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ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL XLVIII - 2002 - CNRS Éditions, Paris LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL YAS BANIFATEMI INTRODUCTION I - LES MODALITÉS DE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL A. Les acteurs B. Les circuits de financement a) Les sources illicites de financement b) Les sources licites de financement II - LES MODALITÉS DE LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL A. Le cadre institutionnel B. Les mesures a) L'adoption de mesures à portée générale b) L'adoption de mesures individuelles CONCLUSION (*) Yas BANIFATEMI, docteur en droit, avocat à la Cour. L'auteur tient à exprimer sa reconnaissance à Gaëlle DERIAZ pour son assistance précieuse, autant dans le travail de recherche que dans la relecture de cet article.

LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL

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ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL XLVIII - 2002 - CNRS Éditions, Paris

LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL

YAS BANIFATEMI

INTRODUCTION

I - LES MODALITÉS DE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL

A. Les acteurs

B. Les circuits de financement

a) Les sources illicites de financement

b) Les sources licites de financement

II - LES MODALITÉS DE LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL

A. Le cadre institutionnel

B. Les mesures

a) L'adoption de mesures à portée générale

b) L'adoption de mesures individuelles

CONCLUSION

(*) Yas BANIFATEMI, docteur en droit, avocat à la Cour. L'auteur tient à exprimer sa reconnaissance à Gaëlle DERIAZ pour son assistance précieuse, autant dans le travail de recherche que dans la relecture de cet article.

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INTRODUCTION

Le financement du terrorisme international est devenu, depuis les événe­ments du 11 septembre 2001, un sujet incontournable 1 . La question n'est pas tant celle de la nouveauté du phénomène du terrorisme international 2 - même si un nouveau degré dans l'horreur était atteint - que celle de l'efficacité des actes de terrorisme international, dont on réalise à quel point elle peut dépendre des ressources financières à la disposition des terroristes 3 . Ces événements ont avant tout conforté l'idée selon laquelle le terrorisme international ne pouvait être combattu de manière efficace que par une action tendant à limiter, voire éliminer, les ressources financières à la disposition des groupements terroristes.

Ce constat explique certainement la multiplication exceptionnelle des mesures adoptées depuis sur le plan international. Ces mesures prolongent et renforcent la lutte contre le financement du terrorisme international entamée dès la fin des années 1990, dans un contexte économique de libéralisation croissante des capitaux favorable à la finance criminelle, par l'adoption de mesures d'obser­vation particulières à l'encontre de groupements terroristes identif iés 4 ou par

1. Parmi les travaux consacrés récemment au sujet, v. notamment Le droit international face au terrorisme - Après le 11 septembre 2001, Paris, Pedone, CEDIN-Paris I, Cahiers internationaux, n° 17, 2002, passim.

2. De nature fondamentalement politique, l'action terroriste a pour objectif principal de rendre publique une cause et de revendiquer une légitimité. La définition du terrorisme international peut soule­ver certaines difficultés d'ordre conceptuel : v. par exemple Jean-Marc SOREL, « Existe-t-il une définition universelle du terrorisme ? », in Le droit international face au terrorisme - Après le 11 septembre 2001, op. cit., pp. 35-68 ; Éric HUGUES, « La notion de terrorisme en droit international : en quête d'une définition juridique », J.D.I., 2002, pp. 753-771 ; W. Michael REISMAN, « International Légal Responses to Terrorism », Houston J.I.L., 1999, pp. 3 et s., pp. 9 et s. V. également la Convention des Nations Unies pour la répression du financement du terrorisme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies dans la résolution 54/109 du 9 décembre 1999 et entrée en vigueur le 10 avril 2002 (la « Convention de 1999 »), qui, bien que ne définissant pas directement le « terrorisme », vise un « acte des­tiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à inti­mider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque » (article 2 (l)(b)).

Sur le caractère international du terrorisme, v. par exemple Éric HUGUES, op. cit., p. 758. Le critère de distinction entre une action terroriste « interne » et une action terroriste « internationale » ne semble pas résider dans la source étrangère du financement, une action terroriste interne pouvant être financée par des fonds situés à l'étranger. L'exemple de la Convention de 1999 est à cet égard significatif, puisqu'elle prévoit, de manière cumulative, qu'elle ne s'applique pas lorsque « l'infraction est commise à l'intérieur d'un seul État, que l'auteur présumé est un national de cet État et se trouve sur le territoire de cet État, et qu'aucun autre État n'a de raison [...] d'établir sa compétence » (article 3).

3. V. par exemple le préambule de la Convention de 1999, aux termes duquel « le nombre et la gra­vité des actes de terrorisme international sont fonction des ressources financières que les terroristes peu­vent obtenir ».

4. Les réseaux et groupements rendus responsables des attentats - essentiellement l'organisation Al-Qaida, Oussama ben Laden et les Taliban installés en Afghanistan - faisaient déjà l'objet d'une obser­vation particulièrement attentive et de sanctions adoptées au sein du Conseil de sécurité de l'ONU : v. par exemple la résolution 1267 (1999) adoptée par le Conseil de sécurité à sa 4051 e séance ternie le 15 octobre 1999 : « Condamnant avec force le fait que des terroristes continuent d'être accueillis et entraînés, et que des actes de terrorisme soient préparés, en territoire afghan, en particulier dans les zones tenues par les Taliban, et réaffirmant sa conviction que la répression du terrorisme international est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, Déplorant que les Taliban continuent de donner refuge à Usama bin Laden et de lui permettre, ainsi qu'à ses associés, de diriger un réseau de camps d'entraînement de terroristes à partir du territoire tenu par eux et de se servir de l'Afghanistan comme base pour mener des opérations terroristes internationales, [...] Décide en outre qu'afin d'assurer l'application du paragraphe 2 ci-dessus devront [...] b) Geler les fonds et autres ressour­ces financières, tirés notamment de biens appartenant aux Taliban ou contrôlés directement ou indirec­tement par eux, ou appartenant à, ou contrôlés par, toute entreprise appartenant aux Taliban ou

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l'adoption d'instruments internationaux tels que la Convention internationale des Nations Unies pour la répression du financement du terrorisme, négociée à l'initiative de la France, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies dans la résolution 54/109 du 9 décembre 1999 et entrée en vigueur le 10 avril 2002 (ci-après la « Convention de 1999 »).

L'analyse des mesures de lutte contre le financement du terrorisme n'en est rendue que plus difficile, autant par l'abondance de la documentation consacrée au sujet que par la complexité même de celui-ci, qui touche de près à des disci­plines très variées telles que le droit, la finance internationale, la fiscalité, la poli­tique, les relations internationales, ou encore la religion. Une étude d'ensemble portant sur le volet juridique de la lutte contre le financement du terrorisme international, qui ne peut qu'effleurer et décrire les principaux thèmes sans prétendre être exhaustive sur l'ensemble de la question, suppose une étude des modalités de financement du terrorisme international par une identification des acteurs et des circuits de financement (I), ainsi qu'une étude des modalités insti­tutionnelles et substantielles de la lutte contre le financement du terrorisme international (II).

I. - LES MODALITÉS DE FINANCEMENT D U TERRORISME INTERNATIONAL

A. Les acteurs

Le financement du terrorisme international est essentiellement le fait de deux types d'acteurs : les États et les groupements privés.

Le rôle des États dans l'encouragement ou la mise à disposition de moyens, y compris de financement, du terrorisme international correspond à une réalité. Cette implication peut exister dans trois situations différentes : un État peut être directement l'auteur d'un acte terroriste, un État peut donner refuge à des individus ou groupements terroristes, ou le territoire d'un État peut être utilisé pour lancer une opération de terrorisme sans que ce dernier contrôle les actes en ques t ion 5 . Parmi ces trois catégories de comportements, c'est surtout la première, celle de l'État activement impliqué,

(Suite de la note 4, page précédente) contrôlée par les Taliban, tels qu'identifiés par le comité créé en application du paragraphe 6 ci-après, et veiller à ce que ni les fonds et autres ressources financières en question, ni tous autres fonds ou ressour­ces financières-ainsi identifiés ne soient mis à la disposition ou utilisés au bénéfice des Taliban ou de toute entreprise leur appartenant ou contrôlée directement ou indirectement par les Taliban, que ce soit par leurs nationaux ou par toute autre personne se trouvant sur leur territoire, à moins que le comité n'ait donné une autorisation contraire, au cas par cas, pour des motifs humanitaires [...]. » Dans le même sens, v. la résolution 1333 (2000) adoptée par le Conseil de sécurité à sa 4251 e séance le 19 décembre 2000, décidant de « geler sans retard les fonds et autres actifs financiers d'Usama bin Laden et des indi­vidus et entités qui lui sont associés, tels qu'identifiés par le Comité, y compris l'organisation Al-Qaida [...] ». V. encore la résolution 1214 (1998) du 8 décembre 1998 sur la situation en Afghanistan.

Dans le même sens, voir également le règlement (CE) n° 467/2001 du Conseil du 6 mars 2001 inter­disant l'exportation de certaines marchandises et de certains services vers l'Afghanistan, renforçant l'interdiction des vols et étendant le gel des fonds et autres ressources financières décidés à l'encontre des Taliban d'Afghanistan, et abrogeant le règlement (CE) n° 337/2000.

5. Sur ces distinctions, v. par exemple W. Michael REISMAN, op. cit., pp. 30-55 ; Kenneth W. ABBOTT, « Economie Sanctions and International Terrorism », Vanderbilt J. Transnat'l L., 1987, pp. 289 et s., pp. 293-298 ; C.R. FENTON, « U.S. Policy Towards Foreign Direct Investment Post-September 11 : Exon-Florio in the Age of Transnational Security », Columbia J. Transnat'l L., 2002, pp. 195 et s., pp. 220-221.

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qui soulève stricto sensu des questions en matière de financement du terro­risme 6 .

La réalité de ce phénomène a été prise en compte par la communauté inter­nationale, notamment au sein de l'ONU. Dans sa résolution 49/60 du 17 février 1995 adoptant les mesures visant à éliminer le terrorisme international, l'Assem­blée générale a ainsi déclaré que :

« les États doivent également remplir les obligations que leur imposent la Charte

des Nations Unies et d'autres dispositions du droit international dans la lutte

contre le terrorisme et sont instamment priés de prendre des mesures efficaces et

résolues, conformément aux dispositions applicables du droit international et aux

normes internationales relatives aux droits de l'homme, pour éliminer rapidement

et définitivement le terrorisme international, et en particulier: a) De s'abstenir d'organiser, de fomenter, de faciliter, de financer, d'encourager ou de tolérer des

activités terroristes et de prendre les mesures pratiques voulues pour que leur terri­

toire ne serve pas à des installations ou à des camps d'entraînement de terroristes,

ni à la préparation ou à l'organisation d'actes terroristes à l'encontre d'autres États

ou de leurs ressortissants » (souligné par nous).

Le Conseil de sécurité a également évoqué l'implication des États dans les actes de terrorisme dans sa résolution 1269 (1999) du 19 octobre 1999, dans laquelle il affirme que « l'élimination des actes de terrorisme international, y compris ceux dans lesquels sont impliqués des États, constitue une contribution essentielle au maintien de la paix et de la sécurité internationales ». De manière plus ponctuelle, certaines résolutions de l'ONU ont visé certains États mis en cause dans certains actes terroristes, par exemple le Soudan 7 , la L ibye 8 ou l'Iraq 9 . En ce qui concerne l'Afghanistan, il est intéressant de relever que les condamnations de la communauté internationale ont frappé le régime des Taliban plutôt que l'État afghan en tant que t e l 1 0 , même avant les événements du 11 septembre 2001 n . C'est conformément à une même logique que, pour les

6. Cette interprétation semble être conforme à l'approche adoptée dans la Convention de 1999, v. la définition de 1'« infraction » à l'article 2 (1), infra, B (1).

7. Dans sa résolution 1044 (1996) adoptée à sa 3627 e séance du 31 janvier 1996, le Conseil de sécu­rité demande « au Gouvernement soudanais de se conformer sans plus attendre aux demandes de l'Orga­nisation de l'unité africaine tendant à ce qu'il : [...] b) Renonce à aider, soutenir et faciliter des activités terroristes, ainsi que donner asile ou refuge à des éléments terroristes, et respecte pleinement, dans ses relations avec ses voisins et les autres pays, les principes de la Charte des Nations Unies et de la Charte de l'Organisation de l'unité africaine [...] ». Dans le même sens, v. la résolution 1054 (1996) adoptée par le Conseil de sécurité à sa 3660 e séance le 26 avril 1996.

8. V. la résolution 748 (1992) du 31 mars 1992, dans laquelle le Conseil de sécurité décide que « le Gouvernement libyen doit s'engager à cesser de manière définitive toute forme d'action terroriste et toute assistance aux groupes terroristes et qu'il doit rapidement, par des actes concrets, montrer sa renonciation au terrorisme [...] ».

9. La situation de l'Iraq est légèrement différente dans la mesure où l'État était présumé, non pas avoir soutenu des groupes de terroristes, mais avoir directement recouru (dans le contexte de la guerre du Golfe) au terrorisme international, v. par exemple la résolution 687 (1991) du 3 avril 1991, dans laquelle le Conseil de sécurité déplore que « l'Iraq ait, au cours du récent conflit, menacé de recourir au terrorisme contre des objectifs situés en dehors du pays et qu'il ait pris des otages ».

10. Dans sa résolution 1378 (2001) adoptée le 14 novembre 2001, le Conseil de sécurité a condamné « les Taliban pour avoir permis que l'Afghanistan soit utilisé comme base d'exportation du terrorisme par le réseau Al-Qaeda et autres groupes terroristes et pour avoir accordé l'asile à Oussama Ben Laden, Al-Qaeda et autres éléments associés, et appuyant dans ce contexte les efforts que fait le peuple afghan pour remplacer le régime des Taliban ».

11. V. par exemple le préambule de la résolution 1333 (2000) du Conseil de sécurité du 19 décembre 2000 : « Condamnant avec force le fait que des terroristes continuent d'être accueillis et entraînés, et que des actes de terrorisme sont préparés dans les zones tenues par la faction afghane dénommée Taliban, qui se désigne également elle-même sous le nom d'Émirat islamique d'Afghanistan (ci-après dénommée

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États-Unis, l'identification d'un État comme « État terroriste » peut fluctuer en fonction des exigences de la politique étrangère américaine, l'Afghanistan n'ayant pas été inclus dans la liste des États-terroristes dressée par le Département d'État afin d'éviter une reconnaissance de fait des Tal iban 1 2 .

De manière générale cependant, le « terrorisme d'État » n'est pas un concept dont on tire aisément des conséquences juridiques : les instruments internatio­naux récents, et en premier lieu la Convention de 1999, visent plutôt les actes commis par des « personnes », en mettant à la charge des États parties des mesures relevant de la prévention et de la sanction d'actes commis par celles-ci. La question, de manière plus générale, se pose de savoir si, dans un contexte fortement politique, ce phénomène peut être appréhendé de manière efficace par les règles juridiques, ce qui n'empêche nullement les États pris individuelle­ment d'adopter des mesures à l'encontre d'États qu'ils considèrent comme terro­ristes, comme c'est le cas par exemple des États-Unis 1 3 . C'est peut-être en adop­tant une logique similaire que certains auteurs s'interrogent sur les conséquences du concept en droit positif, dans la mesure où « les comportements que l'on peut réunir sous cette rubrique sont déjà couverts par des règles qui les caractérisent comme étant des actes illicites internationaux, que ce soit dans le domaine du droit humanitaire, de la protection des droits de la personne ou d'autres » 1 4 .

En réalité, une évolution semble se dessiner dans le sens d'un rôle moindre des États en matière de terrorisme internat ional 1 5 et un financement de plus en

{Suite de la note 11, page précédente) les Taliban), et réaffirmant sa conviction que la répression du terrorisme international est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales ». V. également la résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999.

12. V. C.R. FENTON, op. cit., note de bas de page 131 : «Afghanistan was originally excluded from the 'terrorist list' by the United States because the Clinton administration felt inclusion would signal American recognition of the Taliban as the legitimate government of that country ».

13. V. par exemple Lucien DHOOGE, « Meddling with the Mullahs : An Analysis of the Iran and Libya Sanctions Act of 1996 », Denver J. Int'l L. & Pol'y, 1998, pp. 1 et s.

14. Marcelo KOHEN, « Les controverses sur la question du 'terrorisme d'État' », in Le droit interna­tional face au terrorisme - Après le 11 septembre 2001, op. cit., pp. 83-93, p. 91. Le concept est alors pris en compte comme une circonstance aggravante de l'illicite.

15. V. par exemple Jean-François THONY, « De l'argent de la drogue au financement du terrorisme : relations internationales et finance criminelle », Gaz. Pal., 19 au 23 mai 2002, pp. 10-15, p. 12 : « Les deux autres sources de financement du terrorisme sont les financements de type étatique, source qui s'est fort heureusement quelque peu tarie depuis la fin de la guerre froide, époque bénie des terroristes où les grands blocs étaient toujours prêts à financer ceux qui se proposaient de déstabiliser ou de désorganiser l'autre camp, quelle que fût la cause qu'ils défendaient [...] » ; Brigitte STERN, citant la déclaration faite par le directeur de la CIA devant le Sénat américain en février 2002 : « Des études fai­tes aux États-Unis mêmes sur les menaces futures à l'égard du pays envisageaient cette possible guerre de nouvelle génération, ce conflit non étatique conduit par des opposants dont la base peut ne pas être un État-nation, mais une idéologie ou une religion. Il est en particulier intéressant de relire ce que M. Tenet, Directeur de la CIA déclarait devant le Sénat américain en février 2001 : "State-sponsored terro­rism appears to have declined over the past five years, but transnational groups - with decentralized lea­dership that makes them harder to identify and disrupt - are emerging". », in Brigitte STERN, « Le contexte juridique de Taprès' 11 septembre 2001 », in Le droit international face au terrorisme -Après le 11 septembre 2001¡ op. cit., pp. 3-32, p. 9. V. également GAFI, Directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de financement du terrorisme, 24 avril 2002, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatCTerFinance_fr.htm], p. 4 : « Selon certains experts, il y a deux sources prin­cipales de financement des activités terroristes. La première est le soutien direct d'États ou de structures ayant des organisations suffisamment importantes pour pouvoir collecter et transférer les fonds en faveur de l'organisation terroriste. Ce terrorisme 'sous l'égide des États' semble avoir perdu de son importance ces dernières années et a fait place à des soutiens financiers provenant d'autres sources. Un individu disposant de moyens financiers suffisants peut également apporter un concours financier subs­tantiel à des groupes terroristes. Oussama Ben Laden, par exemple, a semble-t-il consacré des montants importants de sa fortune personnelle à l'établissement et au soutien du réseau terroriste Al Qaida ».

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plus privé 1 6 . Le Groupe d'Action Financière sur le Blanchiment de Capitaux (« GAFI »), créé par le G-7 en 1 9 8 9 1 7 , a ainsi mis en exergue le fait que « [l]es États étant désormais plus réticents à soutenir directement le terrorisme, les groupes terroristes ont dû se tourner vers les activités criminelles pour trouver les fonds nécessaires à leur financement » 1 8 .

En ce qui concerne les événements du 11 septembre 2001, l'identification des groupements et entités soupçonnés d'en être les auteurs n'a pas soulevé de diffi­cultés particulières, dans la mesure où leur existence était connue dès avant les attentats et qu'il existait de fortes présomptions d'activité terroriste de la part de groupes tels que les T a l i b a n 1 9 et de réseaux et individus qui leur sont asso­ciés tels qu'Al-Qaida et Oussama ben Laden, contre lesquels des sanctions étaient prises en vue de limiter leur capacité de financement du terrorisme international 2 0 .

B. Les circuits de financement

Les sources utilisées par les groupes terroristes pour financer leurs activités sont multiples. Une étude menée par le GAFI pour combattre le blanchiment d'argent a énuméré ces sources de la manière suivante : « [t]rafic de stupéfiants, extorsion de fonds et enlèvement, vol avec violence, fraude, jeux de hasard, contrebande et trafic de contrefaçons, soutien direct de certains États, dons et contributions, vente de publications (légales et illégales), fonds provenant d'acti­vités commerciales légitimes » 2 1 . 11 en ressort que le financement du terrorisme

16. V. en ce qui concerne l'exemple du Hamas, qui marque l'évolution vers un financement de plus en plus privé, Stephen C. WARNECK, « A Preemptive Strike : Using Rico and the AEDPA to Attack the Financial Strength of International Terrorist Organizations », Boston University L. Rev., 1998, pp. 177 et s., p. 187 et pp. 224-227.

17. Le GAFI se compose aujourd'hui de 31 pays, territoires ou organisations : Allemagne, Argen­tine, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Canada, Commission européenne, Conseil de coopération du Golfe, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Grèce, Hong Kong, Irlande, Islande, Italie, Japon, Luxembourg, Mexique, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Singa­pour, Suède, Suisse, Turquie.

18. GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 2000-2001,1 e r février 2001, p. 21 ; v. également Alan ElNISMAN, « Ineffectiveness at Its Best : Fighting Terrorism with Economie Sanctions », Minnesota J. Global Trade, 2000, pp. 299 et s.

19. V. par exemple la résolution 1333 (2000) du Conseil de sécurité du 19 décembre 2000 : « 5. Décide que tous les États : a) Empêcheront la fourniture, la vente et le transfert directs ou indirects vers le territoire tenu par les Taliban en Afghanistan, tels qu'identifiés par le Comité créé par la résolution 1267 (1999) [...] d'armes et de matériels militaires associés de toutes sortes, y compris armes et muni­tions, véhicules et équipements militaires, matériels paramilitaires et pièces de rechange qui leur sont destinées ».

20. Le Conseil de sécurité a décidé dans la résolution 1333 (2000) du 19 décembre 2000 que tous les États devaient prendre des mesures pour « 8. [...] c) Geler sans retard les fonds et autres actifs financiers d'Usama bin Laden et des individus et entités qui lui sont associés, tels qu'identifiés par le Comité, y compris l'organisation Al-Qaida, et les fonds tirés de biens appartenant à Usama bin Laden et aux indi­vidus et entités qui lui sont associés ou contrôlés directement ou indirectement par eux, et veiller à ce que ni les fonds et autres ressources financières en question, ni tous autres fonds ou ressources financiè­res ne soient mis à la disposition ou utilisés directement ou indirectement au bénéfice d'Usama bin Laden, de ses associés ou de toute entité leur appartenant ou contrôlée directement ou indirectement par eux, y compris l'organisation Al-Qaida, que ce soit par leurs nationaux ou par toute autre personne se trouvant sur leur territoire, et prie le Comité de tenir, sur la base des informations communiquées par les États et les organisations régionales, une liste à jour des individus et entités que le Comité a identi­fiés comme étant associés à Usama bin Laden, y compris l'organisation Al-Qaida ; 9. Exige que les Tali­ban, ainsi que d'autres personnes mettent fin à toute activité illégale concernant les drogues et s'efforcent d'éliminer virtuellement la culture illicite du pavot à opium, dont les revenus servent à finan­cer les activités terroristes des Taliban ».

21. GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 2000-2001,1 e r février 2001, p. 21.

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international, effectué souvent à travers la criminalité organisée transnationale, n'exclut pas pour autant un financement par des activités licites.

Cette distinction a du reste été illustrée après les événements du 11 septembre 2001, l'organisation Al-Qaida et Oussama ben Laden ayant vrai­semblablement eu recours autant aux sources illicites de financement qu'aux sources l i c i t e s 2 2 . De la même manière, l'imbrication entre les deux types de sources ressortait de la résolution 51/210 de l'Assemblée générale des Nations Unies du 16 janvier 1997 demandant aux États de :

« [pjrendre des mesures pour prévenir et empêcher, par les moyens internes appro­priés, le financement de terroristes ou d'organisations terroristes, qu'il s'effectue soit de manière directe, soit indirectement par l'intermédiaire d'organisations qui ont aussi ou prétendent avoir un but caritatif, culturel ou social, ou qui sont également impliquées dans des activités illégales telles que le trafic illicite d'armes, le trafic de stupéfiants et l'extorsion de fonds, y compris l'exploitation de personnes aux fins de financer des activités terroristes, et en particulier envisager, si besoin est, d'adopter une réglementation pour prévenir et empêcher les mouvements de fonds soupçonnés d'être destinés à des fins terroristes, sans entraver en aucune manière la liberté de circulation des capitaux légitimes, et intensifier les échanges d'informations sur les mouvements internationaux de tels fonds ».

L'imbrication entre les sources illicites (a) et les sources licites (b) constitue l'un des facteurs de complexité du financement du terrorisme international 2 3 .

a) Les sources illicites de financement

L'une des principales sources de financement du terrorisme international réside dans le circuit de la criminalité. Le Conseil de sécurité a ainsi constaté, dans sa résolution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, « les liens étroits existant entre le terrorisme international et la criminalité transnationale organisée, la drogue illicite, le blanchiment d'argent, le trafic d'armes et le transfert illégal de matières nucléaires, chimiques, biologiques et autres présentant un danger mortel » 2 4 .

Selon le GAFI, qui se réfère aux rapports des États membres, la principale source de fonds illégaux provient du trafic de stupéfiants, avant les divers types

22. V. Kurt ElCHENWALD, New York Times du 10 décembre 2001, « A Nation Challenged : the Money » : le schéma décrit bien les sources à la disposition d'Oussama ben Laden et l'organisation Al-Qaida, notamment les « legitimate businesses » et les « charitable organizations ».

23. Sur ce thème, v. Jean de MAILLARD, Un monde sans loi - La criminalité financière en images, Paris, Stock, 1998, p. 49 ; Michel KOUTOUZIS, L'argent du djihad, Paris, Mille et Une Nuits, 2002, pp. 106 et s.

24. V. également les résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies : la résolu­tion 51/210 du 16 janvier 1997, la résolution 50/6 du 9 novembre 1995, la résolution 49/60 du 17 février 1995, la résolution 46/51 du 9 décembre 1991 et la résolution 44/29 du 4 décembre 1989. V. également le communiqué de presse de l'Assemblée générale AG/1194 du 1 e r octobre 2001, consacré à la séance plénière de l'Assemblée générale sur « Les sources de financement du terrorisme et l'asile politique au centre du débat à l'Assemblée générale » : le représentant du Nigeria a notamment mis l'accent sur « les liens qui existent entre le terrorisme et l'augmentation du trafic illicite des armes légères, le trafic de drogue, le blanchiment d'argent et le trafic de diamants et d'autres pierres précieuses ». V. encore les let­tres identiques datées du 1 e r août 2002, adressées au Président de l'Assemblée générale et au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général, Doc. A/57/150, annexe concernant le Rapport du Groupe de réflexion sur les implications du terrorisme pour les politiques de l'ONU, p. 8, paragraphe 25 : « Le terrorisme international et la criminalité transnationale organisée sont souvent étroitement liés, notam­ment par le trafic de drogues et d'armes et le blanchiment d'argent. Un programme global de lutte contre le terrorisme international sera donc plus efficace s'il est mené de front avec la lutte contre la criminalité transnationale organisée. »

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110 LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL

de fraude (bancaire et financière, fiscale, taxe sur la valeur ajoutée, hypothèque, vente à distance, e tc . ) 2 5 .

Ces fonds illégaux font souvent l'objet de blanchiment, qui consiste à retraiter les produits d'origine criminelle pour en masquer l'origine illégale 2 6 . Il est communément admis que le blanchiment d'argent consiste en trois phases : le placement, c'est-à-dire l'introduction des produits obtenus illégale­ment dans le circuit financier ; l'empilement, c'est-à-dire les conversions et déplacements des fonds pour éviter que leur source puisse être tracée ; l'inté­gration, c'est-à-dire la réintroduction des fonds dans des activités économiques légales 2 7 .

Les circuits de blanchiment peuvent en réalité se révéler très simples ou très complexes. À cet égard, le caractère formel ou informel du système financier n'est pas à négliger 2 8 . Dans un système financier formel dans lequel il existe une obli­gation de déclaration systématique des opérations en espèces, les dépôts peuvent échapper aux contrôles en étant fractionnés en-dessous du seuil fixé pour les déclarations (smurfing). Dans un système financier informel, les bureaux de change peuvent jouer un rôle dans le blanchiment de sommes en convertissant de l'argent liquide sous forme de devises et sans enregistrement de l'identité des auteurs de la transaction ; de la même manière, des réseaux officieux peuvent être mis en place : il s'agit le plus souvent de systèmes traditionnels tels que les notoires « hawalas » (technique de compensation financière effectuée par les membres d'une même communauté ethnique dans leurs transactions commer­c ia l e s ) 2 9 ou encore les fourmis japonaises 3 0 . Ces techniques traditionnelles contrastent avec les techniques plus sophistiquées utilisant des produits bour­siers sous couvert de spéculation 3 1 .

L'une des questions soulevées par les experts en la matière est celle de savoir si les techniques utilisées pour le financement du terrorisme interna­tional sont les mêmes que celles de la criminalité transnationale. Certains particularismes de méthode ont été notés par les experts du GAFI en ce qui concerne les groupes terroristes : « les mouvements de fonds clandestins en espèces (par des passeurs ou par des envois massifs d'espèces), les dépôts ou les retraits fractionnés sur des comptes bancaires, les achats de diverses caté­gories d'instruments monétaires (chèques de voyage, chèques bancaires, mandats), l'utilisation de cartes de crédit ou de débit, et les virements. Il semble aussi que certaines formes d'activités bancaires souterraines (notam-

25. GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 1999-2000, 3 février 2000, p. 13. 26. Sur le blanchiment d'argent, v. Dossier « Le blanchiment d'argent », Banque Magazine, n° 639,

septembre 2002, notamment la contribution de Noël PONS et André CUISSET, « Est-il possible d'identifier les circuits ? », ibid., pp. 24-27 ; Jean de MAILLARD, op. cit., pp. 88 et s.

27. V. notamment les documents du GAFI, disponibles sur son site internet [www.fatf-gafi.org] ; pour une typologie, v. notamment GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 1999-2000, 3 février 2000. V. également Groupe d'action financière présidé par Denis Samuel-Lajeunesse, La lutte contre le blanchiment de capitaux, Rapport demandé par les chefs d'État lors du Sommet de l'Arche, La Documentation française, 1990, pp. 91 et s. Contra, v. Jean de MAILLARD, op. cit., pp. 88-104.

28. V. Groupe d'action financière présidé par Denis SAMUEL-LAJEUNESSE, op. cit., pp. 16 et s. 29. Sur les « hawalas », v. notamment Jean de MAILLARD, op. cit., p. 99 ; Nicole M. HEALY, « The

Impact of September l l t h on Anti-Money Laundering Efforts, and" the Europe an Union and Com-monwealth Gatekeeper Initiatives », The Int'l Lawyer, 2002, pp. 733 et s.

30. Il s'agit d'une technique rudimentaire consistant à faire acheter avec de l'argent sale des pro­duits de luxe par des touristes, qui rapatrient ensuite ces produits dans leur pays pour leur revente dans des boutiques spécialisées, permettant ainsi l'intégration des revenus de la vente ; v. Jean de Maillard, op.cit., pp. 88-89.

31. V. les développements de Jean de Maillard sur le blanchiment parallèle sur plusieurs marchés financiers, op .cit., pp. 110-111.

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LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME INTERNATIONAL 111

ment le système hawala) jouent un rôle dans le transfert des fonds à des fins terroristes » 3 2 . Les études menées tendent à établir que les techniques sont les mêmes, mais que les objectifs sont différents : « En ce qui concerne les méthodes uti l isées par les groupes terroristes pour blanchir des fonds d'origine criminelle, les experts ont fourni des exemples qui semblent indiquer que le terrorisme et la criminalité organisée ont recours aux mêmes techniques. Cela étant, bien que les méthodes puissent être les mêmes, les deux formes d'acti­vité criminelle diffèrent dans leurs objectifs ultimes. À la différence des trafi­quants de drogue et autres groupes criminels organisés, qui sont principale­ment motivés par l'appât du gain, les groupes terroristes visent généralement des objectifs non financiers. Certains experts ont fait valoir que, malgré la similarité des méthodes et la diversité des motivations, cette activité pouvait ne pas constituer du blanchiment en soi dans le cas où les fonds n'ont pas pour origine une activité criminelle (par exemple, s'ils proviennent de dons ou de contributions) » 3 3 .

Le débat relatif aux méthodes uti l isées par les terroristes cache en réalité un autre débat : il existe des modes licites de financement du terrorisme international.

b) Les sources licites de financement

Les modes licites de financement du terrorisme international comprennent notamment le financement étatique, les dons et contributions volontaires ou tout type de contributions à des organismes à but non lucratif effectué pour des motifs caritatifs, religieux, culturels, éducatifs, sociaux ou confraternels. C'est de cette catégorie de financement, qui n'est pas nouvel le 3 4 , que relève en particulier la zakât, concept islamique correspondant à l'aumône obligatoire versée par le musulman à titre de solidarité et pouvant être utilisée au bénéfice de la commu­n a u t é 3 5 . Dans les enquêtes menées après les événements du 11 septembre 2001, les sources financières d'Oussama ben Laden et de l'organisation Al-Qaida issues

32. GAFI, Directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de finance­ment du terrorisme, 24 avril 2002, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/rerFinance_fr.htm], p. 5.

33. V. GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 2000-2001, 1 e r février 2001, p. 21. V. également Jean de MAILLARD, op.cit., pp. 88-104, procédant à une classification des circuits par destination de l'argent blanchi. V. encore Yves GODIVEAU, « La lutte contre l'argent du terrorisme, la vision d'un policier », in Dossier « Le blanchiment d'argent », op. cit., pp. 36-38, pp. 37-38 : « Peut-on assi­miler le financement du terrorisme au blanchiment d'argent ? Peut-on faire cohabiter dans une même enceinte, blanchiment et noircissement ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit. D'un point de vue analytique, le financement du terrorisme se présente comme l'opération inverse du blanchiment. Dans le premier cas, ce sont souvent des fonds propres qui sont utilisés à des fins criminelles. Dans la seconde hypothèse, ce sont des fonds criminels que l'on destine à des fins propres. Le rapprochement avec le blanchiment et donc le GAFI ne peut se fondre sur cette analyse. En revanche, une communauté d'intérêt peut être trou­vée dans l'analyse des circuits financiers que les fonds empruntent pour arriver à destination. L'étude des sources du financement du terrorisme enseigne en effet que ce sont des canaux identiques qui sont utilisés par les blanchisseurs et les financiers du terrorisme ».

34. L'assassinat de l'Archiduc François-Ferdinand et de son épouse le 28 juin 1914 à Sarajevo a ainsi été financé par la collecte d'argent auprès de riches commerçants bosniaques dans le prétendu but de créer des écoles en Herzégovine : v. Alain Decaux, C'était le xx> siècle, Paris, pp. 113 et s.

35. La zakât et son lien avec le terrorisme a été étudié par Michel KOUTOUZIS, op. cit., notamment pp. 106-108 : « Bien sûr, l'opium finance les guerres afghanes, comme il finance les insurrections, les gué­rillas et le terrorisme islamiques. Non pas directement, mais par ricochet, à travers la zakât, des fonds saoudiens et des ONG islamistes pakistanaises - c'est-à-dire, une fois que l'ensemble des cycles de blan­chiment et de réintégration des bénéfices des trafics transformera, par un coup de baguette magique, une partie de ces mêmes bénéfices en 'dons issus des plus-values sur les pétrodollars et la zakât'. [...] Si le Département d'État américain semble 'découvrir" enfin le rôle de la zakât dans le financement des camps de Ben Laden, et se préoccupe des banques islamistes, il pèche toujours par amnésie sélective [...] ».

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des transactions l é g a l e s 3 6 et des organisations de charité ont ainsi été mises en valeur 3 7' .

La distinction entre les sources licites et illicites n'est pas simplement conceptuelle, mais a une portée pratique importante. Selon le GAFI, l'existence de sources légales de financement peut rendre la détection du phénomène plus complexe : « Lorsque les organisations terroristes obtiennent des soutiens finan­ciers à partir de sources légales (dons, ventes de publications, etc.) certains facteurs compliquent les opérations de détection et de suivi de ces fonds. Par exemple, les fondations caritatives ou les organismes à but non-lucratif et autres entités légales joueraient éventuellement un rôle important dans le financement de certains groupes terroristes. L'origine apparemment légale de ce financement peut signifier, par exemple, qu'il n'y a guère d'indicateurs susceptibles de mettre en évidence le lien entre une transaction financière individuelle ou une série de transactions et des activités terroristes » 3 8 .

Par ailleurs, les mesures pouvant être prises par les États pour combattre le blanchiment d'argent peuvent varier selon que les fonds sont issus d'actes crimi­nels ou d'un acte volontaire de contribution. Le GAFI a ainsi mené une étude afin :

« d'examiner de quelle manière les groupes terroristes transfèrent ou dissimulent des fonds pour financer leurs activités. L'un des objectifs de cette étude consistait à voir s'il existait des différences significatives entre les méthodes utilisées par les terroristes et celles utilisées par la criminalité organisée. Les éléments rassemblés par les experts semblent indiquer tout d'abord qu'il y a peu de différences entre les sources de financement des deux groupes : les terroristes se livrent à des activités criminelles pour financer leurs opérations (ils ont quelquefois recours à des dons et contributions) à peu près de la même manière que les représentants du crime orga­nisé. Dans les deux cas, les méthodes utilisées pour blanchir les fonds sont quasi­ment identiques. De la même façon, dans un grand nombre de pays, les actions terroristes, voire l'affiliation à un groupe terroriste, constitue un délit grave. La différence réside dans les contre-mesures éventuellement mises en œuvre par les différentes juridictions. Certains pays ne sont pas en mesure d'invoquer la législa­tion anti-blanchiment pour identifier ou saisir de l'argent supposé appartenir à des terroristes si les fonds ont leur origine dans des contributions volontaires et non dans un acte délictueux » 39.

C'est là que réside l'un des obstacles majeurs à la lutte contre le financement du terrorisme international : le contrôle de l'État ne peut qu'être limité lorsque les fonds proviennent d'une source de financement licite.

36. V. Kurt ElCHENWALD, op. cit. : au titre des « legitimate businesses » sont inclues l es transactions suivantes : « While in Sudan, Osama bin Laden had an array of businesses - including a construction company, 'a bakery and a cattle-breeding concern - which were controlled by a Sudanese holding com­pany, Wadi al-Aqiq. While many of those enterprises are believed to have been liquidated, Al Qaeda conti­nued to generate money by operating through legitimate businesses ».

37. Au titre des « charitable organizations » sont inc luses les transactions su ivantes : « After the Soviet invasion of Afghanistan, Mr. Bin Laden learned that charitable groups could be used as fronts to raise money for jihad. Al Qaeda works with charitable fronts that direct money to terrorism, and has infil­trated legitimate groups for the purpose of diverting humanitarian contributions. Some Arab business­men have contributed to these groups », ibid.

38. GAFI, Directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de financement du terrorisme, 24 avril 2002, sur le s i te internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm], p. 6.

39. V. GAFI, Rapport sur les typologies du blanchiment de capitaux, 2000-2001, 1 e r février 2001, p. 31.

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II. - LES MODALITÉS DE LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT D U TERRORISME INTERNATIONAL

A. Le cadre institutionnel

C'est avant tout par une action de coopération que les États mènent la lutte contre le financement du terrorisme in ternat iona l 4 0 , notamment au sein d'organisations intergouvernementales, régionales ou internationales. Au premier rang des organisations régionales, il faut mentionner l'Union euro­p é e n n e 4 1 , au sein de laquelle a été adoptée la recommandation du Conseil du 9 décembre 1999 sur la coopération en matière de lutte contre le financement du terrorisme, notamment en matière d'échange d'informations 4 2 . En ce qui concerne les organisations internationales, le rôle de l'ONU se révèle primor­dial, autant par le cadre offert à la négociation d'instruments internationaux, notamment la Convention de 1999 sur la répression du financement du terro­risme international, que par l'intervention des organes (Assemblée générale et Conseil de sécurité) adoptant des mesures de recommandat ion 4 3 ou de sanction.

L'une des difficultés se rapportant à l'intervention des Nations Unies en matière de lutte contre le financement du terrorisme international tient au rôle du Conseil de sécurité agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, lui permettant de mener une action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression, pour adopter des mesures à

40. Par ailleurs, le rôle des groupements privés en matière de lutte contre le financement du terro­risme n'est pas à négliger. Parmi les groupements les plus actifs, on peut compter le Groupe Egmont, organisme informel des agences gouvernementales spécialisées dans la lutte contre le blanchiment mis en place en 1995, qui se spécialise dans la coordination des renseignements d'ordre financier et regroupe les cellules gouvernementales de renseignements financières (v. le site internet [www.oecd.org/fatf/Ctry-orgpages/org-egmont_fr.htm]) ou les Principes de Wolfsberg associant, depuis 2000, douze grandes ban­ques internationales menées par le Crédit suisse groupe (CSG) et l'Union de banques suisses (UBS) et établissant un code de conduite commun destiné à enrayer le financement du terrorisme (v. le site inter­net [www.wolfsberg-principles.com/wolfsberg_statement.html] ).

41. Au titre d'autres organisations régionales actives en matière de lutte contre le financement du terrorisme international, il faut compter, notamment en matière de blanchiment de capitaux, l'OCDE, le Conseil de coopération du Golfe, Asia-Pacific Economie Coopération (APEC), Asia/Pacific Group (APG) et l'Organisation de coopération de Shangai.

42. Recommandation n° 1999/C 373/01 du 9 décembre 1999 sur la coopération en matière de lutte conre le financement du terrorisme, J.O.C.E. C 373 du 23 décembre 1999, p. 1. Par ailleurs, l'action menée par l'Union européenne inclut la coopération judiciaire et policière : en particulier, certains orga­nismes ont été mis en place par l'Union en matière de coopération policière (Europol) et en matière de coopération judiciaire (Eurojust). Les règles adoptées par l'Union incluent par exemple la décision-cadre du 13 juin 2002 par laquelle les États membres se sont engagés à exécuter tout mandat d'arrêt européen sur le fondement de la reconnaissance mutuelle des décisions entre les États membres, v. décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remises entre États membres n° 2002/584/JAI, J.O.C.E. L 190 du 18 juillet 2002, pp. 1-20.

43. V. déjà la résolution 51/210 du 16 janvier 1997 de l'Assemblée générale des Nations Unies, demandant aux États de « [p] rendre des mesures pour prévenir et empêcher, par les moyens internes appropriés, le financement de terroristes ou d'organisations terroristes, qu'il s'effectue soit de manière directe, soit indirectement par l'intermédiaire d'organisations qui ont aussi ou prétendent avoir un but caritatif, culturel ou social, ou qui sont également impliquées dans des activités illégales telles que le trafic illicite d'armes, le trafic de stupéfiants et l'extorsion de fonds, y compris l'exploita­tion de personnes aux fins de financer des activités terroristes, et en particulier envisager, si besoin est, d'adopter une réglementation pour prévenir et empêcher les mouvements de fonds soupçonnés d'être destinés à des fins terroristes, sans entraver en aucune manière la liberté de circulation des capitaux légitimes, et intensifier les échanges d'information sur les mouvements internationaux de tels fonds ».

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portée générale 4 4 . La question a été soulevée en particulier en ce qui concerne la résolution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, qui constitue l'une des résolutions les plus importantes en matière de financement du terrorisme international et par laquelle le Conseil de sécurité a demandé aux États « de collaborer d'urgence pour prévenir et réprimer les actes de terrorisme, notam­ment par une coopération accrue et l'application intégrale des conventions internationales relatives au terrorisme, [et de] compléter la coopération inter­nationale en prenant des mesures supplémentaires pour prévenir et réprimer sur leur territoire, par tous les moyens licites, le financement et la préparation de tout acte de terrorisme » 4 5 . Par ailleurs, agissant en vertu du Chapitre VII, le Conseil « 1. Décide que tous les États : a) Préviennent et répriment le finan­cement des actes de terrorisme ; b) Érigent en crime la fourniture ou la collecte délibérée par leurs nationaux ou sur leur territoire, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, de fonds que l'on prévoit d'utiliser ou dont on sait qu'ils seront utilisés pour perpétrer des actes de terrorisme ; c) Gèlent sans attendre les fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques des personnes qui commettent, ou tentent de commettre, des actes de terro­risme, les facilitent ou y participent, des entités appartenant à ces personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles, et des personnes et entités agissant au nom, ou sur instruction, de ces personnes et entités, y compris les fonds provenant de biens appartenant à ces personnes, et aux personnes et entités qui leur sont associées, ou contrôlés, directement ou indirectement, par elles ; d) Interdisent à leurs nationaux ou à toute personne ou entité se trou­vant sur leur territoire de mettre des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ou services financiers ou autres services connexes à la disposition, directement ou indirectement, de personnes qui commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent, d'entités appartenant à ces personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles et de personnes et entités agissant au nom ou sur instruction de ces personnes ».

De manière générale, le recours au Chapitre VII dans les résolutions du Conseil de sécurité consacrées à la lutte contre le terrorisme international est justifié par la menace à la paix et à la sécurité internationales 4 6 . La princi­pale difficulté de la résolution 1373 relève de ce qui a été désigné comme la fonction normative exercée par le Conseil de s écur i t é 4 7 , ce qui a pu donner lieu à des critiques, autant du fait d'un bouleversement du processus normatif

44. Si le recours au Chapitre VII devient une sorte d'évidence après les événements du 11 septem­bre 2001, il existait auparavant : v. par exemple la résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999, la résolu­tion 1333 (2000) du 19 décembre 2000 et la résolution 1363 (2001) du 30 juillet 2001.

45. V. déjà la résolution 1269 (1999) du 19 octobre 1999 dans laquelle le Conseil de sécurité souli­gne « le rôle décisif de l'Organisation des Nations Unies dans le renforcement de la coopération interna­tionale destinée à lutter contre le terrorisme et souligne qu'il importe de resserrer la coordination entre États, organisations internationales et organisations régionales ».

46. V. notamment la résolution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, la résolution 1368 (2001) du 12 septembre 2001, ainsi que la résolution 1333 (2000) du 19 décembre 2000.

47. L'ONU elle-même ne conteste pas la portée très générale de la résolution 1373, v. les lettres identiques datées du 1 e r août 2002, adressées au Président de l'Assemblée générale et au Président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général, Doc. A/57/150, annexe concernant le Rapport du Groupe de réflexion sur les implications du terrorisme pour les politiques de l'ONU, p. 9, paragraphe 32 : « [...] C'est l'une des résolutions du Conseil de sécurité dont la portée est la plus vaste puisqu'elle vise à faire en sorte que toute personne qui participe au financement, à la planification, à la préparation et/ou à la commis­sion d'actes terroristes ou appuie des actes terroristes soit traduite en justice et que les actes terroristes soient considérés par la législation interne des États comme des crimes graves et soient sanctionnés comme tels. » (souligné par nous).

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international qu'en raison du caractère lacunaire du régime ainsi instauré par la résolution 13 7 3 4 8 .

Pour la mise en œuvre des mesures préconisées, le Conseil de sécurité a mis en place un comité composé de tous les membres du Conseil et chargé de suivre l'application de ses résolutions, avec l'aide d'experts. Dans le contexte de la réso­lution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, par exemple, le Conseil de sécurité a demandé aux États de faire un rapport au Comité dans les 90 jours sur les mesures prises pour donner effet à la résolution 4 9 . Par ailleurs, la fonction de régulation du Conseil de sécurité peut s'exercer de façon plus ponctuelle, notam­ment pour prendre des mesures de sanction à l'égard de groupes ou d'individus dont on soupçonne qu'ils financent le terrorisme international. Par exemple, le Conseil de sécurité a décidé dans la résolution 1390 (2002) du 16 janvier 2002 de frapper de sanctions l'organisation Al-Qaida, les Taliban et autres personnes, groupes et entreprises figurant sur une liste tenue par le Comité créé en applica­tion du paragraphe 6 de la résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999 5 0 .

L'ONU n'est pas la seule enceinte de coopération entre États pour la lutte contre le financement du terrorisme international. D'autres types d'organisations interna­tionales intergouvernementales jouent un rôle non négligeable, dont le GAFI, créé pour lutter contre le blanchiment d'argent et constituant aujourd'hui l'un des orga­nismes majeurs dans la lutte contre le financement du terrorisme international 5 1 : depuis octobre 2001, le GAFI a étendu sa mission au-delà du blanchiment d'argent et

48. Nicolas ANGELET, « Vers un renforcement de la prévention et la répression du terrorisme par des moyens financiers et économiques ? », in Le droit international face au terrorisme -Après le 11 septembre 2001, op. cit., pp. 219-237. V. également Paul SZASZ, « The Security Council Starts Legislating », A.J.I.L., 2002, vol. 4, pp. 901-905, p. 902 : « On September 28, 2001, the Security Council, reacting to the events of September 11, departed from its previous limited and cautious practice. Acting on a draft proposed by the United States and explicitly referring to Chapter VII of the Charter, the Council adopted Resolution 1373 (2001), by which it decided in two operative paragraphs 'that all States shall' take certain actions against the financing of terrorist activities, as well as a miscellany of other actions designed to prevent any sup­port for terrorists and terrorist activities. A further operative paragraph 'calls upon all States' to take cer­tain additional actions. [...] In the past, as pointed out above, the Security Council has often required states to take certain actions, such as to implement sanctions against a particular state or to cooperate with and ad hoc tribunal, but these requirements always related to a particular situation or dispute and, even though not explicitly limited in time, would naturally expire when the issue in question and all its consequences were resolved. By contrast, as Resolution 1373, while inspired by the attacks of September 11, 2001, is not specifically related to these (though they are mentioned in the preamble) and lacks any expli­cit or implicit time limitation, a significant portion of the resolution can be said to establish new binding rules of international law - rather than mere commands relating to a particular situation - and, moreo­ver, even creates a mechanism for monitoring compliance with them ». L'auteur critique par ailleurs les États-Unis, inspirateurs de cette résolution, elle-même inspirée de la Convention sur la répression du financement du terrorisme international de 1999, mais n'ayant pas eux-mêmes ratifié la Convention, v. p. 903, note 22.

49. V. également la résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999 du Conseil de sécurité, créant déjà un tel comité pour sa mise en application, dont le rôle est rappelé dans la résolution 1333 (2000) du 19 décembre 2000 et la résolution 1363 (2001) du 30 juillet 2001.

50. Cette préoccupation a été renouvelée en 2003, par la résolution 1456 (2003) du Conseil de sécu­rité adoptée le 20 janvier 2003 dans laquelle le Conseil réaffirme qu'il faut « renforcer d'urgence les mesures visant à détecter et arrêter le mouvement des ressources et des capitaux pouvant servir des objectifs terroristes » et exhorte les États à devenir parties à toutes les conventions relatives au terro­risme, « en particulier la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999 » et à « [c]oopérer étroitement en vue d'appliquer pleinement les sanctions contre les terroristes et leurs associés, en particulier Al-Qaida et les Taliban et leurs associés, comme indiqué dans les résolutions 1267 (1999), 1390 (2002) et 1455 (2003), de prendre d'urgence les mesures voulues pour leur interdire l'accès aux ressources financières dont ils ont besoin pour agir et de coopérer pleinement avec le Groupe de suivi créé par la résolution 1363 (2001) ». V. également la résolution 1455 (2003) adoptée par le Conseil de sécurité le 17 janvier 2003.

51. Il existe des organismes régionaux du même type que le GAFI : Groupe d'action financière des Caraïbes (GAFIC), Groupe Asie/Pacifique sur le blanchiment de capitaux (GAP), Conseil de l'Europe

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entend combattre désormais le financement du terrorisme de manière générale 5 2 . Il a ainsi adopté en octobre 2001 huit Recommandations Spéciales en matière de finan­cement du terrorisme et se rapportant à la ratification et l'application des instru­ments de l'ONU (la Convention de 1999 autant que les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité), à Incrimination du financement du terrorisme et du blanchi­ment de capitaux qui s'y rattache, au gel et à la confiscation des biens des terroristes, à la déclaration des transactions suspectes liées au terrorisme, à la coopération inter­nationale, à la remise de fonds alternative, aux virements électroniques et aux orga­nismes à but non lucratif 5 3. Dans son dernier rapport annuel, le GAFI a indiqué, à partir des auto-évaluations des membres du groupe, que la recommandation spéciale relative au gel et à la confiscation des biens des terroristes était celle qui obtenait le meilleur degré d'application 5 4. Par ailleurs, le GAFI a émis d'autres recommanda­tions, dont les directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de financement du terrorisme 5 5 , ou les directives relatives à la lutte contre l'utilisation abusive des organismes à but non lucratif 5 6.

La lutte contre le financement du terrorisme international ne peut se dispenser des mesures que chaque État est amené à prendre dans son propre ordre juridique. Ces mesures sont de deux ordres : il peut s'agir soit de mesures que sont encouragés à prendre les États dont on soupçonne qu'ils financent direc­tement les organisations et groupes terroristes 5 1 , soit de mesures prises par les États non impliqués directement dans le terrorisme, mais dont le territoire et les institutions peuvent être utilisés pour créer ou nourrir des circuits de finance­ment du terrorisme. Dans ce second cas, les États sont amenés à adopter des mesures, unilatéralement ou en application d'instruments internationaux tels que les résolutions du Conseil de sécurité ou les conventions internationales telles que la Convention de 1999.

B. Les mesures

Une typologie classique des mesures de lutte contre le financement du terro­risme international oppose les mesures de prévention aux mesures de

(Suite de la note 51, page précédente) (Comité MONEYVAL, anciennement PC-R-EV), Groupe anti-blanchiment de l'Afrique orientale et aus­trale (GABAOA) et Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux en Amérique du sud (GAFISUD).

52. V. le site internet [wwwl.oecd.org/fatf/TerFinance_fr.htm]. 53. GAFI, Notes directives aux recommandations spéciales relatives au financement du terrorisme et

au questionnaire d'auto-évaluation, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm], passim.

54. V. GAFI, Rapport annuel 2001-2002, 21 juin 2002, p. 5, disponible sur le site du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/FATDocs_fr.htm].

55. V. GAFI, Directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de financement du terrorisme, 24 avril 2002, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm]. Le document contient des exemples intéressants relatifs aux caractéristiques des transactions financières susceptibles d'appeler une vigilance renforcée : les comptes, les dépôts et retraits, les virements, les caractéristiques du client ou de son activité commerciale ou les transactions liées à des lieux sensibles.

56. V. GAFI, La lutte contre l'utilisation abusive des organismes à but non lucratif - Meilleures pra­tiques internationales, 11 octobre 2002, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm].

57. Dans ce sens, v. la résolution 53/108 du 26 janvier 1999 dans laquelle l'Assemblée générale des Nations Unies « demande de nouveau aux États de s'abstenir d'entraîner des terroristes ou de financer ou d'encourager des activités terroristes ou d'apporter un autre soutien quelconque à de telles activités ». Dans le même sens, v. la résolution 52/165 du 15 décembre 1997, la résolution 51/210 du 16 janvier 1997 et la résolution 49/60 du 17 février 1995 adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies.

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répression ; la résolution 1373 (2001) des Nations Unies, par exemple, décide que les États « [préviennent et répriment le financement des actes de terrorisme ». Cette typologie, utile pour rendre compte du type d'action que les États sont en mesure de prendre, ne peut cependant être facilement appliquée pour décrire les mesures effectivement prises, dans la mesure où une même mesure peut relever de la répression autant que de la prévention, l'exemple type en étant le gel de fonds. Une typologie alternative, que nous proposons d'effectuer, pourrait consister à distinguer entre les mesures à portée générale visant à établir un cadre juridique d'intervention (essentiellement l'adoption de lois ou de réglementations pour les États, ou de directives et recommandations par les organisations intergouvernementales) (a) et les mesures individuelles frappant les auteurs d'actes terroristes particuliers (b).

a) L'adoption de mesures à portée générale

Les mesures à portée générale concernent essentiellement celles que les États s'engagent à prendre, dans leur ordre juridique interne, aussi bien pour la prévention que pour la répression du financement du terrorisme international. Ces mesures se rapportent à l'incrimination du financement du terrorisme inter­national (i) et à l'adoption de règles relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux (ii).

(i) L'incrimination du financement du terrorisme international

Après les événements du 11 septembre 2001, le Conseil de sécurité a décidé, dans sa résolution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, que tous les États « [é]rigent en crime la fourniture ou la collecte délibérée par leurs nationaux ou sur leur territoire, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, de fonds que l'on prévoit d'utiliser ou dont on sait qu'ils seront utilisés pour perpétrer des actes de terrorisme » (point 1 (b)).

L'incrimination du financement du terrorisme international avait déjà été consacrée, sur un plan international, par la Convention de 1999. L'article 2 de cet instrument prévoit que :

« [cfommet une infraction au sens de la présente Convention toute personne qui, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, illicitement et délibé­rément, fournit ou réunit des fonds dans l'intention de les voir utilisés ou en sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou en partie, en vue de commettre : a) Un acte qui constitue une infraction au regard et selon la définition de l'un des traités énumérés en annexe ; b) Tout autre acte destiné à tuer ou blesser grièvement un civil, ou toute autre personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé, lorsque, par sa nature ou son contexte, cet acte vise à intimider une population ou à contraindre un gouvernement ou une organisation internationale à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque » 58.

Aux termes de la Convention, l'infraction peut être constituée en cas de complicité (article 2 (5)) ou de tentative (article 2 (4)), sachant qu'il « n'est pas nécessaire que les fonds aient été effectivement utilisés pour commettre une infraction » (article 2 (3)). Les États s'engagent à prendre des mesures pour ériger les infractions visées à l'article 2 en infractions pénales au regard de leur droit

58. La définition des infractions dans la Convention est dépolitisée : « aucune des infractions visées à l'article 2 n'est considérée comme une infraction politique, comme une infraction connexe à une infrac­tion politique ou comme une infraction inspirée par des mobiles politiques » (article 14).

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interne et les punir de peines appropriées (article 4 ) 5 9 . Par ailleurs, les États peuvent prévoir, outre la responsabilité pénale des personnes physiques, la responsabilité pénale, civile ou administrative des personnes morales ayant commis les infractions visées (article 5 (1)) ou des sanctions dissuasives d'ordre pécuniaire (article 5 (3)).

Les types de compétence étatique que peuvent exercer les États aux termes de la Convention pour incriminer le financement du terrorisme international sont classiquement la compétence territoriale 6 0 , la compétence personnelle - active 6 1

ou p a s s i v e 6 2 - ou la compétence extra-territoriale, par exemple en ce qui concerne les services de l'État à l'étranger 6 3 . Par ailleurs, la Convention permet l'exercice d'une compétence lorsque le but recherché était ou le résultat de l'infraction fut de contraindre l'État lui-même « à accomplir un acte quelconque ou à s'en abstenir » (article 7 (2)(c)). Enfin, d'autres types de compétence sont permis, avec un lien de rattachement territorial comme c'est le cas d'une infrac­tion commise par un apatride ayant sa résidence habituelle sur le territoire d'un État (article 7 (2)(d)), ou sans lien de rattachement autre que la présence de l'auteur présumé de l'infraction sur le territoire de l'État, dans l'hypothèse où cet État décide de ne pas extrader l'individu vers un autre État ayant établi sa compétence (article 7 (4)).

Les États peuvent, en application de la Convention de 1999, adapter leur législation en matière d'extradition, afin de ranger les infractions relatives au financement des actes de terrorisme parmi les infractions donnant lieu à extradi­tion (article 11) et de mettre en œuvre la règle aut dedere aut judicare (article 10). Ils peuvent également, en application de la règle de coopération entre États, notamment en matière d'entraide judiciaire (article 12), adapter leur législation afin que le secret bancaire ne puisse être invoqué pour refuser l'entraide judi­ciaire (article 12 (2)).

La Convention de 1999 met ainsi en place un régime d'incrimination de l'acte de financement, puni comme tel et de façon autonome et non comme l'accessoire d'un acte de terrorisme. Il reste aux États parties d'en tirer les conséquences dans leur ordre juridique 6 4 .

59. De manière similaire, le Conseil de sécurité a décidé dans sa résolution 1373 (2001) que les États devaient veiller « à ce que toutes personnes qui participent au financement, à l'organisation, à la préparation ou à la perpétration d'actes de terrorisme ou qui y apportent un appui soient traduites en justice, à ce que, outre les mesures qui pourraient être prises contre ces personnes, ces actes de terro­risme soient érigés en crimes graves dans la législation et la réglementation nationales et à ce que la peine infligée soit à la mesure de la gravité de ces actes » (point 2 (e)).

60. Aux termes de l'article 7 (l)(a), un État peut être compétent lorsque « [1]'infraction a été com­mise sur son territoire ». V. également l'article 7 (2)(a) selon lequel un État est compétent lorsque « W]'infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commission d'une infraction [...] sur son territoire [...] ».

61. Un État est encore compétent lorsque « II]'infraction a été commise par l'un de ses nationaux » (article 7 (l)(c)).

62. Un État est compétent lorsque « [1]'infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la commis­sion d'une infraction [...] contre l'un de ses nationaux » (article 7 (2)(a)).

63. Un État est ainsi compétent lorsque « [1]'infraction avait pour but, ou a eu pour résultat, la com­mission d'une infraction [...] contre une installation publique dudit État en dehors de son territoire, y compris ses locaux diplomatiques ou consulaires » (article 7 (2)(b)).

64. Il est intéressant de relever que certains États qui pourraient avoir un rôle important à jouer en matière de lutte contre le financement du terrorisme, n'ont pas, à ce jour, ratifié la Convention, par exemple certains centres offshore (les Bahamas, les îles Cook, le Liechtenstein ou le Luxembourg) ou certains États impliqués ou concernés par le terrorisme (le Bahrein, le Kenya, la Somalie, la Suisse, l'Iraq, l'Iran, l'Afghanistan, la Syrie ou la Corée du Nord (ces cinq derniers États n'ont pas même signé la Convention de 1999)).

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En droit français, l'acte de financement, direct ou indirect, était incriminé comme un acte terroriste à part entière par l'article 434-6 du Code pénal dès avant l'adoption de la Convention 6 5 , ce qui explique que la ratification de la Convention par la France n'ait pas donné lieu à une adaptation de la législa­tion 6 6 . La législation anglaise a été l'une des premières à prévoir l'incrimination du financement du terrorisme dans le Prévention ofTerrorism Act de 1989 6 7 ; une loi adoptée en 2000, le Terrorism Act, étend la portée de ces dispositions, qui s'appliquaient jusque-là aux actions terroristes irlandaises et à certaines formes de terrorisme international, à toutes les formes de terrorisme 6 8 ; une loi adoptée en 2001 en réaction aux événements du 11 septembre pour éradiquer la menace aux intérêts anglais, permet enfin le gel des avoirs des Gouvernements et résidents étrangers dont les actions ont constitué ou pourraient constituer une menace pour l'économie britannique ou pour des nationaux anglais 6 9 . La Suisse, qui n'est pas partie à la Convention de 1999, a intégré dans sa législation la pour­suite et la répression du financement du terrorisme, assurées par l'article 260 ter du Code pénal suisse punissant l'appartenance à une organisation criminelle, l'article 305 bis du Code pénal suisse en matière de blanchiment d'argent et l'article 305 ter du Code pénal suisse relatif au défaut de vigilance en matière d'opérations financières. Il a pu être soutenu que ces mesures ont leurs limites, l'article 260 ter ne punissant par exemple le financement que si l'organisation concernée a effectivement eu recours à des moyens criminels 7 0 .

Outre l'incrimination pénale du financement du terrorisme international, certaines législations étatiques permettent de rechercher la responsabilité civile des personnes mises en cause dans des actes de terrorisme. La loi américaine relative aux mesures anti-terroristes (Antiterrorism and Effective Death Penalty Act) de 1996 a par exemple modifié la législation relative à l'immunité de juridic­tion des États, le Fédéral Sovereign Immunities Act, afin de permettre les actions

65. L'article 434-6 du Code pénal résultant de la loi n° 96-647 du 22 juillet 1996 se lit comme suit : « Le fait de fournir à la personne auteur ou complice d'un crime ou d'un acte de terrorisme puni d'au moins dix ans d'emprisonnement un logement, un lieu de retraite, des subsides, des moyens d'existence ou tout autre moyen de la soustraire aux recherches ou à l'arrestation est puni de trois ans d'emprison­nement et de 45 000 euros d'amende. Les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise de manière habituelle ».

Par ailleurs, la loi n° 96-393 du 14 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence aggrave le risque pénal encouru par les dirigeants bancaires en matière de blanchiment de capitaux, v. J.O. des 13 et 14 mai 1996, pp. 7211-12 ; v. Anne-José FULGERAS, « Risque pénal du dirigeant : la nouvelle donne », in Dossier « Le blanchiment d'argent », op. cit., pp. 28-33.

66. Selon André Rouvière, sénateur et rapporteur au Sénat, le droit français tel qu'il résulte de l'article 434-6 du Code pénal, « réprim[e] déjà les actes de financement du terrorisme. », v. Rapport fait au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant la ratification de la Convention internationale pour la répression du financement du terro­risme, Document Sénat n° 355, Session ordinaire de 2000-2001, Annexe au procès-verbal de la séance du 6 juin 2001.

67. V. Prevention ofTerrorism (Temporary Provisions) Act 1989, disponible sur le site du Gouverne­ment britannique [www.hmso.gov.uk/acts/actsl989/Ukpga_19890004_en_l.htm], troisième partie de la loi relative à la « Financial Assistance for Terrorism », Sections 9 à 13.

68. V. Terrorism Act 2000, disponible sur le site internet du Gouvernement britannique [www.hmso.gov.uk/acts/acts2000/00011-d.htm], troisième partie relative à la « Terrorist Property », Sec­tions 14 à 31.

69. Loi du 14 décembre 2001 intitulée Anti-terrorism, Crime and Security Act 2001, disponible sur le site internet du Gouvernement britannique [www.hmso.gov.uk/acts/acts2001/20010024.htm], deuxième partie relative aux « Freezing orders », Sections 4 à 16.

70. Sur cet ensemble de dispositions, v. Patrick BLASER, « Financement international du terrorisme : les obligations des banquiers en Suisse », Banque & Droit, n° 86, novembre-décembre 2002, pp. 21-27, p. 23. L'auteur est relativement critique en ce qui concerne l'efficacité de la législation suisse en matière de financement du terrorisme international, contrairement à la position exprimée par la Suisse dans son rapport du 19 décembre 2001 à l'ONU, ibid., p. 27.

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civiles en dommages et intérêts à rencontre de l'État lui-même du fait de ses agents ou représentants étatiques ayant fourni un support matériel ou finan­cier à des groupes terroristes, à condition que la victime ou son ayant-droit soit un national américain et que l'État dont relèvent les auteurs soit désigné par le Département d'État comme soutenant le terrorisme international 7 1 .

(ii) L'adoption de règles relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux

Il existe un lien indéniable entre les activités de terrorisme et le blanchiment de capitaux. Ce lien était par exemple opéré dès 1991 par la directive européenne 91/308/CEE du 10 juin 1991, qui a été modifiée par la directive européenne de lutte contre le blanchiment du 4 décembre 2 0 0 1 7 2 . Dès lors, les États qui cher­chent à adopter des mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux aux fins de la lutte contre le financement du terrorisme peuvent aménager les disposi­tions internes relatives à la lutte contre la criminalité transnationale 7 3 . Les mesures en cause visent en général le blanchiment d'argent, sans que le circuit de blanchiment ou la source du financement (trafic de drogue ; trafic d'armes et transfert illégal de matières nucléaires, biologiques et autres ; trafic de diamants ; etc.) soient directement pertinents.

L'action normative des États peut être mise en œuvre unilatéralement, ou en application d'une obligation internationale résultant d'une convention, comme c'est le cas de la Convention de 1 9 9 9 7 4 . À cet égard, la Convention de 1999

71. « (a) A foreign state shall not be immune from the jurisdiction of courts of the United States or of the States in any case - (7) [...] in which money damages are sought against a foreign state for personal injury or death that was caused by an act of torture, extrajudicial killing, aircraft sabotage, hostage taking, or the provision of material support or resources [...] for such an act if such act or provision of material support is engaged in by an official, employee, or agent of such foreign state [...] », 28 U.S.C. § 1605 (a)(7) et pour les exceptions à l'immunité d'exécution, 28 U.S.C. 1610 (a)(7) : v. les exemples cités sur ce dernier fondement d'actions entamées contre l'Iran, la Libye et l'Iraq, in « FSIA Terrorist-Excep­tion Cases in 2002 », A.J.I.L., 2002, vol. 4, pp. 964-967 ; W . Michael R E I S M A N , Monica HAKIMI, « Illusion and Reality in the Compensation of Victims of International Terrorism », Alabama L.R., 2003, pp. 561 et s., p. 567.

72. Aux termes du considérant 9 de la directive 91/308/CEE du Conseil du 10 juin 1991 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux, « le phénomène du blanchiment de capitaux concerne non seulement le produit d'infractions liées au trafic de stupéfiants, mais aussi le produit d'autres activités criminelles (telles que le crime organisé et le terrorisme) [...] ». V. également directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux, J.O.C.E. L 344 du 28 décembre 2001, pp. 76-81.

73. Dans ce sens, v. la résolution du Conseil de sécurité 1373 (2001) (point 4), ainsi que la résolution de l'Assemblée générale 50/6, la résolution 49/60, la résolution 46/51 et la résolution 44/29.

74. À la mi-juin 2003, la Convention de 1999 compte 86 États parties. Par ailleurs, la nécessité de l'adoption d'un instrument juridique approprié et spécifique à la question du financement du terrorisme international avait fait l'objet de recommandations de l'Assemblée générale des Nations Unies : v. le préambule de la résolution 53/108 du 26 janvier 1999 : « Gardant à l'esprit la possibilité d'envisager dans un avenir proche l'élaboration d'une convention portant sur tous les aspects du terrorisme international, [...] Consciente qu'il est urgent de renforcer la coopération internationale pour empêcher le financement du terrorisme et d'élaborer un instrument juridique approprié, [...] Décide également que le Comité spé­cial créé par sa résolution 51/210 du 17 décembre 1996 [...] élaborera un projet de convention internatio­nale pour la répression du financement du terrorisme afin de compléter les instruments internationaux existants portant sur le terrorisme et examinera ensuite les moyens de développer le cadre juridique offert par les conventions traitant du terrorisme international de façon [à ce] que tous les aspects de la question soient couverts, l'un de ces moyens étant d'envisager, à titre prioritaire, l'élaboration d'une convention portant sur tous les aspects du terrorisme international ; Décide en outre que le Comité spécial se réunira du 15 au 26 mars 1999, étant entendu qu'il devra [...] commencer à élaborer un projet de convention internationale pour la répression du financement du terrorisme [...] ». V. également, sur l'adop­tion d'une convention couvrant tous les aspects de la question, la résolution 51/210 du 16 janvier 1997.

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prévoit la possibilité pour les États parties de prendre des mesures destinées à l'identification, à la détection, au gel ou à la saisie de tous fonds utilisés ou destinés à être utilisés pour commettre les infractions visées 7 5 , les fonds étant définis de manière très large 7 6 , ainsi que des mesures en matière de blanchiment d'argent (article 18).

Parmi les législations étatiques les plus remarquables adoptées en matière de blanchiment de capitaux, il faut compter les lois américaines, dont la plus connue est le Patriot Act, adopté le 26 octobre 2001 en réaction aux événements du 11 septembre 2 0 0 1 7 7 . Cette loi a une portée très générale, puisqu'elle vise à renforcer les pouvoirs du Gouvernement américain dans des domaines aussi variés que la sécurité et la surveillance, l'immigration, ou les enquêtes et les renseignements. En particulier, le titre III de la loi est consacré au blanchiment d'argent (International Money Laundering Abatement and Anti-Terrorist Finan-cing Act of 2001), et prévoit notamment la faculté pour le Gouvernement de prendre des mesures spéciales (Section 311), des obligations de due diligence à la charge des institutions financières (Section 312), et une coopération internatio­nale sous couvert de laquelle les États-Unis cherchent à établir une compétence extra-territoriale pour les agents de renseignements en matière d'opérations financières (Section 330). Par ailleurs, la loi renforce la possibilité pour le Prési­dent de prendre des Executive Orders pour la confiscation d'avoirs appartenant à des personnes étrangères impliquées dans des actes terroristes (Section 1 0 6 ) 7 8 .

Le droit français a également été adapté en matière de blanchiment de capi­taux pour prendre en compte l'évolution de certaines pratiques financières. C'est notamment le secret bancaire en France qui a été aménagé, avec un dispositif de déclarations de soupçon faites au TRACFIN (Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits Financiers clandestins), cellule de centralisation des renseignements financiers créée en 1990 et placée sous l'autorité du ministre des Finances 7 9 . L'article L. 562-2 du Code monétaire et financier résultant de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 fait obligation aux organismes financiers de déclarer

75. V. article 8 de la Convention. L'une des originalités de la convention est de permettre l'affecta­tion des sommes provenant de confiscations à l'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme (article 8(4)).

76. Il s'agit « des biens de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, acquis par quelque moyen que ce soit, et des documents ou instruments juridiques sous quelque forme que ce soit, y compris sous forme électronique ou numérique, qui attestent un droit de propriété ou un intérêt sur ces biens, et notamment les crédits bancaires, les chèques de voyage, les chèques bancaires, les man­dats, les actions, les titres, les obligations, les traites et les lettres de crédit, sans que cette enumeration soit limitative » (article 1 (1)). Sur le gel des fonds, v. infra (2).

77. Uniting and Strengthening America by Providing Appropriate Tools Required to Intercept and Obstruct Terrorism (USA Patriot Act) Act of2001, Public law n° 107-56 ; v. également H. RODGIN COHEN, Richard A. SMALL, Ellen ZlMILES, New Responsibilities & Obligations Under the Money Laundering Aba­tement & Financial Anti-Terrorism Act of 2001, New York, 2002, pp. 198, 204 et 220. V. Nicole M. HEALY^op. cit., pp. 733 et s.

Le droit américain avait déjà intégré des dispositions de lutte contre le financement du terrorisme, par exemple dans la loi Antiterrorism and Effective Death Penalty Act of 1996, dont la Section 303 (a) prévoit : « [...] any financial institution that becomes aware that it has possession of, or control over, any funds in which a foreign terrorist organization, or its agent, has an interest, shall (A) retain possession of, or maintain control over, such funds; and (B) report to the Secretary [of the Treasury] the existence of such funds in accordance with regulations issued by the Secretary », Public law n° 104-132, 110 Stat. 1214-1359, intégrée dans 18 U.S.C. § 2339B (a)(2).

78. Sur cet aspect, v. infra (2). 79. V. loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte

contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants, J.O. du 14 juillet 1990, pp. 8329-33, et décret en Conseil d'État n° 91-160 du 13 février 1991 fixant les conditions d'application de la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990, J.O. du 14 février 1991, pp. 2242-43. Sur le TRACFIN, v. Bruno Buttier, « Tracfin et la lutte contre le financement du terrorisme », in Dossier « Le blanchiment d'argent »,

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au TRACFIN les opérations inscrites dans leurs livres pouvant procéder du trafic de stupéfiants ou d'activités criminelles organisées, ainsi que les opérations portant sur des sommes provenant des mêmes sources 8 0 .

b) L'adoption de mesures individuelles

L'une des premières réactions individuelles aux événements du 11 septembre 2001 a été l'utilisation de la force militaire en Afghanistan à l'encontre des groupes terroristes soupçonnés d'être les auteurs des actes terroristes. Le carac­tère militaire de cette action, qui n'a pas soulevé de difficulté majeure (même si la question a été sérieusement débattue) du point de vue du droit de légitime défense 8 1 , est cependant unique lorsqu'elle est remise dans le contexte de la lutte contre le financement du terrorisme international. Les mesures individuelles de lutte contre le financement du terrorisme empruntent le plus souvent la voie des circuits sur lesquels le financement est réalisé.

(i) Le gel et la confiscation des avoirs

Le gel des fonds appartenant à des groupements et entités ou à des individus soupçonnés de terrorisme constitue l'un des axes majeurs de la lutte contre le financement du terrorisme. Le GAFI distingue entre le gel et la saisie - tous deux permettant de bloquer les avoirs et fonds sans que la propriété soit transférée - et la confiscation ou la déchéance des avoirs, qui aboutit à ce que le propriétaire perde tout droit sur le bien 8 2 .

Des mesures de gel d'avoirs avaient été mises en œuvre avant le 11 septembre 2 0 0 1 8 3 , mais le choc de ces événements a permis l'adoption, de manière assez spectaculaire, de mesures frappant les avoirs de l'organisation Al-Qaida et de groupements et individus proches de ce réseau. Ces mesures ont résulté d'abord d'une série de résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, notamment les résolutions 1390 (2002), 1333 (2000) et 1267 ( 1 9 9 9 ) 8 4 ; les listes

(Suite de la note 79, page précédente) op. cit., pp. 39-41 ; v. également Jean-Bernard PEYROU, « TRACFIN : bilan et perspectives », in Les Cahiers de la sécurité intérieure - Noir, gris, blanc - Les contrastes de la criminalité économique, Institut des Hautes Études de la Sécurité Intérieure, 1999, pp. 101 et s.

80. Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, articles 34 (I) et 40, J.O. du 16 mai 2001, pp. 7776-806. Par ailleurs, d'autres types de mesures ont été adoptées en droit français pour mettre en oeuvre l'obligation de contrôle des établissements bancaires et financiers : en matière de contrôle des chèques, v. le règlement CRBF n° 2002-01 du 18 avril 2002 relatif aux obliga­tions de vigilance en matière de chèques aux fins de lutte contre le blanchiment des capitaux et le finan­cement du terrorisme, disponible sur le site internet de la Banque de France [www.banque-France.fr/fr/ infobafi/regles/6_0201.htm].

81. Sur ce point, v. supra, J. VERHOEVEN, « Les étirements de la légitime défense ». V. également Steven R. RATNER, « Jus ad Bellum and Jus in Bello After September 11 »,A.J.I.L., 2002, vol. 4, pp. 905-921 ; v. également Pierre Michel ElSEMANN, « Attaques du 11 septembre et exercice d'un droit naturel de légitime défense », in Le droit international face au terrorisme - Après le 11 septembre 2001, op. cit., pp. 239-248.

82. V. GAFI, Notes directives aux recommandations spéciales relatives au financement du terro­risme et au questionnaire d'auto-évaluation, sur le site internet du GAFI, wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm, p. 3.

83. V. supra note 4. 84. En particulier, dans la résolution 1390 (2002) adoptée le 16 janvier 2002, le Conseil de sécurité,

agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte, « 2. Décide que tous les États doivent prendre les mesu­res ci-après à l'égard d'Oussama ben Laden, des membres de l'organisation Al-Qaida ainsi que des Tali­ban et autres personnes, groupes, entreprises et entités associés figurant sur la liste établie en application des résolutions 1267 (1999) et 1333 (2000), qui doit être mise à jour périodiquement par le Comité créé en application du paragraphe 6 de la résolution 1267 (1999), ci-après dénommé l e Comité' :

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mises à jour et publiées par l'ONU en application de ces résolutions contiennent deux listes de personnes et entités appartenant ou associées aux Taliban et à l'organisation Al-Qaida 8 5 et faisant notamment l'objet de mesures de gel de fonds et de ressources financières. De la même manière, la réaction de l'Union euro­péenne aux attentats du 11 septembre 2001 s'est traduite par le règlement (CE) n° 2580/2001 du Conseil du 27 décembre 2001 et le règlement (CE) n° 881/2002 du Conseil du 27 mai 2002, mettant en œuvre les résolutions du Conseil de sécu­rité des Nations Unies notamment en ce qui concerne le gel de fonds. En particu­lier, le règlement de mai 2002 établit une liste de personnes, entités et groupes soupçonnés d'actes de terrorisme 8 6 .

Certains États ont adopté des mesures individuelles de gels d'avoirs, notam­ment à l'encontre des groupes mis en cause dans les attentats du 11 septembre 2001. En Suisse, par exemple, le Conseil fédéral a adopté des ordonnances contre le groupe Al-Qaida et les Taliban, notamment une ordonnance du 7 novembre 2001 permettant le blocage des avoirs et interdisant de fournir des fonds à toute personne morale et physique figurant sur la liste établie par le Conseil fédéral annexée à l'ordonnance, cette liste correspondant à celles qui sont établies par les Nations Unies ; par ailleurs, les banquiers ont l'obligation de déclarer les avoirs ainsi bloqués au Secrétariat d'État à l'Économie en indiquant le nom du bénéficiaire, l'objet et le montant des avoirs gelés 8 7 . En application de ces direc­tives, 75 comptes bancaires avaient pu être dénoncés à la fin de l'année 2002 et trente millions d'euros bloqués 8 8 .

Aux États-Unis, des mesures particulières ont été prises par le Président américain sous forme d'Executive Orders adoptés sur le fondement de la Interna­tional Emergency Economie Powers Act du 23 janvier 1995 8 9 . Après les attentats du 11 septembre 2001, le Président américain a ainsi adopté l'Executive Order 13224 (Blocking Property and Prohibiting Transactions with Persons who

(Suite de la note 84, page précédente) a) Bloquer sans délai les fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques de ces personnes, groupes, entreprises et entités, y compris les fonds provenant de biens leur appartenant ou contrôlés, directement ou indirectement, par eux ou par des personnes agissant pour leur compte ou sous leurs ordres, et veiller à ce que ni ces fonds ni d'autres fonds, actifs financiers ou ressources économiques ne soient rendus disponibles, directement ou indirectement, pour les fins qu'ils poursuivent, par leurs citoyens ou par une personne se trouvant sur leur territoire ».

85. Ces deux types de listes comprennent les noms d'individus et d'entités, notamment des banques ou trusts, v. le site internet [www.un.org/Docs/sc/committees].

86. Voir également la position commune du Conseil du 2 mai 2002 portant mise à jour de la position commune 2001/931/PESC relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terro­risme, incluant une liste de personnes et entités soupçonnées d'actions terroristes ; dans le même sens, voir décision du Conseil du 27 décembre 2001 établissant la liste prévue à l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 2580/2001 du Conseil concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme (2001/927/CE).

87. V. ordonnance du 7 novembre 2001 interdisant le groupe 'Al-Qaïda' et les organisations appa­rentées, disponible sur le site internet de la Confédération helvétique [www.admini.ch/ch/f/gg/cr/2001/ 20012461.html] ; v. également Patrick BLASER, op. cit., p. 24.

88. Patrick BLASER, op. cit., p. 24 ; v. également le communiqué de presse de la Commission fédé­rale des banques du 14 mars 2002 intitulé « Rapport de la Commission fédérale des banques : pas d'indice de délits d'initié de la part de terroristes », disponible sur le site internet de la Commission fédé­rale des banques [www.ebk.admini.ch/f/aktuell/index.htm] : « Les avoirs découverts et bloqués en rela­tion avec l'Ordonnance instituant des mesures à l'encontre des Taliban devaient être annoncés au Seco, même s'ils l'avaient déjà été au Bureau de communication en matière de blanchiment. Fin janvier 2002, 40 comptes totalisant CHF 24 millions étaient bloqués en Suisse sur la base de la Loi sur le blanchiment. L'essentiel de ces comptes sont également compris dans les 75 comptes totalisant CHF 42 millions annoncés et bloqués sur la base de l'Ordonnance instituant des mesures à l'encontre des Taliban ».

89. 50 U.S.C. §§ 1701-1706 (« IEEPA »). Sur ce point, v. James J. Savage, « Executive Use of the International Emergency Economie Powers Act - Evolution through the Terrorist and Taliban Sanctions », Currents International Trade Law Journal., 2001, pp. 28 et s.

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Commit, Threaten to Commit, or Support Terrorism) permettant de limiter les ressources financières d'organisations terroristes visées 9 0 . La portée des mesures adoptées est très large, puisque le texte précise que « all property and interests in property of the following persons that are in the United States or that hereafter come within the United States, or that hereafter come within the possession or control of United States persons are blocked » (Section l ) 9 1 . Sont notamment concernées les personnes qui participent au financement des activités terroristes : « (i) to assist in, sponsor, or provide financial, material, or technolo­gical support for, or financial or other services to or in support of, such acts of terrorism or those persons listed in the Annex to this order or determined to be subject to this order; or (ii) to be otherwise associated with those persons listed in the Annex to this order or those persons determined to be subject to subjection 1(b), 1(c), or 1(d) (i) of this order » (Section 1 (d ) ) 9 2 .

Dans l'ensemble, les mesures de gel d'avoirs prises immédiatement après les attentats du 11 septembre ont permis de bloquer des sommes considérables : un rapport du Département du Trésor américain précise que « approximately $ 4 million in assets belonging to Usama bin Laden and the Al Qaida network had been frozen in the U.S. Furthermore, these agencies reported that no less than 102 countries had committed to joining efforts to disrupt terrorist assets. Another $ 24 million in international terrorist assets had been frozen by the efforts of sixty-two other nations by enforcing their own national asset blocking orders » 9 3 .

90. Les premières Executive Orders adoptées en matière de financement du terrorisme l'ont été par le Président Clinton en 1995 (E.O. 12947 et E.O. 13099) : « Both orders are entitled 'Prohibiting Transac­tions with Terrorists Who Threaten To Disrupt the Middle East Peace Process'. The list of additional per­sons or entities was short, the most noteworthy of the three and their aliases are Usama bin Ladin and the Al Qaida and its aliases. [...] On July 6, 1999, President Clinton issued Executive Order 13129 titled, 'Blocking Property and Prohibiting Transactions with the Taliban'. This Executive Order initiated sanc­tions after a finding that held that the Taliban regime in Afghanistan had allowed 'territory under its control to be used as a safe haven and base of operations for Usama bin Laden and the Al Qaida organi­zation' who were openly hostile towards and directed acts of violence against the U.S. and its citizens. », in James J. Savage, op. cit., p. 35.

91. Executive Order No. 13224 Blocking Terrorist Property and Prohibiting Transactions with Per­sons who Commit, Threaten to Commit, or Support Terrorism, disponible sur le site internet du Département du Trésor [www.ustreas.gov/offices/enforcement/ofac/sanctions/terrorism.html].

92. Le texte définit le terrorisme dans les termes suivants : « the term 'terrorism' means an activity that - (i) involves a violent act or an act dangerous to human life, property, or infrastructure; and (ii) appears to be intended - (A) to intimidate or to coerce a civilian population; (B) to influence the policy of a government by intimidation or coercion; or (C) to affect the conduct of a government by mass destruction, assassination, kidnapping or hostage-taking » (Section 3 (d)).

93. In James Savage, op. cit., p. 38. V. également le rapport de septembre 2002 du Département du Trésor américain « Contributions by the Department of the Treasury to the Financial War on Terrorism -Fact Sheet », disponible sur le site internet du Department du Trésor américain [www.treas.gov/press/ releases/reports/2002910184556291211.pdf], p. 8 : « Over 165 countries and jurisdictions have issued blocking orders against the assets of terrorists. Since September 11th, 2001, $112 million in terrorist assets have been frozen worldwide in over 500 accounts. $34 million of those assets are frozen in the Uni­ted States, $78 million overseas ».

Sur la portée des mesures, v. C.R. FENTON, op. cit., p. 229 : « By the end of December, 2001, the Department of Treasury had frozen USD $ 61 million in Al Qaeda assets, while approximately one hun­dred and forty-two nations have issued orders to block any accounts found to be connected to international terrorism. The financial initiatives launched by the Bush administration evidence Washington's recogni­tion of the importance of the financial relationships that underlie terrorist activities and the momentum towards, and support for, the prohibition of certain financial activities on national security grounds. While dealing with the ability of terrorists to access financial resources, these initiatives may be perceived as failing to address fundamental issues: mainly, the protection of domestic industries required for the execution of the global anti-terror campaign, security threats posed by foreign control of particular domes­tic industries, and potential third-party transactions between foreign entities that acquire these industries ».

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(ii) Les enquêtes et déclarations de soupçons

Dans sa résolution 1373 (2001) du 28 septembre 2001, le Conseil de sécurité a décidé que tous les États devaient se prêter « mutuellement la plus grande assis­tance lors des enquêtes criminelles et autres procédures portant sur le finance­ment d'actes de terrorisme » (point 2 (f)). De la même manière, l'article 18 (l)(b) de la Convention de 1999 prévoit une adaptation des législations internes à l'effet de faire « obligation aux institutions financières et aux autres professions inter­venant dans les opérations financières d'utiliser les moyens disponibles les plus efficaces pour identifier leurs clients habituels ou occasionnels, ainsi que les clients dans l'intérêt desquels un compte est ouvert, d'accorder une attention particulière aux opérations inhabituelles ou suspectes et de signaler les opéra­tions présumées découler d'activités criminelles » 9 4 .

Les directives du GAFI à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de financement du terrorisme illustrent la panoplie des mesures que peuvent prendre les institutions à cet égard. Notamment, le GAFI recommande une attention particulière aux comptes, aux dépôts et retraits, aux virements, aux caractéristiques du client ou de son activité commerciale ou aux transactions liées à des lieux sensibles 9 5 . La notion de soupçon a, à cet égard, été définie par le GAFI : « S'agissant des termes soupçon et avoir des motifs raison­nables de soupçonner, ils désignent des niveaux différents de certitude suscepti­bles de servir de base pour déclarer une transaction. Le premier terme - obliga­tion de déclarer aux autorités compétentes lorsqu'une institution financière soupçonne que des fonds proviennent d'activités terroristes ou sont destinés à les financer - est un critère subjectif et transpose l'obligation de déclaration exigée de la Recommandation 15 du GAFI dans sa [Recommandation Spéciale] IV. L'obligation de déclarer les transactions lorsqu'il existe des motifs raisonnables de soupçonner que les fonds proviennent d'activités terroristes ou qu'ils leurs sont destinés est un critère objectif, qui est conforme à l'esprit de la Recomman­dation 15 bien que d'une portée un peu plus large. Dans le cadre de la [Recom­mandation Spéciale] IV, les pays doivent établir une obligation de déclaration en cas de soupçon ou en cas de motifs raisonnables de soupçonner » 9 6 .

Au titre des mesures mises en place par les États pour permettre de telles enquêtes, l'exemple français est particulièrement révélateur : le TRACFIN 9 7', mis en place en 1990, a vu son rôle s'accentuer après les événements du 11 septembre 2001, le nombre de déclarations de soupçon provenant des organismes financiers et le nombre de dossiers transmis à la justice étant en nette progression depuis 9 8 .

94. V. également, au sein de l'Union européenne, la directive 2001/97/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 décembre 2001 modifiant la directive 91/308/CEE du Conseil relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins de blanchiment de capitaux, J.O.C.E. L 344 du 28 décembre 2001, pp. 76-81 : l'article 7 impose une déclaration de soupçon, élargie notamment aux notaires et autres membres de professions juridiques indépendantes (article 2 bis (5)). V. sur ce point : O. DUFOUR, « Le blanchiment, un nouveau risque pour les professions de conseil ? », Petites Affiches, 1 e r juillet 2002, n° 130, pp. 3-4.

95. GAFI, Directives à l'attention des institutions financières pour la détection des activités de finan­cement du terrorisme, 24 avril 2002, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm], Annexe 1 relative aux Caractéristiques des transactions financières susceptibles d'appeler une vigilance renforcée.

96. GAFI, Notes directives aux recommandations spéciales relatives au financement du terrorisme et au questionnaire d'auto-évaluation, sur le site internet du GAFI [wwwl.oecd.org/fatf/ TerFinance_fr.htm], Recommandation Spéciale IV, p. 4.

97. V. supra (1). 98. V. Bruno BUTTIEE, op. cit.

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(iii) Les sanctions économiques et autres mesures assimilées

Les sanctions économiques à l'encontre d'États soupçonnés de terrorisme constituent l'une des voies de lutte contre le financement du terrorisme interna­tional mises en œuvre bien avant les événements du 11 septembre 2001. En particulier, les mesures d'embargo prises par les États-Unis à l'encontre de la Libye et de l'Iran dans la loi dite D'Amato-Kennedy sont désormais classi­ques Ces mesures - parfois critiquées en ce que, frappant essentiellement les États, elles peuvent n'avoir qu'un effet limité sur des groupements non étati­ques disposant de moyens financiers indépendants et importants, en particulier Oussama ben L a d e n 1 0 0 - constituent indéniablement l'un des axes de la poli­tique américaine en matière de lutte contre le terrorisme international et son financement.

Dans une logique proche des sanctions, il convient de mentionner la publi­cation par le GAFI d'une liste désignant les pays ou territoires non coopératifs en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, en raison de défaillances dans leur dispositif anti-blanchiment ou d'un manque de volonté manifeste concernant la coopération anti-blanchiment ; cette liste incluait, en février 2003, les îles Cook, l'Egypte, le Guatemala, l'Indonésie, le Myanmar, Nauru, le Nigeria, les Philippines, Saint-Vincent et les Grenadines et l'Ukraine 1 0 1 . Ce type de mesure a pu être critiqué, dans la mesure où il consiste à exclure d'un débat et d'une coopération ceux qui, précisément, contribuent au financement du terrorisme international 1 0 2 ' , ou à favoriser une gestion politique de leur image par certains États qui adoptent une législation de lutte contre le financement du terrorisme international sans souci réel de son ef f icac i té 1 0 3 .

(iv) Les mesures accessoires

Les personnes soupçonnées d'être impliquées dans des actes de finance­ment du terrorisme international peuvent faire l'objet des mesures indivi­duelles évoquées préalablement ou de poursuites (notamment pénales) en application de lois incriminant le financement du terrorisme international. Lorsque ces personnes sont étrangères, elles peuvent également faire l'objet de mesures individuelles se rapportant à leur statut d'étranger. Les personnes soupçonnées d'activités de terrorisme international peuvent par exemple faire

99. Iran and Libya Sanctions Act of 1996, Public Law n° 104-172, 110 Stat. 1541 (1996). V. par exemple Kenneth W. ABBOTT, op. cit. ; Lucien J. DHOOGE, op. cit. ; Layla NOURAEE, « Reassessing U.S. Policy Toward Iran : Stimulating Reform Through Economic Means », Suffolk Transnat'l L.R., 2002, pp. 535 et s.

100. V. Alan ElNISMAN, op. cit., p. 300. 101. V. GAFI, Pays et territoires non coopératifs, publié sur le site du GAFI [www.fatf-gafi.org/

NCCT_fr.htm]. Le rapport ajoute que quatre pays sont sortis de la liste (les Bahamas, les îles Caïmans, le Liechtenstein et le Panama) en juin 2001, et que quatre autre pays en ont été retirés en juin 2002 (la Hongrie, Israël, le Liban et Saint-Christophe-et-Niévès) puis en octobre 2002 (la Dominique, les îles Marshall, Niue et la Russie).

102. V. Yves GODIVEAU, op. cit., p. 38 : « Cependant des limites existent. Celles qui tiennent à l'essence même du GAFI, émanation du G7. Celles aussi nées de son développement qui aboutit à lister des pays non coopératifs et donc à les exclure de toute possibilité d'adhérer au GAFI. Parmi ces pays figurent des États qui comptent en matière de terrorisme. Pour n'en citer que quelques-uns, il suffit d'évoquer la Russie, le Liban, Israël, l'Indonésie ou encore l'Ukraine ou l'Egypte. Comment imaginer par­ler de financement du terrorisme sans inviter à la table les représentants de ces pays ? Il faut accentuer à l'évidence l'action afin que ces pays arrivent aux standards déterminés par le GAFI. Il est indispensa­ble dans le même temps de les associer à l'éradication du financement du terrorisme ».

103. V. Michel KOUTOUZIS, op. cit., pp. 92-93.

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l'objet d'un refus d'asile 1 0 4 . De la même manière, certains individus soup­çonnés de financement du terrorisme peuvent se voir interdire l'entrée ou le transit sur un territoire, comme c'est le cas des personnes visées par la liste de l'ONU établie en application des résolutions 1390 (2002), 1267 (1999) et 1333 ( 2 0 0 0 ) 1 0 5 .

Il convient de relever l'importance que revêtent dans cette matière les garanties mises en place dans certains instruments tels que la Convention de 1999, qui prévoit que la lutte contre le financement du terrorisme ne comporte­rait pas de mesure dérogatoire en ce qui concerne les droits fondamentaux 1 0 6 . Une application de mesures individuelles fondée sur un simple soupçon ou une présomption de culpabilité peut cependant comporter des dangers pour les droits fondamentaux de la personne humaine lorsqu'elle peut aboutir, sans motif valable, à priver une personne de ces droits, notamment le droit à un procès équitable 1 0 7 .

CONCLUSION

Au regard de l'ensemble des mesures qui ont été adoptées après les événe­ments du 11 septembre 2001, une première évaluation de la lutte contre le financement du terrorisme international permet de mesurer l'importance du chemin déjà parcouru. Cette lutte ne peut cependant être totalement efficace, dans la mesure où elle doit se satisfaire de certaines réalités telles que l'exis-

104. Voir la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité : le Conseil décide que tous les États « c) Refusent de donner asile à ceux qui financent, organisent, appuient ou commettent des actes de ter­rorisme ou en recèlent les auteurs » (point 2 (c)) ; dans le même sens, v. la résolution 1269 (1999) : le Conseil demande à tous les États de prendre les mesures voulues pour « empêcher ceux qui organisent, financent ou commettent des actes de terrorisme de trouver asile où que ce soit, en faisant en sorte qu'ils soient arrêtés et traduits en justice ou extradés » (point 4). Les mesures étatiques, par exemple les mesu­res du Patriot Act aux États-Unis, vont clairement dans ce sens (v. H. RODGIN COHEN, Richard A. SMALL, Ellen ZlMILES, op. cit., pp. 55 et s.). La loi anglaise Anti-terrorism, Crime and Security Act 2001 précitée prévoit dans sa section 33 que les dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 peuvent ne pas être applicables au demandeur d'asile.

105. V. les listes publiées sur le site internet [www.un.org/Docs/sc/committees/1267/ 1267ListEng.htm] : « In accordance with Security Council resolution 1390 (2002), all States are required to ensure that the following three measures are applied with immediate effect to all of the individuals, groups, undertakings and entities included in the list below: [...] 2. Prevent the entry into or the transit through their territories [...]».

106. Aux termes de l'article 17 de la Convention, « [t]oute personne placée en détention ou contre laquelle toute autre mesure est prise ou procédure engagée en vertu de la présente Convention se voit garantir un traitement équitable et, en particulier, jouit de tous les droits et bénéficie de toutes les garanties prévus par la législation de l'État sur le territoire duquel elle se trouve et les dispositions applicables du droit international, y compris celles qui ont trait aux droits de l'homme ». Par ailleurs, l'article 9 de la Convention prévoit que « 2. S'il estime que les circonstances le justifient, l'État Partie sur le territoire duquel se trouve l'auteur ou l'auteur présumé de l'infraction prend les mesures appropriées en vertu de sa législation interne pour assurer la présence de cette personne aux fins de poursuites ou d'extradition. 3. Toute personne à l'égard de laquelle sont prises les mesures visées au paragraphe 2 du présent article est en droit : a) De communiquer sans retard avec le plus proche représentant qualifié de l'État dont elle a la nationalité ou qui est autrement habilité à protéger ses droits ou, s'il s'agit d'une per­sonne apatride, de l'État sur le territoire duquel elle a sa résidence habituelle ; b) De recevoir la visite d'un représentant de cet État ; c) D'être informée des droits que lui confèrent les alinéas a) et b) du pré­sent paragraphe ».

107. V. généralement Kalliopi KOUFA, « Le terrorisme et les droits de l'homme », in Le droit inter­national face au terrorisme - Après le 11 septembre 2001, op. cit., pp. 189-201 ; Barbara DELCOURT, « De quelques paradoxes liés à l'invocation de l'État et du droit », ibid., pp. 203-215. En ce qui concerne la résolution 1373, v. également Nicolas ANGELET, « Vers un renforcement de la prévention et la répression du terrorisme par des moyens financiers et économiques », ibid., pp. 219-237, pp. 227-228.

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tence de sources licites de financement du terrorisme ou la subsistance, inhé­rente au système de financement international, des centres offshore 1 0 8 .

108. Sur les centres offshore, v. Jean-François THONY, op. cit., en particulier pp. 13-15 ; v. encore le rapport d'information n° 2311 de MM. Vincent PEILLON et Arnaud MONTEBOURG, déposé à l'Assemblée nationale française en application de l'article 145 du Règlement par la Mission d'information commune sur les obstacles au contrôle et à la répression de la délinquance financière et du blanchiment des capi­taux en Europe (11 avril 2002), disponible sur le site internet [www.assemblee-nat.fr/dossiers/blanchi-ment.asp]. V. également Michel KOUTOUZIS, op. cit., pp. 90 et s.