LA MÉTHODE DISTRIBUTIONNELLE

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  • 7/28/2019 LA MTHODE DISTRIBUTIONNELLE

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    SANCE 7 : LA MTHODE DISTRIBUTIONNELLE

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    La premire question que l'on se pose lorsqu'on tudie une langue est toutsimplement la suivante : qu'est-ce qu'on tudie ? En effet, la parole seprsente comme un flot inanalysable premire vue, et si le travailscientifique consiste trouver des rgularits dans l'objet en question, celasignifie qu'on peut rduire des phnomnes divers des structuresexplicatives. Mais pour cela, il faut trouver des units. D'o la question :comment faire ? Le distributionnalisme, mthode initie par le linguiste

    amricain Lonard Bloomfield dans les annes 20 (et l'origine sans rapportavec le structuralisme, bien que les deux courants se rejoignent en partie parla suite), donne la mthode suivante pour rpondre la question :

    - il faut segmenter l'objet pour trouver des units sur lesquelles on peuttravailler;- il faut ensuite tablir les lois rgissant l'unit trouve;

    - enfin, il faut regrouper en une mme classe les units qui obissent auxmmes lois.

    L'opration fondamentale qui permet d'appliquer cette mthode est lasubstitution. Il s'agit, pour dlimiter une unit, de chercher si elle peut tre

    remplace par d'autres. Soit l'expression suivante : [ ]. On peut fairepermuter le segment [] avec [], obtenant ainsi l'expression[]. On a donc isol l'unit []. Il s'agit maintenant d'tablir lesrgles qui la gouvernent, c'est--dire de trouver les contextes dans lesquelselle peut apparatre (on abadonne par commodit l'alphabet phontique,quoiqu'on devrait faire toute l'analyse sur des sons : il ne faut pas croire queles blancs de l'orthographe normale isolent des units, ou plutt, il faut le

    prouver, d'autant que ce n'est des fois pas le cas). On va ainsi constater que"gentil" apparat dans "le gentil garon mange une pomme", "ce garon estgentil", etc. Enfin, on cherche, nouveau par substitution, l'ensemble deslments qui obissent aux mmes rgles. On va trouver "mchant", "petit","grand", etc.

    On a ainsi dfini non seulement des units mais aussi une classe d'units aucomportement (syntaxique) semblable. On a donc segment l'objet et on l'arduit, puisqu'au lieu de traiter quatre units distinctement ("gentil","mchant", "petit", "grand"), on les traite en bloc, dans la mesure o elles

    appartiennent la mme classe d'quivalence, c'est--dire qu'elles entrentdans les mmes contextes. De plus, pour en revenir la citation de Culioli

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    (voirsance 1), on a fait une hypothse sur le fonctionnement de la facultde langage, et donc de l'esprit : en effet, si on ne rduisait pas les diverslments des classes, on devrait penser que chaque lment porte avec luiles rgles de son fonctionnement, ce qui crerait un travail intellectuelimmense. Au contraire, si chaque lment appartient une classe, alors il

    suffit de se demander (inconsciemment) comment cette classe fonctionnepour savoir comment l'lment fonctionne. Ainsi, si on a mille lments etqu'ils appartiennent la mme classe, au lieu d'avoir mille fois la mme rgle,on ne l'a qu'une seule fois. Sans cette simplification, le langage seraitinutilisable!

    Dans ce travail, on a mis en jeu dex types de relations trs importantes, et quiont t dfinies par Saussure :

    - les relations syntagmatiques sont celles qu'un lment entretient avec

    d'autres lments d'un mme nonc. Par exemple, dans "le gentil garon","gentil" entre dans une relation syntagmatique avec "le" et "garon;- les relations paradigmatiques sont celles qu'un lment entretient avec leslments qui peuvent lui tre substitus dans un mme contexte. Parexemple, dans le mme nonc, "gentil" est en relation syntagmatique avec"petit", "grand", "mchant", etc.

    (Note : les relations paradigmatiques forment un paradigme. Cependant, lesrelations syntagmatiques ne forment pas toutes un syntagme, dans la mesureo un syntagme est une relation syntagmatique particulire : voir l'analyse en

    constituants.)

    On peut donc dfinir une classe d'quivalence comme un paradigme ayantles mmes possibilits syntagmatiques.

    Cette analyse permet par ailleurs de distinguer plusieurs lments sousl'apparence d'un seul, et donc de ranger une forme donne dans plusieursclasses d'quivalence. Ainsi, dans un premier temps, le test de la substitutionva identifier une unit "bien", puisqu'on peut la permuter avec "normment"'dans "il a bien mang", avec "mauvais" dans "ce film est bien" et avec "sens"dans "le bien commun". On peut donc penser qu'on a une unit "bien" quientre dans les contextes "il a - mang", "ce film est -" et "le - commun".Cependant, si on essaie de construire une classe d'quivalence, c'est--dire sion cherche les lments avec le mme comportement, on va constaterqu'on n'en trouve aucun, ou plutt qu'on trouve des lments diffrents pourchaque contexte. Dans "il a bien mang", on va trouver "normment","beaucoup", "rapidement", etc., dans "ce film est bien", on va trouver"mauvais", "nul", "intressant", etc., et enfin dans "le bien commun", on vatrouver "sens", "souhait", "pot", etc. Or ces diverses units ne sont paspermutables entre elles, c'est--dire que "beaucoup", par exemple, ne vapermuter ni avec "mauvais", ni avec "sens". C'est donc qu'on a affaire trois

    classes d'quivalences diffrentes, qui se distinguent par trois types decontexte. Autrement dit, on a trois paradigmes. Ainsi, malgr l'unit formelle

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    et historique de "bien", il faut voir en cet lment trois units distinctes.Une classe d'quivalence est donc constitue par les relationssyntagmatiques qu'elle permet, et pas par les lments qui y entrent premire vue. En d'autres termes, une classe d'quivalence est un ensemblede rgle (d'apparition dans un ou plusieurs contextes) plutt qu'un ensemble

    d'lments. Ces derniers obissent aux rgles de la classe.

    Classes d'quivalence et parties du discoursLa grammaire traditionnelle distingue neuf ensembles d'units dans leslangues, dites "parties du discours" : Nom, Adjectif, Article, Verbe, Adverbe,Conjonction, Prposition, Pronom, Interjection. Ces catgories sont dfiniessurtout smantiquement, et sont assez peu fiables. Ainsi, on dit que le Nomdnote une entit, que le Verbe dnote une action, et pourtant "nage" est unnom, et dnote une action, par exemple. Il est cependant courant de

    nommer les classes d'quivalence d'aprs les parties du discours. Ainsi laclasse dfinie par la relation syntagmatique |Dt (Adj) - (Adj)| recevral'tiquette Nom (pour comprendre la notation utilise, voir la sance 9).Cependant, cela peut-tre trompeur. La catgorie des Adverbes, parexemple, est trs peu homogne et ses divers lments sont loin d'apparatretous dans les mmes contextes. Ainsi, on aura "Marie m'a pos un lapin; je nelui en veux cependant pas" mais pas "Marie m'a pos un lapin; je ne lui enveux mchamment pas". En effet, "cependant" est ce qu'on appelle un"connecteur" (il relie deux phrases) tandis que "mchamment" est un"circonstant" (il prcise la manire). On aurait encore moins : "je ne lui en veux

    trs pas".

    Niveaux d'analyseLes units que l'on distingue dpendent du niveau auquel on se place, bienque nous ne l'ayons pas prcis dans ce qui prcde. Chaque lment sedfinit par une relation de constituance : il est constitu par les units duniveau infrieur et il constitue les units du niveau suprieur (cf. Benveniste,"Les niveaux de l'analyse linguistique"), de la manire suivante :

    Quand on tudie une unit d'un niveau donn, on l'tudie dans le contextedu niveau immdiatement suprieur. Ainsi, quand on tudiait les phonmes(voir sance 4), on travaillait dans le cadre des morphmes (quoique pour

    simplifier nous nous soyons attachs aux mots). De mme, notre analyse de"petit" se plaait dans le cadre du syntagme, en l'occurrence le syntagme

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    nominal. Il est noter que la reprsentation ci-dessus est simplifie, dans lamesure o tous les niveaux ne sont pas indiqus : la syllabe, par exemple, oupar ailleurs le fait qu'un syntagme comme "la souris" n'entre pas forcmentdans une phrase, mais peut servir former un autre syntagme, comme dans"la queue de la souris". Cette problmatique n'a pas nous occuper pour le

    moment, elle a trait l'analyse en constituants.Quand on construit des classes d'quivalence, ce qui nous intresse, c'est lemot. Le morphme est une unit trop petite et au fonctionnement troprestreint pour pouvoir entrer dans une classe d'quivalence au sens propre,tandis que le syntagme a un fonctionnement particulier qui demande d'avoirdj pratiqu une premire analyse (voir sance 9) et qui ncessite desurcrot une tude syntaxique plus fine.

    Au final, on a deux mthodes complmentaires : d'un ct, on segmente un

    nonc pour y trouver des unit(s) et dterminer leurs classe(s)d'quivalence. De l'autres, ces units sont dj donnes et il s'agit de vrifierqu'il n'y en a bien qu'une seule, ou qu'elle entre bien dans telle ou telle classed'quivalence. La premire mthode est trs utile pour tudier une langueinconnue, et la seconde permet de s'assurer que l'analyse (souvent lguepar la tradition) que l'on fait sur une langue dj tudie est pertinente.

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