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Affaire n° IGE/05/019 9 novembre 2005 LA PRÉVENTION DES CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES par Thierry LAVOUX Guy MERRHEIM membres de l’inspection générale de l’environnement

LA PRÉVENTION DES CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES€¦ · Quand la Commission Européenne agit sur la base d’une plainte, elle recueille de manière informelle les observations de l’État

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Affaire n° IGE/05/019 9 novembre 2005

LA PRÉVENTION DES CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES

par

Thierry LAVOUX Guy MERRHEIM

membres de l’inspection générale de l’environnement

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SOMMAIRE

1 LA COMMANDE ET LA METHODE......................................................1 2 RAPPEL DE QUELQUES NOTIONS DE BASE POUR COMPRENDRE LA PROCEDURE CONTENTIEUSE COMMUNAUTAIRE EN MATIERE D’ENVIRONNEMENT : ..................3

2.1 Les conséquences de l’adoption d’une législation communautaire et le contrôle de son application par la Commission Européenne :................................3 2.2 Les différents cas d’infractions et leurs conséquences :.................................4 2.3 La détermination de la France dans la mise en œuvre des directives : ............5 2.4 La promulgation du DDAC en octobre 2005 ........................................................ 9

3 LE CAS DE L’AUTOROUTE A28 DANS LA SARTHE.......................10

3.1 Les griefs de la Commission européenne : ................................................. 10 3.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain : ................... 12 3.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux : .............. 13

4 LE CAS DU MARAIS POITEVIN :.........................................................15

4.1 Les griefs de la Commission européenne : ................................................. 15 4.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain : ................... 16 4.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux : .............. 18

5 LE CAS POLLUTION EN BRETAGNE PAR LES NITRATES D’ORIGINE AGRICOLE :..............................................................................20

5.1 Les griefs de la Commission européenne : ................................................. 21 5.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain : ................... 22 5.3 Les pratiques qui, selon l’IGE, ont contribué au contentieux : ..................... 23

6 LE CAS DE L’ESTUAIRE DE LA SEINE : ...........................................25

6.1 Les griefs de la Commission européenne : ................................................. 25 6.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain : ................... 26

7 LE CAS DES DECHARGES NON AUTORISEES :..............................28

7.1 Les griefs de la Commission européenne : ................................................. 28 7.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain : ................... 30 7.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux : .............. 32

8 LES PRECONISATIONS DE LA MISSION POUR EVITER QUE NE SE DEVELOPPENT LES RISQUES DE CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES :...................................................................................33

8.1 Rappel sur la méthode :............................................................................. 33 8.2 Des pratiques de mise en œuvre à risques :................................................. 33 8.3 Évoluer vers un nouveau savoir-faire : ....................................................... 35 8.4 Six préconisations pour prévenir les contentieux communautaires............... 35

ANNEXES

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LA PREVENTION DES CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES

1 LA COMMANDE ET LA METHODE

À la demande de Monsieur le Ministre de l’écologie et du développement durable, l’inspection générale de l’environnement (IGE) a reçu mandat d’examiner, dans le cadre de son programme de travail de l’année 2005, les méthodes et les moyens susceptibles de prévenir les contentieux communautaires dans une approche déconcentrée1. Ceux-ci, de plus en plus nombreux, sont en effet de nature à pénaliser financièrement la France, à ternir son image auprès de ses partenaires de l’Union Européenne (UE) et à compromettre l’application efficace de la politique environnementale de l’Europe. Ils sont le plus souvent déclenchés par la saisine de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) via la Commission européenne par des citoyens ou des associations2. MM. Thierry Lavoux, chargé d’inspection générale et Guy Merrheim, préfet, tous deux membres de l’IGE3 ont été désignés pour répondre à cette commande. Guy Merrheim a assuré la coordination de la mission. Comme indiqué dans la note intitulée « termes de référence de la mission »4, la réflexion entreprise par la présente mission s’est inscrite pour partie dans l’esprit et le prolongement de la note de l’IGE rédigée le 8 novembre 2004 sur « l’environnement et le contentieux communautaire »5. Pour aboutir à l’élaboration de préconisations susceptibles de prévenir les contentieux communautaires, quatre étapes avaient été envisagées à l’origine de cette mission. La première consistait à établir, après consultation des directeurs d’administrations centrales (DAC) du Ministère de l’écologie et du développement durable, « la liste des sujets embarrassants sur l’ensemble du territoire national et des cas de sites plus précisément localisés qui posent un véritable problème ». Lesdites consultations se sont déroulées les 21, 22 et 26 avril. La liste définitive arrêtée après prise en compte des souhaits des DAC a été fixée comme suit :

- L’autoroute A28 qui intéresse particulièrement la Direction des Études Économiques et de l’Évaluation Environnementale (D4E) ;

- Le marais poitevin qui intéresse la Direction de l’Eau (DE) et la Direction de la Nature et des Parcs (DNP) ;

1 Lettre de commande de la Direction Générale de l’Administration des Finances et des Affaires Internationales en annexe 1. 2 Au 7 octobre 2004, à l’image des années précédentes, plus du tiers des plaintes examinées par la Commission, concernent le secteur de l’environnement, et plus de la moitié d’entre-elles ont pour origine des plaignants particuliers ou associatifs. 3 Annexe 2 : « Ordre de Mission ». 4 Annexe 3 : « Termes de référence de la mission ». 5 Annexe 4 : « L’environnement et le contentieux européen » 8 novembre 2004.

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- La pollution en Bretagne par les nitrates d’origine agricole qui est du domaine de compétences de la DE ;

- L’estuaire de la Seine qui intéresse particulièrement la DNP. Ces quatre cas représentent les contentieux limités à une zone géographique précise,

- Les décharges non autorisées qui intéressent particulièrement la Direction de la Prévention des Pollutions et des Risques (DPPR) ;

- La directive eaux usées résiduaires dont est responsable la DE. Ces deux derniers cas ont été choisis comme sujets horizontaux puisqu’ils ne concernent pas un espace géographique particulier. Les notes techniques que devaient nous fournir les services concernés par ces dossiers avant que ne soient pris les contacts avec les préfets intéressés nous ont été remis jusqu’au 30 juin. Dans la mesure où la mission a décidé de faire de chaque acteur concerné par un des cas retenus, qu’ils soient élus locaux, responsables de directions déconcentrées de l’État, représentants de Chambres consulaires ou d’organisations professionnelles, animateurs du milieu associatif, un interlocuteur privilégié, un praticien en mesure de contribuer utilement à la compréhension des difficultés rencontrées, la deuxième étape a consisté en une série de déplacements sur le terrain d’audiences, de rencontres, d’échanges et d’écoutes. Une troisième étape devait nous conduire à rencontrer de nouveau chaque acteur de terrain, malheureusement, pour des raisons liées aux actualités locales, l’avant-dernière visite prévue dans le cadre de la deuxième étape ne put être organisée que le 13 septembre. Le déplacement prévu à Marseille pour comprendre les difficultés d’application des actions liées à la directive eaux usées résiduaires, fut quant à lui annulé pour des raisons indépendantes de la volonté de la mission. Cette situation et l’engagement de remettre le présent rapport à Madame la Ministre de l’écologie et du développement durable début novembre 2005 combinés à la richesse des constats déjà effectués a conduit la mission de l’IGE à faire de cette troisième étape l’ultime séquence de son travail de rédaction et de proposition. Dans le premier chapitre du présent rapport, nous rappellerons quelques notions de base pour comprendre les procédures contentieuses communautaires en matière d’environnement. Dans les chapitres suivants, chacun des cinq dossiers finalement étudiés, autoroute A28, marais poitevin, pollution en Bretagne par les nitrates d’origine agricole, estuaire de la Seine, décharges non autorisées, fait l’objet d’un diagnostic général sur l’état des lieux, les griefs de la Commission Européenne et les causes de la situation contentieuse ou précontentieuse. Enfin, dans un huitième et dernier chapitre, la mission de l’IGE propose une série de préconisations susceptibles de contenir, à l’avenir, les risques de contentieux.

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2 RAPPEL DE QUELQUES NOTIONS DE BASE POUR

COMPRENDRE LA PROCEDURE CONTENTIEUSE COMMUNAUTAIRE EN MATIERE D’ENVIRONNEMENT :

L’important volume législatif qui constitue le socle de la politique environnementale de l’UE, qui a pris corps au début des années 19706 couvre désormais un ensemble de sujets extrêmement vaste, puisque l’environnement lui-même n’a quasiment pas de frontières, ni géographiques, ni disciplinaires, et touche à de très nombreux domaines. Le droit élaboré par la Communauté européenne est essentiellement composé de directives et de règlements. Les règlements s’appliquent directement dans les États membres alors que les directives doivent être transposées dans le droit national de chacun des États avant d’avoir force de loi. On recense, à l’heure actuelle, environ 300 à 350 textes de base, obligatoires dans le domaine de l’environnement, dont la comptabilité précise n’est pas chose aisée du fait qu’à chaque fois qu’un nouvel État entre dans l’UE, une modification purement formelle de l’ensemble des textes intervient, ce qui ne change rien au fond, mais qui augmente néanmoins leur nombre artificiellement.

2.1 Les conséquences de l’adoption d’une législation communautaire et le contrôle de son application par la Commission Européenne :

Dès lors qu’une directive est adoptée et publiée au Journal officiel des Communautés, elle doit être non seulement transposée dans des délais précisés dans le texte (le plus souvent deux ans), mais elle doit être également appliquée en pratique et l’État membre doit être en mesure d’en rendre compte. Ceci ne s’effectue pas de manière simple. Il y a d’abord des difficultés spécifiquement juridiques, dues aux particularités des droits nationaux dans lesquels doit se « couler » le texte communautaire ou dues, entre autres, aux structures constitutionnelles et administratives des pays. Ainsi les États fédéraux ou régionalisés doivent compter avec leurs régions ou États fédérés, qui peuvent détenir des compétences législatives autonomes, et doivent alors transposer eux-mêmes les textes communautaires, ou bien déclinent, avec une marge de manœuvre plus ou moins grande, les réglementations nationales fédérales. Rappelons que Bruxelles ne reconnaît que le niveau national et qu’un État membre ne peut exciper de son organisation politique et administrative pour s’exonérer de l’obligation de résultats qu’imposent les directives européennes. Les sources d’information que la Commission Européenne utilise pour déceler des cas de violation du droit communautaire sont variées et vont de l’activité de la Direction Générale de l’environnement (DGENV) surtout dans les cas de non-transposition ou de mauvaise

6 Le premier programme d’action (1973-1977) posait les grands principes de l’action de la Communauté en matière d’environnement, ainsi que les domaines d’intervention prioritaires (eau et déchets pour l’essentiel)

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transposition d’une directive, aux questions posées par des membres du Parlement européen, aux pétitions adressés au même Parlement ou encore aux plaintes déposées par des particuliers ou des associations auprès de la Commission. En matière d’environnement, les plaintes revêtent une importance toute particulière, tant du point de vue quantitatif que qualitatif. En effet, elles permettent aux intéressés d’informer la Commission Européenne de l’existence d’une violation, remédiant ainsi à la carence d’informations qui lui interdit de suivre correctement l’application pratique de la législation communautaire. Par ce biais, et par l’intermédiaire de la Commission Européenne, les plaignants font ainsi pression sur les autorités compétentes des États membres, sans avoir à démontrer l’existence d’un quelconque intérêt et sans aucune formalité. Quand la Commission Européenne agit sur la base d’une plainte, elle recueille de manière informelle les observations de l’État membre concerné avant l’étape de la « mise en demeure » et, si nécessaire, invite le plaignant à commenter les explications fournies par l’État. En tout état de cause, la Commission informe le plaignant de la suite donnée à son initiative. En 20047, 336 plaintes ont été instruites par la Commission dans le domaine de l’environnement.

2.2 Les différents cas d’infractions et leurs conséquences :

Dans de nombreux cas, y compris en matière d’environnement, l’objet de la procédure en manquement8 est lancée parce que les États membres n’ont pas adopté dans les délais prescrits ni communiqué à la Commission les dispositions nationales nécessaires pour mettre en œuvre une directive. D’ailleurs, l’ouverture de la procédure est automatique dans ce genre de cas. L’intérêt juridique de cette catégorie d’affaires est limité puisqu’en cas de saisine de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE), celle-ci se borne à constater que l’État membre a omis d’adopter toutes les mesures requises. La plupart de ces procédures font l’objet d’un classement avant même la saisine de la Cour. L’on peut signaler, tout au plus, que la mise en œuvre des directives environnementales pose des problèmes particuliers lorsque les autorités nationales sont tenues d’adopter, outre des textes législatifs ou réglementaires de type classique, des programmes de réduction de la pollution dont l’établissement exige une enquête technique préalable et un effort de planification considérable, ou bien encore doivent définir des zonages dont les caractéristiques correspondent très exactement à ce que prescrivent les annexes techniques des directives (cas par exemple des directives « Nitrates », « Habitats », « Eaux urbaines usées »). D’autres procédures concernent les cas où les dispositions nationales s’avèrent incomplètes ou juridiquement insuffisantes, ou transposent de manière imparfaite la directive. Additionnées à celles de la catégorie précédente, ces affaires représentent actuellement la très grande majorité des affaires jugées par la CJCE.

7 Sixth annual survey of the implementation and enforcement of community environmental law 2004. SEC(2005)1055. 8 Article 226 du traité « Si la Commission estime qu'un État membre a manqué à une des obligations qui lui incombent en vertu du présent traité, elle émet un avis motivé à ce sujet, après avoir mis cet État en mesure de présenter ses observations. Si l'État en cause ne se conforme pas à cet avis dans le délai déterminé par la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de justice »

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Les arrêts par lesquels la CJCE constate le manquement n’ont, à ce stade, qu’une valeur déclaratoire. Il appartient à l’État membre de prendre les mesures que comporte l’exécution de l'arrêt de la CJCE. La jurisprudence précise que l’exécution doit être entamée immédiatement et doit aboutir dans les meilleurs délais. Au cas où l’État membre omettrait de se conformer à l’arrêt, l’article 228 du traité CE attribue à la Commission Européenne le pouvoir de saisir à nouveau la CJCE, après une nouvelle procédure comportant lettre de mise en demeure et avis motivé, en indiquant le montant de la somme forfaitaire ou de l’astreinte qu’elle estime adapté aux circonstances. La CJCE peut alors infliger à l’État membre défaillant une pénalité forfaitaire et/ou une astreinte. Le montant des sanctions pécuniaires tient compte de la gravité de l’infraction et de ses conséquences pour la Communauté (dommages graves et irréparables causés à la santé humaine ou à l’environnement, préjudices économiques ou immatériels,…) et de la durée de l’infraction (la « bonne volonté » de l’État membre est évaluée par rapport à la durée de la procédure). À ces deux critères s’ajoute un paramètre fixe fondé sur la capacité financière de chaque État exprimée par son PIB et de son nombre de voix au Conseil. À titre d’exemple, l’astreinte demandée par la Commission Européenne pour le non-respect d’un arrêt de la CJCE par la France relativement à la directive Oiseaux s’élevait en 1998 à 105 500 €/jour. Pour l’Italie qui ne se conformait pas à un arrêt concernant la directive eaux urbaines usées, l’astreinte était fixée à 185 850 €/jour9. Plus récemment, la France a été condamnée par un arrêt de la CJCE du 12 juillet 2005 (affaire C-304/02) dans une affaire concernant l’inexécution d’un arrêt de 1991 portant notamment sur la taille des filets de pêche, à une astreinte semestrielle de 57 761 250 € (316 500 € x 182,5 jours) et une amende forfaitaire de 20 millions d’€. Ce décalage entre procédures entamées (dans le cas présent 1991) et arrêts rendus (2005) s’explique par la longueur et la complexité de la procédure, mais aussi par le fait que certains cas peuvent être rapidement classés après que l’État membre concerné ait fourni les explications nécessaires, ou encore par le fait que la Commission Européenne, ne visant pas expressément à faire condamner par la CJCE un État membre « récalcitrant », cherche plutôt à faire pression sur le pays en question afin que ce dernier fasse cesser le manquement qui lui est reproché. Même si la Commission Européenne peut légalement poursuivre la procédure jusqu’au bout dans les cas où l’État membre ne s’est pas conformé à l’avis motivé dans le délai qui lui a été imparti, sa pratique consiste à classer les cas dans lesquels celui-ci a finalement mis fin à l’infraction et à se désister des recours déjà introduits devant la CJCE. De la sorte, elle tire profit de l’intérêt de chaque État membre d’éviter un arrêt constatant le manquement, ne serait-ce que pour des raisons d’image.

2.3 La détermination de la France dans la mise en œuvre des directives :

Dans le domaine de l’environnement, et toujours selon le rapport pré-cité, la France a fait l’objet de 11 procédures (dont 5 pour les déchets et 2 sur l’air) en manquement pour non-communication des textes de transposition et se classe dans le peloton de queue des États membres, 14 procédures pour non-conformité des textes (7 sur les directives « nature » et

9 Commission européenne, JOCE n°C30, 30.01.2001

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3 sur les directives « eau ») et se classe avant dernière. Enfin, notre pays est poursuivi pour 25 cas de mauvaise application pratique et se trouve devancé uniquement par l’Espagne, l’Italie et l’Irlande. Pour répondre de façon opérationnelle aux exigences européennes en matière de transposition, une circulaire du Premier Ministre publiée le 27 septembre 2004 préconise une « démarche intégrée » débutant dès la négociation de l’acte communautaire et s’achevant avec la notification des dispositions internes de transposition10. Un effort d'anticipation est exigé de chaque ministère dès le dépôt de la proposition d'acte communautaire, voire lors de la phase de consultations préalables à ce dépôt (consultations sur les livres verts et livres blancs, par exemple). L'effort d'anticipation doit principalement se matérialiser sous la forme d'une étude d'impact, dont la circulaire précise que « sans verser dans un formalisme excessif », elle devrait comporter un tableau de concordance, article par article, entre l'acte communautaire en cours de négociation et les dispositions internes appelées à être modifiées lors de la transposition. En outre, l'étude d'impact devrait permettre de mesurer les impacts non seulement juridiques, mais aussi techniques, budgétaires et administratifs de l'acte en cours de négociation. Il est intéressant d'observer que la circulaire estime utile de consulter, dès le stade de la négociation, les différents acteurs concernés, « y compris, le cas échéant, les organismes obligatoirement consultés au stade de l'élaboration des mesures nationales d'exécution ». Un effort de programmation doit prolonger l'effort d'anticipation. La circulaire dispose donc que, dans les trois mois suivant la transmission de l'acte communautaire adopté aux ministères responsables, ces derniers doivent adresser au SGCI un échéancier d'adoption des textes relevant de leurs attributions, accompagné d'un avant-projet de rédaction et d'un tableau de concordance définitif. C'est surtout au stade de la mise en œuvre effective des mesures de transposition que la circulaire innove. Tout d'abord, le réseau interministériel de correspondants de la transposition, mis en place par le plan d'action de 200211, doit désormais être composé de correspondants occupant de hautes fonctions hiérarchiques au sein des ministères (secrétaires généraux de départements ministériels ou directeurs d'administration centrale) et ayant donc une prise directe sur l'action normative. Ensuite, un tableau de bord semestriel sur l'état de la transposition des directives doit être envoyé à chaque ministre concerné. Enfin, et c'est là que réside la principale nouveauté, la circulaire met en place un « groupe à haut niveau » chargé de résoudre les difficultés identifiées dans le cadre du suivi interministériel de la transposition. Ce groupe, se réunissant à un rythme trimestriel, rassemble l'ensemble des correspondants de la transposition sous l'autorité conjointe du SGCI et du SGG. L'implication du SGG dans le mécanisme de suivi des transpositions constitue une donnée nouvelle, susceptible de peser fortement dans l'action administrative des ministères, compte tenu du poids politique de cet organisme, placé directement auprès du Premier ministre. Elle permet de donner plus d'efficacité aux interventions. Le ministère de l'écologie et du développement durable a engagé, avant même la publication de la circulaire, une importante réflexion interne sur les difficultés dans le

10 Annexe 5 : Circulaire du 27 septembre 2004 relative à la procédure de transposition en droit interne des directives et décisions-cadres négociées dans le cadre des institutions européennes 11 Plan d’action présenté en Conseil des ministres le 6 novembre 2002 par la ministre déléguée aux affaires européennes

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domaine de la transposition des directives environnement qui concernent toujours d'autres départements ministériels, souvent un très grand nombre, parfois la moitié de l'administration française. Selon le rapport Philipp12 : « la phase de concertation avec les responsables des activités concernées et la discussion interministérielle supposent de nombreuses réunions et des versions successives des textes de transposition. Or, le ministère de l'écologie souffre clairement du nombre réduit de juristes dans ses services. Depuis la publication, de la circulaire, une « task force juridique » se réunit une fois par mois, sous la présidence du directeur de cabinet adjoint, pour identifier les causes des retards et tenter de les surmonter. Par ailleurs, pour tenter de pallier le déficit en juristes, des contacts ont été pris avec le Conseil d'État et la Cour de cassation, afin que les services puissent saisir, pour expertise, ces deux institutions. Le ministère a enfin opté pour des mesures pratiques évitant de ralentir les procédures de transposition : d'une part, il a été convenu de ne plus solliciter l'introduction dans les mesures nationales d'exécution de dispositions n'ayant pas un lien direct avec le texte à transposer ; d'autre part, une signalétique claire des parapheurs a été adoptée pour accélérer la phase de la signature. Ces diverses modifications organisationnelles ont, semble-t-il, produit des effets divers si l'on se réfère au tableau suivant :

12 Rapport d’information n°2447 déposé par la délégation pour l’Union Européenne sur la transposition des directives, Juillet 2005, Assemblée Nationale

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État des transpositions au 30 juin 2005

Ministères

Nombre de directives dont le

délai de transposition est

expiré

Pour mémoire, situation au 30 juin 2004

Nombre de directives non transposées en retard de plus de deux ans

Nombre de directives non transposées nécessitant

l'intervention du législateur

Économie, Finances et Industrie

18 34 1 13

Justice 11 8 4 9 Agriculture et Pêche 11 11 0 3

Écologie et Développement durable

10 10 2 3

Santé et Solidarités 10 7 3 5 Transports, Équipement, Tourisme et Mer

5 13 1 3

Éducation nationale, Enseignement supérieur et Recherche

4 5 4 4

Emploi, Cohésion sociale et Logement

2 7 1 2

Intérieur et Aménagement du territoire

1 3 1 1

Culture et Communication 1 2 1 1

TOTAL 73 100 18 44 « S'agissant du ministère de l'écologie, les résultats semblent beaucoup moins probants à première vue (10 directives en retard de transposition au 30 juin 2005, soit le même stock que l'an passé), mais - selon les responsables auditionnés par le rapporteur - il est envisageable de supprimer l'intégralité de ce stock avant la fin de l'année (sous réserve que le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de l'environnement puisse être inscrit à l'ordre du jour du Parlement) ».

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2.4 La promulgation du DDAC en octobre 2005

L’adoption par le Parlement de la loi 2005/1319 du 26 octobre 200513 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’environnement permet la transposition en droit national de plusieurs directives : celles relatives à : • L’évaluation des incidences sur l’environnement de certains projets publics et privés (85/337) • L’accès du public à l’information sur l’environnement (2003/04) • Le contrôle des produits chimiques (2003/304) • L’évaluation et la gestion du bruit dans l’environnement (2004/1199) • La mise en décharge des déchets (1999/31) • L’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre (2004/101) S’il convient de se féliciter de cette mise en conformité, même tardive pour certains des textes, au droit communautaire, il n’en demeure pas moins que l’application pratique de ces directives devra être exemplaire pour ne pas encourir de nouvelles procédures en manquement de la part de Bruxelles. Cette loi a permis à la Ministre de prouver à la Commission la détermination de la France à rattraper son retard dans la transcription des directives. Elle renforce encore la priorité qui s’attache à une bonne mise en œuvre des 350 directives environnementales.

13 JO du 27 octobre 2005

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3 LE CAS DE L’AUTOROUTE A28 DANS LA SARTHE L’avant-projet sommaire de l’autoroute A28 Alençon-Le Mans-Tours et l’étude d’impact ont été établis entre 1987 et 1991. L’enquête préalable à la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) se déroula du 9 décembre 1991 au 24 janvier 1992. L’autoroute A28 fut inscrite au Schéma Directeur Routier National adopté le 1er avril 1992. Le projet fut déclaré d’utilité publique par décret du 20 juillet 1993, soit deux jours avant qu’intervienne, en application de la directive 92/43/CEE « Habitats » l’arrêté du 22 juillet 199314 fixant la liste des insectes protégés au nombre desquels l’Osmoderma eremita plus connu sous le nom de scarabée Barbot ou pique prune. L’État a concédé la construction, l’entretien et l’exploitation de l’autoroute A28 à la société Cofiroute par décret en date du 21 avril 1994 et un décret du 26 septembre 1995 fixe les conditions techniques et financières pour sa réalisation. En fin d’année 1996, des riverains du tracé de l’autoroute A28 et des associations de protection de la nature interpellent le Ministre de l’Équipement en se référant à une découverte de larves d’un coléoptère nommé Osmoderma eremita, mais aussi de deux autres espèces d’insectes : le grand capricorne (Cerambyx cerdo Linné) et le lucane cerf-volant (Lucanus cervus) qu’aurait faite en 1994 un entomologiste amateur à la lisière de la forêt de Bercé, autour du tracé de la future autoroute, et ils déposent plainte auprès de la Commission Européenne courant 1997 pour non-respect de la directive 92/43/CEE « Habitats ». Suite à la découverte de l’Osmoderma eremita au sud de la commune d’Ecommoy, le chantier de l’autoroute est stoppé et une expertise scientifique est confiée, le 31 mai 1997, au muséum national d’histoire naturelle (MNHN), pour recenser l’habitat des trois coléoptères protégés susceptibles de se trouver dans l’emprise de l’autoroute et d’envisager des mesures compensatoires. Le rapport produit par le MNHN en juin 1998 a conduit à une reprise des travaux de l’autoroute au nord de la commune d’Ecommoy, à soumettre au MNHN l’ensemble des travaux de remembrement, à suspendre les travaux de l’autoroute qui devaient être engagés fin 1998 au sud d’Ecommoy ainsi que le remembrement. Au nord d’Ecommoy, cinq projets de remembrement ont été réalisés après avis favorable du MNHN, cinq ont été révisés et des études d’incidences ont été modifiées avant enquête publique en septembre/octobre 1999. Les remembrements ont ensuite été suivis par un comité de suivi ad hoc. Les deux tronçons de l’A28 au nord d’Ecommoy ont été mis en service en octobre 2000 et juin 2001.

3.1 Les griefs de la Commission européenne :

La Commission européenne, saisie par l’association Sarthe Nature, a adressé aux autorités françaises une première demande d’information le 29 mars 1999 à laquelle il a été répondu le 5 octobre 1999. Une seconde demande d’information est adressée par la Commission européenne le 1er septembre 2000 à laquelle il est répondu le 26 octobre 2000. Il semble que la commission n’ait pas reçu cette réponse, d’où une mise en demeure adressée à la France le 10 avril 2001. Le 25 avril 2001, le Ministère adresse à la Commission Européenne un

14 Annexe 5 avec l’arrêté du 16 décembre 2004 le modifiant

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exemplaire du courrier du 26 octobre 2000 accompagné du rapport du MNHN. Une nouvelle note des autorités françaises est envoyée le 12 juin 2001 à la Commission Européenne.

La Commission Européenne insatisfaite de la réponse française adresse un avis motivé au titre de l’article 226 du traité CE, dernière étape avant la saisine de la Cour de justice le 21 décembre 2001 au motif que notre pays ne s’est pas conformé : - d’une part aux obligations des articles 5, 6 et 8 de la directive 85/337/CEE « Étude d’impact »15 qui disposent que le maître d’ouvrage doit fournir une « description des éléments de l’environnement susceptibles d’être affectés de manière notable par le projet proposé y compris notamment la population, la faune, la flore, le sol, l’eau, l’air, les facteurs climatiques, les biens matériels, y compris le patrimoine architectural et archéologique, le paysage ainsi que l’interrelation entre les facteurs précités », que les résultats recueillis lors de cette étude doivent être mis à la disposition du public et être pris en considération dans le cadre de la procédure d’autorisation ; - d’autre part aux obligations des articles 4 paragraphe 1, et 12 paragraphe 1 point d) de la directive 92/43/CEE « Habitats » en application desquels il n’était notamment pas possible de détruire des arbres qui constituent des sites de reproduction du pique-prune.

Dans la réponse adressée le 3 avril 2003 par les autorités françaises à la Commission Européenne plusieurs engagements ont été pris : - extension du site d’intérêt communautaire (SIC) Natura 2000 qui passerait de 1390 ha à 4723 ha pour respecter la directive 92/43/CEE « Habitats » avec document d’objectif (DOCOB) à l’appui. La Commission Européenne a été destinataire de cette décision le 23 décembre 2004 ; - La mise en place d’un plan de gestion au niveau national et local de l’Osmoderma eremita. La commission européenne a été informée, dans ce cadre, de l’état d’avancement de deux DOCOB des sites FR 5202003 « Bocage à Osmoderma eremita entre Sillé le Guillaume et Grande Charnie », FR 5202004 « Bocage à Osmoderma eremita au nord de la forêt de Perseigne » et FR 5202005 « Châtaigneraies à Osmoderma eremita au sud du Mans ». Ces deux DOCOB doivent être approuvés courant 2005 ; - pour atténuer l’effet de coupure dû à l’autoroute, les transferts de cavités autorisées par arrêté préfectoral du 29 septembre 2003 s’accompagne en annexe d’un protocole avec Cofiroute daté du 26 septembre. L’ensemble a été transmis à la Commission Européenne le 5 octobre 2004 ; - Les études d’impact des remembrements ont été envoyées à la Commission Européenne le 12 janvier 2005 ; - des dérogations au titre de l’article 16 de la directive 92/43/CEE « Habitats » ont fait l’objet de l’arrêté du 16 décembre 2004 modifiant l’arrêté du 22 juillet 1993 fixant la liste des insectes protégés sur le territoire national16.

15 Directive concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement du 27 juin 1985 16 l’arrêté du 16 décembre 2004 peut être consulté annexe 5

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3.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain :

Monsieur le préfet de la Sarthe, informé par courrier du 25 mai 200517 du souhait de la mission de venir sur le terrain, nous a proposé un déplacement qui a eu lieu au Mans le mardi 21 juin 2005. Durant cette journée, la mission a d’abord visité le site de l’autoroute A28 ainsi que deux des trois sites de transfert de cavités autorisés en compagnie de M. Vincent Vignon de l’Office de Génie Écologique, responsable du suivi des transferts, de responsables de la Préfecture, de la DDE, de la DIREN, de la DDAF, de Cofiroute et de la société SOCASO. Elle a ensuite assisté à une réunion du Comité de suivi des études et travaux dans le cadre de la protection de l’Osmoderma eremita, avant de rencontrer Madame Hercent de l’association Sarthe Nature Environnement. Enfin, la mission a participé à une réunion avec les services de l’État et du Conseil Général de la Sarthe et de Cofiroute concernés par ce dossier.

Des échanges que la mission de l’IGE suscitent et des discussions spontanées qui surgissent en différents lieux et contextes durant cette journée, il est noté : - que le suivi de transfert des cavités mis en place il y a deux ans durera vraisemblablement dix années ; - que le remembrement lié au chantier de l’A28 est très favorable au retour à un bocage de qualité et à un environnement plus en rapport avec le maintien du pique-prune ;

- que si ce remembrement est un modèle, selon la représentante de Sarthe Nature Environnement, « c’est qu’il y a eut un grain de sable appelé pique-prune, et qu’à l’avenir, mieux vaudrait ne pas attendre le prochain grain de sable pour agir » ; - que la DIREN aurait du être informée en temps utile, autrement dit bien plus tôt, des espèces d’insectes protégées ;

- que l’existence du pique-prune dans la Sarthe était connue depuis le XIXème siècle mais que cet insecte est aussi présent dans le département de l’Orne, également concerné par le passage de l’A28. (pour ajouter à cette observation, M. Vignon signale qu’en Aveyron, dans le cadre du projet routier RN88, la prise en compte de la présence du pique-prune n’est que sélective et partielle)18 ;

- que le soutien des administrations centrales à l’endroit des administrations déconcentrées n’a pas toujours été perçu comme une évidence ;

- qu’il y avait eu interférence entre un climat national délétère et ce dossier que le milieu associatif avait peut-être voulu prendre en exemple en réponse au sentiment d’avoir du « avaler beaucoup de couleuvres » sur d’autres projets ;

- qu’en février 2002, un fonctionnaire d’une direction centrale du Ministère aurait pu « intervenir en sous main au profit d’opposants au projet de l’A28 » pour ralentir sa réalisation ; - que des divergences apparaissent en mars 2003, entre les DIREN de Pays de Loire et Basse-Normandie dans la lecture d’un rapport scientifique.

17 annexe 6 18 lettre datée du 6 juillet 2005 de M. Vincent Vignon, directeur associé de l’Office du Génie Écologique en annexe 7

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3.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux :

Après avoir analysé ce que, très librement, les différents acteurs locaux de ce dossier nous ont dit être, de leur point de vue, les raisons qui avaient conduit au contentieux, la mission a établi une liste non exhaustive de pratiques, de méconnaissances et d’omissions qui ont largement contribué au déclenchement de ce contentieux avec la Commission Européenne. Tous les niveaux de l’organisation publique française sont ici comme souvent ailleurs, concernés par des comportements qui devront, dans certains cas, largement évoluer pour permettre d’éviter à l’avenir que ce type de contentieux communautaires ne se développe : - dans le cas de l’autoroute A28, la mission de l’IGE constate une imparfaite connaissance voire une non reconnaissance de la prédominance du droit communautaire sur le droit national, de la part des administrations centrales, des services déconcentrés et d’un certain nombre d’acteurs locaux ; - dans le même esprit, le fait que ledit contentieux avec la Commission Européenne soit partiellement lié au retard de transmission d’informations à Bruxelles, lui même dû au mauvais acheminement de courrier, révèle une proximité insuffisante entre administrations communautaire et nationale ; - on retrouve ce même cloisonnement à l’intérieur du service public de l’État. En effet, la solidarité entre services de l’administration centrale et services déconcentrés n’est pas suffisamment avérée. Dans le cas présent, alors que le processus de décision particulier devrait obliger ces deux niveaux d’expression de l’État à agir en parfaite communion d’esprit, on constate que la parole de l’un peut-être contredite par celle de l’autre. En effet, si les services déconcentrés sont chargés de gérer la concertation et les négociations et de rechercher les compromis les mieux adaptés avec les différents acteurs concernés localement, c’est le niveau central qui, en définitive, signe la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) après avoir, le cas échéant, plus ou moins modifié le projet sans en avertir préalablement le service déconcentré ; - à l’origine, le contentieux vient de l’absence de prise en compte, dans l’étude d’impact qui doit être jointe à l’enquête publique, d’une espèce menacée (Osmoderma eremita). Certes, l’espèce n’est pas à l’époque réglementairement protégée, mais elle est déjà signalée dans la « liste rouge »19 des espèces rares. Une étude d’incidence satisfaisante aurait du signaler la présence du pique prune et prévoir des mesures compensatoires ; - l’exigence dans la pratique de la concertation n’est pas la même pour chacune des parties prenantes du dossier de l’A28. Sur ce point essentiel en matière de management de grands projets on constate des inégalités flagrantes, voire une grande lacune dans la culture professionnelle de trop nombreux décideurs publics qui considèrent la procédure d’enquête publique, qui est pourtant obligatoire, comme une démarche suffisante en matière de concertation. Quand certains disent souhaiter une concertation active dès les prémices de la pré-étude, d’autres ne l’envisagent que plus tardivement, voire après la saisine de la Commission Européenne par des opposants, c’est à dire trop tard pour éviter le déclenchement d’une procédure potentiellement contentieuse. Ainsi ne peut-on pas

19 La Liste rouge de l’IUCN (union internationale pour la conservation de la nature) constitue l’inventaire le plus complet de l’état de conservation global des espèces végétales et animales. Le dernier inventaire qui date de 2004 est disponible sur le site : www.redlist.org

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exclure, dans le cas de l’A28, que des naturalistes proches de Sarthe Nature Environnement, connaissant l’existence du scarabée pique-prune, choisirent d’apporter leur concours aux opposants du projet pour exprimer le mécontentement de n’être pas, en temps utile, suffisamment reconnu comme partenaire, éventuellement critique du projet ; - alors que le département de l’Orne, lui aussi traversé par l’A28, est également concerné par l’habitat du pique-prune, les travaux n’ont pas connu de retard et des précautions de sauvegarde ne furent pas prises du fait que la Commission Européenne ne fit pas l’objet d’une saisine. Ce constat conduit la mission à souligner que dans le cas d’un projet inter-régional comme celui de l’A28, se pose un problème de niveau de pertinence de l’autorité responsable.

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4 LE CAS DU MARAIS POITEVIN :

De par son étendue, le Marais Poitevin est la deuxième zone humide de France après la Camargue. D’une superficie de 100 000 ha, elle est d’un grand intérêt pour la faune et pour la flore du fait de la diversité de ses milieux naturels (marais et plans d’eau, tourbières, réseau de fossés et canaux, prairies, boisements, bocages, roselières, vasières, mizottes, lagunes, dunes…). Le Marais Poitevin est aussi un territoire privilégié pour l’accueil de nombreuses espèces d’oiseaux. On dénombre 61 espèces inscrites à l’annexe I de la Directive 79/409 du 2 avril 1979, dite « Oiseaux », et 56 espèces migratrices, soit plus de la moitié des espèces d’oiseaux protégées en France au titre de ladite directive. Le Marais Poitevin, du fait de ses caractéristiques, fait l’objet d’une désignation comme Zone de Protection Spéciale (ZPS) au titre de la Directive « oiseaux » et a été retenu comme site d’intérêt communautaire au titre de la Directive 92/43 du 21 mai 1992, dite « Habitats ». Les périmètres de ces deux zones coïncident et s’étendent, depuis décembre 2003, sur 68 023 ha sur les trois départements de Charente-Maritime, Deux-Sèvres et Vendée.

Le Marais Poitevin a toutefois perdu une partie de son intérêt écologique du fait de mutations agricoles qui ont conduit à une réduction de l’ordre de 50 % de la surface des prairies depuis 30 ans et principalement entre 1973 et 1990, et d’une gestion hydraulique défavorable au milieu naturel. Ces évolutions ont des effets négatifs qui se sont traduites par le non renouvellement du label du Parc Naturel Régional du Marais Poitevin ainsi que par une série de contentieux liés à la mauvaise application des directives européennes sur la nature. Les propositions20 de reconquête de la prairie ne suscitent cependant pas l’adhésion du monde agricole qui se compose aujourd’hui d’environ 1600 exploitations.

4.1 Les griefs de la Commission européenne :

Estimant que les mesures prises par l’État pour remédier à cette tendance n’étaient pas à la hauteur du problème, et déçue par le bilan relatif à la préservation du patrimoine écologique, du Parc Naturel Régional du Marais Poitevin (PNR) créé en 1979 (son label n’a pas été renouvelé en 1991), l’association « coordination pour la défense du Marais Poitevin » a déposé une plainte devant la Commission Européenne en 1989, dénonçant le défaut de gestion hydraulique, l’intensification agricole et le drainage des prairies naturelles. Malgré les mesures prises localement (protocole signé en 1991) et les évolutions générales favorables au Marais Poitevin comme la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 ou la mise en œuvre de la réforme de la Politique Agricole Communautaire (PAC), la Commission Européenne a adressé à la France une mise en demeure le 23 décembre 1992, suivie d’un avis motivé le 28 novembre 1995 pour manquement à la Directive 79/409 « Oiseaux ». Les griefs invoqués par la Commission Européenne étaient l’insuffisance de la ZPS désignée et des mesures prises pour préserver les habitats des oiseaux. La procédure a abouti à une condamnation de la France par la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) le 25 novembre 1999 en application de l’article 226 du traité.

20 Voir « Un projet pour le Marais Poitevin » Pierre Roussel, IGE, décembre 2001

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La Commission Européenne, considérant que cette première procédure n’a pas produit les effets escomptés et que la France ne s’est pas donné les moyens de respecter l’arrêt de la CJCE a engagé une deuxième procédure fondée cette fois sur l’article 228 du traité, ce qui peut déboucher sur une nouvelle condamnation qui, cette fois, pourrait s’accompagner d’une astreinte financière (qui pourrait être de l’ordre de 150 000 €/jour), cumulée le cas échéant avec une amende forfaitaire. Actuellement, cette procédure en est au stade de l’avis motivé. Un plan qui porte sur 10 ans a fait l’objet d’une convention entre l’État et les collectivités locales concernées qui s’engagent à cofinancer ce plan, et une organisation exceptionnelle a été mise en place avec la nomination par décret du préfet de Poitou-Charentes comme préfet coordonnateur pour ce plan et la nomination d’un chef de projet auprès du préfet coordonnateur. Monsieur le Premier Ministre a fait connaître à la Commission Européenne en août 2003, sa détermination pour mettre en œuvre ce plan. Les engagements pris pour le court terme ont été tenus avec l’envoi, fin 2003, d’une extension de la ZPS et du document d’objectifs (DOCOB) du site, puis, en mars 2004, d’une instruction sur les drainages. Des bilans de mise en œuvre de ce plan sont périodiquement adressés à la Commission Européenne. Néanmoins, sur le terrain, les efforts d’explication et de concertation ne semblent pas calmer l’inquiétude du monde agricole qui se demande si le zonage en Natura 2000 ne risque pas d’aggraver les difficultés actuelles de l’agriculture. Les nouveaux drainages seront pratiquement interdits dans la ZPS et le financement des Contrats d’Agriculture Durable (CAD) est considéré comme insuffisant et non garanti pour l’avenir. La crainte de voir évoluer la PAC ajoute aux inquiétudes. Le Marais Poitevin a pourtant bénéficié en 2003, sous la pression du contentieux communautaire, de mesures que lui envient d’autres zones humides comme la mise en place d’engagements agri environnementaux relais, dans l’attente des CAD et d’une indemnité spéciale pour les prairies (Indemnité compensatrice de handicap naturel renforcée). Une mission d’inspection conjointe IGE/CGGREF est en cours pour améliorer le dispositif de mesures financières en faveur des prairies. Quatre recours contentieux ont été déposés en 2004, dont deux par un groupement de 27 syndicats de marais (il en existe une quarantaine dans le Marais Poitevin), un par les trois fédérations de chasse concernées et un par la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FDSEA) de Vendée et un recours gracieux par la « coordination nationale Natura 2000 », qui regroupe divers opposants à Natura 2000. Cette coordination est animée par le président de la fédération de chasse du Maine et Loire. Ces recours demandent l’annulation de l’arrêté ministériel de désignation de la ZPS.

4.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain :

Monsieur le préfet de Région Poitou Charentes et préfet coordonnateur du Marais Poitevin, informé par courrier du 27 mai 200521 du souhait de la mission de venir sur le terrain, nous a proposé un déplacement qui s’est déroulé les 5, 6 et 7 juillet 2005. Le chef de projet, qui a accompagné la mission durant ces trois journées avec son adjoint, avait fait connaître l’impossibilité de réunir l’ensemble des partenaires pour un échange commun, tant les positions étaient divergentes. Cet échange ajoutait-il se transformerait rapidement en débat polémique duquel rien ne sortirait. C’est ainsi que l’Inspection a rencontré et dialogué successivement avec des représentants des agriculteurs responsables des

21annexe 8

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chambres d’agriculture, des services déconcentrés de l’État DRAF-DDAF et DIREN eux aussi, sur les conseils du chef de projet, séparément, puisque ces services semblent défendre des politiques contradictoires, des élus locaux représentant les différents Départements, enfin des associations de protection de l’environnement concernées par le contentieux communautaire.

La mission a retenu de ces entretiens un certain nombre de thèmes sur lesquels les acteurs de terrain sont revenus assez systématiquement et qui sont présentés comme étant pour tout ou partie la cause de la situation présente au sein du Marais Poitevin : - malgré de fréquentes analyses divergentes entre acteurs locaux, certains constats apparaissent récurrents et inquiétants. Par exemple, toutes les catégories d’acteurs de terrain rencontrées par la mission ont indiqué que l’État ne parlait pas d’une seule voix, mais au contraire, défendait deux points de vue, celui des services déconcentrés du ministère de l’agriculture et celui des services déconcentrés du ministère de l’écologie et du développement durable. Les missionnaires, durant les audiences des DRAF, DDAF, et DIREN, ont constaté que cet état de fait pouvait se vérifier. Une des causes de ce qui peut apparaître comme un dysfonctionnement de l’État, c’est que la législation n’a pas toujours été correctement appliquée. Entre 1993 et 2002, alors que le Parlement avait voté la loi sur l’eau du 3 janvier 1992, les exploitants agricoles qui pratiquaient le drainage non autorisé ont poursuivi ces pratiques contraires à la loi. Plus généralement l’État est présenté par la plupart des catégories rencontrées comme ayant été incapable de faire comprendre l’évolution de sa politique, tant par le milieu socio-économique que par ses propres fonctionnaires. Certains acteurs de terrain n’ont pas hésité à mettre en cause des agentsdu MEDD, soupçonnés de fausses déclarations, quand d’autres ont indiqué que des hauts-fonctionnaires laissaient entendre que la France serait condamnée pour sa gestion du Marais Poitevin mais que cela n’avait pas d’importance ; - La fiabilité de l’information rendue publique a également fait l’objet d’une contestation et a été présentée comme une des causes du contentieux actuel. L’état des lieux des drainages par exemple n’était pas connu et reconnu par tous, de ce fait le DOCOB aurait été mis en place approximativement et trop rapidement. Des chambres d’agriculture signalent qu’elles auraient du faire procéder à la quantification du drainage agricole mais qu’elles ressentaient des arrière-pensées inquiétantes au sein du MEDD. Un autre état des lieux, celui des surfaces de prairies est qualifié de tardif et d’inexact, de ce fait, le monde agricole pense que les données contenues dans le mémoire en réponse de la France à la Commission Européenne ne sont pas exactes. Enfin des élus locaux rappellent qu’il y a une vingtaine d’années, un spécialiste départemental d’hydrogéologie aurait affirmé que la réserve de la nappe phréatique était inépuisable. Cette affirmation aurait été relayée par la DDAF, les chambres agricoles et le crédit agricole sans esprit critique et au risque d’être présentée aujourd’hui comme une des sources contestables des choix passés ; - La transcription des directives européennes est trop tardive pour certains responsables de l’administration déconcentrée de l’environnement, qui ajoutent que depuis 1976, des textes français, adaptés à la situation du Marais Poitevin, auraient permis à notre pays d’être en avance sur la mise en œuvre des directives européennes nature, si certaines DDAF et DRAF n’avaient contrarié cette mise en œuvre. Plus généralement, la politique européenne n’apparaît pas assez comme une politique intérieure ou nationale. Le milieu agricole juge qu’il y a trop de discours et de démagogie et que les hommes politiques omettent de fixer le cap. Des élus pensent que des pays comme l’Espagne ne sont pas plus ouverts que la France aux questions

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d’environnement, mais ont l’intelligence de ne pas chercher à nier leurs erreurs et à vouloir « passer en force » ; - Des représentants d’associations disent que l’objectif de la coordination à l’origine du déclenchement du contentieux n’était pas de faire condamner la France mais de faire prendre conscience du problème vital du Marais Poitevin ; - Le dialogue n’a pas été à la hauteur de l’importance du problème. Malgré la création du PNR, les grands travaux d’aménagement du marais et le projet d’autoroute au travers « la Venise verte », une réflexion globale n’a pas été organisée. Il n’y a pas eu de diagnostic partagé de la situation. La ZPS n’a pas été suffisamment discutée ce qui par exemple conduit certaines parties concernées à considérer que les fondements scientifiques étaient fragiles. Certains soulignent qu’à partir de 1996, le déclenchement de la concertation représente des mois de travail, mais celle-ci aurait du intervenir bien avant le dépôt de la plainte déposée en 1989.

4.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux :

- Ce qui est particulièrement significatif et spécifique dans le cas du Marais Poitevin, c’est la difficulté de compréhension de la politique mise en action par l’État. Sur une zone géographique particulièrement sensible, les options nationales en matière de politique agricole et de politique environnementale semblent se télescoper plus que se compléter. La présence sur le terrain de très fortes personnalités publiques ne doit pas contribuer à réduire les antagonismes entre politiques nationales agricole et écologique par essence difficiles à harmoniser. Cette conjoncture contribue à complexifier des problèmes qui peuvent se poser aussi ailleurs que dans le Marais Poitevin. Ici, la mission constate que : - Le contexte politique national et européen observé jusqu’aux années 1980 en matière de pratiques agricoles, plus productivistes et moins soucieuses des questions environnementales, est en partie la cause de la situation présente. À lui seul, ce constat devrait conduire à mieux informer les acteurs de terrain, à commencer par les fonctionnaires des administrations déconcentrées, sur les choix politiques fondamentaux de l’Europe, et par conséquent de la France, les moyens et les exigences dans leur mise en œuvre ; - Le caractère interrégional de certains dossiers comme c’est le cas pour le Marais Poitevin accentue le risque de voir s’installer une forme de cacophonie entre services dans le discours et dans la pratique. On ne peut donc que se féliciter de la décision de nommer un préfet coordonnateur avec une lettre de mission précise, en regrettant toutefois que celle-ci intervienne trop tardivement par rapport au contentieux en cours. Le fait que le préfet coordonnateur puisse s’appuyer sur un collaborateur faisant travailler sous son autorité des agents mis à sa disposition quel que soit leur service de rattachement est un gage de réussite supplémentaire. Ce cas nous enseigne aussi la nécessité de conjuguer anticipation avec prévention ; - La régression progressive des surfaces de prairies humides depuis les années 1970 est généralement admise par tous. Par contre les chiffres et les cartographies produites en 1991 par les services de l’État, mais communiquées par les associations suite à une « fuite » semble-t-il volontaire de l’administration de l’environnement de l’époque, n’a pas été validée par la profession agricole. Si la méthode, condamnable, employée dans ce cas suffit à expliquer la controverse sur la validité des documents, on peut penser qu’un effort de transparence particulier doit être

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fait en cette matière pour que les sources d’informations et leur qualité soient connues de chacun des partenaires de l’État, placés ainsi à égalité en matière d’informations. Parallèlement, les documents livrés à un public plus ou moins large, doivent faire l’objet d’une actualisation et d’une diffusion régulière au risque de perdre tout intérêt. Dans le cas présent, et à titre d’illustration, il semble que pendant une période de dix ans, aucune statistique précise n’a été produite pour mesurer les tendances diverses dans les marais de l’Ouest. De plus, si le forum des marais, financé par l’État et les collectivités locales a publié en 1997 une cartographie et des résultats montrant correctement le déclin des prairies humides dans toute la zone du Marais Poitevin, ces cartes n’ont semble-t-il pas été largement diffusées et les méthodes d’obtention des informations pas assez explicitées pour assainir un climat suspicieux sur l’origine des chiffres. Par exemple, il n’est pas impossible que le rapport Roussel, fondé sur des chiffres disponibles à l’époque, sous-estime le stock de prairies.

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5 LE CAS POLLUTION EN BRETAGNE PAR LES

NITRATES D’ORIGINE AGRICOLE :

En quelques décennies, la Bretagne a connu un essor économique, notamment agricole, qu’il faut rappeler pour mieux comprendre la difficulté de la situation actuelle en matière de dégradation de la qualité de l’eau. Dans les années 1950, l’économie de la Bretagne est à la dérive. L’agriculture de l’époque occupe la moitié de la population active et compte 200 000 exploitations d’une superficie moyenne de moins de 10ha. La Bretagne est enclavée et sous-équipée en infrastructures lourdes. Les routes y sont étroites, les liaisons aériennes quasi-inexistantes, les politiques tarifaires SNCF et énergétiques pénalisent la Région. Le réseau téléphonique est à la traîne. Les conséquences de cette situation en termes de revenus et de conditions de vie sont révélatrices d’une paupérisation : 15 % des ménages sont soumis à l’impôt sur le revenu contre 33 % au niveau national, plus de la moitié des logements ruraux sont privés d’eau courante et d’électricité, l’absence de perspectives entraîne une émigration importante et croissante. Les trois décennies qui vont suivrent et que certains ont appelé « le miracle breton » vont bouleverser le paysage économique et social de la Bretagne et vont conduire à la situation que nous connaissons aujourd’hui. En 1956, un premier plan breton prévoit la relance de l’industrie, le développement des infrastructures et le désenclavement ainsi que la modernisation de l’agriculture. L’accent est mis sur la formation des jeunes bretons. L’essor de l’agriculture s’exprime dans les années 1960 par une intensification des productions végétales, une culture plus intensive de l’herbe qui doit conduire à un développement des productions animales. Rapidement, l’exiguïté des exploitations encourage l’adoption d’un système de production plus intensif. Apparaissent les productions dites « hors sol ». C’est le début de l’élevage industriel sous forme « d’ateliers porcins ou avicoles ». Le sol breton ne suffit plus pour nourrir les animaux, il faut s’approvisionner à l’extérieur. Par l’intermédiaire des ports bretons on importe des tourteaux de soja. Des compléments de céréales proviennent d’autres régions. Dans les années 1970, la Bretagne passe à une vitesse supérieure avec la naissance d’un véritable complexe agroalimentaire. La Bretagne bénéficie de la Politique Agricole Commune (PAC) organisée alors autour du soutien des prix. C’est la période des remembrements. La production hors sol continue à se développer dans les années 1980. Les liens entre agriculture et agro-industrie se renforcent. Dans le même temps la qualité de l’eau se dégrade : l’utilisation massive des engrais, l’épandage mal contrôlé des effluents d’élevage ou des industries d’abattage ont augmenté de manière continue la teneur des eaux en phosphates et nitrates. Au total, l’activité agricole intensive est de plus en plus placée en position d’accusée pour ce qui concerne la détérioration de la qualité de l’eau. Aujourd’hui, la Bretagne est la première région de France en terme de chiffre d’affaire agricole. C’est ici que l’on compte le plus d’emplois agroalimentaires, que la production de lait, de porcs, de volaille en chair est la plus élevée du pays, mais ce modèle « productiviste » est aussi de plus en plus contesté en raison de ses impacts défavorables à bien des égards. En effet, si la fragilité économique apparaît dans certains secteurs de production, c’est surtout dans le domaine de l’environnement que les conséquences de ces pratiques agricoles sont inquiétantes. L’augmentation des surfaces en maïs au détriment de l’herbe, les apports de fertilisants, organiques et minéraux, très supérieurs aux besoins des cultures dans de

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nombreuses zones et au mauvais moment du fait de l’insuffisance de capacités de stockage d’effluents sur les exploitations agricoles, l’arasement des haies et talus22 entraînant érosion et accélération des transferts de polluants (nitrates, phosphore, pesticides), ont généré une forte dégradation de l’environnement et notamment de la qualité de l’eau.

De nombreuses dispositions réglementaires visant l’élevage ont vu le jour à partir du milieu des années 1970, mais, il faudra attendre le début des années 1990 pour que la volonté de prendre en compte les problèmes environnementaux se manifeste vraiment. Par exemple, si la loi du 19 juillet 1976 sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) constitue le socle à partir duquel les élevages intensifs peuvent être réglementés, il aura fallu attendre les arrêtés du 29 février 1992 pour les exploitations de porcs et du 13 juin 1994 pour les exploitations de volailles pour fixer des exigences ayant un « sens agronomique » notamment en matière de stockage et épandage des effluents d’élevage. De même, la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 et ses décrets d’application permettent une avancée que l’on peut regretter tardive de la réglementation. Il est cependant important de souligner que depuis le 1er septembre 1994, la Bretagne est classée dans sa totalité zone vulnérable au titre de la Directive européenne sur les nitrates de 1991.

5.1 Les griefs de la Commission européenne :

Le contentieux actuel fait suite à plusieurs plaintes. Il est relatif au dépassement de la valeur de 50 mg/l de nitrates, fixée d’une part par la directive 75/440 relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire, et d’autre part par la directive 80/778 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine. Chronologiquement, la Commission Européenne a adressé à la France une demande d’information le 1er avril 1992. La France a répondu le 11 mai 1993. Le 30 novembre 1993 une lettre de mise en demeure est adressée aux autorités françaises par la Commission Européenne. La France fera connaître ses observations les 1er février 1994, 28 novembre 1994 et 1er mars 1995. La Commission Européenne a transmis l’avis motivé le 28 octobre 1997 dans lequel elle invoque le non respect par la France des obligations découlant de l’article 4, paragraphes 1,2 et 3 de la directive 75/440/CEE. Le délai de réponse à l’avis motivé a été fixé à deux mois à compter de sa notification. La France a répondu par lettre du 2 janvier 1998. Dans cette lettre, des informations complémentaires étaient annoncées dans un délai de six semaines à compter de l’expiration du délai fixé pour la réponse de l’avis motivé. Le 18 juin 1998, soit avec quatre mois de retard, la France a communiqué ce complément d’information. La Commission Européenne a introduit un recours contre la République française devant la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) le 15 juillet 1999. À ce jour, cette affaire a fait l’objet de deux condamnations. Dans un arrêt du 28 octobre 2004, la CJCE a condamné la France pour dépassement de la valeur limite de nitrates pour une partie de l’eau distribuée en Bretagne. Sur le fond, l’exécution de cet arrêt est liée à celui du 8 mars 2001, portant sur la présence excessive de nitrates dans les eaux superficielles, également qualifiées d’eaux brutes, destinées à l’eau potable.

22 le taux d’arasement a atteint plus de 40% en trente ans (1963-1992)

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Les trois griefs retenus par la Commission Européenne concernent pour le premier l’état de la qualité des eaux brutes en Bretagne, pour le deuxième l’avancement des actions du plan d’action organique breton, pour le troisième l’élaboration des plans de gestion pour la prise d’eau en dépassement. La Commission Européenne estime que les mesures prises pour exécuter cette condamnation étaient insuffisantes. La poursuite de cette procédure est susceptible d’aboutir à une condamnation à des astreintes et/ou une amende forfaitaire. Un avis motivé, dernière étape avant une nouvelle saisine de la CJCE a été notifié à la France par la Commission Européenne en avril 2003. Un nouveau plan d’action organique et l’ensemble des 26 plans de gestion des prises d’eau encore en dépassement ont été transmis entre décembre 2003 et le 7 janvier 2005 à la Commission Européenne. Celle-ci s’est déplacée en Bretagne le 22 février 2005 pour apprécier la situation. Dans une dernière note transmise le 30 septembre 2004 à la Commission Européenne, les autorités françaises indiquent les résultats sur la qualité des eaux brutes, présentent l’état d’avancement des actions du plan d’action organique « reconquête de la qualité des eaux superficielles en Bretagne », et annoncent la transmission des sept derniers plans de gestion pour fin 2004. Dans la mesure où l’exécution de l’arrêt, en ce qui concerne le premier grief prendra plusieurs années, on peut craindre que la Commission Européenne puisse saisir à nouveau la CJCE si les mesures prises par la France sont jugées insuffisantes.

5.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain :

Madame la préfète de Région Bretagne, informée par courrier du 2 juin 200523 du souhait de la mission de se rendre sur le terrain pour rencontrer les acteurs et partenaires de ce dossier, a organisé un déplacement qui se déroula à Rennes le 13 juillet 2005. Durant cette journée, les membres de la mission de l’IGE rencontrèrent successivement des responsables associatifs, notamment « Eaux et rivières de Bretagne », des agriculteurs représentant plusieurs Chambres agricoles, des chefs de services déconcentrés de l’État, des élus locaux de divers Départements. De ces rencontres la mission retient un certain nombre de critiques, présentées par différents intervenants comme étant à l’origine du contentieux : - d’abord une transposition tardive et incomplète de la directive 75/440 qui, de l’avis de plusieurs responsables de services déconcentrés de l’État, n’a été prise au sérieux que trop tardivement, c’est à dire à partir des années 1990. A cette époque, les dépassements de la teneur maximale en nitrates fixée à 50mg/l étant rares et les risques sanitaires jugés faibles, les services ont sous-estimé les problèmes de mise en œuvre de la directive au niveau local. En outre, des régularisations d’élevages ont été pratiquées malgré les interdits de la loi, de 1994 à 2001 ; - Le monde agricole de son côté, considère que la réglementation, dans laquelle interfèrent l’Europe, la France, les collectivités locales, est devenue touffue, changeante, contradictoire et qu’elle manque de transparence sur les constats et la réalité des choses ; - pour des raisons différentes les acteurs et partenaires auditionnés disent souffrir d’un manque d’écoute des pouvoirs publics. Ils s’accordent pour regretter une absence d’informations incontestables qui devraient être mises à la dispositions de l’ensemble des

23 annexe 9

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partenaires. Ils attendent plus de concertation et de prospectives de la part de l’État qui est parfois qualifié d’opaque et de sourd ; - Les élus locaux quant à eux ont fait part de leur doute s’agissant de la cohérence entre politique agricole et environnementale. Ils ont rappelé que les collectivités locales avaient contribué au programme national de maîtrise des pollutions agricoles (PMPOA2) à hauteur de 12 M€, mais qu’il n’y avait pas eu de sanctions pour les « vilains petits canards ». Ils disent que les services de l’État ont accepté des régularisations d’élevages qui n’étaient pas conformes. Cette dernière critique semble correspondre à l’observation faite par certains responsables de service déconcentrés sur cette question.

5.3 Les pratiques qui, selon l’IGE, ont contribué au contentieux :

Le contentieux communautaire concerne en priorité la directive 75/440 relative à la qualité des eaux superficielles, également appelées « eaux brutes », destinées à la production d’eau alimentaire. Il s’agit donc des plans de gestion de la ressource, polluée notamment par l’excès de nitrates. Cette directive « eaux brutes » a été longtemps gérée essentiellement par la DDASS qui était peut-être moins familiarisée à cette époque avec une « culture Europe ». On peut donc saluer le renforcement du travail en commun, DDAS avec la DDAF et la DSV, initié en Bretagne depuis plusieurs années24. Pour atteindre l’objectif fixé par la Commission Européenne et ne pas dépasser la valeur limite de 50 mg/l de nitrates des eaux destinées à la consommation humaine, la Directive Européenne 91/676 sur la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole, réglemente l’utilisation des déjections animales, soit, par exploitation, un maximum de 170 kg/ha/an d’azote d’origine organique. En cas de dépassement, il y a nécessité de prévoir un traitement par exploitation, mais, en France, ce principe n’est pas mis en œuvre à l’échelon de l’exploitation mais du canton25. Il semble sur ce point souhaitable qu’à l’avenir, les pouvoirs publics français s’imposent une lecture plus stricte de la lettre et de l’esprit de ladite directive ce qui serait sans doute de nature à éviter des contentieux futurs. En règle générale, il apparaît que l’importance du respect du droit communautaire a progressé très lentement au niveau de l’administration centrale. C’est vraisemblablement ce manque d’intérêt de l’administration centrale, augmenté des contradictions entre politique agricole et politique environnementale, qui a conduit les services déconcentrés à adopter une attitude laxiste par rapport aux engagements communautaires. Le milieu associatif a ainsi indiqué à la mission qu’il s’est trouvé obligé de porter plainte à Bruxelles en raison d’une trop faible écoute des services concernant les dépassements répétés des normes européennes. Enfin, si des antagonismes peuvent apparaître inévitables dans la gestion d’un dossier aussi compliqué que celui-ci, la mission relève le haut degré d’implication des responsables de tous horizons rencontrés en Bretagne. Chacun comprend que la situation présente est en partie la conséquence d’options économiques qui trouvent leur principale justification dans l’urgente nécessité de répondre, à partir du début des années 1950, à des besoins

24 On peut rappeler que la circulaire MEDD 11/2004 de la Direction de l’Eau incite au travail en commun 25 Décret n° 2005-634 du 30 mai 2005 modifiant le décret n° 2001-34 du 10 janvier 2001 relatif aux programmes d’action à mettre en œuvre en vue de la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole.

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essentiellement quantitatifs. Chacun comprend aussi que des exigences nouvelles, qualitatives et vitales, doivent maintenant intégrer l’analyse économique des décideurs au sujet de l’avenir à construire. Dans ces conditions, la mission ne peut que regretter une culture administrative encore trop peu ouverte à l’échange, le dialogue, la transparence, le partenariat, la concertation vraie et responsable.

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6 LE CAS DE L’ESTUAIRE DE LA SEINE :

L’estuaire de la Seine est l’un des plus important d’Europe. L’intérêt écologique remarquable de cette zone a justifié son intégration au réseau Natura 2000 au titre de la directive 92/43/CEE « Habitats » (site reconnu d’importance communautaire sur 8641ha, l’habitat « estuaire » étant en lui-même d’intérêt communautaire), comme de la directive 79/409/CEE « Oiseaux » (zone de protection spéciale sur 18840 ha). Il assure à ce titre des fonctionnalités naturelles essentielles : le contact mer continent, notamment au travers du bouchon vaseux dont le rôle de fixation microbienne et des polluants est essentiel ; les nourriceries d’espèces halieutiques « nobles » localisées dans l’estuaire ; les zones d’hivernage, de nidification, de gagnage et de halte migratoire, essentielles pour de nombreuses espèces d’oiseaux d’intérêt européen. L’estuaire de la Seine accueille aussi des activités économiques qui ont parfois un très fort impact environnemental : des transporteurs maritimes, fluviaux et terrestres et des industries et logistiques associées. Le développement des ports de Rouen et du Havre, avec en particulier l’extension en cours de Port 2000, le chenal de la Seine, les ponts de Tancarville et de Normandie, le canal de Tancarville et le grand canal maritime, la route de l’estuaire et la voie ferrée. Ces infrastructures ont conduit à une disparition rapide des zones humides (de 140 à 30 km² en un siècle et demi) y compris de nombreuses vasières, à leur sédimentation accélérée, et au fractionnement du milieu qui perturbe voire ampute les fonctions naturelles citées et les activités ; des agriculteurs, chasseurs et pêcheurs, coupeurs de roseaux ; des touristes et promeneurs des agglomérations normandes.

6.1 Les griefs de la Commission européenne :

Estimant insuffisantes les mesures prises par l’État pour assurer la préservation des oiseaux dans l’estuaire de la Seine et pour évaluer les incidences de certains projets d’aménagements réalisés ou prévus par les ports de Rouen et du Havre, plusieurs associations ont déposé, en 1991, des plaintes devant la Commission Européenne. Le 23 décembre 1992, la Commission Européenne a adressé au gouvernement français une lettre de mise en demeure pour inobservation, notamment, de la directive « Oiseaux ». Elle considérait que la Zone de Protection Spéciale (ZPS), créée en 1990 avait une superficie insuffisante pour répondre aux exigences ornithologiques et que le statut de protection de cette ZPS, défini par la convention conclue le 11 avril 1985 entre le Ministère chargé de l’Environnement et les ports autonomes du Havre et de Rouen n’était pas satisfaisant. La Commission Européenne indiquait, en outre, que l’aménagement d’un dépôt de titanogypse en bordure de la ZPS était incompatible avec la directive « Oiseaux ». Tout en reconnaissant la grande valeur biologique de l’estuaire de la Seine, le gouvernement français a répondu, le 18 novembre 1993, qu’il considérait que le statut de protection en vigueur était suffisant pour garantir le respect de l’engagement de conservation des habitats d’oiseaux pris lors de la création de la ZPS. Il a contesté que le dépôt de titanogypse puisse constituer une infraction à la directive « Oiseaux » puisque ce dépôt se situait à l’extérieur de la ZPS. Malgré les réponses apportées, la Commission Européenne a adressé à la France un avis motivé le 3 juillet 1995, par lequel elle constatait que, en ne prenant ni les mesures de conservation spéciale pour les habitats oiseaux dans l’estuaire de la Seine ni les mesures

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appropriées pour éviter la détérioration de ces habitats, cet État membre avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 4 de la directive « Oiseaux ». Elle invitait la France à prendre dans un délai de deux mois à compter de sa notification, les mesures requises pour se conformer à cet avis motivé.

Par lettre du 19 octobre 1995, le gouvernement français a notamment répondu que, la convention n’étant qu’une disposition transitoire, il était envisagé d’adopter d’abord un décret portant création d’une réserve naturelle qui permettrait d’assurer à court terme et de manière pérenne la protection des zones les plus sensibles de l’estuaire et de prendre, ensuite, d’autres mesures visant à sauvegarder de manière efficace le patrimoine naturel de l’estuaire. A la suite de cette longue procédure, la Commission Européenne a saisi la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) le 30 avril 1997 pour manquement à la directive « Oiseaux ». Les griefs invoqués étant l’insuffisance de la ZPS désignée et des mesures prises pour conférer à cette zone un statut de protection juridique suffisant. La CJCE a condamné la France le 18 mars 1999 en application de l’article 226 du traité. La Commission Européenne, considérant que la France n’avait pas pris les mesures nécessaires pour exécuter complètement l’arrêt de la CJCE a engagé une deuxième procédure, fondée cette fois sur l’article 228 du traité, susceptible d’aboutir à une nouvelle condamnation. La procédure en est au stade de l’avis motivé prononcé le 24 décembre 2001. La mobilisation des administrations centrale et déconcentrée, des corps d’inspection (IGE et CGPC) et les mesures prises pour respecter les engagements de la France dans le cadre de l’exécution de l’arrêt CJCE de 1999, font espérer un répit dans la gestion de ce dossier malgré quelques difficultés résiduelles.

6.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain :

Monsieur le préfet de Région Haute-Normandie, informé par courrier du 26 mai 200526 du souhait de la mission de se rendre sur le terrain a organisé une journée de travail qui s’est déroulée à Rouen et au Havre le mardi 6 septembre 2005. Au cours de cette journée la mission de l’IGE a rencontré, en Préfecture et en présence du préfet de Haute-Normandie les responsables des services déconcentrés de l’État, puis les associations, Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), SOS Estuaire, Association de Chasse sur le Domaine Public Maritime (ACDPM), enfin, dans les locaux du port autonome du Havre, les représentants des ports autonomes du Havre et de Rouen et la Maison de l’Estuaire, gestionnaire de la Réserve Naturelle. Des échanges avec ces différentes catégories d’intervenants qu’avait proposé le SGAR à la mission, on retiendra parmi les raisons qui ont contribué à l’émergence du contentieux : - La multiplicité des interlocuteurs et l’absence d’autorité coordonnatrice unique qui ne permet pas d’avoir une perspective d’ensemble et qui accentue les effets produits par des calendriers décalés. Sur ce point, les services déconcentrés de l’État font remarquer d’une part que l’aménagement de l’estuaire est un sujet rendu délicat par des phénomènes d’instabilité juridique et administrative. Les passerelles entre services ne sont, par exemple, pas toujours pleinement réalisées. D’autre part, les mesures de protection de l’environnement ne s’inscrivent pas dans la même échelle de temps que les crédits fixés dans le document unique de programmation (DOCUP). Il y a un problème de calendrier et de rationalité des

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financements, par exemple : il y avait des crédits européens pour Port 2000 qu’il fallait utiliser alors que dans le même temps il fallait assurer les mesures de préservation au titre de la directive « Oiseaux » et « Habitats » ; - Les pouvoirs publics apparaissent comme ayant été longtemps à l’écoute des seuls acteurs économiques et c’est le contentieux qui a conduit à la concertation fin des années 1980 début 1990 ; - l’extension de la surface de la réserve naturelle a pris trop de temps sans doute pour des raisons liées à la communication imparfaite entre administration centrale et administration déconcentrée. Les administrations déconcentrées se plaignent de n’être pas tenues informées des engagements pris par l’État auprès de la Commission Européenne. Elles signalent aussi que ce problème de coordination se retrouve dans le cadre de la gestion des crédits des fonds européens puisque pour un même dossier la Commission Européenne a deux interlocuteurs, le SGCI au niveau central et le SGAR pour la Préfecture ; - des responsables de services déconcentrés de l’État indiquent également que la cause du contentieux vient en partie de la faible écoute des associations. Ils regrettent de ne pas avoir reçu de consignes particulières de l’administration centrale à ce sujet ; - du point de vue des associations on insiste sur le fait que le contentieux n’est pas systématiquement recherché. Au contraire les associations ont conscience qu’elles dépensent du temps et de l’énergie qui pourraient être utile à autre chose et elles craignent que ce type de conflits entraîne un rejet ou une opposition à l’Europe ;

- Les associations disent encore que l’absence de structure de dialogue permanente et efficace au niveau local avec les services de l’État est dommageable. Elles indiquent également qu’au niveau de l’estuaire, depuis le contentieux la concertation fonctionne plutôt bien avec une écoute d’abord bilatérale et plus large ensuite. Néanmoins la LPO regrette que l’État n’agisse en termes de protection de l’environnement que « l’épée de Bruxelles dans les reins ». La LPO ajoute que selon elle les mesures compensatoires ne sont pas suffisantes et que la DIREN a été informé d’un courrier à la Commission Européenne sur ce point ;

- l’ACDPM regrette que les pouvoirs publics ne sont pas suffisamment attentifs aux options différentes défendues par d’autres acteurs. Cette association pense que les décideurs devraient continuer à réunir les partenaires une fois les décisions en cours de mise en œuvre ;

- côté Ports autonomes, on indique faire face à un processus à deux vitesses avec d’un côté des associations qui « fréquentent Bruxelles » et de l’autre l’appareil d’État et son temps de réaction plus lent. La réaction récente du préfet de Région d’organiser une réunion à la Commission Européenne avec DIREN, Ports autonomes et d’autres, a permis de faire baisser la pression ;

- Les responsables des Ports se plaignent aussi du faible retour d’information de la part de leur administration centrale vers le niveau local ce qui est frustrant et ne permet pas de réagir en temps réel. Par exemple, il n’y a pas communication du « mémoire en réponse » du gouvernement. Ils soulignent également le problème d’interprétation juridique de l’article 6.3 et 6.4 de la directive « Habitats » (réaliser un aménagement dans une zone Natura 2000). À ce sujet il est indiqué que l’État n’est souvent pas en mesure de donner « la parole de Bruxelles » autrement dit de donner une interprétation satisfaisante de la législation communautaire (visions non homogènes entre Ministères). On stigmatise aussi les promesses faites au niveau national à Bruxelles que le niveau local ne peut pas tenir. « Il ne faut pas promettre ce qu’on ne peut tenir ».

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7 LE CAS DES DECHARGES NON AUTORISEES :

La France, comme beaucoup d’autres pays européens à haut niveau de vie, est confrontée à l’augmentation continue de la production de déchets domestiques et à la difficulté de les gérer et de les éliminer sans risques pour la santé et l’environnement. Des politiques nationale et européenne ont été adoptées pour répondre à ces enjeux dans les conditions appropriées et satisfaisantes aussi bien sur un plan sanitaire qu’environnemental. Le tri sélectif et le recyclage des déchets, ainsi que l’incinération avec récupération d’énergie sont ainsi encouragés et soutenus. Pourtant le problème de l’élimination demeure, en partie du fait de l’augmentation de la quantité de déchets produit par les ménages. A l’occasion du Conseil des ministres du 21 septembre 2005, Madame la ministre de l’écologie et du développement durable a présenté une communication relative à la politique des déchets dans laquelle on peut lire notamment « Depuis deux ans, des actions fortes en matière de gestion des déchets ont été engagées conformément aux grands principes que sont la prévention des nuisances et la préservation des ressources naturelles (mise en place d’une filière pour les pneumatiques usagés, réduction des quantités de sacs de caisse de magasin distribués, modification des modalités de financement du service public des déchets). Après avoir mené une large consultation, le Gouvernement estime indispensable de donner un nouvel élan à la politique dans ce domaine ». Puis elle fixait quatre priorités dont les deux suivantes : - « accentuer les efforts pour réduire la production de déchets, favoriser la réutilisation de produits usés et développer le recyclage. Aujourd’hui, chaque Français produit en moyenne 360 kg d’ordures ménagères par an, dont 80 % -soit près de 290 kg- finissent en décharge ou sont incinérés. L’objectif est que dans cinq ans les quantités d’ordures ménagères mises en décharge ou incinérées soient inférieures à 250 kg par habitant et par an, et à 200 kg par habitant et par an dans dix ans. La valorisation énergétique sera par ailleurs encouragée par une augmentation de 50 % des tarifs de rachat de l’électricité produite à partir du biogaz des déchets » ; - « Créer des conditions plus propices à l’acceptation de la gestion des déchets. Les déchets destinés à l’enfouissement ou au traitement thermique doivent trouver les capacités de traitement nécessaires. Le Gouvernement veillera à ce qu’aucun incinérateur non conforme à la nouvelle réglementation européenne applicable fin 2005 ne soit en fonctionnement au-delà de ce délai ».

À ce contexte déjà si difficile de gestion organisée du traitement des déchets produits par l’ensemble des Français, s’ajoutent des comportements individuels ou collectifs peu conscients des dégâts qu’ils peuvent produire, qui se traduisent dans les faits par la persistance de décharges sauvages. Dans le communiqué du Conseil des ministres précédemment cité, on indique également que « Les actions en vue de la fermeture des décharges non autorisées seront renforcées. La TGAP pour les déchets admis dans ces sites sera doublée. L’objectif est que, dans dix-huit mois, les derniers sites non autorisés soient fermés ».

7.1 Les griefs de la Commission européenne :

La Commission Européenne a eu connaissance par des plaintes, des articles de presse, de questions parlementaires et un discours de Madame la Ministre de l’écologie et de

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développement durable (MEDD) de l’existence d’environ 9000 décharges non autorisées en fonctionnement en France.

Elle a procédé à l’analyse de 95 plans départementaux d’élimination des déchets ménagers et assimilés (PDEDMA) et y a dénombré environ 8400 décharges et dépôts sauvages. Le niveau de précision des plans s’est avéré très différent, certains ayant distingués chaque site, d’autres s’étant contentés d’un nombre global, renvoyant l’établissement d’une liste précise à de futurs recensements. Les PDEDMA examinés ne contenaient que très peu de données en matière de tonnages de déchets mis en décharge sauvage, par ailleurs, les décharges pour déchets inertes n’ont pas été considérées par les départements comme des décharges illégales car elles sont exclues de la législation française sur les installations classées.

La Commission Européenne a adressé aux autorités françaises une lettre de mise en demeure le 2 mai 2003. Les éléments envoyés par la France les 2 juillet, 8 septembre et 5 novembre 2003 n’ont pas permis d’éviter l’avis motivé que la Commission Européenne a adressé à la France le 19 décembre 2003, « en raison d’un manquement aux obligations lui incombant en vertu des dispositions des articles 427, 828 et 929 de la directive 75/442/CEE relative aux déchets, telle que modifiée par la directive 91/156/CEE, et de l’article 1430, points a), b) et c), de la directive 99/31/CEE concernant la mise en décharge des déchets.

27 L’art 4 prévoit que les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les déchets soient valorisés ou éliminés sans mettre en danger la santé de l’homme ou l’environnement, et notamment sans créer de risque pour l’eau, l’air ou le sol, ni pour la faune et la flore, sans provoquer d’incommodités par le bruit ou les odeurs, sans porter atteinte aux paysages et aux sites présentant un intérêt particulier. Les Etats membres prennent, en outre, les mesures nécessaires pour interdire l’abandon, le rejet et l’élimination incontrôlée des déchets. 28 Selon l’art 8, les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que tout détenteur de déchets les remette à un ramasseur privé ou public ou à une entreprise qui effectue les opérations visées aux annexes IIA ou IIB ; ou en assure lui-même la valorisation ou l’élimination en se conformant aux dispositions de la présente directive. 29 L’art 9, paragraphe 1 dispose qu’aux fins de l’application des art 4, 5 et 7, tout établissement ou toute entreprise qui effectue les opérations visées à l’annexe IIA doit obtenir une autorisation de l’autorité compétente visée à l’art 6. Cette autorisation porte notamment sur les types et les quantités de déchets, les prescriptions techniques, les précautions à prendre en matière de sécurité, le site d’élimination, la méthode de traitement. Au paragraphe 2 il est précisé que les autorisations peuvent être accordées pour une durée déterminée, être renouvelable, être assorties de conditions et d’obligations ou, notamment si la méthode d’élimination envisagée n’est pas acceptable du point de vue de la protection de l’environnement, être refusées. 30 L’art 14 prévoit que les États membres prennent des mesures pour que les décharges autorisées ou déjà en exploitation au moment de la transposition de la directive ne puissent continuer à fonctionner que si certaines mesures sont mises en œuvre dès que possible, et au plus tard le 16 juillet 2009. Ainsi, en vertu du point a) l’exploitant d’une décharge prépare et présente au plus tard le 16 juillet 2002, pour approbation, à l’autorité compétente un plan d’aménagement du site comprenant les éléments relatifs aux conditions d’autorisation ainsi que toute mesure corrective qu’il estime nécessaire pour se conformer aux exigences de la directive à l’exception de celles concernant l’emplacement du site de la décharge. En vertu du point b) à la suite de la présentation du plan d’aménagement, l’autorité compétente prend une décision définitive quant à la poursuite de l’exploitation sur la base dudit plan d’aménagement et de la directive. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, à la désaffectation des sites qui n’ont pas obtenu l’autorisation de poursuivre leurs opérations. En vertu du point c), sur la base du plan d’aménagement du site approuvé, l’autorité compétente autorise les travaux nécessaires et fixe une période transitoire pour l’exécution du plan. Toute décharge existante doit être conforme aux exigences de la directive 99/31CEE à l’exception de celles concernant l’emplacement du site de la décharge, au plus tard le 16 juillet 2009.

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Suite à cet avis motivé, le MEDD a publié le 23 février 2004 une circulaire relative à la résorption des décharges non autorisées accompagné par une liste de 535 sites établie à partir de la liste des décharges acquittant la TGAP. Cette circulaire annonçait tout d’abord la mise en place d’un suivi national. À cet effet, la ministre demandait aux préfets de lui indiquer, pour le 15 avril 2004, l’état des sites figurant sur la liste jointe à la circulaire et à la compléter à partir des inventaires pouvant exister au niveau local et des signalements des maires sollicités par écrit. Sur la base de cet inventaire actualisé la circulaire demandait soit le dépôt d’une demande d’autorisation d’exploiter pour les rares cas où la situation pouvait être régularisée, soit la fermeture de ces sites au 31 décembre 2004. La circulaire demandait également la mise en place d’un comité de pilotage départemental pour la fermeture des dépôts sauvages et des décharges non autorisées. Dans une circulaire du 24 novembre 2004, le MEDD dressait le bilan du suivi de la résorption des décharges non autorisées. La liste des 942 sites exploités (dont 229 soumis à TGAP) au 30 septembre 2004 était jointe en annexe. Une distinction était faite entre deux types de décharges : les 229 décharges de la liste de février 2004 toujours en fonctionnement qui devaient fermer au 31 décembre 2004 et les 713 autres sites recensés suite à la circulaire pour lesquels un délai était laissé jusqu’au 30 juin 2005. Cette circulaire a été transmise à la Commission Européenne en réponse à sa demande. La Commission Européenne a décidé le 14 décembre 2004 de saisir la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) conformément à l’article 226 du Traité. Il s’agit de la première étape pour une condamnation en manquement.

7.2 La mission à l’écoute des acteurs et des partenaires de terrain :

De nombreux départements étant concernés par ce contentieux communautaire, la mission, en concertation avec la Direction de la Prévention des Pollutions et des Risques (DPPR), a retenu le département du Lot-et-Garonne dans la mesure où le nombre de décharges non autorisées y est très important. Le Lot-et-Garonne est couvert par un PDEDMA approuvé le 26 mars 2003. Le plan précédent, approuvé le 30 août 1996, avait été annulé par le Tribunal Administratif de Bordeaux le 18 mai 2000. L’actuel PDEDMA est l’un de ceux que la Commission Européenne a examiné pour connaître le nombre de décharges non autorisées exploitées en France. Ce PDEDMA recense 82 décharges brutes31 et renvoie en annexe (annexe dont ne semble pas disposer le MEDD) leur liste descriptive. Elle avait été établie en utilisant les résultats d’une enquête par questionnaire auprès des collectivités exerçant la compétence collecte et/ou traitement et ceux d’une enquête menée par la Préfecture et la DDASS en 1995. Il prévoit, en outre, qu’une « politique de résorption et de réhabilitation sera mise en place à l’échelle du département » sans pour autant en préciser les modalités.

31La définition de la décharge brute retenue est issue de la circulaire du 20 février 1989 : « décharge faisant l’objet d’apports réguliers de déchets municipaux non inertes, directement exploitée par une municipalité ou laissée par elle à la disposition de ses administrés sans autorisation préfectorale au titre de la législation des installations classées ».

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La liste, établie par le MEDD au 30 septembre 2004 qui accompagne la circulaire du 24 novembre 2004, comptabilisait 52 sites pour le département du Lot-et-Garonne. Quarante trois communes étaient concernées. Les points de dépôt de déchets verts et de gravats n’ont pas été retenus dans cette liste, leur cas est traité dans les annexes de la circulaire du 23 février 2004.

Monsieur le préfet du Lot-et-Garonne, informé par courrier du 16 juin 200532 du souhait de la mission de se rendre sur le terrain a permis que se déroule, le 13 septembre 2005 à Agen, une journée de travail à laquelle étaient conviés, successivement, les responsables des services déconcentrés de l’État et notamment la DDAF, DDSV, DRIRE, dont un inspecteur des installations classées, la Gendarmerie, l’ADEME, puis le milieu associatif, enfin un représentant de l’Amicale des Maires, le Conseil Général et le SMIVAL qui est le syndicat mixte ayant en charge le traitement des décharges. En fait, les élus, absents, étaient représentés par des fonctionnaires territoriaux, et l’ADEME n’était pas représentée. Néanmoins, la mission de l’IGE a écouté avec intérêts les observations des participants et retient notamment ce qui suit : - Les représentants des services déconcentrés de l’État ont indiqué que le plan d’élimination prévoyait la création d’un « syndicat mixte », la fermeture des décharges non autorisées et la création de déchetteries. La sensibilisation des maires a bien eu lieu sur ces questions mais, in fine, le traitement aval des déchets ménagers qui devrait se fonder en partie sur la construction d’une usine d’incinération, ne fait pas l’unanimité, notamment dans le milieu associatif. Ils disent aussi que, s’agissant de la réhabilitation des décharges fermées, le Conseil Général refuse d’en financer le diagnostic préalable (étude d’un montant de 15 000 €) au motif d’être entraîné dans des dépenses dont il ne se sent pas responsable. L’ADEME est reconnue pour son efficacité alors que les responsables des services de l’État s’accordent à dire que le discours écologique ne recueille pas vraiment l’adhésion, et que le glissement de compétences de l’État vers le Conseil Général du dossier des déchets, se heurte au problème du financement de la réhabilitation des sites des décharges illégales et à celui de l’application du principe pollueur-payeur. Les collectivités craignent d’être entraînées, par ailleurs, dans des projets souvent contestés comme la construction d’incinérateurs ; - Le président et une administratrice de la Société pour l’Étude, la Protection et l’Aménagement de la Nature en Lot & Garonne (SEPANLOG), affiliée à France Nature Environnement, ont indiqué que le problème des décharges n’avaient jamais été pris au sérieux. Ils ont rappelé que les deux premiers Plans départementaux d’élimination ont été contestés par les Verts et les associations parce que la place qu’ils laissaient à l’incinération leur semblait trop importante. Ils ont également regretté la trop faible participation du public et des associations au deuxième plan départemental. Pour la SEPANLOG, les communes fautives devraient être tenues pour responsables et sanctionnées. L’association déplore que rien de sérieux ne soit fait en matière de réhabilitation faute d’étude diagnostic. Elle souligne que la population est prête à comprendre et à participer à l’effort en matière de traitement des déchets si les collectivités faisaient preuve de pédagogie ; - Les fonctionnaires territoriaux représentant les élus, quant à eux ont souligné que les maires n’exerçaient pas leur pouvoir de police dans le domaine des déchets et que le rôle des établissements publics de l’État (ADEME, Agences de l’eau) étaient déterminants pour les élus, tant en matière de conseil que de financement. Enfin, ils reconnaissent que l’Europe de l’environnement est très lointaine et peu comprise. Les sanctions pécuniaires encourues par la

32 Annexe 11

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France pour le non-respect des directives ne sont pas connues des interlocuteurs de la mission. Les services de l’État ont été cités comme vecteurs d’une meilleure connaissance du droit communautaire.

7.3 Les pratiques qui, selon la mission, ont contribué au contentieux :

Avant d’avancer les raisons qui, du point de vue de l’IGE, contribuent au contentieux, on ne peut que souligner avec surprise et inquiétude que, s’agissant d’un dossier dont la compétence pour la maîtrise d’ouvrage et la planification a été transférée aux collectivités locales, aucun élu n’a répondu à l’invitation de la préfecture du Lot-et-Garonne de rencontrer l’IGE. Ce constat est d’autant plus regrettable que les membres de la mission considéraient chaque personne rencontrée dans le cadre de cette réflexion sur la prévention des contentieux communautaires, et notamment chaque élu local, comme « un interlocuteur privilégié, un praticien en mesure de contribuer utilement à la compréhension des difficultés rencontrées ».

Après avoir entendu tous ceux qui ont voulu faire entendre leur voix, la mission considère qu’on peut retenir au nombre des raisons qui ont conduit au contentieux : - le sentiment que la prise à bras le corps de ce problème par les pouvoirs publics et la volonté politique ne sont pas suffisants et celui que les questions d’environnement ne relèvent pas des actions les plus urgentes à régler au niveau local ; - le manque d’explications et de pédagogie auprès des citoyens sur la question de la gestion des déchets est la preuve que les décideurs ne souhaitent rien décider ; - l’absence de concertation et difficulté, pour les pouvoirs publics, d’envisager intégrer dans leur réflexion le point de vue des associations ; - la méconnaissance des textes communautaires, notamment en matière de pénalités financières, et absence de mesures répressives individuelles ou collectives en application du principe « pollueur-payeur » ; - l’injustice faite aux collectivités qui réalisent des actions au bénéfice de l’environnement mais qui n’en tirent aucun profit. On pourrait concevoir qu’un organisme indépendant attribue à certaines collectivités, après avoir pris en compte l’action menée en faveur du traitement des déchets, un label qualité environnementale, comparable au pavillon bleu accordé à certaines communes du littoral ; - la trop faible concertation avec les professionnels de l’automobile, pour éviter les dépôts sauvages de pneus usagés.

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8 LES PRECONISATIONS DE LA MISSION POUR EVITER

QUE NE SE DEVELOPPENT LES RISQUES DE CONTENTIEUX COMMUNAUTAIRES :

8.1 Rappel sur la méthode :

Dès l’annonce de la décision ministérielle de retenir au nombre des priorités du programme de travail de l’IGE pour l’année 2005 une mission d’analyse et de propositions sur la prévention des contentieux communautaires au sein de l’administration déconcentrée, les membres de la mission de l’IGE ont délibérément choisi de réfléchir sur des cas concrets, susceptibles de devenir de possibles contentieux communautaires, en associant à cette réflexion les acteurs de terrain concernés, à quelque titre que ce soit, par l’évolution potentiellement conflictuelle des cas qui viennent d’être développés : l’autoroute A28 ; le marais Poitevin ; la pollution en Bretagne par les nitrates d’origine agricole ; l’estuaire de la Seine ; les décharges non autorisées.

Après avoir rencontré, questionné, écouté, entendu des directeurs de l’administration centrale, et, en liaison avec les préfets des Régions Bretagne, Haute-Normandie, Poitou-Charentes et des Départements de la Sarthe et du Lot-et-Garonne, des élus locaux, des responsables de services déconcentrés de l’État, des représentants du monde économique et notamment agricole ainsi que des animateurs associatifs, les membres de la mission de l’IGE ont arrêté une liste de préconisations qui semblent utile de mettre en œuvre pour prévenir les risques de contentieux communautaires en matière d’environnement.

8.2 Des pratiques de mise en œuvre à risques :

Ces préconisations devraient participer à l’émergence de pratiques nouvelles dans la gestion des politiques conduites par l’État, ses représentants et ses serviteurs sur le terrain. Ces propositions déboucheraient sur un nouveau savoir-faire qui admet qu’il est plus valorisant pour les pouvoirs publics d’accompagner un mouvement plutôt que de le subir. Elles seraient l’image inversée de façons de faire aujourd’hui encore trop courantes, qui, assorties de maladresses et d’oublis, sont en partie responsables du développement de démarches potentiellement susceptibles de déclencher des contentieux communautaires. La mission a entendu que certaines pratiques étaient dénoncées par le milieu associatif, mais aussi, assurés que leurs propos seraient protégés par l’anonymat, par des représentants de services de l’État au cours des audiences qui ont alimenté les réunions, ainsi qu’explicité dans les cinq chapitres précédents et qui peuvent être facilement résumées :

- par rapport aux Directives européennes : l’État semble avoir donné jusqu’avant les années 90 le sentiment d’une prise en compte insuffisante des règles et pratiques communautaires dans la mise en œuvre des politiques publiques, ce qui pouvait apparaître comme une forme d’arrogance à l’endroit de l’Europe. À ce jour, il existe encore un réel déficit de connaissance et de reconnaissance du droit communautaire à l’échelon local, que les délais trop longs dans la transcription des directives européennes, dans les textes législatifs et réglementaires nationaux qui s’ensuivent, peuvent encourager à penser que le droit communautaire peut être interprété comme un droit secondaire. L’application des textes communautaires apparaît sur le terrain encore trop tardivement, dans la précipitation, l’absence d’information sur les engagements pris par l’État auprès des instances communautaires, et l’ignorance des risques financiers que les contentieux peuvent produire. Il

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faut ajouter que le message du gouvernement sur la mise en œuvre en France du cadre communautaire a porté jusqu’à présent quasi exclusivement sur un effort important de transcription. Ce message a été perçu par l’administration centrale qui a réalisé un effort important, moins par l’administration déconcentrée qui ne semble pas avoir considéré que cette priorité la concernait également ;

- par rapport à la place de l’environnement : certains dossiers contentieux actuels trouvent leur origine dans le contexte des années 80, à une époque où la problématique environnementale était moins prise en compte. La conjoncture économique difficile des années 90 n’encouragera que modérément cette prise en compte. Encore aujourd’hui, les choix aux retombées à court terme sont ressentis comme privilégiés en comparaison des options écologiques dont les effets ne peuvent s’inscrire positivement que dans la durée. La mission considère également que le message d’intégration de l’environnement dans les autres politiques publiques (ce principe d’intégration constitue une exigence communautaire forte figurant en tête des traités, ainsi qu’à l’article 6 de la charte adossée à notre Constitution que le décret d’attribution de la Ministre de l’Écologie et du Développement Durable lui attribue la charge de sa mise en œuvre) est peu perçu au sein de l’administration déconcentrée ;

- par rapport à la lisibilité de l’action publique : l’image de l’État semble confuse du fait que ses choix n’apparaissent pas suffisamment précis entre les engagements européens et les contraintes locales de toutes natures, ce qui a pour double effet de freiner l’action de ses services déconcentrés et d’accélérer la réaction des opposants à un projet. On relève aussi une difficulté à rendre compatibles les politiques européennes agricole et environnementale si le discours de l’État est entendu comme difficilement décodable et si ce qui doit s’imposer n’apparaît pas assez clairement. Cette lisibilité insatisfaisante de l’action publique ne peut que nuire à la cohérence de la politique nationale ;

- par rapport à la concertation : l’exercice de l’autorité administrative peut donner le sentiment d’être par principe réfractaire à la concertation. Celle-ci n’est en effet pas véritablement ancrée dans la culture administrative. Certains décideurs publics refusent d’envisager d’autres espaces de dialogues que ceux expressément prévus par la loi comme par exemple l’enquête publique. Dans des situations particulières, l’administration démontre cependant des dispositions nettement moins récalcitrantes dans la pratique de la concertation. La mission a retenu des critiques souvent constructives des associations sur de nombreuses questions, que le plus souvent, si l’absence de concertation avait constitué un facteur déclenchant de la saisine de la Commission Européenne, dès lors où le contentieux communautaire était engagé, une forme incomplète de concertation se mettait en place et se déroulait dans des conditions qui pouvaient ne pas être complètement insatisfaisantes. Malheureusement, la définition du contenu de la concertation n’est pas identique pour les différentes parties en présence, ce qui limite largement les chances de trouver les compromis intelligents, acceptables et compris par tous. Par ailleurs, ce processus n’intervient pas toujours en amont de la décision, ce qui constitue la négation de ce principe. La prise en compte de propositions suggérées par le milieu associatif semble exceptionnellement rare. Les informations fournies aux uns et aux autres voient leur fiabilité parfois contestée. En résumé, la reconnaissance de la qualité de partenaires à part entière des associations de défense de la nature par les pouvoirs publics est encore perçue par le milieu associatif comme peu convaincante.

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8.3 Évoluer vers un nouveau savoir-faire :

Les nouveaux savoir-faire doivent aller de pair avec de nouveaux savoir-être. La concertation ne doit pas être considérée comme une forme de violence que devrait s’imposer le responsable d’une autorité publique, pas plus qu’elle ne doit être vécue comme un transfert de pouvoir. La collectivité nationale ou locale détentrice de la compétence dans un domaine donné doit avoir le dernier mot, dès lors que la loi est respectée et que la décision prise n’est pas frappée d’illégalité. Ce principe intangible n’interdit cependant pas l’organisation transparente du dialogue, bien au contraire, cette pratique ne peut que renforcer la portée d’une décision. La mission estime également indispensable d’ajouter que compte tenu du contexte juridique nouveau (Charte et Convention d’Aarhus renforçant les principes de concertation et d’association33), une décision prise dans une démarche ignorant cette exigence serait juridiquement fragilisée.

Les nouveaux savoir-faire doivent aussi intégrer dans le quotidien de la vie d’un responsable de service déconcentré de l’État la dimension européenne dans tous ses aspects, et notamment dans le domaine du droit. Le droit européen n’est pas un droit étranger mais un droit qui, au même titre que le droit national, s’impose à tous, est au service de tous. Enfin, les nouveaux savoir-faire ne doivent rien changer, mais au contraire, permettre de revenir, si nécessaire, à une saine orthodoxie quant à la primordiale nécessité d’entendre l’État exprimer un discours unique, une seule partition, sous la direction des préfets s’agissant de l’État déconcentré, pour garantir une application conforme du droit dans le respect des possibilités offertes à chacun de se faire entendre. L’adoption et l’application des préconisations proposées par la mission doivent concourir à l’émergence de ce nouveau savoir-faire.

8.4 Six préconisations pour prévenir les contentieux communautaires

Les six principales préconisations pour prévenir les contentieux communautaires concernent essentiellement l’administration centrale pour les quatre premières, l’administration déconcentrée pour les deux autres. Chacune d’entre elles est prolongée par des recommandations plus détaillées s’adressant soit à l’administration centrale, soit à l’administration déconcentrée.

33 Les dispositions concernant l’information du public ont été confortées par la convention d’Aarhus signée le 25 juin 1998 au Danemark par 39 États. Cette convention internationale, une fois publiée, a une valeur infra constitutionnelle et supra législative. La convention d’Aarhus, approuvée par le loi n°2002-285 du 28 février 2002 puis annexée au décret de publication du 12 septembre 2002, est donc entrée en vigueur le 6 octobre 2002. Cette convention internationale contient des dispositions d’effet direct, c’est à dire qui peuvent être directement invoquées devant les tribunaux français sans qu’une intégration dans la législation soit nécessaire.

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1ère préconisation : Assurer pédagogie et formation pour tous les services concernés

L’Administration Centrale doit mettre à profit le délai prévu pour la transcription d’une Directive Européenne dans le droit national pour mener, dès la publication au JOCE, des actions pédagogiques sur cette Directive auprès de ceux qui, en administration centrale, en préfecture ou dans les services déconcentrés auront à veiller à sa mise en œuvre. Compte tenu de l’origine des saisines (le plus souvent des associations ou des particuliers) de la Cour de Justice des Communautés Européennes, et des raisons avancées pour justifier celles-ci, un module de formation et de préparation à la concertation sera également prévu. Le MEDD pourrait mettre à profit le délai de transposition des directives, le plus souvent fixé à 2 ans, pour diffuser auprès des services déconcentrés et des acteurs locaux des notices d’explication des textes européens en vigueur : points saillants (difficultés prévisibles), calendrier à respecter, processus de rapportage34, etc… ainsi qu’un « vade-mecum » sur chaque directive et règlement communautaires. En raison des lacunes de connaissance des textes communautaires et de leurs implications concrètes, la mission recommande que soient crées par l’Ifore des sessions de formation en direction de tous les services déconcentrés chargés de la mise en œuvre pratique des directives environnement. Ces modules pourront être utilisés dans les différents réseaux de formation dont bénéficient les Diren/Drire, DDE, DDAF, DSV. Un ou plusieurs modules de formation pourraient être réalisés par l’Ifore en liaison avec le Secrétariat Général du Ministère de l’Intérieur (Direction de la Modernisation et des Actions Territoriales DMAT), à l’adresse du corps préfectoral et des cadres des Préfectures en charge de dossiers environnement. Une attention toute particulière devrait être portée d’une part aux textes « horizontaux » comme les directives « étude d’impact », « plan programmes », « accès à l’information », « participation du public » et d’autre part aux directives sectorielles dont l’application pose le plus de problèmes : Habitats, Oiseaux, Eaux urbaines usées, Nitrates, Déchets… Il est primordial, selon la mission, d’améliorer l’articulation entre l’administration centrale et les services déconcentrés sur l’application des textes communautaires. Il serait ainsi souhaitable que des points d’information réguliers soient réalisés lors de chaque collège des Diren et que la communication systématique des « mémoires en réponse » du gouvernement à la Commission européenne soit assurée par le MEDD auprès des services qui ont eu à connaître des infractions.

34 Synonyme de « reporting ». Néologisme introduit par les Québécois

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2ème préconisation : Mobiliser la Task force avec les services déconcentrés

Charger explicitement la Task Force qu’anime le directeur adjoint de la Direction Générale de l’Administration, des Finances et des Affaires Internationales (DGAFAI) avec l’aide de la sous-direction juridique, de traiter également de la mise en œuvre sur le terrain des mesures communautaires. Cela suppose de mobiliser les structures de chaque direction de l’administration centrale chargées de l’animation des services déconcentrés sur cette priorité et de les associer à la Task Force. La Task Force recevrait mandat d’élaborer un tableau de bord national montrant les sujets les plus préoccupants. Il est proposé en outre d’associer et de mobiliser les établissements publics du MEDD dont les actions sont complémentaires des services déconcentrés. Sur cette base, la secrétaire générale du Ministère de l’écologie et du développement durable pourrait alerter le SGCI et lui demander de tenir des réunions consacrées à la prévention de certains contentieux. Les établissements publics de l’État (EPA, EPIC) sont des acteurs pouvant jouer un rôle important dans la bonne mise en œuvre pratique des directives en raison de leurs capacités financières et de leur souplesse de gestion. La mission recommande de les mobiliser plus fortement à la mise en œuvre pratique des textes (exemple des directives eau et nature : agences de l’eau ; directive déchets et air : Ademe) en les associant, par exemple, à certaines réunions de la « Task Force » et en les invitant à inscrire leurs agents dans les sessions de formation ad hoc. La mission pense que les questions communautaires doivent occuper une place prioritaire dans tous les ministères et les moyens en personnel, de formation juridique, doivent être renforcés dans chacune des directions du ministère chargé de l’environnement35.

35 Extrait du Rapport Christian Philip n°2447 Assemblée nationale, juillet 2005 : « Le ministère de l’écologie, faute de personnel a entamé avec une année de retard la rédaction du décret transposant la directive 2002/88 sur les émissions polluantes des engins mobiles non routiers »

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3ème préconisation : Nommer un préfet coordonnateur pour les grands projets

Un préfet coordonnateur (auprès duquel pourrait être placé un chargé de mission responsable du suivi environnemental du projet) devrait être nommé dans tous les cas de grands projets d’infrastructures (autoroutes, voies ferrées, aménagement d’estuaires, ports autonomes etc…) concernant plusieurs régions ou départements, pour lesquels les risques de contentieux sont particulièrement importants. Ce préfet coordonnateur serait nommé pour une durée et une mission précisément définie et limitée dans le temps. Après avoir obtenu l’accord de principe du Ministre de l’Intérieur sur l’opportunité de nommer un préfet coordonnateur sur un dossier particulier, la Ministre de l’Écologie et du Développement Durable et le Ministre de l’Intérieur pourraient proposer au SGCI d’être l’instance de préparation de cette nomination (elle-même du ressort du Premier Ministre). La D4E sera le plus souvent la direction pilote en raison de ses compétences en matière d’étude d’incidences et d’infrastructures et donc à l’initiative de la saisine du SGCI., elle devra agir, sur ce type de dossier, en liaison avec le secrétariat général du ministère de l’intérieur.

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4ème préconisation :

S’assurer de la vigilance des services déconcentrés

Dans le cadre d’un système de vigilance déconcentré, les préfets de Région et de Département devraient nommer à leurs côtés un chargé de mission Europe. Les directeurs de services déconcentrés désigneraient de leur côté un correspondant Europe. Chargé de mission auprès du préfet et correspondants des services déconcentrés constitueraient un collège chargé notamment d’établir, pour les préfets de Région et de Département, un tableau de bord des dossiers européens de la Région et du Département en indiquant, pour chaque dossier, l’estimation du taux d’exposition au risque de contentieux ainsi que les causes de ce risque. La mission de l’IGE recommande également que le chef de pôle Environnement et Développement Durable (EDD) propose à son préfet de Région d’inscrire les points noirs de ce tableau de bord à l’ordre du jour du CAR. Par ailleurs, Madame la Ministre pourrait rappeler aux chefs de pôle EDD les instructions du 21 mars 2005 leur demandant de préparer pour le préfet un tableau de bord de la mise en œuvre des directives européennes. La conformité aux textes européens nécessite l’adhésion des acteurs de terrain (aménageurs, agriculteurs, associations etc…) qui doit s’établir sur la base d’informations fiables et cohérentes dont la production est garantie par les services de l’État. A cet égard, la mission estime qu’un effort particulier doit porter sur les recueils de données naturalistes en particulier et les informations sur l’environnement en général et leur mise à disposition par les Diren auprès des acteurs locaux et du public. Les arbitrages des préfets sont décisifs pour que les contentieux européens ne se transforment pas en pénalités financières ni ne ternissent l’image de la France au plan européen. La mission estime que leurs décisions doivent pouvoir davantage se construire sur l’information fournie par ses services et ce, en temps réel. Elle propose par conséquent que les services déconcentrés produisent à destination des préfets de départements et de région des tableaux (mensuels ou trimestriels) commentés, relatifs à la mise en œuvre des directives européennes susceptibles de contentieux.

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5ème préconisation :

Responsabiliser les collectivités locales Les services de contrôle de légalité des Préfectures devraient être encouragés à utiliser, par gradation, les moyens dont dispose le représentant de l’État pour inciter les élus locaux à assumer leurs compétences liées au droit communautaire dans le respect du droit national et européen. Au besoin il pourrait être proposé de légiférer pour rendre obligatoire les dépenses des collectivités locales liées aux Directives Européennes pour que les risques de pénalité soient assumés par les auteurs d’infractions, en application du principe pollueur payeur. Cette préconisation s’inscrit dans le droit fil des recommandations formulées par une précédente mission conjointe, coordonnée par l’Inspection Générale de l’Administration (IGA), sur le contrôle de légalité. Elle suppose un appui du Ministère de l’Intérieur. Les directives européennes qui prévoient des obligations de résultats, à la charge des États membres, posent problème à notre système où les collectivités n’ont d’autre obligation que de ne pas enfreindre la loi : surtout quand l’État a transféré des compétences au bénéfice de collectivités locales et qu’il répugne à faire usage de ses pouvoirs de police. La mission de l’IGE qui a pu constater que certaines collectivités hésitaient à agir devant le coût des normes imposées par certaines directives environnement souhaite reprendre cette recommandation d’un précédent rapport d’inspection36 Il semble à la mission : - qu’un dispositif d’alerte allant jusqu’à la mise en demeure doit être mis en place - que la substitution doit pouvoir s’exercer sur des schémas qui seraient prescriptifs - qu’en revanche il est en pratique très difficile de faire réaliser les équipements et mettre en place l’ensemble du service par l’État aux frais de la collectivité - que, en cas de condamnation par la Cour de Justice des Communautés Européennes, l’État doit pouvoir sans sanction récursoire préalable, répercuter les astreintes généralement très lourdes sur la ou les collectivités responsables.

36 extrait du rapport 03/24 sur « l’audit du contrôle de légalité du contrôle budgétaire et du pouvoir de substitution » IGF/IGA/IGE, juillet 2003

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6ème préconisation : Instiller la culture de la concertation

Pour que les risques de multiplication des contentieux soient réellement et durablement enrayés au sein de l’administration déconcentrée, il serait souhaitable que les préfets inculquent aux services placés sous leur responsabilité une nouvelle culture administrative. Cette culture administrative devrait accorder au droit et à la pratique communautaires, ainsi qu’à la concertation organisée en temps utile, une place essentielle dans l’action quotidienne des pouvoirs publics. La mission ayant fait le constat qu’une grande majorité des contentieux communautaires provenait de l’absence ou de la faiblesse de la concertation avec les associations d’environnement, suggère que soient organisées, sous l’égide du préfet, des « conférences de recherche de consensus ou de compromis » associant les représentants des services de l’État, leurs interlocuteurs associatifs, et les acteurs économiques impliqués, à échéances régulières (au moins une fois par semestre) pour débattre des voies et moyens nécessaires pour mieux appliquer le droit communautaire dans l’espace administratif considéré. Ces réunions seraient préparées et animées par une personne ressource placée auprès du préfet ou, dans certains cas, par le préfet lui-même.

Guy MERRHEIM Thierry LAVOUX

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ANNEXE 1

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1

IGE 11 avril 2005

Prévention des contentieux communautaires en matière environnementale au sein de l’administration déconcentrée

Termes de référence de la mission

La réflexion que va entreprendre la mission de l'IGE pour aboutir sur des propositions susceptibles de prévenir les contentieux communautaires au sein de l'administration déconcentrée s'inscrira pour partie dans l'esprit et le prolongement de la note de l'IGE ci-jointe, rédigée le 8 novembre 2004 sur l'environnement et le contentieux européen.

Dans le constat établit à cette occasion, nous constations que s'agissant du domaine de l'environnement le contentieux européen auquel la France est confrontée couvre trois domaines :

- La non-conformité des textes, c'est-à-dire la mauvaise transposition des directives européennes dans le droit national ;

- La non-communication, qui consiste en une omission de transposition ou en une absence d'information de la Commission Européenne sur les actions mises en oeuvre pour transposer dans les délais prescrits ;

- La non mise en oeuvre d'une directive pourtant transposée. Le plus souvent la commission est amené à saisir la cour européenne de justice contre la France sur la base de plaintes provenant notamment des particuliers et associations saisissant la commission (qui décide de saisir la Cour de justice).

Les deux premiers points sont largement pris en charge par l'administration centrale et pilotés par la «Task Force» animée par Francis Massé DGA ; l'administration déconcentrée et nos EP sont concernés au premier chef par le troisième . Plus les progrès des efforts de transposition seront effectifs, plus les contentieux sur plaintes seront importants en proportion. Dans chacun de ces quatre domaines, les dossiers se répartissent entre les six grands secteurs suivants : nature, déchets, eau, air, bruit, divers, rubrique où se situent les substances chimiques. La démarche que nous allons engager pour répondre à l'attente de Monsieur le Ministre de l'Écologie et du Développement Durable devra prendre en compte cette donnée objective. Nous devrons notamment veiller à préconiser les moyens pour que l'administration déconcentrée fasse du milieu associatif non pas un opposant déterminé mais un partenaire actif et constructif des projets initiés par les politiques de l'État ou des collectivités.

ANNEXE 2

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2

Les sujets qui seront retenus parmi ceux qui posent réellement problème à l'échelle du pays ou limités à une zone géographique plus réduite, devront couvrir autant que faire se peut la réalité constatée dans la note du 8 novembre 20041. L'échéancier proposé prévoit le rendu d'une note intermédiaire cet été, la mission de l’IGE pourrait développer dans cette perspective son travail en quatre étapes :

- La première étape ne devrait pas durer au-delà de la mi-avril. Elle serait réservée à l'établissement de la liste des sujets embarrassants sur l'ensemble du territoire national et des cas de sites plus précisément localisés qui posent un véritable problème et qui dans ces conditions seront retenus comme autant d'exercices pratiques. Pour se faire les directions d'administration centrale du Ministère de L'Écologie et du Développement Durable seront consultées. Dès à -présent, pourraient être éventuellement suggérés comme thèmes d'étude

- la directive eau usée résiduaire comme sujet de masse - les dossiers basse Corbières, - la détérioration du Marais poitevin, - l'estuaire de la Seine, - la pollution en Bretagne par les nitrates pour les contentieux limités à

une zone géographique limitée. Cette liste n'est ni exhaustive ni exclusive, des cas problématiques peuvent être ajoutés ou se substituer à d'autres. Dans la liste des dossiers proposés au terme de la première étape il paraît important que figurent des cas où le maître d'ouvrage est une collectivité ou un établissement public.

- La deuxième étape devrait s'achever avant la fin juin. Elle se déroulerait sur le terrain et serait consacrée à l'analyse et à l'évaluation des situations ainsi qu'au processus qui y a conduit. Bien entendu les rapports existants seront également examinés notamment les inspection récentes de services (DIREN DRIRE et police départementales) et des sujets ponctuels à fort contenu communautaire dont A 28, estuaire de la Seine, Marais Poitevin. Elle serait l'occasion de faire le point sur les procédures qui ont été mises en place et sur les informations dont disposaient ceux qui, en administration centrale ou à l'échelon déconcentré pilotaient le dossier, notamment sur les conséquences d'un retard dans la mise en oeuvre d'un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) ou d'un non-respect des directives européennes en terme d'image et de coût financier. Elle permettrait de faire l'inventaire des obstacles qui se sont présentés et pourquoi ceux-ci ne purent être contournés. Elle servirait à évaluer le temps mis au service de la concertation et de la pédagogie dans le but de trouver le compromis, satisfaisant des intérêts parfois contradictoires dans le respect des exigences fixées par le niveau européen. Cette étape permettra de créer une grille de lecture du traitement des dossiers (comportant notamment les étapes clefs). Le but de l'exercice est de comprendre ce qui a engendré le problème afin d'en retenir la leçon et d'éviter que ne se renouvellent des contentieux pénalisants pour notre pays à plus d'un titre. Au terme de cette étape une note intermédiaire rappelant la méthodologie adoptée et les constats établis tant au plan national que local par la mission serait mise à la disposition de ceux qui auront été partie prenante de ce travail.

1 Source informelle à Bruxelles

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3

- La troisième étape se déroulerait en septembre sur le terrain elle aussi. Elle serait celle

d'un recommencement virtuel de la procédure de mise en oeuvre des dossiers étudiés. Instruits des enseignements tirés de l'étape précédente, les acteurs qui auront été associés aux constats contribueront à la définition du scénario qui aurait permis une issue non contentieuse. Le résultat de cet exercice virtuel serait confronté à la situation présente et servirait à alimenter la suite de la réflexion que poursuivront les membres de la mission de l’IGE jusqu'à la conclusion de cette action.

Si la première étape de la démarche (le choix des cibles) qui vient d'être présentée ne concerne que l'administration centrale du Ministère de l'Écologie et du Développement Durable, les deuxième et troisième étapes devront associer des acteurs de l'administration centrale, des acteurs territoriaux autour des préfets de départements concernés au nombre desquels des chefs des services déconcentrés de l'État ainsi que nos établissement publics, des élus locaux, des acteurs de la vie économique, sociale, associative.. Au cours de la démarche la mission IGE rencontrera à plusieurs reprises la Task Force pour échanger avec les directions d'administration centrale du MEDD À partir d'octobre 2005, la mission s'attacherait à mettre en oeuvre la quatrième et dernière étape de cette démarche. Après avoir soumis à un examen rigoureux les propositions susceptibles d'émaner des réflexions réalisées les mois précédents ou de diverses autres sources, elle établirait un recueil de préconisations utiles à la prévention des contentieux communautaires au sein de l'administration déconcentrée. Pendant cette ultime étape, les idées et orientations retenues seraient soumises à l'épreuve critique de ceux qui, dans l'administration centrale comme sur le terrain autour des préfets auront été associés à ce travail. Si le contenu de ce recueil était validé par Monsieur le Ministre de l'Écologie et du Développement Durable, il pourrait faire l'objet d'une large diffusion au sein des administrations déconcentrées qui devraient devenir les garants de pratiques de nature à éviter que ne perdurent les risques de contentieux communautaires. Avant que ne devienne réellement opérationnel ce projet, il serait peut-être judicieux de solliciter la participation de représentants français à Bruxelles pour affirmer la philosophie, finaliser la méthodologie de cette action et recueillir le cas échéant leur avis sur des pratiques ayant démontré leur efficacité en Europe auxquelles nous pourrions envisager emprunter quelques idées.

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ANNEXE 3

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ANNEXE 4

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2 octobre 2004 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 1 sur 89

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Décrets, arrêtés, circulaires

TEXTES GÉNÉRAUX

PREMIER MINISTRE

Circulaire du 27 septembre 2004 relative à la procédure de transposition en droit internedes directives et décisions-cadres négociées dans le cadre des institutions européennes

NOR : PRMX0407654C

Paris, le 27 septembre 2004.

Le Premier ministreà Mesdames et Messieurs les ministres

De la qualité de la transposition en droit interne des directives et des décisions-cadres négociées dans lecadre des institutions européennes dépendent à la fois la sécurité des situations juridiques et le crédit de laFrance auprès de ses partenaires européens.

Les obligations de transposition pesant sur l’Etat découlent tant de la Constitution du 4 octobre 1958 que destraités européens. Un manquement à ces obligations n’affecte pas seulement notre crédit au sein de l’Union. Ilexpose la France à des sanctions contentieuses, y compris pécuniaires. Il entrave le bon fonctionnement dumarché intérieur, affectant aussi bien la concurrence entre entreprises que la protection des consommateurs.

Or d’importants efforts restent à faire pour atteindre les deux objectifs régulièrement rappelés par le Conseileuropéen : ramener le déficit de transposition des directives dites du marché intérieur à moins de 1,5 % de cesdirectives ; assurer la transposition de l’ensemble des directives dont l’échéance de transposition est dépasséedepuis plus de deux ans.

Je souhaite donc que des progrès soient rapidement faits pour rattraper le déficit de transposition. Parailleurs, afin d’éviter que les mêmes difficultés ne se reproduisent, il convient de définir une méthode de travailqui soit partagée par l’ensemble des ministères. Tel est l’objet de la présente circulaire, qui se substitue à celledu 9 novembre 1998.

Le travail de transposition ne peut être mené efficacement que s’il repose sur une démarche intégréedébutant dès la négociation de l’acte.

1. L’impact de l’acte en préparation sur le droit interne doit être apprécié le plus en amont possible, pourpermettre, à la fois, d’arrêter les positions de négociation de la France en connaissance de cause et de préparerla transposition. Cette appréciation est particulièrement nécessaire du fait de l’intervention croissante del’Union européenne dans des domaines nouveaux, notamment ceux touchant à l’exercice des libertés publiques.

Cet effort d’anticipation doit se matérialiser sous la forme d’une étude d’impact, dont l’élaboration et la priseen compte dans le cadre de la négociation s’effectuent selon les modalités définies dans l’annexe I.

2. Un effort de programmation doit prolonger le travail ainsi accompli en amont de l’adoption de l’acte parles institutions européennes, de manière à prévenir les retards ou difficultés, de nature administrativenotamment, traditionnellement observés dans la transposition. Cette programmation est indispensable tant pourpermettre au ministère qui a principalement la charge de la transposition d’organiser efficacement son travailque pour assurer la bonne insertion des résultats de ce travail dans les procédures interministérielles.

3. La constitution d’un réseau interministériel de correspondants de la transposition est nécessaire pourfaciliter cette programmation et veiller à sa mise en œuvre effective. Vous indiquerez dans les meilleurs délaisau secrétariat général du comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne(SGCI) les coordonnées de deux correspondants en charge de la transposition, l’un choisi au sein de votrecabinet, l’autre désigné dans les conditions prévues à l’annexe II.

ANNEXE 5

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2 octobre 2004 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 1 sur 89

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4. Un suivi interministériel régulier des travaux de transposition sera organisé selon les modalités définies àl’annexe III. Il permettra d’identifier toute difficulté rencontrée dans la transposition, de trouver les moyens dela surmonter et de prévenir le contentieux communautaire.

Je vous demande d’accorder une attention particulière à la mise en œuvre de ces instructions par vosservices.

JEAN-PIERRE RAFFARIN

A N N E X E I

MESURE DE L’IMPACT DES PROJETS D’ACTES EUROPÉENSDANS LA NÉGOCIATION DES DIRECTIVES ET DES DÉCISIONS-CADRES

Chaque ministère assume, dans son domaine propre, la responsabilité de la préparation de la transposition dudroit européen en droit interne. Cette responsabilité commence en amont de l’adoption des directives par leConseil. Les effets sur le droit interne des dispositions envisagées et les contraintes ou difficultés qui pourronten résulter doivent être mesurés et pris en compte dès le stade de l’élaboration et de la négociation des actesdes institutions européennes.

L’identification de ces contraintes pourra en particulier nourrir les positions exprimées auprès de laCommission européenne dans la phase de consultation préalable des propositions d’actes (consultations sur leslivres blancs ou livres verts par exemple). Une vigilance particulière mérite d’être accordée à ce stade au choixde l’instrument juridique soumis à la négociation. Il est de peu d’intérêts de faire le choix d’une directivelorsque sont négociées des règles qui ne laisseront aux Etats membres aucune marge de manœuvre dans la miseen œuvre du droit européen : dans la mesure du possible, la forme du règlement devrait en ce cas êtreprivilégiée.

I. − Règles générales

L’activité normative de l’Union doit être gouvernée par les principes de subsidiarité et de proportionnalité. Ilconvient d’examiner chaque proposition de directive ou de décision-cadre à la lumière de ces principes, quiconduisent à écarter de leur champ les questions qui peuvent être réglées au niveau national par chaque Etatmembre.

Il faut également faire en sorte, au cours de la négociation, que soit fixée dans l’acte adopté par lesinstitutions européennes une échéance de transposition compatible avec les difficultés d’ordre interne àsurmonter pour la complète application de l’acte négocié, telles qu’elles ont pu être identifiées à ce stade. Lademande de mise en œuvre progressive d’un acte peut être un moyen de surmonter ces difficultés, dès lors queles délais ainsi obtenus sont effectivement mis à profit pour appliquer la stratégie initialement définie pour latransposition de l’acte.

II. − Fiche d’impact simplifiée et étude d’impact

a) Tout projet d’acte des institutions européennes doit donner lieu à une analyse préalable de ses impactsjuridiques, budgétaires, techniques ou administratifs, y compris, le cas échéant, pour les collectivitésterritoriales, ainsi que de ses conséquences sur le secteur d’activité concerné.

A cet effet, le ministère chef de file doit fournir, sur l’invitation du SGCI et dans les trois semaines suivantla transmission aux assemblées d’une proposition d’acte européen dans le cadre de la procédure de l’article 88-4de la Constitution, une fiche d’impact juridique simplifiée relative à cet acte. Cette fiche dresse la liste destextes de droit interne dont l’élaboration ou la modification seront nécessaires en cas d’adoption de la directiveou de la décision-cadre. Elle indique quelles sont les difficultés de transposition déjà identifiées.

Il peut s’agir, en particulier :– d’interrogations sur le choix du niveau de texte adéquat dans la hiérarchie des normes internes au vu, en

particulier, de la position adoptée par le Conseil d’Etat dans le cadre de la procédure instituée par lacirculaire du 13 décembre 1999 relative à l’application de l’article 88-4 de la Constitution ;

– de difficultés d’interprétation ou de risques d’incohérence au regard des dispositions de droit interneexistantes liés à une insuffisante qualité rédactionnelle du texte communautaire.

Cette fiche est accompagnée d’une première évaluation portant sur les impacts autres que juridiques del’acte, ainsi que d’un avis sur le principe du texte.

b) L’analyse ainsi effectuée permet d’éclairer la négociation dès le stade initial. Première étape de l’étuded’impact, elle est ensuite enrichie et adaptée lorsque des modifications notables sont apportées à la propositiondu fait de la position commune adoptée au Conseil ou à la suite d’amendements proposés par le Parlementeuropéen.

Sans verser dans un formalisme excessif et avec le degré de finesse autorisée par le stade de la négociation,l’étude d’impact doit :

– d’une part, comporter un tableau de concordance, article par article, entre l’acte en cours de négociation etles dispositions de droit appelées à faire l’objet de modifications lors de la transposition ;

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– d’autre part, permettre de mesurer les impacts techniques, budgétaires et administratifs de l’acte en coursde négociation. Les positions du Gouvernement dans la négociation doivent tenir compte de ces différentsimpacts.

L’étude d’impact dresse également la liste des organismes dont la consultation constitue un préalablenécessaire à la transposition en droit interne des directives et des décisions-cadres. Dès le stade de lanégociation, il est utile que soient consultés les différents acteurs du secteur concerné, y compris, le caséchéant, les organismes obligatoirement consultés au stade de l’élaboration des mesures nationales d’exécution.Dès ce stade, une attention particulière devra être prêtée à l’association des collectivités territoriales lorsque laproposition d’acte négociée affecte leurs domaines de compétences.

c) S’il apparaît, dès la présentation du projet d’acte ou au cours de sa négociation, que l’insertion dans ledroit interne du texte examiné par le Conseil de l’Union européenne est susceptible de soulever des problèmesjuridiques délicats, le Conseil d’Etat peut être saisi sans attendre d’une demande d’avis, selon les modalitésprévues par la circulaire du 30 janvier 2003.

A N N E X E I I

CONSTITUTION D’UN RÉSEAU INTERMINISTÉRIELDE CORRESPONDANTS DE LA TRANSPOSITION

La désignation de correspondants de la transposition au sein de chaque ministère permet au ministre d’avoirune vue d’ensemble des travaux relatifs à la transposition des actes européens, sans pour autant priver lesdirections et services matériellement compétents de la responsabilité qui leur incombe dans l’adaptation dudroit correspondant à leur secteur d’attributions.

La fonction de correspondant de la transposition dans les services est confiée au secrétaire général dudépartement ministériel ou au haut fonctionnaire pour la qualité de la réglementation.

Ce correspondant est chargé de la définition et du suivi de la démarche du ministère pour la transpositiondes directives et des décisions-cadres, du respect des échéances par les directions d’administration centralechefs de file et de la coordination d’interlocuteurs qui, au sein des différents services du ministère, ont lacharge de préparer les textes de transposition.

Des objectifs portant sur le respect des obligations européennes de transposition doivent être inclus dans lalettre de mission du secrétaire général ou des directeurs d’administration centrale concernés. A titreexpérimental, un indicateur peut y être introduit pour permettre de moduler leur rémunération en fonction durespect de ces objectifs.

Au-delà de ces désignations, chaque ministère doit s’assurer que l’organisation et le fonctionnement de sonadministration permettent d’établir efficacement le lien entre la définition des positions de négociation et latransposition des actes adoptés.

A N N E X E I I I

SUIVI DES TRAVAUX DE TRANSPOSITION À COMPTERDE L’ADOPTION DE LA DIRECTIVE OU DE LA DÉCISION-CADRE

I. − Echéancier de transposition

Dès que la directive ou la décision-cadre a été publiée, son texte est transmis par le SGCI au ministèredésigné en qualité de chef de file, aux autres ministères intéressés et au secrétariat général du Gouvernement(SGG). Dans un délai fixé par le SGCI et qui ne saurait excéder trois mois suivant cette transmission, chacundes ministères participant à la transposition adresse au SGCI un échéancier d’adoption des textes relevant deses attributions, accompagné, pour chacun de ces textes, d’un avant-projet de rédaction et d’un tableau deconcordance définitif permettant d’identifier clairement les dispositions transposées.

Les délais requis pour l’élaboration des textes doivent être déterminés avec réalisme. Il convient, enparticulier, de prendre toutes mesures pour concilier les procédures de consultation applicables à certains textes,par exemple la consultation d’instances représentant les professions, avec le respect des délais de transposition.

C’est à ce stade qu’il convient également d’identifier les difficultés qui subsisteraient dans l’interprétation dutexte communautaire. En cas de difficulté sérieuse, le SGCI et, le cas échéant, la direction des affairesjuridiques du ministère des affaires étrangères sont saisis sans attendre.

II. − Réunions interministérielles de suivi de la transposition

Ces réunions convoquées par le SGCI à échéances régulières permettent de vérifier le respect deséchéanciers indicatifs fixés à la suite de l’adoption de la directive ou de la décision-cadre. Dans le casparticulier où la directive comporte des dispositions prévoyant que certaines des questions relevant de sonchamp d’application feront l’objet d’un nouvel examen à une échéance prédéterminée (clause dite « de rendez-vous »), le SGCI veille à ce que le délai ainsi accordé soit employé à préparer la position de la France dans lesdiscussions à venir.

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Il incombe au SGCI de tenir à jour, en lien avec les ministères intéressés, le tableau général de transpositiondes directives et des décisions-cadres. Une synthèse de ce tableau par ministère est transmise semestriellementau secrétariat général du Gouvernement, aux fins d’examen dans le cadre de la programmation du travailgouvernemental, et portée à la connaissance des membres du cabinet du Premier ministre pour les matièresrelevant de leur secteur, ainsi que du directeur du cabinet des ministres et secrétaires d’Etat concernés.

Afin de résoudre les difficultés identifiées dans le cadre du suivi interministériel de la transposition effectuésous l’autorité du SGCI, un groupe à haut niveau de l’adaptation au droit communautaire se réunit à un rythmetrimestriel sous l’autorité conjointe du secrétaire général du Gouvernement et du secrétaire général du SGCI, enliaison avec les ministères chargés des relations avec le Parlement et des affaires européennes et en présencedes correspondants de la transposition. Les difficultés qui substitueraient à ce stade sont soumises à l’arbitragedu Premier ministre dans les meilleurs délais.

III. − Prévention du contentieux communautaire

Toutes dispositions susceptibles de prévenir le développement du contentieux doivent être prises.Il importe, en particulier, de veiller à ce que les mises en demeure ou avis motivés émanant de la

Commission reçoivent une réponse dans le délai requis.La pratique des réunions dites dans le langage communautaire « réunions paquets », qui permettent de

procéder à un examen périodique, avec la Commission, de l’ensemble des affaires susceptibles de prendre uncaractère contentieux, mérite d’être développée. Il convient que toutes dispositions soient prises pour quechaque département ministériel soit efficacement représenté à ces réunions.

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Les insectes protégés en France I. Espèces représentées en Métropole : Odonates, Orthoptères, Coléoptères, Lépidoptères. II. Espèces représentées à la Réunion : Lépidoptères III. Espèces représentées à la Guadeloupe : Coléoptères

REPUBLIQUE FRANCAISE

MINISTERE DE L'ENVIRONNEMENT

Arrêté du 22 juillet 1993 relatif à la liste des insectes protégés sur le territoire national

Le ministre de l'Environnement et le ministre de l'Agriculture et de la Pêche, Vu le livre II du code rural relatif à la protection de la nature, notamment ses articles L.211-1 et L.211-2 et R.211-1 à R.211-5 ;

Vu l'avis du conseil national de la protection de la nature,

Arrêtent :

Art. 1er - Sont interdits sur tout le territoire national et en tout temps, la destruction ou l'enlèvement des œufs, des larves et des nymphes, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la préparation aux fins de collections des insectes suivants ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur

transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat :

I - Espèces représentées en métropole

[R] Odonates : Le Leste enfant Sympecma (braueri) paedisca Brauer, 1882 L'Agrion de Mercure Coenagrion mercuriale (Charpentier, 1840) Le Gomphe à pattes jaunes Stylurus (Gomphus) flavipes (Charpentier, 1821) Le Gomphe à cercoïdes fourchus Gomphus graslinii Rambur, 1842 Le Gomphe serpentin Ophiogomphus cecilia Fourcroy, 1725 La Cordulie à corps fin Oxygastra curtisii (Dale, 1834) La Cordulie splendide Macromia splendens (Pictet, 1843) La Leucorrhine à front blanc Leucorrhinia albifrons (Burmeister, 1839) La Leucorrhine à large queue Leucorrhinia caudalis (Charpentier, 1850) La Leucorrhine à gros thorax Leucorrhinia pectoralis (Charpentier, 1825)

[R] Orthoptères : Le Criquet rhodanien Prionotropis rhodanica Uvarov, 1922 Le Criquet hérisson Prionotropis hystrix ssp azami Uvarov, 1923 La Magicienne dentelée Saga pedo Pallas, 1771

[R] Coléoptères : Le Grand Dytique Dytiscus latissimus Linné, 1758 Le Graphodère à deux lignes Graphoderes bilineatus de Geer Le Barbot ou Pique-prune Osmoderma eremita Scopoli, 1763 Le Cucujus vermillon Cucujus cinnabarinus Scopoli, 1763 Le Grand Capricorne Cerambyx cerdo Linné, 1758

Insectes protégés en France

http://www.inra.fr/Internet/Hebergement/OPIE-Insectes/lip-fr.htm

ANNEXE 6

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La Rosalie des Alpes Rosalia alpina Linné, 1798 Le Carabe à reflets cuivrés Chrysocarabus auronitens ssp cupreonitens Chevrolat, 1861 Le Carabe à reflet d'or Chrysocarabus auronitens ssp subfestivus Oberthür, 1884 Le Carabe de Solier Chrysocarabus solieri Dejean, 1826 Le Carabe doré du Ventoux Carabus auratus ssp honnorati Dejean, 1826 Les Aphaenops Aphaenops ssp. Bonvouloir, 1861 Les Hydraphaenops Hydraphaenops ssp. Jeannel, 1916 Les Trichaphaenops Trichaphaenops ssp. Jeannel, 1916

[R] Lépidoptères : La Zygène cendrée ou Zygène rhadamanthe Zygaena rhadamanthus Esper, 1793 La Zygène de la Vésubie Zygaena vesubiana Le Charles, 1933 Le Petit Apollon Parnassius phoebus Fabricius, 1793 L'Apollon Parnassius apollo Linné, 1758 Le Semi-Apollon Parnassius mnemosyne Linné, 1758 La Diane Zerynthia polyxena Denis et Schiffermüller, 1775 La Proserpine Zerynthia rumina Linné, 1758 Le Porte-queue de Corse Papilio hospiton Genè, 1839 L'Alexanor Papilio alexanor Esper, 1799 Le Solitaire Colias palaeno Linné, 1761 La Piéride de l'Aethionème Pieris ergane Geyer, 1828 Le Nacré tyrrhénien Fabriciana elisa Godart, 1823 Le Nacré de la Canneberge Boloria aquilonaris Stichel, 1908 Le Nacré de la Bistorte Proclossiana eunomia Esper, 1799 Le Damier des Knauties Euphydryas (Eurodryas) desfontainii Godart, 1819 Le Damier de la Succise Euphydryas (Eurodryas) aurinia Rottemburg, 1775 Le Damier du Frêne Euphydryas (Hypodryas) maturna Linné, 1758 Le Moiré des Sudètes Erebia sudetica Staudinger, 1861 Le Fadet des Laîches ou Oedipe Coenonympha oedippus Fabricus, 1787 Le Daphnis ou Fadet des tourbières Coenonympha tullia Müller, 1704 Le Mélibée Coenonympha hero Linné, 1761 La Bacchante Lopinga achine Scopoli, 1763 Le Cuivré de la Bistorte Helleia helle Denis et Schiffermüller, 1775 Le Cuivré des marais Thersamolycaena dispar Haworth,1803. Le Protée ou Azuré des mouillères Maculinea alcon Denis et Schiffermüller, 1775 L'Azuré du Serpolet Maculinea arion Linné, 1758 L'Azuré de la Sanguisorbe Maculinea telejus Bergsträsser, 1779 L'Azuré des paluds Maculinea nausithous Bergsträsser, 1779 La Laineuse du Prunellier Eriogaster catax Linné, 1758 L'Isabelle de France ou Papillon vitrail Graellsia isabellae Graëlls, 1849 Le Sphinx de l'Epilobe Proserpinus proserpina Pallas, 1772 Le Sphinx de l'Argousier Hyles hippophaes Esper, 1793 La Matrone ou Ecaille brune Pericallia matronula Linné, 1758 L'Ecaille des marais Diacrisia (Rhyparioides) metelkana Lederer, 1861 L'Ecaille funèbre Phragmatobia caesarea Goeze, 1781

II -Espèces représentées à la Réunion

[R] Lépidoptères

Le Papillon La Pâture Papilio phorbanta Linné, 1771 La Salamide d'Augustine Salamis augustina Boisduval, 1833 La Vanesse de l'Obetie Antanartia borbonica Oberthür, 1880

Insectes protégés en France

http://www.inra.fr/Internet/Hebergement/OPIE-Insectes/lip-fr.htm

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III - Espèces représentées à la Guadeloupe

[R] Coléoptères

Le Dynaste scieur de long Dynastes hercules ssp hercules Linné, 1758

Art. 2 - L'arrêté du 3 août 1979 fixant la liste des insectes protégés en France est abrogé.

Art. 3 - Le directeur de la nature et des paysages et le directeur général de l'alimentation sont chargés chacun en ce qui le concerne de l'exécution du présent arrêté, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Liste des insectes protégés en Ile-de-France

Vers la page d'accueil d'OPIE-Insectes

Insectes protégés en France

http://www.inra.fr/Internet/Hebergement/OPIE-Insectes/lip-fr.htm

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29 décembre 2004 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 61 sur 146

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Décrets, arrêtés, circulaires

TEXTES GÉNÉRAUX

MINISTÈRE DE L’ÉCOLOGIE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Arrêté du 16 décembre 2004 modifiant l’arrêté du 22 juillet 1993fixant la liste des insectes protégés sur le territoire national

NOR : DEVN0430477A

Le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche et de la ruralité et le ministre de l’écologie et dudéveloppement durable,

Vu les articles L. 411-1 et L. 411-2, R. 211-1 à R. 211-11 du code de l’environnement ;Vu l’arrêté du 22 juillet 1993 fixant la liste des insectes protégés sur le territoire national ;Vu l’arrêté du 22 décembre 1999 fixant les conditions de demande et d’instruction des autorisations

exceptionnelles (d’opérations) portant sur des spécimens d’espèces protégées ;Vu l’avis du Conseil national de la protection de la nature,

Arrêtent :

Art. 1er. − Le premier alinéa de l’article 1er de l’arrêté du 22 juillet 1993 susvisé est remplacé par lesdispositions suivantes :

« Sont interdits sur tout le territoire national et en tout temps la destruction, l’altération ou la dégradation dumilieu particulier des insectes suivants ou de leurs œufs, leurs larves et leurs nymphes, la destruction oul’enlèvement des œufs, des larves et des nymphes, la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbationintentionnelle, la préparation aux fins de collections d’individus de ces espèces ou, qu’ils soient vivants oumorts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat. »

Art. 2. − Il est inséré après l’article 1er de l’arrêté du 22 juillet 1993 susvisé un article 2 ainsi rédigé :

« Art. 2. − A condition qu’il n’existe pas une autre solution satisfaisante et que la mesure ne nuise pas aumaintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire derépartition naturelle, l’autorité administrative compétente peut délivrer, selon la procédure définie par arrêté duministre chargé de la protection de la nature, des autorisations exceptionnelles pour déroger aux interdictionsfixées à l’article 1er pour les motifs ci-après :

a) Dans l’intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitatsnaturels ;

b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l’élevage, aux forêts, aux pêcheries,aux eaux et à d’autres formes de propriété ;

c) Dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques, et de la sécurité aérienne ;d) Pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur. Des mesures compensatoires ayant des

conséquences bénéfiques pour les espèces concernées sont alors exigées du demandeur de la dérogation. Sil’écologie des espèces le nécessite, la mise en œuvre de cette dérogation est conditionnée par la réalisationpréalable de certaines de ces mesures compensatoires ;

e) A des fins de recherche et d’éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour desopérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes, ainsi quepour l’élevage se rapportant à ces actions. »

Art. 3. − L’article 2 de l’arrêté du 22 juillet 1993 susvisé devient l’article 3.

Art. 4. − Le directeur de la nature et des paysages et la directrice générale de l’alimentation sont chargés,chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté, qui sera publié au Journal officiel de laRépublique française.

Fait à Paris, le 16 décembre 2004.

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29 décembre 2004 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE Texte 61 sur 146

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Le ministre de l’écologieet du développement durable,

Pour le ministre et par délégation :Le directeur de la nature

et des paysages,J.-M. MICHEL

Le ministre de l’agriculture, de l’alimentation,de la pêche et de la ruralité,

Pour le ministre et par délégation :La directrice générale de l’alimentation,

S. VILLERS

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ANNEXE 7

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ANNEXE 8

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ANNEXE 9

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ANNEXE 10

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ANNEXE 11

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ANNEXE 12

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