27
LA DÉMARCHE COLLABORATIVE DU GROUPE FRANÇAIS NEXANS : UNE STRATÉGIE D'INNOVATION OUVERTE ? Christine Leboulanger et Françoise Perdrieu-Maudière De Boeck Supérieur | Innovations 2012/3 - n°39 pages 99 à 124 ISSN 1267-4982 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-innovations-2012-3-page-99.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Leboulanger Christine et Perdrieu-Maudière Françoise, « La démarche collaborative du groupe français Nexans : une stratégie d'innovation ouverte ? », Innovations, 2012/3 n°39, p. 99-124. DOI : 10.3917/inno.039.0099 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. © De Boeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans : une stratégie d'innovation ouverte ?

Embed Size (px)

Citation preview

LA DÉMARCHE COLLABORATIVE DU GROUPE FRANÇAIS NEXANS: UNE STRATÉGIE D'INNOVATION OUVERTE ? Christine Leboulanger et Françoise Perdrieu-Maudière De Boeck Supérieur | Innovations 2012/3 - n°39pages 99 à 124

ISSN 1267-4982

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-innovations-2012-3-page-99.htm

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Leboulanger Christine et Perdrieu-Maudière Françoise, « La démarche collaborative du groupe français Nexans : une

stratégie d'innovation ouverte ? »,

Innovations, 2012/3 n°39, p. 99-124. DOI : 10.3917/inno.039.0099

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur.

© De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

1 / 1

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

n° 39– innovations 2012/3 99

LA DÉMARCHE COLLABORATIVEDU GROUPE FRANÇAIS

NEXANS : UNE STRATÉGIED’INNOVATION OUVERTE ?

Christine LEBOULANGER

Université de Caen Basse-NormandieNormandie Innovation Management Entreprise Consommation (NIMEC)

[email protected]

Françoise PERDRIEU-MAUDIÈRE

Université de Caen Basse-NormandieNormandie Innovation Management Entreprise Consommation (NIMEC)

[email protected]

Découverte il y a un siècle, la supraconductivité est un phénomène dontles deux propriétés principales sont la disparition de la résistance électriqueet l’exclusion des champs magnétiques. Depuis la découverte, en 1986, desupraconducteurs dits à haute température (HTS), la physique de la matièrecondensée a entrepris une véritable révolution conceptuelle. De nombreuxdomaines peuvent envisager de profiter d’applications à horizon plus oumoins lointain ; ainsi, l’industrie du câble en est un qui présente des perspec-tives sans équivalent au niveau mondial, sur le marché de l’énergie en parti-culier. L’enjeu vise à développer des technologies plus efficaces, plusflexibles, plus fiables dans une perspective de développement durable. Lescâbles HTS devraient, en effet, autoriser la création de liaisons électriquesimpliquant des pertes minimales et contribuer ainsi à la réduction de l’émis-sion de gaz à effet de serre.

Le groupe français Nexans, essaimage d’Alcatel, est le principal industrielimpliqué dans la supraconductivité HTS en France. C’est un des leadersmondiaux de l’industrie du câble et le seul à maîtriser le processus completavec de tels matériaux. Les spécificités de ce contexte de haute technologiel’ont poussé à une démarche collaborative instituant de véritables réseauxinter-organisationnels. Ses coopérations s’avèrent être essentiellement verti-cales ou transversales. Des partenariats récurrents avec des structures tantpubliques que privées sont noués afin de faciliter une création collective de

DOI: 10.3917/inno.039.0099

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

100 n° 39– innovations 2012/3

connaissances et un échange d’expertises indispensables en l’absence d’unmodèle scientifique prédictif. Outre le fait que de telles collaborations tech-nologiques lui permettent d’enrichir son offre, Nexans recherche aussi grâceà elles l’accès à de nouveaux segments et l’extension de ses positions géogra-phiques. Le recours aux connaissances extérieures pour renforcer le socle dessavoirs internes est incontestable. Aussi, avant de présenter le contexte denotre terrain d’investigation, nous sommes-nous intéressés à la problémati-que de l’open innovation. L’étude des modalités des diverses coopérations deNexans nous a permis ensuite d’apprécier le degré d’ouverture de son proces-sus d’innovation et d’analyser le modèle organisationnel qui le sous-tend.

ASPECTS CONCEPTUELS ET MÉTHODOLOGIQUES

Ancrage théorique

Pendant longtemps, les entreprises ont maîtrisé les technologies qu’ellesmettaient en œuvre et qui étaient essentiellement issues de la recherche etdéveloppement (R&D) interne. Celle-ci est un choix stratégique requérantdu temps et une acceptation des risques importante mais qui, en cas de réus-site, assure aux entreprises une domination sans partage. Au cours des der-nières décennies, nous avons assisté à une forme de désintégration d’unepartie de cette R&D au profit de modes de co-développement s’appuyant surdes réseaux d’innovation. L’histoire des sciences et des technologies nousenseigne que l’existence de tels réseaux est ancienne (Gilles, 1978). Enrevanche, leur généralisation constitue une tendance nouvelle amorcée dansles années 1980 (Imai, Itami, 1984). Puis, dans les années 2000, une nou-velle représentation du processus d’innovation a été proposée par HenryChesbrough (2003, 2006a) mettant en exergue des pratiques plus« ouvertes » de l’innovation.

Dans de nombreux domaines, les organisations se trouvent contraintespar leur environnement à nouer des relations avec d’autres pour obtenir desréductions de coûts ou des ressources qui leur font défaut. Cette nouvelleforme d’interaction entre entreprises, décrite par Powell dès 1990, est à labase de la dynamique collaborative en réseaux. Ils sont définis comme « dessituations où des acteurs sont interdépendants et maîtrisent chacun une partie descompétences ou des capacités nécessaires à une action collective » (Weil,Durieux, 2000). Ces alliances technologiques sont des dispositifs formaliséspour encadrer les collaborations qui se différencient selon le type d’acteursconcernés (Dussauge, Garette, 1995). Si les relations engagées concernentdes entreprises compétitrices, la coopération est dite horizontale. Soit elle se

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 101

limite à la R&D et ne fait pas disparaître pour autant la concurrence sur lemarché final, soit à l’inverse, elle concerne l’ensemble du processus d’inno-vation et les recherches communes aboutissent à un produit unique sur lemarché. Si les entreprises sont dans une relation de type fournisseur / client,elles peuvent s’engager dans un projet commun pour le développement d’unproduit par le fournisseur lui-même ou bien seulement afin qu’il acquière del’apprentissage qu’il valorisera plus tard. La coopération est alors qualifiée deverticale. Enfin, lorsqu’elle regroupe des structures de secteurs différentsimpliquées à divers titres dans un domaine d’activité hors des relations ci-dessus évoquées, elle est dite transversale.

Les grilles de lecture théoriques traditionnelles (approche basée sur lesressources, théorie des coûts de transaction) peinent à rendre compte de lacomplexité observée dans certaines industries car elles n’envisagent pas réel-lement la possibilité de combinaisons entre concurrence et coopération(Teece, 1992). En effet, sur un plan stratégique, les diverses alliances ne selimitent pas à une économie de coûts mais contribuent aussi au positionne-ment concurrentiel des entreprises en préservant les positions de leadershiptechnologique. Aussi, une certaine culture du mode réseau devient-elleessentielle pour que se constitue le capital confiance (Dyer, Singh, 1998) :apprendre à travailler ensemble, partager des valeurs communes, préserverl’identité de chaque partenaire.

En outre, la raison d’être de telles collaborations dépasse les seuls projetsdéveloppés en commun et s’explique aussi par la nécessité de capitaliser desconnaissances sur le long terme. Le réseau, en tant que collectif de compé-tences, permet non seulement de faire progresser les savoir-faire et de créerensemble de nouvelles technologies, mais aussi d’en assurer la diffusion.Grâce à l’expérience acquise lors de précédents partenariats, la création devaleur résulte non seulement de la collaboration actuelle mais aussi desautres du passé. Aussi, à des fins de stratégies d’internationalisation, d’inno-vation technologique ou d’expansion de marché, certaines entreprises sont-elles allées encore plus loin dans l’ouverture de leur processus d’innovation.

En 2003, dans son ouvrage fondateur, Chesbrough présente les premiersprincipes de ce qu’il nomme innovation « ouverte » en opposition à innova-tion « fermée ». En 2006, il ira même jusqu’à parler de paradigme. Il définitl’innovation ouverte comme « l’utilisation des flux de connaissances entranteset sortantes afin d’accélérer l’innovation interne, et d’élargir l’utilisation de l’inno-vation aux marchés extérieurs ». Depuis, d’autres auteurs ont proposé à leurtour une définition synthétisée par l’OCDE (2008) dans la Figure 1.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

102 n° 39– innovations 2012/3

Figure 1 – Définitions de l’innovation ouverte

Source : OCDE, 2008, pp. 19-20

Pour les uns, comme Elmquist (Elmquist et al., 2009), l’expression« innovation ouverte » fait référence à un monde complexe déjà préexis-tant. Il serait donc plus approprié de raisonner en termes de continuum.Aussi, de nombreuses recherches discutent-elles de la notion ou du degréd’ouverture (Dahlander, Gann, 2010 ; Trott, Hartmann, 2009 ; Lazzarotti,Manzini, 2009 ; Laursen, Salter, 2006 ; Menon, Pfeffer, 2003). Pour lesautres, il n’existe pas de système totalement clos ou ouvert, il faut admettrequ’entre ces deux extrémités, s’interposent des formes hybrides (Fortin,2005 ; Isckia, 2010). Trois types d’approches sont alors proposés (Manceau etal., 2011) : l’open innovation orientée vers certaines thématiques ou verscertains partenaires et l’innovation complètement ouverte.

Qu’est-ce qui caractérise l’ouverture d’un processus d’innovation ?

L’ouverture se matérialise par des partenariats, des collaborations interentre-prises profitables pour le partage du coût de la R&D, pour un accès rapide àde nouvelles connaissances, pour l’ouverture de nouveaux marchés, pour

Auteurs Définitions

West, Vanhaverbeke,

Chesbrough (2006)

Open innovation is both a set of practices for profiting from

innovation, and also a cognitive model for creating,

interpreting and researching these practices.

West, Gallagher (2006) Open innovation systematically encourages and explores a wide

range of internal and external sources for innovation opportunities,

consciously integrates that exploration with firm capabilities and

resources, and broadly exploits those opportunities through

multiple channels.

Henkel (2006) Openness in innovation processes reaches far beyond the market-

mediated exchange, where technology is treated as a tradable good

to be bought and sold on the market under suitable circumstances.

Firms may make their technology available to the public in order to

elicit development collaboration.

Leadbeater (2007) There are two faces of open innovation: Open innovation IN is the

basic model where ideas flow into companies from different sources

(crowdsourcing). Open innovation OUT is where a group of people, a

movement, sometimes a company, create a kernel or a platform,

with some tools, onto which people can add their ideas and contri-

butions. Open innovation IN narrows down a wider set of

contributions into a funnel of corporate development. Open

innovation OUT is designed to allow a process of evolutionary

innovation that accretes and grows as each new person adds their

piece of information, code or module.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 103

l’expérimentation de technologies émergentes (Chesbrough, 2006b ; Ches-brough, 2006c ; Chesbrough, 2007a). Les collaborations avec des entitésextérieures sont complémentaires et n’entament pas le niveau de R&Dinterne. En effet, les compétences de l’entreprise doivent être suffisantespour qu’une synthèse créatrice puisse être effectuée (Bughin et al., 2008 ;Hakkim, Heidrick, 2008 ; Chesbrough, 2003). Certes, l’idée d’exploiter dessources externes d’innovation (recours à l’outside-in) n’est pas nouvelle carde nombreux travaux ont mobilisé des concepts souvent très proches (Dau-mas, 1996 ; Jacomy, 1990 ; Gille, 1978). Mais, le processus d’innovation esttotalement ouvert si l’entreprise est capable d’optimiser l’utilisation et la dif-fusion de ses résultats en les mettant à la disposition des tiers (recours àl’inside-out). Cette démarche génère en principe des revenus supplémentai-res grâce aux mécanismes mis en œuvre (licences, brevets, spin-off, joint-venture). Ce volet semble incontestablement l’élément le plus original de ladémarche et ce par la place octroyée à la gestion des droits de propriété intel-lectuelle (DPI) (Lichtenthaler, 2008 ; Manyika et al., 2007 ; Henkel, 2006).

Si la proposition de Chesbrough a certes généré des critiques, des doutes,elle a aussi suscité de multiples réflexions sur des exigences nouvelles en ter-mes de management (Fredberg et al., 2008). Ainsi, elles ont mené à des pro-positions visant la réingénierie des modèles d’affaires (Chesbrough,Appleyard, 2007 ; Chesbrough, Schwartz, 2007 ; Van der Meer, 2007), laredéfinition des concepts de design organisationnel et de frontières organisa-tionnelles (Dittrich, Duysters, 2007 ; Lichtenthaler, 2007 ; Simard, West,2006), la mise en place d’une nouvelle culture et d’un nouveau leadershiporganisationnel dans un tel contexte (Fredberg et al., 2008 ; Fleming,Waguespack, 2007 ; Witzeman et al., 2006), le recours à des outils afin d’opé-rationnaliser l’innovation ouverte (Huston, Sakkab, 2007 ; Manyika et al.,2007 ; Dodgson et al., 2006 ; Gassmann et al, 2006 ; Henkel, 2006).

Méthodologie de recherche

Cette recherche est qualitative et repose sur des moyens d’investigationconstitués de sources documentaires obtenues principalement via unenetnographie : communiqués, rapports, articles de presse… mais aussi dis-cours des responsables de Nexans. Ces données secondaires sont complétéespar des données primaires (entretiens téléphoniques et correspondances parcourriel).

La démarche a consisté dans un premier temps à collecter les collabora-tions nouées par Nexans dans les supraconducteurs par la méthode dite de« comptage d’alliances à partir de la littérature » (Hagedoorn, 2002). Vingtprojets ont ainsi été recensés puis, dans un deuxième temps, analysés.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

104 n° 39– innovations 2012/3

Ensuite, la base de données brevets Espacenet a été interrogée à partir desmots clés « nexans » et « supraconducteur ». Les 85 brevets déposés, depuis2001, au nom de Nexans via les procédures INPI, OEB et PCT ont été télé-chargés puis étudiés.

L’approche suivie est holistique car elle implique la prise en compte ducontexte particulier dans lequel évolue cette entreprise à la fois global (danssa quête de solutions pour répondre à une demande en approvisionnementénergétique durable) et managérial (dans la compréhension des choix orga-nisationnels récents du groupe). La démarche est longitudinale. Elle couvrele développement des collaborations de Nexans en supraconductivité depuisl’émergence du groupe en 2000 jusqu’à nos jours. L’étude des données s’estfaite par analyse de contenu. Les comptages par occurrences ou fréquencesd’apparition n’ont pu être retenus ici en raison de la trop grande diversité dessources. Une analyse de contenu continue a fait émerger des thèmes récur-rents. Du sens a été donné à ces thèmes grâce à un travail de catégorisation(Mucchielli, Paillé, 2003). 1 L’interprétation des catégories a conduit, en lesorganisant, à une discussion. Les auteurs reconnaissent avec Bardin (2001)que l’analyse de contenu est un effort d’interprétation qui oscille entrerigueur de l’objectivité et fécondité de la subjectivité. Néanmoins, la con-naissance approfondie qu’ils ont du terrain d’expérimentation, explorédepuis 20 ans déjà, autorise cet exercice.

Repérer les collaborations auxquelles participe Nexans dans les supra-conducteurs depuis sa création, leur évolution au cours du temps ainsi queleur nature permet d’appréhender sa stratégie partenariale. Déterminer larépartition des partenaires publics / privés par projet est un indicateur de lamaturité des technologies visées. Étudier la dimension triadique des projetspermet d’en comprendre les implications géostratégiques. L’identité des par-tenaires, leur nationalité, leur domaine d’activité ainsi que la récurrence deleurs collaborations permettent de mieux cerner la démarche d’innovationde Nexans.

Afin de vérifier le bien-fondé des données recueillies et la pertinence denos analyses, divers entretiens auprès de responsables du secteur ont étémenés. Leur traitement s’est effectué selon une méthodologie narrative ten-tant de rendre compte de la perception de la situation par les différents pro-tagonistes.

1. « Production textuelle, sous la forme d’une brève expression, permettant de dénommer unphénomène perceptible à travers une lecture conceptuelle d’un matériau de recherche ».

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 105

PRÉSENTATION DU CAS

Une entreprise : Nexans

Créé en 2000, le câblier Nexans est un essaimage d’Alcatel. Un siècle luiaura permis de passer d’une petite fabrique de câbles (Société française decâbles électriques, 1897) via la CGE (Compagnie générale d’électricité,1925) et Alcatel (1986) au statut d’expert mondial dans son secteur. Cedéveloppement est dû tout d’abord à l’essor de l’électricité grâce à la mise aupoint dès 1905 de câbles à haute tension. L’entreprise a su ensuite profiter dudéveloppement des transports collectifs et l’essor du téléphone a permis àl’industrie du câble en général de trouver un nouveau relais de croissance. Lechoc pétrolier de 1973 va ensuite lui imposer des restructurations mais dès lafin des années 1970 et pendant toute la décennie suivante, la société procé-dera à de nombreuses acquisitions d’entreprises à l’étranger. Depuis, legroupe optimise ses moyens sur les marchés matures et accélère son déploie-ment dans les pays émergents pour bénéficier de leur dynamisme et de leursperspectives de développement (implantations en 2010 au Maroc, au Qataret en Inde). Nexans a augmenté par ailleurs ses capacités de production enNorvège pour conforter son leadership mondial dans la haute tension sous-marine et en Chine pour servir un marché ferroviaire en très fort développe-ment.

Nexans présente deux atouts majeurs : une forte spécialisation et une poli-tique d’investissements en R&D continue. C’est en effet un des premiers fabri-cants mondiaux de câbles électriques et de câblages dits « intelligents 2 » et undes spécialistes dans l’installation de câbles sous-marins. L’importance del’engagement de Nexans en R&D a été constante comme l’atteste le tableausuivant.

2. Capables de faire circuler à la fois de l’énergie et des informations.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

106 n° 39– innovations 2012/3

Tableau 1 – Efforts en R&D de Nexans

Source : À partir des rapports d’activité du groupe.

Au sein du groupe Nexans, la recherche amont est centralisée et concen-trée dans deux domaines principaux : les polymères et les supraconducteurs.Dans ce domaine, Nexans est la seule entreprise qui maîtrise le processuscomplet, depuis l’exploitation des matières premières jusqu’à la fabricationde fils métalliques finis.

En 2010, la R&D a été réorganisée autour de quatre centres de rechercheavec chacun un domaine de compétence spécifique :

– Lens (France) : développement de procédés et d’alliages perfor-mants.

– Lyon (France), inauguré en mars 2002 : recherche expérimentale ettravaux sur les élastomères.

– Nuremberg (Allemagne) : développement de matériaux thermo-plastiques.

– Jincheon (Corée), depuis 2008 : développement de matériaux élas-tomères.

La recherche appliquée s’effectue au sein de sept centres de compétenceà vocation mondiale focalisés sur les grands métiers du groupe et spécialiséspar produits ou technologies clés. Ils échangent leurs avancées et leurs prati-ques avec l’ensemble des sites Nexans. Pour comprendre la structure des

Années Investissements en millions d’euros Brevets déposés

2011 75 89

2010 71 75

2009 64 60

2008 63 50

2007 60,2 63

2006 54,6 59

2005 53,6 57

2004 47 63

2003 47,1 51

2002 48 53

2001 50 ND

2000 38 ND

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 107

partenariats du groupe Nexans, il est nécessaire de présenter le contexte pro-pre à ce domaine.

Une technologie : les supraconducteurs

Découverte en 1911 par Kamerlingh Onnes 3, la supraconductivité est lapropriété que possèdent certains matériaux de conduire le courant électriquesans dissipation. La résistance électrique mesurée est donc strictement nulle.Mais, cette propriété ne se manifeste qu’en dessous d’une certaine tempéra-ture critique 4. Deux périodes se distinguent dans l’histoire de la supracon-ductivité, la première de 1911 à 1986 avec la supraconductivité à bassetempérature critique (BTS) ou « supraconductivité conventionnelle » et ladeuxième à partir de 1986 avec la supraconductivité à haute température cri-tique (HTS) ou « nouveaux supraconducteurs ». Aujourd’hui, la compré-hension des mécanismes à l’origine de cette propriété de la matière est loind’être établie. Après un siècle de recherches dans le domaine des supracon-ducteurs, plusieurs cycles d’engouement puis de quasi abandon se sont suc-cédé. Si des progrès significatifs ont été réalisés, la rupture technologique nes’est toujours pas produite. En effet, la supraconductivité 5 est une métatech-nologie dont les recherches sur les matériaux sont relativement aisées etdonc peu onéreuses. Mais, à l’inverse, les investigations pour ses applicationsindustrielles nécessitent de lourds investissements car la maîtrise de techno-logies d’interface ou de transfert s’avère indispensable (cryogénie, par exem-ple). De plus, la mise au point d’un grand nombre d’applications s’inscrit surle long terme, faute d’une base théorique suffisante. Néanmoins, les proprié-tés exceptionnelles des matériaux supraconducteurs permettent d’envisagerdes applications dans des domaines variables selon les températures critiquesconsidérées.

Les supraconducteurs les plus utilisés aujourd’hui sont de la premièregénération. Leurs principales applications concernent l’imagerie médicale(IRM), la spectroscopie (RMN), la réalisation d’aimants (Large HadronCollider LHC) et la fabrication des aimants du réacteur de fusion thermonu-cléaire contrôlée (ITER) (Bellin, 2006).

3. Kamerlingh Onnes, chercheur hollandais (1853-1926), est à l’origine de la découverte de laliquéfaction de l’hélium et de celle de la supraconductivité, découvertes pour lesquelles il reçoitle prix Nobel de physique en 1913. C’est en hommage à la découverte fondamentale de ce cher-cheur que l’année 2011 a été déclarée année de la supraconductivité.4. Elle vaut 4,15 K pour le mercure sur lequel Onnes a fait sa découverte.5. La supraconductivité est un état de la matière caractérisé par une résistance électrique nulleet une imperméabilité au champ magnétique qui ne se manifeste qu’à de très basses températures(record de température critique de 138 K ou -135 ×C).

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

108 n° 39– innovations 2012/3

Au cours de la dernière décennie, les supraconducteurs à HTS connais-sent à leur tour un développement important. Si des difficultés techniquesdans la réalisation de grandes longueurs de câbles à des coûts compétitifsralentissent leur essor, la nécessité d’améliorer l’efficacité et la sûreté desréseaux de distribution d’énergie soutient les efforts de recherche (Cointe,2007). La gestion des réseaux constitue en effet une priorité nationale pourla recherche dans de nombreux pays (7ème PCRD). Aussi, les applicationsdéveloppées avec des supraconducteurs de seconde génération portent-ellesessentiellement sur le stockage d’énergie, les câbles de transport et les limi-teurs de courant.

Le stockage direct de l’énergie électrique sous forme magnétique peutenfin être envisagé grâce aux bobines SMES 6 de seconde génération (Super-conducting Magnetic Energy Storage) (Bellin, 2006). Le SMES fait office deréservoir d’énergie pour réguler les réseaux électriques. Il peut aussi être uti-lisé comme source d’énergie d’impulsion pour les lanceurs électromagnéti-ques ou encore protéger des microcoupures de courant. La majorité desSMES a longtemps utilisé des supraconducteurs à BTS, ce qui en a limité ledéveloppement en raison notamment des coûts générés par le recours à lacryogénie par hélium liquide. Les supraconducteurs à HTS offrent une plusgrande stabilité thermique et une meilleure résistance aux perturbationsextérieures permettant d’augmenter les puissances. Leurs performances dansdes champs magnétiques intenses demeurent élevées et les températures derefroidissement moins basses (77 K contre 4 K) en diminuent le coût.

Face à la demande croissante en énergie et dans une logique de moindrecoût, les câbles supraconducteurs sont intéressants pour le transport del’énergie électrique car ils génèrent moins de pertes électriques que les câblesclassiques. De plus, ils peuvent être installés dans les gaines existantes ce quiévite de devoir acquérir de nouveaux terrains et de réaliser de nouveaux tra-vaux (Bembaron, 2010). Ils permettent aussi de transporter des puissancesélectriques en moyenne tension et non plus en haute tension, pouvant ren-dre inutile l’utilisation de transformateurs. En revanche, lorsque ces derniersdemeurent indispensables, en intégrant des supraconducteurs à la place desenroulements classiques en cuivre ou en aluminium, leur utilisation en zoneurbaine peut être mieux acceptée, car les risques pour l’environnement sontminimisés.

L’intérêt des supraconducteurs réside aussi dans leur capacité à limiter uncourant de défaut. Les limiteurs de courant supraconducteurs permettront deprotéger un réseau électrique des courts-circuits en agissant comme un régu-

6. Le développement, en 1969, des SMES, invention française, repose sur les travaux de Ferrier.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 109

lateur naturel de courant (Cointe, 2007). En effet, les supraconducteursdeviennent résistifs lorsque la densité de courant excède une certaine valeurcritique puis reviennent rapidement et automatiquement à leur état initial.Aujourd’hui, il n’existe pas de dispositif traditionnel présentant cette fonc-tionnalité en haute tension. Outre une fiabilité accrue des réseaux, l’utilisa-tion des réseaux existants sera optimisée. En effet, la durée de vie de leurscomposants sera augmentée, ce qui permet d’envisager des reports voire desréductions d’investissements (Lucas, 2012).

Si le marché mondial des supraconducteurs concerne avant tout lessupraconducteurs à BTS, les projets actuels qui visent à introduire ladeuxième génération de supraconducteurs HTS tendent à rapprocher l’hori-zon temporel de leurs applications. Les travaux pour substituer des fils supra-conducteurs ronds aux rubans s’expliquent ainsi. Ils visent à faciliter leurintégration dans les applications, le câblage et la réalisation de câbles de sec-tions plus importantes devenant plus aisés, tout comme la production de plusgrandes longueurs. La faisabilité technologique des supraconducteurs à HTSa déjà été démontrée tant en moyenne qu’en haute tension. Quant aux limi-teurs de courant supraconducteurs, déjà disponibles en moyenne tension, ilsconstituent une application très prometteuse.

La diffusion de cette technologie se heurte malgré tout à des coûts intrin-sèques. Néanmoins, pour les câbles, les économies susceptibles d’être réali-sées au niveau des droits de passage, de l’obtention des permis, du génie civilou encore des équipements des sous-stations peuvent compenser le différen-tiel. Quant aux limiteurs de courants, l’absence d’alternative fiable pourrépondre à une demande actuelle forte en matière de sécurisation et de qua-lité de l’énergie électrique, autorise à envisager une adoption plus rapide.

ANALYSE DU CAS NEXANS

« Avant de définir leur stratégie d’open innovation, les entreprises doivent se poserplusieurs questions : Sur quel sujet ? Avec qui collaborer ? À quelle fréquence ?Comment ? Ces interrogations permettent de choisir le degré et l’objet de l’ouver-ture de la stratégie d’innovation » (Manceau et al., 2011). Ces questions vontnous servir de fil conducteur pour l’étude des données recueillies.

La démarche collaborative

Vingt collaborations formelles de Nexans ont été répertoriées dans ledomaine des supraconducteurs (Tableau 2).

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

110 n° 39– innovations 2012/3

Tableau 2 – Collaborations de Nexans dans les supraconducteurs

N Projet Année Descriptif

1 CURL 10

Consortium

2003-2004 Mise au point d’un limiteur de défaut

supraconducteur ; premier test mondial

en conditions réelles

2 SUPERFLEX

Consortium

2003-2006 Élaboration de supraconducteurs souples

3 MFCL

Contrat de fourniture

2003-2006 Projet de limiteur de courant

supraconducteur destiné à protéger les

réseaux de transmission des courts-circuits

4 SMES DGA

Contrat de fourniture

2003-2006 Projet de stockage direct d’énergie

mobilisable de manière impulsionnelle pour

alimenter un lanceur électromagnétique à

rails

5 Super 3C

Consortium

2004-2008 Fabrication d’un câble supraconducteur HTS

de distribution d’énergie

6 CULT 110

Consortium

2005-2008 Développement d’un limiteur de courant de

défaut à base de supraconducteurs

HTS 110 KV

7 MADISUP

Consortium

2005-2008 Production d’un conducteur YbaCuO rond

8 SESUC

Consortium

2006-2008 Système Électrique Supraconducteur à

Courant Continu

Étude complète de l’association d’un système

électrique innovant (centrale « virtuelle » avec

bus DC) aux supraconducteurs, bien adaptés

aux courants continus (pertes nulles)

9 Siemens

Contrat de fourniture

2005 Fourniture du premier palier sans contact à

base de supraconducteurs HTS

10 LIPA I

Consortium

2006-2008 Phase de recherche : mise en service de la

plus longue liaison supraconductrice au

monde et du premier câble supraconducteur

intégré dans un réseau électrique de

transport d’énergie

11 AMSC / Nexans

Contrat de

partenariat

2007 Test du premier câble au monde de transport

d’énergie constitué de fil HTS

(supraconducteur haute température) de

seconde génération (2G)

12 SuperLimiter TM

SFCL

Consortium

2007-2011 Développement, fabrication et test de câbles

de 2G pour un réseau d’électricité

(Con Edison)

13 Supercable

Accord de

collaboration

2008-2010 Développement d’un câble électrique

supraconducteur

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 111

Sur quel sujet ?

La plupart des collaborations visent à préparer l’avènement du smart grid :dénomination du réseau de distribution d’électricité dit « intelligent 7 ». Ledomaine de la gestion des réseaux en France et dans le monde est en pleineévolution, pour passer d’un réseau de transport de l’électricité arborescentvers une topologie de réseaux de type Internet. Les marchés internationauxsont porteurs en particulier dans les pays où l’infrastructure électrique doit sedévelopper (Chine, Inde) mais aussi en Amérique du Nord et en Europe oùplusieurs cas de pannes (Otomega, 2008) ont fait apparaître un besoin de ren-forcement et de modernisation des réseaux. Nexans fait partie de ces indus-triels qui ont un poids, une expertise et une compétence reconnus en Europeet dans le monde. Ceci justifie la présence de ce groupe dans tous ces projets.

La répartition entre la nature académique ou économique des partenairesmontre que, à l’exception de trois projets, toutes les collaborations intègrentau moins une structure académique (Figure 2).

14 LIPA II

Consortium

2008- Phase d’industrialisation

Changer une des trois phases avec des

matériaux plus innovants

15 SUPERFACTS

Consortium

2008-2011 Développement de fils supraconducteurs

ronds

16 Super SMES

Contrat de fourniture

2008-2011 Développement de la technologie des aimants

haut Tc pour SMES à forte densité d’énergie

massique

17 SFCL I (1 G) 2009-2011 Mise en service du premier limiteur de

courant de défaut supraconducteur

18 ENSYSTROB (2G)

Consortium

SFCL (2G)

2009-2011

2012

Développement de composants limiteurs de

courant à rubans supraconducteurs de

deuxième génération

Installation d’un SFCL résistif de 2G à base de

rubans supraconducteurs

19 ECCOFLOW (2G)

Consortium

2010-2013 Conception, réalisation et test de rubans

supraconducteurs de deuxième génération

(2G) pour un limiteur de courant de défaut

supraconducteur polyvalent, destiné à

améliorer les performances des réseaux

d’énergie. Les lignes électriques haute

tension en cas d’incident.

20 AmpaCity

Consortium

2012- Installation d’un câble supraconducteur haute

tension de 1 km entre deux postes

transformateurs intra urbains

7. « Intelligence » introduite ici sous forme de capteurs, actionneurs et logiciels intégrés en sup-port des infrastructures physiques.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

112 n° 39– innovations 2012/3

Figure 2 – Typologie des partenaires (hors financeurs) par projet

Le déploiement des supraconducteurs se heurte à ce jour à deux verroustechnologiques. D’une part, la température critique requise est encore loinde la température ambiante et impose donc l’utilisation des technologiescryogéniques. D’autre part, la réalisation d’interfaces avec le reste desréseaux s’avère toujours délicate. Les câbles ne doivent pas perturberl’exploitation du réseau existant. La fiabilité et la maintenance doivent êtreétudiées en amont, ceci explique la présence des laboratoires de recherchescientifique.

Le développement du smart grid est un enjeu mondial qui justifie, à côtédes projets européens, des engagements à échelle internationale (Tableau 3).Les États-Unis, plus en avance dans ce domaine, deviennent des partenairesincontournables.

Tableau 3 – Cartographie des collaborations

N Projet National Européen Extracommunautaire

1 CURL 10 X

2 SUPERFLEX X

3 MFCL

4 SMES DGA X

5 Super 3C X

6 CULT 110 X

7 MADISUP X

8 SESUC X

9 Siemens X

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 113

Avec qui ?

L’engagement dans des coopérations technologiques, en France et en Alle-magne, semble plus facile à mettre en œuvre (Figure 3). Dans le domaine dela recherche scientifique et technologique, le partenariat entre la France etl’Allemagne constitue un axe essentiel en matière de coopération bilatéraleet la composante majeure de la coopération multilatérale en Europe.

Figure 3 – Partenaires par nationalité et structure

Nexans est présent depuis longtemps déjà dans ces deux pays et y disposede laboratoires de recherche propres adossés à des laboratoires académiques.Rappelons qu’en l’absence de modèle scientifique prédictif, les recherchesactuelles nécessitent de recourir le plus souvent aux savoirs antérieurs déte-nus essentiellement par l’Europe. Ses atouts en recherche fondamentale fontd’elle un partenaire obligé par l’intermédiaire, le plus souvent, de centres derecherche publics.

10 LIPA I X

11 AMSC/Nexans X

12 SuperLimiter X

13 Supercable X

14 LIPA II X

15 SUPERFACTS X

16 Super SMES X

17 SFCL 1 X

18 ENSYSTROB X

19 ECCOFLOW X

20 AmpaCity X

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

114 n° 39– innovations 2012/3

La proximité géographique de l’Allemagne permet à Nexans de bénéfi-cier d’un véritable « écosystème » basé sur des ressources humaines, finan-cières, environnementales importantes propices au dynamisme innovateur.Ce pays est impliqué dans ce domaine depuis les premières découvertes etfait preuve d’une forte culture de l’innovation en général.

Nexans a été amené à conclure des accords avec un grand nombre destructures différentes (57), mais certains partenariats s’avèrent réguliers(Tableau 4). Le choix des partenaires est restreint en raison des compétencesspécifiques requises et la confiance développée au fil des coopérations répé-tées a permis d’instaurer de véritables réseaux inter - organisationnels.

Tableau 4 – Principaux partenaires de Nexans ( 2 collaborations)

Structure Nationalité Collaboration Qualité

CRETA Grenoble France 6 Laboratoire public

KIT Karlsruhe Allemagne 5 Laboratoire public

Air Liquide France 4 Cryogéniste

AMSC USA 4 Expert en supraconducteurs

RWE Energy Allemagne 4 Énergéticien

BRUKER HTS Allemagne 3 Expert en supraconducteurs

ICMAB-CSIC Espagne 3 Laboratoire public

Tecnalia-Lab Espagne 3 Laboratoire privé

Vattenfall Allemagne 3 Énergéticien

CRTB Grenoble France 2 Laboratoire public

G2Elab Grenoble France 2 Laboratoire public

ELÚ Slovénie 2 Laboratoire public

Endesa Espagne 2 Énergéticien

EON Allemagne 2 Énergéticien

APERAM France 2 Alliages

INPG LMPG France 2 Laboratoire public

Institut Néel France 2 Laboratoire public

LIPA USA 2 Énergéticien

Siemens Allemagne 2 Expert en supraconducteurs

LAIMAN France 2 Laboratoire public

UT de Cottbus Allemagne 2 Laboratoire public

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 115

Si plusieurs acteurs de la distribution électrique sont là, cela démontreleur intérêt pour les réseaux intelligents. Outre de permettre de distribuer35 % d’électricité renouvelable d’ici 2020, il s’agit d’intégrer les réseauxnationaux dans un marché pan européen. L’objectif est de fournir une élec-tricité au meilleur coût au consommateur européen et de lui permettre dedevenir plus sensible à l’exigence de la décroissance énergétique (7e PCRD).

La présence des énergéticiens s’explique par la nécessité de répondre à unedemande en croissance constante à partir d’une offre de plus en plus décen-tralisée et intermittente. En effet, le but est de parvenir à intégrer rapidementet massivement de nouveaux modes de production (éolien, photovoltaï-que…) dont les performances sont assujetties au climat. Aussi, l’intégrationde la France dans le marché européen de l’électricité crée de nouveaux fluxd’échanges inter frontaliers, ce qui élargit les possibilités d’équilibrage tout enmultipliant le nombre d’interlocuteurs du secteur. Vouloir gagner en flexibi-lité impose une architecture de marché appropriée et nécessite par là mêmedes expériences pilotes, d’où le recours aux démonstrations grandeur nature.Deux grands types de coopération sont répertoriés (Tableau 5).

Tableau 5 – Nature des collaborations

N Projet Durée en

années

Coopération Coordinateur

1 CURL 10 2 Transversale ACCEL

2 SUPERFLEX 3 Transversale CNRS CRETA

3 MFCL 3 Transversale Superpower

4 SMES DGA 3 Transversale CNRS CRTB

5 Super 3C 4 Transversale Nexans

6 CULT 110 3 Transversale Nexans

7 MADISUP 4 Transversale CNRS CRETA

8 SESUC 3 Transversale CNRS CRETA

9 Siemens 1 Transversale Siemens

10 LIPA I 2 Verticale AMSC

11 AMSC/Nexans 1 Complémentaire AMSC/Nexans

12 SuperLimiter 5 Transversale SCE

13 Supercable 3 Transversale Endesa

14 LIPA II 4 Verticale AMSC

15 SUPERFACTS 4 Transversale Nexans

16 Super SMES 4 Transversale CNRS

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

116 n° 39– innovations 2012/3

En raison de la présence de structures académiques, dix-sept collabora-tions sont transversales au sens de la théorie. La participation de la recher-che publique dans cette industrie s’explique par la nécessité de mettre enœuvre des connaissances scientifiques issues de la recherche fondamentale,ce qui rapproche la science et la technologie. Cet impératif est devenu unatout et en constitue un des facteurs clés de succès. Les partenaires sont choi-sis pour la pertinence, la qualité et la complémentarité de leurs compétences.

Les projets LIPA I et II sont des collaborations qualifiées de verticalespuisque Nexans intervient en tant que fournisseur de câbles pour ce réseau.AMSC en est le coordinateur en raison de leurs financements par le DOE.L’origine des financements détermine en effet la nationalité du pilote au seindes partenariats. Aussi, Nexans assume-t-il ce rôle pour sept d’entre eux. Engénéral, une structure interne, le Nexans Research Center (NRC), tra-vaillant sur les différents composants du câble (gaine, métal, isolant), a pourmission de guider les coopérations du groupe. Mais, pour les supraconduc-teurs, ce centre a un rôle plus limité. L’enjeu de cette technologie est tel queles supraconducteurs constituent une activité à part au sein du groupe. Leurdéveloppement, leur fabrication, leur commercialisation sont l’œuvre d’uneéquipe quasi autonome. Cette structure dédiée à la recherche en supracon-ductivité présente certaines caractéristiques d’une spin-off sans en être une.

La collaboration entre AMSC et Nexans n’étant ni entre concurrents nientre fournisseur / client peut être qualifiée de coopération entre complémen-teurs au sens de Brandenburger et Nalebuff (1996). Chacun ne maîtrise qu’unepartie de l’offre globale : les rubans pour AMSC et les câbles pour Nexans.

Comment ?

Le recours au consortium est privilégié en raison du nombre important departenaires. Un tel accord explicite s’impose. Établi pour une durée détermi-née par des membres de structures indépendantes, il vise la réalisation d’unobjectif particulier tout en prévoyant la répartition des DPI de chacun.

La plupart des projets sont financés à 50 % par des fonds publics. Cesengagements répondent aux préoccupations énergétiques des États. Ils veu-lent favoriser l’innovation en soutenant des clusters par exemple (projetsSuperflex, SESUC…) et ont pour but de créer des relations de coopérationentre acteurs régionaux. Ceci explique la concentration territoriale des

17 SFCL 1 3 Transversale Nexans

18 ENSYSTROB

SFCL 2

4 Transversale Nexans

19 ECCOFLOW 2 Transversale Nexans

20 AmpaCity ? Transversale RWE

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 117

acteurs et la participation de certains laboratoires étrangers. Pour évitertout refus de financements européens, aucune surreprésentation nationalene doit être envisagée. De leur côté, les entreprises investissent rarementseules dans de telles recherches, à l’exception d’enjeux stratégiques majeurscomme Siemens et Nexans en 2005 (fourniture du premier palier deseconde génération). De même, l’engagement des clients ou des utilisateursdiverge selon les pays. Ainsi, l’espagnol Endesa a investi des fonds pour ledéveloppement d’un câble électrique supraconducteur, alors que les réseauxélectriques américain, espagnol, slovaque et allemand se sont mis à disposi-tion des consortiums pour leur permettre de réaliser in situ les tests de vali-dité des projets HTS. La phase commerciale des câbles supraconducteurs estassujettie à l’obtention de résultats valides à long terme hors laboratoires.Les clients potentiels sont, à ce jour, réticents pour incorporer ces nouvellestechnologies ; seules des performances accrues ou un changement de régle-mentation pourraient en faciliter l’adoption. Leur contribution en tant queterrain expérimental est donc irremplaçable et se substitue à une contribu-tion monétaire. De telles expérimentations sont encore nécessaires car lafiabilité de cette technologie n’est pas totalement démontrée car troprécente.

Le recours à la technologie développée en dehors de l’entreprise et lacapacité à l’intégrer en interne sont deux caractéristiques incontestées del’innovation ouverte. Tous les projets recensés visent le cœur de métier deNexans (la fabrication de câbles). Pour certaines coopérations, l’objectif estune conception commune profitable à chaque partenaire (projet Eccoflow,par exemple). Pour d’autres, le développement du produit ne concerne queNexans (SMES DGA, par exemple). Sa volonté est bien d’accéder à desmoyens techniques et humains afin d’explorer, d’exploiter des technologiescontribuant à accélérer son innovation interne et à élargir ses marchés. Quelque soit son rôle dans les projets, coordinateur ou simple partenaire, sa con-tribution est essentielle de par la maîtrise exclusive de certains processus.C’est une des caractéristiques de l’inside-out de Chesbrough, c’est-à-dire met-tre des ressources ou des outputs de la R&D à la disposition des autres. Lespartenaires grâce aux accords passés avec Nexans accèdent bien à ses con-naissances exclusives et relatives à son cœur de métier. La transmission deces connaissances et de ce savoir-faire est néanmoins maîtrisée par l’entre-prise par sa gestion des DPI.

La gestion de la propriété industrielle

Comme toute démarche collaborative, celle de Nexans génère des coûts detransaction (coordination et organisation) et impose une contractualisation

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

118 n° 39– innovations 2012/3

des relations de partenariat. À la différence du modèle de l’open source, lacréation collective issue de ses coopérations n’est pas librement partagée. Lalogique marchande subsiste et une véritable politique de propriété indus-trielle (PI) s’inscrit dans la stratégie globale du groupe (Rapport d’activité2011 de Nexans).

Depuis son essaimage, Nexans accompagne sa politique de R&D dans lessupraconducteurs d’une stratégie de dépôts de brevets (Tableau 6). La part deces brevets dans le nombre total de brevets du groupe se stabilise autour de15 % au cours des dernières années après en avoir représenté le quart en2006. Dans un domaine qui peine à entrer en phase de commercialisation,cette stratégie pourrait s’interpréter comme une manœuvre prudente visantà rassurer les marchés financiers. En effet, une étude américaine (Cockburnet al., 2007) a mis en évidence une corrélation positive entre taux de surviedes sociétés cotées en bourse et dépôts de brevets. Cette corrélation estd’autant plus élevée que la procédure utilisée est reconnue comme forte. Lerecours à la procédure européenne par Nexans peut se justifier ainsi. Le prin-cipal marché pour les applications des supraconducteurs étant l’Europe, cechoix stratégique prend ici tout son sens. L’étude des brevets par date depriorité (Ashton et al., 1983) conforte cette analyse en révélant que sur les68 brevets européens, seuls 14 brevets ont été déposés via une autre procé-dure avant de faire l’objet d’une extension (12 allemands et 2 PCT).

Tableau 6 – Part des brevets supraconducteurs dans le portefeuille du groupe

Date de

publication

Brevets

supracon-

ducteurs

Part dans

le total des

brevets %

Brevets

communs

Procédures

FR EP WO

2001 2 ND 0 2

2002 1 1,89 0 1

2003 4 7,84 0 2 2

2004 6 9,52 0 6

2005 4 7,02 0 4

2006 15 25,42 0 5 10

2007 10 15,87 1 2 7 1

2008 11 22 1 1 10

2009 9 15 0 3 6

2010 10 13,33 0 10

2011 13 14,61 0 2 11

Total 85 16,01 2 14 68 3

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 119

L’étude des domaines techniques d’application désignés dans les brevetsmontre qu’ils sont bien, à l’exception d’un seul, en lien direct avec lesréseaux électriques. La PI fournit la base juridique indispensable tant à laprotection du savoir-faire et des connaissances acquises qu’à l’appropriationdes connaissances nouvelles. Les brevets permettent de formaliser les parte-nariats et de traiter les questions de droits antérieurs, de propriété des résul-tats, de modalités de cession ou d’exploitation de l’innovation. Ils instaurentaussi les règles de la confidentialité et de la sécurisation des échanges.Nexans évite le brevet conjoint (Tableau 6) car si le recours à la copropriétépeut paraître simple, sa gestion s’avère complexe. Cela lui permet de concé-der comme bon lui semble les licences payantes et de profiter desredevances ; cela lui facilite également les échanges de licences comme avecSuperpower, par exemple, propriétaire de technologies exclusives. Dans lecadre des collaborations avec des structures académiques, la possibilité debrevets est envisagée dans les contrats (bourses CIFRE, par exemple) maisceci ne se produit jamais en réalité ; les sujets sensibles ne leur sont pas attri-bués, seule la recherche amont leur est confiée.

La diffusion à l’extérieur des recherches d’une entreprise par le biais decession de brevets « dormants » par exemple est un gage d’ouverture selonChesbrough. Pour Nexans, ce volet de l’inside-out s’avère impossibleaujourd’hui, en raison du stade de développement des supraconducteurs àHTS. En effet, l’état actuel des connaissances ne permet pas de qualifier etd’apprécier la juste valeur des titres de PI. Cependant, notre analyse des cita-tions de brevets n’a révélé que peu d’antériorités laissant présager l’existencede brevets fondateurs. De même, Nexans ne pratique pas l’auto citation sys-tématique de ses propres titres ce qui exclut toute surévaluation éventuellede ses brevets.

En outre, Nexans ne peut mettre à disposition de quiconque les résultatsde ses recherches d’autant plus que le smart grid impose d’anticiper et debâtir une stratégie de PI de long terme envisageant les principaux obstaclesau développement des applications futures (brevets gênants, standards encours de développement américains ou chinois notamment, acteurs mena-çants provenant du domaine des NTIC par exemple…). Coopérer entreacteurs différents (académique/économique, énergéticien/câblier…) luiimpose, outre de bien choisir ses partenaires, de négocier au préalable lepartage des DPI. La règle est simple : du résultat, chacun s’approprie ce quicorrespond à son domaine. S’il est prévu d’octroyer des licences gratuitesaux différents partenaires, c’est uniquement dans le cadre du projet enquestion. Les accords de licences croisées, eux, ne sont pas envisagésd’emblée.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

120 n° 39– innovations 2012/3

CONCLUSION

L’apport théorique de ce travail est d’avoir mis en évidence comment uneentreprise relie choix technologiques et choix économiques en acceptantune certaine intensité d’ouverture pour son processus d’innovation.

En raison d’un contexte global favorable, les axes de recherche de Nexansen supraconductivité privilégient deux thématiques, la fabrication de câbleset le développement de limiteurs de courant. La stratégie d’ouverture de cegroupe s’illustre par le choix de partenaires aussi variés que les fournisseurs, lesclients, les usagers ou les universités. Selon la nature des projets, les partenai-res apportent des connaissances complémentaires, contribuent au développe-ment d’innovations ou servent de terrain expérimental. La présence quasisystématique des structures académiques est un trait bien spécifique dudomaine et s’explique par la place de la recherche fondamentale.

À l’inverse d’études antérieures relatives aux secteurs des TIC, de l’élec-tronique et des télécommunications par exemple, notre recherche concerneune industrie qui, elle, se caractérise par des cycles de vie technologiquelongs. Elle démontre également que les coopérations dans ce domaine neportent pas nécessairement sur des objets très délimités mais peuvent con-cerner des projets au spectre large se situant en phase amont. Aussi parlons-nous d’innovation ouverte au sens d’innovation partagée orientée vers cer-tains partenaires et/ou vers certaines thématiques.

Cette innovation partagée n’annule pas pour autant toute logique pro-priétaire. Comme Chesbrough l’a exposé, pour sécuriser l’ouverture, Nexansbalise et encadre le partage des outputs de sa R&D. En général aucun brevetconjoint n’est envisagé. Il est stipulé par ailleurs dans les contrats que chaquepartie est propriétaire des résultats qu’elle génère. Les échanges de connais-sances et de technologies se font eux a posteriori par le biais de licences croi-sées.

Le volet inside-out se limite à la diffusion de connaissances ou de compé-tences seulement lors des collaborations. Contrairement à la plupart desentreprises (OCDE, 2008), elle vise son cœur de métier. Actuellement, tousles titres déposés sont voués à être exploités par le groupe lui-même et nepeuvent pas être qualifiés de brevets dormants, d’autant que cette technolo-gie n’est qu’en phase d’émergence. En revanche, dans les autres secteurs enphase de maturité, le groupe a créé des joint-ventures ou des co-entreprises(avec Sumitomo au Japon en 2008, avec le leader indien Polycab en 2009,avec QICC au Qatar en 2010 et en Chine en 2011). C’est seulement à cestade qu’il s’engage dans des coopérations horizontales.

Au plan managérial, cette recherche confirme que l’ouverture exige unmodèle de gouvernance cohérent. Elle repose sur des écosystèmes d’innova-

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 121

tion internationaux dont Nexans est partie prenante à la fois sur un planexterne et interne à l’entreprise. Outre la nécessité d’instaurer une culturepropice à l’ouverture extérieure, il est indispensable de mettre en place unestructure organisationnelle interne favorisant les échanges. C’est le rôle quiincombe au NRC-Lyon qui est le centre de recherche clé pour la recherchede technologies de rupture et le développement de matériaux nouveaux. Lesunités pilotes des autres centres jouent aussi le rôle de relais en repérant lesressources externes tout en valorisant les propres ressources du groupe.Situées à proximité des centres de production et des pôles de compétitivité,elles rapprochent l’entreprise des lieux de la recherche académique. Cettemutualisation des savoirs est optimisée par la Nexans University dont la mis-sion est de créer un espace de partage et de consolidation des acquis. Enoutre, des outils favorisent les échanges de « bonnes pratiques » (conven-tions, lettres d’information techniques, site Internet…). L’ouverture viseaussi les autres fonctions de l’organisation. Ainsi, des contacts avec le réseaumarketing sont constants afin de satisfaire et d’anticiper les besoins desclients. De même, dans le cadre de la gestion des ressources humaines afin derenforcer la capitalisation du savoir et de favoriser la constitution desréseaux des modèles de compétence ont été déployés. Un tel design organi-sationnel a été mis en place pour répondre aux exigences de la stratégie glo-bale réitérées dans le programme « Nexans Excellence Way » lancé en 2009visant à tirer parti de l’ensemble des expériences du groupe.

L’originalité d’un tel business model est la place octroyée à la branche dessupraconducteurs. Sa mission est d’enrichir le portefeuille d’innovations deNexans tout en minimisant le risque économique. Autonome, elle bénéficiedes stimuli liés à l’ouverture du processus d’innovation du groupe tout enprofitant de la flexibilité d’une petite structure.

Dans la continuité de cette étude de cas, il serait intéressant, en étendantle dispositif de recherche aux autres compétiteurs, de vérifier si les spécifici-tés du domaine étudié expliquent à elles seules le choix d’une telle architec-ture organisationnelle ?

BIBLIOGRAPHIE

ASHTON, W. B., CAMPBELL, R. S., LEVINE, L. O. (1983), Patent Analysis as a Techno-logy Forecasting Tool. Economic and Policy Analysis Paper n 60, Columbus, OH, BatelleInstitute.

AYDALOT, P. (1986), Les milieux innovateurs en Europe, Genève, GREMI.

BARDIN, L. (2001), L’analyse de contenu, Paris, PUF.

BELLIN, B. (2006), Contributions à l’étude des bobinages supraconducteurs : le projet DGA duSMES HTS impulsionnel, thèse INP Grenoble.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

122 n° 39– innovations 2012/3

BEMBARON, E. (2010), Nexans au secours des réseaux d’électricité, www.lefigaro.fr

BRANDENBURGER, A., NALEBUFF, B. (1996), Co-opetiton: a revolutionary mindset thatcombines competition and cooperation, Currency Doubleday.

BUGHIN, J., CHUI, M., JOHNSON, B. (2008), The next step in open innovation, TheMcKinsey Quarterly, 1-8.

CHESBROUGH, H. (2003), Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profitingfrom Technology, Harvard Business School Press.

CHESBROUGH, H. (2006a), Open Business Models: How to Thrive in the New InnovationLandscape, Harvard Business School Press.

CHESBROUGH, H. (2006b), New puzzles and new findings, in Open Innovation: Resear-ching a New Paradigm, Oxford University Press, 15-33.

CHESBROUGH, H. (2006c), Open innovation: A new paradigm for understanding indus-trial Innovation, in Open innovation: Researching a New Paradigm, Oxford University Press,1-12.

CHESBROUGH, H. (2007a), Why companies should have open business models, MITSloan Management Review, 48 (2), 22-28.

CHESBROUGH, H., APPLEYARD, M. (2007), Open innovation and strategy, CaliforniaManagement Review, 50 (1), 57-76.

CHESBROUGH, H., SCHWARTZ, K. (2007), Innovating business models with codeve-lopment partnerships, Research-Technology Management, 50 (1), 55-59.

COCKBURN, I. M., WAGNER, S. (2007), Patents and the survival of internet-relatedIPOs, NBER working paper series, http://www.nber.org/papers/w13146

COINTE, Y. (2007), Limiteur de courant continu, thèse INP Grenoble.

DAHLANDER, L., GANN, D. M. (2010), How open is innovation?, Research Policy, 39,699-709.

DAUMAS, M. (dir.) (1996), Histoire générale des techniques - Les techniques de la civilisationindustrielle : transformation, communication, facteur humain, Paris, PUF.

DITTRICH, K., DUYSTERS, G. (2007), Networking as a means to strategy change: Thecase of open innovation in mobile telephony, Journal of Product Innovation Management, 24(5), 510-521.

DODGSON, M., GANN, D., SALTER, A. (2006), The role of technology in the shifttowards open innovation: The case of Procter & Gamble, R&D Management, 36 (3), 333-346.

DUSSAUGE, P., GARRETTE, B (1995), Les stratégies d’alliances, Paris, édition des Orga-nisations.

DYER, J., SINGH, H. (1998), The relational view: cooperative strategy and sources of interorganizational competitive advantage, Academy of Management Review, 23 (4), 660-679.

ELMQUIST, M., FREDBERG, T., OLLILA, S. (2008), Exploring the field of open innova-tion, European Journal of Innovation Management, 12 (3), 326-345.

FLEMING, L., WAGUESPACK, D. (2007), Brokerage, boundary spanning, and leadershipin open innovation communities, Organization Science, 18 (2), 165-184.

FORTIN, R. (2005), Comprendre la complexité. Introduction à la méthode d’Edgar Morin, LesPresses de l’Université Laval, L’Harmattan.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

La démarche collaborative du groupe français Nexans

n° 39– innovations 2012/3 123

FREDBERG, T., ELMQUIST, M., OLLILA, S. (2008), Managing Open Innovation-PresentFindings and Future Directions, Vinnova Report, Chalmers University of Technology.

GARETTE, B. (1995), Coopérations, Alliances et Compétitivité, in M. Ingham (dir.),Management Stratégique et Compétitivité, De Boeck Université (éd.), 245-260.

GASSMANN, O., SANDMEIER, P., WECHT, C. (2006), Extreme customer innovationin the front-end: learning from a new software paradigm, International Journal of TechnologyManagement, 33 (1), 46-66.

GILLES, B. (1978), L’histoire des techniques, La Pléiade, Paris, Gallimard.

HAGEDOORN, J. (2002), Inter-firm R&D partnerships: an overview of major trends andpatterns since 1960, Research Policy, 31, 477-492.

HAKKIM, R. P., HEIDRICK, T. R. (2008), Open innovation in the energy sector. Mana-gement of Engineering & Technology, PICMET, 565-571.

HENKEL, J. (2006), Selective revealing in open innovation processes: The case of embed-ded Linux, Research Policy, 35 (7), 953-969.

HUSTON, L., SAKKAB, N. (2007), Implementing open innovation, Research TechnologyManagement, 50 (2), 21-25.

IMAI, K. J., ITAMI, H. (1984), Mutual infiltration of organisation and market – Japan’sfirm and market in comparison with the US, International Journal of Industrial Organisation,1 (2).

ISCKIA, T., LESCOP, D. (2010), Essai sur les fondements de l’innovation ouverte, Ateliersde l’AIMS, Caen.

JACOMY, B. (1990), Une histoire des techniques, paris, Points Seuil.

LAURSEN, K., SALTER, A. (2006), Open innovation: the role of openness in explaininginnovation performance among UK manufacturing firms, Strategic Management Journal, 27,131-150.

LAZZAROTTI, V., MANZINI, R. (2009), Different modes of open innovation: a theore-tical framework and an empirical study, International Journal of Innovation Management, 13(4), 615-636.

LICHTENTHALER, U. (2007), The drivers of technology licensing: An industry compa-rison, California Management Review, 49 (4), 67-89.

LICHTENTHALER, U. (2008), Open innovation in practice: an analysis of strategicapproaches to technology transactions, IEEE Transactions on Engineering Management, 55(1), 148-157.

LUCAS, T. (2012), Les câbles supraconducteurs sont prêts à entrer en phase commerciale,www.usinenouvelle.com

MANCEAU, D., MOATTI, V., FABBRI, J., KALTENBACH, P.-F., BAGGER-HANSEN,L. (2011), Open innovation: What’s behind the buzzword?, Étude de l’Institut pour l’Innova-tion et la Compétitivité i7, Consultable : http://institut-innovation-competitivite.eu/fr/activite/publications

MENON, T., PFEFFER, J. (2003), Valuing internal vs external knowledge: explaining thepreference for outsiders, Management Science, 49 (4), 497-513.

MANYIKA, J., ROBERTS, R., SPRAGUE, K. (2007), Eight business technology trends towatch, The McKinsey Quarterly, 1-11.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur

Christine Leboulanger, Françoise Perdrieu-Maudière

124 n° 39– innovations 2012/3

MUCCHIELLI, A., PAILLE, P. (2003), L’analyse qualitative en sciences humaines et sociales,Paris, Armand Colin.

OCDE (2008), Open innovation in global networks, Paris.

OTOMEGA, B. (2008), Distributed and centralized system protection schemes against voltageand thermal emergencies, thèse, Université de Liège, Belgique.

POWELL, W. (1990), Neither market nor hierarchy: network forms of organization,Research on Organizational Behaviour, 12, 295-336.

SIMARD, C., WEST, J. (2006), Knowledge networks and the geographic locus of innova-tion, in Open innovation: Researching a New Paradigm, Oxford University Press, 220-240.

TEECE, D. J. (1992), Competition, cooperation and innovation – organizational arrange-ments for regimes of rapid technological progress, Journal of Economic Behaviour and Orga-nization, 18, 1-25.

TROTT, P., HARTMANN, D. (2009), Why ‘open innovation’ is old wine in new bottles,International Journal of Innovation Management, 13 (4), 715-736.

VAN DER MEER, H. (2007), Open innovation-the Dutch treat: Challenges in thinkingin business models, Creativity and Innovation Management, 16 (2), 192-202.

WEIL, T., DURIEUX, F. (2000), La gestion de l’innovation en réseau, ANRT.

WITZEMAN, S., SLOWINSKI, G., DIRKX, R., GOLLOB, L., TAO, J., WARD, S.,MIRAGLIA, S. (2006), Harnessing external technology for innovation, Research Techno-logy Management, 49 (3), 19-27.

Doc

umen

t tél

écha

rgé

depu

is w

ww

.cai

rn.in

fo -

-

- 13

8.73

.1.3

6 -

18/0

5/20

13 2

1h03

. © D

e B

oeck

Sup

érie

ur

Docum

ent téléchargé depuis ww

w.cairn.info - - - 138.73.1.36 - 18/05/2013 21h03. ©

De B

oeck Supérieur