15
1 LA PORTE ETROITE. Quand les classes moyennes parlent de leurs priorités pour la France et de ceux qui pourraient les porter en 2017. FreeThinking pour Publicis Groupe Octobre 2015

La porte étroite

Embed Size (px)

DESCRIPTION

A moins de deux ans des prochaines élections présidentielles, et dans un climat qui reste difficile et mis sous tension par des événements soit d’origine extérieure – la crise des migrants – soit tragiquement imprévisibles – l’attentat raté du Thalys - , quelles sont les préoccupations et les priorités des Français des classes moyennes qui seront le cœur de l’électorat de 2017 ? Neuf mois après le 11 janvier et ce mouvement qui n’a sans doute pas encore livré tout son sens, comment perçoivent-ils l’état du pays, et dans quel état d’esprit eux-mêmes se trouvent-ils ? Comment appréhendent-ils les grands enjeux qui occupent les discours des politiques et dont les media se font l’écho, jour après jour ? Et bien sûr : qui, pour porter ces enjeux et apporter des réponses qui donnent envie d’y croire et d’avancer ?

Citation preview

Page 1: La porte étroite

1

 

LA PORTE ETROITE.

Quand les classes moyennes parlent de leurs priorités pour la France et de ceux qui pourraient les porter en 2017.

FreeThinking pour Publicis Groupe

Octobre 2015

Page 2: La porte étroite

2

 

moins de deux ans des prochaines élections présidentielles, et dans un climat qui reste difficile et mis sous tension par des événements soit d’origine extérieure – la crise des migrants – soit tragiquement imprévisibles – l’attentat raté du Thalys - ,

quelles sont les préoccupations et les priorités des Français des classes moyennes qui seront le cœur de l’électorat de 2017 ? Neuf mois après le 11 janvier et ce mouvement qui n’a sans doute pas encore livré tout son sens, comment perçoivent-ils l’état du pays, et dans quel état d’esprit eux-mêmes se trouvent-ils ? Comment appréhendent-ils les grands enjeux qui occupent les discours des politiques et dont les media se font l’écho, jour après jour ? Et bien sûr : qui, pour porter ces enjeux et apporter des réponses qui donnent envie d’y croire et d’avancer ? C’est à ces questions que cette investigation qualicollaborative de grande ampleur – 156 Français de classes moyennes interrogés pendant 11 jours du 31 août au 10 septembre 20151, sur notre plateforme fermée, avait pour objectif de répondre. Des Français à qui nous avons demandé de mettre noir sur blanc leurs réactions et leurs réflexions sur les enjeux et sur les hommes, sans censure, en toute liberté. 1382 contributions plus tard, c’est une vision très dure qu’il nous est offert de partager. Une vision qui témoigne de leur appréhension devant ce qu’ils comprennent de la situation de la France, dans le monde qui se dessine. Impasses économiques, impasses culturelles, impasses politiques… Celui ou celle qui, en 2017, devra proposer un chemin pour en sortir, devra aussi convaincre qu’il est capable de passer par une porte très étroite. Et affronter des classes moyennes qui affichent parfois ici, pour la première fois à ce niveau de désinhibition, une violence de parole et de pensée qui dit à la fois la dureté des temps et l’attente d’un dirigeant qui saura se frayer un chemin entre les tensions qu’une politique d’autorité peut provoquer, et la peur de voir la société sombrer dans d’incontrôlables conflits. Cette vision s’articule autour de 4 idées clés : 1. Si, pour 2017, l’agenda des priorités des Français change apparemment peu par rapport à

celui du printemps… 2. La « big picture » qu’ils dressent est celle d’une société totalement déréglée, fondant la

demande d’une « destruction créatrice » de cet ordre ancien qui n’est plus qu’un désordre… 3. « Destruction créatrice » qui donne une force d’attraction massive à MLP, la seule

responsable politique qui pourrait briser le cadre et explique comment elle compte le faire… 4. Même si, au-delà des rêves de Grand Soir et en deuxième analyse, on se résoud encore à

chercher l’homme de la situation, celui qui passera par la porte étroite, dans une offre politique plus classique – Manuel Valls, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy -.

Mais jusqu’à quand ?

                                                                                                                         1 156 Français des classes moyennes / revenu foyer net mensuel de 1800 à 2400 euros pour une personne seule / de 2400 à 5000 euros pour un couple / hommes et femmes, âgés de 18 à 65 ans, dont 34% de 18-25 ans. 90% d’actifs dont 80% issus du secteur privé et 20% issus du secteur public – 8% de chômeurs, 5% d’étudiants, 5% de retraités / S’étant abstenus pour 30% d’entre eux aux élections départementales 2015. Pour 55% sympathisants de gauche / 45% sympathisants de droite.

A

Page 3: La porte étroite

3

 

1. France 2017 : un agenda de priorités qui change apparemment

peu…

Premier enseignement de cette exploration : au-delà du terrorisme et de la crise des migrants, les Français que nous avons interrogés dessinent leur agenda 2017, en première analyse, autour de trois priorités inchangées.

• L’emploi et la croissance : de loin, la priorité pour la France, le sujet qui devra

occuper le centre du débat des prochaines présidentielles. Parce que « tout en découle ». Une thématique qui se structure autour de 2 objectifs :

1) Donner aux entreprises la possibilité de recruter. Avec des sujets récurrents : alléger les entreprises des taxes et contraintes administratives, les aider à investir, à s’implanter en France. Définir des univers prioritaires pour l’emploi comme la transition écologique, développer l’apprentissage, contrôler et taxer les produits importés.

2) Donner du pouvoir d’achat au consommateur en baissant les impôts, en réintroduisant la défiscalisation des heures supplémentaires… Ou en abandonnant les 35h. Pour commencer le plus important à mon sens, c’est l’emploi et tous ses tenants et aboutissants : plus de

flexibilité dans le code du travail (35 heures), tout en garantissant certains acquis aux salariés, simplification administrative pour les créateurs d’entreprise, aides à la mobilité pour encourager les

chômeurs à aller là où il y a de l’emploi, aides à la reconversion, plus de passerelles entre l’école et le monde du travail, revalorisation de l’apprentissage, économie du développement durable et des énergies

renouvelables porteuse d’emploi, etc.  – Olivier35

• L’immigration et surtout l’intégration : la première, devenue une priorité en raison d’une gestion jugée laxiste des flux de population et un facteur aggravant de la crise économique ; la deuxième parce qu’elle est un échec à leurs yeux, et le symptôme d’une incapacité à faire fonctionner nos systèmes d’éducation et d’insertion. Le contrôle des frontières est une évidence pour eux. Et l’intégration devrait faire l’objet de plus de volontarisme et de moins de discussions : être responsable, à leurs yeux, c’est réaffirmer les lois de la République, pas débattre à l’infini sur la place de l’Islam.

La France n’a objectivement plus la capacité d’accueillir tout le monde. Désolé mais je vois trop de problèmes d’intégration au quotidien pour avoir envie de soutenir une politique d’immigration de masse.  

- Dataou

• Enfin, la sécurité. A travers la délinquance bien sûr, mais aussi le terrorisme, un thème appréhendé comme une réalité quotidienne et non plus comme un événement exceptionnel et en un sens marginal. Sur ce point, le discours de Manuel Valls est passé : ces Français des classes moyennes affichent avoir compris qu’il fallait s’habituer au terrorisme.

Page 4: La porte étroite

4

 

Quant à l’insécurité, ici c’est fréquent, on m’a déjà bousillé mon portail à coups de pieds… Nombreux

sont les braquages dans les commerces et les trafics de drogue, et cet été une voiture a été brûlée juste devant ma propriété et a commencé à brûler mon jardin, j’ai eu la peur de ma vie. Bref, c’est de pire en pire, sincèrement on se demande bien à quoi sert la police. Je ne suis pas tranquille quant à l’avenir de

mes enfants, je n’ose pas les lâcher d’une semelle. - mercredi

Le second sujet est le terrorisme, dans notre monde actuel, les djihadistes sont les plus virulents, ces derniers gagnant chaque jour du terrain et des adeptes.

Daech, Boko Haram, Al Qaida etc sont clairement des ennemis de l’occident, et donc de la France, à ce titre nous devrions les combattre de toutes nos forces. - Ensiferum

Mais, au-delà de ce diagnostic, c’est un tableau autrement sombre que ces Français livrent, quand ils nous donnent leur « big picture » de la situation du pays…

u

Page 5: La porte étroite

5

 

2. Au-delà de l’agenda des priorités, un diagnostic très dur : une

société totalement déréglée, un système à casser.

Au-delà de ces priorités pour 2017, un constat s’impose pour ces Français des classes moyennes : celui d’une société dérèglée, que plus personne ne sait comment gérer… Un constat porteur de désarroi, exprimé aujourd’hui avec une virulence extrême. Comme si le dérèglement de la société engendrait la « surtension » du citoyen, jusqu’à la demande d’une violence nécessaire pour changer les choses. DEREGLEMENTS.

• Dérèglements, d’abord, dans l’ordre économique et social. Pourquoi le chômage ne

baisse-t-il jamais ? Pourquoi accepter le travail détaché et l’immigration quand il n’y a pas de travail pour tous ? Comment se fait-il que Pôle Emploi ne marche toujours pas ? Pourquoi autant d’aides de toutes sortes ? Ces questions rassemblent. Jeunes, seniors, sympathisants de droite et de gauche partagent l’idée que plus personne ne sait quoi faire, pour réguler le système. Comme si les cadrans qui permettaient à l’origine de piloter le « modèle social français » étaient cassés, bloqués, ou devenus fous.

Beaucoup de pays arrivent à diminuer leur chômage et à réduite leurs déficits, pourquoi pas nous ? Je ne comprends pas.  - cocolomio

Vous pensez réellement qu’avec la concurrence à la baisse des salaires dans l’UE, les consommateurs seront

en mesure de consommer pour relancer l’économie ? Nous n’avons plus les manettes pour influer sur les mesures de relance… Je ne parle même pas des

clandestins qui vont travailler pour une bouchée de pain et qui participeront à l’écroulement de l’économie du pays. - Nad

• Dérèglements, ensuite, dans l’ordre culturel. C’est leur lecture « philosophique » de la question de l’immigration-intégration. Dans l’étude Dissonances , en mars dernier, on avait vu que le traumatisme Charlie et le 11 janvier avaient calmé le jeu : c’est terminé. L’atmosphère est à la méfiance, et même à la peur - non pas de l’Autre, mais de l’explosion.

La France peine depuis ces dernières décennies à insérer, intégrer, accepter ses flux d’immigrés. Trop de

différences ethniques, culturelles ? Et, à mon sens, s’ajoute une volonté croissante de la part des migrants actuels de vouloir conserver leur identité, leur origine. Tout cela dans un contexte économique et social

tendu… Les « Français » se disent pourquoi viennent-ils chez nous ? Les « migrants » : pourquoi ne nous aiment-ils pas ? Chacun doit donc faire un pas vers l’autre, mais visiblement cela ne se fera pas

spontanément… - asterix • Dérèglements dans l’ordre politique. Dysfonctionnement pour eux radical de la

démocratie, c’est leur propre impuissance, en tant que citoyens, qu’ils décrivent aujourd’hui. Les électeurs n’ont plus le mode d’emploi de leurs dirigeants et des institutions. Ils ont perdu le fil et ne savent pas comment interrompre ce décrochage démocratique d’une société où

Page 6: La porte étroite

6

 

le peuple souverain a perdu le rapport de force qui l’oppose maintenant frontalement aux dirigeants.

On ne fait pas le poids face aux politiciens. – lolo16 Mais le dérèglement de la politique, c’est aussi l’évolution de l’Europe, et la perte de la souveraineté nationale. Dans le domaine économique : les politiques ont perdu la main, c’est clair aux yeux de tous. Dans le domaine régalien : ils ont perdu non seulement la main, mais en un sens la tête. La crise des migrants, après la crise grecque, joue le rôle de révélateur. Au-delà des polémiques, c’est l’hybris européenne qui frappe nos participants : démesure de l’émotion qui a semblé engloutir tout sens des responsabilités et du réel ; démesure d’un fonctionnement dans lequel l’indépendance du pays a été mise en cause.

Réformer l’Europe, pas de soucis, redonner aux pays européens leur souveraineté. A voir les règles dictées par Bruxelles, nous ne sommes même plus libres d’établir nos propres réformes. Perso, je pense que dans quelques

années plusieurs pays vont sortir de l’Europe et j’espère que la France va faire de même.  - Jordan

Je partage l’avis de Sandrine : que deviendront ces pauvres gens, une fois l’émotion passée, projetés sur un continent dont ils ne partagent pas forcément les valeurs, les croyances, la culture… Passés les premiers

moments d’euphorie, comment seront-ils vus sur notre territoire ? Comment verront-ils notre pays qu’ils n’ont pas vraiment choisi ? - 51mlp

SURTENSION. Des Français qui n’en peuvent plus de ces dérèglements, c’est en définitive des Français en surtension – comme si le court-circuit était proche. L’évolution est nette depuis mars, avec trois sentiments dévastateurs et partagés par la quasi-totalité des participants. • Sentiment d’abandon. Avec cette idée que le stade ultime du dérèglement des élites,

c’est de se détourner de leurs administrés. Beaucoup de posts sur cette idée que les dirigeants ont renoncé à agir pour eux et qu’il va falloir « se sortir du pétrin » sans aide.

Franchement je pense que la France est trop naufragée… Alors savoir si c’est toto ou tata qui sera au

pouvoir, lequel sera le plus apte à gérer les problèmes… - chicheng • Sentiment d’humiliation. Avec ce sentiment que l’essentiel de l’action politique

consiste à communiquer auprès d’eux dans une logique de manipulation, sans jamais se placer sur un pied d’égalité avec eux. D’un côté, ceux qui savent et peuvent, de l’autre, eux, qui ne savent rien, ne peuvent pas grand-chose, et sont jugés incapables de comprendre.

Franchement je ne sais vraiment pas pourquoi nous votons ça ne sert rien. Les politiciens s’en foutent de nous,

nous ne sommes rien pour eux.  -­‐ nonojackie

• Sentiment d’être acculé. C’est sans doute le sentiment le plus terrible. Le désespoir, c’est pour eux en définitive se sentir dans une impasse. Impasse économique, culturelle, démocratique.

Ce que je pense c’est qu’il faudrait une révolution pour résoudre les problèmes de la France. On n’a pas de

vrai dirigeant et on a beau critiquer la Russie de Poutine, mais au moins lui il a su tirer son pays vers le haut.  - arkom

Page 7: La porte étroite

7

 

POUR UNE DESTRUCTION - PEUT-ETRE - CREATRICE.

Conséquence de cette surtension : s’il est plus que jamais temps de changer, il n’est plus temps de barguigner. Le désir de rupture n’est pas nouveau. Mais changer veut maintenant dire – et ça c’est nouveau – qu’il faut détruire. Assumer de briser le cadre, et même pour certains revendiquer un véritable niveau de violence dans le changement. Il va falloir faire des dégâts et des mécontents, pour changer vraiment : les institutions (supprimer le Sénat ?), l’Europe (la refonder totalement, voire en sortir), le modèle social, la politique économique (supprimer les 35H ?), le droit du travail, la politique d’immigration. Avec un vocabulaire désinhibé et parfois extrême.

u

Page 8: La porte étroite

8

 

3. Qui pour briser le cadre ? La séduction MLP.

3ème enseignement de cette étude : pas de « chouchou » parmi les candidats de droite et de gauche traditionnels. Les prétendants actuels ont construit le système et ne peuvent prétendre aujourd’hui le défaire, leurs faiblesses collectives et individuelles l’emportant sur les atouts très pauvres qu’ils peuvent mettre en avant. Marine le Pen est la seule qui donne envie. QUI POUR BRISER LE CADRE ? PERSONNE A DROITE, NI A GAUCHE.

Ce constat est partagé par ces Français des classes moyennes qu’ils soient de droite ou de gauche. Il faudra se résoudre à un tel ou un tel… Comment les candidats « classiques » pourraient-ils détruire ce qu’ils ont construit et dans quoi ils se sont construits ? Mêmes écoles, mêmes réseaux, mêmes façons de penser, et de gouverner, mêmes échecs. Il s’agirait pour reconstruire de « passer à autre chose » dans le personnel politique : un vrai réformateur et qui soit hors système, hors parti, qui vienne du monde réel, une nouvelle offre à la Podemos… Mais aucune de ces idées ne réussit à être contagieuse dans la conversation.

Pauvre France, on ne lui trouve même plus un candidat à la Présidence !…  - fleur59

Ce désamour, une quantification des citations de personnalités qu’on est susceptible de considérer en 2017 permet de le mesurer : seuls émergent, parmi les dirigeants ayant exercé des responsabilités, Manuel Valls, Alain Juppé, et DSK avant Nicolas Sarkozy - DSK dont la présence fait débat bien sûr, entre regret et controverses… MLP est la seule à provoquer une dynamique qui va au-delà de la simple considération – certains l’ont déjà choisie. François Hollande a disparu.

Page 9: La porte étroite

9

 

EVALUATION DES CANDIDATS : LEURS FAIBLESSES ECRASENT LEURS FORCES.

Ils ont tous plus de faiblesses que de forces… - djfab Être incapable de citer spontanément une personnalité, c’est être incapable de désigner un dirigeant dont les qualités l’emporteraient sur les handicaps. Des résultats qui contrastent avec la couverture médiatique de certaines personnalités politiques « redécouvertes » comme Alain Juppé ou « révélées » comme Bruno Lemaire. Les mots, pour décrire les candidats, sont quasiment toujours associés à des postures / des personnalités et non à leurs idées. François Hollande : on s’est trompé. Il n’est plus considéré. L’évaluation est sans appel : incompétence / pilotage à vue / sans opinion.

Nicolas Sarkozy : il a échoué. Il est toujours là, mais on souhaiterait pouvoir tourner la page. Le garant d’un système qu’il a protégé au lieu de le réformer. Une image de président proche des riches qui persiste. Des affaires qui l’enkystent dans une image sulfureuse. L’expérience malgré tout, notamment lors de la crise de 2008, le charisme, l’énergie demeurent à son actif.

Manuel Valls : il m’intéresse mais il m’inquiète. Il s’investit, s’impose, s’engage avec fougue. Mais ses passages en force, sa nervosité dessinent un personnage facilement « à la limite ».

Page 10: La porte étroite

10

 

Alain Juppé : dans vieux sage, il y a vieux. L’expérience, l’intelligence, la confiance. Mais sa modération alliée à son âge est aussi sa faiblesse.

François Fillon : le collaborateur. Un manque de charisme et de succès passés qui l’empêche d’être audible. L’ombre portée du quinquennat Sarkozy réduit sa stature. François Bayrou : où le situer ? Difficile à placer sur l’échiquier politique : fluctuant dans ses positions, mais au cœur du système à détruire.

Jean-Luc Melenchon : un showman. Plus proche du spectacle que du réel.

Bruno Lemaire et Nicolas Dupont Aignan : je ne les connais pas. Deux candidats loin derrière, avec une notoriété très faible. NDA peut être cité comme un politique hors système avec des idées intéressantes. A la différence de BL qui lui fait partie du système.

LE CAS MLP…

Dans ce paysage politique désolé, MLP apparaît comme un cas à part. Pour une minorité peu audible sur le blog, elle reste un danger pour la France et la démocratie. Ces participants sont sûrs de leurs convictions, mais n’entrent jamais dans une discussion réelle avec les autres. Oui avec Marine le Pen au pouvoir, on risque de frôler la dictature et de se retrouver dans la panade. Les grèves et

les émeutes vont être très nombreuses en France. - Lannig

Page 11: La porte étroite

11

 

Pour un noyau dur actif, elle apparaît comme un espoir assumé et même revendiqué, la seule vraiment choisie parmi tous les candidats évoqués.

Pour moi le choix se résume à une seule candidate. Je ne la mettrais pas au même niveau que les candidats des partis qui ont ruiné notre pays depuis 40 ans. 2100 milliards de dettes ça suffit maintenant. Sans une réaction

forte, notre pays rejoindra la Grèce avec une situation désastreuse. - Nad Pour une minorité forte et audible sur le blog, c’est une solution susceptible de les intéresser, qu’ils déclarent venir de la gauche ou de la droite. Comme si elle était devenue un repère en fonction duquel on peut se situer, ancrée sur 3 piliers solides :

1. MLP fixe l’agenda des idées. Comme Nicolas Sarkozy en 2005-2007, elle réussit à être

identifiée grâce à quelques positions clairement énoncées et appropriées, touchant à l’immigration et à l’Europe, à l’euro, aux frontières. Les autres candidats sont évalués sur des postures, des historiques, des traits de personnalité, elle l’est d’abord sur des idées. Même sur l’économie elle a des idées, contestables mais discutables, qui la mettent dans la course.

La seule qui a le courage de ses opinions, mais pour laquelle je ne voterai pas non plus car je ne suis pas d’accord avec beaucoup de ses idées, est Marine Le Pen. Elle a une réflexion incroyable qui me sidère dans

bien des cas et malgré les critiques sur le FN certaines idées sont plus qu’intéressantes.  – Kikicapuchon

Marine Le Pen, que son parti soit décrié ou acclamé, il est désormais au centre de la politique, ce qui fait d’elle une vraie femme de pouvoir. - Esperluette

2. MLP assume un degré de brutalité en phase avec les attentes. Il ne s’agit pas pour ceux

qui déclarent adhérer ou être sensibles à ses propos de faire preuve d’extrêmisme. Mais simplement d’être en phase avec la violence de la situation, avec la violence du réel telle qu’ils déclarent la vivre, telle qu’ils la ressentent à travers ce que les media leur en rapportent, telle qu’ils l’imaginent demain.

Marine le Pen sort son épingle du jeu car elle propose des programmes violents qui feront bouger la France, c’est certain. Elle ira droit au but concernant les migrants, l’emploi, la sécurité… Ce sera un régime austère

mais ne faut-il pas provoquer ce régime pour donner un bon coup de pied dans la fourmillière que forment les autres politiciens?  - Surfie.

3. MLP rassemble, jusqu’à un certain point. Paradoxe de cette investigation : malgré son

ancrage au FN, elle réussit à rassembler au delà d’un clivage droite-gauche de moins en moins compréhensible pour les participants, et à ne pas s’inscrire explicitement dans une tradition d’extrême-droite – personne sur le blog ne dénonce de « dérapages » racistes ou antisémites de sa part, même ceux qui dénoncent ses idées. Et les thématiques qui constituent le fonds de son positionnement politique, comme l’insécurité culturelle, sont devenues incontournables même si la priorité reste l’emploi. Comme si c’était le réel qui était devenu d’extrême-droite.

Je suis assez d’accord, on diabolise le FN mais plus j’écoute, je lis leur programme ce n’est plus le FN de Jean-Marie Le Pen. Il y a pas mal de bonnes idées sur la sécurité et l’emploi. Et la France est au premier

plan. Le reste (Europe, immigration) au second plan, mais vu l’état du pays, c’est ce qu il faut. – Sandrine, 26-45 ans, sympathisante droite

C’est Marine le Pen la « meilleure » pour des solutions radicales contre l’immigration – Surfie, 46-65 ans,

sympathisante gauche

Page 12: La porte étroite

12

 

Marine le Pen a eu une trés bonne idée en disant qu’il fallait expulser toutes les personnes classées S ! Au

moins cela les rendrait incapables de commettre des crimes atroces et inutiles dans notre pays. Sur ce sujet, c’est la seule en qui j’ai le plus confiance, trop de laxisme et un manque de suivi de ces êtres assoiffés de sang nous

amènent a penser qu’ils sont assez libres de leurs mouvements – Jordan, 18-25 ans, sympathisant gauche

Qui pour remplacer M. le Président Hollande, qui fera mieux? Peut être Marine Le Pen après tout on ne peut pas savoir et après tout on a tout essayé alors pourquoi pas Marine Le Pen je pense en tout cas moi

qu’elle a le potentiel pour gérer la France. Non? – Spatchi, 46-65 ans, sympathisant droite Parmi ces 10 personnalités, seule MLP parvient à déclencher une envie auprès d’une minorité plus audible qu’elle ne l’a jamais été, souvent incertaine mais séduite. Cela peut-il suffire à en faire un choix suffisamment robuste pour qu’elle fasse la différence en 2017 ?

u

Page 13: La porte étroite

13

 

4. Au-delà de la tentation MLP, qui passera par la porte étroite ?

Pour autant, la montée aux extrêmes que cette conversation semble exprimer ou confirmer est-elle irrésistible ? Quand les débats cristalliseront autour de thématiques plus précises et plus engageantes, que se passera-t-il ? C’est ce que nous avons tenté d’explorer en proposant à nos participants de réévaluer chacun des candidats à l’aune des 3 thématiques qui constituent leurs priorités. Cet exercice fait bouger les lignes. AVOIR BESOIN, AVOIR ENVIE Parce qu’il conduit à passer de l’envie au besoin. L’envie : le désir d’autre chose, d’un choix politique assumé, même et surtout dans sa radicalité. Le besoin : la nécessité de respecter le réel, les équilibres de la société, de ne pas provoquer de réactions en chaîne incontrôlables, ni de conflits majeurs. La porte devient très étroite : il faut assumer la brutalité de celui qui va accepter de casser des œufs, mais avoir l’habileté de celui qui saura le faire sans provoquer de catastrophes. Dans le contexte d’une société française perçue comme fragilisée et inflammable, reconsidérer l’offre politique en se demandant qui serait le choix le plus pertinent pour relancer l’économie, gérer au mieux les questions d’intégration et assurer la paix civile, c’est réviser son jugement, au moins partiellement. Passer du dirigeant fantasmé au dirigeant réel, de l’homme ou la femme de demain à l’homme ou la femme de la situation.

Actuellement la France est en situation de crise, ne nous voilons pas la face. Que ce soit la gauche, la droite ou un autre parti au pouvoir je ne pense pas que la situation serait différente. La croissance économique et le chômage sont

au centre des discussions depuis un certain moment déjà mais aucune solution concrète n’a encore été trouvée. Au niveau de l’immigration certains candidats (pour ne pas les citer) auraient des solutions radicales, sont-elles les

meilleures ? – bibiblue1 MLP : AVOIR ENVIE MAIS AVOIR PEUR. Dans cette configuration, MLP perd de sa capacité d’attraction : inspirante parce qu’elle a des idées fortes, elle n’est pas rassurante parce qu’elle pourrait les appliquer. Le fait qu’elle fasse peur plus qu’envie sur certains sujets est indéniable. La perspective de la guerre civile n’est pas loin, pour ces Français, quand ils l’imaginent au pouvoir aux prises avec la question de l’immigration : ce qui fait la force de son positionnement fait aussi sa faiblesse relative. Mais il ne faut pas s’y tromper : sur l’économie, pour une minorité très audible, la peur ne change pas la donne. Comme si arrivés à ce point de difficultés en termes d’emploi et de pouvoir d’achat, d’exténuation, le risque MLP valait le coup.

Comme je suis exténué de l’incompétence des politiciens de notre pays je serais bien tenté de dire que Marine LE

PEN est peut-être la solution mais j’ai bien peur qu’elle ne soit trop excessive dans ses propos et je crains donc ses débordements si elle passe au pouvoir. – Titi95

Pour le défi de l’immigration, le parti FN de MLP part favori car c’est sur cet axe qu’elle espère convaincre ses

électeurs. Mais je trouve que ses propositions sont trop radicales. Je vois plus un homme comme M. Sarkozy quand il était Ministre de l’Interieur il a fait preuve de fermeté mais aussi de justice, et je pense que c’est avec cette vision

que l’on peut régler cette question sur le long terme. - valentina

Page 14: La porte étroite

14

 

MANUEL VALLS, SEUL A GAUCHE. Dans cette configuration où l’on cherche « l’homme de la situation », Manuel Valls tire son épingle du jeu, sans devenir le choix de l’évidence pour tous. Sa personnalité et son action actuelle incitent en effet à le croire capable de « casser des œufs » sans mettre le feu à la maison. Energie, rudesse, voire brutalité, capacité à aller au-delà de son camp, expérience : le mélange pourrait être pour beaucoup convaincant, qu’ils viennent de droite ou de gauche. En tout cas, il est compétitif par rapport aux autres acteurs, sur l’économie, le régalien et le culturel. Evidemment par rapport au Président qui n’existe plus dans la course, à l’instant t , dans cette conversation ; mais aussi par rapport à Nicolas Sarkozy et Alain Juppé.

VALLS : je pense qu’il serait le plus qualifié à ce poste, mi-homme de coeur mi-homme de loi. - Fabu90

JUPPE / SARKOZY : AVOIR ENVIE OU AVOIR BESOIN ? En effet : distancé en spontané, quand il s’agit de juger les candidats sur l’envie qu’ils peuvent générer – le désir de leur candidature - Nicolas Sarkozy revient dans la course quand il s’agit de juger du besoin de leur candidature. Sans être l’homme de demain, il redevient pour certains, en matière économique, l’homme de la situation – celui qui par son autorité et son expérience, même si elle n’a pas toujours été synonyme de succès, saura forcer le passage quand et comme il le faudra. Ils n’ont pas forcément envie de Nicolas Sarkozy, mais ils en ont peut-être besoin.

Sarko lui a quand même été meilleur sur certains points comme les heures sups, on n’avaient pas l’impression de

bosser pour rien. - Maelle

A contrario, Alain Juppé perd à mesure que l’évaluation devient plus concrète, plus appliquée, sur des sujets comme l’immigration sur lesquels il paraît moins à l’aise parce que moins naturellement « brutal » … Compétent, honnête, prudent, intelligent, expérimenté, il ne provoquera pas de catastrophes ou de conflits. Doté d’une stature et d’une hauteur de vue que beaucoup reconnaissent, il peut être l’homme d’un projet pour la France. Mais sera-t-il l’homme de la situation – et d’une situation anormale, explosive ? Beaucoup sont plutôt sensibles à sa personnalité mais hésitent à le penser. Ils peuvent avoir une envie de Juppé, mais en ont-ils besoin ?

Alain Juppé : pourquoi pas car il aurait l’intelligence des décisions, mais on ne sait pas grand chose de ses connaissances économiques. - tanya

Il a de bonnes idées, essaye de faire dans le collaboratif ; mais j’ai des doutes. - taorem

Alain Juppé, il a plein d’idées mais sera-t-il prêt à passer à des actions fortes, j’en doute. - devachris

Page 15: La porte étroite

15

 

LES POLITIQUES A L’ESSAI… Enfin, au-delà des personnalités en lice, c’est l’envie et le besoin d’une démocratie différente, dans laquelle les dirigeants seraient non seulement élus mais contrôlés en permanence, qui se font jour… Une relation de méfiance institutionnelle, exprimée à la toute fin de cette conversation dans deux idées force sonnant à la fois comme une prière et un avertissement : si seulement les dirigeants pouvaient tenir quelques uns de leurs engagements… Si seulement on pouvait les élire avec une période d’essai d’un an renouvelable indéfiniment.

La seule chose que j’aimerais dire au prochain Président c’est de tenir ses promesses. – Kupo

Monsieur le Président de la nouvelle France des libertés, et du travail pour tous : 1) Refonte de ANPE avec des fonctionnaires capables d’aider les demandeurs d’emploi

dans leur recherche 2) Un SMIC revalorisé a 2000 EUROS

3) Des peines plus fermes contre la délinquance et le terrorisme 4) Que vos ministres soient plus intégrés dans la vie des salariés et des patrons

5) Que vous baissiez votre salaire de moitié et celui de vos ministres 6) Une pér iode d ’ e s sa i d ’un an s inon on vous v i r e . - Titof

u