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Christoph Schiller LA MONTAGNE MOUVEMENT l’aventure de la physique vol . i chute , flux et chaleur www.motionmountain.net

La Montagne Mouvement - L'Aventure de la Physique

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  • Christoph Schiller

    LA

    MONTAGNE MOUVEMENT

    laventure de la physique vol. i

    chute, flux et chaleur

    www.motionmountain.net

  • Christoph Schiller

    La Montagne Mouvement

    LAventure de la Physique

    Volume I

    Chute, Flux et Chaleur

    Traduit de l anglais par Benot CLENET

    23e dition, disponible gratuitement sur

    www.motionmountain.net

  • Editio vicesima tertia.

    Proprietas scriptoris Christophori Schillersecundo anno Olympiadis vicesimae nonae.

    Omnia proprietatis iura reservantur et vindicantur.Imitatio prohibita sine auctoris permissione.Non licet pecuniam expetere pro aliquo, quodpartem horum verborum continet ; liberpro omnibus semper gratuitus erat et manet.

    Vingt-troisime dition.

    Copyright 2009 Christoph Schiller,deuxime anne de la 29e Olympiade.

    Ce chier pdf est distribu sous licence Creative CommonsPaternit-Pas d Utilisation Commerciale-Pas de Modication 3.0 Allemagnedont le texte peut tre consult en intgralit sur la pagecreativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/de/deed.fr,avec la restriction supplmentaire que toute reproduction,distribution et utilisation, partielle ou totale, dans n importe quelproduit ou service, qu il soit commercial ou non, nest pas autorisesans le consentement crit du dtenteur du droit d auteur.Toute personne est libre de consulter, enregistrer et imprimerce chier pdf pour son usage personnel, et de le diuser pardes moyens lectroniques, mais uniquement sous sa forme originaleet de manire entirement gratuite.

    http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/3.0/de/deed.fr
  • Britta, Esther et Justus Aaron

  • Die Menschen strken, die Sachen klren.

  • PRFACE

    Primum movere, deinde docere*.

    AntiquitCe livre s adresse toute personne curieuse de la nature et du mouvement. La curio-

    sit portant sur la manire dont se meuvent les gens, les animaux, les choses, les imageset l espace nous entrane dans de multiples aventures. Ce volume prsente les meilleuresd entre elles dans le domaine du mouvement familier. Lobservation du mouvement detous les jours nous permet de dduire six propositions fondamentales : le mouvementquotidien est continu, conserv, relatif, rversible, invariant par rexion, et... fainant.Oui, la nature est vraiment paresseuse : dans chacun de ses mouvements, elle minimisele changement. Ce texte explore comment ces rsultats sont dduits et comment ils s ac-commodent de toutes les observations qui semblent les contredire.

    La majorit des points de dpart de la physique moderne, dont la structure est indi-que sur la Figure 1, est constitue des rsultats issus dumouvement quotidien. Le prsentvolume le premier d une collection qui en compte six propose un tour d horizon dela physique ; il rsulte d une triple aspiration que j ai poursuivie depuis 1990 : prsenterle mouvement d une manire simple, moderne et vivante.

    An dtre simple, le texte se focalise sur les concepts, tout en donnant aux math-matiques le niveau minimum ncessaire. La priorit est donne la comprhension desconcepts de la physique plutt qu l utilisation des formules dans les calculs. Tout cetexte est la porte d un tudiant qui accde au premier niveau universitaire.

    An dtre moderne, ce texte est enrichi par les nombreux joyaux aussi bien tho-riques quempiriques qui parsment la littrature scientique.

    An dtre vivant, ce texte tente de surprendre le lecteur autant que possible. Lire unlivre de physique gnrale, ce devrait tre comme assister un spectacle de magie. Nousobservons, nous nous tonnons, nous nen croyons pas nos yeux, nous rchissons, etnalement nous comprenons le truc. Lorsque nous observons la nature, nous faisons sou-vent cette mme exprience. C est pourquoi chaque page propose au moins une surpriseou une provocation qui mettra la sagacit du lecteur l preuve. Un grand nombre deds intressants sont proposs.

    La devise de ce texte, die Menschen strken, die Sachen klren, une phrase clbre surla pdagogie due Hartmut von Hentig, se traduit ainsi : Fortier les hommes, clarierles choses . Clarier les choses ncessite du courage, puisque changer les habitudes depense engendre la peur, souvent masque par la colre. Mais en surpassant nos peurs

    * Dabord mouvoir, ensuite enseigner . Dans les langues modernes, ce type mentionn de mouvement(celui du cur) est souvent appelmotivation : ces deux termes sont issus de la mme racine latine.

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  • 8 prface

    Physique galilenne, chaleur et lectricit

    Aventures : sport, musique, navigation, cuisine,

    dcrire la beaut et comprendre son origine,

    utiliser llectricit et les ordinateurs,

    comprendre le cerveau et ltre humain.

    Relativit restreinte

    Aventures : lumire,

    magntisme, contrac-

    tion des longueurs,

    dilatation du

    temps et

    E0 = mc2 .

    Mcanique quantique

    Aventures : mort,

    sexualit, biologie,

    admirer lart et les

    couleurs, toute la

    technologie de pointe,

    mdecine, chimie

    et volution.

    Mcanique quan-

    tique et gravitation

    Aventures : neutrons

    qui rebondissent, com-

    prendre la crois-

    sance des

    arbres.

    Description unifie du mouvement

    Aventures : comprendre le

    mouvement, joie intense

    avec la pense, saisir

    une lueur dextase,

    calculer les

    masses.

    G c h, e, k

    PHYSIQUE :

    Dcrire le mouvement

    laide de laction.

    Thorie quantique

    des champs

    Aventures : btir des

    acclrateurs, compren-

    dre les quarks, toiles,

    bombes et fondements

    de la vie, la matire,

    le rayonnement.

    Comment les

    objets familiers

    rapides et massifs

    se dplacent-ils ?

    Comment se dplacent

    les objets minuscules ?

    Que sont les choses ?

    Pourquoi le mouve-

    ment se produit-il ?

    Que sont lespace,

    le temps et les par-

    ticules quantiques ?

    Relativit Gnrale

    Aventures : le

    ciel nocturne, me-

    surer la courbure

    de lespace, explo-

    rer les trous noirs

    et lunivers,

    lespace et le

    temps.

    Gravitation

    classique

    Aventures :

    randonne en montagne,

    ski, voyage dans lespace,

    les prodiges de lastronomie

    et de la gologie.

    F I G U R E 1 Une carte complte de la physique : les connexions sont dfinies par la vitesse de la lumirec, la constante de la gravitation G, la constante de Planck h, la constante de Boltzmann k et la chargelmentaire e.

    nous gagnons en force. Nous ressentons alors des motions intenses et enivrantes. Toutesles grandes aventures de la vie et explorer le mouvement en est une mnent cela.

    Munich, 10 Janvier 2009.

    Remerciement

    Je remercie Benot Clnet pour sa traduction de ce volume. Sa patience, son nergieet son professionnalisme sont exemplaires.

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  • prface 9

    Conseil au lecteur

    Daprs mon exprience d enseignant, je connais une mthode dapprentissage quiest toujours parvenue transformer des lves en chec en lves gagnants : si vous lisezun livre pour l tudier, rsumez chaque section que vous lisez, dans vos propres termes, voix haute. Si vous ny arrivez pas, lisez la section une nouvelle fois. Recommencezjusqu ce que vous puissiez rsumer clairement ce que vous avez lu avec vos propresmots, voix haute. Vous pouvez le faire tout seul dans votre chambre, ou avec des amis,ou tout en marchant. Si vous faites cela avec tout ce que vous lisez, vous rduirez votretemps dapprentissage et de lecture de manire signicative. De surcrot, vous prendrezbeaucoup plus de plaisir apprendre avec des bons ouvrages et dtesterez nettementmoins les mauvais manuels. Les prodiges de cette mthode peuventmme l utiliser touten coutant un cours, voix basse, vitant ainsi de prendre constamment des notes.

    Comment utiliser ce livre ?

    Le texte en vert, que l on trouve dans un grand nombre de notes en marge, signale unlien sur lequel on peut cliquer dans un lecteur pdf. Ces liens en vert sont soit des rf-rences bibliographiques, des notes de bas de page, des rfrences croises vers d autrespages, des solutions aux ds ou des pointeurs vers des sites Web.

    Les indices et solutions des ds sont donns dans l annexe. Les ds sont classsainsi : niveau recherche (r), dicile (d), niveau tudiant standard (s) et facile (e). Lesds des types r, d ou s pour lesquels aucune solution na encore t incorpore dans lelivre sont marqus (pe).

    Appel contribution

    Ce texte est et demeurera librement tlchargeable depuis Internet. En change,envoyez-moi s il vous plat un bref courriel [email protected], propos desquestions suivantes :

    Quest-ce qui ntait pas clair ? Quelle histoire, sujet, nigme, image ou lm navez-vous pas compris ? Quest-ce qui devrait tre amlior ou corrig ?Dfi 1 s

    Vous pouvez galement ajouter votre retour directement sur www.motionmountain.net/wiki. Au nom de tous les lecteurs, merci par avance pour votre collaboration. Si votrecontribution est particulirement pertinente, et si vous le souhaitez, votre nom sera men-tionn dans les remerciements, ou bien vous recevrez une rcompense, ou les deux. Maispar-dessus tout, trs bonne lecture !

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  • Table des Matires

    14 1 Pourquoi s intresser au mouvement ?

    Le Mouvement existe-t-il ? 15 Comment devrions-nous parler du mouve-ment ? 17 Quels sont les dirents types de mouvements ? 19 Perception,continuit et changement 23 Le monde a-t-il besoin dtats ? 25 Curiosits etds amusants sur le mouvement 26

    30 2 De la mesure du mouvement la continuit

    Quest-ce que la vitesse ? 31 Quest-ce que le temps ? 32 Pourquoi les horlogestournent-elles dans le sens des aiguilles d une montre ? 38 Est-ce que le tempss coule ? 38 Quest-ce que l espace ? 39 Lespace et le temps sont-ils abso-lus ou relatifs ? 42 La taille pourquoi les surfaces existent-elles, mais pas lesvolumes ? 43 Quest-ce quune ligne droite ? 47 Une Terre creuse ? 48 Cu-riosits et ds amusants sur l espace et le temps quotidiens 49

    57 3 Comment dcrire le mouvement la cinmatique

    Le jet et le tir 59 Quest-ce que le repos ? 61 Les objets et les particules ponc-tuelles 64 Des jambes et des roues 67

    70 4 Des objets et des images la conservation

    Mouvement et contact 71 Quest-ce que la masse ? 72 Le mouvement est-ilternel ? 79 Appendice sur la conservation l nergie 81 La vitesse est-elleabsolue ? La thorie de la relativit quotidienne 84 La rotation 87 Des rouesen rotation 90 Comment marchons-nous ? 91

    94 5 De la rotation de la Terre la relativit du mouvement

    Comment la terre tourne-t-elle ? 99 La Terre se dplace-t-elle ? 102 La rota-tion est-elle relative ? 105 Curiosits et ds amusants sur le mouvement quoti-dien 106 Des jambes ou des roues ? Suite 116

    120 6 Dynamique due la gravitation

    Proprits de la gravitation 123 La dynamique Comment les choses bougent-elles dans plusieurs dimensions ? 128 La gravitation dans le ciel 129 La Lune 131 Les orbites 133 LesMares 136 La lumire peut-elle tomber ? 139 Quest-ceque la masse ? Suite 140 Curiosits et ds amusants sur la gravitation 142

    155 7 La mcanique classique et la prdictibilit du mouvement

    Devrait-on employer la force ? 156 tats complets conditions initiales 162 Les surprises existent-elles ? Lavenir est-il dj tout trac ? 164 Une conclusiontrange sur le mouvement 168 Descriptions gnrales du mouvement 168

    173 8 Mesurer le changement avec l action

    Le principe de moindre action 177 Pourquoi le mouvement est-il si souvent li-mit ? 182 Curiosits et ds amusants sur les lagrangiens 186

    189 9 Mouvement et symtrie

    Pourquoi pouvons-nous rchir et discuter ? 189 Points de vue 191 Symtrieset groupes 192 Reprsentations 193 Symtries, mouvement et physique gali-lenne 196 Reproductibilit, conservation et thorme de Noether 200 Curio-sits et ds amusants sur la symtrie du mouvement 205

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  • 12 table des matires

    206 10 Mouvements lmentaires des corps tendus vibrations etondes

    Les ondes et leur mouvement 208 Pourquoi pouvons-nous nous parler ? Leprincipe de Huygens 214 Signaux 215 Ondes solitaires et solitons 217 Curio-sits et ds amusants sur les ondes et les corps tendus 220

    227 11 Les corps tendus existent-ils ? les limites de la continuitMontagnes et fractales 227 Une barre de chocolat peut-elle durer pour tou-jours ? 228 quelle hauteur les animaux peuvent-ils sauter ? 230 lagaged arbres 230 Lcho du silence 231 Des petites billes dures 232 Le mou-vement des uides 235 Curiosits et ds amusants sur les uides 238 Curio-sits et ds amusants sur les solides 244 Quest-ce qui peut bouger dans la na-ture ? 247

    250 12 De la chaleur l invariance temporelleTemprature 250 Entropie 254 Courant d entropie 256 Les systmes isolsexistent-ils ? 257 Pourquoi les ballons ont-ils besoin despace ? La n de la conti-nuit 257 Mouvement brownien 259 Entropie et particules 261 Lentropieminimale de la nature le quantum d information 263 Pourquoi ne pouvons-nous pas nous souvenir du futur ? 264 Est-ce que tout est fait de particules ? 265 Pourquoi les pierres ne peuvent tre ni continues ni fractales, ni faites de petitesbilles dures 267 Curiosits et ds amusants sur la chaleur 268

    275 13 Auto-organisation et chaos l lgance de la complexitCuriosits et ds amusants sur l auto-organisation 282

    285 14 Des frontires de la physique aux limites du mouvementmes de recherche en dynamique classique 285 Quest-ce que le contact ? 285 Prcision et exactitude 286 Est-ce que toute la nature peut tre dcrite dansun livre ? 287 Pourquoi la mesure est-elle possible ? 287 Le mouvement est-ilillimit ? 288

    289 a Notation et conventionsLalphabet latin 289 Lalphabet grec 291 Alphabet hbreu et autres cri-tures 293 Chires et nombres 294 Les symboles utiliss dans ce texte 295 Calendriers 297 Abrviations et ponymes ou concepts ? 299

    300 b Units , Mesures et ConstantesUnits naturelles de Planck 303 Autres systmes d units 305 Curiosits etds amusants sur les units 306 Prcision et exactitude des mesures 312 Constantes physiques fondamentales 313 Nombres utiles 318

    320 c Sources d information sur le mouvement

    327 Bibliographie

    353 Indices et solutions des dfis

    391 CrditsRemerciements 391 Crdits lmographiques 392 Crdits photogra-phiques 392

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  • Chute , Flux et Chaleur

    Dans notre apprentissage du mouvement des objets,l aventure de la randonne et d autres expriencesnous conduisent introduire les concepts devitesse, temps, longueur,masse et temprature,et d en tirer parti pour mesurer le changement.Nous dcouvrons comment otter librement dans l espace,pourquoi nous avons des jambes au lieu de roues,pour quelle raison le dsordre ne peut tre supprim,et pourquoi l une des questions les plus arduesde la science concerne l coulement de l eau dans un tube.

  • C h a p i t r e 1

    POURQUOI S INTRESSER AUMOUVEMENT ?

    Tout mouvement est une illusion.

    Znon dle*Braoum ! Lclair, frappant l arbre situ proximit, interrompt brutalement notreelle et paisible randonne forestire : nos curs se mettent soudainement battreplus rapidement. la cime de l arbre, nous voyons le feu apparatre une nouvelle fois,puis s teindre. Le lger vent agitant les feuilles autour de nous ramne ce lieu sonapaisement initial. ct, l eau dune petite rivire suit son chemin tortueux vers le basde la valle, rchissant sur sa surface les silhouettes mouvantes des nuages.

    Le mouvement est partout : amical et menaant, terrible et magnique. Il est fonda-mental pour notre existence humaine. Nous avons besoin du mouvement pour grandir,pour apprendre, pour penser et pour proter de la vie. Nous utilisons le mouvementpour marcher travers une fort, pour couter ses bruitages et pour parler de tout cela.Comme tous les animaux, nous comptons sur le mouvement pour chercher de la nourri-ture et pour survivre aux dangers. Comme tous les tres vivants, nous avons besoin dumouvement pour nous reproduire, pour respirer et pour digrer les aliments. Commepour tous les objets, le mouvement nous rchaue.

    Le mouvement est l observation la plus fondamentale que nous puissions faire sur lanature en gnral. Cette remarque fait apparatre l ide que tout ce qui se produit dansle monde est un certain type de mouvement. Il ny a aucune exception. Le mouvementest une partie si fondamentale de nos observations que l origine mme du mot se perddans l obscurit de l histoire linguistique indo-europenne. La fascination pour le mou-vement a toujours fait de lui un objet favori de curiosit. Durant le cinquime sicle av.J.-C. dans la Grce ancienne, son tude lui avait attribu un nom : la physique.Rf. 1

    Le mouvement est galement important pour l existence humaine. Qui sommes-nous ? Do venons-nous ? Quallons-nous faire ? Que devrions-nous faire ? Quest-ceque nous rserve l avenir ? Do viennent les gens ? O vont-ils ? Quest-ce que lamort ?Do vient le monde ? Comment la vie est-elle apparue ? Toutes ces questions sont en rap-port avec le mouvement. Ltude du mouvement fournit des rponses qui sont la foisprofondes et surprenantes.

    Le mouvement est trange. Bien qu il soit omniprsent dans les toiles, dans lesmares, dans nos paupires , ni les penseurs antiques et ni les milliers d autres qui seRf. 3sont succd depuis 25 sicles nont pu lever le voile sur le mystre central : Quest-ceque le mouvement ? Nous dcouvrirons que la rponse classique, le mouvement est la

    * Znon dle (v. 450 av. J.-C.), fut un des principaux reprsentants de l cole latique de philosophie.

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 15

    PHYSIQUE

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    MontagneMouvement

    ocan social

    baie de lmotion

    MDECINE

    MATHMATIQUESLHUMANIT

    ASTRONOMIE

    SCIENCES DE LA MATIRE

    SCIENCES DE LA TERRE

    BIOLOGIE

    partie III : tm

    partie II : tq

    partie I : mc, rg & em

    CHIMIE

    F I G U R E 2 Lle de lExprience, avec la Montagne Mouvement et la piste suivre (mc : mcaniqueclassique, rg : relativit gnrale, em : lectromagntisme, tq : thorie quantique, tm : thorie M, tdm :thorie du mouvement).

    variation de la position dans le temps , est inapproprie. Ce nest que rcemment quunerponse a nalement t trouve. Ceci est l histoire du cheminement de cette dcouverte.

    Le mouvement fait partie de l exprience humaine. Si nous imaginons l expriencehumaine comme une le, alors le destin, reprsent par les vagues de l ocan, nous aports jusqu son rivage. Prs du centre de l le une montagne particulirement hautemerge. Depuis son sommet nous pouvons survoler le paysage tout entier et avoir lasensation que toutes les expriences humaines ont un lien de parent, en particulier lesdivers exemples demouvement. Ceci est un guide vers le sommet de ce que j ai nomm laMontagneMouvement. Son parcours est une des plus belles aventures de l esprit humain.Clairement, la premire question poser est :

    Le Mouvement existe-t-il ?

    Das Rtsel gibt es nicht. Wenn sich eine Frageberhaupt stellen lt, so kann sie beantwortetwerden*.

    Ludwig Wittgenstein, Tractatus, 6.5Pour aiguiser l esprit sur le problme de l existence du mouvement, regardez la Fi-gure 3 et suivez les instructions. Dans les deux cas les gures semblent tourner. NousRf. 2pouvons ressentir lesmmes eets lorsque nousmarchons sur les pavs italiens en forme

    * Le mystre nexiste pas. Si une question peut tre pose, alors elle peut trouver une rponse.

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  • 16 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    F I G U R E 3 Illusions du mouvement : regardez la figure de gauche et dplacez lgrement la page, ouregardez le point blanc au centre de la figure de droite et bougez votre tte davant en arrire.

    de vagues ou lorsque nous jetons un il sur les illusions de la page Web www.ritsumei.ac.jp/~akitaoka/. Comment pouvons-nous tre srs que le mouvement rel est direntde ceux-ci ou dautres illusions similaires ?*Dfi 2 s

    Plusieurs savants ont simplement avanc que lemouvement nexiste pas du tout. Leursarguments ont profondment inuenc la recherche sur le mouvement. Par exemple, leRf. 4philosophe grec Parmnide (n vers 515 av. J.-C. le, une petite ville prs de Naples,dans le sud de l Italie) a mis l ide que, puisque rien ne peut provenir du vide, le chan-gement ne peut pas exister. Il a mis l accent sur la constance de la nature et a donc logi-quement arm que tout mouvement et donc tout changement est une illusion.Rf. 5

    Hraclite (v. 540 v. 480 av. J.-C. ) a tenu le point de vue oppos. Il l a exprim danssa clbre expression panta rhei ou tout se meut sans cesse **. Il imagi-nait le changement comme tant l essence de la nature, contrairement Parmnide. Cesdeux opinions galement clbres ont incit plusieurs savants rechercher plus prcis-ment si, dans la nature, il y a des quantits conserves ou si la cration est possible. Nousdcouvrirons la rponse plus tard ; en attendant, vous pouvez mditer sur l alternativeque vous prfrez.Dfi 3 s

    Le collaborateur de Parmnide, Znon dle (n vers 500 av. J.-C.), a dbattu avectant d intensit contre le mouvement que certains ont toujours un doute ce proposaujourd hui. Dans un de ses arguments il prtendit dans un langage simple qu ilest impossible de gier quelquun, tant donn que la main doit premirement parcou-rir la moiti du trajet vers le visage, puis parcourir la moiti de la distance qu il reste,puis encore une fois et ainsi de suite. Par consquent, la main ne pourra jamais atteindrele visage. Largument de Znon se concentre sur le lien entre l inni et son oppos, leni, dans la description du mouvement. Dans la thorie quantique moderne, un sujetsimilaire proccupe encore aujourd hui des scientiques.Rf. 6

    Znon a galement arm quen observant un objet en mouvement durant un courtinstant, nous ne pouvons pas dire qu il bouge. Znon argumenta que, durant un courtinstant, il ny a aucune dirence entre un corps en mouvement et un corps au repos. Ilen dduisit alors que, s il ny a pas de dirence durant un court instant, il ne peut y en

    * Les solutions des ds sont donnes soit la page ??, soit plus loin dans le texte. Les ds sont classs en :niveau approfondi (r), dicile (d), niveau tudiant normal (n) ou facile (e). Les ds qui nont pas encorede solution sont marqus (ny).** LAnnexe A explique comment lire un texte grec.

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    http://www.ritsumei.ac.jp/~akitaoka/http://www.ritsumei.ac.jp/~akitaoka/
  • pourquoi s intresser au mouvement ? 17

    F I G U R E 4 Combien faut-il deau pour faire en sorte que le seau soit suspendu verticalement ? partirde quel angle la bobine tire change-t-elle sa direction de mouvement ? ( Luca Gastaldi)

    avoir non plus pour un temps plus long. Znon a donc dout que le mouvement puisseclairement tre distingu de son oppos, le repos. En ralit, dans l histoire de la physique,les penseurs ont altern plusieurs fois entre rponse positive et ngative. Ce fut cette vraiequestion qui conduisit Albert Einstein au dveloppement de la relativit gnrale, undes points culminants de notre voyage. Nous suivrons les principales rponses donnespar le pass. Ensuite, nous serons bien plus audacieux : nous nous demanderons en nde compte si les courts instants de temps existent rellement. Cette question, qui nousemmnera loin, est essentielle pour la dernire partie de notre aventure.

    Lorsque nous examinerons la thorie quantique, nous dcouvrirons que le mouve-ment est en ralit dans une certaine mesure une illusion, comme Parmnide l avaitarm. Plus prcisment, nous montrerons que nous observons le mouvement parceque notre existence humaine a un caractre limit. Nous trouverons que nous ressentonsle mouvement uniquement parce que nous voluons sur la Terre, avec une taille nie,avec un nombre d atomes trs grand mais limit, avec une temprature nie et modre,parce que nous sommes lectriquement neutres, trs grands compars un trou noir demme masse, normes par rapport notre longueur d onde de la mcanique quantique,trs petits compars l univers, avec une mmoire limite, contraints par notre cerveaudestimer l espace et le temps comme des choses continues, et contraints par notre cer-veau de dcrire la nature comme tant constitue de parties distinctes. Si une seule de cesconditions ntait pas vrie, nous nobserverions pas le mouvement. Le mouvement,alors, nexisterait pas.Chacune de ces conclusions peut tre dcouverte plus ecacementsi nous commenons avec la question suivante :

    Comment devrions-nous parler du mouvement ?

    Je hais le mouvement, qui dplace les lignes,Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.

    Charles Baudelaire, La Beaut** Charles Baudelaire (n. Paris 1821, d. Paris 1867).Rf. 7

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  • 18 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    Thales

    Plato

    Sosigenes

    StraboCtesibius

    Archimedes

    Konon

    Chrysippos

    Philoof Byz.

    Dositheus

    Biton

    Asclepiades

    Varro

    Athenaius

    Diodorus Siculus

    Virgilius

    Horace

    Cicero

    Frontinus

    Maria the Jew

    Josephus

    Epictetus

    Marinus

    Menelaos

    Nicomachos Apuleius

    Cleomedes

    Artemidor

    Sextus Empiricus

    Athenaios of Nauc.

    Philostratus

    Alexander of Aphr.

    Diogenes Laertius

    PomponiusMela

    Dioscorides

    Plutarch

    Ptolemy

    Eudoxus

    Aratos

    Berossos

    Aristotle

    Heraclides

    Theophrastus

    Autolycus

    Euclid

    Epicure

    Alexander

    Ptolemaios I

    Ptolemaios II Ptolemaios VIII

    Straton

    Pytheas

    Dikaiarchus Poseidonius

    Socrates

    Anaximander

    Anthistenes

    Anaximenes

    Pythagoras

    Almaeon

    Heraclitus

    Xenophanes

    Parmenides

    Philolaos

    600 BCE 400500 300 200 100 100 2001

    Zeno

    Archytas

    Aristoxenus

    Empedocles

    Herophilus

    Polybios

    Diophantus

    Aristarchus

    SeleukosArchimedes

    Erasistratus

    Eudoxus of Kyz.

    Eratosthenes

    DionysiusThrax

    Diocles

    Apollonius Theodosius

    Hipparchus Lucretius

    Heron

    Vitruvius

    Livius

    Geminos

    Manilius

    Valerius Maximus

    Seneca

    Plinius Senior

    Nero Trajan

    Galen

    Aetius

    Rufus

    Dionysius Periegetes

    Theon of Smyrna

    Arrian

    Demonax

    Lucian

    Anaxagoras

    Leucippus

    Protagoras

    Oenopides

    Hippocrates

    Herodotus

    Democritus

    Hippasos Speusippos

    Caesar

    F I G U R E 5 Une chronologie des scientifiques et des personnalits politiques dans lAntiquit (la dernirelettre du nom est aligne avec lanne du dcs).

    Comme toute science, l approche de la physique est double : nous progressons grce la prcision et grce la curiosit. La prcision donne aux changes d informations toutleur sens, et la curiosit fait qu ils en valent la peine*. Toutes les fois que nous parlons dumouvement et que nous souhaitons avoir une meilleure prcision ou une connaissanceplus dtaille, nous sommes engags, sciemment ou non, dans l ascension de la Mon-tagne Mouvement. chaque augmentation dans la prcision de la description, nousgagnons de l altitude. Les exemples de la Figure 4 le pointent du doigt. Lorsque vousremplissez un seau avec une petite quantit d eau, il nest pas suspendu verticalement.(Pourquoi ?) Si vous continuez ajouter de l eau, il commence se tenir verticalement partir d un certainmoment. Combien faut-il d eau ? Lorsque vous tirez sur le l d uneDfi 4 pebobine de la manire indique, la bobine se dplacera en avant ou en arrire, en fonctionde l angle selon lequel vous tirez. Quel est l angle limite entre les deux possibilits ?

    Une grande prcision implique d explorer jusquaux dtails les plus ns. Cette m-thode augmente en fait le plaisir pour l aventure**. Plus nous gagnons de l altitude surla Montagne Mouvement, plus nous voyons loin et plus notre curiosit est rcompense.Les vues oertes sont couper le soue, surtout depuis le point culminant. Le cheminque nous suivrons un parmi tous les itinraires possibles commence du ct de labiologie et entre directement dans la fort qui se trouve au pied de la montagne.Rf. 9

    * Pour une srie dexemples intressants sur le mouvement dans la vie de tous les jours, voir l excellent livrede Walker.Rf. 8** Mez-vous de quiconque voudrait vous parler sans examiner les dtails. Il essaie de vous tromper. LesDfi 5 sdtails sont importants. Ainsi, soyez vigilants durant cette promenade.

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 19

    TA B L E AU 1 Contenus de livres relatifs au mouvement slectionns dans une bibliothque publique.

    Th m e s s u r l e m o u v e m e n t Th m e s s u r l e m o u v e m e n t

    photographies du mouvement le mouvement comme thrapie pour le traitementdu cancer, du diabte, de l acn et de la dpression

    perception du mouvement Rf. 21 cintose (mal des transports)

    le mouvement comme aide la mditation exercices physiques pour la forme et le bien-tre

    matrise du mouvement en sport aptitude bouger l examen de sant

    mouvement perptuel chorgraphie dans la danse, la musique et autres arts

    le mouvement des toiles et des anges Rf. 11 le mouvement comme preuve de l existence de di-vers crateurs Rf. 10

    ecacit bnque du mouvement lien entre les habitudes changeantes et motion-nelles

    le mouvement en psychothrapie Rf. 12 le mouvement pour surmonter un traumatisme

    troubles du mouvement locomotion des insectes, chevaux et robots

    les agitations au Parlement les changements dans l art, les sciences et la poli-tique

    lesmcanismes dans les montres les gesticulations la Bourse

    dveloppement de la marche chez lesenfants

    apprentissage et enseignement du mouvement

    mouvements musicaux mouvements de troupes Rf. 13

    mouvements religieux mouvements intestinaux

    dplacements aux checs tours de passe-passe au casino Rf. 14

    rapport entre le produit national brut et la mobilit des citoyens

    Une vive curiosit nous conduit en ligne droite aux extrmes : comprendre le mouve-ment ncessite d explorer les distances les plus grandes, les vitesses les plus leves, lesparticules les plus petites, les forces les plus fortes et les ides les plus tranges. Commen-ons.

    Quels sont les diffrents types de mouvements ?

    Chaque mouvement nat d une volont dechangement.

    AntiquitLe lieu le plus appropri pour avoir une vue densemble gnrale sur les types demouvement est une grande bibliothque, comme indiqu dans le Tableau 1. Les domainesdans lesquels le mouvement, les agitations et les dplacements jouent un rle sont enralit varis. Dans la Grce ancienne les gens souponnaient dj que tous les types demouvement, et aussi plusieurs autres types de changement, taient relatifs. Il est communde distinguer au moins trois catgories.

    La premire catgorie de changement est celle du dplacement matriel, tels un indi-vidu enmarche ou une feuille tombant d un arbre. Le dplacement est le changement deposition ou dorientation des objets. Au sens large, l activit humaine se place galement

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  • 20 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    F I G U R E 6 Un exemple de dplacement.

    dans cette catgorie.Une deuxime catgorie de changement regroupe les observations telles que la dissolu-

    tion du sel dans l eau, la formation de glace par conglation, la dcomposition du bois, lacuisson des aliments, la coagulation du sang et la fusion et l alliage des mtaux. Ces chan-gements de couleur, luminosit, duret, temprature et autres proprits matrielles sontappels transformations. Les transformations sont des changements apparemment nonrelis aux dplacements. Dans cette catgorie, quelques penseurs anciens y ajoutrentl mission et l absorption de la lumire. Durant le vingtime sicle, on a prouv que cesdeux eets taient des cas particuliers de transformations, comme le sont l apparitionet la disparition de matire rcemment dcouvertes, que l on observe dans le Soleil etdans la radioactivit. Le changement desprit, comme le changement d humeur, de sant,d ducation et de caractre, est galement (principalement) un type de transformation.Rf. 15

    La troisime catgorie particulirement importante de changement est la croissance.Rf. 16Elle est observe chez les animaux, les plantes et les bactries, mais aussi dans les cristaux,les montagnes, les toiles et les galaxies. Au cours du dix-neuvime sicle, les change-ments dans les populations de systmes, l volution biologique, et, au cours du vingtimesicle, les changements dans la taille de l univers, l volution cosmique, ont t ajouts cette catgorie. Traditionnellement, ces phnomnes furent tudis par des sciencesdistinctes, qui aboutirent toutes indpendamment la conclusion que la croissance estune combinaison du dplacement et de la transformation. La dirence est pour l unela complexit et pour l autre l chelle de temps.

    Pendant la Renaissance, au dbut de la sciencemoderne, seule l tude du dplacementa t perue comme faisant partie du champ de la physique. Le mouvement tait assimilau dplacement. Les deux autres domaines furent ignors des physiciens.Malgr cette res-triction, le champ de la recherche restait large, recouvrant une grande partie de l le del Exprience. La tentation vidente est de structurer ce domaine en distinguant les di-

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 21

    F I G U R E 7 Dplacement, croissance et transformation. ( Philip Plisson)

    rents types de dplacement en fonction de leur origine. Les mouvements, tels que ceuxdes jambes lorsque nous marchons, sont volontaires parce qu ils sont commands parnotre volont, tandis que les dplacements d objets externes, telle la chute d un oconde neige, que nous ne pouvons inuencer par notre volont, sont qualis de passifs. Lesenfants sont capables de faire cette distinction partir de 6 ans environ, et ceci marqueune tape importante pour chaque personne dans le dveloppement de sa comprhen-sion prcise de l environnement*. partir de cette distinction, la dnition historiquemais aujourd hui prime de la physique persiste comme une science du mouvementdes objets inertes.

    Puis, un jour, les machines sont apparues. partir de ce moment-l, la distinctionentremouvements volontaire et passif s est invite dans le dbat. Comme les tres vivants,les machines peuvent se dplacer toutes seules et de cette faon imitent le mouvement vo-lontaire. Toutefois, une observation mticuleuse nous montre que chaque lment dansunemachine est dplac par un autre, de telle sorte que leur mouvement est en fait passif.Les tres vivants sont-ils galement desmachines ? Les activits humaines sont-elles aussides exemples de mouvements passifs ? Laccumulation des observations durant les centdernires annes a rendu vident le fait que le dplacement volontaire** a, en ralit, les

    * La ralisation complte de cet apprentissage peut chouer chez des individus ayant diverses convictionstranges, comme la croyance sur la capacit agir sur la bille du jeu de la roulette, tel que dcouvert chezdes joueurs compulsifs, ou sur la capacit dplacer des objets distants par la pense, tel que dcouvertchez de nombreuses autres personnes apparemment en bonne sant. Un rcit divertissant et instructif surtoutes les duperies et illusions impliques par l apparition et la prservation de ces croyances est donn parJames Randi, e Faith Healers, Prometheus Books, 1989. Prestidigitateur professionnel, il prsente denombreux sujets similaires dans plusieurs de ses autres ouvrages. Voir galement le site Web http://www.randi.org pour plus de dtails.** En anglais, mouvement se dit motion [N.d.T.]. Le terme anglais movement est plutt rcent : il futimport dans la langue anglaise partir de l ancien franais et devint populaire seulement la n du dix-huitime sicle. Il ne fut jamais utilis par Shakespeare.

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    http://http://www.randi.orghttp://http://www.randi.org
  • 22 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    mmes proprits physiques que le mouvement passif des systmes inertes. (Bien sr, surle plan motionnel, les dirences restent importantes, par exemple, le pardon ne peuttre attribu quaumouvement volontaire.) La distinction entre les deux types nest doncRf. 17pas ncessaire et sera omise par la suite. Puisque les mouvements passif et volontaireont les mmes proprits, nous pouvons apprendre des choses sur l homme lui-mme travers l tude du mouvement des objets inertes. Cela sera plus agrant lorsque nousvoquerons les thmes du dterminisme, de la causalit, de la probabilit, de l inni, dutemps et du sexe, pour ne citer que quelques-uns des sujets que nous rencontrerons surnotre chemin.

    Avec l accumulation des observations durant les dix-neuvime et vingtime sicles,les barrires historiques sur l tude du mouvement furent encore plus mises en exergue.Des observations tendues montrrent que toutes les transformations et tous les phno-mnes de croissance, y compris le changement et l volution du comportement, sontaussi des exemples de dplacement. En dautres termes, plus de 2 000 ans d tudes ontprouv que l ancienne classication des observations tait inutile : tout changement estun dplacement. Au milieu du vingtime sicle, cela culmina mme avec la conrma-tion dune ide encore plus prcise, dj formule dans la Grce ancienne : chaque typede changement est caus par le mouvement de particules. Il a fallu beaucoup de temps etd eorts pour arriver cette conclusion, qui s est prsente uniquement parce que nousavons avanc sans relche vers la plus haute prcision possible dans la description dela nature. Les deux premires parties de cette aventure retracent le chemin jusqu cersultat. (tes-vous d accord pour cela ?)Dfi 6 s

    La dernire dcennie du vingtime sicle a boulevers cette vision. L ide de particules est rvle fausse. Ce nouveau rsultat, dj suggr par la thorie quantique avance,apparat dans la troisime partie de notre aventure travers une combinaison dobserva-tions et de dductions attentives. Mais nous aurons encore beaucoup de chemin faireavant d y arriver.

    Pour l instant, au dbut de notre promenade, nous retiendrons simplement que l his-toire a montr que la classication des dirents types de mouvement nest pas utile.C est en essayant d atteindre la prcisionmaximale que l on peut esprer arriver aux pro-prits fondamentales du mouvement. La prcision, et non la classication, est la rgle suivre. Comme Ernest Rutherford le disait : All science is either physics or stampcollecting. *

    Pour atteindre la prcision ncessaire dans notre description du mouvement, nousavons besoin de choisir des exemples particuliers de mouvement et de les tudier pleine-ment en dtail. Il est intuitivement clair que la description la plus prcise est ralisablepour les exemples les plus simples possibles. Dans la vie de tous les jours, c est le casdu mouvement de tous les corps inertes, solides et rigides, dans notre environnement,telle une pierre lance en l air. En ralit, comme tous les hommes, nous avons appris lancer des objets bien avant d avoir appris marcher. Le lancer est une des premiresRf. 18expriences physiques que nous ayons accomplies par nous-mmes**. Durant notre plustendre enfance, en lanant des pierres, des jouets et d autres objets, nous explorions la

    * Toute science est soit de la physique soit une collection de timbres. [N.d.T.]** L importance du lancer apparat galement partir des termes qui en drivent : en latin, des mots commesubjicio (subicio), sujet, mettre sous ou jeter dessous, adversus, objet, protester ou jeter en face , interjicio(interjacio), interjection, insrer ou jeter entre . En grec, il a men des termes comme symbole ou jeter

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 23

    perception et les proprits du mouvement, jusqu ce que nos parents aient eu peurpour les appareils mnagers. Nous allons faire lamme chose.

    Die Welt ist unabhngig von meinemWillen*.

    Ludwig Wittgenstein, Tractatus, 6.373Perception , continuit et changement

    Il ny a que lesmauviettes qui ntudient que lecas gnral, les vrais scientiques courent aprsles exemples.

    Beresford ParlettLes tres humains adorent percevoir les choses. La perception commence avant lanaissance, et nous continuons y prendre plaisir aussi longtemps que nous le pouvons.C est pourquoi la tlvision est si populaire, mme quand elle est dpourvue de contenu.Pendant notre promenade travers la fort, au pied de la Montagne Mouvement, nousne pouvons pas nous empcher de percevoir. La perception est en premier lieu la ca-pacit distinguer. Nous utilisons l opration cognitive lmentaire de la distinction chaque instant de notre vie. Par exemple, durant notre enfance, nous avons tout d abordappris faire la distinction entre les objets familiers et inconnus, une aptitude renduepossible par l association avec une autre capacit lmentaire, celle de mmoriser les ex-priences. Lammoire nous donne la possibilit d exprimenter, de parler de la nature etdonc de l explorer. La perception, la classication et lammorisation forment ensemblel apprentissage. Dpourvus de l une de ces trois aptitudes, nous ne pourrions pas tudierle mouvement.

    Les enfants apprennent rapidement distinguer la continuit de l instabilit. Ils s ha-bituent reconnatre les visages humains, mme si un visage nest jamais totalement lemme chaque fois qu il est peru. partir de l identication des visages, les enfantsprolongent la reconnaissance tout ce qui est observable. La reconnaissance fonctionneassez bien dans la vie quotidienne. Il est agrable de reconnatre ses amis, mme dansla nuit, et mme aprs plusieurs bires (ceci nest pas un d). Laction de reconnatreutilise donc toujours une forme de gnralisation. Lorsque nous observons, nous avonstoujours une ide gnrale dans notre esprit. Nous allons en prciser les principales.

    Toutes les forts nous rappellent l essence de la perception. Assis sur l herbe dansune clairire de la fort au pied de la Montagne Mouvement, entours par les arbres et lesilence caractristique de ces endroits, une sensation de tranquillit et de srnit nousenvahit. Soudain, quelque chose sagite dans les buissons. Nos yeux se dtournent sur-le-champ et notre attention se concentre. Les cellules nerveuses qui ont dtect le mou-vement font partie de la rgion la plus ancienne de notre cerveau, que nous partageonsavec les oiseaux et les reptiles : le tronc crbral. partir de cemoment, le cortex, ou cer-Rf. 19veau rcent, prend le relais pour analyser le type de mouvement et pour en dterminerl origine. En surveillant lemouvement autour de notre champ de vision, nous observonsdeux entits invariantes : le paysage immobile et l animal qui bouge. Aprs avoir identil animal comme tant une biche, nous nous relchons nouveau.

    ensemble , problme ou jeter en avant , emblme ou jeter dedans et le petit dernier dmon ou jeter travers .* Lemonde est indpendant de ma volont.

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  • 24 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    Comment avons-nous fait la dirence entre le paysage et la biche ? Plusieurs tapesdans la vision et dans le cerveau sont impliques. Le mouvement joue un rle importantdans celles-ci, comme nous le voyons mieux partir du petit lm saccad plac dansles coins infrieurs gauches de ces pages. Chaque imagemontre seulement un rectangleRf. 20combl par un motif mathmatiquement alatoire. Mais, lorsque nous faisons dler cespages, nous discernons une forme en mouvement sur un fond immobile. un instantdonn, la forme ne peut tre dissocie du fond : aucun objet nest visible sur chacune deces images. Nanmoins il est facile de percevoir son mouvement*. Des expriences deperception comme celle-ci ont t eectues avec de nombreuses variantes. Dans l unedelle, on a constat que le fait de dtecter un tel objet en mouvement nest pas quelquechose de spcique aux humains. Les mouches ont la mme aptitude, comme, en fait,tous les animaux qui ont des yeux.

    Le petit lm saccad sur le coin infrieur gauche, comme toutes les expriences simi-laires, fait apparatre deux relations primordiales. Premirement, le mouvement est peruuniquement si un objet peut tre distingu dun arrire-plan ou dun milieu ambiant.Beaucoup d illusions sur le mouvement se focalisent sur ce point**. Deuximement, lemouvement exige de dnir la fois l objet et l environnement, et de les direncierl un de l autre. En fait, la notion despace est entre autres une abstraction de l ided arrire-plan. Ce fond est tendu, l objet anim est localis. Tout cela vous semble en-nuyeux ? a ne l est pas : attendez juste une seconde.

    Appelons l ensemble des proprits localises qui restent invariantes ou constantespendant le mouvement, comme la taille, la forme, la couleur, etc., pris ensemble, objet(physique) ou corps (physique). Nous restreindrons ensuite la dnition, puisque sinonles images pourraient aussi bien tre des objets. En dautres termes, exactement commeau dbut, nous ressentons le mouvement comme un processus relatif. Il est peru en rela-tion avec l environnement et par opposition lui. La notion dobjet est par consquentaussi une notion relative. Mais la distinction thorique lmentaire entre les objets loca-liss, isols et l environnement tendu nest pas insigniante ou sans importance. Pre-mirement, cela donne l impression dune dnition qui se mord la queue. (tes-vousd accord ?) Plus tard, ce problme nous occupera normment. Deuximement, nousDfi 7 sutilisons tellement frquemment notre capacit isoler des systmes localiss de leur en-vironnement que nous l acceptons sans l ombre d un doute. Toutefois, comme nous leverrons dans la troisime partie de notre promenade, cette distinction se rvle logique-ment et exprimentalement impossible*** ! Notre promenade nous amnera dcouvrirPage ??la raison de cette impossibilit et ses consquences importantes. Finalement, mis part

    * Lil humain est trs performant pour dtecter le mouvement. Par exemple, l il peut dceler le mouve-ment dun point lumineuxmme si la variation de l angle est plus petite que celle qui peut tre distinguesur une image xe. Les dtails de ce phnomne et dautres thmes analogues pour les autres sens font partiedu domaine de la recherche sur la perception.Rf. 21** Le thme de la perception du mouvement est plein daspects intressants. Le chapitre 6 du magniqueouvrage de Donald D. Hoffman, Visual Intelligence How We Create What We See, W.W. Norton &Co., 1998. en est une excellente introduction. Sa srie d illusions sur le mouvement lmentaire peut tre ex-primente et approfondie en association avec le site Web http://aris.ss.uci.edu/cogsci/personnel/homan/homan.html.*** Contrairement ce que l on peut frquemment lire dans la littraturepopulaire, la distinction est possibledans la thorie quantique. Elle devient impossible seulement lorsque la thorie quantique est unie avec larelativit gnrale.

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    http://http://aris.ss.uci.edu/cogsci/personnel/hoffman/hoffman.htmlhttp://http://aris.ss.uci.edu/cogsci/personnel/hoffman/hoffman.html
  • pourquoi s intresser au mouvement ? 25

    TA B L E AU 2 Arbre gnalogique des notions physiques fondamentales.

    le mouvement

    la forme fondamentale du changement

    lments relations arrire-plan

    stable inconstant stable

    limit illimit tendu

    form sans forme mesurable

    objets images tats interactions E des phases espace-temps

    impntrable pntrable global local compos simple

    Les aspects correspondants :

    masse intensit instant source dimension courbure

    taille couleur position rpartition distance topologie

    charge apparition moment grandeur volume distance

    spin disparition nergie direction sous-espaces surface

    etc. etc. etc. etc. etc. etc.

    monde nature univers cosmos

    l assemblage de tous les lments, relations et arrire-plans

    les entits mobiles et le fond immobile, nous avons besoin dun troisime concept, telqu indiqu dans le Tableau 2.

    II ny a quune chose sage, c est de connatre lapense qui peut tout gouverner partout.

    Hraclite d phseRf. 22Le monde a-t- il besoin d tats ?

    Das Feste, das Bestehende und der Gegenstandsind Eins. Der Gegenstand ist das Feste,Bestehende ; die Konguration ist dasWechselnde, Unbestndige*.Ludwig Wittgenstein, Tractatus, 2.027 2.0271

    Quest-ce qui direncie les divers dessins dans les coins en bas gauche de chaquepage ? Dans la vie quotidienne, nous dirions la position ou la conguration des objetsconcerns. La conguration dcrit d une certaine manire tous ces aspects qui peuventtre dirents d un cas l autre. On a coutume dappeler la liste de tous les aspects

    * Les objets, l immuable et le perptuel sont une seule et mme chose. Les objets sont ce qui est immuableet durable ; leur conguration est ce qui est changeant et instable.

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  • 26 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    variables dun ensemble d objets leur tat de mouvement (physique), ou plus simplementleur tat.

    Les congurations dans les coins en bas gauche dirent de tous les autres d abordpar le temps. Le temps est ce qui rend les opposs possibles : un enfant est dans unemaison et le mme enfant est en dehors de la maison. Le temps rend compte de cetype de contradiction et le rsout. Mais l tat ne distingue pas seulement des congu-rations direntes dans le temps : l tat contient tous les aspects d un systme (c est--dire d un groupe dobjets) quon ne retrouve pas dans les systmes stationnaires. Deuxobjets peuvent avoir les mmes masse, forme, couleur, composition et tre indiscer-nables par rapport toutes les autres proprits intrinsques, nanmoins ils seront di-rents par rapport leur position, ou leur vitesse, ou leur orientation. Ltat met le doigtsur l originalit dun systme physique* et nous permet de le distinguer de ses copiesconformes. Par consquent, l tat dcrit galement la relation dun objet ou dun sys-tme avec son environnement. Ou pour rsumer : l tat dcrit tous les aspects dun sys-tme qui dpendent de l observateur. Ces proprits ne sont pas inintressantes r-chissez juste ceci : l univers possde-t-il un tat ?Dfi 9 s

    Dcrire la nature comme un ensemble d entits stables et d tats variables est le pointde dpart de l tude du mouvement. Les divers aspects des objets et de leurs tats sontappels des observables. Toutes ces dnitions approximatives et prliminaires seront af-nes pas pas par la suite. En utilisant les termes prcdemment introduits, nous pou-vons stipuler que le mouvement est le changement dtat des objets**.

    Les tats sont ncessaires pour la description du mouvement. An de progresser et deraliser une description exhaustive dumouvement, nous avons besoin dune descriptioncomplte des objets et d une description complte de leurs tats possibles. La premireapproche, appele physique galilenne, consiste caractriser notre environnement quo-tidien le plus prcisment possible.

    Curiosits et dfis amusants sur le mouvement

    Le mouvement nest pas toujours un sujet simple***.

    Est-ce que le dplacement d un fantme est un exemple de mouvement ?Dfi 10 s

    * Un systme physique est un objet d tude localis. Dans la classication du Tableau 2, le terme systmephysique est ( peu prs) la mme chose que objet ou corps physique . Les images ne sont habituel-lement pas considres comme des systmes physiques (bien que le rayonnement lumineux en soit un). Lestrous sont-ils des systmes physiques ?Dfi 8 s** La sparation exacte entre ces aspects propres l objet et ceux appartenant l tat dpendent de la prci-sion des observations. Par exemple, la longueur dun morceau de bois nest pas constante : le bois se rtrcitet se courbe avec le temps, en raison des processus en uvre au niveau molculaire. Pour tre prcis, lalongueur dun morceau de bois nest pas une caractristique de l objet, mais de son tat. Les observationsmticuleuses renversent alors la distinction entre l objet et son mouvement, la distinction elle-mme ne dis-parat pas du moins pas pour le moment.*** Les sections intitules curiosits sont des sries de sujets et de problmes qui permettent de vrieret d approfondir l utilisation des notions rcemment introduites.

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 27

    F I G U R E 8 Une poulie compose et une poulie diffrentielle.

    Un homme escalade une montagne de 9 heures du matin jusqu 13 heures. Il se coucheau sommet et redescend le jour suivant, descendant encore une fois de 9 heures dumatinjusqu 13 heures. Y a-t-il un endroit sur le chemin o il passe la mme heure les deuxjours ?Dfi 11 s

    Est-ce que quelque chose peut s arrter de bouger ? Comment pouvez-vous le montrer ?Dfi 12 s

    Est-ce quun corps se dplaant pour toujours en ligne droite dmontre que la nature estinnie ?Dfi 13 s

    Lunivers peut-il bouger ?Dfi 14 s

    Pour discuter de la prcision avec prcision, nous avons besoin de lamesurer. Commentvous y prendriez-vous ?Dfi 15 s

    Pourrions-nous observer le mouvement si nous navions pas demmoire ?Dfi 16 s

    Quelle est la vitesse minimale que vous avez pu observer ? Y a-t-il une vitesseminimaleDfi 17 sdans la nature ?

    Selon la lgende, le brahmane Sissa Ben Dahir, l inventeur indien du jeu dchecs, de-manda au roi Sherham la rcompense suivante pour son invention : il souhaita que l ondpose un grain de bl sur la premire case, deux sur la deuxime, quatre sur la troi-

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  • 28 1 pourquoi s intresser au mouvement ?

    sime, huit sur la quatrime, et ainsi de suite. Combien de temps tous les champs de bldu monde mettront-ils pour produire la quantit de grains ncessaire ?Dfi 18 s

    Lorsquune bougie allume est dplace, la amme a du mal suivre le mouvement dela bougie. Comment la amme se comportera-t-elle si la bougie, toujours allume, estplace dans une cage en verre et que l ensemble est mis en mouvement ?Dfi 19 s

    Une bonne faon de gagner de l argent est de construire des dtecteurs de mouvement.Un dtecteur de mouvement est une petite bote dote de quelques connecteurs mtal-liques. La bote produit un signal lectrique chaque fois quelle bouge. Des dtecteursde quels types demouvement pouvez-vous imaginer ? quel prix pouvez-vous fabriquerune telle bote ? Avec quelle prcision ?Dfi 20 d

    Une boule parfaitement lisse et sphrique est pose prs du bord dune table parfaite-ment plate et horizontale. Que va-t-il se passer ? Au bout de combien de temps ?Dfi 21 d

    Vous marchez dans une bote ferme dpourvue de fentre. La bote est dplace pardes forces extrieures inconnues pour vous. Pouvez-vous dterminer, de l intrieur dela bote, comment vous vous dplacez ?Dfi 22 s

    Quelle longueur de corde devons-nous tirer pour soulever unemasse d une hauteur h l aide d une poulie compose de quatre roues, comme indiqu sur la Figure 8 ?Dfi 23 s

    Lorsquun bloc est roul sur un plancher sur un ensemble de tubes, quelles sont les vi-tesses du bloc et des tubes relativement au bloc ?Dfi 24 s

    Vous naimez pas les formules ? Si c est le cas, utilisez la mthode suivante, qui ne prendque 3 minutes, pour inverser la situation. Cela vaut la peine de l essayer, car elle va vousRf. 15rendre la lecture de ce livre encore plus amusante. La vie est courte : elle devrait tre,Dfi 25 sautant que possible, un plaisir, comme celui de lire cet ouvrage.

    1 - Fermez les yeux et rappelez-vous une exprience qui fut absolument merveilleuse,une situation o vous vous tes senti excit, curieux et optimiste.

    2 - Ouvrez vos yeux pendant une seconde ou deux et regardez la page 68 ou touteautre page qui contient de nombreuses formules.

    3 - Fermez alors une nouvelle fois vos yeux et repensez votre exprience mer-veilleuse.

    4 - Rptez l observation des formules et la visualisation de votre souvenir tapes 2et 3 trois fois encore.Sortez alors de votre souvenir, regardez autour de vous pour revenir l instant prsent

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  • pourquoi s intresser au mouvement ? 29

    et au lieu prsent, puis testez-vous. Regardez une nouvelle fois la page 68. Commenttrouvez-vous les formules maintenant ?

    Durant le seizime sicle, Niccolo Tartaglia* proposa l nigme suivante. Trois jeunescouples veulent traverser une rivire. Seule une petite barque pouvant transporter deuxpersonnes est disponible. Les hommes sont extrmement jaloux et ne voudront jamaislaisser leur ance seule avec un autre homme. Combien dallers-retours sont-ils nces-saires pour traverser la rivire ?Dfi 26 s

    * Niccolo Fontana Tartaglia (14991557), important mathmaticien vnitien.

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  • C h a p i t r e 2

    DE LA MESURE DU MOUVEMENT LA CONTINUIT

    Physic ist wahrlich das eigentliche Studium desMenschen*.

    Georg Christoph LichtenbergLa description la plus simple du mouvement est celle que nous utilisons tous incons-ciemment, comme les chats ou les singes, dans la vie de tous les jours : une seule chosepeut se trouver en un lieu donn un instant donn. Cette description gnrale peut trespare en trois hypothses : la matire est impntrable et se dplace, le temps est faitd instants et l espace est fait de points. Sans ces trois hypothses (tes-vous d accordpour les accepter ?) il est impossible de dnir la vitesse dans la vie quotidienne. CetteDfi 27 sdescription de la nature est appele physique galilenne ou newtonienne.

    Galileo Galilei (15641642), professeur toscan de mathmatiques, fut un fondateurde la physique moderne et est clbre pour avoir dfendu l importance des observationscommemoyens de vrication des hypothses sur la nature. En exigeant et en accomplis-sant ces vrications durant toute sa vie, il fut amen amliorer constamment l exac-titude de la description du mouvement. Par exemple, Galile tudia le mouvement enmesurant les variations de positions avec un chronomtre qu il confectionna lui-mme.Sa mthode remplaa la description spculative de la Grce ancienne par la physiqueexprimentale de la Renaissance italienne**.

    Isaac Newton, alchimiste, mystique, thologien, physicien et politicien anglais (16431727), fut un des premiers dfendre avec vigueur l ide selon laquelle les direntstypes de mouvement ont les mmes proprits. Il franchit des tapes importantes dansla mise en place des concepts utiles la dmonstration de cette ide***.

    * La Physique est vraiment l tude approprie de l homme. Georg Christoph Lichtenberg (17421799)fut un important physicien et essayiste.** Le meilleur et le plus instructif des livres sur la vie de Galile et sur son poque est celui de Pietro Re-dondi (voir la note de la page 229). Galile naquit l anne o le crayon fut invent. Avant sa naissance, iltait impossible de faire des calculs avec un crayon et du papier. Pour les curieux, le site Web http://www.mpiwg-berlin.mpg.de vous permettra de lire unmanuscrit original de Galile.*** Newton naquit un an aprs lamort de Galile. Une autre activit de Newton, commematre de la Mon-naie royale, fut de surveiller personnellement la pendaison des faux-monnayeurs. Sur l engouement de New-ton pour l alchimie, voyez le livre de Dobbs. Entre autres, Newton croyait lui-mme avoir t choisi par Dieu :Rf. 23il prit son nom latin, Isaacus Neuutonus, et forma l anagramme Jeova sanctus unus. Sur Newton et son rledans la mcanique classique, lisez l ouvrage de Cliord Truesdell.Rf. 24

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  • de la mesure du mouvement la continuit 31

    F I G U R E 9 Galileo Galilei.

    Qu est-ce que la vitesse ?

    Il ny a absolument rien dautre de semblable.

    Jochen Rindt*La vitesse fascine. Pour les physiciens, non seulement les rallyes automobiles sont in-

    tressants, mais aussi tous les objets qui se dplacent. Par consquent, ils ont d abordvalu autant d exemples que possible. Une slection en est donne dans le Tableau 4 etle Tableau 5. Les prxes et les units utiliss sont dcrits en dtail dans l Annexe B.

    La vie quotidienne nous apprend beaucoup de choses sur le mouvement : les objetspeuvent se devancer les uns les autres et peuvent se dplacer dans des directions di-rentes. Nous remarquons galement que les vitesses peuvent tre augmentes ou modi-es de faon continue. La liste exhaustive de ces proprits, fournie dans le Tableau 3,est rsume par les mathmaticiens dans une expression particulire : ils disent que lesvitesses forment un espace vectoriel euclidien**. Nous donnerons plus de dtails sur cetteexpression bizarre sous peu. Pour l instant, notons simplement que, pour dcrire la na-Page 64ture, les conceptsmathmatiques se prsentent comme l instrument le plus prcis.

    On qualie la vitesse de galilenne lorsquelle est prsume tre un vecteur eucliden.La vitesse est un concept fondamental. Par exemple, la vitesse ne ncessite pas demesuresd espace et de temps pour tre dnie. tes-vous capable de trouver une mthode pourmesurer les vitesses sansmesurer l espace et le temps ? Si c est le cas, vous avez vraisem-Dfi 28 dblablement envie de sauter la page 15, passant par-dessus 2 000 ans de recherches. Sivous ne trouvez pas, lisez bien ceci : toutes les fois que nous mesurons une quantit, noussupposons implicitement que n importe qui est capable d en faire autant et que tout lemonde trouvera le mme rsultat. En dautres termes, nous dnissons la mesure parrapport une valeur standard. Nous supposons alors implicitement quun tel standardexiste, c est--dire quun exemple de vitesse parfaite peut tre dcouvert. Historique-

    * Jochen Rindt (19421970), clbre pilote autrichien de rallye automobile de Formule 1, parlant propos dela vitesse.** Ainsi nomm daprs Euclide, ou Eukleids, le grandmathmaticien grec qui vivait Alexandrie aux alen-tours de l an 300 av. J.-C. Euclide crivit un traitmonumental sur la gomtrie, ou les lments,qui est une des uvresmajeures de la pense humaine. Louvrage expose toute la connaissance de l poquesur la gomtrie. Pour la premire fois, Euclide introduisit deux approches qui sont maintenant utilisescommunment : tous les noncs sont dduits partir d un nombre rduit d axiomes de base et, pourchaque nonc, une preuve en est donne. Le livre, encore dit aujourdhui, fut l uvre de rfrence engomtrie pendant 2 000 ans. Sur le Web, on peut le trouver l adresse http://aleph0.clarku.edu/~djoyce/java/elements/elements.html.

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  • 32 2 de la mesure du mouvement la continuit

    TA B L E AU 3 Proprits de la vitesse au sens quotidien ou vitesse galilenne.

    L e s v i t e s s e sp e u v e n t

    P r o p r i t p h y s i q u e

    D n o m i n at i o nm at h m at i q u e

    D f i n i t i o n

    tre distingues discernement lment d un ensemble Page ??

    Changer graduellement continuit espace vectoriel rel Page 64,Page ??

    Pointer quelque part direction espace vectoriel, dimensionalit Page 64

    tre compares mesurable mtrique Page ??

    tre cumules additivit espace vectoriel Page 64

    Avoir des angles dnis direction espace vectoriel euclidien Page 64

    Dpasser toute limite inni innitude Page ??

    ment, l tude du mouvement nexamina pas cette question au premier abord, parce quependant plusieurs sicles personne ne put trouver un tel standard de vitesse. Vous tesdonc en bonne compagnie.

    Quelques chercheurs se sont spcialiss dans l tude des vitesses les plus faibles quel on rencontre dans la nature : ils sont appels gologues. Ne manquez jamais l occasionRf. 28de traverser un site tout en coutant parler l un dentre eux.

    La vitesse est un sujet profond pour une deuxime raison : nous dcouvrirons quetoutes les proprits du Tableau 3 sont uniquement approches, aucune nest exacte enralit. Des expriences perfectionnes nous dvoileront les limites de chaque propritde la vitesse galilenne. La faillite des trois dernires proprits nous conduira la relati-vit restreinte et gnrale, l chec des deux dumilieu la thorie quantique et l chec desdeux premires proprits la description unie de la nature. Mais, pour l instant, nousresterons accrochs la vitesse galilenne, et nous poursuivons avec un autre concept ga-lilen qui en drive : le temps.

    Sans les concepts de lieu, de vide et de temps, lechangement ne peut se produire. [...] Il est doncclair [...] que leur comprhension doit treralise, en tudiant chacun dentre euxsparment.

    Aristote* Physique, Livre III, partie 1.Qu est-ce que le temps ?

    Le temps nexiste pas intrinsquement,maisseulement travers les objets perus, dontdcoulent les notions de pass, de prsent et defutur.

    Lucrce**,De rerum natura, lib. 1, v. 460 ss.Pendant les premires annes de leur vie, les enfants passent beaucoup de temps jeter des objets autour d eux. Le terme objet est un mot latin qui signie la chosequi peut tre jete en face . La psychologie volutive amontr exprimentalement qu

    * Aristote (384/3322), savant et philosophe grec.** Titus Lucretius Carus (v. 95 v. 55 av. J.-C. ), pote et rudit latin.

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  • de la mesure du mouvement la continuit 33

    TA B L E AU 4 Quelques valeurs mesures de vitesse.

    O b s e rvat i o n V i t e s s e

    Croissance des stalagmites 0,3 pm/sPouvez-vous trouver quelque chose de plus lent ?

    Dfi 29 s

    Croissance d un nodule de manganse en plaine abyssale 80 am/sCroissance du lichen 7 pm/sDplacement caractristique des continents 10mm/a = 0,3nm/sCroissance humaine pendant l enfance, croissance capillaire 4 nm/sCroissance des arbres 30 nm/sDplacement des lectrons dans un l mtallique 1 m/sDplacement d un spermatozode de 60 160 m/sVitesse de la lumire au centre du Soleil 0,1mm/sDplacement du ketchup 1mm/sPlus petite vitesse de la lumire mesure dans la matire sur Terre 0,3m/s Rf. 25Chute des ocons de neige de 0,5m/s 1,5m/sVitesse du signal dans les cellules nerveuses humaines 0,5m/s 120m/s Rf. 26Vitesse du vent 1 degr Beaufort (trs lgre brise) moins de 1,5m/sVitesse de la pluie qui tombe, en fonction du rayon de la goutte de 2m/s 8m/sPoisson le plus rapide la nage, le voilier (Istiophorus platypterus) 22m/sRecord de vitesse en navigation maritime (par le vliplanchisteFinian Maynard)

    25,1m/sAnimal le plus rapide la course, le gupard (Acinonyx jubatus) 30m/sVitesse du vent 12 degrs Beaufort (ouragan) plus de 33m/sVitesse de l air dans la gorge lors de l ternuement 42m/sLe lancer mesur le plus rapide : la balle du jeu de cricket 45m/sHomme en chute libre de 50 90m/sOiseau le plus rapide en vol, au piqu, le faucon plerin(Falco peregrinus)

    60m/sService le plus rapide au badminton 70m/sVitesse moyenne des molcules d oxygne dans l air temprature ambiante

    280m/sVitesse du son dans l air sec au niveau de la mer et temprature ordinaire

    330m/sClaquement de l extrmit du fouet 750m/sVitesse d une balle de fusil 3 km/sVitesse de la propagation de la ssure dans la brisure dusilicium

    5 km/s

    partir de cette toute premire exprience les enfants extraient les notions de temps etRf. 18despace. Les physiciens adultes en font de mme lorsqu ils tudient le mouvement l universit.

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  • 34 2 de la mesure du mouvement la continuit

    TA B L E AU 5 Quelques valeurs mesures de vitesse (suite).

    O b s e rvat i o n V i t e s s e

    La plus haute vitesse macroscopique accomplie par l homme :le satellite Voyager

    14 km/sVitesse moyenne (et de pointe) de l extrmit de l clair 600 km/s (50 000 km/s)Vitesse de la Terre travers l univers 370 km/sLa plus haute vitesse macroscopique mesure dans notre galaxie 0,97 108 m/s Rf. 27Vitesse des lectrons dans un tlviseur couleur 1 108 m/sVitesse desmessages radio dans l espace 299 792 458m/sLa plus haute vitesse de groupe de la lumire jamais mesure 10 108 m/sVitesse d un point lumineux mis par une tour de lumirelorsqu il franchit la Lune

    2 109 m/sLa plus haute vitesse propre pour des lectrons jamaisralise par l homme

    7 1013 m/sLa plus haute vitesse possible pour un point lumineux ouune ombre

    innie

    F I G U R E 10 Une trajectoire typique suivie par une pierre jete en lair.

    Lorsque nous jetons une pierre en l air, nous pouvons dnir une succession dob-servations. Notre mmoire et nos sens nous donnent cette aptitude. Loue enregistre lesdivers sons durant la monte, la chute et l arrive de la pierre. Nos yeux traquent l empla-cement de la pierre d un point l autre. Toutes les observations ont leur emplacementdans la succession, avec certaines observations qui les prcdent, certaines observationsqui leur sont simultanes, et d autres encore qui les suivent. Nous disons que les obser-vations sont perues comme survenant divers instants et nous appelons la successiondes instants le temps.

    Une observation qui est considre comme tant la plus petite partie d une succes-sion, c est--dire qui nest pas elle-mme une succession, est appele un vnement. Lesvnements sont primordiaux pour la dnition du temps. En particulier, dclencher ouarrter un chronomtre sont des vnements. (Mais les vnements existent-ils relle-ment ? Gardez cette question dans un coin de votre tte pendant que nous progressons.)Dfi 30 s

    Les phnomnes successifs ont une autre proprit, connue comme tant la priode,l tendue ou la dure. Quelques valeurs mesures sont donnes dans le Tableau 6*. La

    * Une anne est abrge par a ( annus en latin).

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  • de la mesure du mouvement la continuit 35

    TA B L E AU 6 Quelques mesures slectionnes de temps.

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    Le plus petit tempsmesurable 1044 s

    Le plus petit temps jamais mesur 1023 s

    Temps mis par la lumire pour traverser un atome typique 10181 s

    Priode de la transition hyperne de l tat fondamentaldu csium

    108,782 775 707 78ps

    Battement d aile de lamouche du vinaigre (drosophile) 1ms

    Priode du pulsar (toile neutrons en rotation) PSR 1913+16 0,059 029 995 271(2)s Instant humain 20ms

    La plus petite dure de vie d un tre vivant 0,3 j

    Dure moyenne du jour il y a 400millions d annes 79 200 s

    Dure moyenne du jour aujourd hui 86400,002(1) sDure coule depuis votre naissance jusqu votre1 000 millionime seconde de vie

    31,7 a

    ge du plus ancien arbre vivant 4 600 a

    Apparition du langage humain 2 105 a

    ge de l Himalaya de 35 55 106 a

    ge de la Terre 4,6 109 a

    ge des plus vieux astres 13,7Ga

    ge de la plupart des protons de votre corps 13,7Ga

    Dure de vie du noyau de tantale 180Ta 1015 a

    Dure de vie du noyau de bismuth 209Bi 1,9(2) 1019 adure rete l ide que les successions prennent du temps. Nous disons quune opra-tion prend du temps pour exprimer l ide que dautres oprations peuvent avoir lieuparalllement celle-ci.

    Quest exactement le concept de temps, comportant des successions et des dures, in-fr par les observations ? Beaucoup de gens ont examin cette question : les astronomes,les physiciens, les horlogers, les psychologues et les philosophes. Ils ont tous trouv quele temps est dduit en comparant des mouvements. Les enfants, ds leur plus jeune ge,dveloppent la notion de temps partir de la comparaison des mouvements dansleur voisinage. Les grandes personnes considrent le mouvement du Soleil comme uneRf. 18rfrence et nomment le type de temps qui en rsulte le temps local. partir de la Luneils ont construit un calendrier lunaire. En prenant une horloge particulire dans un vil-lage d une le europenne, ils l appellent le temps universel coordonn (TUC, en anglaisCoordinated Universal Time, UTC), autrefois connu sous le nom de temps moyen deGreenwich *. Les astronomes utilisent le dplacement des astres et nomment ce rsultat

    * Le temps TUC ociel est utilis pour dterminer la phase du courant lectrique, les ux de transmissiondes compagnies de tlphone et le signal du systme GPS utilis par de nombreux systmes de navigationdans le monde, notamment dans les navires, avions et camions. Pour plus d informations, voir le site Webhttp://www.gpsworld.com. L infrastructure de la gestion du temps est galement importante pour dautrespans de l conomie moderne. Pouvez-vous en reprer les plus importants ?Dfi 31 s

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  • 36 2 de la mesure du mouvement la continuit

    le temps des phmrides (ou un de ses succdans). Un observateur qui se rfre samontre personnelle dsigne la lecture de celle-ci comme tant son temps propre, il estcouramment utilis dans la thorie de la relativit.

    Tout mouvement nest pas forcment une bonne rfrence de temps. En l an 2000une rotation de la Terre ne prenait pas 86 400 secondes, comme en l an 1900, maisPage 30986 400,002 secondes. Pouvez-vous deviner en quelle anne votre anniversaire sera d-cal d une journe entire par rapport au temps prvu de 86 400 secondes ?Dfi 32 s

    Toutes les mthodes de dnition du temps sont donc fondes sur des comparaisonsentre mouvements. Dans le but de rendre ce concept aussi prcis et aussi utile que pos-sible, un standard de mouvement de rfrence est choisi, et avec celui-ci sont tabliesune succession standard et une dure standard. Lappareil qui ralise cette tche est ap-pel une horloge. Nous pouvons alors rpondre la question du titre de cette section :le temps est ce que nous lisons sur une horloge. Remarquez que