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Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers Institut d'Études Politiques d'Aix-en-Provence La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France Moins de 2000 morts par an sur les routes en 2020 : les sapeurs-pompiers peuvent-ils contribuer à atteindre cet objectif ? Mémoire en vue de l’obtention de la Formation d’Adaptation à l’Emploi de Chef de Groupement et du Certificat d’Études Politiques de Sciences-Po Aix-en-Provence Promotion CGPT 2015/01 n°30 Présenté sous la direction du colonel Eric FLORES, Directeur du SDIS de l’Aveyron Rédacteurs: Capitaine Stéphane ALLEGUEDE (SDIS 12) Commandant Sébastien BERTAU (ENSOSP) Commandant David GOUZOU (SDIS 47) Capitaine Jean-Philippe LADET (SDIS 07) Accompagnement méthodologique : Division des Formations Supérieures de l’ENSOSP

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

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Page 1: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers

Institut d'Études Politiques d'Aix-en-Provence

La politique nationale de sécurité routière et

les sapeurs-pompiers de France

Moins de 2000 morts par an sur les routes en 2020 :

les sapeurs-pompiers peuvent-ils contribuer à atteindre cet objectif ?

Mémoire en vue de l’obtention de la Formation d’Adaptation à l’Emploi de Chef de Groupement

et du Certificat d’Études Politiques de Sciences-Po Aix-en-Provence

Promotion CGPT 2015/01 n°30

Présenté sous la direction du colonel Eric FLORES,

Directeur du SDIS de l’Aveyron

Rédacteurs:

Capitaine Stéphane ALLEGUEDE (SDIS 12)

Commandant Sébastien BERTAU (ENSOSP)

Commandant David GOUZOU (SDIS 47)

Capitaine Jean-Philippe LADET (SDIS 07)

Accompagnement méthodologique : Division des Formations Supérieures de l’ENSOSP

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

Les opinions exprimées dans ce mémoire sont propres à leurs auteurs et n’engagent pas l’Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers, ni l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

REMERCIEMENTS

Entreprendre une formation de chef de groupement, c’est s’engager sur un long et difficile chemin qui demande à chacun des officiers qui l’emprunte un très fort investissement personnel, de la passion et de la volonté.

Nous tenons ici à remercier nos directeurs respectifs :

Colonel Didier AMADEÏ, Directeur Départemental du Service d’Incendie et Secours (DDSIS) de l’Ardèche,

Colonel Eric FLORES, DDSIS de l’Aveyron,

Colonel Francis MENE, Directeur de l’Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers (ENSOSP),

Colonel Philippe RIGAUD, DDSIS de Lot-et-Garonne,

pour la confiance qu’ils nous ont accordée et le temps qu’ils ont bien voulu nous laisser dédier à cette tâche.

Tous les efforts consentis seraient vains s’ils étaient produits dans l’entre-soi et l’isolement.

Cette formation a été l’occasion de très nombreuses rencontres au cours desquelles nous avons pu profiter sans retenue de la plus grande richesse qui était à notre disposition, l’expérience humaine.

Ainsi, le travail qui suit n’aurait pas pu être achevé sans le concours précieux et les conseils avisés de toutes les personnes que nous avons sollicitées au cours de notre recherche.

Nous tenons ici à leur adresser nos très chaleureux remerciements.

Il s’agit en premier lieu, et encore une fois, du colonel Eric FLORES, qui fut notre directeur de mémoire et qui a su, au milieu d’un emploi du temps très chargé, prendre régulièrement le temps de nous recevoir, nous orienter et nous conseiller.

Nous remercions également l’équipe pédagogique de la Division des Formations Supérieures du Département Prospective et Professionnalisation de l’ENSOSP, pour l’organisation et le suivi de notre formation, ainsi que les intervenants qui nous ont dispensé leurs enseignements, pour la qualité de leurs prestations et les échanges qui ont suivi.

Les entretiens que nous avons sollicités ont toujours reçu un aimable accueil et nos interlocuteurs ont fait en sorte de nous aider à comprendre leurs champs d’action respectifs afin que nous puissions bâtir une analyse aussi complète que possible du sujet qui nous avait été demandé de traiter.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

La liste complète des personnes que nous avons consultées est établie plus loin, mais dès à présent, nous remercions tout particulièrement :

Monsieur Philippe HOUILLON, député du Val d’Oise, membre du Conseil National de la Sécurité Routière,

Monsieur Jean BENET, adjoint au Directeur Général de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises, directeur des sapeurs-pompiers,

Colonel Eric FAURE, Directeur Départemental du Service d’Incendie et Secours de Seine-et-Marne et Président de la Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers de France,

Colonel Philippe BODINO, chargé de mission auprès de l’Inspection Générale de l’Administration,

Monsieur Christian MACHU adjoint à la secrétaire générale de l’Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière,

Docteur Bernard LAUMON, président du comité des experts auprès du Conseil National de la Sécurité Routière, directeur de recherches à l’Institut Français des Sciences et Technologies des Transports, de l’Aménagement et des Réseaux.

Le fait que ces personnalités de tout premier plan dans leurs domaines respectifs aient accepté de nous éclairer dans notre recherche, montre l’intérêt porté à la profession des officiers de sapeurs-pompiers, en général et au sujet traité, en particulier.

Nous tenons à souligner les liens d’amitié qui se sont créés entre tous les camarades de cette 30ème promotion de chef de groupement. Les qualités professionnelles et personnelles des femmes et des hommes de ce groupe nous ont accompagnées tout au long du parcours.

Nous tenons enfin à remercier nos épouses respectives et nos enfants pour la patience dont ils ont, encore une fois, fait preuve et le soutien indéfectible qu’ils nous ont apporté dans notre engagement professionnel.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

RESUME

Le bilan de la sécurité routière en 2014 n’est pas bon : 3,5% de personnes sont tuées en

plus par rapport à l’année précédente, sur les voies de circulation françaises. Depuis douze

années ce nombre était en constante diminution.

Tous les leviers d’action doivent être utilisés pour limiter le nombre des tués et des blessés

dans des accidents de circulation routière. Pour la première fois, la question est posée : les

sapeurs-pompiers peuvent-ils contribuer à atteindre l’objectif gouvernemental de moins de

2000 morts en 2020 ? Nous démontrons que bien qu’ils soient reconnus comme acteurs

opérationnels de terrain, ils sont absents de la conception de la politique nationale de

sécurité routière. Ils agissent localement pour prévenir les risques et porter secours. Grâce

au maillage territorial, ils sont les premières forces publiques présentes sur les lieux.

La recherche menée démontre que les sapeurs-pompiers de France peuvent contribuer aux

progrès de cette politique publique, au-delà du périmètre départemental, en apportant de

nouvelles compétences. Cela ne sera rendu possible qu’à condition d’être en situation de

pouvoir rendre compte de leur expertise, au plan national et international.

Mots clés : Risque routier, sécurité routière, gestion des risques, secours routier, techniques

opérationnelles, politique publique, formation, statistiques, sapeurs-pompiers, nouvelles

technologies, innovation, accident de la route, prévention, expertise, recherche des causes,

économie, communication, gouvernance.

ABSTRACT

The assessment of road safety in 2014 is not good: the number of people killed increase by

3.5% compared to the previous year on French roads. For twelve years the number was

steadily decreasing.

All levers must be used to limit the number of killed and injured in road traffic accidents. For

the first time, the question is : can the firefighters help the government's target achievement

of less than 2000 dead in 2020 ? We demonstrate that although they are recognized as

operational field actors, they are absent from the design of the national road safety policy.

They act locally to prevent risks and rescue. With the territorial network, they are the first

public forces present at the scene.

The research shows that French firefighters can contribute to the progress of this public

policy, beyond the departmental scope, bringing new skills. This will be made possible only if

it is in a position to realize their expertise at national and international level.

Keywords: road risk, road safety, risk management, breakdown assistance, operational

techniques, public policy, education, statistics, firefighters, new technologies, innovation,

road accident prevention, expertise, research into the causes, economics, communication,

governance.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

TABLE DES ABREVIATIONS

AAAM Association for advancement of automotive medecine

ABS Anti blocking system

ABTH Accidents, blessés, tués, hospitalisés

ACMF Automobile club médical de France

AFNOR Association française de normalisation

AIS Abbreviated injury scale

APAM Auteurs présumés d’accidents mortels

ARVAC Association pour le registre des victimes d’accidents de la circulation

ARS Agence régionale de santé

BAAC Bulletin d’analyse des accidents corporels

BH Blessés hospitalisés

BLEVE Boiling linquid expanding vapor explosion

BRIRC Bureau de la réglementation incendie et des risques courants

BSPP Brigade des sapeurs-pompiers de Paris

CARE Community road accident database

CASDIS Conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours

CEREMA Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement

CERISC Centre d'études et de recherches interdisciplinaire sur la sécurité civile

CGCT Code général des collectivités territoriales

CHSCT Comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail

CIC Centre interministériel de crise

CIS Centre d’incendie et de secours

CISR Comité interministériel de la sécurité routière

CMVOA Centre ministériel de veille opérationnelle et d’alerte du MEDDE

CNRS Centre national de la recherche scientifique

CNSR Conseil national de la sécurité routière

CNTPSR Comité national technique et pédagogique secours routier

COD Centre opérationnel départemental

CODIS Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours

COGIC Centre opérationnel de gestion interministériel de crise

COS Commandant des opérations de secours

COTRRIM Contrat territorial de réponse aux risques et aux menaces

CPI Centre de première intervention

Page 9: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

CRSS Compte rendu de sortie de secours

CS Centre de secours

CSA Contrôle sanction automatisé (radars)

CSP Centre de secours principal

CTA Centre de Traitement de l’Alerte

DDSIS Directeur départemental du service d’incendie et de secours

DDT Direction départementale des territoires

DGEC Direction générale de l'énergie et du climat

DGO Document général d'orientations

DGITM Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

DGSCGC Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises

DIR Direction interdépartementale des routes

DISR Délégué interministériel à la sécurité routière

DMAT Direction de la modernisation de l'action territoriale

DOS Directeur des opérations de secours

DSCR (la) Direction devenue Délégation à la sécurité et à la circulation routières

DSCR (le) Délégué à la sécurité et à la circulation routières

EMIZ État-major interministériel de zone

ENSOSP Ecole nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers

ERG Emergency response guide

ERP Etablissement recevant du public

FAD Fiche d’aide à la désincarcération

FNSPF Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France

GES Gaz à effet de serre

GIEC Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat

GIPSR Groupement interministériel permanent de la sécurité routière

GN Gendarmerie nationale

IFSTTAR Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux

IGA Inspection générale de l'administration

IGH Immeuble de grande hauteur

INSEE Institut national de la statistique et des études économiques

INSERM Institut national de la santé et de la recherche médicale

INSERR Institut national de sécurité routière et de recherches

IRTAD International road traffic and accident database

LCVR Ligue contre la violence routière

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

MAIS Maximum Abbreviated injury scale

MADS Modèle d’analyse des dysfonctionnements des systèmes

MEDDE Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Mio, Mrd EUR Millions, milliards d’euros

MILDECA Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives

MOSAR Méthode organisée systémique d’analyse des risques

OCDE Organisation de coopération et de développement économique

ODSR Observatoire départemental de sécurité routière

OMS Organisation mondiale de la santé

ONISR Observatoire national interministériel de sécurité routière

ONU Organisation des nations unies

PDASR Plan départemental d’actions de sécurité routière

PDCR Plan départemental de contrôles routiers

PIB Produit intérieur brut

PMSI Programme de médicalisation des systèmes d’information

PPRR Plan de prévention des risques routiers

RO Règlement opérationnel

SAMU Service d'aide médicale urgente

SDACR Schéma départemental d’analyse et de couverture des risques

SDCSR Sous-direction de la circulation et de la sécurité routières

SDIS Service départemental d’incendie et de secours

SIG Système d’information géographique

SIS Service d’incendie et de secours

SMUR Service mobile d'urgence et de réanimation

SUAP Secours d’urgence aux personnes

T2A Tarification à l’acte

THLE Très haute limite élastique

UCLIR Unité de coordination de lutte contre l'insécurité routière

UHLE Ultra haute limite élastique

UMRESTTE Unité mixte de recherche épidémiologique et de surveillance, transport, travail et Environnement

VSAB Véhicule de secours aux asphyxiés et blessés

VSAV Véhicule de secours et d’assistance aux victimes

VSR Véhicule de secours routier

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

PARTIE 1 : LE CONTEXTE ET LES HYPOTHESES 3

1.1 PROPOS INTRODUCTIF 3 1.2 LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURITE ROUTIERE 7 1.3 L’ORGANISATION DES SERVICES D’INCENDIE ET DE SECOURS EN FRANCE 20 1.4 FORMULATION DES HYPOTHESES DE RECHERCHE 27

PARTIE 2 : DES ACTIONS OPERATIONNELLES VERS LA POLITIQUE NATIONALE 29

2.1 PRESENTATION DE LA RECHERCHE 29 2.2 CONTENU DE LA RECHERCHE 31 2.3 RETOUR SUR LES HYPOTHESES DE RECHERCHE 49 2.4 LES PRECONISATIONS : VERS UNE COMPLETE INTEGRATION DE L’EXPERTISE DES SAPEURS-POMPIERS DE FRANCE 51

CONCLUSION 59

TABLE DES MATIERES 62

BIBLIOGRAPHIE 64

WEBOGRAPHIE 67

TABLE DES ILLUSTRATIONS 71

ANNEXES 72

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

«En vérité, le chemin importe peu, la volonté d’arriver suffit à tout.»

Albert CAMUS1

1 Prix Nobel de littérature en 1957, Albert CAMUS est mort le 4 janvier 1960, dans un accident de la route, sur la RN6, dans l’Yonne, à l’âge de 47 ans. La citation est tirée de l’ouvrage le « Mythe de Sisyphe ».

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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INTRODUCTION

Sourd. Un bruit terrible. La tôle pliée. Une personne décédée.

Il s’agit du 3 384ème tué sur les routes de France en 2014. Le dernier.

Un piéton renversé par une voiture. Il avait 39 ans.

Depuis douze ans, l’accidentalité routière était en constante diminution. Une forte volonté des hommes et femmes politiques français avait permis de créer les conditions pour obtenir ces résultats.

Cette année marque le pas. Le bilan de la sécurité routière n’est pas bon.

Face à cette situation, le ministre de l’Intérieur Bernard CAZENEUVE a déclaré le 11 mai 2015 devant le Conseil National de la Sécurité Routière (CNSR) : « Il nous faut faire preuve désormais de davantage de rigueur, d’imagination et de persévérance. (…) Nous ne devons rien négliger et utiliser au contraire tous les effets de levier possibles. »

Les sapeurs-pompiers de France agissent pour aider les victimes d’accident de la route. En 2014, ils sont intervenus 279 498 fois2 à ce titre. Ce chiffre est en augmentation par rapport à 2013.

Les sapeurs-pompiers sont des acteurs opérationnels du secours routier. Ils ne semblent pas présents dans la définition et la conception de la politique de sécurité routière et d’éducation, comme peuvent l’être la gendarmerie ou la police, pas plus que dans le recueil des données statistiques.

Ils semblent aussi absents des politiques de sécurité des infrastructures routières et de réglementation technique des véhicules, qui restent de la compétence du ministre de l’écologie, en charge des transports. De nouvelles technologies et modes de mobilité induisent des risques émergents pour les personnels intervenant sur les accidents.

C’est dans ce contexte que, dans le cadre de notre formation d’adaptation à l’emploi de chef de groupement à l’Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers (ENSOSP), il nous a été confié le sujet initialement formulé « les sapeurs-pompiers sont absents de la politique nationale de sécurité routière. Comment y remédier ? »

Après avoir progressé dans l’étude du sujet, une reformulation nous est apparue nécessaire. En effet, le risque d’une prise de position initiale trop forte et non démontrée (« l’absence ») nous est apparu.

2 Statistiques des services d’incendie et de secours pour l’année 2014 - Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises (DGSCGC)

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

2

A l’issue de cette nouvelle réflexion, et en accord avec notre directeur de mémoire, nous avons proposé une reformulation du sujet, titre de notre mémoire :

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France.

Moins de 2000 morts par an sur les routes en 2020 : les sapeurs-pompiers peuvent-ils contribuer à atteindre cet objectif ?

La sécurité routière représente un enjeu significatif de sécurité et de santé publique dans notre pays. Malgré une augmentation continue du nombre de kilomètres parcourus, la politique française de sécurité routière initiée depuis le début des années 1970 a permis une diminution importante du nombre de blessés et de morts. Une politique nationale de sécurité routière est donc indispensable, afin de tendre vers l’objectif gouvernemental de moins de 2000 morts en 2020. Celle-ci doit être adaptée en permanence aux évolutions de la société. Mais l’action publique ne peut pas tout. La réussite de cette politique dépend également de l’implication active de tous les acteurs.

Une fois le sujet posé, le contexte identifié et circonscrit, et la problématique établie, la question de recherche peut être formulée :

En quoi l’implication des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière peut-elle conduire à la réduction des dommages corporels et des décès dus aux accidents de la route ?

Nous nous proposons de répondre à cette question selon un angle nouveau et complémentaire pour la sécurité routière. Nous observons et étudions dans un premier temps la politique nationale de sécurité routière menée. Dans un second temps, nous examinons l’organisation des SIS afin d’identifier leurs leviers d’action. Cela nous conduit à formuler deux hypothèses de recherche.

Au travers de la seconde partie, après avoir exposé la méthodologie de notre recherche, nous présentons les résultats qui désignent la place réelle des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière, leur capacité à s’y insérer, et leurs apports. Ensuite nous répondons aux hypothèses initiales. Ainsi, nous pouvons dégager des préconisations susceptibles d’être reprises, afin que les sapeurs-pompiers de France contribuent à l’atteinte de l’objectif du gouvernement.

Notre recherche ne consiste pas à envisager toutes les solutions pour répondre à l’insécurité routière. De plus, nous prenons soin d’éluder notre propre expérience de conducteur, afin de ne pas influencer l’analyse. Compte tenu de la dimension du sujet, nous nous limitons à proposer des points d’entrée qui devront permettre, dans un deuxième temps, de réunir les conditions de la contribution utile et efficace des SIS à la politique publique nationale de sécurité routière et au développement de la qualité du service rendu.

A Paris, au début de notre formation en janvier, nous nous sommes posé les questions suivantes : « Quelle ambition avons-nous ? Quelle portée voulons-nous donner à notre mémoire ? ».

Espérant ne pas manquer d’humilité, nous répondons : « Nous sommes sapeurs-pompiers. Puissions-nous, à travers ce document, agir et mettre en avant nos valeurs. Si ce document permet un jour de sauver des vies ou d’éviter que des personnes soient blessées, alors nous aurons atteint notre but. »

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Partie 1 : LE CONTEXTE ET LES HYPOTHESES

1.1 Propos introductif

1.1.1 Le risque routier

1.1.1.1 Le concept de risque

Qu’est-ce qu’un risque3 ? Le risque est un concept évanescent4, incertain par nature. Notion éminemment polémique, mot-valise, mesure de l’incertitude5… Le mot définit une notion dont la compréhension semble évidente, naturelle, en tout cas très largement distribuée dans la nature humaine. Pourtant la définir n’est pas si simple, tant elle fait partie de notre quotidien et des arbitrages que chacun doit réaliser, plus ou moins consciemment, au moment d’opérer un choix. Les risques sont « fondamentalement réels et irréels » 6 . La norme ISO 31000 7 définit le risque comme « l’effet de l’incertitude sur l’atteinte d’un objectif ». L’acception scientifique est de le considérer comme une combinaison de trois facteurs : la vulnérabilité, la probabilité et la gravité. La prise de risque peut nous élever dans la vertu, voire la fortune, mais aussi nous entraîner dans sa chute, le déclin, l’échec, l’accident. Les conséquences a posteriori seront plus immédiatement perceptibles et mesurables, que celles présupposées ou imaginées lors de la prise de risque initiale.

Alors qu’une application du fameux principe de précaution8 au risque routier nous dicterait un principe d’abstention, celui de ne pas conduire de véhicule automobile, le choix de la société est bien celui de la prise de risque, avec force règles et prudence. Il s’agit donc de s’accommoder et de négocier avec des objets et des situations dangereux, sans parler des effets sur l’environnement que nos véhicules carbonés produisent.

Mais alors, quel est l’évènement non souhaité9? Nous considèrerons que l’évènement redouté n’est pas uniquement l’accident 10 , résultat de l’incertitude sur l’atteinte d’un objectif de mobilité, mais l’atteinte aux personnes consécutive à l’accident, c’est à dire les blessures, qui peuvent être plus ou moins graves, et la mort.

Toutes les utilisations d’un véhicule à moteur sur le réseau routier français ne provoquent pas un accident, ni un mort, fort heureusement. Le système de circulation routière dispose d’un certain degré de résistance. Néanmoins, il arrive que cette résistance s’effondre brutalement, c’est l’accident.

Le déplacement d’un véhicule motorisé mobilise une quantité considérable de sciences, de surcroît tissées entre elles11 : physique, chimie, biologie, neurosciences, mécanique…

3 Plusieurs étymologies sont acceptées : resecare (enlever en coupant), resecum (ce qui coupe), risco (italien), rizq (de l’arabe « don de dieu, bon ou mauvais »), riesgo (rocher découpé), rixicare (se quereller). Le risque est ce moment de la croisée des chemins, du choix, du franchissement d’un cap où un péril se pressent et un gain potentiel est espéré.

4 Jean-Pierre DUPUY, dans « Pour un catastrophisme éclairé ». Editions Points

5 David LE BRETON dans « Sociologie du risque ». Editions Presses Universitaires de France

6 Ulrich BECK, dans « La société du risque ». Editions Flammarion

7 Association Française de Normalisation (AFNOR), novembre 2009

8 Que l’on pourrait qualifier de « risque de risque », cf. charte de l’environnement

9 Modèle d’Analyse des Dysfonctionnements des Systèmes (MADS) et Méthode Organisée Systémique d’Analyse des Risques (MOSAR)

10 Étymologiquement « accidens » : ce qui arrive

11 Etymologiquement « complexus » : tissé ensemble

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

4

Dès lors, nous considérons qu’une approche par la complexité est pertinente. « Mais la complexité ne comprend pas seulement des quantités d’unités et interactions qui défient nos possibilités de calcul ; elle comprend aussi des incertitudes, des indéterminations, des phénomènes aléatoires. La complexité dans un sens a toujours affaire avec le hasard ». Selon cette citation d’Edgar MORIN12, le mot complexité est plus un « mot problème », qu’un « mot solution ». Ne pouvons-nous pas formuler l’hypothèse, humblement, qu’il n’en est pas moins pour le mot risque ?

Face au paradigme de simplification (disjonction, réduction, abstraction), notre contribution dans l’étude du sujet de recherche n’aura de cesse que de tenter de rassembler les savoirs parcellaires (« reliez, reliez, reliez », disait Edgar MORIN), dans le but d’appréhender sincèrement la complexité du réel13. C’est un peu l’idée formulée par PASCAL : « Je ne peux pas concevoir le tout sans concevoir les parties et je ne peux pas concevoir les parties sans concevoir le tout ».

Sans complexes, nous misons donc sur la systémique et la complexité, pour tisser notre ouvrage et nous accompagner dans notre démarche, car ce qui avance peut converger !

Edgar MORIN considérait que la « complexité nécessite une stratégie », une politique publique relève également d’une stratégie, d’un programme, nous le verrons plus loin.

1.1.1.2 La circulation routière

Le transport terrestre automobile a pris naissance avec l’automobile elle-même. Invention majeure du 18ème siècle, avec le fardier de Joseph CUGNOT (1769) 14, elle avait pour but de remplacer la traction animale par une traction motorisée et gagner ainsi en puissance et en facilité de mise en œuvre. La vapeur a d’abord été considérée comme une solution technique envisageable avant d’être rapidement supplantée par le moteur à explosion et l’invention en 1883 de l’automobile proprement dite15.

Les évolutions techniques se sont succédé à une vitesse vertigineuse pour aboutir au début de notre 21ème siècle à ce que le transport automobile de marchandises et de passagers par voie routière soit un élément fondamental de l’économie mondiale.

La voiture automobile et le transport routier sont des composantes de la vie économique des sociétés mais revêtent également un aspect sociétal multiforme qui fait que leur existence ne peut plus aujourd’hui être remise en question.

Chaque année, les français parcourent en moyenne 725 Mrd de kilomètres, dont seulement 8.1 Mrd en transport en commun.

12 Edgar MORIN, dans « Introduction à la pensée complexe ». Editions Points

13 « Quand on examine un système quelconque, il faut le prendre dans son ensemble, et se rappeler que le fonctionnement du système est déterminé par l’interaction de toutes les parties de l’ensemble. Il n’y a pas de parties inutiles et l’élimination des parties considérées comme inutiles changera beaucoup le système et peut l’amener à ne plus fonctionner ». Xavier LE PICHON

14 Fardier : voiture à roues très basses qui sert au transport de charges très lourdes (Larousse)

15 Histoire mondiale de l'automobile, Serge BELLU, 1998 ; Une histoire de l'automobile, Edme FAUSSILLON, 2009, Edilivre universitaire.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.1.1.3 Le modèle systémique

Nous proposons une modélisation de l’activité « circulation routière », dont le but est la mobilité, selon 3 composantes systémiques internes et 5 sphères d’interaction externe :

Les 3 composantes systémiques internes :

Le véhicule : cette composante est constituée par tous les types de véhicules motorisé ou non, en circulation sur le réseau routier national, quel que soit leur usage, leur tonnage, leur capacité d’emport en passagers ou marchandises, leur mode de propulsion. Le véhicule est par lui-même un système compliqué.

Le réseau routier : ce réseau est constitué de toutes les voies ouvertes à la circulation automobile. Elles diffèrent par leur constitution physique (largeur, aménagements, intersections…), leur entité gestionnaire (état, département, commune, réseaux concédés), et les règles d’usage qui leur sont applicables (limitations de vitesse, de tonnage, de véhicules autorisés…). En termes de systémique, le réseau est un système simple.

L’humain : l’humain peut être usager de la route à divers titres, conducteur, passager de tous les véhicules en circulation ou même simplement piéton. L’humain est quant à lui un système complexe.

Les 5 sphères d’interaction externe (voir annexe I)

La sphère sociale : le déplacement routier fait partie intégrante du mode de vie des Français. Cette intégration s’exprime d’autant plus fortement que les autres modes de transport tels que le rail ou l’aérien par exemple sont moins développés, inadaptés aux transports quotidiens nécessaires, inaccessibles ou simplement absents. Elle est d’autant plus marquée et que les impératifs sociaux rendent la présence humaine sur les voies de circulation incontournable, quelle que soit la forme via laquelle les personnes deviennent usagers de la route (automobilistes, transporteurs, cyclistes, piétons…). Le déplacement routier répond à un besoin social dont la satisfaction est nécessaire à la réalisation de multiples activités inhérentes à la vie quotidienne. Par ailleurs, l’objet automobile a été et reste un marqueur social. La détention ou l’usage de tel ou tel type de véhicule positionne son utilisateur dans la sphère sociale.

La sphère technique : les véhicules utilisés depuis le début de l’ère automobile ont considérablement évolué. Ils ont gagné en vitesse, en confort, en fiabilité et en sécurité pour leurs occupants. Cette évolution s’est d’abord faite sous la pression de l’essor économique et donc de la demande croissante de la population. La forme de cette demande a progressivement évolué et a pris en compte des notions de sécurité et d’écologie qui étaient absentes du champ premier.

La sphère économique : la route est un moyen de transporter des personnes et des biens et de répondre ainsi aux besoins de flux économiques. Le marché automobile constitue une part importante de l’activité économique française. Les ventes de marchandises dans le secteur du commerce et la réparation automobiles en 2013 représentent 103,4 Mrd EUR16. Le transport routier intérieur quant à lui représentait mensuellement 12,192 Mrd de tonnes.kilomètres17 en décembre 2014. 1,363 Mio de personnes travaillaient dans le secteur des transports au 4ème trimestre 2014.18

16 Source INSEE

17 Source INSEE

18 Source INSEE

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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La sphère environnementale : un des effets majeurs du développement du trafic routier est l’impact en matière de pollution, notamment atmosphérique. Cette composante historiquement absente s’est imposée comme un enjeu majeur. Les émissions de gaz à effet de serre (GES) générés par les transports tous vecteurs confondus, représentent le deuxième émetteur mondial après la production d’énergie.19

La sphère politico juridique : compte tenu de ses impacts sur la vie de la société, la circulation automobile s’impose comme un thème fort et récurrent de la vie politique française. Que ce soit par exemple du point de vue du poids économique représenté par les entreprises françaises du secteur dans un contexte de crise économique, que par l’impact général que représentent sur toute la population la mise en œuvre de politiques publiques nouvelles et contraignantes.

Le fonctionnement défaillant du système circulation routière peut amener à produire des accidents et des victimes : le risque routier.

Il appelle la mise en place d’une démarche de sécurité routière. Il convient maintenant de rappeler les grands principes de construction des politiques publiques nationales.

1.1.2 Les principes généraux de construction des politiques publiques

Les politiques publiques peuvent se définir comme un ensemble d'actions publiques coordonnées, mises en œuvre avec pour objectif d'obtenir une modification ou une évolution d'une situation collective donnée. Les politiques publiques sont conçues par le pouvoir exécutif, dans le champ et selon les principes des lois de la République Française20.

Nous examinons ici « la politique », expression par nature polysémique, prise dans un contexte avec le sens de la constitution d’une structure et d’un fonctionnement de la société, de la cité (« polis »). Contrairement au politikè, qui revêt le sens de l’art politique, de la stratégie et des jeux de pouvoir, la politique permet d’aménager et de gouverner la société pour le bien commun, la chose commune : res publica. Une politique publique puise nécessairement ses origines dans une histoire et une réalité sociale, qui peut elle-même surgir de plusieurs manières : suffrage, enquêtes d’opinion, pouvoir médiatique, statistiques…

Les politiques publiques mobilisent un ensemble de moyens visant à modifier une situation structurelle ou conjoncturelle déterminée, afin d’atteindre un ensemble d’objectifs préalablement fixés.

Selon la définition classique qu’en donne Jean-Claude THOENIG21, une politique publique est « un programme d’action propre à une ou plusieurs autorités publiques ou gouvernementales ». Les politiques publiques sont donc des outils et des moyens mis en œuvre par les pouvoirs publics pour atteindre des objectifs dans un domaine particulier de la société. Elles recouvrent un vaste champ d’intervention possible, comme par exemple : la politique économique, la politique de la ville, de la jeunesse, de la sécurité routière. Ces politiques publiques ont une histoire, elles peuvent avoir connu des évolutions en fonction des préoccupations politiques d’une époque. Des changements de paradigme ou de référentiel sont ainsi susceptibles de se produire expliquant ainsi de nouvelles préoccupations ou justifiant la mise en œuvre de moyens d'actions différents.

19 Source GIEC 2014.

20 Article 20 de la Constitution : « Le gouvernement détermine et conduit la politique de la nation. »

21 Directeur de recherche au CNRS.

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L’action publique peut se caractériser par la volonté d’agir, ou par la volonté de ne pas agir à un moment donné, compte tenu d’un contexte et de situations « kairotiques22 » particulières, et suite à une analyse qui conduit à ces choix.

Dans tous les cas, l’évaluation des politiques publiques est indissociable de l’action publique23. Une fois les objectifs définis, et la politique publique mise en œuvre, il convient donc de mesurer l’efficacité de l’action publique sur la réalité politique. Cette évaluation24 peut alors orienter le choix du maintien du cap gouverné initialement, ou d’une correction en vue d’une meilleure adaptation aux circonstances.

A présent, nous pouvons examiner le champ d’application de la sécurité routière.

1.2 La politique nationale de sécurité routière

1.2.1 Des progrès historiques

Pendant les deux premiers tiers du « siècle de l’automobile », la population française a considéré que les accidents de la route étaient la contrepartie inévitable liée à l’augmentation du nombre de véhicules ainsi que de leurs performances. Le parc automobile français double de 1960 à 197225. Cette expansion s’accompagne d’une hausse du nombre des victimes qui touche d’une manière directe ou indirecte l’ensemble des familles françaises. Le pic de mortalité sur la route est atteint en 1972 avec 16 545 morts26. Les accidents de la route deviennent plus qu’une statistique, mais un drame humain vécu par une part de plus en plus importante de la population. Devant cette prise de conscience, les pouvoirs publics décident de mettre en place une politique publique de sécurité routière. En 1972, la politique de sécurité routière débute véritablement. Elle se matérialise par la création du Comité Interministériel de Sécurité Routière (CISR), et s’accompagne d’une vague de mesures réglementaires et de leur contrôle accru par les forces de l’ordre. Dans les années qui suivent, le nombre de victimes ne cesse de diminuer, mais au début des années 80, le renforcement des dispositifs réglementaires ne semble plus suffire pour faire évoluer le comportement des conducteurs.

Les années 1980-1990 voient une mobilisation des échelons locaux et départementaux afin d’intervenir au plus près du terrain. Une politique locale de sécurité routière est instituée par le CISR du 13 juillet 1982 initiée par la création d’une Direction à la Sécurité et à la Circulation Routières (DSCR) rattachée au ministère de l’équipement. La mise en place de cette politique locale visait un double objectif. D’une part, à l’échelon national le Délégué Interministériel à la Sécurité Routière (DISR) a été doté de moyens d’action et de mobilisation des ministères concernés. D’autre part, au niveau local, une implication des services de l’État et des collectivités territoriales a vu le jour. Dans les années qui suivent, l’organisation des politiques locales de sécurité routière a fait l’objet d’aménagements successifs qui créent une organisation locale transversale.

22 Kairos dieu grec de l’opportunité.

23 Article 24 de la Constitution : « Le parlement vote la loi. Il contrôle l'action du gouvernement. Il évalue les politiques publiques. »

24 Circulaire n°5629 du 7 janvier 2013 relative à la modernisation de l’action publique (MAP).

25 La part des ménages possédant une voiture au moins passe de 30,2 % en 1960 à 64,1 % en 1975. (Source : INSEE, comité des constructeurs français.) Le parc de voitures particulières en service passe ainsi de 2,5 millions de véhicules en 1953 à 15,5 millions en 1975. Il atteint aujourd’hui 31 millions de véhicules.

26 Ce chiffre de 16 545 morts correspond à une mortalité comptabilisée à 6 jours de l’accident, soit plus de 18 000 morts à 30 jours.

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En 200227 le Président de la République française Jacques CHIRAC fait de la sécurité routière un des trois grands chantiers de son mandat. La mise en place du Contrôle Sanction Automatisé (CSA) montre une volonté de reprendre en main la politique de sécurité routière au niveau central. Dès son annonce, cette décision produit un choc dans l’opinion publique et mobilise l’ensemble des acteurs de la politique de sécurité routière.

Depuis 2010, la tendance à la baisse est moins forte que lors de la décennie précédente. Nous avons atteint un palier en dessous duquel il semble difficile de descendre. Les mesures « classiques » commencent à ne plus être suffisantes. Aujourd’hui, la lutte contre l’insécurité routière reste un enjeu de société.

Figure 1 Evolution de la mortalité routière métropolitaine et mesures prises 1970-2013

1.2.2 Gouvernance de la politique publique

La diminution du nombre de morts ces 40 dernières années est un indicateur de l’efficacité de la politique de sécurité routière. Le nombre de personnes tuées par milliard de kilomètres parcourus pour l’ensemble des véhicules passe de 80, en 1972, à 6 en 2013. Nous remarquons qu’une volonté politique forte montre rapidement des résultats significatifs, parfois même avant la mise en place effective des nouvelles mesures.

La politique de sécurité routière s'exprime dans un cadre interministériel. Elle implique différents ministères mais aussi les collectivités territoriales en charge de la gestion des infrastructures, ainsi que de nombreuses associations qui jouent un rôle essentiel pour modifier les comportements.

D’après le rapport de l’Inspection Générale de l’Administration, « la gouvernance [de la politique de sécurité routière] s’est affaiblie ces dernières années ». l’IGA attribue cet affaiblissement au fait que « chaque acteur se cantonne strictement à son domaine de responsabilité »28.

27 Cette annonce est effectuée lors de l’allocution télévisée du 14 juillet 2002.

28 Rapport IGA du 12 juillet 2014, rendu public fin août 2015, relatif à l’évaluation de la politique de sécurité routière. p. 9

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1.2.3 Les acteurs de la sécurité routière

1.2.3.1 Cartographie des acteurs

Figure 2 Cartographie des acteurs de la sécurité routière (2015)

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1.2.3.2 Le rôle des acteurs nationaux

La politique de sécurité routière est définie au sein du CISR sur proposition du Conseil National de la Sécurité Routière (CNSR). Le coordinateur de cette politique est le DISR qui s’appuie sur une administration dépendant du ministère de l’Intérieur, la Délégation à la Sécurité et à la Circulation Routières (DSCR), et sur un service interministériel, l’Observatoire National Interministériel de Sécurité Routière (ONISR). Le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie (MEDDE) joue un rôle historiquement important car il est en charge de la sécurité des infrastructures et de la réglementation technique des véhicules. Dans les territoires, chaque administration (Direction Départementale des Territoires, Police, Gendarmerie Nationale, tribunaux, hôpitaux…) contribue à la déclinaison locale de la politique sous la responsabilité du préfet en collaboration avec collectivités territoriales.

Le CISR

Le CISR29 a été institué le 5 juillet 1972 en même temps que la fonction de DISR. Structure politique de décision et d’arbitrage dans le domaine de la sécurité, le comité a pour mission de définir la politique du gouvernement en matière de sécurité routière et ses principes d'application.

Présidé par le Premier ministre, ou par délégation le ministre de l’Intérieur, il regroupe l’ensemble des ministres concernés : équipement, intérieur, justice, défense, santé, éducation nationale... Son secrétariat est tenu par le DISR. Le CISR etait en sommeil depuis mai 2011 et mais une séance s’est tenue le 2 octobre 2015.

Le CNSR

Le CNSR a été créé le 28 août 2001 par décision du CISR. Véritable « parlement » de la sécurité routière, le CNSR est un organisme composé d’élus, de représentants des entreprises et associations intéressées par la sécurité routière ainsi que des représentants de l’administration. Il est assisté par un comité d’experts30, chargé d’analyser les statistiques et études de l’ONISR afin d’éclairer les travaux du conseil.

Les sujets soumis au débat sont préparés au sein de 4 commissions :

jeunes et éducation routière ; deux-roues, deux-roues motorisés ; outils technologiques et infrastructures routières ; alcool, stupéfiants et vitesse.

Le CNSR organise le débat des acteurs de la sécurité routière et propose des recommandations au gouvernement pour lutter contre l’accidentalité routière. Les séances plénières se tiennent au moins deux fois par an.

Au cours de son premier mandat (2001-2004), le CNSR a fait des recommandations sur la signalisation et la certification qualité des infrastructures, sur les limiteurs de vitesse et les avertisseurs de non-port de la ceinture. Il a aussi débattu sur les questions des feux de jour ou l’abaissement du taux d’alcool.

29 Le CISR est créé par décret du 5 juillet 1972. 30 Ces experts sont nommés par le CNSR sur proposition du DISR.

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Pendant le deuxième mandat (2005-2008), les problématiques soulevées ont porté sur le développement du contrôle sanction automatisé (CSA), le suivi des démarches au niveau européen pour interdire le kit mains-libres ou encore une meilleure prise en compte des usagers vulnérables dans la création et la modification des infrastructures.

Le CNSR a été mis en sommeil jusqu’en 2008, et réinstallé en 2012 pour son troisième mandat. Dans cet intervalle, une mission d’information parlementaire relative à l’analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière a rendu un rapport d’information31. Il est présidé par le député Armand JUNG32. L’objectif fixé par le ministre de l’Intérieur, le 27 novembre 2012, est de diviser par deux la mortalité routière entre 2010 et 2020, soit compter moins de 2 000 personnes tuées sur les routes de France métropolitaine en 2020.

Le DISR

Le DISR joue un rôle central dans la politique de sécurité routière que veut mener un gouvernement. En effet, le délégué interministériel a un rôle d’animation et possède une capacité d’intervention transversale vis-à-vis des ministères concernés. Ainsi le délégué préside le Groupement Interministériel Permanent de la Sécurité Routière (GIPSR) qui, composé de hauts fonctionnaires représentant les ministres membres du CISR, prépare les textes réglementaires. Il s’appuie sur l’ONISR et des conseillers techniques mis à disposition par les ministères chargés de la santé, du travail, de la justice et de l’éducation routière.

Le DISR occupe également, intuitu personae, la fonction de délégué à la sécurité et à la circulation routières. Depuis 1972, 14 délégués se sont succédé, ayant des origines diverses : les ponts et chaussées, l’administration ou encore la magistrature (M. Rémy HEITZ, M. Emmanuel BARBE). On notera que le premier délégué, Monsieur Christian GERONDEAU, a exercé simultanément la fonction de directeur de la sécurité civile de 1975 à 1982.

Depuis le 1er avril 2015, cette fonction est assurée par M. Emmanuel BARBE.

La Délégation à la Sécurité et à la Circulation Routière (DSCR)

La DSCR élabore et met en œuvre la politique de sécurité routière et apporte son concours à l’action interministérielle dans ce domaine.33 A cette fin, la délégation coordonne l’ensemble des travaux législatifs et réglementaires, collecte et diffuse l’information routière, élabore et met en œuvre les systèmes de contrôles automatisés. Le DISR peut s’appuyer sur la délégation pour réaliser l’ensemble des travaux techniques relatifs à la sécurité routière, mais le fait qu’elle soit rattachée à un ministère particulier peut altérer le caractère interministériel de sa fonction34.

La Direction de la Sécurité et de la Circulation Routière était une direction d’administration centrale créée en 1982 au sein du ministère de l’équipement. Elle est devenue la Délégation à la sécurité et à la circulation routières en 2008 et a été rattachée au ministère de l’Intérieur en 2012. Dans le cadre de la nouvelle organisation de l'administration centrale du ministère de l’Intérieur, les attributions précédemment exercées par la Sous-Direction de la Circulation et de la Sécurité Routières (SDCSR) de la Direction de la Modernisation et de l'Action Territoriale (DMAT) sont reprises par la DSCR.

31 Rapport d’information parlementaire relatif à l’analyse des causes d’accident de la circulation et à la prévention routière (Président : M. Armand JUNG, Rapporteur : M. Philippe HOUILLON).

32 Député de la 1ère circonscription du Bas-Rhin.

33Article 11 du Décret n° 2013-728 du 12 août 2013 portant organisation de l'administration centrale du ministère de l’Intérieur et du ministère des outre-mer.

34 Rapport IGA du 12 juillet 2014, relatif à l’évaluation de la politique de sécurité routière.

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L’ONISR

L'ONISR, créé en 1993, est directement placé auprès du DISR en appui de la DSCR. L’ONISR s’appuie sur des observatoires régionaux et départementaux (ORSR et ODSR). Il assure le secrétariat du CNSR. Il a pour mission de :

collecter, mettre en forme, interpréter et diffuser les données statistiques nationales et internationales ;

assurer le suivi des études, et l'évaluation des nouvelles mesures de sécurité prises ou envisagées.

1.2.3.3 Un partenariat fort au niveau des territoires

L’État ne peut pas mener seul une politique publique. Depuis plus de 35 ans les territoires se voient confier de plus en plus de responsabilités ainsi que des pouvoirs accrus. Il en est de même dans le domaine de la sécurité routière. Aussi, on constate qu’à partir de 1981, la politique de sécurité routière a pour objectif de « provoquer une intense mobilisation sociale et, de ce fait, une réelle prise en charge de la politique locale »35. C’est l’époque du slogan, « La sécurité routière est l’affaire de tous », qui s’adresse au citoyen mais aussi à tous les élus et fonctionnaires des différentes collectivités.

La politique de sécurité routière se décline au jour le jour à l’intérieur des territoires, mais c’est surtout à l’échelon départemental que l’on retrouve les outils de la politique locale de sécurité routière. La politique de sécurité routière à l’échelon local est instaurée par le CISR du 13 juillet 1982 et c’est naturellement que cette responsabilité est confiée aux préfets, dans un contexte des lois de décentralisation36.

Les politiques locales de sécurité portent sur deux volets :

Le volet répressif comprenant, d’une part la compétence des forces de l’ordre pour le de contrôle des règles du code de la route, et d’autre part la compétence des magistrats chargés d'appliquer les sanctions ;

Le volet préventif comprenant des actions de communication, de sensibilisation menées par un grand nombre d’acteurs : les services de l'État, les collectivités locales, les associations, les entreprises, les médias.

L’organisation de la politique locale de sécurité routière s’appuie sur un certain nombre de préconisations émanant de la DSCR. Le préfet s’appuie sur un chef de projet sécurité routière (directeur de cabinet).

La gestion quotidienne de la politique locale de sécurité routière est déléguée à un coordonnateur nommé par le préfet. Les coordonnateurs proviennent pour la majorité de la DDT, pour les autres ils sont issus des services de la préfecture ou d’autres administrations. Le coordonnateur joue un rôle central dans la déclinaison départementale de la politique de sécurité routière. Il anime le « Pôle de Compétence État » sur la sécurité routière qui est réuni régulièrement par le chef de projet. Alors que le dispositif est national, il existe de fortes disparités dans son application départementale37. La différence réside dans la manière dont le coordonnateur parvient à créer des réseaux locaux concernés par la sécurité routière. Celui-ci se trouve dans une mission aussi bien administrative que d’animation d’un réseau regroupant des acteurs provenant d’univers très variés.

35 Pierre MAYET, Directeur de la circulation et de la sécurité routière (1982-1985).

36 Lois DEFFERRE et notamment la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

37 Note sur les cadres coordonnateurs : le cas de la sécurité routière par Hervé CHOMIENNE Maître de conférence à l’université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines.

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Figure 3 Acteurs locaux de la sécurité routière.

Le préfet valide deux documents stratégiques :

le Document Général d'Orientation (DGO) à cinq ans, outil d’analyse et d’orientation, réalisé à partir des données provenant des ODSR ;

le Plan Départemental d'Actions de Sécurité Routière (PDASR) pour l’année, qui regroupe l’ensemble des actions proposées par les acteurs locaux (police, gendarmerie nationale, associations…). Une action, inscrite à ce plan, bénéficiera d’une communication particulière ainsi que d’un financement. Des crédits sont mis à disposition des préfets pour le financement des actions qu'ils proposent et pour soutenir certaines actions des partenaires, notamment des associations.

A partir des travaux du pôle de compétence sécurité routière, le comité départemental de sécurité38, placé sous l’autorité du préfet et celle du procureur de la République, fixe les orientations d’actions du DGO pour 5 ans et leur programmation annuelle dans le cadre du PDASR (voir annexe II).

Cette approche, ciblée sur les enjeux, est d'autant plus indispensable que les comportements face aux risques peuvent varier d'un département à l'autre mais surtout d'une grande région à l'autre. Par exemple, les motards ou conducteurs de motocyclettes ont tendance à moins bien se protéger (faible port du casque, vêtements plus légers sans protection) dans le sud de la France que dans le nord, l'utilisation des deux roues motorisés est plus fréquente en zone urbaine qu'en zone rurale.

38Le comité départemental de sécurité a été créé par le décret du 17 juillet 2002 relatif aux dispositifs territoriaux de sécurité et de prévention de la délinquance, y compris la sécurité routière, sous la dénomination de « conférence départementale de sécurité ». Le décret du 7 juin 2006 relatif à la réduction du nombre et à la simplification de la composition de diverses commissions administratives l’a rebaptisé « Comité départemental de sécurité »

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D’autres documents viennent coordonner l’action du préfet dans le domaine de la sécurité routière, à savoir :

Le Plan Départemental de Contrôle Routier (PDCR) qui vise à coordonner l’action de la police et de la gendarmerie ;

Le Plan De Communication (PDC) qui a une importance primordiale dans l’objectif de modifier les comportements.

Nous venons de décrire les grands principes de la politique nationale de sécurité routière. Nous allons maintenant examiner les conditions de sa mise en œuvre.

1.2.4 La déclinaison actuelle de la politique nationale de sécurité routière

1.2.4.1 Les chiffres clés du risque routier

Le coût de l’insécurité routière

L’ONISR estimait le coût de l’insécurité routière, de la même manière de 2003 à 2012, en prenant la valeur tutélaire de la vie humaine. Dans son rapport d’activité de 2013, l’ONISR fait évoluer son mode de calcul en utilisant des valeurs proches de celles recommandées par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économique) 39 . Ce nouveau mode de calcul rejoint celui utilisé par l’IGA dans son rapport de juillet 2014.

La valeur tutélaire de la vie humaine est réévaluée à :

3 Mio EUR pour une personne tuée ; 375 000 EUR pour une personne hospitalisée plus de 24 heures ; 15 000 EUR pour un blessé léger.

On constate que ce changement de mode de calcul fait passer le coût des accidents corporels de 9,5 Mrd EUR en 2012 à 22 Mrd EUR40 en 2013. A ce coût humain viennent se rajouter les coûts matériels41 des accidents estimés à 15,3 Mrd EUR. Le coût de l’insécurité routière serait donc de 37,3 Mrd EUR, soit 1,7 % du Produit Intérieur Brut (PIB) de la France. Mais pour la première fois, l’ONISR prend en compte les travaux de l’Unité Mixte de Recherche Epidémiologique et de Surveillance Transport Travail et Environnement (UMRESTTE) et estime que le nombre des blessés est largement sous-estimé par rapport aux données des forces de l’ordre.

Le coût réévalué de l’insécurité routière est donc de 50 Mrd EUR soit 2,3 % du PIB (L’OMS évalue ce taux entre 1 et 3%).

Nous retiendrons ce chiffre pour la suite du rapport, car il correspond d’une part aux normes internationales sur le coût de la vie humaine, et d’autre part il intègre des éléments statistiques beaucoup plus proches de la réalité que celles provenant des données issues des forces de l’ordre. Les modalités de recueil des données sont décrites au paragraphe 1.2.5.

39 Recommandation du rapport du commissariat général à la stratégie et à la prospective de septembre 2013 relatif à l’évaluation socio-économique des investissements publics

40 L’IGA dans son rapporte estime ce coût à 16,3 Mrd EUR (l’écart étant expliqué par la différence de valeur tutélaire de la vie humaine considérée)

41 Ce coût correspond aux simples dégâts matériels en responsabilité civile

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Le coût de la politique de sécurité routière

Devant la multiplicité des acteurs et de leurs modes de gestion (État, collectivités territoriales, associations), il est très difficile de cerner précisément le coût de la politique de sécurité routière. Pour les contributions de l’État, le rapport de l’IGA estime qu’elles sont sous-évaluées de 50 % par rapport aux coûts recensés dans le document de politique transversale42 en raison de l’oubli de certains programmes. Elles seraient donc de 3,996 Mrd EUR pour 2013.

Selon l’IGA, le montant des budgets consacrés à la politique de sécurité routière n’est pas étudié par les organismes de contrôle public et est donc totalement inconnu. La seule source que nous avons est le rapport de l’IGA qui l’évalue à 8,293 Mrd EUR en prenant en compte les secours d’urgence et une répartition de charges équivalente entre l’État et les collectivités territoriales. La contribution des sapeurs-pompiers à la sécurité routière est estimée à 336,82 Mio EUR.

Nous constatons donc un écart de 1 à 6 entre le coût de l’insécurité routière (50 Mrd EUR) et le montant consacré à lutter contre celle-ci (8,293 Mrd EUR).

1.2.4.2 Moins de 2000 morts en 2020

En 2012, le ministre de l’Intérieur Manuel VALLS annonçait lors de la réinstallation du CNSR, que l’objectif du gouvernement était de réduire la mortalité à moins de 2000 morts d’ici 2020. Cet objectif ambitieux nécessitait une baisse annuelle de 6,7 % du nombre des tués entre 2010 et 2020. Ce rythme a été pratiquement tenu entre 2010 et 2013 avec une baisse de 18,1 %.

Figure 4 Evolution récente de la mortalité en métropole (Source ONISR- 2014)

Mais, l’année 2014 a connu, pour la première fois depuis 12 ans, une hausse de 3,5 %. Il y a eu 3384 personnes tuées sur les routes en 2014, soit 116 décès de plus qu’en 2013, qui avait été une année record à la baisse pour le nombre de tués. Ces augmentations se confirment en 2015 avec 99 tués supplémentaires, sur les 8 premiers mois.

42 Document de politique transversale annexé au projet de loi de finance 2014.

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1.2.4.3 L’actualité de cette politique nationale en 2015

Face aux mauvais chiffres de 2014, le ministre de l’Intérieur a annoncé, le 26 janvier 2015, 26 mesures pour combattre les causes d’accidents déjà identifiées afin de tenir l’objectif de réduction de la mortalité d’ici 2020. L’ensemble de ces mesures s’articule autour de 4 axes :

sensibiliser, prévenir, former ; protéger les plus vulnérables ; lutter sans relâche contre les infractions graves ; améliorer la sécurité des véhicules et des infrastructures.

Lors de l’annonce de ces mesures le ministre de l’Intérieur, Bernard CAZENEUVE, a pris la décision d’affiner l’analyse des accidents. Jusqu’au bilan 2015, 40% des causes d’accidents n’entraient dans aucune catégorie statistique, dans la mesure où les forces de l’ordre ne disposaient que d’un choix limité à 5 causes pour déterminer l’origine des accidents de la route. Dès le début 2015, ce choix a été étendu à 14 causes possibles43.

Au 1er juillet 2015, 4 des 26 mesures sont entrées en vigueur : taux alcoolémie autorisé en baisse pour les conducteurs novices, uniformisation des plaques d’immatriculation pour les 2 roues, expérimentation de la limite de vitesse à 80 km/h sur certains axes et interdictions de certains kits mains libres44.

Le Premier ministre a annoncé le 10 août 2015 qu’un CISR se tiendrait à la fin de l’été pour faire le point sur la mise en œuvre des mesures annoncées le 26 janvier. Mais cette décision faisait suite à la révélation dans la presse de l’existence d’un rapport de l’IGA, datant de juillet 2014. Ce rapport pointe notamment un manque de collaboration interministérielle, mais aussi « un manque de volonté politique 45». Le CISR s’est donc réuni le 2 octobre 2015, 22 mesures nouvelles et 33 mesures complémentaires ont été annoncées. Celles-ci s’organisent autour de 4 principes :

lutte contre les comportements dangereux ; protection des usagers vulnérables ; principe d’égalité dans l’application des règles ; ouverture aux nouvelles technologies.

A présent, nous allons examiner un point essentiel, le recueil des données d’accident.

1.2.5 Le recueil des données sur les victimes et les accidents

1.2.5.1 L’approche réglementaire

Tout accident corporel de la circulation fait l’objet d’une saisie informatique dans un fichier dit BAAC : Bulletin d’Analyse d’Accident Corporel de la circulation. Toutefois, cette saisie n’est réalisée que par les forces de l’ordre, sur un logiciel PROCEA@WEB pour les services de police46, et sur un logiciel PULSAR pour les services de gendarmerie. La saisie d’un BAAC est liée à la présence de victime(s), qui peut elle-même donner lieu à une procédure de police judiciaire. Les SIS rédigent, quant à eux, des Comptes Rendus de Sorties de Secours (CRSS), dont le contenu est indépendant des BAAC.

43 Le tableau des données est placé en annexes.

44 CNSR du 11 mai 2015.

45 N. Sarkozy en 2007 avait pris l’engagement de moins de 3000 morts en 2012. Cet objectif n’a pas été atteint.

46 Cela englobe plusieurs services de Police d’Etat : Police nationale, Compagnies Républicaines de Sécurité, Police de l’Air et des Frontières, Préfecture de Police de Paris. Au 1er juin 2015, PROCEA est devenu PROCE@WEB avec utilisation du portail CHEOPS, commun à tous les services de police.

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Les données des BAAC sont exploitables en moyenne 2 à 4 mois après leur saisie.

Les données sont organisées autour de 4 grandes thématiques d’accidents : caractéristiques, lieux, véhicules, usagers.

Il existe également une procédure parallèle, dite de « remontée rapide », au moyen d’un fichier ABTH : Accidents, Blessés, Tués, Hospitalisés. Il s’agit de données brutes, transmises dans le mois suivant, afin de permettre aux autorités en charge de cette politique publique de disposer d’indicateurs dans un délai plus rapide.

Il existe également un fichier APAM : Auteurs Présumés d’Accidents Mortels.

L’organisation de la gestion de ces bases de données et des logiciels associés sera décrite dans le paragraphe suivant.

L’ONISR est chargé de l’administration et de la diffusion des statistiques d’accidentalité conformément au décret du 15 mai 197547 relatif au CISR. Ces statistiques ont été labellisées le 4 juin 2013 par l’autorité de la statistique publique48.

L’arrêté du 27 mars 2007 concernant les conditions d'élaboration des statistiques relatives aux accidents corporels de la circulation précise les définitions applicables. Les BAAC sont rédigés par les forces de l’ordre et transmis au fichier national par les directions générales de la gendarmerie et de la police dans les 2 mois qui suivent l’accident. Les BAAC font ensuite l’objet d’un contrôle de conformité au niveau national puis local avant d’être publiés, c’est à dire validés par les ODSR. L’objectif est de pouvoir disposer des éléments statistiques dans les 2 à 4 mois qui suivent l’accident et notamment au moment de la clôture annuelle du fichier, le 15 avril de chaque année49.

Une autre base de données est celle du CSA, qui a enregistré 25,8 millions d’infractions en 2012, soit 12,8% de plus qu’en 2011 et 1,9 fois plus qu’en 200250. En 2012, le nombre de délits routiers s’élevait à 552 000. Ils ont donné lieu à plus de 300 000 condamnations et compositions pénales. Cette base de données est liée à celle qui organise le permis à points. Plus de 14 millions de points ont été retirés en 2012 (1,2 millions en 1993).

Les établissements de soins quant à eux comptabilisent leurs entrées de patients au moyen d’une base appelée Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information (PMSI).

Il existe également des bases de données internationales (OMS, CARE, IRTAD) relatives à l’accidentologie.

1.2.5.2 La nature des données collectées

La DSCR dispose de l’ONISR pour établir, organiser et exploiter les données d’accidents corporels issues des fichiers BAAC saisis par les forces de l’ordre. L’ONISR a pour missions principales la collecte, la mise en forme, l’interprétation et la diffusion des données statistiques nationales et internationales. Il a également en charge le suivi des études sur l’insécurité routière, ainsi que l’évaluation des nouvelles mesures de sécurité prises ou envisagées. (Voir annexes III, IV et V)

47 Décret n°75-360 du 15 mai 1975.

48 Avis n°2013-02 de l’Autorité de la statistique publique en date du 4 juin 2013, publié au JORF n°0139 du 18 juin 2013.

49 Il existe des circulaires qui précisent de manière très concrète et détaillée les modalités pratiques. Il s’agit notamment de la circulaire NOR INT K1410208J du 24 août 2014, et la circulaire NOR INT K1413271C du 19 septembre 2014.

50 Selon l’ONISR, 82% des infractions sont liées à la vitesse et au stationnement.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Si l’ONISR peut être considéré comme le maître d’ouvrage de la « base accidents », c’est le Centre d’Etudes et d’Expertise sur les Risques l’Environnement la Mobilité et les Aménagements (CEREMA) Sud-Ouest, basé à Saint-Médard en Jalles, en Gironde, qui en est le maître d’œuvre. Ce fichier constitue une base de données indispensable pour connaître l’état et l’évolution de l’insécurité routière. Ses exploitations statistiques orientent les politiques nationales et locales de sécurité routière.

A ce titre, l’ONISR publie un guide51 pour une meilleure utilisation de la codification du BAAC et dans le souci d’améliorer la précision des données renseignées. Des indications sont apportées sur les définitions concernant la plupart de ces variables, ce qui contribue à renforcer la qualité du fichier. Cet objectif de qualité, selon le guide, doit s’obtenir par :

l’exhaustivité de l’enregistrement des accidents ; le renseignement le plus complet possible de toutes les variables ; l’homogénéité au niveau national des informations recueillies.

L’arrêté du 27 mars 2007 susvisé précise les définitions applicables :

Accident : un accident corporel (mortel et non mortel) de la circulation routière est un accident qui provoque au moins une victime (c'est-à-dire un usager ayant nécessité des soins médicaux), et survient sur une voie ouverte à la circulation publique (les voies privées sont exclues), et implique au moins un véhicule (à moteur ou non) ;

Usagers : un accident corporel implique un certain nombre d'usagers. Parmi ceux-ci, on distingue les indemnes (impliqués non décédés et dont l'état ne nécessite aucun soin médical), les victimes (impliqués non indemnes). Parmi les victimes, on distingue les tués (toute personne qui décède sur le coup ou dans les 30 jours qui suivent l'accident), les blessés (victimes non tuées). Parmi les blessés, on distingue les blessés hospitalisés (victimes admises comme patients dans un hôpital plus de 24 heures) et les blessés légers (victimes ayant fait l'objet de soins médicaux mais n'ayant pas été admises comme patients à l'hôpital plus de 24 heures).

Le décompte des jours pour une victime tuée est de 30 jours francs à compter de la date de l’accident. Cet indicateur a été harmonisé en 2004. Avant le 1er janvier 2005, le délai de prise en considération du décès était de 6 jours.

Le décompte des jours pour une victime hospitalisée est d’un jour franc à compter de la date de l’accident. Avant le 1er janvier 2005, les blessés graves étaient ceux hospitalisés plus de 6 jours, et les blessés légers moins de 6 jours. Afin d’assurer une continuité des séries chronologiques entre 2004 et 2005, un coefficient de correction de 1,069 pour les tués a été appliqué aux données antérieures à 2005. Cependant, pour les blessés, aucun coefficient de correction n’a été défini. En pratique actuellement, les statistiques officielles de la sécurité routière ne prennent en compte que les blessés hospitalisés (BH) lors des communiqués sur le nombre de blessés.

L’Union Européenne a retenu la définition de la personne gravement blessée comme celle présentant au moins une lésion de niveau 3 sur l’échelle de gravité internationale AIS (dite MAIS 3+)52. Le CISR du 9 juillet 2004 a décidé l’adoption des définitions internationales aux fins de favoriser les comparaisons entre pays. Ces définitions résultent de la décision du Conseil de l’Union Européenne 93/704/CE du 30 novembre 1993, créant la base statistique européenne en matière d’accidentalité (base CARE) et décrivant les obligations des états membres en matière de transmission de statistiques d’accidentalité routière.

51 Guide pour l’élaboration des BAAC (mai 2014), annexé à la circulaire NOR INT K1413271C du 19 septembre 2014.

52 AIS : Abbreviated injury scale (échelle de gravité des lésions des victimes mise au point par l’AAAM, Association for the Advancement of Automotive Medecine). MAIS : maximum AIS.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Par la suite, la loi 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a prévu, en son article 28, que les conditions d’élaboration des statistiques relatives aux accidents corporels de la circulation routière et leurs conséquences médicales seront déterminées par l’arrêté du 27 mars 2007.

1.2.5.3 Le contrôle des données collectées

Les objectifs de qualité des données recherchés exigent une organisation du contrôle de celles-ci. Le contrôle des données est établi à plusieurs niveaux :

le 1er niveau est un contrôle de format : identification de l’accident et au moins une ligne remplie dans chacune de 4 grandes rubriques (caractéristiques, lieux, véhicules, usagers) ;

le 2ème niveau est un contrôle de doublons. L’objectif est d’éviter la saisie de deux BAAC pour un même accident ;

le 3ème niveau est un premier niveau de contrôle de la qualité interne à la donnée. Cette étape consiste en la vérification d’une quantité minimale de saisie de données. Si ce minimum n’est pas atteint, la donnée ne sera pas publiée ;

les 4ème et 5ème contrôles sont des vérifications internes de la qualité interne à la donnée, telles que la complétude, et la cohérence.

De plus, une vérification de cohérence avec les données ATBH est effectuée.

1.2.5.4 Des divergences dans les décomptes

A ce stade, nous pouvons d’ores et déjà remarquer que les définitions de victimes, blessés, ne sont pas homogènes entre les services de l’ONISR et ceux de la sécurité civile. En effet, dans certains SDIS (comme le 47 par exemple), une personne impliquée et indemne sera considérée comme une victime indemne, contrairement au fichier BAAC où elle sera indemne, et non pas victime. D’ailleurs, selon le guide BAAC, « les sapeurs-pompiers ne sont pas considérés comme des professionnels de santé (sauf les médecins) ». La comptabilité des tués semble être plus homogène.

Nous l’avons vu, les forces de l’ordre sont chargées de saisir un BAAC, dès lors que les accidents signalés répondent aux définitions réglementaires de l’arrêté du 27 mars 2007, qu’ils donnent lieu ou non à l’établissement d’une procédure judiciaire. Nous verrons plus loin qu’il existe une tendance à sous-déclarer les accidents par des BAAC, ceux-ci étant en pratique plutôt adossés aux procédures judiciaires, et donc aux tués ou blessés hospitalisés. Or celles-ci ne sont pas systématiques, même en présence d’accident corporel, en particulier lorsqu’il s’agit de blessés légers.

Les forces de l’ordre et les ODSR sont tenus de veiller à la stricte application des définitions communes, car elles garantissent la qualité statistique des données et leur pertinence par rapport aux analyses de l’accidentalité routière. Les trois conditions nécessaires et suffisantes à la classification d’un accident en accident corporel de la circulation sont la présence d’au moins une victime, l’ouverture à la circulation publique, et l’implication d’au moins un véhicule.

Le principe de base est de retenir tous les accidents répondant à ces critères quel que soit l’événement causal. Toutefois, il ne doit pas résulter d’un acte intentionnel de type suicide ou homicide. Les données disponibles dans le fichier BAAC sont disponibles en annexe VI.

Nous achevons la description de la politique publique, le paragraphe suivant traitera de la description des SIS.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.3 L’organisation des services d’incendie et de secours en France

1.3.1 Les sapeurs-pompiers et la gestion des risques et des crises

Les sapeurs-pompiers sont des acteurs majeurs de la sécurité civile en France53.

Ils contribuent à la prévention des risques et à la protection des personnes, des biens et de l’environnement.

Les missions du SDIS, telles qu’elles sont définies par l’article L1424-2 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), ont pour but de faire face aux risques des territoires. Cette gestion des risques s’établit à plusieurs niveaux :

la prévention, pour éviter la réalisation du risque et limiter la gravité de ses conséquences ;

la prévision, pour organiser la réponse opérationnelle avant la réalisation du risque ; l’intervention, dès qu’il est fait appel aux services d’urgence ; l’exploitation du retour d’expérience, et la recherche des causes et des circonstances,

avec ou sans contribution au processus judiciaire.

Le nombre d’interventions réalisées en 2014, s’élève à environ 4 280 00054, en baisse de 0,4%. La part de la population française qui a fait appel à ce service public, dans un contexte opérationnel, est stable à 5%. Les SIS ont porté secours à 3 383 484 personnes.

L’activité secours routier représente 7% de l’activité globale. Les SIS ont réalisé 279 498 interventions pour des accidents de la route, en augmentation de 3% par rapport à 2013.

S’agissant des ressources humaines, les SDIS recensent en 2014 : 40 834 sapeurs-pompiers professionnels, 193 756 sapeurs-pompiers volontaires et

11 279 personnels administratifs ; la répartition de professionnels/volontaires est respectivement de 17% et 83% ; le nombre de sapeurs-pompiers des unités militaires est de 12 400 agents ; le Service de Santé de Secours Médical (SSSM) représente 11 704 agents, soit

environ 5% des effectifs ;

l’effectif moyen est de 360 sapeurs-pompiers pour 100 000 habitants.

En 2013, les centres de réception du 18/112 ont reçu 24 264 826 appels, soit 35 821 appels pour 100 000 habitants.

Le coût moyen d’une intervention est évalué à 1015 EUR. Il existe cependant de très fortes variations, selon la durée de l’intervention et le nombre des moyens humains et matériels nécessairement mobilisés. Le coût moyen d’une intervention pour un secours routier est estimé à 1 248 EUR55.

L’armement moyen des SIS est de :

71 Véhicules de Secours et d’Assistance aux Victimes (VSAV) ; 24 Véhicules de Secours Routier (VSR), dont certains engins polyvalents.

53 Loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile.

54 Les statistiques des SIS – DGSCGC – Données 2013 et premières tendances de l’année 2014.

55 Rapport IGA 2014.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Le coût moyen56 de ces véhicules opérationnels est de :

environ 65 000 EUR par VSAV ; environ 186 000 EUR par VSRM (VSR Moyen).

En matière de ressources financières :

le coût du service est évalué à 81 EUR par habitant, cette valeur est stable ; le budget cumulé des SDIS s’élève à 4,927 Mrd EUR ; la contribution des conseils départementaux représente 57%, soit 2.8 Mrd EUR, dont

1 Mrd EUR est abondé par l’État au titre de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance ;

la contribution des communes et Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) complète à hauteur de 43 %.

Pour leur organisation opérationnelle, les SIS s’appuient sur des documents structurants :

le Schéma Départemental d’Analyse et de Couverture des Risques (SDACR) dans lequel sont recensés les risques présents dans la zone de compétence de chaque service et la répartition des moyens prévus pour y répondre ;

le Règlement Opérationnel (RO) qui fixe les modalités d’engagement et de réalisation des missions.

Le ministre de l’Intérieur a adressé aux préfets une circulaire57 en date du 26 mai 2015, relative aux orientations en matière de sécurité civile. Concernant les SDACR, le ministre demande aux préfets de veiller à ce que les SDIS n’engagent plus de travaux de mise à jour des SDACR. En effet, une réflexion de fond a été engagée à la DGSCGC, à ce sujet. Dans le cadre du Livre blanc sur la sécurité et la défense nationale, une expérimentation est en cours dans les zones de Paris et du Sud-Est, afin d’élaborer un Contrat Territorial de Réponse aux RIsques et aux Menaces (COTRRIM).

Ainsi, au sein des SIS, les sapeurs-pompiers développent une véritable culture de la gestion des risques et des crises. Par exemple, au sein de l’ENSOSP, un laboratoire réalise des recherches spécifiquement dans ce domaine, le Centre d'Etudes et de Recherches Interdisciplinaire sur la Sécurité Civile (CERISC).

1.3.2 Le maillage territorial

Basés dans 7015 centres d’incendie et de secours58, les 247 000 sapeurs-pompiers assurent une arrivée sur les lieux d’un accident de circulation en 9 minutes 46 secondes en moyenne sur tout le territoire Français, avec du personnel formé et du matériel adapté.

Ces données brutes doivent être précisées : nous devons tout d’abord les mettre en perspective par rapport aux 36 767 communes couvertes mais aussi par rapport au 1 078 119 kilomètres de routes59 françaises.

De plus, la capacité opérationnelle de chaque Centre d’Incendie et de Secours (CIS) est variable, selon le RO et le SDACR60 du SIS considéré.

56 Montants hors taxe. Le coût peut varier selon qu’il s’agisse d’un achat isolé, d’un groupement d’achat, ou d’une commande auprès de l’UGAP (établissement public : centrale d’achat public).

57 Circulaire NOR : INTK1512505C.

58 Les statistiques des services d’incendie et de secours – DGSCGC – premières tendances de l’édition 2015.

59 Réseau routier en 2013 : comparaison régionale – INSEE.

60 Article L 1424-7 du CGCT.

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Réglementairement, les CIS sont classés en trois catégories61 :

les Centres de Secours Principaux (CSP) doivent assurer en simultané quatre départs (deux départs en intervention pour secours d’urgence à personne, un départ pour mission de lutte contre l’incendie et un autre départ) ;

les Centres de Secours (CS) doivent assurer simultanément deux départs (un départ pour une mission de lutte contre l’incendie ou un départ pour un secours d’urgence à personne et un autre départ) ;

les Centres de Première Intervention (CPI) assurent un départ en mission.

Les sapeurs-pompiers assurent ainsi en permanence un service public en tout point du territoire. Ce maillage a toute son importance dans les chances de survie d’une victime d’un accident de circulation. En effet, les délais d’arrivée des secours auprès de la victime sont un facteur décisif pour sa prise en charge.

1.3.3 Les sapeurs-pompiers en interservices

1.3.3.1 La direction et le commandement de l’opération de secours

Les sapeurs-pompiers sont engagés et agissent en vertu des pouvoirs de police du maire. Ce dernier est alors le Directeur des Opérations de Secours (DOS). Le commandement est exercé par le sapeur-pompier désigné par le DDSIS : il prend alors l’appellation de Commandant des Opérations de Secours (COS) suivi du nom de la commune où se déroule l’accident. Son travail consiste à observer et comprendre la situation opérationnelle. Après analyse, en accord avec le DOS, il traduit les objectifs à atteindre en méthodes opérationnelles. Il répartit alors les tâches à réaliser pour chaque intervenant. Ainsi, il coordonne l’ensemble du dispositif et donc l’ensemble les acteurs des autres services. Il rend compte au DOS et au DDSIS.

1.3.3.2 L’interservices en communication opérationnelle

Les sapeurs-pompiers interagissent quotidiennement avec les autres services et en premier lieu la préfecture. La maîtrise de la communication avec les autres acteurs (SAMU, forces de l’ordre…) sur l’aspect opérationnel est une mission courante pour l’ensemble des CODIS. Mais les sapeurs-pompiers apportent leurs contributions aux autres administrations sur des manifestations programmées telles que la journée de la sécurité intérieure, les différents exercices opérationnels…

De plus, les sapeurs-pompiers sont rompus aux pratiques interservices, lors de l’activation des Centres Opérationnels Départementaux ou Zonaux (COD, COZ), ou encore au sein des services des États-Majors Interministériels de Zone (EMIZ) ou de la DGSCGC.

Cette expertise se retrouve également au Centre Opérationnel de Gestion Interministériel de Crises (COGIC), ainsi qu’au Centre Interministériel de Crises (CIC).

61 Décret n°97-1225 du 26 décembre 1997 relatif à l'organisation des services d'incendie et de secours codifié depuis dans le Code de la Sécurité Intérieure.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.3.3.3 L’interservices dans l’exercice de la prévention

Organisés en SDIS ou en unités militaires, les sapeurs-pompiers sont reconnus comme des acteurs opérationnels, mais également comme des acteurs de prévention.

L’article L1424-2 du CGCT reconnaît même une forme de primauté de la prévention par rapport à l’opération :

« Les services d'incendie et de secours sont chargés de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. Ils concourent, avec les autres services et professionnels concernés, à la protection et à la lutte contre les autres accidents, sinistres et catastrophes, à l'évaluation et à la prévention des risques technologiques ou naturels ainsi qu'aux secours d'urgence.

Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes :

1° La prévention et l'évaluation des risques de sécurité civile ;

2° La préparation des mesures de sauvegarde et l'organisation des moyens de secours ;

3° La protection des personnes, des biens et de l'environnement ;

4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation. »

Cela paraît logique tant il relève du bon sens « qu’il vaut mieux prévenir que guérir ».

Cette compétence s’exerce donc de manière générale, en tant que mission d’un service public, parfois sous la forme d’une compétence exclusive (l’incendie), mais également sous la forme de compétences partagées (le reste de la protection des personnes, des biens et de l’environnement).

Ce domaine de la prévention des risques ouvre ses portes à des actions qui peuvent relever d’une initiative propre de l’établissement public, mais aussi, dans certains cas, d’actions menées dans le cadre de commissions interservices, comme par exemple :

le conseil départemental de sécurité civile ; le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et

technologiques ;

la commission départementale de sécurité et d’accessibilité ; la commission départementale des risques naturels majeurs ; …

L’expérience des sapeurs-pompiers dans le domaine de la conception et la mise en œuvre de politiques publiques interservices de prévention des risques est réellement éprouvée.

Les résultats de ces actions de prévention sont remarquables. Ils sont régulièrement sous la barre des 10 décès par an lors d’incendies dans les Etablissements Recevant du Public (ERP), et aucun dans les Immeubles de Grande Hauteur (IGH).

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.3.4 La chaîne des secours

Après la survenue d’un accident corporel, la société s’organise dans un but de résilience. Il s’agit de l’action simultanée de plusieurs acteurs pour porter aide et secours à une victime et traiter les conséquences de l’accident.

1.3.4.1 L’alerte

En premier lieu, cette chaîne des secours débute par l’action de la population elle-même. Elle doit chercher à éviter un sur-accident dans un premier temps et appeler ensuite les secours publics. Dans le meilleur des cas, elle réalise les « gestes qui sauvent ». Seulement 46% de la population française est formée aux gestes de premiers secours62.

Un service public interconnecté réceptionne l’appel (112, 18, 17, 15…).

L’article R231-1 du code de la route dispose que tout conducteur ou usager impliqué dans un accident de la circulation doit avertir ou faire avertir les services de police ou de gendarmerie si une ou plusieurs personnes ont été blessées ou tuées dans l’accident. Une telle rédaction nous a paru surprenante dans un premier temps, considérant en tant que sapeurs-pompiers que l’engagement des secours est prioritaire aux considérations judiciaires et statistiques.

De plus, cet article exige que les personnes présentes doivent « éviter, dans toute la mesure compatible avec la sécurité de la circulation, la modification de l'état des lieux et la disparition des traces susceptibles d'être utilisées pour établir les responsabilités ».

Selon les divers éléments recueillis, l’appel est alors ou non qualifié d’appel d’urgence (c’est la phase de « débruitage »). Le traitement de l’appel continue, des moyens de secours sont engagés. Chaque service compétent est informé et fait le choix des moyens.

1.3.4.2 La prise en charge des victimes

Les sapeurs-pompiers sont formés aux techniques de Secours d’Urgence aux Personnes (SUAP). Les personnels du service de santé et de secours médical quant à eux sont formés aux techniques médicales et paramédicales. Ils suivent à l’ENSOSP, au sein du SIMulateur d’URGEnce (SIMURGE) des modules de formation adaptés à la prise en charge des victimes d’accident. Les sapeurs-pompiers ont donc les capacités matérielles et techniques pour agir. C’est souvent une compétence partagée avec les Services Mobiles d’Urgence et de Réanimation (SMUR).

La victime prise en charge est ensuite évacuée vers une structure médicale dont le plateau technique est plus ou moins complet et adapté à ses blessures. Elle y recevra les soins appropriés, ce qui marque la fin de la chaîne des secours. La victime entre alors dans le système de soins, avec une hospitalisation plus ou moins longue selon la gravité de ses atteintes, avant une éventuelle orientation vers un centre de rééducation.

62 Question au gouvernement n°55504 du 7 septembre 2014.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.3.4.3 La dimension technique de l’intervention

En l’attente de l’intervention des services des routes, et des forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers balisent l’accident et participent donc à la protection contre un sur-accident. Ils assurent également la protection contre les risques d’incendie. Ils mettent ensuite en sécurité le véhicule accidenté et réalisent si besoin les techniques de désincarcération pour permettre l’évacuation de la victime.

Sur les lieux de l’accident, l’intervention des secours se termine par l’évacuation du véhicule accidenté, la remise en état des infrastructures et les constats pour l’enquête judiciaire.

1.3.5 Approche historique du secours routier en France

Avec la survenue des accidents liés aux déplacements motorisés et mécanisés, les secours ont dû s’organiser pour prendre en charge les victimes. Des initiatives publiques et privées sont prises dans les années 1950. Elles sont initiées ou encouragées par quatre ministères en charge des problèmes posés par ces accidents.

Par instruction interministérielle du 5 février 1952, le service national de la protection civile demande aux préfets d’établir un plan établi sur les mêmes principes que le plan ORSEC63. Ainsi les missions sont réparties entre les sapeurs-pompiers, les gendarmes et le service de santé. Cette circulaire préfigure les rôles actuels de chacun. L’alerte est réceptionnée par la gendarmerie. En effet, à cette époque c’est le seul corps national organisé pour réceptionner un appel d’urgence.

Dans les années 1960, les services opérationnels ont pris conscience de la nécessité de se structurer, de s’équiper et de se former. Mais cela a été réalisé de manière inégale sur le territoire national. Il semble qu’il n’y avait alors pas de coordination suffisante pour permettre de définir une doctrine commune dans ce domaine.

A partir des années 1970, des techniques et des matériels spécifiques sont développés pour l’extraction et la prise en charge des victimes. Emergent donc en parallèle chez les sapeurs-pompiers le développement et le déploiement de matériels et Véhicules de Secours Routier (VSR) spécifiques et de Véhicules de Secours aux Asphyxiés et Blessés (VSAB). Les médecins hospitaliers et sapeurs-pompiers organisent de leur côté la médicalisation des victimes sur les lieux de l’accident. Cette doctrine sera différente de celles mises en place dans des pays nord-européens ou nord-américains.

Pendant les années 80, les VSR et les matériels sont normalisés. Les techniques et formations sont perfectionnées. S’ensuivent une quinzaine d’années de relative stabilité : les sapeurs-pompiers réalisent les secours et les désincarcérations sans véritable difficulté.

Par contre vers la fin des années 90, les constructeurs automobiles prennent conscience de leur responsabilité vis-à-vis de la société alors que les accidents routiers et les victimes de la route restent toujours nombreux. En quelques années sous l’effet de la concurrence, ils développent de nouveaux systèmes de sécurité actifs et passifs. Parallèlement, conscients des enjeux environnementaux, ils diversifient les énergies motrices, modifient les moteurs et les structures des voitures en incorporant des aciers de nouvelles générations.

Malgré les progrès qu’elles permettent, toutes ces nouvelles technologies engendrent de nouveaux risques pour tous les intervenants, qui doivent ainsi s’adapter et modifier leurs doctrines et méthodes opérationnelles.

63 A l’époque « Organisation des Secours ».

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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1.3.6 Les risques et difficultés opérationnelles pour les intervenants liés aux nouvelles technologies

Depuis une quinzaine d’années, les constructeurs de véhicules automobiles se montrent particulièrement innovants dans les domaines de l’énergie motrice – l’administration reconnaît à ce jour 22 combinaisons de sources d’énergies différentes pour les véhicules terrestres 64 – et des systèmes de sécurité actifs de type Anti Blocking System (ABS), correcteur de trajectoires, anti patinage, ou passifs tels que les airbags, les capots actifs... Au 1er janvier 2012, le nombre de versions de véhicules automobiles commercialisés en France était estimé à 6 473.

En mode de fonctionnement dégradé, comme à la suite d’un accident de circulation, ces nouvelles technologies diversifient les risques pour les secours. Par exemple, les véhicules électriques ou hybrides peuvent engendrer des risques d’électrisation voire d’électrocution, mais aussi des risques chimiques en cas de rupture de l’enveloppe des batteries.

D’autres exemples peuvent être cités comme les airbags ou les prétensionneurs de ceintures qui se déclenchent en quelques millièmes de secondes à l’aide de systèmes pyrotechniques. Ceux-ci, s’ils n’ont pas servi au moment de l’impact, peuvent se déclencher intempestivement ou accidentellement sous l’effet des outils des sapeurs-pompiers.

Parallèlement les constructeurs automobiles ont modifié les structures des véhicules afin de rigidifier certaines parties et permettre à d’autres d’absorber l’énergie en cas de choc. Ainsi se côtoient des matériaux tels que les aciers qualifiés de Ultra Haute Limite Elastique (UHLE) ou de Très Haute Limite Elastique (THLE), l’aluminium ou encore les plastiques. Les parties résistantes d’un véhicule moderne formant l’habitacle créent la zone de survie pour les occupants. Le problème pour les sapeurs-pompiers qui doivent désincarcérer ces occupants, est que leurs outils ne sont plus assez résistants ou puissants pour césariser cet habitacle. Fréquemment des lames de cisailles cassent net en éjectant violemment une partie de l’outil menaçant la victime et le sauveteur.

Les difficultés rencontrées par les sapeurs-pompiers lors de ces interventions tiennent :

à la présence d’acier de plus en plus résistant ; à la présence de nombreux dispositifs de sécurité qui nécessitent une prise en

compte particulière par les secouristes (utilisation de charges pyrotechniques) ;

aux énergies utilisées par les véhicules (risque d’explosion, d’électrisation…) ; aux feux d’alliages métalliques (difficultés d’extinction) ; à la pyrolyse des pneus (risques augmentés d’explosion).

Tous ces risques et ces difficultés obligent les secours à prendre de nouvelles dispositions pour intervenir en sécurité et pour extraire la victime, au détriment d’un temps d’intervention rallongé.

Le lieutenant-colonel Michel GENTILLEAU, chef du pôle « moyens opérationnels » au SDIS de la Vienne, membre du comité national technique et pédagogique de secours routier, attire notre attention « quand je vous parle d’une révolution intellectuelle pour les sapeurs-pompiers, il faut aussi la faire pour les services qui interviennent et notamment pour les médecins. Si les sapeurs-pompiers mettent en place une nouvelle stratégie, il faut que les autres services la comprennent ».

64 Arrêté du 9 février 2009 modifié relatif aux modalités d’immatriculation des véhicules.

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1.4 Formulation des hypothèses de recherche

A ce moment de notre rapport, après avoir présenté l’organisation de la politique nationale de sécurité routière et des SIS, nous nous proposons d’émettre puis de vérifier deux hypothèses de recherche.

1ère hypothèse :

Si nous observons l’organisation de la politique nationale de sécurité routière, alors nous constatons que les sapeurs-pompiers ne sont pas suffisamment impliqués.

2ème hypothèse :

Si nous observons l’organisation des sapeurs-pompiers de France, alors nous constatons qu’ils disposent de compétences et de moyens permettant de mobiliser de nouveaux leviers d’action pour servir la sécurité routière.

Ainsi dans la prochaine partie, nous répondrons à chacune de ces hypothèses, grâce à une démarche de recherche.

Enfin, nous formulerons des préconisations apportant notre contribution à la politique nationale de sécurité routière.

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Partie 2 : DES ACTIONS OPERATIONNELLES VERS LA POLITIQUE NATIONALE

2.1 Présentation de la recherche

2.1.1 Méthodologie de la recherche

La question de la politique nationale de sécurité routière offre la possibilité d’une lecture abondante et particulièrement variée. On recense une quantité considérable de rapports, ouvrages, études, thèses, articles de presse, médias… La question de la construction, de la mise en œuvre et de l’évaluation des politiques publiques n’est pas moins généreusement documentée. Face à ce constat, et à la nécessité d’appréhender le sujet dans sa complexité, le groupe de travail s’est attaché à définir et mettre en œuvre une stratégie et une méthodologie de recherche réfléchies. De plus, ce sujet faisant l’objet d’un premier traitement dans le cadre des formations supérieures aux emplois de direction, il nous est apparu judicieux d’aborder le sujet de la manière la plus large possible, en accord avec notre directeur de mémoire.

Dans un premier temps, nous avons donc largement ouvert notre curiosité, dans une attitude de découverte sincère du sujet, de son histoire et de son actualité. A cette occasion, chaque membre du groupe a effectué des recherches documentaires et a activé son réseau professionnel, afin d’autoriser l’émergence naturelle de pistes de recherche. Ensuite, un temps de mise en commun et de première synthèse des résultats est apparu nécessaire.

La seconde phase a consisté à concevoir une réelle stratégie de recherche, une fois l’équipe constituée et le projet partagé. Tous les entretiens ont été conduits de manière semi-directive, dans une relation individuelle ou collective, selon les cas. Une double approche qualitative et quantitative a été jugée nécessaire, le choix ayant été adapté en fonction de la nature et de l’objectif de l’entretien. Nous nous sommes attachés à rencontrer les représentants des principaux acteurs nationaux de cette politique publique.

La troisième étape de la recherche a consisté à resserrer et approfondir la démarche notamment sur quelques SDIS particulièrement impliqués. Le groupe de travail a fait le choix d’une démarche de recherche des bonnes pratiques auprès de tous les SDIS de France, en partageant le travail, à hauteur d’un quart des établissements par rédacteur.

Enfin, la stratégie et la méthode de recherche ont permis d’activer la « boucle » de la démarche de recherche : conception, réalisation, analyse, interprétation.

2.1.2 Recherches documentaires

Pour débuter nos recherches, nous avons entrepris la lecture d’une littérature riche et importante dans de très nombreux domaines tant au point de vue national, qu’international.

Sur internet, nous avons consulté les sites des différentes institutions luttant contre l’insécurité routière mais aussi des sites lobbyistes. Nous avons également pu trouver grand nombre de rapports et d’études médicales sur la prise en charge de victimes polytraumatisées ou encore des données techniques et scientifiques sur l’accidentologie routière.

Parallèlement, la lecture de livres sur le risque routier, le secours, la construction de politiques ou encore la sécurité routière, nous a orienté sur des concepts comme l’intelligence territoriale, la prise de décision, l’innovation collaborative, l’économie de la sécurité, ou encore la gestion des risques.

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Enfin, nous avons pu trouver et consulter de très nombreux rapports institutionnels et universitaires sur le domaine. Nous constatons qu’au début des années 2000, de nombreuses études ont été menées.

2.1.3 Entretiens avec les différents acteurs

Afin d’enrichir notre recherche, il nous est apparu nécessaire de réaliser des entretiens avec les différents acteurs de la sécurité routière et de la sécurité civile. Ces entretiens semi-directifs ont été menés du mois de février au mois de septembre 2015.

Nous nous sommes réparti ces travaux en fonction des domaines d’étude (associations et assurances, techniques et formation, institutions et politiques, Europe et lobbies). Chacun a jugé de l’opportunité de prendre les rendez-vous et de mener les entretiens physiquement ou par téléphone.

Enfin à l’issue de chaque entretien un relevé a été établi, communiqué à l’ensemble des rédacteurs de ce mémoire afin de partager les savoirs et les réflexions acquis par ce biais. Un exemple de compte rendu est porté en annexe VII et la liste des personnes auditées en annexe VIII.

2.1.4 Recherche des bonnes pratiques auprès des SDIS

La sécurité routière n’est pas énoncée en tant que telle dans les missions des SDIS français. L’investissement des services nous a semblé de prime abord très variable et très largement influencé par les circonstances locales, la personnalité des acteurs ou l’histoire de l’organisation.

Afin d’évaluer le degré de prise en compte du risque routier au sein des SDIS, nous avons entrepris une démarche systématique.

Pour ce faire, nous avons construit une grille d’entretien organisée en deux parties, la première tournée vers les actions internes à l’établissement, la seconde orientée vers son rayonnement externe en matière de sécurité routière. Chaque entrée est identifiée par le numéro de département ainsi que par le nom de l’interlocuteur interrogé. La variété des systèmes d’organisation et le niveau d’implication des établissements font que l’interlocuteur pertinent en la matière n’est pas nécessairement positionné au même endroit de la structure.

Sur le volet interne, ont été examinées :

la tenue de statistiques de l’accidentologie routière des agents de l’établissement dans le cadre de leurs fonctions ;

l’existence d’actions de communication interne visant à alerter et prévenir ce risque ainsi que leur forme ;

l’existence d’un Plan de Prévention du Risque Routier (PPRR) au sein de l’établissement.

Sur le volet externe ont été recherchés :

l’influence éventuelle de la politique départementale de sécurité routière sur les documents structurants de l’établissement et notamment le SDACR;

l’existence d’actions menées par le SDIS en matière de sécurité routière à destination du grand public et/ou des élus locaux ;

le développement de techniques opérationnelles spécifiques visant à améliorer la réponse opérationnelle in fine.

Les résultats sont portés en annexe IX.

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2.2 Contenu de la recherche

2.2.1 Les sapeurs-pompiers ne sont pas suffisamment impliqués dans la politique nationale

2.2.1.1 Absence dans la conception de la politique nationale

Nous avons tout d’abord examiné la présence des sapeurs-pompiers par des recherches documentaires. Nous constatons qu’aucun représentant sapeur-pompier n’est présent au sein de la DSCR, chargée de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique de sécurité routière. Cette carence a pour conséquence que les sapeurs-pompiers ne sont pas acteurs de la rédaction des textes techniques et législatifs dans ce domaine. Il est à noter que l’ensemble des autres acteurs avec qui nous collaborons au niveau local sont représentés : force de l’ordre, justice, éducation nationale. Ce même constat peut être réalisé pour l’ONISR. Toutefois, il s’explique par le fait que les SDIS ne participent en aucun cas à l’élaboration des statistiques officielles aussi bien au niveau départemental que régional.

Le CNSR, véritable « parlement » de la sécurité routière, ne comprend là encore aucun représentant sapeur-pompier, ni en tant que membre de droit, ni au sein du comité des experts. De ce fait, la parole des sapeurs-pompiers ne peut porter lors des débats regroupant l’ensemble des acteurs de la sécurité routière, afin de proposer des recommandations au gouvernement.

Les SIS sont aussi absents des politiques de sécurité des infrastructures routières et de réglementation technique des véhicules qui restent de la compétence du MEDDE, en charge des transports.

De plus, aucun texte ne définit le rôle des sapeurs-pompiers au sein de la politique de sécurité routière, à la différence de la gendarmerie65. Les différents niveaux hiérarchiques y jouent un rôle défini, depuis les fonctions de conception et de pilotage de la politique de sécurité routière, jusqu’à leur mise en œuvre.

Notre recherche documentaire a été confirmée par plusieurs entretiens :

monsieur Jean BENET, alors directeur des sapeurs-pompiers à la DGSCGC, confirme que les sapeurs-pompiers sont effectivement absents de la politique nationale de sécurité routière. Il estime que la place des sapeurs-pompiers est avant tout légitime au niveau local ;

le lieutenant-colonel GENTILLEAU, du SDIS de la Vienne estime que l’insuffisance de l’implication des sapeurs-pompiers est criante, tant sur le plan de la conception, que de la mise en œuvre de la politique publique ;

le docteur Philippe LAUWICK, président de l’association Automobile Club Médical de France (ACMF), considère que les sapeurs-pompiers ne sont pas identifiés actuellement comme des acteurs majeurs de la prévention routière. Notre position reconnue est celle du domaine de l’opérationnel ;

dans le registre des experts, le groupe a pu notamment s’entretenir longuement avec le professeur Claude GOT, expert reconnu dans le domaine de l’accidentologie routière66, membre démissionnaire du CNSR.

65 L’action de la gendarmerie dans la lutte contre l’insécurité routière est définie par l’instruction n°45000 / GEND/DOE/SDSPSR/DSRFMS du 18 juin 2011.

66 http://securite-routiere.org/got/auteur.htm

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Il considère que la politique de sécurité routière menée en France depuis les années 1970 est un « succès incroyable de santé publique » mais estime que la place des sapeurs-pompiers dans cette politique publique est difficile à définir. Nous sommes indiscutablement reconnus comme des acteurs opérationnels, mais prétendre à un rôle d’expert dans le domaine nécessite selon lui plus que de l’expérience et du vécu. En effet, une formation rigoureuse à l’accidentologie est indispensable, pour élever le débat au-dessus des discussions du « café du commerce ». Tout le monde a un avis sur la question, en tant que conducteur, mais cela n’est pas suffisant, et l’analyse de faits collectifs basés sur des expériences personnelles n’est pas garante de crédibilité, ni de rigueur scientifique. Il pense que nous devrions être très impliqués dans les politiques publiques de niveau départemental. Il reconnaît que cette implication est très variable d’un département à l’autre.

La recherche documentaire ainsi que les entretiens menés au niveau central (DGSCGC, DSCR, Unité de Coordination de Lutte contre l’Insécurité Routière) amènent à la conclusion que les sapeurs-pompiers sont absents de la conception de la politique nationale de sécurité routière.

2.2.1.2 Une implication prévue par les plans internationaux

Au niveau international, des plans d’actions ont été élaborés.

L’Organisation des Nations Unies (ONU) a adopté en mars 2010 une résolution par laquelle elle proclame la décennie 2011-2020 « décennie d’action pour la sécurité routière en vue de stabiliser puis de réduire le nombre prévu de décès imputables aux accidents de la route dans le monde en multipliant les activités menées aux niveaux national, régional et mondial ».

La commission européenne quant à elle, a établi un document intitulé « Vers un espace européen de la sécurité routière : orientations politiques pour la sécurité routière de 2011 à 2020 ».

Il apparaît entre ces deux institutions des approches similaires avec des dispositions spécifiques par thématique pour lutter contre l’insécurité routière.

Par exemple, concernant l’ONU, l’un des volets porte sur « les soins post-accident [pour] accroître la capacité de réponse aux situations d’urgence et rendre les systèmes de santé plus à même d’offrir aux victimes de la route des traitements d’urgence appropriés ».

Une préconisation de ce volet est de : « développer des systèmes de soins pré-hospitaliers, y compris pour la désincarcération des victimes après un accident, et créer un numéro de téléphone d’urgence national unique, en appliquant les bonnes pratiques existantes ».

La commission européenne fixe 7 objectifs dont l’un est : « Améliorer les services d’urgence et la prise en charge ultérieure des blessés […]. Pour réduire la gravité des lésions dues aux accidents de la route, il faut introduire une série d’actions diversifiées, ayant trait, par exemple, à la sécurité des véhicules et des infrastructures, […] à la disponibilité de services d’urgence, à la rapidité et à la coordination des interventions ».

Ainsi, nous vérifions qu’au niveau international, la participation des acteurs du secours est clairement légitimée, ce qui ne trouve pas de transcription effective dans la politique nationale française.

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2.2.1.3 Une présence insuffisante et inégale sur le plan de la mise en œuvre

Sur le plan de la mise en œuvre de cette politique publique, il ressort de notre recherche que les sapeurs-pompiers sont très clairement identifiés comme des acteurs opérationnels. Toutefois, leur implication semble majoritairement limitée à ce domaine, nonobstant quelques initiatives, plus ou moins locales.

Au moyen des entretiens conduits auprès des principaux acteurs nationaux, et à grâce à l’appui des échanges réalisés avec les SDIS de France dans le but de permettre l’émergence des bonnes pratiques, nous avons constaté une mise en œuvre opérationnelle à peu près uniforme. En revanche, le niveau d’implication des SDIS est très inégal, dans les domaines de la prévention et des innovations techniques.

Une gouvernance de la politique locale à renforcer

Le rapport de l’IGA de juillet 2014 établit que : «La politique locale de sécurité routière est mise en œuvre sous l’autorité des préfets. Le nombre des acteurs concernés rend cette coordination essentielle et complexe. Cette coordination est facilitée lorsque l’impulsion politique est forte et vient du plus haut niveau de l’État. Elle l’est également lorsqu’une capitalisation des bonnes pratiques est assurée par la DSCR, ce qui n’est plus le cas depuis 2010. » Lors de nos entretiens, nous avons constaté que cette analyse était partagée par monsieur MACHU alors secrétaire général adjoint de l’ONISR.

Il ressort des entretiens que les SDIS 12 et 47 sont très impliqués dans l’élaboration, la conduite et l’évaluation de la politique départementale de sécurité routière. Ils sont associés au DGO, au PDASR et au PDCR, aux réunions post-accident mortel, aux comités de pilotage des actions de prévention, à la désignation d’intervenants départementaux de sécurité routière, au collège des chefs de services préfectoraux, au pôle de compétence État…

L’ensemble de ces bonnes pratiques s’étend même sur la gestion des statuts des acteurs, où, par exemple, Bernard BRIZARD de l’ODSR (DDT 47) est également capitaine de sapeur-pompier volontaire au SDIS 47, des agents du SAMU sont également sapeurs-pompiers volontaires, il existe une plateforme commune 15/18/112, un terminal d’alerte opérationnel a été installé au PC route du conseil départemental… De toute évidence, ces relations horizontales et partenariats facilitent la conduite des actions en interservices. La dimension humaine, la connaissance et le respect mutuel, sont indéniablement des facteurs de réussite des projets collaboratifs.

Dans le cas du département de la Guadeloupe, l’adjudant-chef VADIMON, sapeur-pompier professionnel, a été mis à disposition auprès du préfet de département en qualité de chargé de mission sécurité routière en 2012. Cette bonne pratique donne des résultats satisfaisants dans ce département particulièrement touché par l’insécurité routière.

Nous venons de mettre en évidence l’importance de la gouvernance territoriale et les progrès possibles en la matière. Celle-ci relève d’une « intelligence territoriale » qui se déploie dans les réseaux verticaux et horizontaux tissés entre l’administration centrale et les territoires.

Les insuffisances du recueil statistique

Comme nous l’avons vu en première partie, les données des sapeurs-pompiers ne participent pas à l’élaboration des fichiers BAAC. Mais dans certains départements, l’ODSR et le SDIS collaborent. Ils réalisent des fichiers d’accidentalité notablement plus détaillés que ceux des BAAC (SDIS 07, 12, 47, 52, 56, 85...).

Les écarts conséquents constatés entre les chiffres de ces départements impliqués et les fichiers BAAC correspondants prouvent l’aspect parcellaire des statistiques servant de support au pilotage de la politique nationale de sécurité routière. Ceci est corroboré par les conclusions du rapport de l’IGA de juillet 2014 qui considère que : « le recueil des données

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de l’accidentologie est lourd et pourtant insuffisant pour rendre cette politique encore plus pertinente : l’ONISR doit être renforcé et bénéficier du soutien de l’ensemble des ministères concernés par cette politique. » (…) « Un nouveau souffle pourrait provenir d’une meilleure prise en compte des blessés. » (…) « Les statistiques de l’ONISR ne permettent pas de comptabiliser correctement les blessés. »67

Lors de notre recherche de bonnes pratiques, nous avons identifié l’exemple du Lot-et-Garonne (47)68, dont les modalités de la politique départementale de sécurité routière nous paraissent suffisamment remarquables pour être rapportés.

Concernant la gestion des données, un partenariat étroit a été mis en place. En effet, la coordination préfectorale et le SDIS ont établi une convention et un financement permettant à la préfecture de récupérer toutes les données de géolocalisation69 des accidents de la route, y compris ceux n’entrant pas dans la procédure BAAC. Ces données sont significatives car il y a eu 172 BAAC en 2014 dans le Lot-et-Garonne, et plus de 1800 CRSS pour le SDIS sur des motifs identiques d’alerte. Toutefois, les accidents matériels légers, sans appel de demande de secours au 18, ne sont pas comptabilisés, et sont traités dans le cadre du constat amiable, par les assurances. Le résultat de cette recherche montre que seul un accident avec demande de secours, sur dix en moyenne, fait l’objet d’un BAAC. Cette bonne pratique a permis de faire émerger, de façon logique, pragmatique et opérationnelle, des priorités d’action à l’encontre des cibles suivantes sur des secteurs géographiques donnés : les jeunes de 18 à 25 ans, les deux roues motorisés, les conduites addictives (voir annexe X).

Selon l’ODSR de l’Aveyron, il existe des cas d’accidents corporels qui n’ont pas fait l’objet de BAAC. Cette tendance à la sous-déclaration des accidents corporels a été confirmée par l’ORSR d’Aquitaine. Elle peut trouver une explication dans la lourdeur de la procédure70, où l’intégration BAAC implique le plus souvent une procédure judiciaire par les forces de l’ordre. Or, selon la logique des BAAC (cf. guide d’utilisation BAAC), il n’y a pas de lien direct entre procédure judiciaire et fichier BAAC. Tout accident corporel, y compris avec un ou plusieurs blessés légers (hospitalisation de moins de 24 heures) devrait entrer dans les BAAC, ce qui visiblement n’est pas le cas. Pour la gendarmerie, seuls les blessés hospitalisés sont pris en compte (hospitalisés plus de 24 heures).

Avec la Tarification A l’Acte (T2A) utilisée dans le secteur hospitalier, la durée d’hospitalisation fait l’objet d’une gestion rigoureuse71, sous l’autorité de l’Agence Régionale de Santé (ARS), aux fins de maîtrise des dépenses de santé.

Selon l’ODSR 47, le facteur vitesse a tendance à être sous-estimé au profit de l’infraction72 « défaut de maîtrise eu égard aux circonstances ». Or, ce défaut de maîtrise, selon l’ODSR, est souvent la conséquence d’une vitesse excessive. Ce constat et cette analyse sont partagés par le SDIS 47. Un site internet collaboratif, le « portail accident V2 », a été conçu à la base pour être largement ouvert et partagé. En pratique, on constate que cela n’est pas le cas. Par exemple, le SDIS 47 ne l’utilise pas.

67 Rapport IGA juillet 2014, Tome 1, pages 2 et 9.

68 Même si les résultats de 2015 ne sont pas bons : autant de morts au 1er semestre 2015 que sur toute l’année 2014.

69 Logiciel CLICK VIEW. Intégration des données GPS X et Y lors du signalement d’arrivée sur les lieux des véhicules sapeurs-pompiers, par le système radio ANTARES et le logiciel d’alerte SYSTEL START. Participation de la Préfecture à hauteur de 6300 EUR, dans le cadre du budget PDASR 2013.

70 La durée d’une procédure est estimée à 16 homme.heure, plus un temps de saisie d’une heure (source ONISR, colonel ROUSSEAU).

71 La gestion des données d’hospitalisation est gérée sur un fichier PMSI.

72 NATINF : nature de l’infraction.

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Nous avons constaté qu’il n’existe pas encore d’harmonisation de la classification des victimes entre l’ODSR et le SDIS 47. Ces différences de définitions sont pénalisantes car les acteurs en utilisant les mêmes données, ne parlent pas des mêmes phénomènes. Par exemple, un indemne est une victime pour le SDIS, mais pas pour l’ODSR, qui ne considère que les blessés graves, c'est-à-dire hospitalisés plus de 24 heures. Le nombre des tués est par contre bien accordé, avec néanmoins quelques ajustements nécessaires, comme par exemple le cas d’une personne décédée dans sa voiture suite à un malaise qui a ensuite causé un accident de la route. Dans ce cas, la victime peut être considérée comme étant décédée des suites du malaise, et non pas de l’accident de la route consécutif, ce qui a pour effet de l’exclure de la comptabilité des tués sur la route.

Madame PERRICHON de la Ligue Contre la Violence Routière (LCVR) considère que notre contribution pourrait être très utile dans le recueil des statistiques d’accidents non prises en compte dans les fichiers BAAC ainsi que dans le domaine des solutions innovantes.

Nous avons interrogé un assureur de la MACIF pour lequel l’apport des sapeurs-pompiers pourrait s’inscrire dans ce schéma, en complément de l’analyse des accidents corporels effectuée au moyen des procédures et fichiers BAAC. Il considère aussi qu’il y a un manque de recherches sur les causes et les circonstances des accidents, en particulier sur le point de basculement entre accident matériel et corporel. Sur ce point également, les sapeurs-pompiers présents sur le terrain de manière plus systématique que les forces de l’ordre, auraient un rôle à jouer. Cette production de connaissance permettrait de mieux comprendre le phénomène d’accidents de la route.

Vers une meilleure comptabilisation et évaluation des blessés

Nous avons pu, en première partie, montrer l’importance du recueil des données d’accidents pour évaluer l’efficacité de la mise en œuvre de la politique publique, et ensuite adapter sa conception. Ce recueil des données repose essentiellement sur les fichiers BAAC. Or, le registre du Rhône73 des victimes d’accidents de la circulation routière recense, en milieu hospitalier public et privé, l’ensemble des blessés et tués de la route, hospitalisés ou non, sur le territoire du département du Rhône. Le registre est géré par l’Association pour le Registre des Victimes d’Accidents de la Circulation (ARVAC) 74 . Nous avons eu l’opportunité de rencontrer le responsable de ce service, le docteur Bernard LAUMON.

Depuis 1995, cet enregistrement fonctionne de manière continue, en recensant les victimes d’accidents corporels de la circulation routière se produisant dans le département du Rhône. Ses objectifs sont la connaissance du traumatisme routier et de ses conséquences, notamment grâce à une description précise des lésions des victimes. Ce registre est qualifié par le comité national des registres. L’inclusion ne repose pas sur le lieu de résidence des victimes mais sur le lieu de l’accident. L’évènement de santé inventorié est l’atteinte de l’intégrité corporelle (une lésion et plus, au sens de l’AIS) lors d’un accident de la circulation routière impliquant au moins un véhicule en mouvement (y compris les patins et planches à roulettes). Les chutes de piétons sont donc exclues. Le recueil repose sur l’ensemble des structures sanitaires publiques et privées, au nombre de 245, qui prennent en charge les blessés de la route, y compris dans les départements limitrophes du Rhône : SDIS, urgences pré hospitalières (SAMU et SMUR), services d’urgences, déchoquage, réanimation, médecine légale, chirurgie, rééducation, convalescence.

73 Cohorte ESPARR « Etude sur le suivi d’une population d’accidentés dans le Rhône ».

74 http://www.revarrhone.org

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Chaque service remplit une fiche pour chaque victime. Les victimes et/ou leur famille sont sollicitées par voie d’affiche ou par courrier pour compléter certaines informations manquantes, en particulier le lieu de l’accident. Les informations recueillies concernent la victime, son accident, son parcours hospitalier et ses lésions. C’est au moment de la saisie informatique que les différentes fiches concernant la même victime sont regroupées sous le même identifiant.

Les descriptions lésionnelles sont la synthèse des informations provenant de différents services. Les lésions sont décrites en clair à partir des observations médicales, puis codées par le médecin du registre à l’aide de l’AIS90. Cette classification des lésions traumatiques comporte un descriptif de la lésion auquel est associé un niveau de gravité immédiate : le score AIS. Il varie de 1 pour une lésion de gravité « mineure » à 6 pour « maximale ». Les lésions de niveau AIS4 ou plus (potentiellement mortelles) sont appelées « lésions graves ». Pour chaque victime, le MAIS (Maximum AIS) est le score maximal de gravité immédiate de ses différentes lésions.

Pour la période 1996-2008, 154 050 fiches ont été traitées. Elles correspondaient à 108 100 accidents ayant fait 123 826 victimes, dont 87,7% habitant le Rhône. Ces victimes présentaient au total 235 671 lésions.

Une thèse75 soutenue en 2007 a démontré que si les enregistrements du registre du Rhône tendent vers l’exhaustivité, les données issues des forces de l’ordre (fichiers BAAC) sont en-deçà de la réalité : « Les effectifs estimés sont bien plus élevés que les effectifs basés sur les données des forces de l’ordre (3,7 fois plus pour les blessés toutes gravités et 2,2 fois pour les blessés graves). Cela change l’ampleur de ce problème de santé publique. Il y a autant de blessés avec séquelles majeures que de tués, chaque année. Les enjeux sont aussi déplacés : les cyclistes sont au même niveau que les piétons pour le nombre de blessés, et les usagers de deux roues motorisées sont au même niveau que les automobilistes pour le nombre de blessés graves (mais pas pour ce qui concerne les tués). Enfin, alors que les données des forces de l’ordre indiquent une baisse du taux de gravité, les résultats de la projection indiquent que ce taux est plutôt stable. 76»

Figure 5 Principe d'extrapolation des données du registre du Rhône (Source étude AMOROS)

75 Emmanuelle AMOROS. Les blessés par accidents de la route : Estimation de leur nombre et de leur gravité lésionnelle,

France, 1996-2004. Modélisation à partir d’un registre médical (Rhône) et des données policières (France). 76 Page 147 de la thèse.

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De cet exemple du registre du Rhône, nous tirons quelques enseignements :

le recueil BAAC souffre de faiblesses et d’insuffisances dans les données ; l’apport des sapeurs-pompiers, notamment dans l’analyse des blessés, serait utile ; la compréhension du « phénomène accident », sur le plan individuel et collectif, est

altérée par ces lacunes.

Etude comparative des données DGSCGC et ONISR

Afin d’aller plus loin dans cette analyse, nous proposons de mettre en perspective les écarts mesurés dans l’accidentalité routière de 2013, entre les données de la DGSCGC et de l’ONISR :

source DGSCGC, fichiers CRSS : 267 973 accidents et 310 942 blessés ; source ONISR, fichiers BAAC : 57 805 accidents et 72 406 blessés.

Le coefficient entre les données ONISR et les données DGSCGC est de :

4,63 pour le nombre d’accidents ; 4,29 pour le nombre de blessés (cette valeur est proche de celle trouvée dans la

thèse AMOROS).

Cette tendance est constante sur les 10 dernières années.

Figure 6 Comparaison des chiffres SIS et ONISR (Extrait d’un document de travail col P.BODINO)

Pour les accidents, cet écart important peut en partie s’expliquer par le fait que les sapeurs-pompiers sont parfois appelés pour un accident de la route, et qu’une fois sur les lieux, aucun blessé n’est à déplorer. Dans ce cas, l’évènement n’apparaît pas dans le fichier BAAC.

Pour les blessés, cet écart important peut en partie s’expliquer par le fait que le mode de comptabilité est très différent entre les deux services, nous l’avons décrit précédemment.

Au regard de l’organisation du recueil des données, et des résultats obtenus, nous pouvons mettre en évidence que :

le nombre des accidents est incertain ; le nombre des blessés est incertain ; le nombre des tués est fiable ; des progrès sont possibles, notamment grâce à une plus grande collaboration

interservices.

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Dans le domaine de la prévention et du continuum éducatif

Lors de notre entretien avec le colonel TREPOS, chef de l’inspection à la DGSCGC, nous avons pu mesurer à quel point les SDIS sont inégalement impliqués dans la mise en œuvre de la politique publique. Mais quand les sapeurs-pompiers sont présents, ils interviennent essentiellement sur le plan de la prévention.

Les contacts pris dans le cadre de notre recherche de bonnes pratiques ont permis de mettre en évidence une quasi-unanimité des SDIS dans leur implication au profit de la prévention et de l’éducation par le biais de manœuvres de désincarcération. Ces démonstrations sont le prétexte à la diffusion de messages de prévention. Cette perception est partagée jusqu’au niveau central 77 . Pour autant les documents utilisés et les contenus délivrés sont extrêmement disparates, ce qui pénalise la cohérence du message.

Selon le point de vue de l’IGA (rapport de juillet 2014), «si le message des autorités reste encore crédible en matière de politique de sécurité routière, les phénomènes de méfiance vis-à-vis de l’expertise et la prolifération sur internet de contre-vérités relatives à la sécurité routière nécessitent une politique de communication de plus en plus multiforme et multicanaux». A cet égard, les sapeurs-pompiers, et leur image positive auprès de la population, sont en mesure de contribuer à cet effort.

Notre recherche a pu mettre en lumière le cas de quelques SDIS (06, 47, 83, 95…) particulièrement actifs dans ce domaine. En effet, des sapeurs-pompiers vont au contact des élèves à l’occasion de séances d’information, de temps d’accueil périscolaires…

La sécurité civile est bien « l’affaire de tous », et « le citoyen en est le premier acteur ». La prévention des risques de toute nature est le premier objectif de la sécurité civile (article 1er de la loi du 13 août 2004 dite « Loi MOSC »). En outre, « toute personne concourt par son comportement à la sécurité civile ». La modernisation des SIS doit pourvoir s’orienter vers une approche globale et transversale de la gestion des risques, avec implication citoyenne car les services publics ne peuvent pas tout.

De ce point de vue, la contribution des SIS à la prévention permettrait une baisse des accidents et une gestion plus efficiente.

2.2.2 Pourtant, l’action des sapeurs-pompiers pourrait contribuer à l’amélioration des résultats de cette politique

2.2.2.1 L’intégration du risque routier au sein des SDIS : un devoir d’exemplarité

Plusieurs acteurs nationaux de la politique de sécurité routière (LCVR, UCLIR…) se représentent les sapeurs-pompiers comme des acteurs d’un service public qui doit être exemplaire vis-à-vis de sa propre relation avec la sécurité routière. Ce comportement collectivement vertueux légitimerait d’autant plus le message de prévention que les sapeurs-pompiers sont capables de diffuser auprès de la population.

L’intégration du risque routier au sein des SDIS peut avoir lieu en s’engageant au sein de la politique locale de sécurité routière, mais il est aussi un enjeu interne fort. Les accidents de la circulation représentaient 38 % des décès en service en 201278.

Cette sinistralité a des conséquences importantes sur le plan humain et matériel (blessures, indisponibilité des véhicules, coût financier des réparations...).

77 Entretiens avec monsieur MACHU (ONISR) et monsieur DUMONTET (MEDDE).

78 25 % accident de trajet et 13 % accident de la circulation.

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Pour la DGSCGC le montant des primes a évolué de plus de 60 % soit environ 200 EUR par véhicule et par an. La réduction du nombre d’accidents devient pour nos structures un vrai enjeu humain et financier.

Par exemple, le SDIS du Puy de Dôme a intégré la problématique de la sécurité routière dans le cadre de sa démarche de santé-sécurité au travail (Plan de Prévention des Risques Routiers - PPRR), en lien avec le Comité d’Hygiène de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT). De plus, un soin particulier est apporté à la formation des conducteurs de véhicules, dans le cadre d’un PPRR, en relation avec le CHSCT.

L’engagement des SDIS dans le domaine de la prévention des risques routiers professionnels est très disparate sur le territoire. Les départements se trouvent à des niveaux d’avancement très différents selon que l’accidentalité est identifiée par la direction comme un enjeu, ou pas. Une minorité des SDIS a mis en place un PPRR. Toutefois, nous pouvons relever que les SDIS disposent de personnels formés spécifiquement pour l’enseignement de la conduite des différents véhicules sapeurs-pompiers (niveau COD 3). Cette unité de valeur est en cours de réécriture (référentiel CMOV).

La mise en œuvre d’une réelle démarche interne globale de prévention routière est indispensable au sein des SDIS pour viser :

la baisse des conséquences corporelles sur les agents de la collectivité ; la réduction de la fréquence des mises en cause du service lors d’accidents avec des

tiers ; la préservation de l’image du service vis-à-vis des autres usagers de la route et de

l’opinion publique ;

la préservation de la capacité opérationnelle de la structure ; la réduction des coûts induits pour les établissements publics en primes d’assurances

et en réparations non couvertes.

Ceci peut être réalisé suivant plusieurs axes :

former spécifiquement les conducteurs d’engins de secours, quel que soit leur gabarit. Ainsi, les règles particulières concédées par le code de la route aux véhicules prioritaires d’intérêt général seront parfaitement connues ;

afficher la sécurité routière comme un pilier de la culture d’établissement ; acquérir des véhicules dotés des plus récentes innovations techniques (radars et

caméras de recul, dispositifs de contrôle de la motricité et de la trajectoire, aides au freinage d’urgence, dispositifs de limitation de la vitesse maximale) ;

impliquer les sapeurs-pompiers dans les actions d’information et de prévention afin de renforcer leur propre comportement par leurs actions pédagogiques.

2.2.2.2 L’apport technique des sapeurs-pompiers

Un principe : diminuer les délais opérationnels pour augmenter les chances de survie d’une victime

La victime doit être au cœur des préoccupations de l’ensemble des acteurs de la chaîne des secours.

Débutant notre recherche, il nous est rapidement apparu que certaines victimes ne décédaient pas subitement au moment de l’accident, mais plus tard. Nous pouvons donc les qualifier de « morts évitables ». En effet, l’évolution des blessures des victimes a suivi l’évolution technologique des véhicules.

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Il est aujourd’hui plus rare de porter secours à des victimes polytraumatisées aux atteintes extérieures impressionnantes (hémorragie externe importante, fracas du visage, désarticulation des membres…) que dans les années 60 à 80. En effet, ces blessures graves sont plus discrètes car souvent de nature interne, surtout causées par les décélérations importantes (traumatisme crânien, hémorragie interne, désinsertions médullaires…).

Certaines personnes décèdent également de causes d’étouffement : les liquides internes venant obstruer les voies aériennes. Ecartés les traumatismes majeurs pour lesquels les lésions rendent la survie impossible (par exemple : écrasement de la boite crânienne, désinsertion aortique ou atteintes graves du tronc cérébral…), ces principaux mécanismes causent le décès précoce de victimes de la route, à l’échelle de quelques heures.

Le secours routier est donc une lutte contre le temps. Le docteur HERTGEN, médecin-chef du SDIS du Nord, considère que « pour les morts évitables, les choses n’ont pas fondamentalement changé. La rapidité d’arrivée des secours, pour les patients les plus graves, est un facteur de réussite. Certes, nous faisons de nouveaux progrès au niveau technique, mais il y a des fondamentaux. Et dans les fondamentaux, il y a le temps ». Le docteur Jonathan CHARBIT, Responsable de l'unité régionale d'accueil des patients traumatisés sévères au département d'anesthésie réanimation « A-Lapeyronie » centre hospitalier universitaire (CHU) de Montpellier, spécialisé dans l’accueil de victimes polytraumatisées de la région Languedoc-Roussillon, ajoute que « les morts évitables actuels relèvent de cas de chocs hémorragiques. Cela nécessite donc une rapidité d’exécution et de transfert ». Ce constat est confirmé par une importante littérature scientifique.

Nous nous sommes ensuite intéressés à la « golden hour», l’heure d’or. Ce terme a été introduit en 1961 par R. Adams COWLEY79. A cette époque, le principe était d’évacuer au plus vite une victime polytraumatisée vers un centre hospitalier. Il faisait alors le constat que la prise en charge en moins d’une heure de cette victime par un chirurgien augmentait ses chances de survie.

Depuis, ce concept a été affiné, et nous apportons ici un nouvel éclairage à notre problématique : diminuer autant que possible la durée entre le moment de l’accident causant les blessures, et la prise en charge chirurgicale qui permettra de stabiliser l’état général de la victime. C’est donc un équilibre à trouver entre temps et évolution de l’état de la victime.

Adaptant le concept aux sapeurs-pompiers, le lieutenant-colonel Michel GENTILLEAU du SDIS de la Vienne et membre de la commission « extricaction and new technologies » du Comité Technique International du Feu (CTIF), simplifie cette approche : « les autres pays européens travaillent plutôt suivant le principe de la golden hour : 3 fois 20 minutes. 20 minutes pour arriver sur les lieux de l’accident, 20 minutes pour intervenir et prendre en charge la victime et donc 20 minutes pour l’évacuer vers le centre hospitalier adapté ».

De ce point de vue, la qualité du maillage territorial des CIS et la disponibilité des sapeurs-pompiers déterminent les chances de réussite de la mission, en moins d’une heure environ.

Ainsi, cette approche exige, de la part des sapeurs-pompiers, l’optimisation de toutes leurs actions lors des secours routiers, au bénéfice de la victime.

79 Chirurgien américain, pionnier dans la médecine d’urgence et dans la prise en charge des victimes polytraumatisées aux Etats-Unis.

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Prise en charge des victimes

Dans les années 1970, au niveau mondial, deux courants opérationnels se sont développés quant à la prise en charge d’une victime d’un accident routier.

Le premier que nous qualifierons de français (appelé outre-Atlantique «stay and play») consiste à médicaliser la victime sur les lieux de l’accident avant évacuation vers le centre hospitalier. Ce courant a notamment induit la mise en place des Services Mobile d’Urgence et de Réanimation (SMUR) avec un concept de médicalisation de l’avant : stabiliser l’état de la victime avant évacuation vers un centre hospitalier.

Le second, dit « américain » (concept de « scoop and run »), préconise une prise en charge minimaliste de la victime avant une évacuation rapide vers un centre hospitalier.

Une phrase 80 illustre cette doctrine : « les interventions chronophages devraient généralement être évitées afin de ne pas retarder les soins définitifs ». Ce sont des « paramedics » (infirmiers) qui réalisent quelques gestes médicaux salvateurs avant d’évacuer la victime vers un centre hospitalier.

Une étude canadienne81 conclut que le système « américain » permet d’obtenir de meilleurs résultats quant à la prise en charge de blessés lorsque le centre hospitalier n’est pas loin des lieux de l’accident. C’est donc souvent le cas dans un milieu urbain.

Une autre étude (NATHENS AB, BRUNET FP et MAIER RV 2004) menée en 2004, comparant les soins pré-hospitaliers américains et français suggère des taux de mortalité équivalents. Elle n’a pu prouver qu’un système soit meilleur que l’autre.

Le docteur Patrick HERTGEN, pense « qu’il ne faut pas faire de dogmatisme dans ce domaine. L’état de la victime, les conditions générales de l’intervention, les moyens disponibles doivent nous permettre d’utiliser telle doctrine ou telle autre ».

Dans l’attente de résultats d’une nouvelle expérimentation dans ce domaine, nous pouvons rechercher les bonnes pratiques au niveau international. Par exemple en Suède, une méthode de classification des blessés après le bilan secouriste est en application :

A. indemne ou légèrement blessé, aucun signe de blessure au dos ni au cou. B. lésions soupçonnées au dos ou au cou. Les constantes sont bonnes. C. lésions soupçonnées au dos ou au cou. Victime piégée ou incarcérée. D. blessures graves. Victime non piégée. E. blessures très graves. Victime incarcérée. F. personne décédée.

A partir de cette classification, il est possible de déterminer les priorités, le tempo de l’opération d’évacuation et les techniques déterminantes pour la survie des victimes.

Cela pourrait se traduire dans notre organisation de la manière suivante. Les primo intervenants, venant d’arriver sur les lieux, doivent faire un diagnostic en « lisant » l’accident simplement à partir de questions et des observations. Les premiers chefs d’agrès et ensuite le chef de groupe doivent pouvoir évaluer et comprendre la situation afin de déterminer les victimes à évacuer rapidement et les efforts à porter prioritairement.

Nous pensons que cette classification peut être un outil complémentaire pour décider, par exemple, d’une désincarcération d’urgence.

80 Resources for optimal care of the injured patient – Committee on trauma American college of surgeons – 2014.

81 Pro/con debate: Is the scoop and run approach the best approach to trauma services organization ? Barbara HAAS, Avery B NATHENS – Critical Car – 10 septembre 2008.

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Nous soulignons ici, toute l’importance du rôle du COS et la nécessité qu’il a de disposer de solides compétences, dans les domaines du secours d’urgence aux personnes et du secours routier, pour coordonner l’action de tous les acteurs opérationnels.

Nous avons pu identifier que certains SDIS (12, 34, 68, 84...) mettent en place pour les sapeurs-pompiers ou pour les personnels du SSSM, une approche globale, technique et pédagogique différente au profit des victimes traumatisées : la méthode Pré-Hospital Trauma Life Support (PHTLS). Cet enseignement et ces techniques pourraient permettre une meilleure prise en charge de ces victimes. Une différence notable par rapport aux techniques conventionnelles consiste à davantage considérer les circonstances de l’accident (cinétique du choc, équipements de protection pour le motard…).

Exemple d’expérimentation au SDIS de Lot-et-Garonne

Concernant le secours routier, des démarches innovantes ont été mises en œuvre par le SDIS 47, en « mode projet », par lettre de mission du DDSIS 47 au capitaine Denis AJAGAMELLE, adjoint au chef du CSP AGEN. Le SDIS 47 a souhaité remettre en question son approche du secours routier. Liée directement aux mesures prises en matière de politique publique de sécurité routière ces dernières années, l’activité « secours routiers » a connu une baisse significative en 2013 dans le Lot-et-Garonne, puis une hausse en 2014.

Cependant, si le nombre d’opérations nécessitant une désincarcération reste à peu près constant, les durées d’intervention apparaissent de plus en plus longues, car plus techniques.

Avec près de 1300 interventions par an (moyenne des trois dernières années), la sollicitation pour les missions de secours routiers reste significative pour le SDIS 47, si bien que des évolutions sont envisagées pour cet établissement.

De plus, l’exemple d’un retour d’expérience (cf. photo ci-dessous) mené à l’issue d’une intervention mettant en cause un véhicule hybride et un véhicule à énergie classique a permis de mettre en avant les problématiques suivantes :

prise en charge des victimes : l’état de santé des victimes du véhicule hybride, compte tenu de l’intégrité de l’habitacle, a été mal jugé. La passagère de ce véhicule transportée non médicalisée, souffrait de lésions du mésentère et de l'intestin diagnostiquées à son arrivée en structure hospitalière ;

prise en compte de la source d’énergie (découverte tardive de la motorisation par méconnaissance, câbles HT détériorés, « surpercapacité » perforée). Le marquage « bleu » des véhicules hybrides ou électriques n’est pas encore intégré par le personnel ;

absence de gants isolants permettant une intervention sans risque sur le véhicule hybride ;

enlèvement du véhicule : lors de la prise en charge du véhicule par le dépanneur, la manœuvre de remorquage proposée (train avant soulevé et train arrière au contact), était de nature à produire de l’électricité pendant le remorquage avec un risque de court-circuit.

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Figure 7 accident d'un véhicule Hybride (photo SDIS 47)

Cette démarche innovante du SDIS 47 peut être retenue comme une bonne pratique. Elle peut être comparée à l’évolution des techniques opérationnelles qui avaient été constatée, il y a quelques années, lorsque des véhicules avec réservoir de GPL étaient apparus sur les routes françaises. Des cas d’explosion (BLEVE) avaient été constatés, en l’absence de soupape de sécurité sur certains véhicules.

Evolution des techniques

Les sapeurs-pompiers confrontés à l’émergence de nouveaux risques liés à l’évolution des véhicules ont pris des initiatives.

Face à ces constats, des SDIS ont travaillé sur la thématique du secours routier parfois individuellement, parfois en réseau.

Les SDIS de la Loire-Atlantique (44) et de la Vienne (86) ont ainsi eu une approche globale au niveau départemental :

partenariats avec des constructeurs automobiles et d’outils de forcement, de coupe et de levage pour perfectionner leurs techniques de secours routier ;

réflexion sur la réalisation des missions ; création d’une Marche Générale Opérationnelle (MGO) spécifique au secours routier ; définition de niveaux de mission spécifiques par catégorie de centre de secours ; réflexion sur la répartition des moyens dans les CIS, dans le cadre du SDACR et du

RO ;

conception de formations spécifiques pour les formateurs de formateurs en secours routier et ensuite des sapeurs-pompiers du département.

Un guide a été rédigé. Il sert aujourd’hui de base à de nombreux SDIS en France qui ont envoyé un ou plusieurs agents se former dans la Vienne.

Devant ce défaut de doctrine opérationnelle identifié par les SDIS, la DGSCGC a mis en place un Comité National Technique et Pédagogique de Secours Routier (CNTPSR), chargé de proposer des recommandations en la matière. Il semble que la doctrine issue de ce guide rencontre une large adhésion.

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Collaboration avec les constructeurs de véhicules

Aujourd’hui les constructeurs français, après avoir été largement contactés par les sapeurs-pompiers à la recherche d’informations sur les systèmes de sécurité, prennent de plus en plus en compte les problématiques de ces derniers. Ainsi, les constructeurs français semblent être les premiers à compléter l’éventail de leurs solutions par la sécurité tertiaire.

L’exemple d’intégration des sapeurs-pompiers à la politique de sécurité routière du constructeur RENAULT est remarquable, et caractérise une « bonne pratique ». Grâce à un partenariat initié par le SDIS 67, puis désormais avec le concours de la Fédération Nationale de Sapeurs-Pompiers de France (FNSPF), le constructeur français de véhicules collabore véritablement avec les sapeurs-pompiers. Nous avons pu échanger plusieurs fois avec le docteur Claire PETIT-BOULANGER, chef de projet sécurité routière, et participer à une conférence sur le site du siège, au mois d’avril, en région parisienne.

De nombreux travaux ont été engagés par le constructeur, étayés par l’expertise des sapeurs-pompiers. On peut citer les Fiches d’Aide à la Désincarcération (FAD), les Emergency Response Guides (ERG82), le projet Quo Vadis83, les rescue code84.

Dans le domaine de la sécurité tertiaire (après le choc et jusqu’à l’arrivée des secours), nous retiendrons celui des solutions de sécurité mises en place pour les batteries d’un véhicule électrique (modèle RENAULT ZOE). La collaboration avec les sapeurs-pompiers des Yvelines a permis de mettre en évidence une problématique particulière d’extinction de feu de batteries. Une trappe spéciale (fireman access85) a été conçue et intégrée en amont, dans l’architecture et l’assemblage du véhicule électrique. Sans cette collaboration en amont, dès le cahier des charges, il aurait fallu attendre les premiers incendies et le constat des difficultés opérationnelles pour définir en urgence des parades souvent complexes et coûteuses. Madame Claire PETIT-BOULANGER estimait avec beaucoup de lucidité que si la sécurité intégrée n’est pas forcément un argument d’achat pour le client, l’absence de sécurité constitue indéniablement un argument de non-vente, et une dégradation durable de l’image de la compagnie.

Actuellement, RENAULT a signé des conventions avec à peu près la moitié des SDIS de France, et à ce titre, a fourni plus de 250 véhicules neufs à des fins de réalisation de véhicules pédagogiques ou pour des exercices de désincarcération. Toutefois, selon notre interlocutrice, le niveau d’hétérogénéité et le mode de gouvernance des SDIS sont des facteurs pénalisants pour le développement de leur implication dans la mise en œuvre de la politique de sécurité routière. Des contacts récents pris entre RENAULT, l’ENSOSP et la FNSPF nous permettent d’espérer des progrès dans le domaine.

2.2.2.3 L’apport technique de la prévention des incendies et de la RCCI

Historiquement, les sapeurs-pompiers sont très impliqués dans l’élaboration de la réglementation contre les risques d’incendie dans les ERP et les IGH. A partir du début du 20ème siècle, les feux dramatiques comme celui du Bazar de la Charité à Paris en 1897 ou des Nouvelles Galeries à Marseille en 1938, ont engendré une réglementation contre l’incendie tout d’abord locale dans les grandes villes (ordonnance du préfet de police de 1906 à Paris), puis nationale avec la parution du premier règlement de sécurité le 7 Février 1941.

82 Document explicitant les principes d’intervention selon l’incident intéressant le véhicule.

83 Etude menée sur 3 départements (78, 63, BSPP) visant à l’analyse in situ des accidents routiers par les sapeurs-pompiers. Les résultats sont traités et analysés par le LAB (unité de recherche de RENAULT). L’étude est financée par la Fondation de France.

84 QR code placé sur une vitre du véhicule permettant d’accéder directement à la FAD.

85 Accès pompiers.

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Au fil du temps la réglementation s’est enrichie par une compilation de textes qui se veut exhaustive et qui met toujours en avant le pouvoir de police du maire. Sur l’impulsion et le retour d’expérience des sapeurs-pompiers complété par les données statistiques, une maîtrise du risque a pu être atteinte, tout en préservant les équilibres politiques et économiques.

Par courrier du 6 août 2013, les ministres concernés ont demandé une mission d’évaluation de la prévention du risque d’incendie dans les ERP et les IGH, à l’IGA, au Conseil général de l’environnement et du développement durable, et à l’Inspection générale des affaires sociales. Ce courrier cite la circulaire du Premier ministre, en date du 7 janvier 2003, relative à l’évaluation des politiques publiques. Un rapport d’évaluation 86 a été rendu. Il sert actuellement de base à notre ministère de tutelle pour la conduite des évolutions de cette réglementation, qui ne va pas vers un durcissement87. Un deuxième rapport88 du Conseil général de l’environnement et du développement durable a également été produit.

Selon cette même logique, l’exemple de l’émergence de la démarche de Recherche des Causes et des Circonstances des Incendies (RCCI) dans les SDIS doit être souligné. En effet, de nombreux points communs peuvent être soulevés, entre la sécurité routière et la sécurité incendie (techniques, statistiques, opérationnels, interservices…).

Désormais reconnue au plan national, cette nouvelle discipline constitue le maillon manquant de la chaîne itérative, incrémentale et vertueuse de gestion d’un risque : prévention, prévision, opération, retour d’expérience et RCCI, prévention… Dans cette boucle, le volet répressif n’est pas abordé, mais un point de contact est prévu entre gestion du risque accidentel, et répression des comportements délictueux, par la possible contribution des sapeurs-pompiers investigateurs aux enquêtes judiciaires. Une convention tripartite (préfet, procureur, SDIS) peut être établie.

Par cette démarche RCCI, il s’agit d’affirmer le rôle essentiel de la prévention et du retour d’expérience dans la gouvernance des SDIS, en particulier grâce à des actions possibles en faveur de la maîtrise des risques, au service de l’intérêt général. Une meilleure connaissance étiologique du phénomène incendie doit permettre une diminution de l’occurrence et de la gravité de cet évènement non souhaité, sur le plan humain, environnemental et économique, à l’instar des principes de la politique publique visant à maîtriser le risque routier.

L'activité RCCI ne constitue pas une mission obligatoire du SDIS au sens de l'article L.1424-2 du CGCT, mais elle est complémentaire et facultative pour le SDIS. Pour atteindre ces objectifs, la RCCI met en œuvre une méthodologie et des techniques décrites dans la circulaire interministérielle du 23 mars 2011. A l’heure actuelle 36 SIS ont engagé une démarche de RCCI.89

Cette démarche singulière, à la fois scientifique et heuristique, suscite un véritable engouement en interne, comme en externe, et répond à un réel besoin d’analyse et de compréhension globale des causes et circonstances des incendies de bâtiments, qui provoquent chaque année environ 600 morts en France.

86 www.interieur.gouv.fr : 14047-13083b-01-prevention-incendie-immeubles-grande-hauteur.pdf

87 Cf. « lois de Rolland » : principe de mutabilité du service public qui doit s’adapter en permanence aux besoins de la société.

88 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/154000046.pdf

89 Source Bureau de la Réglementation Incendie et des Risques Courants (BRIRC).

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Le facteur pénalisant, à cet instant, est l’absence de base de données nationale, qui devra permettre cette analyse sur des volumes d’interventions représentatifs. Cette base de données est toutefois en phase de tests, et devrait être déployée prochainement90.

En somme, les points de comparaison entre la gestion du risque incendie et du risque routier sont donc nombreux, nous inspirent, et semblent nous suggérer une certaine légitimité. Grâce à l’engagement des sapeurs-pompiers, un niveau de maîtrise du risque a pu être atteint, dans le domaine de la prévention du risque incendie/panique dans les ERP/IGH, même si des efforts importants restent encore à accomplir dans le domaine de la prévention du risque incendie dans les bâtiments d’habitation et dans celui des accidents domestiques.

La démarche entreprise dans le cadre de la RCCI participe d’une logique de compréhension d’un phénomène pour l’appréhender plus finement et ainsi mieux le prévenir.

Appliquée au domaine de la sécurité routière, nous pourrions envisager, à l’identique, des investigateurs formés spécifiquement, et qui seraient dépêchés sur les lieux des accidents pour en faire l’analyse et en déterminer les causes, en relation avec l’autorité judiciaire. La somme des données collectées alimenterait une base de données partagée, en interne et avec les autres services concernés.

A l’appui de ces analyses, les sapeurs-pompiers pourraient apporter des contributions éclairées dans les instances locales ou nationales où ils auraient à siéger.

Pour conclure sur ce sujet, nous souhaitons ajouter que le groupe a eu l’opportunité de s’entretenir avec le colonel (ER) Dominique PARISSE, ancien chef d’état-major de la Brigade de Sapeurs-Pompiers de Paris (BSPP). Il a réalisé une étude sur les statistiques d’incendies de bâtiments en France, et en particulier sur le nombre de blessés et de morts. De nombreuses comparaisons peuvent, là aussi, être établies entre gestion du risque incendie et gestion du risque routier.

Lorsque les sapeurs-pompiers sont en situation de pouvoir s’exprimer au plan national, et qu’ils le font d’une manière coordonnée et réfléchie, des résultats sont obtenus.

Le colonel Dominique PARISSE pense que les sapeurs-pompiers ont un rôle à jouer dans la politique nationale de sécurité routière, en étant présents et en portant une parole claire et unanime. Il considère qu’il serait intéressant également de disposer dans les SDIS de services capables d’observer en permanence le nombre, la gravité, les causes et les circonstances des motifs d’appels 18. Cette veille permettrait de contribuer à la régulation des demandes de secours et de proposer des actions de sécurisation et de prévention. Il s’agit là d’un principe connu dans le domaine de la gestion des risques, et qui peut parfaitement être reconnu dans le sujet de la sécurité routière. Les sapeurs-pompiers, grâce à leur nombre et au maillage territorial, ont cette aptitude à réaliser ce suivi permanent et bienveillant.

90 Commandant MALHER (BRIRC) – DGSCGC.

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2.2.2.4 Les perspectives en matière de gestion de l’alerte

Nous avons pu souligner l’importance de la phase de prise d’appel et de traitement de l’alerte.

Une étude réalisée par la FNSPF 91 énumère les numéros d’appel d’urgence utilisables à l’heure actuelle : 15, 17, 18, 112, 114… Ce choix trop important est source de confusion pour l’utilisateur, en particulier en situation d’urgence. La FNSPF argumente en faveur d’un numéro d’appel unique, le 112, aboutissant sur des plateformes mutualisées.

Les SDIS de France disposent d’au moins un Centre de Traitement de l’Alerte (CTA), voire plusieurs dans certains cas. Ce service opérationnel est chargé de traiter l’appel et de le convertir en départ de secours adaptés, au moyen d’un système informatique de gestion opérationnelle relié avec les unités opérationnelles. Ensuite, l’opération de secours est supervisée par le Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours (CODIS). Le plus souvent, les deux entités sont installées dans les mêmes locaux.

Certains départements ont fait le choix d’une mutualisation plus poussée, parfois depuis de nombreuses années. Ainsi, l’étude de la FNSPF dénombre 19 centres communs 15/18 (SAMU et SDIS), dont 5 virtuels. Cette tendance se confirme, car 9 autres plateformes communes sont en projet.

Le numéro d’appel 112 est reçu par les SDIS dans 62 départements, sur une plateforme commune pour 19, et au SAMU dans 15 autres.

A partir de 2013, la BSPP a engagé une expérimentation de regroupement des plateformes 17 et 15/18. La Préfecture de Police de Paris, mettra en place une réception unifiée des appels d’urgence à compter du mois de janvier 2016. Début 2015, le ministère de l’Intérieur a engagé une réflexion dans ce domaine, pour le territoire national92.

Les Agences Régionales de Santé (ARS), la police et la gendarmerie nationales suivent également cette tendance avec le rapprochement de plateformes au niveau régional.

Un groupe de travail national (GT 399) œuvre93 au développement d’une normalisation des logiciels de sécurité civile, en vue notamment de faciliter l’interopérabilité.

Les mutualisations et l’interopérabilité des bases de données augmentent la quantité et la qualité des données. Cette combinaison peut permettre d’extraire de nouvelles analyses prédictives et envisager ainsi une diminution significative du nombre d’accidents, par exemple.

Dans ces plateformes mutualisées aboutiront les appels « emergency calling » (E-call)94. A partir de 2018, la France devra réceptionner l’appel directement émis par le véhicule accidenté. L’objectif est de réduire le temps d’alerte et ainsi d’augmenter les chances de survie des victimes.

Selon monsieur Christophe RAMOND, directeur des études et recherches à l’Association Prévention Routière, ce nouveau système pourra aider les sapeurs-pompiers à progresser dans les conditions de la prise en charge précoce des victimes de la route. Il considère que notre système de réception des appels d’urgence sur le territoire est trop disparate, et qu’il gagnerait à être uniformisé.

91 FNSPF – Gestion des appels d’urgence, pour la création de plateformes communes 112. Septembre 2015.

92 Discours du ministre de l’Intérieur lors du congrès de la FNSPF, fin septembre 2015 à AGEN.

93 Piloté par la DGSCGC.

94 A bord d’une automobile, dispositif d’appel automatique des secours en cas d’accident.

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Il pense que les sapeurs-pompiers ont leur place dans toute la chaîne du secours, et que des actions innovantes et collaboratives pourraient être développées.

Le gain financier de cette mesure de simplification et de mutualisation est estimé au niveau national à 100 Mio EUR95.

Cette unification et cette concentration aurait toutefois pour inconvénient une perte de proximité. Les opérateurs se trouveraient plus loin des centres d’intervention et ne pourraient plus connaître particulièrement les points remarquables du terrain. Ce dernier aspect pourrait être compensé par un système d’information géographique (SIG) performant et par les communications internes vers les unités territoriales de proximité.

2.2.2.5 Estimation de la pertinence de la contribution des sapeurs-pompiers

Des morts évitables ?

A ce stade de l’étude nous pouvons nous poser la question suivante : les secours peuvent-ils sauver plus de vies, alors même qu’ils agissent déjà avec efficacité ?

Nous estimons que des résultats meilleurs sont possibles, si l’action de l’ensemble des acteurs de la chaîne des secours est concertée et optimisée. Néanmoins, nous n’avons pas trouvé d’étude menée en France portant sur ce domaine. Par contre, une importante littérature publiée depuis la fin des années 90, au niveau mondial, précise que 20 à 30%96 de victimes polytraumatisées décédées après une heure le sont suite à un étouffement ou à un traumatisme interne de type hémorragique ou désinsertion médullaire. Ce pourcentage est confirmé par le professeur Claude GOT.

Faisant un rapide calcul en utilisant le taux de 20% (20% x 3384 morts en 2014), nous pouvons dire qu’une chaîne de secours efficace en tout point pourrait éviter jusqu’à 675 morts par an en France. Évidemment en améliorant le fonctionnement de tous les acteurs, nous pouvons penser que la prise en charge des blessés sera meilleure et que les séquelles seront moindres. Nous pouvons également supposer que toutes les victimes polytraumatisées bénéficieront de cette efficacité.

Nous estimons donc jusqu’à 675 le nombre de morts évitables chaque année si la chaîne des secours est complètement optimisée.

Au-delà de la démarche intéressant la réduction du nombre des morts, il est nécessaire d’ouvrir un champ d’analyse sur la réduction du nombre des blessés, de la gravité de leurs atteintes et du coût induit pour la société. « Il sera ainsi possible d’étudier les voies pour passer d’une politique de gestion du nombre des morts à une politique des gestion du nombre des blessés graves, puis du nombre des blessés légers et in fine de gestion du nombre des accidents.97 »

Des économies ?

L’implication des sapeurs-pompiers dans la politique de sécurité routière peut entrainer des coûts supplémentaires pour les SDIS qu’il est difficile d’évaluer précisément. Un éventuel surcoût peut être compensé par des gains financiers aussi bien pour la structure que pour l’ensemble de la société.

95 Source FNSPF.

96 Committee on trauma american college of surgeons. “Ressources for optimal care of the injured patients” 2014

B.Vigué, K. Tazarourte lors du 52ème congrès national d’anesthésie et de réanimation « Prédiction et mortalité annoncée en traumtologie » 2010.

97 Discours du colonel FAURE 08 avril 2015 Séminaire de sécurité tertiaire techno-centre RENAULT

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En effet, la baisse des interventions pour secours routiers a une influence directe sur les dépenses des SDIS. Prenons comme exemple la baisse du nombre d’interventions entre 2003 et 2013. Cette diminution de 60 116 interventions a représenté une économie financière pour l’ensemble des SDIS de plus de 75 Mio98 EUR.

Au niveau national, nous avons vu que les conséquences des accidents de la route faisaient peser un poids financier important sur la société, à hauteur de 2,3 % du PIB national.

Dans les paragraphes précédents nous avons estimé que 675 morts sont évitables chaque année, dans le meilleur des cas, si la chaîne des secours est complètement efficace. Si on évalue d’un point de vue strictement financier la perte de ces vies, sur la base de 3 Mio EUR par vie99, le gain pour la société s’élèverait à 2,025 Mrd EUR.

2.3 Retour sur les hypothèses de recherche

Notre phase de recherche et d’analyse se terminant, le moment est venu de la synthétiser en faisant un retour sur chacune des hypothèses.

Hypothèse n°1 :

Si nous observons l’organisation de la politique nationale de sécurité routière, alors nous constatons que les sapeurs-pompiers ne sont pas suffisamment impliqués.

Retour sur Hypothèse n°1 :

Il nous est apparu deux aspects bien distincts quant à la participation des sapeurs-pompiers à la politique nationale de sécurité routière :

les sapeurs-pompiers ne sont pas associés à la conception de la politique ; cette politique est déclinée au plan local, avec les sapeurs-pompiers, mais de manière

inégale et disparate.

La conception et le contrôle de cette politique se trouvent centralisés au niveau ministériel. La décision relève du gouvernement parfois même de la présidence de la République Française. Les sapeurs-pompiers n’y sont pas associés malgré leur présence au sein du ministère de l’Intérieur.

Cette politique est déclinée et mise en œuvre au niveau local. Nous avons observé que les sapeurs-pompiers y participaient. Toutefois, il est à noter que leur implication est plus ou moins importante en fonction des départements.

Enfin, nous avons pu vérifier que l’accident et le traitement des conséquences de ce dernier ne sont pas considérés comme faisant partie intégrante de la sécurité routière. C’est que nous qualifions de « zone d’aveuglement ».

L’hypothèse n°1 est vérifiée et validée.

98 Le coût moyen d’une intervention sapeur-pompier pour un secours routier est estimé à 1 248 EUR. 99 Référence 2013 du coût de la vie humaine (Commissariat Général à la Stratégie et à la Prospective).

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Hypothèse n°2 :

Si nous observons l’organisation des sapeurs-pompiers de France, alors nous constatons qu’ils disposent de compétences et de moyens permettant de nouveaux leviers d’action pour la sécurité routière.

Retour sur Hypothèse n°2 :

Les sapeurs-pompiers interviennent quotidiennement pour secourir les accidentés de la route. Leurs interventions se situent à partir de la prise d’appel d’urgence jusqu’à l’évacuation des victimes vers un centre hospitalier. Ils participent à sauvegarder des vies et à diminuer les conséquences des accidents routiers au sein de la chaîne des secours.

Au regard de leur organisation, de leurs compétences et des évolutions techniques, ils peuvent améliorer les résultats de la politique nationale de sécurité routière et réduire de manière notable la mortalité.

Les sapeurs-pompiers sont des acteurs singuliers qui ont dans leur culture le travail en interservices dans les domaines de la planification, de la prévention, de l’opération ou de la gestion des crises. Ils ont une bonne connaissance des autres services et se trouvent en capacité de travailler avec eux et d’augmenter par leurs expériences du terrain l’intelligence collective nécessaire à l’élaboration et à la mise en œuvre de cette politique.

L’hypothèse n°2 est vérifiée et validée.

Le chapitre suivant est consacré à la formulation de préconisations, basées sur les travaux réalisés précédemment. Les cadres les plus épais soulignent celles qui nous paraissent prioritaires.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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2.4 Les préconisations : vers une complète intégration de l’expertise des sapeurs-pompiers de France

2.4.1 Selon l’axe politique de la politique nationale

2.4.1.1 La place des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière

Nous avons mis en évidence que les sapeurs-pompiers sont absents de l’ensemble des instances de décision de la politique nationale de sécurité routière alors que de nombreux acteurs sont impliqués : gendarme, police, associations, constructeurs, gestionnaires de route…

L’absence des sapeurs-pompiers au CNSR est particulièrement surprenante car cette instance est lieu d’échange où l’on retrouve les différents acteurs impliqués dans le domaine de la sécurité routière. Or nous avons montré que nous sommes impliqués comme acteur de cette politique, nous pensons donc que les sapeurs-pompiers ont leur place au sein de cette instance.

PRECONISATION n°1 :

Intégrer les sapeurs-pompiers dans les instances nationales compétentes en matière de sécurité routière.

Coût : 80 000 EUR/an dans l’hypothèse de la mise à disposition permanente d’un officier supérieur

2.4.1.2 Le partage des données et leur communication

Le rapport de l’IGA de juillet 2014 prône le renforcement du dispositif statistique et de l’ONISR : « La politique de sécurité routière est basée sur une analyse de l’accidentalité qui permet d’orienter les actions menées. Toutefois cette connaissance est insuffisante : non connaissance de la gravité des blessures, sous-comptabilisation des blessés notamment cyclistes, analyse moins fréquente des circonstances des accidents… ». Les sapeurs-pompiers peuvent participer à enrichir les données statistiques d’accidentalité au niveau national grâce aux données collectées dans les CRSS. L’exemple mené dans le Rhône pourrait être repris et étendu au niveau national.

PRECONISATION n°2 :

Prendre en compte les données concernant les victimes en possession des SIS et des ARS afin de mieux comptabiliser les blessés d’accidents de la route.

Coût : aucun

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Néanmoins, même si les sapeurs-pompiers possèdent ces données, elles ne sont pas exploitables aujourd’hui directement par l’ONISR car trop éloignées des fichiers BAAC. Monsieur MACHU, secrétaire général adjoint de l’ONISR, a évoqué la possibilité d’une expérimentation menée par l’IFSTTAR.

PRECONISATION n°3 :

Réaliser une étude de faisabilité, avec l’IFSTTAR, permettant aux données des SIS d’être intégrées aux fichiers d’accidentalité.

Coût : aucun pour les SIS car financement possible par l’ONISR

Les modes de comptabilisation des blessés en cours d’harmonisation en matière de sécurité routière pourraient être transposés aux autres domaines de risques, comme par exemple l’incendie en habitation, où la comptabilité des morts et des blessés n’est pas fiable. Cette évolution faciliterait la comparaison de l’efficacité des politiques publiques.

PRECONISATION n°4 :

Poursuivre l’harmonisation des modes de comptabilisation des blessés en l’étendant aux autres risques à des fins de comparaison des effets des politiques publiques.

Coût : aucun

2.4.1.3 La valorisation des SIS auprès des autorités

Nous avons constaté, grâce à nos recherches, que la montée en puissance des SIS avait permis l’émergence de solutions innovantes et de bonnes pratiques. Or, celles-ci éprouvent des difficultés à être rassemblées au plan national, et à être valorisées auprès des autorités.

PRECONISATION n°5 :

Fédérer l’action des SIS afin d’en permettre le rayonnement auprès des autorités.

Coût : aucun

2.4.1.4 La cohérence des différents schémas directeurs de planification

L’organisation des secours ne relèvent pas que des seuls SIS. Une chaîne de secours efficace passe par la cohérence de son organisation. Lorsqu’une autorité décide de la création d’un nouvel axe de communication routier, de la fermeture d’un bloc opératoire ou d’un centre de secours, les études d’impact croisées pour les autres services intervenants ne sont pas systématiquement menées.

PRECONISATION n°6 :

Mettre en cohérence les différents schémas directeurs de planification, notamment lors de la modification du maillage territorial des centres de secours.

Coût : non évaluable à ce stade

Il nous apparaît donc nécessaire que l’ensemble des plans traitant de l’analyse, de la couverture des risques routiers et du secours pour les victimes de la route soient coordonnés avec les plans d’aménagement des territoires. Il s’agit pour nous d’un choix stratégique pour créer une véritable synergie interservices au bénéfice des usagers de la route.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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2.4.1.5 L’implication des SIS au niveau local et les bonnes pratiques

Notre recherche a montré que l’implication des SIS dans la mise en œuvre locale de la politique publique était très inégale. Les préfets pourraient être encouragés à impliquer les sapeurs-pompiers dans la politique départementale de sécurité routière.

PRECONISATION n°7 :

Inciter les préfets à impliquer les SDIS dans la politique départementale de sécurité routière.

Coût : aucun

Un sapeur-pompier pourrait être identifié comme réfèrent au sein du SDIS et siéger au pôle de compétence État.

PRECONISATION n°8 :

Désigner un chargé de mission sécurité routière dans tous les SDIS.

Coût : aucun

De plus, nous avons montré que l’implication des sapeurs-pompiers dans l’élaboration des PDCR pouvait permettre de mieux déterminer les zones à risques et les contrôles.

PRECONISATION n°9 :

Associer les SIS à l’élaboration des PDCR.

Coût : aucun

Notre recherche a montré également que des initiatives locales tout à fait pertinentes sont mises en œuvre. Pourtant, celles-ci peinent à sortir du périmètre départemental, alors même qu’elles pourraient inspirer d’autres SDIS. De ce point de vue, il nous semble judicieux que la conduite de cette politique publique permette l’émergence et la communication des bonnes pratiques.

PRECONISATION n°10 :

Organiser le pilotage de la politique publique de sécurité routière, en permettant notamment l’émergence et la diffusion des bonnes pratiques des sapeurs-pompiers.

Coût : aucun

2.4.1.6 Les partenariats et l’innovation

Nous constatons que l’IFSTTAR et l’ENSOSP se trouvent géographiquement proches. En effet, l’IFSTTAR a deux laboratoires au sein de son département transport santé et sécurité dans les Bouches du Rhône, à Salon-de-Provence et à Marseille. L’ENSOSP principalement basée à Aix-en-Provence dispose d’outils pédagogiques tels que le SIMURGE ou le plateau technique permettant la simulation d’accidents et la prise en charge de victimes. Il nous apparaît évident que nous avons là des éléments pour développer une véritable synergie entre ces deux établissements.

PRECONISATION n°11 :

Développer un partenariat entre l’ENSOSP et l’IFSTTAR.

Coût : aucun

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Ce partenariat pourrait être actif sur plusieurs sujets en particulier autour de la sécurité tertiaire :

adapter les recueils et l’analyse des données pour mieux connaitre les phénomènes d’accident et les conséquences sur l’homme ;

augmenter la connaissance sur les lésions et améliorer les techniques et les matériels pour prendre en charge une victime accidentée de la route ;

développer des outils ou des techniques à bord des véhicules facilitant l’action des secours ;

améliorer l’organisation et les techniques de traitement d’un accident.

L’implication des sapeurs-pompiers très en amont, dès la conception des véhicules, est de nature à permettre une plus grande efficacité opérationnelle.

PRECONISATION N°12

Normaliser la sécurité tertiaire des véhicules au niveau européen par des relations partenariales avec les constructeurs de véhicules et les équipementiers.

Coût : non évaluable à ce stade

A titre d’exemple, des parties faibles permettant aux acteurs du secours de pénétrer facilement et en sécurité dans le véhicule et d’en extraire rapidement et sûrement les victimes pourraient être prévues à la conception des véhicules.

La couleur et les emplacements des dispositifs de sécurité pourraient être normalisés.

2.4.2 Selon l’axe de l’organisation des SIS

2.4.2.1 L’unification de la prise et la gestion des appels d’urgence

Le principe de disposer sur tous les territoires de plateformes d’appel d’urgence interconnectées n’est pas suffisant pour assurer une complète efficacité de l’engagement des secours.

PRECONISATION n°13 :

Mettre en place un numéro d’appel d’urgence unique : le 112.

Coût : non évaluable à ce stade

Les populations européennes et plus particulièrement françaises n’auraient qu’un seul numéro à retenir, ce qui faciliterait l’apprentissage et l’éducation des populations. De plus, cela permettrait de concentrer les coûts de formation et de communication sur ce seul numéro. Une modification de l’article R231-1 du code de la route, relatif à l’alerte en cas d’accident serait alors nécessaire.

Un seul numéro obligerait les centres d’appel existants à se structurer et à se concentrer, favorisant le développement de plateformes communes interservices. Cette mutualisation permettrait une augmentation synergique des compétences et du niveau d’expertise.

PRECONISATION n°14 :

Mutualiser les plateformes de réception des appels d’urgence.

Coût : non évaluable à ce stade

Gain : 100 Mio EUR/an (évaluation FNSPF)

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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L’accès au fichier national des immatriculations permettrait d’obtenir rapidement des informations utiles à l’intervention, comme par exemple l’énergie du véhicule, le nombre de places à bord, les ERG, les FAD…

PRECONISATION n°15 :

Donner aux opérateurs des plateformes de réception des appels d’urgence un accès facile au fichier national des immatriculations.

Coût : non évaluable à ce stade

2.4.2.2 Démarche d’amélioration continue

PRECONISATION n°16

Mettre en place au sein des SIS une démarche d’amélioration continue particulière au secours routier.

Coût : aucun

La phase pré-évènementielle ou pré-accidentelle est constituée de tous les moments et les causes qui vont aboutir à la survenue de l’accident. Pour les SIS cette phase doit être propice à plusieurs actions de :

prévention à destination des personnels ;

préparation des personnels par la formation initiale et la formation continue ; préparation des matériels par le contrôle et l’entretien ; participation à la réflexion et à l’amélioration des secours et de la sécurité routière.

La phase événementielle est le moment de l’accident. A ce moment-là, les SIS ne sont pas acteurs de l’évènement. Par contre, une fois sollicités, ils doivent veiller à arriver sur les lieux de l’accident en évitant la survenue d’un autre accident à leur passage. L’exemplarité des secours à se déplacer en situation urgente est un impératif.

La phase post événementielle est pour nous dans un premier temps la phase de mise en œuvre de la chaîne des secours. C’est là, le « cœur de métier » des SIS : réceptionner et traiter l’alerte, intervenir, évacuer une ou plusieurs victimes selon le cas. A l’issue les services d’incendie et de secours doivent poursuivre leur action dans le domaine de la recherche des causes et circonstances de l’accident, du retour d’expérience, de la communication interne et externe.

2.4.2.3 Les techniques opérationnelles et la formation

La phase de reconnaissance et d’évaluation est essentielle sur un accident de circulation. Il est nécessaire que les sapeurs-pompiers puissent avoir suffisamment de compétences et de connaissances pour évaluer le degré de gravité des blessures des victimes. Cela passe par un renforcement des savoirs dans le domaine du secours routier. Ils doivent pouvoir qualifier l’état de la victime et adapter leurs actions.

PRECONISATION n°17 :

Expérimenter de nouvelles techniques opérationnelles et de formation orientées vers une prise en charge, une désincarcération et un transport plus rapides.

Coût : non évaluable à ce stade

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Enfin, les meilleurs résultats concernant la prise en charge médicale d’une victime résultent de la collaboration efficace des différents intervenants sapeurs-pompiers, police ou gendarmerie, service des routes et service médical. C’est pourquoi, il nous apparaît nécessaire de concevoir et de mettre en place des séquences pédagogiques partagées entre les acteurs des différents services (par exemple la mission partagée de balisage).

PRECONISATION n°18 :

Généraliser les exercices opérationnels de proximité en interservices de niveau « risque courant ».

Coût : aucun

2.4.2.4 Les PPRR dans les SDIS

Nous avons vu que l’engagement des SDIS dans le domaine de la prévention des risques routiers était faible au niveau national. Afin de répondre à un enjeu fort d’accidentalité interne et d’être exemplaire vis-à-vis des autres services, il nous semble essentiel de généraliser les PPRR.

PRECONISATION n°19 :

Favoriser la généralisation des PPRR dans l’ensemble des SDIS en proposant un guide méthodologique simple au niveau national.

Coût : aucun

2.4.2.5 La prévention des risques, le continuum éducatif et la communication

L’organisation opérationnelle étant désormais mieux structurée, grâce au processus de départementalisation issu de la loi du 3 mai 1996, le moment nous semble venu de favoriser la réalisation d’actions de prévention et d’éducation, qui elles-mêmes contribueront à une meilleure organisation opérationnelle, au sein d’une dynamique vertueuse. En particulier, la réalisation d’actions de prévention ciblées doit permettre une diminution du nombre et de la gravité de certaines interventions.

PRECONISATION n°20 :

Développer les capacités du service à mieux concourir à la sécurité civile des territoires, dans le sens d’une démarche qualité, au moyen de la prévention, du continuum éducatif.

Coût : aucun

Ainsi, le choix des actions de prévention futures pourra être réalisé au regard :

de l’analyse statistique des interventions réalisées (fréquence et gravité constatées) ;

de l’analyse des risques du territoire (probabilité d’occurrence et gravité potentielle).

PRECONISATION n°21 :

Analyser systématiquement les statistiques opérationnelles pour ajuster les actions de prévention ciblées et mesurer l’efficacité de la démarche, dans le cadre d’un système de pilotage de la performance.

Coût : aucun

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

57

Les actions de prévention du risque routier peuvent s’inscrire dans le continuum éducatif, et doivent s’appuyer sur des ressources en moyens de communication adaptés, pour pouvoir être efficacement diffusés au plus grand nombre. Dans cet esprit, nous proposons que soit expérimentée sur quelques SDIS volontaires l’organisation d’actions d’éducation routière telles que des examens du code de la route, ou des stages de récupération de points.

PRECONISATION n°22 :

Contribuer, de manière expérimentale et ciblée, aux actions d’éducation routière : examen du code de la route ou les stages de récupération de points.

Coût : compensé par la facturation des actions

Parmi les enjeux de l’action publique, celui de la communication paraît déterminant. Les sapeurs-pompiers peuvent porter une parole renouvelée, vers un équilibre de la prévention et de la répression. En particulier, l’opinion publique semble leur reconnaître une légitimité dans la connaissance du risque routier, qui ne se limite pas au domaine opérationnel.

PRECONISATION n°23 :

Engager les sapeurs-pompiers dans les actions de communication en faveur de la prévention des accidents de la route.

Coût : aucun

2.4.2.6 Les causes et les circonstances des accidents

Nous avons pu mettre en évidence que l’analyse des causes et des circonstances des accidents représentait un enjeu fondamental visant à la compréhension des phénomènes et donc de la capacité de l’action publique à lutter contre ceux-ci.

Cette démarche nous paraît particulièrement pertinente au regard du nombre d’accidents de la route qui n’entrent pas dans l’analyse du phénomène, de par leur exclusion des BAAC, et le fait que le seul canal d’entrée de la donnée soit celui des forces de l’ordre. Cette organisation nécessiterait toutefois une formation particulière des cadres sapeurs-pompiers concernés, par exemple de niveau chef de groupe minimum.

PRECONISATION n°24 :

Mettre en place une formation d’expertise à l’attention des sapeurs-pompiers qui seront en charge de la recherche des causes et des circonstances des accidents (RCCA).

Coût : 2500 EUR par agent formé

En outre, cette nouvelle démarche permettrait une alimentation plus exhaustive de la base de données des BAAC, dont nous avons démontré l’incomplétude, en particulier dans les cas d’accidents corporels avec blessés légers. Compte tenu de la baisse constatée, depuis 40 ans, du nombre de tués et de blessés graves, il paraît judicieux d’intégrer à l’étude les blessés légers et les accidents sans victimes, afin de disposer d’un volume de données supplémentaire.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Nous avons pu mettre en évidence que la démarche RCCI était capable de collaborer efficacement avec l’autorité judiciaire, dans le cadre de conventions tripartite (Préfet, Procureur, SDIS). Nous considérons que cette capacité peut être transposée dans le domaine des accidents de la route, selon les mêmes objectifs et la même forme.

PRECONISATION n°25 :

Etablir des conventions tripartites, permettant aux sapeurs-pompiers investigateurs spécialisés en accidentologie routière, de contribuer aux enquêtes judiciaires.

Coût : aucun

Cette démarche nous paraît particulièrement pertinente car elle facilitera le travail des enquêteurs, tout en permettant aux sapeurs-pompiers de contribuer, sous une nouvelle forme, à la politique nationale de sécurité routière.

2.4.2.7 Opportunités d’évolutions dans la gouvernance et la coordination des SIS

La réforme territoriale enclenchée ouvre des pistes de réflexion et d’action concernant le niveau de gouvernance et de coordination des SIS.

Cette étape dans l’histoire de la France représente une opportunité pour les SIS de reconsidérer leur organisation et leur influence, dans le domaine de la politique nationale de sécurité routière et au-delà.

PRECONISATION n°26 :

Examiner les opportunités d’évolution dans la gouvernance et la coordination des SIS offertes par la réforme territoriale.

Coût : aucun

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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CONCLUSION

«Tout faire pour sauver des vies.»

Manuel VALLS100

Les accidents graves de la route s’obstinent.

Il y a actuellement près de 10 morts par jour, et il y aura, au mieux, moins de 2000 morts en 2020, auxquels un grand nombre de blessés plus ou moins graves, plus ou moins recensés et collectivement considérés, viendront s’ajouter. Face au constat d’une violence routière quotidienne et silencieuse, la faible magnitude de ces évènements, à l’exception par exemple d’accidents comme celui de Beaune en 1982101 et Loriol en 2002102 peine à susciter une charge émotionnelle suffisante pour déclencher une réaction unanime de l’opinion publique103. La signification sociale, collective, de ces drames n’apparaît, de manière plus ou moins fidèle, que dans les bilans statistiques. Le risque routier semble vouloir traduire un fait de responsabilité sociétale, un prix à payer dans une « société du risque »104, un tribut au développement économique et aux libertés individuelles. En tant que corporation et service public, les SIS œuvrent au quotidien, avec courage et dévouement, pour se préparer, prévenir, sauver, analyser, et recommencer. Même s’ils font face à chaque instant, ils ne peuvent rester indifférents devant une telle situation, et sont prêts à contribuer à la résolution des problèmes de sécurité civile, dans la limite de leurs attributions définies par les lois et les règlements.

Abordée pour la première fois dans le cadre des formations supérieures de l’ENSOSP, la présente recherche s’est donné pour ambition l’ouverture d’un nouvel espace de réflexion et d’analyse susceptible d’envisager la sécurité routière sous un angle élargi. L’étude cherchait à éclairer ce qui nous apparaissait comme une « zone d’aveuglement » : le post-accident. L’étude a proposé une démarche novatrice, visant à réduire les conséquences des accidents sur les victimes, grâce à l’action globale des SIS, sur le plan politique et technique. Cette démarche se voulait complémentaire à l’approche classique de la sécurité routière (prévention, répression), qui a démontré une capacité à obtenir des résultats remarquables, mais aussi à marquer désormais des limites.

Des décisions politiques ont été communiquées par le gouvernement, en cette année 2015, face à l’augmentation du nombre des tués, constat douloureux après des années de baisse.

Le périmètre de l’étude affirmait le refus du piège d’une critique vaine de l’actuelle politique nationale de sécurité routière, hors de propos dans cet exercice, au profit de l’émergence de solutions innovantes, issues d’un nouveau gisement de sécurité : l’intégration résolue des SIS dans cette politique publique indispensable à la pacification de l’espace commun de circulation routière.

100 CISR du 2 octobre 2015.

101 Carambolage survenu sur l’autoroute A6, sur la commune de Beaune, le 31 juillet 1982. Cet accident impliquait 2 cars et 2 voitures. Le bilan faisait état de 53 morts dont 44 enfants. De nouvelles mesures de sécurité routière avaient été décidées par le gouvernement à la suite de cet accident : limitation de la vitesse par temps de pluie, limitateur de vitesse sur les véhicules lourds. C’est l’accident le plus meurtrier de l’histoire de la sécurité routière.

102 5 sapeurs-pompiers décédés, fauchés par une voiture alors qu’ils intervenaient sur l’autoroute A7.

103 Comme par exemple le mouvement populaire « Je suis Charlie », suite aux attentats de janvier 2015.

104 Ulrich BECK, sociologue Allemand

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Alors, les SIS peuvent-il contribuer à atteindre l’objectif gouvernemental ? En quoi l’implication des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière pourrait-elle conduire à la réduction des dommages corporels et des décès dus aux accidents de la route ?

Après avoir établi le contexte qui a permis de sélectionner deux hypothèses de recherche, nous avons présenté nos résultats et formulé des préconisations. Nous avons fait le choix assumé de proposer une démarche qui devra permettre, à l’avenir, de réunir les conditions de la contribution utile et efficace des SIS à la politique publique nationale de sécurité routière.

Toutefois, nous sommes conscients des limites de notre recherche. Le sujet est vaste, complexe, déjà extrêmement documenté, et sans doute suffisamment polémique. Nous sommes convaincus, et nous avons tenté de le démontrer, que les sapeurs-pompiers peuvent contribuer à cette politique publique, en apportant de nouvelles compétences, une acuité, et une réelle crédibilité.

Nous pensons que l’approche globale des SIS face aux risques de sécurité civile, dont l’efficacité est reconnue, représente une forme de légitimité pour contribuer de manière plus approfondie à la maîtrise du risque routier. De plus, l’apport de ce service public dans le domaine statistique permettra une meilleure connaissance de la situation cindynique 105 , préalable à la construction d’une politique publique de sécurité pertinente, efficace, et convenablement acceptée par la population en cela qu’elle tend à limiter les libertés publiques individuelles au profit de l’intérêt général106.

Enfin, la démarche de ces services peut être valorisée par un engagement politique et technique forts, et l’argumentation de sa raison économique, dans le contexte d’une réflexion sur la forme et la taille des SIS et l’opportunité de leurs mutualisations, à l’heure de la réforme territoriale. Les SIS bénéficient de la confiance de la population. Ils ont une histoire à raconter, solidement ancrée sur le réel. Ils ont la capacité à porter un message uniforme de prévention.

Aujourd’hui, nous pouvons témoigner d’une évolution personnelle du regard que nous portons désormais sur cette politique publique, sur son importance et sa complexité. Les neuf mois de travail consacrés au dialogue avec cette problématique nous ont permis de mieux la comprendre, et de la mettre en perspective au moyen d’une double approche professionnelle et personnelle. Le caractère extrêmement concret et actuel du sujet a été perçu comme une véritable opportunité. Nous avons découvert un nouveau volet de notre vie professionnelle future, celui de l’implication dans une démarche collective en rapport avec la mise en œuvre d’une politique publique.

Nous espérons que notre contribution fera œuvre utile, et qu’elle ouvrira de nouveaux espaces de recherche. Quoiqu’il en soit, nous affirmons en confiance que notre participation a été sincère. Qu’il s’agisse de répression, d’action éducative, ou d’enjeux de santé publique, nous pensons que l’action publique ne peut pas tout et qu’il conviendrait désormais de communiquer vers les conducteurs.

Responsabilisation, compréhension du risque et donc du sens de la règle et de son utilité collective, nous semblent être des solutions au moins aussi pertinentes que la « peur du gendarme ».

105 Cindyniques : sciences du danger (du grec kindunos).

106 Article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

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La place des SIS dans les politiques publique ne relève-t-elle pas d’enjeux de santé publique ? Avons-nous véritablement mesuré la portée économique voire morale de l’insécurité routière ?

Des axes de nouvelles recherches semblent vouloir se dégager, à partir de la problématique qui nous a été soumise, tels que : la question du pilotage d’ensemble des SIS en l’absence de « supra-départementalité », le manque de mutualisation des actions transversales et des ressources, les possibilités de maîtriser la sollicitation opérationnelle par le développement de la prévention intégrée, l’exploitation des grands volumes de données (big data).

Pour conclure, nous estimons que la contribution des sapeurs-pompiers de France à la politique nationale de sécurité routière est donc à deux niveaux. Le premier niveau est un niveau politique, où les sapeurs-pompiers s’interrogent sur la place qu’ils pourraient occuper dans la conception des politiques publiques nationales. Le deuxième est un niveau d’expertise technique, actuellement un peu trop éparpillé dans les territoires, et qui peine à se fédérer, et à être valorisé.

Durant toute la genèse de ce mémoire, l’actualité de la politique de sécurité routière en France n’aura cessé d’évoluer.

A l’heure de mettre un point final à notre contribution, nous apprenons que le sujet de notre recherche a fait l’objet d’un débat entre monsieur Bernard CAZENEUVE, ministre de l’Intérieur, et le colonel Eric FAURE, président de la FNSPF, lors du 122ème congrès national de la FNSPF, qui s’est tenu à AGEN.

Le président de la FNSPF a attiré l’attention du ministre sur l’absence des sapeurs-pompiers de France dans la politique nationale de sécurité routière.

Le ministre a annoncé que les sapeurs-pompiers de France seront désormais intégrés dans les groupes de travail nationaux, en relation avec la DSCR.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

62

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION 1

PARTIE 1 : LE CONTEXTE ET LES HYPOTHESES 3

1.1 PROPOS INTRODUCTIF 3 1.1.1 Le risque routier 3

1.1.1.1 Le concept de risque 3 1.1.1.2 La circulation routière 4 1.1.1.3 Le modèle systémique 5

1.1.2 Les principes généraux de construction des politiques publiques 6 1.2 LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURITE ROUTIERE 7

1.2.1 Des progrès historiques 7 1.2.2 Gouvernance de la politique publique 8 1.2.3 Les acteurs de la sécurité routière 9

1.2.3.1 Cartographie des acteurs 9 1.2.3.2 Le rôle des acteurs nationaux 10

Le CISR 10 Le CNSR 10 Le DISR 11 La Délégation à la Sécurité et à la Circulation Routière (DSCR) 11 L’ONISR 12

1.2.3.3 Un partenariat fort au niveau des territoires 12 1.2.4 La déclinaison actuelle de la politique nationale de sécurité routière 14

1.2.4.1 Les chiffres clés du risque routier 14 Le coût de l’insécurité routière 14 Le coût de la politique de sécurité routière 15

1.2.4.2 Moins de 2000 morts en 2020 15 1.2.4.3 L’actualité de cette politique nationale en 2015 16

1.2.5 Le recueil des données sur les victimes et les accidents 16 1.2.5.1 L’approche réglementaire 16 1.2.5.2 La nature des données collectées 17 1.2.5.3 Le contrôle des données collectées 19 1.2.5.4 Des divergences dans les décomptes 19

1.3 L’ORGANISATION DES SERVICES D’INCENDIE ET DE SECOURS EN FRANCE 20 1.3.1 Les sapeurs-pompiers et la gestion des risques et des crises 20 1.3.2 Le maillage territorial 21 1.3.3 Les sapeurs-pompiers en interservices 22

1.3.3.1 La direction et le commandement de l’opération de secours 22 1.3.3.2 L’interservices en communication opérationnelle 22 1.3.3.3 L’interservices dans l’exercice de la prévention 23

1.3.4 La chaîne des secours 24 1.3.4.1 L’alerte 24 1.3.4.2 La prise en charge des victimes 24 1.3.4.3 La dimension technique de l’intervention 25

1.3.5 Approche historique du secours routier en France 25 1.3.6 Les risques et difficultés opérationnelles pour les intervenants liés aux nouvelles technologies 26

1.4 FORMULATION DES HYPOTHESES DE RECHERCHE 27

PARTIE 2 : DES ACTIONS OPERATIONNELLES VERS LA POLITIQUE NATIONALE 29

2.1 PRESENTATION DE LA RECHERCHE 29 2.1.1 Méthodologie de la recherche 29 2.1.2 Recherches documentaires 29 2.1.3 Entretiens avec les différents acteurs 30 2.1.4 Recherche des bonnes pratiques auprès des SDIS 30

2.2 CONTENU DE LA RECHERCHE 31

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

63

2.2.1 Les sapeurs-pompiers ne sont pas suffisamment impliqués dans la politique nationale 31 2.2.1.1 Absence dans la conception de la politique nationale 31 2.2.1.2 Une implication prévue par les plans internationaux 32 2.2.1.3 Une présence insuffisante et inégale sur le plan de la mise en œuvre 33

Une gouvernance de la politique locale à renforcer 33 Les insuffisances du recueil statistique 33 Vers une meilleure comptabilisation et évaluation des blessés 35 Etude comparative des données DGSCGC et ONISR 37 Dans le domaine de la prévention et du continuum éducatif 38

2.2.2 Pourtant, l’action des sapeurs-pompiers pourrait contribuer à l’amélioration des résultats de cette politique 38

2.2.2.1 L’intégration du risque routier au sein des SDIS : un devoir d’exemplarité 38 2.2.2.2 L’apport technique des sapeurs-pompiers 39

Un principe : diminuer les délais opérationnels pour augmenter les chances de survie d’une victime 39 Prise en charge des victimes 41 Exemple d’expérimentation au SDIS de Lot-et-Garonne 42 Evolution des techniques 43 Collaboration avec les constructeurs de véhicules 44

2.2.2.3 L’apport technique de la prévention des incendies et de la RCCI 44 2.2.2.4 Les perspectives en matière de gestion de l’alerte 47 2.2.2.5 Estimation de la pertinence de la contribution des sapeurs-pompiers 48

Des morts évitables ? 48 Des économies ? 48

2.3 RETOUR SUR LES HYPOTHESES DE RECHERCHE 49 2.4 LES PRECONISATIONS : VERS UNE COMPLETE INTEGRATION DE L’EXPERTISE DES SAPEURS-POMPIERS DE FRANCE 51

2.4.1 Selon l’axe politique de la politique nationale 51 2.4.1.1 La place des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière 51 2.4.1.2 Le partage des données et leur communication 51 2.4.1.3 La valorisation des SIS auprès des autorités 52 2.4.1.4 La cohérence des différents schémas directeurs de planification 52 2.4.1.5 L’implication des SIS au niveau local et les bonnes pratiques 53 2.4.1.6 Les partenariats et l’innovation 53

2.4.2 Selon l’axe de l’organisation des SIS 54 2.4.2.1 L’unification de la prise et la gestion des appels d’urgence 54 2.4.2.2 Démarche d’amélioration continue 55 2.4.2.3 Les techniques opérationnelles et la formation 55 2.4.2.4 Les PPRR dans les SDIS 56 2.4.2.5 La prévention des risques, le continuum éducatif et la communication 56 2.4.2.6 Les causes et les circonstances des accidents 57 2.4.2.7 Opportunités d’évolutions dans la gouvernance et la coordination des SIS 58

CONCLUSION 59

TABLE DES MATIERES 62

BIBLIOGRAPHIE 64

WEBOGRAPHIE 67

TABLE DES ILLUSTRATIONS 71

ANNEXES 72

Annexe I - Modèle systémique externe de la circulation routière 72 Annexe II - Compétence des commissions départementales 73 Annexe III - Nature des données collectées 74 Annexe IV - Schéma macroscopique de collecte des données 75 Annexe V - La chaine d’accident 76 Annexe VI - Fichier BAAC 77 Annexe VII - Exemple de compte rendu d’entretien 78 Annexe VIII - Liste des personnes auditées 80 Annexe IX - Résultats de la recherche des bonnes pratiques 83 Annexe X - Utilité de l’apport des données SDIS dans la sécurité routière au niveau local 85

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

64

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www.inpes.sante.fr

Agence nationale de traitement automatisé des infractions

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AGIR abcd

http://www.agirabcd.org

Alcool assistance

http://www.anateep.asso.fr

Animafac

http://www.fondation-groupama.com

Association Prévention MAIF

http://www.maif.fr

Association de la Prévention Routière

http://www.preventionroutiere.asso.fr

Page 80: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

68

Association des accidentés de la vie (FNATH)

http://www.fnath.org

Association Internationale pour la Sécurité du Transport des Jeunes

http://www.anateep.asso.fr

Avenir Santé

http://www.avenir-sante.com

Centre de ressources et d'innovation Mobilité et Handicap (CEREMH)

http://ceremh.org

Familles rurales

http://www.famillesrurales.org

Fédération des Associations de la Route pour l'Education (FARE)

http://federationfare.fr

Fédération des Associations générales étudiantes (FAGE)

http://www.fage.org

Ligue contre la violence routière (LCVR)

http://www.violenceroutiere.org

Marilou, pour les routes de la vie

http://www.association-marilou.org

Tous en routes.com

http://www.tousenroute.com

Union nationale des associations de familles de traumatisés crâniens et cérébro-lésés (UNAFTC)

http://www.traumacranien.org

Victimes et citoyens

http://www.victimes.org/fr

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Voiture & Co

http://www.voitureandco.com

Association pour le développement de la pratique et de la sécurité moto (ADSM)

http://www.net1901.org

Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB)

http://www.fubicy.org

Moteurs du cœur

http://www.moteursducoeur.org

La Route à motard-com

http://www.restez-motard-a-moto.fr

Solidarité Motards accidentés (SMA)

http://solidaritemotardsaccidentes.org

Jeunes et Sécurité Routière

http://jeunes-securite-routiere.fr

Permis de conduire

http://www.permisdeconduire.gouv.fr

Prévention des accidents de la circulation et de la route

http://www.saser.fr

Sécurité pour Tous. Site du constructeur automobile RENAULT

http://www.securite-pourtous.com

MACIF Prévention

https://www.macif.fr/web/site/groupe/accueil/groupe/prevention/securite_routiere/outils_operationnels_securite_routiere

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

70

GEMA Assureurs mutualistes

http://www.gema.fr/

Fédération française des sociétés d’assurance

http://www.ffsa.fr/

ACMF : Automobile Club Médical de France

http://www.acmf.asso.fr

CEREMA Portail

http://www.cerema.fr/

ECall

http://www.eena.org

Cabinet sociologues (M. TERUEL)

http://www.bsa-sociologie.fr

CNSR – Liste des experts

http://www.conseil-national-securite-routiere.fr/liste-des-experts/

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

71

Table des illustrations

Figure 1 Evolution de la mortalité routière métropolitaine et mesures prises 1970-2013 8

Figure 2 Cartographie des acteurs de la sécurité routière (2015) 9

Figure 3 Acteurs locaux de la sécurité routière. 13

Figure 4 Evolution récente de la mortalité en métropole (Source ONISR- 2014) 15

Figure 5 Principe d'extrapolation des données du registre du Rhône (Source étude AMOROS) 36

Figure 6 Comparaison des chiffres SIS et ONISR (Extrait d’un document de travail col P.BODINO) 37

Figure 7 accident d'un véhicule Hybride (photo SDIS 47) 43

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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ANNEXES

Annexe I - Modèle systémique externe de la circulation routière

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

73

Annexe II - Compétence des commissions départementales

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe III - Nature des données collectées

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe IV - Schéma macroscopique de collecte des données

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe V - La chaine d’accident

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

77

Annexe VI - Fichier BAAC

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe VII - Exemple de compte rendu d’entretien

Entretien avec M. DE BOUTER, chargé de mission sécurité routière au Conseil Départemental de Lot-et-Garonne

Le 02 juillet 2015, au Conseil Départemental (CD) de Lot-et-Garonne

Quel est votre rôle au Conseil Départemental ?

M. DE BOUTER est issu de la fonction publique d’Etat (DDT). Il est ingénieur en chef, rattaché à la DGA Infrastructures, Transports, Logements du CD 47.

Sa mission est transversale. Un accident de car scolaire du CD, à St Jean de Thurac, il y a quelques années avait beaucoup marqué les esprits dans l’opinion publique et auprès des politiques du CD (un enfant avait été accidentellement écrasé par un bus).

Sa mission est en lien avec les autres directions du CD, notamment celle en charge de l’éducation dans le cadre du continuum éducatif.

Il existe un lien étroit avec la préfecture, notamment dans le cadre du DGO et du PDASR (prévention), mais également dans le cadre du PDCR (répression).

Il s’agit de conduire la politique départementale de sécurité routière. Six mois après sa prise de fonction, un rapport avait été adressé à ses responsables, avec des préconisations.

Le CD participe financièrement au PDASR, à hauteur d’environ 40 k€ pour un budget global de 100 k€ environ.

Quelles actions sont menées par la mission ?

Des campagnes de prévention, par exemple, comme le village sécurité routière avec Vinci Autoroute cet été, ou encore le pass bonne conduite qui valorise le bon comportement des jeunes. Des éthylotests peuvent également être distribués.

Ils mènent également des actions d’amélioration du réseau routier (environ 3000 km de routes départementales), dans le cadre d’un plan départemental d’amélioration du réseau routier. Certaines routes sont classées RGC : route à grande circulation.

La nouvelle composition des conseils départementaux (parité, nouveaux élus) ouvre des opportunités nouvelles d’action.

Le service peut mener des études ISRI : inspection sécurité routière sur itinéraire.

Sur la base d’un exemple concret, il me montre que les actions de mise en sécurité ne font pas toujours l’unanimité, comme par exemple les barrières de sécurité qui peuvent être souhaitées par des automobilistes mais pas par les motards. Ou encore, les situations où l’on trouve des platanes au bord des routes (ligne droite d’Ayet par ex).

Sur quelles bases réglementaires vous appuyez-vous pour les travaux ?

La « bible » est l’ARP : aménagement des routes principales.

La route doit devenir un « espace de pacification », qui pardonne les éventuelles erreurs de conduite.

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Il existe un bureau d’étude au CD en charge de ces conceptions.

Comment identifiez-vous le rôle des sapeurs-pompiers dans la politique nationale de sécurité routière ?

Une dimension opérationnelle évidemment, avec une attention particulière au délai d’arrivée sur les lieux.

Il existe un PC route au conseil départemental, avec une console d’alerte (SYSTEL START) déportée du CODIS 47, pour visualiser les opérations en cours et les moyens engagés.

Ils ont un rôle de prévention / communication / sensibilisation.

Les sapeurs-pompiers participent également aux forums de sécurité routière.

Une attention particulière à l’importance du balisage, qui relève d’une compétence partagée. Il serait utile de disposer d’un protocole commun.

Quel est l’état du réseau routier départemental, est-il dangereux ?

Le réseau structurant s’est considérablement amélioré, et celui-ci est rarement mis en cause dans les accidents graves, souvent liés au comportement inadapté des conducteurs.

En 2015, les résultats sur le nombre de tués n’est pas bon (22 morts en 6 mois, contre 14 en 12 l’année dernière).

Ce qui caractérise le 47, c’est un indice de gravité important (ILSR : indicateur locaux de SR).

Des arbitrages politiques sont souvent nécessaires lorsque deux choix apparaissent.

Une approche écologiquement responsable est mise en avant, comme par exemple le fait de ne pas faucher les bords de route.

Il souhaite être destinataire du mémoire.

David GOUZOU

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

80

Annexe VIII - Liste des personnes auditées

NOM Prénom Grade, Titre Organisme Date de

l'entretien

AJAGAMELLE Capitaine (SP) SDIS 47 – CMSR 11/06/2015

ARNAUD Odile Docteur LCVR 34 01/04/2015

ARNOUX Pierre-Jean Docteur en médecine

Directeur de recherches au laboratoire de biomécanique appliquée

02/10/2015

BARBAZA Gardien de la paix (PN)

Brigade accidents et délits routiers AGEN

09/06/2015

BARTOLO Lieutenant-Colonel (GN)

UCLIR 27/05/2015

BASOIN M. ORSR Bordeaux 12/05/2015

BENET Jean Directeur des Sapeurs-Pompiers

DGSCGC 28/05/2015

BETHENCOURT Julien M. Philosophe chargé d’innovation pour le groupe Poult

16/04/2015

BIDAL Michèle Mme Documentation IFSTTAR 02/10/2015

BODINO Philippe Colonel IGA 23/03/2015

BOUR Michel Col CTIF 02/04/2015

BRIZARD M. ODSR 47 05/03/2015

CARPY M. Education routière - Inspecteur

01/07/2015

CHARBIT Docteur en médecine

Trauma center Lapeyronie 23/06/2015

CLUZEAU Adjudant-chef Brigade AIGUILLON 10/06/2015

DE BOUTER M. Conseil Départemental 47 - CMSR

02/07/2015

DE SAINT-GERMAIN Stéphanie

Mme Comité des constructeurs français automobiles - CCFA

07/10/2015

DUMONCEAUD Lcl SDIS 47 - CMSR 04/03/2015

DUMONTET Pierre M. Chef du CMVOA 29/05/2015

DURAND M. MACIF SOP 29/03/2015

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

81

NOM Prénom Grade, Titre Organisme Date de

l'entretien

ECASSUS Jean-Pierre M. Coordonnateur sécurité routière de l'Aveyron

09/04/2015

ERVITI M. MACIF SOP 16/01/2015

FARRON Pascal Colonel (SP) DGSCGC – bureau organisation

28/05/2015

FAURE Eric Président FNSPF/DDSIS

FNSPF/SDIS77 28/05/2015

GARIN Mme Préfecture 47 – CMSR 16/01/2015

GENTILLAU Michel Lieutenant-Colonel (SP)

SDIS86 20/05/2015

GILCART Jean-Charles

Commandant (SP) SDIS91 17/03/2015

GOT Claude Professeur Professeur de médecine-ancien expert CNSR

26/05/2015

GOUEZEC Stéphane DDA SDIS58 22/03/2015

GUICHARD-NIKOU Christophe

Commandant (SP) Chef de salle au CMVOA 29/05/2015

HASSMANN Capitaine (GN) EDSR 47 - Gendarmerie 16/01/2015

HERTGEN Médecin (SP) FNSPF/SDIS59 17/05/2015

HOUILLON Philippe Député Député UMP – Membre CNSR 13/05/2015

LAUMON Bernard Docteur Registre du Rhône – responsable du groupe des expert CNSR – IFSTTAR

02/10/2015

LAUWICK Dr Automobile club médical de France (ACMF)

09/04/2015

LECOZ Médecin LAB Renault 08/04/2015

LUGRAND Mme Préfecture 47 – DIRCAB 24/06/2015

MACHU Christian M. Adjoint secrétaire général de l’ONISR

27/05/2015

MAZZI Jean-Paul M. Directeur adjoint IFSTTAR 02/10/2015

PARISSE Colonel (ER) BSPP 18/06/2015

PERRICHON Mme Ligue contre la violence routière

18/05/2015

PETIT-BOULANGER Claire

Docteur Renault 08/04/2015

Page 94: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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NOM Prénom Grade, Titre Organisme Date de

l'entretien

PILOSSOF Romain Docteur en médecine

Praticien hospitalier – service des urgences – CH Béziers

18/05/2015

RAMOND M. Association prévention sécurité routière

02/06/2015

REMOND Didier Colonel (GN) ONISR et UCLIR 27/05/2015

RIBIER Lieutenant (SP) SDIS 30 16/04/2015

RIGOLET Cédric Commandant (SP) SDIS08 05/03/2015

ROUJEAN Mme ODSR 47 05/03/2015

ROUSSEAU Thierry Colonel Chef de mission animation réseau des forces de l’ordre

27/05/2015

SCHMAUCH jean-François

Colonel (SP-ER) Ancien Officier SP 28/04/2015

SIBEL Mme CEREMA 10/04/2015

SMINKEY Laura Mme ONU 21/05/2015

TERUEL M. Sociologue – Chargé d’une étude sur l’accidentologie des jeunes

10/03/2015

TREPOS Yvon Colonel IDGSCGC 28/05/2015

TREVISIANI M. DGSCGC 29/01/2015

VADIMON Thierry Adjudant-chef (SP) Chargé de mission auprès du préfet de la Guadeloupe

06/05/2015

VENNIN M. DGSCGC 29/01/2015

VIRET Jean Professeur Professeur de Droit Public 18/05/2015

VOLLMACHER Kurt M. CTIF 23/04/2015

WILLEIM Sébastien Capitaine DGSCGC 28/05/2015

YERPES Joël M. Responsable équipe de chercheurs spécialisés dans les infrastructures – IFSTTAR

21/09/2015

Page 95: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe IX - Résultats de la recherche des bonnes pratiques

Recherche des bonnes pratiques auprès des SDIS

Nombre de SDIS ayant répondus à notre recherche : 81

Bilan des actions internes à l’établissement menées par les SDIS :

- Pourcentage des SDIS interrogés tenant statistiques d’accidentologie : 76 %.

- Pourcentage des SDIS interrogés réalisant un plan de communication interne sur

le risque routier : 80 %.

- Pourcentage des SDIS interrogés ayant un Plan de Prévention du Risque Routier

(PPRR) ou un document équivalent : 69 %.

Bilan des actions externes menées par les SDIS :

- Pourcentage des SDIS interrogés dont la politique départementale de sécurité

routière à une incidence sur le SDACR : 50 %.

- Pourcentage des SDIS interrogés réalisant des actions en matière de sécurité

routière à destination du grand public et/ou des élus locaux : 74 %.

- Pourcentage des SDIS interrogés réalisant un développement de techniques

opérationnelles spécifiques visant à améliorer la réponse opérationnelle : 46 %.

Page 96: La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs

La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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SDIS AYANT REPONDU A NOTRE RECHERCHE

SDIS interlocuteur SDIS interlocuteur SDIS interlocuteur

2 Cdt OUGUEL 41 Cne RICHARD 72 Cdt DESCHAMPS

3 Cdt LOUISEAU 42 Lcl BUSSIERE 73 Lcl BOJUC

4 Ltn LOUTZ 43 Lcl PIGNAUD 74 Cdt BRANDO

7 Cne LADET 44 Cdt RUSSEAU 76 Ltn TALON

8 Cdt RIGOLLET 45 Cdt COUTELAN 78 Cne LEMAIRE

12 Cne ALLEGUEDE 46 Cdt GALTIER 79 Cdt AUDE

14 M. GUELLE 47 Lcl DUMONCEAUD 80 Ltn BRIATTE

15 M. NOYER 49 Mme LAGARDE 81 Adc PEPIN

16 Cne LAVIGNE 50 Cdt AUROUSSEAU 82 Adc MAZET

18 Mme LECHEMAU 51 Lcl GOULET 83 Cdt GAMBE DE VERGNE

19 Ltn VECHAMBRE 52 Cdt PLANCHON 85 Lcl LEGOUALHER

21 Mme SALOMON 53 Cne MANSON 86 Lcl GENTILLEAU

22 Mme LECORTELLEC 54 Cdt KOESSLER 87 Ltn BESSON

23 Cne BOUDIN 55 Cdt VENAILLE 89 Cdt VINCENT

24 Mme BOYER 56 Lcl CILLARD 90 Lt DEVILLONI

26 Cdt GONSOLIN 57 Cdt SMITH 91 Cdt GILCARD

27 Cdt LORIOT 58 Lcl GOUEZEC 95 Cdt MAZOUE

28 Ltn FERRON 59 Cdt BOUCHE 971 Adc VADIMON

29 M. GUIOT 60 Lcl BRUNO 972 Cne NORESKAL

30 Ltn RIBIER 61 Cdt DELANDRE 973 Cne BATANY

31 Ltn BARTALAN 62 Lcl HERBAUT 976 Cdt FOSCO

32 Cdt GAUBERT 63 Lcl RODIER

Lcl : Lieutenant-Colonel

33 Lcl GARDERE 64 Lcl ROURE

Cdt : Commandant

34 Cdt LIGNY 65 Cdt BLANCO

Cne : Capitaine

35 Ltn GOUERY 66 Cdt DI-BARTOLOMEO

Ltn : Lieutenant

36 Cdt PASQUIER 67 Cdt HARROUE

Adc : Adjudant-Chef

37 Cdt TANGUY 68 Mme CARTAILLER

38 Cdt CROMBOIS 69 Cdt BEAU

39 Cdt MARILLET 70 Lcl BEL

40 Cdt LOUSTEAU 71 Cdt PELISSE

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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Annexe X - Utilité de l’apport des données SDIS dans la sécurité routière au niveau local

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La politique nationale de sécurité routière et les sapeurs-pompiers de France

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