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UNIVERSITE DE LILLE II FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES, POLITIQUES ET SOCIALES LA TECHNIQUE DES DROITS POTESTATIFS DANS LES CONTRATS DE PROMESSE DE VENTE D’IMMEUBLE MEMOIRE POUR LE DIPLOME SUPERIEUR DU NOTARIAT Présenté et soutenu le 20 décembre 2012 Par Géraldine LANCELIN JURY Président : Monsieur Eric KERKHOVE, Professeur des universités Suffragant : Monsieur Bertrand RYSSEN, Notaire Suffragant : Monsieur Laurent LESAGE, Notaire

La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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mémoire publié dans Proche Orient Etrudes Juridiques, 2013

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Page 1: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

UNIVERSITE DE LILLE II

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES, POLITIQUES ET SOCIALES

LA TECHNIQUE DES DROITS POTESTATIFS DANS LES CONTRATS DE PROMESSE DE VENTE D’IMMEUBLE

MEMOIRE POUR LE DIPLOME SUPERIEUR DU NOTARIAT

Présenté et soutenu le 20 décembre 2012

Par Géraldine LANCELIN

JURY

Président : Monsieur Eric KERKHOVE, Professeur des universités Suffragant : Monsieur Bertrand RYSSEN, Notaire Suffragant : Monsieur Laurent LESAGE, Notaire

Page 2: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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TABLE INVERSEE DES ABREVIATIONS

AJDI : Actualité juridique droit immobilier, Dalloz.

al. : alinéa

art. : article

APD : Archives de philosophie du droit, Dalloz

Bull. civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (chambres civiles)

CA. : Cour d'appel

Cass. : Cour de cassation

Cass. civ. 1ère: première chambre civile de la Cour de cassation

Cass. civ. 2ème: deuxième chambre civile de la Cour de cassation

Cass. civ. 3ème: troisième chambre civile de la Cour de cassation

Cass. com. : chambre commerciale de la Cour de cassation

c.civ. : code civil

cf. : confère

chron. : chronique

D. : Recueil Dalloz

Dalloz jur. : Dalloz jurisprudence

éd. : édition

fasc. : fascicule

GAJC : Grands arrêts de la jurisprudence civile, Dalloz.

ibid. : ibidem

Id. : idem.

J.CL Not.-Rép. : Juris-Classeur, Notarial Répertoire

J.CL Not.-Form. : Juris-Classeur, Notarial Formulaire

J. CL Civil Code : Juris-Classeur, code civil

JCP G.: Juris-Classeur périodique, édition générale

JCP N.: Juris-Classeur périodique, édition notariale et immobilière

n° : numéro

obs. : observation

op. cit. : opere citato

p. : page

Rép. civ. Dalloz : Répertoire de droit civil, Dalloz (encyclopédies)

Rép. Defrénois : Répertoire du notariat Defrénois

RDI : Revue de droit immobilier, Dalloz.

RTD. civ. : Revue trimestrielle de droit civil, Dalloz.

somm. : sommaire

t. : tome

v. : voir

Page 3: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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SOMMAIRE

LA TECHNIQUE DES DROITS POTESTATIFS

DANS LES CONTRATS DE PROMESSE DE VENTE D’IMMEUBLE

PARTIE I : Un pouvoir particulier dans le contrat SECTION I : Le caractère unilatéral du droit potestatif I - La génération d’un lien de sujétion utile au contrat

A - La situation des parties au lien de sujétion B - Fondements et effets de l'assujettissement conventionnel

II - Le lien de sujétion ignoré par la jurisprudence A - La qualification jurisprudentielle de l’obligation du promettant B - L’impossible rencontre des consentements SECTION II : Le pouvoir unilatéral conditionné du potentior

I - Les limites imposées à l’exercice du droit potestatif A - Les termes du choix potestatif B - Le délai d’exercice du droit potestatif

II – Interaction des délais d’exercice des droits potestatifs A - Le délai pour renoncer à une condition suspensive

B - L’exercice combiné des droits potestatifs

PARTIE II : Caractères et effets de la manifestation unilatérale de volonté

SECTION I : L’acte juridique unilatéral de volonté

I - Qualification de la manifestation unilatérale de volonté en acte unilatéral

A - La validité de l’acte juridique soumise à la réalité de la volonté de son auteur

B - Effets propres à l’acte juridique unilatéral

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II - L’extériorité de la manifestation unilatérale de volonté A - L’expression de la manifestation de volonté B - Le caractère réceptice de la manifestation unilatérale

SECTION II: Les effets de l’exercice du droit potestatif I - La modification de la situation juridique préexistante

A - Critères de la notion de modification de la situation juridique appliquée à l’exercice du droit potestatif

B - Appréhension extensive de la notion de modification de situation juridique

II- Les effets subséquents à l’exercice du droit potestatif

A - L’irrévocabilité de l’exercice du droit potestatif B - Le contrôle de l’exercice du droit potestatif

Page 5: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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INTRODUCTION

Au regard du principe de la liberté contractuelle, les parties au contrat ont

toute latitude quant au contenu des conventions qui les unissent, tant qu’elles

n’affectent pas la moralité et l’ordre public1. Elles ont donc la faculté de s’entendre

sur la position dominante de l’une d’entre elles, en offrant à celle-ci des prérogatives

particulières dont pourrait dépendre l'existence du contrat. C'est le cas par exemple

du droit de réméré par lequel le vendeur peut exiger de l'acquéreur qu'il lui rende la

propriété du bien vendu moyennant le paiement du prix en principal2, du droit

d’option dans les promesses unilatérales de vente par lequel le bénéficiaire a le choix

entre acheter ou ne pas acheter un bien déterminé, du droit de rupture comme

conséquence du jeu d’une clause résolutoire ou d’une clause de dédit et permettant

au cocontractant d'anéantir le contrat, du droit de préférence qui est conféré à une

1 Pour une définition de l’ordre public, v. B. FAGES, Droit des obligations, L.G.D.J., 3

ème éd., 2011,

n° 169 et suiv. Pour l’auteur, la notion d’ordre public désigne, en droit contractuel, « les règles qui

sont considérées comme tellement essentielles au bon fonctionnement de la société qu’il est

impossible aux parties d’y déroger par un accord de volontés ». L’ordre public économique est dit

« de direction » lorsqu’il est édicté dans un but d’intérêt économique général, et « de protection »

lorsqu’il a pour objectif de défendre l’individu présumé en situation de faiblesse. 2 L'article 1659 du code civil définit la faculté de rachat ou de réméré comme « un pacte par lequel le

vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal et le

remboursement dont il est parlé à l’article 1673. » L'article 1673 al.1 du code civil dispose quant à lui

que « le vendeur qui use du pacte de rachat, doit rembourser non seulement le prix principal, mais

encore les frais et loyaux coûts de la vente, les réparations nécessaires, et celles qui ont augmenté la

valeur du fonds, jusqu'à concurrence de cette augmentation. Il ne peut entrer en possession qu'après

avoir satisfait à toutes ces obligations. »

Page 6: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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personne pour le cas où le stipulant déciderait de vendre… S'intéresser à l'insertion

de ces mécanismes juridiques dans le contrat renvoie à la question de la

construction, plus ou moins lente, et à celle de l'aménagement, plus ou moins

complexe, des relations contractuelles.

Le contrat n'apparaît plus en effet comme le résultat de la rencontre

simultanée et instantanée des volontés. La construction de l'accord définitif peut

prendre du temps, être précédée d'une phase précontractuelle de négociation pendant

laquelle les parties se résignent à faire de nécessaires concessions, lesquelles

représentent des coûts affectant plus ou moins l'utilité du contrat en même temps

qu'elles accroissent la satisfaction de le conclure. Elle peut aussi susciter un

engagement inégalitaire des parties, l'une décidant de s'engager définitivement,

tandis que l'autre prospecte encore et s'interroge sur la faisabilité de l'opération. De

même, en concluant le contrat, faut-il prévoir sa durée, les causes de son extinction,

les sanctions de son inexécution, les raisons de son aménagement. Une fois formé, il

doit être exécuté conformément aux prévisions des parties et selon la dynamique

qu'elles ont souhaitée.

Ainsi, le contrat est un ensemble complexe de convergences intervenues par

suite de négociations entre des parties aux motivations et intérêts légitimes

différents. L'équilibre du contrat résulte des ajustements négociés entre les parties.

L'intégration de mécanismes spécifiques créant des événements dans le

contrat en rompt la linéarité. Ils ont vocation à modifier les rapports contractuels

existant, à en créer d'autres, à planifier leur terme. L'exercice du droit de préférence,

comme celui lui du droit de préemption ou du droit de substitution, provoque une

scission dans le contrat, un morcellement de celui-ci en deux intervalles distincts par

modification de l'identité de la partie définitivement contractante. L'exercice du droit

d'option dans la promesse unilatérale de vente a pour effet de modifier

instantanément la situation juridique précédant ce moment, par la création d'une

vocation à la propriété au profit de son titulaire.

Page 7: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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Les droits présentement cités à titre d'exemple sont d'application usuelle dans

la pratique notariale des contrats. Ils ont des caractères communs : ils s'exercent au

moyen d'une volonté unique, d'une activité propre qui n'est pas une obligation au

sens juridique mais une sorte de prérogative à définir, et bouleversent

l'ordonnancement du contrat dès l'expression manifeste de la volonté de leurs

titulaires d'en user. Ces droits ont en effet pour objet de conférer à leurs titulaires un

pouvoir particulier et unilatéral, générant dès leur exercice la modification d'une

situation juridique intéressant autrui. Ils correspondent à une forme originale de droit

à laquelle la notion de droit potestatif fait écho.

La notion de droit potestatif est une notion d'origine étrangère qui a prospéré

sous la plume de quelques auteurs de la doctrine juridique allemande et italienne3.

En Allemagne, le droit potestatif est connu notamment sous le terme de Kan-Recht

ou Gestaltungsrechte, en Italie sous le terme de diritto potestativo. Elle a pénétré

très progressivement la doctrine française à la fin des années 1940, d'abord par

référence à son existence au-delà de nos frontières. A cette époque, certains auteurs

français intègrent le concept de droit potestatif dans leurs écrits en en démontrant

l'intérêt en droit français ; ainsi BOYER l'utilise pour caractériser la nature de la

notion de transaction4 et celle des pactes d'option

5. Néanmoins, c'est sous l'influence

de Monsieur NAJJAR que la notion de droit potestatif a été définitivement introduite

en France, à propos du droit d’option6. Monsieur NAJJAR démontre dans sa thèse

que le droit d'option est un droit potestatif, et que le droit potestatif est un droit

subjectif d'une nature particulière.

3 La « notion » peut être définie comme « le moyen par lequel les juristes appréhendent des faits en

vue de déterminer quelles règles de droit leur sont applicables : la notion permet de qualifier des faits,

c'est-à-dire de les faire rentrer dans une catégorie connue et répertoriée, à laquelle ces faits paraissent

correspondre et, en conséquence, de leur déclarer applicable le régime juridique établi pour cette

catégorie. Ainsi, la notion est l'outil qui permet d'opérer des « qualifications » en vue de procéder à

« l'imputation » de régimes juridiques déterminés », F.-P. BÉNOIT, Notions et concepts, instruments

de la connaissance juridique: les leçons de la Philosophie du droit de Hegel, Mélanges à G. Peiser,

1995, p. 23. 4 L. BOYER, La notion de transaction, Contribution à l'étude des concepts de cause et d'acte

déclaratif, thèse, Toulouse, 1947, Recueil Sirey, préface de J. MAURY. 5 L. BOYER, Les promesses synallagmatiques de vente, contribution à la théorie des avant-contrats,

RTD. civ. 1949. 6 I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral, thèse,

préface de P. RAYNAUD, Paris, L.G.D.J., 1967.

Page 8: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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Monsieur NAJJAR définit les droits potestatifs comme « des pouvoirs par

lesquels leurs titulaires peuvent influer sur les situations juridiques préexistantes en

les modifiant, les éteignant ou en créant de nouvelles au moyen d’une activité propre

unilatérale ».7 Le droit potestatif confère ainsi à son titulaire un pouvoir dont

l’exercice modifie la sphère juridique d’autrui par simple manifestation de volonté

unilatérale. Le terme de « pouvoir » annonce la prérogative, l’aptitude, le droit, voire

le privilège accordé à son bénéficiaire8. Quant à la modification de la situation

juridique, elle s’entend de celle à laquelle sont attachées des conséquences

juridiques9. Le droit potestatif est le pouvoir du titulaire du droit de modifier la

situation juridique d’autrui, et non d’exercer directement un pouvoir sur autrui.

Suite à la thèse de Monsieur NAJJAR, les travaux consacrés uniquement à

l'analyse du concept de droit potestatif sont rares, et il a fallu attendre la thèse de

Monsieur VALORY10

pour avoir un ouvrage entièrement consacré à l’étude de la

notion de potestativité en droit français. Monsieur VALORY propose de créer une

notion autonome et élargie de la potestativité en recherchant dans le critère de

sujétion un critère homogène de la potestativité, qu’elle soit un droit ou une

condition au sens de l’article 1170 du code civil.

Pourtant, la notion de droit potestatif est usuellement employée par les

auteurs pour qualifier certains droits, et quelques-uns s’essaient à la faire accéder au

rang de notion autonome du droit. C'est ainsi, par exemple, que Madame SAINT-

ALARY-HOUIN11

a qualifié le droit de préemption de droit potestatif, que

7 Ibid., n°99. Cette définition est la même que celle avancée par MESSINA, auteur de la doctrine

italienne qui a consacré de nombreuses études à la théorie du droit potestatif. C’est aussi la définition

généralement retenue par la doctrine française pour définir les droits potestatifs. V. en ce sens les

développements de L. BOYER, Les promesses synallagmatiques de vente, contribution à la théorie

des avant-contrats, op.cit., p.26. 8 M. ROBIN définit le pouvoir au sens du droit civil comme « l’aptitude à faire certains actes

reconnus et garantis par l’ordre juridique à certaines personnes. », in Droit subjectif et pouvoir

fonctionnel, contribution à la théorie générale du pouvoir juridique, thèse, Paris, 1953, p. 23. 9 Pour une définition de la situation juridique comme « un complexe de droits et de devoirs », v. P.

ROUBIER, Le rôle de la volonté dans la création des droits et devoirs, APD. 1957, p.7. 10

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, thèse, avant-propos d’I. NAJJAR,

et préface de J. MESTRE, Aix-en-Provence, P.U.A.M., 1999. 11

C. SAINT-ALARY-HOUIN, Droit de préemption, thèse, préface P. RAYNAUD, Paris, L.G.D.J.,

1979.

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- 9 -

Monsieur MIRABAIL12

et Monsieur PILLET13

ont repris la même analyse à propos,

respectivement, du droit de rétractation et du droit de substitution de contractant à la

formation du contrat. De nombreuses chroniques et commentaires d’arrêts évoquent

également l’existence du droit potestatif, en en donnant la définition et en rappelant

la thèse de Monsieur NAJJAR, sans pourtant en poursuivre la réflexion. Seulement

quelques articles traitent du droit potestatif pour en approcher réellement le contenu.

Le législateur n’a jamais fait explicitement référence à la catégorie des droits

potestatifs, et n’en a jamais donné de définition. Quant à la jurisprudence, bien

qu’usant régulièrement du terme « potestatif », elle est réticente à appliquer les

effets qu’implique la qualification d’un droit en droit potestatif, préférant recourir à

des qualifications juridiques reconnues du droit positif mais qui sont peut-être moins

adaptées. C'est ainsi que la substitution de contractant est analysée par la Cour de

cassation comme n’étant pas une cession de créance, et la violation de la promesse

unilatérale de vente par le promettant comme celle d'une obligation contractuelle de

faire.

Mais de la qualification juridique d'un droit découlent ses effets ; et à l’heure

de la confection de clauses particulières contenues dans un contrat, le praticien

s’interroge souvent sur la qualification à retenir des dispositions souhaitées par les

parties et sur les conséquences de l'insertion de tel ou tel mécanisme juridique dans

le contrat. Le droit potestatif n’est pas seulement une technique du droit des

contrats - même si c’est en cette matière que son existence suscite le plus l’intérêt

des juristes - puisqu’on peut en trouver des manifestations également en droit des

biens (droit de mitoyenneté), en droit international privé (déclaration de nationalité),

ou en droit de la famille par exemple (droit d’option de l’héritier). Si le droit

potestatif traduit le fonctionnement de nombreux mécanismes juridiques, il demeure

paradoxalement une notion théorique peu diffusée et assez méconnue du notaire.

12

S. MIRABAIL, La rétractation en droit privé français, thèse, préface J.-P. MARTY, Toulouse,

L.G.D.J., 1997. 13

G. PILLET, La substitution de contractant à la formation du contrat en droit privé, thèse, préface

de P. JOURDAIN, Paris, L.G.D.J., 2004.

Page 10: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 10 -

L'objet de ce mémoire est de rechercher l’utilité de la qualification en droit

potestatif de certains mécanismes conventionnels, permettant d'aménager les

différents temps - plus ou moins longs - du contrat, de sa formation jusqu’à sa

rupture. Il s’agit d’abord d’identifier précisément les caractères du droit potestatif,

en recherchant si la notion de droit potestatif est pertinente et satisfaisante lors de la

qualification d'un certain nombre de mécanismes du droit des contrats. Est-ce que la

notion de droit potestatif est suffisamment polyvalente pour caractériser des

mécanismes conventionnels différents, et parfois contradictoires ? La définition du

droit potestatif, qui renvoie presque exclusivement à son « pouvoir de volonté

formateur »14

unilatéral, nous éclaire sur son rôle lorsqu'il est inséré dans un rapport

contractuel autant qu'elle nous interroge sur sa possible insertion dans le contrat.

Comment un pouvoir exclusif peut-il trouver à s'intégrer dans une matière qui a pour

fondement l'égalité entre les parties? L'existence de droits potestatifs dans le contrat

serait une traduction de l'élément consensuel qui gouverne la matière et qui consiste

dans « l'accord de volontés des cocontractants, des parties dotées d'une capacité et

d'un pouvoir suffisants, leur consentement sur un objet et sur une cause régulière »15

.

Le droit potestatif confère à un cocontractant un pouvoir particulier, dont la nature et

les effets sont à rechercher.

Si les parties se sont entendues sur la mise en place d’un pouvoir exclusif et

unilatéral, il faut donner à cette entente une traduction juridique. Rechercher les

implications pratiques de la qualification théorique de certaines prérogatives en droit

potestatif nécessite d'appréhender les effets de l'exercice de ce droit, et les effets de

sa violation postérieurement à son exercice. Des solutions jurisprudentielles, comme

celle consistant à analyser la violation de la promesse de vente par le promettant

comme celle d'une obligation contractuelle de faire, tend à atrophier la commune

intention des parties et dénaturer l'engagement réel des parties puisqu'à la levée de

l'option le contrat devrait être en principe formé, et ses effets s'appliquer. Le contrat

apparaît souvent comme le cadre de confiance des échanges patrimoniaux. La

possibilité d'aménager le contrat par des clauses adaptées aux situations, ainsi que la

14

I. NAJJAR, Droits fondamentaux et droits discrétionnaires : pour une mise en perspective en droit

civil, Université Saint-Joseph, Faculté de droit et des sciences politiques, Documents et publications

du CEDROMA (Centre d'études des droits du monde arabe), novembre 2003, p. 4. 15

J.-M MOUSSERON, M. GUIBAL, D. MAINGUY, L'avant-contrat, Francis Lefebvre, 2001, p. 26.

Page 11: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 11 -

connaissance des effets des dispositions contenues dans le contrat, participent à la

sécurité juridique des contractants.

La matière des contrats de promesse de vente d’immeuble est le domaine

privilégié de l’analyse, non seulement parce qu’elle constitue une grande part de

l’activité notariale en droit des contrats, mais aussi parce que c’est en cette matière

que les droits potestatifs sont les plus importants et s’entrecroisent. Le droit

potestatif, en ce qu'il confère un pouvoir particulier à son titulaire, n'a d'intérêt que si

l'objet sur lequel porte le droit est rare ou existe en nombre limité, ce qui est le cas

des biens et droits immobiliers. La terminologie employée de « contrat de promesse

de vente » fait ici référence à la promesse unilatérale et à la promesse

synallagmatique de vente.

Les promesses de vente s’inscrivent dans le délai qui segmente les

négociations informelles et la conclusion du contrat définitif. Elles sont

fréquemment intégrées dans la catégorie des « avant-contrats », c’est-à-dire des

accords et des actes préparatoires au contrat définitif. Néanmoins, si elles sont

conclues en prévision du contrat définitif dont les éléments essentiels sont définis,

elles constituent elles-mêmes des contrats pourvus d’effets obligatoires en raison de

l’irrévocabilité de l’engagement émis.

Les promesses synallagmatique et unilatérale de vente sont très usitées en

pratique, et le choix entre l’une ou l’autre ne dépend que de l’actualité de la

rencontre des consentements des parties au contrat définitif lors de sa conclusion. La

promesse synallagmatique de vente est définie à l’article 1589 alinéa 1 du code civil

par référence au contrat de vente définitif : « La promesse de vente vaut vente,

lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix. »

L’objet de ce contrat est effectivement la vente définitive dont la constatation ne

peut pas en pratique encore intervenir parce qu’elle dépend de conditions qui ne se

sont pas encore réalisées. La promesse unilatérale de vente n’est pas définie par le

code civil qui reconnait son existence essentiellement en son article 1589-2, par le

bais de la sanction qui lui est réservée « si elle n'est pas constatée par un acte

authentique ou par un acte sous seing privé enregistré dans le délai de dix jours à

Page 12: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 12 -

compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire. »16

La doctrine et la

jurisprudence ont suppléé au silence du législateur, et dressé le régime de la

promesse unilatérale de vente. La promesse unilatérale de vente n’a d’unilatéral que

l’engagement définitif du promettant et, même si la terminologie rend difficilement

compte du rapport contractuel existant, elle implique l’activité du bénéficiaire de

l’accepter17

. Elle peut être définie comme le contrat par lequel le promettant

s’engage envers le bénéficiaire, qui l’accepte, à conclure le contrat définitif si celui-

ci en manifeste la volonté dans un certain délai. Le bénéficiaire de la promesse est

alors titulaire d’un droit d’option, puisqu’il peut accepter ou refuser de conclure

l’acte définitif. La levée de l’option a pour effet de former la vente, ou du moins la

promesse synallagmatique de vente lorsque les conditions nécessaires à la perfection

de la vente ne sont pas encore remplies.

Le droit d’option conféré au bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente

est « un droit potestatif par excellence ».18

Figure et modèle des droits potestatifs

contenus dans le contrat, il servira de référence lorsqu’il s’agira d’analyser

concrètement les caractères théoriques du droit potestatif, par détermination du

contenu des éléments composant sa définition. Les développements qui lui seront

consacrés pourront être transposés aux autres droits potestatifs contenus dans les

contrats de promesse.

16

L’art. 1589-2 c. civ est la transposition dans le code civil des dispositions de l’ancien article 1840-

A du code général des impôts : « Est nulle et de nul effet toute promesse unilatérale de vente

afférente à un immeuble, à un droit immobilier, à un fonds de commerce, à un droit à un bail portant

sur tout ou partie d'un immeuble ou aux titres des sociétés visées aux articles 728 et 1655 ter du code

général des impôts, si elle n'est pas constatée par un acte authentique ou par un acte sous seing privé

enregistré dans le délai de dix jours à compter de la date de son acceptation par le bénéficiaire. Il en

est de même de toute cession portant sur lesdites promesses qui n'a pas fait l'objet d'un acte

authentique ou d'un acte sous seing privé enregistré dans les dix jours de sa date. » Le code civil

évoque également l’existence de la promesse unilatérale de vente en son article 1675 alinéa 2, lequel

dispose qu’ « en cas de promesse de vente unilatérale, la lésion s’apprécie au jour de la réalisation. » 17

L’acceptation de la promesse unilatérale de vente est distincte du droit de lever l’option. Comme le

souligne I. NAJJAR, « l’acceptation est un fait juridique qui complète l’offre, pour former un

contrat ; l’option est un acte juridique unilatéral qui forme le contrat final en vue. L’acceptation lie

définitivement le bénéficiaire de l’offre (verser un prix de l’option à venir ; etc.) ; le droit d’option,

quant à lui, reste le gage de la liberté de choix, tant que l’option n’est pas levée. » La levée de

l’option suppose préalablement l’acceptation de la promesse unilatérale de vente. I. NAJJAR, Les

contrats d’option, Proche-Orient études juridiques 1988-1990, Revue de la Faculté de droit et de

sciences politiques Université de Saint-Joseph, Beyrouth, n° 22. 18

I. NAJJAR, avant-propos à la thèse de S. VALORY, la potestativité dans les relations

contractuelles, op. cit., p. 9.

Page 13: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 13 -

Quelle que soit l’opération juridique que le droit potestatif met en œuvre

(droit d’option, droit de substitution, droit de rétractation…), il suppose - ou exige -

l’existence d’un rapport de pouvoir entre son titulaire, appelé potentior, et la

personne dont la situation juridique sera modifiée postérieurement à son exercice. Le

pouvoir conféré au titulaire du droit potestatif n’est pas un pouvoir contre cette

personne, mais un pouvoir sur la situation juridique qui intéresse cette dernière. La

nature du pouvoir du titulaire du droit potestatif, fondé sur l’existence d’un lien de

sujétion l’unissant à la personne dont la situation juridique sera modifiée, doit être

sondée pour pouvoir en analyser les effets. Après avoir étudié la nature du pouvoir

particulier conféré au potentior (première partie), nous analyserons les caractères et

les effets de son exercice (seconde partie).

Première partie : Un pouvoir particulier dans le contrat

Seconde partie : Caractères et effets de la manifestation unilatérale de volonté

Page 14: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 14 -

PREMIERE PARTIE :

UN POUVOIR PARTICULIER DANS LE CONTRAT

L’impact du droit potestatif dans les promesses de vente, pour être démontré,

nécessite en premier lieu de mettre en évidence les critères de ce droit particulier, à

la frontière des droits réels et personnels composant le droit subjectif. Quelle est la

nature du pouvoir potestatif, par quelle activité propre unilatérale s’exerce-t-il ?

Le terme de potestativité doit encore être éclairci eu égard à la connotation

péjorative qu’il véhicule. En effet, il éveille dans l’esprit du praticien la suspicion :

parce qu’il renvoie à la notion de condition purement potestative, il signifie

l’arbitraire laissé à une partie, et procure le vertige de l’anéantissement du contrat.

Au sens de l’article 1174 du code civil, la notion d’arbitraire a pour objet de justifier

la nullité d’un contrat jugé déséquilibré parce que laissé en fait au pouvoir d’une des

parties. Comment un droit qualifié de potestatif peut-il s’insérer dans le contrat sans

être contraire à l’idée de la solidarité qui en résulte ?

En réalité le droit potestatif est tout autre que l’instauration d’un droit

arbitraire à l’intérieur du contrat. Le lien de sujétion qui caractérise le droit potestatif

ne définit pas une relation de domination d’une des parties au contrat, mais a pour

objet d’isoler le droit potestatif des autres droits subjectifs en en révélant le caractère

Page 15: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 15 -

purement unilatéral (section I). Il confère à son titulaire la capacité de contraindre,

mais n’en demeure pas moins un pouvoir conditionné puisqu’il doit être exercé

conformément à des règles rationnelles qui maintiennent l’ordre dans le contrat

(section II).

SECTION I : Le caractère unilatéral du droit potestatif

Le droit potestatif d’origine conventionnelle est un pouvoir volontairement

concédé à son titulaire. La situation des sujets destinataire et titulaire de ce droit doit

être considérée au regard du lien de sujétion qui les unit (I). Relevons d’emblée que

le recours à la notion de « sujet » implique traditionnellement l’existence d’une

relation d’allégeance volontaire à une personne détenant un pouvoir ou une autorité

légitime19

. Les juges ne se montrent pas favorables à la reconnaissance de

l’existence d’une relation de soumission lorsqu’elle pèse sur le consentement du

promettant à un contrat de promesse unilatérale de vente. L’étude de la conception

jurisprudentielle de l’obligation du promettant, et des commentaires doctrinaux

qu’elle a suscités, permet d’expliciter le contenu de la notion d’assujettissement, les

conséquences juridiques qui en découlent, et son utilité pratique (II).

I- La génération d’un lien de sujétion utile au contrat

Définir une relation par l’utilisation d’un substantif, « la sujétion », ne rend

compte que par abstraction des rôles respectifs des sujets actif et passif de la

relation. L’analyse de la position de chacune des parties au lien de sujétion est

nécessaire pour rendre compte du pouvoir particulier conféré au potentior. Il

convient également d’analyser l’incidence de la stipulation contractuelle d’un prix

du droit potestatif sur la force du lien de sujétion qui les unit (A). En matière

conventionnelle, il faut rechercher les fondements de l'admission du lien

d'assujettissement et en analyser les effets (B).

19

V. L. ALTHUSSER, pour lequel l’étude de la relation de pouvoir engendre la notion de sujet,

l’assujettissement emporte avec lui la fonction-sujet. « L’individu interpellé se retourne. Par cette

simple conversion physique de 180 degrés, il devient sujet ». L. ALTHUSSER, Idéologie et appareils

idéologiques d’Etat, in Positions, Editions sociales, 1976.

Page 16: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 16 -

A - La situation des parties au lien de sujétion

Monsieur HAGE-CHAHINE définit le lien de sujétion comme « le lien en

vertu duquel une personne est tenue de subir l’empiétement d’une autre personne sur

sa sphère juridique sans qu’on lui assigne la moindre tâche à accomplir. »20

1- Le rôle du destinataire du droit potestatif, sujet passif du lien de

sujétion

La définition donnée du lien de sujétion exprime la fatalité qui pèse sur le

destinataire du droit potestatif, il n’est pas débiteur d’une prestation, conformément

à la définition traditionnelle du droit subjectif, mais est juste « tenu de subir »

l’action du titulaire du droit sur sa propre sphère juridique.

Le lien de sujétion est inhérent au droit potestatif, il se crée en même temps

que naît le droit potestatif. Dès la naissance du droit potestatif et jusqu’à son

exercice effectif par son titulaire, le sujet passif du lien de sujétion est en attente

d’une possible modification de sa sphère juridique21

par le titulaire du droit

potestatif. L’attitude d’attente ne nécessite aucune action particulière du sujet passif.

« Il n’est pas obligé de donner, de faire ou de ne pas faire mais de laisser faire »22

.

En réalité, le laisser-faire du sujet passif ne constitue pas une obligation au sens

juridique du terme, une obligatio, c’est à dire une dette qui correspondrait à une

action.

Dans le rapport d’obligations, le débiteur est tenu d’exécuter ce à quoi il s’est

obligé, c’est à dire d’agir positivement en vue de satisfaire son engagement, qui peut

être de donner23

, de faire24

ou de ne pas faire25

. Par exemple, dans le contrat de

20

F. HAGE-HACHINE, Essai d’une nouvelle classification des droits privés, RTD. civ. 1982, p.705,

n°48. 21

V. infra, les développements consacrés à la modification de la situation juridique, p. 107 et suiv. 22

F. HAGE-HACHINE, op.cit. 23

Art. 1136 à 1141 c. civ. 24

Art. 1142 à 1144 c. civ.

Page 17: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 17 -

vente, le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir

la chose vendue.26

L’objet fondamental de l’obligation de livrer la chose, moyennant

le paiement du prix, fait naître corrélativement l’obligation de ne rien faire pour

nuire à son exécution. Le débiteur de l’obligation doit alors s’abstenir délibérément

de tout fait qui rendrait impossible l’exécution de son obligation. Cette obligation de

ne pas faire est le prolongement de l’obligation principale, et plus généralement de

l’ensemble du contenu du contrat. Monsieur NAJJAR indique que ce type

d’obligations engendre « une véritable action, une diligence nécessaire au maintien

d’un ‘état passif de tolérance’».27

Cette action sans mouvement, constituant le

pendant d’un droit de créance, est incompatible avec la notion de sujétion qui sous-

tend le droit potestatif, et qui confère à son titulaire un droit plus absolu que celui

détenu par le créancier d’une obligation de ne pas faire.

La notion de sujétion suppose en effet une limitation de la liberté du sujet

passif plus importante et plus contraignante que les restrictions à la liberté imposées

dans un rapport d’obligations. Le sujet passif n’est pas contraint d’adopter un certain

comportement en vue de permettre l’exercice du droit potestatif, il ne s’oblige pas à

la passivité, il est passif en raison du pouvoir absolu du titulaire du droit potestatif

d’exercer son droit. Il doit uniquement obéir, c’est-à-dire se soumettre à la volonté

du titulaire du droit potestatif. Il subit parce qu’il ne peut pas en être autrement.28

La sujétion constitue en réalité le versant passif du droit de volonté détenu par le

titulaire du droit potestatif.

2- Le rôle du titulaire du droit potestatif, sujet actif du lien de sujétion

25

Art. 1142, 1143 et 1145 c. civ. 26

Article 1603 c. civ. 27

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°101. Les termes « état passif de tolérance » sont mis entre guillemets par l'auteur. 28

La situation du sujet passif est qualifiée par certains auteurs de « situation de responsabilité », en ce

sens que « la personne juridiquement responsable est celle qui ne peut pas empêcher l’action du sujet

actif à son encontre ; celle qui est tenue de subir la domination ou la contrainte de la part de celui-

ci. » F.K. COMPARATO, Essai d’analyse dualiste de l’obligation, thèse, Paris, Dalloz, 1964,

préface A. TUNC, cité par S. PRIGENT dans son article Le dualisme dans l’obligation, RTD. civ.

2008, p.401, n°10. Le terme « responsabilité » (« haftung » en droit allemand) renvoie à la notion

d’ « engagement », qui s’oppose à celle de « devoir » contenue dans la notion d’obligation.

Page 18: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 18 -

Le titulaire du droit potestatif est titulaire d’un droit de volonté visant la

sphère juridique de l’assujetti.

Il a la liberté de laisser entrer ce droit de volonté dans son patrimoine en

régularisant le contrat, ou d'en refuser le bénéfice, puis de l'exercer ou non, le tout

expressément ou non. Tant qu'il n'a pas exercé le droit qui lui est conféré, le sujet

actif a le pouvoir d'exiger le maintien de l'assujettissement du sujet passif. Lorsqu'il

décide d'exercer son droit, il a le pouvoir de pénétrer dans la sphère juridique de

l'assujetti sans que ce dernier ne puisse faire le moindre acte d'opposition.

En matière contractuelle, le titulaire du droit potestatif exerce une puissance

spécifique sur le contrat, puisqu'il peut faire, défaire, ou modifier le contrat par suite

de l'exercice de son droit et dans les limites de ce dernier. Cette toute puissance à

modifier une situation juridique pourrait être assimilée à la détention d'un pouvoir

arbitraire, mais il convient de rappeler que la notion d'arbitraire comprend celle

d'abus illégitime dans l'exercice d'un pouvoir, et la sanction de cet abus.

3- L’incidence du caractère onéreux du droit potestatif sur le lien de

sujétion

L’assujettissement du sujet passif peut avoir lieu moyennant le paiement

d’un prix. C’est notamment le cas du droit d’option conféré au bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente moyennant le versement d’une indemnité

d’immobilisation,29

et du droit de dédit conférant à son titulaire le pouvoir de

résoudre unilatéralement un contrat valablement formé.

3.1- Le prix du droit potestatif

Le droit de dédit est un droit potestatif d’option, par lequel son titulaire a le

choix entre poursuivre le contrat et l’anéantir au moyen d’une activité qui lui est

propre. Il est généralement défini « comme une convention synallagmatique

accessoire au contrat de vente dont les engagements réciproques sont, d'un côté, la

29

Le mécanisme du droit d’option sera développé dans la seconde partie de cette section.

Page 19: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 19 -

sujétion de l'une des parties à l'égard de l'autre autorisant la résolution de la

convention principale et, de l'autre côté, l'obligation pour le partenaire de verser une

certaine somme d'argent s'il fait usage de son droit potestatif. »30

Le prix du dédit ne

représente pas le montant d’une indemnité ou d’une pénalité31

dont devrait

s’acquitter le titulaire du droit, mais le prix de l’exercice du droit qui lui est conféré

par le contrat. Si le droit de dédit est généralement consenti à titre onéreux, rien ne

s’oppose à ce qu’il soit gratuit. Dans un arrêt du 30 octobre 2000, la Cour de

cassation32

a ainsi rappelé que « rien n'interdit qu'une partie s'engage envers une

autre avec une faculté de dédit gratuite ». De ce fait, on perçoit bien immédiatement

la différence entre le dédit et l’indemnité d’immobilisation : l’un est le pouvoir de

résoudre le contrat formé33

(moyennant, ou non, la modalité accessoire de payer un

prix), l’autre est le prix à payer pour bénéficier (pendant un certain délai) d’un droit

d’option formateur du contrat définitif.

Comme le dédit, l’indemnité d’immobilisation est présentée par la doctrine34

non pas comme une indemnité devant compenser le préjudice subi du fait de

l’immobilisation, ou comme la sanction de l’inexécution de l’obligation d’acheter

qui pèserait sur l’acquéreur, mais comme le prix de l’option. La Cour de cassation

valide cette analyse en affirmant que l’indemnité d’immobilisation « constitue le

prix de l’exclusivité consentie au bénéficiaire de la promesse », acquise au

promettant en cas de refus du bénéficiaire de lever l’option35

.

La stipulation d’un prix - qu’il s’agisse du prix du dédit ou du prix de

l’option - ne modifie pas structurellement le lien de sujétion unissant le sujet actif et

le sujet passif du droit potestatif, mais en représente essentiellement le coût. Certes,

en achetant le droit potestatif, le potentior devient débiteur d’une obligation

30

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op. cit., n° 255. 31

Ce n’est pas une clause pénale destinée à sanctionner l’inexécution d’une obligation, et dont le

montant serait révisable par le juge (article 1152-2 c.civ.). 32

Cass. com., 30 octobre 2000, D. 2001, p. 3241, obs. D. MAZEAUD. 33

Parce que le bénéficiaire d’une clause de dédit a déjà donné son consentement à la vente, une telle

stipulation ne peut pas figurer dans un contrat de promesse unilatérale de vente, du moins en faveur

du bénéficiaire. 34

I. NAJJAR, Les contrats d’option, op.cit, n°53 et suiv. ; S. VALORY, ibid., n°368 et suiv. ; D.

MAZEAUD, La révision de l’indemnité d’immobilisation, JCP N. 1992. I, p.113. 35

Cass. civ. 1ère

, 5 décembre 1993, Rép. Defrénois. 1996, 36354, obs. D. MAZEAUD.

Page 20: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 20 -

pécuniaire, mais ce prix ne corrompt pas la force du droit de volonté auquel le sujet

passif ne peut rien opposer.

3.2- L’impact d’un coût financier exorbitant

En s’engageant à verser une somme d’argent considérable, le potentior

demeure t-il complètement libre d’exercer le droit potestatif qui lui est conféré par la

convention ? Si le prix du droit potestatif est une modalité destinée à compenser

l’assujettissement du sujet passif et les conséquences qui en découlent, son caractère

exorbitant peut être une entrave à la liberté du potentior. Par exemple, le versement

d’une indemnité d’immobilisation excessive pourrait laisser supposer qu’il a déjà

adhéré au contrat définitif, ou qu’il est économiquement contraint de l’accepter. En

ce sens, le droit potestatif qui lui est conféré serait une fiction. La jurisprudence a

longtemps considéré que lorsque l’indemnité d’immobilisation représente un

montant trop élevé en considération du prix de vente et du délai d’option, elle

contraint le bénéficiaire à acquérir, si bien que la promesse unilatérale de vente

s’analyse en réalité en une promesse synallagmatique de vendre et d’acquérir36

.

Suite à la requalification du contrat opérée par le juge, le droit d’option se mue en

droit de dédit. De nombreux auteurs ont critiqué la requalification jurisprudentielle

du contrat, ceux-ci faisant valoir essentiellement qu’un critère strictement quantitatif

ne peut raisonnablement fonder la qualification juridique de la convention, qui ne

devrait dépendre que de l’intention des parties au jour de la régularisation de la

promesse vente37

.

Il semble que la Cour de cassation ait été sensible à cet argument, puisque

dans un arrêt du 1er

décembre 201038

, la première chambre civile de la Cour de

cassation refuse de requalifier une promesse unilatérale de vente en promesse

36

V. O. BARRET, Promesse de vente, Rép. civ. Dalloz, n°19. L’auteur cite notamment les décisions

suivantes : CA. CAEN 16 février 1970, D. 1970, p. 399, et CA. PARIS, 22 octobre 1990, D .1993,

p.234, note G. PAISANT. Dans le premier arrêt, la Cour d’appel a requalifié la promesse unilatérale

en présence d’une indemnité d’immobilisation fixée à 20% du prix en principal. Dans le second, la

Cour d’appel opère également une requalification de la promesse de vente, alors que l’indemnité

fixée représente 10 % du prix. Dans cette espèce, pour décider du montant excessif de l’indemnité

d’immobilisation, les juges ont tenu compte de la durée du délai d'option, plus bref qu'à l'ordinaire

(cinq semaines). 37

I. NAJJAR, note D. 1983, p.58 ; I. NAJJAR, Les contrats d’option, op. cit, n°52 et suiv. 38

Cass. civ. 1ère, 1er décembre 2010, RTD. civ. 2011, p. 346, obs. B. FAGES ; Rép. Defrénois.

2011. art. 39190, note V. ZALEWSKI.

Page 21: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 21 -

synallagmatique en présence d’une indemnité d’immobilisation dont le montant est

excessif. Elle affirme de façon générale que quel que soit le montant du dépôt de

garantie, et même s'il est presqu’égal au prix de vente, celui-ci ne peut préjudicier à

la qualification de la promesse unilatérale de vente39

. Cette solution, approuvée en

doctrine, privilégie la qualification que les parties ont entendu donner à leurs

accords, et participe ainsi à la sécurité juridique. Même si le montant de l’indemnité

d’immobilisation versé est exorbitant, le bénéficiaire d’une promesse unilatérale

demeure libre de ne pas acheter le bien promis à la vente40

.

Toutefois, afin d’éviter toute requalification inopportune du contrat, et de

réduire le droit d’option du bénéficiaire à un leurre, il appartient au rédacteur de la

promesse unilatérale de vente de conseiller aux parties d’évaluer l’indemnité

d’immobilisation à raison de données objectives qui peuvent être le prix de vente, la

nature du bien, le délai d’option, les divers droits conférés au bénéficiaire aux termes

de l’acte. Monsieur NAJJAR propose également de valoriser l’indemnité

d’immobilisation en tenant compte de « la valeur du profit escompté » par

l’acquisition et « du degré d’incertitude » de sa réalisation. Il propose en outre d’en

moduler le montant en retenant le délai effectif utilisé par le bénéficiaire pour

exercer l’option41

. L’indemnité d’immobilisation peut être fixée pour un montant

déterminé et indexé prorata temporis, si bien que le montant qui sera effectivement

à payer par le bénéficiaire en cas de refus d’acquérir est proportionnel à la durée

réelle de l’indisponibilité du bien et de la sujétion du passif.

Quoi qu’il en soit, le prix ne demeure qu’une modalité accessoire du droit

potestatif. Le pouvoir de volonté du potentior est libre, sans entrave possible, et

39

Cass. civ. 1ère, 1er décembre 2010 : « Attendu qu'ayant retenu, d'une part, qu'aux termes de l'acte

du 6 mai 1958 une seule partie, les vendeurs, s'était engagée de manière ferme et définitive, envers le

candidat acquéreur, qui prenait acte de l'engagement mais qui de son côté ne s'engageait pas, à

conclure le contrat définitif, disposant d'une option lui permettant dans l'avenir de donner ou non son

consentement à la vente et que le versement d'un dépôt de garantie d'un montant presqu'égal au prix

de la vente ne préjudiciait en rien à la qualification de cet acte (…)». 40

Comme le fait remarquer B. FAGES, « il peut, par exemple, choisir au dernier moment de ne pas

voir entrer dans son patrimoine un bien appelé à entraîner des dépenses très largement supérieures au

montant de l'indemnité perdue (filiale déficitaire, site pollué, immeuble vétuste, etc.) ; ou vouloir

discrètement gratifier le promettant du montant des sommes présentées comme le prix de

l'immobilisation. », RTD. civ. 2011, ibid. 41

I. NAJJAR, Les contrats d’option, op. cit, n° 52 et suiv.

Page 22: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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unilatéral. Il ne doit pas pour autant être confondu avec le pouvoir d'une volonté

arbitraire, et ce à raison même du fondement de l'assujettissement en matière

conventionnelle.

B - Fondements et effets de l'assujettissement conventionnel

1- La légitimation du pouvoir, fondement de l’assujettissement

conventionnel

1.1- La distinction des origines de l’assujettissement

L’origine du droit potestatif, en droit des contrats, explique la possibilité

d’un lien de sujétion dans une matière où l’égalité entre parties est le principe.

Lorsque l’assujettissement est d’origine légale, sa seule justification est dans

la loi de l’Etat, supérieure aux intérêts privés. L’assujettissement résulte d’une

situation juridique créée, et en pratique le sujet passif s’assujettit en même temps

que le sujet actif décide d’appliquer le droit qui sommeille dans son patrimoine. Le

droit d’acquérir la mitoyenneté d’un mur, communément cité par la doctrine quand il

s’agit de recenser les droits potestatifs d’origine légale, illustre notre propos :

l’article 661 du code civil pose en principe absolu « la faculté » pour un propriétaire

d’acquérir la mitoyenneté du mur joignant sa propriété, à la seule condition d’en

payer le prix. 42

Le droit potestatif est le droit pour le propriétaire d’un immeuble

d’obtenir, par simple manifestation de sa volonté, la mitoyenneté du mur séparant sa

propriété de celle du voisin.43

Ce pouvoir est une émanation du droit réel de

propriété qu’il détient sur l’immeuble, il a intégré son patrimoine dès l’acquisition

de l’immeuble. Avant que le propriétaire ne manifeste sa volonté d’exercer son droit

à la mitoyenneté, et d’être par voie de conséquence copropriétaire du mur et du sol

42

Pour une définition de la mitoyenneté, sa nature juridique et son domaine, cf. J. HUGOT, J.-CL.

Formulaire notarial, mitoyenneté, fascicule 10 et suiv. 43

V. J. HUGOT, ibid. Le droit pour le propriétaire du fonds voisin d’en réclamer la mitoyenneté

consiste selon l’auteur en une servitude légale à son profit. Néanmoins, il remarque que le droit de

réclamer la mitoyenneté n’est pas soumis à la prescription trentenaire des servitudes pour leur non-

usage, et que la mitoyenneté plutôt que d’être une servitude est « un droit de propriété dont deux

personnes jouissent en commun ».

Page 23: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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sur lequel il est bâti, le voisin n’est pas réellement assujetti puisqu’il ne se passe

rien, c’est un temps vide pendant lequel il n’est soumis à aucune attente et jouit en

exclusivité du droit de propriété du mur. Lorsque le propriétaire décide d’exercer

son pouvoir et de faire valoir sa qualité de copropriétaire, le voisin ne peut pas

s’opposer à la cession de la mitoyenneté, c’est à cet instant qu’il est tenu de subir le

« démantèlement forcé de sa propriété »44

. La cession de la mitoyenneté s’opère en

principe immédiatement par l’effet de la demande d’acquisition et à sa date, ou en

l’absence de demande, par l’empiètement effectif du sujet actif sur le droit de

propriété de son voisin.

Dans le cadre conventionnel, le droit potestatif d'origine légale découle en

principe du contrat dans lequel il est contenu : la conclusion du contrat emporte de

facto la naissance de droits potestatifs. C'est le cas du droit de rétractation d'origine

légale dans les contrats de vente, du droit de préemption… Ils sont édictés par le

législateur dans un but d'équité qui nécessite de protéger la partie considérée comme

la plus faible au contrat, ou dans un but plus général d'utilité publique.

Lorsque l’assujettissement est d’origine conventionnelle, c’est le

consentement du sujet passif à s’assujettir qui justifie le caractère régulier de son

assujettissement. L’assujettissement n’est pas, en effet, à comprendre comme une

contrainte extérieure, ni comme une obéissance non choisie. L’assujettissement

conventionnel est le résultat d’un consentement libre de la part de l’assujetti. Le

sujet passif subit son sort comme s’il s’agissait d’une fatalité inéluctable parce qu’il

a été préalablement libre de le décider. Son assujettissement est donc le résultat de sa

propre volonté, la manifestation de sa propre capacité à assumer sa liberté

contractuelle. Le pouvoir du sujet actif est ainsi légitimé de par son existence, en

tant qu'il relève de la volonté de l'assujetti d’y consentir.

Le terme d’assujettissement relate bien la position de l’assujetti entre la

naissance du droit potestatif et son éventuel exercice par son titulaire. Néanmoins, il

ne rend pas compte du point de départ de l’assujettissement en matière contractuelle.

44

Ibid. Pour J. HUGOT, l’obligation pour celui qui a construit le mur de clôture d’avoir à en céder la

mitoyenneté à son voisin, sur simple réquisition de celui-ci, constitue « une sorte d’expropriation et

un démantèlement forcé de sa propriété.» V. en ce sens Cass. civ. 1ère

, 3 juillet 1958, D. 1958, p.618.

Page 24: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 24 -

C’est pourquoi il serait en réalité préférable, dans le cadre conventionnel, de parler

plutôt d’« assujettissement volontaire », ou de « servitude volontaire » pour

reprendre l’oxymore adopté par La Boétie dans son célèbre Discours sur la

légitimité de l’autorité45

. Ces expressions traduisent sans équivoque le fait que

l’assujettissement résulte d’un consentement intérieur de l’assujetti. Compris

comme résultant d’un acte de volonté, comme si finalement il exprimait le premier

engagement d’une volonté ferme, l’assujettissement s’insère parfaitement dans le

domaine contractuel, et se justifie par la théorie de l’autonomie de la volonté46

.

1.2- La justification de l’insertion du lien de sujétion dans le contrat

Les auteurs de la deuxième commission du 100ème

Congrès des notaires de

France47

présentent la théorie de l'autonomie de la volonté comme le fondement de

la liberté contractuelle, et précisent que cette liberté est triple :

« - En premier lieu, l'individu est libre de contracter ou non ; il n'y a pas d'obligation

juridique de contracter. Nul contrat ne saurait se former sans que l'ensemble des

parties contractantes l'aient voulu ou contre leur gré. Le refus de contracter n'est

qu'une manifestation de la liberté.

- L'individu est également libre de choisir la personne de son cocontractant.

- Enfin, l'individu est libre de déterminer le contenu du contrat. Les contractants

définissent eux-mêmes ce à quoi ils s'obligent. Les lois, particulièrement celles qui

réglementent les contrats nommés, doivent demeurer supplétives ou interprétatives

de volonté ; le législateur doit laisser la plus entière liberté aux parties contractantes.

Les règles impératives constituent le seul obstacle à la liberté contractuelle. Ainsi

doivent-elles demeurer exceptionnelles ; le législateur peut édicter des règles

impératives seulement dans le but de préserver une liberté autre que la liberté

contractuelle. »

45

Le Discours de la servitude volontaire a été rédigé par Etienne de La Boétie en 1549, mais ce sont

les protestants qui, face aux persécutions qu’ils subissaient, ont décidé de le publier pour la première

fois en 1574, sous le nom de « Contr’un ». Pour une édition récente de l’œuvre, et la translation en

français moderne du texte, c.f. par exemple les Editions Gallimard, 2008. 46

E. GOUNOT, Le principe de l'autonomie de la volonté en droit privé français, contribution à

l'étude critique de l'individualisme, thèse, Dijon, 1912. 47

100ème

Congrès des notaires de France, Les défis d'un nouveau siècle, Paris 16-19 mai 2004, v. les

travaux de la deuxième commission dont le thème des travaux est « Le nouveau monde contractuel »,

page 173 et suiv.

Page 25: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 25 -

En conséquence, la liberté contractuelle posée à l'article 1134 alinéa 1er du

code civil48

autorise l'insertion dans le contrat de relations de sujétion si celles-ci ont

fait l'objet d'un consentement libre et éclairé et sous réserve du respect de l'ordre

public49

.

Le droit potestatif s'insère alors dans le contrat, il est généré par l'échange des

consentements des parties au contrat. Cette affirmation pourrait paraître contestable

au regard de la définition du contrat posée à l'article 1101 du code civil, selon lequel

« le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s'obligent,

envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou ne pas faire quelque chose ». Si

le droit potestatif est dans le contrat, il s'inscrit dans un rapport d'obligations. Or,

nous indiquions précédemment que le doit potestatif n'est pas réductible au rapport

d’obligations en raison de l'existence et de la force du lien de sujétion, le sujet passif

au droit potestatif n'étant pas tenu - comme le débiteur d'une obligation envers son

créancier - à un devoir au profit du titulaire de ce droit, dont l'objet serait de donner,

de faire ou de ne pas faire quelque chose. Monsieur VALORY indique que « prendre

à la lettre le texte légal pour dénier toute origine contractuelle au droit potestatif

serait abusif »50

d'abord parce que les rédacteurs du code civil ne pouvaient

envisager conceptuellement le rapport contractuel autrement que sous la forme d'un

rapport d'obligations, et ensuite parce que la définition du contrat est actuellement

plus large que celle contenue dans le code civil. Monsieur VALORY se réfère alors

à la définition donnée par Monsieur GHESTIN pour qui « le contrat est un accord de

volontés, qui sont exprimées en vue de produire des effets de droit et auxquels le

droit objectif fait produire de tels effets »51

. En ce sens, le droit potestatif s'insère

naturellement dans le contrat, puisqu'il relève d'un accord des parties, libres d'y

consentir et de l'accepter, et qu'il a pour fonction de produire des effets de droit par

la modification de la situation juridique préexistante. Entre la liberté contractuelle et

48 Art 1134 al 1 c. civ : « Les conventions légalement, loyalement et équitablement formées tiennent

lieu de loi à ceux qui les ont faites. » 49

V. C. JAMIN, Une brève histoire politique des interprétations de l'article 1134 du Code civil, D.

2002. p.901 et s. 50

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n° 232. 51

J. GHESTIN, La notion de contrat, D. 1990, p.147.

Page 26: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 26 -

le droit potestatif il y a donc bien autre chose qu'un rapport d'exclusion, il existe un

jeu complexe qui repose sur une conception volontariste du contrat.

2- Les effets du lien de sujétion sur la nature du droit potestatif

Les développements précédents ont montré que le titulaire du droit potestatif

a toute puissance quant à l'usage de son droit, parce que l'assujetti - qui a consenti à

l'instauration de ce droit - ne peut que subir son exercice. Aussi l'assujetti ne peut se

retourner contre le pouvoir du potentior et lui résister, le faire reculer ou céder lors

de l'exercice de son droit. Conséquence du lien de sujétion, le droit potestatif est

inviolable. C'est en ce sens que Monsieur NAJJAR affirme que « dans le droit

potestatif toute violation du droit ou toute inexécution sont purement et simplement

inconcevables. En effet, l'exercice du droit potestatif ne dépend que de la volonté de

son titulaire et son efficacité est indépendante de la volonté de celui qui doit le

subir. »52

Ce constat retient l'attention car il est distinct de celui retenu en présence

de droits qualifiés de subjectifs.

Le droit subjectif est un concept admis du droit positif, même si son contenu

a été source d’affrontements doctrinaux53

. La doctrine actuelle le définit comme

« une restriction légitime à la liberté d'autrui établie par la norme objective en

faveur du sujet qui bénéficie ainsi d'un domaine réservé pour exercer ses

pouvoirs »54

. Le droit subjectif est celui qui confère à son titulaire des prérogatives

dont seul ce dernier peut se prévaloir, soit sur une chose (droits réels), soit sur une

personne déterminée (droits personnels ou de créance). Il est défini comme un acte

de volonté, « du consentement de tous », et conformément au droit objectif55

. En

effet, le titulaire du droit subjectif dispose du droit d’obtenir d’un tiers une prestation

déterminée (dare, facere, non facere), et ce conformément aux règles juridiques

découlant du droit objectif, c’est à dire de l’ensemble des règles obligatoires, par

52

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit, n° 99 bis. Les termes sont soulignés par l'auteur. 53

Pour une analyse exhaustive des différentes théories des droits subjectifs, V. par exemple Conflits

entre droits subjectifs, libertés civiles et intérêts légitimes: un modèle de résolution basé sur

l'opposabilité et la responsabilité civile, par T. LEONARD, thèse, éd. LARCIER, 2005. 54

S. GHESTIN, J. GOUBEAUX, avec le concours de M. FABRE-MAGNAN, Traité de droit civil

Introduction générale, Paris, L.G.D.J. 1994, n°172. 55

Cette définition du droit subjectif fait écho à la théorie volontariste développée par K. VON

SAVIGNY, dans son Traité de droit romain, tome 1, traduction française Ch. GUENOUX, Paris

Firmin Didot Frères, 1840.

Page 27: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 27 -

nature générales et abstraites. Le droit d’obtenir est même celui d’exiger : le tiers ne

peut en principe pas s’opposer à l’exigence du titulaire du droit subjectif, ce dernier

étant libre de vouloir, ou de ne pas vouloir exercer son droit56

. Le droit subjectif

incorpore en effet la notion de liberté dans son exercice, puisque le titulaire du droit

a la possibilité de choisir d’user ou de ne pas user du droit qui lui est reconnu par le

droit objectif. Conséquence de l'opposabilité du droit subjectif57

, son titulaire peut,

s’il s’avère nécessaire, recourir au juge afin de sanctionner le non-respect de son

droit par le tiers.58

Les droits classiques « réels » et « de créance » sont en effet protégés contre

les atteintes d'autrui, et leurs titulaires sont investis du pouvoir d'en exiger le respect.

Ce pouvoir d'exiger, dégagé progressivement par la doctrine59

, comporte

intrinsèquement celui de poursuivre en justice le tiers qui rend impossible

l'exécution du droit subjectif60

. Le pouvoir d'agir en justice présente un caractère

objectif, il vise à protéger l'exercice du droit subjectif en conférant à son titulaire « le

droit de contraindre le débiteur au paiement »61

lorsque celui-ci est devenu exigible,

et à sanctionner les atteintes qui seraient portées à son « intérêt propre ». Le pouvoir

d'exiger la réalisation d'un droit subjectif s'exerce à l'encontre du débiteur dans un

56

G MICHAELIDES-NOUAROS, L’évolution récente de la notion de droit subjectif, RTD. civ.

1966, p.216 : « le droit subjectif, en dernière analyse, n’est qu’un « rapport juridique » entre deux

personnes, en vertu duquel l’une d’elles (le titulaire du droit) peut exiger de l’autre le respect de ses

obligations reconnues par la loi. » 57

L'affirmation de l'opposabilité des droits subjectifs a fait l'objet de nombreuses controverses

doctrinales, notamment en ce qui concerne la catégorie des droits de créance. Pour le rappel de ces

controverses, V. T. LEONARD, ibid., p.334 et suiv. Les critiques procèdent d'une assimilation entre

l'opposabilité du droit et l'exigibilité que confère son pouvoir à l'encontre du débiteur. 58

C'est par référence à la possibilité d'exiger le respect et l'accomplissement du droit que R.

BONNARD définit le droit subjectif : c'est, pour l'auteur, le « pouvoir d'exiger de quelqu'un, en vertu

d'une règle de droit objectif, une chose à laquelle on a intérêt, sous la sanction d'une action en justice ;

le contenu de la chose exigible étant fixé immédiatement soit par le droit objectif, soit par un acte

juridique individuel. Les droits publics subjectifs des administrés, Revue du droit public, 1932, p.702.

Citation extraite de la thèse de T. LEONARD, ibid., p.82. 59

V. la théorie de J. DABIN, Le droit subjectif, D. 1952, p.94, pour qui il n'existe pas de droit

subjectif sans la caractérisation de l'obligation du respect de ce droit : « le droit subjectif comporte

nécessairement la faculté d'exiger quelque chose de positif ou de négatif de la part d'une ou plusieurs

personnes. » Le pouvoir d'exiger est l'aspect externe de la définition du droit subjectif, présenté par

l'auteur comme « appartenance-maîtrise ». Il précède l'existence du concept d'exigibilité, en raison

même de l'appartenance-maîtrise de l'objet au sujet de droit. 60

Le législateur a consacré des modes non juridictionnels de solution des litiges afin d'éviter le

recours au juge, comme le contrat de transaction par lequel les parties terminent une contestation née,

ou préviennent une contestation à naître (c. civ., art. 2044), mais ces dispositifs ne privent pas le

titulaire du droit subjectif contesté d'entreprendre une action de nature juridictionnelle. 61

CA. Dijon, arrêt du 21 avril 1910, DP 1913, II, p.76.

Page 28: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 28 -

rapport d'obligations, et à l'encontre de chacun quand le droit porte directement sur

une chose. Le pouvoir d'exiger et l'action en justice se justifient par la possibilité

laissée au débiteur de se dérober à son obligation, et par là même de violer le droit

du créancier. Ainsi, le droit subjectif est conditionné par le droit objectif dans sa

reconnaissance puisqu’il est créé par lui, et dans son existence puisqu’il est protégé

par lui. Il ne peut exister sans le rapport à autrui à qui on l’oppose, ou à l’universalité

des sujets de droit lorsque le droit en cause s’applique à une chose.

Le raisonnement en présence d'un droit potestatif est différent.

Postérieurement à l'acte d'assujettissement, la satisfaction des intérêts du sujet actif

au droit potestatif ne passe pas par l'exécution d'une prestation particulière du sujet

passif. Entre l'acte d'assujettissement et l'éventuel exercice du droit potestatif par son

bénéficiaire, le sujet passif n'a pas à exécuter une action déterminée. Parce qu'il n'a

plus rien à accomplir, qu'aucune obligation ne pèse plus à sa charge62

, il n'a pas le

moyen de violer le droit potestatif. Les seules tentatives de résistance du sujet passif

pourraient se situer « hors du cadre juridique »63

pour empêcher le sujet actif de

manifester la volonté par laquelle il décide d'exercer son droit64

, ou rendre

impossibles les effets découlant de l'exercice du droit. Il pourrait, par exemple, et en

l'état de la jurisprudence, conférer à un tiers de bonne foi la propriété du bien

immobilier offert par préférence au bénéficiaire du droit. Il pourrait également

décider de ne pas réitérer l'acte en la forme authentique après la levée de l'option si

la réitération de l'acte a été érigée par les parties à l'avant-contrat en élément de

formation du contrat définitif, ou refuser d'exécuter les conditions mises à sa charge

aux termes de la convention… En tout état de cause, les moyens de s'opposer à la

reconnaissance de l’exercice du droit potestatif seraient constitutifs d'une faute de la

part de l'assujetti récalcitrant et provoqueraient la mise en jeu de sa responsabilité

civile. Et surtout, la défaillance du sujet passif n'atteindrait pas le droit potestatif en

soi, mais les conséquences découlant de son exercice, de sorte qu'elle ne peut pas

entraver la modification de sa sphère juridique.

62

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°22. 63

S. VALORY, la potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n°44. 64

I. NAJJAR, ibid., n°101.

Page 29: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 29 -

II - Le lien de sujétion ignoré par la jurisprudence

Le lien de sujétion en matière conventionnelle suppose chez l’assujetti

l’existence d’une volonté propre destinée à faire produire des effets au droit

potestatif qu’il consent, et la confiance légitime du potentior en l’existence d’une

telle volonté. La qualification du droit d’option dans les promesses unilatérales de

vente en droit potestatif devrait justifier que le promettant, assujetti, ne puisse pas

rétracter la promesse de vente avant l’écoulement du délai d’option, et que le

bénéficiaire puisse se prévaloir du maintien de l’engagement du promettant jusqu’à

l’extinction du délai d’option, et ce sans même avoir consenti à l’exercer.

Néanmoins, la jurisprudence offre à l’auteur d’une promesse unilatérale de vente le

droit d’anéantir son consentement à la vente. La Cour de cassation s’est d’abord

fondée sur l’existence d’une obligation de faire pesant sur le promettant, pour lui

reconnaître un droit à la rétractation dès lors que la levée de l’option n’a pas été

exercée (A). Par la suite, elle a abandonné cette qualification en optant pour la

solution de l’impossible rencontre des volontés (B). Ces appréciations de la position

contractuelle du promettant - et de la force de la promesse de vente - sont inexactes

si l’on retient que le consentement donné au contrat ne peut pas se reprendre.

Notons ici que la rétractation du promettant après la levée de l’option ne peut

pas être un obstacle à la reconnaissance du lien de sujétion, puisqu’elle intervient

alors que le droit potestatif a déjà été exercé. Elle n’a pas d’incidence sur le pouvoir

conféré au titulaire du droit potestatif, mais affecte la situation juridique qui a été

modifiée suite à l’exercice de ce droit. Elle ne fera donc pas l’objet de

développements particuliers. La possibilité d’une rétractation du promettant avant la

levée de l’option est, quant à elle, de nature à nier le pouvoir exclusif que détient le

bénéficiaire du droit d’option sur le sort de la promesse de vente.

Page 30: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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A - La qualification jurisprudentielle de l’obligation du promettant

1- Définition du droit d’option

Le droit d’option est l’élément central du contrat de promesse unilatérale de

vente. En concluant un tel contrat, le promettant s’engage envers le bénéficiaire, qui

l’accepte, à conclure le contrat de vente définitif si ce dernier en manifeste la

volonté. Le droit d’option conféré au bénéficiaire lui permet, dans un certain délai,

d’accepter ou de refuser de conclure le contrat de vente définitif.

La nature de ce droit d’option a fait l’objet de nombreuses appréciations

doctrinales, conçues d’abord comme des objections radicales à la jurisprudence de la

Cour de cassation conférant au promettant la possibilité de se rétracter. Depuis la

thèse de Monsieur NAJJAR, de nombreux auteurs s’accordent (au moins

allusivement) pour reconnaître théoriquement au droit d’option la qualification de

droit potestatif, notamment parce qu’il ne confère pas un pouvoir direct sur une

chose ou sur une personne, mais sur une situation juridique en mouvement65

. Le

droit d’option d’achat dans les promesses unilatérales de vente serait même devenu

le modèle du droit potestatif d’origine conventionnelle, tant l’ensemble des droits

potestatifs contenus dans les promesses emprunte la forme de l’option, et tant la

définition du droit général d’option présente des analogies avec celle du droit

potestatif. En effet, Monsieur NAJJAR définit le droit d’option comme « une

prérogative juridique qui permet à son titulaire de pouvoir, par un acte de volonté,

modifier une situation juridique incertaine, et cela suivant une alternative précise et

prévisible. » 66

65

V. notamment HAGE-CHANINE, Essai d'une nouvelle classification des droits privés, RTD. civ.

1982. 705 ; J. ROCHFELD, Les droits potestatifs accordés par le contrat, in Études offertes à J.

Ghestin, 2000, L.G.D.J., p. 752, no 7 ; D. MAZEAUD, Promesse unilatérale de vente : la Cour de

cassation a ses raisons…, D. 2011, p. 1457 ; F. BENAC-SCHMIDT, D. 1994, p.508. Cf. infra pour

l’analyse de la notion de situation juridique. 66

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit. n°45.

Page 31: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 31 -

2- L’obligation de faire dégagée par la jurisprudence

La jurisprudence considère que le droit d’option est un droit de créance et

analyse l’obligation du promettant en obligation de faire, du moins tant que le

bénéficiaire n’a pas opté. Dans un arrêt du 15 décembre 1993, réprouvé par la

doctrine quasi-unanime67

, la Cour de cassation a ainsi retenu sur le fondement de

l’article 1142 du code civil que « tant que les bénéficiaires n’avaient pas déclaré

acquérir, l’obligation de la promettante ne constituait qu’une obligation de faire et

que la levée d’option, postérieure à la rétractation de la promettante, excluait toute

rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir ». La rétractation du

promettant est analysée comme un manquement à son obligation et sanctionnée par

l’octroi de dommages-intérêts au profit de son cocontractant, l’article 1142 du code

civil n’autorisant pas l’exécution forcée de la vente68

. Cette solution a été réaffirmée

à maintes reprises depuis69

.

3- Les réfutations doctrinales à la qualification jurisprudentielle

3.1- Les critiques relatives à l’appréciation de la situation du promettant

Les auteurs ont critiqué la nature de l’obligation du promettant dégagée par la

jurisprudence. La notion d’obligation de faire n’est, en effet, pas de nature à

67

Arrêt dit « Cruz », Cass. civ. 3ème

, 15 décembre 1993, D. 1994, p. 507, obs. F. BENAC-

SCHMIDT ; D. 1994, p. 23, obs. O. TOURNAFOND ; Rép. Defrénois, 1994, art.35845, p.795, obs.

P. DELEBECQUE ; RTD. civ. 1994, p.584, obs. J. MESTRE ; D. 1995, p. 87, L. AYNES ; JCP G.

1995. II. 22366, obs. D. MAZEAUD. 68

L’article 1142 code civil dispose que « Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en

dommages et intérêts en cas d'inexécution de la part du débiteur. » 69 Cf. par exemple Cass. civ., 3

ème 28 octobre 2003, RDC. 2004, p. 270, obs. D. MAZEAUD. Dans

un arrêt du 26 juin 1996 la troisième chambre civile de la Cour de cassation avait paru revenir sur

cette jurisprudence (D. 1997, p.119, obs. I. NAJJAR), ce qui a été très vite analysé comme un

« leurre » (D. 1997, p.169, obs. D. MAZEAUD) : si la Cour de cassation a accepté de sanctionner la

rétractation par l’exécution forcée de la vente, c’est en réalité parce que le promettant n’avait pas

soulevé devant la Cour d’appel que, tant que le bénéficiaire n'a pas déclaré acquérir, son obligation

ne constituait qu'une obligation de faire, et que la levée de l'option après la rétractation du promettant

excluait toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d'acquérir. A contrario, il faut en

déduire que si le moyen avait été avancé par le promettant devant la cour d’appel, il aurait fait échec à

la perfection de la vente.

Page 32: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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qualifier la situation du promettant. L’obligation de faire ne peut concerner que

l’accomplissement d’un fait ayant trait une chose. Or maintenir son consentement ne

vise pas une chose à faire, mais une abstention, celle qui consiste à ne pas reprendre

son consentement. Est-ce à dire qu’il s’agirait plutôt d’une obligation de ne pas

faire ? Le promettant a effectivement l’obligation de ne rien faire qui pourrait nuire

aux droits consentis au bénéficiaire et « faire disparaître l’un des éléments essentiels,

déjà présents, du contrat envisagé »70

. Néanmoins, cette obligation de ne pas faire

laisse supposer que le promettant puisse encore agir sur son consentement. Or,

conformément à la théorie générale des contrats, le promettant a donné son

consentement définitif à la vente. Pour que le transfert de propriété puisse s’opérer

de manière automatique, il ne manque plus que le consentement du bénéficiaire, et à

constater le paiement du prix. La volonté du promettant est inopérante sur la volonté

du bénéficiaire et sur l’événement traduisant cette volonté. Du côté du promettant, le

transfert de propriété est engagé dès la conclusion de la promesse. L’obligation de

ne pas faire pesant sur lui est un accessoire du droit d’option qu’elle vise à protéger.

Mais le promettant n’a plus aucune action à réaliser, c’est en sens qu’il est assujetti.

3.2- Les critiques relatives à la sanction de la rétractation du promettant

Les auteurs ont également critiqué la nature de la sanction applicable à la

défaillance du promettant, en constatant que la stricte application de la lettre de

l’article 1142 du code civil était absurde eu égard à l’évolution générale du droit

positif qui tend à consacrer le droit du créancier à obtenir de son débiteur l’exécution

en nature si celle-ci est possible et si elle ne porte pas atteinte aux libertés

individuelles du débiteur71

. L’avant-projet de réforme du droit des obligations établi

70

F. COLLART-DUTILLEUL, Les contrats préparatoires de la vente d’immeuble, Sirey, 1988, n°

227. 71

D. MAZEAUD, RDC. 2004, p. 270, op.cit. ; F. BENAC-SCHMIDT, D. 1994, p. 507, op.cit. La

majeure partie de la doctrine souhaite l’abandon de l’article 1142 du Code civil, car il est devenu

désuet depuis l’adoption de certaines dispositions légales et réglementaires visant à consacrer le

principe de l’exécution forcée des obligations (cf. notamment les lois du 05 juillet 1972 et du 09

juillet 1991 consacrant l’astreinte comme moyen d’obtenir l’exécution en nature du débiteur, le décret

n°85-1330 du 17 décembre 1985 conférant au Président du Tribunal de Grande Instance la

compétence pour ordonner l’exécution d’une obligation, même s’il s’agit d’une obligation de faire

(article 809 du Nouveau Code de procédure civile).

Page 33: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 33 -

sous la direction du Professeur CATALA72

préconise d’ailleurs l’abandon de

l’article 1142 du code civil, en proposant que lui soit substitué un article 1154, ainsi

rédigé : « L’obligation de faire s’exécute si possible en nature. Son exécution peut

être ordonnée sous astreinte ou un autre moyen de contrainte, sauf si la prestation

attendue a un caractère éminemment personnel. En aucun cas, elle ne peut être

obtenue par une coercition attentatoire à la liberté ou à la dignité du débiteur. À

défaut d’exécution en nature, l’obligation de faire se résout en dommages-

intérêts. »73

Dans le domaine de la vente d’immeuble, l’exécution en nature est a priori

forcément réalisable74

puisque celle-ci porte toujours sur un objet déterminé (ou au

moins déterminable). Elle ne porte pas atteinte à la personne du promettant, parce

qu’elle ne l’oblige pas à réaliser un acte qui le contraindrait directement, mais le

force au transfert de la propriété d’un bien auquel il a, par ailleurs, consenti.

L’exécution forcée pourrait se justifier également par le fait que le bénéficiaire n’a

souvent pas fait qu’accepter le contrat de promesse de vente conclu à son profit,

mais qu’il a également versé une indemnité d’immobilisation accentuant encore -

s’il le fallait - le caractère définitif de l’engagement du promettant. Si l’option peut

avoir un prix, c’est bien que le promettant réalise un sacrifice définitif pour lequel il

peut recevoir une contrepartie financière. En effet, quelle justification pourrait

72

P. CATALA, rapport contenant « Avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à

1383 du code civil) et du droit de la prescription (Article 2234 à 2281 du code civil) », La

Documentation française, 2005. Dans le texte, il sera fait parfois référence audit avant-projet en le

dénommant le projet CATALA, ou l’avant-projet de réforme CATALA. 73

Dans le projet CATALA, seule l’obligation de ne pas faire peut donner lieu à des dommages et

intérêts en cas d’inexécution, l’article 1154-1 prévoyant que « L’inobservation d’une obligation de ne

pas faire se résout de plein droit en dommages-intérêts du seul fait de la contravention, sauf le droit

pour le créancier d’en exiger à l’avenir l’exécution en nature. » 74

Du moins lorsque le promettant n’a pas vendu le bien à une tierce personne au mépris des droits

qu’il a conférés au bénéficiaire. D’autre part, le système de publicité français ne favorise pas la

possibilité d’une exécution forcée en nature puisque la publicité de la promesse de vente à la

Conservation des hypothèques n’a pas pour effet de la rendre opposable erga omnes. La promesse

unilatérale de vente pourrait être considérée comme faisant partie des actes relevant de l’article 28 du

décret n°55-22 du 4 janvier 1955 organisant la publicité foncière et rendant obligatoire, à fin

d’opposabilité aux tiers, la publicité au bureau des hypothèques du lieu de situation de l’immeuble

« les actes entre vifs dressés distinctement pour constater des clauses d'inaliénabilité temporaire et

toutes autres restrictions au droit de disposer ». Néanmoins, l’article 37 du décret prévoit

expressément la publicité facultative des promesses unilatérales de vente, à fin d’information des

tiers. Dès lors, la publicité de la promesse unilatérale de vente ne peut pas avoir pour effet de la

rendre opposable aux tiers, ce qui peut paraître inadapté eu égard à la sécurité juridique que devrait

inspirer le contrat de promesse.

Page 34: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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recevoir l’indemnité d’immobilisation si le promettant n’est pas tout à fait obligé

d’immobiliser son bien ?

Si le promettant ne peut pas reprendre son consentement, il y a bien

rencontre des volontés dès lors que le bénéficiaire a opté pour la vente, et

l’exécution forcée devrait pouvoir être prononcée sur le fondement de l’article 1134

alinéa 2 du code civil75

. La sanction de l’exécution forcée de la vente est d’ailleurs

celle retenue par la Cour de cassation, lorsque la rétractation du promettant

intervient après la levée de l’option du bénéficiaire. Elle a également affirmé à de

nombreuses reprises que la perfection de la vente est uniquement liée à l’accord sur

la chose et sur le prix76

. Pourtant même dans ce cas, le prononcé de l’exécution en

nature de la vente ne repose pas sur le constat que la rétractation du promettant est

impossible, mais est la sanction à la violation d’une obligation de donner par refus

de transférer le bien objet de la promesse77

. Pour Madame FABRE-MAGNAN, il est

inconcevable que le transfert de propriété puisse être une obligation, « en ce sens,

qu’il s’agit non pas de quelque chose de matériel, de tangible, qu’un contractant

pourrait accomplir, mais d’un concept purement juridique », d’un « effet légal du

contrat » nécessairement induit par la rencontre des consentements.

3.3- Exposé et appréciation de la théorie de Madame FABRE-MAGNAN

Madame FABRE-MAGNAN propose que soit abandonnée la distinction

entre obligation de faire (ou de ne pas faire) et celle de donner fondant la sanction de

la rétractation du promettant, pour retenir celle du contrat automatiquement translatif

ou non translatif de propriété. En raisonnant en ces termes, elle confirme toutefois

l’analyse jurisprudentielle qui consiste à faire une distinction entre le fait que la

levée de l’option soit intervenue avant ou après la rétractation. La levée de l’option

75

Art. 1134 c. civ. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont

faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi

autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. » 76

Cass. civ, 3ème

, 20 décembre 1994, JCP G. 1995, II, 21491, note C. LARROUMET. 77

M. FABRE-MAGNAN, Le mythe de l’obligation de donner, RTD. civ. 1996, p.85. Pour de

nombreux auteurs, le recours à l’obligation de donner « n’ajoute rien, sinon de la confusion » : D.

TALLON, Le surprenant réveil de l’obligation de donner, D.1992, chronique 69 ; v. J. GHESTIN

insistant sur le fait qu’il aurait été préférable de viser les contrats translatifs ou non de propriété, note

sous Cass. com 5 et 9 novembre 1991 et 23 février 1993, D. 1993, p. 383.

Page 35: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 35 -

opère une mutation dans le contrat. Selon l’auteur, tant que la levée de l’option n’est

pas intervenue, le contrat de promesse est un contrat obligatoire insusceptible d’être

érigé en contrat translatif de propriété car le bénéficiaire n’a pas consenti à la vente

mais au bénéfice d’une option. L’exécution forcée est donc impossible. Par contre,

par la levée de l’option le bénéficiaire consent à acheter et est associé à un contrat

translatif de propriété qui « est seul de nature à justifier que le juge constate le

transfert convenu en cas d'opposition du promettant. » Selon Madame FABRE-

MAGNAN, « ce nouveau raisonnement permet en effet seul d'affirmer que le

consentement du vendeur est définitivement donné le jour de la promesse de vente -

le promettant étant, dès ce jour, engagé irrévocablement à vendre - tout en

expliquant le rôle essentiel de la levée de l'option et, également, la différence

radicale entre promesse unilatérale et promesse synallagmatique de vente. » La

différence de sanction paraît, pour l’auteur, justifiée. « En effet, la sanction la plus

équitable doit correspondre au préjudice subi par la victime, ici le bénéficiaire de

l'option. Or jusqu'à la levée de l'option, celui-ci ne perd précisément qu'une option,

c'est-à-dire une faculté de choix qu'il avait et qui résultait de la promesse. Il doit

donc recevoir des dommages-intérêts correspondant au préjudice ainsi subi. En

revanche, une fois l'option levée, le bénéficiaire acquiert véritablement le droit d'être

propriétaire de la chose et la façon la plus adéquate de l'indemniser revient

précisément à imposer au vendeur le transfert de propriété convenu. Ces solutions

nous paraissent ainsi équitables.»

L’analyse de Madame FABRE-MAGNAN nous parait contestable parce

qu’elle n’applique pas, sans pourtant les méconnaître, les effets de l’engagement

définitif du promettant, son assujettissement pendant l’écoulement du délai d’option,

et les conséquences attachées au droit potestatif. Le caractère translatif ou non d’un

contrat n’a pas pour objet de définir la qualité des engagements pris par un

cocontractant, ou de les minimiser. En cas de rétractation du promettant avant la

levée de l’option, le préjudice subi par le bénéficiaire n’est précisément pas la perte

du droit d’option, celui-ci ne peut pas être repris par le promettant qui se rétracte ou

disparaître par le seul fait de l’inexécution de son engagement. En réalité, la

rétractation du promettant avant la levée de l’option fait échec à la réalisation des

effets de l’acte d’option lorsqu’il est exercé, c’est-à-dire qu’elle déjoue

Page 36: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 36 -

l’automatisme du transfert de propriété que son exercice induit. Le promettant est

engagé de manière identique, que la promesse de vente soit unilatérale ou

synallagmatique. Parce qu’il a conféré un droit d’option au bénéficiaire, et consenti

définitivement à la vente, il ne nous semble pas possible de tirer argument du

caractère non translatif du contrat pour retenir l’impossibilité d’une exécution forcée

en nature en cas d’inexécution du promettant. La promesse unilatérale de vente ne

pourrait-elle d’ailleurs pas se concevoir comme un contrat translatif de propriété en

voie d’édification, en attente des éléments nécessaires au transfert de propriété ? Il

s’agit alors de figer les éléments existants et de rechercher ceux manquants. Dans la

promesse unilatérale de vente acceptée, il ne manque plus que l’accord du

bénéficiaire à lever l’option pour que la vente soit parfaite. Si l’on retient le

caractère potestatif du droit d’option, le promettant ne peut tout simplement pas

rétracter son engagement jusqu’au terme prévu, qui est l’expiration du délai pour

lever l’option. Nous verrons que si le délai n’est pas prévu, l’engagement du

promettant n’est pas pour autant rétractable sans précautions78

.

La proposition de Madame FABRE-MAGNAN a nourri la réflexion de la

jurisprudence, qui a récemment abandonné toute référence à l’existence d’une

obligation de faire pesant sur le promettant pour fonder le droit au promettant de se

rétracter.

B - L’impossible rencontre des consentements

1- Synthèse de la jurisprudence postérieure à l’arrêt de 1993

La Cour de cassation a offert à la doctrine quelques éléments pouvant faire

songer qu’elle abandonnerait la jurisprudence de 1993. Après avoir affirmé dans un

arrêt du 11 mai 200579

que le désengagement du promettant avant la levée de

l’option ne pouvait s’analyser en une « rétractation régulière », la troisième

chambre civile de la Cour de cassation a reconnu dans un arrêt du 8 septembre

78

V. infra, p. 54. 79

Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2005, RTD. civ. 2006, p. 106, obs. J. MESTRE.

Page 37: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 37 -

201080

que l’engagement du promettant à la vente était « définitif », si bien que

l’option pouvait être levée par le bénéficiaire après le décès du promettant81

. Dans

un arrêt en date du 7 mai 200882

, la troisième chambre civile de la Cour de cassation

a en outre censuré, sur le visa de l’article 1134 du code civil, une cour d’appel qui

n’avait pas retenu que « si une offre d'achat ou de vente peut en principe être

rétractée tant qu'elle n'a pas été acceptée, il en est autrement au cas où celui de qui

elle émane s'est engagé à ne pas la retirer avant une certaine époque ». Il semblait

que si cette solution pouvait s’appliquer à une offre de contrat, qui par définition

n’est pas un contrat mais peut être qualifié d’engagement unilatéral, il était

pratiquement du devoir du juge de l’appliquer à la promesse unilatérale de vente afin

de sauvegarder la sécurité juridique induite par le mécanisme contractuel. Notons

que l’arrêt, s’il déclare la rétractation de l’offrant inefficace, ne se prononce pas sur

la sanction applicable à cette rétractation, le procès ayant été intenté par l’offrant qui

souhaitait seulement obtenir la restitution du dépôt de garantie qu’il avait versé à

l’émission de l’offre83

.

Par ailleurs, dans un arrêt du 26 mai 200684

, la chambre mixte de la Cour de

cassation a admis la possibilité d’exécution forcée d’un pacte de préférence en

affirmant que « le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger

l’annulation d’un contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et

d’obtenir sa substitution à l’acquéreur »85

. Les auteurs ont fait remarquer que si la

sanction de l’exécution forcée pouvait s’appliquer en cas de violation d’un pacte de

préférence, cette solution - exception faite de la double condition la rendant

applicable - était évidemment transposable à la levée de l’option dans les promesses

80

Cass. civ, 3ème

, 8 septembre 2010, RTD civ. 2010, p. 778, obs. B. FAGES ; Rép. Defrénois. 2010.

2123, obs. L. AYNES. 81

Cette solution se calque sur celle admise par la Cour de cassation en matière d’offre de contrat

assortie d’un délai, laquelle doit survivre au décès de l’offrant : Cass. civ. 3ème

, 9 novembre 1983,

Bull. civ. III, n° 222. 82

Cass. civ. 3ème, 7 mai 2008, D. 2009, p. 440, note. M.-L. MATHIEU-IZORCHE. 83

L’offre intervient en 2000, et à cette époque l’article 1589-1 du code civil n’est pas encore entré en

vigueur. 84

Ch. mixte composée des 1ère

et 3ème

chambres civiles, de la chambre commerciale et de la chambre

sociale de la Cour de cassation, 26 mai 2006, RTD. civ. 2006, p. 550, obs. J.MESTRE. 85

« (…) si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé

avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur, c’est à

condition que ce tiers ait eu connaissance, lorsqu’il a contracté, de l’existence du pacte de préférence

et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir. »

Page 38: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 38 -

unilatérales de vente, et d’autant plus justifiée dans ce domaine parce qu’à la

différence du pacte de préférence le droit d’option est un droit « actuel » et non

éventuel86

. Monsieur MAZEAUD résume ainsi le sentiment de la doctrine aux

lendemains de l’arrêt du 26 mai 2006 : « Si l'exécution forcée en nature d'un pacte

de préférence, qui crée une simple priorité contractuelle au profit du bénéficiaire, est

désormais admise, au nom d'un souci de cohérence élémentaire, il ne pouvait pas en

aller autrement en matière de promesse unilatérale de contrat, laquelle engendre au

profit du bénéficiaire une exclusivité contractuelle... »87

.

Pourtant, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a marqué la

persistance de son analyse dans un arrêt du 11 mai 201188

. En l’espèce, le

bénéficiaire d’une promesse de vente avait levé l’option d’achat qui lui était

consentie dans les délais, mais après la rétractation du promettant. La Cour d’appel

avait privé la rétractation de tout effet et déclaré la vente parfaite. La Cour de

cassation censure l’arrêt, au visa des articles 1101 et 1134 du code civil parce que

« la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse postérieurement à la

rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de

vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut être ordonnée. »

2- Le recours à l’article 1134 du code civil

Dans l’arrêt précité du 11 mai 2011, la Cour de cassation ne vise plus

l’inexécution de l’obligation de faire pour exclure la possibilité d’une exécution

forcée en nature, mais analyse la rétractation du promettant en termes de

consentement. Le recours à l’article 1134 du code civil est étonnant puisque c’est le

même texte, en son alinéa 2, qui fondait l’analyse des détracteurs de la jurisprudence

de 1993 : parce que la promesse unilatérale de vente est un contrat par lequel le

promettant a donné son consentement définitif à la vente, il ne peut de lui-même

révoquer le contrat sans l’accord du bénéficiaire. En fait, la Cour de cassation ne nie

86

62ème

Congrès des Notaires de France, « La formation du contrat, l’avant-contrat », communication

de Me SABATIER, p.100. 87

D. MAZEAUD, D. 2011, p. 1457, op.cit. 88

Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2011, D. MAZEAUD, ibid.; D. 2001, p.1460 note D. MAINGUY ; RTD.

civ. 2011, p.532, obs. B. FAGES ; étude G. ROUZET, conseiller-rapporteur à la Cour de cassation,

JCP N. 1163.

Page 39: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 39 -

pas la disposition légale, elle la contourne en considérant « que c’est la rétractation

elle-même qui impose la solution, en empêchant toute rencontre des volontés

réciproques de vendre et d’acquérir »89

. Cette solution a été reprise par la chambre

commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 13 septembre 201190

, laquelle

vient tempérer les espoirs doctrinaux à peine ranimés par un arrêt de la troisième

chambre civile en date du 06 septembre 201191

. La question est donc devenue celle

de savoir si le consentement à la vente, par hypothèse définitif, peut quand même

être rétracté dès lors que le cocontractant n’a pas déclaré vouloir acheter, et que par

suite la rencontre des volontés n’a pas - encore - eu lieu. Mais elle est en réalité de

savoir s’il pèse encore sur le promettant une obligation, et pour la résoudre il faut

savoir si la vente peut être constatée sans réitération du consentement du promettant.

La jurisprudence admet explicitement que l’engagement du promettant est

définitif dès la conclusion de la promesse de vente, lorsqu’elle retient que le respect

des règles de capacité et de pouvoir du promettant doit s’analyser au jour de la

promesse92

. C’est également parce que la promesse unilatérale de vente est destinée

à valoir vente par la seule levée de l’option, que la chose promise doit être

déterminée - ou à tout le moins déterminable - et que la promesse doit comporter

l’indication du prix. C’est encore parce que la levée de l’option rend définitive la

formation de la vente que c’est à sa date que s’apprécie la lésion des sept douzièmes

et que commence à courir le délai de l’action en rescision, prescriptible dans un délai

de 2 ans93

. Si l’engagement à la vente du promettant est définitif, demeure-t-il

rétractable tant qu’il n’a pas rencontré celui du bénéficiaire ? La solution d’une

possible rétractation unilatérale est impossible si l’on retient, comme nous en enjoint

89

N. MOLFESSIS, de la prétendue rétractation du promettant dans la promesse unilatérale de vente

ou pourquoi le mauvaise usage d’un concept inadapté doit être banni, D. 2012, p. 231. 90

Arrêt non publié n° 10-19.526 qui adopte la solution pour une promesse unilatérale de cessions

d’actions, RTD. civ. 2011, p. 758, note B. FAGES ; JCP G. 2011. 1353, note J. HEYMANN ; JCP

Contrats Concurrence Consommation, 2011, comm.53, note L. LEVENEUR. 91

Arrêt non publié. La Cour de cassation a estimé dans cet arrêt qu’ « ayant relevé que la date

d'expiration du délai de levée de l'option ouverte [à la bénéficiaire] par la promesse unilatérale de

vente à elle consentie par [les promettants] était fixée au 15 septembre 2006 et que la dénonciation,

par ces derniers, de leur engagement datait du 16 janvier 2006, la cour d'appel en a exactement déduit

que [la bénéficiaire] était fondée à faire valoir que la levée de l'option devait produire son plein effet.

Cette solution, si elle devait être reprise, initierait un revirement total de jurisprudence. 92

Cass. civ., 24 octobre 1950, JCP 1951, IV.174. 93

C. civ. art 1675 ; Cass. civ. 3ème

, 24 février 1999, D. 2000, p. 38, obs. I. NAJJAR ; Cass. civ. 3ème

,

29 mars 2000, RD imm. 2000. P. 585, obs. J.-C. GROSLIERE.

Page 40: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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l’article 1134 alinéa 2 du code civil, que le consentement donné par le promettant

lors de la conclusion du contrat de promesse ne peut pas se reprendre sans l’accord

du bénéficiaire. L’existence du droit d’option n’a pas pour objet de remettre en

cause l’intégralité du consentement du promettant ou d’en suspendre l’efficacité,

mais a pour fonction de donner toute liberté au bénéficiaire pour accepter ou refuser

la vente dans le délai énoncé au contrat de promesse. Le promettant est engagé dans

un contrat et ne peut pas reprendre unilatéralement son consentement. C’est ainsi

que Monsieur NAJJAR affirme que « la rétractation de la promesse est un non-

sens ; on ne rétracte qu’un accord sans engagement, voire qu’un engagement non

obligatoire (….), réserve faite des cas des rétractations intempestives ou

frauduleuses »94

.

Si la rétractation est « un non-sens », faut-il en déduire qu’elle ne peut pas

exister ? Monsieur MAZEAUD l’affirme lorsqu’il écrit que la solution dégagée par

la jurisprudence repose « sur une analyse erronée de la situation contractuelle du

promettant qui, dans la perspective de la formation du contrat promis, n’est

juridiquement tenu à effectuer aucune prestation et est concrètement réduit à la

passivité, puisque pour que la promesse de vente se mue en vente, il faut simplement

que le bénéficiaire lève l’option. »95

Ce constat emprunte toutes les caractéristiques

précédemment analysées du lien de sujétion96

.

Si la rétractation est inopérante parce que le promettant est tenu de subir la

décision du bénéficiaire, il doit être constaté la rencontre de volontés dès lors que le

bénéficiaire lève l’option dans les délais impartis. La rétractation du promettant ne

saurait être constitutive d’une faute à laquelle est attachée une sanction, tout

simplement parce qu’elle ne peut pas avoir lieu. La sanction n’est dès lors pas

l’octroi de dommages-intérêts mais l’exécution forcée du contrat de vente. Cette

94

I. NAJJAR, D. 1997, op.cit. 95

D. MAZEAUD, D. 2011, op.cit. 96

Cf. dans le même sens, N. MOLFESSIS, De la prétendue rétractation du promettant dans la

promesse unilatérale de vente ou pourquoi le mauvais usage d'un concept inadapté doit être banni,

op.cit.: « Le promettant ne consent pas à la vente au moment où le bénéficiaire lève l’option. Il a

consenti dans le contrat de promesse, et il n’y a évidemment aucun besoin qu’il ‘continue’ à consentir

pendant le temps de la promesse. Pour le dire autrement, le promettant n’a rien à exécuter » ;

également F. COLLART-DUTILLEUL, Les contrats préparatoires à la vente d'immeuble : les

risques de désordre, Droit et patrimoine, déc. 1995, p. 58.

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solution respecte la nature de l’engagement du promettant, lequel comporte deux

sortes d’enchainements puisqu’il confère au bénéficiaire la certitude que la situation

ne peut pas être modifiée sans sa volonté, puis le droit d’obtenir les effets de

l’exercice du droit d’option.

En maintenant sa solution, la Cour de cassation offre en fait au promettant un

véritable droit potestatif de se rétracter - moyennant le paiement de dommages et

intérêts -, ou plus exactement de se dédire, et balaie les effets de celui conféré

conventionnellement au bénéficiaire de la promesse de vente. Cette solution porte

évidemment atteinte à la sécurité juridique et à la force obligatoire des contrats, et

c’est essentiellement la raison pour laquelle elle est décriée par la doctrine : « A quoi

bon conclure un tel avant-contrat, si le promettant est investi d'un pouvoir de ne pas

contracter en dépit de la promesse qu'il a irrévocablement conclue, s'il est investi

d'un pouvoir de dire « non! » au contrat promis, alors que l'intérêt d'une promesse

unilatérale de contrat est de lui imposer le devoir de dire « oui ! » »97

3- La nécessité d’adaptations contractuelles

Si la Cour de cassation ne tire pas les conséquences de l’article 1134 alinéa 2

du code civil, il appartient à la pratique notariale de s’assurer de l’efficience des

promesses unilatérales de vente. Rappelons que dans un arrêt en date du 25 janvier

1989, la première chambre civile de la Cour de cassation98

a déclaré que

« l'obligation qui pèse sur les notaires de s’assurer de la validité et de l'efficacité des

actes qu'ils dressent s'étend à tous les actes auxquels ils donnent la forme

authentique, notamment aux promesses de vente, lesquelles sont créatrices de

droit. » En l’état de la jurisprudence de la Cour de cassation, il incombe au notaire

d’informer les parties à une promesse unilatérale de vente du caractère éminemment

fragile de l’acte qu’ils s’apprêtent à régulariser, et de leur proposer une clause

adaptée au souci de sécurité juridique qui les anime.

97

D. MAZEAUD, D. 2011, op.cit. 98

Cass. Civ. 1ère

, 25 janvier 189, JCP G. n°18, 2 mai 1990. II. 21468, note M. DAGOT.

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- 42 -

Dans un arrêt du 27 mars 200899

, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation affirme que l’inexécution du promettant de vendre se résout par des

dommages-intérêts dès lors que les parties n’ont pas stipulé une autre sanction. On

déduit de cet arrêt que les parties ont toute latitude pour aménager les conséquences

de la rétractation du promettant, et ainsi pour prévoir explicitement qu’elle sera

sanctionnée par la constatation judiciaire de la vente.100

Suite à cet arrêt, les praticiens ont inséré dans le contrat de promesse

unilatérale de vente une clause visant à écarter l’application de l’article 1142 du

code civil et permettant ainsi au bénéficiaire qui a levé l’option dans les délais

impartis par la promesse mais après la rétractation du promettant, d’obtenir la vente

forcée du bien. Cette clause est insuffisante, parce qu’elle oblige le bénéficiaire à

renoncer au droit éventuel de percevoir des dommages-intérêts et occulte le

caractère irrévocable de l’engagement du promettant. Elle n’est d’ailleurs plus

adaptée, puisque la Cour de cassation ne fonde plus sa solution sur l’inexécution

d’une obligation de faire.

Monsieur AYNES a proposé d’insérer dans le contrat une clause prévoyant

que la vente serait conclue dès la levée de l’option, le promettant acceptant dès la

conclusion du contrat de promesse qu’elle puisse être judiciairement constatée101

. Il

a également proposé que la qualification juridique de l’acte en « promesse

unilatérale de vente » soit remplacée par celle de « pacte d’option »102

. Cette

99

Cass. civ. 3ème

, 27 mars 2008 : « Mais attendu qu'ayant retenu que si les parties à une promesse

unilatérale de vente étaient libres de convenir que le défaut d'exécution par le promettant de son

engagement de vendre pouvait se résoudre en nature par la constatation judiciaire de la vente, force

était de relever que les actes conclus entre la société Foncière Costa et la société Ogic n'avaient pas

stipulé que l'inexécution par la société Foncière Costa de sa « promesse ferme » et de son

« engagement ferme et définitif » de vendre se résoudrait par une autre voie que celle prévue à

l'article 1142 du code civil, la cour d'appel, sans dénaturation, en a exactement déduit que la société

Ogic n'était pas fondée à prétendre à une exécution en nature et que la société Foncière Costa devait

réparer le dommage que l'inexécution de son obligation de vendre avait pu causer à la société Ogic »,

obs. B. FAGES, RTD. civ. 2008, p 475. 100

Cette appréciation est confirmée par A-C MONGE et I. GOANVIC, conseillers référendaires à la

Cour de cassation, D., 2011, p.2679. 101

D. MAZEAUD se prononce dans le même sens, ibid. A la suite d’un article publié par L. AYNES,

P. TARRADE (notaire) et P. DAVY (notaire assistant) proposent une formule contenant les clauses

essentielles de la promesse unilatérale dans Rép. Defrénois, 2011, 40209, p. 1575. 102

L. AYNES, Faut-il abandonner la promesse unilatérale de vente ?, Rép. Defrénois, 2011, p.1023.

L. BOYER avait également fait cette proposition en 1971, dans Rép. civ., Contrats et conventions, v.

I. NAJJAR, Les contrats d’option, op. cit. n°14.

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terminologie pourrait effectivement mieux renseigner sur le caractère contractuel de

la promesse unilatérale de vente dont l’expression « n’exprime, ni le caractère né et

actuel de l’option qui en découle, ni l’originalité du mécanisme juridique. »103

Elle

éclairerait également les parties sur la force du droit conféré au bénéficiaire du

contrat en insistant sur son caractère potestatif, au reste défendu par Monsieur

AYNES qui définit le droit d’option comme « un droit « au » contrat, c’est-à-dire du

droit subjectif d’imposer l’exécution du contrat par l’exercice de sa seule volonté ;

en bref, un droit potestatif »104

.

La clause d’exécution forcée permettant au juge de constater la vente

nonobstant la rétractation du promettant emprunte assurément les caractères du lien

de sujétion propre au droit potestatif, et est conforme au principe de l’autonomie de

la volonté qui justifie le fait qu’une partie puisse déclarer, par la régularisation d’un

contrat de promesse, s’engager définitivement à réaliser une prestation déterminée

ou à subir l’exercice par le bénéficiaire d’un pouvoir de volonté. La rédaction de

cette clause pourrait s’orienter comme suit :

« Le promettant promet de vendre le bien ci-après désigné, au bénéficiaire

qui accepte la promesse en tant que telle, sans toutefois prendre l’engagement

d’acquérir. Le bénéficiaire disposera d’un délai de x mois pour lever l’option

d’achat. Dès la levée de l’option par le bénéficiaire dans les délai et conditions

stipulés aux présentes, la vente sera parfaite.

Le consentement du promettant à la vente est irrévocable pendant

l’écoulement du délai d’option. Sauf accord exprès du bénéficiaire, il ne pourra

donc pas le révoquer.

En cas de non-respect par le promettant de l’engagement qu’il a pris aux

termes des présentes - que la levée de l’option soit ou non intervenue -, le

bénéficiaire, devenu acquéreur suite à la levée de l’option, pourra demander au

103

I. NAJJAR, ibid. L’auteur remarque que le terme unilatéral est source d’amalgame : « Que de

confusions, d’ailleurs, n’a-t-on pas constaté, en raison de l’emploi du mot unilatéral, alors que la

promesse n’est pas un acte unilatéral, mais un contrat où le promettant s’est déjà lié, certes, mais

dans le cadre d’un contrat, et où le bénéficiaire est parfois tenu - véritable synallagmatisme -

d’exécuter certaines obligations ! » L’auteur s’interroge sur le fait de ne pas plutôt qualifier la

promesse unilatérale de vente de « contrat d’option ». 104

L. AYNES, ibid.

Page 44: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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juge de constater le transfert de propriété sans que le promettant ne puisse s’y

opposer.

Dans ce cas, le jugement permettra la publication de la vente à la

conservation des hypothèques compétente. »

L’analyse de la Cour de cassation relative à la rétractation du promettant

dans les promesses unilatérales de vente n’est pas de nature à conforter l’existence

d’un lien de sujétion unissant le promettant au bénéficiaire, et par suite à confirmer

que le droit d’option est un droit potestatif. Pourtant, en indiquant que les parties

peuvent expressément prévoir que l’engagement du promettant est irrévocable et que

son inexécution se résoudra par l’exécution forcée en nature, elle ne s’oppose pas à

ce que le droit d’option puisse assujettir le promettant si telle est la volonté exprimée

des parties. D’autre part, en maintenant sa jurisprudence, la Cour de cassation a

œuvré indirectement en faveur de la reconnaissance doctrinale du droit potestatif,

devenu la fronde des auteurs qui s’insurgent contre la possible rétractation du

promettant. La force obligatoire de la promesse unilatérale de vente justifie

l’irrévocabilité de principe du consentement du promettant, et peut rendre son

assujettissement socialement désirable.

L’unilatéralité du droit potestatif tient autant du fait que le sujet passif n’ait

plus aucune manifestation de volonté à produire par suite de son assujettissement,

qu’en la forme de l’activité à accomplir par le sujet actif pour le mettre en œuvre. Le

droit potestatif s’exerce « au moyen d’une activité propre unilatérale » de son

titulaire, selon les termes de la définition qui en est posée. Cette « activité » traduit

l’exercice du droit potestatif. Le droit du potentior, tout puissant soit-il, n’en reste

pas moins encadré par les conditions imposées à son exercice.

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SECTION II : Le pouvoir unilatéral conditionné du potentior

Le titulaire du droit potestatif conventionnel n’est pas investi d’un pouvoir

d’action sur toutes les situations découlant du contrat, mais d’un pouvoir circonscrit

à un ou plusieurs éléments du contrat. En outre, son choix est limité à une alternative

entre deux ou plusieurs options, fournies et acceptées par les parties au contrat. Le

droit potestatif est également conditionné par les limites temporelles fixées à son

exercice (I).

La question de la durée dans lequel l’exercice du droit potestatif s’inscrit,

renvoie à celle, plus délicate, de la juxtaposition et l’articulation des délais en cas de

droits potestatifs multiples (II).

I- Les limites imposées à l’exercice du droit potestatif

La notion de choix est inhérente à l’exercice du droit potestatif conventionnel

(A), de même que la nécessité de prendre parti dans un certain délai (B).

A - Les termes du choix potestatif

1- La notion de choix

Le choix n’est pas une faculté laissée au potentior, qui serait un accessoire de

sa volonté, il est la volonté, le pouvoir même qui lui est laissé de déterminer

consciemment et unilatéralement l’avenir contractuel. A la conclusion du contrat, il

s’est engagé à réaliser un choix, mais son action est encore indéterminée. Le choix

est le moment du passage entre l’indétermination de la volonté du potentior et sa

prise de décision. C’est en ce sens que le choix potestatif est toujours une « attitude

active »105

. Il est le moment de détermination positive mettant fin à la situation

juridique existante, le moment où le pouvoir du sujet actif devient réel. En pratique,

en matière contractuelle, le choix du potentior s’opère entre accepter de mettre en

105

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°36.

Page 46: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 46 -

œuvre et refuser de mettre en œuvre une prérogative résultant du droit potestatif.

Ainsi, l’attributaire d’un droit de rétractation choisit de se rétracter ou de ne pas se

rétracter, le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente choisit de lever ou de

ne pas lever l’option d’achat, le bénéficiaire d’un droit de préemption choisit de se

porter acquéreur ou refuse la vente à son profit …

Les termes du choix ne peuvent pas être modifiés après la signature de la

promesse de vente, sauf accord des parties, et l’exercice du droit potestatif doit être

réalisé conformément aux branches de l’alternative.

2- Les réserves contenues dans l’alternative

L’alternative peut comprendre une réserve ou une condition voulue par les

parties ou le législateur. Rien n’interdit en effet aux parties de formuler, dans le

contrat qui donne naissance au droit potestatif, que si le titulaire du droit choisit telle

option, il pourra subordonner l’effectivité de son choix à une condition particulière.

C’est ainsi que, par exemple, les parties à une promesse unilatérale de vente peuvent

décider de subordonner la levée de l’option à l’obtention d’un permis de construire

ou à la résiliation du bail en cours.

De même, la loi prévoit parfois de manière impérative des conditions à

l’exercice de certains droits potestatifs d’origine conventionnelle, dans le but de

protéger le titulaire d’un tel droit : il en va ainsi, par exemple, du droit de

préemption laissé au locataire d’un immeuble à usage d’habitation lors de la

première vente suivant la division de l’immeuble ou consécutif, lequel peut

subordonner l’expression de sa volonté d’acquérir à l’obtention d’un prêt sans que le

vendeur ne puisse s’y opposer106

.

106 C’est l’article 10 de la loi n°75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants

de locaux à usage d’habitation, modifiée par l’article 81 de la loi n° 82-526 du 22 juin 1982 relative

aux droits et obligations des locataires et des bailleurs, qui instaure un droit de préemption au profit

du preneur à bail d’un local d’habitation, mixte ou professionnel, dès lors que la vente de ce local est

« consécutive à la division initiale ou à la subdivision de tout ou partie d’un immeuble par lots »

(article 10-1 de la loi du 31/12/1975). Le locataire peut renoncer à acquérir le bien loué, ou accepter

de se porter acquéreur. Il n’a le choix qu’entre ces deux options. Dès acceptation de l’offre par

l’acquéreur, la vente est valablement formée et l’acte authentique doit intervenir dans le délai de deux

Page 47: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 47 -

Pour le cas où une condition ou une réserve à la levée de l’option aurait été

formulée par les parties ou par la loi, l’exercice du droit potestatif est parfait à

l’émission du choix par son titulaire mais ses effets sont subordonnés à la réalisation

de la condition. Ce n’est pas, en effet, l’exercice du droit potestatif qui est suspendu

à la condition : le bénéficiaire du droit d’option a opté pour une branche de

l’alternative, mais la modification de la situation juridique est encore incertaine tant

que la condition comprise dans la branche de l’alternative n’est pas réalisée. En cas

de réalisation de la condition suspendant la levée d’option, celle-ci devient parfaite

et produit rétroactivement ses effets au jour de la levée d’option en application de

l’article 1179 du code civil107

.

3- L’exercice pur et simple du droit potestatif

Le potentior ne peut pas réduire l’effectivité de son choix en l’assortissant

unilatéralement de modalités ou de conditions. C’est ainsi que, par exemple, le

bénéficiaire d’un droit d’option d’achat, ou d’un droit préemption, ne peut pas lever

l’option sous la réserve de l’obtention d’un prêt, ou sous la condition d’obtenir un

permis de construire, dès lors que cette réserve n’est pas imposée par un dispositif

légal ou qu’elle n’a pas été acceptée par le vendeur.

mois à compter de la notification par le locataire de son acceptation. Passé ce délai pour réitérer

l’acte, le locataire perd son droit de préemption et demeure locataire des biens vendus au tiers

acquéreur. Si le preneur des locaux exerce son droit de préemption et envisage de financer son

acquisition à l’aide d’un emprunt immobilier, il doit faire connaître au vendeur-bailleur, en même

temps que son acceptation, qu’il exerce son droit de préemption sous condition suspensive de

l’obtention d’un prêt. Le délai de réitération par acte authentique est alors de quatre mois à compter

de la notification par le locataire de son acceptation sous condition. Le bailleur ne peut pas s’opposer

à la stipulation d’une telle condition suspensive de l’obtention d’un prêt, alors même que le tiers

acquéreur avait renoncé à son bénéfice.

Il en va de même pour le congé pour vendre institué par l’article 15 de la loi n°89-462 du 06 juillet

1989 (dite loi Quilliot), et délivré par le bailleur à l’issue du bail d’habitation. La distinction majeure

entre ces deux droits de préemption du locataire réside dans les conséquences de la non-acceptation

de l’offre de vente par le locataire. Dans le cadre du congé pour vendre, le locataire qui ne préempte

pas perd sa qualité de preneur et le bailleur pourra vendre le logement libre de toute occupation. 107

Pour une étude sur le champ d’application de l’article 1179 du code civil, v. J.CL Not. Rép., J.-J

TAISNE, Contrats et obligations, fasc. 44 à 46, et 47 « Accomplissement de la condition ».

Page 48: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 48 -

3.1- Les arguments développés par Monsieur DAGOT

Monsieur DAGOT, dans son étude consacrée à la validité de la levée

d’option conditionnelle108

, fonde sur divers arguments l’impossibilité d’insérer

unilatéralement une condition à l’exercice du droit d’option. Le premier est que la

levée de l’option sous condition fixée unilatéralement par son bénéficiaire

maintiendrait l’incertitude quant à l’imputation définitive du contrat en même temps

qu’elle en créerait une nouvelle, puisque la vente serait alors « subordonnée à une

condition qui n’existait pas au départ ». Ensuite, en ce qui concerne le droit de

préemption, Monsieur DAGOT fait remarquer que la possibilité laissée au

bénéficiaire du droit de substitution d’adjoindre des conditions à celles convenues

entre le vendeur et le tiers acquéreur serait contraire à la nature même du droit de

préemption qui n’est que « la possibilité de se substituer à une tierce personne, mais

sans pouvoir (sauf exception prévue ou imposée par la loi) modifier unilatéralement

les règles du jeu »109

. Dans le prolongement de la dénaturation du droit en présence,

il retient que « l’atteinte à la liberté contractuelle deviendrait intolérable si le titulaire

du droit de préemption pouvait non seulement s’imposer en tant qu’acquéreur, mais

en outre imposer unilatéralement telle ou telle condition de son gré. » Pour Monsieur

DAGOT, la dénaturation du droit de préemption s’étendrait au contrat lui-même,

puisque qu’en modifiant les modalités dès avant convenues entre le vendeur et le

tiers acquéreur, le bénéficiaire du droit de préemption modifierait en réalité le

contrat lui-même. Enfin, admettre que le bénéficiaire du droit de préemption puisse

unilatéralement ajouter une condition au bénéfice de la préemption reviendrait à

anéantir l’équilibre des parties au contrat, en permettant à l’une des parties de

modifier le contrat alors que l’autre partie ne pourrait pas en modifier les termes.

108

M. DAGOT, La levée conditionnelle, JCP N., n° 28, 13 juillet 1990, 100908. 109

Néanmoins, nous pouvons remarquer que le droit de préemption reconnu aux collectivités

publiques et établissements publics habilités peut contenir des modalités différentes à celles

contenues dans la promesse de vente : si le prix a été stipulé comptant entre les parties, le préempteur

conditionne en principe le paiement du prix à la publication de la vente à la Conservation des

hypothèques et à la production d’un état sur formalités vierge de toute inscription.

Page 49: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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Si Monsieur DAGOT juge que le terme de « dénaturation »110

du contrat est

« particulièrement évocateur », il confirme l’analyse constante de la Cour de

Cassation qui, dans un arrêt en date du 08 novembre 1933 retenait déjà que « la

promesse unilatérale de vente ne se transforme en vente que par le concours, avec la

volonté déjà exprimée du pollicitant, de la volonté entièrement concordante du

bénéficiaire de cette promesse ; qu’il n’y a plus accord de volontés, indispensable

pour la formation du contrat, quand celui à qui la pollicitation a été faite ne l’accepte

que sous des réserves ou avec des modalités non comprises dans la dite

pollicitation. »111

L’adjonction unilatérale d’une condition par le bénéficiaire du

droit de préemption exclut tout accord de volontés entre lui et le vendeur. Or, c’est la

rencontre des volontés qui forme le contrat. En ce sens conclut l’auteur, il y a plus

que dénaturation du contrat, il n’y a pas de contrat.

3.2- La maîtrise de l’étendue du lien de sujétion par l’indivisibilité de

l’option

Les arguments de Monsieur DAGOT, développés principalement à propos du

droit de préemption d’origine conventionnelle, valent pour l’ensemble des droits

potestatifs de même nature puisque leur exercice ne doit s’effectuer que dans le

cadre de l’assujettissement volontaire du sujet passif. Il a accepté sa sujétion parce

que celle-ci est encadrée dans les limites de l’alternative laissée au choix du sujet

actif, c’est en ce sens qu’elle n’est pas arbitraire et qu’elle s’insère dans le contrat

sans en contrarier la philosophie. Retenir que le sujet actif puisse accroitre le

domaine de la sujétion du sujet passif en augmentant ou modelant la puissance de

son droit, en y ajoutant ou en modifiant unilatéralement une alternative, serait

contraire à la sécurité juridique et exclurait formellement toute rencontre de

volontés.

110

Le terme de « dénaturation » apparaît dans l’arrêt de la Cour d’Appel de Dijon, du 24 mars 1988,

JCP N, n°49, 7 décembre 1990, 101507 : « attendu que le « pacte de préférence » porté dans l’acte du

14 novembre 1977 ne comportait pas de condition suspensive ; que M. Gaudry, en assortissant son

accord d’une réserve qui n’était pas prévue, dénaturait le contrat et par suite son acceptation doit être

considérée comme non valable (…) ». 111

Arrêt cité par M. DAGOT, Cass.civ. 8 novembre 1933, Sirey, 1934. 1, p. 28.

Page 50: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 50 -

L’exercice du droit potestatif doit donc être pur et simple en l’absence de

toute condition d’origine légale ou conventionnelle. L’ajout unilatéral d’une réserve

à l’exercice du droit potestatif aboutit à la modification unilatérale d’une clause

contenue dans le contrat, et est assimilable à un refus d’exercer le droit potestatif112

.

L’exercice du droit ne peut produire aucun effet sur la situation juridique intéressant

le sujet passif.

C’est ainsi, par exemple, que la levée d’option par le bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente sous la condition, non prévue au contrat, de

l’obtention d’un permis de construire, est nulle. Est-ce à dire que le droit potestatif

est épuisé par la manifestation de volonté, et que le promettant se trouve défait de

tout assujettissement? La levée de l’option non conforme aux dispositions

contractuelles ne peut pas rendre la vente parfaite113

, mais tant que le délai d’option

n’est pas écoulé, le promettant n’est pas corrélativement libéré des engagements

qu’il a pris dans la promesse de vente. En ajoutant une condition à la levée de

l’option, le bénéficiaire n’a pas renoncé expressément à l’option telle que prévue au

contrat de promesse, mais a exprimé une « contre-proposition » à l’adresse du

promettant qui peut l’accepter ou la refuser. Pour le cas où le promettant accepterait

la condition particulière insérée unilatéralement par le titulaire du droit d’option, la

doctrine et la jurisprudence analysent ce nouvel accord comme distinct de la

promesse de vente qui contenait le droit d’option, laquelle est devenue caduque par

suite de l’absence de rencontre de volontés relativement aux conditions qu’elle

contenait.114

Si, au contraire, le promettant refuse la contre-proposition du

bénéficiaire, ce dernier peut encore lever l’option dans les termes et le délai stipulés

dans de la promesse de vente. S’il ne le fait pas, il est censé avoir renoncé

définitivement à la levée de l’option et l’indemnité d’immobilisation éventuellement

versée demeure, en principe, acquise au promettant.

112

CA. PAU, 2ème

Ch., 10 juillet 1997, Juris-Data 1997-048820. 113

Ce sont les termes de l’arrêt de la troisième chambre de la Cour de cassation, en date du 5 avril

1968, cité par M. DAGOT (ibid.), Bull. 162. p.128. Dans cet arrêt la Cour de cassation approuve les

juges du fond d’avoir retenu que « la vente n’était pas parfaite », dès lors que le promettant vendait

son bien sans condition et moyennant le paiement d’un prix comptant, et que le bénéficiaire

promettait de l’acquérir à la condition « que le payement du prix pourrait être différé pendant un

temps d’ailleurs indéterminé ». 114

Arrêt cité par M. DAGOT, Cass. civ. 1ère

, 17 juillet 1947, Sirey, 1950, 1, 97, obs. TIRLEMONT.

Page 51: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 51 -

La définition des termes du choix, de même que l’indivisibilité de l’option,

aboutissent à une prévisibilité du sort du contrat. Cette solution relativise

l’assujettissement du sujet passif au droit potestatif, en même temps qu’elle encadre

le pouvoir de son titulaire. Pour être valable, car limité aux termes de l’engagement

du sujet passif, l’exercice du droit potestatif doit encore être effectué en temps utiles.

B - Le délai d’exercice du droit potestatif

1- La nécessité de prendre parti dans un certain délai

Lorsque le droit potestatif prend naissance avec le contrat, il y a été librement

inséré par les cocontractants. Le sujet passif a consenti librement à son

assujettissement, et le sujet actif au bénéfice du droit qui lui est conféré. Entre la

naissance et l’exercice du droit potestatif, son titulaire a toute liberté pour réfléchir à

l’opportunité des termes de l’option, et en conséquence pour choisir l’influence qu’il

veut exercer sur la situation juridique créée avec le contrat.

En attendant l’exercice du droit potestatif, la situation juridique en cours est,

comme l’indique Monsieur NAJJAR, « incertaine », en voie de transformation ou

de disparition115

. Eu égard au principe de la sécurité juridique, il y a donc nécessité à

ce que le titulaire du droit potestatif fasse connaître son choix dans un certain délai.

Lorsque le droit potestatif découle de la propriété, tel que le droit de demander le

bornage d’une parcelle, la mitoyenneté d’un mur, cette nécessité de prendre parti est

en attente de la réclamation du droit par son titulaire. La nécessité de prendre parti

est attachée au moment où le titulaire du droit potestatif réclamera l’application de

son droit, et il peut le faire à tout moment puisque son droit repose sur un droit de

nature imprescriptible, le droit à la propriété. Il en va différemment pour les droits

potestatifs conventionnels contenus dans les promesses de vente qui, même s’ils

portent sur un immeuble, ne sont pas l’accessoire du droit de propriété.

115

I NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°31.

Page 52: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 52 -

De la même manière que la loi prévoit le délai d’exercice des droits

potestatifs qu’elle crée, la convention doit fixer les échéances à respecter pour

activer les droits potestatifs qu’elle contient. Les cocontractants ont en effet toute

latitude pour définir le délai imparti pour l’exercice du droit potestatif

conventionnel, et le rédacteur de la promesse de vente doit apporter un soin

particulier à cette mention.

2- Points de départ et d’extinction du délai d’exercice du droit potestatif

2.1- Le point de départ du délai d’exercice du droit potestatif

En principe, le point de départ du délai d’exercice du droit potestatif est le

moment de la naissance du droit potestatif. Néanmoins, rien n’interdit aux parties de

convenir qu’il en soit distinct. Ainsi, le point de départ de l’exercice du droit

potestatif peut être attaché à la survenance d’une condition ou d’un terme, tant qu’il

n’est pas soumis à un évènement qui dépendrait de la volonté unique de l’une des

parties au contrat.

Le délai suspensif de l’exercice du droit potestatif renvoie à la question du

pacte post mortem, par lequel le bénéficiaire ne pourrait lever l’option qu’après le

décès du promettant. Pendant un temps la jurisprudence censurait une telle

convention, en l’assimilant à un pacte sur succession future prohibé par l’article

1130 alinéa 2 du code civil116

, lequel confère au bénéficiaire un droit éventuel sur

un bien relevant d’une succession non ouverte117

. La Cour de cassation justifiait

cette assimilation au motif que la promesse de vente n’engageait pas le promettant

mais uniquement ses héritiers118

. Par la suite, la jurisprudence a opéré une

116

Article 1130 al.2 c. civ : « On ne peut cependant renoncer à une succession non ouverte, ni faire

aucune stipulation sur une pareille succession, même avec le consentement de celui de la succession

duquel il s'agit, que dans les conditions prévues par la loi. » 117

Cass. civ. 11 janvier 1933, GAJC, 12ème

éd., n° 133-136. 118

Cass. civ. 1re

, 13 octobre 1964, JCP 1965. II. 14170, note R. SAVATIER : dans cet arrêt la Cour

de cassation censure une cour d’appel qui avait considéré que « l'acte litigieux constituait une

promesse de vente déterminée dans son objet comme dans son prix (…) engageant les promettants

immédiatement d'une façon irrévocable », alors même que « le transfert de propriété de l'immeuble

ne pouvait s'effectuer qu'après la mort des promettants » et qu’en conséquence l’acte litigieux

« créait en réalité à la charge de leur succession une obligation dont ils n'étaient pas tenus eux-

mêmes ».

Page 53: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 53 -

distinction entre la promesse post mortem valable, parce que conférant au

bénéficiaire un droit actuel né dès la conclusion de la promesse mais dont l’exercice

est différé jusqu’à l’ouverture de la succession du promettant, et le pacte sur

succession future prohibé octroyant à son bénéficiaire un droit éventuel dans une

succession non ouverte119

. A la signature de la promesse de vente, les parties se sont

entendues sur la chose et sur le prix, et conformément à l’article 1589 du code civil,

« la promesse de vente vaut vente ». Dès lors, le promettant est engagé

« immédiatement et de façon irrévocable »120

à régulariser la vente définitive, il ne

peut plus disposer comme il l’entend du bien promis à la vente. Le bénéficiaire est

quant à lui investi d’un droit d’option « actuel pur et simple », même si l’exigibilité

de ce droit est reportée à la survenance d’un terme121

. La clause stipulant que la

levée d’option ne pourra intervenir qu’au décès du promettant n’a pas pour objet

d’attribuer un droit dans une succession, mais de suspendre l’exercice du droit déjà

né au décès du promettant. En ce sens, elle est exclue du champ d’application des

pactes sur succession future reportant la naissance du droit au décès, et parfaitement

valable.

2.2- Le terme extinctif du délai d’exercice du droit potestatif

Le moment de l’expiration du délai d’exercice du droit potestatif doit

également figurer dans la promesse de contrat, de même que doit être fixé le sort du

contrat à défaut d’émission de choix dans le délai prévu. Il ne s’agit pour autant pas

d’une condition de validité de la promesse, hormis le cas - courant dans la pratique -

du droit de lever l’option dans les promesses de vente (ou d’achat) d’immeuble, de

fonds de commerce ou de parts de société immobilières, dès lors que le contrat est

négocié par une personne physique ou morale se livrant ou prêtant son concours aux

opérations portant sur les biens d’autrui122

.

119

Cass. civ. 1ère

, 30 mai 1985, D. 1986, p. 65, note I. NAJJAR ; Cass. civ. 1ère

, 5 mai 1986, JCP N.

II, 10219, note O. BARRET ; Cass. civ. 1ère

, 6 févr. 1996, D. 1997, p. 369, note I. NAJJAR. 120

Cass. civ. 1ère

, 5 mai 1986, ibid. 121

Cass. civ. 1ère

, 5 mai 1986, ibid. Cette jurisprudence de la Cour de cassation peut être rapprochée

de celle relative à la rétractation du promettant avant la levée de l’option. 122

L’article 7 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités

relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, dispose en effet

que « sont nulles les promesses et les conventions de toute nature relatives aux opérations visées à

l'article 1er qui ne comportent pas une limitation de leurs effets dans le temps. » L’article 1er

vise les

Page 54: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 54 -

La promesse de vente, qui est par essence un contrat intermédiaire, située

entre les pourparlers et le contrat de vente définitif, est en principe conclue pour une

durée déterminée. En l’absence de durée prévue pour exercer un droit potestatif

d’origine conventionnelle, la date d’expiration du droit potestatif est alors le terme

extinctif de la promesse de vente. Il ne survit pas à la caducité du contrat principal.

Dans le silence de la convention, le juge reconnait au promettant la faculté de

mettre en demeure le bénéficiaire d’exercer son droit dans un certain délai,

compatible avec la notion de « délai raisonnable » eu égard à la bonne foi, aux

circonstances et aux usages123

. Néanmoins, s’agissant spécialement du délai pour

lever l’option dans les promesses unilatérales de vente, la Cour de cassation s’est

prononcée en faveur de la validité d’une rétractation par le promettant sans mise en

demeure préalable du bénéficiaire d’accepter ou de refuser la promesse124

. Cette

solution est identique à celle retenue en matière d’offre de contracter.

Lorsque le délai d’exercice du droit potestatif est déterminé par les parties, le

titulaire du droit ne peut exercer celui-ci que dans le délai convenu. En ce qui

concerne le droit d’option du bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente, la

jurisprudence retient qu’en cas d’absence de levée d’option dans le délai fixé par la

convention, le bénéficiaire de la promesse est réputé avoir renoncé à son droit

d’option125

. La promesse devient alors caduque, réserve faite de l’indemnité

opérations suivantes : « 1° L'achat, la vente, l'échange, la location ou sous-location, saisonnière ou

non, en nu ou en meublé d'immeubles bâtis ou non bâtis ; 2° L'achat, la vente ou la location-gérance

de fonds de commerce ; 3° La cession d'un cheptel mort ou vif ; 4° La souscription, l'achat, la vente

d'actions ou de parts de sociétés immobilières donnant vocation à une attribution de locaux en

jouissance ou en propriété ; 5° L'achat, la vente de parts sociales non négociables lorsque l'actif social

comprend un immeuble ou un fonds de commerce ; 6° La gestion immobilière ; 7° A l'exclusion des

publications par voie de presse, la vente de listes ou de fichiers relatifs à l'achat, la vente, la location

ou sous-location en nu ou en meublé d'immeubles bâtis ou non bâtis ; 8° La conclusion de tout

contrat de jouissance d'immeuble à temps partagé régi par les articles L. 121-60 et suivants du code

de la consommation. » 123

Cass. civ, 3ème

, 24 avril 1970, Rép. Defrénois, 1049, obs. J.-L. AUBERT, relatif au droit d’option

dans la promesse unilatérale de vente. 124

Cass. civ, 3ème

, 25 mars 2009, JCP G. 2009. p. 213, note F. LABARTHE. 125

Cass. civ. 1ère

, 15 octobre 1962, Bull.civ. 1962, I, n°418. Cf. également Cass. com. 26 janvier

1993, RTD civ. 1994, p.587, obs. J. MESTRE : La Cour de Cassation, qui affirme dans cet arrêt

« que la renonciation à un droit ne se présume pas et ne saurait s'induire d'un oubli, d'une abstention

ou d'une omission qui ne caractérisent pas une volonté non équivoque de renoncer » retient que le

silence du bénéficiaire d’une cession de parts sociales, après la réception de trois lettres du promettant

Page 55: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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d’immobilisation éventuellement stipulée, et le promettant retrouve son entière

liberté. Dans un arrêt du 1er

juin 1993126

, la chambre commerciale de la Cour de

cassation a toutefois retenu que la levée de l’option postérieure de « quelques jours »

à la date prévue pour les parties au contrat était admissible et non susceptible d’être

analysée comme une « violation suffisamment grave de l’accord», dès lors que le

contrat ne prévoyait pas que « l’échéance du terme (…) serait sanctionnée par la

caducité ou la résolution de l’accord ». Cette solution est critiquable : comment

admettre que le juge puisse, sous prétexte d’interprétation de « la loi du contrat »,

procéder à une extension du délai d’option fixé expressément par les

cocontractants ? Cette solution parait contraire à l’expression de volonté des parties,

et au fait que l’assujettissement du sujet passif doit être circoncis à ce qu’il a lui-

même consenti. Afin de limiter l’interprétation de la convention par le juge,

Monsieur MESTRE recommande au rédacteur de la promesse de vente de préciser

explicitement qu’à défaut de levée d’option dans les délais convenus, la promesse

sera résolue de plein droit ou frappée de caducité.

2.3- La prescriptibilité du droit potestatif conventionnel

La limitation temporelle de l’exercice du droit potestatif pose la question de

sa prescriptibilité qui, comme l’expose Monsieur MALAURIE « mesure les rapports

de l’homme avec le temps et avec le droit : elle domine toutes les règles et tous les

droits. »127

La prescription est un mode d’extinction ou d’acquisition d’un droit (ou d’un

bien) par l’effet du temps. L’ancien article 2219 du code civil définissait la

prescription de façon générale, comme « un moyen d’acquérir ou de se libérer par un

certain laps de temps, et sous les conditions déterminées par la loi ». La loi du 17

juin 2008 portant réforme de la prescription scinde désormais la définition de la

prescription en distinguant précisément selon qu’elle est extinctive ou acquisitive.

L’article 2219 du code civil définit désormais la prescription extinctive comme « un

l’informant de la révocation de la promesse de cession, « démontrait qu'il avait renoncé à se prévaloir

de la promesse de vente à laquelle il n'avait pas donné suite depuis sa conclusion ». 126

Cass. com. 1er

juin 1993, RTD civ. 1994, p 586, obs. J. MESTRE. 127

P. MALAURIE, Avant-projet de réforme CATALA, « Exposé des motifs », p. 171.

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mode d'extinction d'un droit résultant de l'inaction de son titulaire pendant un certain

laps de temps », la prescription acquisitive étant définie à l’article 2258 du code civil

comme « un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans

que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer

l'exception déduite de la mauvaise foi. »

Sans aborder les débats doctrinaux relatifs au fait de savoir si la prescription

extinctive éteint le droit ou seulement l’action en justice128

, nous pouvons constater

que la rédaction de l’article 2219 du code civil retient explicitement une approche

substantielle de la prescription, celle-ci n’éteignant pas le droit d’agir en justice mais

l’existence du droit lui-même129

. A propos du droit d’option, Monsieur NAJJAR

retient qu’il est à l’évidence prescriptible par extinction, mais que la nature de la

prescription est particulière.

L’exercice du droit d’option n’est pas une obligation au sens juridique du

terme mais est nécessaire « parce que la situation antérieure va de toutes manières,

être modifiée »130

, et parce qu’admettre qu’il puisse être imprescriptible serait

contraire à « l’interdiction des clauses frappant d’inaliénabilité perpétuelle un bien

quelconque »131

. Néanmoins, comme le fait remarquer Monsieur NAJJAR dans sa

thèse publiée en 1967, la particularité de la prescription réside ici dans le fait qu’elle

ne s’applique pas à un droit compris dans le domaine légal de la prescription. Ce

constat peut être maintenu, alors même que le droit de la prescription a été

complétement réformé par la loi du 17 juin 2008.

128

Deux thèses s’opposent en doctrine: la thèse processualiste, selon laquelle la prescription

extinctive emporte uniquement l’extinction de l’action en justice, et la thèse substantialiste selon

laquelle la prescription extinctive éteint le droit substantiel. 129

Cf. toutefois C. GRIMALDI, La durée des droits : péremption ou prescription ? Approche

empirique, D. 2012, p.514. Pour l’auteur, il faut distinguer entre la péremption d’un droit et sa

prescription : la première met fin au droit substantiel alors que la seconde éteint le droit d’agir en

justice pour faire reconnaître le droit substantiel lésé. Pour l’auteur, la durée du droit et sa péremption

sont choisis par les parties au contrat, alors que le délai de prescription est fixé par la loi et peut être

aménagé par les parties dans les conditions fixées par la loi. Ainsi si l’on transpose le raisonnement à

une promesse de vente consentie pour un délai indéterminé, celle-ci sera caduque après mise en

demeure du bénéficiaire par le promettant, la prescription s’appliquant seulement à l’action en justice

menée par le bénéficiaire en cas de violation supposée de l’engagement du promettant. 130

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°109. 131

I. NAJJAR, ibid., n°181.

Page 57: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 57 -

Avant la réforme du droit de la prescription, l’article 2262 du code civil

énonçait à propos de la prescription extinctive que « toutes les actions, tant réelles

que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette

prescription soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception

déduite de la mauvaise foi. » La prescription s’applique alors aux actions par

lesquelles le détenteur d’un droit réel ou d’un droit de créance exige la

reconnaissance de son droit par celui qui lui doit la prestation. Or, comme nous

l’avons déjà indiqué précédemment132

, le droit potestatif n’est ni un droit réel, ni un

droit de créance. Le sujet passif au lien de sujétion n’est pas obligé à une quelconque

action mais est assujetti tant que dure le droit potestatif, et il est libéré sans que ne

subsiste aucun devoir à la réalisation d’une prestation dès lors que le droit potestatif

n’a pas été exercé dans le délai. De plus, le droit potestatif ne porte ni directement

sur une chose, ni directement contre une personne ou son patrimoine, mais sur une

situation juridique133

.

Néanmoins, affirmer que le droit potestatif est prescriptible par extinction

consistait à constater avant la loi du 17 juin 2008 qu’il s’éteignait par trente ans, la

question de la nature du droit important peu en réalité à cet égard, puisque le délai de

prescription commun était identique pour les actions réelles et personnelles.

La rédaction, issue de la loi du 17 juin 2008, de l’article 2219 du code civil

n’exclut pas d’emblée le droit potestatif des catégories de droit susceptibles d’être

prescriptibles par extinction. Néanmoins, la réforme de 2008 retient que la

prescription extinctive s’applique aux « actions personnelles ou mobilières » par

l’écoulement du nouveau délai de droit commun réduit à cinq ans , et aux « actions

réelles immobilières » par l’écoulement d’un délai particulier de trente ans. Si le

droit potestatif est un droit prescriptible par voie d’extinction, il ne répond toujours

pas aux catégories des actions visées par la loi, qu’elles soient fondées sur la nature

du droit en présence (personnel ou réel), ou sur la nature de l’objet réclamé (mobilier

ou immobilier). Ainsi le code civil n’est pas plus favorable qu’avant la réforme de

2008 à l’admission du droit potestatif dans les catégories des droits prescriptibles.

132

Cf. supra, p. 26 et suiv. 133

Cf. infra, en seconde partie les développements consacrés à la modification de la situation

juridique, p. 107 et suiv.

Page 58: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 58 -

Pourtant, en raison de l’assujettissement du sujet passif pendant toute la durée

d’existence du droit potestatif, il nous semble qu’il convient de considérer le droit

potestatif aux côtés du droit personnel et de le soumettre à une prescription

quinquennale de droit commun. Ce délai commun de la prescription extinctive peut

être aménagé par les parties au contrat, dans les conditions posées à l’article 2254 du

code civil : « la durée de la prescription peut être abrégée ou allongée par accord des

parties. Elle ne peut toutefois être réduite à moins d’un an ni étendue à plus de dix

ans. » 134

Enfin, si le point de départ de la prescription du droit potestatif n’est pas

défini par les parties au contrat, il sera fixé selon les termes de l’article 2224 du code

civil au « jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui

permettant de l’exercer ». La formulation légale du point de départ de la prescription

se réfère au moment à partir duquel le droit peut être exercé, par suite de la

connaissance qu’acquiert son titulaire de la possibilité qu’il a d’en user

effectivement. Ainsi, le point de départ du délai à l’expiration duquel le droit

potestatif ne peut plus être exercé se situe au moment où il devient « actuel », c’est-

à-dire non pas au moment où il prend naissance mais au moment à partir duquel il

peut être exercé et que cette possibilité est connue de son titulaire. Cette définition

du point de départ de l’exercice du droit potestatif retiendra notre attention lorsqu’il

s’agira notamment d’analyser le délai d’exercice du droit de préférence135

.

Le pouvoir du titulaire du droit potestatif est ainsi encadré par les termes du

choix qu’il doit exercer, et par la durée dans lequel le choix doit être exercé. Cet

encadrement ne réduit pas le caractère absolu de l’exercice du droit potestatif, mais

limite habilement la soumission du sujet passif.

En pratique, les contrats de promesse de vente contiennent plusieurs droits

potestatifs, d’origine légale ou/et conventionnelle, ce qui aboutit à l’instauration

d’un ensemble complexe de délais dissemblables pour agir : délai pour accepter la

promesse en tant que telle, délai pour opter, délai pour substituer une personne dans

le bénéfice du contrat, délai pour se rétracter, délai pour la réalisation d’une

condition suspensive, délai pour renoncer à une condition défaillie ou non…

134

Cela revient à fixer un délai maximum d’option. 135

Cf. infra, p.114-115

Page 59: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 59 -

Si tous les droits potestatifs contenus dans la promesse de vente reposent

quant à leur exercice sur la règle générale de l’émission d’un choix dans un délai

déterminé, ils doivent aussi tous pouvoir s’exercer dans la durée - plus ou moins

brève - de validité du contrat. Ils s’exercent donc en pratique dans des délais

identiques, juxtaposés ou superposés. L’interaction entre les délais imposés pour

l’exercice des droits potestatifs n’est pas sans incidence sur la détermination

définitive de leur durée.

II – Interaction des délais d’exercice des droits potestatifs

La coexistence de certains droits potestatifs, qu’ils soient d’origine légale ou

d’origine conventionnelle, peut être problématique en raison du temps qu’ils

partagent pour leur exercice.

La renonciation à la condition suspensive suppose en principe que la

condition existe au jour de la renonciation, ce qui pose la question du délai pour

renoncer et celle, subséquente, de la possibilité de renoncer à une condition défaillie.

Seule la renonciation par le cocontractant en faveur duquel la condition a été stipulée

nous intéressera ici, puisque seule celle-ci a le caractère d’un droit potestatif (A).

L’étude de l’exercice combiné de certains droits contenus dans un même contrat

permet de mettre en lumière l’importance de la prévision de leur durée par rapport à

un ensemble contractuel (B).

A - Le délai pour renoncer à une condition suspensive

La condition est définie comme « un événement futur et incertain dont

dépend l’existence d’une obligation. La condition suspensive retarde la naissance de

l’obligation tandis que la condition résolutoire provoque sa disparition

rétroactive »136

.

136

V. pour une explication du mécanisme de la condition suspensive, 94ème

Congrès des Notaires de

France, Le contrat, première commission « la formation du contrat », p. 149.

Page 60: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 60 -

L’insertion de conditions suspensives dans le contrat de promesse est

ordinaire, voire normale, puisqu’en leur absence il n’y aurait pratiquement pas lieu

de signer un avant-contrat, et l’on pourrait envisager la conclusion immédiate de

l’acte de vente définitif137

. En pratique, les conditions suspensives les plus

fréquemment rencontrées sont celles relatives à l’obtention d’un prêt destiné au

financement de l’acquisition, à la justification d’une origine de propriété régulière, à

l’obtention d’un permis de construire, réserve faite des conditions suspensives dont

l’objet ne devrait théoriquement pas être érigé en condition puisque portant sur un

élément essentiel du contrat de vente138

. Le mécanisme de la condition suspensive

est simple : soit la condition suspensive se réalise et le contrat qui la contient est

consolidé, soit elle défaille et le contrat est caduc. En présence de plusieurs

conditions suspensives, la défaillance de l’une d’entre-elles entraîne en principe la

caducité du contrat dans son ensemble et chacune des parties peut s’en prévaloir139

.

1- L’admission de principe de la possibilité de renoncer à une condition

suspensive pendente

La jurisprudence admet que le contractant en faveur de qui la condition

suspensive a été stipulée puisse y renoncer unilatéralement dès lors qu’elle est

pendente conditione, c’est-à-dire tant que la réalisation de la condition est en

suspens140

. Le contrat prévoit généralement d’ailleurs cette possibilité, par

l’indication que le bénéficiaire pourra renoncer à la condition suspensive stipulée à

son profit, le délai de renonciation étant identique à celui fixé pour la réalisation de

ladite condition. Comme le note Madame WITTMANN, reconnaître que l’une des

parties au contrat puisse renoncer unilatéralement à se prévaloir du bénéfice de la

condition suspensive stipulée dans son intérêt suppose d’admettre la légitimité

137

Du moins en ce qui concerne le contrat de promesse synallagmatique de vente. 138

B. NUYTTEN, L. LESAGE, 94ème

Congrès des Notaires de France, ibid., p. 156 : il s’agit

notamment de la condition de réitération par acte authentique et de paiement du prix, de la condition

suspensive de la purge du droit de préemption urbain, de l’autorisation du juge des tutelles. 139

A propos de la défaillance de la condition suspensive d’un permis de construire, Cass. civ. 3ème

,

13 juillet 1999, RDI, 1999, p.666, note J.-C. GROSLIERE. 140

Egalement à propos d'une condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire, Cass. civ.

3ème

, 22 mai 1970, Bull. III n° 357 ; Cass. civ, 3ème

, 13 juillet 1999, Bull. civ. III, n° 179. Seule la

partie dans l’intérêt de qui la condition suspensive a été stipulée peut se prévaloir de la défaillance de

la condition : Cass. civ. 3

ème, 20 juin 2006, n° 05-12319.

Page 61: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 61 -

« d'un droit unilatéral conféré à cette dernière, lui permettant d'imposer la conclusion

du contrat définitif ou d'y renoncer»141

.

La renonciation à la condition pendente s’analyse en un droit potestatif. Le

choix du titulaire du droit potestatif porte alors sur l’alternative suivante, clairement

définie : soit il accepte le jeu de la condition suspensive - et ses conséquences sur le

contrat, variables selon que la condition se réalise ou non -, soit il refuse le bénéfice

de la clause pendente conditione stipulée dans son intérêt, et ce choix unilatéral

modifie la nature du contrat qui devient pur et simple au lieu d’être conditionnel (ou

en voie de disparition si la non-réalisation de la condition se profile). Les effets du

choix sont inversés par rapport à un droit d’option d’achat : ici c’est la décision de

refuser le bénéfice de la condition qui consolide le contrat. La renonciation à la

condition pendente met fin à l’expectative caractérisant la situation juridique

antérieure à son exercice. Le cocontractant est tenu de constater la modification de la

situation juridique découlant de l’exercice de ce droit de renonciation, et ne peut pas

s’y opposer. Pour Monsieur VALORY si le droit de renoncer au bénéfice d’une

condition pendente est bien un droit potestatif, il ne s’exerce pas par le biais d’un

droit d’option puisque « son titulaire n’est nullement dans l’obligation de prendre

parti dans un sens ou dans l’autre avant la dissipation de l’incertitude »142

. Pourtant

il apparaît que, de fait, le bénéficiaire exclusif d’une condition suspensive choisit de

se prévaloir ou non de la clause insérée dans le contrat. Il est exact qu’il n’est pas

obligé de prendre matériellement parti, mais le droit d’option ne comporte pas une

« obligation » d’opter. S’il n’opère pas un choix, la clause de renonciation subsiste,

et le contrat initial n’est pas modifié. L’absence de choix explicite produit donc un

effet similaire à celui d’opter pour la poursuite de la condition suspensive.

Seulement le titulaire du droit de renoncer à la condition suspensive n’a pas besoin

d’opter pour son maintien, parce que le contrat contient déjà son consentement au

bénéfice de la condition suspensive. Lorsque la condition suspensive risque de

défaillir, le choix du bénéficiaire est plus explicite : en s’abstenant de renoncer à la

condition suspensive, il choisit de se prévaloir de la caducité automatique du contrat.

S’il veut réaliser le contrat définitif alors que le délai fixé pour la réalisation de la

141

V. WITTMANN, La renonciation unilatérale à la défaillance de la condition suspensive dans les

promesses de vente : à la recherche d’un équilibre contractuel, D. 2012, p. 301. 142

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n° 273.

Page 62: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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condition suspensive n’est pas expiré et que l’incertitude liée à sa réalisation n’est

pas dénouée, il est obligé de renoncer à ladite condition. Dans ce cas, il est obligé de

prendre définitivement parti. Il peut donc y avoir nécessité d’opter dans un délai

déterminé.

L’exercice de la renonciation à la condition avant le terme fixé pour constater

sa réalisation ou sa défaillance ne pose pas vraiment de difficulté. Elle est d’ailleurs

consacrée dans l’avant-projet de réforme CATALA, avec la proposition d’insertion

dans le code civil d’un article 1178 disposant que « La partie dans l'intérêt exclusif

de laquelle la condition est stipulée est libre d'y renoncer unilatéralement, tant que la

condition n'est pas accomplie. Jusqu'à ce moment, les parties peuvent également,

d'un commun accord, renoncer à la condition stipulée dans l'intérêt de chacune.

Toute renonciation rend l'obligation pure et simple».143

2- La renonciation à la condition suspensive postérieurement à sa

défaillance

La question de la renonciation à la défaillance de la condition suspensive est

plus complexe. La défaillance de la condition suspensive doit être constatée, comme

le dispose l’article 1176 du code civil, « lorsque le temps est expiré sans que

l'événement soit arrivé. » Lorsque la condition défaille, le contrat qui la contient est

en principe inéluctablement anéanti.

Est-il possible d’admettre que le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de

vente, en faveur de qui était stipulée la condition suspensive qui a défailli, puisse

encore lever l’option dès lors que le délai pour opter n’est pas écoulé ?

2.1- Les effets induits par la défaillance de la condition suspensive

La défaillance de la condition suspensive devrait faire échec à la levée

d’option, parce que l’existence de celle-ci dépend inévitablement de la validité du

143

Avant-projet CATALA, op cit. Pour une analyse de la modalité conditionnelle dans le projet de

réforme, v. M. BOUTEILLE, Regard critique sur la modalité conditionnelle dans l'avant-projet de

réforme du droit des obligations et de la prescription, D. 2008, p. 1848.

Page 63: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 63 -

contrat de promesse. Le droit d’option d’achat n’est pas censé avoir davantage existé

que le contrat de promesse qui l’inclut, et cela ne dépend pas de la volonté du

bénéficiaire mais de la survenance de la non-réalisation de la condition suspensive.

Dès lors que le contrat est éteint, le bénéficiaire n’a plus le pouvoir de renoncer à la

condition suspensive, parce qu’elle-même a disparu. Il pourrait vouloir renoncer à la

caducité du contrat, mais il est exclu qu’une partie puisse ranimer par sa seule

volonté un contrat éteint. La renonciation à la caducité du contrat par le bénéficiaire

ne peut pas produire effet sans l’accord du promettant, par le biais de la

formalisation d’un nouvel accord. Dans ce cas, la doctrine considère généralement

qu’une novation du contrat pourra s’opérer144

. Monsieur NUYTTEN, en s’exprimant

au cours d’un colloque sur le thème « Durées et contrats », note que si les parties

entendent signer l’acte de vente selon les prévisions du contrat préparatoire, il n’est

pas possible de nier les effets de la défaillance de la condition suspensive. Cette

situation fait ressurgir de nouveau « la question de la durée » avec celle de la purge

du droit de rétractation ou de réflexion imposée par l’article L. 271-1 du code de la

construction et de l’habitation : « on doit donc se poser la question de savoir si la

purge du droit de rétractation, effectuée au vu de l’avant-contrat, n’a pas disparu

avec le contrat lui-même, et s’il ne faut pas faire précéder la signature de l’acte

authentique de la purge du délai de réflexion. »145

Dans ce cas, la défaillance de la

condition suspensive entraînerait la création d’un nouveau droit potestatif de

rétractation au profit du bénéficiaire du contrat, dès lors que les parties souhaitent

poursuivre la vente.

2.2- La solution jurisprudentielle

La Cour de cassation a reconnu à plusieurs reprises que la renonciation à la

condition suspensive stipulée en faveur d’un cocontractant donnait naissance à un

nouveau contrat146

. Mais elle a aussi jugé que les cocontractants pouvaient

poursuivre le contrat originaire en renonçant d’un commun accord à invoquer la

caducité du contrat de promesse survenue suite à la défaillance de la condition

144

Cf. J.-J TAISNE, Contrats et obligations, J.CL. Not.-Rép., fasc. 44 à 46 ; cf. en ce sens, Cass.

com, 10 janvier 1978, Bull. civ. IV, n°19. 145

RDC. 2004, numéro spécial, colloque « Durées et contrats », p.187. 146

V. Cass. civ. 1ère

, 27 mai 1964.

Page 64: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 64 -

suspensive147

. Elle a surtout conféré au bénéficiaire d’une condition suspensive la

possibilité de renoncer unilatéralement aux conséquences juridiques de la défaillance

de cette condition. C’est ainsi que dans un arrêt du 12 avril 1995148

, la troisième

chambre civile de la Cour de cassation retient que la défaillance d’une condition

stipulée dans l’intérêt exclusif du bénéficiaire d’une promesse de vente n’empêche

pas celui-ci de lever l’option dans le délai fixé par la promesse. En l’espèce, une

promesse unilatérale de vente avait été conclue pour une durée déterminée,

susceptible de prorogation en cas de non-communication par le promettant de

l’ensemble des pièces du dossier, et sous la condition suspensive de l’obtention d’un

prêt destiné au financement de l’acquisition. Le bénéficiaire lève l’option dans le

délai de prorogation de plein droit de la promesse, mais le promettant refuse de

régulariser l’acte de vente. Le bénéficiaire assigne alors le promettant en justice pour

faire juger qu’il avait valablement levé l’option. La Cour d’appel constate que la

levée de l’option est intervenue dans les délais et fait droit aux prétentions du

bénéficiaire. Le promettant fait valoir dans son pourvoi que la Cour d’appel aurait

dû rechercher si la non-obtention du prêt dans le délai stipulé n'avait pas rendu la

promesse caduque avant la levée de l'option. La Cour de cassation rejette le pourvoi

en retenant que la promesse n’était pas expirée au jour de la levée de l’option et que

ce simple constat ne rendait pas nécessaire la recherche de la défaillance de la

condition suspensive.

Outre que la troisième chambre de la Cour de cassation confond prorogation

de la promesse de vente et prorogation du droit de lever l’option, elle suggère que la

levée de l’option pourrait valoir en quelque sorte renonciation à la défaillance de la

condition suspensive, alors que le délai pour s’en prévaloir est expiré et que le

contrat devrait être atteint de caducité. Précisons que rien dans la loi du 13 juillet

1979 ne permet de penser que la défaillance de la condition suspensive d’obtention

d’un prêt puisse déroger à la règle de la caducité du contrat posé à l’article 1176 du

code civil149

. La solution de la Cour de cassation peut uniquement se justifier en

147

V. Cass. civ. 1ère

, 24 octobre 1978, Bull. civ. I, n° 321. 148

Cass. civ. 3ème

, 12 avril 1995, D. 1996, p. 286, note O. STAES. 149

La loi n° 79-596 du 13 juillet 1979, relative à l’information et à la protection des emprunteurs dans

le domaine immobilier, a été codifiée sous les articles L. 312-1 et suivants du code de la

consommation. L’article L. 312-16 relatif à la condition suspensive de l’obtention d’un prêt,

obligatoire pour tous les contrats portant sur les opérations visées à l’article L 312-2 ne vise que le

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l’absence de délai fixé pour la constatation de la réalisation de la condition

suspensive d’obtention de prêt, l’article 1176 du code civil prévoyant que « s'il n'y a

point de temps fixe, la condition peut toujours être accomplie ; et elle n'est censée

défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas », c’est-à-

dire si la condition est encore pendente. Or, en l’espèce, les délais encadrant la

condition suspensive de l’obtention d’un prêt avaient été nettement arrêtés. De plus,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation a adopté la même solution dans

un arrêt du 12 janvier 2010, à propos d’une condition suspensive d’obtention de

permis de construire, alors même qu’il était patent qu’aucune démarche aux fins

d’obtenir l’autorisation d’urbanisme n’avait été entreprise par le contractant en

faveur duquel la condition avait été stipulée150

. On peut d’ailleurs s’étonner de

l’absence de recours à l’article 1178 du code civil pour sanctionner la passivité du

bénéficiaire, lequel article dispose que « la condition est réputée accomplie lorsque

c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché

l'accomplissement. »151

2.3- Les conséquences de la solution jurisprudentielle

La conséquence de cette solution jurisprudentielle est que la défaillance de la

condition suspensive n’a aucun effet sur le contrat de promesse, et aucun impact sur

l’obligation du promettant de vendre le bien promis si le bénéficiaire lève l’option

dans les délais impartis. D’ailleurs, dans un arrêt du 6 février 1996152

, la chambre

commerciale de la Cour de cassation admet directement que la renonciation à la

défaillance de la condition suspensive n’entraine pas caducité automatique de la

promesse de vente contenant la stipulation conditionnelle. Dans cet arrêt, elle a

considéré que lorsque les acquéreurs ont renoncé à la défaillance de la condition

stipulée dans leur intérêt exclusif, le délai d’action en nullité d’une cession de fonds

de commerce prévu à l’article 12 de la loi du 29 juin 1935 commence à courir au

jour de la signature de la promesse de vente et non au jour où les acquéreurs ont

délai de validité de la condition suspensive, qui ne peut être inférieure à un mois « à compter de la

date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la

formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement. ». 150

Cass. civ. 3ème

, 12 janvier 2010, Bull. civ. III, n°6. 151

V. WITTMANN, D. 2012, p. 301, op.cit. 152

Cass. com., 6 février 1996, JCP N. 1996, p. 1662, note B. PETIT.

Page 66: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 66 -

renoncé aux conséquences juridiques de la défaillance de la condition défaillie

stipulée en leur faveur.

Dans un arrêt du 19 octobre 2011, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation153

a néanmoins jugé que la renonciation à la défaillance de la condition

suspensive contenue dans une promesse synallagmatique de vente entraînait caducité

du contrat dès lors que le contractant dans l’intérêt duquel la clause avait été stipulée

n’avait pas justifié d’y avoir « satisfait ou renoncé (…) dans le délai contractuel ».

Dans cet arrêt, la renonciation était intervenue à une date postérieure à celle fixée

pour la régularisation de l’acte authentique de vente, constituant le point de départ

de l'exécution forcée du contrat, et c’est à ce titre qu’elle est invalidée154

. Dans un

arrêt du 29 mars 2011, la troisième chambre civile de la Cour de cassation reprend

cette solution mais le « délai contractuel » visait cette fois le délai fixé pour la

réalisation de la condition suspensive. A l’issue de ces arrêts, si la Cour de cassation

ne semble pas abandonner la jurisprudence selon laquelle il est possible de renoncer

unilatéralement à la défaillance d’une condition suspensive sans que celle-ci n’opère

caducité du contrat, elle semble restreindre progressivement la durée de l’option

qu’elle confère au contractant en faveur duquel une condition suspensive a été

stipulée : ce dernier peut renoncer aux conséquences de la défaillance de la

condition, mais cette renonciation doit intervenir dans le délai fixé pour la réalisation

de la condition.

La renonciation à la défaillance de la condition suspensive par le

cocontractant en faveur duquel elle a été stipulée fait naître un nouveau droit

potestatif 155

peut-être non prévu par les parties lorsqu’elles ont régularisé le contrat

de promesse, et conférant à son titulaire un nouveau droit d’option portant sur les

alternatives suivantes : soit choisir l’anéantissement du contrat, soit de faire revivre

153

Cass. civ. 3ème

, 19 octobre 2011, AJDI 2012, p.63. La troisième chambre civile de la Cour de

cassation a retenu pour une promesse unilatérale de vente que le bénéficiaire d’une condition

suspensive pouvait renoncer à sa défaillance et lever l’option tant que la promesse était maintenue.

Précisons que la réalisation de la condition suspensive devait intervenir dans le délai fixé pour lever

l’option d’achat, si bien que la solution est à rapprocher de celle dégagée par l’arrêt du 29 mars 2011.

V. également Cass. civ. 3ème

, 13 octobre 1999, JCP G. 2000. I. 237, note J. ROCHFELD. 154

Cass. civ. 3ème

, 29 mars 2011, pourvoi n° 10-14.664. 155

La qualification en droit potestatif est reconnu par une partie de la doctrine, cf. V. WITTMANN

qui s’interroge sur le de fait de savoir si « défaillance de la condition ne constitue pas un droit

potestatif de résiliation », op. cit. ; également B. PETIT, note suivante.

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un contrat théoriquement éteint. Comme le fait remarquer Monsieur PETIT156

« à la

question « suis-je engagé par le contrat ? », la réponse n’est plus « oui ou non, cela

dépend de la réalisation de la condition suspensive » mais « oui si la condition

suspensive se réalise et, sinon, si je veux ». Ce constat n’est pas sans rappeler la

position défendue par la Cour de cassation, pour qui le bénéficiaire de la condition

non réalisée n’« a pour seule alternative que de se prévaloir de la caducité de la

promesse ou d’y renoncer et des poursuivre la vente aux conditions initiales »157

. Si

la renonciation à la défaillance de la condition par son bénéficiaire exclusif constitue

bien un droit potestatif d’option, son exercice doit être encadré dans un délai,

notamment en raison de l’assujettissement du cocontractant. Le délai d’exercice du

droit potestatif n’a pas pour objet de tempérer l’intensité du pouvoir du titulaire du

droit potestatif, mais de circonscrire la soumission du sujet passif à un temps précis.

Dans un arrêt en date du 28 avril 2011158

, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation admet d’ailleurs que si la condition suspensive d’obtention est stipulée

dans l'intérêt d’une partie au contrat, le délai de réalisation de la condition est « en

revanche stipulé dans l'intérêt des deux parties » si bien que la renonciation doit

« intervenir dans le délai fixé pour sa réalisation ».

B - L’exercice combiné des droits potestatifs

Ainsi qu’indiqué précédemment159

, pour être valable l’exercice du droit

potestatif ne doit pas être assorti d’une condition si celle-ci n’a pas été prévue dans

le contrat de promesse ou dictée par la loi. Si des conditions suspensives sont

stipulées au contrat, quel est l’impact de la durée laissée à leur réalisation sur la

levée d’option ? En d’autres termes, le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de

vente peut-il lever l’option d’achat qui lui est conférée alors que le contrat de

promesse est encore suspendu à la réalisation de certaines conditions ? De la même

manière, peut-il opter pour la vente alors que le délai imposé pour l’exercice de la

faculté légale de rétractation n’est pas expiré ?

156

B. PETIT, Conséquences de la renonciation par le bénéficiaire d’une promesse de vente à une

condition suspensive, JCP N., n°48, p.1662. 157

Cass. civ. 3ème

, 31 mars 2005, RTD. civ. 2006, p. 775, obs. J. MESTRE et B. FAGES. 158

Cass. civ. 3ème

, 28 avril 2011, pourvoi n° 10-15.630. 159

Cf. supra, p. 47.

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1- L’articulation du droit d’option avec la faculté légale de rétractation

L’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation confère à

l’acquéreur non-professionnel de l’immobilier ayant conclu un acte relatif à la

construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, le pouvoir de « se

rétracter dans un délai de sept jours à compter du lendemain de la première

présentation de la lettre lui notifiant l’acte.» Le législateur n’a pas défini le terme de

« rétractation » si bien que la doctrine s’est interrogée sur la nature juridique de ce

droit, et notamment sur la question de savoir s’il s’agissait d’un droit unilatéral de

retirer le consentement déjà donné et donc assimilable au repentir, ou s’il retardait la

formation du contrat. Dans un arrêt du 13 février 2008, la troisième chambre civile

de la Cour de cassation160

a clairement pris position sur la nature du droit de

rétractation de l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation, en le

qualifiant de droit de repentir ayant « entraîné l'anéantissement du contrat » par son

exercice.

Le droit légal de rétractation apparaît être un droit potestatif d’option

puisqu’il confère à son bénéficiaire le « pouvoir de modifier la situation juridique en

anéantissant un contrat valablement formé »161

. L’alternative contenue dans l’option

est alors de poursuivre le contrat ou d’y mettre fin.

La faculté légale de rétractation s’applique à la conclusion d’une promesse

unilatérale de vente d’immeuble, c'est-à-dire à l’acceptation de la promesse en tant

que telle par le bénéficiaire et non pas à la levée de l’option. La levée de l’option

peut-elle intervenir, alors que l’acceptation de la promesse par le bénéficiaire est

encore sous réserve du non-exercice de la faculté légale de rétractation ? La levée de

l’option pendant le délai de rétractation peut-elle entrainer renonciation à la faculté

de rétractation ?

160

Cass. civ. 3ème

, 13 février 2008, RTD. civ. 2008, p. 293, obs. B. FAGES. 161

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n° 295. Pour R.

BAILLOD, le droit de repentir, RTD. civ. 1984, p. 227, le droit de rétractation est un droit potestatif

conférant à son titulaire le droit « d’empêcher la formation du contrat ».

Page 69: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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Le bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente ne peut pas renoncer au

bénéfice du délai de rétractation, qui est d’ordre public.

Si l’on retient la thèse selon laquelle la promesse de vente n’est pas encore

définitivement acceptée tant que le délai de rétractation n’est pas expiré, le droit

d’option qui y est inhérent ne l’est pas davantage. Or, en levant l’option, le

bénéficiaire consent à la vente définitive et accepte donc de facto le bénéfice de la

promesse de vente dans un délai non permis par la loi. Le délai légal de rétractation

serait alors suspensif du délai d’option. En ce sens, il n’altèrerait pas la durée de la

promesse de vente mais diffèrerait le point de départ du délai d’option.

Il n’existe pas à notre connaissance de jurisprudence relative à la

combinaison des délais pour l’exercice de la faculté légale de rétractation et de la

levée d’option. Néanmoins, il nous semble que la levée de l’option peut intervenir

pendant le délai de la faculté légale de rétractation, sous la réserve expresse du non-

exercice du droit de rétractation. La levée d’option pendant l’écoulement du délai

légal de rétractation transforme la promesse unilatérale de vente en promesse

synallagmatique de vente, mais le bénéficiaire reste titulaire du droit de se rétracter

pendant le délai légal. L’exercice du droit de rétractation anéantirait la levée de

l’option préalablement intervenue. Cette solution est conforme à l’arrêt du 13 février

2008 précité, et aux exigences légales relatives au délai de rétraction.

2- La combinaison des délais du droit d’option et de la réalisation de la

condition suspensive de prêt

La promesse unilatérale de vente est généralement conclue sous diverses

conditions suspensives, dont celle de l’obtention d’un prêt. Même si elle n’est pas

prévue par le contrat, le bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente d’immeuble

peut se prévaloir de cette condition suspensive, dès lors qu’il n’a pas expressément

renoncé à son application et que le contrat entre dans le champ d’application des

articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation.162

La condition suspensive

162

L’article L. 312-2 du code de la consommation fixe le champ d’application de la protection

légale : « Les dispositions du présent chapitre s'appliquent aux prêts qui, quelle que soit leur

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de l’obtention d’un prêt s’applique à la promesse de vente acceptée, et non à la levée

de l’option, ce qui est d’ailleurs clairement affirmé par les articles L. 312-15 du code

de la consommation. La levée d’option peut-elle être exercée valablement pendant

l’écoulement du délai de la condition suspensive ?

La jurisprudence et la doctrine s’accordent pour retenir que la réalisation de

la dernière des conditions suspensives stipulées dans la promesse unilatérale de

vente est le point de départ à partir duquel le bénéficiaire peut lever l’option, ce que

certains justifient par le fait que « l'option n'existe pas tant que la condition est

pendante »163

. Dans un arrêt du 27 février 1999, la troisième chambre civile de la

Cour de cassation affirme ainsi que sauf renonciation au bénéficie de la réalisation

des conditions suspensives contenues dans une promesse unilatérale de vente, la

levée de l’option ne peut intervenir que lorsque toutes les conditions suspensives

sont réalisées.164

En conséquence, si l’on réserve une lecture stricte à cette

jurisprudence, le bénéficiaire de la promesse de vente conclue sous la condition

suspensive de l’obtention d’un prêt ne pourrait pas lever l’option tant qu’il n’aurait

pas obtenu le financement nécessaire à l’acquisition qu’il projette, quand bien même

il lèverait l’option sous la condition suspensive de l’obtention d’un prêt. Il serait lui-

qualification ou leur technique, sont consentis de manière habituelle par toute personne physique ou

morale en vue de financer les opérations suivantes :

1° Pour les immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation:

a) Leur acquisition en propriété ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant

vocation à leur attribution en propriété, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre

la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi acquis;

b) Leur acquisition en jouissance ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant

vocation à leur attribution en jouissance, y compris lorsque ces opérations visent également à

permettre la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi

acquis;

c) Les dépenses relatives à leur réparation, leur amélioration ou leur entretien lorsque le montant du

crédit est supérieur à 75 000 € ;

d) Les dépenses relatives à leur construction ;

2° L'achat de terrains destinés à la construction des immeubles mentionnés au 1° ci-dessus.

L’article L. 312-3 alinéa 2 du code de la consommation, exclut du champ d’application de la

protection légale, les prêts « destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité

professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même

accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce

soit, des immeubles ou fractions d'immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels,

en propriété ou en jouissance ». 163

M. MIGNOT, J.- CL civil code, fasc. vente, n°110 ; Cf. également O.STAES, D. 1996, p.286, op.

cit., n°5 : « La promesse étant conclue sous la condition suspensive de l'obtention du prêt, le

bénéficiaire ne devrait pouvoir lever l'option qu'après la réalisation de la condition puisque, pendente

conditione, le droit n'est pas encore né. » 164

Cass. civ. 3ème

, 27 février 1999 ; I. NAJJAR, Le point de départ de l'action en rescision d'une

vente conclue sur une levée d'option sous condition, D. 2000, p.38.

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même assujetti dans l’exercice du droit potestatif d’option. Enfin, en raison du délai

minimum légal laissé pour la réalisation de la condition suspensive d’obtention d’un

prêt, le délai d’option ne pourrait pas être inférieur à celui d’un mois à compter de la

signature de la promesse, ou de l’enregistrement de la promesse si elle est conclue

sous seings privés.

La condition suspensive de l’obtention d’un prêt n’a pas pour objet de

reporter la naissance du droit potestatif à sa réalisation, mais d’anéantir le contrat si

sa défaillance est constatée. Le droit d’option est un droit né et actuel dès la

signature de la promesse de vente. Aussi, il nous semble que l’exercice du droit

d’option peut avoir lieu pendant le délai de réalisation de la condition suspensive,

mais que ses effets sont alors suspendus à la levée de la condition165

. Dans ce cas,

conformément au régime juridique de la condition, la réalisation de la condition

suspensive entraînera la formation rétroactive de la vente définitive au jour de la

levée de l’option. Si l’on raisonne en termes de refus d’opter, cette solution parait

logique : le bénéficiaire n’est pas tenu d’attendre l’expiration du délai de réalisation

de la condition suspensive pour refuser d’acquérir le bien. Néanmoins, en pratique, il

aura tout intérêt à attendre la défaillance de la condition suspensive de l’obtention du

prêt - voire de provoquer cette défaillance - afin de se voir restituer l’indemnité

d’immobilisation versée lors de la conclusion du contrat de promesse.

En l’absence de délai fixé dans la promesse de vente pour la réalisation de la

condition suspensive de l’obtention d’un prêt, la doctrine s’est divisée sur le point de

savoir si c’est le délai minimum fixé par la loi qui doit être appliqué, ou s’il y a lieu

de considérer que la condition peut toujours être accomplie tant qu’il n’est pas

devenu certain que l’événement n’arrivera pas, en application de l’article 1176 du

code civil. Certains auteurs ont également proposé que « le vendeur mette en

demeure l'acquéreur d'effectuer les démarches d'obtention dans un délai

raisonnable. »166

. Dans un arrêt du 29 novembre 2011, la troisième chambre civile

de la Cour de cassation167

a retenu que « la réalisation des conditions suspensives

165

M. DAGOT, La levée d’option conditionnelle, op.cit., n°23. 166

D. MAZEAUD et S. PIEDELIÈVRE, Crédit immobilier, Rép. civ. Dalloz. 167

Cass. civ. 3ème

, 29 novembre 2011, pourvoi n° 10-25.258, Dalloz jur.

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stipulées dans un acte de vente168

est nécessairement soumise au délai de réalisation

de l'acte authentique lui-même, en l’absence de délai plus bref ». On peut déduire de

cette solution que si aucun délai n’est fixé dans la promesse unilatérale de vente

pour la réalisation de la condition suspensive d’obtention de prêt, le bénéficiaire peut

se prévaloir de la condition jusqu’au terme du délai fixé pour lever l’option. Et

observer que si la levée de l’option doit intervenir dans un délai commençant à

courir à compter de la réalisation de la dernière condition suspensive, il reste peu de

temps pour lever l’option !

Enfin notons que le législateur n’a pas précisé ce qu’il fallait entendre par

« l’obtention d’un prêt » mais que la Cour de cassation semble favorable à

l’interprétation169

consistant à retenir que le prêt est obtenu dès que l’emprunteur a

reçu une offre de prêt conforme aux caractéristiques de financement établies dans le

contrat de promesse. Cette solution est conforme aux exigences de liberté quant à

l’exercice du droit d’option, le bénéficiaire pouvant choisir soit de ne pas agréer

l’offre de prêt et de renoncer à l’achat, soit d’accepter l’offre de prêt et lever

l’option170

.

3- La coordination des délais applicables aux droits potestatifs d’option

et de substitution

La clause de substitution insérée dans une promesse de vente confère au

bénéficiaire le droit de transmettre sa « position contractuelle ».171

Dès la conclusion

du contrat, le promettant accepte que l’acquéreur ne soit peut-être pas le bénéficiaire

originaire de la promesse. L’exercice du droit de substitution n’est donc pas

subordonné à l’accord préalable du promettant, qui ne peut pas s’y opposer s’il est

168

Il s’agissait d’une promesse synallagmatique de vente. 169

Cass. civ. 1ère

, 9 déc. 1992, JCP N. 1993, I, p.348 note D. MAZEAUD, La condition suspensive

d’obtention d’un prêt immobilier à l'épreuve de la jurisprudence. 170

Cf. F. BENAC-SCHMIDT, La promesse de vente : à propos de deux questions d’actualité, D.

1990, p.7. D’autre part, notons que la clause imposant au bénéficiaire de signifier au vendeur la non-

obtention d’un prêt dans le délai de un mois est illicite puisque faisant échec aux dispositions d’ordre

public issues de la loi du 13 juillet 1979 : c’est le prêt qui doit être obtenu dans ce délai, et non sa

justification auprès du promettant ; Cass. civ, 3ème

, 12 avril 1995, D. 1996, p.539, note F. BENAC-

SCHMIDT. 171

I. NAJJAR, Clause de substitution et «position contractuelle», D. 2000, p.635.

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effectué conformément aux modalités prévues au contrat172

. Notons que la clause de

substitution ne peut être utilement stipulée dans une promesse synallagmatique de

vente, que lorsque cette dernière ne comporte pas en elle-même transfert de

propriété. Dans le cas contraire, la commutation d’acquéreur aurait pour effet non

pas de céder une « position contractuelle » mais de constater la revente du bien par

l’acquéreur. Pour la même raison, le droit de substitution doit être exercé avant la

levée de la dernière des conditions suspensives stipulées dans la promesse

synallagmatique de vente, ou avant la réalisation du terme retardant le transfert de

propriété.173

3.1- La difficulté de qualification juridique du droit de substitution

Sans revenir sur l’ensemble des débats doctrinaux inhérents à la nature et au

régime du droit de substitution, et consistant pour l’essentiel à savoir si l’exercice de

ce droit contenu dans une promesse unilatérale de vente peut être assimilé à une

cession de promesse de vente soumise aux dispositions des articles 1690 et 1589-2

du code civil, ou s'il doit s'analyser en un mécanisme original échappant à ce

formalisme, nous pouvons constater que la Cour de cassation, amenée à se

prononcer sur la question, procède par exclusion.

La Cour de cassation refuse généralement la qualification de cession de

créance soumise aux formalités de l’article 1690 du code civil174

, sans renseigner

davantage sur la nature du procédé. Certes, dans un arrêt d’espèce du 7 juillet 1993,

la troisième chambre de la Cour de cassation a qualifié la substitution d’acquéreur

dans une promesse synallagmatique de vente de cession de contrat175

et sous-

entendu incidemment que cette dernière comporte intrinsèquement une cession de

172

Pour une étude globale sur le droit de substitution, v. G. PILLET, La substitution de contractant à

la formation du contrat en droit privé, op.cit. 173

V. J. HUET, Les principaux contrats spéciaux, coll. « Traité de droit civil », L.G.D.J., 3ème

éd.,

2012. 174

Art. 1690 c. civ : « Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du

transport faite au débiteur. Néanmoins, le cessionnaire peut être également saisi par l'acceptation du

transport faite par le débiteur dans un acte authentique. » 175

Cass. civ. 3e, 7 juillet 1993, D. 1994 p. 211, note A. PENNEAU ; v. E. JEULAND, Proposition de

distinction entre la cession de contrat et la substitution de personne, D. 1998, p. 356, pour qui la

cession de contrat serait la cession la cession d’« un lien contractuel » « qui comprend des créances,

des dettes et des droits potestatifs avec lesquels il ne se confond pas ».

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créance soumise aux formalités de l’article 1690 du code civil. Mais la doctrine n’a

pas donné de valeur significative à cet arrêt, en raison notamment de sa rédaction et

des circonstances de l’espèce. Selon certains auteurs, c’est notamment parce que les

dispositions contenues à l’ (ancien) article 1840-A du Code général des impôts176

ne

s’appliquent pas à la substitution opérée dans le cadre d’une promesse

synallagmatique de vente, que la Cour de cassation ne prend pas la peine d’évincer

la qualification en cession de contrat. Néanmoins, le mécanisme substitutif est le

même, qu’il soit mis en œuvre dans le cadre d’une promesse synallagmatique de

vente ou dans celui d’une promesse unilatérale de vente, si bien qu’il ne peut pas

être et ne pas être une cession de créance177

. Or, la Cour de cassation a toujours

refusé de qualifier la substitution de bénéficiaire dans une promesse unilatérale de

vente en cession de créance178

ou en cession de contrat.179

En réalité, la Cour de cassation n’a jamais procédé, de façon claire et

générale, à la qualification du mécanisme substitutif. Dans un arrêt du 12 avril

2012180

, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a encore repris la

solution traditionnelle consistant à éviter toute qualification positive et à affirmer

lapidairement « que le fait pour les bénéficiaires d'un « compromis de vente » de

se substituer un tiers ne constituait pas une cession de créance et n'emportait pas

obligation d'accomplir les formalités de l'article 1690 du code civil ». Cette

solution est conforme à celle retenue par la jurisprudence dans le cas d’une

substitution de bénéficiaire dans une promesse unilatérale de vente. En cette

matière, elle a également affirmé que le droit de substitution n’est pas une

stipulation pour autrui, puisque le droit d’option d’achat est né dans le

patrimoine du substituant bénéficiaire de la promesse avant de transiter dans le

176

L’article 1840-A du code général des impôts a été abrogé par l’Ordonnance n° 2005-1512 du 7

décembre 2005, et remplacé par l’article 1589-2 du code civil qui en reprend intégralement le texte,

cf. supra., p. 7. 177

V. P. BRUN, Nature juridique de la clause de substitution dans le bénéfice d'une promesse

unilatérale de vente : une autonomie de circonstance ?, RTD. civ. 1996 p. 29. L’auteur relève

également que les termes de l’arrêt ne visaient pas une promesse de vente sous conditions

suspensives mais une vente, or la substitution dans ce cas n’est pas possible. 178

Par ex Cass. civ. 3ème

, 13 juillet 1999, D. 2000, p. 195, note E. JEULAND, D. 2000, p.635, note I.

NAJJAR. 179

Par ex Cass., civ. 3ème

, 17 avril 1984, D. 1985, p. 234, note I. NAJJAR ; Cass. civ. 3ème

, 19 mars

1997, D. 1997, p. 341, obs. P. BRUN. 180

Cass. civ. 3ème

, 12 avril 2012, JCP G 2012, p. 945, chron. M. BILLIAU, Rép. Defrénois 2012, nº

12, p. 611, note C. GRIMALDI, JCP G 2012, p. 760, Y. DAGORNE-LABBE.

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patrimoine du substitué. Dans un arrêt du 27 avril 1988, la Cour de cassation a

d’ailleurs accepté que le bénéficiaire originaire de la promesse de vente puisse

lever l’option après que soit intervenue la rétractation du substitué, ce qui

démontre bien que le droit de substitution ne peut consister en une stipulation pour

autrui et que le substituant ne s’efface jamais complètement du contrat181

.

Comme le fait remarquer Monsieur SOUBISE, certains auteurs analysent

la position de la Cour de cassation comme pouvant peut-être augurer « l'intention

de la Cour suprême de reconnaître une valeur juridique à une nouvelle catégorie

de droits aux côtés des droits réels et des droits de créance : les droits

potestatifs »182

.

Le droit de substitution répond en effet à tous les critères du droit potestatif.

En effet, en exerçant le droit de substitution qui lui est conféré, le bénéficiaire de la

promesse de vente modifie unilatéralement la situation juridique en cours, en

opérant par sa seule volonté un changement de partie au contrat, et sans que le

promettant ne puisse s’y opposer. Le droit de substitution repose sur un mécanisme

d’option dont les termes sont : le droit de désigner un tiers acquéreur comme

bénéficiaire du contrat, ou le choix de poursuivre la vente à son profit183

.

181

Cass. civ. 3ème

, 27 avril 1988, D. 1989, p. 65, note I. NAJJAR. 182

V. SOUBISE, La transmission, par substitution de bénéficiaire, des droits conférés par une

promesse de vente, D. 1994, p. 237, qui cite notamment L. AYNES, JCP 1987 .I. 3310 ; et

J. FLOUR, J.-L. AUBERT, Y. FLOUR et E. SAVAUX, Droit civil, les obligations.

V. également M. BILLIAU pour qui le droit de substitution pourrait être analysé en un « droit

potestatif permettant à son bénéficiaire de revenir unilatéralement sur son engagement, par exception

à ce que prescrit l'article 1134 du code civil, sous la condition de présenter un autre contractant ».

Pour l’auteur, « cette analyse justifie encore la position de la troisième chambre civile aujourd'hui. En

effet, dans la vente, l'acheteur ne dispose en principe d'aucun droit de repentir. La faculté de

substitution apparaît alors bien comme la faculté offerte par le contrat à l'acheteur de se délier

unilatéralement du contrat, mais en offrant un nouveau contractant qui se soumet à toutes les

conditions du contrat primitivement arrêtées. La faculté de substitution opère ainsi à la manière d'une

résolution anéantissant la cession primitive, puisque le substituant y renonce, pour donner naissance à

une nouvelle cession à laquelle le substituant est tiers. Le substituant ne participe d'ailleurs pas à la

conclusion du contrat finalement signé par le cédant avec le substitué. Dès lors, s'agissant d'une

nouvelle vente, les formalités d'opposabilité applicables à une cession de créance n'ont d'évidence pas

lieu de s'appliquer, la faculté de substitution ne produisant aucun effet translatif.» 183

V. I. NAJJAR, Clause de substitution et « position contractuelle », D. 2000, p. 635, op.cit. : « La

clause de substitution est, en réalité, une option, un droit, non une obligation. A ce titre la clause de

substitution suppose, à la base, un droit potestatif au bénéfice de son titulaire. Cette option est

distincte de l'option du bénéficiaire d'une promesse de contrat. La clause de substitution n'est pas liée,

structurellement, au contrat de promesse. »

Page 76: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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3.2- Incidences de la levée de l’option sur le délai d’exercice du droit de

substitution

Lorsque le droit de substitution s’agrège au contrat de promesse unilatérale

de vente, deux droits d’option distincts sont alors conférés au bénéficiaire de la

promesse : celui de lever l’option, et celui de se substituer la personne de son choix

dans le bénéfice de la promesse. La question de la coordination des délais pour

exercer les droits potestatifs se profile ici : Le délai pour actionner le mécanisme de

la substitution se poursuit-il après la levée d’option d’achat ?

Il est établi, tant en jurisprudence qu’en doctrine, que le droit de substitution

peut s’exercer avant ou après la levée d’option d’achat184

. Soulignons toutefois que

dans un arrêt du 19 décembre 2001185

, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation a conclu aux termes d’un surprenant attendu que le bénéficiaire d’une

promesse de vente ne peut plus substituer un tiers « dans le bénéfice de la promesse

de vente qui, par l’effet de la levée de l’option, a(vait) cessé d’exister ». Comme

l’indique Monsieur COLLART-DUTILLEUL, cette solution est contestable parce

que la clause de substitution n’a pas plus vocation à disparaître par l’effet de

l’option, que les autres charges et modalités de la vente. D’autre part, elle compresse

le délai d’exercice du droit de substitution dans l’étau d’ « un délai à la fois limité

(par la date ultime du délai d’option) et indéterminé (il s’achève lors de la levée

effective de l’option). »186

Si l’on raisonne sur la solution plus généralement admise que le droit de

substitution peut s’exercer avant ou après la levée d’option d’achat, il faut encore

constater que la levée de l’option n’est pas sans incidence sur l’exercice du droit de

substitution.

184

F. COLLART-DUTILLEUL, RDC. 2004, La durée des promesses de contrat, colloque « Durées

et contrats », numéro spécial, p. 24. L’auteur cite un arrêt de la Troisième chambre civile de la Cour

de cassation aux termes duquel il a été admis que la substitution puisse intervenir après la levée de

l’option. Dans l’arrêt du 19 mars 1997 précité, (D. 1997, op. cit. note P. BRUN) également cité par F.

COLLART-DUTILLEUL, la Troisième chambre civile de la Cour de cassation a admis que la

validité d’un ensemble de substitutions exercées avant et après l’option pour le bénéfice d’une même

promesse. 185

Cass. civ. 3ème

, 19 décembre 2001, pourvoi n° 98-21.747. 186

F. COLLART-DUTILLEUL, ibid., p. 25.

Page 77: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 77 -

Lorsque le droit d’option n’a pas encore été exercé, le droit de substitution

porte sur le droit d’option lui-même, c'est-à-dire sur le droit de pouvoir lever

l’option ou non. Dans ce cas, le bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente cède

son droit d’option avant de l’avoir exercé. C’est alors le substitué qui bénéficie du

droit d’option et qui devra prendre parti. C’est uniquement dans ce cadre que

s’instaure un lien de sujétion entre le promettant et le tiers substitué.

Lorsque la levée de l’option a eu lieu, le bénéficiaire originaire de la

promesse met en œuvre deux droits potestatifs, à savoir le droit d’option d’achat

puis le droit de substitution. Le droit de substitution s’exerce directement sur le

contrat de vente lui-même, puisque le substituant a déjà donné son consentement à la

vente. Dans ce cas, le tiers substitué devient cocontractant dans un contrat qui a

perdu son caractère unilatéral. Il prend la position de bénéficiaire d’une promesse

synallagmatique de vente, ou d’acquéreur dans le contrat de vente définitif de vente.

Les questions relatives à la durée des droits potestatifs ne se posent pas qu’en

présence d’un droit d’option cumulé à un droit de substitution. Elles sont inhérentes

à la coexistence, dans un même contrat, de droits unilatéraux particuliers aux effets

parfois opposés. On pourrait multiplier les interrogations, du type : l’exercice du

droit de préemption est-il suspensif de l’exercice du droit d’option d’achat187

? Ces

questions n’ont pas qu’un intérêt théorique, et doivent inciter le praticien à

structurer efficacement les différents temps d’option contenus dans la promesse de

vente qu’il rédige.

Il appartient au notaire de rédiger avec précision les clauses qui contiennent

des délais, et de s’assurer de leur compatibilité. Au sujet de la rédaction des

conditions suspensives, Monsieur NUYTTEN recommande d’éliminer les délais

inutiles qui y sont contenus, pour se concentrer essentiellement sur les délais

entraînant la disparition du contrat à leur expiration188

. Il préconise également de

187

Cette question sera évoquée incidemment à propos des effets de l’exercice du droit potestatif, p.

113 et suiv. 188

B. NUYTTEN, L’abus de délais est dangereux pour le contrat ! , RDC. 2004, numéro spécial, op.

cit., p.211.

Page 78: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 78 -

rédiger avec soin les effets des conditions suspensives et de leur défaillance.189

A ce

propos, il suggère notamment d’insérer, lorsqu’elle telle est la volonté des parties, la

stipulation selon laquelle « l’acquéreur aura également, dans le délai de réalisation

des conditions suspensives exclusivement, la faculté de renoncer à se prévaloir de la

défaillance qui serait produite de l’une de ces conditions ». Cette clause permet

d’aménager les effets de la défaillance de la condition suspensive en apportant

davantage de sécurité juridique aux parties.

189

B. NUYTTEN, La renonciation à la condition suspensive : quand c'est le mécanisme qui défaille,

RDC. 2008, p. 959. L’auteur propose en p. 964 une formule relative aux principales conditions

suspensives contenues dans la promesse de vente, dans laquelle il distingue entre la renonciation aux

conditions suspensives pouvant survenir alors que la condition est en cours de réalisation, et suite à

la défaillance de la condition suspensive.

Page 79: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 79 -

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Le droit potestatif est un pouvoir subjectif particulier qui confère à son

titulaire le pouvoir d’imposer une modification du rapport juridique en cours, sans

qu’il ne puisse se voir opposer une volonté contraire. Il n’est pas un droit réel, parce

qu’il n’est pas un pouvoir qui porte directement sur le bien objet de la promesse. Il

n’est pas non plus une créance à l’encontre du sujet passif car il ne réalise rien de

similaire au paiement d’une dette, « il ne vise pas l’exécution d’une prestation

déterminée ; il n’est pas dirigé à l’encontre de la personne du débiteur au sens strict

puisque « le débiteur » a déjà exécuté ce à quoi il s’était engagé.»190

Lorsqu’il est inséré dans le contrat, le droit potestatif d’origine

conventionnelle a été librement consenti par chacune des parties. Le sujet passif au

droit potestatif ne peut pas s’opposer à sa concrétisation, parce qu’il est assujetti et

qu’il a lui-même fait acte de volonté en acceptant cette position contractuelle. En ce

sens, le sujet passif fait simplement usage du principe selon lequel, et conformément

à la théorie de l’autonomie de la volonté, il peut librement s’imposer un devoir pour

exprimer son adhésion au contrat.

Lorsqu’elle trouve sa source dans la loi, l’insertion d’un droit potestatif dans

le contrat intègre également les prévisions des parties. Seul le droit potestatif

d’origine jurisprudentielle peut faire craindre la sujétion d’une partie au contrat sans

son véritable consentement, c’est-à-dire sans un consentement conscient. Il en va

ainsi du droit de rétractation (ou de dédit) du promettant dans une promesse

unilatérale de vente, ou de la renonciation à la défaillance de la condition suspensive

par son bénéficiaire exclusif. Le notaire rédacteur de la promesse de vente peut gérer

l’incertitude liée aux solutions jurisprudentielles parfois versatiles, en proposant aux

parties des clauses respectueuses de leur volonté contractuelle. Dès lors, les droits

190

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n° 24.

Page 80: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

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potestatifs dégagés par la jurisprudence sont des droits d’origine conventionnelle

expressément instaurés ou refusés par les parties.

Le droit potestatif fait naître une situation d’attente, un suspense contractuel,

parce l’action du titulaire n’est pas immédiate et qu’il doit réfléchir à l’opportunité

du choix qu’il a à opérer. Si le potentior a le pouvoir de choisir, ce pouvoir ne peut

être exprimé que dans le cadre d’une alternative et d’un temps impartis par le contrat

de promesse, si bien que s’il y a bien un suspense, il n’y a pas de surprise car le sujet

passif a participé à l’élaboration des limites de l’expectative. L’exercice du droit

potestatif n’est pas seulement l’opération d’un choix, mais également un acte

juridique qui concrétise l’exercice de ce choix.

La volonté du titulaire du droit potestatif, pour produire concrètement des

effets sur la situation juridique préexistante, doit en effet être extériorisée. En cela, il

doit manifester sa volonté. Le terme de « manifestation » est particulièrement

évocateur puisqu’il se réfère à l’action d’exprimer son choix dans l’idée de le faire

connaître (SECONDE PARTIE).

Page 81: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 81 -

SECONDE PARTIE :

CARACTERES ET EFFETS DE LA MANIFESTION UNILATERALE DE

VOLONTE

La forme de la manifestation unilatérale de volonté n’est pas imposée par la

nature du droit potestatif mais plutôt par ce sur quoi il porte. Monsieur VALORY

indique que « la définition traditionnelle du droit potestatif fait apparaître trois types

d’activité propre unilatérale », à savoir « l’acte juridique, l’instance judiciaire et le

recours administratif »191

, auxquels Monsieur HAGE-CHAHINE192

a ajouté « l’acte

matériel ». Lorsque le droit potestatif est le droit d’agir en justice, la volonté de son

titulaire se manifestera par l’introduction de la demande auprès du tribunal : c’est le

cas par exemple de l’action en nullité, l’action en garantie des vices cachés, de

l’action en rescision pour lésion…. Lorsqu’il est relatif au droit des biens et des

personnes, comme par exemple le droit de bornage d’une parcelle ou le droit de

visite parental, il s’extériorisera par le biais d’un acte matériel. S’agissant d’un droit

potestatif inséré dans un contrat, il s’exercera par le biais d’un acte juridique

unilatéral (Section I). Cet acte juridique est essentiel à la perfection de l’exercice du

droit potestatif, pour qu’il puisse produire ses effets (Section II).

191

S. VALORY La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit, n°57. 192

F. HAGE-CHAHINE, Essai d’une nouvelle classification des droits privés, op. cit, n°49.

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SECTION I : L’acte juridique unilatéral de volonté

Par opposition au fait juridique qui est un événement voulu ou non par

l’homme mais susceptible de produire des effets de droit indépendamment de la

volonté de son auteur, l’acte juridique se caractérise par la manifestation de volonté

de son auteur dans le but de produire des conséquences juridiques193

. A la différence

du contrat qui est l’exemple type de l’acte juridique bilatéral ou multilatéral émanant

de la rencontre de plusieurs volontés, l’exercice du droit potestatif inséré dans le

contrat n’implique pas, lors de sa réalisation, l’émission d’un accord de volontés

entre les parties en présence. En ce sens, l’exercice du droit potestatif est un acte

juridique unilatéral dans le contrat (I). En effet, dès la conclusion du contrat de

promesse, le sujet passif a consenti à ce que soit exercé le droit potestatif et il n’a

plus rien à accomplir pour son exercice. Si le sujet passif est ainsi extérieur à

l’exercice du droit potestatif, il n’en demeure pas moins que l’acte unilatéral par

lequel le droit se concrétise doit être porté à sa connaissance et compris de lui (II).

I - Qualification de la manifestation unilatérale de volonté en acte

unilatéral

CARBONNIER a défini l’acte juridique unilatéral comme « toute

manifestation de volonté par laquelle une personne agissant seule, détermine des

effets de droit, soit à sa charge, soit même à son profit »194

. Parce que l’acte

unilatéral par lequel s’exerce le droit potestatif génère des « effets de droit » qu’il

conviendra d’analyser (B), les règles relatives à la validité du consentement

s’appliquent à la manifestation unilatérale de volonté (A).

193

L’avant-projet de réforme du droit des obligations rédigé sous la direction de CATALA envisage

l’insertion dans le code civil d’un article 1101-1 dont le premier alinéa disposerait que « les actes

juridiques sont des actes de volonté destinés à produire des effets de droit ». L’article 1101-2 alinéa 1

définirait les fait juridiques « comme des agissements ou des événements auxquels la loi attache des

effets de droit ». 194

J. CARBONNIER, Droit Civil, t.4, Les obligations, 21ème

édition, 1998, PUF, n°14.

Page 83: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 83 -

A - La validité de l’acte juridique soumise à la réalité de la volonté de

son auteur

L’acte par lequel le potentior exerce le droit potestatif est unilatéral parce

qu’il exprime un « intérêt unique », le sien195

. Le terme d’intérêt renvoie à celui

d’avantage, lequel se confond dans une certaine mesure avec la cause de l’acte

juridique unilatéral196

, qui peut être définie comme l’objectif que le potentior

souhaite atteindre et pour lequel il met en œuvre le droit qui lui est conféré par la

convention.

1- La cause de l’acte juridique unilatéral de volonté

La cause de l’acte mettant en œuvre le droit potestatif conventionnel répond

à celle des actes d’option, dont il emprunte pour l’essentiel les caractères. Monsieur

NAJJAR a démontré que la cause de l’acte unilatéral d’option est originale en raison

« de la structure même de l’acte unilatéral »197

et de « la nature potestative du droit

d’option »198

. En effet, la cause ne peut pas être recherchée dans le contrat qui

contient le droit d’option, mais doit être déterminée « en fonction du seul acte de

l’auteur de l’option. C’est lui qui agit et il est naturel, pour déterminer le contenu de

la cause de son action, de se référer à son seul acte. »199

La cause de l’acte d’option

serait ainsi à rechercher dans l’élément conventionnel qui ne dépend objectivement

que de la volonté du potentior, soit dans « l’alternative qui donne naissance à une

situation incertaine »200

. L’acte juridique unilatéral met un terme à la situation

d’incertitude et c’est sa finalité. En manifestant sa volonté d’agir, dans un sens ou

dans l’autre, le titulaire du droit potestatif accomplit la modification de la situation

juridique antérieure. L’acte unilatéral de volonté a ainsi pour cause de supprimer

l’alternative et la situation incertaine qui en découle.

195

C.BRENNER, Acte, Rép. civ. Dalloz, n°52. L’avant-projet CATALA propose de définir, à

l’article 1101-1 al 2, l’acte juridique unilatéral comme « un acte accompli par une seule ou plusieurs

personnes unies dans la considération d’un même intérêt en vue de produire des effets de droit dans

les cas admis par la loi ou par l’usage ». 196

J. MARTIN de LA MOUTTE, L’acte juridique unilatéral, thèse, Sirey, 1949, n°33. 197

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°247. 198

I. NAJJAR, ibid., n°248. 199

I. NAJJAR, ibid. 200

I. NAJJAR, ibid.

Page 84: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 84 -

2- L’intégrité du consentement émis par le potentior

La volonté manifestée par le potentior doit évidemment exister au moment

où s’opère l’acte juridique par lequel il exerce son droit. Le délai qui

lui est laissé pour prendre parti laisse d’ailleurs préjuger que la volonté qu’il exprime

est décidée, c'est-à-dire qu’elle a trouvé les motifs du choix opéré. En outre, le

consentement du potentior ne doit pas être vicié. La Cour de cassation affirme à ce

sujet que « les causes de nullité qui intéressent le consentement sont applicables aux

actes unilatéraux»201

, si bien que l’acte de manifestation unilatérale de volonté doit

avoir été consenti conformément aux règles des articles 1109 et suivants du code

civil relatifs à l’intégrité du consentement dans les contrats ou obligations202

. En

matière successorale, l’article 930 alinéa 2 du code civil confirme la solution

jurisprudentielle en disposant que la renonciation à l'action en réduction de la

succession « est nulle lorsqu'elle n'a pas été établie dans les conditions fixées au

précédent alinéa, ou lorsque le consentement du renonçant a été vicié par l'erreur, le

dol ou la violence ».

2.1- Les vices du consentement du potentior

Les termes de l’article 1111 du code civil203

, relatif à la violence, ne

s’opposent pas à l’application de ce vice du consentement à l’acte juridique

unilatéral.

En ce qui concerne le dol, l’article 1116 du code civil204

est plus restrictif

puisqu’il vise « la convention » et les « manœuvres de l’une des parties »205

. Or,

201

Cass. civ. 1ère

, 09 février 1970, JCP 1971. II. 16806, note M. DAGOT ; Cass. civ. 1ère

, 27 avril

1988, RTD. civ. 1988, p. 541, obs. J. MESTRE. 202

Article 1109 c. civ. « Il n’y a point de consentement valable, si le consentement n’a été donné que

par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol. » 203

Art. 1111 c. civ. : « La violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation, est une cause de

nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été

faite. » 204

Article 1116 c. civ. : « Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres

pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie

n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. » 205

J. CARBONNIER, Droit civil, t. 4, Les obligations, op. cit., no 14.

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- 85 -

l’acte unilatéral ne comporte qu’une partie. Le dol ne pourrait alors que concerner le

contrat dans lequel est inséré le droit potestatif, la manœuvre dolosive consistant à

obtenir du potentior qu’il émette un choix plutôt qu’un autre, pensant poursuivre son

intérêt exclusif alors qu’il agit en réalité dans l’intérêt du cocontractant. Si le dol

trouve sa source dans la convention, il produit ses effets sur l’exercice du droit

potestatif puisque l’acte juridique unilatéral est une conséquence de la manœuvre

dolosive qui s’exerce en amont.

Enfin, le vice du consentement relatif à l’erreur sur la substance de la chose

objet de la convention ou sur la personne du cocontractant206

est également

transposable à l’acte juridique unilatéral, mais avec les ajustements nécessités par le

caractère unilatéral de l’acte de volonté. La doctrine s’accorde pour reconnaître que

l’erreur sur la personne du destinataire de l’acte unilatéral peut fonder un vice du

consentement sanctionné par la nullité de l’acte207

. L’erreur sur la substance de la

chose ne peut porter quant à elle que sur l’unique conviction de l’auteur de l’acte

unilatéral208

.

2.2- La capacité du potentior

La capacité du potentior doit être analysée au moment de l’exercice du droit

potestatif, en raison de ce sur quoi porte le droit potestatif en présence, c'est-à-dire

selon que la situation à modifier porte sur un acte d’administration ou un acte de

disposition.209

Le décret n°2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de

gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, et auquel

renvoie l’article 496 du code civil, définit les actes d’administration comme « les

actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée

dénués de risque normal », et les actes de disposition comme « les actes qui

engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une

206

Art.1110 c. civ. : « L'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la

substance même de la chose qui en est l'objet. Elle n'est point une cause de nullité lorsqu'elle ne

tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de

cette personne ne soit la cause principale de la convention. » 207

C.BRENNER, Acte, op.cit., n°69. 208

Ibid. 209

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°233.

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- 86 -

modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur

en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». Sont

annexées au décret deux listes, l’une reprenant les actes à analyser impérativement

en des actes d’administration ou de disposition, l’autre classant les actes à regarder

comme acte d’administration ou de disposition « sauf circonstance d’espèce »210

.

Les actes comportant acceptation de vente ou d’achat sont classés impérativement

dans les actes de disposition. La levée d’option, l’acte de préemption ou de

substitution, en raison du transfert de propriété qui va s’opérer à la suite de ceux-ci,

doivent être analysés en des actes de disposition. C’est à ce moment que le titulaire

du droit d’option donne définitivement son consentement - libre et éclairé - à la

vente qui doit se réaliser à son profit, et c’est donc à ce moment que doit être

analysée sa capacité à conclure un acte de disposition. A défaut d’être juridiquement

capable, il doit être assisté ou représenté conformément à la loi, et l’exercice du droit

devra respecter le formalisme juridique imposé par la mesure de protection sous

laquelle il est placé.

2.3- La représentation du potentior devenu vulnérable

En matière contractuelle, rien ne semble s’opposer à ce que l’exercice du

droit potestatif appartenant à une personne devenue vulnérable soit réalisé par son

représentant légal, puisqu’en principe, tous les actes juridiques peuvent être

accomplis par l'intermédiaire d'un représentant211

. Cette solution peut surprendre si

l’on s’attarde sur le caractère personnel des droits potestatifs, constitué dès lors qu’il

est contractuellement consenti au profit d’une personne déterminée. Mme

POMART-NOMDEDEO fait remarquer que « si le titulaire du droit potestatif

devient incapable après que le droit a été conventionnellement accordé mais avant

qu'il n'ait été exercé (…) le contractant assujetti n'a peut-être pas intégré au nombre

de ses paramètres, lorsqu'il a consenti un tel droit, que ce ne serait in fine pas le

bénéficiaire qui choisirait de l'exercer ou non. La question de la représentation

210

V. décret du 22 décembre 2008, sous l’article 496 du code civil modifié par la loi du 5 mars 2007,

code civil, édition Dalloz, 2012. 211

V. H., L. et J. MAZEAUD et F. CHABAS, Leçons de droit civil, Obligations. Théorie générale,

9e éd. par F. CHABAS, 1998, Montchrestien, n

o 927.

Page 87: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 87 -

s'articule difficilement avec le caractère personnel du droit. »212

Néanmoins, le

critère personnel de la relation juridique existant entre le titulaire du droit potestatif

et celui qui en subit l’exercice n’est pertinent que pour définir si le droit est cessible

ou transmissible, ou effectivement consenti intuitu personae. Lorsque le droit

potestatif a été expressément consenti en considération de la personne de son

titulaire, il ne peut pas faire l’objet d’une transmission. C’est par exemple le cas

d’une clause de substitution souscrite au profit d’une personne déterminée : en

l’absence d’accord du promettant, il n’est pas envisageable que la personne

substituée dans le bénéficie de la promesse de vente soit différente de celle visée

dans le contrat.

Pour analyser la possibilité d’une représentation du titulaire lors de l’exercice

du droit potestatif, c’est moins le critère personnel du droit potestatif que celui de

son entrée dans le patrimoine du potentior qui doit être retenu. Parce que le droit

potestatif a pénétré le patrimoine de son titulaire dès la conclusion de la promesse de

vente, il peut être exercé par son représentant (légal ou conventionnel), dans l’intérêt

de la personne représentée. C’est sur le même fondement d’appartenance au

patrimoine du débiteur, que la levée de l’option par les créanciers du bénéficiaire

d’une promesse unilatérale de vente est autorisée213

en cas d’inaction du débiteur à

exercer l’option offerte214

. De même, en cas de procédure collective ouverte à

l’encontre du bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente pendant le délai

d’option, il appartiendra à l’administrateur ou au liquidateur de procéder à la levée

de l’option et au paiement du prix215

.

212

C. POMART-NOMDEDEO, Le régime juridique des droits potestatifs en matière contractuelle,

entre unité et diversité, RTD. civ. 2010, p 209. 213

L’article 1166 du code civil dispose que « Néanmoins les créanciers peuvent exercer tous les

droits et actions de leur débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la

personne ». 214

Cf. O. BARRET, Rép. civ. Dalloz, Promesse de vente, n°133. 215

O. BARRET, ibid., n°132. L’auteur cite un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de

cassation du 1er

février 2000, aux termes duquel cette solution est admise (pourvoi n°97-21.642). Si

l’administrateur ne continue pas la promesse de vente, et en conséquence ne lève pas l’option, le

promettant n’a pas droit au paiement de l’indemnité d’immobilisation. Il pourra demander des

dommages et intérêts, sa créance devant alors s’inscrire au passif.

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- 88 -

B - Les effets propres à l’acte juridique unilatéral

1- La classification des effets de l’acte juridique unilatéral

La doctrine a présenté différents types de classification des actes juridiques

unilatéraux, selon leur objet patrimonial ou extrapatrimonial, le moment de leur

expression (avant la formation du contrat / pendant l’exécution du contrat / à

l’extinction du contrat), et les effets juridiques qui y sont attachés. Ce dernier critère

de classification permet de distinguer les actes unilatéraux ayant un effet déclaratif,

de ceux ayant un effet translatif, constitutif, ou extinctif. L’acte déclaratif est celui

par lequel un droit préexistant est officiellement reconnu, l’acte translatif est celui

par lequel un droit est transféré d’un patrimoine à un autre, l’acte constitutif est

créateur d’un droit nouveau apparaissant après son exercice, tandis que l’acte

extinctif éteint un droit préexistant.

Il serait tentant de constater que l’acte juridique unilatéral varie en fonction

du droit potestatif en présence : s’agissant d’un droit de substitution, l’acte unilatéral

par lequel le droit potestatif s’exerce aurait un effet translatif du contrat au bénéfice

du substitué, s’agissant d’un droit de résiliation unilatérale ou de rétractation l’acte

juridique aurait un effet extinctif du contrat principal… Néanmoins, le droit

potestatif a pour objet fondamental la modification unilatérale d'une situation

juridique, et il ne faut pas confondre celle-ci avec les effets subséquents générés par

l'exercice du droit potestatif 216

. Si l'on prend l'exemple de la promesse unilatérale de

vente, le pouvoir du titulaire du droit potestatif est la totale liberté de lever, ou de ne

pas lever, l'option. L'exercice du droit modifie la situation juridique du promettant,

qui est soit engagé rétroactivement dans le contrat, soit libéré purement et

simplement du lien de sujétion : c'est l'effet de l'exercice du droit potestatif. Ainsi,

l’acte juridique unilatéral par lequel s’exerce le droit d’option, est soit un acte

d’acceptation (lever l’option), soit un acte de renonciation (ne pas lever l’option), de

nature déclarative puisque c’est par son biais que le droit potestatif en cause est

définitivement consacré.

216

Cf. infra, les développements consacrés à la modification de la situation juridique, p. 107 et suiv.

Page 89: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 89 -

Dans une acception classique, l’acte déclaratif est celui qui ne crée rien mais

constate un droit existant. Néanmoins, la doctrine a étendu progressivement le

champ d’application de l’acte déclaratif. C’est ainsi que pour BOYER, l’acte

déclaratif n’a pas pour unique objet de reconnaître un droit préexistant, mais peut

transformer la situation juridique préétablie217

. L’existence d’une situation antérieure

intéressant le titulaire du droit potestatif est nécessaire, sans quoi il ne pourrait

exister d’acte déclaratif. Cette situation juridique est aisément caractérisée lorsque le

droit potestatif est inhérent ou adjoint à un contrat, puisqu’elle est constituée par la

conclusion du contrat lui-même.

2- L’absence de caractère obligatoire

L’acte juridique par lequel s’exerce un droit potestatif contenu dans le contrat

ne produit pas en lui-même une obligation particulière à la charge de son auteur,

même si comme l’indique Monsieur NAJJAR, « l’option fait naître apparemment

un engagement unilatéral »218

. Si le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente

lève l’option, il s’engage à acheter le bien objet de la promesse. Pourtant, poursuit

Monsieur NAJJAR, il n’y a « aucun lien de structure entre le fait de s’engager et

celui d’opter », et « pour s’en convaincre, il suffirait d’ailleurs d’observer que l’acte

d’opter peut être aussi un acte de refus. Or l’idée de refus est incompatible avec

l’idée d’engagement positif ayant pour effet de créer une obligation »219

.

En effet, la levée de l’option entraîne la formation définitive de la vente, mais

c’est uniquement de la vente que va découler l’effet translatif du contrat, et la

multitude d’obligations liée au transfert de propriété ainsi qu’au paiement du prix.

En d’autres termes, l’acte de levée d’option dans la promesse unilatérale de vente est

un acte juridique unilatéral car il produit effet par la seule volonté active du

bénéficiaire, mais cet effet est de rendre la vente parfaite, non de créer des

obligations à la charge du bénéficiaire.

217

L. BOYER, La notion de transaction. Contribution à l’étude des concepts de cause et d’acte

déclaratif, thèse, préface J. MAURY, Toulouse, Sirey, 1947, p. 352 et suiv. 218

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°203. 219

Ibid.

Page 90: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 90 -

En cas de refus de lever l’option, l’indemnité d’immobilisation mise à la

charge du bénéficiaire est en principe acquise au promettant. Le paiement de cette

indemnité pourrait être analysé comme constitutive d’une obligation pesant sur le

bénéficiaire suite au refus de lever l’option. Néanmoins, l’indemnité

d’immobilisation est « le prix de l’exclusivité»220

, acquise au promettant quel que

soit le choix opéré par le bénéficiaire. Elle n’a pas la fonction de réparer, à titre de

peine privée, un préjudice subi par le promettant du fait de l’inexécution d’un

prétendu engagement de la part du bénéficiaire. Elle rémunère le promettant de

l’avantage qu’il procure au bénéficiaire en s’interdisant de disposer du bien pendant

une certaine durée. L’indemnité d’immobilisation est distincte du prix de vente

consenti et accepté entre les parties, et pourrait être acquise au promettant quel que

soit le choix opéré par le bénéficiaire, entre refuser et accepter la vente à son profit.

Seule la clause insérée dans la promesse unilatérale de vente, stipulant que

l’indemnité d’immobilisation sera imputée sur le prix de vente en cas de réalisation

de l’acte de vente définitif en revêtant alors la qualification « d’acompte sur le

prix », permet d’écarter le versement de la somme constitutive du prix de

l’exclusivité en cas de levée de l’option. L’obligation de verser l’indemnité

d’immobilisation est indépendante de l’exercice de l’option, mais rémunère le droit

potestatif consenti par le promettant. En ce sens, le refus de lever l’option ne

comporte donc pas, en lui-même, l’engagement unilatéral de verser une indemnité

d’immobilisation.

3.- L’exclusion de l’acte potestatif d’option du domaine de l’engagement

unilatéral de volonté

3.1- L’exclusion, conséquence de l’absence de caractère obligatoire

L’absence de caractère obligatoire conduit à exclure l’acte potestatif d’option

du champ de la théorie de l’engagement unilatéral de volonté, défini par la doctrine

comme l’acte juridique unilatéral par lequel le déclarant s’oblige vis-à-vis d’un tiers

220

Cass. civ. 1ère

, 5 décembre 1995, v. supra, les développements relatifs à l’incidence du caractère

onéreux du droit potestatif sur la sujétion.

Page 91: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 91 -

qui devient créancier sans même avoir à donner son consentement à l’acte.221

Si

l’engagement unilatéral de volonté repose, tout comme l’acte juridique unilatéral,

221

Pour une étude de l’engagement unilatéral de volonté, cf. C. LARROUMET, Droit civil, Les

obligations, Le contrat, tome 3, 6ème

édition, 2007, Economica ; M.-L. IZORCHE, « L’avènement de

l’engagement unilatéral en droit privé contemporain », 1995, PUAM ; M.-L. MATHIEU-IZORCHE,

D. 2009, p.440, à propos de l’irrévocabilité de l’offre de contrat.

C’est le juriste autrichien SIEGEL, qui en 1874, a affirmé qu’il existait, à côté du contrat, une

seconde source volontaire d’obligations : la volonté unilatérale du débiteur. En France, cette thèse a

rencontré la faveur des partisans de l’autonomie de la volonté, mais fait encore l’objet d’une

controverse doctrinale. La théorie de l’engagement unilatéral de volonté, notamment soutenue par J.

MESTRE et M.-L. IZORCHE, a fait l’objet d’un construit juridique par la jurisprudence qui utilise la

notion pour expliquer certaines institutions et également lorsqu’il lui parait opportun (eu égard à la

sécurité juridique et à l’intérêt social) de faire peser sur le promettant une obligation immédiate et

irrévocable. La jurisprudence foisonne d’exemples relatifs à la pratique des documents publicitaires

adressés par les sociétés commerciales à leurs clients, les avertissant qu’ils viennent d’être tirés au

sort et de gagner un lot de valeur. Dans deux arrêts de principe du 28 mars 1995, la première chambre

civile de la Cour de cassation a décidé à ce propos qu’une société de correspondance qui avait adressé

des documents trompeurs, laissant croire à une personne qu’elle avait gagné le gros lot, avait

l’obligation de délivrer le gain promis. Elle fonde cet engagement sur le principe classique de la

responsabilité civile de l’organisateur, tout en atténuant les conditions, et va plus loin en invoquant

l’engagement unilatéral. L’idée, pour justifier l’engagement unilatéral, est que, de façon libérée et

réfléchie, la société a voulu persuader ses clients d’avoir gagné un lot de valeur, et se faisant, s’est

engagée à satisfaire leur espoir. La jurisprudence sur les promesses de gain est certes de pure

politique, mais confirme la tendance plus générale à reconnaître l’engagement unilatéral comme tel.

La Cour d’appel de Toulouse, dans trois arrêts du 14 février 1996 confirme cette analyse : « en droit,

s’il est de principe que, pour produire effet, l’engagement unilatéral doit exprimer la volonté de son

auteur, cette volonté peut, pour une société commerciale, résulter de promesses précises et

ostensiblement affichées dès lors que celles-ci s’inscrivent dans sa stratégie publicitaire et ont été

manifestement délibérées ». Cependant, il n’y aurait lieu d’admettre la théorie de l’engagement

unilatéral de volonté que de manière subsidiaire, que lorsque la technique contractuelle n’a pas

vocation à s’appliquer (cf. J. MARTIN DE LA MOUTTE, « L’acte juridique unilatéral. Essai sur sa

notion et sa technique en droit civil français »,op.cit.). La thèse est résumée par GENY en ces

termes : « amener à déclarer obligatoires, non par pour toutes promesses unilatérales, mais celles-là

seulement qui paraîtront indispensables pour atteindre un résultat socialement désirable et impossible

à réaliser pratiquement par une autre voie ». (F. GENY, Méthodes d’interprétation et sources en droit

privé positif, essai critique, vol. 1, L.G.D.J., 1919, n°172 bis). L’admission de l’engagement

unilatéral de volonté soulève la question de son régime, dont il est admis qu’il doive se calquer sur

celui du droit des obligations contractuelles (cf. Cass.com, 22 juillet 1986 ; Cass.civ.1ère

, 20

novembre 1990, RTD. civ. 1992, p. 99, obs. J. MESTRE). En dehors des conditions communes à

l’existence de tout acte juridique, des exigences spécifiques doivent être recherchées pour savoir si

l’on est en présence d’un engagement unilatéral de volonté valable : celle d’une volonté ferme, et

d’un délai (CA. TOULOUSE, 2e ch., 14 février 1996, RTD civ. 1996, p.397, obs. J. MESTRE ; Cass.

civ. 3e, 10 mai 1968 (2 arrêts), Bull.civ. III, n°209 ; CA. Aix, 15 mars 1984, RTD civ. 1985, p. 730,

obs. J. MESTRE). Si l’engagement par volonté unilatérale a une autonomie propre, il est souvent

présenté comme préalable au contrat. L’engagement « moral » ou « d’honneur », qui est une

proposition par laquelle une personne exprime la volonté de s’engager sans pour autant que l’honneur

qu’il engage n’entraine d’effets juridiques (par exemple, les promesses d’alliance, de non

concurrence, de remboursements de dettes dans le cas d’un retour à meilleur fortune), est parfois

analysé par la jurisprudence comme civilement, « voire contractuellement obligatoire » (A. LAUDE,

La reconnaissance par le juge de l’existence d’un contrat, n°682.), en raison des éléments d’espèce,

de l’intention de l’engagé et des circonstances de son engagement. Ainsi, de façon traditionnelle, les

juges reconnaissent comme juridiquement obligatoires l’engagement d’un failli donné sur l’honneur

au moment de la conclusion d’un concordat ou ultérieurement à payer ses créanciers « en cas de

retour à meilleure fortune » (Cass. civ., 29 avril 1876, D.P. 1873. 1.207), ou celui pris par un mari

condamné à verser à son ex-épouse une pension alimentaire de renoncer à en réclamer ultérieurement

la diminution (Cass. civ. 2ème

, 27 novembre 1985, RTD. civ. 1986, p. 750, obs. J. MESTRE). A

Page 92: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 92 -

sur la volonté unilatérale, il s’en distingue effectivement parce qu’à la différence du

second, il est générateur d’obligations au sens technique du terme.222

Le déclarant

est obligé dès qu’il manifeste la volonté ferme de s’engager, c’est-à-dire avant toute

acceptation du créancier. L’engagement unilatéral de volonté est en principe

irrévocable, et l’acceptation du créancier a pour effet de faire rétroagir la créance au

jour de l’engagement du débiteur223

. Notons que l’hypothèse d’un engagement

unilatéral de volonté n’a jamais été formulée que dans la perspective de la création

d’un droit au profit d’un tiers. L’idée d’un engagement d’autrui par volonté

unilatérale du déclarant est impossible : nul ne saurait discrétionnairement décider

qu’un tiers deviendra son débiteur, en dehors de tout consentement de ce dernier. Ce

serait d’ailleurs contraire à l’article 1119 du code civil qui dispose que « on ne peut

en général, s’engager, ni stipuler en son propre nom, que pour soi-même ». Certains

auteurs qualifient l’obligation de maintenir une offre de contrat faite à personne et

durée déterminées d’engagement unilatéral de volonté224

. L’offre de contrat

répondant à ces critères est un acte juridique unilatéral par lequel une personne

propose à une autre personne de former le contrat par sa seule acceptation, si celle-ci

intervient dans le délai fixé. La seule acceptation suffisant à créer le contrat, l’offre

doit être ferme, expresse, et précise.

3.2- Le particularisme de l’acceptation de l’offre de contrat

L’acte consistant à faire une offre de contrat n’est pas un droit potestatif

parce qu’elle ne modifie pas la situation juridique du destinataire de l’offre, au

l’étude de la jurisprudence, si l’engagement d’honneur peut produire des effets de droit, c’est

essentiellement lorsqu’il se présente comme un contrat, comme une garantie d’exécution d’une

contrepartie de quelque chose dont l’auteur de l’engagement bénéficie lui-même ou comme une

condition fondamentale d’acceptation par le bénéficiaire d’une clause contractuelle. La pure volonté

unilatérale de s’engager sur l’honneur ne serait alors pas en principe susceptible d’obliger son auteur

qui pourrait rétracter à tout moment son offre. Cette solution prévaut également pour les lettres

d’intention qui peuvent se retrouver à l’occasion de la négociation d’un contrat, et qui ont pour objet

de déclarer le désir de leur auteur de fixer le cadre de sa négociation. La loi, quant à elle, a également

consacré l’existence d’engagements unilatéraux, notamment en droit des sociétés avec l’institution

des sociétés à associés uniques, et en droit commercial avec les effets de commerce transmissibles par

endossement. 222

V. MM. STARCK, ROLAND, BOYER, Obligations, Contrats, t. 2, 6e éd., 1998, Litec, n°53.

Nous faisons référence ici au rapport d’obligation, celui existant entre deux parties en vertu duquel le

créancier peut exiger quelque chose du débiteur. 223

C.LARROUMET, Droit civil, Les obligations, Le contrat, op.cit., p.77. 224

M.-L. IZORCHE, D. 2009, op.cit.

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- 93 -

moins tant qu’elle n’est pas acceptée, et ne crée pas un lien de sujétion entre

l’émetteur et le destinataire de l’acte. L’émetteur de l’offre est libre de proposer un

bien à la vente, car il n’est nullement obligé de prendre position sur le fait d’émettre

une offre ou de ne pas émettre une offre.

L’acte d’acceptation de l’offre est plus problématique, sa qualification

dépendant de la possibilité ou non de rétracter l’offre avant acceptation.

Lorsque l’offre est à durée indéterminée, il est admis que l’offrant peut

toujours révoquer son engagement après un délai raisonnable. Dans ce cas, le

bénéficiaire de l’offre ne bénéficie pas d’un droit potestatif d’acceptation car il

manque alors l’élément fondamental de sujétion inhérent au droit potestatif. Si le

déclarant n’est pas obligé de maintenir son offre, « on ne voit pas comment son

bénéficiaire pourrait, par l’exercice d’un acte unilatéral de volonté, et sans le

concours de la volonté continue de l’offrant, former définitivement et rendre

irrévocable le contrat »225

. En effet, dans ce cas le maintien de l’offre n’est pas le

résultat de la nécessaire passivité de son auteur, mais de la persistance de sa volonté.

Lorsque l’offre est assortie d’un délai, elle n’est en principe pas révocable

pendant un certain temps, lequel est compris entre la réception de l’offre par son

destinataire et l’expiration du délai de validité de l’offre. En effet, avant que l’offre

ne parvienne à la connaissance de son bénéficiaire, il est admis que l’offrant puisse

révoquer son engagement, puisque cette révocation ne cause aucun préjudice réel au

destinataire de l’offre. De même, à l’issue de la durée de validité de l’offre, laquelle

peut être expresse ou fixée par le juge en référence aux usages, l’offrant peut

révoquer son engagement parce qu’il ne peut pas être obligé à le maintenir

indéfiniment226. L’avant-projet de réforme du droit des obligations prévoit l’insertion

d’un article 1105-2 dans le code civil, lequel disposerait que « l’offre peut être

librement révoquée tant qu’elle n’est pas parvenue à la connaissance de son

destinataire ou si elle n’a pas été valablement acceptée dans un délai raisonnable ».

225

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op. cit., n°120. 226

Pour la référence à un « délai raisonnable », cf. Cass. civ. 3ème

, 20 mai 1992, RTD. civ. 1993, p.

345, obs. J. MESTRE ; Cass. civ. 3ème, 20 mai 2009, RTD. civ, p. 524, obs. B. FAGES.

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L’impossibilité de révoquer une offre assortie d’un délai a été affirmée expressément

par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 7

mai 2008227

qui retient, sur le fondement de l’article 1134 du code civil, que « si une

offre d'achat ou de vente peut en principe être rétractée tant qu'elle n'a pas été

acceptée, il en est autrement au cas où celui de qui elle émane s'est engagé à ne pas

la retirer avant une certaine époque ». La référence à l’article 1134 du code civil est

surprenante parce que l’offre ne peut pas être assimilée à un contrat. Néanmoins la

Cour de cassation ne pouvait pas admettre plus explicitement le caractère

irrévocable du consentement donné à l’offre, et pour M.-L. MATHIEU-IZORCHE

« reconnaître plus nettement l’aptitude de l’acte unilatéral à créer des obligations, à

côté des contrats ».

En admettant le caractère irrévocable de l’offre, du moins pendant une

certaine période, il apparaît que l’offrant est assujetti à la volonté du destinataire de

l’offre qui peut créer le contrat par sa veule volonté. Mais le lien de sujétion n’est

alors pas une émanation de la loi ou de la convention, il dérive de l’unique volonté

de son auteur et est assimilable à un acte de liberté. L’avant-projet de réforme mené

sous la direction de CATALA prévoit néanmoins d’insérer dans le code civil un

article 1105-4 susceptible de confirmer l’assujettissement de l’offrant, et de lui

conférer ainsi une base légale : « Cependant, lorsque l’offre adressée à une personne

déterminée comporte l’engagement de la maintenir pendant un délai précis, ni sa

révocation prématurée ni l’incapacité de l’offrant ni son décès ne peut empêcher la

formation du contrat. »228

Ainsi, l’offrant ne pourrait pas révoquer son engagement

pendant le délai de validité de l’offre et pendant lequel le destinataire aurait toute

latitude pour choisir de créer ou non le contrat, par une simple manifestation de sa

volonté. L’exercice de l’acceptation par le destinataire de l’offre serait parfait sans

besoin de l’intervention de l’offrant, et celui-ci ne pourrait pas s’opposer à la

formation du contrat qu’il serait tenu d’exécuter. Ce mécanisme est similaire à celui

qui devrait être théoriquement retenu en matière de rétractation du promettant avant

la levée de l’option du bénéficiaire d’une promesse de vente. Rien ne devrait alors

s’opposer à la qualification de l’offre de contrat en droit potestatif.

227

D. 2009, p.440, obs. M.-L. MATHIEU-IZORCHE, op. cit. 228

En ce sens, v. arrêt du 20 mai 2009 précité.

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- 95 -

Cependant, le projet de réforme de la Chancellerie établi en 2008, et qui

s’inspire dans une large mesure de celui publié sous la direction de CATALA,

n’adopte pas cette conception. L’article 26 du projet prévoit que « la rétractation de

l’offre, en violation de l’obligation de maintien prévue à l’article 25, n’engage que la

responsabilité délictuelle de son auteur sans l’obliger à compenser la perte des

bénéfices attendus du contrat ». L’obligation de maintien serait donc une obligation

de faire, et sa violation serait sanctionnée par des dommages et intérêts. Cette

solution n’est pas sans rappeler la jurisprudence de la Cour de cassation inaugurée

en 1993, relative à la sanction encourue par le promettant qui rétracte son

consentement avant la levée de l’option par le bénéficiaire de la promesse unilatérale

de vente. La qualification de l’acceptation de l’offre en droit potestatif est alors

impossible, parce que s’il s’agissait d’un droit potestatif, l’offrant ne pourrait pas

s’opposer à l’acceptation du bénéficiaire de l’offre et par suite à la conclusion du

contrat de vente. La révocabilité de l’offre par son auteur « fût-ce en commettant une

faute l’exposant à des dommages et intérêts, est contraire au principe de

sujétion »229

, et l’absence de lien de sujétion fait échec à la nature potestative d’un

droit.

Reste que l’absence de lien de sujétion ne suffit pas à disqualifier l’offre en

engagement unilatéral de volonté. La Cour de cassation affirme, dans l’arrêt susvisé

du 7 mai 2008, que l’offre de contrat est un acte obligeant son auteur, ce qui permet

de la qualifier d’engagement unilatéral de volonté. Le projet de la Chancellerie

reprend cette analyse jurisprudentielle à l’article 25, lequel dispose que « l’offre

oblige son auteur à la maintenir pendant le délai expressément prévu, ou à défaut

pendant un délai raisonnable ». Au-delà de la qualification de l’offre, cet article rend

efficace l’idée selon laquelle l’acte unilatéral peut être une source autonome

d’obligations, au même titre que la convention. Pour autant si l’offre de contrat est

un engagement unilatéral de volonté, il doit être admis que le déclarant ne puisse pas

reprendre son consentement et que s’il violait son engagement le bénéficiaire

pourrait obtenir l’exécution forcée du contrat dès acceptation de l’offre dans les

formes et conditions prévues.

229

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op. cit. n° 207.

Page 96: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 96 -

Si l’exercice du droit potestatif n’a pas pour effet de créer des obligations à la

charge du potentior, nous verrons qu’il produit inéluctablement des effets juridiques

eux-mêmes créateurs d’obligations. D’autre part, il ne faut pas en déduire l’absence

de force obligatoire de l’acte juridique accompli.

II - L’extériorité de la manifestation unilatérale de volonté

Conformément au régime de l’acte unilatéral230

, aucune forme de principe

n’est exigée pour l’exercice du droit potestatif (A). Néanmoins, il doit parvenir

significativement à la connaissance du sujet passif (B).

A - L’expression de la manifestation unilatérale de volonté

L’acte par lequel est exprimée la volonté du potentior peut être exprès

(lorsqu’il procède d’une expression claire), ou tacite (lorsqu’il se déduit d’une

manifestation indirecte).

1- Le respect de la forme prévue par la loi ou les parties

Lorsque le droit potestatif conventionnel est d’origine légale, la loi impose le

respect d’un certain formalisme231

à peine de nullité, tout au moins en cas d’option

pour l’une des branches de l’alternative : c’est ainsi, par exemple, que l’article

L.271-1 du code de la construction et de l’habitation prévoit que l’acquéreur qui

entend user du droit de rétractation instauré par cet article doit notifier sa décision au

vendeur, par « lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout

autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date

de réception ou de remise. » En revanche, aucune forme n’est exigée pour le cas où

l’acquéreur refuserait d’exercer cette faculté légale de rétractation, son silence valant

refus de s’en prévaloir à l’expiration du délai.

230

Cf. O. BARRET, Rép. civ., Promesse de vente, n°166. 231

Pour une étude sur le formalisme, cf. L. LESAGE et B. NUYTTEN, Regards sur les notions de

consensualisme et de formalisme, Rép. Defrénois. 1998. p. 497.

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En matière conventionnelle, les parties ont en principe pris soin de prévoir

comment l’acte devra être exprimé : lettre recommandée, versement du prix et des

frais d’acquisition en la comptabilité du notaire chargé de recevoir l’acte

authentique, notification par acte d’huissier, signature de l’acte authentique

constatant le caractère définitif de la vente, procès-verbal en la forme authentique …

L’acte unilatéral doit alors remplir les formes prévues au contrat, à peine de nullité.

Dans un arrêt du 11 mai 2005, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation232

a néanmoins jugé que l’option d’achat peut être levée, en cours de

procès, par la signification des conclusions récapitulatives du bénéficiaire. Cette

solution est admise alors même que les formes de la levée de l’option étaient fixées

dans le contrat de promesse. En l’espèce, le contrat prévoyait que « la cession des

parts, si elle est réalisée, s'effectuera à première demande du bénéficiaire, formulée

par lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, adressée au promettant ».

Suite à un refus du promettant de régulariser l’acte de vente sous le prétexte (non

fondé selon l’analyse des juges du fond) que la promesse était nulle pour

indétermination du prix, le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente a

assigné son cocontractant dans le but de faire constater la validité de la promesse. La

Cour de cassation relève que l’assignation par le bénéficiaire « concrétisait déjà sa

volonté de maintenir son engagement et de lever l'option », et qu’il avait

« régulièrement levé cette option en signifiant ses conclusions récapitulatives ».

Notons, qu’en l’espèce, les conclusions récapitulatives ont été signifiées le premier

jour du délai fixé pour lever l’option. Si les formalités du procès peuvent « suppléer

aux formalités contractuelles pour venir exprimer la volonté de contracter d'une

partie »233

, il faut en déduire que le bénéficiaire peut, dans ce cas dégagé par la

jurisprudence, ne pas respecter le formalisme imposé par le contrat. Cette solution se

justifie par la similitude d’effet entre la lettre recommandée avec demande d’avis de

réception, et l’assignation : toutes deux sont portées à la connaissance du

cocontractant, et ont date certaine. Il s’agirait ici d’une transposition du choix ouvert

à l’article L.271-1 du code de la construction et de l’habitation, entre la lettre

232

Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2005Arr. inédit n°03-20.669, RTD. civ. 2006 p. 106, obs. J. MESTRE et

B. FAGES. 233

J. MESTRE et B. FAGES, ibid.

Page 98: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 98 -

recommandée avec demande d'avis de réception et « tout autre moyen présentant des

garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise ».

2- L’expression tacite de la volonté unilatérale

Si le contrat ne prévoit aucun formalisme, l’exercice du droit potestatif doit

se déduire d'une attitude dénuée d'ambigüité. Il résultera alors d’indices portant sur

le choix implicite du potentior. En cas de litige sur l’existence de l’exécution d’un

acte tacite, les juges du fond sont amenés à analyser les circonstances et les attitudes

contractuelles de nature à la révéler.234

L’acceptation tacite de la levée d’option par

le bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente peut résulter d’une convocation

chez un notaire pour signer l’acte de vente authentique235

, de la prise de possession

de l’immeuble par le bénéficiaire236

, du paiement du prix237

, ou même du versement

d’un acompte sur le prix238

… En tout état de cause, l’acceptation tacite « résulte

d’actes non équivoques qui l’impliquent nécessairement»239

.

La renonciation tacite à se prévaloir d’un droit peut également être déduite de

l’émission d’un acte positif : c’est ainsi qu’en réitérant la vente par acte authentique,

le bénéficiaire d’une promesse de vente sous condition suspensive est en principe

censé avoir renoncé à se prévaloir de la condition qu’elle soit pendente conditionne,

défaillie ou réalisée. Notons cependant que, dans un arrêt du 23 janvier 1996, la

première chambre civile de Cour de cassation a jugé que l'exécution du contrat ne

pouvait valoir renonciation non équivoque aux conséquences juridiques de la

défaillance de la condition240

. La question de la renonciation à la caducité par

l’exécution du contrat n’est pas définitivement tranchée par la jurisprudence. Aussi,

est-il utile de prévoir dans la promesse de vente la forme d’expression par laquelle la

234

J. MESTRE, Comportement et qualification des contrats, RTD. civ., 1994, p. 595. 235

Cette convocation doit être émise à l’initiative du bénéficiaire de la levée d’option : Cass. civ. 1ère

,

4 mai 1954, JCP G. 1954, IV, 86 ; sur la délivrance adressée par le bénéficiaire au vendeur d’une

sommation de réitérer la vente, Cass. civ. 3ème

, 26 janvier 2011, n° 09-71.486, AJDI 2011, p. 320. 236

Cass. civ. 1ère

, 6 juillet 1964, Bull. civ., 1964, I, n° 369. 237

Cass. civ. 1ère

, 13 juin 1961, JCP G. 1961, IV, 115. 238

Cass. civ 3ème

, 27 mars 1973, Bull. civ., 1973, III, p. 234. 239

Cass. com., 20 novembre 2011, n° 00-14. 177, Dalloz. Jur. 240

V. obs. de J. MESTRE sur l’arrêt cité, RTD. civ., 1996, p. 608.

Page 99: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 99 -

renonciation à la condition suspensive doit avoir lieu241

. Si celle-ci n’a pas été

prévue, il peut être recommandé d’intégrer dans le contrat de vente authentique la

déclaration expresse du bénéficiaire de la condition qu’il y a bien renoncé, et que

cette renonciation ne vaut pas novation du contrat pouvant entraîner l’application du

délai de réflexion prévu à l’article L. 271-1 du code de la construction et de

l’habitation. En l’absence de toute indication, la preuve de l’acte tacite doit être

apportée par la personne qui s’en prévaut.

3- L’expression silencieuse de la manifestation de volonté

Si l’acte peut être tacite, il n’en demeure pas moins qu’une extériorisation

suffisante de la volonté est nécessaire. En l’absence de tout acte déclaratif, la volonté

ne peut être correctement appréhendée242

. La jurisprudence se refuse à déceler une

valeur déclarative dans le silence du bénéficiaire d’un droit d’option, c'est-à-dire si

celui-ci ne manifeste pas sa volonté « par rapport à un acte juridique, ni par une

action spéciale à cet effet (volonté expresse) ni par une action d'où l'on puisse

déduire sa volonté (volonté tacite) ».243

Dans un arrêt du 26 janvier 1993244

, la

troisième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé que le silence du

bénéficiaire vaut renonciation à se prévaloir de son droit d’option. En l’espèce, une

promesse unilatérale de vente a été conclue pour une durée indéterminée. Par la

suite, dans trois courriers successifs adressés au bénéficiaire, le vendeur a déclaré

qu’il n’entendait plus régulariser l’acte de vente pour divers motifs. Le bénéficiaire

ne réagit pas à ces courriers, et lève finalement l’option deux mois après le dernier

courrier. La Cour de cassation a considéré que le silence gardé pendant une longue

période par le bénéficiaire « démontrait qu’il avait accepté la position » du

promettant et « avait renoncé à se prévaloir de la promesse » qui lui avait été

consenti.

241

Pour une rédaction de clause, cf. B. NUYTTEN, La renonciation à la condition suspensive :

quand c’est le mécanisme qui défaille, RDC. 2008, op. cit, p.965. 242

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n° 292 et suiv. 243

R.DEMOGUE, Traité des obligations en général, t. 1, Rousseau, 1923, n° 185, p. 299. 244

Cass. civ. 3ème

, 26 janvier 1993, D. 1994, p. 69, note J. MOURY. En l’espèce, la promesse de

vente porte sur une cession de parts sociales.

Page 100: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 100 -

Néanmoins, le contrat et la loi peuvent expressément assigner une

signification au silence, lui donnant valeur d’acceptation ou de renonciation au droit

en présence. Dans ce cas, si le bénéficiaire du droit garde le silence, il aura

définitivement et utilement exercé son droit dès que le délai imparti pour le faire

aura expiré. Nous pouvons remarquer que si le droit est exercé définitivement à

l’expiration du délai et porté à la connaissance du sujet passif après l’expiration du

délai, le droit est exercé en dehors du délai, c'est-à-dire à un moment où le droit

potestatif est devenu caduc par expiration du terme. Pour autant, si c’est à ce

moment que le choix du potentior est définitif, il faut constater qu’il a bien exercé

son droit dans le délai imparti en respectant le silence.

De façon plus générale, la doctrine relève que le contexte dans lequel

s’inscrit le silence (notamment les usages professionnels ou commerciaux, les

relations d’affaires, ou si le droit à exercer est stipulé au profit exclusif) peut être

déterminant pour en analyser le sens affecté, et lui faire produire les effets attachés à

l’acte juridique.245

En tout état de cause, étant donné les appréciations versatiles de

la jurisprudence en matière de signification donnée à l’acte tacite et au silence, la

sécurité juridique doit, là encore, imposer aux parties et au rédacteur de la promesse

de vente de prévoir précisément les modalités d’expression de la volonté unilatérale

du titulaire du droit potestatif. Celle-ci, pour produire ses effets, doit être non

seulement extériorisée mais également portée à la connaissance du sujet passif.

B- Le caractère réceptice de la manifestation unilatérale

La doctrine et la jurisprudence font figurer la manifestation unilatérale de

volonté du potentior parmi les actes réceptices246

. Pour Messieurs MARTY et

RAYNAUD, il faut distinguer « deux sortes d’actes unilatéraux quant à leur

formation, suivant que la manifestation unilatérale de volonté de leur auteur se suffit

à elle-même ou suivant qu’elle doit être portée à la connaissance d’une autre

personne. C’est la distinction des déclarations faites à partie ou non faites à partie

245

Cass. com. 24 mai 2005, RTD. civ. 2005. p. 588, obs. J. MESTRE et B. FAGES. 246

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n° 622.

Page 101: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 101 -

qui est aussi dite distinction des déclarations actives et des déclarations passives ou

encore la distinction des déclarations réceptices et des déclarations non réceptices

(….) Ainsi, est un acte réceptice la résiliation d’un contrat par volonté unilatérale en

ce qu’elle n’est efficace que si elle est notifiée à l’autre partie ».247

1- La soumission de l’exercice du droit potestatif à la connaissance du

sujet passif

Si l’acte réceptice n’a d’efficacité juridique que par la notification qui en est

faite à son destinataire, la notification est donc constitutive de l’acte juridique.

Comme le fait remarquer Monsieur BRENNER, il faut distinguer entre la validité

d’un acte qui est constituée dès qu’il a été formé régulièrement, et son efficacité qui

est soumise « à des conditions étrangères à sa validité et dont il n’est pas nécessaire

qu’elles soient remplies au moment de sa formation ». La validité et l’efficacité de

l’acte concourent toutes deux à sa perfection, c’est-à-dire à son « aptitude à produire

les effets de droit voulus : est parfait l’acte qui réunit tous les éléments et qualités

nécessaires à la réalisation de son objet. » 248

Si l’exercice du droit potestatif est valable dès la réalisation de l’acte

juridique consistant à manifester la volonté de son titulaire, sa perfection est soumise

au fait qu’il soit porté à la connaissance du sujet passif. En effet, la manifestation

unilatérale de volonté du potentior a pour effet de modifier instantanément la

situation juridique du sujet passif, mais cette modification ne peut pas produire effet

si elle n’est pas notifiée à la personne qui va la subir. C’est, par exemple, à l’instant

où est levée l’option d’achat dans une promesse de vente que se forme la rencontre

de volontés. Pour que se produise la rencontre des volontés, il n’est peut-être pas

nécessaire que le sujet passif soit informé de la levée d’option, mais la transmission

de la volonté à la connaissance du sujet passif est nécessaire à son efficacité. C’est

donc à la date de la levée de l’option d’achat par le bénéficiaire d’une promesse de

vente que la vente est définitivement formée, sans qu’il puisse y avoir d’effet

rétroactif puisque c’est au jour de la levée de l’option que le bénéficiaire consent

247

G. MARTY et P. RAYNAUD, Droit civil, les obligations, tome 1, les sources, Sirey, 2ème

éd.

1988, n° 361. Les termes de la citation figurant en italiques sont mis entre guillemets par les auteurs. 248

C. BRENNER, Acte, op.cit., n°87.

Page 102: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 102 -

définitivement au contrat de vente. Mais pour que la levée de l’option soit parfaite et

puisse produire utilement les effets de son exercice, encore faut-il (et il suffit)

qu’elle soit portée à la connaissance du promettant. On ne voit d’ailleurs pas

comment la décision de lever d’option dans une promesse de vente, ou d’exercer un

droit de préemption par exemple, pourrait être efficace et produire ses effets sans

être portée à la connaissance du propriétaire.

La notification du choix potestatif peut se faire par tout moyen, au moins à

défaut de forme expressément choisie par la loi ou par les parties : il peut s’agir

d’une lettre recommandée, d’une sommation, ou de toute action non équivoque

parvenant au sujet passif. Cette extériorisation dirigée vers le sujet passif maintient

les intérêts de celui dont va être modifiée la situation juridique, autant qu’elle permet

de contrôler la volonté réelle du sujet actif à modifier de lui-même la situation

juridique.

2- Le délai imparti pour la notification de l’exercice du droit potestatif

La nature réceptice de l’acte juridique par lequel s’exerce le droit potestatif

renvoie à la question du délai dans lequel l’acte doit être porté à la connaissance du

sujet passif. Si le droit potestatif doit s’exercer dans un certain délai, doit-on en

conclure que le potentior doit émettre son choix dans ce délai, ou est-ce que la

notification de l’exercice du droit potestatif doit être reçue par le sujet passif dans ce

délai ? S’il est prévu, par exemple, que le bénéficiaire pourra substituer dans le

bénéfice de la promesse de vente tout tiers de son choix, « dans le délai d’un mois à

compter de la signature des présentes », faut-il considérer que le promettant

s’engage à consentir un droit potestatif de substitution pendant un mois, ou que toute

substitution qui ne lui serait pas notifiée dans le délai d’un mois serait nulle et non

avenue ? L’exercice du droit potestatif est-il efficace si le bénéficiaire envoie dans le

délai d’un mois un courrier informant le promettant de sa décision, mais que le

promettant ne reçoit le courrier qu’après l’expiration du délai convenu ?

Page 103: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 103 -

2.1- La signification du délai imparti en raison de la nature du droit

potestatif

En raison de la nature même du droit potestatif, il pourrait être considéré que

la manifestation de la volonté unilatérale dans le délai imparti puisse suffire à rendre

valable l’exercice du droit249

. L’exercice du droit potestatif dans un certain délai

devrait ainsi signifier que le choix du potentior doit être émis dans ce délai, non pas

qu’il doive parvenir au sujet passif dans ce délai. L’efficacité de l’exercice du droit

potestatif serait soumise à l’exigence de notifier l’acte au sujet passif, la notification

pouvant intervenir après le délai de validité du droit potestatif.

Cette question renvoie en fait à la controverse doctrinale relative à la

formation du contrat entre absents - c’est-à-dire lorsque « l’acceptation n’est pas

donnée en présence de l’autre partie »250

- opposant les partisans de la théorie de

l’émission à celle de la réception. La théorie de l’émission consiste à retenir que le

contrat est formé dès que le destinataire de l’offre a émis son acceptation en

direction de l’offrant. La théorie de la réception exige quant à elle que le contrat se

forme au moment de la réception de l’acceptation par l’offrant.

2.2- La détermination jurisprudentielle du délai imparti

Le code civil ne définit aucun principe en matière contractuelle, mais la Cour

de cassation privilégie en principe la théorie de l’émission251

en précisant toutefois

qu’il s’agit là d’un domaine réservé à l’appréciation des juges du fond252

. Dans un

arrêt du 15 juin 2005253

, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a ainsi

affirmé que pour qu’un acte soit valable, peu importait que la notification soit

parvenue à son destinataire. En l’espèce, une SAFER254

a préempté une parcelle de

249

O. BARRET, Promesse de vente, Rép. civ. Dalloz, n° 142. 250

M.PLANIOL et G. RIPERT, Traité pratique de droit civil français, par P. ESMEIN, 2ème

édition,

L.G.D.J., 1952, n° 155. 251

Cass. com, 7 janvier 1981, n° 79-13.499, Bull. civ. 1981. IV, n° 14. 252

Cass. civ. 1ère

, 21 décembre 1960. 253

Cass. civ. 3ème

, 15 juin 2005, Bull. civ. 2005, III, n° 134 p. 122. 254

Société d'aménagement foncier et d'établissement rural.

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- 104 -

vignes suite à la notification qui lui a été adressée par le propriétaire, aux termes de

laquelle il l’informait de son intention de vendre le bien à un tiers. En vertu de

l'article R. 143-6 du Code rural, la décision de préemption d'une SAFER doit être

notifiée à l'acquéreur évincé par lettre recommandée avec demande d'avis de

réception dans un délai de quinze jours. La SAFER réalise donc cette formalité, mais

l’acquéreur évincé ne réclame pas le courrier recommandé auprès de la Poste.

Quelques jours plus tard, il assigne la SAFER en annulation de la décision de la

préemption, au motif que cette décision ne lui avait pas été notifiée. La Cour d’appel

fait droit à cette demande, en retenant qu'il n'y a pas notification à personne si la

lettre recommandée n'a pas été remise à son destinataire absent mais renvoyée à son

expéditeur. Si la lettre adressée à l’acquéreur ne lui est pas parvenue, la SAFER n’a

pas pu valablement notifier son avis de préemption dans le délai de quinze jours, et

la décision de préemption est nulle. La Cour de cassation rejette cette analyse en

affirmant que la condition de remise à la personne du destinataire absent de la lettre

recommandée n’est pas une exigence de la validité de la décision de préemption, dès

lors qu’elle n’est pas prévue par la loi.

L’avant-projet de réforme dirigé par CATALA envisage de remettre en cause

cette solution en prévoyant, à la suite des dispositions relatives à l’offre de contrat,

et à celles relatives à la promesse unilatérale de contrat et du pacte de préférence, un

article 1107 intitulé « De la date et du lieu de formation », dont les termes font

directement référence à la théorie de la réception : « Faute de stipulation contraire, le

contrat devient parfait par la réception de l’acceptation ; il est réputé conclu au lieu

où l’acceptation est reçue. »255

La théorie de la réception, appliquée au droit

potestatif, permet de s’assurer que le sujet passif a bien connaissance de la décision

définitive du titulaire du droit potestatif. Néanmoins, elle fait dépendre l’efficacité

du droit potestatif d’une action qui reste à accomplir par le sujet passif : il doit faire

acte de recevoir la notification qui lui est destinée. Alors que l’efficacité du droit

potestatif ne devrait dépendre que de son exercice, c’est-à-dire de la volonté

exprimée par son titulaire, l’application de la théorie de la réception force

255

Cette proposition est intégrée au projet de réforme de la Chancellerie qui la reprend in extenso en

son article 31.

Page 105: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 105 -

l’apparition d’un bilatéralisme au moment final de sa perfection. Subséquemment,

elle instaure un terme suspensif à l’efficacité du droit potestatif256

.

Dans un arrêt du 16 juin 2011257

, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation semble emprunter la voie de la théorie de la réception, dans une espèce

relative - encore - au droit de préemption de la SAFER. Après avoir préempté des

parcelles agricoles, une SAFER a notifié au preneur en place deux projets de

rétrocession portant sur certains biens objet de la préemption. Chacun de ces projets

a été suivi d’un projet modifiant l’assiette de la rétrocession. Le jour de la réception

de chacun des courriers rectificatifs, et dans le délai légal de deux mois258

, le preneur

en place a informé la SAFER qu’il entendait exercer ses droits de préemption

conformément aux termes des projets initiaux. Estimant que seule la réception de

l’acceptation pouvait former la vente et que tant qu’elle n’avait pas réceptionné les

acceptations du preneur il lui était loisible de révoquer ou de modifier les avis de

préemption, la SAFER refuse que soient exercés les droits de préemption tels que

prévus dans la première notification relative à chacun des droits. Le preneur en

place, se prévalant de l’affirmation que seule l’émission de l’acceptation forme le

contrat, l’assigne pour faire reconnaître son droit de propriété sur les parcelles

préemptées. La Cour d’appel fait droit à la demande du preneur en place, en

affirmant « qu'en l'absence de stipulation contraire, une convention est destinée à

devenir parfaite non par la réception par le pollicitant de l'acceptation de l'autre

partie mais par l'émission par celle-ci de l'acceptation ». Parce que les acceptations

ont été émises par le preneur préempteur avant - ou le jour - qu’il ne reçoive les

courriers rectificatifs, elles sont parfaites. La Cour de cassation réfute cette solution,

en subordonnant « la formation du contrat à la connaissance de l’acceptation de

l’offre par le pollicitant ». Les contrats n’ont pas pu se former parce « qu’à la date de

256

Sur les difficultés de preuve de la date de réception par le sujet passif, et plus généralement sur les

difficultés posées par la lettre recommandée, v. M. DAGOT, Les illusions de la lettre recommandée,

JCP N. 2003. 1266. 257

Cass. civ. 3ème

, 161 juin 2011, D. 2011, p.2260, note N. DESSAUX. 258

L’article L. 412-8 du code rural et de la pêche maritime dispose que « Le preneur dispose d'un

délai de deux mois à compter de la réception de la lettre recommandée ou de l'acte d'huissier pour

faire connaître, dans les mêmes formes, au propriétaire vendeur, son refus ou son acceptation de

l'offre aux prix, charges et conditions communiqués avec indication des nom et domicile de la

personne qui exerce le droit de préemption. Sa réponse doit être parvenue au bailleur dans le délai de

deux mois ci-dessus visé, à peine de forclusion, son silence équivalant à une renonciation au droit de

préemption. ». Les mêmes dispositions s’appliquent au droit de préemption urbain de l'article L. 213-

2 du code de l’urbanisme.

Page 106: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 106 -

la notification des offres rectificatives, la réponse du preneur sur les offres initiales

n'était pas parvenue au propriétaire ». Cet arrêt peut être analysé comme une

consécration de la théorie de la réception259

. Notons toutefois que la Cour de

cassation ne vise pas expressément la réception par l’auteur de la préemption du

courrier contenant acceptation, mais « la connaissance de l’acceptation », si bien que

nous pouvons en déduire que l’auteur de la préemption ne peut plus révoquer son

offre dès lors qu’il est établi qu’il a eu connaissance de l'acceptation du destinataire.

En ce sens, la date de réception de la notification importerait peu. Cette solution

serait alors à rapprocher de celle dégagée par la Cour d’appel d’Angers, dans un

arrêt ancien - mais souvent cité -, aux termes duquel il a été affirmé que, pour être

valable, l’acte d’option doit être porté à la connaissance du promettant dans le délai

d’option260

.

2.3- Les adaptations contractuelles

Etant donné l’importance de la question, et en l’absence de solution certaine,

il est nécessaire de prévoir dans le contrat de promesse de vente, au titre des droits

potestatifs qu’elle contient, le délai à l’intérieur duquel la décision du potentior doit

parvenir au sujet passif. Si la notification doit être réalisée par un exploit d’huissier,

ou la remise en main propre de la lettre d’acceptation, il suffit de préciser que cette

notification devra être réalisée dans le délai d’exercice du droit. Si la notification

emprunte la forme d’un courrier recommandé avec accusé de réception, il doit être

précisé si la lettre doit être émise, reçue, ou présentée dans ce délai. La date de

première présentation de la lettre par la Poste paraît être la plus judicieuse, car elle

permet de s’assurer que le droit a bien été exercé dans le délai fixé, que dans le

même délai le sujet passif a été mis en mesure d’en prendre connaissance, et de ne

pas subordonner l’efficacité de l’exercice du droit à une quelconque action de ce

dernier. Cette solution est celle adoptée pour la notification du droit légal de

rétractation : dans le silence de la loi, et par application du parallélisme des formes

avec la notification du droit de rétractation à l’acquéreur immobilier, il est admis que

« la lettre recommandée contenant la rétractation soit présentée pour la première fois

259

V. N. DESSAUX, ibid. 260

CA. Angers, 11 avril 1951, JCP G, 1951, I. 6615, note BECQUE.

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- 107 -

au vendeur au plus tard le dernier jour du délai »261

. Précisons que la notification

adressée au notaire n’est valable que si l’acte le prévoit expressément, ou si le

notaire est en possession d’un mandat lui permettant de représenter valablement la

personne destinataire de la notification262

. Une clause comportant ces indications, et

applicable à l’ensemble des droits potestatifs contenus dans la promesse de vente,

pourrait être rédigée ainsi qu’il suit :

« L’exercice du présent droit devra être notifié par son titulaire avant

l’expiration du délai stipulé ci-dessus pour sa validité, par lettre recommandée avec

accusé de réception adressée au notaire chargé de dresser l’acte authentique. Pour

que l’exercice du droit soit valable, cette lettre devra être présentée pour la

première fois par la Poste avant l’expiration de ce délai.»

SECTION II : Les effets de l’exercice du droit potestatif

L’exercice du droit potestatif a pour effet majeur de modifier la situation

juridique préexistante. Cet effet est inhérent à l’exercice du droit potestatif, il

s’accomplit systématiquement par l’exercice du droit potestatif sans dépendre d’une

autre volonté que celle par laquelle il se réalise (I). L’exercice du droit potestatif

produit également des effets subséquents, dont la mise en œuvre participe d’un

processus qui lui est extrinsèque (II).

I - La modification de la situation juridique préexistante

S’agissant de l’effet direct de l’exercice du droit potestatif, la notion de

modification de la situation juridique doit être définie pour en apprécier le contenu et

le particularisme (A).

261

M. DAGOT, La protection de l’acquéreur immobilier et l’article 72 de la loi SRU, JCP N. 2001.

p. 912. 262

Cass. civ. 3ème

, 5 juin 2007, AJDI 2008, p. 141 : à propos de l’exercice du droit de préemption

urbain, la Cour de cassation affirme que si la déclaration d'intention d'aliéner prévoit la notification

de la décision de préemption au propriétaire, le transfert de propriété intervenant de plein droit à la

date de réception par le vendeur de la notification ne peut pas avoir lieu par la seule notification de

préemption au notaire.

Page 108: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 108 -

La modification de la situation juridique apparaît être non seulement l’effet

automatique du droit potestatif, mais également son objet. Elle doit être entendue de

manière extensive si l’on s’attache à analyser l’impact immédiat de la manifestation

de volonté sur le sort du contrat en cours (B).

A - Critères de la notion de modification de la situation juridique

appliquée à l’exercice du droit potestatif

En définissant les droits potestatifs comme des « pouvoirs par lesquels leurs

titulaires peuvent influer sur les situations juridiques préexistantes en les modifiant,

les éteignant ou en créant de nouvelles au moyen d’une activité propre

unilatérale »,263

la notion de situation juridique est au centre des critères

caractérisant ces droits.

L’exercice unilatéral d’un droit doit être factuellement analysé afin d’évaluer

s’il a, de lui-même, emporté modification de la situation juridique préexistante. La

caractérisation du changement de la situation juridique par manifestation unilatérale

de volonté est donc le moyen d’identifier l’effet de l’exercice d’un droit en vue de

déterminer s’il peut être ou non un droit potestatif. En ce sens, la modification de la

situation juridique n’est donc pas seulement un événement scindant l’existence du

contrat entre les moments précédant et suivant sa survenance, mais est également

une notion juridique permettant de signifier un fait (intervention d’un changement

dans le rapport juridique), et de qualifier un droit (potestatif) en vue de lui appliquer

un régime déterminé.

1- Définition de la situation juridique préexistante

Monsieur NAJJAR définit la situation juridique comme celle qui « peut être

décrite avec exactitude et qui est juridique parce qu’il en découle des effets reconnus

par la loi ou la convention »264

, la situation juridique préexistante étant celle qui

existe avant l’exercice du droit potestatif. Les promesses de vente constituent des

263

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n° 99. 264

I. NAJJAR, ibid., n°30.

Page 109: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 109 -

situations juridiques préexistantes à l’exercice des droits potestatifs qu’elles

contiennent. Elles sont des situations juridiques parce que de leur conclusion

découlent des effets juridiques : le promettant s'interdit tout acte susceptible de

porter atteinte au droit de propriété et aux conditions de jouissance promises à

l'acquéreur, il s'engage à conserver l'immeuble dans l’état dans lequel il se trouve au

jour de la promesse…

La situation juridique à modifier est celle intéressant autrui, ce qui permet

d’exclure certains mécanismes de la catégorie des droits potestatifs. Il en va ainsi de

l’offre de contrat, qui ne modifie à son émission que la situation juridique de son

auteur265

.

Pour Monsieur NAJJAR, la situation juridique préexistante à l’exercice d’un

droit d’option se singularise par la coexistence de deux éléments particuliers :

« l’incertitude qui y plane et l’alternative qui en découle par l’effet de la loi ou de la

convention. »266

. Ces deux éléments ont fait l’objet de développements antérieurs, au

titre de la nécessité de choisir qu’ils influent267

. Tant que le titulaire du droit

potestatif intégré au contrat n’a pas exercé le pouvoir de choix qui lui appartient, le

contrat préparant la vente est en suspens dans au moins un des termes qu’il contient,

et la vente définitive ne peut pas être conclue. Ainsi, tant que le titulaire d’un droit

de substitution ou de préférence ne s’est pas prononcé, l’identité du bénéficiaire

définitif du contrat n’est pas connue, tant que le bénéficiaire d’un droit de

rétractation peut encore se rétracter on ne peut présumer efficacement de la

poursuite du contrat en cours… La situation juridique née de la conclusion du

contrat de promesse est en « attente ». Si la vente est définitivement conclue, il faut

en déduire que les droits potestatifs inhérents à la promesse de vente ont été exercés,

la conclusion de la vente pouvant elle-même opérer l’exercice tacite de l’option,

sous les réserves précédemment exprimées.

265

S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n°208. 266

I. NAJJAR, ibid., n°30. 267

Cf. supra., les développements relatifs au délai d’exercice du droit potestatif, p. 52 et suiv.

Page 110: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 110 -

Dire que la manifestation de volonté suffit à modifier la situation juridique

n’est pas de nature à contester la nécessité d’accomplir un certain formalisme pour

que l’instauration de la situation juridique nouvelle puisse effectivement avoir lieu.

L’exigence de la réalisation d’un formalisme renvoie à la question de la perfection

de l’acte unilatéral postérieurement à son exercice. Comme l’indique Monsieur

NAJJAR à propos de la levée de l’option par le bénéficiaire d’une promesse

unilatérale de vente, « il ne faut pas confondre effets de la conclusion du contrat

(enregistrement, formalités, passation de l’acte authentique, publicité, etc.) et cause

directe de sa conclusion ou sa formation »268

. La levée de l’option est, « en tant

qu’acte « formateur », suffisante à la conclusion du contrat définitif final »269

, alors

que l’accomplissement du formalisme exigé postérieurement à l’exercice du droit

potestatif est un effet de son efficience.

2- La détermination de la modification apportée à la situation juridique

Retenir la qualification de droit potestatif pour définir une prérogative

donnée à une personne nécessite donc de rechercher si l’exercice du droit potestatif

par son titulaire modifie la situation juridique préexistante : c’est ainsi que l’exercice

du droit d’option par le bénéficiaire d’une promesse de vente modifie le lien

contractuel existant par la formation de la vente, que l’exercice du droit de

substitution ou de préemption modifie la promesse de vente par modification de la

personne contractante, que l’exercice du droit de rétractation comporte en lui-même

l’extinction du lien contractuel.

L’exercice du droit potestatif modifie la situation juridique, et celle-ci a pour

effet propre de faire naître de nouveaux droits trouvant leur source dans l’accord

initial. Ainsi, l’exercice de l’acte de substitution dans le bénéfice d’une promesse de

vente modifie la situation juridique du promettant qui se trouve alors engagé dans un

contrat avec une autre personne que celle initialement désignée. La réitération de

l’acte de vente au profit du substitué n’est pas l’effet de l’exercice du droit potestatif,

268

I. NAJJAR, Les contrats d’option, op. cit., n° 23. 269

Ibid.

Page 111: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 111 -

mais l’effet de la substitution utilement opérée à son profit. Cette distinction est

importante, parce que l’objet du droit potestatif en dépend.

Monsieur VALORY, pour expliquer la distinction entre l’exercice du droit

potestatif et les droits qui découlent de la modification de la situation juridique,

prend l’exemple particulièrement évocateur du droit d’acquérir la mitoyenneté d’un

mur. En exerçant son droit, le potentior « donne naissance à une situation juridique

nouvelle : jusqu’alors propriété exclusive du voisin, le mur devient un bien mitoyen.

Le propriétaire dispose alors d’un droit réel de copropriétaire distinct du droit

d’obtenir la mitoyenneté et qui en est la conséquence. Cette possibilité d’acquérir un

droit nouveau grâce au droit potestatif justifie qu’il soit parfois présenté comme un

instrument, un droit-moyen permettant à son titulaire de réaliser de nouveaux effets

juridiques »270

. Monsieur NAJJAR résume le « droit-moyen » ou « secondaire »

comme celui permettant à « son titulaire de réaliser de nouveaux effets juridiques

par simple déclaration de volonté analysée en un «acte-condition », c’est-à-dire en

un acte ayant pour effet d’engendrer une situation générale et impersonnelle qui

n’était pas acquise de plein droit.»271

Ainsi, par exemple, l’exercice du droit de

substitution a pour objet d’instituer le substitué dans le bénéfice de la promesse et de

lui conférer la qualité d’acquéreur. Dès lors, si toutes les modalités de la promesse

de vente sont réalisées, il pourra obtenir la conclusion de la vente à son profit. La

conclusion de la vente à son profit est une conséquence de l’exercice de la

substitution. Le cas de l’exercice du droit d’option par le bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente est plus subtil : par la levée de l'option, le contrat de

promesse de vente est transfiguré en vente, cette dernière étant translative de

propriété. Le titulaire du droit d’option acquiert la propriété du bien vendu, par

l’effet automatique du transfert opéré à son profit. Il acquiert donc un droit de

propriété sur la chose, mais ce droit réel est bien distinct du droit de former la vente.

De la même façon, l’exercice du droit de rétractation offert à une partie au contrat

« entraîne l’anéantissement du contrat »272

et l’acquéreur perd alors tout droit sur la

270

S. VALORY, ibid., n°34. L’idée de droit-moyen a été développée par L. BOYER, La notion de

transaction. Contribution à l’étude des concepts de cause et d’acte déclaratif, op. cit. 271

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., note sous n° 99 bis ; v. également I. NAJJAR, La postestativité, à paraître. 272

Cass. civ. 3ème

, 13 mars 2012, D. 2012, P 876 ; JCP N 2012, p. 561, obs. LOISEAU.

Page 112: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 112 -

chose objet du contrat, mais la perte de tout droit est différente du droit de se

rétracter, elle en est la suite.

Comme le fait remarquer Monsieur NAJJAR, la modification de la situation

juridique n’est pas propre à l’exercice du droit potestatif, puisque « toute prérogative

juridique provoque, par son exercice, le déroulement d’un certain nombre d’effets

nouveaux totalement ou partiellement »273

. Le critère de distinction entre les droits

potestatifs et les autres droits n’est pas la modification de la situation juridique

préexistante, mais la modification de la situation juridique par une manifestation

unilatérale de volonté à laquelle le sujet passif ne peut rien opposer puisqu’il est

assujetti. C’est bien le caractère de la sujétion appliqué à la modification de la

situation juridique qui confère au droit potestatif toute son originalité, voire sa

véritable autonomie, si l’on conclut avec Monsieur NAJJAR que « l’impossibilité

dans laquelle se trouvent ceux qui y sont assujettis de paralyser et d’empêcher les

effets de l’exercice des droits potestatifs justifie bien le caractère autonome de ceux-

ci, car elle ne se retrouve pas dans l’exercice des autres pouvoirs juridiques. »

B - Appréhension extensive de la notion de modification de situation

juridique

1- La modification de la situation juridique, objet du droit potestatif

La situation juridique qui va être modifiée est présentée par certains auteurs

comme l’objet même du droit potestatif274

. D’autres retiennent que l’objet du droit

potestatif est la liberté du potentior275

, et d’autres encore que le droit potestatif est un

droit sans objet276

. A l’étude de la nature du droit potestatif, on peut s’interroger sur

le fait de savoir si la génération du lien de sujétion ne peut pas constituer l’objet du

droit potestatif. En effet, même si cette opinion n’a pas fait l’objet d’étude de la part

273

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n°102. 274

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral »

op.cit., n°20 ; S. VALORY, La potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n°35. 275

J. DABIN, Le droit subjectif, D. 1952. 276

C. SAINT-ALARY-HOUIN, Le droit de préemption, thèse, L.G.D.J., 1979 ; G. MICHAELIDES-

NOUAROS, L’évolution récente de la notion de droit subjectif, cités par S. VALORY, ibid., n°35.

Page 113: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 113 -

la doctrine, il apparaît que le droit potestatif repose fondamentalement sur

l’assujettissement du sujet passif. Seul le lien de sujétion justifie que la situation

juridique puisse être inéluctablement modifiée par l’émission de la volonté

unilatérale du potentior. Quoi qu’il en soit, si l’on retient, à l’instar de la doctrine

majoritaire, que la modification de la situation juridique est l’objet du droit

potestatif, l’objet de ce droit est identique à l’effet de son exercice. Cette solution

peut être idéalement retenue lorsque les droits potestatifs sont insérés dans un

contrat. Dans ce cas, quel que soit le droit potestatif en présence, il a toujours pour

objet d’impacter sur le déroulement du contrat, donc de modifier la situation

juridique en cours.

Monsieur VALORY fait remarquer que retenir la modification de la situation

juridique comme objet du droit potestatif peut poser problème quand le droit

potestatif est d’origine légale et qu’il existe avant que ne soit constitué son objet,

c’est-à-dire avant que n’apparaisse la situation juridique permettant son exercice. Il

vise le droit de retrait légal, lequel est défini comme « le droit accordé à certaines

personnes de prendre pour elles un achat fait par un autre en se substituant à celui-ci

comme acheteur. »277

. C’est par suite de la conclusion du contrat de vente au profit

d’un tiers que le titulaire du droit de retrait va pouvoir se substituer à l’acquéreur

originaire. La substitution a alors un effet rétroactif puisque l’exercice du droit de

retrait propulse le substitué dans le contrat aux lieu et place de l’acquéreur

originaire, et ce dès le jour de la conclusion du contrat de vente. Si le droit potestatif

de retrait existe avant la conclusion du contrat de vente, il est sans objet à sa

naissance puisqu’il précède la situation juridique à modifier (c’est-à-dire le contrat

de vente au profit du tiers acquéreur). Cette solution n’est pas différente de celle

existant en présence d’un droit de préemption ou d’un pacte de préférence, si bien

277

M. PLANIOL, Traité élémentaire de droit civil, 1905, tome 2, n°1647, p.544. Le droit de retrait

est un droit de préemption qui s’exerce après conclusion de la vente au profit de l’acquéreur d’un

bien - nommé le retrayé – qui en a payé le prix. Le bénéficiaire du droit de retrait, nommé le

retrayant, a le pouvoir de se substituer au retrayé moyennant le remboursement du prix et des frais

engagés par ce dernier. Le droit de retrait des beaux-arts exercé par l’Etat après la vente de l’œuvre

d’art est un exemple de droit de retrait. Néanmoins, le législateur qualifie ce droit de préemption.

Seule la doctrine utilise encore la notion de droit de retrait, pour distinguer les droits de préemption

mis en œuvre avant la conclusion de la vente et après la conclusion de la vente, seule cette dernière

organisant une véritable substitution d’acquéreur.

Page 114: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 114 -

que la question de l’existence de l’objet peut se poser indifféremment pour

l’ensemble de ces droits, quelle que soit leur origine légale ou conventionnelle.

Si les droits de préemption sont d’origine légale, et les droits de préférence

d’essence conventionnelle (on parle de « pacte »), on peut constater qu’ils ont la

même structure d’exercice. Le pacte de préférence est la convention par laquelle un

promettant s’engage, pour le cas où il se déciderait à vendre un bien déterminé, à en

faire prioritairement la proposition au bénéficiaire. Le bénéficiaire du pacte est

titulaire d’un droit potestatif d’option dès la conclusion du pacte, mais la réalité de

son droit est soumis à la décision unilatérale du propriétaire d’aliéner son bien. A la

différence de la promesse unilatérale de vente, le promettant ne s’engage pas à

vendre, mais à préférer le bénéficiaire s’il se décidait à vendre. Dès que le vendeur

consent à vendre, le bénéficiaire du pacte se trouve dans une situation similaire à

celle dont bénéficie le titulaire d’un droit d’option dans une promesse unilatérale de

vente. Le bénéficiaire peut alors décider soit de renoncer à l’achat, soit de se porter

acquéreur, aux charges et modalités prévues par le pacte de préférence278

. Si le

bénéficiaire décide d’acheter, le vendeur ne peut pas efficacement s’y opposer. Le

droit de préemption fonctionne selon le même schéma, puisqu’il s’agit là encore

d’un droit préférentiel d’acquérir un bien pour le cas où son propriétaire l’aliénerait.

Le préempteur bénéficie également d’un véritable droit d’option dès que l’intention

de vendre lui est notifiée. S’il exerce son droit, il est substitué dans le contrat au lieu

et place de l’acquéreur originaire, et doit régulariser la vente aux charges et

conditions de la vente négociée par ce dernier.

Le pacte de préférence et le droit de préemption ne sont pas des mécanismes

complétement similaires, notamment parce qu’ils ont des fonctions dissemblables,

mais les droits potestatifs qu’ils instaurent sont identiques : outre qu’ils s’exercent

au moyen d’un acte unilatéral d’option, il s’agit de droits qui modifient la situation

juridique antérieure du vendeur, puisque qu’ils opèrent par leur mise en œuvre la

vente définitive au profit du titulaire du droit, sans que le vendeur - ou l’acquéreur

évincé - ne puisse s’y opposer. Ce qui importe ici est de définir à quel moment est né

278

En général, il est prévu que la vente aura lieu aux charges et conditions de la cession négociée

entre le vendeur et le tiers acquéreur.

Page 115: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 115 -

le droit de préemption, de préférence, ou de retrait, par rapport à la modification de

situation juridique qu’emporte son exercice.

Qu’il s’agisse de droits trouvant à s’exercer après la conclusion du contrat de

promesse (droit de préférence, droit de préemption), ou postérieurement à la

conclusion de l’acte de vente (droit de retrait), ce sont des droits qui dépendent, pour

leur exercice, de l’expression de la volonté du propriétaire d’aliéner le bien. En

attendant ce moment, le titulaire du droit de préemption ou du pacte de préférence

est simplement celui qui est désigné, par la loi ou par la convention, comme celui

qui devra être préféré à tout autre acquéreur. Il ne peut exercer son droit qu’au

moment où le vendeur exprime son intention de vendre, c’est-à-dire au moment où

la situation juridique intéressant le vendeur se forme. Si le pacte de préférence a été

conclu à durée indéterminée, c’est à compter de la notification faite par le vendeur

de sa décision de vendre, que le titulaire du droit de préférence peut être mis en

demeure de se prononcer sur sa volonté d’acquérir, et que commence à courir délai

de prescription extinctive. Dans un arrêt du 22 décembre 1959279

, la première

chambre civile de la Cour de cassation a ainsi affirmé à propos d’un pacte de

préférence figurant dans un acte de partage successoral que « la prescription ne court

pas contre celui qui est dans l'impossibilité absolue d'agir par suite d'un

empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention ou de la force

majeure ».

Si la modification de la situation juridique est l’objet du droit potestatif, il

faut retenir que les droits potestatifs de préférence, de retrait et de préemption

préexistent à leur objet. Monsieur VALORY note que le « problème peut cependant

être résolu par le recours à la notion de droit éventuel. Le droit éventuel étant celui

dont la réalisation dépend d’un élément essentiel à son existence, le droit légal de

retrait est un droit potestatif éventuel dont l’élément faisant défaut est précisément

son objet. »280

En ce sens, le droit de retrait serait un droit potestatif en cours

d’existence mais suspendu dans son exercice à l’expectative de la conclusion du

contrat de vente. Les droits de préemption et de préférence deviendraient actuels au

279

Cass. civ. 1re

, 22 décembre 1959, RTD. civ. 1960, p. 323, obs. J. CARBONNIER. 280

C. SAINT-HALARY-HOUIN, Le droit de préemption, op.cit., n°510, cité par S. VALORY, La

potestativité dans les relations contractuelles, op.cit., n°35.

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- 116 -

jour de la notification par le vendeur de son intention de vendre. Ne doit-on pas

plutôt considérer, à l’instar du raisonnement tenu par la jurisprudence relative aux

promesses post mortem, que le droit de préférence est un droit actuel né dès la

conclusion du pacte mais dont l’exercice est différé jusqu’au jour où le promettant se

décidera à vendre ? En dehors du cadre contractuel, le droit d’action en justice,

présenté par la doctrine comme un droit potestatif sans option281

, pose également

difficulté. Le droit d’action en justice est « le pouvoir de chaque individu d’obtenir

du juge qu’il mette fin à une situation juridique litigieuse par l’application des

normes légales »282

. Il s’exerce au moyen d’une déclaration unilatérale de volonté

(la demande en justice), et confère au demandeur « le pouvoir d’obtenir la décision

judiciaire qui tranche le litige »283

. En ce sens, le droit d’action en justice « s’exerce

contre un sujet passif déterminé qui est, d’une part, le juge qui doit se prononcer sur

le bien-fondé de la prétention, et d’autre part, le défendeur qui doit subir les

conséquences de la position dans laquelle il a été mis par le demandeur »284

. Il ne

comporte pas de choix, parce que « son exercice est facultatif (…). On peut obliger

le titulaire du droit d’option à prendre parti ; mais on ne peut pas obliger un

créancier à agir en justice »285

. La demande en justice visant à mettre fin à une action

litigieuse crée une situation juridique nouvelle, constituée par le lien juridique

d’instance qui se greffe sur la situation litigieuse. La situation juridique apparaît

alors concomitamment à la mise en œuvre du droit potestatif d’action en justice. Si

l’on admet que la situation juridique est l’objet du droit potestatif, il faut alors retenir

que l’objet du droit n’existe que par sa mise en œuvre. Parce que l’objet d’un droit

ne peut pas prendre naissance de son exercice et qu’il doit nécessairement lui

précéder, la doctrine conclut que, dans ce cas, « l’objet existe dès la naissance du

droit formateur sous la forme d’une situation future »286

. Le droit potestatif serait

alors « un pouvoir reconnu à une personne qui peut demeurer totalement inexistant à

défaut de l’apparition d’une situation juridique (...). Il demeure une expectative tant

281

V. notamment I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte

unilatéral » op.cit., n° 123 et suiv. ; S. VALORY, ibid., n°64 et suiv. ; F. HAGE-CHAHINE, Essai

d’une nouvelle classification des droits privés, RTD. civ. 1982, p. 705. 282

I. NAJJAR, ibid., n° 124. 283

I. NAJJAR, ibid. 284

F. HAGE-CHAHINE, ibid., p. 705. 285

I. NAJJAR, ibid., n° 140. 286

S. VALORY, ibid., n°35.

Page 117: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 117 -

que son objet n’est pas rempli. »287

Il nous semble que cette solution pourrait

s’appliquer aux droits de préférence, de préemption, et de retrait.

2- L’extension du domaine de la modification de la situation juridique

par la classification des effets

Le critère de la modification de la situation juridique doit être apprécié de

manière extensive. La doctrine288

retient en effet que les droits potestatifs sont des

droits modificatifs, constitutifs ou extinctifs d’une situation juridique.

Les droits potestatifs à effet modificatif ne créent pas une situation purement

nouvelle mais modifient, lors de leur exercice, la situation préexistante dans un ou

plusieurs de ses éléments. Il s’agit par exemple, dans le cadre contractuel, du droit

unilatéral d’opter entre plusieurs obligations alternatives ou du droit de substitution.

Les droits potestatifs à effet constitutif sont ceux qui créent purement et

simplement une situation juridique nouvelle : le droit d’option dans une promesse de

vente, le droit de préemption, le droit de préférence, le droit de retrait sont à classer

dans cette catégorie.

Enfin, Les droits potestatifs à effet extinctif éteignent en son entier le rapport

juridique préexistant. Il s’agit pour l’essentiel des droits de rupture unilatérale

d’origine légale ou conventionnelle.

Comme le constate Monsieur NAJJAR, cette classification des droits

potestatifs selon l’effet induit suite à leur exercice est trop hermétique, de nombreux

droits étant à la fois modificatifs, constitutifs et/ou extinctifs d’une situation

juridique. Il prend l’exemple du droit potestatif de ratifier une convention viciée

d’une cause de nullité relative : « il est possible de remarquer qu’il s’agit à la fois

287

F. HAGE-CHAHINE, ibid. 288

V. I. NAJJAR, ibid., n° 116 et suiv. L’auteur expose la vision tripartite des « pouvoirs de

formation » développée en Italie par MESSINA, pour qui les droits potestatifs sont soit constitutifs,

soit modificatifs, soit extinctifs. Cette distinction a été reprise ensuite par S. VALORY, et par

l’ensemble des auteurs traitant de la potestativité. cf. C. POMART-NOMDEDEO, Le régime des

droits potestatifs en matière contractuelle, entre unité et diversité, op. cit.

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- 118 -

d’un droit constitutif (puisqu’il réforme le contrat vicié) et d’un droit extinctif

(puisqu’il en supprime les causes de nullité relative) » 289

. De même, l’exercice d’un

droit potestatif inséré dans une promesse de vente a pour effet de modifier la

situation juridique née avec la promesse, en même temps qu’il peut avoir un effet

constitutif ou extinctif. Ainsi, la levée de l’option d’achat contenue dans une

promesse de vente modifie la situation antérieure ne serait-ce que parce qu’elle lève

l’incertitude planant sur le sort du contrat. Il en va de même en cas de refus de lever

l’option. La levée de l’option créée également une situation juridique nouvelle

puisque c’est au moment de la levée de l’option que la vente est valablement formée.

Le refus de lever l’option génère quant à lui un second effet opposé, puisqu’il abolit

tout rapport juridique né de la promesse de vente. Monsieur VALORY retient que

« pour donner un sens à cette classification, il faut envisager uniquement l’objectif

de l’opération »290

.

Cette solution vise finalement à analyser l’effet de l’exercice du droit

potestatif en recherchant les effets secondaires attachés à la modification de situation

juridique. Or, dans une conception stricte du droit potestatif, en levant l’option le

bénéficiaire n’obtient pas un droit de propriété immédiat, de même qu’en refusant de

lever l’option, il n’abdique de rien. L’effet immédiat du droit potestatif est

uniquement de mettre fin à la situation juridique qui existait antérieurement, en

l’abolissant ou en la modifiant. Il pourrait paraître davantage conforme à l’idée du

droit potestatif de retenir une conception unitaire de la notion de « modification de la

situation juridique », permettant de rechercher si l’exercice du droit a eu pour effet

objectif d’influencer - dans un sens ou dans un autre - la situation juridique

intéressant autrui. La classification des droits potestatifs par leurs effets ne rend

finalement pas compte de l’importance de la simple modification de situation

juridique pour qualifier un droit potestatif, et l’exclure de la catégorie des droits

subjectifs traditionnels. Pourtant c’est en ce sens que la modification de situation

juridique est bien ce sur quoi porte directement le droit potestatif. C’est par ce

critère qu’il se distingue des droits réels qui portent directement sur une chose, et des

droits personnels (ou de créance) qui s’exercent directement contre une personne ou

289

I. NAJJAR, ibid., n° 118 ; v. également S. VALORY, ibid., n° 56. 290

S. VALORY, ibid.

Page 119: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 119 -

son patrimoine. Les autres effets du droit potestatif conventionnel sont davantage

liés au fait qu’il s’opère par le biais d’un acte juridique unilatéral qu’à sa nature.

II- Les effets subséquents à l’exercice du droit potestatif

L’exercice du droit potestatif est en principe irrévocable (A). C’est également

à la suite de la mise en œuvre du droit potestatif que le contrôle du juge est rendu

possible. Le domaine et le contenu du contrôle judiciaire doit être analysé en raison

de la nature du pouvoir conféré au potentior (B).

A- L’irrévocabilité de l’exercice du droit potestatif

1- L’irrévocabilité de principe de l’exercice du droit potestatif

Communément, il est enseigné que « l’acte juridique épuise son efficacité

dans l’exécution, se transformant en fait par la consommation de son effet. Il prend

ainsi naturellement fin avec la réalisation de son objet »291

. Par application du

régime général de l’acte juridique, la doctrine retient que le droit potestatif se réalise

et s’éteint par son exercice. Il faut logiquement en conclure que l’exercice du droit

potestatif met fin à l’assujettissement du sujet passif. A propos du droit d’option,

Monsieur NAJJAR fait remarquer que « les effets communs à toutes les options

découlent de la disparition du lien de sujétion. (…) La situation d’incertitude,

d’attente, disparaît. Les sujets reprennent leur liberté de manœuvre. (…) Le droit

d’option ne peut plus être exercé. »292

L’irrévocabilité de principe, affirmée par la doctrine, se justifie dès lors qu’il

est établi que l’exercice du droit potestatif a des conséquences sur la situation

juridique intéressant autrui, et qu’en modifiant la situation juridique préexistante il

en crée une nouvelle, porteuse de nouveaux droits réels et de créance. Elle s’impose

291

C. BRENNER, acte, Rép. civ. Dalloz. 292

I. NAJJAR, Le droit d’option, contribution à l’étude du droit potestatif et de l’acte unilatéral,

op.cit., n° 311.

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- 120 -

dès lors que le retrait de l’acte juridique par lequel s’exprime la volonté porterait

atteinte à la sécurité juridique élémentaire des transactions293

.

Admettre la libre révocabilité de l’exercice du droit potestatif reviendrait en

quelque sorte à admettre l’exercice d’un second droit potestatif. La rétractation serait

alors un nouveau moment, également unilatéral, l’exercice d’un pouvoir octroyé ou

consenti modifiant de nouveau la situation juridique en replaçant le cocontractant

initial dans sa qualité de bénéficiaire du contrat. Reste que l’exercice d’un second

droit potestatif n’est pas nécessairement consenti par le sujet passif. Il n’est pas

concevable que le potentior qui a expressément refusé de lever l’option qui lui était

consentie aux termes d’une promesse unilatérale de vente puisse par la suite arguer

de ce droit aux fins d’acquérir l’immeuble objet de la promesse, alors même que le

promettant a pu le vendre à un tiers entre temps. L’acte juridique unilatéral d’option

est unique, actuel, et définitif. Il ne peut pas subir de contre-exercice de la part de

son titulaire, ou être anéanti par un acte de volition postérieur, quand bien même le

délai d’exercice du droit potestatif ne serait pas expiré.

Dans un arrêt du 13 février 2008, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation a pris clairement position sur la question, en ce qui concerne le droit de

rétractation prévu à l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation294

.

En l’espèce, suite à la signature d’une promesse synallagmatique de vente,

l’acquéreur a usé de son droit de rétractation puis s’est « repenti » de cette décision

avant l’expiration du délai de rétractation, en acceptant finalement de conclure le

contrat de vente aux charges et conditions fixées dans la promesse. Néanmoins, il

refuse de régulariser l’acte de vente authentique. Le vendeur assigne l’acquéreur en

résolution de la vente aux torts de l’acquéreur, et en paiement de la clause pénale

stipulée dans la promesse de vente. L’acquéreur lui oppose l’exercice régulier de la

faculté légale de rétractation. La Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel

qui a fait droit à la demande du vendeur, et déclare que l’exercice par l’acquéreur de

son droit de rétractation a « entrainé l’anéantissement du contrat », si bien que la

293

I. NAJJAR, ibid., n° 307. 294

Cass. civ. 3ème

, 13 février 2008, RTD. civ. 2008, p. 293, obs. B. FAGES ; D. 2008, p. 1530, obs.

Y. DAGORNE-LABBE.

Page 121: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 121 -

vente ne peut pas être résolue. Dans un arrêt du 13 mars 2011295

, la troisième

chambre civile de la Cour de cassation confirme, dans un cas identique et dans les

mêmes termes, sa position.

Monsieur DAGORNE-LABBE a contesté cette solution : le délai de sept

jours est un délai d’ordre public fixé en vue de protéger l’acquéreur contre lui-

même, si bien qu’« il est indispensable qu'il reste libre, après avoir opté pour la

renonciation au contrat, de revenir sur sa décision dès lors qu'il est encore dans le

délai légal. Si la rétractation entraîne effectivement l'anéantissement de la

convention, cet effet ne se produira qu'à l'expiration du délai de sept jours et à

condition que l'acheteur n'ait pas décidé finalement, toujours dans ce délai, de

conclure le contrat aux conditions prévues. Seule cette analyse permet de préserver

une réelle liberté pour l'acquéreur de prendre parti puisqu'il pourra toujours modifier

sa position en fonction de ses intérêts.»296

Cette analyse conduit à reconnaître que l’exercice du droit de rétractation est

suspendu à l’expiration du délai dans lequel il doit s’exercer, suspensif de lui-même

en quelque sorte. Elle fait également présumer du caractère suspensif du droit de

rétractation sur la promesse de vente, qui ne serait définitivement acceptée qu’après

l’expiration du délai légal de rétractation. Nous avons noté précédemment que cette

acception conduirait à interdire au bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente

de lever l’option dans le délai imparti pour exercer le droit légal de rétractation297

. La solution de la Cour de cassation, consistant à déclarer que l’exercice du droit de

rétractation crée une situation juridique définitive (anéantissement du contrat), est

une application fidèle du régime général des actes unilatéraux, et est conforme à

l’analyse des caractères du droit potestatif298

. L’exercice du droit potestatif de se

rétracter accomplit donc irrévocablement son plein effet extinctif du contrat. Il est

295

Cass. civ. 3ème

, 13 mars 2011, JCP construction et urbanisme. 2012, comm. 90, C. SIZAIRE. 296

Y. DAGORNE-LABBE, op.cit. 297

Cf. supra, p.68. 298

B. FAGES, RTD. civ. 2008, p. 293: « la rétractation n'a pas pour conséquence de suspendre le

processus de conclusion du contrat, lequel ne deviendrait parfait qu'à l'expiration du délai fixé par le

législateur, laissant entre-temps au contractant le loisir de faire, défaire et refaire son consentement de

manière discrétionnaire. Tout au contraire, comme le montre cet arrêt, la rétractation vient frapper un

contrat que l'échange initial des consentements est d'ores et déjà parvenu à former, et ceci par une

mesure radicale : son anéantissement. D'où l'impossibilité, ici, de résoudre ce qui était déjà anéanti.

Résolution sur anéantissement ne vaut. »

Page 122: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 122 -

néanmoins possible de prévoir dans la promesse de vente un droit de résolution

unilatérale de la volition antérieurement exprimée. Une telle clause de dédit est

valable puisque les cocontractants ont toute liberté quant au contenu des conventions

qui les unissent, sous réserve qu’elles ne soient pas contraires à l’ordre public. Il est

ainsi possible de prévoir que la levée de l’option par le bénéficiaire d’une promesse

de vente pourra être rétractée dans un certain délai. Le cocontractant donne dès

l’origine du contrat son consentement à la résolution du contrat par le potentior, si

bien que cette disposition est conforme à l’article 1134 alinéa 2 du code civil qui

autorise la révocation des conventions par consentement mutuel299

. Il ne s’agit pas

d’un droit de repentir pouvant être défini comme « le droit de revenir sur son

engagement »300

comme s’il n’avait jamais existé, mais d’une nouvelle option

réservée au bénéficiaire de la promesse. Grâce à l’insertion d’une clause de dédit

dans le contrat, « la volonté est à ce point libre qu’elle peut à la fois exprimer sa

liberté en donnant son consentement une première fois pour entrer dans le contrat et

jouer une seconde fois pour briser l’effet obligatoire »301

.

Enfin, si postérieurement à l’exercice du droit de rétractation, l’acquéreur

émet le désir de poursuivre le contrat initialement envisagé, il est nécessaire que le

vendeur y consente, et qu’un nouveau contrat de promesse soit régularisé. L’article

L. 271-1 du code la construction et de l’habitation trouve donc de nouveau

s’appliquer. Si les parties décident de poursuivre le contrat de promesse initial sans

signer une nouvelle promesse de vente, il appartiendra au rédacteur de l’acte

authentique de vente de considérer que l’acte à recevoir n’a pas été précédé d’un

299

Art. 1134 c. civ, al. 1 et 2 : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui

les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes

que la loi autorise. » 300

R.BAILLOD, Le droit de repentir, RTD. civ. 1984, p. 227.

Plus exactement le droit de rétractation est défini comme « une manifestation de volonté contraire par

laquelle l’auteur d’un acte ou d’une manifestation unilatérale de volonté entend revenir sur sa volonté

et la retirer comme si elle était non advenue afin de la priver de tout effet passé et à venir »,

Vocabulaire juridique, publié par l’association H. CAPITANT, sous la direction de G. CORNU,

P.U.F, éd. 2011. L’avant-projet CATALA, quant à lui, définit le repentir comme « celui jusqu’à

l’expiration duquel il est permis au destinataire de l’offre de rétracter discrétionnairement son

consentement au contrat » (article 1110-2). 301

M.-A. FRISON-ROCHE, L’unilatéralisme et le droit des obligations, Economica, 1999, p 21, cité

par D. MAZEAUD, Se dédire sans dédit, vaut !, D. 2001, p. 3241, à propos d’un arrêt Cass. com du

30 octobre 2000 qui valide une clause de dédit sans contrepartie onéreuse.

Page 123: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 123 -

contrat préliminaire, et de purger le délai de réflexion instauré par le même article.

Dans ce cas, l'acte authentique ne peut être signé pendant ce délai de sept jours.

2- Tempéraments jurisprudentiels apportés à l’irrévocabilité de l’acte

d’option

La question de l’irrévocabilité de l’exercice des droits potestatifs engendre

celle relative à la possibilité de rétracter les actes de préemption et de substitution.

2.1- La « rétractation » de l’exercice du droit de préemption

L’exercice du droit de préemption conduit à la réalisation de l’échange des

contentements et à la conclusion de la vente au profit de son titulaire. L’article 1104

du code civil s’oppose à la rétractation de l’une des parties sans le consentement de

l’autre. Or, le droit de préemption institué par la loi prévoit généralement un délai

pour conclure la vente définitive : c’est le cas du droit de préemption accordé à un

indivisaire, ou à un preneur en place. Si le préempteur empêche la réalisation de la

vente dans le délai imposé, la déclaration de préemption est nulle de plein droit. Le

fait que la préemption ne produise dans ce cas aucun effet a pu être assimilé à un

droit de rétractation, alors que le code civil l’envisage comme une sanction de

l’inertie du préempteur. Ainsi, dans un arrêt en date du 22 juin 2004302

la Cour de

cassation affirme franchement que l’indivisaire préempteur « peut renoncer

expressément à la réalisation de l'acte de vente dans le délai de deux mois à compter

de la date d'envoi de sa réponse au vendeur », et peut « valablement se rétracter ».

Cette rétractation ne rend pas la promesse de vente caduque303

, et la vente peut se

poursuivre au profit du bénéficiaire-acquéreur ayant levé l’option dans les délais304

et envers lequel le vendeur est « tenu de manière ferme et définitive ».

302

Cass. civ. 3ème

, 22 juin 2004, pourvoi n° 01-12.731. 303

A moins que la caducité ne soit stipulée dans la promesse de vente comme conséquence

automatique de la notification par le préempteur de l’intention d’exercer son droit. 304

Dans un arrêt du 22 septembre 2010, la troisième chambre civile de la Cour de cassation affirme

qu’en cas d’annulation de la décision de préemption entachée d’illégalité, le bénéficiaire de la

promesse unilatérale de vente ne peut valablement agir en nullité des ventes postérieures à l’acte de

préemption, que s’il a lui-même opté dans les délai et conditions fixés dans la promesse de vente, à

défaut de quoi la promesse de vente est caduque. ; v. note D. BONNET, Les droits potestatifs ne

bénéficient qu’à ceux qui les exercent…, JCP G., I. 1238.

Page 124: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 124 -

Pour Monsieur PILLET, « de manière significative, la Cour de cassation

aborde l'absence de réalisation de la vente comme une possible rétractation, alors

que le texte appliqué - l'article 815-14 du code civil - la présente comme une cause

de nullité de la préemption, c'est-à-dire une sanction. Lorsqu'il conduit à une

substitution d'acquéreur, l'exercice du droit préférentiel d'acquisition n'a pas en lui-

même d'effet créateur. Une partie des droits a simplement changé de titulaire. Dès

lors, la rétractation ne ferait perdre aucun droit au vendeur, et elle permettrait bien

au contraire au tiers acquéreur évincé de retrouver sa place au sein du contrat et,

ainsi, la propriété du bien vendu. Elle le rétablit dans ses droits. La rétractation

devrait alors y être également possible. »305

Il nous semble qu’en admettant la possibilité de rétracter l’exercice du droit

de préemption, la Cour de cassation occulte incontestablement le caractère

inaltérable du consentement qui, dès lors qu’il a rencontré celui du cocontractant,

échappe à son auteur et ne peut pas être repris. La nullité de plein droit de la

décision de préemption est une mesure répressive d’origine légale prise à l’encontre

du préempteur qui abuserait de son droit et immobiliserait le bien du vendeur sans

limitation de durée. L’article 815-14 du code civil, relatif au droit de préemption de

l’indivisaire, ne prête pas à interprétation lorsqu’il dispose que la nullité de plein

droit, intervenant quinze jours après une mise en demeure sans effet, ne prive pas le

vendeur de demander des dommages-intérêts.

Le défaut de réitération de la vente dans le délai de deux mois fait présumer

de l’absence de suite ou d’effet souhaité par le préempteur, voire du manque de

cause réelle et sérieuse à l’exercice du droit de préemption. De plus, retenir

l’existence d’un droit de rétractation de l’exercice du droit de préemption ne

conforte pas plus les droits du tiers acquéreur à la vente que la qualification de

nullité de l’exercice du droit de préemption, car les effets sont identiques. En effet,

la nullité de plein droit implique l'anéantissement rétroactif de la décision de

préemption, et le rétablissement de l’acquéreur dans l'intégralité des droits qu’il

détient de la promesse de vente. Le vendeur doit alors poursuivre la vente au profit

305

G. PILLET, Préemption et retraits, Rép. civ. Dalloz.

Page 125: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 125 -

de l’acquéreur initialement pressenti, dans les conditions de la notification adressée

au bénéficiaire du droit de préemption.

Retenir que l’absence d’effet de la décision de préemption est bien la

conséquence d’une nullité et non d’une rétractation possible du préempteur est

conforme à la nature du droit potestatif qui a été exercé : l’exercice du droit

potestatif est bien définitif, la nullité ne sanctionne pas l’exercice du droit mais le

défaut de régularisation de la vente dans les délais légaux. La faute du potentior est

constituée dès lors qu’il a transgressé son droit en l’exerçant sans suite. La nullité de

plein droit, qui participe d’un ordre public de protection, limite le risque d’arbitraire

ou d’abus lié à l’autorité de la décision individuelle de préemption, autant qu’elle

montre la volonté du législateur de protéger la liberté du vendeur, un temps assujetti,

de réaliser une opération économique.

2.2- La « rétractation » de l’exercice du droit de substitution

L’exercice du droit de substitution n’a pas la même vocation directe à la

conclusion de la vente que le droit de préemption, puisqu’il a pour effet de

transmettre tout ou partie des droits issus d'une promesse de vente à un tiers à ce

contrat. Le droit de substitution est une modalité du contrat, permettant à « son

auteur de donner unilatéralement une configuration définitive à la situation juridique

dans laquelle il intervient »306

, il « ne fait que parfaire la formation du contrat »307

.

Dans un arrêt du 27 avril 1988, la troisième chambre civile de la Cour de

cassation308

a jugé que le bénéficiaire d’un droit de substitution conventionnel

pouvait, dans le délai fixé pour exercer le droit de substitution, « rétracter son

acceptation », cette rétractation restituant au substituant la qualité pour lever

l’option. La Cour de cassation insiste, en se concentrant sur les faits de l’espèce, sur

306

G. PILLET, La substitution de contractant à la formation du contrat en droit privé, L.G.D.J.,

2004, n°149. 307

G. PILLET, ibid., n°432. 308

Cass. civ. 3ème

, 27 avril 1988, D. 1989, p.65, note I. NAJJAR : « Mais attendu que l'exercice, par

le bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente, de la faculté qui lui a été reconnue de se

substituer une autre personne, n'ayant pas le caractère d'une cession de créance, la cour d'appel, qui a

constaté que M. X..., bénéficiaire substitué, avait rétracté son acceptation, a pu, abstraction faite d'un

motif surabondant, retenir que la qualité de Mme Y... pour lever l'option n'était pas douteuse ».

Page 126: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 126 -

le caractère parfaitement valable de la substitution intervenue, laquelle respectait

toutes les modalités comprises dans le contrat de promesse et avait été portée à la

connaissance du vendeur. Elle fonde sa décision sur le fait que la faculté reconnue

au bénéficiaire de substituer un tiers dans le bénéfice de la promesse unilatérale de

vente n’a pas le caractère d’une cession de créance. Cette solution parait contraire au

principe d’irrévocabilité des actes d’option ci-dessus exposé, et aucun mécanisme de

nullité n’est susceptible de l’expliquer.

Monsieur PILLET309

approuve l’analyse de la Cour de cassation parce que la

rétractation de substitution ne porte pas plus atteinte à la sécurité juridique du

vendeur que la substitution même. Selon lui, c’est seulement à l’expiration du délai à

l’intérieur duquel doit être exercé le droit de substitution que « l’acte de substitution,

comme tout acte juridique, sera irrévocable ». La situation d’attente et d’incertitude

ne prendrait donc pas fin avec l’exercice du droit potestatif, mais par l’expiration du

délai fixé pour l’exercice de l’option. Certes, cette solution jurisprudentielle accroit

temporellement l’assujettissement du sujet passif, sans pour autant dépasser le cadre

de ce à quoi il avait consenti.

Il nous semble que la possible rétractation du substituant et la réintégration

du bénéficiaire originaire dans la promesse de vente puisse aussi s’expliquer par

l’originalité du mécanisme de substitution.

Monsieur NAJJAR310

relève, à l’appui d’un arrêt de la troisième chambre

civile de la Cour de cassation en date 13 juillet 1999311

, que suite à l’exercice du

droit de substitution, le bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente devient la

figure fantomatique du contrat de promesse puisqu’il n’en fait a priori plus partie

mais reste « un partenaire, même dormant, de l'opération dans son ensemble ». Pour

309

G. PILLET, ibid., n°432. 310

I. NAJJAR, Clause de substitution et « position contractuelle », D. 2000, p.635, à propos d’un

arrêt rendu par Cass. civ. 3ème

, 13 juillet 1999. 311

Dans cet arrêt la Cour de cassation censure une cour d’appel qui, pour rejeter une créance, a retenu

que l’acte de substitution entrainait cession de la créance, de sorte que le substituant n’avait plus la

qualité de créancier alors que, selon la Haute- Cour, la substitution d’un tiers au bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente n’est pas une cession de créance, et qu’il est constaté que l’acte de

promesse prévoyait que le promettant pourrait refuser de régulariser l’acte authentique de vente en

versant une somme déterminée.

Page 127: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 127 -

Monsieur NAJJAR, la substitution est « une « cession de position contractuelle » qui

« maintient les contractants de base et élargit le contrat ». En ce sens, la rétractation

du substitué ne réintègre pas le bénéficiaire originaire dans le contrat, mais le fait

réapparaitre.

La mise en œuvre du droit de substitution suppose que le droit soit consenti

et accepté dans le contrat de promesse, mais nécessite également qu’intervienne un

accord entre le substitué et le substituant, auquel le promettant n’est pas partie. Cet

accord, autonome de la promesse de contrat, peut être négocié sous la forme d’un

droit potestatif d’option au profit du potentiel substitué, qui a le choix entre accepter

l’offre de substitution ou la refuser. Dans cet acte de substitution indépendant de la

promesse de vente qui en est l’objet, le bénéficiaire de la promesse de vente est le

promettant-substituant, et le potentiel substitué à la promesse de vente est le

bénéficiaire. L’acceptation de la substitution est un acte qui produit alors un double

effet : c’est un acte d’option du bénéficiaire-substitué auquel le promettant-

substituant ne peut pas s’opposer, et qui va nécessiter la mise en œuvre par ce

dernier du droit d’option qu’il détient au titre de la promesse de vente. L’abandon de

la décision de substitution par le substitué produit les deux effets inverses : le

substitué ne peut en principe pas rétracter le droit qu’il a exercé et qui lui était offert

par le substituant, en raison du caractère définitif de la volonté exprimée et qui est

finie. La violation de l’engagement de substitution atteint la relation contractuelle

existant entre le substituant et le substitué, et doit être sanctionnée à ce titre.

Néanmoins, en cas de rétractation du substitué, le substituant qui n’a jamais quitté

le contrat récupère tous ses droits dans la promesse de vente.

Si l’exercice du droit potestatif est en principe irrévocable en ce sens qu’il ne

peut être défait par son auteur, il n’est pas toujours définitivement acquis. En effet,

l’exercice du droit potestatif déclenche le moment où le contrôle de ce droit est

rendu possible, et peut être contesté dans les limites qu’impose sa nature.

Page 128: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 128 -

B - Le contrôle de l’exercice du droit potestatif

1- Le cadre du contrôle judiciaire limité par la nature du droit potestatif

1.1- Le caractère discrétionnaire du droit potestatif

Le droit potestatif est le pouvoir de modifier la situation juridique par simple

expression de volonté émanant de son titulaire. D’emblée, le pouvoir unilatéral

conféré au potentior semble mal s’accommoder d’un contrôle de validité réalisé par

le juge, dès lors qu’il n’est pas contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs et que

le consentement de l’assujetti à leur insertion dans le contrat n’a pas été vicié312

.

Ce constat amène à s’interroger sur l’appartenance du droit potestatif à la

catégorie rémanente des droits discrétionnaires313

. Les droits discrétionnaires sont

ceux insusceptibles d’abus dans leur exercice, et par conséquent absolument

soustraits au contrôle du juge. Monsieur ROETS constate que le caractère

discrétionnaire des droits de dédit et de repentir légaux a déjà été consacré par la

doctrine, et affirme plus généralement qu’en ce qui concerne les droits d’option

« conférant à leur titulaire le droit d’opter entre les termes de l’alternative que leur

propose la loi ou le contrat », « si l’hypothèse de l’abus ne peut être exclue, on

conçoit mal qu’ils puissent subir les conséquences d’un choix auquel, de toute façon,

ils doivent procéder ». Outre que le droit d’option appartenant au bénéficiaire d’une

promesse de vente est qualifié par l’auteur de droit discrétionnaire, la conception

même des droits de repentir légaux fonde leur insertion au sein de cette catégorie

juridique car « permettre aux professionnels d’invoquer, fût-ce à titre exceptionnel,

l’abus du droit de rétractation risquerait à terme, de ruiner l’efficacité du mécanisme

protecteur instauré ». A propos du droit d’option conféré au bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente, Monsieur ROETS s’interroge sur le fait que l’abus

312

Un quelconque contrôle de validité du droit potestatif n’est pas envisageable lorsqu’il est d’origine

légale, puisque dans ce cas il s’impose aux parties dès que les conditions prévues par la loi sont

réunies. La jurisprudence sanctionne l’irrégularité lors de la constitution du droit potestatif d’origine

conventionnelle par la nullité de la clause qui l’institue, ou par la nullité du contrat dans sa totalité si

l’existence du droit potestatif a déterminé la conclusion de la convention. La nullité reposant sur un

défaut inhérent au droit potestatif ne fera pas l’objet de développements particuliers, puisqu’elle est

l’application à un droit particulier du régime général de validité du contrat et des clauses qui y sont

contenues. 313

D. ROETS, Les droits discrétionnaires : une catégorie juridique en voie de disparition ?, D. 1997,

p.92.

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- 129 -

puisse d’ailleurs constituer « une éventualité même du contrat », citant alors

Monsieur HUET314

pour qui « le promettant ne peut jamais être certain que

l'opération se fera, et il souffrira de la non-réalisation s'il désire employer le prix de

la vente à une acquisition concomitante ». La question d’abus est alors traitée au

stade de l’exercice du droit, au moment où la volonté du potentior se situe à la

jonction d’alternatives possibles et qu’il doit opérer un choix. Si l’exercice du droit

discrétionnaire est insusceptible d’abus, le comportement déloyal de son titulaire

n’est pas pour autant exonéré de toute sanction.

Le recours à la catégorie juridique des droits discrétionnaires n’est, semble-t-

il, pas nécessaire pour expliquer l’admission du seul contrôle judiciaire au stade de

l’exercice du droit potestatif.

Parce qu’il est dans la nature du droit potestatif d’être un pouvoir auquel on

ne peut rien opposer, un contrôle judiciaire exercé a priori paraît, en effet,

inconcevable. Les auteurs315

s’accordent pour reconnaître que l’intervention du juge

préalablement à l’exercice du droit potestatif dénaturerait la structure du droit

potestatif en relativisant le rôle de la volonté unilatérale et en altérant le rapport de

sujétion. Si le juge intervient avant la mise en œuvre du droit potestatif afin de

valider le droit potestatif, « la seule volonté du titulaire ne serait plus toute puissante

à modifier la situation juridique intéressant autrui. La mise en œuvre nécessiterait,

certes une manifestation de volonté du titulaire, mais également l’intervention du

juge. Cette intervention préalable modifierait en conséquence profondément le

caractère potestatif de ce droit en niant la puissance de la volonté et l’existence du

lien de sujétion »316

.

1.2- Théorie de Madame ROCHFELD

Il nous faut signaler la théorie de Madame ROCHFELD317

selon laquelle les

droits potestatifs adjoints seraient susceptibles d’un contrôle avant leur exercice. Ces

314

J. HUET, Les principaux contrats spéciaux, L.G.D.J., 1996, n° 11164. 315

S. VALORY, n° 218 et suiv. ; A. DUCROCQ, Recherches sur la notion de droit potestatif, dir. C.

JAMIN, Lille, 2000, p. 33 et suiv. ; C. POMART-NOMDEDEO, Le régime juridique des droits

potestatifs en matière contractuelle, entre unité et diversité, op.cit. 316

A. DUCROCQ, ibid., p. 33 et suiv. 317

J. ROCHFELD, Les droits potestatifs accordés par le contrat, in Le contrat au début du XXIème

siècle, op.cit.

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- 130 -

droits sont ceux qui sont librement négociés et insérés dans le contrat sans en être

l’objet principal. Il s’agit par exemple du droit de se dédire, de renoncer à une

condition, de choisir entre différentes modalités d’exécution d’une obligation, de

résilier unilatéralement le contrat… Le droit d’option conféré au bénéficiaire d’une

promesse unilatérale de vente n’est pas un droit potestatif adjoint car il forme « la

substance même de l’accord ». La faculté légale de rétractation est également exclue

de la catégorie car elle s’impose aux parties. Selon Madame ROCHFELD, les droits

potestatifs adjoints sont susceptibles de porter atteinte à l’équilibre contractuel parce

qu’ils « introduisent de l’unilatéral dans un mécanisme, le contrat, qui n’en est pas

l’espace naturel ». Malgré le caractère consensuel de leur insertion, les droits

potestatifs adjoints pourraient être constitutifs d’un danger pour le sujet passif, parce

qu’il doit subir les effets de leur exercice sans être en mesure de riposter. « Le

danger provient de la reconnaissance d’une faculté détenue » sans que « ce pouvoir

soit contrebalancé, comme à l’accoutumée (au moins dans le paradigme des contrats

synallagmatiques) par un sacrifice équivalent de l’autre partie. » Pour l’auteur, les

caractères du droit potestatif sont également source de danger, parce que « tout

d’abord, sous couvert de n’engendrer aucune nouvelle obligation, le droit potestatif

adjoint se glisse dans le contrat et semble échapper au calcul de l’équilibre

contractuel, celui des contreparties respectives. Ensuite, même s’il se définit comme

un pouvoir sur une situation juridique préexistante et non sur un débiteur, lorsque ce

droit s’exerce en matière contractuelle, l’autre partie n’en subit pas moins, une fois

cette situation modifiée, toutes les conséquences qui s’attachent à un tel pouvoir. »

Pour Madame ROCHFELD, le danger contenu dans le droit potestatif adjoint

dériverait en pratique d’un exercice abusif du droit (brutal ou de mauvaise foi), et de

l’incertitude quant au moment où le droit sera exercé. Selon l’auteur, il peut dès lors

être nécessaire de borner le pouvoir unilatéral détenu par l’une des parties au contrat,

par deux contrôles sanctionnant d’une part l’incertitude temporelle tenant à

l’exercice du droit potestatif, et d’autre part l’abus de l’unilatéralité. Serait ainsi

prompt à la sanction un droit potestatif actionnable par son titulaire pendant toute la

durée d’existence d’un contrat indéterminé. Tel est le cas d’un droit potestatif de

résiliation anticipée, stipulé sans durée de validité et dont l’usage serait laissé à la

discrétion de son titulaire. Le critère pour vérifier le bon usage de l’incertitude

inhérente au droit potestatif adjoint pourrait être « la considération minimale de

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- 131 -

l’intérêt d’autrui ». L’auteur estime que la sanction de l’incertitude pourrait être la

nullité du droit potestatif tout en maintenant l’acte qui le contient. Elle pourrait être

également de « maintenir ce droit mais en limitant cette certitude », en recourant au

juge pour fixer un délai rationnel à l’exercice du droit. Il nous semble que cette

solution justifie l’existence d’un contrôle avant l’exercice du droit potestatif, parce

que si le droit peut être maintenu c’est qu’il n’est pas encore exercé. Quant à l’abus

du droit potestatif adjoint, il résiderait dans « la possibilité de son exercice abusif »,

donc dans la mise en œuvre du droit. L’absence de considération de l’intérêt du

cocontractant et l’inexistence de justification donné à l’acte unilatéral pourraient

caractériser l’abus au moment de l’exercice du droit. La sanction de l’abus

caractérisé pourrait être l’allocation de dommages-intérêts sur la base de l’article

1134 alinéa 3 du code civil, ou la possibilité laissée au juge de « contrebalancer la

faculté accordée à l’un par l’imposition d’une contrepartie pécuniaire au bénéficie de

l’autre ou par une bilatéralisation, c’est-à-dire par la reconnaissance de la même

faculté aux deux parties ».

1.3- Appréciation de la théorie de Madame ROCHFELD

La théorie de Madame ROCHFELD nous semble contestable. D’abord, si la

constatation d’un quelconque danger pour le sujet passif est légitime, rien ne peut

laisser suggérer que le sujet passif n’en a pas pris la mesure au jour où il a consenti

(et peut-être proposé) à l’adjonction d’un droit potestatif dans le contrat. D’ailleurs,

tous les droits potestatifs adjoints n’ont pas vocation à créer, lors de leur exercice,

une menace pour le sujet passif. Certains droits potestatifs permettent même de

sauver le contrat de l’anéantissement : c’est ainsi que la renonciation à une condition

- suspensive ou non - par son bénéficiaire exclusif consolide le contrat. Si, par

exemple, le bénéficiaire d’une promesse de vente renonce au bénéfice de la clause

mettant à la charge du promettant la réalisation de certains travaux, ou s’il renonce à

la condition de l’obtention par le promettant d’un permis de construire, il est

indubitable que l’exercice du droit potestatif a lieu en faveur du promettant. La prise

en compte de l’intérêt d’autrui lors de l’exercice du droit potestatif est également

difficilement perceptible, puisque l’acte unilatéral de volonté a pour objet

d’exprimer l’intérêt unique de celui qui le réalise. Ensuite, il est difficilement

concevable d’appliquer un contrôle différencié aux droits potestatifs insérés dans le

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- 132 -

contrat, en raison de leur origine légale ou conventionnelle, et en fonction du fait

qu’ils sont l’objet principal ou l’accessoire du contrat. A titre d’exemple, l’exercice

du droit d’option conféré au bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente est-il

insusceptible d’abus dans son exercice ? En outre, peut-on affirmer que le droit de

substitution est davantage « subi » par le sujet passif que le droit d’option? Il n’y a

pas de degré dans la sujétion du sujet passif. Considérer que la sujétion est plus ou

moins subie reviendrait à nier l’existence du concept, et à occulter le caractère

consensuel de la sujétion lorsqu’elle est d’origine contractuelle. En acceptant

d’adjoindre un droit potestatif au contrat, le sujet passif a réalisé un acte de

consentement qui légitime son empêchement à agir contre la mise en œuvre de ce

droit.

2- La sanction de l’abus dans l’usage du droit potestatif

Le pouvoir du titulaire du droit potestatif n’est pas sans limites. Celles-ci

s’appuient sur un contrôle a posteriori qui sanctionne effectivement l’abus et la

mauvaise foi dans l’usage du droit potestatif.

L’abus de droit se caractérise traditionnellement soit par l’intention de nuire,

soit par l’usage anormal du droit, soit par le détournement de l’utilité sociale pour

laquelle le droit a été conféré. En réalité l’abus de droit ne s’applique pas au droit

potestatif, ni à son exercice318

. Comme le fait remarquer Monsieur NAJJAR à

propos de la révocation de mandat, « l’abus est signe non pas de l’exercice d’un

droit, mais de son exercice anormal. La sanction de l’abus fait appel souvent à une

condamnation à des dommages-intérêts, mais non à la suppression du pouvoir de

révocation ou à l’annulation rétroactive de la révocation. La révocation ne peut être

supprimée comme on ferait détruire - en nature ! - une fausse cheminée érigée dans

le but de nuire à un voisin… (…) L’abus est faute, la faute est anormalité

préjudiciable et illégitime quelquefois dans une intention malveillante, ou pour des

mobiles malicieux. L’ordre social l’emporte, sans conteste, sur l’ordre civil, et celui-

ci sur la liberté individuelle. » 319

318

Cf. J. DE VAN, Le droit de nuire, RTD. civ., 1995, p. 533. 319

I. NAJJAR, Mandat et irrévocabilité, D. 2003, p. 708.

Page 133: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 133 -

Le droit potestatif doit donc s’exercer sans entrave par son titulaire mais ne

doit pas être utilisé dans un but détourné de son affectation originelle. Le contrôle

par le juge de l’exercice du droit potestatif et la sanction de son exercice anormal ne

contrarient pas les caractères de ce droit. « La sanction de l’abus n’est ni spécifique,

ni une fatalité lorsque l’objet même d’un droit consiste à ce que son sujet s’exprime

librement.»320

La Cour de cassation sanctionne l’abus dans l’exercice des droits potestatifs

insérés dans le contrat par l’allocation de dommages-intérêts au profit du sujet

passif321

.

La jurisprudence retient un fondement différent à la responsabilité du

potentior selon que le droit potestatif dont l’usage est abusif participe à la formation

du contrat ou qu’il est exercé en cours de contrat : la responsabilité est de nature

délictuelle dans le premier cas, et contractuelle dans le second. L’engagement de la

responsabilité contractuelle est souvent recherché par la jurisprudence par référence

au devoir de bonne foi dans l’exécution des conventions, si bien que « certains

auteurs s’interrogent sur le fait de savoir si l’article 1134 alinéa 3 du code civil ne

fournit pas un fondement général au contrôle de l’abus de droit en matière

contractuelle »322

.

La notion de bonne foi dans les relations contractuelles fait essentiellement

référence à l’adoption et le maintien d’un comportement loyal - et honnête - par le

cocontractant. En ce sens, Monsieur STOFFEL-MUNK note qu’« exécuter le contrat

de bonne foi, c’est adopter au fil de l’exécution un comportement loyal, c’est-à-dire

refléter dans son attitude un ensemble de vertus d’inspiration morale sur lesquelles

le cocontractant pouvait légitimement compter, soit qu’il puisse les attendre de

320

I. NAJJAR, ibid. Sur la question du contrôle du droit potestatif, cf. I. NAJJAR, La potestativité, à

paraître. 321

S. VALORY a mis en évidence une « gradation du contrôle exercé par le juge » sur le fondement

de l’abus de droit. L’exercice de certains droits est strictement contrôlé. En ce qui concerne les droits

potestatifs contenus dans le contrat, il s’agit notamment de l’exercice des droits de rupture unilatérale.

Les droits de préemption, de préférence, d’option seraient plus faiblement contrôlés. S.VALORY,

op.cit. n°804 et suiv. 322

C. POMART-NOMDEDEO, « Le régime juridique des droits potestatifs en matière contractuelle,

entre unité et diversité », op.cit. L’auteur renvoie à l’analyse de R. ENCINAS DE MUNAGORRI,

L’acte unilatéral dans les rapports contractuels, L.G.D.J., 1995.

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- 134 -

chacun dans un monde civilisé, soit qu’il ait pu spécialement les escompter de son

partenaire en raison de la confiance particulière qui imprégnait leur relation. »323

Pour sanctionner l’usage anormal ou déloyal d’un droit contenu dans le

contrat, et en recourant à la notion de bonne foi qui doit prévaloir dans les relations

contractuelles, la Cour de cassation décide également de paralyser les effets

juridiques qui sont la conséquence de son exercice. Dans un arrêt du 11 mai 1976324

,

confirmé par un arrêt 15 février 2000325

, la troisième chambre de la Cour de

cassation a ainsi affirmé que « la faculté de se dédire ayant été exercée de mauvaise

foi, ce dédit ne pouvait produire aucun effet juridique », et n’empêche donc pas la

formation du contrat définitif. De la même manière, la Cour de cassation juge

qu’une clause résolutoire ne peut pas produire ses effets si elle n’a pas été mise en

œuvre de bonne foi326

. Dans un arrêt très remarqué du 10 juillet 2007, la chambre

commerciale de la Cour de cassation a consacré en des termes plus généraux le

principe visant à paralyser les effets de l’exercice déloyal d’un droit : « la règle

selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de

sanctionner l'usage déloyal d'une prérogative contractuelle ». Elle ajoute dans le

même attendu de principe, que l’application de cette règle ne peut autoriser le juge

« à porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus

entre les parties »327

. La Cour de cassation oppose ici la substance du contrat aux

« prérogatives contractuelles ».

Monsieur HOUTCIEFF, dans une étude relative à la terminologie employée

dans cet arrêt par la Cour de cassation, relève que la prérogative doit être entendue

323

P. STOFFEL-MUNCK, note sous Cass. Com., 10 juillet 2007, D. 2007, p.2839. 324

Cass. civ. 3ème

, 11 mai 1976, D. 1978, p. 269, note J.-J. TAISNE, Rép. Defrénois. 1977, p.476,

note J.-L AUBERT. 325

Cass. civ. 3ème

, 15 février 2000, Rép. Défrenois, 2000, p. 1379, obs. D. MAZEAUD ; RTD. civ.

2000, p. 565, obs. J. MESTRE et B. FAGES. 326

La jurisprudence relative à l’exercice des clauses résolutoires est abondante en raison du

contentieux que leur mise en œuvre suscite. Dans le cadre de notre étude, nous ne renverrons qu’à

l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 31 janvier 1995, D. 1995,

p.389, note C. JAMIN ; cf. également à propos d’un pacte de préférence, CA. Paris. 4e ch., A, 22

janvier 1992, RTD. civ. 1995, p. 623, note J. MESTRE. 327

Cass. com., 10 juillet 2007, D. 2007, p. 2839, note P. STOFFEL- MUNCK, JCP G. 2007, II,

10154, note D. HOUTCIEFF, RTD. civ. 2007, p. 773, obs. B. FAGES. Dans cet arrêt, la Cour de

cassation affirme qu’une créance ne peut être neutralisée par le seul fait que son titulaire a manqué à

son obligation d’exécution de bonne foi. V. également I. NAJJAR, La potestativité, à paraître.

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- 135 -

comme « un terme générique englobant tout droit subjectif, tout pouvoir de droit,

toute faculté d'agir fondée en droit, à l'exclusion d'une maîtrise de pur fait »328

. La

prérogative est une notion indicative de l’existence d’un pouvoir unilatéral,

suffisamment abstraite pour recouvrir, selon l’auteur, « d'autres notions aux contours

des plus flous, telles que le « droit potestatif » ou encore la « faculté » ». Si le droit

potestatif est effectivement une prérogative, la Cour de cassation consacre ici que

son usage déloyal peut être sanctionné.

La paralysie des effets produits par l’exercice déloyal d’un droit potestatif

n’altère pas l’essence du droit potestatif qui est un pouvoir unilatéral dont l’exercice

est libre. Le contrôle du juge ne porte pas sur le caractère abusif de l’insertion d’un

mécanisme unilatéral dans le contrat. Il ne s’applique pas non plus aux mobiles du

choix opéré par le potentior, qui demeure libre et ne doit pas faire l’objet de

justifications particulières329

. L’absence de motivation peut faire partie du faisceau

d’indices utilisés par la Cour de cassation pour caractériser concrètement le

comportement déloyal du cocontractant. Mais la réalisation du choix par le potentior

ne peut-être en elle-même déloyale, car c’est bien ce à quoi tend l’instauration dans

le contrat d’un droit potestatif : à l’émission d’une volonté unilatérale constitutive

d’un choix unique et délibéré, modifiant la situation juridique existante. Le choix est

l’usage du droit potestatif, il est la liberté, non l’abus de liberté.

328

G. CORNU, Vocabulaire juridique, Prérogative, cité par D. HOUTCIEFF. 329

Par ex Cass. Civ. 1ère

, 30 octobre 2008, JCP G. 2009. II. 10052, obs.

F. CHABAS. Dans cet arrêt la Cour de cassation affirme qu’il n’est pas possible d’imposer une

motivation de la décision unilatérale de résiliation, en l’absence de toute règle de droit ou de clause

particulière insérée dans le contrat à durée déterminée prévoyant cette obligation.

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- 136 -

CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE

L’acte unilatéral de volonté par lequel s’exerce le droit potestatif inséré dans

un contrat est un acte de puissance particulièrement efficace. Il confirme la

détermination du potentior à user du droit qui lui est conféré aux termes de la

promesse de vente, et exprime sa volonté d’agir conformément à l’une des

alternatives contenues dans le choix qui lui offert. L’acte de choix est radical. Il met

naturellement fin à l’ambivalence qui compose l’option, et a pour effet direct

d’influer sur la situation juridique existante afin de la modifier, de l’éteindre, ou

d’en créer une nouvelle.

Quelle que soit la finalité de l’action exercée par le potentior (création,

modification ou extinction de la situation juridique), l’exercice du droit potestatif a

toujours pour objet de métamorphoser le rapport juridique existant, en abolissant

l’incertitude qui le caractérise par extinction du choix qu’il contient. La modification

de la situation juridique intervient par la seule manifestation de volonté du potentior.

Pour accomplir son effet direct, la manifestation de volonté n’a besoin d’aucune

approbation extérieure, d’aucun secours du dehors. Elle suffit à modifier la situation

juridique, et le sujet passif ne peut pas s’y opposer puisqu’il s’est volontairement

astreint au quiétisme.

Nous avons défini l’activité du potentior comme un choix libre devant

s’exercer dans les limites du contrat, et conformément au régime de l’acte unilatéral.

Le recours à la notion de liberté n’a pas d’autre fonction que celle de qualifier le

pouvoir détenu par le potentior d’exercer son droit sans autre contrainte que celles

préalablement fixées. Dire que le choix du potentior est libre signifie qu’il doit

s’exercer par son seul arbitrage, eu égard à la situation contractuelle existante et en

fonction de l’impulsion réelle qu’il veut lui donner. Si l’idée de choix est

consubstantielle à celle de liberté dans son accomplissement, elle ne sous-tend pas

celle d’une action située en dehors du cadre fixé par le contrat ou par la loi, ou

réalisée sans conscience morale. Choisir une option, plutôt qu’une autre, ne peut être

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- 137 -

constitutif d’un abus en tant que tel, quand bien même le choix ne reflète que

l’intérêt égoïste de son auteur. Seule la manière d’exercer le droit peut faire l’objet

d’un contrôle judiciaire et être constitutive d’une faute. C’est alors le comportement

du potentior qui peut être sanctionné par le juge, s’il est jugé contraire au principe de

bonne foi qui gouverne les relations contractuelles. L’analyse du comportement du

potentior implique de considérer la présence du sujet passif, et réalise

empiriquement la médiation entre les intérêts des parties au droit potestatif.

Page 138: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 138 -

CONCLUSION GENERALE

Si l’exposé de certains mécanismes mettant en œuvre le même procédé n’est

pas une méthode de démonstration proprement dite de l’existence d’un concept, elle

permet d’en vérifier l’utilité et d’en expliquer intelligiblement le substrat. Le droit de

substitution, le droit d’option, le droit de rétractation (pour ne citer qu’eux)

présentent des analogies, non pas en raison de l’opération juridique que leur mise en

œuvre permet d’atteindre, mais en raison du pouvoir particulier qu’ils confèrent à

leur titulaire.

Le pouvoir détenu par le titulaire du droit potestatif n’est pas une simple

attitude de domination. Il est fondé sur une situation juridique qu’il a pour objet de

modifier. Lorsqu’il est contenu dans le contrat, le droit potestatif confère à l’un des

cocontractants le pouvoir de modifier unilatéralement le rapport de droit établi par la

convention, sans que l’autre partie ne puisse s’y opposer.

La suspicion que fait naître le pouvoir unilatéral détenu par le titulaire du

droit potestatif est peut-être l’une des raisons pour lesquelles il n’est pas nommé

lorsqu’il est mis en œuvre. Veut-on condamner la notion de droit potestatif à la

théorie juridique sous prétexte que l’idée d’énoncer l’existence d’un pouvoir

unilatéral est inconciliable avec l’idée d’équilibre contractuel et constituerait un

paradoxe éthique? La faiblesse du droit potestatif ne réside pas dans son domaine

d’application, mais dans la méconnaissance de la terminologie d’un droit largement

usité.

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- 139 -

Si le terme « potestatif » évoque bien la puissance, la force unilatérale de son

détenteur, le droit potestatif est quant à lui un pouvoir circonscrit, et concentré

autour de son objet (la modification de la situation juridique). Lorsque le droit

potestatif est d’origine conventionnelle, le sujet passif a accepté son insertion dans le

contrat, et les conditions de son exercice. Il est contraint à la passivité pendant le

délai de validité du droit potestatif, parce qu’il y a consenti. En ce sens, il est

responsable de son assujettissement. Le droit d’option conféré au bénéficiaire d’une

promesse de vente lui confère le droit d’accepter ou de refuser le contrat définitif. Le

promettant a déjà consenti à la conclusion du contrat définitif en cas de levée de

l’option, et il n’a plus rien à accomplir. La solution jurisprudentielle visant à

admettre la rétractation du promettant lorsqu’elle intervient avant la levée de

l’option est regrettable, parce qu’elle nie l’engagement définitif du promettant et

amenuit la force juridique du contrat. Si l’on applique le régime du droit potestatif

au droit d’option du bénéficiaire d’une promesse unilatérale de vente, la rétractation

du promettant serait simplement impossible pendant le délai d’exercice du droit

d’option, parce que jusqu’à l’expiration du terme fixé pour la levée de l’option le

promettant est contraint à la passivité. La reconnaissance du caractère potestatif du

droit d’option par la jurisprudence aurait pour conséquence de restaurer la véritable

nature de la promesse unilatérale de vente.

Le droit potestatif ne contient en lui-même ni péril absolu, ni danger

imminent pour le sujet passif. Lorsqu’il est inséré dans le contrat, il est une

technique permettant d’en aménager les différents temps. Il réalise les fins élaborées

par le système contractuel et intégrées par les parties. L’exercice du droit potestatif

est la réalisation d’un choix unilatéral qui « passéifie » la situation juridique

existante, une sélection délibérée entre les possibles alternatives prévues par les

parties. En ce sens, le droit potestatif est une puissance d’autodétermination de la

volonté du potentior, autant qu’il est un instrument de détermination contractuelle.

La liberté du potentior ne s’exprime que dans le choix qu’il réalise. Certes, les

motifs et les mobiles du choix échappent au sujet passif, et l’exercice d’un choix ne

peut être en lui-même abusif. Néanmoins, le comportement du potentior lors de

l’exercice de son droit n’est pas insusceptible d’abus, et peut être sanctionné. La

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sanction ne s’applique pas au droit potestatif mais à l’usage déloyal qui pourrait en

être fait.

L’analyse des caractères du droit potestatif démontre qu’il n’est pas un droit

polymorphe malgré le nombre de situations diverses qu’il concrétise, ni un pouvoir

absolu sur le contrat. Il participe à la traduction effective des dispositions voulues

par les parties, et peut constituer un remède au déséquilibre contractuel dès lors qu’il

est confié à la partie considérée comme la plus faible. Si la reconnaissance de la

catégorie générale des droits potestatifs ne s’est pas encore produite en droit positif,

une synthèse unitaire des droits potestatifs semble possible si l’on considère le droit

potestatif comme une technique, comme un moyen objectif de mettre en œuvre

certaines prérogatives juridiques.

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TABLE DES MATIERES

LA TECHNIQUE DES DROITS POTESTATIFS DANS LES CONTRATS DE PROMESSE DE VENTE D’IMMEUBLE

Liste inversée des abréviations…………………………………………...………................……….....……2

Sommaire…………………………………………………………………….…………………………...........................3

Introduction…………………………………………………………………………....……………….........................5

PARTIE I : Un pouvoir particulier dans le contrat…………....…....…….14

SECTION I : Le caractère unilatéral du droit potestatif…………………………....……….…....15

I - La génération d’un lien de sujétion utile au contrat……………..………………….….........15

A - La situation des parties au lien de sujétion….....…………………………………………….....16 1- Le rôle du destinataire du droit potestatif, sujet passif du lien de sujétion……………………...…………………………………………….......................16 2- Le rôle du titulaire du droit potestatif, sujet actif du lien de sujétion…………………………………………………………………………....................17 3- L’incidence du caractère onéreux du droit potestatif sur le lien de sujétion………….............................................................…....18 3.1- Le prix du droit potestatif…...............................................................................18 3.2- L’impact d’un coût financier exorbitant….........................................................20

B - Fondements et effets de l'assujettissement conventionnel………………...……….....22 1- La légitimation du pouvoir, fondement de l’assujettissement conventionnel..................................................….............22

1.1- La distinction des origines de l’assujettissement............................................22 1.2- La justification de l’insertion du lien de sujétion dans le contrat…………………..24 2- Les du lien de sujétion sur la nature du droit potestatif …...............................................26

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II - Le lien de sujétion ignoré par la jurisprudence………………………………………….........29 A - La qualification jurisprudentielle de l’obligation du promettant…………................…..30 1- Définition du droit d’option …...........................................................................................30 2- L’obligation de faire dégagée par la jurisprudence................…........................................31 3- Les réfutations doctrinales à la qualification jurisprudentielle…......................................31

3.1- Les critiques relatives à l’appréciation de la situation du promettant..............31 3.2- Les critiques relatives à la sanction de la rétractation du promettant..............32 3.3- Exposé et appréciation de la théorie de Madame FABRE-MAGNAN………………34

B - L’impossible rencontre des consentements............................................................36 1- Synthèse de la jurisprudence postérieure à l’arrêt de 1993 ….........................................36 2- Le recours à l’article 1134 du code civil…..........................................................................38 3- La nécessité d’adaptations contractuelles ……..................................................................41

SECTION II : Le pouvoir unilatéral conditionné du potentior.....................................45

I - Les limites imposées à l’exercice du droit potestatif…............................................45

A - Les termes du choix potestatif…................................................................................45 1- La notion de choix…..........................................................................................................45 2- Les réserves contenues dans l’alternative…......................................................................46 3- L’exercice pur et simple du droit potestatif ……................................................................47 3.1- Les arguments développés par Monsieur DAGOT…….......................................48 3.2- La maîtrise de l’étendue du lien de sujétion par l’indivisibilité de l’option.......49

B - Le délai d’exercice du droit potestatif …..................................................................51 1- La nécessité de prendre parti pendant un certain délai………………………………………………...51 2- Points de départ et d’extinction du délai d’exercice du droit potestatif……………..………..52 2.1- Le point de départ du délai d’exercice du droit potestatif……..........................52 2.2- Le terme extinctif du délai d’exercice du droit potestatif……............................53

2.3-Prescriptibilité du droit potestatif conventionnel ……........................................55

II – Interaction des délais d’exercice des droits potestatifs …….................................59 A - Le délai pour renoncer à une condition suspensive.......................................................59 1- L’admission de principe de la possibilité de renoncer à une condition suspensive pendente..................................................................................60 2- La renonciation à la condition suspensive postérieurement à sa défaillance…….............62 2.1- Effets induits par la défaillance de la condition suspensive..............................62 2.2- La solution jurisprudentielle…...........................................................................63

2.3- Les conséquences de la solution jurisprudentielle……......................................65

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B - L’exercice combiné des droits potestatifs …………....................................................67 1- L’articulation du droit d’option avec la faculté légale de rétractation..............................68 2- La combinaison des délais du droit d’option et de la réalisation de la condition suspensive de prêt ............................................................69 3- La coordination des délais applicables aux droits potestatifs d’option et de substitution…..................................................................72 3.1- La difficulté de qualification juridique du droit de substitution........................73 3.2- Incidences de la levée de l’option sur le délai d’exercice du droit de substitution ….……....................................................76

Conclusion de la première partie.......................................................................79

PARTIE II : Caractères et effets

de la manifestation unilatérale de volonté………....................……….....81

SECTION I : L’acte juridique unilatéral de volonté……..................................................82

I - Qualification de la manifestation unilatérale de volonté en acte unilatéral……82 A - La validité de l’acte juridique soumise à la réalité de la volonté de son auteur......................................................................................................................83 1- La cause de l’acte juridique unilatéral de volonté……......................................................83 2- L’intégrité du consentement émis par le potentior ….......................................................84 2.1- Les vices du consentement du potentior……………………………………………………....84 2.2- La capacité du potentior………………………………………………………….…….……………....85 2.3-La représentation du potentior devenu vulnérable….........................................86

B - Les effets propres à l’acte juridique unilatéral........................……......................88 1- La classification des effets de l’acte juridique unilatéral...................................................88 2- L’absence de caractère obligatoire...................................................................................89 3- L’exclusion de l’acte potestatif d’option du domaine de l’engagement unilatéral de volonté………....................................................90 3.1- L’exclusion, conséquence de l’absence de caractère obligatoire……….………….90 3.2- Le particularisme de l’acceptation de l’offre de contrat…................................92

II - L’extériorité de la manifestation unilatérale de volonté…....................................96 A - L’expression de la manifestation de volonté…........................................................96 1- Le respect de la forme prévue par la loi ou les parties…..................................................96 2- L’expression tacite de la volonté unilatérale…..................................................................98 3- L’expression silencieuse de la manifestation de volonté…...............................................99

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B - Le caractère réceptice de la manifestation unilatérale…………………………………….100 1- La soumission de l’exercice du droit potestatif à la connaissance du sujet passif….......101 2- Le délai imparti pour la notification de l’exercice du droit potestatif.............................102 2.1- La signification du délai imparti

en raison de la nature du droit potestatif…………..……………………………………….……..103 2.2- La détermination jurisprudentielle du délai imparti…......................................103 2.3- Les adaptations contractuelles….....................................................................106

SECTION II : Les effets de l’exercice du droit potestatif……..........................107 I - La modification de la situation juridique préexistante …….................................107

A - Critères de la notion de modification de la situation juridique appliquée à l’exercice du droit potestatif..................................................108 1- Définition de la situation juridique préexistante……............................................…........108 2- La détermination de la modification apportée à la situation juridique …........................110

B - Appréhension extensive de la notion de modification de situation juridique...........................................................…………..112 1- La modification de la situation juridique, objet du droit potestatif………………...…...........112 2- l’extension du domaine de la modification de la situation juridique Par la classification des effets…............................................................................117

II- Les effets subséquents à l’exercice du droit potestatif........................................119 A - L’irrévocabilité de l’exercice du droit potestatif……………............................................119 1- L’irrévocabilité de principe de l’exercice du droit potestatif…........................................119 2- Tempéraments jurisprudentiels apportés à l’irrévocabilité de l’acte d’option………………………….................………………………….............123 2.1- La « rétractation » de l’exercice du droit de préemption ….........................…123 2.2- La « rétractation » de l’exercice du droit de substitution …. ..........................125

B - Le contrôle de l’exercice du droit potestatif…………………………………………………..…..128 1- Le cadre du contrôle judiciaire limité par la nature du droit potestatif…………….….........128 1.1- Le caractère discrétionnaire du droit potestatif……………………………………………128 1.2- Théorie de Madame de ROCHFELD………………………………..…………………………….129

1.3- Appréciation de la théorie de Madame ROCHFELD………………………………………131 2-La sanction de l’abus dans l’usage du droit potestatif……………………………….……………….…132

Conclusion de la seconde partie…………………………….........................................136

Conclusion générale………………………………………………………..................................138

Table des matières……………………………………………………................................……..141

Bibliographie………………………………………………………………................................…….145

Page 145: La Technique Des Droits Potestatifs Dans Les Contrats de Promesse de Vente d'Immeuble, par GERALDINE LANCELIN

- 145 -

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Congrès des Notaires de France, La vente d’immeuble, Deauville, 2003.

- 100ème Congrès des notaires de France : Code civil : Les défis d'un nouveau

siècle, Paris, 2004.

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III- ARTICLES DE REVUES, CHRONIQUES, RAPPORTS et COLLOQUES

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Defrénois. 2011, p. 1023.

AYNES (L.) : Promesse unilatérale, du nouveau !, Rép. Defrénois. 2011, p. 1575,

proposition de clause par TARRADE (P.) et DAVY (P.).

BAILLOD (R.) : le droit de repentir, RTD. civ. 1984, p.227.

BENAC-SCHMIDT (F.) : Dans une promesse de vente, l’obligation du promettant

est une obligation de faire, D. 1994, p. 507.

BENAC-SCHMIDT (F.) : La promesse de vente : à propos de deux questions

d’actualité, D. 1990, p.7.

BONNET (D.) : Les droits potestatifs ne bénéficient qu’à ceux qui les exercent…,

JCP G. I. 1238. (A propos d’un arrêt rendu par la troisième Chambre civile de la

Cour de cassation en date du 22 septembre 2010).

BOUTEILLE (M.) : Regard critique sur la modalité conditionnelle dans l'avant-

projet de réforme du droit des obligations et de la prescription, D.2008, p. 1848.

BOYER (L.) : Les promesses synallagmatiques de vente, contribution à la théorie

des avant-contrats, RTD. civ. 1949.

BOYER (L.) : Clause de substitution et promesse unilatérale de vente, JCP G.

1987. I.3310.

BRUN (P.) : Nature juridique de la clause de substitution dans le bénéfice d'une

promesse unilatérale de vente : une autonomie de circonstance ?, RTD. civ. 1996 p.

29.

CATALA (P.) : Avant-projet de réforme du droit des obligations (Articles 1101 à

1383 du Code civil) et du droit de la prescription (Article 2234 à 2281 du Code

civil), La documentation française, 2005.

COLLART-DUTILLEUL (F.) : Les contrats préparatoires à la vente d'immeuble :

les risques de désordre, Dr. et patrimoine, déc. 1995, p. 58.

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DABIN (J.) : Le droit subjectif, D.1952, p. 94.

DAGOT (M.) : La levée conditionnelle, JCP N. 1990. 100908.

DAGOT (M.) : Les illusions de la lettre recommandée, JCP N. 2003, p. 1266.

DAGOT (M.) : La protection de l’acquéreur immobilier et l’article 72 de la loi

SRU, JCP N, 2001. p. 912.

FABRE-MAGNAN (M.) : Le mythe de l’obligation de donner, RTD. civ. 1996,

p.85.

GHESTIN (J.) : La notion de contrat, D. 1990, p. 147.

GRIMALDI (C.) : La durée des droits : péremption ou prescription ? Approche

empirique, D. 2012, p.514.

HAGE-HACHINE (F.) : Essai d’une nouvelle classification des droits privés,

RTD. civ. 1982, p. 705.

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JEULAND (E.) : Proposition de distinction entre la cession de contrat et la

substitution de personne, D. 1998, p. 356.

LESAGE (L.) et NUYTTEN (B) : Regards sur les notions de consensualisme et de

formalisme, Rép. Defrénois, 1998. Art. 36784, p. 497.

MATHIEU-IZORCHE (M.-L.) : L'irrévocabilité de l'offre de contrat ? Réflexions

à propos de l'arrêt de la troisième chambre civile du 7 mai 2008, D. 2009, p. 440.

MAZEAUD (D.) : La révision de l’indemnité d’immobilisation, JCP N. 1992. I.

113.

MAZEAUD (D.) : La condition suspensive d’obtention d’un prêt immobilier à

l'épreuve de la jurisprudence, JCP N. 1993, I, p. 348.

MAZEAUD (D.) : Promesse unilatérale de vente : la Cour de cassation a ses

raisons…, D. 2011, p. 1457.

MESTRE (J.) : Comportement et qualification des contrats, RTD. civ., 1994, p.

595.

MICHAELIDES-NOUAROS (G.) : L’évolution récente de la notion de droit

subjectif, RTD. civ. 1966, p. 216

MOLFESSIS (N.) : De la prétendue rétractation du promettant dans la promesse

unilatérale de vente ou pourquoi le mauvaise usage d’un concept inadapté doit être

banni, D. 2012, p. 231.

NAJJAR (I.) : Droits fondamentaux et droits discrétionnaires : pour une mise en

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NAJJAR (I.) : Les contrats d’option, Proche-Orient études juridiques 1988-1990,

Revue de la Faculté de droit et de sciences politiques Université de Saint-Joseph,

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NAJJAR (I.) : Le point de départ de l'action en rescision d'une vente conclue sur

une levée d'option sous condition, D. 2000, p. 38.

NAJJAR (I.) : Clause de substitution et « position contractuelle », D. 2000, p.635

(à propos d’un arrêt rendu par la Cour de cassation en date du 13 juillet 1999).

NAJJAR (I.) : Mandat et irrévocabilité, D. 2003, p. 708.

NAJJAR (I.) : La potestativité, à paraître.

NUYTTEN (B) et LESAGE (L.) : Regards sur les notions de consensualisme et de

formalisme, Rép. Defrénois, 1998. Art. 36784, p. 497.

NUYTTEN (B.) : L’abus de délais est dangereux pour le contrat !, RDC. 2004,

numéro spécial, p. 211.

NUYTTEN (B.) : La renonciation à la condition suspensive : quand c'est le

mécanisme qui défaille, RDC. 2008, p. 959.

PETIT (B.) : Conséquences de la renonciation par le bénéficiaire d’une promesse

de vente à une condition suspensive, JCP N. n°48, p.1662.

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matière contractuelle, entre unité et diversité, RTD civ. 2010, p. 209.

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ROCHFELD (J.) : Les droits potestatifs accordés par le contrat, in Le contrat au

début du XXIème siècle, Etudes offertes à J. GHESTIN, L.G.D.J, 2000, p. 746.

ROETS (D.) : Les droits discrétionnaires : une catégorie juridique en voie de

disparition ?, D. 1997, p. 92.

ROUBIER (P.) : Le rôle de la volonté dans la création des droits et devoirs, APD.

1957, p. 7.

SOUBISE (V.) : La transmission, par substitution de bénéficiaire, des droits

conférés par une promesse de vente, D. 1994, p. 237.

TALLON (D.) : Le surprenant réveil de l’obligation de donner, D.1992, chron. 69.

TOURNAFOND (O.) : La révocation d’une promesse unilatérale de vente,

obligation de faire, D. 1994, p. 230

DE VAN (J.) : Le droit de nuire, RTD. civ., 1995, p. 533.

WITTMANN (V.) : La renonciation unilatérale à la défaillance de la condition

suspensive dans les promesses de vente : à la recherche d’un équilibre contractuel,

D. 2012, p. 301.

IV- NOTES, OBSERVATIONS, et CONCLUSIONS DE JURISPRUDENCE

AUBERT (J.-L.) :

Obs sous Cass. civ, 3ème

, 24 avril 1970, Rép. Defrénois, 1970, art. 1049.

Note sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 1976, Rép. Defrénois, 1977. p. 476.

AYNES (L.) :

Note sous Cass. civ. 3ème, 15 décembre 1993, D. 1995, p. 87.

Obs. sous Cass. civ. 3ème , 08 septembre 2010, Rép. Defrénois, 2010, art. 2123.

BARRET (O.) :

Note sous Cass. civ. 1ère

, 5 mai 1986, JCP N. II, 10219.

BENAC-SCHMIDT (F.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 15 décembre 1993, D. 1994, p. 507.

Note sous Cass. civ. 3ème

, 12 avril 1995, D. 1996, p.539.

BILLIAU (M.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 12 avril 2012, JCP G 2012, p. 945.

BRUN (P.) :

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 19 mars 1997, D. 1997, p. 341.

CARBONNIER (J.) :

Obs. sous Cass. civ. 1re

, 22 décembre 1959, RTD. civ. 1960, p.323.

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CHABAS (F.) :

Obs. sous Cass. civ. 1ère

, 30 octobre 2008, JCP G. 2009. II. 10052.

DAGORNE-LABBE (Y.) :

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 13 février 2008, D. 2008, p. 1530.

Note sous Cass. civ, 3ème

, 12 avril 2012, JCP G. 2012, p. 760.

DAGOT (M.) :

Note sous Cass. civ. 1ère

, 09 février 1970, JCP 1971. II. 16806.

Note sous Cass. civ. 1ère

, 25 janvier 1989, JCP G. 1990, II, 21468.

DELEBECQUE (P.) :

Obs. sous Cass. civ. 3ème, 15 décembre 1993, Rép. Defrénois, 1994, art.35845,

p.795.

DESSAUX (N.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 16 juin 2011, D. 2011, p.2260.

FAGES (B.) :

Et MESTRE (J.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 février 2000, RTD. civ. 2000, p. 565.

Et MESTRE (J.), obs. sous Cass. com. 24 mai 2005, RTD. civ. 2005, p. 588.

Et MESTRE (J.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 31 mars 2005, RTD. civ. 1996, p.613.

Et MESTRE (J.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2005, RTD. civ. 2006, p. 106.

Note sous Cass. com., 10 juillet 2007, RTD. civ. 2007, p. 773.

Note sous Cass. civ., 3ème

, 27 mars 2008, RTD. civ. 2008, p 475.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 20 mai 2009, RTD. civ. 2009, p. 524.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 08 septembre 2010, RTD. civ. 2010, p. 778.

Obs. sous Cass. civ. 1ère

, 1er décembre 2010, RTD. civ. 2011, p. 346.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2011, RTD. civ. 2011, p.532.

Note sous Cass. com. 13 septembre 2011, RTD. civ. 2011, p.758.

GHESTIN (J.) :

Note sous Cass.com 5 et 9 novembre 1991 et 23 février 1993, D. 1993, p. 383.

GRIMALDI (C.) :

Note sous Cass. civ, 3ème

, 12 avril 2012, Rép. Defrénois, 2012, p. 611.

GROSLIERE (J.-C) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 13 juillet 1999, RDI. 1999, p. 666.

Obs sous Cass. civ. 3ème

, 29 mars 2000, RDI. 2000. p. 585.

HEYMANN (J.)

Note sous Cass. com. 13 septembre 2011, JCP G. 2011, 1353.

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- 151 -

HOUTCIEFF (D.) :

Note sous Cass. com., 10 juillet 2007, JCP G. 2007, II, 10154.

JAMIN (C.) :

Note sous Cass. civ. 1ère

, 31 janvier 1995, D. 1995, p.389.

JEULAND (E.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 13 juillet 1999, D. 2000, p. 195.

LABARTHE (F.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 25 mars 2009, JCP G. 2009, p. 213.

LARROUMET (C.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 20 décembre 1994, JCP G. 1995, II, 21491.

LEVENEUR (L.)

Note sous Cass. com. 13 septembre 2011, JCP Contrats Concurrence

Consommation, 2011, comm.53.

LOISEAU (G.) :

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 13 mars 2012, D. 2012, p. 876

MAINGUY (D.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2011, D. 2001, p.1460.

MATHIEU-IZORCHE (M.-L.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, D. 2009, p. 440.

MAZEAUD (D.) :

Note sous Cass. civ. 1ère

, 9 déc. 1992, JCP N. 1993, I, p. 348.

Obs. sous Cass. civ. 1ère

, 5 décembre 1993, Rép. Defrénois, 1996, art. 36354.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 décembre 1993, JCP G. 1995, II. 22366.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 26 juin 1996, D. 1997, p. 169.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 février 2000, Rép. Defrénois, 2000, p. 1379.

Obs .sous Cass. com, 30 octobre 2000, D. 2001, p. 3241.

Obs. sous Cass. civ., 3ème

, 28 octobre 2003, RDC. 2004, p. 270.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 13 février 2008, RTD. civ. 2008, p. 293.

Note sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2011, D. 2011, p. 1457.

MESTRE (J.) :

Obs. sous CA. Aix, 15 mars 1984, RTD. civ, 1985, p. 730.

Obs sous Cass. civ. 2ème

, 27 novembre 1985, RTD. civ. 1986, p. 750.

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- 152 -

Obs sous Cass. civ. 1ère

, 27 avril 1988, RTD. civ. 1988, p. 541.

Obs. sous Cass.civ.1ère

, 20 novembre 1990, RTD. civ. 1992, p. 99.

Note sous CA. Paris. 4e ch., A, 22 janvier 1992, RTD. civ. 1995, p.623.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 20 mai 1992, RTD. civ. 1993, p. 345.

Obs sous Cass.com, 26 janvier 1993, RTD. civ. 1994, p. 587.

Obs sous Cass. com, 1er

juin 1993, RTD. civ. 1994, p. 586.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 décembre 1993, RTD. civ. 1994, p.584.

Obs. sous Cass. civ. 1ère

, 23 janvier 1996, RTD. civ., 1996, p. 608.

Obs. sous CA. Toulouse, 2e ch., 14 février 1996, RTD. civ. 1996, p. 397.

Et FAGES (B.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 février 2000, RTD. civ. 2000, p. 565.

Et FAGES (B.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 31 mars 2005, RTD. civ. 1996, p. 613.

Et FAGES (B.), obs. sous Cass. com. 24 mai 2005, RTD. civ. 2005, p. 588.

Et FAGES (B.), obs. sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2005, RTD. civ. 2006, p. 106.

Obs. sous Cass. civ. ch. mixte 1ère

et 3ème

, 26 mai 2006, RTD. civ. 2006, p.550

MOURY (J.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 26 janvier 1993, D. 1994, p. 69.

NAJJAR (I.) :

Note sous Cass. civ. 3e, 17 avril 1984, D. 1985, p. 234.

Note sous Cass. civ. 1ère

, 30 mai 1985, D. 1986, p. 65.

Note sous Cass. civ, 3ème

, 27 avril 1988, D. 1989, p. 65.

Note sous Cass. civ. 1ère

, 6 févr. 1996, D. 1997, p. 369.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 26 juin 1996, D.1997, p. 119.

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 24 février 1999, D. 2000, p. 38.

Note sous Cass. civ, 3ème

, du 13 juillet 1999, D. 2000, p. 635.

PAISANT (G.) :

Note sous CA. Paris, 22 octobre 1990, D .1993, p. 234.

PENNEAU (A.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 7 juillet 1993, D. 1994 p. 211.

PETIT (B.) :

Note sous Cass. com., 06 février 1996, JCP N. 1996, p. 1662.

ROCHFELD (J.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 13 octobre 1999, JCP G. 2000. I. 237.

ROUZET (G.) :

Etude sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 2011, G. ROUZET, conseiller-rapporteur à la

Cour de cassation, JCP N. 2011. 1163.

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SAVATIER (R.) :

Note sous Cass. civ. 1re

, 13 octobre 1964, JCP 1965. II. 14170.

SIZAIRE (C.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 13 mars 2011, JCP construction et urbanisme. 2012,

comm. 90.

STAES (O.) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, D.1996, p. 286.

STOFFEL-MUNCK (P.) :

Note sous Cass. com., 10 juillet 2007, D. 2007, p.2839.

TAISNE (J.-J) :

Note sous Cass. civ. 3ème

, 11 mai 1976, D. 1978, p. 269.

TOURNAFOND (O.) :

Obs. sous Cass. civ. 3ème

, 15 décembre 1993, D. 1994, p. 23.

ZALEWSKI (V.) :

Note sous Cass. civ. 1ère

, 1er décembre 2010, Rép. Defrénois, 2011. art. 39190.