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LA MAIF : UNE ENTREPRISE A MISSION

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Etude de casLA MAIF : UNE ENTREPRISE A MISSION

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INTRODUCTION

La notion d’« entreprise à mission » fait référence aux sociétés commerciales qui se définissent statutairement, en plusde leur but lucratif, une finalité d’ordre social ou environnemental. Ces nouvelles formes de sociétés ont été introduitesen droit à partir de 2010. En France, le terme a été introduit en 2015 par Kevin Levillain, chercheur à Mines ParisTech. L’idée d’une entreprise pouvant servir le bien commun est donc d’apparition relativement récente.

En effet, tout au long des Trente Glorieuses, toutes les conditions étaient réunies pour que l’idée d’un progrès continuet durable soit partagée. La croissance économique assurait le plein-emploi et l’amélioration des conditions de vie,permise par l’augmentation constante du pouvoir d’achat, et symbolisée par la progression constante de l’équipementdes ménages en biens durables. Parallèlement, l’Etat-providence garantissait la régulation du système économique pardes politiques conjoncturelles et structurelles, une protection sociale pour le plus grand nombre, et unedémocratisation réelle de l’accès à la culture et à l’éducation. Tout le monde ou presque y trouvait son compte, et iln’y avait pas de doute sur le fait que les ressources naturelles étaient inépuisables (c’est le club de Rome qui émet lapremière inquiétude à cet égard en 1972), et pas de soupçon sur l’éventuel impact écologique de l’activité humaine.Depuis les années 1980, le monde a changé. La croissance économique n’est plus synonyme de progrès social.L’exclusion gagne du terrain et les Etats ne parviennent plus à réguler le système économique et social. La relativeimpuissance de ces Etats à relever les défis contemporains fait que l’on se tourne vers les entreprises, somméesdésormais d’apporter leur contribution au bien-être collectif. Et les premières réponses qui ont été données par celles-ci en termes de Responsabilité sociétale et environnementale (RSE), qui demeuraient en marge de leur activitéprincipale, ne suffisent plus à les dédouaner. La société demande maintenant que l’entreprise assume sa responsabilitépolitique, en inventant des modèles d’affaires qui font de la contribution et de l’engagement au service de tous dessources de performance.

Sur l’émergence de cette entreprise politique, la MAIF a beaucoup de choses à apporter, ne serait-ce qu’en raison deson origine, puisque cette entreprise est née il y a 85 ans d’une volonté de rupture avec les pratiques de marchéd’alors, et que sa réussite a entraîné dans son sillage les grandes mutuelles d’assurance, qui ont été construites surson modèle, et qui assurent aujourd’hui 6 voitures sur 10 et 1 habitation sur 2. Dans la continuité de sa philosophiefondatrice, la MAIF est aujourd’hui en passe d’inventer un nouveau modèle d’entreprise qui fait de l’engagement auservice de la société une source majeure de performance. En cessant d’opposer le lien social et le marché, la MAIFréalise un cercle vertueux dans lequel l’engagement pour ses parties prenantes et pour le reste du monde crée plus deperformance pour l’entreprise, ce qui permet en retour encore plus d’engagement.

I- L’émergence de l’entreprise à mission

A- Le contexte

En 1867, au moment de la création des personnes morales de droit privé que sont les sociétés anonymes, le rôle del’actionnaire n’est guère mis en relief. La meilleure preuve en est qu’à l’époque, la puissance publique n’est guèrefavorable à l’apparition de personnes morales de droit privé, à côté de personnes morales de droit public, qui selon ellesont les seuls garants de l’intérêt général (voir Jean-Philippe Robé, Le temps du monde de l’entreprise, Dalloz, 2016).En effet, préalablement, dans un avis rendu en 1825, le Conseil d’Etat posait très clairement que le gouvernementdevait réserver le privilège de la société anonyme aux sociétés ayant pour objet la création d’établissements d’utilitépublique. Quant au paradigme de l’entreprise, qui est apparu dans les années 1880 en même temps que lamultiplication des écoles de commerce et d’ingénieurs, il représente celle-ci comme une organisation bénéfique pour lacollectivité, qui associe travailleurs, ingénieurs et actionnaires, dans l’organisation de la production. En 1916, HenriFayol, dans son Traité d’administration industrielle et générale, réduit le rôle des actionnaires à peu de choses : lanomination des directeurs.

Cette représentation de l’entreprise s’est imposée pendant une bonne partie du XXème siècle. Jusqu’aux années 1970,les grandes entreprises sont vues comme les fleurons de la nation. On se souvient par exemple de l’adage « Ce qui estbon pour General Motors est bon pour les Etats-Unis ».

C’est à partir des années 1980 que l’on a vu s’affirmer un capitalisme financier, et le pouvoir des actionnaires quil’accompagne. Et c’est à partir de ce moment que l’entreprise, comme organisation collective créatrice de richesses etdonc dotée d’une mission d’intérêt général, disparaît dans les codes de gouvernance qui ne s’intéressent plus qu’auxsociétés par actions. Les nouvelles règles de gouvernance des entreprises ne reposent plus sur la maximisation duprofit, mais sur la maximisation de la valeur pour l’actionnaire, ce qui peut conduire les entreprises à devoir distribuerdes dividendes ou à défendre le cours de l’action en limitant l’investissement ou en accumulant les dettes, stratégiequi à terme peut compromettre la survie de l’organisation. Il résulte de tout ceci une situation paradoxale, puisquel’actionnaire qui est le « propriétaire » supposé de l’entreprise, est en mesure d’imposer des décisions exclusivementcentrées sur ses intérêts, alors qu’il est complétement déconnecté de la production réelle.

C’est pour éviter cette déconnexion préjudiciable de la finance et de la production que les premières formes desociétés à mission ont été introduites en droit aux Etats-Unis dans les années 2000. Les juristes à l’origine de cesnouvelles formes juridiques partaient du constat qu’il était parfois risqué pour les dirigeants d’entreprises américainsde protéger leurs initiatives en faveur de développement de l’entreprise contre l’exigence de rentabilité des

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actionnaires. Ces derniers peuvent en effet engager des poursuites judiciaires contre le « manager », au motif de« manquement aux obligations envers les actionnaires » (breach of fiduciary duties »). Trois formes d’entreprise àmission ont été introduites aux Etats-Unis : la Benefit Corporation, adoptée dans plus de 30 Etats et qui compte plusde 2000 sociétés, la Social Purpose Corporation, adoptée dans 3 Etats (Californie, Etat de Washington, Floride) dans150 sociétés environ, et plus récemment la Public Benefit Corporation, adoptée en 2015 au Delaware.

B- La loi PACTE est l’aboutissement d’un long processus

En ce qui concerne la France, la loi PACTE est l’aboutissement d’un long processus de réflexion sur la réforme del’entreprise qui a été très présent tout au long de la Vème République. Déjà en 1950 un rapport rédigé sous ladirection de Georges Lasserre proposait d’orienter l’objectif de l’entreprise vers l’intérêt général. Mais c’est en 1963avec l’ouvrage de François Bloch-Lainé Pour une réforme de l’entreprise que des idées véritablement nouvelles vontsurgir. Cet ouvrage évoque des concepts comme celui de démocratie industrielle, de destin public de l’entreprise, ouencore de contrôle du fonctionnement de l’entreprise. Un peu plus tard, sous la présidence de Valéry Giscardd’Estaing, le rapport Sudreau de janvier 1975 contient des mesures destinées à insérer les finalités de l’entreprisedans celles de la société. Il est fait notamment mention d’un développement nécessaire de la participation et del’autonomie des salariés, ainsi que du rôle des associations de consommateurs et de l’instauration du principe depollueur-payeur. Néanmoins, à l’époque, ces rapports sont ignorés ou mal reçus par le patronat.

Les premières mesures législatives sur les droits des travailleurs seront consécutives au rapport Auroux de 1981, quis’inspire largement du rapport Sudreau. Parmi les mesures les plus représentatives, celles sur la citoyenneté dessalariés dans l’entreprise, sur la reconnaissance de nouveaux droits collectifs ainsi que sur la protection des droits etdes libertés dans l’entreprise feront l’objet de 4 lois adoptées en 1982.

D’autres lois suivront plus tard. On peut citer la loi sur les Nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001,qui prévoit une obligation d’information sociale et environnementale qui se matérialise par la mention de cesinformations dans le rapport de gestion élaboré par le Conseil d’administration (c’est cette loi qui fait entrer laResponsabilité sociale et environnementale-RSE-dans la sphère du droit. On peut citer également les lois Grenelle I(03 août 2009) et Grenelle II (12 juillet 2010) qui accentuent cette obligation d’information, de même que la loi du 17août 2015 qui précise l’obligation de reporting en matière d’enjeux climatologiques, ainsi que l’ordonnance du 19 août2017 qui transpose la directive sur le reporting extra-financier (déclaration de performance extra-financière, qui peutdevenir un véritable outil de pilotage de la stratégie).

Si l’on suit Fleur Laronze (Introduction à la Conférence de recherche du 02 mars 2019 « L’entreprise à mission »,France Stratégie), on peut cependant penser que c’est la loi du 02 août 2016 (dite loi Travail) qui réalise la véritablesubstantialisation de la RSE en passant d’une simple obligation d’information à une obligation sanctionnée, ens’appuyant sur le cas des plateformes numériques. Un peu plus tard, la loi Sapin II du 09 décembre 2016 qui reconnaîtde manière uniforme le droit d’alerte professionnelle et la loi du 27 mars 2017 qui crée le devoir de vigilance dessociétés mères et des entreprises donneurs d’ordre constituent une évolution supplémentaire vers la contrainteexercée sur les entreprises, préfigurant la loi PACTE.

C- Le contenu de la loi

Jusqu’en 2019, le droit français ne reconnaissait pas de statut spécifique pour les entreprises à mission. Uneproposition remarquable avait cependant été faite en ce sens, qui était de créer un statut de Société à objet socialétendu (SOSE), issu des recherches menées par l’Ecole des Mines de Paris, en liaison avec un programme du Collègedes Bernardins (Blanche Segrestin, Kevin Levillain, Stéphane Vernac et Armand Hatchuel, « La Société à objet socialétendu : Un nouveau statut pour l’entreprise », Presses des Mines, 27 octobre 2016), et proposant un modèleaccessible à toute société, quelle que soit sa forme juridique (SA, SARL, SAS, SCOP, etc.), qui chercherait à se doterd’une finalité supplémentaire à la recherche du profit. La SOSE repose sur 3 caractéristiques qui sont la définition del’Objet social étendu-OSE- (inscription d’objectifs d’ordre humain, social ou environnemental dans les statuts), unprincipe d’engagement (approbation par les associés, voire du Comité d’entreprise ou d’un Conseil spécifique créé pourl’occasion), et un principe de contrôle (discussion des décisions de gestion en Assemblée générale sur la base d’unrapport spécifique à l’OSE).

A la suite du rapport Notat-Senard (« L’entreprise, objet d’intérêt collectif ») remis le 09 mars 2018 après unecommande gouvernementale en 2017, et qui était destiné à formuler des propositions pour mieux intégrer les objectifssociaux et environnementaux dans les stratégies de l’entreprise, la loi PACTE est adoptée par l’Assemblée nationale le11 avril 2019, et promulguée le 16 mai 2019.

La loi PACTE propose 3 étapes, amenant à la société de mission. La première étape, c’est la modification du Code civilqui s’adresse à toutes les sociétés. L’article 1833, qui impose à toute Société d’être « constituée dans l’intérêt commundes associés » s’est vu ajouter un deuxième alinéa, qui consacre la notion d’un « intérêt social » qui dépasse celui desactionnaires, et affirme la nécessité que toute Société prenne désormais en compte les enjeux sociaux etenvironnementaux liés à son environnement, au-delà de la simple cause lucrative mentionnée à l’article 1832. Toutdirigeant est maintenant amené à s’interroger sur ces enjeux à l’occasion de ses décisions de gestion. La deuxièmeétape, qui est une étape facultative, est la « raison d’être », définie comme « un projet entrepreneurial répondant à unintérêt collectif et qui donne sens à l’action de l’ensemble des collaborateurs », compatible avec l’objet social del’entreprise, qui s’inscrit dans ce « projet de long terme ». La troisième étape, facultative elle aussi, est la société de

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mission qui vient coiffer ce dispositif, qui permet aux sociétés qui se sont dotées d’une raison d’être d’aller encore plusloin en se dotant statutairement d’objectifs sociaux et environnementaux.

Cinq conditions sont prévues par la loi pour créer une société à mission : trois conditions internes statutaires, et deuxconditions externes de vérification. La première condition est de se doter d’une raison d’être, comme évoqué plushaut. La deuxième condition statutaire est de prévoir dans les statuts de l’entreprise des objectifs sociaux etenvironnementaux que celle-ci se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité. La troisièmecondition, également statutaire, est de se doter d’un comité de suivi (distinct des organes qui existent déjà dans lasociété, comme le Conseil d’administration par exemple). Les deux dernières conditions de vérification sont quel’exécution des objectifs fasse l’objet d’une vérification par un organisme indépendant (audit externe) et que lesmodifications statutaires évoquées plus haut soient inscrites au greffe du tribunal de commerce pour vérification.

II- La MAIF, une entreprise politique

A- L’intégration des objectifs du développement durable

L’intégration des objectifs durables à la MAIF commence par des actes à la fois simples et importants du point de vuede l’exemplarité. C’est ainsi que l’entreprise n’a pas de plateaux téléphoniques au Maroc ou de gestionnaires desinistres à Madagascar, pas plus que de développeurs informatiques en Inde permettant de réaliser des économies surles frais généraux. Domiciliée en France, la MAIF part du principe qu’elle y paie la totalité de ses impôts, assumantpar-là pleinement ses responsabilités de contribuable un principe qui, faut-il le rappeler, n’est guère partagé par denombreuses multinationales comme Google, Apple, Facebook ou Amazon…). De même, la MAIF cherche à réduire saconsommation d’énergie par de nombreuses initiatives : l’énergie consommée y est produite à partir de sourcesrenouvelables, les salariés sont invités autant que possible à éviter le recours à l’automobile pour les trajets domicile-travail, le papier utilisé est issu du recyclage ou de forêts gérées en sorte de préserver la diversité biologique, laproduction de déchets est réduite au strict minimum.

Mais l’urgence climatique exige des entreprises un engagement qui va au-delà des gestes du quotidien. Comme le ditPascal Demurger, directeur général de la MAIF (L’entreprise du XXIème siècle sera politique ou ne sera plus, Editionsde l’Aube, 2019), c’est le cœur de l’entreprise qu’il faut désormais transformer.

Concrètement, cela signifie la mise en place d’une véritable économie circulaire de la pièce détachée automobile (entant qu’assureur, la MAIF prend en charge chaque année 300000 véhicules accidentés, ce qui lui donne une fortecapacité de prescription en matière de réparation automobile). La structuration d’une filière de recyclage des piècesdétachées n’est pas forcément rentable pour l’assureur puisque la déconstruction des épaves en France coûteactuellement plus cher que leur envoi vers les PVD. Mais elle permet à la fois de réduire l’empreinte écologique de laréparation en limitant la production de composants neufs et en repoussant les limites écologiques de la réparabilitédes véhicules, et également de baisser le coût des réparations pour les propriétaires de voitures (les pièces d’occasionsont environ 40% moins chères que les neuves).

Cela signifie également une autre philosophie de la collecte de l’épargne et de la gestion d’actifs financiers. La MAIF aété pionnière de la prise en considération des critères ESG (Environnementaux, Sociaux, et de Gouvernance), et elleréalise dès aujourd’hui plus de 80% de ses placements sur la base de ces critères, bien au-dessus des critères dumarché. Elle a ainsi soutenu de nombreux projets originaux, à l’image du fonds MAIF Transition lancé en 2019. Cefonds, destiné à financer les transitions énergétique et agricole, vise à concilier l’installation d’unités de productionphotovoltaïques au sol avec l’insuffisance de terrains disponibles. Il s’agit de financer des projets combinantinstallations photovoltaïques et conversion à l’agriculture biologique sur un même terrain, pour rendre les deuxtransitions possibles. Dès 2019, 50 millions ont été mobilisés pour financer des projets de ce type, avec l’ambitiond’atteindre 400 millions d’euros à terme.

Enfin, les engagements de la MAIF en matière de développement durable portent aussi sur la gestion des données. Enla matière, l’engagement est de ne pas revendre les données des sociétaires, d’héberger ces données dans l’Unioneuropéenne, de garantir la transparence sur le contenu de ces données et leur provenance (conformément auxobligations du Règlement général sur la protection des données), et d’ouvrir un droit à l’effacement des données. Ence qui concerne l’intelligence artificielle, alors que beaucoup d’entreprises perçoivent l’arrivée de l’intelligenceartificielle comme une occasion de diminuer la masse salariale et d’améliorer la productivité, la MAIF pense que l’onpeut dépasser la classique opposition entre l’homme et la machine en utilisant celle-ci, non comme une solutionalternative à l’homme, mais comme un moyen d’améliorer la performance de chacun. L’engagement sur le digitalconcerne enfin le recours à l’open source, puisque la philosophie du logiciel libre est parfaitement en phase avecl’approche collaborative et contributive que promeut l’entreprise. Depuis maintenant plus de deux ans, la MAIF a mis àdisposition de tous le code de nombreux développements réalisés en interne (par exemple, un outil de gestion et deroutage des emails). Cette démarche a d’ailleurs été récompensée en 2018 par le Conseil national du logiciel libre.

B- Un nouveau modèle de management

Depuis maintenant quelques années, la MAIF fait de la confiance l’axe central de sa manière d’être et de ses relations,à tel point qu’elle qualifie son style managerial de « management par la confiance », ce qui est très important de nosjours, dans une société où c’est plutôt la défiance qui s’impose comme le marqueur essentiel des relations sociales

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(Yann Algan et Pierre Cahuc, La Société de défiance, CEPREMAP, Editions rue d’Ulm, 2007). Le déploiement progressifde ce principe de management a créé quelques changements radicaux dans les comportements au sein de l’entreprise.La relation manageriale n’est plus la même au sein de l’entreprise. Il ne s’agit plus seulement de commander, maisd’accorder sa confiance, de déléguer, d’offrir des marges de manœuvre réelles à chacun. Une des premièresillustrations de ce principe concerne l’organisation du temps de travail. Grâce à une approche très différente du travail,non pas considéré comme une souffrance, mais comme un vecteur potentiel d’approfondissement de soi, et aussi à lamise en œuvre d’une méthode très participative, l’entreprise a pu faire converger les aspirations des salariés et lesbesoins de l’organisation. L’accord d’entreprise signé en 2018 a permis la mise en place d’une organisation du travailqui permet aux salariés de choisir librement leurs horaires en dehors des plages planifiées. En élargissant lesamplitudes horaires et en annualisant le temps de travail pour mieux s’adapter aux cycles d’activité, les collaborateursde l’entreprise peuvent désormais organiser beaucoup plus librement leur temps, adopter le télétravail et bénéficierd’un système de préretraite partiellement financé par l’entreprise. Une autre illustration est fournie par le système derémunération. A la différence des systèmes qui valorisent la performance individuelle, le système de rémunération dela MAIF met en relief le collectif dans la reconnaissance de la performance de l’entreprise. L’intéressement est alorsdistribué, au sein d’un service ou d’une direction donnés, de manière totalement égalitaire. Ce système permet devaloriser une culture de la réussite collective plutôt que la mise en avant de l’individu. Dans le même ordre d’idées, laMAIF pense que la recherche de cohésion passe par le maintien d’un éventail de rémunérations à un niveauraisonnable. A la MAIF, l’écart de rémunération entre les salaires les plus bas, sensiblement supérieurs au SMIC, et lesplus élevés, est maintenu dans un rapport de l’ordre de 1 à 20 (dans cette catégorie d’entreprises, la moyenne dessalaires perçus par les dirigeants correspond à 187 fois le SMIC…).

Dès maintenant, ce principe de responsabilisation progressive des équipes a donné des résultats significatifs du triplepoint de vue de l’épanouissement des collaborateurs, de la qualité du dialogue social et de la performance del’entreprise. L’épanouissement des collaborateurs s’appréhende surtout par leur enthousiasme qui se manifeste par lavolonté de bien faire, un sens du service irréprochable, un taux d’absentéisme très faible, un niveau de participationrecord aux manifestations organisées par l’entreprise, ou encore une spontanéité à défendre la MAIF en touteoccasion. La qualité du dialogue social s’éprouve dans la relation avec les partenaires sociaux, qui sont extrêmementconfiantes et constructives, puisque ceux-ci approuvent la stratégie de l’entreprise. Quant à la performance, elle estindéniable. Pour reprendre les propos de Pascal Demurger, l’entreprise est passée en quelques années de l’image« d’une mutuelle considérée par la profession comme la belle endormie du secteur à une entreprise aujourd’hui perçuecomme l’une des plus innovantes ». La dynamique collective de l’entreprise s’exprime dans une qualité de service etune satisfaction hors norme des sociétaires. Pour Pascal Demurger, c’est d’ailleurs la qualité de la relation avec lessociétaires qui fonde le modèle de développement de la MAIF à long terme.

C- La MAIF, première entreprise à mission

Dans le prolongement de tous ces engagements environnementaux et dans la sphère du management, la MAIF estdevenue la première entreprise française à adopter le statut d’entreprise à mission créé par la loi PACTE.Concrètement, cela signifie que l’entreprise s’est dotée d’une raison d’être qui a été exposée à Nantes en fin mai 2019aux différentes parties prenantes de l’entreprise et qui a pris la formulation suivante : « Convaincus que seule uneattention sincère portée à l’autre et au monde permet de garantir un réel mieux commun, nous la plaçons au cœur dechacun de nos engagements et de chacune de nos actions. C’est notre raison d’être ».

A la suite de la formulation de cette raison d’être, la MAIF s’attelle maintenant à définir des « engagements précisévaluables et opposables envers les parties prenantes », en vue d’être adoptés lors de l’Assemblée générale de 2020.Conformément au statut de l’entreprise à mission, la MAIF va faire évoluer également sa gouvernance, en créant en2020 un comité ad hoc indépendant de sa direction générale : ce « comité des parties prenantes » auquel pourraientparticiper un représentant des salariés, un représentant des sociétaires, mais aussi des personnalités extérieures (éluspolitiques, associations, ONG) aurait pour rôle de suivre la mise en œuvre des engagements pris par la MAIF.

L’entreprise compte inscrire son action dans la durée. Comme le fait observer son Directeur général, « il n’y a pas deretour en arrière possible ; en initiant le mouvement, nous avons également l’ambition de créer un effetd’entraînement sur les autres entreprises ». Par ailleurs, en liaison avec ce nouveau statut, la MAIF approfondit lasingularité de sa marque. Cela se décline dans son nouveau plan stratégique 2019-2022 baptisé « Engagés pourdemain » qui repose sur une nouvelle identité de marque tournée vers les consommateurs citoyens et incarné dans unlogo modernisé unique pour le groupe (le vert disparaît au profit du rouge, mais l’entreprise garde sa signatured’« assureur militant ».

Conclusion

Selon Pascal Demurger (op. cit), « l’entreprise politique répond à une urgence à agir », à la fois sur le front del’environnement, mais aussi du social, pour contrer la montée d’inégalités devenues insoutenables politiquement, etcela au moment où les Etats et les institutions internationales sont devenus relativement impuissants.

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La « société à mission » offre un cadre pertinent pour mettre en œuvre cette dimension politique. Pour les entreprisesqui acceptent de modifier leurs statuts, c’est une révolution conceptuelle : l’entreprise n’est plus tournée sur elle-même, mais accepte officiellement, et même statutairement, des objectifs de contribution à l’amélioration du biencommun. Si indiscutablement la « société à mission » introduite par la loi PACTE peut permettre de repenser le lienentre l’entreprise et la société, deux limites sont toutefois actuellement bien présentes.

La première limite est le caractère facultatif de la société de mission. Comme le fait remarquer Olivier Favereau(« Entreprise à mission, codétermination et… éco-détermination », in « L’entreprise à mission », Réflexions sur leprojet de loi PACTE, Conférence de recherche du 02 mars 2019, France Stratégie), alors que la codétermination rendévidente la nature politique du couple société/entreprise, en affirmant que l’entreprise n’est plus seulement l’affaire ducapital, mais celle du capital et du travail, la faiblesse propre à la notion de « mission » est de venir s’ajouter àl’objectif permanent de satisfaire des « associés » sur le seul plan qui les définit : le plan financier, à savoir lesdividendes et les plus-values. Dans ces conditions, le passage optionnel de la société standard à la « société demission » risque d’être assez improbable. En attendant, la codétermination telle qu’elle est prévue par la loi PACTE faitassez peu bouger les lignes sur la question du nombre d’administrateurs salariés : ceux-ci vont passer de 1 à 2 dansles Conseils d’administration de 8 à 12 membres, et la suggestion du rapport Notat-Senard de passer à 3 à partir duseuil de 12 n’a pas été retenue (rappelons qu’il y a un ratio d’un tiers d’administrateurs salariés dans la plupart despays d’Europe, et même ma moitié en Allemagne).

La deuxième limite est que l’initiative française sur la société de mission ne suffit pas. Il faut que l’action nationale soitrelayée dans l’ensemble de l’Union européenne avec un cadre juridique adéquat pour favoriser l’émergence et ledéveloppement d’entreprises qui choisissent d’avoir un tel impact sur l’organisation de la société, et cela passe par lapromotion d’un label européen unique. Or, malgré un demi-siècle de construction en matière de marché commun, depolitique de la concurrence, de monnaie unique, l’Europe ne parvient toujours pas à faire avancer la dimension sociale.Alors que le continent européen a autrefois inventé la démocratie, le capitalisme, les droits de l’homme, lesyndicalisme et la protection sociale, sera-t-il capable de promouvoir une conception de l’entreprise qui réunifiel’économie et la démocratie, avec comme matrice commune la notion d’intérêt général ?

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Etude de casAuteur : Judith Leverbe

La MAIF- Partie Pédagogique

1- QCM (plusieurs bonnes réponses possibles)

1- Que signifie l’acronyme RSE ?

a) Responsabilité sociétale des états

b) Responsabilité sociale élargie

c) Responsabilité sociétale des entreprises

2- La MAIF a été créée en …

a) 1934

b) 1964

c) 1985

3- Une mutuelle d’assurance …

a) est une société à but non lucratif

b) repose sur la solidarité entre ses adhérents

c) ne couvre que les dépenses de santé

4- En France, aujourd’hui, les mutuelles d’assurance assurent …

a) 6% des automobiles

b) 16 % des automobiles

c) 60 % des automobiles

5- La société anonyme a été créée en France en …a) 1867b) 1878c) 1937

6- La SOSE désigne …

a) La Société Organisée et Socialement Ethique

b) La Société à Objectif Social et Ethique

c) La société à Objet Social Etendu

7- L’acronyme de la loi Pacte signifie :

a) Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation de l'Entreprise

b) Programme d’Adaptation et de Croissance et le Travail en Entreprise

c) Perspective d’Adaptation pour le Changement et la Transition des Entreprises

8- La SOSE repose sur …

a) La définition, dans les statuts de l’entreprise, d’objectifs humains ou sociaux

b) Des engagements environnementaux

c) Des obligations financières à l’égard des actionnaires

9- La « raison d’être » est …

a) Un projet entrepreneurial de court terme

b) L’objectif de l’entreprise en matière de croissance du chiffre d’affaire

c) Un projet qui s’inscrit dans une logique collective de long terme

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10- La Société à mission est tenue de …

a) Mettre en place un comité de suivi spécifique

b) Donner au Conseil d’administration la mission de contrôler de la réalité des engagements

c) De limiter les écarts de salaires en son sein

2- Les chiffres de la MAIF

Source : Maif.fr

Exercice : Classer les informations permettant de caractériser le poids économique et l’engagement sociétal de laMAIF dans le tableau suivant :Poids économique de la MAIF Engagement sociétal de la MAIF

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3- La création d’une société à missionDocument 1La loi PACTE raisonne en trois étapes, qui sont progressives et qui amènent, au troisième étage, à la société àmission. (…) La première étape, qui s’adresse à toutes les sociétés, c’est la modification du code civil. C’est unemodification transversale, qui touche toutes les sociétés, et qui demandera, dès l’entrée en vigueur de la loi PACTE,à toutes les sociétés d’être gérées dans leur intérêt social et de prendre en considération les enjeux sociaux etenvironnementaux de leurs activités. (…)

Il y a ensuite deux étages supplémentaires, qui sont quant à eux des étages volontaires, qui fonctionnent sous laforme d’une incitation. Le premier de ces étages, c’est la « raison d’être », qui intervient, aussi dans le Code civil, àl’article 1835. La loi incite les entreprises à se doter d’une raison d’être dans leurs statuts. (…) L’élément importantaujourd’hui est de comprendre que la société à mission vient coiffer ce dispositif en ajoutant un troisième et dernierpalier, en permettant aux sociétés qui se sont dotées d’une raison d’être d’aller encore plus loin et de se doterstatutairement d’objectifs sociaux et environnementaux.

Source : Pierre Rohfritsch, L’entreprise à mission dans la loi Pacte, France Stratégie, juillet 2019

Document 2 Comment créer une société à mission ?

Une société mission doit commencer par se doter d’une raison d’être, ce qui passe par une modification statutaireadoptée en assemblée générale.

La deuxième condition, c’est de prévoir dans les statuts, en plus de cette raison d’être, des objectifs sociaux etenvironnementaux que la société se donne pour mission de poursuivre dans le cadre de son activité (…) : il ne s’agitpas de créer une « mission » qui serait complètement séparée des activités normales de l’entreprise, qui n’aurait rienà voir avec son activité habituelle. Il s’agit d’une mission, d’objectifs sociaux et environnementaux, qui s’attache às’intégrer à l’activité même de la société. Pour des objectifs sociaux, la société pourrait par exemple réfléchir auxconditions de travail de ses salariés, aux profils de ses salariés, ou à leurs conditions de recrutement ; pour desobjectifs environnementaux, à réfléchir aux conditions de fabrication des produits manufacturés, en se dotant, parexemple, d’objectifs de réduction des émissions de carbone. Ces objectifs s’inscrivent dans le cadre de son activité,ce n’est pas une mission séparée de l’activité concrète de l’entreprise.

La troisième condition statutaire consiste à doter la société d’un comité de suivi de l’exécution de la mission. C’est uncomité qui doit être distinct des organes qui existent déjà dans la société. (…) Ce qu’il faut retenir c’est qu’il a pourmission de suivre les objectifs que la société a inscrit statutairement.

À ces trois conditions statutaires d’organisation interne se rajoutent deux conditions de vérification : la premièredemande à ce que l’exécution des objectifs fasse l’objet d’une vérification par un organisme indépendant. (…) C’estun audit externe. La deuxième condition externe consiste à inscrire les modifications statutaires au greffe du tribunalde commerce. Le greffier aura pour mission de vérifier que les trois conditions statutaires ont bien été ont bien étéremplies.

Source : Pierre Rohfritsch, L’entreprise à mission dans la loi Pacte, France Stratégie, juillet 2019

Exercice : La société à mission- Vrai-Faux ?

Vrai Faux

La société à mission a été créée aux Etats-Unis avant de l’être en FrancePour créer une société à mission, il faut un accord des pouvoirs publicsLa Société à Objet Social Étendu » est une des formes de l’entreprise àmissionLa « raison d’être » est le projet financier de l’entreprise La société à mission repose sur un projet entrepreneurial lié à un intérêtcollectif La Maif a été en France la 1ère société à mission

4- Atouts et limites de la société à mission

Document 3

Beaucoup disent que se doter d’une mission relève d’une volonté de communication, de marketing. L’argument secomprend mais en tant qu’économiste j’envisage aussi l’effet inverse, le risque réputationnel dans nos économiesdes réseaux sociaux en quête de transparence. Se doter d’une raison d’être ambitieuse peut être risqué – etheureusement qu’il en va ainsi. En cas de non-respect d’une raison d’être, les risques réputationnels sont majeurs,ce qui constitue aussi une condition d’auto-exécution de la raison d’être et ce qui contre en partie l’argumentcompréhensible du Commons ou Mission Washing (afficher n’est-ce pas déjà s’engager ?). Je pense alors qu’il estsans doute moins important de savoir si les entreprises choisiront d’être des « sociétés à mission » qu’elles se dotent

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d’une raison d’être collective (au service de l’intérêt général, dont la conception peut aussi transparaître dans letexte) permettant de répondre avec ambition aux exigences sociétales. Il faut donc tendre vers des raisons d’êtred’intérêt général. Source : Virgile Chassagnon, La théorie de la firme comme entité fondée sur le pouvoir : quelles missions pourl’entreprise ? , France Stratégie, juillet 2019

Exercice :

1- Quelle est la principale critique portée aux notions de mission et de raison d’être ?

2- Quel est le contre-argument présenté par l’auteur ?

5-EXERCICE TYPE BAC : E3C - Raisonnement appuyé sur un dossier documentaire

Sujet : À l’aide du dossier documentaire et de vos connaissances, vous montrerez comment

l’entreprise peut avoir un engagement sociétal.

Document 1

Les pratiques « engagées sociétalement » des entreprises visent à mieux concilier les attentes de la société civileavec les finalités socio-économiques des entreprises. En effet, les promoteurs d’une plus grande responsabilité desacteurs économiques vis-à-vis de la société, de plus en plus attentifs depuis vingt ans à ce que les entreprisesrecherchent la réduction de leurs externalités négatives sur la société ou l’environnement, voient dans l’entreprise àmission tantôt un risque de « green & socialwashing » tantôt le moyen de cette meilleure conciliation entre l’intérêtgénéral et les intérêts privés. Et, au fond, il convient de rester mesuré quant à la réduction potentielle de l’écartentre les deux puisque sa réalité sera fonction de l’intérêt que portera chaque entreprise à se conformer à ce nouvelinstrument d’incitation à l’engagement sociétal. Ce dernier n’est en fait pas réductible à cette nouvelle procédure dereconnaissance des actions menées par ailleurs qui n’introduit pas d’autres obligations comme une participation pluslarge des salariés ou encore le partage de la valeur, à l’instar des ESUS. La définition d’une mission est davantage unoutil de structuration d’une démarche de mise en cohérence des engagements sociétaux de son entreprise.Source : Camille Phe, De L’engagement social ou sociétal à la mission. Ethnographie d’un réseau d’entreprises,France Stratégie, juillet 2019

Document 2 Quelques étapes de l’engagement sociétal de la MAIF

2019 : Primée pour sa relation client. En 2019, pour la 15e fois, la MAIF a reçu le premier prix de la Relationclient dans le secteur assurance.

2015 : Pour une société collaborative. En 2015, la MAIF s'est dotée d'une structure dédiée au financement del'innovation, du digital et de l'économie collaborative : MAIF Avenir.

2013 : Investisseur responsable. Le groupe MAIF est reconnu pour sa gestion prudente et raisonnée. Il reçoit leprix de l’Investisseur responsable créé par Natixis et Amadéis. Il crée, cette même année, le fonds MAIFinvestissement social et solidaire.

2002 : Des citoyens éclairés. La MAIF intègre un nouveau média à son engagement en faveur de l’éducation pourtous : ses solutions éducatives sont mises en accès libre sur le Net.

1989 : Anticiper les risques. Fondation MAIF est créée pour soutenir la recherche et prévenir les risques quiaffectent les personnes et leurs biens : routiers, naturels, numériques…

1988 : Ouverture à tous. Création de sa filiale, Filia-MAIF, ouverte à tous ceux qui partagent les valeurs du groupeMAIF. Le succès est immense !

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1981 : Voyager serein. La MAIF et les autres assurances mutuelles niortaises donnent naissance à IMA (Intermutuelles assistance) et secourent leurs sociétaires accidentés ou en panne.

1980 : Éduquer aux risques. Création de l’association Prévention MAIF. Ses bénévoles interviennent partout enFrance pour dispenser une éducation aux risques routiers et domestiques.

1950 : La réussite inspire. La croissance de la MAIF après la guerre inspire d’autres corporations. La MAIF soutientla naissance de la Maaf. Suivront la Macif et la Matmut.

1934 : Le prix de l’indépendance. Aujourd’hui, on les appellerait des « makers » ou des « start-uppers ». 156instituteurs pionniers créent la MAAIF (Mutuelle d'assurance automobile des instituteurs de France).

Source : Maif.fr

Document 3 Une évolution profonde de l’entreprise

Ces dispositions* instaurent une rupture doctrinale profonde : l’entreprise n’est plus réductible à un pur agentéconomique. Certes, le profit des associés reste une contrainte vitale de l’entreprise, mais il n’est pas la seulefinalité. Le droit stipule désormais que l’entreprise doit prendre sa part de responsabilité dans le développementcollectif. Alors que depuis plus de deux siècles, la société devait -selon le code civil- être « gérée dans l’intérêtcommun des associés », le texte actuel de la loi stipule que la « société doit être gérée dans son intérêt social, enprenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

Source : Armand Hatchuel, Blandine Segrestin, « Avec l’article 61 de la loi Pacte, l’entreprise n’est plus réductible àun pur agent économique, Le Monde, 26 octobre 2018

Il s’agit des dispositions de la loi Pacte

Document 4 Les principes fondateurs de la Maif

SOCIÉTAIRE : AU COEUR DU MODÈLELa MAIF n’a ni capital social ni actionnaires. Elle exerce son activité au seul bénéfice de ses sociétaires, auxquels ellegarantit la qualité et la pérennité de sa protection et de ses services. À la fois assureur et assuré, chaque sociétaireest membre à part entière d’une communauté dont il partage les valeurs et les règles. Par ses comportementsquotidiens et ses engagements, il est un acteur responsable de la bonne santé du groupe. Il apporte sa pierre àl’édifice.

GOUVERNANCE MUTUALISTESociété de personnes, MAIF se définit par son organisation démocratique. Sa gouvernance est une émanation directedes sociétaires. Ceux-ci élisent leurs délégués, qui élisent à leur tour les membres du conseil d’administration,instance décisionnaire de la mutuelle d'assurance. Au côté du président, choisi parmi les membres du conseil, ledirecteur général met en œuvre la stratégie de l’entreprise. Ce modèle de gouvernance est original : il offre lapossibilité à tout sociétaire de gravir tous les échelons de responsabilité, jusqu’à la présidence de la mutuelled'assurance. Il garantit une connaissance très fine des intérêts du collectif.

Source : Maif.fr

LEXIQUE

GOUVERNANCE : Ensemble des processus, des institutions, des réglementations encadrant la manière dontl'entreprise est dirigée, administrée et contrôlée.

PARTIES PRENANTES : les parties prenantes (en anglais : stakeholder) sont les acteurs concernés par les

décisions de l’entreprise, que ce soit de façon positive ou négative.

RSE : la responsabilité sociétale des entreprises a été définie en 2011 par la Commission Européenne comme « la

responsabilité des entreprises (RSE) vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société ». Il s’agit d’un processuswww.melchior.fr

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permettant que la gouvernance de l’entreprise intègre les préoccupations en matière sociale, environnementale,

éthique, de droits de l’homme et de consommateurs dans leurs activités commerciales et leur stratégie de base.

SOCIETE A MISSION : nouvelles formes de sociétés commerciales qui se définissent statutairement, en plus de

leur but lucratif, une finalité d’ordre social ou environnemental.

SOSE : Acronyme pour un nouveau statut d’entreprise appelée « Société à Objet Social Étendu ». Il s’agit de l’une

des formes que peut prendre l’entreprise à mission. Ce statut permet aux entreprises de définir les objectifs sociaux

ou environnements qu’elle se donne.

CORRIGE

La MAIF- Partie pédagogique- CORRIGES

La MAIF- Partie Pédagogique

1. QCM (plusieurs bonnes réponses possibles)

1. Que signifie l’acronyme RSE ? c) Responsabilité sociétale des entreprises

2. La MAIF a été créée en …b)1964

3. Une mutuelle d’assurance …

a) Est une société à but non lucratifb)Repose sur la solidarité entre ses adhérents

4. En France, aujourd’hui, les mutuelles d’assurance assurent …c) 60 % des automobiles

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5. La société anonyme a été créée en France en …

a) 1867

6. La SOSE désigne … c) La société à Objet Social Etendu

7. L’acronyme de la loi Pacte signifie :

a)Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation de l'Entreprise

8. La SOSE repose sur :

a) La définition, dans les statuts de l’entreprise, d’objectifs humains ou sociaux b) Des engagements environnementaux

9. La « raison d’être » est …a) Un projet qui s’inscrit dans une logique collective de long terme

10. La Société à mission est tenue de …

a) Mettre en place un comité de suivi spécifique

2. Les chiffres de la MAIF

Exercice : Classer les informations permettant de caractériser le poids économique et l’engagement sociétal de laMAIF dans le tableau suivant :

Poids économique de la MAIF Engagement sociétal de la MAIF3 millions d’assurés Utilisation d’énergie renouvelable à 100%Croissance du nombre d’assurés + de 80 % de placements socialement

responsables6ème assureur auto Investissement dans l’économie sociale et solidaireHausse du chiffre d’affaires Investissement dans l’économie innovante et

collaborative1er assureur des associations

3. La création d’une société à mission

Exercice : La société à mission- Vrai-Faux ?

Vrai Faux

La société à mission a été créée aux Etats-Unis avant de l’être en France X

Pour créer une société à mission, il faut un accord des pouvoirs publics X

La Société à Objet Social Étendu » est une des formes de l’entreprise àmission

X

La « raison d’être » est le projet financier de l’entreprise X

La société à mission repose sur un projet entrepreneurial lié à un intérêtcollectif

X

La MAIF a été en France la 1ère société à mission X

4. Atouts et limites de la société à mission

Exercice :

1- Quelle est la principale critique portée aux notions de mission et de raison d’être ?

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C’est le risque de faire de la raison d’être qu’une volonté de communication et de marketing, ce que certainsont appelé le « Green-Washing », renvoyant ainsi la définition d’une « mission » ou d’une « raison d’être » àun simple affichage de la part des entreprises. La RSE a donné lieu au même type de remarques critiques.

2- Quel est le contre-argument présenté par l’auteur ?

L’auteur considère que l’affichage de la mission que se donne l’entreprise exercera une forte pression àréaliser l’objectif du fait d’un risque au niveau de la réputation, ce que beaucoup d’entreprises ne peuvent sepermettre sans prendre des risques pour leur avenir.

5. EXERCICE TYPE BAC : E3C - Raisonnement appuyé sur un dossierdocumentaire

Sujet : À l’aide du dossier documentaire et de vos connaissances, vous montrerez comment

l’entreprise peut avoir un engagement sociétal.

L’entreprise moderne ne peut plus être simplement considérée comme un simple agent économique dont l’objectifultime est la distribution de rémunération à ses propriétaires. De fait, elle est un acteur puissant au niveau collectif,elle transforme les modes de vie et façonne les sociétés par les innovations qu’elle met en œuvre… C’est sur cesbases que s’est développée l’idée d’une entreprise intégrée dans un tissu de parties prenantes. L’entreprise peutavoir un engagement sociétal par le biais de la définition de son champ de responsabilité, sociale, économique etenvironnementale. Elle peut aussi, depuis peu en France, aller plus loin en se donnant une « raison d’être » voiremême une mission.

1- Un premier niveau d’engagement : la RSE

Depuis 2011, la RSE (responsabilité sociétale des entreprises) est définie par la commission européenne comme « la responsabilité des entreprises (RSE) vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société ».

La gouvernance de l’entreprise intègre ainsi des préoccupations sociales, environnementales, éthiquesdans ses activités commerciales et sa stratégie de production. (Document1)

Le cas particulier de la MAIF : une société coopérative, sans actionnaire, sans capital social. La MAIFs’inscrit très tôt dans cette logique de RSE. Notons deux exemples d’engagement sociétal assez précoces.En 2002, la MAIF s’engage en faveur de l’éducation pour tous en mettant en place des moduleséducatifs en accès libre sur le Net. En 2013, Le groupe MAIF reçoit le prix de l’Investisseur responsableet crée, le fonds MAIF investissement social et solidaire. (Document 2)

2- Se doter d’une “raison d’être”

Se doter d’une raison d’être collective consiste pour l’entreprise à intégrer son activité à une logiqued’intérêt général et à des exigences sociétales. Il peut s’agir, comme dans le cas de la RSE, de réduireles inégalités salariales ou encore de respecter des engagements environnementaux, etc.

Ce type de gouvernance consiste donc à institutionnaliser la mission de long-terme de l’entreprise et defaire naître un nouveau compromis productif mettant en avant le caractère collectif du projetentrepreneurial. Cette logique est donc opposable aux actionnaires qui mettraient en avant leurs intérêtscourt-termistes.

3- La société à mission: inscrire encore un peu plus l’entreprise dans l’intérêt collectif

La société à mission vient compléter la « raison d’être » en permettant aux sociétés qui le souhaitent dese doter statutairement d’objectifs sociaux et environnementaux. Il s’agit d’une nouvelle forme desociété commerciale qui, à côté de son but lucratif, se donne une finalité d’ordre social ouenvironnemental. (Documents 1 et 3)

Avec la SOSE, l’objectif est d’ancrer l’entreprise dans une logique de long terme. Le seul objectif du profità court terme n’est donc plus l’horizon stratégique de l’entreprise. Le rôle et l’autonomie du dirigeantsont donc affirmés face à l’intérêt à court terme des actionnaires.

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Ce statut nécessite des dispositifs de contrôle par un organe indépendant des organes de gouveranance.L’engagement est donc beaucoup plus avancé.

L’exemple de la MAIF (document 4): une gouvernance autour de la démocratie et de la solidarité

Penser l’entreprise globalement, à travers son ancrage sociétal, n’est pas une utopie mais bien une manière deredonner sa place voire sa légitimité à l’entreprise dont l’image est écornée par la financiarisation qui l’aprofondément transformée.

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