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C'est un peu l'histoire L'AVENTURE DES On l'écoute au petit dé- jeuner, dans la voiture, toute la journée parfois, en bruit de fond... La ra- dio fait aujourd'hui par- tie des meubles. Mais il y a à peine plus de septan- te ans, les adeptes de la téléphonie sans fil fai- saient encore figure d'ex- tra-terrestres! Une histoi- re qui n'est pas tout à fait étrangère à celle de votre "Moustique" adoré. L a première expé- rience de téléphonie sans fil eut lieu aux Etats-Unis en 1906 mais la Belgique n'attendit pas très longtemps pour prendre en marche le train de la formidable aventu- re qui commençait. Dès 1907, Robert Goldschmidt, en col- laboration avec Maurice Phi- lippson, réussissait plusieurs expériences de TSF depuis le Palais de Justice de Bruxelles vers Tervuren d'abord, vers la citadelle de Namur et l'Ob- servatoire de Liège ensuite, et enfin à destination d'un bal- lon! En 1913, les Belges faisaient même figure de pionniers en Europe en installant une sta- tion expérimentale de radio- phonie dans une annexe du palais royal de Laeken. Dès le printemps 1914, celle-ci dif- fusait les premiers concerts radiophoniques sur le conti- nent. En théorie, on pouvait les capter aux quatre coins du pays et même dans le nord de la France, mais les posses- seurs de postes à galène fai- saient encore figure d'explo- rateurs des ondes! Le 28 mars 1914, le roi Al- bert 1er fait installer un poste- récepteur au Palais de Bruxelles pour écouter les concerts en famille. En quelques semaines, on crée une école de TSF et un labo- ratoire de recherches à Lae- ken. C'est aussi que huit pylônes de 80 à 125 mètres se dressent, qui vont permettre des émissions expérimentales de radio intercontinentales. Principalement, bien sûr, à destination de la colonie congolaise. C'est ainsi qu'à la veille du premier conflit mon - dial, toutes les conditions sont déjà remplies pour permettre le démarrage de la radio en Belgique... L'invasion alle- mande en décidera autre- ment: le 19 août 1914, sur ordre du Roi, des charges de dynamite font sauter les ins- tallations de Laeken. _ Pendant près de 10 ans, le silence... Il faut en effet attendre le mois de novembre 1923 pour qu'une entreprise privée, la SBR (Société belge radio- électrique), se lance à nou- veau dans quelques émis- sions expérimentales. Celles- ci seront entendues bien au- delà de nos frontières comme le prouveront des lettres en - thousiastes provenant de France, de Suisse et même du nord de l'Algérie et de Norvège! Radio Bruxelles - qui deviendra Radio Belgique en 1924 - est née. Sa locali- sation? Les focaux de l'Union coloniale, au n°34 de la rue de Stassart dans la commune bruxelloise d'Ixelles. Il s'agit d'un point particulièrement élevé de la capitale. A l'origine, les programmes sont exclusivement musicaux: concerts classiques joués par l'orchestre de la radio, puis aussi de captations au théâtre

C'est un peu l'histoire L'AVENTURE DES

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C'est un peu l'histoire

L'AVENTURE DESOn l'écoute au petit dé-jeuner, dans la voiture,toute la journée parfois,en bruit de fond... La ra-dio fait aujourd'hui par-tie des meubles. Mais il ya à peine plus de septan-te ans, les adeptes de latéléphonie sans fil fai-saient encore figure d'ex-tra-terrestres! Une histoi-re qui n'est pas tout àfait étrangère à celle devotre "Moustique" adoré.

La première expé-rience de téléphoniesans fil eut lieu auxEtats-Unis en 1906mais la Belgique

n'attendit pas très longtempspour prendre en marche letrain de la formidable aventu-re qui commençait. Dès 1907,Robert Goldschmidt, en col-laboration avec Maurice Phi-lippson, réussissait plusieursexpériences de TSF depuis lePalais de Justice de Bruxellesvers Tervuren d'abord, vers lacitadelle de Namur et l'Ob-servatoire de Liège ensuite, etenfin à destination d'un bal-lon!

En 1913, les Belges faisaientmême figure de pionniers enEurope en installant une sta-tion expérimentale de radio-phonie dans une annexe dupalais royal de Laeken. Dès leprintemps 1914, celle-ci dif-fusait les premiers concertsradiophoniques sur le conti-nent. En théorie, on pouvaitles capter aux quatre coins dupays et même dans le nord dela France, mais les posses-seurs de postes à galène fai-saient encore figure d'explo-rateurs des ondes!

Le 28 mars 1914, le roi Al-bert 1er fait installer un poste-récepteur au Palais deBruxelles pour écouter lesconcerts en famille. Enquelques semaines, on créeune école de TSF et un labo-ratoire de recherches à Lae-ken. C'est là aussi que huitpylônes de 80 à 125 mètres sedressent, qui vont permettredes émissions expérimentalesde radio intercontinentales.Principalement, bien sûr, àdestination de la coloniecongolaise. C'est ainsi qu'à laveille du premier conflit mon -dial, toutes les conditions sontdéjà remplies pour permettrele démarrage de la radio enBelgique... L'invasion alle-mande en décidera autre-ment: le 19 août 1914, surordre du Roi, des charges dedynamite font sauter les ins-tallations de Laeken.

_ Pendantprès de 10 ans,

le silence...Il faut en effet attendre le

mois de novembre 1923 pourqu'une entreprise privée, laSBR (Société belge radio-électrique), se lance à nou-veau dans quelques émis-sions expérimentales. Celles-ci seront entendues bien au-delà de nos frontières commele prouveront des lettres en -thousiastes provenant deFrance, de Suisse et mêmedu nord de l'Algérie et deNorvège! Radio Bruxelles -qui deviendra Radio Belgiqueen 1924 - est née. Sa locali-sation? Les focaux de l'Unioncoloniale, au n°34 de la ruede Stassart dans la communebruxelloise d'Ixelles. Il s'agitd'un point particulièrementélevé de la capitale.

A l'origine, les programmessont exclusivement musicaux:concerts classiques joués parl'orchestre de la radio, puisaussi de captations au théâtre

du "Moustique"

PIONNIERS BELGES DE LA TSFde la Monnaie. Mais après unan d'expérience, des émis-sions parlées apparaissentsous f o r m e de"causeries" en dé-but de s o i r é e ,avant le sacro-saint concert dusoir. Des méde-cins, notamment,évoquent des su-jets comme l'hy-giène corporelle,les premiers signesde la tuberculoseou e n c o r e les"préjugés sur lesmaladies men -taies". Ces pre-miers pas dans lapresse parlée sontsuivis, dès mars1924, d'une autreinnovation plusimportante enco-re: la diffusion sur"Radio-Belgique"d'informations de

Le premier journalparlé du monde

était belgeDécidément à la pointe du

progrès en matière de TSF,Radio-Belgique va initier unevéritable révolution radiopho-nique dès novembre 1926.Essentiellement grâce à l'ac-tion d'un homme: le journalis-te Théo Fleischman. Engagépar la rue de Stassart en mars1924, il n'aura de cesse demettre sur pied un véritablejournal d'information parlé.Celui-ci voit le jour deux ansplus tard avec pour concept:"toutes les nouvelles du mon-de et de la journée en trenteminutes". Cette formule maisaussi la rigueur du journal deRadio-Belgique seront prisesen exemple dans le mondeentier! C'est ainsi que, fin desannées vingt, les observa-teurs étrangers par dizainesse déplacèrent rue de Stas-sart pour étudier la recetteFleischman.

1927:le premier direct

sportifdu stade

du Daringà Molenbeek...

Dès 1930, les pionniersbelges de la radio avaient dé-jà tout inventé. Le JP, on l'adit, mais aussi le reportagesportif, initié en 1927 parAdrien Milecan, lorsqu'ilcommenta en direct du stadedu Daring le match de footBelgique-Angleterre. Dès1928, nos reporters n'hésitentplus non plus à envoyer desbillets radio depuis l'autrebout du monde. Cette année-là, ils accompagnent notam-ment nos souverains au

Congo. Et c'est aussi en 1928qu'est apparu le bulletin d'in-formation bimensuel depuisLéopoldville. Les premièresémissions de radio scolairesapparaissent dès 1929 sous laforme de cours d'anglais maisaussi... d'espéranto et de sté-nographie. Tandis que lesémissions colombophiles ac-centuent encore la vocationde service au public inhérenteà ce média. Mais les auditeursveulent aussi se divertir. Qu'àcela ne tienne, il suffira dedemander la solution à l'in-contournable Théo Fleisch-man. Le journaliste se muealors en écrivain et produit,dès 1929, plusieurs pièces dethéâtre spécialement adap-tées au "jeu radiophonique".Peu de temps après appa-

raissent aussi les premièresémissions enfantines quivoient défiler des clowns dansles studios ixellois de Radio-Belgique.

Le vaisseaude la futureplace Flagey

sort de terre...Les progrès fulgurants de la

radio vont rapidement débou-che r sur une pr ise deconscience dans les milieuxpolitiques mais aussi et sur-tout dans la presse: la puis-sance du nouveau média,mais également les servicesqu'il peut rendre à la nation

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télémoastiqoe 27

conduisent à la création d'unorganisme officiel de radiodif-fusion: l'I.N.R. (Institut natio-nal belge de radiodiffusion),institué par la loi du 18 juin1930.

H.E FANTOME DE LA RADIO

Belgique", mais cel les-cis'avèrent rapidement insuffi-santes et surtout inadaptéespour couvrir parfaitementl ' ensemb le du pays. Al'époque, l'ensemble des stu-dios et bureaux de la radionationale sont encore disper-sés dans le quartier de la por-te de Namur, Principalementrue du Bastion. Après les ra-vages causés par l'incendied'un important studio, en dé-cembre 1933, l'I.N.R. décidede se faire construire sa "Mai-son de la radio". Une sorte devaisseau amiral qui lui per-mettrait enfin d'assurer toutesses missions. A l'époque, ilest vrai que les subventionsdu gouvernement et les rede-vances radio permettent en-core à l'Institut de présenterdes comptes largement bé-néficiaires...

Absorbant"Radio-Bel-gique", l'I.N.R.n'aura pour-tant pas lemonopole desé m i s s i o n s .Des tempsd ' a n t e n n esont accordésa u x t r o i sgrands cou-rants poli -tiques belges.C e s o r g a -nismes de dif-fusion (Radioc a t h o l i q u ebelge. RadioEmission so-cialiste d'ex-pression fran-çaise, Sociétélibérale de ra-diodiffusion)occuperont dela sorte envi-ron le tiers dutemps d'an-t e n n e d el'I.N.R. (*)

Par ailleurs,les auditeursg a r d e n t lapossibilité dec a p t e rd'autres sta-tions, privéescelles-là, quisont apparuesà part i r de1925. Selonleur port d'at-tache, tes plusanciens deslecteurs du

Moustique n'ont certainementpas publié les émissions deRadio-Schaerbeek, Radio-Conférences, Rad io-Ar -dennes, Radio-Liège (ex-Radio Wallonie), Radio-Ver -viers, Radio-Seraing, RadioWallonia, Radio Bonne Espé-rance, Radio-Châtelineau,etc.

A ses débuts, l'I.N.R. héritedes installations de "Radio-

Des voixsurgies

du passé

En 1934, un terrain de 4.000m2 est donc acheté sur la pla-ce Sainte-Croix, rebaptiséeplus tard place Flagey, en fa-ce des étangs d'Ixelles. Le 3novembre, la première pierrede l'imposant bâtiment jauneest posée. Quatre ans plustard, l'usine à son est prête àémettre. Aujourd'hui encore,la maison de l'I.N.R. que cesoit par son architecture, sonfonctionnalisme ou encoreson aspect imposant (notam-ment ses six salles de concertdont une de plus de millemètres!) ne laisse pas indiffé-rent. C'est d'ailleurs par unevisite nocturne, à pas de loup,comme pour ne pas dérangerles fantômes qui y dormentcertainement que Wilbur Le-guebe entame son émouvantreportage.

Emouvant, car l'on sait bienque, comme autrefois leFrance, le paquebot de laplace Flagey va bientôt êtrerevendu à des privés qui, s'ilssauront sans doute le rani-mer, priveront la communautéd'une partie importante deson patrimoine culturel.Emouvant aussi et surtout,parce que cette visite n'estque le prétexte à des retrou-vailles avec nombre de pion-

niers des ondes dejadis. Encore frais,alertes et bien sûrpassionnés, ilsnous racontent cespremières décen-nies de l'histoireextraordinaire dela TSF.

Il y a André Ha-gon qui fut "spea-ker" sur RadioWal lon ia , bienavant d'être l'ins-piré père spiritueldu centre de pro-duction RTBf de Charleroi;Jean-Albert Renaud qui ani-mait les concours de chan-teurs amateurs et biend'autres émissions sur lesondes de Radio-Ardennes. Ily a aussi le comédienGeorges Genicot qui avecd'autres, au fil de nombreusesannées, créa cet univers fan-tasmagorique et sans douteinoubliable du théâtre radio-phonique. Paul Levy, ce re-porter vedette de l'I.N.R. qui

fit découvrir et aimer notrepays et ses gens au travers demultiples reportages de ter-rain. Et même l'écrivain Ar-thur Haulot qui, en 1938,commenta les funérailles dutribun socialiste Emile Van-dervelde...

D'autres voix encore, pré-sentes et passées, commecelle du grand Théo Fleisch-

man, nous racontent cettepremière tranche de vie de laradio en Belgique. Ce tempsoù l'on écoutait vraiment laradio. C'est-à-dire qu'assisen famille autour d'elle, on lafixait; on la regardait. Pas-sionnément. Exactementcomme la télé aujourd'hui. Etfinalement, les images appa-raissaient. Nettes. Tou-chantes. Parfois même me-

morables. Car elles prove-naient de l'imagination, ducœur de chaque auditeur. •

Michel Bouffioux

(') Ce système qui assurait tepluralisme politique et philoso-phique des émissions de radio, àl'instar d'ailleurs de ce qui se faitencore aujourd'hui chez nos voi-sins hollandais, disparaîtra avecla Seconde Guerre.

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.Il faudrait que je m'habille...mais comment?Viens nounours... je t'emmèneavec moi...

Qu'est ce que je vais mettreaujourd'hui?

...on va de ce pasvoir la nouvellecollection

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