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ARTICLE IN PRESS Modele + L’évolution psychiatrique xxx (2014) xxx–xxx Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ScienceDirect Article original Lacan lecteur de Descartes (I) : sur deux usages de la métaphore Lacan as a reader of Descartes (I): Concerning two uses of the metaphor Frédéric Pellion (Docteur en médecine et en sciences humaines cliniques, psychiatre, praticien hospitalier, psychanalyste, directeur de recherches à l’université Paris Diderot, enseignant à l’université Paris Descartes, et au Collège clinique de Paris, membre de l’École de Psychanalyse des Forums du Champ Lacanien) a,b,c,d,e,a Centre hospitalier Sainte-Anne, 17, rue Broussais, 75674 Paris, France b Institut national de jeunes sourds, 254, rue Saint-Jacques, 75005 Paris, France c Établissement public de santé Érasme, 143, avenue Armand-Guillebaud, 92161 Antony cedex, France d 25, rue Tournefort, 75005 Paris, France e Centre de recherches psychanalyse, médecine et société, 8, rue Albert-Einstein, 75205 Paris cedex 13, France Rec ¸u le 6 ecembre 2012 Résumé Introduction. Dans les suites de son hypothèse de l’« inconscient structuré comme un langage », Jacques Lacan s’est assidûment employé à concevoir la métaphore de manière proprement psychanalytique. Toute- fois, le résultat n’est pas univoque, et les différentes versions proposées par Lacan de « sa » métaphore ne s’ajustent pas sans laisser entre elles l’espace de certaines ambiguïtés. Objectifs. Partant du constat que la perspective du cogito cartésien n’est jamais très éloignée des considé- rations de Lacan sur la métaphore, nous développerons ici l’hypothèse que, d’une part, (1) les interprétations par Lacan de la structure métaphorique du cogito, et, de l’autre, son insistance sur, à la fois, (2.1.) la réfé- rence cartésienne comme cruciale pour la psychanalyse, et (2.2.) la métaphore comme figure centrale de la rhétorique inconsciente, peuvent s’éclairer les unes les autres. Méthode. Nous étaierons cette hypothèse au moyen, entre autres, de la lecture précise de quelques-unes des étapes de la construction par Lacan de sa théorie de la métaphore, et d’un passage crucial des Méditations. Toute référence à cet article doit porter mention : Pellion F. Lacan lecteur de Descartes (I) : sur deux usages de la métaphore. Evol psychiatr XXXX; vol. (n o ) : pages (pour la version électronique) ou adresse URL [date de consultation] (pour la version électronique). Auteur correspondant. Centre hospitalier Sainte-Anne, 17, rue Broussais, 75674 Paris, France. Adresse e-mail : [email protected] http://dx.doi.org/10.1016/j.evopsy.2014.02.008 0014-3855/© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS. EVOPSY-831; No. of Pages 14

Lacan lecteur de Descartes (I) : sur deux usages de la métaphore

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L’évolution psychiatrique xxx (2014) xxx–xxx

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

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Article original

Lacan lecteur de Descartes (I) : sur deux usagesde la métaphore�

Lacan as a reader of Descartes (I): Concerning two uses of the metaphor

Frédéric Pellion (Docteur en médecine et en sciences humaines cliniques,psychiatre, praticien hospitalier, psychanalyste, directeur de recherches àl’université Paris Diderot, enseignant à l’université Paris Descartes, et au

Collège clinique de Paris, membre de l’École de Psychanalyse desForums du Champ Lacanien) a,b,c,d,e,∗

a Centre hospitalier Sainte-Anne, 17, rue Broussais, 75674 Paris, Franceb Institut national de jeunes sourds, 254, rue Saint-Jacques, 75005 Paris, France

c Établissement public de santé Érasme, 143, avenue Armand-Guillebaud, 92161 Antony cedex, Franced 25, rue Tournefort, 75005 Paris, France

e Centre de recherches psychanalyse, médecine et société, 8, rue Albert-Einstein, 75205 Paris cedex 13, France

Recu le 6 decembre 2012

Résumé

Introduction. – Dans les suites de son hypothèse de l’« inconscient structuré comme un langage », JacquesLacan s’est assidûment employé à concevoir la métaphore de manière proprement psychanalytique. Toute-fois, le résultat n’est pas univoque, et les différentes versions proposées par Lacan de « sa » métaphore nes’ajustent pas sans laisser entre elles l’espace de certaines ambiguïtés.Objectifs. – Partant du constat que la perspective du cogito cartésien n’est jamais très éloignée des considé-rations de Lacan sur la métaphore, nous développerons ici l’hypothèse que, d’une part, (1) les interprétationspar Lacan de la structure métaphorique du cogito, et, de l’autre, son insistance sur, à la fois, (2.1.) la réfé-rence cartésienne comme cruciale pour la psychanalyse, et (2.2.) la métaphore comme figure centrale de larhétorique inconsciente, peuvent s’éclairer les unes les autres.Méthode. – Nous étaierons cette hypothèse au moyen, entre autres, de la lecture précise de quelques-unes desétapes de la construction par Lacan de sa théorie de la métaphore, et d’un passage crucial des Méditations.

� Toute référence à cet article doit porter mention : Pellion F. Lacan lecteur de Descartes (I) : sur deux usages de lamétaphore. Evol psychiatr XXXX; vol. (no) : pages (pour la version électronique) ou adresse URL [date de consultation](pour la version électronique).

∗ Auteur correspondant. Centre hospitalier Sainte-Anne, 17, rue Broussais, 75674 Paris, France.Adresse e-mail : [email protected]

http://dx.doi.org/10.1016/j.evopsy.2014.02.0080014-3855/© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

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Résultats. – Cela nous permettra de préciser comment les enjeux de la métaphore se croisent, mais aussise distinguent, pour Descartes et pour Lacan, et d’en déduire un éclairage sur quelques-uns des motifs del’insistance, chez Lacan, de la référence à Descartes en général, et à son cogito en particulier.Discussion. – L’horizon du texte demeure en effet celui des rapports à la fois contradictoires etcomplémentaires du sujet de l’inconscient au « sujet de la science » trouvant dans le cogito cartésien, selonLacan, son point d’origine.

© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Mots clés : Psychanalyse ; Causalité ; Cogito ; Détermination ; Métaphore ; Science ; Sujet

Abstract

Introduction. – In the follow-up of his hypothesis of “the subconscious structured as a language”, JacquesLacan unremittingly devoted himself to conceiving the metaphor in a specifically psychanalytical manner.However, the result is not univocal, and the varying versions proposed by Lacan of “his” metaphor do notadjust themselves without leaving room between them for certain ambiguities.Objectives. – Based on the acknowledgement that the perspective of the Cartesian cogito is never far fromLacan’s considerations on the metaphor, we will develop herein the hypothesis whereby on the one hand (1)the interpretations by Lacan of the metaphorical structure of cogito, and on the other, his insistence that both(2.1.) the Cartesian reference as crucial for psychoanalysis and (2.2) the metaphor as a central figure of thesubconscious rhetoric, can enlighten each other.Method. – We will develop this hypothesis using, among others, the precise reading of a few of the stages inthe construction by Lacan of his theory of the metaphor, and of an essential passage from “Méditations”.Results. – This will allow us to specify how the stakes of the metaphor overlap, but also distinguish themselves,for Descartes and for Lacan, and result in a clarification of some of the reasons of Lacan’s insistence andthe reference to Descartes in general, and to his cogito in particular.Discussion. – The horizon of the text indeed remains that of reports, at the same time contradictory andcomplementary, on the subject of the subconscious regarding “the subject of science” revealing in theCartesian cogito, according to Lacan, its point of origin.© 2014 Published by Elsevier Masson SAS.

Keywords: Psychoanalysis; Causality; Cogito; Determination; Metaphor; Science; Subject

« Le signifié d’un signifiant vient toujours de la place qu’occupe le même signifiant dans unautre discours (Lacan J. Le savoir du psychanalyste (1971–1972). Lecon inédite du 3 février1972).

Les affects sont ce qui résulte de la présence de la langue en tant que, de savoir, elle articuledes choses qui vont beaucoup plus loin que tout ce que l’être parlant supporte de savoirénoncé » ([1], p. 127).

Jacques Lacan

Lire René Descartes, et faire partager cette lecture, aura occupé Jacques Lacan pendantprès de vingt-cinq ans1 : au moins du « retour à Descartes » annoncé en 1946 dans les « Propos

1 Ce texte développe quelques idées avancées lors du séminaire de recherche tenu au Centre hospitalier Sainte-Annesous le titre « Le fait clinique et la psychanalyse » durant les années 2010–2012 (Collège de clinique psychanalytique deParis, Centre de Recherches Psychanalyse, Médecine et Société de l’université Paris Diderot).

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sur la causalité psychique » [2] (sept années, donc, avant celui à Freud), à l’« Allocution surl’enseignement » de 1970 ([3], p. 301–2), où Lacan fait apparaître derrière la figure convenue duDescartes rationnel une sorte de chimère mêlant les discours du maître (qui trouve à se réaliser,selon lui, dans certains pans du discours philosophique) et de l’hystérie (dont il s’agit pour luide montrer, en l’occurrence, l’affinité avec le discours scientifique)2.

Entre temps, en 1965, Lacan aura posé le cogito cartésien comme point d’origine de l’étatcontemporain du sujet3, puis, en 1967, aura développé une interprétation très personnelle du« donc » autour duquel celui-ci pivote dans le Discours de la méthode et les Principes de laphilosophie. Cette interprétation, résumée en peu de mots, lit ce « donc » comme la trace de la causeen tant qu’elle échappe ; ce qui met ce « donc » dans une continuité imprévue avec le C a freudienen tant que puissance dynamique tournée vers une référence extérieure à la psychanalyse (enl’occurrence vers cette référence biologique/mécaniste dont Sigmund Freud, fidèle à la traditionphysicaliste4 dont il était issu, tenait à ce que la psychanalyse restât tournée)5.

Même si sa validité est aujourd’hui contestée par certains [6], la thèse de 1965, surtout com-plétée de celle de 1967, est forte, claire et séduisante : (1) la position d’un sujet individuel6 estune des conditions de possibilité de la psychanalyse ; or, (2) ce sujet doit beaucoup de sa formeactuelle, écartelée entre doute et certitude, au cogito cartésien — y compris en ce que cette formelaisse ce sujet aux prises avec une cause qui le dépasse, comme la portée du « donc » dépassele débat entre pensée et être apparemment mis en scène par le cogito — ; conséquence, (3) lapsychanalyse est historiquement tributaire du cogito, ce qui légitime, en retour, ses prétentions àune certaine parenté avec la science.

Il semble donc assez normal que les commentaires portant sur l’influence du corpus cartésiensur l’élaboration théorique de Lacan, quand ils ont émané de psychanalystes, se soient d’abordconcentrés [7,8] sur les réinterprétations lacaniennes de la logique en jeu dans les différentesformes du cogito, en particulier concernant le sort à réserver à l’Autre divin sur lequel celui-cis’appuie — ou fait mine de le faire7.

Plus récemment, on a également cherché à interroger le rôle qu’aurait pu avoir pour Lacanla théorie cartésienne des passions [9,10]. Or, cette dernière n’est développée que dans le der-nier traité de Descartes, Les passions de l’âme — raison pour laquelle elle apparaît parfois,pour les philosophes cartésiens eux-mêmes, comme un repentir tardif, voire comme un codicille

2 Par l’image de cette coexistence un peu fantastique, voire de cet enroulement d’un discours sur l’autre, il semble queLacan cherche aussi à rendre compte de cette ambiguïté qui fit de Descartes un savant estimé par son temps, mais trèsvite oublié, — ambiguïté que traduit aussi bien son échec scientifique que son succès philosophique.

3 « J’ai pris pour fil conducteur [. . .] un certain moment du sujet que je tiens pour être un corrélat essentiel de la science :un moment historiquement défini [,] dont peut-être nous avons à savoir s’il est strictement répétable dans l’expérience,celui que Descartes inaugure et qui s’appelle le cogito. [. . .] Le sujet sur quoi nous opérons en psychanalyse ne peut êtreque le sujet de la science » ([4], pp. 856–8).

4 On fait référence ici au « serment » épistémique qui lia, à partir 1842, Brücke, premier maître de Freud, Du Bois-Reymond et Helmholz.

5 Lacan J. Le séminaire, Livre XIV, La logique du fantasme (1966–1967). Lecon inédite du 11 janvier 1967. D’unecertaine manière, le développement de cette lecon n’est rien d’autre qu’une explicitation de l’assertion de 1964 selonlaquelle, quelle que soit la « dysymétrie » entre elles, « la démarche de Freud est cartésienne » ([5], p. 36).

6 Par cette expression, j’entends l’idée d’un sujet dont le centre de gravité se confondrait, peu ou prou, avec les contoursd’un individu, eux-mêmes dessinés en superposition à ceux d’un corps propre. Cette idée n’est pas tout à fait, j’y reviendrai,l’idée structuraliste.

7 Car l’hypothèse d’un dieu trompeur est-elle envisageable autrement que, justement, comme masque, clause de styleet/ou métaphore, quand on saisit bien — et ce sera l’essentiel du propos — ce que Descartes a dû mettre de lui pourconstruire le cogito qui la réfutera ?

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disgracieux8. De plus, et comme à rebours de l’abondance des commentaires sur le cogito, Lespassions de l’âme ne sont que très rarement évoquées par Lacan, et uniquement de manière allu-sive (p. ex. [2], pp. 157 & 188). Il est néanmoins frappant de lire dans le dernier opus cartésienune préfiguration de ce que Lacan tentera de faire saisir au moyen de ses développements autourd’un « stade du miroir » puis d’un « schéma optique ». Soit une esquisse [9] de la topologie selonlaquelle l’objet extérieur, même s’il ne présente pas les caractères de la perfection divine (car ilpeut aussi bien être un corps humain, ce qui porte au cœur des Passions de l’âme la question durapport au semblable), peut jouer le rôle de la cause qui échappe ; c’est-à-dire aussi une relèvepossible du mouvement, qui, selon la tradition idéaliste, irait simplement du sujet au monde —mouvement que Edmund Husserl, par la suite, nommera « intentionnalité » —, par un mouvementinverse, mais certes pas réciproque, qui part effectivement de l’objet, et/ou du semblable, pourimprimer dans le sujet la tâche et le destin d’un « faire avec » lui.

1. Lacan, Descartes et la question du style

Une troisième perspective possible, mais encore, à ma connaissance, bien moins explorée, estcelle du style. On sait, bien sûr, l’importance de cette question pour Lacan9 ; comment, alors, àconstater la diamétrale opposition de leurs deux styles, négliger son incidence dans le transfert10

de Lacan à Descartes ?Comme on le sait, les difficultés de la théorie de la métaphore sont centrales pour la rhétorique ;

et elles concentrent, à elles seules, nombre d’aspects de cette question du style. Or, sur ce pointcomme sur tant d’autres, nos deux auteurs se montrent aussi asymétriques qu’il est possible del’imaginer. Certes, Descartes, dont l’économie rhétorique a indubitablement contribué à fonderce qu’on a pris l’habitude d’appeler le style « classique », n’a, pour ainsi dire, jamais théoriséexplicitement aucune figure de style ni aucun procédé d’écriture11 ; mais il n’en reste pas moins,toutefois, qu’il n’aura pas sous-estimé le pouvoir des mots sur les choses — ainsi que le montrece passage crucial des Quatrièmes réponses aux Méditations, où, poussé dans ses retranchementspar les objections d’Arnaud, il en vient à placer la définition métaphysique de la substance sousla dépendance de la « signification » de ce terme ([14], pp. 440–7).

Tandis que Lacan, lui, aura au contraire passé plusieurs années à tenter de produire le conceptexplicite des deux figures du discours qui lui paraissaient emblématiques de la rhétorique incons-ciente, à savoir la métaphore et la métonymie, puis à tenter d’en tirer les « conséquences » ([12],p. 10) sur sa propre facon d’écrire et de dire.

« Il ne faut pas confondre être clair et être complet. La force classique repose sur cette dis-tinction ; les Classiques furent clairs, d’une clarté terrible, mais [. . .] on pressent dans cette

8 Dans la tradition cartésienne francaise, il semble en effet qu’il faille attendre une époque toute récente, et, en particulier,le travail essentiel de Denis Kambouchner [11], pour reconsidérer la place du Traité des passions. Ce dernier montre demanière tout à fait convaincante que, si certains thèmes du Traité étaient depuis longtemps objet de réflexion pour Descartes,et que si l’urgence de les développer était devenue évidente à partir de la Sixième méditation, ce n’est vraisemblablementpas par distraction qu’il n’a pas développé le thème plus tôt, mais bien plutôt à cause des difficultés de fait que les passionsdressent devant le projet cartésien.

9 Il suffit de se reporter aux deux pages introductives du volume des Écrits, qui proposent pour l’essentiel un itinéraireserré entre cette question et la réponse qu’y suggère l’objet a [12].10 Je hasarderai l’hypothèse suivante, qui sera indirectement développée dans la suite de ce texte : Descartes est pour

Lacan supposé savoir. . . écrire.11 À moins que, justement, son « s’avancer masqué sur la scène du monde » [13] n’annonce lui aussi un programme

stylistique ?

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transparence des vides inquiétants dont on ne sait, à cause de leur habileté, s’ils les y ont mis ousimplement laissés » ([15], p. 59). Ces quelques mots de Roland Barthes ne proposent rien moins,on le voit, que de fonder le « style classique » sur la présentification d’un vide à la fois subi etvoulu, à la fois cerné et creusé, à la fois vacuité et évidement, à la fois dissimulé et suggéré parle « masque » même12 dont on aura prétendu le couvrir. Les pages que l’on va lire partiront doncde cette citation, et de la contribution — certes indirecte, mais peu dubitable — de Descartes àun texte de Lacan un peu méconnu, et qui porte justement sur la métaphore.

Il me semble en fait que Lacan a pris appui sur quelque chose qu’il a trouvé chez Descartes(mais sur quoi ? Nous aurons évidemment à le préciser), au moment de tenter de dépasser lesambiguïtés de son propre « retour à Freud » en s’attelant à la tâche de construire, solidairementl’une de l’autre et au moyen d’un concept renouvelé de la métaphore, les deux théories qui aurontle plus cruellement manqué à la métapsychologie freudienne :

• une théorie du sujet indépendante, et capable de rendre compte à la fois de ses relations avec lelangage, avec le corps matériel et avec la refente que ces deux catégories hétérogènes causenten lui ;

• une théorie cohérente de la causalité psychique, qui fasse droit à la liberté et à la détermination,et qui dépasse ainsi les clivages dans lesquels la tradition philosophique quant à celle-ci menacesans cesse de s’enfermer13.

2. Présentation d’un problème, et résumé d’un argument

En annexe des Écrits se trouve un petit texte intitulé « La métaphore du sujet » ; il s’agit précisé-ment d’une réponse, datée de 1960 et réécrite en 1961, à un exposé de Chaïm Perelman, philosopheet rhétoricien belge, auteur à l’époque tout récent d’un ambitieux Traité de l’argumentation [16].

Ce texte a toute son importance, et pas seulement parce qu’il expose un mathème de la méta-phore différent de ceux jusque-là utilisés par Lacan. À partir de sa lecture un peu attentive, jevoudrai développer ici quatre points :

• la formule que Lacan, dans ce texte, propose de l’opération métaphorique, est bien sa formulela plus aboutie, car la plus cohérente avec la conception du sujet que celui-ci est dans le mêmetemps en train d’élaborer ;

• l’exemple de métaphore choisi par Lacan pour illustrer son propos a une portée plus généralequant à, disons, la position épistémologique de la psychanalyse, que ceux qu’il a auparavantmentionnés ;

• le choix et le développement de cet exemple comportent une référence à Descartes démontrantune fois de plus l’importance essentielle, pour Lacan, de la position cartésienne ;

• et enfin, ce texte, et son irrigation cartésienne, éclairent rétroactivement l’incidence, la portée etle statut d’exception de ce que Lacan a antérieurement défini comme « métaphore paternelle ».

12 Ibid.13 Le présent texte porte essentiellement sur le premier de ces deux points. Je renvoie par anticipation, pour le second,

à une autre face, à paraître, de ce travail sur la lecture de Descartes par Lacan (Lacan lecteur de Descartes (II) : sur la« causalité psychique »).

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3. Du sujet comme métaphore

La conception proposée par Lacan dans « La métaphore du sujet » paraît à première vue assezclassique : la métaphore repose sur « la substitution d’un signifiant à un autre » dans une chaîne,« sans que rien de naturel ne l’y prédestine » ([17], p. 890). Ce « rien de naturel » suggère néan-moins une intervention libre de l’auteur de la métaphore et contribue déjà, donc, à opposer lamétaphore à la métonymie, où le second signifiant est classiquement dans un rapport de conti-nuité lexicale, plus ou moins contraint14, avec le premier. Par ailleurs, Lacan semble accorder àPerelman qu’il est possible de considérer la métaphore comme une « opération à quatre termes »,mais la distingue beaucoup plus nettement que lui (on verra comment, et aussi pourquoi) del’analogie, où phore (le point de départ de l’opération substitutive) et thème (son point d’arrivée)sont répartis d’une manière telle que les quatre termes en jeu sont également explicites : A/B = C/D.

L’écriture que Lacan propose est celle-ci :(S/S′1

) × (S′2/x

) → S (I/s") ([17], p. 890).Avant de la commenter pour elle-même, remarquons que cette écriture en enrichit et complète

deux autres, proposées en 1957 et 1958, et ne peut donc pas être lue indépendamment d’elles.(1) Dans « L’instance de la lettre. . . », en 1957, Lacan se proposait de relire la condensation et

le déplacement freudiens, thématisés dans le chapitre VII de L’interprétation du rêve ([19], par-ticulièrement pp. 319–95), en termes, respectivement, de métaphore et de métonymie. Précisonsseulement, pour ce qui nous concerne ici, que l’étude de la condensation offrait à Freud l’occasiond’associer, d’une manière jusque-là inédite, l’acte psychique et ce régime spécial de la causalitéqu’est la surdétermination ([19], p. 326 ; cf. aussi [20]).

Lacan y écrivait une première formule de la substitution métaphorique : f(S′/S

) × S ≈ S (+) s([18], p. 515)15.

Cette formule insistait surtout sur le gain de sens qui se produit à la faveur de la métaphore —et qui, par différence, ne se produirait pas à la faveur de la métonymie16. Ce gain de sens — Lacandira un tout petit peu plus tard ce « pas-de-sens » ([22], pp. 83 sqq.), au sens de l’unité de mesureque la marche humaine offre à l’intuition — se produit grâce au « franchissement » (autre empruntà la sphère sémantique de la motilité) de la « barre résistante à la signification » constituant del’algorithme saussurien ([18], p. 497)17. Or, Lacan prend comme exemple de ce franchissementrien de moins que. . . le cogito cartésien, par lequel, selon lui, le « sujet » insaisissable d’Aristote[23] change de « nature » en assurant autrement les « amarres de son être » ([18], p. 527)18.

14 « Continuité » ou « connexion », dans l’ordre du signifiant, bien sûr, sauf à considérer que les mots « voile » et « navire »,par exemple — c’est l’exemple de métonymie pris par Lacan dans « L’instance de la lettre. . . » ([18], pp. 505–6) —, seraienttous deux apparentés avec le bâti phonologique du mot « bateau ». . . Où l’on voit que le « naturel », à l’époque, pour Lacan,est déjà celui de la langue, celui qui est formalisé dans l’Autre, et celui-là seul. . .15 L’idée sous-jacente à cette écriture est celle d’une fonction métaphorique ; mais on ne sait pas bien, à ce stade — et

c’est sans doute pourquoi Lacan a abandonné par la suite cette écriture —, s’il faut attribuer cette fonction au langage ouau sujet. On peut toutefois prendre un apercu de cette fonction dans un texte de 1959, où Lacan propose d’identifier lesignifiant « supplanté » par la substitution métaphorique au signifiant du besoin, le signifiant « implanté » dans la chaînepar cette substitution à celui de la demande, et la chaîne latente qui prolonge(rait) le signifiant « supplanté » vers lesramifications du désir, lequel est donc essentiellement refoulé ([21], pp. 708–9).16 Ce qui n’est évidemment pas tout à fait exact. Ainsi, « trente voiles » pour « trente navires » insiste sur l’homogénéité

toute militaire, ou à la rigueur commerciale, de l’ensemble de bâtiments considérés ([18], p. 505). . .17 Ce franchissement est matérialisé sur le schéma par le fait que le signifiant S se trouve écrit à la fois au-dessus et en

dessous de la barre.18 On reviendra tout à l’heure sur cette connotation maritime. . .

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Descartes nomme « certitude » l’affect19 marquant ce franchissement. Et, pour lui, l’assuranceprise du cogito, assurance que cette certitude contresigne, restaure la lisibilité du monde mise àmal par le doute. Le cogito devient ainsi la « machine à concevoir » [24] au moyen de laquelleDescartes réalise son désir d’intelligibilité (S2). À l’égard du savoir désiré, il fonctionne donccomme moteur, premier principe, soit comme « signifiant-maître » (S1) [25]. Et il a en cela plusà voir avec la vérité qu’avec le savoir20.

Mais de quel discours le cogito est-il l’instigateur ? Le désir de Descartes se dit textuellementcomme celui de « trouver quelque chose de constant et d’assuré dans les sciences » ([14], p. 270, jesouligne) ; et la mise en avant du nouvel S1 entraîne en effet un « renoncement » ([26], pp. 22–3)21

à la philosophie — en tout cas à celle dont on fait l’apprentissage sur les bancs de l’École — auprofit des sciences. Nous verrons plus loin quelques conséquences à tirer de cela.

On comprend dès lors mieux le rapprochement suggéré par Lacan : théoriser la métaphore, cen’est pas seulement amarrer la psychanalyse à une autre science que celle qui faisait référencepour Freud, c’est-à-dire substituer la linguistique à la biologie, mais aussi, et surtout, en modifiantune nouvelle fois les amarres du sujet, d’offrir à la psychanalyse un espace de lisibilité qui luisoit propre — et ce, si possible, jusqu’à y ménager la place d’un régime spécifique de la déter-mination causale. Cela explique pourquoi la conception lacanienne de la métaphore va toujoursplus s’éloigner de son modèle rhétorique/linguistique, pour lequel la métaphore vaut plus commeforme que comme acte.

(2) Cette première écriture sera une première fois modifiée l’année suivante, dans la « Questionpréliminaire à tout traitement possible de la psychose », et dans le sens, on va le voir, de ce quivient d’être dit à l’instant :

(S/$′) × (

$′/x) → S (I/s) ([30], p. 537).

C’est maintenant le mathème du sujet divisé — écrit ainsi, $, pour la première fois22 —qui prend la place du signifiant « élidé » ([30], p. 537) par la métaphore (d’où le signe [‘] quil’affecte). Cette division se matérialise par la double présence du sujet au-dessus et au-dessousde la barre, et est congruente avec ceci que le sujet, par la substitution métaphorique, n’estplus « aboli » comme auparavant ([18], pp. 507–8), mais est à la fois manifesté par le S qui vale représenter, et signifié comme « élidé » de la part refoulée que l’opération aura détachée dusignifiant métaphorique, laquelle appartiendra dès lors à l’inconscient comme instance (ce quedit le I majuscule du schéma).

Cette diffraction de la signification, elle-même corrélative de la division du sujet, est parachevéepar l’action du x dont, partant du cas particulier de la métaphore paternelle, Lacan donneral’explication suivante : « signifié au sujet » ([30], p. 537). Il me semble qu’il n’y a pas moyende lire autrement ces trois mots que comme indication d’une « signification » — au sens, cettefois, où on l’on signifie un jugement — émanant de l’Autre (où se fomentent les conditions dela métaphore) vers le sujet. Par cette seconde écriture, Lacan ouvre donc vers le monde réel la

19 Même si la place manque ici pour le justifier, je ne méconnais évidemment pas la difficulté induites par l’emploiapparemment inhabituel de ce terme à cette place ; je ne peux que renvoyer, sur ce point, au texte annoncé dans la no 15.20 Dans l’écriture lacanienne des discours, ultérieure, la vérité est le signifié de l’agent (ou plus tard du semblant) ; et

donc, dans le premier discours formalisé par Lacan, celui du maître, elle est le signifié du « signifiant-maître » S1. Du fait,entre autres, de cette relation particulière à la vérité, ce dernier, comme le Nom-du-Père, et à certains égards comme lephallus symbolique, est en position d’exception à l’endroit de la chaîne signifiante.21 On sait que c’est très exactement le sens que Descartes lui-même donne au premier de ses trois célèbres rêves [27],

cité dans [28]. Mais ce renoncement est également à rapprocher de la Versagung dans l’« ordre » de laquelle, selon Lacan,« opère » l’analyste ([29], p. 378).22 Qu’il ait cru devoir attendre ainsi indique peut-être que Lacan ne se satisfait déjà plus de la définition structuraliste

du sujet (cf. infra, et no 27).

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définition structuraliste d’une métaphore entièrement refermée sur, et par, la combinatoire delangage : en effet, en plus d’être le signifié de la métaphore, son « effet de sens »23, le sujet estégalement son référent, la chose dont elle parle, et qu’elle pose ce faisant. Ceci, évidemment, estparticulièrement clair dans la psychose — d’où la production de l’explication du x à partir de lamétaphore paternelle — : dans ce cas, là où le Nom-du-Père est appelé, rien n’a été « signifié ausujet », précisément, et les retours dans le réel de cet effet désignatif du langage, plus ou moinserratiques, font du psychosé le « martyr de l’inconscient » ([31], p. 151) ; mais la proposition estvalable pour le névrosé aussi bien, à l’inconscient pas à ciel ouvert, justement, près. . .

Enfin, l’apparition de la flèche cherche à traduire que, contrairement à l’analogie ou à lacomparaison, la métaphore n’est pas réversible ; comme la vérité avec qui elle a rapport24, sonénonciation est constitutive d’un avant et d’un après. Cette écriture témoigne également de laprise de distance avec le modèle linguistique en suggérant que l’étage du signifié puisse ne riencontenir, en soi, d’essentiellement différent de celui du signifiant.

(3) La réécriture de « La métaphore du sujet » est donc la seconde :(S/S′1

) × (S′2/x

) →S (I/s").

Comme on le voit, là où étaient, dans la formule précédente, S et S’, ou bien S et $’, troissignifiants sont maintenant individualisés par Lacan : S, S’1, S’2. Ces trois signifiants n’ont pasle même statut : S s’oppose à S’1 et S’2, qui disparaissent tous deux au cours de l’opérationmétaphorique, tandis que S’1 et S’2 s’opposent l’un à l’autre en tant qu’ils représentent les deuxsignifiants entre lesquels s’écartèle le sujet25. Enfin, ces trois signifiants s’opposent à leur tour àl’élément refoulé s” que l’opération métaphorique relie plus ou moins inopinément au phore26,et qui est lui-même porte ouverte vers d’autres signifiants (ce pourquoi il est marqué du signe[”])27. Ainsi, les « quatre termes » concédés à Perelman sont marqués de trois hétérogénéités.

Quant au sujet « lui-même », il ne s’écrit plus du tout. C’est que, même s’il n’a pas beaucoupd’être en dehors de la métaphore qui le met en scène, celle-ci ne livre pas pour autant sa substance :cette substance serait plutôt, si celui-ci était saisissable, à cerner dans le désir. Et en effet, pendantles trois années qui séparent la « Question préliminaire. . . » de « La métaphore du sujet », lamétonymie corrélative du désir a cessé de se définir seulement par la négative (de n’être pas unemétaphore, et/ou à partir de la face de défaut du « pas-de-sens »). Elle a reconquis, si je puisdire, sa positivité rhétorique propre28, à laquelle contribue certainement sa capacité de restituerson opérativité — à l’origine de la fonction référentielle et donc de tous les mondes possibles29

— à la barrière résistante à la signification ; et ce tandis que l’invention de l’objet a, en voie de

23 Lacan J. Le séminaire, Livre XII, Problèmes cruciaux pour la psychanalyse (1964–1965). Lecon inédite du 2 décembre1964.24 Ainsi, par exemple, selon Heidegger, les lois de Newton ne peuvent être considérées comme vraies qu’à compter du

jour où celui-ci les a énoncées ([32], pp. 263–78).25 Ces deux signifiants ne sont donc plus susceptibles de la simplification à laquelle l’écriture pseudo-fractionnaire

héritée de Saussure peut laisser croire qu’elle se prêterait.26 Tregnier C. Métaphore du sujet, mathème et Nom-du-Père. À paraître.27 Cette écriture, et on en verra à l’instant un exemple, montre mieux que les précédentes que l’élément refoulé s” ne

vaut pas uniquement comme « sens figuré » de S, mais comme amorce d’une signification résolument inédite — et dontle déploiement, d’ailleurs, ne se fera pas sans un zeste de. . . métonymie ([18], p. 515).28 Lacan J. Le séminaire, Livre VI, Le désir et son interprétation (1958–1959). Lecon inédite du 12 novembre 1958.29 Il y a là la préfiguration du reproche à la linguistique « scientifique » que Lacan formulera clairement, dans les années

1970, en disant que celle-ci se fonde d’un rejet de cette barre et de sa fonction.

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s’achever30, a encore accentué l’extériorité du désir au sujet. Mais il n’en reste pas moins qu’ilfaut un sujet pour prendre position à l’endroit du désir qui l’anime.

4. An ocean of false learning : autres pièces du puzzle, ou l’incessante ambiguïté de lamétaphore

Je vais maintenant m’arrêter sur l’exemple de métaphore choisi par Lacan dans « La métaphoredu sujet ». Il s’agit de l’expression « an ocean of false learning », reprise du Traité de Perelman([16], pp. 534–49).

Cette expression se trouve à l’origine dans un dialogue de George Berkeley [34]. Il faut donccommencer par resituer celui-ci et ce dialogue. Berkeley écrit en 1713, soit à une époque où lascience commence à produire des effets de plus en plus évidents. Et ceci, Berkeley semble lepressentir, ne va pas tarder à menacer toute position philosophique qui ne soit pas plus ou moins« physicaliste », pour reprendre le terme mis en circulation par les maîtres de Freud, et qui fait àpeu près consensus aujourd’hui [35].

Le dialogue met en scène Philonous, qui, comme son nom l’indique, défend l’esprit — plusexactement la doctrine même de Berkeley, à savoir l’idéalisme immatérialiste —, et Hylas, qui,comme son nom l’indique également, défend un empirisme matérialiste. Hylas est donc en positionde contradicteur à Berkeley. L’expression « an ocean of false learning » lui vient en réponse àune très longue période31 où Philonous a tenté de faire valoir les avantages heuristiques, posés

30 On rappelle que l’objet a s’écrira pour la première fois en tant que tel dans la « Remarque », rédigée au plus tard enavril 1960 ([33], pp. 674–82).31 Je cite ici, à partir de la même source, la partie du texte qui nous concerne le plus : « Phil. As a balance, therefore,

to this weight of prejudice, let us throw into the scale the great advantages that arise from the belief of Immaterialism,both in regard to religion and human learning. [. . .] — Then, with relation to human sciences. In Natural Philosophy,what intricacies, what obscurities, what contradictions hath the belief of Matter led men into ! To say nothing of thenumberless disputes about its extent, continuity, homogeneity, gravity, divisibility, etc. — do they not pretend to explainall things by bodies operating on bodies, according to the laws of motion? And yet, are they able to comprehend howone body should move another? Nay, admitting there was no difficulty in reconciling the notion of an inert being witha cause, or in conceiving how an accident might pass from one body to another; yet, by all their strained thoughts andextravagant suppositions, have they been able to reach the mechanical production of any one animal or vegetable body?Can they account, by the laws of motion, for sounds, tastes, smells, or colours; or for the regular course of things?Have they accounted, by physical principles, for the aptitude and contrivance even of the most inconsiderable parts ofthe universe? [. . .] — Then in Metaphysics: what difficulties concerning entity in abstract, substantial forms, hylarchicprinciples, plastic natures, substance and accident, principle of individuation, possibility of Matter’s thinking, origin ofideas, the manner how two independent substances so widely different as Spirit and Matter, should mutually operate oneach other? What difficulties, I say, and endless disquisitions, concerning these and innumerable other the like points,do we escape, by supposing only Spirits and ideas? — Even the Mathematics themselves, if we take away the absoluteexistence of extended things, become much more clear and easy; the most shocking paradoxes and intricate speculationsin those sciences depending on the infinite divisibility of finite extension; which depends on that supposition — But whatneed is there to insist on the particular sciences? Is not that opposition to all science whatsoever, that frenzy of the ancientand modern Sceptics, built on the same foundation? Or can you produce so much as one argument against the realityof corporeal things, or in behalf of that avowed utter ignorance of their natures, which doth not suppose their reality toconsist in an external absolute existence? Upon this supposition, indeed, the objections from the change of colours in apigeon’s neck, or the appearance of the broken oar in the water, must be allowed to have weight. But these and the likeobjections vanish, if we do not maintain the being of absolute external originals, but place the reality of things in ideas,fleeting indeed, and changeable [. . .]. — Hyl. I agree to all you have now said, and must own that nothing can incline meto embrace your opinion more than the advantages I see it is attended with. I am by nature lazy; and this would be a mightyabridgment in knowledge. What doubts, what hypotheses, what labyrinths of amusement, what fields of disputation, whatan ocean of false learning, may be avoided by that single notion of Immaterialism! »

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en termes de « science » — qu’il s’agisse des sciences particulières ou de la science en général—, de son idéalisme. En fait, il semble que Hylas fasse seulement mine d’avoir été convaincupar Philonous, et que ce soit par antiphrase qu’il le remercie de lui avoir permis de s’épargner àl’avenir le dur et patient labeur de l’empiriste, qui ne l’aurait conduit qu’à plonger dans un « oceanof false learning ». À première vue, « an ocean of false learning », dans le discours de Hylas, sesubstitue donc à « science », dans celui de Philonous, et en serait la métaphore.

C’est en tout cas ce que suggère Perelman, qui parle, d’ailleurs, dans son propre texte, d’un« océan de fausse science » ([16], p. 537, je souligne), et traduit donc directement « learning »par « science ». Lacan, quant à lui, juge cette traduction trop précipitée ([17], p. 890) : et de fait,indépendamment des nuances qui distinguent le signifiant [science] en anglais et en francais, soitscience et learning font (déjà) assez un pour être encore en quelque sorte interchangeables l’unavec l’autre32, soit « learning » recouvre (encore) une réalité différente (et peut-être plus large)que la seule « science ». Même si les positions sont différentes, on se retrouve en tout cas dans levoisinage significatif immédiat du renoncement cartésien à la philosophie apprise pour la scienceconstruite évoqué plus haut, mais aussi des retours toujours possibles du scepticisme refoulé aunom ce renoncement.

À première vue, notre métaphore se laisse en effet interpréter comme exposition d’un conflit,par exemple entre le vrai que l’on aimerait attribuer à la science empirique et le faux donton pressent tout de même que, quelles que soient les garanties qu’on33 croit prendre sur lesphénomènes, elle pourrait le ramener34. Et ce conflit est ce qui la distingue de l’analogie. Lesujet « signifié à » cette métaphore, c’est-à-dire mise en place par elle, aurait alors commemission — impossible, sans doute — de résoudre ce conflit. Conflit entre deux doctrines,donc, et entre deux conceptions de la vérité. Mais il semble que cela n’épuise pas la por-tée, l’efficace, de cette métaphore : peut-être, en effet, permet-elle à Hylas de moquer lesutopies de Philonous sans dépasser les bornes du bon ton ? Peut-être lui offre-t-elle, de sur-croît, l’opportunité de dire son doute quant à la véracité de la science qu’il affirme, lui Hylas,défendre ? Peut-être, enfin, Hylas prêche-t-il un faux pour pousser Philonous dans un retranche-ment où le premier suppose que le second n’aura plus comme recours que d’avouer la vérité(en tout cas la vérité supposée telle par Hylas) des motifs qui lui font préférer son idéalisme àl’évidence ?

Le dialogue, à cet endroit, prend donc structure de trait d’esprit, et, en particulier dans latroisième hypothèse, annonce le célèbre Witz de Lemberg et Cracovie par lequel Freud, un peu plusd’un siècle plus tard, inventant tout exprès la dénomination « mot d’esprit sceptique », justement,conclura l’inventaire des différentes catégories de mots d’esprit ([36], p. 188–90). Rappelons qu’ilcommente ainsi l’histoire : « Le sérieux de cette histoire consiste dans la recherche du critériumde la vérité ; à nouveau l’esprit conduit à un problème et exploite l’incertitude d’une de nosconceptions les plus courantes. Est-ce dire la vérité que de présenter les choses telles qu’ellessont, sans se préoccuper de la facon dont l’auditeur entendra ce qu’on dit ? N’est-ce peut-êtrelà qu’une vérité jésuitique, et la réelle sincérité ne consiste-t-elle pas plutôt à tenir compte de lapersonne de l’auditeur et à lui fournir un tirage fidèle de son propre savoir ([36], p. 189) ? »

32 Or ceci est précisément la position physicaliste contemporaine, dont le Traité de l’argumentation se veut explicitementun contre-programme ([16], pp. 1–13).33 C’est évidemment à dessein que j’insiste ici, par la répétition, sur l’impossible identité à soi-même de ce « on ». Le

dialogue se termine d’ailleurs sur le constat de ses deux acteurs de l’impossibilité de s’accorder.34 Trégnier C. Op. cit.

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5. Berkeley, Descartes et un Dieu qui pourrait ne pas tromper

Mais cela suffit-il encore ? En effet, dans le cas particulier de « an ocean of false learning »substitué par Hylas au « science » de Philonous, on sent bien que le terme [ocean] joue un rôlecentral dans la création de l’effet métaphorique. Pourtant, en toute rigueur, s’il s’agissait seulementdu conflit entre vrai et faux, ce terme ne serait pas si essentiel ; il pourrait être remplacé parn’importe quel autre terme amenant la même idée de vastitude — « infinité », « amoncellement »,par exemple. Or ces deux expressions n’emportent pas du tout le même effet, et ne suscitent pasl’« espèce nouvelle dans la signification » ([17], p. 891, je souligne) dont Lacan parle, à raison, àpropos de « an ocean of false learning ».

La présentation que Lacan donne, dans son texte — et finalement à rebours de celle de Perelman—, de la métaphore « an ocean of false learning », va dans ce sens : elle décompose l’expressionen « an ocean », placé sur le schéma en S, « learning », placé en S’1, et « false », placé en S’2 —soit à proximité immédiate du x où se joue la désignation du sujet ([17], p. 890). Les différentstermes se répartissent de part et d’autre de la barre, et l’effet métaphorique est produit à l’intérieurde l’expression, et non plus dans sa substitution à « science »35. De fait, l’expression « parle »indépendamment du dialogue qui en fournit le contexte.

Il me semble que le terme [ocean] rende présent sans le dire non seulement le sens du débaten tant que discussion philosophique, mais aussi l’enjeu, la mise, que Berkeley y met : dans cesquestions du vrai et du faux, qui, quel dispositif, ou à tout le moins quel signifiant, nous guidera,pour éviter que l’océan de la question ne nous engloutisse ? Ou pour rester libre de son jugementmalgré la prégnance des déterminations matérielles ? En d’autres termes, avec quelles armesfaire face à ce « rien de sûr » dont Lacan fera, dans son séminaire sur L’identification, en 1962,le complexe nucléaire de la névrose ? On sait peut-être que Berkeley, pour ce qui le concerne,choisira la mission pastorale, puis, plus tard, celle des ordres.

Or, chose curieuse, mais qui est précisément celle où je voulais en venir, cette image de l’océanappartient également à Descartes. Elle intervient en fait entre la première et la seconde Méditation.Je cite la longue dernière phrase de la première Méditation :

« Tout de même qu’un esclave qui jouissait dans le sommeil d’une liberté imaginaire,lorsqu’il commence à soupconner que sa liberté n’est qu’un songe, craint d’être réveillé, etconspire avec ces illusions agréables pour en être plus longtemps abusé, ainsi je retombeinsensiblement de moi-même dans mes anciennes opinions, et j’appréhende de me réveillerde cet assoupissement, de peur que les veilles laborieuses qui succéderaient à la tranquillitéde ce repos, au lieu de m’apporter quelque jour et quelque lumière dans la connaissance dela vérité, ne fussent pas suffisantes pour éclaircir les ténèbres des difficultés qui viennentd’être agitées » ([14], pp. 272–3).

Cette thématique en apparence parfaitement maîtrisée du réveil et du rêve cède la place à uneautre, plus inquiétante (et peut-être reliée à la première par le signifiant [ténèbres]), au tout débutde la seconde :

« La Méditation que je fis hier m’a rempli l’esprit de tant de doutes, qu’il n’est plus désormaisen ma puissance de les oublier. Et cependant je ne vois pas de quelle facon je les pourrai

35 Les auteurs du Traité ont d’ailleurs eux-mêmes l’intuition que le trope qui la déploie habituellement n’est peut-êtrepas l’unité où se détermine véritablement l’effet métaphorique, puisqu’ils admettent comme métaphores des mots-valisestels que « bateau-mouche » ou « bankster » ([16], p. 539).

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résoudre ; et comme si tout à coup j’étais tombé dans une eau très profonde, je suis tellementsurpris, que je ne puis ni assurer mes pieds dans le fond, ni nager pour me soutenir au-dessus »([14], p. 274).

Même si le mot n’y est pas, voilà bien évoqué l’océan auquel Berkeley reviendra, cet espace deténèbres indéterminés où s’abolissent toutes les distinctions, jusqu’à celle entre fond et surface.

Je propose donc de lire dans cet intervalle du texte des Méditations la coupure qui matérialise,au-delà de son style, l’essentielle discontinuité du sujet méditant, et aussi les lointaines répliquesdu tremblement qui, en 1619, avait saisi Descartes devant les conséquences de son propre désir.Cette coupure, qui met en scène la « surprise » d’une abolition de fait du sujet de l’énonciation,manifeste, selon moi, que Descartes, en 1641, n’en a pas encore tout à fait fini avec la prise parcorps de cette « frayeur » surgie du silence de Dieu durant le second rêve36 de la nuit du 10 au11 novembre 1619. Et qu’il y faudra encore, sans doute, Les passions de l’âme [9]. . .

Mais elle offre aussi à Lacan, au-delà des critiques qu’il pourra adresser à l’apparente transpa-rence du cogito achevé, un modèle selon moi assez sûr pour ce qui sera son sujet, divisé par unecertitude dont il ne sait plus rendre compte, et par une cause qui lui échappe.

6. Conclusion parcellaire : de la métaphore à la lettre

Il y a donc au fond deux usages, au moins, de la métaphore : l’un, théorique, celui de Lacan,conduit le sujet déjà posé comme cogitant, donc supposé déjà à même de rapprocher des objets dela « machine à concevoir » qu’est le cogito [24], à des conséquences de manière de dire, de styleet par là de méthode ; l’autre, purement expérientiel, celui de Descartes, engage le corps vivant, etson geste, à garantir l’entreprise théorique là où elle court le risque de s’effondrer sur elle-même.Car, comme on l’a vu, c’est aussi son corps que Descartes mise dans l’expérience méditative37 ;c’est bien ce corps, et pas seulement un signifiant, qui menace d’être « aboli », englouti, par la« frayeur » qui escorte l’expérience38.

À cet égard, la métaphore du nageur qui reprend pied sur le fond pour ne pas se laisserengloutir par un ocean of false learning, mais qui, en même temps, invente ce fond, ce sol,n’est véritablement métaphorique que pour les lecteurs de Descartes, dont Lacan ; elle n’est aucontraire, pour Descartes lui-même, rien de rhétorique, mais la trace littérale de l’expérience dusujet Descartes recuisant trente années durant les scories de son passage par l’École pour forgerles formules du cogito — formules qui sont comme la lettre d’une expérience non intégralement

36 Pour mémoire, voici une partie du texte de ce second rêve, tel qu’il nous est parvenu : « Il lui vint aussitôt un nouveausonge dans lequel il crût entendre un bruit aigu & éclatant qu’il prit pour un coup de tonnére. La frayeur qu’il en eut leréveilla sur l’heure même : & ayant ouvert les yeux, il appercût beaucoup d’étincelles de feu réponduës par la chambre. Lachose lui étoit déjà souvent arrivée en d’autres têms [. . .]. Mais en cette dernière occasion il voulut recourir à des raisonsprises à la Philosophie : & il en tira des conclusions favorables pour son esprit [. . .]. Ainsi sa frayeur se dissipa, & il serendormit dans un assez grand calme » ([28], pp. 237–8].37 Le lecteur qui en douterait encore peut aussi se référer aux deux preuves de l’existence de Dieu développées par la

troisième Méditation ; la réitération de l’argument des perfections par celui de la « création continuée » ou du « concourscontinu » ([14], pp. 296–9) est difficilement explicable autrement que par l’intuition cartésienne d’une certaine précaritéontologique de la substance pensante, où se trahit, quoiqu’elle en ait, ce qu’elle doit au corps périssable qui s’y engage.38 À cet égard, Perelman ne va-t-il pas trop vite quand il décrit le programme du Traité de l’argumentation comme celui

d’une « rupture » avec une « tradition cartésienne » qui serait celle d’une « limitation imposée [par cette tradition] à l’idéede raison » ([16], pp. 1–4) ? Ne tombe-t-il pas à son tour dans l’erreur, déjà dénoncée par Lacan en son temps [2], deprendre cette « tradition cartésienne » pour Descartes lui-même, et de substituer, ce faisant, son usage métonymique à lamétaphore inaugurale ?

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répétable, tout comme ne sont pas intégralement transmissibles les métaphores paternelle etdélirante, elles aussi « signifiées à » un sujet particulier, et qui engagent ce sujet à des conséquencesqui lui sont propres, en particulier quant à sa jouissance.

Je conclurai par deux propositions, que j’espère équitablement réparties : côté Descartes, son« erreur » ne tient peut-être pas tant, comme se l’imagine naïvement Antonio Damasio [37], depousser jusqu’à l’intenable la distinction des substances pensante et étendue, qu’à ce qu’il présumeque le « temps long » [38] de l’expérience méditative puisse après lui être épargné à ses lecteurs39

— et cette présomption marque peut-être les limites du pouvoir du style qu’il contribua à inventer— ; côté Lacan, son effort pour construire son propre concept de la métaphore est à la fois unendettement vis-à-vis du cogito cartésien, et le détour indispensable pour lui permettre de renoncerà la fascinante transparence de ce même cogito — dans laquelle s’enracine l’interdit porté par lascience sur la métaphore —, et d’entrer ainsi de plain-pied dans un Autre régime du discours quecelui qui court dans les interstices entre philosophie, science et hystérie.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références

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39 Dans l’Entretien avec Burman, on lit par exemple ceci, qui suggère révolu le temps des Méditations : « Il ne faut pastellement s’appesantir sur les méditations [. . .]. Il suffit d’en avoir pris connaissance une fois de manière générale et dese rappeler la conclusion [. . .]. L’auteur s’est assez attaché aux choses métaphysiques dans ses Méditations contre lesSceptiques, etc., et il a établi leur certitude de telle manière que les autres n’aient pas à s’y essayer de l’entreprendre, ouà se tourmenter longtemps l’esprit en méditant sur ces matières ([39], p. 1381). »

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[24] Pellion F. Quelques remarques à propos de l’usage de la notion de « sujet » en psychanalyse. Evol Psychiatr2007;72(1):155–61.

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236–40.[29] Lacan J. Le séminaire, Livre VIII, Le transfert dans sa disparité subjective, sa prétendue situation, ses excursions

techniques (1960–1961). Paris: Seuil; 1991.[30] Lacan J. D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose (1958). In: Écrits. Paris: Seuil; 1966.

p. 531–83.[31] Lacan J. Le séminaire, Livre III, Les psychoses (1955–1956). Transcription. Paris: Seuil; 1981.[32] Heidegger M. Être et temps. Paris: Gallimard; 1986.[33] Lacan J. Remarque sur le rapport de Daniel Lagache : psychanalyse et structure de la personnalité (1960). In: Écrits.

Paris: Seuil; 1966. p. 647–84.[34] Berkeley G. Three dialogues between Hylas and Philonous in opposition to sceptics and atheists. The third dialogue.

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1355–402.