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La démonologie dans le moyen-platonisme : Plutarque et Apulée http://www.cndp.fr/musagora/mondes-antiques-mondes-modernes/la- demonologie-dans-le-moyen-platonisme-plutarque-et-apulee/ presentation/ Présentation La théologie des intermédiaires se trouve ébauchée dans Le Banquet de Platon, à travers la figure d’Éros. Le moyen-platonicisme y revient, et notamment Plutarque et Apulée qui ont tous deux écrit un De Genio Socratis. Niveau : lycée Enseignements associés : latin (première), grec (première), philosophie (terminale), histoire des arts Objectifs : interprétation de la notion de daïmôn ; étude de documents iconographiques. Activités pédagogiques associées : Platon et le daïmôn de Socrate ; Néoplatonisme et théurgie. Documents supports Iconographie Gravure représentant un portrait de Plutarque (v. 46/49-v. 125), Paris, BNF. © Roger-Viollet. Portrait de Lucius Apuleius (v. 124-v. 180 ap. J.-C.), gravure provenant d’une page illustrée de la première édition de L’Histoire de Cupidon et Psyché par Lucius Apuleius, 1469, reprise en frontispice dans l’édition de 1903, English School (XVe siècle), Collection privée. © Ken Welsh/The Bridgeman Art Library. Textes Plutarque, De Genio Socratis, 20. Source : Hodoi Elektronikai. Apulée, De Deo Socratis, 6. Source : Itinera Electronica. Le De Genio Socratis de Plutarque Plutarque écrit son Démon de Socrate à la fin du premier siècle de notre ère, mais il situe l’action de son dialogue à Thèbes en 379 avant J.-C., soit vingt ans après la mort du Socrate historique. Caphisias, frère d’Épaminondas, fait, a posteriori et à Athènes chez Archédamos, le récit de la récente libération de Thèbes. Les principaux conjurés se réunissent chez l’un des leurs et la conversation tourne sur plusieurs sujets, et notamment du « démon de Socrate ». Plutarque souhaite, en effet, lier l’arétê (la vertu) nécessaire aux citoyens partisans de la liberté démocratique et une juste appréciation du sacré qui fait en même temps d’eux des hommes pleins de piété. Ainsi Simmias, un disciple de Socrate qui apparaît dans le Phédon de Platon, participant à la conjuration malgré la maladie qui l’immobilise, joue ici le rôle du vieux sage, substitut et garant de son maître. Épaminondas tient, lui, celui du héros à la fois sage, pieux et intègre.

La Démonologie Dans Le Moyen-platonisme

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un studiu asupra demonologiei medio-platonice

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La démonologie dans le moyen-platonisme : Plutarque et Apuléehttp://www.cndp.fr/musagora/mondes-antiques-mondes-modernes/la-demonologie-dans-le-moyen-platonisme-plutarque-et-apulee/presentation/

PrésentationLa théologie des intermédiaires se trouve ébauchée dans Le Banquet de Platon, à travers la figure d’Éros. Le moyen-platonicisme y revient, et notamment Plutarque et Apulée qui ont tous deux écrit un De Genio Socratis.Niveau : lycéeEnseignements associés : latin (première), grec (première), philosophie (terminale), histoire des artsObjectifs :interprétation de la notion de daïmôn ;étude de documents iconographiques.Activités pédagogiques associées :Platon et le daïmôn de Socrate ;Néoplatonisme et théurgie.Documents supports

IconographieGravure représentant un portrait de Plutarque (v. 46/49-v. 125), Paris, BNF. © Roger-Viollet.Portrait de Lucius Apuleius (v. 124-v. 180 ap. J.-C.), gravure provenant d’une page illustrée de la première édition de L’Histoire de Cupidon et Psyché par Lucius Apuleius, 1469, reprise en frontispice dans l’édition de 1903, English School (XVe siècle), Collection privée. © Ken Welsh/The Bridgeman Art Library.TextesPlutarque, De Genio Socratis, 20. Source : Hodoi Elektronikai.Apulée, De Deo Socratis, 6. Source : Itinera Electronica.

Le De Genio Socratis de PlutarquePlutarque écrit son Démon de Socrate à la fin du premier siècle de notre ère, mais il situe l’action de son dialogue à Thèbes en 379 avant J.-C., soit vingt ans après la mort du Socrate historique. Caphisias, frère d’Épaminondas, fait, a posteriori et à Athènes chez Archédamos, le récit de la récente libération de Thèbes. Les principaux conjurés se réunissent chez l’un des leurs et la conversation tourne sur plusieurs sujets, et notamment du « démon de Socrate ». Plutarque souhaite, en effet, lier l’arétê (la vertu) nécessaire aux citoyens partisans de la liberté démocratique et une juste appréciation du sacré qui fait en même temps d’eux des hommes pleins de piété.Ainsi Simmias, un disciple de Socrate qui apparaît dans le Phédon de Platon, participant à la conjuration malgré la maladie qui l’immobilise, joue ici le rôle du vieux sage, substitut et garant de son maître. Épaminondas tient, lui, celui du héros à la fois sage, pieux et intègre.Pour Plutarque, la voix de Socrate, tout en étant intérieure, n’est que le reflet d’une réalité extérieure : l’âme des hommes démoniques est illuminée par les pensées des démons, mais celles-ci pénètrent en elle de l’extérieur :« Nous n’entendîmes pas la réponse de Simmias aux propos de Galaxidôros ; mais il disait qu’ayant un jour interrogé Socrate sur ce sujet, il n’avait pas obtenu de réponse ; que pour cette raison il n’était pas revenu à la charge, mais qu’il l’avait vu souvent regarder comme des imposteurs ceux qui prétendaient avoir communiqué dans une vision avec un être divin, tandis qu’il prêtait attention à ceux qui affirmaient avoir entendu une voix et les questionnait fort sérieusement. “Cela nous donnait donc à penser, lorsque nous discutions entre nous, que le démon de Socrate n’était pas une vision, mais la perception d’une voix ou l’intelligence d’une parole qui lui parvenait de façon mystérieuse ; ainsi, dans le sommeil, il n’y a pas de voix, mais on s’imagine et comprend certaines paroles et on croit entendre parler. Cependant une telle intuition n’a lieu réellement qu’en songe pour certains, dans la tranquillité et le calme du corps, lorsqu’ils reposent ; autrement, dans l’activité de la veille, ils ont peine à rendre leur âme attentive à la voix des êtres supérieurs ; assourdis par le tumulte des passions et par la dissipation des affaires, ils ne peuvent prêter l’oreille et appliquer leur attention à ce qui leur est manifesté. L’entendement de Socrate, au contraire, était net et exempt de passions, et ne s’amalgamait au corps que bien peu, pour les choses nécessaires ; aussi était-il ouvert et subtil, vite modifié par ce qui le frappait ; or, ce qui le frappait, c’était vraisemblablement, non une voix, mais la parole d’un démon, qui sans voix touchait par les révélations qu’il lui faisait sa faculté intellective. La voix, en effet, ressemble à un choc qui frappe l’âme, laquelle reçoit bon gré mal gré la parole par les oreilles quand nous parlons entre nous ; mais l’intelligence de l’être supérieur guide l’âme bien née, en la touchant par

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l’intelligible sans qu’elle ait besoin de choc ; elle lui cède, à lui qui en laisse aller ou en retient les propensions, lesquelles ne sont pas violentes comme elles le seraient si les passions résistaient, mais souples et douces comme des rênes qui s’abandonnent. […] » (De Genio Socratis, 20. Source : Hodoi Elektronikai)

Le De Deo Socratis d’ApuléeApulée se situe dans la lignée platonicienne et reprend les grandes caractéristiques du daïmôn chez Platon : le daïmôn est un demi-dieu, intermédiaire entre les dieux et les hommes ; il est le gardien de l’individu tout en s’assimilant à son âme. De fait, le philosophe de Madaure définit les daïmônes comme « une sorte de puissances divines intermédiaires » (quaedam divinae mediae potestates, De Deo Socratis, 6, 132) : « Non, vous répondra Platon par ma bouche, non, les dieux ne sont pas tellement distincts et séparés des hommes, qu’ils ne puissent entendre nos vœux. Ils sont, il est vrai, étrangers au contact, mais non au soin des choses humaines. Il y a des divinités intermédiaires qui habitent entre les hauteurs du ciel et l’élément terrestre, dans ce milieu qu’occupe l’air, et qui transmettent aux dieux nos désirs et les mérites de nos actions : les Grecs les appellent démons.Messagers de prières et de bienfaits entre les hommes et les dieux, ces démons portent et reportent des uns aux autres, d’un côté les demandes, de l’autre les secours ; interprètes auprès des uns, génies secourables auprès des autres, comme le pense Platon dans son Banquet, ils président aussi aux révélations, aux enchantements des magiciens, à tous les présages. Chacun d’eux a ses attributions particulières. Ils composent les songes, découpent les victimes, règlent le vol et le chant des oiseaux, inspirent les devins, lancent la foudre, font briller les éclairs, et s’occupent enfin de tout ce qui nous révèle l’avenir : toutes choses que nous devons croire commandées par la volonté, la providence et les ordres des dieux, et accomplies par le soin, l’obéissance et le ministère des démons. » (De Deo Socratis, 6. Source : Itinera Electronica)On peut résumer la doctrine d’Apulée par le schéma suivant :Ordre supérieurLes Êtres célestes sont incorporels, éternels, exempts de la souillure du corps, exempts de passibilité ; ils sont foncièrement transcendants, mais d’une transcendance qui implique une coupure radicale avec les autres ordres.Ordre médianLes Êtres intermédiaires possèdent à la fois un élément de légèreté qui les attire vers l’Ordre supérieur et un élément de pesanteur qui les tire vers l’Ordre inférieur. Ils sont éternels, exempts de la souillure du corps, mais sujet à la passibilité ; leur fonction est celle de Médiateurs : - du supérieur vers l’inférieur : ils manifestent aux hommes la volonté des Dieux ; - de l’inférieur vers le supérieur : ils offrent aux Dieux les prières et salutations des hommes.Ordre inférieurL’Ordre inférieur est celui des hommes, êtres doubles composés d’une âme et d’un corps, dotés de l’immortalité collective, mais individuellement mortels et sujets à la passibilité.Haut de page

Références et liensBibliographieSourcesApulée, – Le Dieu de Socrate ;– Les Métamorphoses.Plutarque, – Le Génie de Socrate ; – Sur les oracles de la Pythie.ÉtudesG. Aubry, « Démon et intériorité d’Homère à Plotin : esquisse d’une histoire », G. Aubry et F. Ildefonse (dir.), Le Moi et l’Intériorité, Paris, Vrin, coll. « Textes et traditions », 2008, p. 255-268.P. Cambronne, - Chants d’exil. Mythe et théologie mystique. De l’aube de la pensée grecque à l’Antiquité tardive. Une herméneutique du désir, Bordeaux, William Blake, 1998 ;- Chants d’exil II. Histoire et théologie mystique. Jérusalem, de Babylone à Rome, Bordeaux, William Blake, 2005 ;- Saint Augustin. Un voyage au cœur du temps. 1. Une histoire revisitée, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, coll. « Imaginaires et écritures », 2010 ;

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- Saint Augustin. Un voyage au cœur du temps. 2. Le Temps des commencements, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, coll. « Imaginaires et écritures », 2011 ;- « La Théologie des intermédiaires aux deux premiers siècles : de Plutarque à la Gnose valentinienne », Eidôlon, n° 46, L’Imaginaire de la communication, Bordeaux-III, 1996, p. 55-76.J. Dillon, The Middle Platonist : A study of Platonism 80 b.C to a.d. 220, Londres, Duckworth, 1977.E. R. Dodds, The Greeks and the Irrational, Los Angeles/Berkeley, University of California Press, 1951.J. Ries et H. Limet (dir.), Anges et Démons, Louvain, Centre d’histoire des religions, 1989.J.-P. Vernant, Mythe et pensée chez les Grecs. Études de psychologie historique, édition revue et augmentée, Paris, La Découverte, 1988.