22

Click here to load reader

La Légende d'Hiram(1810)

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: La Légende d'Hiram(1810)

Vendredi 9 septembre 2005

La Légende d'Hiram(1810)

David, roi d'Israël, ayant formé le projet d'élever un temple à l'Éternel, amassa, pour cet effet, d'immenses trésors..... Mais ce roi ayant quitté les sentiers de la vertu, et s'étant rendu indigne de la protection du grand Architecte, la gloire d'élever un temple au maître de l'Univers, fut donné à son fils Salomon.

Avant de commencer ce grand édifice, Salomon en fit part au roi de Tyr, son voisin, son ami et son allié, qui lui envoya Hiram, architecte célèbre. Salomon ayant reconnu les vertus et les grands talens d'Hiram, le distingua bientôt par les postes les plus éminens , et lui confia la direction des ouvriers et le soin de dresser les plans.

Les travaux étaient immenses, et le nombre des ouvriers nécessaires leur étant proportionné, il avait fallu les distribuer en plusieurs classes, et leur affecter un salaire proportionné à leurs talens. Ces classes furent divisées en apprentis, en compagnons et en maîtres. Chacun de ces grades avait des signes et des mots pour se faire reconnaître, et recevoir le salaire de leur ouvrage et de leur peine.

Les app.·. s'assemblaient à la colonne B; les compagnons à la colonne J, et les maîtres dans la chambre du milieu.

Quinze compagnon voyant le temps presque fini, et qu'ils n'avaient pu obtenir les mots de maîtres, parce que leur temps n'était pas encore expiré, convinrent de les obtenir par force du R.·. Hiram, à la première occasion, afin de passer pour maîtres dans d'autres pays, et en recevoir la paie .

Douze de ces compagnons se rétractèrent, les trois autres, nommés Jubelas, Jubelos et Jubelum, s'obstinèrent dans leur dessein. Ces trois compagnons sachant qu'Hiram allait tous les jours à midi faire sa prière dans le temple, pendant que les ouvriers se reposaient, furent se placer à chacune des portes.

Jubelas, à la porte du sud.

Jubelos, à celle de l'ouest.

Jubelum, à celle de l'est.

Là, attendant le moment où Hiram se présenterait pour sortir. Hiram dirigea d'abord ses pas vers la porte du sud, où Jubelas lui demanda le mot de maître; à quoi il répondit qu'il ne devait pas le recevoir de cette manière, qu'il fallait attendre avec patience que son temps fût fini; qu'au surplus il ne pouvait le donner seul, qu'il devait être accompagné des rois d'Israël et de Tyr, aux termes de son serment, de ne le donner qu'avec eux assemblé. Jubelas, peu satisfait de cette réponse, lui donna un coup de règle de 24 pouces, au travers de la gorge.

Le très-respectable maître Hiram s'enfuit à la porte de l'ouest, où il trouva Jubelos qui lui fit la même demande, et sur son refus, ce deuxième lui porta un coup violent avec une équerre dont il était armé.

Page 2: La Légende d'Hiram(1810)

Hiram, ébranlé du coup, rappela ses forces, et se sauva à la porte de l'est: mais il y trouva Jubelum, qui lui fit la même demande que les deux autres, et qui, sur son refus, lui asséna un si terrible coup de maillet sur le front, qu'il l'étendit mort à ses pieds.

Les trois assassins s'étant rejoints, ils se demandèrent réciproquement la parole de maître; mais voyant qu'ils n'avaient pu l'obtenir, et désespérés d'avoir commis un crime sans utilité, ils ne songèrent plus qu'à en dérober la connaissance. À cet effet, ils enlevèrent le corps d'Hiram, et le cachèrent sous des décombres, et dans la nuit ils le portèrent hors de Jérusalem, sur une montagne, et l'enterrèrent. Le R.·. maître Hiram ne paraissant plus aux travaux comme à son ordinaire, Salomon fit faire les plus exactes recherches, mais inutilement.

Lorsque les douze compagnons qui s'étaient rétractés, soupçonnèrent la vérité, ils se réunirent, et résolurent entr'eux d'aller trouver Salomon, avec des gants blancs, comme le témoignage de leur innocence, et l'informèrent de ce qui s'était passé.

Salomon envoya ces douze compagnons à la recherche de leur maître Hiram, leur ordonna, dans le cas où ils le trouveraient, de chercher sur lui la parole de maître, et leur observant que s'ils ne pouvaient pas la retrouver, elle était perdue, attendu qu'il n'y avait que trois personnes qui la connussent, et qu'elle ne pouvait être donnée que par ces trois personnes réunies, dont Hiram faisait partie. Il leur observa, en supposant qu'il fût mort, que pour l'avenir le premier signe et le premier mot qui seraient fait et prononcé en retrouvant et en exhumant le corps de ce R.·. maître, seraient substitués aux anciens signe et mot de maître.

Ces compagnons ayant la promesse de Salomon d'être récompensés par la maîtrise, s'ils parvenaient au but de leur recherche, partirent, et se divisèrent en quatre bandes.

Trois allèrent vers le nord, trois au sud, trois à l'ouest et trois à l'est.

Une de ces quatre bandes descendit la rivière de Joppa: un d'eux s'étant reposé à côté d'une roche, il entendit de terribles lamentations par l'ouverture du rocher. Prêtant l'oreille, il entendit une voix qui disait: Oh! que j'eusse eu plutôt la gorge coupée, la langue arrachée jusqu'à la racine, et que j'eusse été enterré dans les sables de la mer à la basse marée et à une encablure de distance du rivage où la mer flue et reflue deux fois par jour, plutôt que d'avoir été complice de la mort de notre regretté maître Hiram!

Oh! dit un autre, que mon coeur ait été arraché de mon sein, et jeté pour servir de proie aux vautours, plutôt que d'avoir été complice de la mort d'un aussi bon maître!

Mais, hélas! dit Jubelum: Je l'ai frappé plus fort que vous deux, puisque c'est moi qui l'ai tué! Que j'eusse eu mon corps séparé en deux, une partie au midi, une autre au nord, et mes entrailles réduites en cendres et jetées aux quatre vents, plutôt que d'avoir été le meurtrier de notre respectable maître Hiram!

Ce compagnon, après avoir entendu ces plaintes lamentables, appela les deux autres compagnons; ils convinrent entre eux d'entrer dans l'ouverture du rocher, de se saisir des ouvriers, et de les transporter devant le roi Salomon; ce qu'ils exécutèrent.

Page 3: La Légende d'Hiram(1810)

Ces meurtriers avouèrent à Salomon ce qui s'était passé et le crime qu'ils avaient commis, et témoignèrent le désir de ne pas survivre à leur forfait.

En conséquence, Salomon ordonna que leur propre sentence fût exécutée, puisqu'ils avaient désigné eux-mêmes le genre de leur mort, et ordonna qu'il fût fait ainsi:

Jubelas eut la gorge coupée.

Jubelos eut le coeur arraché.

Jubelum eut le corps coupé en deux parties, l'une fut jetée au nord, l'autre au midi.

Salomon ayant ainsi vengé la mort du R.·. maître Hiram-Abif renvoya les mêmes compagnons pour remplir leur première mission.

Ces douze compagnons partirent une seconde fois, et voyagèrent pendant cinq jours sans rien trouver.

Ces compagnons ayant rendu compte à Salomon de l'inutilité de leur recherche, il ordonna à neuf maîtres de faire une seconde recherche. Ceux-ci furent sur le mont Liban, et le deuxième jour, l'un d'eux, excessivement fatigué, voulut se reposer sur un petit monticule. Là, il aperçut des branches d'arbres nouvellement coupées et plantées dans la terre. Il les arracha, et vit par-là que la terre avait été fraîchement remuée. Après avoir sondé la fouille dans ses trois dimensions, largeur, longueur et profondeur, il appela ses camarades, et leur fit part de sa découverte. Ensuite ils se mirent à ôter la terre avec beaucoup de précaution, et parvinrent à trouver ainsi le corps de notre R.·. maître Hiram, qui avait été assassiné; mais n'osant, par respect, pousser leur recherche plus loin, ils recouvrirent la fosse; et pour reconnaître le lieu, ils coupèrent une branche d'acacia, qu'ils plantèrent dessus, et se retirèrent vers Salomon, auquel ils firent leur rapport.

Salomon, pénétré de la plus vive douleur, jugea que ce ne pouvait être effectivement que son grand architecte Hiram. Il leur ordonna d'aller faire l'exhumation du corps, et de le rapporter à Jérusalem. Ces anciens maîtres se revêtirent de leur tablier et de gants blancs. Rendus au mont Liban, le deuxième jour, ils firent la levée du corps.

LA LÉGENDE D'HIRAM

La légende d'Hiram

Les origines de la légende, sa signification, la suite de la légende, le grade de Royal Arche, Conférence de Roger Dachez, suivie de la légende des trois mages qui ont visité la grande voûte et découvert le centre de l'idée - légende profondément ésotérique, qui constitue la trame du rituel du grade de Royal Arch

Salomon, Hiram, Zorobabel, n’ont ni construit, ni rebâti le Temple … Ils nous ont légué son modèle, caché sous une image. Ils nous indiquent le chemin vers la Cité Idéale où il s’élèvera, dans l’harmonie.

Page 4: La Légende d'Hiram(1810)

Suite à la publication sur le web d'une version amputée d'une partie importante du texte original des trois propos de ce blog  Le Tour de France -  La légende d'Hiram - La suite de la Légende,  nous rééditons le texte intégral dans sa version originale.

 

Le Tour de France

 

Chaque mois de juillet, le "Tour de France" ressuscite la grande fête du vélo. Il peut être vu comme un carnaval moderne, qui laisse une place à l’expression mouvante et rituelle des rêves populaires. Durant cette épreuve, une nouvelle classe d’âge succède à la précédente. Le temps détrône l’ancien monde et couronne le nouveau. Naissance et mort ne sont pas coupées l’une de l’autre et les deux pôles du devenir sont englobés dans leur unité contradictoire. La course est un temps joyeux, qui interdit à l’ancien temps de se perpétuer et qui engendre le temps nouveau. Les champions qui dominent la course cherchent à acquérir une "maîtrise" de la vie , une forme de perfection humaine où l’imitation des aînés joue un grand rôle. Cette recherche de la perfection pourrait se définir par trois maximes :

"l’apprentissage, long et difficile, doit être méthodique", "les chefs-d’œuvre sont marqués par le temps", "la mort vient toujours à son heure" …

Mais, dans le "Tour de France", on parle de la mort en faisant la fête et en acclamant les nouveaux champions qui viennent pour perpétuer la tradition. Le maillot jaune est un symbole qui fait entrer son détenteur dans la catégorie des hommes dieux qui meurent. Comme dans le cycle du "Rameau d’Or" décrit par James Frazer, "il faut tuer l’homme dieu, dès qu’apparaissent les signes de son déclin et transmettre son âme à un successeur vigoureux". Ainsi, de maillot jaune en maillot jaune, la course cycliste du "Tour de France"forme une longue chaîne de "meurtres rituels". Héros solaire, le vainqueur conquiert la "Toison d’Or" après une longue lutte et par un acte de rupture : "la mise à mort rituelle et symbolique de son prédécesseur", exécutée au nom de la pérennité des valeurs. Cette mise à mort est réalisée dans un moment d’une "grande sacralité" et le nouvel élu symbolise l’éternelle jeunesse du "monde nouveau" …

Ce n'est pas l'usage de parler d'actualité dans ce blog ... Mais observer que l'on peut trouver dans le "Tour de France" certaines analogies avec avec le mythe fondateur de la franc-maçonnerie , c'est souligner que la démarche maçonnique consiste moins à s'envoler ou à se réfugier dans les "nuages théologiques" des rituels et des symboles que de considérer le symbolisme comme une certaine manière de "voir" et de "savoir" qui, en renouvelant le regard intérieur, transfigure la vision de l'homme. C'est également affirmer que la démarche maçonnique doit intégrer dans sa

Page 5: La Légende d'Hiram(1810)

réflexion les traditions populaires, mythologiques et religieuses, afin d’y rechercher ce qui peut révéler le sens de la destinée de l’homme et la signification de l’aventure humaine.

1 - Origines et signification

Les origines de la légende d'Hiram

L’étude des origines d’une institution a pour préliminaire la distinction entrela légende et la vérité historique. Cette distinction, entre la fable et la réalité, s’imposeparticulièrement en ce qui concerne la légende d’Hiram, dont les origines sont à la fois obscures et méconnues. Si l’on ajoute foi à des contes dont l’antiquité n’est pas douteuse, le problème sera vite résolu …Il suffira d’interroger un maître, de préférence "un ancien". Un de ceux qui ont conservé intacte la foi des anciens âges et d’écouter. Il dira les origines bibliques de la légende, les étapes de la construction du Temple de Salomon, les péripéties de la vie d’Hiram et son assassinat final par trois mauvais compagnons. Il citera des noms, des faits, des dates. Aucune question ne l’embarrassera, car la relation traditionnelle, dont il sera l’interprète, est des plus précises. Inutile d’ajouter que ses dires, dont la sincérité sera absolue, ne seront appuyés par aucune preuve, qu’ils resteront donc peu vraisemblables et que le travail de l’historien, loin d’être terminé, après cette audition, commencera seulement avec elle.

Martin Saint-Léon expose les légendes que possèdent les fédérations qui administrent les trois Rites du Compagnonnage : "les Compagnons du Devoir et de Liberté", "les Enfants de Maître Jacques", "les Enfants du Père Soubise". Chacun des trois Rites possède sa légende propre et prétend se rattacher à l’un de ces trois fondateurs : Salomon, Maître Jacques, Soubise. Et chaque légende possède elle-même des variantes, voire des versions différentes. Maître Jacques aurait été l’un des premiers maîtres artisans de Salomon et l’un des compagnons d’Hiram. Il aurait travaillé à la construction du Temple de Salomon et serait devenu le Maître des Tailleurs de Pierre, des Maçons et des Menuisiers. Le Temple achevé, il aurait quitté la Judée, en compagnie d’un autre Maître, Soubise, avec lequel il se brouilla. Soubise débarqua à Bordeaux et Maître Jacques à Marseille. La fin de l’histoire de Maître Jacques semble calquée sur le récit de la passion du Christ. Alors qu’il était en prière, l’un de ses disciples vint lui donner un baiser de paix. C’était le signal convenu pour cinq assassins qui le tuèrent de cinq coups de poignard. Soubise fut accusé d’avoir été l’instigateur de ce meurtre, ce qui fut longtemps la cause de la désunion entre les Compagnons des deux Rites. Mais cette accusation fut finalement estimée infondée et injuste.

Une autre version de la légende veut, qu’au lieu d’avoir été un artisan contemporain de Salomon, Maître Jacques ait été tout simplement le même personnage que Jacques de Molay, dernier Grand Maître des Templiers, brûlé sur ordre de Philippe le Bel. Jacques de Molay a très bien pu, dans le cadre des nombreuses constructions édifiées par les templiers, donner une règle aux ouvriers

Page 6: La Légende d'Hiram(1810)

Maçons, Tailleurs de Pierre et constituer des sociétés de Compagnons. Cette version, à première vue moins invraisemblable que la précédente, ne repose toutefois sur aucun fondement historique. Car si l’existence d’une filiation entre les Templiers et le Compagnonnage, n’est pas impossible, force est de considérer que, même probable, elle demeure purement conjecturale.

La légende de Soubise est implicitement contenue dans la précédente. Soubise, architecte du Temple de Salomon, comme Maître Jacques, ami de celui-ci, serait devenu l’instigateur de son assassinat. Le fait est toutefois contesté. Mais d’après un autre récit, Soubise aurait été un moine bénédictin qui aurait vécu à la fin du XIIIème siècle. C’est sous le costume des moines bénédictins, qu’il est généralement représenté dans les Cayennes. Soubise aurait participé, avec Jacques de Molay, à la construction de la cathédrale d’Orléans. Le Compagnonnage aurait été fondé à cette époque et Soubise aurait survécu quelques années au Grand Maître des Templiers. Cette version, qui n’est pas impossible, reste également purement conjecturale.

Les Compagnons du "Devoir et de Liberté" , Enfants de Salomon, prétendent eux, que leur fondateur est le Roi Salomon lui-même. Et ils se réfèrent à une légende qui a pour point de départ un passage de La Bible (Premier Livre des Rois, Chapitres 5 & 7) : "Le roi Salomon envoya quérir Hiram de Tyr. C’était le fils d’une veuve de la tribu de Nephtali. Il était rempli de sagesse, d’intelligence, de science, pour faire toute œuvre en airain. Il vint donc chez le roi Salomon et fit ses ouvrages". Rien, dans ce texte, ne permet de conclure à l’existence d’une association telle que le Compagnonnage au temps de Salomon… Mais la légende continue le récit biblique. Pour payer les ouvriers, en éliminant les intrus et les oisifs qui se mêlaient à eux, Hiram donna à chacun des ouvriers un mot de passe pour se faire reconnaître. Ainsi, chacun était payé selon son mérite et recevait, le moment venu, le mot de passe de son nouveau grade. Le Compagnonnage de Liberté était fondé.

Une seconde légende se superpose à la première. Trois compagnons, Holem ou Hoben, Sterkin ou Skelem, et Hoterfut, furieux de s’être vus refuser la maîtrise, décidèrent de contraindre Hiram à leur donner le "mot" de maître ou de l’assassiner. Cette version constitue la trame du rituel maçonnique de l’élévation à la maîtrise.Le récit le plus connu et le plus complet de la légende se trouve dans le livre des "Voyages en Orient", de Gérard de Nerval. Il nous raconte "l’histoire de la Reine du Matin et de Soliman Ben Daoud, Prince des génies" (l’histoire de la Reine de Saba et de Salomon, fils de David)… Au fil des douze chapitres, d’"Adoniram", le premier, à "Mac Benah", le dernier, se révèle tout le symbolisme de la légende. Les trois mauvais compagnons y symbolisent l’ignorance, l’hypocrisie et le fanatisme. La recherche et la découverte du corps d’Hiram exaltent les trois vertus opposées, mais aussi la liberté et la fidélité, l’une portant l’autre, et qui sont les vertus de l’esprit. La fidélité est la lumière de l’esprit. Dès qu’on change ses idées d’après l’événement, l’intelligence n’est plus qu’une "fille".

La signification de la légende

Page 7: La Légende d'Hiram(1810)

La légende d’Hiram, est pour le nouveau maître une invitation à réfléchir son propre portrait dans le miroir que lui propose la légende. Il essayera donc d'observer comment le miroir est construit en tant que lieu spéculaire des métamorphoses de son propre moi symbolique … Car cette légende est d’abord un recours à soi-même, où chacun est invité à trouver sa propre vérité. Et c’est bien là que se trouve sans doute le sens alchimique de la légende, si l’on veut bien voir dans l’alchimie la tentative de chaque individu pour découvrir sa propre vérité, son propre secret, pour trouver la connaissance suprême réservée à chaque itinéraire humain. Car qu’est-ce donc que l’Initiation, sinon la traversée de la vie humaine, avec ses joies et ses épreuves, à travers laquelle l’être humain met à nu, lentement, cette étincelle qui est en lui et qui, une fois révélée, éclaire l’univers et lui donne un sens ?On retrouve les acteurs de la légende au portail Nord de la cathédrale de Chartres où figurent David avec Salomon et la Reine de Saba ainsi que Zorobabel ... Salomon, constructeur, il y a trois mille ans, du premier temple, détruit en l’an 600 avant notre ère par Nabuchodonosor II. Près de lui, se trouve Zorobabel, architecte du second temple, embelli par Hérode et détruit par les romains, en l’an 70 de notre ère. Eséchiel, l’inventeur du "troisième temple", a disparu du portail nord à la Révolution. Mais Saint Jean-Baptiste au même portail présente au passant l’emblème du troisième temple, la Jérusalem céleste, "la Cité qui n’a besoin ni du soleil, ni de la lune pour l’éclairer, car l’agneau est son flambeau".

"Ici, tout est symbole", cette affirmation, répétée au cours de la cérémonie d’initiation maçonnique est chargée de sens, parce qu’elle annonce la valeur de la démarche et la méthode de travail : la recherche du sens, au-delà de l’apparence. Après son apprentissage et son compagnonnage, le franc-maçon médite sur la passion d’Hiram. Et il apprend alors que les maîtres disposent pour se reconnaître d’un mot substitué à la "parole" qui a été perdue. La "parole" est perdue pour ceux qui croient avoir tout vu, tout dit et qui disent"qu’il n’y a rien à voir". La parole est effectivement perdue lorsqu’on n’est plus à même de produire une pensée nouvelle à propos des symboles. Ainsi la "parole" est-elle toujours à retrouver et sa quête exige une remise en question permanente de toutes nos certitudes antérieures. Muni du mot substitué, le Maître Maçon explore les paysages proposés par les rites. Mais le voyage initiatique ne peut être accompli que par celui qui ne se contente pas du mot substitué. La Maîtrise véritable exige l’essentiel. Encore faut-il garder un esprit critique et conserver un certain humour, afin de ne pas devenir un dévot béat qui attend une "révélation" de la part de ses maîtres. Ainsi, au départ, dès le commencement de la quête, il

Page 8: La Légende d'Hiram(1810)

faut savoir que la "parole" ne pourra se dire. Elle sera montrée, sous l'égide de la rose, sortie d’une boite, sous forme d’initiales, qui sont le symbole du "mot" et non le "mot"lui-même, enfin retrouvé ...

2 - La suite de la légende Le grade de Royale Arche

L'un des motifs qui provoqua, en 1750, la célèbre querelle maçonnique entre les "Antients"et les "Modernes" réside dans l’attitude des uns et des autres envers le grade de Royale Arche - la Sainte Arche Royale de Jérusalem. Les Anciens admettaient la pleine valeur de ce grade dont ils faisaient l’une des pièces maîtresses de l’édifice maçonnique et qu’ils pratiquaient réellement. Les modernes, par contre, refusaient officiellement de reconnaître ce grade, bien qu’ils fussent nombreux à le prendre et à s’y faire recevoir. Le schisme cessa en 1823, par la création de la Grande Loge Unie d’Angleterre dont l’article 2 de la déclaration préliminaire précisait que : "la maçonnerie pure et ancienne consiste en trois degrés, sans plus, à savoir : Apprenti, Compagnon et Maître Maçon, y compris l’Ordre Suprême de la Sainte Arche Royale".

Ce grade est-il de source opérative ? Très probablement non. Est-il issu des degrés hiramiques, en constituant la seconde partie du grade de Maître ? Rien ne prouve que les deux légendes du troisième degré et de l’Arche Royale aient jamais été associées dans un même cérémonial. Toutefois, les Anciens accusaient les modernes d’avoir mutilé le grade de Maître en l’amputant de sa seconde partie. Ce qui porte l’idée d’une maçonnerie en trois grades, le troisième étant reçu au cours de deux cérémonies distinctes …

Les rituels du grade de Royale Arche

Les origines des rituels du grade de Royale Arche sont multiples et complexes. Le plus ancien rituel connu de ce grade date de 1760. Après la tenue du premier Grand Chapitre de Royale Arche en 1766, le développement des rituels se caractérise, sous l’influence semblerait-t-il de jésuites, par la substitution à la légende ancienne, solomonienne et hiramique, d’une nouvelle légende racontant la reconstruction du Temple par Zorobabel.

L’enseignement historique du grade - qui présente des similitudes avec celui de Chevalier d’Orient du Rite Français - raconte que, "lors de la reconstruction du temple, trois pèlerins inconnus s’étaient offerts pour déblayer les décombres de l’ancien édifice. Et comme le bruit courait que quelque chose d’important était enfouis sous les décombres, il leur avait été recommandé de prendre le plus grand soin pour réaliser leur travail. Au bout de quelques jours, ils avaient découvert, derrière un mur sonnant le creux, une voûte où ils avaient aperçu des tables, portant une partie des lois divines et un petit autel recouvert d’un voile. Ce voile soulevé leur avait permis de lire les noms des Maîtres qui avaient construit le premier temple, mais aussi le nom de l’Eternel - non pas celui qui est donné à l’ordinaire, mais un autre - qui était manifestement la parole perdue. Tous les Maîtres présents avaient dû prendre l’engagement de ne jamais révéler aux autres frères la parole retrouvée et de ne jamais la prononcer qu’en présence de deux autres Maîtres". Le grade

Page 9: La Légende d'Hiram(1810)

de Royale Arche, tel qu’il prend corps en Angleterre à partir de 1766 affiche une marque chrétienne que l’on retrouve dans le rituel de Maître Parfait du Rite Ecossais Rectifié. Ceci suppose que dans les Loges qui pratiquaient le grade de Royale Arche, la légende de l’Ancien Testament soit interprétée d’un point de vue chrétien : celui de l’annonce de la reconstruction symbolique du troisième temple.

Dans le rituel de 1765, les acteurs en sont les Maîtres Sublimes, Salomon, Hiram, Roi de Tyr et Hiram, l’architecte assassiné. "Les Maîtres Sublimes demandent à Salomon de leur conférer le grade de Royale Arche. Salomon leur répond négativement, sachant qu’il a condamné une trappe dans le sanctuaire. Cette trappe mène à un souterrain qui donne accès à une voûte de neuf arches. Longtemps après, Salomon envoie trois intendants, Sublimes Ecossais, pour chercher les choses les plus précieuses dans les ruines du Temple (ce qui constitue une incohérence, le Temple de Salomon étant détruit plus de quatre cents ans après sa construction). L’un des intendants accroche sa pioche à un gros anneau fixé à une dalle. Il soulève la dalle - dont l’image se trouve sur le sautoir du 14ème grade du Rite Ecossais Ancien Accepté - et découvre le souterrain. Il lie une corde autour de sa taille et dit à ses compagnons qu’il tirera sur la corde pour demander qu’on le remonte. Il descend dans le trou - le souterrain serait donc bien au fond d’un puits. Il passe trois arches, tire trois fois la corde pour se faire remonter. Au cours d’une nouvelle tentative, il passe six arches, tire six fois la corde. Il redescend une nouvelle fois avec un flambeau et passe neuf arches. Un pan de mur se détache et il aperçoit une pierre triangulaire sur laquelle est écrit le mot sacré du grade de Royale Arche : JABULUM. Il fait le même signe que Salomon, lorsqu’il a refusé de leur conférer le grade de Royale Arche (Signe d’Admiration). Il met un genou en terre, une main dans le dos et l’autre pour se protéger de la lumière (Signe de Protection) et tire sur la corde pour se faire remonter. Revenu avec les autres intendants, il leur dit : "Jabulum est un bon maçon" et décide avec eux :- que le nouveau mot de passe sera "Je suis ce que je suis"…

Le symbolisme du grade de Royale Arche

Les soirées privilégiées parfois vécues par les francs- maçons ne peuvent se produire que dans les Loges qui, au moyen d’un rituel, pratiquent l’art d’ouvrir une porte sur un mondehors du temps et sur un univers sans limite. Ce monde, à l’intérieur d’un Temple orienté, couvert de sa voûte étoilée, devient d’autant plus réel qu’il est imaginaire. Ainsi, par le moyen du Rite, le franc-maçon peut passer de la durée temporaire ordinaire au temps sacré. Le franc-maçon vit ainsi dans deux sortes de temps : le temps profane et le temps sacré, qui se présente sous l’aspect paradoxal d’un éternel présent mythique qu’il est possible de réintégrer par le Rite. Le thème de la recherche de la parole perdue s’inscrit naturellement dans cette démarche. Après son apprentissage et son compagnonnage, le franc-maçon médite sur le meurtre d’Hiram. Et il comprend que le mot que les Maîtres utilisent, pour se reconnaître, est un Mot substitué, dont ils portent les initiales sur leur tablier et que le but de la démarche est la recherche de la Parole perdue … Muni du mot substitué et afin de retrouver cette Parole, le Maître Maçon explore les paysages proposés par les rites. Le processus de l'initiation nous donc fait traverser des paysages, plus précisément desstructures qui jalonnent la voie initiatique, qui n'est elle-même qu'une expérience totale de la vie …

Au douzième degré du Rite Ecossais Ancien Accepté, le Maçon redécouvre que le Temple que chaque Maçon doit construire en lui-même, représentel'édifice idéal que chacun de nous est

Page 10: La Légende d'Hiram(1810)

appelé à réaliser et que le Temple de Jérusalem est une image de l'univers destiné à satisfaire notre raison, une conception philosophique traduisant, autant qu'il est possible, une approche de la Vérité.Au XVlllème siècle, avant la structuration définitive de la Franc-maçonnerie spéculative, la prononciation du mot de maître est J H V H (Jéhovah). Tout se passe ensuite comme si tout le mythe d'Hiram consistait, dans un de ses aspects, àsupprimer cette invocation pour la remplacer par un mot substitué qui sera le premier mot que l'on entendra et dont les significations vont de Mach Banach, Marrow in the Bone, Moabon enfin, qui deviendra le mot substitué du Rite Ecossais Ancien Accepté.

Le sens profond du Rite Ecossais Ancien Accepté est le passage fondamental de l’Ancien au Nouveau Testament , où le tétragramme Chrétien I N R I se substitue au tétragramme hébraïque I H V H. Et toute la démarche ultérieure sera ciblée sur la découverte de la complémentarité de l’Ancien et du Nouveau Testament, l’un, symbolisé dans les grades vétéro-testamentaires par la formule : Amour de la Vérité et l’autre symbolisé par la référence au Nouveau Testament : Amour de l’Humanité, symbolisme que l’on retrouvera sur l'échelle mystérieuse du rituel du trentième grade du Rite Ecossais Ancien Accepté …Certains diront : qu’importent les spéculations et les retours vers le passé à l’époque de la science, de la technique, de l’efficacité, de la raison… Les sceptiques et les agnostiques diront que la maçonnerie n’a que faire de dieu et des religions. Les croyants objecteront que leur foi leur suffit et s’en remettront à leur église, avec plus ou moins de confiance, pour s’occuper de leur dieu et du salut de leur âme. L’église, de son côté, parle de moins en moins, afin de ne pas effaroucher le client, l’important restant de maintenir, autant que possible, une influence fondée sur quelques principes d’ordre moral.

Quant aux francs-maçons, ils se présentent sous des visages bien divers, sans unité de doctrine ni d’action. Il existe, il est vrai, pour les trois premiers grades, un critère simple : celui de la régularité, qui garantit, dans l’ensemble, la reconnaissance de principes communs traditionnels. Et les choses deviennent encore plus claires lorsqu’on sait que la régularité doit s’apprécier sous deux aspects complémentaires : la régularité obédientielle et la régularité initiatique. Mais cette simplicité relative, qui concerne la franc-maçonnerie des grades symboliques, fait place à une réelle confusion lorsqu’il s’agit des "hauts" grades.L’histoire de ces grades est fort complexe et l’on y trouve le meilleur, mais également, il faut en convenir, le pire. On s’aperçoit, de plus, qu’il n’existe, au regard des "hauts" grades, aucun critère de régularité, ni aucun pouvoir régulateur qualifié, même si le Rite Ecossais Ancien Accepté peut se prévaloir de regrouper, au niveau mondial, 90 pour 100 des maçons travaillant dans les Ateliers au delà du troisième grade. Peut-on d’ailleurs parler "du" Rite Ecossais Ancien Accepté, tant les pratiques en sont parfois différentes, et les formules constitutives laissées "ad libitum" de chaque Atelier ?

Il semblerait donc raisonnable d'accepter une constatation de départ aussi simple qu’évidente. La franc-maçonnerie est, à l’origine, une initiation de Métier et l’ésotérisme qu’elle met en œuvre est d’essence judéo-chrétienne. Partant de là, il convient de déterminer et de comprendre l’expression de cette essence judéo-chrétienne, d’en suivre le passage de la maçonnerie opérative de jadis à la maçonnerie spéculative moderne, puis de son évolution jusqu’à la pratique actuelle. Salomon, Hiram, Zorobabel, n’ont ni construit, ni rebâti le Temple… Ils nous ont légué son modèle, caché sous une image. Ils nous indiquent le chemin vers la Cité Idéale où il s’élèvera, dans l’harmonie. Il importe donc que les maçons de bonne foi, rejetant les idoles, mènent à bonne fin une pratique

Page 11: La Légende d'Hiram(1810)

des "hauts" grades qui leur donne leur seule justification : aider, servir et honorer la Franc-maçonnerie symbolique, qui est la seule détentrice de toute l’initiation. Ainsi, la maçonnerie de Royale Arche pourrait-elle être considérée à juste titre comme la fondation et la clé de voûte de l’ensemble de l’édifice maçonnique. Dégagée de tout dogme, de toute attache cultuelle, considérée non comme un grade, mais comme un complément et une explication des grades symboliques, laissée à la libre interprétation de la conscience individuelle de chacun, elle montrerait ainsi l’importance, non pas tant religieuse, que sacrée de l’initiation maçonnique. Avec elle, s’éclairerait toute la signification à donner à la légende opérative et traditionnelle du Temple de Jérusalem ainsi que la haute portée de son enseignement initiatique selon lequel l’accomplissement du chemin de la connaissance rejoint la quête spirituelle de l’Amour.

Conférence de Roger Dachez

La question des origines de la Franc-Maçonnerie occupe un statut particulier dans l'imaginaire maçonnique. Préoccupés par la transmission, certains franc-maçons ont dicté des règles et établirent des lois qui façonnèrent l'histoire de l'institution qui ressortit des "Constitutions d'Anderson". C'est ainsi que la Franc-Maçonnerie s'origina dans le Paradis Terrestre immémorial d'Adam et Eve et qu'elle fut transmise par les prophètes et les rois, accréditant la thèse selon laquelle la Grande Loge, apparue à Londres au XVIIIème siècle, n'était pas une "création" mais un "éveil", éveil s'inscrivant donc dans la continuité des bâtisseurs de cathédrales. Théorie qui connaît une rupture avec l'avènement de l'histoire moderne sur laquelle s'appuie, entre autre, la Franc-Maçonnerie spéculative qui tenta de "décortiquer" le mythe de la Franc-Maçonnerie opérative.

Cet exposé tente de répondre aux deux questions suivantes: la Franc-Maçonnerie spéculative dérive-t-elle de la Franc-Maçonnerie opérative? L'Histoire peut-elle détruire le mythe? N'a-t-elle pas plutôt le pouvoir de le restituer dans sa dimension fondatrice et son sens réel ?

LA LÉGENDE D’HIRAM & Franc-maçonnerie.

Je souligne, pour la nième fois que je ne suis ni spéculateur, ni Franc-Maçon, ni Rose+Croix, ni Templier, ni autre chose encore qui puisse me faire l’adepte d’une confrérie fut-elle celle des fines gueules !

Certains de mes lecteurs, en qualité de frère à trois points, peuvent avoir des opinions différentes des miennes, car, comme le disait solennellement ma concierge :« Nous sommes en République ! ».

Mes amis lecteurs me répondent parfois avec des développements spéculatifs élaborés. Quand ils me font parvenir par courriel, le fruit de leurs réflexions que voulez-vous que je réponde ? Je ne puis donner suite à ce genre de message qui va à l’encontre de ma manière de procéder (j’adore la brièveté d’un coup de sifflet et les phrases à courte queue !) issues de mon tempérament et de mes observations personnelles. Je comprends ceux qui veulent partager leurs connaissances et leurs découvertes, je suis passé par là. Mais attention de ne point enfermer le lecteur avec l’auteur dans un cercle aussi vicieux qu’infernal.

Page 12: La Légende d'Hiram(1810)

En Franc-Maçonnerie, tout le symbolisme des trois premiers grades qui sont ceux d’Apprenti, Compagnon et Maître, s’achève donc à l’accession au grade de Maître, dont le sens initiatique gravite autour de la légende d’Hiram, et de son assassinat.

En d’autres termes, et d’une manière quelque peu abrupte on peut résumer en disant que cette légende donne accès à l’Art Royalou alchimie inséparable de l’art sacerdotal (celui pratiqué au sein du Temple) ou art sacré. Car un alchimiste véritable est d’abord prêtre, quand il reçoit une ordination valide qui ne peut être qu’en marge des grandes Églises.

L’alchimiste est prêtre selon l’Ordre de Melchisédech, un être étrange et puissamment mystique en marge de notre monde, qui, rencontra Abraham et l’intronisa puis lui donna son calice (futur graal) à la fin d’une cérémonie consécratoire préfigurant la messe christique. J’y reviendrais.

Remarquons d’abord que les deux colonnes situées à l’entrée du temple maçonnique sont placées à cet endroit pour perpétuer l’œuvre d’Hiram qui les plaça devant l’entrée du temple de Salomon. C’est la Bible qui signale ce fait au chapitre VII du premier livre des Rois :

« Le roi Salomon envoya chercher Hiram de Tyr. Il était fils d’une veuve de la tribu de Nephtall, mais son père était Tyrien et travaillait l’airain. Il était rempli de sagesse, d’intelligence et de savoir pour faire toutes sortes d’ouvrages d’airain ; il vint auprès du roi Salomon, et il exécuta tous ses ouvrages.

Il fabriqua les deux colonnes en airain. »

Je ne vais pas m’appesantir sur le sens de ces deux colonnes qui ouvrent une porte normale dans un sens, mais à rebrousse temps dans l’autre, à la manière de certains menhirs, et qu’Hiram appelaJachin et Booz pour des raisons autant de complémentarités que d’opposition. Malgré l’aspect farfelu de ce que je viens de signaler, il paraît évident que ce genre de fait ne saurait se manifester en fonction du grade.

Je rappelle cette légende bien connue qui est retracée à grands traits par Jules Boucher à la page 251 de la symbolique maçonnique :

« Trois compagnons voulant s’arroger les prérigatives des Maîtres assaillirent successivement Hiram, le blessèrent et le dernier d’entre eux le tua. Ils enterrèrent le cadavre et plantèrent un rameau d’acacia dans la terre fraîchement remuée. Les compagnons partis à la recherche d’Hiram découvrirent son cadavre grâce au rameau d’acacia. »

Page 13: La Légende d'Hiram(1810)

Cette légende est alchimique et permet de comprendre pourquoi le baron de Tchoudy, l’auteur du catéchisme de l’étoile flamboyante, place au cœur de son rituel alchimique des indications précises et pratiques, s’étalant sur trois pages d’écritures serrées du manuscrit original, donnant des indications précises pour réaliser le Grand Œuvre[1]. Ne vous étonnez pas de ne pas trouver cet enseignement précieux puisque le maniement des matras ou ballons de verre fut passés sous silence par ceux qui ne voulaient pas en entendre parler sous le prétexte fallacieux qu’il s’agit d’occultisme noir. La réalité est qu’ils expurgent à l’aune de leur compréhension. Ils font de leur mieux pour que leur domination sur la loge, malgré leur ignorance verbeuse[2], ne soit pas remise en cause. Au diable la vérité pour que vive l’autorité !

Les trois compagnons qui tuèrent Hiram sont les trois corps alchimiques : sel, soufre et mercure. Ils blessent et font saigner Hiram et le tuent (Hiram se confond ici avec le récipiendaire qui va accéder à la maîtrise).

Cela marque la phase de la mort ou le sceau d’hermès de couleur rouge sang surnage la matière noire en putréfaction. Le message de cette légende est des plus significatifs quant à l’art royal. En effet, il est impossible de réaliser le Grand Œuvre si l’on ignore le secret de l’acacia, car la substance obtenu à partir de ce végétal va permettre d’élaborer le sel alchimique qui seul, je dit bien seul, va permette à la matière de saigner et de prendre la couleur noire.

D’où la conclusion dépourvue d’ambiguïté : Les premiers maçons n’étaient reçus Maître qu’a la seule condition de savoir fabriquer le sel alchimique au laboratoire afin de pouvoir dire sans mentir, et sans l’ombre d’une hésitation : « L’acacia m’est connu ! ». C’était vraiment une initiation qui donnait la clé fondamentale de l’ésotérisme, la première clé en quelque sorte qui va permettre ensuite de séparer le bon grain de l’ivraie pour progresser dans les hauts grades et parvenir à l’escarboucle des sages. Et le baron de Tchoudy précise : « La matière évaporée jusqu’à sècheresse, il vous reste au fond du pot un sel fixe (sec) que vous prendrez encore chaud et le réduirez en poudre avant que l’humidité de l’air l’ai rendu moite… »

En écrivant cela je pense à mon frère Pascal de la Martinique qui apprit à ses dépends ce que cette moiteur veut dire !

Devant la méconnaissance en ce domaine véhiculée par les mandarins, je suis révolté par leur ignorances (vraie ou simulée), car les manes de l’univers ne font pas de cadeaux à ceux qui induisent leurs soi-disant frères en erreur.

La spiritualité et l’Initiation sont de l’ordre du sacré. Ceux qui déforment les choses œuvrent contre l’Esprit et ne sont ni pardonnables ni pardonnés. Le Christ lui-même l’affirme ! Donc, pas de circonstances atténuantes pour les menteurs ou ceux qui acceptent de vivre dans le mensonge.

Connaissez-vous, cher maître, le secret du sel ? Si la réponse n’est pas bonne le « maître » est un profane (qui fut probablement trompé), il est intronisé maître d’opérette, fin bretteur dans l’art de manier le verbe. Non ! et non !

Page 14: La Légende d'Hiram(1810)

Un « initié » de cette eau, (pas plus que l’initiateur ou ceux qui en tiennent lieu) ne mérite pas le nom de Maçon car il est incapable de façonner la Pierre (pas même sur le plan théorique) pour l’amener à son plus haut degré de perfection qui est la Pierre Philosophale. Dire autre chose ne peut plus être accepté de nos jours.

Ouf ! Je me calme pour reprendre l’histoire d’Hiram.

Je partage l’opinion de Jules Boucher (idem supra page 253) quand il écrit :

« La légende d’Hiram est semblable à celle qu’on trouve dans les mystères de l’antiquité et à ce titre elle est d’un intérêt indiscutable. On prétend que cette légende a été « inventée » en 1725 parce que nul document ne la mentionne antérieurement sous la forme où nous la connaissons. » Mais il s’agit non pas d’un symbole mais bien d’un rite, adapté peut-être, mais, à coup sur, initiatique. »

Voici une autre version de la légende d’Hiram qui donne d’autres perspectives, et aussi un rite plus significatif, au grade de Maître et à la Franc-Maçonnerie tout entière.

Un jour, Salomon décida de construire un Temple. Pour cela il fit appel, pour en être le maître d’œuvre, à Hiram.

Ce fut au temps où la reine de Saba, Balkis, vint à Jérusalem après avoir entendu parler du sage Salomon.

En fait, elle fut, à son arrivée, charmée par la sagesse sublime et claire, par la beauté de Salomon. Celui-ci demanda la main de la reine et l’obtint. Alors, cette reine de Saba entendit parler de la construction du temple. Elle voulu donc faire connaissance du maître d’œuvre, Hiram. Quand elle le vit, elle fut profondément impressionnée et captivée par son seul regard.

Il en résulta alors quelque chose comme de la jalousie entre Hiram et le sage Salomon. Il s'ensuivit que Salomon aurait bien voulu faire quelque chose pour nuire à Hiram ; mais il devait le garder afin que la construction du temple puisse s’achever.

Il se passa alors la chose suivante. Le temple était presque terminé. Une seule créàtion manquait encore, qui devait être le chef-d’œuvre d'Hiram, la mer d’Airain. Ce chef-d’œuvre d'Hiram devait représenter l'océan coulé dans le bronze et était destiné à orner le temple. Tous les mélanges de métaux avaient été préparés par Hiram d'une façon admirable et tout était prêt pour la fonte.

Mais trois compagnons d'Hiram qui n'avait pas été jugés capables d'être promus Maître, se mirent en besogne. Ils s'étaient juré de tirer vengeance et voulurent empêcher la réalisation de la mer d'Airain. Un ami d'Hiram qui apprit cela, communiqua a Salomon le plan des compagnons afin qu'il pu le déjouer. Mais Salomon, par sa jalousie envers Hiram, laissa les choses suivre leur cours car il voulait faire échec au maître d’œuvre. En conséquence, Hiram du assister à la destruction de toute la coulée

Page 15: La Légende d'Hiram(1810)

parce que les trois compagnons avaient introduit un mauvais matériau dans la masse métallique. Il tenta encore d'éteindre le feu qui faisait rage en versant de l'eau mais les choses empirèrent. Comme la réalisation de l'œuvre était mise à mal, un de ses aïeux lui apparut. Il lui demanda de plonger dans le feu en toute sérénité car il ne serait pas vulnérable au feu. Hiram le fit et atteignit le centre de la Terre. Ou il fut conduit à la divinité originelle. Hiram fut alors initié aux mystères de la création du feu, au secret de la fonte du bronze, au secret de l'alchimie et à d'autres secrets encore. Il reçut de la divinité un marteau et un triangle d'or qu'il devait porter autour du cou. Ensuite il s'en retourna et fut en mesure de réaliser la mer d'Airain, d'effectuer correctement la coulée.

Hiram obtient alors la main de la reine de Saba. Mais il est attaqué par surprise par les trois compagnons et tués. Avant de mourir, il réussit encore à jeter dans un puits le triangle d'or.

Comme on ignore où est passé Hiram on le cherche. Salomon lui-même prend peur et veut découvrir ce qui se passe.

Avant de mourir Hiram indiqua le lieu où le triangle d'or pouvait être trouvé. On l'apporta près de la mer d'Airain et les deux furent gardés dans un lieu particulier du temple : le Saint des Saints. Ils ne peuvent être trouvés que par ceux qui ont la compréhension de ce que signifie toute cette légende du temple de Salomon et de son architecte Hiram.

Cette légende, qui fut connue par l’Ordre de Memphis, Misraïm, est des plus instructives puisque le temple est le temple des confréries de l’ésotérisme et le Saint des Saint le lieu de séjour des confréries secrètes sévèrement gardé. Celles-ci savaient ce que la mer d’Airain et le triangle d’or signifient, tout comme plus tard elles sauront ce que sont les tables de la Loi et le Graal.

Quand au feu des passions, ou feu contre nature, il ne faut pas le confondre avec le feu de nature. Nous savons maintenant à quoi nous en tenir. Que puis-je dire de plus ? Peut-être que la relation entre la mer d’Airain et la mer qui engloutit une civilisation bien connue ne devrait pas être négligée. Quoi qu’il en soit cette légende est inséparable de la saga humaine. C’est à chacun de nous de progresser vers la connaissance du triangle d’or transmuté qui porte en lui le secret des 4 éléments et celui du sceau de Salomon ou étoile à six branches qui brillait une nuit au firmament nocturne de Bethléem.

Anathème à ceux qui exhibent à la boutonnière une branche d’acacia ou en sautoir le triangle d’or sans en connaître le sens. Que ceux qui véhiculent une interprétation bidon aux apprentis confiants et studieux réalisent leur indignité vis-à-vis du Grand Architecte de l’Univers. En supposant évidemment qu’ils ne l’aient pas mis au rancart.

[1] Ce passage extrêmement instructif est situé après le grade de « Vrai Maçon ou Chevalier d’Isis » (durant les cérémonies les adeptes se réunissent en Académie), et les « Chevaliers Argonautes » ou Chevaliers de la Toison d’or qui devaient donc, comme le grade l’indique, connaître le Grand Œuvre.

Page 16: La Légende d'Hiram(1810)

Et en plus ils reconnaissent pour père de l’Art Royal Hermès Trismégiste et pour frère tous les adeptes c’est-à-dire ceux qui sont capables de manier cornues et matras ! (voir instruction de ce grade).

[2] Cette attitude m’a fait penser à un graphiti de mai 1968 qui disait à propos des mandarins : « La culture c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale. »