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1 L’Afrique : les défis du développement, 1 ère partie : le Sahara Un cours en 2 parties : 1) Le Sahara : ressources, conflits (étude de cas) : composition exigible au bac, étude de docs possible : En quoi le Sahara est-il un enjeu géoéconomique et géopolitique ? 2) Le continent africain face au développement et à la mondialisation : composition et croquis exigibles au bac et étude de docs possible : Comment l’Afrique s’insère-t-elle dans la mondialisation ? Fil directeur : le lien entre développement et mondialisation, la notion de développement étant comprise au sens large et non seulement étroitement économique. Après la décennie chaotique des années 1990, le continent vient de connaître une décennie de croissance économique et d’intérêt géostratégique : de plus en plus de puissances extra-africaines sont intéressées par ce continent, aussi il est important de comprendre la diversité et la complexité des situations africaines. Problématiques Quels sont les enjeux économiques et géopolitiques de l’ensemble saharien au regard des ressources qu’il recèle ? Quelles sont les multiples convoitises qui s’y manifestent ? En quoi les ressources du Sahara sont-elles à la fois facteurs de développement et sources de conflits ? Comment le Sahara s’intègre-t-il dans la mondialisation. Quelle est la situation de l’Afrique face aux questions de développement ? Le continent connait- il un réel décollage économique ? Quelle place occupe-t-il dans la mondialisation ? Quels défis démographiques, économiques, environnementaux et politiques l’Afrique doit-elle encore relever ? Comment le statut de pays émergent se manifeste-t-il pour l’Afrique du Sud ? Quels en sont les aspects dans le domaine du développement économique, et dans l’influence sur le continent africain et sur la scène internationale ? Quelles en sont les limites en termes de développement humain et de différenciations sociales et spatiales ? Objectifs de l’étude de cas sur le Sahara (40% de la superficie de l’Afrique) Cette étude de cas permet de mettre à jour les enjeux actuels du développement et de l’insertion de l’espace saharien dans la mondialisation. Constituant l’entrée dans la question consacrée à l’Afrique, il est impératif de la placer en tête. Vidéos : « le Dessous des Cartes » : sur le Sahara, les Etats du Sahel à voir. Plusieurs axes de lecture: un espace de fortes contraintes physiques, mais disposant de ressources. Le nom même, al- sahrà (ocre), de cet immense espace (8,5 millions de km²) dont les limites peuvent varier selon les critères retenus, suggère la contrainte radicale de l’aridité à laquelle s’ajoutent de forts contrastes thermiques. Le Sahara, peu peuplé (7M d’hab.) hormis le couloir du Nil (Egypte 85M hab.), dispose de ressources, principalement souterraines (phosphates, hydrocarbures, nappes aquifères fossiles) ; il est aussi propice à un tourisme d’aventure contrarié par une insécurité endémique ; un ensemble politiquement fractionné. Le découpage frontalier héritier des découpages de la colonisation puis de la décolonisation, aujourd’hui assumé par les États africains, est toutefois source de contestations par les populations locales (fédération touareg), de revendications territoriales (Sahara occidental), de conflits et de mouvements de populations réfugiées. Pour les États du Maghreb ou du Makrech tournés vers la Méditerranée, les territoires sahariens constituent des arrières pays en voie d’intégration ; pour plusieurs

L’Afrique : les défis du développement, 1ère partie : le

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L’Afrique : les défis du développement, 1ère partie : le Sahara Un cours en 2 parties :

1) Le Sahara : ressources, conflits (étude de cas) : composition exigible au bac, étude de docs possible : En quoi le Sahara est-il un enjeu géoéconomique et géopolitique ?

2) Le continent africain face au développement et à la mondialisation : composition et croquis exigibles au bac et étude de docs possible : Comment l’Afrique s’insère-t-elle dans la mondialisation ?

Fil directeur : le lien entre développement et mondialisation, la notion de développement étant comprise au

sens large et non seulement étroitement économique. Après la décennie chaotique des années 1990, le continent vient de connaître une décennie de croissance économique et d’intérêt géostratégique : de plus en plus de puissances extra-africaines sont intéressées par ce continent, aussi il est important de comprendre la diversité et la complexité des situations africaines.

Problématiques

Quels sont les enjeux économiques et géopolitiques de l’ensemble saharien au regard des ressources qu’il recèle ? Quelles sont les multiples convoitises qui s’y manifestent ? En quoi les ressources du Sahara sont-elles à la fois facteurs de développement et sources de conflits ? Comment le Sahara s’intègre-t-il dans la mondialisation.

Quelle est la situation de l’Afrique face aux questions de développement ? Le continent connait-il un réel décollage économique ? Quelle place occupe-t-il dans la mondialisation ? Quels défis démographiques, économiques, environnementaux et politiques l’Afrique doit-elle encore relever ?

Comment le statut de pays émergent se manifeste-t-il pour l’Afrique du Sud ? Quels en sont les

aspects dans le domaine du développement économique, et dans l’influence sur le continent africain et sur la scène internationale ? Quelles en sont les limites en termes de développement humain et de différenciations sociales et spatiales ?

Objectifs de l’étude de cas sur le Sahara (40% de la superficie de l’Afrique) Cette étude de cas permet de mettre à jour les enjeux actuels du développement et de l’insertion de l’espace saharien dans la mondialisation. Constituant l’entrée dans la question consacrée à l’Afrique, il est impératif de la placer en tête. Vidéos : « le Dessous des Cartes » : sur le Sahara, les Etats du Sahel à voir. Plusieurs axes de lecture:

un espace de fortes contraintes physiques, mais disposant de ressources. Le nom même, al- sahrà (ocre), de cet immense espace (8,5 millions de km²) dont les limites peuvent varier selon les critères retenus, suggère la contrainte radicale de l’aridité à laquelle s’ajoutent de forts contrastes thermiques. Le Sahara, peu peuplé (7M d’hab.) hormis le couloir du Nil (Egypte 85M hab.), dispose de ressources, principalement souterraines (phosphates, hydrocarbures, nappes aquifères fossiles) ; il est aussi propice à un tourisme d’aventure contrarié par une insécurité endémique ;

un ensemble politiquement fractionné. Le découpage frontalier héritier des découpages de la colonisation puis de la décolonisation, aujourd’hui assumé par les États africains, est toutefois source de contestations par les populations locales (fédération touareg), de revendications territoriales (Sahara occidental), de conflits et de mouvements de populations réfugiées. Pour les États du Maghreb ou du Makrech tournés vers la Méditerranée, les territoires sahariens constituent des arrières pays en voie d’intégration ; pour plusieurs

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des États saharo- sahéliens (Mali, Niger, Tchad, Soudan), l’enclavement s’ajoute à l’aridité ;

un espace convoité. Les enjeux géopolitiques et économiques des espaces sahariens suscitent de nombreuses convoitises entre de multiples acteurs internes à l’Afrique ou extérieurs : zones d’influence, contrôles de territoires, exploitation de ressources (pétrole, uranium, par exemple). L’exploitation des richesses énergétiques va de pair avec la maîtrise des faibles ressources en eau près des lieux d’extraction, d’autant plus que la localisation des gisements est loin des foyers de peuplement et de consommation et impose la gestion d’une dissymétrie spatiale amplifiant les contraintes de la distance, de l’immensité, de la continentalité. Ces convoitises se manifestent dans les investissements en provenance, le plus souvent, d’autres parties du monde, et s’expriment, entre autres, dans des conflits intra et interétatiques dont les populations subissent les effets, conjugués à ceux de la mal gouvernance.

Les acquis de cette étude seront synthétisés sous la forme d’un schéma car pas de croquis exigible au bac. Introduction : Le Sahara est le plus grand désert du monde. Ce désert chaud recouvert de 20% de sable s’étend de l’Atlantique à la Mer Rouge et sépare l’Afrique du Nord de l’Afrique subsaharienne. Il englobe 10 Etats dont aucun n’est entièrement saharien. Depuis le milieu du XXe siècle, ses ressources importantes sont exploitées au profit de ces 10 Etats mais aussi de puissances non africaines d’où les enjeux géostratégiques importants qui dominent cette région, qui de plus, est entrée de plain-pied dans la mondialisation. Cet espace est aussi marqué par un déséquilibre et une forte diversité de peuplement : concentration littorale de la population atlantique et méditerranéenne et autour des oasis au détriment des espaces centraux. Mais le Sahara, loin d’être un espace en marge, constitue l’une des préoccupations majeures de la géopolitique européenne et internationale, mais aussi des FTN. Rôle dans la mondialisation avec ses immenses ressources en hydrocarbures et minières. Il est aussi au cœur de la sécurité internationale et la géopolitique mondiale de par ses conflits anciens et récents, les migrations clandestines, les trafics et le terrorisme, les conséquences des « Printemps arabes » de 2011. Mots clés : ressources, conflits, acteur transnational, flux illicite, « zone grise », Frontex, secteur informel, land grabbing, Etat saharo-sahélien (ex Mali, Niger), Sahel : « rivage » espace semi-aride de transition entre le Sahara et les régions de savanes, Sahara : espace limité par l’isohyète 200 mm

source : F.Paris, CNED, 2013

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I. Le Sahara est un espace désertique aux fortes contraintes mais disposant de ressources convoitées

a) Un espace contraignant :

Sahara = + grande superficie du monde 8,5 millions de km2 donc peu de population 7 M d’habitants (sans la vallée du Nil)

Bande de désert de part et d’autre du Tropique du Cancer

Un puissant anticyclone limite les précipitations de 100 mm/an : 100 mm/an au Nord, 100 à 200 mm/an au Sud

Donc aridité permanente Contrastes thermiques très importants : jour/nuit Forte érosion éolienne ; Tempêtes de sable Nappes phréatiques profondes ; Oasis 2 types de déserts : reg et erg

Légende schéma :

Limites du Sahara,

Isohyète 200mm pour montrer la contrainte aride,

Limite Sahel

Massifs montagneux

Déserts de sable

Ressources en eau

Oasis

Vidéo : « le dessous des cartes : le Sahara » : https://www.youtube.com/watch?v=vKMTQNdnIB8

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Le Sahara est marqué par de fortes contraintes car il s’agit d’abord d’un désert. Les contraintes apparaissent dans la définition même de ses limites géographiques au nord comme au sud puisque ce sont des limites de faiblesse des précipitations qui permettent de définir les limites : 100 mm au nord et 150 mm au sud. Les températures dépassent les 40°C, voire atteignent les 50°C à l’ombre en été, ombre fort rare. L’eau y est rare, en dehors de quelques lieux où elle affleure en surface, puits dans certains cas, oasis dans d’autres. Dans ces conditions, le développement de l’agriculture et de l’élevage est difficile en dehors des oasis ou de la zone sahélienne limitrophe. Cela implique souvent un élevage nomade. Pour autant, le Sahara n’a jamais été vide d’hommes.

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Nombreuses ressources stratégiques se trouvent dans le Sahara

Hydrocarbures : pétrole et gaz essentiellement en Algérie et en Lybie, Egypte

Minerais : fer de Mauritanie, uranium du Niger, phosphates du Maroc (1RM) et de

Tunisie

Réserves d’eau fossile mais pb nappes phréatiques transfrontalières (Lybie, Egypte)

Réserve de sel

Difficultés d’extraction, inégale répartition des ressources et surtout les gisements dépassent les frontières

Uranium : « route de l’uranium » au Niger entre Tahoua et Arlit

Potentiel solaire

La mise en valeur des ressources énergétiques et minières se fait dans un contexte physique très contraignant : immensité, contrainte de la distance : piste de 600km voire plus, mais aussi contexte géopolitique politique (instabilité des Etats, lieux des organisations terroristes…).

b) Un espace aux nombreuses ressources

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Le pétrole saharien résulte d’une exploitation majoritairement onshore (différente de l’exploitation offshore exploité au fond des océans par des plates-formes pétrolières). Ces gisements de pétrole saharien peuvent se situer soit au cœur du Sahara soit sur ses marges, comme au Sahel au sud. L’exploitation ne s’en trouve pas nécessairement facilitée et les forages restent une entreprise difficile et coûteuse. Le projet transsaharien d’oléoducs date du XXIe s mais il n’est pas encore prêt de voir le jour : régions de rébellion Touaregs et activités terroristes des groupes AQMI. Enjeu géostratégique de l’énergie solaire qui intéresse beaucoup les Européens (Désertec) mais les constructions sont perçues comme du colonialisme. Cette région du monde, faiblement peuplée, offre une quantité impressionnante de ressources, des ressources que chacun estime légitimement pouvoir exploiter car elles ne semblent appartenir à personne dans ces zones inhabitées. Donc enjeu stratégique : la nature même des ressources naturelles donne au Sahara une valeur particulière sur le plan régional et mondial.

Légende schéma :

Ressources minières : minerais métalliques, potasse et phosphates

Ressources énergétiques : hydrocarbures

Nappes phréatiques

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c) Un espace de convoitise et de domination

Le Sahara est découpé en 10 états indépendants : tous sont intéressés par le désert (frontières, stratégiques, politiques, économiques, démographiques

Rôle des partages coloniaux Nécessité d’améliorer l’encadrement administratif dans ces zones car contrôle très difficile (excentré, topographie, peuples nomades)

Rôle géostratégique des ressources.

Les ressources énergétiques variées profitent peu aux populations sahariennes : le fer, uranium, phosphates

et hydrocarbures sont exploités loin des zones de consommation et de plus ces ressources sont

essentiellement destinées aux villes littorales ou à l’exportation et les bénéfices dégagés ne profitent pas aux

populations locales dont le développement humain reste faible cf Tchad, Mali

II) Où les acteurs, les enjeux sont nombreux et les conflits multiples : l’insertion du Sahara dans la mondialisation

a) Des acteurs variés et nombreux aux intérêts parfois divergents : Etats, FTN, puissances étrangères

Les Etats : en conflit pour le partage territorial (frontières pas toujours reconnues cf. Sahara occidental), pour la possession des ressources mais aussi pour la circulation dans le désert. Etats majeurs = Algérie, Libye, Mali, Maroc, mais états instables et désorganisés Les FTN : rôle des multinationales dans l’exploitation des matières premières (Areva), dans la transformation des territoires (tourisme).

Les puissances étrangères : intérêts géostratégiques nombreux : liens de la colonisation, passif de la colonisation, possession des réserves (land grabbing), lutte contre les opposants ou contre le terrorisme, présence nouvelle et croissante de la Chine (Algérie, Niger). Les populations : intérêts divergents de certains groupes Touaregs, Sahraouis du Sahara Occidental. Les mafias : groupes terroristes, clans, groupes ethniques….. Exemple : exploitation du pétrole

Plusieurs types d’acteurs sont à l’origine de l’exploitation de la ressource pétrolière : - Les entreprises publiques : -celles appartenant aux États sahariens -celles, comme la CNPC, d’États totalement extérieurs à la région. La Chine fait, par ses compagnies d’État, une entrée fulgurante dans la région, s’accommodant ainsi du régime dictatorial soudanais en fermant les yeux sur les atrocités dénoncées par l’Occident, au Darfour. Les tentatives déçues de plusieurs pays émergents indiquent l’importance du besoin en pétrole pour leur

économie, encore pour partie encadrée par leurs administrations. - Deux États sahariens seulement sont membres de l’OPEP et peuvent donc peser sur les cours

mondiaux du pétrole. - Les acteurs privés se partagent en deux catégories :

- Les plus grandes compagnies pétrolières occidentales voient leurs intérêts encadrés et soutenus par les États.

- La multitude de petites sociétés, à l’existence liée au démarrage de l’exploitation, relève de pratiques du népotisme (lorsque les dirigeants encouragent leurs proches ou leurs parents à se lancer dans des affaires qu’ils jugent profitables).

Si le pétrole entre dans la logique du développement économique des États sahariens, il n’est pas encore entré dans une logique du développement durable. Le pilier social est déséquilibré, les populations sahariennes sont réduites, au mieux, à des emplois de techniciens. Beaucoup vivent de petits métiers du

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service et du commerce dans les sites pétroliers. Le pilier économique montre que développer des projets au Sahara n’est pas la priorité des retombées de l’argent du pétrole. Le pilier environnemental est le plus malmené, le Sahara contient une multitude de sites pollués sur les zones d’extraction. Les conflits sont évidents à propos du pétrole subsaharien et relèvent de la concurrence entre acteurs. Ce désert est convoité par de nombreux acteurs, les Etats et les FTN sont les grands bénéficiaires des ressources, ils tentent de contrôler les réserves, les exploitations et les bénéfices retirés. Mais ces bénéfices constituent des rentes énergétiques* plus qu’un levier pour le développement local. Les ressources minières et en hydrocarbures sont une rente, un bénéfice financier dont profitent inégalement les États. Au Maghreb et en Libye, les hydrocarbures ont donné lieu à des activités de raffinage qui traitent cette ressource brute et fournissent des emplois. L’activité pétrolière et gazière représente 30 % du PIB algérien. En revanche, plus au sud, les activités se limitent à la seule extraction : le fer mauritanien n’est pas transformé dans le pays et donc exporté brut vers l’Europe et l’Asie. La concurrence entre acteurs est partout présente dans les États sahéliens, à l’autorité incomplète et aux ressources financières ne permettant pas une mise en valeur publique. Ex : Le Tchad doit ainsi faire appel à la fin des années 1990 aux prêts de la Banque mondiale pour mettre en route l’exploitation des gisements situés au nord du pays, en partenariat avec des compagnies étrangères comme l’américaine Exxon. À la fin des années 2000, le pays se tourne vers des investisseurs nouveaux comme la Chine afin de ne plus dépendre des conditions de remboursement fixées à l’État par la Banque mondiale. D’une manière plus générale, si les acteurs publics sont des régulateurs de l’activité, nombre d’entre eux doivent s’en remettre à des compagnies étrangères (Siemens, St-Gobain). Parmi ces dernières, les compagnies publiques d’Afrique du Nord ou de géants asiatiques (Chine, Inde…) sont des concurrentes acharnées de compagnies occidentales traditionnellement présentes (Total, Chevron…). Deux raffineries chinoises sont ainsi l’œuvre de la Chine pour le seul Tchad. Des conflits sont aussi générés directement ou indirectement par les ressources naturelles : le partage des eaux suscitent des conflits d’usage* entre agriculteurs sédentaires et éleveurs nomades. La volonté de contrôler les richesses minières et énergétiques réelles ou supposées explique en partie les conflits armés : rébellion touarègue*, guerre de sécession au Soudan. La redistribution des richesses n’est pas vraiment synonyme de développement mais plutôt engendre du malaise social au sein des populations locales comme ont témoigné les manifestations du Printemps arabes de 2011. Le Sahara n’est pas seulement un lieu de production de ressources mais également un espace de circulation et de transit pour des marchandises venues d’ailleurs. En effet, l’essor des trafics au Sahara a pris une ampleur inégalée. Des acteurs locaux organisent des activités illicites pour bénéficier de la circulation des hommes et des marchandises dans la région. Des villes comme Tamanrasset sont devenues des plaque- tournantes des trafics d’armes, de drogues, de contrebandes mis en œuvre par des réseaux mafieux.

Légende croquis : Inscrire les Etats

Capitales des Etats

Présence militaire française Des enjeux majeurs : possession des ressources, migrations, espaces stratégiques, les frontières, les

trafics, eau

Légende croquis

Détroit stratégique

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b) Des conflits multiples qui créent une situation géopolitique instable peu favorable au développement : frontalier, ethnique, civil, islamisme, migrations et pauvreté, eau

Conflits nombreux : politique, ethnique, religieux, démographiques, économiques

Tensions sociales pour le partage des richesses

Conflits internes mais mobilisent aussi les acteurs étrangers : Touaregs, Sahraouis, Tchad, Soudan

Indépendance : du Soudan du Sud en 2011 (donc volonté de Sécession)

Terrorisme : groupe AQMI Formes des tensions : guerre armée, guérilla, attentats, attaques, enlèvement, trafics illicites…..

Le Sahara est devenu un territoire de développement des organisations terroristes :

Vidéo : « Le dessous des cartes : les Etats fragiles du Sahel » :https://www.youtube.com/watch?v=7NXnuqOz_aI

Al-Qaïda au Maghreb islamique est une organisation terroriste née en Algérie, qui a pris ce nom en 2007 suite à sa reconnaissance par le groupe de Ben Laden. Sa référence à un islam radical est évidente, sa volonté de combattre les alliés des États-Unis et de l’Occident (comme le Maroc) tout autant.

Aqmi étend son activité à l’ensemble du Sahara dans l’immensité incontrôlable devenue une zone de non-droit. Les principaux groupes armés terroristes se sont associés aux revendications traditionnelles des Touaregs maliens et se sont approprié un vaste espace dans le Nord du Mali en le nommant Aazawad. L’entrée d’Aqmi dans ce jeu diplomatique et militaire complexifie encore plus la situation. Cette action est d’abord destinée à déstabiliser l’Algérie.

En dépit d’une volonté des États de contrôler au mieux leur territoire, force est de constater que le Sahara reste mal surveillé. L’immensité de ce désert permet à des groupes terroristes de s’y cacher, d’y implanter des camps d’entraînement à une époque où les nouvelles technologies mettent en relation des petits groupes entre eux. Vide et immensité sont donc bien deux « ressources », naturelles, utilisées à leur profit par les terroristes. Le Sahara, nouveau théâtre de conflits entre groupes armés.

Le Sahara est également le théâtre d’enjeux territoriaux majeurs depuis les années 1970. Le Front Polisario est un groupe politique armé, né dans les années 1970 de la lutte contre les occupants espagnols. Suite à la conquête du Sahara occidental par le Maroc, une partie des Sahraouis, soutenus par l’Algérie a combattu les forces armées royales, revendiquant l’indépendance du Sahara occidental face au Maroc. Les camps de réfugiés sahraouis sont situés en Algérie, à la frontière du Maroc où la population vit depuis 1976 dans des conditions de pénurie et de précarité extrêmes. Le Sahara occidental, dans la continuité sud du Maroc, est divisé en deux parties. 80 % du territoire est administré par le Maroc qui en a fait ses provinces méridionales, sous le contrôle de l’armée : c’est le Sahara « utile » avec le littoral atlantique, les villes, les ressources minières. A l’est du mur de défense établi par l’armée marocaine se trouve le territoire de la République arabe sahraoui démocratique (RASD). Un cessez-le-feu a été signé en 1991, sans grand effet sur les négociations entre les deux parties en présence.

Entre les régions très arides du Sahara du Nord et celles de l’Afrique tropicale humaine se situent les « zones grises » du Sahel : elles sont parcourues par des trafiquants et des groupes qui échappent à l’autorité des Etats. Conséquences lourdes de la chute de Kadhafi en Libye notamment pour des Etats comme le Mali ou le Niger : guerre en 2012, intervention française en 2013 (opérations Serval et Minusma des Nations Unies).

Plusieurs types de conflits se sont donc développés entre les populations du Sahara :

- Conflits entre sédentaires et nomades depuis les années 1970. - Depuis les années 1980, des guérillas éclatent au Mali et au Niger, les accords de paix restent sans

effet sur le terrain.

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- Les années 2000 voient un regain de tensions, notamment au Mali et alors que les réfugiés s’installent dans les pays riverains comme le Burkina-Faso. Certains ont été expulsés d’Algérie. En 2011, les Touaregs de Libye ont combattu contre la révolution qui a chassé la famille Kadhafi et sont obligés à leur tour de trouver refuge dans les pays voisins.

- Des révolutions notamment en Libye - Le renforcement de conflits territoriaux, comme au Mali, par des groupes islamistes.

Bilan : le Sahara est une région aux ressources très importantes, traversée par des conflits de multiples natures aux enjeux internationaux.

Légende schéma : Conflits frontaliers Révolutions et guerres civiles

Lieux attentats et enlèvements

Zone d’activité terrorisme AQMI

III) Mais c’est aussi un espace parcouru, exploité et urbanisé qui tente de s’intégrer dans la mondialisation

a) Un espace de circulation aux nombreux échanges

Des flux nombreux : migrations des populations, des produits, des cultures, des IDE

Echanges réactivés dans les années 1990 entre états du Maghreb et les Etats sahéliens

Migration clandestine

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Des infrastructures difficiles à entretenir : routes, voie ferrée, aéroport des réseaux se créent.

Légende schéma :

Flux migratoires

Importations

Exportations

Grandes routes

Hommes et marchandises transitent à travers le Sahara. La période actuelle voit renaître le commerce nord-sud saharien. Une part importante réside dans la contrebande, à travers ces espaces mal contrôlés. Ce type de commerce concerne des produits de première nécessité, alimentaires, dont les prix varient et sont très divers en fonction des subventions étatiques. Les types de produits échanges sont par exemple : - le lait en poudre algérien, les boîtes de concentré de tomates tunisiennes. - Les cigarettes sont aussi une marchandise échangée selon un flux sud-nord, qualifié de « Marlboroconnexion » . - La drogue trouve dans le Sahara et le Sahel de vastes espaces de transit non gardés : le haschich

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marocain est pour partie dirigé dans un premier temps vers le Mali et le Niger, pour remonter vers la Libye et l’Egypte et ainsi gagner l’Europe. - La cocaïne américaine provenant des ports du Golfe de Guinée transite maintenant vers la Méditerranée via le Sahara. Les frontières du sud des États du Maghreb sont poreuses et aisées à franchir pour nombre de migrants sahéliens. Le Maroc, a été le principal pays de transit vers l’Europe par le détroit de Gibraltar ou par les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, mais le renforcement des contrôles par les autorités marocaines a fortement limité ce transit de clandestins. La Tunisie puis la Libye sont des zones de départ vers les îles italiennes. L’Égypte est une terre de passage vers le Proche-Orient. Ces désirs de terre promise européenne, d’eldorado, entretiennent une économie locale clandestine, faite de passeurs de frontières dans des régions mal surveillées. C’est maintenant sur la côte méditerranéenne que s’arrête le plus souvent l’aventure de ces migrants, dans le cadre d’accords avec l’Union européenne. Et cette nouvelle main-d’œuvre est alors exploitée dans des conditions de quasi esclavage.

Les flux de migrants sont source de tensions notamment avec l’Union européenne qui a mis en place le

dispositif Frontex pour maîtriser l’immigration clandestine et surveiller la Méditerranée (cf pb récents).

Accords avec les Etats comme l’Algérie et la Libye pour contrôler les camps de réfugiés.

Le Sahara est ainsi devenu au cœur de la géopolitique internationale : l’essor des trafics illégaux, du

terrorisme et des flux migratoires illégaux dans une région aux ressources stratégiques inquiètent la

communauté internationale. L’Onu est présente dans l’observation des conflits (Sahara occidental) et dans

la gestion des camps de réfugiés (Algérie, Soudan).

b) Un espace exploité : exploitation des ressources, exploitation des oasis

Exploitation de l’espace par l’activité agricole : agriculture irriguée dans les oasis, élevage nomade qui suivent les pâturages = conflits entre nomades et sédentaires.

Exploitation des matières premières : moderne et reliée au centre d’exportation (port), réalisation de station de forage et d’exploitation, création de gazoduc et d’oléoduc = grands projets et développement des villes

Développement d’activités économiques dans les villes (services, administration…) Tourisme plusieurs formes et créations d’espaces touristiques

Légende schéma :

Oléoduc, gazoduc

Lieux de tourisme

Etats enclavés

Le Sahara est équipé d’infrastructures permettant les flux à travers le désert. L’exportation des produits miniers et des hydrocarbures nécessite des infrastructures nouvelles :

- Le chemin de fer est rare au Sahara : il n’existe que pour mettre en relation un gisement et le port d’exportation lié, à la manière des mines de fer de Zouerate au nord de la Mauritanie, directement reliées au port de Nouadhibou par un train minier.

- Les oléoducs et gazoducs font aussi partie de ces équipements de transport, qu’il s’agisse de l’Algérie, ou du Soudan avec le conduit de quelque 1200 km entre les gisements pétroliers au sud du pays et Port-Soudan sur la Mer Rouge.

- Les routes ont acquis un rôle majeur pour le contrôle des territoires dont l’importance revêt un caractère symbolique, à la manière de la Route de l’Espoir en Mauritanie, créée et asphaltée durant les années 1980 pour nourrir les populations de l’est du pays touchées par la sécheresse.

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Les paysages et le cadre environnemental sont aussi des ressources. Le tourisme pratiqué au Sahara se fonde pour partie ou en totalité sur un cadre naturel recherché. Il en va ainsi de la fréquentation de certains massifs, comme le Hoggar en Algérie ou l’Akakus en Libye, pour des activités de trekking, de visite des canyons, des fresques néolithiques. Le tourisme « de masse » développé dans le Sahara tunisien joue lui aussi sur les images du désert, comme dans l’oasis de Tozeur, véritable concentration d’hôtels luxueux. Ce tourisme est une activité en pointillés, en fonction des aléas politiques et militaires. Mais ce tourisme saharien est au point mort en 2012 suite à des enlèvements de touristes et à la multiplication des groupes armés par la guerre civile en Libye.

c) Un espace urbanisé Des villes en plein développement : lié à la multiplication des échanges (sel, bétail, arachide,

sésame, henné, biens manufacturés

Réalisation de réseaux urbains Problèmes : ravitaillement, adduction d’eau, pollution, extension des espaces urbains, bidonvilles,

réfugiés

Légende schéma :

Ville nœuds d’échanges

L’augmentation de la population dans les villes sahariennes est due d’abord à :

- un niveau élevé de la fécondité : La Mauritanie montre bien ce phénomène commun à tous les États du Sud : 4,5 enfants par femme en 2010, au lieu des plus de 6 dans les années 1960. Ce chiffre est de 6,2 en 2010 au Tchad.

- une augmentation des populations migrantes qui ont convergé vers ces centres urbains depuis les années 1960. La croissance de Nouakchott s’explique en grande partie par ce phénomène, tout comme celle des villes sahéliennes qui ont vu converger dans les années 1970 des populations touchées par la sécheresse et la famine et qui se sont ensuite sédentarisées. Véritables villes champignons, les villes sahariennes doivent leur exceptionnelle vitalité à la croissance de la population, l’augmentation de l’espérance de vie et la réduction de la mortalité infantile, dans un contexte de maintien de la fécondité à des niveaux élevés. Cette croissance urbaine influe sur la hausse de la population totale des États sahariens.

- la volonté des États sahariens de mieux contrôler leur territoire entraîne la présence croissante de militaires et de fonctionnaires vivant en ville en famille.

- l’exploitation des ressources du sol et du sous-sol saharien en raison de la nécessité de main

d’œuvre. La ville algérienne d’Hassi R’Mel, fondée sur l’exploitation du gaz naturel, est passée de 12 000 habitants en 2002 et à 22 000 en 2008.

- Mais les taux d’urbanisation des États partiellement sahariens sont faibles (40 % en Mauritanie, 20

% au Niger, 33 % au Mali…). Et il reste encore une importante population rurale.

Conclusion :

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Trait d’union entre Afrique du Nord et reste du continent africain, le Sahara redevient un enjeu d’intérêts internationaux. L’époque où le désert était un simple espace de transit ponctué par quelques oasis et autres relais caravaniers est bien loin. Le Sahara est maintenant au cœur des enjeux stratégiques de premier ordre sur la scène mondiale. Il est devenu essentiel d’y contrôler ses ressources et de juguler l’expansion des groupes terroristes qui y trouvent refuge. Éradiquer les zones de non droit est devenu une priorité pour les États sahariens et pour leurs alliés occidentaux, États-Unis en tête. Il est important de souligner les fortes disparités liées au niveau de vie de chaque État qui le compose. Les États maghrébins donnent le ton pour le contrôle de l’exploitation de leurs richesses, montrant ainsi une volonté politique de s’approprier les revenus de ces richesses nationales. Cette attitude nationaliste tranche avec le comportement de nombreux États subsahariens plus faibles, où la corruption et le clientélisme laissent encore le champ libre aux intérêts étrangers. Le Sahara manque aussi d’un leadership. Aucune puissance saharienne ne se dégage. L’Égypte la première puissance économique et militaire a les yeux fixés sur l’est du pays (Sinaï, Gaza et Israël) et la résolution de ses problèmes politiques internes. L’Algérie et le Maroc se tiennent mutuellement en respect. La Tunisie et la Libye sont à reconstruire et les États sahéliens luttent pour leur survie. L’Afrique du Sud est vraie la puissance africaine, mais elle est située à l’autre extrémité du continent. Après des siècles d’effacement et de désintérêt, le Sahara est devenu un espace de conflits dans la mondialisation. Doté d’immenses richesses et peu peuplé, le Sahara aurait pu rester une zone de paix. Pourtant, à l’échelle du monde, il représente sans doute l’une des terres d’affrontement du début du XXI° siècle, pour le contrôle de ses immenses ressources stratégiques.

Sujets possibles de composition : Le Sahara, un territoire en marge de la mondialisation ? ; Les enjeux géopolitiques du Sahara

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Les enjeux territoriaux : Localisation des gisements Appropriation des ressources Conflits territoriaux

Les enjeux financiers Investissements dans les infrastructures : exploitation, transformation et/ou exportation

RESSOURCES

Les enjeux environnementaux Echelle locale : préservation des écosystèmes Echelle mondiale ; épuisement des ressources fossiles, réchauffement climatique

Les enjeux économiques et sociaux Partage des richesses et « piège de la rente » : inégalités sociales fortes malgré les richesses, dépendance des cours mondiaux

Conflits d’usage

f terr or x fr er r l’appropriation de la ressource Exemple

Exemple

erre c e r e

re rces

f c x r e

r e e re te Exemple : Exemples

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