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La détermination des bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie 4 La Veille - n°11 - Octobre 2008 «Chaque année, plusieurs milliards d’euros restent ainsi captés par les compagnies d’assurance alors qu’ils auraient dû être, conformément à la volonté des défunts, reversés à des bénéficiaires. C’est une situation inacceptable sur le plan de l’éthique». La proposition de loi déposée le 21 septembre 2007 évoquée dans l’article précité a abouti à la promul- gation de la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés. Le Législateur a donc entendu l’appel du Médiateur de la République et a apporté à ces dysfonctionnements manifestes une réponse que pourront utilement compléter en amont les avocats des souscripteurs de tels contrats afin que soient respectés les droits et volontés de ces assurés. 1°) Les apports de la loi du 17 décembre 2007 La loi apporte deux innovations significatives : a) Elle prévoit que les Compagnies d’assurance s’informent du décès éventuel de l’assuré et pourront à cette fin accéder aux données figu- rant au Répertoire National d’Identification des Personnes Physiques (RNIPP) : cf. article 3 de la loi. Lorsque l’assureur sera informé du décès de l’un de ses assurés, il sera tenu d’en aviser le bénéfi- ciaire du contrat. La nouvelle loi prévoit que le verse- ment du capital ou de la rente garantis au bénéficiaire du contrat devra intervenir dans un délai d’un mois à compter du décès. Les nouveaux textes prévoient en outre qu’à défaut, les sommes non versées produiront de plein droit intérêt au taux légal majoré de moitié durant deux mois puis, à l’expiration de ce délai de deux mois, au double du taux légal : cf. article 2 de la loi. b) La nouvelle loi modifie significative- ment les conditions de l’accepta- tion par le bénéficiaire Préalablement à cette réforme, et conformément aux règles de droit commun de la stipulation pour autrui, il était acquis que le bénéfi- ciaire pouvait accepter expressé- ment ou tacitement les dispositions souscrites en sa faveur, et ce sans même que le souscripteur/assuré en soit informé… Cette acceptation expresse ou tacite avait pour conséquence de rendre irrévocable la stipulation ainsi souscrite en faveur du bénéfi- ciaire acceptant. Une telle acceptation remettait ainsi en cause la faculté de rachat qui aurait pu être ouverte au profit du souscripteur, ou encore la pos- sibilité pour ce dernier de nantir son contrat. La loi prévoit désormais que cette acceptation doit être faite au terme d’un avenant qui sera signé par l’assureur, le souscripteur et le bénéficiaire, et ce par acte authen- tique ou sous seing privé. Après acceptation du bénéficiaire dans les formes et aux conditions ainsi nouvellement stipulées, le souscripteur ne pourra plus exer- cer sa faculté de rachat et il ne pourra nantir son contrat qu’avec l’accord du bénéficiaire acceptant. Il est ainsi mis un terme aux incer- titudes juridiques affectant les modalités mais également les conséquences de l’acceptation par le bénéficiaire. Le Législateur a donc renforcé la protection des droits et de la volon- té de l’assuré en aval de la souscrip- tion du contrat. Il s’agit cependant et parallèlement d’optimiser cette protection en amont de la souscription de ce contrat d’as- surance-vie, et c’est ici qu’intervient le rôle fondamental de l’Avocat auprès de son client, potentiel sous- cripteur d’un contrat d’assurance-vie. 2°) Mission de conseil et d’assistance en amont de la souscription du contrat d’assurance Il est indispensable d’attirer l’attention de nos clients désireux de souscrire un contrat d’assurance-vie sur la nécessité d’identifier très précisé- ment la ou les personnes qu’ils entendront voir figurer sous la clau- se « bénéficiaire » du contrat d’assu- rance-vie. En effet, les Compagnies d’assuran- ce proposent des formulaires dont les clauses de style se sont révélées source d’incertitudes et de confusion et ces formulaires sont souvent don- Comme rappelé dans un précédent article paru dans La Veille n° 4 de novembre 2007 1 , le Médiateur de la République dénonçait dans son rapport 2006 l’existence de milliards d’euros de contrats d’assurance-vie en déshérence dans les termes suivants :

La Détermination Des Bénéficiaires d'Un Contrat d'Assurance-Vie (Avec Me Granier-Zarrabi, Octobre 2008)

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  • La dtermination des bnficiaires dun contrat dassurance-vie

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    La Veille - n11 - Octobre 2008

    Chaque anne, plusieurs milliardsdeuros restent ainsi capts par lescompagnies dassurance alors quilsauraient d tre, conformment lavolont des dfunts, reverss desbnficiaires.

    Cest une situation inacceptable surle plan de lthique.

    La proposition de loi dpose le 21 septembre 2007 voque danslarticle prcit a abouti la promul-gation de la loi n 2007-1775 du 17dcembre 2007 permettant larecherche des bnficiaires descontrats dassurance sur la vie nonrclams et garantissant les droitsdes assurs.

    Le Lgislateur a donc entendu lappeldu Mdiateur de la Rpublique et aapport ces dysfonctionnementsmanifestes une rponse que pourrontutilement complter en amont lesavocats des souscripteurs de telscontrats afin que soient respects lesdroits et volonts de ces assurs.

    1) Les apports de la loi du 17 dcembre 2007

    La loi apporte deux innovationssignificatives :

    a) Elle prvoit que les Compagniesdassurance sinforment du dcsventuel de lassur et pourront cette fin accder aux donnes figu-rant au Rpertoire NationaldIdentification des PersonnesPhysiques (RNIPP) : cf. article 3 dela loi.

    Lorsque lassureur sera inform dudcs de lun de ses assurs, ilsera tenu den aviser le bnfi-ciaire du contrat.

    La nouvelle loi prvoit que le verse-ment du capital ou de la rentegarantis au bnficiaire du contratdevra intervenir dans un dlaidun mois compter du dcs.

    Les nouveaux textes prvoient enoutre qu dfaut, les sommesnon verses produiront de pleindroit intrt au taux lgal majorde moiti durant deux mois puis, lexpiration de ce dlai de deuxmois, au double du taux lgal : cf.article 2 de la loi.

    b) La nouvelle loi modifie significative-ment les conditions de laccepta-tion par le bnficiaire

    Pralablement cette rforme, etconformment aux rgles de droitcommun de la stipulation pourautrui, il tait acquis que le bnfi-ciaire pouvait accepter express-ment ou tacitement les dispositionssouscrites en sa faveur, et ce sansmme que le souscripteur/assuren soit inform

    Cette acceptation expresse outacite avait pour consquence derendre irrvocable la stipulationainsi souscrite en faveur du bnfi-ciaire acceptant.

    Une telle acceptation remettaitainsi en cause la facult de rachatqui aurait pu tre ouverte au profitdu souscripteur, ou encore la pos-sibilit pour ce dernier de nantirson contrat.

    La loi prvoit dsormais que cetteacceptation doit tre faite au termedun avenant qui sera sign parlassureur, le souscripteur et lebnficiaire, et ce par acte authen-tique ou sous seing priv.

    Aprs acceptation du bnficiairedans les formes et aux conditionsainsi nouvellement stipules, lesouscripteur ne pourra plus exer-cer sa facult de rachat et il nepourra nantir son contrat quaveclaccord du bnficiaire acceptant.

    Il est ainsi mis un terme aux incer-titudes juridiques affectant lesmodalits mais galement lesconsquences de lacceptationpar le bnficiaire.

    Le Lgislateur a donc renforc laprotection des droits et de la volon-t de lassur en aval de la souscrip-tion du contrat.

    Il sagit cependant et paralllementdoptimiser cette protection en amontde la souscription de ce contrat das-surance-vie, et cest ici quintervientle rle fondamental de lAvocatauprs de son client, potentiel sous-cripteur dun contrat dassurance-vie.

    2) Mission de conseil et dassistance en amont de la souscription du contrat dassurance

    Il est indispensable dattirer lattentionde nos clients dsireux de souscrireun contrat dassurance-vie sur lancessit didentifier trs prcis-ment la ou les personnes quilsentendront voir figurer sous la clau-se bnficiaire du contrat dassu-rance-vie.

    En effet, les Compagnies dassuran-ce proposent des formulaires dont lesclauses de style se sont rvlessource dincertitudes et de confusionet ces formulaires sont souvent don-

    Comme rappel dans un prcdent article paru dans La Veille n 4de novembre 20071, le Mdiateur de la Rpublique dnonaitdans son rapport 2006 lexistence de milliards deuros de contratsdassurance-vie en dshrence dans les termes suivants :

  • 5La Veille - n11 - Octobre 2008

    ns directement par les Banques etdans la plupart des cas sans aucunconseil de professionnel.

    Or, la clause dsignant les bnfi-ciaires ne saurait revtir une quel-conque ambigut ou a fortiori ineffi-cacit.

    Un exemple concret illustrera cetteimprieuse ncessit de rdiger cetteclause bnficiaire avec le plus grandsoin et la meilleure prcision, puis dela maintenir jour .

    Dans cette espce, lassure, veuvesans enfant, laisse sa successionlgale deux hritiers : ses frres.

    Elle souscrit un contrat dassurance-vie dont la clause bnficiaire dsigne ses hritiers .

    Dans lintervalle, lassure rdige untestament olographe aux termesduquel elle institue lun de ses deuxfrres lgataire universel.

    A son dcs, la question se pose : a-t-elle entendu dsigner commebnficiaires ses hritiers lgaux (sesdeux frres) ou testamentaires (sonfrre lgataire universel) ?

    Seul le Juge serait mme de tran-cher et dinterprter la clause litigieu-se, sauf aux deux potentiels ayantsdroit ngocier un accord transac-tionnel

    En ltat du litige ainsi n de linsuffi-sance rdactionnelle et de lambigu-t de la clause, cest la banqueauprs de laquelle le contrat a t

    souscrit qui va conserver le capitalobjet du litige entre les deux frres delassure.

    Ds lors ce litige fera in fine le jeu delassureur qui consignera les fonds ense retranchant derrire la ncessitdune dcision judiciaire ou dunhypothtique et laborieux accordtransactionnel entre les candidatsbnficiaires .

    Autre exemple :Larticle L. 132-9, al. 4 du Codedes Assurances est ainsi rdig :

    lattribution titre gratuit du bnficedune assurance sur la vie une per-sonne dtermine est prsume faitesous la condition de lexistence dubnficiaire lpoque de lexigibilitdu capital ou de la rente garantie

    La rgle correspond celle de larticle1039 du Code Civil et souligne lecaractre personnel de lattribution titre gratuit. Le stipulant se prfreaux hritiers du bnficiaire dsign :si celui-ci dcde avant lui-mme, ladsignation est prsume rvoque.

    Un arrt de la Cour de Cassation aprcis le point : si le bnficiaire titre gratuit dun contrat prvoyant leversement dune prestation au dcsde lassur dcde avant davoiraccept, la prestation garantierevient, non ses hritiers , mais auxpersonnes dsignes titre subsidiai-re (Civ.1 , 10 juin 1992 : D.1992.493,note Aubert) .

    Dans ces conditions, il conviendra deconseiller imprativement nosclients de vrifier lexacte identifica-tion des bnficiaires quils entendentainsi avantager au terme de la sous-cription dun ou plusieurs contratsdassurance-vie.

    Il sera galement indispensable quilsmettent jour cette clause bnfi-ciaire autant de fois que ncessaire :naissance denfants, souscription dedispositions testamentaires, diff-rends survenus entre le souscripteuret le ou les bnficiaires et dcs dundes enfants laissant des hritiers

    Il conviendra dencourager le clientsouscripteur rester vigilant et si lonsouhaite que les rgles de la repr-sentation successorale jouent en casde prdcs du bnficiaire il fautimprativement le prvoir en touteslettres dans le contrat car seul lecontrat sapplique.

    Les clauses types proposes par lesassureurs et les banques ncessitentdonc des adaptations et amnage-ments conventionnels que lassuraura tout loisir de cibler et dtermineren temps utile, avec lassistance deson Avocat.

    Elisabeth GRANIER ZARRABIAgns PROTONAvocats au Barreau de Grasse

    1 - Les Compagnies dAssurance pingles par le Mdiateur de la Rpublique dans son rapport 2006 : La proposition de loi permettant la recherche de bnfi-ciaires des contrats dassurance sur la vie non rclams et garantissant les droits des assurs du 21 septembre 2007 : Me Agns PROTON, La Veille n 4 -novembre 2007 p. 5

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