26

LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 2: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

LA HAUTE- NORMANDIE

Page 3: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 4: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

1 Nadine-Josette CHALINE

LA HAUTE-NORMANDIE autrefois

1 Collection : «La vie quotidienne autrefois»

Édition HORVATH 42120 LE COTEAU

Page 5: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Les EDITIONS H O R V A T H tiennent à remercier toutes les personnes et orga- nismes qui ont aidé à la réalisation de cet ouvrage et en particulier : La Bibliothèque Municipale de Rouen, les Archives Départementales de l 'Eure et de la Seine Maritime, Madame P. LAUXERROIS, Messieurs F. CONCATO, Michel VAUGARNY, Pierre N O U A U D et Patrice MACQUERON.

Ils rendent hommage également aux auteurs des cartes postales qui ont permis de fixer la vie quotidienne à cette époque sans lesquels cette œuvre n'aurait pas pu être réalisée.

D i r e c t e u r d e P u b l i c a t i o n

J o ë l B O N G I N I

ISBM 2-7171-0300-7

Copyright Editions HORVATH

Page 6: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

AVANT-PROPOS

Une, deux Normandies? A cette question si épineuse que semble fort imprudemment trancher le titre du présent livre, la sagesse serait sans aucun doute, d'apporter une réponse ... de Normand. Songeons au légendaire paysan du cru traduisant concrétement son sens de la nuance et de la relativité des choses :

« Dire qu'il y a des pommes cette année, il n'y a pas de pommes, mais dire qu'il n'y en a pas, il y en a ... ». En irait-il de même de l'unité ou non de la province?

Reconnaissons d'abord un fait : de l'Epte au Couesnon, les habitants des cinq départements aiment à se dire « normands », et cette identité qu'ils revendiquent est probablement un des points sur lesquels ces populations réputées paisibles montrent le plus de susceptibilité. Ce n'est pas en vain qu'une province entière a subi l'empreinte (à la vérité plus institutionnelle qu'eth- nique) des conquérants vikings, prolongée par une longue domi- nation anglaise. L'Histoire et tout son héritage prêchent ainsi en faveur d'une unité de la Normandie. Mais la Géographie? Quoi de commun entre les paysages de l'Orne et ceux de la Seine Inférieure? Certes, rentrant chez lui, le Normand aime découvrir, sitôt franchies la Bresle ou l'Avre, quelque repère familier : maison à colombage, clos planté de pommiers... Mais il faut faire une longue route encore pour que ces références à l'archétype provincial deviennent un peu plus que de simples témoins isolés. Car bien des cantons de la Normandie n'ont rien de très « normand »; dans son Tableau célèbre de la France de l'Ouest, André Siegfried raconte à quel point les conscrits cauchois expédiés à Évreux, étaient dépaysés face aux horizons, déjà presque beaucerons, des larges plaines de l'Eure. L'eussent-ils été tellement moins face aux reliefs déjà armoricains du bocage virois?

Unité historique, diversité naturelle, entre les deux c'est finale- ment l'évolution économique qui devait faire pencher la balance en opposant de plus en plus à une « Basse-Normandie » princi- palement rurale une « Haute-Normandie », dotée de grandes villes, de puissants organismes portuaires, enfin d'une industrie d'importance nationale.

A l'origine de cette fortune et de cette divergence, amorcée dès le Moyen Age mais qui éclate plus que jamais à la « Belle Époque », le privilège exceptionnel qu'avait l'est de la province de disposer du meilleur axe imaginable de communications : la

Page 7: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

vallée de la Seine, propice tout aussi bien à la circulation terrestre qu'à des transports fluviaux et même maritimes; et d'autre part cette chance — quel qu'en puisse être le revers — qu'est la proximité de la capitale, immense marché de consom- mation dont la région allait bientôt devenir l'avant-port en même temps qu'un des principaux fournisseurs.

En somme, au sein d'une province unie par ses traditions, une région haut-normande qu'individualisent des traits bien précis : de grosses cités, de multiples usines, de très grands ports. Face à la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée, plus « parisienne » peut-être aussi. Mais une Normandie à coup sûr, perçue comme telle tant par ses habitants que par ses visiteurs, et contribuant tout comme l'autre à renforcer l'image convention- nelle d'un pays de la pomme, du lait et des bonnets de coton.

Mythe, stéréotype pour la Haute-Normandie d'hier? Pas forcé- ment. Mais à cette vision partielle et par conséquent abusive, il faut en ajouter une autre qui l'élargit. C'est à quoi voudrait s'employer ce livre où le travail des historiens actuels s'unit au témoignage des photographes d'hier.

Page 8: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

DES CAMPAGNES OPULENTES ET CONTRASTÉES

Les « pays »

Création très récente (1964) en tant qu'unité administrative mais réalité anciennement consacrée par le vocabulaire courant, la Haute-Normandie correspond, on le sait, aux deux départe- ments situés à l'est de la province : l'Eure et une Seine Inférieure devenue « Maritime » en 1955. Au total 12 000 km2 répartis assez également de part et d'autre de la Seine, Rouen, par sa position centrale faisant figure de capitale naturelle de l'ensemble et affirmant de fait sa suprématie sur Évreux ou Le Havre tant par les services qu'elle concentre que par son influence économique ou culturelle sur toute la région. Dans l'espace ainsi défini vivent à la « Belle Époque » environ 1 200 000 habitants, encore très largement ruraux malgré l'exode qui peu à peu vide les campa- gnes au profit des villes « tentaculaires », l'Eure, peu urbanisé, ne rassemblant plus guère que le quart du total.

Très inégalement répartie, on le voit, cette population se partage entre quelque 1 450 communes, réunies en 81 cantons et — alors — 10 arrondissements : Dieppe, Le Havre, Neufchâtel, Rouen, Yvetot d'une part, les Andelys, Bernay, Évreux, Lou- viers, Pont-Audemer de l'autre.

La multiplicité de ces sous-préfectures n'est pas sans corres- pondre à la diversité de fait d'une Haute-Normandie elle-même constituée, dans le détail, d'unités naturelles fort variées, diffé- rant aussi bien par leurs paysages ou leurs ressources que, bien souvent, par les mentalités de leurs habitants. Bray, Caux, Vexin, Roumois, Lieuvin... la liste est longue de ces « pays » dont l'originalité durable, bien soulignée par André Siegfried reste une donnée fondamentale pour l'historien comme pour le géographe. Une présentation générale s'impose donc, qui en retiendra les traits caractéristiques notamment du point de vue agricole.

Au nord de la Seine, dominent ainsi des plateaux limoneux, riches terroirs dont les grosses fermes, entourées de champs ouverts, appartiennent fréquemment, au seuil du xxe siècle, à des propriétaires citadins ou encore à ces hobereaux dont Maupas-

Page 9: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

sant a si bien su nous dresser le portrait. A l'est de l'Andelle, c'est le Vexin normand, pays de grande culture céréalière ou betteravière, d'habitat surtout groupé et de vastes exploitations (parfois plusieurs centaines d'hectares), très proche déjà de l'Ile- de-France et à la vérité plus lié, en dépit de son nom, avec la capitale qu'avec les villes normandes. A l'ouest, après une zone de transition, le pays de Caux s'étale jusqu'à la mer, tout aussi opulent avec ses céréales, son lin, son colza (ses « cossards » comme on dit ici), mais plus original, plus verdoyant, pour tout dire plus « normand ». Y contribuent des pluies plus abondantes, un sol plus argileux, l'allure plus « bocagère » de l'habitat, semant dans une campagne ouverte les vastes enclos herbeux entourés de hêtres des « cours » ou « masures » traditionnelles.

Page 10: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

L'isolement qui en résulte pour les paysans ne fait que s'ajouter à la presque insularité de ce plateau cauchois, sans relation sinon par bac avec le sud de la Seine, et sans grande ouverture sur la Manche, qu'il surplombe par une falaise abrupte à peine échan- crée par quelques rivières; Dieppe, Fécamp, Étretat restent pour lui comme des enclaves étrangères. L'industrie, en revanche, ouvre sur l'extérieur et relie notamment à Rouen ce pays ancien- nement adonné à l'artisanat textile : si le tissage à main de la « rouennerie » n'est plus qu'une survivance, vers 1900, dans les fermes cauchoises, de multiples petites usines égrenées le long des cours d'eau descendant du plateau continuent de tourner, mainte- nant en place une activité qui résiste encore à la concentration en ville.

Page 11: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Enfin entre le pays de Caux, si caractéristique, et les plateaux semi-picards déjà d'entre Béthune et Bresle, bordé d'importants massifs forestiers (Lyons, Eawy, Eu...), le Bray affirme lui aussi sa personnalité. Sa longue dépression creusée en « boutonnière » où affleure l'argile profonde en fait un vaste herbage avec exploitations de taille plus modeste, très tôt orienté vers la production laitière avec pour débouché Paris.

Une fois franchie la Seine dont la vallée sinueuse voit se

succéder forêts, prés et vergers, peu concurrencés encore, vers 1900, par les implantations industrielles ou portuaires, ce sont d'autres « pays » encore que nous découvrons. La variété des sols, souvent moins riches qu'au nord, fait alterner ici campagnes et bocages, pays de culture et pays d'élevage. Au sud-est de la région, les plaines du Neubourg, d'Évreux et de Saint-André, de plus en plus plates et nues, avec des limons assez généreux et une pluviosité réduite, voient s'accentuer un paysage de type beauce- ron, aux gros villages et riches exploitations céréalières.

A l'ouest de la Risle au contraire, l'humidité accrue, la disper- sion croissante de l'habitat, la multiplication des pommiers, des prairies et l'importance des bovins recréent progressivement l'image « classique » de la Normandie. Non sans nuances d'ail- leurs : au sud l'absence de limons fait du pays d'Ouche, voisin du Perche et déjà largement boisé, un terrain médiocre, voué à l'élevage et à d'assez maigres cultures. Plus au nord, un sol argileux confère au Roumois, entre Seine et basse Risle, puis au Lieuvin qui lui fait suite à l'ouest une allure bocagère de plus en plus nette, avec habitat assez dispersé et exploitations de taille réduite pratiquant surtout l'élevage. Là encore, notons-le, l'indus- trie n'est pas ignorée, ateliers ruraux et petites usines de vallée fonctionnant toujours à la « Belle Époque », dans l'orbite de Rouen, de Louviers ou d'Elbeuf.

Autant de « pays » distincts dont cartes postales et autres photographies anciennes nous aident à retrouver l'aspect et la vie quotidienne. Entamons donc, en commentant ses principales images, ce pèlerinage iconographique à travers la Haute-Nor- mandie d'avant 1914.

Page 12: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

La vie à la campagne

Au détour d'un chemin creux entre ces hauts « fossés » d'où

jaillit un rideau de grands hêtres, la « masure » cauchoise se laisse entrevoir, repliée sur elle-même, avec ses bâtiments épars à l'abri du clos complanté de pommiers où s'ébattent poules et canards.

Dans cette région plutôt pauvre en pierre à bâtir, la maison rurale, sauf dans la vallée de la Seine près des carrières de Vernon ou de Caumont, use peu d'un matériau tout de suite coûteux. Seule l'assise — ou « solin » — en est constituée, quand elle n'utilise pas tout simplement les rognons de silex recueillis dans les dépôts superficiels d'argile. Les murs restent souvent en pans de bois avec remplissage en torchis, mélange de paille et de glaise; la toiture, très pentue vu le climat pluvieux, garde certaine fidélité au chaume, jugé économique et protégeant bien de surcroît contre les rigueurs de l'hiver ou un éventuel excès de chaleur estivale. Un peu partout cependant, la pression des compagnies d'assurances contre l'incendie et certain souci de prestige sinon de confort, poussent à substituer aux matériaux traditionnels la brique et l'ardoise dont le développement des moyens de communication facilite la diffusion.

Page 13: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Malgré quelques progrès de l'habitation ou du matériel agri- cole, pour lesquels la Haute-Normandie se situe plutôt parmi les régions françaises avancées, la vie reste très dure à la campagne. L'image idyllique des pommiers en fleurs, des fermières en coiffe élégante, des pots à lait en cuivre rutilant ne doit pas cacher la réalité des travaux pénibles où la machine ne supplée guère encore aux bras de l'homme. C'est le mérite des anonymes photographes que d'avoir su en témoigner, joignant aux vues et scènes de genre pour touristes le souvenir combien plus précieux de l'humble labeur quotidien.

Voici, ouvrant le cycle immémorial des travaux et des jours, les grands labours d'automne, dans une terre grasse exigeant ces lourdes charrues à versoir dont Mathieu de Dombasle s'était fait

le propagateur, et dont la construction artisanale, recourant largement au bois, cède lentement la place à une fabrication industrielle tout en métal. Pour les tirer, l'effort de deux ou trois puissants chevaux est nécessaire, guidés de la voix par un robuste paysan pesant sur ses mancherons et veillant à la rectitude du sillon.

Page 14: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 15: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

La Fenaison en pays de Bray

Page 16: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Les semailles faites, et après un hiver un peu moins occupé, le retour de la belle saison est aussi celui d'un labeur intensif, pour les récoltes successives. En cette région riche en herbages et cultures fourragères, le mois de juin s'impose comme le temps des foins, qu'à l'exception de rares fermes équipées déjà de faucheuses tractées, les hommes coupent à la main, aidés des femmes qui ratellent et mettent à sécher en tas, avant que l'on engrange pour nourrir le bétail l'hiver. A la fenaison succèdent les moissons, guère plus mécanisées souvent, et réclamant dès

Page 17: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 18: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

lors une abondante main-d'œuvre pour faucher, lier les gerbes, édifier les meules. Il n'est pas rare encore de voir des glaneuses suivre les moissonneurs, en quête d'épis oubliés. Gestes tradition- nels où le « Progrès », pourtant, vient se mêler, allégeant partiel- lement la peine des hommes. Ainsi pour le battage, opération longue et pénible, que facilite singulièrement l'intervention de la machine. Remplaçant le fléau, la batteuse à vapeur circule désormais de village en village, voire de ferme en ferme, suscitant une certaine coopération entre utilisateurs accompagnée de toute une convivialité. Le grain, enfin, sera moulu dans l'une de ces minoteries qui jalonnent les vallées normandes, profitant de la force hydraulique.

Page 19: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Dans une certaine mesure, le renchérissement de la main-d'œu- vre agricole, lui-même inséparable de l'exode rural, incite à mécaniser quelques opérations, au moyen par exemple de mois- sonneuses-lieuses dont le prix de revient devient alors abordable. Mais ce calcul de rentabilité est surtout le fait des très grandes exploitations, gérées de façon moderne et disposant de capitaux. Ainsi dans le Vexin ou encore dans la plaine du Neubourg, sur le domaine moderne de Nassandres, équipé de locomobiles et alimentant en betteraves la sucrerie voisine que possède la famille Bouchon.

Page 20: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 21: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 22: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Cabane de berger

Une autre réponse aux difficultés de l'agriculture à la fin du xixe siècle, marquée par une chute inquiétante des cours céréa- liers, consiste à développer la part de l'élevage. La tendance est très nette, et même sans aller jusqu'au « couchage en herbe » de type bas-normand, on cultive de plus en plus des fourrages artificiels introduits dans les assolements, trèfle, luzerne ou

« bette à vaque ». Car ce sont les bovins, nourris au pré ou à l'étable, qui profitent le plus de ce mouvement. Le cheptel ovin, lui, souffre de la concurrence des laines importées et aussi du recul des jachères, lieu de pacage traditionnel, que l'essor des engrais permet désormais de mettre en culture. Malgré cela les chaumes, les landes, les communaux restent assez nombreux pour que l'image du berger surveillant son troupeau reste familière dans la campagne normande. Image ambiguë d'ailleurs, à laquelle s'attache une connotation un peu inquiétante. Ce berger, vivant seul avec ses chiens, loin de tout, au milieu de ses bêtes, n'ayant d'autre maison que sa roulotte, « véritable hutte ambu- lante » nous dit Maupassant, « sorte de niche perchée sur des

Page 23: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Cabane de berger

roues que les gardiens de troupeaux traînent, pendant l'été, de pâturage en pâturage... », occupe une place à part dans la société villageoise. Bien que misérable, on le craint; rares les maîtres qui osent le renvoyer. Issue du fond des âges, une réputation maléfi- que l'accompagne encore, au fort relent de soufre. « Tous sor- ciers » écrivait Flaubert à l'article correspondant de son Diction- naire des Idées reçues. Jehan le Povremoyne, attentif aux mentali- tés normandes du début de ce siècle, pourra dire encore : quand le berger « passait au long des cavées, ramenant ses brebis que harcelaient les chiens, les femmes se cachaient. Des hommes juraient bien, un soir d'ivresse, de l'abattre d'un coup de fusil, mais les épouses à genoux suppliaient qu'on le laissât tranquille, c'était le Diable... ». C'était au moins le rebouteux, dépositaire de secrets, de recettes mystérieuses pour soigner les bêtes ou guérir les humains, mais peut-être aussi pour faire fondre sur eux maladie et malheur.

Page 24: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Au déclin des moutons s'oppose l'essor des bovins orienté surtout ici, avec la race normande, vers une production laitière fortement stimulée par les besoins croissants de l'agglomération parisienne. La proximité de cet immense marché de consomma- tion favorise la Haute-Normandie et spécialement le pays de Bray, bien que la concurrence d'autres régions, rapprochées de la capitale par le chemin de fer, ou même de pays étrangers comme le Danemark, se fasse désormais sentir. Plus que jamais s'impose donc l'image d'une Normandie laitière, même en cette partie orientale de la province où les champs cultivés gardent globale- ment la prééminence.

Page 25: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,
Page 26: LA HAUTE- NORMANDIEexcerpts.numilog.com/books/9782717103007.pdf · la Normandie de l'ouest, avec tout ce qu'implique ce terme, une Normandie de la Seine plus citadine, plus développée,

Achevé d'imprimer en décembre 1983

par

[ill

NO d'imprimeur : 155 Dépôt légal : 4e trimestre 1983