mais les États-Unis ont des intérêts économiques en jeu : ils sont le premier acheteur de pétrole brut du Venezuela et fournissent du brut léger à Caracas. Sans compter que de nombreux Vénézuéliens opposés au régime de Maduro ont fui vers la Floride, État du sénateur Marco Rubio, instigateur de la stratégie de reconnaissance de Guaidó.

Une intervention étrangère ?

Ce bras de fer entre grandes puissances débouchera-t-il sur un conflit armé ? En réalité, la Russie et la Chine utilisent le Venezuela pour s’affirmer politiquement face aux États-Unis. Mais ni l’un ni l’autre n’ont intérêt à s’engager dans un conflit armé pour sauver le régime d’un pays lointain. Une intervention militaire américaine est peu probable car elle nécessiterait l’aval du Congrès. Or les démocrates et une partie des républicains risqueraient de s’opposer à une telle intervention.

Quels scenarii pour sortir de l’impasse ? Il semble que l’armée vénézuélienne ait un rôle clé à jouer. Pour le moment, elle considère le gouvernement de Maduro comme le seul pouvoir légitime. Toutefois, on sent poindre dans l’armée un certain mécontentement qui jusqu’à présent a été étouffé. Si l’armée venait à se rebeller, on aurait soit un renversement de Maduro, soit une révolution de palais où un chaviste le remplacerait. Une autre éventualité pourrait être l’organisation de nouvelles élections sous la pression internationale et des militaires. Quoi qu’il en soit, l’armée aurait la main. Raison pour laquelle tous les yeux sont tournés vers elle.

Titre et chapeau sont de la rédaction.

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8.26. Venezuela : Maduro rejette l’ultimatum européen pour une nouvelle présidentielle

AFP Publié le dimanche 03 février 2019 à 23h45 - Mis à jour le lundi 04 février 2019 à 00h01 Le chef de l'Etat vénézuélien Nicolas Maduro a rejeté l'ultimatum de plusieurs pays européens pour l'organisation d'une nouvelle élection présidentielle, expirant dimanche en fin de journée, dans un entretien avec la chaîne de télévision espagnole La Sexta.

M. Maduro a déclaré qu'il ne ferait pas preuve de "lâcheté face aux pressions" de ceux qui réclament son départ et soutiennent l'opposant Juan Guaido. L'Espagne, la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, le Portugal, rejoints dimanche par l'Autriche, ont exigé du pouvoir de M. Maduro qu'il annonce la convocation d'une présidentielle anticipée, faute de quoi ils reconnaîtraient M. Guaido comme président du Venezuela.

Appel du Premier ministre canadien et de Juan Guaido à une présidentielle "libre"

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau et l'opposant vénézuélien Juan Guaido ont appelé dimanche à l'organisation d'une élection présidentielle "libre et juste" au Venezuela en raison de l'"illégitimité" du régime de Nicolas Maduro.

MM. Trudeau et Guaido ont convenu dans un entretien téléphonique à la veille d'une réunion à Ottawa du groupe de Lima -qui compte plusieurs pays latino-américains et le Canada- qu'il était "important que la communauté internationale envoie un message clair concernant l'illégitimité du régime Maduro et le respect de la Constitution vénézuélienne", selon un communiqué du cabinet du chef du gouvernement canadien.

Les deux hommes se sont en outre prononcés en faveur de l'organisation d'une présidentielle "libre et juste", a ajouté le cabinet.

Juan Guaido, le chef du Parlement et rival du président socialiste Nicolas Maduro, s'est proclamé mercredi dernier président par intérim du Venezuela, affirmant que la Constitution l'autorisait à le faire.

L'opposition estime, en effet, qu'il existe un vide du pouvoir dans la mesure où elle juge illégitime le second mandat pour lequel M. Maduro a été investi le 10 janvier.

Dans son entretien avec M. Trudeau, M. Guaido s'est dit "déterminé à assurer une transition pacifique vers la démocratie, conformément à la Constitution vénézuélienne", selon le communiqué diffusé par Ottawa.

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Les Vénézuéliens, dont le pays était autrefois le plus riche d'Amérique latine grâce à ses revenus pétroliers, sont désormais confrontés à de graves pénuries de vivres et de médicaments, ainsi qu'à une inflation galopante.

Hormis la réitération de son soutien à M. Guaido, le Premier ministre canadien a déclaré que la 10e réunion ministérielle du Groupe de Lima porterait sur "la façon dont la communauté internationale peut appuyer davantage la population du Venezuela, y compris au moyen d'une aide humanitaire immédiate".

Le Groupe de Lima a été créé en août 2017 pour contribuer à un règlement pacifique de la crise au Venezuela.

Mardi, ses 14 pays membres se sont dits contre toute intervention militaire au Venezuela pour renverser le président Maduro.

Outre le Canada, les Etats-Unis, la France, l'Allemagne, l'Espagne, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni et de nombreux pays d'Amérique latine, dont la Colombie et le Brésil, ont apporté leur soutien à Juan Guaido.

En revanche, la Russie, la Chine, la Turquie et l'Iran soutiennent Nicolas Maduro.

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8.27. Recep Erdogan s’immisce dans la crise vénézuélienne et s’en prend à l’UE

BELGA Publié le mardi 05 février 2019 à 12h25 - Mis à jour le mardi 05 février 2019 à 12h25 Le président turc Recep Tayyip Erdogan a accusé mardi l'Union européenne de chercher à renverser le président vénézuélien Nicolas Maduro, au mépris de la "démocratie".

"On sait maintenant ce qu'est l'UE. (...) D'un côté, vous parlez d'élections et de démocratie et après, par la violence et la ruse, vous allez renverser un gouvernement", a déclaré M. Erdogan lors d'un discours télévisé.

Dix-neuf pays de l'Union européenne ont reconnu Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela après qu'il s'est autoproclamé président le 23 janvier. Il considère Nicolas Maduro comme un usurpateur pour s'être fait réélire lors d'une élection contestée par l'opposition et par une grande partie de la communauté internationale, avec ses adversaires en prison ou en exil.

Washington, qui a reconnu M. Guaido aussitôt après son autoproclamation comme président, s'est félicité des reconnaissances européennes et a invité tous les autres pays à faire de même. Mais le chef de l'État turc soutient fermement M. Maduro.

M. Erdogan a qualifié mardi les efforts destinés à pousser M. Maduro vers la sortie de "tentative de coup d'État pour déloger le dirigeant élu du pays du pouvoir".

Le président turc avait appelé M. Maduro le 23 janvier pour lui apporter son soutien, l'exhortant à garder "la tête haute". MM. Erdogan et Maduro entretiennent des rapports étroits depuis plusieurs années. M. Maduro fut l'un des premiers dirigeants au monde à apporter son soutien à M. Erdogan après la tentative de coup d'État contre ce dernier en juillet 2016.

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8.28. Reconnaître Guaido comme « président en charge » du Venezuela : pourquoi la décision de plusieurs pays européens manque de cohérence

MARIE-FRANCE CROS Publié le mardi 05 février 2019 à 06h33 - Mis à jour le mardi 05 février 2019 à 10h16 La décision de plusieurs pays européens manque de cohérence. Analyse. L’Espagne, le Royaume-Uni, la France, l’Autriche, le Danemark, l’Allemagne, la Finlande, les Pays- Bas, la Lituanie et la Suède ont reconnu lundi Juan Guaido comme "président en charge" du Venezuela, en lieu et place de Nicolas Maduro. Ils suivent ainsi les États-Unis, premier pays à approuver l’autoproclamation inopinée (même sa mère, à ses côtés, ne s’y attendait pas) du jeune président de l’Assemblée nationale, le 24 janvier, imités ensuite par une dizaine de pays latino-américains. On a toutefois du mal à comprendre cette position européenne. Rivaux exclus aussi au Congo M. Maduro a été réélu lors d’une présidentielle anticipée, en mai dernier, dont avaient été exclus ses principaux rivaux. Mais ce n’est pas le premier chef d’État à assurer sa réélection en écartant ses rivaux. Ainsi, le cas tout récent du Congo-Kinshasa a également vu les principaux concurrents des kabilistes écartés de la compétition, sans que cela n’entraîne la même indignation dans ces pays européens. Les Congolais sont, eux aussi, frappés de pauvreté pour raisons de malgouvernance. Et Kinshasa a fait bien pire que Caracas puisqu’elle a ensuite nommé Président un concurrent qui n’a pas gagné l’élection malgré les exclusions. Par ailleurs, contrairement à ce qui a été dit ces dernières semaines, M. Maduro ne s’est pas mis dans l’illégalité en prêtant serment, le 10 janvier dernier, devant la Cour suprême au lieu de le faire devant les députés : l’article 231 de la Constitution vénézuélienne prévoit que cela se fasse ainsi "si, pour quelque motif que ce soit, le Président ou la Présidente de la République ne pouvait prendre possession (NDLR : du pouvoir) devant l’Assemblée nationale". On sait que M. Maduro a choisi la Cour suprême parce que l’Assemblée nationale - qu’il cherche toujours à circonvenir - est contrôlée par l’opposition depuis décembre 2015. Mais la Constitution dit bien "pour quelque motif que ce soit".

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Un autre que Guaido Par ailleurs, quand la communauté internationale reconnaît un pouvoir alternatif parce que le pouvoir officiel est sorti de la loi de manière plus extraordinaire que ce que de nombreux peuples doivent supporter, elle reste le plus près possible de la légalité du pays concerné. Or, la Constitution vénézuélienne ne désigne le président de l’Assemblée nationale comme le remplaçant du chef de l’État en cas de "défaillance absolue" de ce dernier que dans le cas où elle survient entre l’élection et la prestation de serment du Président. Dès qu’il est investi, et durant "les quatre premières années" de son mandat de six ans, le chef de l’État en "défaillance absolue" doit être remplacé au moyen d’une "nouvelle élection universelle et directe dans les 30 jours", en attendant celle-ci, c’est "le vice-Président ou la vice-Présidente exécutif qui se chargera de la Présidence de la République" (article 233 de la Constitution vénézuélienne), soit Delcy Rodriguez. Pourquoi donc sauter sur l’impulsion de Juan Guaido pour en faire "le Président en charge" ? Enfin, l’Espagne, qui a lancé le mouvement pro-Guaido au sein de l’Union européenne, a eu droit à une allocution télévisée de son Premier ministre, le socialiste Pedro Sanchez, appelant M. Guaido à convoquer de nouvelles élections présidentielles "dans le plus bref délai possible". Comment diable cet ingénieur de 35 ans, issu d’une famille modeste, le pourrait-il alors qu’il ne dispose ni de l’administration, ni de l’armée ? Invasion ? Guerre civile On sait que le président Trump n’a pas écarté la possibilité d’une intervention militaire au Venezuela, bien que les pays du Groupe de Lima qui ont reconnu Guaido s’y soient opposés. Procéder à une telle intervention déclencherait à coup sûr une guerre civile. Car toute la société vénézuélienne n’est pas derrière l’opposition et le Président autoproclamé. M. Maduro garde en effet un soutien important non seulement au sein de l’armée mais aussi dans la population, parmi les plus pauvres, persuadés que l’arrivée de l’opposition de droite au pouvoir en finira avec leurs rêves de promotion sociale. S’y ajouteraient ceux qui combattraient "l’envahisseur" par patriotisme, bien plus enraciné au Venezuela qu’au Congo. Enfin, les capitales européennes devraient se souvenir que l’opposition ne s’entend que pour rejeter Maduro. Pour le reste, elle est désunie et minée par des rivalités d’ego qui lui ont déjà coûté cher.

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8.29. Venezuela, position à adopter face à la Russie … Les divergences entre les pays font patiner la politique étrangère de l’UE

MARIA UDRESCU Publié le mercredi 06 février 2019 à 11h12 - Mis à jour le jeudi 07 février 2019 à 19h36 Cette semaine, les États membres ont affiché leurs divergences sur plusieurs sujets. L’Union européenne dispose-t-elle encore d’une politique étrangère ? La question pourrait se poser, tant les États membres ont étalé leurs divergences sur plusieurs sujets ce lundi, tels que la situation au Vénézuela, la migration ou encore le ton à adopter face à la Russie, affichant ainsi leur incapacité à parler d’une seule voix sur la scène internationale. "Un consensus entre les Vingt-huit est nécessaire pour forger formellement une politique étrangère européenne, ce qui a toujours été un exercice difficile ", explique Steven Blockmans, du Centre for European Policy Studies. La multiplication des contradictions diplomatiques au sein de l’UE cette semaine n’est donc pas inédite et résulte d’un malheureux hasard du calendrier. Elle n’en est pas moins symptomatique d’une Union "dont l’environnement politique est en mutation et se fragmente", estime Giovanni Grevi, directeur du programme "Europe in the world", à l’European Policy Centre. La question vénézuélienne divise l’Italie et l’Union Lundi, seuls dix-neuf États membres ont reconnu l’opposant Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela, suite à l’expiration dimanche, de l’ultimatum lancé par six pays européens (France, Allemagne, Royaume-Uni, Espagne, Portugal et Autriche) au chef de l’État vénézuélien Nicolas Maduro, lui enjoignant de convoquer une nouvelle élection présidentielle. Ces réactions en ordre dispersé ont mis en évidence le silence de l’Union sur un sujet sur lequel elle s’est déjà positionnée par le passé, en adoptant des sanctions économiques contre Caracas. Une position européenne a été impossible à adopter cette fois, puisqu’elle n’existe pas. La Grèce reste le seul État membre à soutenir le régime chaviste, fidélité de gauche oblige. L’Italie a jugé, par la voix de son Premier ministre, Giuseppe Conte, qu’il n’était pas "opportun de se précipiter à reconnaître des investitures comme celle de M. Guaidó, qui n’ont pas été validées par un processus électoral". En réalité, cette position italienne est due à des divergences entre les membres de la coalition au pouvoir à Rome, La Ligue (extrême droite) ayant exprimé son soutien à M. Guaido, contrairement aux populistes du Mouvement 5 Étoiles (M5S). D’autres États, dont l’Irlande, la Suède, la Finlande, ont refusé de se jeter à l’eau. La Belgique a, elle, simplement exprimé un "soutien à Juan Guaido dans sa mission d’organiser de nouvelles élections libres et transparentes".

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La réunion avec la Ligue arabe reste sans conclusions Toujours lundi, les ministres des Affaires étrangères européens et les représentants de la Ligue arabe s’étaient donné rendez-vous à Bruxelles pour préparer le sommet UE-Ligue arabe prévu les 24 et 25 février à Charm el-Sheikh, où seront abordés des défis communs tels que le terrorisme, le changement climatique et (surtout) la migration. Aucune conclusion n’a toutefois suivi cette rencontre. En cause : le refus de la Hongrie et de la Pologne d’y mentionner… la question migratoire, un thème pourtant crucial, à l’heure où l’Union tente de convaincre les pays nord-africains de prendre part à la gestion de la crise migratoire. Le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) avait toutefois concocté en dernière minute une déclaration hautement consensuelle. Mais la teneur de celle-ci s’est avéré tellement fade que les Vingt-huit ont, de nouveau, préféré le silence, comme le rapporte Politico qui a obtenu une copie du projet de conclusions avorté. Quelle position européenne face à la Russie ? Cinq jours après que Washington et Moscou ont décidé de suspendre leur participation au traité sur les armes nucléaires de portée intermédiaire (INF), la réaction européenne se fait attendre. Or, si l’UE n’y figure pas en tant que telle comme signataire, "l’Europe est probablement celle qui a le plus bénéficié de ce traité", avait affirmé vendredi Mme Mogherini, avant d’annoncer la publication d’une déclaration commune aux Vingt-huit, "dans les prochaines heures". Et depuis ? Plus rien. D’après Politico, un projet de texte a été bloqué lundi par des pays de l’UE non membres de l’Otan, le considérant trop sévère à l’égard de Moscou. "Sur la Russie, vous avez d’un côté le groupe de la ‘guerre froide’ (allant des États baltes à la Pologne) et de l’autre, les ‘chevaux de Troie’, dont Chypre, qui promeuvent les intérêts russes dans l’UE. Entre les deux, il y a un groupe ‘agnostique’, dont fait partie l’Allemagne qui souffle le chaud et le froid sur la Russie", note M. Blockmans. Une politique étrangère affectée par la fragmentation politique de l’UE Reste une victoire de la politique étrangère européenne à noter cette semaine : l’UE a entériné l’entité créée par Paris, Berlin et Londres pour commercer avec Téhéran malgré les sanctions américaines rétablies en 2018. Et de manière générale, "l’épisode honteux" de lundi dernier n’enlève rien au fait que "la politique étrangère de l’Union se poursuit dans d’autres domaines", précise M. Blockmans. "S’il y a un pouvoir que l’UE exerce le plus efficacement dans le monde, c’est celui de l’argent, que ce soit de manière négative (sanctions financières) ou positive (aide au développement, accords commerciaux)."

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Mais ce type d’épisodes risque de se répéter, tant "les politiques nationales au sein de l’UE sont de plus en plus polarisées", ce qui risque de rendre de plus en plus difficile l’adoption d’une position européenne à l’unanimité des Vingt-huit, note M. Grevi. Si la prise de décisions en matière de politique étrangère à la majorité qualifiée pourrait théoriquement être une solution au blocage, l’idée ne semble pas recueillir… l’unanimité des Vingt-huit nécessaire à son implémentation. Selon M. Grevi, "le système décisionnel est dans l’impasse. S’il est impossible d’avancer à Vingt-huit, les progrès se feront de plus en plus à travers des coalitions d’États membres qui décideront de prendre le lead. Ce qui ne serait pas bénéfique pour la politique étrangère européenne en tant que telle".

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8.30. La menace d’une intervention américaine plane sur le Venezuela : « Venez nous libérer ! »

ANNIE-LAURE PETIT, ENVOYÉE SPÉCIALE À SAN ANTONIO (VENEZUELA) Publié le lundi 25 février 2019 à 14h15 - Mis à jour le lundi 25 février 2019 à 14h16 L'aide humanitaire partie du Brésil et de la Colombie a dû renoncer. Certains militaires commencent à faire défection. Washington fait encore monter la pression sur Nicolas Maduro. Leurs bus sont grands et modernes. Des modèles comme on n’en voit pas dans ce petit village de la frontière vénézuélienne avec la Colombie. D’ordinaire, ils sont petits, usagés et surchargés. Ils déversent ceux qui fuient le pays. Mais ces bus-là sont bordeaux et portent les inscriptions de la République bolivarienne. "Ça, ce sont les gens de Maduro", traduit Julio (*), qui connaît San Antonio depuis toujours. Ils ont pris d’assaut les collèges et les écoles et en ont fait leurs casernes. De nombreuses voitures de policiers à l’intérieur, pour leur sécurité personnelle. Interdit de les approcher, de prendre une photo et encore moins de questionner. "Les gens de Maduro" ne sortent pas dans la ville. Ils sont emmenés en bus depuis le groupe scolaire qu’ils se sont approprié au pont qu’ils vont occuper. Allers et retours. Rien d’autre. "Les gens de Maduro" sont inaccessibles. "Des pro-Maduro, il n’y en a pas ici à San Antonio. C’est pour ça qu’ils les ont fait venir", poursuit Julio. "Ici, on gère les trochas. La zone est passée aux mains des paramilitaires colombiens. Regarde…" Sous le pont-frontière Simon Bolivar, on devine des passages entre les roseaux du fleuve Tachira. Des guetteurs partout sur des kilomètres et ce samedi matin, alors que la frontière est fermée et qu’un groupe de militaires pose pour la presse, des rabatteurs continuent de crier "Colombie, Colombie". Le business est bien rodé et le prix du passage en Colombie via "la trocha" vient de grimper, loi de l’offre et de la demande oblige. Les frontaliers qui doivent aller travailler sur l’autre rive sont usés. "Et eux, ils font la fête sur le pont. Mais c’est pas à eux, le pont, c’est à nous tous. Ils font leur numéro et nous, on a que dalle. On est obligés de bosser en Colombie pour gagner à peine de quoi survivre. Y en a vraiment ras le bol !", discutent deux amis qui regardent quelle trocha choisir. San Antonio était prospère avant la crise. Les commerces fleurissaient à la douane et on y a fait de bonnes fortunes. Il n’en reste plus que des vestiges. Dans l’avenue principale, Mauricio (*) a allumé une petite radio et discute sur les barricades avec les gardes en uniforme vert. "Ici, on se connaît tous, il n’y a pas de problème." Pour une fois, les gardes n’ont ni le torse bombé ni la tête haute. À cause de la reddition de trois de leurs collègues sur un autre pont, à 20 km de là, à Urena ? Ils baisseront juste le regard, tourneront le dos et feront signe de ne pas trop en demander quand même. Répression brutale et violences gratuites

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Un peu plus haut dans la ville, des médecins, des étudiants et de nombreux citoyens en t-shirt blanc. Les volontaires pour faire entrer l’aide humanitaire sont prêts. "Bienvenue à l’opération Liberté", annonce le haut-parleur posé à l’arrière d’un pick-up. Le check point au-dessus de San Antonio a été renforcé la veille et de très nombreux bus ont été refoulés avant que la route ne soit définitivement fermée. Sans accès, moins de monde que prévu mais la détermination est intacte : convaincre les militaires de laisser passer l’aide humanitaire. Certains prient à genoux sur le bitume. Les femmes sont mises en tête du cortège, bras dessus bras dessous, et l’espoir illumine les visages, comme jamais. San Antonio n’a jamais connu aucune manifestation, d’aucun bord. Des centaines d’habitants les rejoignent spontanément. La famille Penarada est sur son balcon. Teresa est en appel vidéo avec ses petites-filles émigrées aux États-Unis. Son mari, Gavino, 71 ans, en a presque les larmes aux yeux. "La foule est pacifique, c’est incroyable ! C’est une guerre des coeurs, une guerre d’amour. Mon cœur s’enorgueillit. Maduro est intelligent, il va négocier." La foule en bas scande "Oui, c’est possible." Un camion militaire arrive trop tard pour bloquer la rue, le cortège le fait reculer avec des sourires. Mais 200 m plus bas, les premiers tirs. Des gaz lacrymogènes. Des hommes armés en civil. Et un nuage qui fait courir dans tous les sens. Début de panique. Les affrontements sont tout de suite violents. La manifestation se transforme en insurrection. Lui, 23 ans, court avec une barricade qu’il vient d’arracher comme il arracherait sa liberté s’il le pouvait. "Il y a des militaires, il y en a trop. Ils n’ont aucune compassion, ils sont extrêmement agressifs. Mais qu’ils se calment ! Nous voulons la paix." Il est vendeur de ticket de bus les autres jours, très loin d’un délinquant ou d’un opposant politique. Des "collectivos" armés font régner la peur Près de la douane, Enrique (*) explose d’une rage qui ne peut plus être contenue. "Je suis ingénieur électricien, ce n’est pas possible que j’ai fait cinq ans d’université pour crever la faim ! Ce n’est pas possible ça !", dit-il avant de jeter avec force des pierres ramassées dans la rue qui n’est plus entretenue depuis de nombreuses années. Puis, comme tout le monde, de prendre ses jambes à son cou devant l’arrivée des "collectivos", des hommes masqués et armés qui tirent, dans toute la ville. Dix-huit blessés par armes à feu, beaucoup d’autres par des plombs, et même le médecin en charge des premiers secours a été menacé de mort. Hugo Castillo Bellido, de l’ONG Médicos, responsable des premiers secours (33 infirmiers et médecins), devant la douane raconte : "On est descendus de trois rues pour aller

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chercher six personnes blessées par les gaz lacrymogènes. On était au sol en train de soigner quelqu’un. Des collectivos sont apparus. Ils m’ont frappé, m’ont insulté de traître à la patrie, m’ont dit qu’ils avaient seulement besoin des médecins cubains, ce genre de discours […]. Ils m’ont mis une arme sur la poitrine et frappé au visage […]. Il a fallu que ce soit un autre collectivo et des militaires qui nous extraient sous des tirs croisés. […] Ces collectivos sont des prisonniers que le gouvernement a sortis de prison et mis dans la rue, ils n’ont de scrupules pour rien." La ville de San Antonio a basculé dans la terreur. Des hordes de motards encagoulés, armés, ont imposé de tout fermer et interdit de sortir. Une ambiance de couvre-feu totalitaire, comme si la ville était assiégée. La peur au ventre, Antonio (*) lâche : "Maintenant que le monde entier voit que rien ne marche, venez nous libérer !" (*) Prénom d’emprunt Guerre des concerts sur la frontière entre la Colombie et le Venezuela Ils portent des jeans troués et ne rateraient ça pour rien au monde. Maël et sa petite amie, rouge vif sur les lèvres et épaules dénudées façon colombienne, n’ont jamais eu l’occasion d’aller à un tel concert. "Je suis venu exprès de Maracaïbo. Moi, je ne connais que Maduro et je ne peux même pas m’acheter une paire de chaussures !" Les amoureux se serrent les mains, comme si tout pouvait s’arrêter, maintenant. "C’est un jour d’espérance" , veut croire Mario Florès qui apprend à répéter "libertad" à son fils de cinq ans juché sur ses épaules revêtues d’un très grand drapeau de son pays. Comme lui, plus de 320 000 personnes sont venues assister, à Cucutà, au concert en faveur de la liberté et de l’aide humanitaire. À l’autre bout du pont de Las Tienditas, ils sont à peine deux mille à avoir la casquette rouge vissée sur la tête. Leur scène musicale n’est pas montée, aucun chanteur n’est arrivé et ils reçoivent les décibels de leurs "ennemis impérialistes". Les partisans de Maduro ont orchestré un défilé millimétré en scandant des hymnes socialistes, le tout scandé le poing levé. Et ils refusent tous de parler. Ces soutiens du gouvernement sont venus en bus, payés par l’État, depuis tout le pays. Pendant que les locaux continuent de faire la queue à la station-service pendant deux jours. S’arrêter devant l’école de Cuba où certains dorment, et sortir son téléphone, revient à se faire agresser verbalement, se faire encercler par 30 personnes et se faire menacer. "La souveraineté", c’est ce qu’ils sont venus défendre. À 40 km de là, dans les montagnes colombiennes, des groupes de Vénézuéliens marchent le long de la route qui va à Bucaramanga. Fuyant leur pays sans avoir l’argent pour se payer le bus.

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Pressions américaine et colombienne "Le pire du pire des tyrans" Qualifiant sur la chaîne CNN le président vénézuélien Maduro de "pire du pire des tyrans", le secrétaire d’État américain Mike Pompeo s’est dit "certain que, grâce aux Vénézuéliens, les jours de Maduro sont comptés". Guaido et le groupe de Lima Le président colombien Ivan Duque, ferme soutien de M. Guaido, s’est rendu dimanche sur la frontière entre les deux pays. Il a salué l’arrivée de M. Guaido au sein du "groupe de Lima", créé en 2017 pour résoudre la crise vénézuélienne. "Le gouver-nement légitime du Venezuela intègre formellement le groupe de Lima et […] nous lui souhaitons la bienvenue", a-t-il affirmé.

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8.31. Pourquoi la crise au Venezuela peut avoir un impact sur la présidentielle américain

AFP Publié le mardi 26 février 2019 à 20h49 - Mis à jour le mardi 26 février 2019 à 20h57 Normalement, une crise dans un pays étranger, comme celle qui secoue le Venezuela, ne devrait pas avoir d'impact sur les affaires domestiques aux Etats-Unis. Mais c'est sans compter le poids de la communauté vénézuélienne en Floride, un Etat clé dans la course à la Maison Blanche.

La Floride fait partie de ces "swing states", ces Etats indécis qui peuvent basculer à tout moment côté démocrate ou républicain et ont donc une importance capitale dans une élection présidentielle.

En 2000, la victoire du républicain George W. Bush était ainsi en grande partie due à son succès à Floride, Etat qu'il avait remporté par moins de 600 votes...

L'importance des 150.000 Vénézuéliens qui y résident actuellement - et sont très favorables à la politique agressive menée par Donald Trump à l'encontre de Nicolas Maduro - n'est donc pas à négliger en vue de l'élection présidentielle de 2020.

"La Floride est un Etat tellement contesté que le moindre changement politique pour un petit groupe a de grandes implications", explique Michael McDonald, professeur de sciences politiques à l'Université de Floride.

Seulement 36.000 personnes nées au Venezuela votent aux Etats-Unis, mais si on compte leurs descendants - immigrés de deuxième ou troisième génération - on arrive à des "dizaines de milliers" d'électeurs, selon Daniel Smith, professeur à l'Université internationale de Floride".

Avec ses 21 millions d'habitants, la Floride est la porte d'entrée des Etats-Unis sur l'Amérique latine. Et les politiciens locaux doivent prêter une attention toute particulière aux remous dans des pays comme le Venezuela, Cuba ou le Nicaragua.

Le sénateur républicain de Floride Marco Rubio, fils d'immigrés cubains anti-castristes, est ainsi l'un des plus fervents opposants au président socialiste Nicolas Maduro.

De quoi s'attirer les bonnes grâces des Vénézuéliens émigrés en Floride, traditionnellement non marqués républicains ou démocrates, mais fortement opposés à la politique chaviste de Nicolas Maduro.

"Bien que je ne sois pas républicaine, je suis très sensible au soutien apporté par Trump et le gouvernement américain dans le conflit", a par exemple estimé Bettina Grand, actrice vénézuélienne de 53 ans qui réside à Miami depuis 10 ans.

"Gracias Trump"

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Dans la métropole floridienne, il n'est pas rare de voir des drapeaux aux couleurs du Venezuela, et des affiches disant "Gracias, Trump".

Pas une bonne nouvelle pour les démocrates, qui chercheront à reprendre la Maison Blanche lors de l'élection présidentielle de 2020, selon Tomas Regalado, ancien maire de Miami.

Les Vénézuéliens de Floride "font beaucoup de bruit", explique à l'AFP l'ancien élu républicain, en souvenir de ses années passées à l'hôtel de ville de Miami.

"Ils sont véhéments quand ils veulent défendre leurs idées. Ils sont incroyablement bons pour se mobiliser et attirer l'attention des médias", estime-t-il.

Les démocrates, voyant bien ce qui se passe sous leurs yeux, ont décidé de réagir pour aller draguer ce précieux électorat.

"Ils ne veulent pas être en retard", explique Daniel Smith. "Ils ne veulent pas être dépassés par l'administration Trump".

Sur le terrain les élus multiplient les photos avec les leaders de l'opposition vénézuélienne, alors que des grands noms du parti, comme Bill et Hillary Clinton, ont appelé Nicolas Maduro à quitter le pouvoir et à laisser l'aide internationale entrer dans le pays.

"Je soutiens le président Juan Guaido, le Parlement et le peuple du Venezuela qui ont décidé de vivre en paix, de choisir leurs dirigeants et de décider de leur futur", a estimé le 42e président des Etats-Unis (1993-2001).

Surtout, plusieurs candidats déclarés à l'élection de 2020, comme Kamala Harris et Bernie Sanders, ont également agi de la sorte, appelant même l'administration Trump à étendre le statut de protection temporaire (TPS) aux Vénézuéliens. Pour, enfin, avoir un coup d'avance.

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8.32. Crise au Venezuela : un rare double veto russo-chinois enterre un projet américain

AFP Publié le jeudi 28 février 2019 à 23h05 - Mis à jour le jeudi 28 février 2019 à 23h10 Les quinze membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont étalé jeudi leur incapacité à s'entendre sur le Venezuela, avec le rejet de deux projets de texte, l'un américain, objet d'un rare double veto russo-chinois, l'autre russe, écarté faute de voix suffisantes.

"C'est un échec collectif, de nous quinze assis à cette table, car nous sommes tous venus ici aujourd'hui en sachant que nous ne parviendrions pas au consensus nécessaire à l'adoption d'une résolution", a résumé l'ambassadeur indonésien, Dian Triansyah Djani, dont le pays, membre non permanent du Conseil, s'est abstenu lors des deux scrutins.

"C'est une perte de temps", a confirmé un diplomate sous couvert d'anonymat. "Ca ne sert à rien", a renchéri une autre source en se demandant pourquoi les Etats-Unis avaient voulu un vote sur leur texte, entraînant une contre-proposition russe.

Outre la Russie et la Chine, l'Afrique du Sud a aussi voté contre le projet américain qui appelait à des élections présidentielles "libres, justes et crédibles" et à des "livraisons d'aide humanitaire sans entraves" au Venezuela.

Il aurait été sans précédent à l'ONU et revenait à "limoger un président", Nicolas Maduro, s'est insurgé l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassily Nebenzia. "L'objectif, c'est le changement de régime", a dénoncé le diplomate russe.

C'était un "texte a minima", a jugé au contraire l'ambassadeur du Pérou, Gustavo Meza-Cuadra, qui a voté en sa faveur avec les Etats-Unis, les cinq membres européens du Conseil (France, Royaume-Uni, Allemagne, Belgique, Pologne), le Koweït et la République dominicaine.

Trois pays se sont abstenus : la Guinée équatoriale, la Côte d'Ivoire et l'Indonésie.

L'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre, a plaidé en vain pour un texte qui "ne représentait pas une base légale pour un recours à la force, pas plus qu'une atteinte à la souveraineté du Venezuela".

Profonde division internationale

Le texte russe, qui visait à dénoncer "les menaces de recourir à la force" contre Caracas, agitées régulièrement par les Etats-Unis, n'a recueilli de son côté qu'un soutien de quatre pays (Russie, Chine, Afrique du Sud, Guinée équatoriale), un score faible.

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Les Etats-Unis, les cinq Européens et le Pérou ont voté contre. Quatre pays se sont abstenus : Indonésie, Koweït, République dominicaine et Côte d'Ivoire.

En ayant voté contre le texte américain, la Chine et la Russie "continuent de protéger (Nicolas) Maduro et ses acolytes et de prolonger les souffrances du peuple vénézuélien", a regretté l'émissaire américain pour le Venezuela, Elliott Abrams.

Devant la presse, il s'est félicité du résultat du double scrutin: neuf votes d'un côté, quatre de l'autre, "cela montre le soutien" dont bénéficie l'opposant vénézuélien Juan Guaido et l'appui "en faveur d'une transition pacifique".

Interrogé pour savoir si le départ de M. Maduro, selon les Etats-Unis, était une question de jours ou de mois, il a répondu: "Nous espérons dès que possible".

Le texte russe n'offrait "aucune solution à la crise, il donne l'illusion d'un Venezuela pacifié alors que plus de 3,5 millions de personnes ont fui le pays", a relevé François Delattre.

Le Venezuela a réaffirmé qu'il n'y avait "aucune violence" constatée dans le pays.

Comme attendu, le double rejet des deux textes à l'ONU a illustré la profonde division internationale sur le Venezuela.

Juan Guaido, qui s'est autoproclamé président par intérim le 23 janvier, est soutenu par une cinquantaine de pays, dont les Etats-Unis, le Brésil ou la Colombie et une majorité des membres de l'Union européenne.

Nicolas Maduro, qui a succédé en 2013 au défunt président Hugo Chavez et entamé un deuxième mandat le 10 janvier, est appuyé de son côté par un nombre équivalent de pays, incluant la Russie, la Chine, l'Iran, la Corée du Nord, la Syrie ou Cuba.

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8.33. Acclamé à son retour au Venezuela, Guaido maintient la pression sur le régime

AFP Publié le lundi 04 mars 2019 à 21h38 - Mis à jour le mardi 05 mars 2019 à 11h29

L'opposant Juan Guaido, rentré lundi au Venezuela malgré la crainte d'être arrêté, a aussitôt lancé un nouvel appel à manifester samedi pour maintenir la pression sur le régime de Nicolas Maduro.

"Samedi on continue! Tout le Venezuela se retrouvera dans la rue. Nous ne resterons pas tranquilles une minute ni même une seconde tant que nous n'aurons pas retrouvé la liberté", a-t-il lancé devant des milliers de personnes massées sur une place de Caracas, moins d'une heure après son arrivée.

Juan Guaido, président autoproclamé reconnu par une cinquantaine de pays, avait quitté clandestinement le pays il y a une dizaine de jours pour se rendre en Colombie. Arrivé lundi à la mi-journée à l'aéroport de Caracas, il a été accueilli par ses partisans et par un comité d'ambassadeurs européens et latino-américains venus garantir sa sécurité, a expliqué le représentant de la France Romain Nadal.

"Nous connaissons les risques que nous courons, ça ne nous a jamais retenus : nous sommes ici, plus fort que jamais !" a lancé M. Guaido avant de sortir de l'aérogare en costume sombre et chemise blanche, tout sourire, debout sur le toit d'une voiture, tandis que la foule scandait son nom. "Guaido ! Guaido" et "Si se puede", reprenant le fameux slogan des campagnes de Barack Obama "Oui c'est possible".

"Réaction rapide"

Au moment même où son avion se posait à Caracas, le vice-président américain Mike Pence promettait depuis Washington une "réaction rapide" en cas de "menaces, violences ou intimidations" contre l'opposant de 35 ans : "Les Etats-Unis attachent la plus grande importance au retour au Venezuela de Juan Guaido en toute sécurité", a-t-il averti sur Twitter.

Juan Guaido a galvanisé la foule qui l'attendait à Caracas en déclarant, bras levés au côté de son épouse : "Vous avez devant vous le président de la République du Venezuela!"

"Malgré les menaces des groupes armés, je vous le demande : avez-vous une once de peur? Nous voici, plus forts que jamais !" a-t-il répété en appelant à "rester mobilisés dans toutes les rues du Venezuela".

"Les fonctionnaires de l'immigration m'ont accueilli en disant, +Bienvenue président+", a-t-il affirmé. Mais "nous avons affaire à une dictature qui ne va pas céder volontairement le pouvoir, il faut continuer de faire pression".

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Des rassemblements similaires se sont tenus dans les principales villes du pays, en congé pour cause de carnaval, sans aucun incident notable.

Juan Guaidó a par ailleurs renouvelé son appel aux forces armées, principal soutien du gouvernement, à le rejoindre. A ce jour environ, 700 militaires ont fait défection en Colombie et au Brésil, sans réussir à faire basculer l'armée qui compte 350.000 hommes.

"Nous allons insister pour que l'aide humanitaire arrive dans ce pays", a également promis le leader de l'opposition. C'est d'ailleurs pour forcer le passage de ces convois de vivres et de médicaments bloqués à la frontière colombienne, et dont manque cruellement le pays confronté aux pénuries et à une hyperinflation à huit chiffres, qu'il avait bravé son interdiction de quitter le pays.

Théoriquement, M. Guaido, en tant que président de l'Assemblée nationale, bénéficie de l'immunité parlementaire, mais il fait l'objet d'une enquête pour "usurpation" même s'il n'a pas été formellement accusé.

Depuis la Colombie, il s'est lancé dans une tournée qui l'a conduit au Brésil, au Paraguay, en Argentine et en Equateur. Il a été accueilli partout en chef d'Etat.

Ultime erreur

Juan Guaido avait annoncé la semaine dernière son intention de rentrer au pays "malgré les menaces". Dimanche soir, via les réseaux sociaux, il a mis en garde le régime de Nicolas Maduro contre toute "tentative de l'enlever", qui constituerait selon lui "son ultime erreur".

Jusqu'au dernier moment, les détails de son retour sont restés secrets : son entourage a révélé lundi que, depuis l'Equateur, il s'est envolé pour Bogota d'où il a pris un vol pour Panama, afin de rejoindre Caracas, destination desservie par très peu de vols sur le continent.

Son retour représente un dilemme pour le président socialiste en place, Nicolas Maduro, qui doit décider s'il l'arrête, au risque de provoquer la communauté internationale, ou s'il le laisse rentrer sans encombre et défier son autorité.

Le président Maduro a répété ces derniers jours qu'en tant que chef du Parlement, son rival devait "respecter la loi" et que s'il rentrait au pays, il devrait "rendre des comptes à la justice".

Depuis qu'il s'est proclamé le 23 janvier président par intérim en qualifiant d'"usurpateur" M. Maduro, dont la réélection serait selon ses adversaires entachée de fraudes, Juan Guaido s'est appuyé sur la rue et a convoqué plusieurs manifestations de soutien qui ont fait une quarantaine de morts et des centaines de blessés.

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8.34. Venezuela : soumis à de nouvelles sanctions, le régime contre-attaque AFP Publié le jeudi 07 mars 2019 à 07h26 - Mis à jour le jeudi 07 mars 2019 à 07h26 Le régime de Nicolas Maduro, soumis à la pression de la communauté internationale en faveur de l'opposant Juan Guaido, a contre-attaqué mercredi en expulsant l'ambassadeur d'Allemagne à Caracas pour "ingérence".

Une décision immédiatement condamnée par Berlin qui la juge "incompréhensible" et estime qu'elle "aggrave la situation et ne contribue pas à la détente".

"Notre soutien, le soutien de l'Europe, à Juan Guaido reste intact", a ajouté le ministère allemand des Affaires étrangère en félicitant "l'ambassadeur Kriener (qui) a fait de l'excellent travail à Caracas, en particulier ces derniers jours".

La crispation du gouvernement vénézuélien accompagne de nouvelles sanctions annoncées par Washington, qui a révoqué les visas de 77 responsables du régime et de leurs proches, en plus des dizaines d'annulations déjà annoncées, et menacé les "institutions financières étrangères impliquées (dans l'aide) à Nicolas Maduro et à son réseau corrompu".

"Nous allons continuer à demander des comptes à l'ensemble du régime Maduro jusqu'à ce que la +libertad+ soit rétablie au Venezuela", a prévenu le vice-président américain Mike Pence.

Accusé "d'ingérence dans les affaires intérieures" du pays, l'ambassadeur allemand Daniel Kriener a été déclaré persona non grata et prié de quitter le pays "dans les 48 heures", a annoncé la vice-présidence vénézuélienne.

Guaido de retour malgré les menaces

Le diplomate allemand s'était rendu lundi à l'aéroport international de Caracas comme une douzaine d'autres diplomates occidentaux et latino-américains pour y accueillir Juan Guaido, président de l'Assemblée nationale et président par intérim autoproclamé, que soutiennent une cinquantaine de pays.

M. Guaido, qui avait bravé une interdiction de quitter le pays pour se rendre notamment en Colombie, avait annoncé son retour "malgré les menaces", M. Maduro ayant averti qu'il devrait s'expliquer devant la justice pour avoir bravé une interdiction de sortie du territoire.

L'opposant et président du Parlement, qui s'est proclamé président par intérim du Venezuela le 23 janvier, fait depuis l'objet d'une enquête pour "usurpation".

"Le Venezuela juge inacceptable qu'un diplomate étranger exerce un rôle public proche de celui d'un responsable politique aligné sur le complot de secteurs

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extrémistes de l'opposition vénézuélienne", a dénoncé la vice-présidence dans un communiqué.

Pour Juan Guaido, qui a présidé mercredi une réunion de l'Assemblée nationale, l'expulsion de l'ambassadeur allemand constitue "une menace contre le monde libre".

Sur Twitter, il a exprimé "son soutien total et sa reconnaissance" au diplomate, dont il a salué "l'engagement total en faveur de notre démocratie".

A ce stade, seul l'ambassadeur allemand a fait l'objet d'une mesure d'expulsion.

Douze autres représentants occidentaux et latino-américains étaient venus lundi accueillir M. Guaido à l'aéroport "comme témoins de la démocratie et de la liberté, afin que le président Guaido puisse rentrer", selon les mots de l'ambassadeur de France à Caracas, Romain Nadal.

Les Etats-Unis avaient menacé de représailles s'il était porté atteinte à l'opposant.

Dans un message le soir même sur Twitter, M. Guaido avait "remercié" les diplomates "qui ont accompagné notre retour au Venezuela" citant outre l'Allemagne, la France, l'Espagne, le Portugal, les Pays-Bas, la Roumanie, le Canada, le Chili, l'Argentine, le Brésil, le Pérou, l'Equateur et les Etats-unis.

Un journaliste américain arrêté puis libéré

Un journaliste américain, Cody Weddle (correspondant à Caracas depuis plusieurs années de divers médias, dont la chaîne ABC et le quotidien Miami Herald), a été arrêté mercredi matin à son domicile et emmené vers un lieu inconnu.

La secrétaire d'Etat américaine adjointe chargée des Amériques, Kimberly Breier, a fait état dans un tweet de sa "profonde inquiétude" et demandé "la libération immédiate du journaliste, sain et sauf".

Le journaliste a été relâché dans la soirée et sera renvoyé aux Etats-Unis, ont annoncé un des médias pour lequel il travaillait et un syndicat de presse vénézuélien.

"Cody Weddle a été libéré après avoir été détenu par les autorités vénézuéliennes", a écrit sur Twitter la chaîne Local 10 News, basée à Miami.

Le journaliste doit être expulsé vers les Etats-Unis jeudi, selon le syndicat des travailleurs de la presse (SNTP).

M. Guaido a estimé que la mesure prise contre Cody Weddle "visait, en vain, à cacher la vérité".

Le 23 février, les forces armées vénézuéliennes s'étaient violemment opposées à l'entrée de l'aide humanitaire organisée par l'opposition avec l'aide des Etats-Unis et bloquée aux frontières avec le Brésil et la Colombie.

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C'est à cette occasion que Juan Guaido s'était rendu clandestinement en Colombie. Les incidents avaient fait sept morts et plus de 300 blessés.

Depuis, la frontière avec la Colombie, que des milliers de Vénézuéliens traversaient chaque jour pour travailler ou se ravitailler, est restée fermée.

Des députés de l'opposition ont affirmé que des centaines de lycéens et étudiants qui s'apprêtaient à reprendre leurs cours mercredi à Cucuta, du côté colombien de la frontière, ont été repoussés par les forces armées et la police vénézuéliennes à l'aide de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc.

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8.35. Pourquoi le Venezuela veut expulser l’ambassadeur allemand MARIE-FRANCE CROS Publié le jeudi 07 mars 2019 à 15h06 - Mis à jour le jeudi 07 mars 2019 à 15h17 Le gouvernement vénézuélien a déclaré mercredi “persona non grata” l’ambassadeur d’Allemagne à Caracas pour “ingérence” dans les affaires intérieures. En cause : la participation de l’ambassadeur à l’accueil réservé lundi dernier, à l’aéroport de Caracas, par les partisans de l’opposant, à Juan Guaido, de retour d’une tournée à l’étranger.

M. Guaido s’est auto-proclamé Président le 23 janvier et fait l’objet, dans son pays, d’une enquête pour “usurpation” de fonctions. Selon le Wall Street Journal du 25 janvier, le vice-Président américain, Mike Pence, avait promis au jeune Vénézuélien le soutien des Etats-Unis lors d’un contact téléphonique la nuit précédant l’auto-proclamation de M. Guaido. Et ce dernier a été reconnu par Washington moins de cinq minutes après son annonce.

Expulsion “incompréhensible” selon Berlin

La vice-Présidence vénézuélienne a indiqué dans un communiqué : “Le Venezuela juge inacceptable qu’un diplomate étranger exerce un rôle public proche de celui d’un responsable politique aligné sur le complot de secteurs extrémistes de l’opposition vénézuélienne”.

L’ambassadeur allemand était accompagné de ses confrères français, espagnol, portugais, néerlandais, roumain, canadien, chilien, argentin, brésilien, péruvien, équatorien et des Etats-Unis; mais seul l'Allemand Daniel Kriener, jusqu’ici, s’est vu donner 48h pour quitter le Venezuela. Berlin a condamné l’expulsion, “incompréhensible” selon l’Allemagne, et réitéré son “soutien” à l’opposant.

Juan Guaido a jugé, pour sa part, que l’expulsion de l’ambassadeur allemand était “une menace contre le monde libre”. Il a, par ailleurs, indiqué dans une interview au Spiegel: “Le Venezuela vit sous une dictature et cette manière de procéder constitue une menace pour l’Allemagne” - ce qui ne l’a pas empêché d’appeler l’ambassadeur d’Allemagne à “rester” à Caracas malgré son expulsion.

M. Guaido a ajouté : “Maduro occupe illégalement la Présidence. Il n’est pas légitime pour déclarer un ambassadeur indésirable”. Rappelons que Nicolas Maduro a été réélu à la Présidence en mai 2018, lors d’élections dont avaient été exclus les ténors de l’opposition. Et que M. Guaido lui-même n’a aucune légitimité à se proclamer “Président intérimaire”, poste qui n’existe pas au Venezuela ; en cas de vacance de la Présidence, c’est le vice-Président qui le remplace, pas le président de l’Assemblée nationale qu’est M. Guaido. Il a été élu à ce poste début janvier par les députés, bien qu’il appartienne à un parti d’opposition minoritaire, Voluntad Popular.

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Dans la même interview, M. Guaido a appelé les pays européens à “renforcer les sanctions financières contre le régime” Maduro.

Etrangler financièrement le Venezuela

Les Etats-Unis ont encore accru leurs sanctions contre l’économie vénézuélienne par un décret présidentiel du 28 janvier. Washington vise ainsi à bloquer tous les actifs de PDVSA (la société nationale des pétroles du Venezuela, principale source de revenus du pays) aux Etats-Unis et empêcher les citoyens américains de faire des affaires avec la compagnie, ses filiales et les sociétés dont PDVSA possède plus de 50%.

Les sanctions interdisent également l’exportation vers le Venezuela de diluant, indispensable au raffinage du pétrole vénézuélien, particulièrement lourd. Selon une analyse du cabinet Torino Economics, distribuée par l’ambassade du Venezuela à Bruxelles, ces deux mesures devraient entraîner une chute de la production vénézuélienne assez rapidement, donc restreindre considérablement l’accès de Caracas à des devises.

Une autre partie des sanctions vise à rendre impossible toute négociation sur une restructuration de la dette vénézuélienne, indique le cabinet Torino Economics.

Madrid fait marche arrière Josep Borrell, ministre espagnol des Affaires étrangères, avait été un des premiers soutiens de Juan Guaido au sein de l’UE et avait poussé ses homologues à reconnaître le “Président intérimaire”.

Dans une interview à la télévision espagnole La Sexta, reprise par la télévision vénézuélienne lundi, il a dû admettre que c’était le gouvernement de Nicolas Maduro qui contrôlait “le territoire et l’administration” et pouvait résoudre les problèmes, pas Juan Guaido. Le reconnaître comme “Président intérimaire” a-t-il été une erreur ? M. Borrell a éludé la question, préférant décrire la situation comme “atypique”, “non prévue par les manuels de Droit international”. Il a renvoyé la responsabilité à Washington. “Quelqu’un […] directement derrière ce processus mmmm… n’avait pas pensé que Maduro montrerait tant de résilience”

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8.36. Après la panne : le Venezuela sort de l’ombre, pas du chaos AFP Publié le mercredi 13 mars 2019 à 23h25 - Mis à jour le mercredi 13 mars 2019 à 23h27 Le Venezuela sort progressivement de l'ombre mercredi, mais pas du chaos après six jours de panne électrique dont la population et l'économie nationale continuent de payer les conséquences, faisant craindre une crise encore plus profonde.

Caracas a retrouvé le courant ainsi que la plupart des Etats, selon le gouvernement, mais il était toujours intermittent et insuffisant dans l'ouest du pays.

Le Venezuela continue de fonctionner au ralenti avec une nouvelle journée chômée mercredi sur ordre du gouvernement. La plupart des banques et des commerces sont restés fermés et les transports publics, déjà déficients en temps normal, suspendus.

La Chine a proposé son aide pour faire la lumière sur les raisons de cette panne, dont l'ampleur et la durée restent inédites dans ce pays pétrolier. Le président Nicolas Maduro y voit une attaque "cybernétique" fomentée par le ministère américain de la Défense et l'opposition.

Une thèse techniquement possible, selon les experts, qui la jugent cependant improbable et rappellent le manque d'entretien des infrastructures du pays.

Pénuries massives

Loin de ces querelles d'experts, les Vénézuéliens se battent surtout pour trouver de l'eau, leur souci principal. De longues files se forment partout en ville devant les camions citernes affrétés par le gouvernement et les maires d'opposition dans la capitale, et il faut parfois attendre des heures pour remplir son bidon. Le réseau de distribution n'a pas été rétabli, et même à Caracas le rationnement s'impose.

"Pas d'eau, pas de lumière, pas de médicaments, pas d'argent liquide et pas de transports... Formidable", résume Victoria Milano, 40 ans. Son immeuble a retrouvé l'électricité, mais depuis elle vit dans la peur de la perdre de nouveau.

La ministre chargée de l'Eau, Evelyen Vásquez, a fait valoir que rétablir le système est "complexe" et prendra encore du temps. "Nous avons relancé les pompes et nous progressons lentement".

Alors que le pays connaissait déjà des pénuries alimentaires, la panne les aggrave: selon la Fédération nationale des éleveurs (Fedenaga), "tout ceci est en train d'affamer le pays".

Le Conseil national du Commerce et des Services (Consecomercio) a par ailleurs appelé les autorités à rétablir l'ordre après les pillages : quelques-uns ont été signalés à Caracas, mais c'est surtout à Maracaibo, la capitale pétrolière (ouest), que le

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principal centre commercial et "plus de 500 commerces" ont été pillés "en toute impunité".

"Ils ont dévalisé les boulangeries, tout emporté, ont volé les sacs de farine et même les moules à pain", a raconté à l'AFP un habitant de la ville, Espinoza.

La "destruction des commerces réduit les capacités d'approvisionnement en vivres et médicaments de la population. Nous exhortons l'Etat à prendre des mesures pour protéger les établissements commerciaux et à identifier les responsables" des troubles, a lancé le responsable du Consecomercio, Felipe Capolzzolo.

Secteur pétrolier en panne

Ecoanálitica, institut d'analyse économique, évalue à ce stade les pertes "à 875 millions de dollars". L'industrie est paralysée et "pour redresser le pays il faudrait faire appel à un soutien international et au secteur pétrolier", estime le directeur, Asdrúbal Oliveros.

Mais ce secteur-clé de l'économie vénézuélienne est à l’arrêt : "A ce stade, on risque de perdre jusqu'à 700.000 barils par jour", signale-t-il.

La compagnie nationale pétrolière PDVSA - qui assure 95% des revenus du pays - fonctionnait déjà mal, minée par la corruption : elle avait déjà vu sa production tomber de 3,2 millions de barils en 2008 à près d'un million avant la panne.

La méga-panne d'électricité a débuté jeudi après-midi dans 22 des 23 Etats de ce pays de 30 millions d'habitants, et a duré officiellement jusqu'à mardi soir, quand Maduro a annoncé "la victoire dans la guerre électrique".

Pour le chef de l'opposition, Juan Guaido, qui s'est proclamé président par intérim le 23 janvier, c'est la négligence et la corruption du gouvernement qui sont responsables de ce fiasco.

Les hôpitaux en particulier vivent une situation dramatique : M. Guaido affirme qu'au moins vingt personnes sont mortes depuis jeudi. L'ONG Codevida a signalé au moins quinze morts faute de dialyse. Des bilans démentis énergiquement par les autorités.

"Comment se peut-il qu'une maternité n'ait pas de générateur ? On a dû utiliser des mèches trempées dans le kérosène", s'insurge Milano, qui travaille dans un hôpital de Caracas.

M. Maduro a ordonné la distribution à prix subventionnés de 50.000 citernes d'eau restées stockées et appelé la population à se munir de bougies, de lampes et de radios.

Il a annoncé la création d'une "commission d'enquête présidentielle" pour laquelle il entend solliciter "l'aide de l'ONU, de la Chine, de la Russie, de l'Iran, et de Cuba, pays qui ont une grande expérience des cyber-attaques".

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8.37. Le chaos continue au Venezuela : des manifestations fleurissent contre la panne de courant qui paralyse le pays

MARIE-FRANCE CROS Publié le mercredi 13 mars 2019 à 07h14 - Mis à jour le mercredi 13 mars 2019 à 08h35 Cinq jours sans courant épuisent la population. Sabotage, selon Maduro ; corruption, selon son opposition. Le gouvernement vénézuélien a appelé les administrations publiques à chômer ce mardi - comme lundi, après une semaine de congé de carnaval - au cinquième jour d’une gigantesque panne de courant qui paralyse le pays. Et le président de l’Assemblée nationale – qui s’est autoproclamé "président intérimaire", le 23 janvier dernier avec l’appui des États-Unis -, Juan Guaido, a appelé à manifester "partout dans le pays" contre le gouvernement alors que, selon l’AFP, le courant revenait progressivement dans plusieurs quartiers de la capitale. Des pillages y ont cependant été recensés. Les autorités distribuent de l’eau potable. Juan Guaido - membre de Voluntad Popular, qui n’est pas le principal parti d’opposition - attribue en effet les raisons de la panne à "la corruption et l’impéritie" des services publics. Le président Nicolas Maduro la dit provoquée par une attaque des États-Unis contre la principale centrale hydroélectrique du pays afin de "désespérer" la population pour qu’elle se soulève et préparer une intervention militaire. Washington n’a pas caché son intention de créer des difficultés économiques au Venezuela afin d’y provoquer un soulèvement et a refusé d’exclure une intervention militaire. Il faut cependant se souvenir que le président Maduro, comme son prédécesseur Hugo Chavez, a négligé d’entretenir l’outil de production pétrolier, de diversifier l’économie vénézuélienne et de consolider la production électrique du pays pour qu’elle résiste aux sécheresses. Frontière rouverte avec la Colombie Juan Guaido a aussi obtenu le vote, par l’Assemblée nationale, d’une suspension des livraisons de pétrole à Cuba en raison de la "situation calamiteuse" du pays ; en vertu d’un accord passé sous Hugo Chavez, 90 000 barils/jours doivent aller à La Havane, quantité qui aurait baissé de 40 % depuis la crise économique vénézuélienne. Cette suspension a peu de chance d’être exécutée, Juan Guaido n’ayant aucun pouvoir et l’Assemblée nationale ayant été dépouillée des siens par l’Assemblée nationale constituante, pro-Maduro. Il en va de même pour l’"état d’alerte" décrété par Juan Guaido, lundi, qui permettrait, s’il était effectif, de faire entrer l’"aide humanitaire" massée par la Colombie et les États-Unis à la frontière colombo-vénézuélienne. Selon la Croix-Rouge internationale, ce convoi ne répond pas aux critères de l’aide humanitaire définis par l’Onu. Selon

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Caracas, elle doit servir à appuyer une intervention militaire des États-Unis et la frontière avait été fermée, le 22 février, pour l’empêcher d’entrer. La frontière a été rouverte lundi, permettant, selon les services de migration colombiens, à 3300 lycéens vénézuéliens étudiant en Colombie de reprendre les cours ; 1 800 adultes sont également passés. Enfin, Washington a rappelé le reste de son personnel diplomatique. Caracas avait rompu les relations diplomatiques après que Washington eut reconnu Juan Guaido comme "président intérimaire".

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8.38. « On a faim ! » : Maracaibo, la capitale pétrolière du Venezuela, mise à sac

AFP Publié le jeudi 14 mars 2019 à 19h27 à Caracas L'employée fond en larmes devant les allées dévastées du supermarché de Maracaibo où elle travaille depuis 15 ans. La deuxième ville du Venezuela, coeur de son industrie pétrolière, a été mise à sac par des milliers de pillards hurlant "On a faim !", pendant la gigantesque panne d'électricité qu'a connue ce pays.

L'odeur du poivre, pulvérisé par des forces de l'ordre impuissantes face aux bandes déchainées, flotte encore dans les travées. Tout respire la rage dans les décombres de cet immense magasin qui emploie 400 personnes, aujourd'hui désemparées et inquiètes pour leur avenir.

"J'ai vu un homme qui emportait de la farine de maïs, il ne l'a lâchée que pour s'emparer de pneus", raconte, encore secoué, Deivis Garcia qui a vu déferler quelque 2.000 personnes au cinquième jour de la panne.

"Mes enfants me demandent : +et maintenant papa, qu'est ce qu'on va faire ?+", poursuit-il.

Le courant a brusquement été coupé le 7 mars en fin d'après-midi. En partie rétabli mardi soir, il reste intermittent à Maracaibo. Une panne unique par son ampleur et sa durée, même pour cette ville de 3,6 millions d'habitants pourtant habitués aux incidents de ce type.

Les salariés ont trouvé refuge sur une mezzanine en surplomb du supermarché d'où ils ont contemplé, stupéfaits, la foule démonter jusqu’aux réfrigérateurs pour en emporter des pièces.

Policiers et militaires ont été incapables de contenir les échauffourées et les groupes qui se sont éparpillés dans les rues à la faveur de l'obscurité.

- Militaires en armes -

"On a faim !", criaient les pillards, se souvient un jeune policier aux yeux clairs, qui demande à garder l'anonymat. "Ils m'ont suggéré d'abandonner mon uniforme et de me joindre à eux pour piller... Nous aussi on a faim, chez moi il n'y a rien à manger". C'est la mi-journée et il n'a toujours pas pris son petit-déjeuner, montant la garde devant les commerces saccagés.

Selon le Conseil national du Commerce et des Services (Consecomercio), plus de 500 commerces et le principal centre commercial de la ville ainsi que la zone industrielle ont été pillés pendant la panne.

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Le syndicat patronal Fedecamaras a condamné dans un communiqué "tout acte de violences" qui n'aboutit qu'à "approfondir la pauvreté (...) au sein de notre société".

Devant une des usines de Polar, la principale entreprise alimentaire du Venezuela, des dizaines d'habitants d'un bidonville voisin tournent autour du site mais des militaires arrivés en camions blindés gardent les lieux.

Sur son site internet, la compagnie souligne que quatre de ses usines, qui produisent des sodas, des bières et des pâtes, ont été pillées. "Ces pillages affectent gravement la production et la distribution et met en péril nos activités", prévient-t-elle.

Les boutiques de chaussures, de bijoux, de téléphones ont également été visitées. Dans cette ville autrefois prospère, les rues offrent des scènes de désolation et les établissements sont fermés. Trouver une bouteille d'eau relève du parcours du combattant. Devant les rares petits commerces ouverts, des centaines de personnes attendent en file de pouvoir acheter quelque chose à manger.

- Il ne reste rien -

"C'étaient des pillages massifs, on a perdu des milliards (de bolivars, monnaie dont le cours s'est effondré en raison de l'hyperinflation, ndlr)", gémit Francisco Arteaga, 61 ans. "Maintenant chacun est là à chercher à manger comme un fou... Regardez la ville, on dirait qu'il y a eu la guerre", ajoute-t-il après avoir marché des heures dans les artères dévastées à la recherche de vivres.

Le sexagénaire en appelle à Nicolas Maduro, sous le mandat duquel le Venezuela traverse la pire crise son histoire récente. "Qu'il quitte le pays !". "Après vingt ans de révolution, rien ne va !", jure-t-il.

A La Curva de Molina, le cœur commercial de Maracaibo, des hordes munies de bâtons et de pierres ont cassé les vitrines et forcé les portes. "Il n'y a pas eu un magasin qui a échappé au pillage", affirme Angel Chirinos, un commerçant de 38 ans.

"Ils sont arrivés par ici mais il y avait tellement de choses à piller qu'ils n'ont pas pu tout prendre", constate le propriétaire d'un magasin d'alcools. Depuis, il monte la garde : "J'ai passé trois nuits sans dormir : il y avait encore plein de gens qui rodaient", dit-il les yeux rougis.

Pour Ramón Morales, un coiffeur de 44 ans, la pire crise alimentaire que traverse le Venezuela depuis trois ans risque d'empirer : "Regardez l'entrepôt des Chinois, que va-t-on manger ?", soupire-t-il en désignant le local incendié.

Judith Palmar, une domestique qui a fait une heure de route jusqu'à Maracaibo afin de chercher à manger "pour ses patrons" se désole : "Depuis vendredi dernier tout est fermé... les gens ont faim. Mais pourquoi tout détruire ? Jusqu'où va-t-on aller ?".

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8.39. Venezuela : en tournée nationale, Guaido veut marcher « jusqu’à la présidence »

AFP Publié le samedi 16 mars 2019 à 23h38 - Mis à jour le samedi 16 mars 2019 à 23h39 L'opposant vénézuélien Juan Guaido a entamé samedi une tournée à travers le pays avec l'intention de marcher "jusqu'à Miraflores", le siège de la présidence à Caracas, pour en déloger Nicolas Maduro.

"Nous entamons aujourd'hui une nouvelle phase de notre mobilisation en visitant tous les Etats possibles, nous lançons une opération pour libérer notre pays et que cesse l'usurpation" a lancé M. Guaido, qui s'est proclamé président par intérim le 23 janvier, devant plusieurs milliers de ses partisans réunis à Valencia, capitale de l'Etat de Carabobo, l'une des principales villes industrielles du pays à 170 km à l'ouest de Caracas.

Au même moment, le président en exercice Nicolas Maduro avait de nouveau appelé la population dans les rues de Caracas à une "marche révolutionnaire et anti-impérialiste", afin de fêter la fin de la panne électrique qui a frappé le pays pendant près d'une semaine, et la "victoire" sur les Etats-Unis qu'il accuse d'avoir commandité le 7 mars des attaques "cybernétiques" contre la principale centrale du pays, le plongeant dans le noir.

Deux présidents Deux manifestations concurrentes qui illustrent l'impasse politique entre deux "présidents" qui se disputent un pays miné par la crise économique, l'effondrement de sa monnaie et les pénuries.

"Qu'ils partent, ils ne reviendront pas! Va-t-on les laisser entrer à Miraflores? Va-t-on permettre que le palais du peuple redevienne le palais de l'oligarchie, de la bourgeoisie?", a demandé samedi depuis le rassemblement chaviste un des piliers du régime, Diosdado Caballo.

Nicolas Maduro a ordonné à l'armée de renforcer la surveillance des installations électriques et de défricher la végétation autour des sites, après que des images circulant sur les réseaux sociaux ont montré les pylônes de lignes à haute tension envahis par de hautes herbes.

L'opération, baptisée "En avant! Anna Karénine", appelle la population à prêter main forte aux forces armées pour "conforter le retour à la normale", a exhorté le ministre de la Défense Vladimir Padrino, en visite samedi dans l'Etat de Vargas, voisin de Caracas.

Pour Juan Guaido, président de l'Assemblée nationale qui a reçu le soutien d'une cinquantaine de pays, M. Maduro est un "usurpateur" réélu pour un deuxième mandat

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lors d'un scrutin entaché de fraudes, et cette panne est due à sa mauvaise gestion et à la corruption du régime.

"Il est temps de reprendre le Venezuela point par point", a-t-il déclaré à Valencia. "Ils pensent pouvoir nous faire taire, nous intimider (...) Le régime veut nous faire douter. Ils ne pourront pas nous diviser, ce processus est irréversible, il n'y a pas de retour en arrière possible".

Après une série de grands rasemblements dans Caracas et le reste du pays, Juan Guaido a changé de tactique et demandé aux députés de l'opposition, qui domine le Parlement, d'organiser des assemblées citoyennes dans leurs circonscriptions à la manière ds "cabildos", les conseils traditonnels. Une cinquantaine de réunions de ce type se tenaient ce samedi dans dix des 23 Etats du pays, selon l'opposition.

Sabotage Guaido, 35 ans, a promis cette semaine de s'installer "très prochainement dans le bureau présidentiel" - sans cependant annoncer de date pour le dernier acte de sa tournée à Caracas.

Mardi, le procureur général du Venezuela a ouvert une enquête contre lui "en raison de son implication présumée dans le sabotage du système électrique" du pays.

Avec cette mégapanne, qui a mis l'économie à l'arrêt, le pays de 30 millions d'habitants - dont 10% vivent actuellement en exil - s'enfonce encore un peu plus dans la crise qui a vu l'effondrement de sa production de pétrole, la seule ressource du pays qui assure 96% de ses recettes.

Ce grave incident a accru la nervosité des autorités qui ont procédé récemment à plusieurs arrestations et expulsions de journalistes, locaux comme Luis Carlos Diaz, libéré après 24 heures mais accusé "d'incitation au crime", ou étranger comme Cody Weddle, américain, arrêté et expulsé douze heures plus tard.

Vendredi, Tomasz Surdel, correspondant du quotidien polonais Gazeta Wyborcza, a accusé la police de l'avoir passé à tabac à Caracas, avec un simulacre d'exécution.

L'ONG Espacio Publico, qui défense la liberté d'expression, a enregistré une cinquantaine d'arrestations dans la presse depuis le 1er janvier et l'organisation de défense des droits de l'homme Foro Penal comptabilise plus de 900 détenus politiques dans le pays.

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8.40. Venezuela : l’humanitaire comme moyen pour légitimer le recours à la force

CONTRIBUTION EXTERNE Publié le dimanche 24 mars 2019 à 10h07 - Mis à jour le dimanche 24 mars 2019 à 10h08 Une opinion de Frédéric Thomas, Docteur en sciences politiques, chargé d’étude au CETRI – Centre tricontinental.

La crise au Venezuela a remis au-devant de la scène la question du bon usage de l’humanitaire. Si son instrumentalisation ne fait guère de doute, au premier chef par les États-Unis, il n’en révèle pas moins la confusion entretenue autour de son indépendance.

La rapide succession des séquences, depuis l’auto-proclamation de Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela, sa reconnaissance quasi immédiate par les États-Unis (puis par une série de pays), et, enfin, l’appel à une aide humanitaire internationale d’urgence, dénote l’orchestration stratégique, qui fait de l’humanitaire la poursuite du politique, sinon du militaire, par d’autres moyens. Exemple emblématique de ce que Jean-Christophe Rufin a nommé "la gâchette humanitaire", à savoir l’utilisation de l’humanitaire comme moyen pour légitimer le recours à la force.

Les besoins des Vénézuéliennes et Vénézuéliens, pourtant brandis avec véhémence pour justifier cette aide, servent tout au plus de décor à ce qui, d’emblée, s’est présenté comme un spectacle. Les 100 millions de dollars que l’Organisation des États d’Amérique se félicitait d’avoir rassemblés, étaient ridicules par rapport aux nécessités du pays. Mais il s’agissait avant tout d’une bataille de chiffres, de mots, d’images – prélude à un combat autrement plus violent ?

Nombre d’organisations – le Comité international de la Croix-Rouge, Oxfam, Médecins du Monde, etc. – ont rejeté cette politisation de l’aide, insistant sur les risques qu’elle faisait encourir aux acteurs eux-mêmes. Et de rappeler les principes d’impartialité, d’indépendance et de neutralité de l’humanitaire. Par ailleurs, loin de la surmédiatisation des camions bloqués à la frontière, des organisations humanitaires, dont plusieurs agences de l’ONU, continuent de travailler au Venezuela avec l’accord du gouvernement.

Confusion

Il n’en demeure pas moins que les accusations de la politisation de l’humanitaire participent d’une confusion, entretenue en partie par les acteurs eux-mêmes. Elle suppose l’innocence, d’un côté, et une douloureuse répétition de trahisons de l’autre.

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L’humanitaire serait cette action neutre et indépendante, sans cesse pervertie, falsifiée et détournée. Les réponses pour expliquer ce paradoxe empruntent le plus souvent deux voies contradictoires.

Celle de la dénonciation cynique du masque humanitaire, couvrant des enjeux géopolitiques et des intérêts impérialistes, d’une part. Celle qui fait de l’humanitaire d’État – et de lui-seul – le lieu et la formule de cette instrumentalisation, pour mieux mettre en évidence l’indépendance d’ONG comme Médecins sans frontières (MSF), de l’autre. Mais c’est se leurrer sur la nature même de l’humanitaire, et sur la menace de politisation qui pèse sur lui.

Dans un champ polarisé et médiatisé – et à mesure de cette polarisation et de cette médiatisation –, Trump, Guaido, aussi bien que Maduro, politisent l’aide. Mais, plus radicalement, le propre de l’humanitaire est d’être instrumentalisé. Se scandaliser de sa "distorsion" est naïf, sinon hypocrite. Depuis l’intervention française au Liban, en 1860, jusqu’à la crise vénézuélienne actuelle, en passant par l’émergence des french doctors au Biafra, et les interventions d’urgence de grande ampleur, l’humanitaire est toujours, aussi, mobilisé en fonction d’enjeux politiques.

La neutralité de l’humanitaire, loin de constituer un espace naturel, qui existerait a priori, est une fiction. Soit, au sens où l’entend, dans un autre contexte, Jacques Rancière, une "structure de rationalité", qui construit un cadre, au sein duquel les sujets, les situations et les actions font sens. L’aide humanitaire invente ses propres codes afin de dégager un espace où son intervention est pensable et possible.

Mais, en dernière instance, cette fiction, pour produire ses effets, ne tient que pour autant que les divers acteurs en présence, font « comme si » ; qu’ils s’accordent pour donner à leur action ce sens-là. En mettant en suspens les enjeux politiques. Ceux-ci n’en demeurent pas moins déterminants. L’indépendance et la neutralité de l’humanitaire sont donc aussi le fruit d’une négociation implicite ou explicite, d’un accord, par nature, toujours fragile et ponctuel, partiel et partial.

Il n’y a pas de crise humanitaire au Venezuela

Reprocher à l’humanitaire de faire le jeu du politique, voire de l’impérialisme, est dès lors quelque peu déplacé. Pas plus qu’un autre, il ne peut se dégager complètement de ce jeu, dont il cherche plutôt à suspendre les règles, à limiter les effets. Ce qu’il faut par contre reprocher, c’est la tentation à recoder la situation vénézuélienne. Il n’y a pas de crise humanitaire au Venezuela. Il y a une crise sociale et politique. Qui appelle à des réponses sociales et politiques, mises en œuvre par les Vénézuéliens et Vénézuéliennes eux-mêmes. Au mieux, avec notre soutien.

Tout, depuis la reconnaissance de la situation d’urgence, le diagnostic des besoins, le financement et l’organisation de l’intervention – ainsi que sa mise en récit –, jusqu’aux rapports avec les victimes et les autorités locales, est politique. Ils

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soulèvent des questions de choix et de priorité, d’égalité et de souveraineté. D’où la nécessité de combattre la tendance dominante à faire de l’humanitaire une raison et un gouvernement, étrangers voire opposés au politique. Et par-là même plus efficaces, plus neutres et plus justes. De la fiction, on glisse vers le spectacle. Une manière de se débarrasser à bon compte de notre responsabilité, une agitation qui dissimule (mal) notre impuissance ou notre inaction.

Titre de la rédaction : Titre original : "Venezuela : l’humanitaire entre gâchette et substitut"

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8.41. Venezuela : la présence des militaires russes viole la Constitution AFP Publié le mardi 26 mars 2019 à 19h01 - Mis à jour le mercredi 27 mars 2019 à 10h49 Le chef de file de l'opposition vénézuélienne Juan Guaido, soutenu par une cinquantaine de pays, dont les Etats-Unis, a estimé mardi que la présence de militaires russes au Venezuela était une violation de la Constitution. "Il semble que (le gouvernement de Nicolas Maduro) n'ait pas confiance en ses propres militaires, car il les fait venir de l'étranger (...) Ils violent à nouveau la Constitution", a déclaré Juan Guaido devant le Parlement, seul organe contrôlé par l'opposition.

Deux avions russes transportant une centaine de militaires et 35 tonnes de matériel, "dans le cadre de la coopération technique et militaire" avec le Venezuela, sont arrivés à Caracas, a annoncé dimanche l'agence russe Sputnik.

Cela a donné lieu à une passe d'armes lundi entre Washington et Moscou.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a prévenu son homologue russe Sergueï Lavrov que les Etats-Unis ne resteraient pas "les bras croisés" si la Russie continuait "d'exacerber les tensions au Venezuela". M. Lavrov a rétorqué en accusant les Etats-Unis de tenter d'organiser un "coup d'Etat" pour renverser le président vénézuélien Nicolas Maduro.

Un peu plus tôt mardi, le ministère des Affaires étrangères russe a souligné que l'envoi de ces militaires avait été fait "dans le cadre de la loi" vénézuélienne.

La Russie "est en train de renforcer sa coopération avec le Venezuela en accord avec la Constitution de ce pays et dans le cadre de la loi", a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova.

Juan Guaido s'est autoproclamé président par intérim du pays le 23 janvier. Deux mois plus tard, le Venezuela reste confronté à la plus grave crise de son histoire, avec une économie au ralenti, une monnaie naufragée et des pénuries de tout.

Nicolas Maduro de son côté met en avant le soutien de la Russie et de la Chine, les principaux créanciers du pays, qui prennent systématiquement son parti dans les instances internationales comme au Conseil de sécurité des Nations unies.

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8.42. Venezuela : l’opposant Juan Guaido déclaré inéligible durant 15 ans AFP Publié le jeudi 28 mars 2019 à 19h09 - Mis à jour le vendredi 29 mars 2019 à 06h57 Le pouvoir vénézuélien a accentué jeudi la pression sur Juan Guaido, reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays, en le déclarant inéligible durant 15 ans, une sanction aussitôt rejetée par le chef de file de l'opposition.

Cette décision a fait monter la tension dans ce pays pétrolier paralysé par une nouvelle panne d'électricité massive durant trois jours et qui compte deux dirigeants rivaux se disputant le pouvoir : le chef d'Etat socialiste Nicolas Maduro et le député de centre-droit Juan Guaido.

Sur la scène internationale aussi, la tension ne redescend pas entre Washington et Moscou à propos de la présence de soldats russes au Venezuela : ce pays d'Amérique du Sud est devenu un point de friction supplémentaire de la nouvelle Guerre froide opposant les deux géants.

A Caracas, le Contrôleur général de la République, Elvis Amoroso, chargé de veiller à la transparence de l'administration au Venezuela, a décidé jeudi à la mi-journée "d'interdire l'exercice de toute fonction élective au citoyen (Juan Guaido) pour la durée maximum prévue par la loi", soit 15 ans, pour corruption présumée, a-t-il déclaré à la télévision d'Etat.

Selon M. Amoroso, jugé proche du pouvoir en place, l'opposant n'a pas justifié, dans ses déclarations de patrimoine, certaines dépenses réalisées au Venezuela et à l'étranger avec des fonds provenant d'autres pays.

"Il a réalisé plus de 91 voyages hors du territoire pour un coût supérieur à 310 millions de bolivars (quelque 94.000 dollars au taux actuel), sans justifier l'origine de ces fonds", a expliqué le Contrôleur, qui a demandé au parquet d'"exercer les actions correspondantes", sans plus de précision.

Personne ne reconnaît personne

Dans la foulée, Juan Guaido a rejeté cette sanction lors d'un discours devant ses partisans alors qu'il présentait son plan pour le Venezuela.

"Il n'est pas contrôleur. Il ne l'est pas (...) et il n'existe pas de sanction d'inéligibilité (...) Le Parlement légitime est le seul ayant le pouvoir de désigner un contrôleur", a déclaré Juan Guaido, rappelant qu'Elvis Amoroso avait été nommé à ce poste par l'Assemblée constituante, acquise au pouvoir et qui remplace dans les faits le Parlement, seul organisme contrôlé par l'opposition.

"Chaque journée (supplémentaire) dans la rue pour moi est une défaite pour le régime. S'il m'arrête, ce sera son ultime défaite", a-t-il ajouté dans une autre réunion publique.

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Les Etats-Unis ont qualifié de "ridicule" cette sanction. "Ça, c'est fort. C'est ridicule", a déclaré le porte-parole du département d'Etat, Robert Palladino. Les pays latino-américains et européens du Groupe de contact international (GCI) sur le Venezuela, réunis jeudi à Quito, ont condamné la décision des autorités vénézuéliennes.

Dans ce pays où personne ne reconnaît la légitimé de personne, difficile de dire quelles seront les conséquences de cette décision qui vise Juan Guaido, également président du Parlement. Ni s'il va pouvoir continuer à siéger, la sanction étant en théorie d'application immédiate.

Dans la rue, les Vénézuéliens ont fait face durant trois jours à une nouvelle panne électrique géante qui frappe leur pays en ayant recours à des "méthodes du Moyen Age": marcher pendant des heures, fabriquer des lampes à huile ou aller chercher de l'eau à la source.

"Cela fait perdre patience à n'importe qui (...) Ca suffit! Ce n'est pas la première panne", s'est plaint Mauro Hernandez, 57 ans, qui a dû marcher durant une heure et demie pour rejoindre son travail.

Passe d'armes

Jeudi après-midi, le ministre de la Communication Jorge Rodriguez a annoncé que le courant était revenu "dans la plus grande partie" du Venezuela, pays de 30 millions d'habitants. Le gouvernement a également annoncé la reprise vendredi des cours et du travail dans les administrations qui étaient suspendus depuis mardi.

Un peu plus tôt, une nouvelle passe d'armes a opposé Russes et Américains.

Washington reconnaît comme une cinquantaine de pays Juan Guaido comme président par intérim et réclame le départ de Nicolas Maduro, tandis que Moscou accuse les Etats-Unis d'essayer d'organiser un "coup d'Etat" dans ce pays aux immenses réserves pétrolières.

Ces tensions ont connu un nouveau pic depuis l'arrivée le week-end dernier de deux avions russes, un Antonov An-124 et un Iliouchine Il-62, à Caracas. Selon des médias vénézuéliens, ils transportaient 99 militaires et 35 tonnes de matériel, sous le commandement du chef de l'armée de terre russe, le général Vassili Tonkochkourov.

Recevant mercredi dans le Bureau ovale Fabiana Rosales, épouse de Juan Guaido, Donald Trump a haussé le ton : "La Russie doit partir" du Venezuela.

En réponse, la Russie a demandé à Donald Trump de la "respecter" et de ne pas se mêler de ses relations avec Caracas, où elle a confirmé avoir envoyé des "spécialistes" militaires chargés de mettre en oeuvre les contrats d'achat d'armement entre Moscou et Caracas.

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8.43. « Une guerre électrique visant à rendre fou le pays » : au Venezuela, on rationnera l’électricité pour 30 jours

AFP Publié le lundi 01 avril 2019 à 07h09 - Mis à jour le mardi 02 avril 2019 à 11h06 Le président du Venezuela Nicolas Maduro a annoncé dimanche l'entrée en vigueur d'un plan de rationnement de l'électricité d'une durée de 30 jours en raison de l'aggravation des coupures d'électricité qui affectent le pays depuis le 7 mars.

"J'ai approuvé un plan de 30 jours" pendant lesquels l'électricité sera rationnée, afin d'assurer un "équilibre" entre la production, le transport, la distribution et la consommation "avec une attention particulière à garantir la distribution d'eau", a déclaré M. Maduro à la télévision nationale.

Les coupures d'électricité perturbent de nombreux services au Venezuela, notamment la distribution de l'eau.

Accompagné par les ministres du gouvernement et par le haut commandement des forces armées, M. Maduro a délivré son message à la radio et à la télévision nationales, en relevant que de nombreux Vénézuéliens ne pourraient pas l'entendre puisqu'ils étaient une nouvelle fois sans électricité ce dimanche soir.

Le rationnement annoncé par le président chaviste est similaire à ceux qui ont déjà été appliqués dans l'Etat pétrolier de Zulia, dans l'ouest du Venezuela, qui connaît des pannes de courant depuis une dizaine d'années.

Le pouvoir attribue les coupures massives qui se sont succédé dernièrement à Caracas et dans la quasi-totalité des Etats vénézuéliens à des actes de sabotage de l'opposition soutenue par les Etats-Unis.

Ces sabotages affectent selon le président Maduro la centrale hydroélectrique de Guri, qui fournit au Venezuela 80% de son électricité.

"Nous devons administrer une situation très grave", a déclaré M. Maduro. Il a répété que les coupures étaient causées par des "attaques terroristes" constituant ce qu'il a appelé "une guerre électrique visant à rendre fou le pays".

Il n'a pas précisé les modalités concrètes du plan de rationnement qui, a-t-il dit, "est entré en vigueur ce dimanche 31 mars".

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8.44. Venezuela : Guaido compte mettre fin sous peu au règne de Maduro AFP Publié le dimanche 07 avril 2019 à 08h20 - Mis à jour le dimanche 07 avril 2019 à 08h21 Le chef de l'opposition vénézuélienne Juan Guaido a déclaré samedi avoir lancé la "phase définitive" de l'éviction du président Nicolas Maduro, qui a demandé l'aide de pays de la région pour ouvrir un dialogue entre les deux camps.

Samedi a été une nouvelle journée de mobilisation au Venezuela: les partisans de M. Maduro et ceux de M. Guaido, reconnu comme président intérimaire par plus de 50 pays dont les Etats-Unis, ont une fois de plus manifesté par milliers dans les rues de Caracas et d'autres villes.

"On est là et on va y rester! Tous dans la rue, pour la phase définitive qui mettra fin à l'usurpation!", a déclaré M. Guaido, juché sur un camion équipé d'enceintes devant des milliers de partisans rassemblés dans l'est de Caracas, qui agitaient des drapeaux du Venezuela et des pancartes portant l'inscription "Liberté".

"On est en mode survie, c'est ce à quoi nous oblige cette dictature", a déclaré à l'AFP Marcel Rouaix, un étudiant de 22 ans.

"Montée en pression"

Pour que la mobilisation ne retombe pas, M. Guaido a appelé à une nouvelle manifestation pour mercredi prochain. Celui qui à 35 ans préside le Parlement, seule institution vénézuélienne tenue par l'opposition, avait annoncé vendredi "la montée en pression la plus grande de l'histoire".

A Maracaibo, la deuxième ville du Venezuela, dans l'ouest, les forces de l'ordre ont violemment dispersé une manifestation et deux députés de l'opposition, Renzo Prieto et Nora Bracho, ont été arrêtés et brièvement détenus, a déclaré à l'AFP leur collègue parlementaire Elimar Diaz.

En dehors de Maracaibo, les manifestations se sont dispersées dans le calme.

Le pouvoir chaviste, qui n'entend pas laisser la rue à l'opposition, a lui aussi fait descendre dans la rue des milliers de fidèles vêtus de rouge contre l'"impérialisme".

"Ensemble, toujours mobilisés, continuons à défendre la paix et l'indépendance nationale. Halte à l’ingérence !", a écrit M. Maduro sur Twitter.

"Grand dialogue"

Devant une foule de ses partisans rassemblés près du palais présidentiel de Miraflores, M. Maduro a appelé plusieurs pays de la région à contribuer à l'établissement d'un dialogue intervénézuélien. "Le Venezuela demande un soutien et un accompagnement pour un grand dialogue de paix, d'entente", a-t-il déclaré.

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Le Mexique et l'Uruguay avaient proposé en janvier de faciliter un dialogue entre MM. Maduro et Guaido. Outre ces deux pays, le président socialiste a sollicité samedi la Bolivie et les pays des Caraïbes.

"Mettons toutes les cartes sur la table", a-t-il dit, "et avec l'accompagnement du Mexique, de la Bolivie, de l'Uruguay et de la Caraïbe, le Venezuela peut organiser au plus tôt une table de dialogue avec tous les secteurs".

Jusqu'à présent, M. Guaido a rejeté toute discussion avec le camp Maduro.

Le pouvoir chaviste a renforcé ces derniers jours sa pression politique sur M. Guaido, le privant de son immunité parlementaire, ce qui permet la poursuite de la procédure pénale engagée à son encontre. L'opposant a aussi été déclaré inéligible pour 15 ans.

Avertissement américain

Il est difficile d'anticiper les conséquences concrètes de ces décisions dans un pays plongé dans une profonde crise politique.

M. Guaido a affirmé que "rien" ne l'arrêterait, bien qu'en théorie il puisse être interpellé à tout moment par les autorités.

Arrêter Guaido "serait une très grave erreur, peut-être la dernière du régime", a prévenu vendredi Elliott Abrams, représentant spécial américain pour la crise vénézuélienne, dans un entretien à la chaîne NTN24.

"La réaction, je vous l'assure, sera très forte, nous avons des plans", a-t-il ajouté sans plus de détails.

M. Abrams a été traité d'"assassin" par le numéro deux du chavisme, Diosdado Cabello, en raison de son implication passée dans des conflits en Amérique centrale.

Le président Donald Trump n'exclut pas d'intervenir militairement au Venezuela, pays qui compte les plus grandes réserves de pétrole de la planète, tandis que M. Guaido songe à demander au Parlement d'autoriser une opération militaire étrangère.

Les manifestations ont lieu alors que le Venezuela a vécu sa pire panne d'électricité au début du mois de mars. Et depuis une dizaine de jours, des coupures de courant intermittentes plongent le pays dans le noir à intervalles réguliers et créent de graves problèmes de distribution d'eau.

M. Maduro rend les sanctions américaines responsables des problèmes économiques du Venezuela. M. Guaido estime, lui, que c'est l'incurie du gouvernement et la corruption en son sein qui sont à blâmer.

Le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir mercredi à la demande de Washington, en présence du vice-président américain Mike Pence, pour discuter de

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la crise humanitaire au Venezuela. Vendredi, les Etats-Unis ont annoncé de nouvelles sanctions contre 34 navires du groupe pétrolier public vénézuélien PDVSA.

"Ce n'est qu'un premier pas", a prévenu samedi John Bolton, le conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche.

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8.45. Pence demande à l’ONU de reconnaître Guaido comme dirigeant du Venezuela

AFP Publié le mercredi 10 avril 2019 à 18h37 - Mis à jour le jeudi 11 avril 2019 à 07h52 Le vice-président des Etats-Unis, Mike Pence, a demandé mercredi à l'ONU de reconnaître l'opposant Juan Guaido comme le dirigeant du Venezuela et a réclamé le départ de Nicolas Maduro, qui a annoncé la conclusion d'un accord avec la Croix-Rouge.

"Aujourd'hui (mercredi) le vice-président des Etats-Unis, Mike Pence, s'est ridiculisé au Conseil de sécurité des Nations unies. Je ne comprends pas son arrogance, sa suffisance, son suprémacisme racial", a déclaré le président vénézuélien dans une allocution télévisée.

"Menacer le Venezuela au Conseil de sécurité d'une invasion militaire, M. Mike Pence, cela ne s'était jamais vu auparavant", a ajouté M. Maduro, qui accuse régulièrement le président américain Donald Trump de vouloir s'emparer par la force des immenses réserves pétrolières du Venezuela, les plus importantes du monde.

Un peu plus tard dans la journée, Nicolas Maduro a annoncé, toujours lors d'une allocution télévisée, qu'un accord avait été conclu avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) pour une distribution d'"aide humanitaire" au Venezuela.

Cet accord était très attendu, le Venezuela souffre depuis longtemps de pénuries de produits alimentaires et de médicaments, des problèmes attribués par M. Maduro aux sanctions économiques américaines.

Nicolas Maduro, qui nie que la situation actuelle du Venezuela puisse être qualifiée de crise humanitaire, a estimé que cette coopération devrait être mise en oeuvre "sans politisation grotesque", dans la "légalité et le respect".

Cette crise humanitaire a poussé, selon le Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR), 3,4 millions de Vénézuéliens à quitter le pays.

Sanctions contre Cuba

Evoquant devant le Conseil de sécurité, lors d'une réunion demandée par Washington, "un Etat en déroute", Mike Pence avait annoncé plus tôt dans la journée que Washington était en train de rédiger un projet de résolution pour la reconnaissance de Juan Guaido par les Nations unies, qui inclurait une révocation de l'ambassadeur actuel.

Ce projet pourrait être présenté à l'Assemblée générale de l'ONU, où la Russie et la Chine, soutiens du président Maduro, n'ont pas de droit de veto.

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S'adressant directement au représentant du Venezuela Samuel Moncada, le vice-président américain a lancé qu'il ferait mieux de rentrer dans son pays dire à Nicolas Maduro que "son heure était comptée".

Mike Pence a aussi annoncé que Donald Trump allait "adopter prochainement des sanctions contre Cuba pour sanctionner son influence négative au Venezuela" et que Washington allait augmenter de 60 millions de dollars son assistance humanitaire aux Vénézuéliens.

"Sécurité internationale"

"C'est un nouvel épisode du spectacle destiné à renverser le régime" de Nicolas Maduro, s'est insurgé l'ambassadeur russe à l'ONU Vassily Nebenzia, alors que Mike Pence avait déjà quitté la salle du Conseil. "Si vous souhaitez rendre leur grandeur aux Etats-Unis, ce que nous souhaitons tous, arrêtez les ingérences", a lancé le diplomate russe.

La Chine a aussi affirmé son opposition à "toute ingérence" au Venezuela, comme à "toute intervention militaire" dans ce pays.

L'ambassadeur vénézuélien a accusé les Etats-Unis de détruire l'économie de son pays. "Nous devons arrêter cette guerre menée par Donald Trump", a-t-il dit.

Depuis le début de l'année, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est montré incapable de s'entendre sur une ligne commune à l'égard du Venezuela. Chaque mois ou presque, les Etats-Unis y envoient des responsables pour tenter de rassembler davantage de soutiens à Juan Guaido.

En janvier, le secrétaire d'Etat Mike Pompeo avait fait le déplacement, suivi en février de l'envoyé spécial américain Elliott Abrams. Fin février, deux projets de résolution concurrents avaient été rejetés par le Conseil de sécurité, illustrant la profonde division de la communauté internationale.

Appels à manifester

La réunion du Conseil de sécurité était consacrée à l'aide humanitaire alors que, selon l'ONU, sept millions de personnes --près du quart de la population vénézuélienne-- manquent de nourriture et de soins médicaux.

Mercredi, après une nouvelle panne électrique qui a plongé Caracas et une grande partie du Venezuela dans le noir, le gouvernement a affirmé que le courant était rétabli. "Nous assurons désormais le service (de fourniture d'électricité) sur tout le territoire national", a annoncé le ministre de la Communication Jorge Rodriguez.

Des habitants de plusieurs Etats de l'ouest du pays faisaient néanmoins encore état de difficultés.

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Début mars, une méga-panne électrique a paralysé le pays pendant près d'une semaine, suivie par d'autres coupures sporadiques qui ont contraint le gouvernement à mettre en place un plan de rationnement.

Reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays, Juan Guaido, 35 ans, a appelé ses partisans à manifester mercredi. La nouvelle panne générale est "une raison supplémentaire pour descendre dans la rue", a-t-il tweeté, avant de participer à un rassemblement à Caracas.

Des groupes d'habitants se sont rassemblés en divers points de la capitale et du pays.

Le pouvoir a également appelé à des manifestations entre jeudi et samedi pour commémorer le 17e anniversaire du coup d'Etat manqué en 2002 contre l'ex-président Hugo Chavez (1999-2013) et dénoncer les menaces d'"intervention" des Etats-Unis.

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8.46. Le courant est rétabli dans tout le pays BELGA Publié le mercredi 10 avril 2019 à 22h37 - Mis à jour le mercredi 10 avril 2019 à 23h49 Le gouvernement vénézuélien a annoncé mercredi que le courant électrique avait été rétabli dans tout le pays, avec toutefois encore quelques coupures programmées, selon lui, moins de 24 heures après une nouvelle panne massive.

"Nous assurons désormais le service (de fourniture d'électricité) sur tout le territoire national", a déclaré le ministre de la Communication Jorge Rodriguez dans une allocution à la télévision d'Etat, première intervention gouvernementale depuis le début des pannes. Le ministre a attribué la dernière grande interruption, survenue à 03H20 GMT, à une "panne" dans la centrale hydroélectrique de Guri (sud) qui fournit 80% de l'électricité du pays, "conséquence des dégâts engendrés par l'attaque terroriste" du 7 mars.

Début mars, une méga-panne électrique a paralysé le pays pendant près d'une semaine, suivie par d'autres coupures qui ont contraint le gouvernement à mettre en place un plan de rationnement dans tout le pays, à l'exception de Caracas. Le gouvernement a attribué la méga-panne à des "cyberattaques" perpétrées par les Etats-Unis et l'opposition. Cette dernière pointe pour sa part le manque d'entretien des infrastructures électriques et l'incurie des autorités.

La coupure de mardi soir a touché la capitale et au moins 20 des 23 Etats du pays, selon les informations diffusées par des internautes à travers le pays. Le ministre de la Communication a annoncé que le rationnement serait en vigueur jusqu'à fin avril et a appelé la population à faire des économies d'énergie. A Caracas, la lumière est revenue progressivement dans la matinée de mercredi, tandis que des régions dans l'ouest du pays connaissaient encore des problèmes d'approvisionnement.

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8.47. Venezuela : Deux manifestations antagonistes annoncées samedi MARIE-FRANCE CROS Publié le vendredi 26 avril 2019 à 06h33 - Mis à jour le vendredi 26 avril 2019 à 06h34 L’opposition veut relancer la pression contre le président Maduro, pour qui commence l’embargo sur le pétrole. Journées chaudes en perspective au Venezuela, où des manifestations antagonistes doivent avoir lieu ce samedi 27 avril. Juan Guaido, qui s’est autoproclamé "président" le 23 janvier 2019 - sans disposer d’aucune base légale pour le faire puisque son poste, président de l’Assemblée nationale, n’en fait pas le deuxième personnage de l’État, qui est, dans ce pays, le vice-président - a en effet appelé à manifester, samedi, contre le gouvernement du président Nicolas Maduro, réélu en mai 2018 lors d’un scrutin d’où les ténors de l’opposition avaient été exclus. Entendu avec l’administration Trump Juan Guaido, avant son autoproclamation, avait reçu une promesse de soutien du vice-président américain, Mike Pence, avait indiqué le Wall Street Journal le 25 janvier dernier. Washington, qui cherche à renverser le régime vénézuélien depuis des années (les États-Unis avaient reconnu hâtivement un coup d’État contre Hugo Chavez en 2002, avant que les putschistes échouent), avait reconnu Guaido "président" moins de cinq minutes après son autoproclamation. Embargo de Washington contre le pétrole Juan Guaido veut relancer la pression contre le président Maduro, qui a immédiatement réagi à cet appel à manifester contre lui en convoquant ses partisans - qui demeurent nombreux - à manifester de leur côté pour protester contre la campagne de déstabilisation orchestrée par les États-Unis et l’opposition pro-Guaido. Ce samedi est le jour fixé par les deux camps. C’est aussi le jour où entre en vigueur la sortie du Venezuela de l’Organisation des États américains (OEA), dont le siège est à Washington et qui a toujours été un organe où les États-Unis font la loi. Cela avait justifié la création, à l’initiative de feu Hugo Chavez, d’autres institutions latino-américaines. L’OEA a reconnu le 9 avril un représentant de Juan Guaido comme ambassadeur du Venezuela en son sein. C’est aussi ce week-end - dimanche 28 avril - qu’entrent en vigueur les sanctions

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américaines les plus dures contre le Venezuela : un embargo sur son pétrole, principale source de revenus du pays latino-américain. Capitaux bancaires retenus Ces sanctions s’ajoutent à celles décrétées par l’administration Trump - qui a résolu de s’attaquer aux trois régimes de gauche d’Amérique latine, Cuba, le Nicaragua et le Venezuela, et l’a annoncé publiquement à la communauté cubaine de Miami, il y a quelques semaines - contre la Banque centrale de Caracas. En outre, plusieurs pays dans les banques desquels le Venezuela avait logé ses fonds publics ont, comme les États-Unis, décidé de ne donner accès à ces fonds qu’à Juan Guaido, pas au gouvernement de Caracas. L’administration Maduro assure s’être ainsi fait "voler" quelque "30 milliards de dollars", notamment au sein de l’Union européenne. Il souligne qu’il n’y a pourtant "aucun embargo" décrété contre son pays jusqu’ici. C’est de l’argent, dit le président Maduro, qui pourrait servir à acheter les médicaments et aliments dont le pays a besoin. La profonde crise économique à laquelle le Venezuela doit faire face a été provoquée par la chute des prix pétroliers, la mauvaise gouvernance économique des autorités "bolivariennes" et les sanctions américaines. Elle a poussé 2,7 millions de Vénézuéliens à émigrer.

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8.48. Venezuela : Maduro appelle l’armée à combattre « tous les putschistes »

AFP Publié le jeudi 02 mai 2019 à 15h37 - Mis à jour le jeudi 02 mai 2019 à 15h37 Le président vénézuélien Nicolas Maduro, dont la légitimité est réfutée par l'opposant Juan Guaido et une partie de ses compatriotes, a appelé l'armée à "combattre tous les putschistes", dans un discours jeudi, au lendemain de nouvelles manifestations contre lui. "Oui, nous sommes en plein combat, le moral doit être au maximum dans cette lutte pour désarmer tous les traîtres, tous les putschistes", a dit Nicolas Maduro qui s'exprimait devant plusieurs milliers de soldats tôt dans la matinée.

La veille, le chef de l'Etat avait déjà assuré qu'il n'"hésiterait pas" à punir les "traîtres" responsables, selon lui, de la tentative ratée de soulèvement militaire auquel avait appelé Juan Guaido mardi matin. A cette occasion, le chef de file de l'opposition, avait revendiqué le soutien de soldats entrés en rébellion.

"Loyauté toujours, trahison jamais! ", a encore lancé le chef de l'Etat aux soldats dans son discours jeudi, reprenant un slogan scandé dans toutes les réunions et manifestations du pouvoir.

"Personne ne peut avoir peur. L'heure est à la défense du droit à la paix", a encore dit Nicolas Maduro, qui revendique l'héritage du défunt président Hugo Chavez (1999-2013).

La tentative de soulèvement militaire de mardi a provoqué des manifestations monstres contre le président dans tout le Venezuela, mais dans la soirée ce dernier a affirmé avoir déjoué une "escarmouche putschiste".

Le lendemain, à l'occasion de la Fête du travail, des milliers de Vénézuéliens sont retournés dans la rue pour exiger son départ et soutenir Juan Guaido, qui est reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays. De violents heurts avec les forces de l'ordre ont éclaté et une jeune femme a été tuée.

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8.49. Après les sanctions, voici la carotte : la nouvelle technique de Washington pour renverser Maduro

MARIE-FRANCE CROS Publié le samedi 11 mai 2019 à 18h26 - Mis à jour le samedi 11 mai 2019 à 18h27 Washington lève ses sanctions contre les élites qui font défection. L’administration Trump, qui a admis sa surprise devant l’incapacité de l’opposition vénézuélienne - malgré l’appui de Washington - à renverser le président Nicolas Maduro, a inauguré cette semaine une nouvelle technique. Après la pluie de sanctions qui s’est abattue sur le Venezuela, étranglant sa population, et sur les élites du régime en place, pour pousser au soulèvement contre le chef de l’État, voici la carotte. Encourager d’autres à déserter Les autorités américaines ont en effet levé mardi dernier, "avec effet immédiat", les sanctions qu’elles avaient imposées le 15 février à Christopher Figuera, chef du service de renseignement vénézuélien (Sebin). Entre-temps, l’homme a fait défection. En l’annonçant, mardi, le vice-Président américain, Mike Pence, a espéré que cela "encouragera d’autres à suivre l’exemple du général Christopher Figuera". Ce dernier avait disparu le 30 avril, lorsqu’avait échoué le soulèvement militaire annoncé par quelques soldats et l’opposant Juan Guaido - qui s’est autoproclamé "Président" du Venezuela en janvier dernier avec les encouragements de Washington - faute d’appuis dans l’armée. C’est apparemment Christopher Figuera qui avait libéré des arrêts domiciliaires le patron du parti de Juan Guaido (Voluntad Popular), Leopoldo Lopez, condamné à 14 ans de prison pour avoir organisé des manifestations meurtrières. Ce dernier avait déjà participé à un coup d’État raté contre Hugo Chavez en 2002, coup d’État soutenu par Washington et Madrid. Devant l’échec du soulèvement militaire, le 30 avril, Leopoldo Lopez s’était réfugié dans l’ambassade d’Espagne et 25 soldats dans celle du Brésil. La Cour suprême vénézuélienne a ouvert des poursuites contre dix parlementaires de l’opposition qui ont soutenu l’appel au soulèvement de Juan Guaido. Deux d’entre eux se sont réfugiés à l’ambassade d’Italie, un troisième à l’ambassade d’Argentine. Un quatrième, le bras droit de Juan Guaido, Edgar Zambrano, a été arrêté mercredi soir de manière spectaculaire à Caracas : comme il refusait de quitter sa voiture, un

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camion-grue a remorqué son véhicule vers le siège du Sebin, le service de renseignement. Les dix parlementaires sont accusés d’"incitation à l’insurrection" et "trahison". Juan Guaido a dénoncé, dans ces poursuites, le "démantèlement" de l’Assemblée nationale et un "terrorisme d’État". Le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, a affirmé que l’arrestation de M. Zambrano était "arbitraire" et appelé à sa libération immédiate. L’UE a fait de même. Deux assemblées L’immunité des dix parlementaires a été levée par l’Assemblée constituante, organe rival de l’Assemblée nationale ; la première est aux mains des pro-Maduro, la seconde dans celles des anti- Maduro. La Constituante avait levé, le mois dernier, l’immunité parlementaire de Juan Guaido pour "usurpation de fonction", puisqu’il s’est autoproclamé "Président de la République". Une cinquantaine de pays ont suivi les États-Unis et reconnu Guaido comme "Président ad interim", en janvier-février, tandis que quelque 140 autres pays continuent de reconnaître Nicolas Maduro comme chef de l’État vénézuélien. Le Venezuela détient les plus importantes réserves de pétrole du monde. Le pays est plongé dans une grave crise économique, depuis plusieurs années, qui a fait émigrer 2,3 millions de ses 32 millions d’habitants. Cette crise est due à la chute des cours du pétrole, à la mauvaise gouvernance et aux sanctions américaines contre l’économie du pays ; ces dernières s’en prennent principalement aux exportations pétrolières du Venezuela - sa principale ressource - et aux avoirs bancaires de l’État.

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8.50. Venezuela : des discussions secrètes entre frères ennemis MARIE-FRANCE CROS Publié le vendredi 17 mai 2019 à 06h53 - Mis à jour le vendredi 17 mai 2019 à 06h53 Oslo a accueilli des discussions secrètes entre les deux camps vénézuéliens. Rien n’a filtré. C’est la télévision publique norvégienne qui l’a annoncé jeudi : des "négociations de paix" se sont tenues cette semaine dans le pays scandinave entre les frères ennemis vénézuéliens. Rien n’a filtré, toutefois, sur les thèmes de discussion, ni sur leurs résultats éventuels. Côté gouvernemental, la délégation était conduite par le ministre de l’Information, Jorge Rodriguez ; côté opposition, par le vice-président de l’Assemblée nationale, Stalin Gonzalez. Perspectives de guerre Cette ouverture survient alors que plusieurs pays s’inquiètent des perspectives de guerre soulevées par l’annonce de l’administration Trump qu’elle n’écartait pas l’hypothèse d’une intervention militaire au Venezuela et par la déclaration de Juan Guaido - président de l’Assemblée nationale qui s’est autoproclamé "Président" en janvier dernier, à la surprise générale, sauf celle de Washington. Il a annoncé que son envoyé aux États-Unis allait rencontrer le chef du Southern Command de l’armée américaine. Les États-Unis ont appuyé un coup d’État contre Hugo Chavez en 2002, qui a échoué grâce à la rue et une partie de l’armée. Depuis la prestation de serment du successeur de Chavez, Nicolas Maduro, à un second mandat, en janvier dernier, la violence entre frères ennemis a repris de plus belle. Les relations entre pouvoir et opposition sont violentes au Venezuela, marquées par une forte intolérance politique et une puissante hostilité entre riches et pauvres. La chute des prix pétroliers, une mauvaise gouvernance et des sanctions des États-Unis contre l’économie du Venezuela ont plongé celui-ci dans une grave crise, qui a provoqué l’émigration 2 millions de personnes. Les pays voisins, qui accueillent le gros de ces migrants et qui sont dirigés par la droite, quand les autorités de Caracas sont de gauche, appuient de nouvelles élections au Venezuela, tout comme les pays européens qui ont reconnu Juan Guaido comme "Président aad interim" à la suite des États- Unis.

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Risque de guerre civile S’ils sont hostiles à Nicolas Maduro, ces pays latino-américains se sont prononcés contre une intervention armée au Venezuela ; elle déclencherait une guerre civile, en raison du nombre de soutiens dont dispose encore le régime Maduro. Dans la population, où les pauvres le voient comme le seul qui s’intéresse à eux ; au sein de l’armée, soit par nationalisme "bolivarien", soit pour préserver les intérêts de la nomenklatura maduriste. C’est pourquoi les espoirs de l’administration Trump, qui comptait sur une chute rapide du régime, sont déçus ; ce qui la pousse à une attitude plus vindicative. Juan Guaido doit, par ailleurs, faire face aux demandes de ceux qui ont suivi son appel à déserter : 65 militaires et leurs familles qui avaient déserté en Colombie en février ont été mis à la porte de l’hôtel où ils logeaient, rapporte l’AFP. Ils demandent l’aide de Juan Guaido, dont "aucun représentant" n’est venu les voir.

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8.51. Comment le Venezuela pourrait coûter à Trump sa réélection PHILIPPE PAQUET Publié le dimanche 19 mai 2019 à 17h56 - Mis à jour le lundi 20 mai 2019 à 06h45 La politique latino-américaine du Président peut faire la différence en Floride, qui sera un enjeu crucial en 2020. Depuis le jour de 2015 où il lança sa campagne présidentielle en dénonçant l’immigration mexicaine, Donald Trump n’a cessé d’accorder à l’Amérique latine une place considérable. Si l’on excepte l’Iran et la Corée du Nord, c’est cette partie du monde qui alimente l’essentiel de sa politique étrangère, qu’il s’agisse de réduire à néant le rapprochement esquissé par Barack Obama avec Cuba, de favoriser un changement de régime au Venezuela, de saluer l’avènement d’un gouvernement populiste au Brésil, ou de dénoncer “l’invasion” de migrants venus du Honduras et du Guatemala. On n’y verra rien de très surprenant depuis que Washington énonça la doctrine Monroe au début du XIXe siècle, et moins encore en sachant de quel poids pèse désormais – au moins théoriquement – l’électorat hispanophone aux États-Unis. Démocrates et républicains n’ont pareillement jamais cessé de courtiser cette force démographique et politique. Si les premiers ont eu jusqu’ici nettement plus de succès en raison notamment de leurs programmes sociaux, les seconds misent sur deux attraits pour combler leur retard : la défense d’un conservatisme religieux susceptible de plaire à une population catholique traditionnelle, et l’opposition inconditionnelle aux régimes de gauche qui ont fait fuir tant de réfugiés vers les États-Unis. Donald Trump ne se démarque donc guère de ses prédécesseurs quand il cherche à séduire les Latinos. D’aucuns s’interrogent néanmoins, dans les rangs républicains, sur l’efficacité de sa méthode, en sachant que ce vote pourrait être crucial en Floride, enjeu lui-même crucial dans tout scrutin présidentiel. Trump n’avait enlevé la Floride que de justesse en 2016 (49,02 % des voix, contre 47,82 % pour Hillary Clinton). Avec 29 “grands électeurs”, le Sunshine State est le troisième gros lot, ex-aequo avec New York, après la Californie et le Texas. En Floride, le candidat républicain avait largement perdu le vote hispanophone en 2016, au profit de sa rivale démocrate (71 % contre 26 %). Il l’avait, toutefois, emporté auprès des Cubains, mais avec un différentiel (54 % contre 41 %) qui pourrait ne pas résister à tous les assauts. Or, la politique cubaine de Donald Trump est diversement appréciée, à Miami et ailleurs. Si la vieille génération d’immigrants cubains, résolument hostile à Castro et ses héritiers, applaudit au virage à 180 degrés imprimé par l’Administration actuelle, les jeunes, qui n’ont généralement pas souffert de la dictature, se montrent plus favorables à une ouverture et à des échanges. L’interdiction des voyages à Cuba, qui venait à peine d’avoir été levée par Obama,

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est en particulier mal ressentie. En guerre contre la “gauche radicale” On sait que le durcissement américain à l’égard de La Havane est, en partie au moins, motivé par le soutien que les autorités cubaines apportent au gouvernement socialiste de Nicolas Maduro à Caracas. Or, la Maison-Blanche a juré la perte de ce dernier, pressant ses alliés de la suivre dans la reconnaissance du “président élu” Juan Guaido comme solution de rechange. Si cette dernière initiative a été appréciée par les quelque 200 000 résidents d’origine vénézuélienne en Floride, beaucoup d’entre eux s’impatientent à présent en constatant l’impuissance de Guaido à s’imposer. Donald Trump est pris au piège d’une politique qui porte plus la marque de son conseiller à la Sécurité nationale, le va-t-en-guerre John Bolton, que la sienne. Le Président n’est pas un chaud partisan des renversements de régime et, s’il a entériné l’idée s’agissant du Venezuela, c’est sans doute dans un souci de cohérence avec sa campagne électorale contre les démocrates, qu’il qualifie systématiquement, dans ses tweets, de “gauche radicale”. Un air de “baie des Cochons” Si Maduro devait réussir à se maintenir au pouvoir, l’échec de Donald Trump résonnerait comme celui de Barack Obama en Syrie, où le “tyran” Bachar el-Assad est pareillement parvenu à résister aux pressions américaines. Ou il aurait le goût, à en croire un ancien président du Parti républicain en Floride, d’un autre fiasco retentissant des États-Unis en Amérique latine : celui de la baie des Cochons, où une tentative de John F. Kennedy de faire renverser Castro par des exilés cubains échoua lamentablement en 1961. La bonne fortune électorale de Donald Trump en Floride – et, partant, ses chances de conquérir un second mandat – ne dépendra évidemment pas seulement des résultats de sa politique à l’égard du Venezuela. Les hispanophones, pour ne s’en tenir qu’à eux, considéreront à coup sûr d’autres facteurs spécifiques, de la pertinence du mur que le Président veut construire sur la frontière avec le Mexique, au mépris qu’il afficha envers Porto Rico après le passage dévastateur de l’ouragan Maria en septembre 2017 (3 000 morts). Il n’empêche que la tournure des événements à Caracas pourrait être lourde de conséquences. Le Président n’est pas le dernier à le pressentir. Lors d’un meeting à Miami, le 28 février, il avait consacré une bonne partie d’un discours triomphal à ses héroïques efforts pour chasser Nicolas Maduro. De retour en Floride, à Panama City cette fois, le 8 mai dernier, il a jugé préférable de n’évoquer que brièvement la situation au Venezuela, et pour dire qu’elle évoluait “peu à peu”.

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Table des matières

1. INTRODUCTION .......................................................................................................................................... 1 1.1. OBJET DE LA RECHERCHE .................................................................................................................... 1 1.2. LE CONTEXTE DES ÉVÈNEMENTS ......................................................................................................... 2 1.3. HYPOTHÈSE ......................................................................................................................................... 6

2. CORPUS ET MÉTHODOLOGIE ............................................................................................................... 7

3. PREMIÈRE PARTIE : ANALYSE DES TITRES ..................................................................................... 9 3.1. PRÉSENTATION DE L’OBJET DE TRAVAIL .............................................................................................. 9 3.2. CLASSEMENT DES TITRES .................................................................................................................... 9 3.3. ANALYSE DE LA FRÉQUENCE DES MOTS ............................................................................................. 13 3.4. ANALYSE DES TITRES ......................................................................................................................... 16

4. ANALYSE DES ÉLÉMENTS RELEVANT DE LA COMMUNICATION DES SOURCES ET DES INTERVENANTS ................................................................................................................................................. 27

4.1. ANALYSE DES INTERVENANTS ........................................................................................................... 27 4.2. LE RÔLE DE LA PRESSE DANS LE PROCESSUS DE CO-CONSTRUCTION AU DÉBAT ................................ 46 4.3. ANALYSE DES INTERVIEWÉS .............................................................................................................. 56 4.4. CONCLUSION DE L’ANALYSE DES INTERVENANTS ............................................................................. 63

5. ANALYSE DES POSITIONS ET DES ARGUMENTAIRES ................................................................. 66 5.1. ANALYSE DES ÉDITORIAUX ................................................................................................................ 66 5.2. ANALYSE DES CARTES BLANCHES ..................................................................................................... 72 5.3. CONCLUSION DES ANALYSES ............................................................................................................. 78

6. CONCLUSION ............................................................................................................................................. 79

7. BIBLIOGRAPHIE ....................................................................................................................................... 82 7.1. OUVRAGES ........................................................................................................................................ 82 7.2. ARTICLES ........................................................................................................................................... 82 7.3. SITES ÉLECTRONIQUES ....................................................................................................................... 90 7.4. SOURCES AUDIOVISUELLES ............................................................................................................... 92 7.5. COMMUNICATIONS ORALES ............................................................................................................... 92

8. ANNEXES ..................................................................................................................................................... 93 8.1. VICTOIRE DE MADURO CONTESTEE ................................................................................................... 93 8.2. LE VENEZUELA VIT UNE TRAGICOMÉDIE AVEC MADURO, SELON UN EX-CONSEILLER DE CHAVEZ ... 94 8.3. VENEZUELA : RASSEMBLEMENT PRO-MADURO DANS LE CENTRE DE CARACAS ................................ 96 8.4. GUERRE D’USURE AU VENEZUELA .................................................................................................... 97 8.5. LA RUE EN COLÈRE CONTRE MADURO AU VENEZUELA ..................................................................... 99 8.6. VENEZUELA : LE PRÉSIDENT OBTIENT DES POUVOIRS SPÉCIAUX FACE À « L’AGRESSION IMPÉRIALISTE » DES ÉTATS-UNIS ............................................................................................................................................... 101 8.7. BRAS DE FER ENTRE PARLEMENT ET COUR SUPRÊME À CARACAS .................................................. 103 8.8. VENEZUELA : LE RÉFÉRENDUM ANTI-MADURO N’AURA PAS LIEU EN 2016 ..................................... 105 8.9. AVEC MADURO, LE POUVOIR VÉNÉZUÉLIEN PREND UN AIR DE DICTATURE ..................................... 107 8.10. VENEZUELA : L’OPPOSITION SOUTIENT LES SANCTIONS AMÉRICAINES ............................................ 109 8.11. LE PAPE DEMANDE À L’ONU D’AIDER LE VENEZUELA ................................................................... 110 8.12. LE VENEZUELA ACCUSE LES ETATS-UNIS DE « TERRORISME PSYCHOLOGIQUE » ............................ 111 8.13. VOL D’UN HÉLICO DE LA POLICE, ATTAQUE DE LA COUR SUPRÊME … QUI ÉTAIT L’HOMME LE PLUS RECHERCHÉ PAR MADURO ? .............................................................................................................................. 112 8.14. LA RUSSIE AURAIT AIDÉ LE VENEZUELA POUR CONTRER LES SANCTIONS US ................................. 114 8.15. « AU VENEZUELA, DES GENS MEURENT À CAUSE DES PÉNURIES DE NOURRITURE OU DE MÉDICAMENTS » ................................................................................................................................................ 116 8.16. « LA SOCIÉTÉ N’A JAMAIS ÉTÉ AUSSI INDIVIDUALISTE AU VENEZUELA, PARCE QU’ON EST DANS LA SURVIE, DANS LA MISÈRE » ............................................................................................................................... 119 8.17. AU VENEZUELA, LE POUVOIR ET L’OPPOSITION « CAPITALISENT SUR L’ATTENTAT » QUI AURAIT VISÉ NICOLAS MADURO ............................................................................................................................................ 125 8.18. LA CRISE AU VENEZUELA PROVOQUE DES TENSIONS MIGRATOIRES EN AMÉRIQUE LATINE ............ 127 8.19. VENEZUELA : UN SECOND MANDAT POUR MADURO ....................................................................... 129 8.20. VENEZUELA : LES ETATS-UNIS ET L’UE MENACENT NICOLAS MADURO ........................................ 130 8.21. VENEZUELA : JUAN GUAIDO, LE PRÉSIDENT DU PARLEMENT CONTRÔLÉ PAR L’OPPOSITION A ÉTÉ ARRÊTÉ …………………………………………………………………………………………………….132

Page 201: La crise politico-économique vénézuélienne dans la …...du président de l’époque Carlos Andrés Pérez, qui ont fait presque 3000 morts2. Par la suite, deux coups d’Etat

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8.22. LE VENEZUELA SUSPEND L’EXPULSION DES DIPLOMATES AMÉRICAINS .......................................... 133 8.23. « QU’EST-CE QUI ME FAIT PEUR ? LE BAIN DE SANG » : LE PAPE FRANÇOIS SE DIT TERRIFIÉ PAR LA VIOLENCE AU VENEZUELA ................................................................................................................................ 134 8.24. MADURO SE DIT FAVORABLE À DES LÉGISLATIVES ANTICIPÉES ....................................................... 135 8.25. VENEZUELA : L’ARMÉE A LA MAIN .................................................................................................. 136 8.26. VENEZUELA : MADURO REJETTE L’ULTIMATUM EUROPÉEN POUR UNE NOUVELLE PRÉSIDENTIELLE ……………………………………………………………………………………………….........139 8.27. RECEP ERDOGAN S’IMMISCE DANS LA CRISE VÉNÉZUÉLIENNE ET S’EN PREND À L’UE ................... 141 8.28. RECONNAÎTRE GUAIDO COMME « PRÉSIDENT EN CHARGE » DU VENEZUELA : POURQUOI LA DÉCISION DE PLUSIEURS PAYS EUROPÉENS MANQUE DE COHÉRENCE ................................................................................ 142 8.29. VENEZUELA, POSITION À ADOPTER FACE À LA RUSSIE … LES DIVERGENCES ENTRE LES PAYS FONT PATINER LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DE L’UE .................................................................................................... 144 8.30. LA MENACE D’UNE INTERVENTION AMÉRICAINE PLANE SUR LE VENEZUELA : « VENEZ NOUS LIBÉRER ! » ....................................................................................................................................................... 147 8.31. POURQUOI LA CRISE AU VENEZUELA PEUT AVOIR UN IMPACT SUR LA PRÉSIDENTIELLE AMÉRICAIN ………………………………………………………………………………………………….....151 8.32. CRISE AU VENEZUELA : UN RARE DOUBLE VETO RUSSO-CHINOIS ENTERRE UN PROJET AMÉRICAIN 153 8.33. ACCLAMÉ À SON RETOUR AU VENEZUELA, GUAIDO MAINTIENT LA PRESSION SUR LE RÉGIME ....... 155 8.34. VENEZUELA : SOUMIS À DE NOUVELLES SANCTIONS, LE RÉGIME CONTRE-ATTAQUE ....................... 157 8.35. POURQUOI LE VENEZUELA VEUT EXPULSER L’AMBASSADEUR ALLEMAND ..................................... 160 8.36. APRÈS LA PANNE : LE VENEZUELA SORT DE L’OMBRE, PAS DU CHAOS ............................................ 162 8.37. LE CHAOS CONTINUE AU VENEZUELA : DES MANIFESTATIONS FLEURISSENT CONTRE LA PANNE DE COURANT QUI PARALYSE LE PAYS ..................................................................................................................... 164 8.38. « ON A FAIM ! » : MARACAIBO, LA CAPITALE PÉTROLIÈRE DU VENEZUELA, MISE À SAC ................. 166 8.39. VENEZUELA : EN TOURNÉE NATIONALE, GUAIDO VEUT MARCHER « JUSQU’À LA PRÉSIDENCE » ..... 168 8.40. VENEZUELA : L’HUMANITAIRE COMME MOYEN POUR LÉGITIMER LE RECOURS À LA FORCE ............ 170 8.41. VENEZUELA : LA PRÉSENCE DES MILITAIRES RUSSES VIOLE LA CONSTITUTION ............................... 173 8.42. VENEZUELA : L’OPPOSANT JUAN GUAIDO DÉCLARÉ INÉLIGIBLE DURANT 15 ANS ........................... 174 8.43. « UNE GUERRE ÉLECTRIQUE VISANT À RENDRE FOU LE PAYS » : AU VENEZUELA, ON RATIONNERA L’ÉLECTRICITÉ POUR 30 JOURS .......................................................................................................................... 176 8.44. VENEZUELA : GUAIDO COMPTE METTRE FIN SOUS PEU AU RÈGNE DE MADURO .............................. 177 8.45. PENCE DEMANDE À L’ONU DE RECONNAÎTRE GUAIDO COMME DIRIGEANT DU VENEZUELA .......... 180 8.46. LE COURANT EST RÉTABLI DANS TOUT LE PAYS ............................................................................... 183 8.47. VENEZUELA : DEUX MANIFESTATIONS ANTAGONISTES ANNONCÉES SAMEDI .................................. 184 8.48. VENEZUELA : MADURO APPELLE L’ARMÉE À COMBATTRE « TOUS LES PUTSCHISTES » ................... 186 8.49. APRÈS LES SANCTIONS, VOICI LA CAROTTE : LA NOUVELLE TECHNIQUE DE WASHINGTON POUR RENVERSER MADURO ........................................................................................................................................ 187 8.50. VENEZUELA : DES DISCUSSIONS SECRÈTES ENTRE FRÈRES ENNEMIS ................................................ 189 8.51. COMMENT LE VENEZUELA POURRAIT COÛTER À TRUMP SA RÉÉLECTION ....................................... 191