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NOVEMBRE 2003 29 PORTEFEUILLE DANIEL LAVERDIÈRE lusieurs conseillers doivent éclairer des clients lorsque ceux-ci quittent leur emploi en détenant un régime de retraite à pres- tations déterminées. Le participant doit faire un choix entre conserver la rente ou opter pour la valeur de trans- fert. Voilà un bel exemple où le conseiller en placement doit agir au- delà de ses propres intérêts financiers. Le client qui choisit la valeur de transfert doit être informé des élé- ments suivants : La valeur de transfert représente la valeur actualisée 1 de l’ensemble des droits accumulés dans le régime de retraite (rente de base, indexation, prestation de décès, etc.). Si la valeur est importante, la rente l’est également. Il y a perte du privilège d’un revenu régulier de qualité et sans tracas. Le retraité (ou le conjoint survivant) est dans l’obligation de voir à ses placements et de décider des retraits. Il doit assumer le risque de rende- ment (fluctuation des taux d’intérêt et des marchés boursiers) et espé- rer obtenir mieux que l’hypothèse implicite du taux d’actualisation 3 . Il doit assumer le risque de survie (vivre plus longtemps que la moyenne). Il peut perdre certains avantages sociaux offerts aux membres du régime de pension. Il peut passer à côté d’une éven- tuelle valorisation ponctuelle accordée par l’employeur à ses retraités (exemple : indexation) 2 . Une partie importante du montant peut parfois être imposable au moment même du transfert. Les contraintes du FRV peuvent faire en sorte que le retrait maxi- mal est inférieur à la rente nor- malement prévue par le régime de retraite. Il semble de toute évidence que plusieurs clients réalisent aujourd’hui qu’ils n’ont pas pris leur décision avec toute l’information qui s’imposait. Les aléas des marchés financiers observés depuis trois ans sont bien entendu la première source d’insatisfaction. Les nouvelles projections de retraite faites à partir des soldes FRV actuels indi- quent souvent que le choix de conser- ver la rente aurait pu s’avérer la déci- sion convenant davantage à la quiétude recherchée. Si une simulation des risques avait été faite dès le départ, le client aurait été plus difficile- ment en mesure de prétendre avoir été mal renseigné. Par exemple, le graphique ci-contre (inspiré d’un cas vécu) indique les probabilités d’être en vie et d’avoir épuisé son capital. Les simulations de type Monte Carlo permettent d’illustrer les dommages causés par la volatilité du rendement ainsi que par la survie prolongée. Dans notre exemple, en utilisant un rendement de 7 % avec un écart type de 2 %, la probabilité que le solde ne soit jamais nul est de l’ordre de 98 %. Toutefois, si l’écart type est de 8 % (celui des fonds équilibrés), on obtient ce même graphique. La simple volati- lité fait en sorte que dans 25 % des cas on épuisera le capital, le client survi- vant parfois même plus de 15 ans au manque d’actif (5 % des cas). Bien entendu, on pourra toujours prétendre qu’en cas de décès pré- maturé le solde de la valeur de trans- fert peut représenter une valeur plus importante que les prestations de décès prévues (garanties, réversibi- lité) par le régime de retraite. Or, à trop vouloir se préoccuper de la situation en cas de décès, on risque de négliger la situation en cas de retraite prolongée. Lorsque la rente est le principal actif, les consé- quences d’opter pour le transfert peuvent être très lourdes. Daniel Laverdière est directeur principal de Planification finan- cière Banque Nationale. OC P La valeur de transfert : ce qu’il faut aussi dire ! Capital épuisé 25 % Capital jamais épuisé du vivant 75 % Moins de 5 ans 9% Entre 5 et 10 ans 6% Entre 10 et 15 ans 5% Plus de 15 ans 5% PHOTO : BONO 1. Les normes de l’ICA tiennent compte notam- ment de la survie anticipée et des conditions des marchés financiers. Dans le calcul, on doit toutefois prendre les conditions de retraite anticipée applicables en cas de départ et non celles applicables en cas de retraite immédiate (souvent plus généreuses). 2. Quoique moins fréquents, des ajustements à la baisse de la rente peuvent également avoir lieu en cas de manque de solvabilité du régime. 3. Le taux implicite à battre (après frais de ges- tion) est celui des obligations à long terme du gouvernement du Canada + 50 pb pour les 15 premières années et 6 % par la suite. Pour les rentes indexées, le rendement réel est de l’ordre de 3,25 % (après inflation).

la Valeur De Transfert : Ce Qu’il Faut Aussi Dire! · NOVEMBRE 2003 29 PORTEFEUILLE DANIEL LAVERDIÈRE lusieurs conseillers doivent éclairer des clients lorsque ceux-ci quittent

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Page 1: la Valeur De Transfert : Ce Qu’il Faut Aussi Dire! · NOVEMBRE 2003 29 PORTEFEUILLE DANIEL LAVERDIÈRE lusieurs conseillers doivent éclairer des clients lorsque ceux-ci quittent

NOVEMBRE 200329

PORTEFEUILLE

DANIEL LAVERDIÈRE

lusieurs conseillers doiventéclairer des clients lorsqueceux-ci quittent leur emploi en

détenant un régime de retraite à pres-tations déterminées. Le participantdoit faire un choix entre conserver larente ou opter pour la valeur de trans-fert. Voilà un bel exemple où leconseiller en placement doit agir au-delà de ses propres intérêts financiers.

Le client qui choisit la valeur detransfert doit être informé des élé-ments suivants :

❚ La valeur de transfert représente lavaleur actualisée1 de l’ensembledes droits accumulés dans lerégime de retraite (rente de base,indexation, prestation de décès,etc.). Si la valeur est importante, larente l’est également.

❚ Il y a perte du privilège d’unrevenu régulier de qualité et sanstracas. Le retraité (ou le conjointsurvivant) est dans l’obligation devoir à ses placements et de déciderdes retraits.

❚ Il doit assumer le risque de rende-ment (fluctuation des taux d’intérêtet des marchés boursiers) et espé-rer obtenir mieux que l’hypothèseimplicite du taux d’actualisation3.

❚ Il doit assumer le risque de survie (vivre plus longtemps quela moyenne).

❚ Il peut perdre certains avantagessociaux offerts aux membres durégime de pension.

❚ Il peut passer à côté d’une éven-tuelle valorisation ponctuelleaccordée par l’employeur à sesretraités (exemple : indexation)2.

❚ Une partie importante du montant

peut parfois être imposable aumoment même du transfert.

❚ Les contraintes du FRV peuventfaire en sorte que le retrait maxi-mal est inférieur à la rente nor-malement prévue par le régimede retraite.

Il semble de toute évidence queplusieurs clients réalisent aujourd’huiqu’ils n’ont pas pris leur décision avectoute l’information qui s’imposait. Lesaléas des marchés financiers observésdepuis trois ans sont bien entendu lapremière source d’insatisfaction. Lesnouvelles projections de retraite faitesà partir des soldes FRV actuels indi-quent souvent que le choix de conser-ver la rente aurait pu s’avérer la déci-sion convenant davantage à laquiétude recherchée.

Si une simulation des risquesavait été faite dès le départ, leclient aurait été plus difficile-ment en mesure de prétendreavoir été mal renseigné. Parexemple, le graphique ci-contre(inspiré d’un cas vécu) indiqueles probabilités d’être en vie etd’avoir épuisé son capital. Lessimulations de type Monte Carlopermettent d’illustrer les dommagescausés par la volatilité du rendementainsi que par la survie prolongée.Dans notre exemple, en utilisant unrendement de 7 % avec un écart typede 2 %, la probabilité que le solde nesoit jamais nul est de l’ordre de 98 %.Toutefois, si l’écart type est de 8 %(celui des fonds équilibrés), on obtientce même graphique. La simple volati-lité fait en sorte que dans 25 % des cason épuisera le capital, le client survi-

vant parfois même plus de 15 ans aumanque d’actif (5 % des cas).

Bien entendu, on pourra toujoursprétendre qu’en cas de décès pré-maturé le solde de la valeur de trans-fert peut représenter une valeur plusimportante que les prestations dedécès prévues (garanties, réversibi-lité) par le régime de retraite. Or, àtrop vouloir se préoccuper de lasituation en cas de décès, on risquede négliger la situation en cas deretraite prolongée. Lorsque la renteest le principal actif, les consé-quences d’opter pour le transfertpeuvent être très lourdes.

Daniel Laverdière est directeurprincipal de Planification finan-cière Banque Nationale.

OC

P

La valeur de transfert :ce qu’il faut aussi dire!

Capitalépuisé25 %

Capitaljamais

épuisé duvivant75 %

Moins de 5 ans9 %

Entre 5 et 10 ans6 %

Entre 10 et 15 ans5 %

Plus de 15 ans5 %

PH

OTO

:B

ON

O

1. Les normes de l’ICA tiennent compte notam-ment de la survie anticipée et des conditionsdes marchés financiers. Dans le calcul, ondoit toutefois prendre les conditions deretraite anticipée applicables en cas de départet non celles applicables en cas de retraiteimmédiate (souvent plus généreuses).

2. Quoique moins fréquents, des ajustements àla baisse de la rente peuvent également avoirlieu en cas de manque de solvabilité durégime.

3. Le taux implicite à battre (après frais de ges-tion) est celui des obligations à long termedu gouvernement du Canada + 50 pb pourles 15 premières années et 6 % par la suite.Pour les rentes indexées, le rendement réelest de l’ordre de 3,25 % (après inflation).