80
L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen les droits des femmes en Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Palestine, Syrie et Tunisie Rapport élaboré par Rabéa Naciri et Isis Nusair Publié par le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH)

L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

  • Upload
    others

  • View
    5

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

L’intégration des droits des femmes

du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord

dans le Partenariat euro-méditerranéen

les droits des femmes en Algérie, Égypte, Israël,Jordanie, Liban, Maroc, Palestine, Syrie et Tunisie

Rapport élaboré par Rabéa Naciri et Isis Nusair

Publié par le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH)

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page i

Page 2: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Copenhague, mai 2003

Réseau euro-méditerranéen des droits de l’HommeWilders Plads 8H1403 Copenhague KDanemarkTel : +45 32 69 89 10Fax : +45 32 69 89 01E-mail : [email protected] : http://www.euromedrights.net

© REMDH 2003

Informations bibliographiques :

Titre : L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéenAuteurs individuels : Naciri, Rábea ; Nusair, Isis Coordinateurs : Han, Sarah ; Jorgensen, Marit Floe Auteur moral : Réseau euro-méditerranéen des droits de l’HommeEditeur : Réseau euro-méditerranéen des droits de l’HommeDate de publication : 20030500Pages : 76ISBN : 87-91224-03-9Langue originale : françaisTraduction vers l’anglais : Sharpe, SusanTraduction vers l’arabe : Al Hadad, Aiman H.Termes de l’index : Femmes / Discrimination sexuelle / Discrimination / Egalité devant la loi /Violence contre les femmes / Famille / Mariage / Liberté d’association / Liberté de mouvement /Participation politique / Union européenne Termes géographiques : Pays méditerranéens / Afrique du nord / Moyen-Orient

Ce rapport est publié avec le soutien financier de la Commission de l’UE et de la FondationHeinrich Böll.

Les opinions exprimées par les auteurs ne représentent pas le point de vue officiel de laCommission de l’UE ni celui de la Fondation Heinrich Böll.

Page de couverture : Conception de la couverture : Leila DrarConception et réalisation : Genprint et 80:20 - Educating and Acting for a Better World,Irlande.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page ii

Page 3: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Sommaire

Avant-propos 1

À propos du rapport 4

Résumé détaillé 5

Recommandations 11

Introduction 14

Partie I : Violations des droits des femmes dans la région MENA 151.1 Discrimination envers les femmes dans les lois du statut personnel 151.2 Discrimination envers les femmes dans les lois pénales, les lois sur la

nationalité et d’autres textes 191.3 Discrimination envers les femmes dans l’éducation et l’emploi 221.4 Discrimination envers les femmes dans la représentation politique 241.5 La violence à l’encontre des femmes 251.6 Les pays du MENA et les instruments internationaux relatifs

aux droits des femmes 30

Partie II : Dynamiques civiques en faveur de l’égalité des genres

dans la région MENA 352.1 Les dynamiques civiques 35

2.1.1 Le mouvement pour les droits des femmes dans la région MENA 352.1.2 Les réseaux pour la promotion des droits des femmes

dans la région MENA 402.2 Réactions des États et des acteurs non-étatiques à ces dynamiques

en faveur de l’égalité des genres 412.2.1 Réaction des États 412.2.2 Réaction des acteurs non-étatiques 43

Partie III : Droits des femmes dans le processus du Partenariat

euro-méditerranéen 473.1 La mise en œuvre du PEM néglige les droits des femmes 47

3.1.1 Quelques initiatives en faveur des droits des femmes dans le PEM 493.1.2 Bilan de l’intégration du genre dans le PEM 50

3.2 Les initiatives de la société civile en faveur des droits des femmes dans la région MENA 54

Conclusion générale 58

Bibliographie 59

Annexes 63I. Glossaire 63II. Codes du statut personnel dans les pays du MENA 64

iii

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page iii

Page 4: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

III. Le genre dans les codes de la nationalité des pays du MENA 68IV. La liberté de mouvement des femmes dans certains pays du MENA 70V. Les pays du MENA et la Convention CEDAW 72VI. Les articles de la Convention CEDAW objets de réserves de la part

des pays du MENA 73VII. Les réseaux des droits des femmes dans la région MENA 75

iv

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page iv

Page 5: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Ce rapport vise à présenter le contexteexplicatif des dynamiques propices et hostilesau développement des droits des femmes dansla région du Moyen-Orient et de l’Afrique dunord (MENA). Il synthétise l’informationdisponible sur la discrimination et la violencecontre les femmes dans la région et metl’accent sur les réseaux nationaux, régionauxet internationaux ainsi que sur les initiativesféminines en faveur de la promotion desdroits des femmes dans la région MENA et ausein du Partenariat euro-méditerranéen(PEM). Il analyse, enfin, l’étendue del’incorporation de la dimension genre (gendermainstreaming) dans le PEM et présente desrecommandations afin que les droits desfemmes soient adressés de façon plussatisfaisante par l’UE et les États partenaires.

Le principe de base sur lequel repose cerapport est que la promotion des droits desfemmes est inséparable des droits humains,de la démocratie et du développement. Eneffet, comment les droits des femmespeuvent-ils progresser si le dialogue relatifaux droits humains ne s’applique pas defaçon égale aux hommes et aux femmes? Demême, comment promouvoir les droits desfemmes, lorsque la moitié de la population sevoit systématiquement refuser uneparticipation égale au processus de prise dedécision dans la société? Et comment parlerde réel développement, lorsqu’une personnesur deux ne profite pas de l’augmentation dela qualité de la vie?

Les participants à la conférence de Pékin surles droits des femmes de 1995 ont déclaréqu’il ne pouvait y avoir de droits de l’Hommesans droits des femmes, ni de démocratie sansparticipation pleine et égale des femmes.Cette déclaration a été confirmée par laConférence Pékin + 5 de New York en 2000.De même, le rapport 2002 du PNUD sur ledéveloppement humain arabe a identifié lestatut des femmes dans le monde arabecomme l’un des trois déficits majeurs dans larégion qui entravent le développement (lesdeux autres étant le manque de liberté et lebas niveau de connaissance).

La Déclaration de Barcelone ne reconnaîttoutefois pas de façon explicite la relation quiexiste entre les droits de l’Homme, ladémocratie, le développement et les droitsdes femmes, se contentant d’une référence àl’importance du rôle des femmes dans ledéveloppement économique et traitant ainsiles droits des femmes comme une question àpart.

En dépit de l’importance que représentent lesdroits des femmes pour les droits humains, ladémocratie et le développement, un certainnombre d’obstacles viennent entraverl’engagement international en faveur de leurpromotion. Plus récemment, le contexte del’après-11 septembre, marqué par uneréférence croissante des discoursgouvernementaux aux questions de sécurité etde terrorisme, se montre de moins au moinsaccueillant à l’égard des obligations relativesaux droits de l’Homme. Il a également permisà des gouvernements du Sud (et du Nord) devioler de plus en plus impunément les droits del’Homme. En raison de l’indivisibilité des droitshumains et des droits des femmes, cechangement d’environnement autour de lapromotion des droits de l’Homme a eu unimpact négatif sur le travail des organisationsde défense des droits des femmes.

Il existe également une tendance desgouvernements de la région MENA, maisaussi des institutions de l’UE, à considérer lesdroits des femmes dans la région MENAcomme une question de «normes religieuseset de traditions culturelles», à traiter commeune question d’ordre interne.

De plus, les femmes de la région MENA, etparticulièrement les femmes musulmanes,sont souvent victimes de stéréotypes de lapart du Nord, qui les perçoit comme étant desêtres opprimés, faibles, incapables d’influersur leur sort et enfermées dans une sociétéincapable d’évoluer. La tradition musulmaneest également perçue comme étant tropdifférente de la culture «occidentale» et parconséquent inconciliable avec elle, particul-ièrement en ce qui concerne les femmes.

1

Avant-propos

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 1

Page 6: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Le présent rapport devrait permettre deremettre en question ces perceptions. Afin decombattre les normes juridiques et socialesqui propagent discrimination et violenceenvers les femmes, les mouvements de droitsdes femmes et de l’Homme de la régionMENA ont recours aux conventionsinternationales relatives aux droits del’homme, et plus particulièrement à laConvention de 1979 sur l’élimination detoutes les formes de discrimination à l’égarddes femmes (CEDAW), afin d’inciter les paysde la région MENA à retirer leurs réserves àcette convention. Ils font également du lobbyauprès de l’UE afin qu’elle impose un telretrait à ces États.

Ce rapport identifie également organisationset réseaux actifs dans le domaine des droitsdes femmes dans la région MENA et souligneleur contribution à la lutte contre ladiscrimination et la violence à l’égard desfemmes. Il montre comment ces organisationsont réussi à initier des débats sur la questiondes droits des femmes dans la région ; ont misen place des centres d’aide juridique etpsychologique destinés aux femmes victimesde violence et ont lancé un certain nombre decampagnes, notamment à propos des soi-disant crimes d’honneur ou surl’augmentation de l’âge minimum dumariage pour les fillettes et les femmes.

Ce rapport contribue ainsi à appréhender lemonde arabo-musulman dans sa complexitéet sa diversité et à promouvoir une meilleurecompréhension entre les cultures et lessociétés de la région. Il expose également lesnombreuses violations des droits des femmesdans la région MENA et appelle l’UE et lespays partenaires à respecter leursengagements en faveur des droits del’Homme, tels qu’ils sont exprimés dans laDéclaration de Barcelone, dans denombreuses politiques de l’UE et dans le droitinternational.

Les droits des femmes dans le PEM

En novembre 1995, l’Union européenne et lesdouze pays méditerranéens partenaires1 ontadopté la Déclaration de Barcelone, décidantainsi de créer le PEM.

Dans la Déclaration de Barcelone, les partiess’engagent «à agir conformément à la Chartedes Nations unies et à la Déclaration

universelle des droits de l’Homme, ainsiqu’aux autres obligations résultant du droitinternational». Elles se sont engagées, deplus, à respecter les droits de l’Homme et leslibertés fondamentales et à garantir ceslibertés sans aucune discrimination sur la basede la race, de la nationalité, de la langue, dela religion ou du sexe.

L’objectif de l’UE et des pays partenaires, àtravers ces nobles engagements, étaitprobablement de faire du bassinméditerranéen une aire de paix, de stabilitéet de prospérité, fondée sur une démocratierenforcée, sur le respect des droits del’Homme, sur un développement économiqueet social intégré et équilibré, sur unediminution de la pauvreté et sur l’incitation àune meilleure compréhension interculturelle.La mise en place du Partenariat a donc permisessentiellement de créer un nouvelinstrument majeur, qui reconnaîtl’indivisibilité des facteurs politiques,économiques, sociaux et culturels dans ledéveloppement.

Toutefois, malgré l’engagement du PEM enfaveur des droits de l’Homme, la question desdroits des femmes n’a pas fait l’objet d’uneattention suffisante dans le PEM. Seul le voletéconomique et financier de la Déclaration deBarcelone fait une référence spécifique auxdroits des femmes, en énonçant la nécessitéd’améliorer les conditions de vie despopulations et d’augmenter le niveaud’emploi des populations de la région euro-méditerranéenne. Ce n’est qu’en novembre

2

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Femmes faisont des reserches sur internet dans lebibliothéque d’Alexandrie récement inaugrée.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 2

Page 7: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

2001 que la question des genres a étémentionnée pour la première fois dans lesconclusions finales d’un sommet duPartenariat euro-méditerranéen. Enfin, leprogramme de travail du Partenariat n’areconnu l’importance des droits des femmesque de façon marginale et ces droits ne sontpas abordés de façon cohérente par les cadresstratégiques (strategy papers) euro-méditerranéens nationaux et par lesprogrammes indicatifs nationaux2.

À travers l’analyse des initiatives relatives auxdroits des femmes dans le PEM, ce rapportinsiste également sur la nécessité d’intégrerles genres dans toutes les politiques et tousles programmes des trois volets du PEM3, etde mettre en place des actions positives(affirmative action) et des programmes axésspécifiquement sur les femmes.

Le REMDH et les droits des femmes

Le Réseau euro-méditerranéen des droits del’Homme (REMDH) a été établi en janvier1997, comme réponse de la société civile à lacréation en 1995 du Partenariat euro-méditerranéen et à l’adoption de laDéclaration de Barcelone. Il vise à promouvoiret protéger les droits de l’Homme.

Reconnaissant l’importance des droits desfemmes dans la réalisation des objectifs de ladimension droits de l’Homme du PEM – etdans le développement de la société – leREMDH les considère comme l’une de sesquestions thématiques-clés. Il cherche àpromouvoir la prise de conscience sur cesdroits en :

● mettant l’accent sur la question desdroits des femmes dans la régionméditerranéenne ;

● renforçant l’action des ONG dans ledomaine des droits des femmes ;

● appelant à faire de la question desdroits des femmes un thème prioritaireau sein du PEM.

Ce rapport vise à décrire «l’état des lieux» desdroits des femmes dans la région MENA, àidentifier les organisations et réseaux actifsdans ce domaine et à analyser les initiativesdu PEM visant à promouvoir ces droits.

Nous espérons que ce rapport et sesrecommandations seront utiles auxgouvernements, aux institutions de l’UE ainsi

qu’aux défenseurs des droits des femmes etde l’Homme, dans leur lutte incessante enfaveur de la promotion des droits des femmesdans la région MENA.

Notes1 Algérie, Autorité nationale palestinienne, Chypre,

Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Malte, Maroc, Syrie,Tunisie et Turquie.

2 Voir The Human Rights Implications of the MEDAProgrammes, rapport présenté par Iain Byrne etCharles Shamas, publié par le REMDH, Copenhague,septembre 2002.

3 Les trois volets sont le partenariat politique etsécuritaire, le partenariat économique et financieret le partenariat dans les affaires sociales, culturelleset humaines.

3

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 3

Page 8: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

En janvier 2002, le REMDH a chargé Rabéa Naciri,marocaine, et Isis Nusair, palestinienne d’Israël,activistes et chercheuses dans le domaine desdroits des femmes, d’entreprendre une étude envue de rédiger un rapport sur les droits desfemmes dans la région MENA. Après deséchanges de vues avec le REMDH, ce tandemféminin a présenté les grandes lignes de sonrapport en février 2002. Des études de terrain ontensuite été menées en mars et avril 2002 dans larégion euro-méditerranéenne, plus particulière-ment en Égypte, en Israël, en Jordanie, au Liban,au Maroc, en Palestine et en Tunisie. Ce travail deterrain a consisté notamment en des interviewsavec des organisations travaillant sur la défensedes droits des femmes et avec des activistes et desuniversitaires au niveau local. Des sources écritesont également été consultées. L’équipe arencontré des représentants du Partenariat euro-méditerranéen lors d’une visite à Bruxelles enfévrier 2002.

Les principaux résultats de cette recherche ontété présentés et discutés lors d’un atelier sur lesdroits des femmes, tenu à l’occasion du Forumcivil euro-méditerranéen de Valence en avril2002.

Deux mois plus tard, à Athènes, un projet derapport a été soumis à discussion au cours d’unséminaire du REMDH intitulé «Les droits desfemmes dans la région euro-méditerranéenne :quel partenariat?», réuni en marge de la 5e

assemblée générale du REMDH. Les membres duREMDH, de même que des experts etreprésentants-clés d’organisations des droits desfemmes de la région euro-méditerranéenne, soitun total de quatre-vingt-cinq délégués, ontparticipé aux discussions et présenté descommentaires. Leurs remarques ont été prises encompte dans le présent rapport.

Au cours d’une session ultérieure de discussion, àMalte en octobre 2002, le groupe de travail surl’éducation aux droits de l’Homme du REMDH afait des suggestions sur la façon dont ce rapportpourrait être utilisé afin d’accroître la prise deconscience sur les droits des femmes dans larégion.

Ce rapport traite de neuf pays du Moyen-Orientet d’Afrique du nord (MENA), partenaires duPartenariat euro-méditerranéen : l’Algérie,

l’Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, le Maroc, laPalestine, la Syrie et la Tunisie. Il ne cherche pas àévaluer la performance de chaque pays, mais àprésenter des éléments permettant decomprendre les dynamiques qui freinent oustimulent la promotion des droits des femmes.Trois pays partenaires du PEM ne sont pas évaluésdans ce rapport. Bien qu’un bref commentairecomparatif ait été incorporé, les droits desfemmes en Turquie, y compris la situation deskurdes, ne sont pas traités en détail. Il en est demême en ce qui concerne la situation des femmesà Chypre ou à Malte. De plus, la question desfemmes appartenant à des minorités culturellesou religieuses - comme les coptes ou les berbères- ou des femmes réfugiées, n’a pas été traitée.Enfin, il faut mentionner certains développe-ments intervenus depuis la rédaction de cerapport. La première femme juge a été nomméeà la Haute Cour constitutionnelle égyptienne enjanvier 2003 et un décret royal a été adopté enJordanie en février 2003, approuvant la décisiondu Cabinet de créer six nouveaux siègesparlementaires pour les femmes aux prochainesélections4, pour ne citer que deux exemples. Demême, dans le PEM, la Commission européenne alancé un processus d’évaluation des politiques del’UE dans le domaine de l’intégration des droitsdes femmes. Le présent rapport devrait donc êtreconsidéré comme un aperçu du processusdynamique de promotion des droits des femmesdans le PEM.Ce rapport a bénéficié du généreux soutien de laFondation Heinrich Böll et de la Commissioneuropéenne.Le REMDH tient à remercier tous ceux qui ontcontribué à rendre possible la publication de cerapport. Des remerciements tous particuliers àtous les défenseurs des droits des femmes et auxchercheurs de la région MENA, qui continuent àse battre contre la discrimination et la violenceenvers les femmes.

REMDH, avril 2003

4 Une commission royale – le Comité sur le quota desfemmes parlementaires – avait proposé que huitsièges parlementaires soient réservés aux femmes,mais le Cabinet jordanien a opté pour six. JordanTime, «“6 parliamentary seat quota not enough”,say women activists», 14-15 février 2003.

4

À propos du rapport

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 4

Page 9: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Ce rapport étudie les droits des femmes dansla région du Moyen-Orient et de l’Afrique dunord (MENA), et plus particulièrement enAlgérie, Égypte, Israël, Jordanie, Maroc,Palestine, Syrie et Tunisie, dans le contexte duPartenariat euro-méditerranéen (PEM). Lapremière partie identifie les lois et pratiquescommunes qui violent les droits des femmesdans cette région. La seconde partie présenteles initiatives sociales et civiques quicherchent à promouvoir, au plan local, lestatut des femmes dans la région, ainsi que larésistance à laquelle ces mouvements dedéfense des droits des femmes se heurtent.Enfin, la troisième partie évalue les droits desfemmes dans le processus du Partenariateuro-méditerranéen, en s’intéressant toutparticulièrement à la question de l’étenduede l’intégration du genre dans le PEM et enfaisant des recommandations concrètes sur lafaçon dont ce dernier pourrait contribuerdavantage à la promotion des droits desfemmes dans la région MENA.

Part I : Violations des droits des

femmes dans la région MENA

Discrimination envers les femmes dans

les lois du statut personnel

Le statut inférieur des femmes dans la régionMENA trouve ses racines dans les lois de lafamille, aussi appelées codes du statutpersonnel (CSP). Ces CSP régissent ce qui esttypiquement considéré comme relevant de lasphère privée – le mariage, le divorce, lespensions alimentaires, la garde des enfants etl’héritage – mais a également un effet sur lavie publique des femmes, agissant commepuissant moyen de contrôle des activitéséconomiques, politiques, sociales, civiques etculturelles des femmes.

Au cœur du fonctionnement des CSP estl’idée de tutelle sur les femmes. Les femmesdoivent vivre sous la tutelle légale de leursmaris, pères, ou d’un autre membre masculinde leur famille ou de leur tribu, et leurs«droits» civils sont placés sous le contrôle de

ces gardiens. Par conséquent, les femmesn’ont pas la capacité légale de prendre lesdécisions élémentaires qui les concernent.

Par exemple, conformément aux CSP, unefemme n’a pas le pouvoir de contractermariage, pas plus qu’elle ne peut être tutricelors du mariage d’une autre femme. Il enrésulte que la femme doit être juridiquement«cédée» par un proche mâle afin de pouvoirse marier. Une femme ne peut non plusjuridiquement divorcer, elle doit obtenir uneautorisation du juge dans des conditions trèsstrictes, alors que les maris ont la possibilitéde répudier leurs épouses sans même avoir àjustifier leur décision. Quant aux dispositionsdes CSP relatives à l’héritage, elles nepermettent aux femmes d’hériter que lamoitié de la part des hommes.

Ainsi, alors que les CSP ne concernent que ledroit de la famille, ils servent de fondement àdes discriminations envers les femmes danstous les domaines de leur vie, aussi bien dansla sphère privée que publique.

Discrimination envers les femmes dans

les lois pénales, les lois sur la

nationalité et d’autres textes

Les lois pénalesLes législations pénales des pays de la région,comme le code pénal syrien, donnent la prioritéà l’honneur et à l’intégrité physique et moralede l’homme sur ceux de la femme. Les mariscoupables de meurtre ou de coups et blessuressur leur épouse soupçonnée d’adultère peuventobtenir des circonstances atténuantes, alorsque la loi n’offre pas la même mansuétude auxépouses. Les crimes d’honneur bénéficient d’unlaxisme juridique dans plusieurs pays tandis qued’autres, comme le Maroc, exigent uneautorisation préalable des tribunaux afinqu’une femme victime d’abus par son épouxpuisse se porter partie civile.

Les lois sur la nationalitéLes lois sur la nationalité des pays de la régionMENA violent les principes relatifs à la

5

Résumé détaillé

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 5

Page 10: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

nationalité posés par tous les instrumentsinternationaux. L’enfant d’une femme mariée àun étranger ne peut obtenir automatiquementla nationalité de sa mère, même s’il est né et vitdans son pays. Il en résulte que ces enfants nebénéficient que d’un accès très restreint auxservices de santé et d’éducation. De plus, lesfemmes de la région ne sont pas autorisées àtransmettre leur nationalité à leur épouxétranger. Or, ces mêmes restrictions nes’appliquent pas aux hommes mariés à desfemmes étrangères, ni à leurs enfants.

La liberté de mouvementDans certains pays, et jusque récemment enJordanie, les femmes ne peuvent obtenir unpasseport sans l’autorisation de leur époux.Dans d’autres, comme au Maroc ou au Liban,le mari peut forcer de façon unilatérale safemme à réintégrer le domicile conjugal.

Discrimination envers les femmes dans

l’éducation et l’emploi

Inégalité entre les genres dans l’éducationLe taux d’analphabétisme des femmes dans larégion, bien que variable d’un pays à l’autre,demeure extrêmement élevé et atteint unemoyenne de 42% (à l’exception d’Israël et de laTurquie), alors que le taux moyen dans la régionen ce qui concerne les hommes est de 21%.

L’inégalité des genres et l’activitééconomiqueAlors qu’officiellement la participation desfemmes à l’activité économique dans les paysde la région MENA partenaires du processuseuro-méditerranéen est en hausse, ellen’atteint toutefois que 29%, ce qui représentel’un des taux les plus bas au monde.

Les domaines traditionnels d’activité desfemmes dans la région MENA - le travaildomestique et l’agriculture - ne sonttoutefois pas pris en compte dans le taux decroissance annuel, ce qui contribue à fausserl’image de la contribution des femmes à leurséconomies respectives et renforce leur statutinférieur dans la société.

Par ailleurs, en raison du fort taux dechômage que connaissent plusieurs pays duMENA, les États ont été réticents àencourager un égal accès des femmes àl’emploi, les hommes se voyant accorder lapriorité dans les emplois rémunérés.

Le travail des femmes est cependant unequestion complexe. Un taux élevé de travailféminin ne reflète pas nécessairement unecroissance du développement des femmes. Ilest donc essentiel d’analyser le type d’emploisoccupés par les femmes ainsi que leur contexte,afin de mieux comprendre les raisons pourlesquelles elles peuvent être autorisées àtravailler, capables ou même forcées de le faire.

Discrimination envers les femmes dans

la représentation politique

Les constitutions des pays de la région MENAgarantissent généralement une égaleparticipation politique des hommes et desfemmes. En pratique, toutefois, le taux departicipation des femmes au processus deprise de décision politique dans la région estl’un des plus bas au monde. L’actionaffirmative en faveur des membres fémininsdu parlement, telle qu’elle a été introduite auMaroc ou en Jordanie, pourrait représenterun développement positif. Toutefois, le faitque l’État réprime la libre expressionpolitique, fait que la présence de femmesdans les institutions étatiques ne constituepas en elle-même une amélioration du statutde la femme.

La violence à l’encontre des femmes

La violence contre les femmes dans la régionMENA est légalisée et institutionnalisée dansle cadre des relations maritales et familiales.Par exemple, juridiquement, le mari ne peutjamais être accusé d’avoir violé son épouse,car il dispose d’un droit absolu sur son corps.Il a aussi le droit de la frapper (légèrement), sielle lui désobéit. La pratique de l’excisionféminine, les crimes d’honneur et le trafic desfemmes à des fins de prostitution et de travaildomestique, n’ont par ailleurs toujours pasdisparu.

La violence contre les femmes en temps deconflitsEn raison des discriminations subies et del’infériorité de leur statut social, les femmessont particulièrement vulnérables à la violenceen temps de conflits. Meurtres, viols, séquestra-tion de femmes et d’adolescentes, de mêmeque le mariage forcé, ont été le lot de milliersde femmes dans la région MENA en temps deconflits, comme par exemple en Algérie.

6

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 6

Page 11: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Le viol des femmes est souvent utilisé commeune arme de guerre afin d’humilier leshommes, les femmes étant considéréescomme porteuses de l’honneur familial. Cesfemmes font généralement face aux piresdifficultés à se réinsérer dans leur famille etdans leur communauté, car l’environnementsocial tend à ne pas les considérer comme desvictimes mais comme responsables dudéshonneur de la famille.

Les pays du MENA et les instruments

internationaux relatifs aux droits des

femmes

Tous les pays du MENA ont signé et ratifié lespactes et les conventions internationalesrelatives aux droits des femmes,particulièrement la Convention CEDAW, maisla plupart ont émis des réserves qui vont àl’encontre de la lettre et de l’esprit de cestextes. Les États recourent souvent à desarguments «culturels et religieux» pour nepas mettre en œuvre les dispositions de cestextes internationaux.

De plus, les obligations internationalesrelatives aux droits de l’Homme ne sont pasincorporées de façon satisfaisante dans lalégislation nationale. Alors que lesconstitutions libanaise et algérienneaccordent aux conventions internationales lapriorité sur les lois nationales, lesconstitutions de la plupart des autres pays necontiennent pas de disposition spécifiquerelative à l’incorporation et à la mise enœuvre des conventions internationales dansleur système juridique interne.

Part II : Dynamiques civiques en

faveur de l’égalité des genres

dans la région MENA

Les dynamiques civiques

Le mouvement pour les droits des femmesdans la région MENAA l’origine, les mouvements de défense desdroits des femmes ont été liés auxmouvements de libération nationale.Aujourd’hui encore, il existe un lien étroitentre le mouvement «internationaliste» desdroits des femmes et le mouvement en faveurdes droits de l’Homme et de la démocratie.

Le mouvement des femmes dans la régioncomprend également un certain nombre degroupes islamistes, ou ce que l’on désigne leplus souvent par le terme «islamismeféminin». Ces groupes islamistes prétendentque la définition de l’égalité, telle qu’ellefigure dans la Déclaration universelle desdroits de l’Homme, n’est pas «juste» car ellene respecte pas les différences innées entrehommes et femmes, ni leurs naturescomplémentaires et les rôles respectifs qui endécoulent. Toutefois, en préférant la notiond’équité à celle d’égalité, ces groupescherchent à maintenir une structure depouvoir opprimante pour les femmes etn’abordent pas les véritables racines del’inégalité entre les genres.

Les réseaux pour la promotion des droitsdes femmes dans la région MENALes organisations de femmes «international-istes» sont actives aussi bien au Maghreb qu’auMoyen-Orient. Au début des années 1990,elles ont entrepris de mettre en place desréseaux régionaux, comme le «Collectif 95Maghreb Egalité», Aisha, le Tribunal desfemmes arabes, le réseau Maghreb-Machrekpour l’information et l’éducation sur lesgenres, SIGI, ainsi que d’autres réseaux nonofficiels. Ces réseaux sont associés à diversesactivités, comme les campagnes sur des thèmesspécifiques tels que les crimes d’honneur ou laviolence envers les femmes ou, plusgénéralement, aident à informer les femmesde l’existence de leurs droits et leur procurentune aide financière ainsi que des conseils.

7

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Recontre entre un jeune couple.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 7

Page 12: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Réactions des États et des acteurs non-

étatiques à ces dynamiques en faveur

de l’égalité des genres

Réaction des ÉtatsLes États de la région MENA essaient delimiter, d’entraver ou de contrôlerentièrement les initiatives civiques, grâce à lalégislation sur les libertés publiques etassociatives. Ainsi, les organisations en Syrie,au Liban et en Égypte ont besoin d’uneautorisation gouvernementale afin d’êtreenregistrées et de pouvoir fonctionnerofficiellement. Les gouvernements ontégalement recours à des commissions, descomités ou des organisations para-officielles,qui se présentent comme des ONG ou desréseaux autonomes.

Réaction des acteurs non-étatiquesDivers groupes islamistes de la régions’opposent violemment au mouvement desdroits des femmes. De tels groupesprétendent que les instruments relatifs auxdroits de l’Homme sont les instruments d’unvaste complot contre l’islam et les pays arabeset s’opposent donc aux organisations dedéfense des droits des femmes qui invoquentl’universalité des droits de l’Homme et desarguments tirés des instruments juridiquesinternationaux.

Parce que les islamistes se positionnent d’unpoint de vue culturel et religieux «arabo-musulman», leur argumentation est perçueau niveau international et régional commeétant plus légitime et plus en phase avec lestraditions et cultures des pays MENA. De cefait, alors que certaines activistes féministess’efforcent de faire mieux connaître lesinstruments internationaux relatifs aux droitsdes femmes et font du lobby afin d’obtenir lalevée des réserves faites à la ConventionCEDAW, d’autres ont recours à uneinterprétation progressiste et à une lecturehistorique des textes religieux, également àl’intérieur du cadre arabo-musulman, dans lebut de contrer les groupes islamistes.

Part III : Droits des femmes dans le

processus du Partenariat

euro-méditerranéen

Bien que les femmes, surtout celles de larégion MENA, aient été absentes duprocessus de décision qui a débouché sur

l’établissement des instruments politiques,institutionnels et financiers du PEM en 1995,plusieurs organisations de femmes perçoiventquand même le PEM comme le moyend’ouvrir leurs sociétés aux valeurs universellesconsacrant les droits des femmes.

La mise en œuvre du PEM néglige les

droits des femmes

Ni la Déclaration de Barcelone, ni les accordsd’association qui régissent le PEM, nereconnaissent de façon explicite l’indivisibilitédes droits des femmes, des droits de l’Hommeet de la démocratie. La seule référence auxfemmes dans la Déclaration de Barcelonefigure au chapitre II, relatif à la coopérationéconomique et financière. Les accordsd’association comprennent une clausegénérale relative aux droits de l’Homme, maisles femmes n’y sont pas mentionnées defaçon spécifique.

Toutefois, tous les États parties au PEM ontl’obligation positive d’intégrer les genresdans tous les volets de ce dernier,conformément à la plate-forme d’action dePékin, à diverses politiques et engagementsde l’UE envers les droits des femmes, et auxengagements juridiques fondamentauxenvers la Charte des Nations unies, laDéclaration universelle des droits del’Homme, la Convention CEDAW et d’autresinstruments internationaux. En n’accordantpas une place suffisante à l’intégration desgenres au sein du PEM, les États partenairesviolent donc les obligations auxquelles ils ontsouscrits.

Quelques initiatives en faveur des droits

des femmes dans le PEM

Les droits des femmes ont été confinés auxsphères sociale et économique du PEM.Toutefois, des résolutions du Parlementeuropéen, et particulièrement le rapport defévrier 2002 sur la politique de l’Unioneuropéenne vis-à-vis des pays méditerranéenspar rapport à la promotion des droits desfemmes et l’égalité des chances dans ces pays,ont insisté sur la question des droitsfondamentaux des femmes et sur ladiscrimination qu’elles subissent dans larégion MENA. De plus, en 2001, la présidencebelge a mis l’accent sur les droits des femmesdans le PEM, en invitant la Commission

8

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 8

Page 13: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

européenne à lancer une évaluation desprogrammes du PEM dans une perspectived’égalité des genres, afin de déterminer dansquelle mesure ils incluent des projets relatifsaux droits des femmes et ont un effet sur lesconditions de vie de ces dernières. Le premierprogramme régional en faveur de lapromotion du rôle des femmes dans la vieéconomique a été adopté en 2001, lors de laréunion ministérielle euro-méditerranéenneet la Commission européenne devrait lemettre en œuvre très prochainement. Parailleurs, une référence à l’égalité des chancesa été inscrite pour la première fois à l’ordredu jour du Comité de l’association UE-Marocen mars 2002.

Bilan de l’intégration des genres

dans le PEM

Les institutions européennes justifient lemanque d’attention du PEM pour les droitsdes femmes et l’absence d’intégration desgenres par l’idée selon laquelle les droits desfemmes dans la région MENA constitueraientune affaire culturelle et religieuse, relevantdonc de l’ordre interne et devant être traitéeau plan national. Toutefois, en invoquant descontraintes culturelles et religieuses, lesinstances décisionnelles cherchent desprétextes pour justifier l’insuffisance desressources allouées aux politiques et auxprogrammes d’incorporation des genres del’UE et le fait que des intérêts politiques etéconomiques l’emportent sur lesengagements en faveur des droits desfemmes.

Manque d’attention pour les dynamiquesdes genres dans la région MENAIl est nécessaire d’incorporer et d’accroître ausein des institutions européennes laconnaissance relative à la vie des femmes etaux dynamiques sociales qui sont à l’originede l’inégalité entre les genres dans la régionMENA. Très peu d’études et de statistiquessont disponibles dans le cadre du PEM sur laquestion des femmes dans la région. Aucontraire, les stéréotypes qui voient dans lesfemmes du sud de la Méditerranée des êtresuniformes et résignées à leur sort continuentà persister. Les capacités et l’expertise desfemmes du Sud ne sont pas étudiées etrestent mal connues. Il en résulte que lesfemmes participent rarement au

développement et au suivi des programmeset projets du Partenariat.

Des études qualitatives et quantitatives surles femmes et le genre dans la région sontnécessaires afin de faire progresserl’incorporation des genres dans le PEM.

Le financement par l’UE des projets relatifsaux droits des femmes dans la régionMENALa quasi-absence de référence aux femmesdans la Déclaration de Barcelone et dans lesaccords d’association fait que les projetsrelatifs aux droits des femmes n’ont pas étéfinancés de façon satisfaisante à travers lesprogrammes du MEDA. L’engagement deprincipe en faveur de l’incorporation desgenres dans toutes les politiques du PEM,ainsi que dans tous ses programmes et projets- à la fois au niveau euro-méditerranéenbilatéral et multilatéral – est cependant unpoint positif. De plus, MEDA I et MEDA II onttous deux alloué des fonds à des projetsspécifiques de promotion des femmes. Lesprojets soumis à financement par l’Initiativeeuropéenne pour la démocratie et les droitsde l’Homme (IEDDH), conformément à lapolitique d’ensemble de l’UE en faveur del’incorporation du genre dans tous lesprogrammes de l’UE, y compris le PEM, ontété invités à indiquer dans quelle mesure ilsintégraient les femmes. En fin de compte,

9

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Des femmes de l’equipe de natation d’Alexandriese préparent pour une competition.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 9

Page 14: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

toutefois, les projets de l’UE ont toujours étélimités aux sphères sociale et économique et,même alors, le financement n’a pas toujoursété garanti.

À ce jour, les programmes MEDA n’ont pasfinancé ni réussi à mettre en œuvre un seulprogramme régional fondé exclusivement surles droits des femmes.

De plus, les différentes contraintes qui pèsentsur les femmes font que les organisations dedéfense des droits des femmes –particulièrement celles du Sud – ne disposentgénéralement pas d’informations suffisantessur les procédures et structures de l’UE, ce quirend encore plus difficile l’accès aufinancement.

Il est nécessaire de mettre en place desprogrammes visant spécifiquement lesfemmes, car ceux présentés comme étantindifférents aux genres ne profiteront pasautomatiquement ni de façon équitable auxfemmes autant qu’aux hommes. En effet, lesfemmes n’ont généralement pas la mêmecapacité à saisir de telles opportunités, enraison des discriminations dont ellessouffrent. L’intégration des genres et l’actionaffirmative devraient donc être utiliséescomme des stratégies complémentaires, afinde garantir que femmes et hommesparviennent à réaliser la totalité de leurpotentiel, en utilisant les différences entregenres comme un indicateur principal dusuccès de la politique.

Des opportunités adéquates de financementdevraient être offertes pour des projetsnationaux et régionaux de défense des droitsdes femmes dans la région MENA, dans le butde lutter contre la discrimination et laviolence envers les femmes dans tous lesdomaines, et pas seulement dans lesdomaines social et économique.

Les initiatives de la société civile en

faveur des droits des femmes dans la

région MENA

Le processus de Barcelone a ouvert un débatsur l’économie mais aussi sur la citoyenneté,la démocratie et les droits de l’Homme dansla région. Différents réseaux de citoyens ontvu le jour depuis lors et certains d’entre eux -y compris le Réseau euro-méditerranéen desdroits de l’Homme et l’Instituto per ilMediterraneo - ont bénéficié du programme

MEDA-Démocratie et d’autres lignesbudgétaires du PEM.

Conclusions

Les femmes dans la région MENA font face àdes discriminations qui affectent presquechaque domaine de leur vie. Au mêmemoment, plusieurs organisations ou réseauxde femmes sont actifs dans la région. Alorsque le processus de Barcelone doit encoreprouver son rôle moteur pour la promotiondes droits des femmes dans la région, desdéveloppements positifs, particulièrement cesdernières années, ont été enregistrés. C’est lecas de l’approche par l’intégration des genreset de l’établissement du programme sur lesfemmes dans le développement économique.Mais il reste encore aux États partenaires duPEM et à l’UE à mettre en œuvre leursengagements en faveur de l’intégration desgenres. Cette approche doit être introduitedans les trois volets du PEM, c’est-à-dire lacoopération politique et de sécurité, leséchanges économiques et financiers, ainsi queles échanges sociaux, culturels et humains.L’analyse par genre devrait guider toutes lesactivités de développement, ainsi que tous lesprogrammes et projets à tous les niveaux, etun mécanisme de suivi devrait être établi afind’évaluer les résultats de la mise en œuvre despolitiques sensibles aux genres dans le PEM.

Malgré ces faiblesses, le processus deBarcelone a fourni un cadre permettantd’aborder les droits des femmes dans larégion euro-méditerranéenne. Tous les Étatspartenaires du PEM doivent respecter leursengagements en faveur des droits desfemmes et de l’intégration des genres, demême qu’ils doivent soutenir fermement lalutte contre la discrimination et contre laviolence envers les femmes dans le MENA.

10

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 10

Page 15: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

11

Recommandations générales

1. Tous les États participants au processus deBarcelone (ci-après États partenaires)devraient lever leurs réserves à laConvention sur l’élimination de toutes lesformes de discrimination à l’égard desfemmes (CEDAW) et ratifier le protocoleadditionnel à cette convention.

2. L’UE et les États partenaires devraientcombattre toutes les formes dediscrimination à l’égard des femmes dansla région MENA, dans le cadre du respectdes droits de l’Homme et de ladémocratisation, respecter l’universalitédes droits de l’Homme et cesser de traiterles droits des femmes comme étantessentiellement une question de «normesreligieuses et de traditions culturelles».

3. L’UE et les États partenaires devraientintégrer la question des femmes dansleurs politiques, programmes et projetsdans la région MENA et renforcerl’expertise sur ce thème.

4. L’intégration des genres devrait fairepartie de toutes les politiques ainsi quede tous les programmes et projets de l’UEet du PEM. Parallèlement, desprogrammes d’action affirmative et desprogrammes spécifiques à destination desfemmes devraient être mis en place.

Les mécanismes des droits de

l’homme et le dialogue politique

5. L’UE et ses États partenaires devraientintégrer les droits des femmes dans leursdialogues relatifs aux droits de l’Homme(lors des conférences ministériellesrégionales, aux Conseils de l’associationet aux réunions du Comité del’association), en se fondant sur la clausedroits de l’Homme de l’article 2 desaccords d’association.

6. Un mécanisme transparent de supervisionde la clause droits de l’Homme, prenanten compte les droits des femmes, devrait

être mis en place. À cet égard, l’UE et lesÉtats partenaires devraient définir desindicateurs et critères concrets etspécifiques sur les droits de l’Homme et laquestion des genres, et devraientprocéder à leur examen aux niveauxpolitiques multilatéral et bilatéral.

7. Ce dialogue politique devrait êtreaccompagné de consultations régulièresavec la société civile à propos de la miseen œuvre et de l’évaluation des accordsd’association, dans une perspective degenres qui associerait des représentantsd’organisations compétentes etindépendantes de défense des droits desfemmes.

8. Des groupes de travail sur les droits del’Homme permettant de faciliter ledialogue ainsi que les mécanismes desupervision devraient être mis en placedans le cadre de chaque accordd’association. Ces groupes de travaildevraient être composés de représentantsnommés par l’Union européenne et lesÉtats partenaires. Ils devraient consulterla société civile et tenir compte de sesvues dans leurs activités.

9. La Commission européenne devraitétablir un groupe de travail sur les droitsdes femmes dans la région euro-méditerranéenne (v. infra).

10. La Commission européenne estégalement invitée à intégrer la dimensiongenre dans un chapitre distinct de sonrapport annuel MEDA.

11. La future Assemblée euro-parlementaire,dont la création est prévue pour début2004, devrait établir des mécanismes enfaveur de la promotion des droits desfemmes dans la région MENA, et devraitmettre en place un comité spécial relatifaux droits de l’Homme, dont la tâcheserait d’encourager à l’intégration desdroits des femmes dans le PEM.

Recommandations

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 11

Page 16: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Intégration des genres et action

affirmative

12. Le PEM devrait intégrer les genres danstous ses dialogues politiques, sespolitiques, ses programmes et ses projets,du stade de la planification à celui del’évaluation, et devrait mettre en placedes mécanismes de suivi afin desuperviser les progrès des droits desfemmes.

13. De plus, l’UE devrait mettre en place desprogrammes d’action affirmative àl’intérieur du PEM, afin d’accroître laparticipation des femmes dans tous lesdomaines d’activité et de les soutenir pardes ressources financières et techniquesappropriées.

14. La Commission européenne devraitconsacrer une ligne de budgethorizontale dans les programmes MEDA,ainsi que dans l’IEDDH (Initiativeeuropéenne pour la démocratie et lesdroits de l’Homme), à la prévention de ladiscrimination et de la violence à l’égarddes femmes dans la région MENA.

15. Les institutions européennes devraientfaire en sorte qu’existe un niveausuffisant d’expertise sur la question desgenres au sein de leur personnel auniveau central, mais aussi au sein de leursreprésentations et délégations dans lesÉtats partenaires. Des spécialistes de laquestion des genres devraient êtrenommés au niveau des politiques, dansles services techniques et au niveau de lamise en œuvre. De plus, un nombreimportant de sessions de formation surles droits des femmes devrait êtreorganisé, afin de faciliter l’intégration.

Les programmes MEDA

16. La Commission européenne devraitmettre en place un processus d’évaluationde l’impact des politiques du PEM, ycompris des programmes MEDA sur lesdroits de l’Homme qui incluentsystématiquement les genres. Un projetpilote pourrait être imaginé pour lancerune telle évaluation.

17. L’UE devrait définir une politique globaleau niveau de la programmation et desprojets, afin de protéger et de

promouvoir les droits des femmes dans larégion MENA. Cela impliquerait :

- d’encourager et soutenir la révisiondes politiques actuelles et du cadrejuridique, afin de les sensibiliser auxquestions des genres, et d’éliminer lesobstacles qui limitent la participationdes femmes à la vie publique ;

- d’intégrer les genres dans les troisvolets du PEM, afin d’inclure les droitsdes femmes et l’égalité des chancesdans tous les domaines d’activité, etpas seulement dans ceuxtraditionnellement considérés commeconcernant les femmes ;

- d’insérer une description de l’état de laquestion des genres au niveaunational, ainsi que des stratégiesrégionales y relatives, dans les cadresstratégiques et programmes indicatifsnationaux et régionaux ;

- de considérer les baisses de disparitésentre les genres comme indicateurs dusuccès des réformes des lois et despratiques, dans les politiques et straté-gies de développement nationales ;

- de reconnaître l’importance des genresdans le fonctionnement de l’économie,et d’établir ainsi un lien entre lesnivaux macro et micro des politiques,afin de s’assurer que les disparitésentre genres seront dûment prises enconsidération lors de la mise en œuvreet de l’évaluation de tous lesprogrammes MEDA ;

- de promouvoir la participation desfemmes à la vie publique et dechercher à améliorer leurs capacités entermes de productivité et de gains ;

- d’encourager la participation d’unnombre plus grand de femmes auxnégociations et à la mise en œuvre duPEM aux niveaux multilatéral etbilatéral.

18. Le programme régional de la Commissioneuropéenne de promotion du rôle desfemmes dans la vie économique est unpremier pas positif et devrait êtreconsidéré comme un projet pilote, àpartir duquel d’autres programmesrelatifs aux droits des femmes pourraientêtre développés, en consultation avec les

12

Women’s Rights The Middle East and North Africa

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 12

Page 17: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

13

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

organisations des droits des femmes. Leprogramme régional devrait être mis enœuvre sans délai et devrait être consolidépar les mesures suivantes :

a) consultation des représentantscompétents de la société civile - ycompris les ONG féministes - à tous lesstades du projet, de la programmationau suivi en passant par la mise enœuvre et l’évaluation ;

b) allocation de ressources supplémen-taires proportionnelles aux moyens etobjectifs ;

c) définition souple des cahiers descharges, afin de permettre suffisam-ment de flexibilité et une adaptationdes activités aux besoins des acteurslocaux ;

d) mise en place, dès le départ, demécanismes de suivi et d’évaluation,de façon à s’assurer que les objectifsfixés seront atteints.

Sur la société civile

19. La Commission européenne devraitrenforcer les procédures d’information etde consultation des ONG sur la dimensiondroits de l’Homme du PEM, afin derenforcer le pluralisme dans les Étatspartenaires. Des quotas devraient êtreréservés à la participation d’organisationsde défense des droits des femmes dansces consultations entre l’UE et les ONG. Laconsultation régionale lancée parl’Initiative européenne pour ladémocratie et les droits de l’Homme(IEDDH) pourrait servir d’exemple, àcondition qu’elle soit institutionnaliséesur des bases régulières.

20. Les programmes MEDA, ainsi quel’IEDDH, devraient renforcer les synergiessur les questions relatives à la sociétécivile et aux droits des femmes.

21. L’UE devrait réserver des lignesbudgétaires spécifiques dans lesprogrammes MEDA et de l’IEDDH,destinées à financer les réseauxrégionaux et les organisations féministeset à engager des actions sur les droits desfemmes, tant dans la région MENAqu’entre les deux rives de laMéditerranée.

22. L’UE devrait offrir davantage depossibilités de financement auxorganisations et réseaux de défense desdroits des femmes et les affecter de façonà ce qu’ils correspondent à leurs besoins,en tenant compte des différences decapacités.

23. L’UE devrait se montrer ferme avec lesÉtats partenaires à propos du droit desassociations autonomes à bénéficier definancements, y compris dans le cadre duMEDA, afin de renforcer la capacité et lesactivités de la société civile, en tant quecomposante d’une société démocratique.

Sur le groupe de travail

24. La Commission européenne devraitétablir un groupe de travail spécialisé surles droits des femmes dans la régionméditerranéenne, afin de faciliter la miseen œuvre des recommandations. Cegroupe de travail devrait être composé dereprésentants de la Commissioneuropéenne, d’autres institutionseuropéennes, ainsi que d’experts de lasociété civile et du monde universitaire. Ilaura pour mission de veiller à ce que :

a) des études sur des thèmes spécifiquesrelatifs aux droits des femmes dans larégion MENA soient entreprises et queles progrès enregistrés dans cedomaine soient évalués ;

b) l’UE et le PEM identifient desprogrammes spécifiques aux femmeset que de tels programmes soient misen place et exécutés ;

c) l’Union européenne et les Étatspartenaires intègrent les genres à tousles niveaux du dialogue politique etdans les programmes MEDA, c’est-à-dire lors de la programmation, de lamise en œuvre et de l’évaluation ;

d) le contact soit établi avec lesgouvernements, la société civile et lesONG de défense des droits desfemmes, afin de promouvoirl’établissement d’une consultationrégulière.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 13

Page 18: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Depuis 1995, date de l’adoption de laDéclaration de Barcelone et de la naissancedu Partenariat euro-méditerranéen, unnouvel espoir est né, celui de rapprocher lesdeux rives de la Méditerranée, pourtant déjàsi proches, et de créer un espace de partage,d’échange et de prospérité pour les hommeset les femmes.

Alors que l’humanité n’a jamais accumuléautant de savoir et de richesses, les écartsentre les pays riches de la rive nord de laMéditerranée et leurs voisins du sud necessent de se creuser contribuant, ainsi, àexacerber les tensions largement entretenuespar des pouvoirs non démocratiques quiinstrumentalisent les phobies et lesintolérances pour mieux contrôler lesdifférents acteurs sociaux et politiques. Enraison des discriminations et de la violencequ’elles subissent de façon généralisée, lesfemmes sont les premières victimes desviolations des droits de l’Homme, du manquede démocratie et du sous-développementdans la région.

Dans ce contexte, ce rapport a pour objectifde contribuer au débat sur la question desdroits des femmes au Moyen-Orient et enAfrique du nord (MENA), ainsi que dans lePartenariat euro-méditerranéen.

Il comporte trois parties. La première,intitulée «Violations des droits des femmesdans la région MENA», décrit les lois etpratiques communes, fondement desviolations des droits des femmes dans lesdifférents aspects de leur vie.

La deuxième partie, intitulée «Dynamiquesciviques en faveur de l’égalité des genresdans la région MENA», souligne ledynamisme des mouvements de défense desfemmes à la fois au Maghreb et au Moyen-Orient, et décrit les défis auxquels ils sontconfrontés de la part d’acteurs étatiques etnon-étatiques.

La troisième partie, enfin, est consacrée aux«Droits des femmes dans le processus duPartenariat euro-méditerranéen». Elle évalue

le degré d’intégration des droits des femmeset des genres dans le PEM et recommandeque l’UE et les États partenaires incorporentles genres dans les trois volets du PEM,conformément à la politique de l’UE et auxnormes juridiques internationales.

Ce rapport vise à constituer un outild’information à l’attention des acteursofficiels et des activistes de la société civile del’ensemble des pays partenaires, sur lasituation des femmes de la région et sur lesraisons pour lesquelles leurs droits devraientêtre pris en compte dans le Partenariat euro-méditerranéen. Il expose également lesétapes qui devraient être suivies en vued’améliorer le statut des femmes dans larégion MENA et montre comment le PEMpourrait contribuer à renforcer l’émergencede solidarités naissantes et déjà prometteusesentre les peuples, et plus particulièrement lesfemmes, des deux rives de la Méditerranée.

Femmes protestant contre le décision dugovernment marocain en 2000 de ne pas adopterle Plan d’action pour l’intégration des femmesdans le développement (ADFM).

Introduction

14

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 14

Page 19: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

1.1 Discrimination envers les

femmes dans les lois du statut

personnel5

Alors que différentes religions sontpratiquées dans la région MENA6,essentiellement le christianisme, l’islam et lejudaïsme, les lois de la famille des différentspays de la région, connues aussi sous le nomde codes du statut personnel (CSP), sontinspirées du droit traditionnel de la famillelequel, à son tour, dérive de divers textesreligieux et est influencé par l’interprétationhumaine. Par conséquent, alors que les autresbranches du droit des pays de la région MENAsont généralement séculaires, la religion etl’interprétation humaine des textes religieuxconstituent la principale source decodification du statut juridique des femmes.

Les CSP, bien qu’ils ne concernent «que» ledroit de la famille, reflètent généralement auplan juridique les rôles et les statutsparticuliers que la société impose aux

femmes. Ils régissent ce qui est considérécomme appartenant par essence à la sphèreprivée – le mariage, le divorce, les pensionsalimentaires, la garde des enfants etl’héritage7 – mais ont également des effetssur la vie publique des femmes, enfonctionnant comme mécanismes de contrôlede leurs activités économiques, politiques,sociales, civiques et culturelles8.

En dépit de la diversité des formes qu’ellepeut prendre à travers la région, ladiscrimination envers les femmes dans les CSPreste fondée sur l’idée de tutelle sur lesfemmes : les femmes doivent être sous latutelle des époux, des pères ou d’autresmembres mâles de leurs familles ou tribus, etleurs «droits» civils sont placés sous lecontrôle de ces tuteurs. Cette hiérarchie desdroits, qui donne la priorité aux hommes surles femmes, ainsi que ses effets sur tous lesaspects de la vie de ces dernières, constituentune violation flagrante de leurs droits etlibertés. Analphabétisme, faible participation

15

Part IViolations des droits des femmes

dans la région MENA

Genre et indicateurs de développement humain dans la région MENA

Indicateur sexo-spécifique Différence deClassement du développement classement selonselon l’IDH humain ISDH l’IDH et l’ISDH

Classement Valeur

22 – Israël 22 0,891 075 – Liban 69 0,739 -485 – Turquie 71 0,734 197 – Tunisie 81 0,709 099 – Jordanie 84 0,701 -1

106 – Algérie 90 0,679 -2108 – Syrie 92 0,669 -2115 – Égypte 99 0,628 -2123 – Maroc 102 0,585 0

Source : Rapport mondial sur le développement humain, PNUD, 2002.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 15

Page 20: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

économique et politique, implication quasi-inexistante dans les affaires de la cité, libertéde mouvement entravée et violencesquotidiennes, sont autant de facettes du vécude millions de femmes vivant sous les CSP despays du MENA.

Cette citoyenneté de seconde zone a desimpacts encore plus négatifs sur les femmesles plus pauvres, comme les rurales ou cellesqui appartiennent à des minorités ou à despopulations vivant sous occupation, commeles femmes palestiniennes. Par essence, lesCSP peuvent même avoir pour effet dedéléguer aux proches masculins des femmes,directement ou indirectement, le droit de vieou de mort sur leurs parentes9.

Le mariage

Les lois du statut personnel de l’ensemble despays de la région MENA autorisent le mariageprécoce pour les femmes alors que, pour leshommes, l’âge minimum du mariage est fixépresque partout à dix-huit ans10. Le juge peutdécider d’autoriser le mariage de la jeunefille avant même l’âge légal au mariage(treize ans en Syrie, quinze ans au Maroc), s’ilcraint pour ses «mœurs» ou sa «réputation».

Ce principe a été maintenu, en dépit de laratification par ces pays de la Convention surles droits de l’enfant et malgré les demandesincessantes du mouvement des femmes, quiconsidère que le consentement au mariage ne

peut être réel lorsque la fillette est mineure11.Le mariage précoce est, en réalité, une formedéguisée de mariage forcé et une atteinte auxdroits humains de ces fillettes, ainsi qu’unobstacle majeur à leur éducation et un dangerpour leur santé mentale et physique12.

L’obligation de tutelle matrimoniale pour lafemme (wilaya) est une autre dispositiondiscriminatoire largement reprise dans les CSPdes pays de la région MENA. Elle repose sur leprincipe selon lequel la femme ne peutconclure elle-même son mariage13, ni celuid’une autre femme (sa pupille, si elle esttutrice testamentaire), et doit se fairereprésenter par un homme pour qu’ilcontracte mariage en son nom ou en celui desa pupille. Les tuteurs matrimoniaux peuventêtre choisis au sein de la parentèle masculinede la femme, de proche en proche, àcondition qu’ils soient majeurs et sainsd’esprit. Dans la région, les femmesmusulmanes ne peuvent épouser un non-musulman, alors que cet empêchement nen’applique pas aux hommes.

À l’exception de la Tunisie et de la Turquie, lapolygamie est autorisée par les lois de lafamille de ces pays14, alors qu’elle devient unfait social rare dans la grande majorité despays de la région. L’autorisation de lapolygamie (quatre épouses à la fois) faitpeser une menace sur les femmes et, surtout,porte atteinte à leur dignité. Elle les metégalement dans la situation vulnérable de

16

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

La situation particulière de la TurquieLes femmes turques ont obtenu l’égalité dans le divorce, l’héritage et la garde desenfants en 1926, avec l’introduction d’un code civil largement inspiré du code civilsuisse. La polygamie a également été supprimée. Toutefois, le mari était toujours lechef de la famille et le tuteur légal des enfants, et c’était à lui de prendre les décisionsles plus importantes. Certaines discriminations à l’encontre des femmes ont persistédans les lois et surtout dans les pratiques.

A titre d’exemple, jusqu’en 1992, les femmes avaient besoin de l’autorisation dumari pour travailler à l’extérieur de la maison. Les crimes d’honneur, les mariagesprécoces et forcés, le viol conjugal, le contrôle de la virginité des femmes, la coercitionsexuelle, la violence et l’imposition d’une tenue vestimentaire réglementaire sontautant d’atteintes et de violations des droits des femmes en Turquie.

Grâce aux mobilisations et aux pressions des organisations de femmes, un nouveaucode civil a été promulgué en novembre 2001. Désormais, la famille est considéréecomme une union basée sur un partenariat égal entre le mari et la femme. Parailleurs, de nouveaux droits pour les femmes ont été reconnus, notamment auniveau de la relation aux enfants, du domicile conjugal et de la propriété des biens.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 16

Page 21: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

n’avoir le choix qu’entre accepter leremariage de leur époux ou devoir divorcer.

Partout, le chef de famille est le mari, ycompris en Tunisie, pays qui dispose pourtant,avec la Turquie, des législations familiales lesplus libérales de la région. L’article 23 de laMajella tunisienne (CSP) stipule que le pèreest le chef de famille. En Jordanie, l’article 34du code de la famille prévoit qu’en l’absencedu père décédé, absent ou ayant renoncé à sanationalité alors que sa(ses) femme(s) et sesenfants sont toujours des nationaux, le chefde famille pourrait être la première épouseou l’enfant le plus âgé.

Le devoir d’entretien de l’époux en échangede l’obligation d’obéissance de sa femmeconstituent aujourd’hui les principesfondateurs de la discrimination entre leshommes et les femmes dans la région MENA.À quelques exceptions près15, la femme doitobéissance à son mari et respect à sa famille.En vertu de cette disposition, le mari peutl’empêcher de visiter sa parenté à degré nonprohibé et peut lui interdire de travailler àl’extérieur ou tout simplement de sortir. En

Syrie, (articles 73 et 74 du CSP), et en Jordanie(article 68 du CSP)16, la femme désobéissanteou qui travaille à l’extérieur sans lapermission de son mari, perd son droit àl’entretien (nafaqa).

Aux maris est accordé le droit de répudiation(talaq, rupture unilatérale du lienmatrimonial), sans qu’ils aient à motiver leurdécision, alors que les femmes ne peuventjamais divorcer seules. Elles doivent en effetaller devant les tribunaux (tatliq) ou donnerune compensation à leur époux pour qu’ilsconsentent au divorce (khul‘)17.

Le principe du khul‘ - donner la possibilité àla femme d’acheter son mari pour qu’ilconsente au divorce - est clair, même si desvariations ont été introduites dans diverspays. Il n’est généralement obtenu qu’avec leconsentement de l’époux, alors que le droitmusulman prévoyait, à l’origine, que cetteautorisation n’était pas obligatoire. C’est unmoyen humiliant pour la femme, dans lamesure où elle est censée acheter sa liberté.Les avantages de cette forme de dissolutiondu mariage sont qu’elle peut se révéler plus

17

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

La Tunisie, un pays à part dans le monde arabe1956 : promulgation du code du statut personnel, qui abolit la polygamie, la

répudiation, l’institution du tuteur matrimonial, la contrainte matrimonialeet instaure le libre et plein consentement des futurs époux et le divorcejudiciaire.

1958 : reconnaissance de l’adoption plénière (avec filiation).

1959 : institution du droit de succession en faveur des petits-enfants, y compris lespetites filles de la lignée paternelle, en leur donnant le droit d’évincer de lasuccession de leur père ou de leur grand-père certains successeurscollatéraux (les oncles). Reconnaissance à la veuve du droit de succéder àson époux. Augmentation de la part successorale de la veuve sans enfantsen cas d’absence d’autres héritiers.

1966 : modification de l’ordre des gardiens bénéficiaires du droit de garde desenfants et introduction de la notion d’intérêt de l’enfant dans l’attributionde la garde par les juges.

1981 : attribution de la tutelle légale à la mère gardienne en cas de décès du père.

1993 : création d’un fonds de garantie de la pension alimentaire et de la rente dedivorce et abolition du devoir d’obéissance.

1998 : régime facultatif de la communauté des biens entre époux. Introduction desactions en recherche de paternité pour les enfants abandonnés ou defiliation inconnue.

Source : Second rapport périodique de la Tunisie au Comité CEDAW, 1995.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 17

Page 22: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

rapide que la procédure de divorce judiciaire ;plus libératrice pour les femmes, qui peuventdemander et obtenir le divorce, et moinslourde pour les systèmes judiciaires de larégion, qui souffrent de l’accumulation desdemandes de divorce non traitées,introduites par les femmes. C’est cette mêmeprocédure, révisée récemment de façonpartielle en Égypte18 et en Jordanie19, aprèsplusieurs mois de polémiques entredéfenseurs et opposants, qui est présentéecomme un grand acquis pour les femmes.

Les CSP de la région ne prévoient absolumentrien pour les femmes divorcées, qui n’ontdroit à l’entretien que durant la courtepériode de viduité (‘idda : retraite légale de lafemme après le divorce et après le veuvage).Ainsi, une femme au foyer mariée durant desdécennies peut se retrouver du jour aulendemain répudiée et totalementdépourvue de ressources pour vivre. Parailleurs, la loi ne prévoit rien non plus pourles couples en instance de divorce. Tant que lafemme n’a pas divorcé, elle appartient à sonmari qui continue à avoir tous les droits surelle. La lenteur de la procédure de divorcejudiciaire fait que les femmes peuvent vivredans cette situation d’incertitude durant desannées, alors que l’autorisation de lapolygamie libère l’homme qui peut, enattendant son divorce, prendre une deuxièmeépouse. De plus, l’absence de sanctionspermet au mari d’échapper aux raresobligations découlant de ses privilèges (ex.abandon de famille et non-paiement de lapension alimentaire aux enfants).

Le statut de mère, si encensé et valorisé dansla culture de l’ensemble des pays de la région,n’est pas exempt de cette discrimination. La

mère est considérée, malgré les légèresmodifications intervenues dans leslégislations de certains pays (Turquie etTunisie), comme la nourrice de ses enfants etjamais comme leur tutrice légale, sauf en casde décès du père ou dans d’autres cas trèsrestrictifs20. En tant que gardienne desenfants, elle n’a aucun droit de regard sur lesaffaires les concernant, c’est toujours le pèrequi en est le tuteur. Dans l’ensemble des paysarabes du MENA, les femmes divorcées etgardiennes de leurs enfants mineurs n’ontpas le droit de se remarier, sous peine de sevoir retirer la garde de leurs enfants21, alorsque le remariage du père n’entraîne pas lesmêmes effets. Cette dernière dispositionmontre bien que les CSP considèrent lesenfants comme les descendants du seul pèreet s’assurent qu’après le divorce, les enfantsresteront dans la parentèle masculine.

Par ailleurs, la mère divorcée et gardienned’enfants mineurs n’a pas le droit de garderle domicile conjugal, sauf très raresexceptions, alors que la pauvreté, la faibleparticipation des femmes à l’activitérémunérée et la crise du logementcontribuent à amplifier les conséquencessociales dramatiques de ce principe22.

Cette inégalité est renforcée par la législationsur l’héritage, qui adopte partout la règle del’inégalité entre hommes et femmes. Leprincipe fondateur est qu’au même degré deparenté par rapport au défunt, les hommeshéritent du double de la part des femmes23.Le principe du taasib est une autre dispositioninégalitaire, car il prévoit qu’en l’absence dedescendant mâle du défunt, ses collatérauxentrent en concurrence dans la successionavec les descendantes de sexe féminin24. Pour

18

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Les différentes formes de rupture du lienmatrimonial dans le droit musulman

Talak (répudiation) : dissolution unilatérale du mariage par le mari, ou par unedécision de justice ou par décision de l’épouse si le mari lui a permis de le stipulerdans son contrat de mariage.

Tatlik : divorce judiciaire à l’initiative de la femme. Ne peut avoir lieu que devantun tribunal et dans des cas bien définis et limités en ce qui concerne exclusivementles femmes.

Khul‘ : divorce moyennant compensation. Droit attribué à l’épouse d’obtenir ledivorce moyennant compensation financière accordée au mari.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 18

Page 23: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

cette raison, les familles préfèrent lesgarçons, qui permettent de sauvegarder lepatrimoine familial. Par ailleurs, dansl’ensemble des pays de la région, la femmenon-musulmane n’a pas le droit d’hériter deson époux musulman.

1.2 Discrimination envers les

femmes dans les lois pénales, les

lois sur la nationalité et dans

d’autres textes

Après les indépendances des pays du MENA,le législateur moderne a renforcé lesdispositions discriminatoires des CSP, enintroduisant dans les autres textes de lois,d’inspiration séculaire (code du travail, codepénal, code du commerce et code de lanationalité), des dispositions discriminatoiresvisant à restreindre aussi bien le principe del’égalité que celui de la liberté des femmes.

Code du travailC’est le mari, en tant que chef de famille, quia le droit de choisir le domicile conjugal25. Ledroit de la femme à sortir pour travailler,pourtant garanti par les constitutions de ces

pays, est continuellement menacé. L’activitérémunérée des femmes mariées, surtout, estl’objet de négociations et de conflitsincessants entre les époux26, compte tenu desdispositions des CSP et des contraintesdécoulant du partage inégal des tâchesdomestiques dans le couple.

Code pénalPlusieurs dispositions des législations pénalesdes pays de la région confortent la visiontraditionnelle, selon laquelle l’honneur etl’intégrité physique et morale de l’hommepriment sur ceux de la femme. Lescirconstances atténuantes sont accordées aumari en cas de meurtre ou coups et blessuressur la personne de son épouse adultère ou surson partenaire, alors que la réciproque n’estpas envisagée par le législateur27. Le mêmetraitement inégalitaire existe dans la sanctionde l’adultère. En Syrie, par exemple, la femmeconvaincue d’adultère est passible de troismois à deux ans de prison, alors que pour lemari se trouvant dans la même situation, lasentence est d’un mois à une année.

Dans plusieurs pays de la région, le «crimed’honneur»28 est autorisé et bénéficie d’un

19

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Les lois religieuses en IsraëlL’amendement en mars 2000 de la «Loi sur l’égalité des droits pour les femmes»(1951) s’est étendu à toutes les sphères à l’exception, toutefois, de la sphère privée etdes relations familiales, qui continuent à être régies, pour une grande part, par lesjuridictions des tribunaux religieux (juifs, musulmans, chrétiens ou druzes). Devantces juridictions, les femmes n’ont pas les mêmes droits que les hommes, par exempledans l’accès au divorce.

Dans certains cas, la loi civile israélienne donne le choix aux femmes entre lesjuridictions (civiles ou religieuses) devant lesquelles elles peuvent porter leursrequêtes relatives à la garde des enfants, au droit de propriété et à la pensionalimentaire. Mais ce choix n’est pas donné à toutes les femmes : les femmes arabo-musulmanes - citoyennes israéliennes - n’ont le droit de recourir qu’aux tribunauxreligieux. Aucune juridiction religieuse (juive, musulmane, chrétienne ou druze) nepermet aux femmes de siéger en tant que juges, laissant ainsi les hommes déciderd’affaires concernant les femmes israéliennes.

Il n’existe pas de mariage civil en Israël. Les couples qui ont opté pour le mariagecivil ou les couples mixtes (de religion différente) sont obligés de se marier horsd’Israël. En cas de dissolution d’un mariage civil, la décision revient au président dela Cour suprême, qui doit décider quelle juridiction est compétente. C’est uneprocédure longue et coûteuse.

Source : The Working Group on the Status of Palestinian Women in Israel : The status of PalestinianWomen Citizens of Israel, NGO Report on CEDAW, 1997.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 19

Page 24: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

laxisme légal, de l’indulgence de la policechargée de rassembler les preuves et d’uneacceptation sociale du meurtre commemoyen de laver un honneur qui a été souillé.Dans d’autres pays, la loi interdit aux épousesde se constituer partie civile contre leursépoux, sans l’autorisation préalable de lajuridiction saisie29. Par ailleurs, la législationpénale autorise également le ministère publicà poursuivre en justice une femme quientretient, de notoriété publique, desrelations adultères, si son mari se trouve àl’étranger. La réciproque n’est pas prévue parle législateur.

Code de la nationalitéA l’opposé de l’homme, la femme mariée àun étranger ne transmet jamaisautomatiquement sa nationalité à sesenfants, même si ces derniers sont nés etvivent dans son pays30. Les codes de lanationalité31 dans l’ensemble des pays duMENA violent donc, en toute impunité,l’ensemble des conventions internationales,et plus particulièrement la Convention sur lesdroits de l’enfant (CDE), le Pacte internationalsur les droits civils et politiques (PIDCP)32 et laConvention sur l’élimination de toutes lesformes de discrimination à l’égard desfemmes (CEDAW).

En Jordanie, les organisations de femmes ontproposé en 2001 d’amender le code de lanationalité, afin de donner au Conseil desministres le pouvoir d’accorder la nationalitéjordanienne, pour des raisons humanitaires,aux enfants de femmes jordaniennes mariéesà des non-nationaux qui ont des difficultés àaccéder à l’éducation et à l’emploi. Le Conseilsupérieur de l’éducation a décidé, en 1996,que les enfants qui ont un livret de famillepourront intégrer l’université. Or, les femmesjordaniennes mariées à des étrangerspeuvent avoir un livret de famille, mais lesenfants qui ont la nationalité de leur père nepeuvent être portés sur ledit livret33.

En Égypte, du fait de la discrimination àl’encontre des femmes en matière detransmission de la nationalité, les droitséconomiques et sociaux des enfants issus depères étrangers, nés et résidents en Égypte,sont bafoués (permis de résidence, accès àl’éducation et à l’emploi)34. Le Centreégyptien pour les droits des femmes a estiméque des milliers de femmes mariées à des

étrangers, et au moins un million d’enfants,continuent à souffrir de cette loi35. Au regardde la procédure de naturalisation, les épouxdes Egyptiennes sont traités comme desétrangers et obtiennent rarement lanationalité, alors que pour les épouses desEgyptiens, la procédure de naturalisation estrelativement facile et rapide.

En Israël, près d’un millier de femmesd’origine palestinienne, citoyennes d’Israël etmariées entre les années 1967 et 1990 à desPalestiniens des territoires occupés,continuent à être discriminées par la loi sur lanationalité. Elles ont été amenées à signer unformulaire stipulant la déchéance de lanationalité israélienne en cas de mariage etde résidence avec des Palestiniens desterritoires occupés. Ces femmes ont signé cesformulaires sans vraiment comprendre leursimplications et, parfois même, alors qu’ellesétaient mineures. De plus, leurs enfantsnaissent apatrides. Les divorcées ou veuvesqui souhaitent recouvrer leur nationalité,retourner vivre en Israël ou au moinsbénéficier d’un permis de séjour permanent,se voient opposer une fin de non-recevoir. Cesfemmes continuent à vivre en Israël en tantque réfugiées et peuvent être déportées sielles viennent à être découvertes. Elles nepeuvent ni obtenir un permis de travail, nibénéficier avec leurs enfants d’une assurancemédicale et d’une couverture sociale et leurenfants n’ont pas droit aux services éducatifs.Après la pétition de l’Association pour lesdroits civils en Israël en 1998, adressée à laCour suprême, le ministre de l’Intérieur apromis de rendre leur nationalité à cesfemmes et à leurs enfants. Mais, à ce jour, cespromesses sont restées lettre morte.

AvortementL’avortement autre que thérapeutique estinterdit, même s’il est pratiquéclandestinement et constitue une source derevenus pour les médecins et même pourcertains charlatans. Le coût élevé del’interruption volontaire de grossesse fait queseules les femmes qui en ont les moyenspeuvent le pratiquer dans de bonnesconditions. Le droit des femmes de contrôlerleur propre fécondité est nié par les États, quin’y voient qu’un moyen de limiter lesnaissances. Si la vente de contraceptifs estlibre et fortement encouragée dans plusieurspays de la région en raison des politiques

20

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 20

Page 25: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

anti-natalistes, d’autres dispositions légaleslimitent la liberté des femmes. Il en est ainside l’autorisation de l’époux pour effectuerune ligature des trompes ou du contrôle surla distribution et la vente des contraceptifspour les femmes, qui sont obligées deproduire la preuve établissant leur étatmatrimonial (ex. Algérie).

Libre circulationLa libre circulation et la liberté demouvement des femmes sont limitées par laloi36 et par la tradition qui considère l’espacepublic comme strictement réservé auxhommes.

Dans certains pays du MENA, les femmes n’ontpas le droit de voyager seules ouaccompagnées par des hommes n’ayant pasavec elles une parenté à degré prohibé. En

Arabie saoudite, où cette règle est strictementappliquée, cela signifie qu’aucune femme nepeut accomplir le pèlerinage sans êtreaccompagnée par un homme de sa famille. EnJordanie, la femme mariée a encore besoin del’autorisation de son mari pour l’obtention dupasseport, disposition qui a été déclaréeinconstitutionnelle par la Haute Courconstitutionnelle égyptienne en 2000 et a étésupprimée au Maroc37 et au Liban (1974). Deplus, la loi jordanienne oblige la femme àsuivre son mari partout, sauf s’il ne peutassurer sa sécurité38.

Le mari peut également recourir auxtribunaux pour obliger son épouse àréintégrer le domicile conjugal contre savolonté et quelles que soient les raisons quil’ont poussée à le quitter. À titred’illustration, au Maroc, sur 5 400 cas traités

21

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Pratiques discriminatoires et effectivité des loisdans les pays du MENA

Dans l’ensemble de la région MENA, les rares lois égalitaires ne sontqu’exceptionnellement appliquées et accessibles aux femmes. En dépit del’importance et de la nécessité vitale des réformes juridiques, les femmes vivent auquotidien dans des zones de non-droit et sous le poids des traditions et coutumes quisont en contradiction avec les quelques lois non-discriminatoires en vigueur.

L’exclusion des femmes de l’héritage, le mariage forcé et précoce, les crimesd’honneur tolérés dans la pratique même s’ils ne sont pas toujours légaux et laviolence familiale et conjugale constituent le lot quotidien des femmes, surtout lesplus défavorisées et les plus pauvres d’entre elles.

Dans plusieurs pays de la région, les jeunes femmes célibataires sont contraintes depasser le test de virginité sur simple volonté des parents, ou à la demande du futurépoux et de sa famille. En Turquie, en dépit du décret gouvernemental de 1999réglementant ce test (réservé désormais aux investigations relatives à des affairescriminelles), les familles continuent à avoir largement recours à cette pratique,utilisée comme prétexte aux crimes d’honneur. L’État, lui-même, y a recours dans lescentres de réinsertion des jeunes filles, par exemple. La perte de la virginité, lesgrossesses hors-mariage et le contrôle social incitent beaucoup de jeunes femmes dela région MENA au suicide, à l’abandon de leurs enfants et à la prostitution.

A cela, s’ajoute l’ignorance des rares dispositions légales favorables aux femmes, cesdernières n’étant généralement pas informées de leurs droits. Des procéduresjuridiques contradictoires et complexes ; un environnement social et judiciaire nonfavorable aux femmes comme, par exemple, la réticence des juges à recourir auxconventions internationales, pourtant ratifiées et publiées par leurs pays ; l’absencede femmes au sein du corps de la magistrature de certains pays - même si la loi nel’interdit pas, comme en Égypte - et l’interdiction, sans aucune base légale, faite auxmagistrats femmes de statuer en matière de statut personnel (Maroc, Jordanie,Israël), participent à renforcer les impacts sociaux négatifs des lois discriminatoiresen vigueur.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 21

Page 26: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

uniquement par les tribunaux de premièreinstance de Casablanca en 1993, 167concernaient des affaires de réintégrationpar la femme du domicile conjugal39.

Harcèlement sexuelLes ONG féminines se sont mobilisées,notamment au Maroc et au Liban, mais aussien Égypte, en Palestine et en Israël, pourobtenir l’adoption de lois protégeant lesfemmes contre le harcèlement sexuel. Bien quede telles lois existent en Israël, elles ne sont pastoujours appliquées. Certains milieuxconservateurs prennent prétexte de l’ampleurde ce phénomène pour préconiser la non-mixité sur les lieux de travail et dans l’ensembledes espaces publics. Mais, en l’absence d’unetelle politique, la ségrégation des sexes dans lasociété est encore très répandue, comme l’estl’idée selon laquelle l’espace public appartientaux hommes, surtout après la tombée de lanuit, ce qui constitue également une sérieuselimitation à la liberté des femmes et à leurparticipation à la vie publique.

1.3 Discrimination envers les

femmes dans l’éducation et

l’emploi40

Inégalité entre les genres dans l’éducationAprès les indépendances, les États de larégion MENA ont consenti de grands effortsen matière d’éducation pour combler les

retards enregistrés dans ce domaine et poureffacer le lourd héritage des colonisations.

Toutefois, les données statistiques pour 1998montrent que plusieurs pays de la régionenregistrent encore des taux très élevésd’analphabétisme féminin. Le taux moyenpour les femmes de la région MENA (àl’exception d’Israël et de la Turquie) est del’ordre de 42% (contre 21% pour leshommes)41. Bien évidemment, cette moyennemasque de grands écarts en matièred’analphabétisme féminin : 64% pour leMaroc et 16% pour la Jordanie.

L’indicateur du taux de scolarisation dans lestrois cycles d’enseignement (primaire,secondaire et supérieur) est révélateur desefforts fournis en matière de scolarisation desjeunes femmes, mais également des écartsqui existent encore entre les hommes et lesfemmes, d’une part, et entre la moyenne decertains pays méditerranéens du MENA etcelle des pays à revenus comparables42,d’autre part. En effet, le taux moyen pour lespays de la région (Algérie, Égypte, Jordanie,Liban, Maroc, et Tunisie) est de 63,8% pourles femmes et de 69,5% pour les hommes,alors qu’il est respectivement de 67,3% et de83,3% pour les pays à revenus comparables.La différence dans la scolarisation des fillettesest très grande entre les pays cités : 77% pourle Liban, contre 68% pour la Tunisie et 42%pour le Maroc.

22

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Inégalités entre femmes et hommes en termes d’éducation et d’instruction

Taux brutAnalphabétisme Scolarisation Scolarisation d’inscription

des femmes nette des filles nette des filles des femmesadultes au primaire au secondaire dans le supérieur

En % En % En % En %Taux du taux Taux du taux Taux du taux Taux du taux

Classement (%) masculin (%) masculin (%) masculin (%) masculinselon l’IDH 2000 2000 1998 1998 1998 1998 1998 1998

22 - Israël 92,4 95 95 100 85 101 57 14275 – Liban 80,3 87 77 97 79 109 39 10285 – Turquie 76,5 82 96 92 … … 18 16597 – Tunisie 60,6 74 96 97 56 103 17 9799 – Jordanie 83,9 88 65 102 62 107 … …

106 – Algérie 57,1 75 92 95 59 101 … …108 – Syrie 60,5 68 89 92 36 92 … …115 – Égypte 43,8 66 89 94 … … … …123 - Maroc 36,1 58 73 86 … … 8 75

Source : Rapport mondial sur le développement humain, 2002.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 22

Page 27: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

De plus, en raison des difficultés économiquesactuelles dans la région, un grand nombre defamilles vont avoir tendance à favoriser lesfils au détriment des filles, dans les questionsd’éducation. Par conséquent, les femmessouffrent généralement davantage que leshommes des effets négatifs sur l’éducationd’un climat économique difficile.

L’inégalité des genres et l’activitééconomiqueLa pauvreté des données disponibles sur laparticipation économique des femmes dansles pays arabes du MENA et le fait, à quelquesexceptions près, que ces dernières ne soientpas toujours ventilées par sexe, ne permet pasd’avoir une idée précise du degré departicipation des femmes au marché dutravail.

D’autre part, les statistiques sur le chômageféminin sont biaisées, dans la mesure oùl’outil statistique peut considérer une femmeau foyer comme n’étant pas demandeused’emploi et par conséquent comme n’étantpas en situation de chômage.

En dépit de la progression de l’activitéféminine dans les pays du MENA partenairesdu processus euro-méditerranéen43, elle restecependant l’une des plus faibles au monde44,puisque la participation à la force de travail

ne dépasse pas en moyenne 29%, alorsqu’elle est de l’ordre de 39% pour les pays àrevenus comparables. Parmi les pays arabesdu MENA, c’est le Maroc qui vient en tête,suivi par la Tunisie, alors que la Jordanieenregistre la plus faible participationéconomique des femmes. Toutefois, laquestion du travail des femmes est complexe: un taux plus élevé de travail féminin nereflète pas forcément une croissance dudéveloppement des femmes. Dans les pays àrevenus faibles, l’emploi féminin atteint41%45. Par conséquent, il est indispensabled’analyser le type et le contexte du travail desfemmes, afin de mieux comprendre lesraisons pour lesquelles elles peuvent êtreautorisées à travailler, capables ou forcées dele faire46.

Les données sur l’éducation et la participationdes femmes au marché du travail permettentde tirer deux conclusions principales :

● le décalage existant entre laparticipation à l’éducation et au marchédu travail montre que les femmesqualifiées n’investissent généralementpas leurs diplômes et qualifications surle marché du travail. Au contraire, dansles pays où la participation des femmesau marché du travail est importante,comme au Maroc et en Égypte,l’analphabétisme et la sous-

23

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Inégalité entre femmes et hommes dans l’activité économique

Travailleursfamiliaux

Taux d’activité Taux d’activité par secteur économique collaborantClassement économique à l’entrepriseselon l’IDH des femmes agriculture industrie services familiale

Indice En %(base du

Taux % 100 = tauxTaux % 1990) masculin

2000 2000 2000 F M F M F M F M

22 - Israël 48.4 113 67 1 3 12 35 86 61 77 2375 - Liban 29.6 122 39 - - - - - - - -85 - Turquie 49.9 114 61 72 34 10 25 18 41 - -99 - Jordanie 26.6 157 34 - - - - - - - -97 - Tunisie 36.9 112 47 - - - - - - - -

108 - Syrie 28.6 121 37 - - - - - - - -106 - Algérie 29.5 154 39 - - - - - - - -115 - Égypte 35.0 115 44 35 28 9 25 56 46 36 64123 - Maroc 41.4 107 52 6 6 40 32 54 63 - -

Source : PNUD, Rapport mondial sur le développement humain, 2002.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 23

Page 28: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

qualification continuent de caractériserune part importante du salariatféminin ;

● il existe une forte ségrégationhorizontale du salariat dans la région :l’emploi des femmes se concentre dansles secteurs de l’administrationpublique, de l’éducation, de la santé, del’agriculture et des services sociaux.

La privatisation du secteur public contribue àaccroître le chômage des femmes, parcequ’elle ne s’accompagne pas de changementsstructurels appropriés dans la formation etsur le marché de l’emploi.

D’autres facteurs contribuent à limiter laparticipation publique des femmes, comme :

● la discrimination à leur encontre dansl’accès au travail rémunéré ;

● l’inégalité des salaires entre hommes etfemmes ;

● le plus grand nombre de contraintesfamiliales pesant sur elles (soins auxenfants et aux personnes dépendantes) ;

● le sexisme ambiant sur les lieux dutravail et l’absence ou le nombre peuélevé d’instruments juridiques pour lecombattre ;

● la discrimination dans la promotionprofessionnelle. À qualification égale,les femmes obtiennent plusdifficilement que les hommes des postesde cadre et de direction. Ces pratiques

discriminatoires sont très répandues etmême justifiées par le mythe de lafemme entretenue et par le silence deslois - et surtout des CSP - sur la questiondu droit des femmes à l’éducation et autravail47.

● En dépit des écarts enregistrés entre lesdifférents pays en termes d’accès desfemmes au travail rémunéré, ce dernierreste partout relativisé par rapport à lafamille, car la loi considère toujours lafemme comme un être éternellemententretenu par son père ou par sonépoux qui, légalement, est son tuteur.

1.4 Discrimination envers les

femmes dans la représentation

politique

Depuis les indépendances des pays du MENA,leurs constitutions garantissent l’égalité desdroits politiques entre hommes et femmes.Certaines dispositions réglementaires, commeen Algérie, qui autorisaient le conjoint àvoter en lieu et place de sa femme et de sasœur, ont été supprimées récemment (1995).

Mais, dans la pratique, la participation desfemmes au pouvoir politique et à la prise dedécision, comme dans le travail rémunéré, estl’une des plus faibles du monde. Le taux dereprésentation des femmes arabes dans lesparlements nationaux ne dépasse pas 3,5%48.

La division traditionnelle des rôles sexuels etle maintien des femmes hors du secteur

24

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Participation des femmes à la vie politique

Indicateur departicipation Date d’obtention par Date d’accès Femmes

des femmes (IPF) les femmes du droit au parlement siégeant au FemmesClassement par : élection (E) ; gouvernement parlementairesselon l’IDH Class. Valeur Vote Candidature nomination (N) % (1999) %

22 - Israël 22 0,596 1948 1948 1949 E 6,1 13,375 - Liban … … 1952 1952 1991 N 0,0 2,385 - Turquie 63 0312 1930 1934 1935 N 0,0 4,297 - Tunisie … … 1974 1974 1989 N 10,0 11,599 - Jordanie ... ... 1974 1974 1989 A 0,0 1,3

106 - Algérie ... ... 1962 1962 1962 A 0,0 3,4108 - Syrie … … 1949, 1953 1953 1973 E 11,1 10,4115 - Égypte 65 0,260 1956 1956 1957 E 6,1 2,4123 - Maroc … … 1963 1963 1993 E 4,9 0,6

Source : Rapport mondial sur le développement humain, 2001 et 2002.Remarque : En Jordanie, en Algérie et au Maroc, les femmes représentent respectivement 7,5% ; 5,6% et 0,4% desmembres de la chambre haute (Sénat).

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 24

Page 29: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

public, justifiés par des arguments de typeculturel ou religieux, contribuent aussi àlimiter l’investissement par les femmes dusecteur public officiel et des centres de prisede décision politique.

D’autres facteurs contribuent à exclure lesfemmes de la participation politique ou àrendre leur contribution purement formelle,comme le manque de démocratie, l’absencede consultations transparentes ou l’existencede modes de scrutin basés sur la représenta-tion tribale, ethnique ou confessionnelle,comme c’est le cas en Jordanie et au Liban.

La faible participation des femmes à la viepolitique officielle reste un problème dans lagrande majorité des pays arabes. Pourcorriger cette situation, certains gouverne-ments ou partis politiques recourent àl’action affirmative (discrimination positive),en exigeant qu’un pourcentage donné decandidats soient des femmes ou en leurréservant un certain nombre de sièges dansles parlements nationaux.

Les régimes algérien, syrien, égyptien ettunisien ont ainsi adopté des mesures d’actionaffirmative et la Jordanie a, elle aussi, proposérécemment d’y recourir49. Toutefois, dans despays peu ou pas démocratiques, ces mesuresne constituent en aucun cas une alternativesérieuse à l’absence de femmes dans lesinstitutions représentatives. La Tunisie, avec11,6% de femmes députées, et la Jordanie,avec 11,5%, occupent la première place despays du Maghreb et du Moyen-Orient, etviennent en tête de la région MENA, suivies deprès par la Syrie. Alors qu’au Maroc, où lemouvement des femmes est plus présent grâceà un environnement politique plus favorableaux mobilisations et à une relative libertéd’expression et d’association, la proportion defemmes dans les deux chambres du parlementne dépasse pas 0,5%50. La présence de femmesen politique n’est donc pas nécessairement liéeau niveau de démocratie dans le pays.

Pour la grande majorité des pays de la région,les processus démocratiques sont hypothé-qués par des intérêts privés et par desgroupes puissants, habitués à agir hors desrègles démocratiques et à influencer ou àcorrompre les électeurs dans le cadre deconsultations qui sont, dans la grandemajorité des cas, de simples mises en scènedestinées à redorer l’image des gouvernantsauprès de la communauté internationale. Ce

faisant, ces pratiques participent audésenchantement des électeurs et àl’éloignement de la participation politiquenon seulement des femmes, qui sontfaiblement insérées dans ces réseaux, maiségalement des élites et des jeunes.

Dans l’ensemble des pays du MENA, et àquelques exceptions près, les femmesdésignées et co-optées dans le cadre del’action affirmative à la députation ou àd’autres responsabilités électives, sontpresque toujours choisies en fonction de leurproximité aux pouvoirs en place. Loin dedéfendre les intérêts des femmes, elless’érigent parfois en ennemies des féministes,d’autant plus acharnées qu’elles pressententqu’elles sont là essentiellement pour lescombattre. De même, élues sans avoirréellement brigué le suffrage universel etgrâce au système des sièges réservés, elles nepeuvent que difficilement exprimer leurdésaccord sur les lois ou les politiques suivies.

Cette exclusion des femmes de la sphèrepolitique officielle a été compensée, dans ungrand nombre de pays du MENA, par leurinvestissement du champ associatif et civique.Au Maghreb, par exemple, le mouvement desfemmes constitue un segment très actif etagissant de la société civile et participe audébat public sur les questions sociales,économiques et politiques de leurs paysrespectifs51. Cette participation pèse d’autantplus que le contexte de liberté d’expression etd’association est favorable comme c’est le cas,depuis ces dernières années, au Maroc.

1.5 La violence à l’encontre des

femmes

Dans un passé très proche, la violence àl’égard des femmes était un sujet tabou etune pratique menée dans le silence, acceptéeet même justifiée socialement par les CSP qui,de par le statut inférieur qu’ils réservent auxfemmes, légitiment la violence contre elles.Mais, grâce à l’action et au soutien desassociations pour la promotion les droits desfemmes dans l’ensemble des pays du MENA,le silence commence à être levé et cettequestion sort peu à peu de la sphère privéepour investir le champ social et politique.

Le manque de données quantitatives etqualitatives sur la prévalence, les formes etles manifestations de la violence contre les

25

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 25

Page 30: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

femmes - surtout la violence conjugale(notion presque inexistante dans la régionMENA)52 - tendent à maintenir le mythe de lasociété musulmane basée sur la sacralité desliens familiaux et sur la crainte de Dieu. Lesrares statistiques sur la question restentfragmentaires et sont surtout le fruit del’effort consenti par les ONG féministes53. Cemanque de visibilité des violences subiesquotidiennement par les femmes permet auxÉtats de la région d’en nier l’existence et dene pas assumer leurs responsabilités,notamment par la prise des mesures légalesnécessaires, la création de structures d’accueilpour les victimes et, enfin, par la formation etl’affectation de ressources humainessuffisantes et qualifiées auprès du corpsmédical, de la police et de la magistrature.

Or, dans cette partie du monde, les violencessont d’abord juridiques et institutionnelles,comme c’est le cas pour la législation sur lesrelations conjugales et familiales et les loispénales. Juridiquement, un mari ne violejamais sa femme car il a un droit absolu surson corps. Il a également le droit de corrigerson épouse (légèrement) si elle n’est pasobéissante.

En Algérie, selon les données recueillies dansun seul hôpital d’Alger54, quelques 9 000femmes battues se rendent chaque année àl’hôpital pour faire soigner leurs blessures55.Trois agressions sur quatre ont lieu audomicile de la victime et l’agresseur est, leplus souvent, l’époux. Les trois quarts desagresseurs n’ont jamais été condamnés, alorsque beaucoup d’entre eux sont desrécidivistes. En Tunisie, selon les données duCentre d’écoute et d’orientation des femmesvictimes de violence56, plus de 64,4% desdossiers traités en 1998 par ce centre sontrelatifs à la violence conjugale.

Dans plusieurs pays de la région, les traditionssont érigées en normes et préceptes quasi-sacrés. L’excision des fillettes continue à êtrepratiquée à grande échelle, en Égypte57

notamment, mais aussi dans les payseuropéens de migration. La pratique de lamutilation génitale des fillettes, qui n’aaucun fondement religieux ou légal, estlargement acceptée et presqueinstitutionnalisée, tant elle bénéficie d’unetotale impunité. Selon un rapport de lasécurité nationale égyptienne (1995), 97%des femmes âgées de quinze à quarante-cinqans ont subi des mutilations génitales, etseulement 10% de ces mutilations ont étésupervisées par des médecins.

Les crimes d’honneur en Égypte, Israël58,Jordanie, Liban, Palestine et Syrie fontplusieurs victimes par an, à cause del’indulgence des lois et de ceux qui sontchargés de les appliquer, alors que cettepratique n’a aucun fondement religieux. Desfillettes et des femmes payent de leur vie«l’honneur des hommes», au nom d’unereligion instrumentalisée au service dupatriarcat et des intérêts politiques et autresintérêts triviaux qui n’ont rien à voir avec«l’honneur» (comme par exemple la jalousieou des conflits relatifs à l’héritage).

En Turquie, les crimes commis par des parentssont estimés à deux cents jeunes filles etfemmes tuées chaque année59. En 2001, lesjuges statuant sur ces affaires ont dans laplupart des cas réduit les peines des criminels,sous prétexte que les victimes avaientprovoqué le meurtre en transgressant le codede conduite imposé aux femmes par lasociété. Dans certains cas, les familless’arrangent pour faire commettre ces crimespar les membres mâles et mineurs de lafamille, car les sanctions sont alors moinslourdes.

En Jordanie, ces crimes font en moyenne vingt-cinq à trente victimes par an60. La propositiond’abolir la disposition légale (art. 340 du codepénal) qui accorde des circonstancesatténuantes à l’auteur d’un crime d’honneurcommis contre une proche parente s’il réussit àdémontrer que sa motivation était de

26

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Prévalence de la violence contre les femmes exercée par un partenaire intime

Pays Année Femmes adultes agressées par un partenaire intime (%)

Égypte 1995-1996 34,4Turquie 1998 57,9

Source : Le progrès des femmes à travers le monde, 2000, UNIFEM, Rapport Biennal, p. 97.Seuls les 2 pays figurant dans le tableau ont des données (plus ou moins fiables) sur la prévalence de la violenceexercée par un partenaire intime.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 26

Page 31: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

restaurer l’honneur familial, présentée à deuxreprises par le gouvernement jordanien (en1999 et 2000), a été rejetée par la chambrebasse du Parlement. Afin de faire barrage àl’adoption de cette loi, les députés islamistes sesont mobilisés pour faire campagne etexpliquer que «l’interdiction du “crimed’honneur” entraînerait la débauche et ladégradation des mœurs». En 2000, la chambrehaute du Parlement a repris l’initiative devoter un amendement à l’article 340 et l’asoumis à la chambre basse du Parlement. Mais,comme le Parlement jordanien a été dissous en2001, la proposition n’a toujours pas étédiscutée.

Non seulement les femmes sont les victimesmais, en plus, le gouvernement prend commemesure de protection l’enfermement decelles qui sont menacées par des crimesd’honneur. Ces femmes sont ainsiemprisonnées, alors que ceux qui lesmenacent sont en liberté. Les statistiquesjordaniennes officielles font mention decinquante à soixante femmes qui sont placéesannuellement en détention administrativepréventive, pour une période allant dequelques mois à plus de trois ans.

En Israël, selon les données de la police, vingtfemmes ont été tuées en 2001, et cesmeurtres ont été classés sous l’appellation«mobiles romantiques». Selon l’associational-Badeel (Coalition contre les crimesd’honneur), un grand nombre de ces crimesn’ont pas été élucidés, à cause de lacomplicité de la communauté et de l’attitudede la police et des juges, qui continuent à

considérer ces crimes comme étant desaffaires privées, liées aux traditionsculturelles de la société palestinienne61.

En Syrie, le code pénal (art. 548.1) stipule que :

«celui qui a surpris sa femme, une de sesascendantes, descendantes ou sa sœuren délit d’adultère ou en relationsexuelle illégitime avec un autre et quise rend coupable, sans intention de lefaire, d’homicide ou de coups etblessures sur sa parente et son complice,bénéficie de l’exemption de la peine».L’article 548.2 du même code stipuleque «celui qui surprend sa femme, unede ses ascendantes, descendantes ou sasœur en situation suspecte avec unhomme et se rend coupable d’homicideou de coups et blessures, bénéficied’une réduction de la peine prévue parla loi».

Les conventions sociales font que les relationssexuelles ne devraient avoir lieu que dans lemariage. Malgré le tabou qui entoure lesquestions sexuelles, une évolution sociale etéconomique a conduit les femmes à se marierbeaucoup plus tard et a entraîné uneaugmentation des relations sexuelles horsmariage.

Les mères célibataires sont généralement desjeunes filles issues des milieux les plusdéfavorisés, qui n’ont pas la possibilité derecourir à un avortement clandestin coûteuxet n’ont pas accès à l’informationcontraceptive62. Ces mères et leurs enfantssont les principales victimes de la conjonction

27

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

La législation sur le viol dans la région MENADans l’écrasante majorité des pays du MENA (y compris en Turquie), le viol estconsidéré dans les législations pénales comme une atteinte à la pudeur/décencepublique et non comme un crime contre la personne. Cette classification reflète lanotion patriarcale, qui veut que le corps et la sexualité des femmes soient considéréscomme des questions relevant de l’ordre public et de la famille.

La notion de viol conjugal n’existe dans aucun des pays arabes du MENA, pour lasimple raison que le corps de la femme mariée est censée appartenir à son époux.

Dans certains pays de la région (Maroc, Liban), le code pénal permet de stopperautomatiquement les poursuites à l’encontre du violeur, s’il accepte d’épouser savictime mineure et nubile. Cette disposition humiliante et dégradante est souventdéfendue, sous prétexte que c’est la solution qui sauvegarde le mieux l’honneur dela fille et de sa famille.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 27

Page 32: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

d’une loi discriminatoire et d’une hypocrisiesociale renforcée par l’impact de la vagueislamiste dans la région.

Si les ONG et le mouvement des femmes ontcontribué à lever le tabou sur les conditionsde cette catégorie de la population,l’empêchement légal fait aux pères dereconnaître leurs enfants illégitimes nés endehors des liens du mariage63 encourage cesderniers à adopter un comportementirresponsable. Devant cette situation, lesfemmes ont tendance à abandonner leursenfants après l’accouchement, dans lesmaternités ou, le plus souvent, dans la rue.

La pauvreté et l’absence de protection socialefrappent certaines catégories féminines quisont plus particulièrement vulnérables, parmilesquelles les femmes appartenant à desminorités, les mères célibataires, les femmeset les jeunes filles rurales et les domestiquesde maison, qui sont souvent victimes deréseaux organisés de trafic de femmes.

En Israël, selon lesdonnées de la police,vingt femmes ont ététuées en 2001, et cesmeurtres ont été classéssous l’appellation«mobiles romantiques».

Trafic de femmesLes données sur la prostitution et sur le traficdes femmes ne sont pas disponibles, mais ilest clair que ce phénomène gagne enampleur, en raison de la consolidation descircuits de trafic de femmes les plus pauvresde la rive sud de la Méditerranée et d’Asie dusud et du sud-est vers l’Europe et vers les paysproducteurs de pétrole du Golfe et duMoyen-Orient.

Selon le rapport du département d’Étataméricain (2001), Israël et le Liban sontconsidérés comme en tête des pays de larégion MENA en ce qui concerne l’importancedu trafic humain. Les autorités de ces pays neréussissent pas à combattre, ou même parfoisrefusent de reconnaître le trafic des femmes

comme une violation des droits de l’Homme,et n’interdisent ou ne punissent pas le traficde façon satisfaisante, pas plus qu’ils ne fontd’efforts soutenus pour éliminer ce fléau64. EnIsraël, en dépit de l’introduction en 2000d’une loi interdisant le trafic à des finsd’exploitation sexuelle des individus, legouvernement n’a pas réussi à assurer uneprotection juridique des personnes victimes detrafic, introduites en Israël pour les travauxdomestiques, l’agriculture et la construction.

Les trafiquants ont recours à de nouvellesméthodes pour contourner la surveillancedans les aéroports et réussissent à introduiredes femmes aux fins de prostitution à traversle désert du Sinaï. Selon le Toda’ah Institute,65

au moins 3 000 femmes sont introduiteschaque année en Israël par les réseaux detrafic. La complicité de l’État et la corruptionjouent un rôle important dans le maintien dece trafic. Selon une étude récente réalisée parle Hot-line for Migrant Workers, 55% desvingt-neuf femmes qui ont été introduites enIsraël pour la prostitution forcée ont déclaréque les membres des forces de sécurité sontleurs principaux clients.

La plupart des États de la région MENA n’ontpas de législation sur la traite des femmes. Lesressortissants de pays tiers sont généralementexclus du code du travail de ces pays (ex.Liban), et ne se voient donc offrir aucuneprotection juridique. Les victimes du traficsont souvent traitées comme des étrangèresen situation illégale ou des criminelles, ou lesdeux à la fois, et font l’objet de poursuites aulieu d’être indemnisées pour les abus66 dontelles ont souffert. Ces abus prennent souventla forme de viol, coups, menaces,enfermement, esclavage ou de travail forcésans salaire.

Au Maroc, qui vient en position moyennedans le classement effectué par le rapport dudépartement d’État américain, la presse faitrégulièrement état du démantèlement deréseaux de prostitution qui acheminent desjeunes filles mineures vers les pays européens,notamment l’Espagne et l’Italie. Ces réseauxprofitent des restrictions sur la circulation despersonnes entre les deux rives de laMéditerranée, pour faire miroiter à ces jeunesfilles des contrats de travail dans le nord. Lanouvelle législation européenne sur laprostitution, notamment aux Pays-Bas, offreaux travailleurs du sexe de meilleures

28

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 28

Page 33: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

conditions de travail et la possibilité de porterplainte pour violence et abus, mais n’adressepas la question sous-jacente du droit desressortissants de pays non-européens àtravailler dans l’UE. Des travailleurs illégauxdu sexe sont ainsi encouragés à rester dansl’ombre, dans la crainte d’être poursuivis ouexpulsés67.

Chaque jour, des milliers de jeunesdomestiques asiatiques, africaines etméditerranéennes sont asservies68 en Europe.Par exemple, selon les statistiques recueilliesdans les centres du Comité contre l’esclavagemoderne (CCEM, 2001) en France, 76% desvictimes du trafic et de l’esclavage sont desfemmes et sont originaires d’Afrique del’ouest (36,9%), du Maghreb (8,5%), et plusparticulièrement du Maroc (7,7%). De plus,26,7% des victimes ont été recrutées par desagences et 6,5% par des intermédiaires ;73,3% des victimes n’ont perçu aucun salaireet 95% d’entre elles ont eu leurs papiersd’identité (passeport, livret de voyage, actede naissance) confisqués. Enfin, huit victimessur dix étaient en situation irrégulière lors desfaits.

Le meurtre, le viol, laséquestration ou lemariage forcé desfemmes et desadolescentes est le destinde milliers de femmesdans la région MENA enpériodes de conflits.

Violences contre les femmes dans lessituations de conflitsDans la région MENA, la discriminationcombinée au statut inférieur fait des femmesdes victimes particulièrement vulnérables à laviolence en temps de conflits. Le meurtre, leviol, la séquestration ou le mariage forcé desfemmes et des adolescentes est le destin demilliers de femmes dans la région MENApendant les périodes de conflits.

Les femmes palestiniennes continuent àsouffrir de l’embargo, des check points et des

restrictions sévères à la liberté de mouvementimposées par Israël sur la grande majorité desterritoires palestiniens occupés. En juin 2001,l’UNRWA (United Nations Relief and WorksAgency) a rapporté que les femmespalestiniennes sur le point d’accoucher seheurtent à de nombreuses difficultés pouraccéder aux maternités. En juillet 2001, unefemme palestinienne originaire de Gaza adonné naissance à son enfant au poste decontrôle militaire et son enfant est mort justeaprès, suite à des complications et l’absencede soins médicaux. L’Union of PalestinianMedical Relief Committees (UPMRC) ainventorié plus de cinquante-deux cas defemmes n’ayant pu accéder aux maternités età des soins post-natal depuis le début de ladeuxième intifada en septembre 2000.

En Algérie, l’assassinat, le viol, laséquestration des femmes et des petites filleset les mariages forcés ont été le lot de milliersde femmes en temps de conflit entre l’État etles groupes armés69. Devenues butin deguerre, elles sont contraintes d’accomplir destâches domestiques, en plus de tout autre«service» sexuel que l’on exige d’elles. Cesviolences sont le fait de groupes armés isolés,qui saisissent et profitent de l’occasionofferte par le climat de conflit et del’impunité qui l’accompagne, sous prétextequ’elles sont de mœurs légères ou que leuraspect n’est pas conforme à la tenuevestimentaire «islamique» ou simplementparce que leurs époux, frères ou fils sont desopposants ou appartiennent à des groupesrivaux. Le gouvernement, lui-même, a étéimpliqué dans des actes de violence envers lesfemmes, à travers ses forces de sécurité quiont attaqué et même tué des activistesislamistes et leurs épouses, afin d’extorquerdes informations ou à titre punitif. En 1997,un changement de politique a permis dereconnaître la fréquence des viols70 et a offertun avortement légal aux victimes.

Les données quantitatives et qualitatives surces violences ne sont pas connues nirépertoriées mais, en 2000, les forces desécurité ont déclaré que 2 029 femmes enAlgérie avaient survécu à des viols par desgroupes armés. À ce jour, et en dépit desdemandes du mouvement des femmes et desassociations médicales pour que les violeurssoient considérés comme des criminels deguerre, l’État n’a pris aucune initiative dansce sens.

29

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 29

Page 34: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Le fait que les auteurs de viol et de violencessexuelles, en Algérie et à travers le monde, nesoient pas considérés par les pouvoirs publicscomme des criminels de guerre, ne fassent pasl’objet de poursuites et ne soient pas traduitsdevant les tribunaux ni sanctionnés, contribueégalement à créer un climat d’impunité, quifavorise la violence contre les femmes.

… les femmes victimes deviol ont généralement lespires difficultés à seréinsérer dans leurfamille et leurcommunauté, comptetenu de l’environnementsocial qui tend à lesconsidérer non pascomme des victimes maiscomme portant lamarque du déshonneurde leurs familles

Le viol des femmes est utilisé comme unearme de guerre. Il vise à humilier les hommesen s’attaquant au fondement même de leurvirilité, à démontrer la force des agresseurs etl’impuissance de leurs adversaires à protégerla sexualité de leurs femmes et sœurs, etc. Cefaisant, le viol des femmes permet des’attaquer à l’un des piliers dufonctionnement du code d’honneur masculinet social71 dans la région.

De plus, les femmes victimes de viol ontgénéralement les pires difficultés à se réinsérerdans leur famille et leur communauté, comptetenu de l’environnement social qui tend à lesconsidérer non pas comme des victimes maiscomme portant la marque du déshonneur deleurs familles. Elle ne bénéficientpratiquement d’aucune prise en charge socialeou psychologique, hormis celle assurée parquelques structures de la société civile72.

Le conflit en Algérie a aussi mis en évidenceet renforcé le statut inférieur des femmesdans le domaine de l’aide gouvernementale,

de l’héritage et de la garde des enfants. Sansle certificat de décès de leur époux, lesfemmes dont le mari a disparu se voientrefuser toute assistance par le gouvernement,de même qu’elles ne peuvent toucherl’héritage des biens de leur époux. La familledu mari peut aussi, pour les mêmes raisons,refuser à la mère la garde de ses enfants. Or,les certificats de décès sont extrêmementdifficiles ou même impossibles à obtenir encas de disparition, ce qui met un grandnombre de femmes victimes de la guerre dansune situation extrêmement difficile etincertaine73.

1.6 Les pays du MENA et les

instruments internationaux

relatifs aux droits des femmes

Bien que tous les États de la région MENAaient ratifié la Convention sur l’éliminationde toutes les formes de discrimination àl’égard des femmes (CEDAW)74, et queplusieurs d’entre eux soient égalementparties à d’autres pactes et conventions,l’intégration au plan national des obligationsinternationales relatives aux droits del’Homme et des femmes resteproblématique.

Un obstacle majeur à l’intégration effectivede ces obligations internationales dans lesstructures juridiques internes des pays de larégion est dû au fait que les gouvernementsont pris l’habitude de ratifier les pactes etconventions internationales relatives auxdroits des femmes en les assortissant deréserves, de façon à ne pas engager leurresponsabilité quant à la discrimination etaux violences à l’encontre des femmes dansleurs pays respectifs. Ainsi, la ConventionCEDAW, ratifiée par l’ensemble des pays de larégion, a enregistré un recours record etsystématique aux réserves, particulièrement àl’encontre des articles 2, 9 (alinéa 2), 15(alinéa 4) et 1675. Cette convention aenregistré le plus grand nombre de réservesde tous les traités et pactes internationaux.De plus, à ce jour, le Protocole facultatif de1999 à cette convention n’a encore signé paraucun pays du MENA, si ce n’est la Turquie. Endépit des mobilisations du mouvement pourles droits des femmes dans le but de lever lesréserves à la Convention CEDAW, la situationn’a pas évolué.

30

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 30

Page 35: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Non seulement ces réserves rendent laConvention CEDAW et les autres conventionsinternationales ineffectives76, mais ellesrendent, de facto, caduques et sans objettoute discussion sur les moyens d’améliorerles différentes conventions relatives auxdroits de l’Homme et aux droits desfemmes77.

Même lorsque les conventionsinternationales ont été adoptées sansréserves, leur mise en œuvre n’est pasgarantie. Certains pays, comme l’Algérie et leLiban, accordent dans leurs constitutions laprimauté aux conventions internationales surles lois internes. Mais d’autres paysentretiennent l’ambiguïté sur cette question,

comme au Maroc où les constitutions réviséesde 1992 et 199678 ne contiennent aucunedisposition expresse consacrée à la primautéet à la force obligatoire des traités dansl’ordre juridique interne.

Même la reconnaissance par les constitutionsde certains pays de la région MENA duprincipe d’égalité comporte des réserves.L’égalité entre les hommes et les femmes estrarement mentionnée explicitement dans leslois, ou alors n’est reconnue que pour ce quiconcerne les droits économiques sociaux etpolitiques ainsi que pour les droits de lafamille, qui sont encore régis par les règlesdiscriminatoires des codes du statutpersonnel.

31

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Part I : Résumé

Un grand nombre de discriminations envers les femmes dans la région MENA sontcodifiées dans les législations de ces pays. À travers la région, les lois sur la famille,aussi appelées codes du statut personnel, violent systématiquement les droitsfondamentaux des femmes en les plaçant sous la tutelle légale de leur époux ou d’unmembre masculin de la famille. Des formes de discrimination dans d’autres domaines,y compris les lois de la nationalité et les lois pénales, restreignent sérieusement lesdroits des femmes protégés par les textes juridiques internationaux.

Dans le domaine de l’éducation, les taux d’analphabétisme féminin sont plus élevésque ceux des hommes, même s’il existe de grandes différences d’un pays à l’autre. Larégion enregistre également un taux très bas de participation des femmes à l’emploirémunéré, en raison des nombreux obstacles sociaux et juridiques qui se dressentdevant les femmes désireuses de travailler. Toutefois, si l’on analyse la participation desfemmes au marché du travail, il faut tenir compte du contexte de l’emploi féminin,afin de comprendre les raisons pour lesquelles les femmes peuvent être autorisés,capables ou obligées de travailler.

Le taux de participation des femmes à la prise de décision politique est également l’undes plus bas au monde. Bien que l’Algérie, l’Égypte, la Jordanie et la Tunisie aientintroduit des méthodes d’action affirmative en faveur des femmes parlementaires, laseule présence de femmes en politique ne signifie pas nécessairement qu’ellesparticipent à la prise de décision, en raison du contrôle étroit que les gouvernementsde la région exercent sur l’expression politique.

Les femmes de la région MENA doivent également faire face à différentes formes deviolences, y compris la violence domestique, la circoncision féminine, les crimesd’honneur et le trafic en vue de la prostitution et des travaux domestiques. En tempsde conflits, les femmes sont particulièrement vulnérables à la violence. Et bien que lespays de la région MENA aient tous signé la Convention sur l’élimination de toutes lesformes de discrimination à l’égard des femmes, ils l’ont fait en émettant un grandnombre de réserves, qui violent l’esprit et la lettre de ce texte. Les gouvernements dela région doivent faire tous les efforts nécessaires, afin de mettre fin à la discriminationet à la violence systématique contre les femmes.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 31

Page 36: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Notes5 Pour plus d’informations sur les différentes

dispositions relatives aux lois du statut personnel,voir Annexe II.

6 Aux fins du présent rapport, le terme «régionMENA» ne désigne que les pays membres duPartenariat euro-méditerranéen qui y sont analysés :l’Algérie, l’Égypte, Israël, la Jordanie, le Liban, leMaroc, la Palestine, la Syrie et la Tunisie. Le rapportse réfère également brièvement à la situation desfemmes en Turquie. Pour de plus amplesinformations, voir la partie intitulée «A propos de cerapport».

7 Voir V. Moghadam, Modernizing Women : Genderand Social Changes in the Middle East, AmericanUniversity in Cairo, 1994, p. 144 et ADRI/IEREM,Actes du Colloque : Le Statut Personnel dans les paysdu pourtour de la Méditerranée, février 1993.

8 N. Hijab, Laws, Regulation and Practices ImpedingWomen’s Economic Participation in the MENARegion, rapport ronéotypé soumis à la Banquemondiale, avril 2001.

9 Voir annexe II.10 Voir Annexe II.11 En Palestine, 35% des mariages des fillettes se

situent entre douze et dix-sept ans.12 L’âge moyen au premier mariage des femmes n’a

pas cessé d’augmenter dans l’ensemble des pays duMENA où il atteint, par exemple, 27,6 ans en Algérie; 26,7 ans au Maroc et 29 ans en Tunisie.

13 Cette disposition a été partiellement aménagée auMaroc, en vertu de la réforme de 1993 et suite à lamobilisation du mouvement des femmes. Ainsi, lesfemmes majeures orphelines de père ont le droit deconclure elles-mêmes leur mariage.

14 Voir annexe II. Au Liban, toutefois, la loi chrétiennesur la famille interdit la polygamie.

15 La Tunisie a aboli en 1993 le devoir d’obéissance,pour le remplacer par un devoir de respect mutuel.

16 Au Maroc, le nouveau projet de code du travail quisera examiné par le Parlement, a supprimél’autorisation maritale pour le travail de l’épouse.

17 Voir l’annexe II pour les différentes formes dedivorce dans les pays de la région MENA. La loi de lafamille des chrétiens donne le droit aux femmes dedemander le divorce devant les cours religieuseschrétiennes.

18 Loi n° 1 de janvier 2000 relative à la procédure dudivorce, qui stipule que dorénavant les deux épouxdoivent se mettre d’accord sur le khul‘, sinon letribunal pourra accorder le divorce à la femme aprèss’être assuré qu’elle a restitué la dot à son époux etqu’elle a abandonné son droit à l’entretien durant lapériode de viduité (‘idda).

19 Des amendements à la loi jordanienne sur le divorceont été introduits en 2002. L’épouse n’a plus besoinde l’autorisation de son époux pour obtenir ledivorce. Il n’est plus exigé, par ailleurs, qu’ellemotive sa décision. Si le juge échoue dans satentative de réconcilier les époux, il doit accorder ledivorce à la femme. Cet amendement n’est toutefois

qu’une mesure provisoire et doit encore êtreapprouvé par le Parlement.

20 Incapacité juridique du père, père apatride, pèreinconnu, etc.

21 Sauf si l’époux à un lien de parenté à degré prohibéavec l’enfant ou est son tuteur légal.

22 En Tunisie, le père a le devoir de pourvoir aulogement de l’enfant et de la titulaire de la garde, sicette dernière n’a pas de logement. Toutefois, selonune enquête de l’Association des femmestunisiennes pour la recherche et le développement(AFTURD, 2000), moins d’une femme divorcée surquatre se voit attribuer le logement familial.

23 À l’exception des grands-parents, qui héritent departs égales. Dans la loi du statut personnel deschrétiens, appliquée au Liban, hommes et femmeshéritent de parts égales.

24 Si le défunt a une fille unique, sa part dans lasuccession représente la moitié de la succession ; s’ila plus d’une fille mais pas de fils, cette part sera dedeux tiers, à partager entre elles. En Tunisie, la filleunique peut être héritière universelle de sesascendants, sans intervention des collatérauxmasculins.

25 Voir Annexe II.26 Voir, dans ce sens, les deux études sondages sur le

Degré d’adhésion aux valeurs égalitaires au Maroc(ADFM, 1999) et en Algérie (Collectif 95 MaghrebEgalité, 2000) avec l’appui de l’UNIFEM.

27 En Tunisie, cette disposition a été abrogée par laréforme de juillet 1993. Au Maroc, le projetd’amendement du code pénal présentédernièrement par le ministère de la Justice, prévoitla suppression de l’article 418 du même code portantsur les circonstances atténuantes accordées au marien cas de meurtre ou de coups et blessures sur lapersonne de son épouse adultère ou sur sonpartenaire. En Jordanie, l’amendement de l’article340 du code pénal en 2001 a gardé la possibilité deréduction de peine pour l’homme, tout enpermettant à la femme de bénéficier, elle aussi,d’une atténuation de la peine si elle tue son mariadultère.

28 En vertu duquel l’homme peut tuer, en touteimpunité, une femme de sa parenté à degré prohibé(mère, sœur, tante etc.), pour «laver son honneur».

29 Le projet de code de procédure pénale adopté toutrécemment au Maroc (juillet 2002) prévoit lasuppression de l’article 336 du code de procédurepénale, disposant de l’obligation d’autorisation dujuge.

30 Voir en Annexe III, les législations des pays du MENArelatives à la nationalité.

31 Sans le statut de national ou de citoyen, un individuest privé du droit de vote, du droit de propriété, dudroit d’accès à des soins médicaux, du droit descolariser ses enfants, du droit de travailler et dudroit de voyager à l’intérieur ou à l’extérieur du paysde résidence.

32 Une révision de l’article 14 du code tunisien de lanationalité (1993) a été opérée récemment, pourpermettre aux enfants d’obtenir la nationalité de

32

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 32

Page 37: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

leur mère, sur la base d’une déclaration conjointeengageant les deux parents.

33 En novembre 2002, une loi temporaire sur lanationalité a été adoptée, en vertu de laquelle lesfemmes mariées à des non-Jordaniens pourronttransmettre leur nationalité à leurs enfants, avecl’accord du Conseil des ministres. Cette loitemporaire doit encore être approuvée par lachambre basse du Parlement.

34 Une décision du ministère de l’Education de 1994 apermis de réduire les frais de scolarité pour cesenfants.

35 Human Right Watch, Rapport Mondial, 2001.36 Pour en savoir plus, voir Annexe IV sur les

législations relatives à la liberté de mouvement danscertains pays du MENA.

37 Ce n’est qu’en 1994, après la mobilisation dumouvement des femmes au Maroc, quel’autorisation maritale pour l’obtention dupasseport a été abolie.

38 Voir Annexe IV.39 Données de l’enquête réalisée par l’Association

marocaine des droits des femmes (AMDF), Laviolence à l’encontre des femmes, quelle protection?(en arabe), Casablanca, 1997.

40 Pour en savoir plus sur les droits économiques desfemmes du MENA, voir le rapport de Nadia Hijab,avril 2001, op. cit.

41 Banque Mondiale, http://genderstats.worldbank.org.Ces données sont relatives à la moyenne des payssuivants : Algérie, Égypte, Jordanie, Liban, Maroc,Syrie et Tunisie.

42 Le développement au seuil du 21ème siècle, Rapportsur le développement dans le monde, 1999/2000,Banque Mondiale. La Banque mondiale a divisé lespays en trois catégories principales : pays à basrevenu, pays à moyen revenu et pays à haut revenu.L’index national moyen par tête pour les troiscatégories est de 410 US$, 1970 US$ et 27 680 US$,respectivement. Des revenus comparables seréfèrent à des pays de la même catégorie.

43 Données disponibles pour l’Algérie, l’Égypte, laJordanie, le Liban, le Maroc et la Tunisie.

44 Le premier rapport sur le développement humainarabe (PNUD, 2002) indique que la région arabeenregistre le plus faible taux de participation desfemmes au marché du travail.

45 Banque Mondiale, http://genderstats.worldbank.org46 Le rapport 2002 du PNUD sur le développement

humain arabe appelle à une féminisation del’emploi par l’abandon des préjugés sexuels, ycompris la ségrégation entre les fonctions basées surle genre et les différences de salaires, et à évoquer laquestion des différences entre genres dans la qualitéet la pertinence de l’éducation et les programmes derenforcement des capacités. Il identifie également lanécessité de donner la priorité aux femmesentrepreneurs dans les programmes derenforcement des capacités locales, pour fournir desservices de micro-crédit au-delà des moins de 2% defoyers défavorisés qui bénéficient actuellementd’une aide financière.

47 N. Hijab, avril, 2001, op. cit.48 PNUD, Rapport sur le développement humain arabe,

2002 (en arabe et en anglais), disponible sous :http://www.undp.org/rbas/ahdr/english.html

49 En janvier 2003, une commission royale – le Comitésur le quota des femmes parlementaires – a adoptédes recommandations en faveur de l’introductiond’un quota temporaire qui permettrait de réserveraux femmes un certain nombre de sièges au sein dela chambre basse du parlement.

50 Aux élections parlementaires de septembre 2002,trente-cinq femmes ont été élues, suite à un accordconclu entre les partis politiques afin de réservertrente sièges aux femmes sur la liste nationale. Lenombre actuel de femmes au sein de la Chambre desdéputés atteint ainsi les 10% (trente femmes ayantété élues sur la liste nationale et cinq sur des listesrégionales).

51 Voir la seconde partie de ce rapport.52 En Tunisie, lors de la réforme du code pénal en1993,

le lien conjugal est devenu une circonstanceaggravante de la violence exercée par un conjointcontre l’autre, la notion de violence conjugalen’étant pas reconnue par la loi.

53 Au Maroc, récemment, des initiatives prises parcertains départements ministériels, et surtout par leministère de la Justice, d’établir une base de donnéessur les cas de violences présentés aux tribunaux deCasablanca, constituent un premier pas très positif.

54 Note préparée par la Fédération internationale desligues des droits de l’homme (FIDH) à l’intention dela Rapporteuse spéciale de la Commission des droitsde l’homme sur les violences à l’égard des femmes,ses causes et ses conséquences. Rapport de la FIDH,Algérie, les violences contre les femmes : l’état deslieux, 2001. Voir http://www.fidh.org/femmes/rapport/2001/État2811f.htm

55 Estimation faite à partir du nombre de femmesreçues durant les neuf premiers mois de 2001 àl’hôpital Mustapha : 960 cas y ont été examinés.

56 Association tunisienne des femmes démocrates(ATFD, 2001).

57 Le Conseil d’État égyptien (décembre 1997) aaffirmé qu’il était «désormais interdit de pratiquerl’excision même en cas de consentement de la fille etdes parents».

58 Selon al-Badeel, la Coalition contre les crimesd’honneur (Coalition against Crimes of FamilyHonour), soixante-sept femmes ont été tuées enIsraël entre 1990 et 1999, alors que le Centre d’aidejuridique et de conseil des femmes (Women’s Centerfor Legal Aid and Counseling) a documenté douzecas en Cisjordanie et vingt-six cas à Gaza, entre 1996et 1999.

59 Human Rights Watch, Rapport mondial, 2000.60 Ibid.61 Organisation mondiale contre la torture (OMCT),

2001.62 Selon une étude réalisée par l’ONG «Terre des

Hommes» à Casablanca (Maroc, 1996), la grandemajorité des mères célibataires est constituée dedomestiques de maison.

33

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 33

Page 38: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

63 En Tunisie, la filiation légitime peut être établie parla reconnaissance par le père de son enfant né horsmariage.

64 Le rapport d’État américain annuel sur le trafic desêtres humains (2001) a classé d’autres pays arabesnon-méditerranéens en tête de liste des pays ayantles plus mauvaises pratiques dans le domaine dutrafic des êtres humains : Bahreïn, Qatar, Arabiesaoudite et Emirats arabes unis.

65 Le Toda’ah Institute est une organisation israélienneaffiliée à la Coalition mondiale contre le trafic desfemmes.

66 Selon les statistiques du Comité contre l’esclavagemoderne (CCEM, 2001), 88,5% des victimesaccueillies dans les centres du Comité en France ontsubi des violences psychologiques (c’est le cas pour100% des victimes mineures) ; 44,3% d’entre ellesont subi des violences physiques (58% des victimesmineures) ; 17,6% des victimes ont subi des violencessexuelles (24,7% des victimes mineures) et 6,4% desvictimes ont été torturées.

67 Pour plus d’informations, voir le European Networkfor HIV/STD Prevention in Prostitution,http://www.europap.net/final/eu_policy.htm

68 Voir la Convention sur l’esclavage(http://193.194.138.190/html/menu3/b/f2sc.htm),pour une définition de l’esclavage. Si une personneaccepte de fournir un travail ou d’autres services,l’arrangement peut être qualifié de pratiquesimilaire à l’esclavage, si les termes et les conditionsde l’accord n’ont pas été définis de façonsatisfaisante ou si la personne perd sa liberté pourchanger de statut. Pour de plus amples informationssur les standards juridiques internationaux du traficdes femmes, voir http://hrw.org/reports/2000/japan/5-int-stand.htm

69 Voir le rapport de la FIDH sur la violence contre lesfemmes en Algérie, op. cit.

70 Selon le journal el-Khabar du 4 septembre 1998,2 084 femmes ont été violées entre 1993 et 1997(voir Ch. Bouatta, «De quelques violences à l’égarddes femmes» in Les Algériennes citoyennes endevenir, IMED, 1999).

71 Ch. Bouatta, De quelques violences à l’égard desfemmes, op.cit.

72 Les associations de défense des droits des femmesalgériennes ont dénoncé, à maintes reprises,l’absence de services de soutien aux victimes de viols.

73 La situation est rendue encore plus complexe par lefait que, dans le cas où le gouvernement a étéimpliqué dans la disparition, les femmes doiventsigner un certificat de décès contrefait, selon lequelles groupes armées sont responsables du décès. Pourde plus amples informations, contacter le Collectifdes familles de disparus en Algérie.

74 Pour le texte de la convention et des informations surle CEDAW, voir, http://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/cedaw.htm

75 Voir annexe III.76 Y compris l’article 19 (c) de la Convention de Vienne

sur le droit des traités.77 En matière de droits de l’homme, un État peut tout

au plus, en formulant une réserve, aménager une

période de transition, durant laquelle il prendra lesmesures nécessaires pour mettre sa législation enconformité avec la convention. Cette période detransition peut être longue ou courte mais ne peutêtre reportée indéfiniment et, en tout état de cause,l’État doit justifier les mesures prises pour donnereffet aux droits humains garantis (FIDH, Auditionpublique sur la promotion des droits de la femme etde l’égalité des chances dans le partenariat euro-méditerranéen, tenue au Parlement européen,novembre 2001).

78 Le préambule des constitutions révisées de 1992 et1996 se contente de stipuler que le Royaume duMaroc réaffirme son attachement aux droits del’homme tels qu’ils sont internationalementreconnus.

34

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 34

Page 39: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

2.1 Les dynamiques civiques

Plusieurs des initiatives civiques dans larégion se heurtent à des défis importantsdans leurs activités. Les États tentent souventde contrôler directement les activités de lasociété civile, en apportant des restrictions àleur financement et à leur libertéd’expression et d’association. De plus, lesorganisations de défense des droits desfemmes sont confrontées à des acteurs non-étatiques, notamment islamistes, qui nient lalégitimité des standards internationaux desdroits de l’Homme. Toutefois, malgré cesdifficultés, les mouvements de défense desdroits des femmes et les groupes associés dela société civile ont réussi à perdurer.

2.1.1 Le mouvement pour les droits

des femmes dans la région

MENA

Les mouvements de défense des droits desfemmes ont été liés à l’origine auxmouvements de libération nationale auMoyen-Orient et au Maghreb. Aujourd’hui,ils font partie d’un courant plus vaste enfaveur des droits de l’Homme et de ladémocratie dans la région MENA. La prioritéa été donnée par l’ensemble du mouvementdes femmes aux mobilisations en faveur duchangement des lois discriminatoires contreles femmes, de la lutte contre la violenceinstitutionnelle, sociale et conjugale à l’égarddes femmes et de la mise en place d’Étatsdémocratiques pleinement respectueux desdroits des femmes.

Le mouvement de défense des femmes abénéficié du savoir-faire acquis dans les

mouvements de libération nationale et ausein des formations politiques et desorganisations syndicales. Les grandesconférences internationales ont constitué,également, une importante opportunité pourla mobilisation des ONG et des activistes etont facilité les actions locales, régionales etinternationales relatives aux droits desfemmes dans la région MENA. Cesconférences ont également encouragé lamobilisation autour d’initiatives dumouvement actuel des femmes, commel’augmentation de l’âge minimum dumariage, la pénalisation des crimesd’honneur ou le retrait des réserves à laConvention CEDAW.

Les ONG de défense des droits des femmesdans la région MENA ont également tiréprofit de leur adhésion à des coalitionsrégionales et à des réseaux dans le Maghreb,au Proche Orient et dans les paysméditerranéens, de même qu’au niveauinternational.

Le mouvement des droits des femmes auMaghrebEn Algérie, les femmes ont été particulière-ment actives lors de la lutte pour la libérationnationale, de même qu’après l’indépendance.Les femmes se sont surtout mobilisées après lapromulgation du code du statut personnel en1984, pour obtenir des amendements au codede la famille. Toutefois, la forte politisationaux lendemains de l’arrêt du processusélectoral en janvier 1992 a eu des impactsnégatifs sur l’expansion et la consolidationd’un mouvement féministe très revendicatif,même s’il n’en était qu’à ses débuts79.

35

Part IIDynamiques civiques

en faveur de l’égalité des genresdans la région MENA

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 35

Page 40: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

La situation de conflit armé, l’insécurité ettout simplement la difficulté des femmes àfaire face aux exigences de la vie quotidiennedans un environnement économique etpolitique chaotique, ont rendu la tâche trèsdifficile au mouvement des femmes. Mais lemouvement des femmes a été parmi les plusacharnés dans la dénonciation du terrorismeet du manque de démocratie et il a bénéficiéd’un soutien important de la part dumouvement féminin international, surtoutdes pays du sud de la Méditerranée (France,Italie et Espagne, notamment).

À partir de 1997, toutefois, les ONGféministes ont repris l’initiative de demanderla révision du code du statut personnel. C’estainsi qu’une nouvelle coordination dequatorze associations a décidé de lancer unepétition nationale, dans le but d’obtenir unmillion de signatures en faveur de vingt-deuxamendements au code de la famille. Lapétition «un million de signatures pour lesdroits des femmes dans la famille» a permisau mouvement des femmes de s’unir une foisde plus et de reprendre l’initiative sur leterrain de la revendication, après s’être limitéde 1992 à 1997 à la dénonciation duterrorisme.

Au Maroc, le mouvement des femmesconstitue actuellement l’une descomposantes les plus actives et les plusdynamiques de la société civile, grâce auxalliances qu’il a pu tisser avec d’autres forcesciviles et politiques de la société. Les ONGpour les droits des femmes ont saisil’opportunité offerte par le changement degouvernement en 1998 et l’arrivée au pouvoirdu premier ministre El-Yousoufi, ainsi que lasuccession à la tête du pays de Mohammed VIen 1999, pour exercer des pressions en faveurde la réforme des lois et des pratiquesdiscriminatoires à l’égard des femmes.

Depuis les dernières années, et en dépit del’opposition notamment du mouvementislamiste, le mouvement des femmes estdevenu plus offensif et a adopté de nouvellesformes de mobilisation : en 1997, il a étéimpliqué dans la publication d’un rapportparallèle sur la mise en œuvre au plannational de la Convention CEDAW. En 2000,une marche a réuni des dizaines de milliers defemmes pour dénoncer l’abandon par legouvernement du Plan d’action pourl’intégration des femmes au développement.

En 2002, ont eu lieu des protestations devantle Parlement. Les associations de défense desdroits des femmes ont également organisédes campagnes et diffusé des informationssur la discrimination et la violence contre lesfemmes et ont créé des centres d’assistancejuridique et psychologique pour les femmesvictimes de violence.

Depuis les dernièresannées, et en dépit del’opposition notammentdu mouvement islamiste,le mouvement desfemmes est devenu plusoffensif et a adopté denouvelles formes demobilisation …

Une partie du succès du mouvement dedéfense des femmes au Maroc est due à sesstratégies de construction de coalitions avecd’autres composantes de la société civile.Grâce à ces coalitions et réseaux, lemouvement des femmes a réussi à exercerune pression plus forte sur le gouvernementqu’il n’aurait pu le faire autrement. Ce fut lecas par exemple en 1999, avec la création duRéseau d’appui au plan d’action pourl’intégration des femmes au développement,qui a réuni plus de deux cents ONG répartiessur l’ensemble du territoire. Au printemps2001, une coalition réunissant neuf ONGféministes a créé le réseau Printemps del’égalité, chargé d’opérer le suivi des travauxde la commission gouvernementale pour laréforme de la Moudawwana (CSP).

En Tunisie, le mouvement associatif aenregistré à la fin des années 80 undéveloppement important, avec la création del’Association des femmes tunisiennes pour larecherche en développement (AFTURD) et del’Association tunisienne des femmesdémocrates (ATFD). Ces deux principalescomposantes du mouvement autonome pourles droits des femmes font face à un régimepolitique qui dresse des obstacles face à lacréation d’associations qui ne lui sont pasinféodées et use d’un mécanisme subtil de

36

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 36

Page 41: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

récupération/appropriation80. Des associationsà ses ordres sont créées et encouragées, alorsque les associations autonomes sont à peinetolérées et leur capacité d’action restreinte pardes tracasseries administratives et policières.

Même si la Tunisie est l’un des pays les pluslibéraux de la région MENA en ce quiconcerne les droits des femmes, songouvernement actuel a une longue etsérieuse tradition de répression de la libertéd’association et d’expression. Mais de tellespolitiques répressives n’ont pas empêché lesONG de femmes en Tunisie de devenir unevoix puissante d’opposition aux atteintesgouvernementales quotidiennes à la libertéde réunion et d’expression.

Le contexte politique actuel leur impose de semobiliser sur deux fronts : celui des droits desfemmes, particulièrement sur la question dela violence contre les femmes et de ladiscrimination dans l’héritage, et sur le plande la démocratie et du respect des droits del’Homme.

Le mouvement des droits des femmes auMoyen-OrientLe mouvement des femmes en Égypte est l’undes plus anciens du monde arabe81. Dès lesannées vingt, le mouvement égyptien ainauguré l’ère d’un féminisme ouvert etorganisé, avec un mouvement local quidépassait les clivages sociaux et a réussi àmaintenir son indépendance par rapport àl’État.

Le mouvement féministe a toutefois faitl’objet d’oppositions et est actuellementmenacé en raison de la nouvelle loi quirestreint la liberté d’association82. De plus, endépit du fait que le féminisme égyptien tend àavoir recours à la fois à l’islam et à l’idéologienationaliste pour légitimer son discours83, ilmenace le patriarcat et est donc fortementcombattu par les milieux conservateurs etextrémistes, d’une part, et par le pouvoir enplace, d’autre part. Si ce climat hostile n’a pasempêché les activistes et organisations dedéfense des droits des femmes de continuerleurs activités, il a toutefois conduit à un degréde fragmentation qui a affecté leur capacité àformer des coalitions et à obtenir deschangements dans les lois et les pratiques. Lesrares réalisations couronnées de succès,comme l’éphémère réforme du statutpersonnel menée par Jihane Sadate84, ont

souvent été le fait d’initiatives individuelles defemmes proches des cercles du pouvoir.

En raison des restrictions croissantesauxquelles doivent faire face les ONG suiteaux modifications récentes de la loi sur lesassociations, le discours féministe seconcentre maintenant sur le droit des femmesà l’éducation et sur la nécessité de réformerles lois et pratiques qui discriminent lesfemmes au nom de l’islam. Au mêmemoment, les activistes féministes poursuiventleur lutte en faveur d’une révision du CSP. Enjanvier 2000, le Parlement égyptien a autoriséune nouvelle forme de rupture du mariage(khul‘), en autorisant pour la première fois lesfemmes à demander unilatéralement ledivorce pour des motifs d’incompatibilité.Toutefois, la loi exige de la femme qu’ellerenonce à sa pension alimentaire etrembourse à son mari le montant de la dot85.Plusieurs activistes féministes reconnaissentque cette nouvelle loi a facilité l’accès audivorce par les femmes, mais font remarquerque des études plus poussées sont nécessairespour évaluer son impact général.

Le mouvement féministea toutefois fait l’objetd’oppositions et estactuellement menacé enraison de la nouvelle loiqui restreint la libertéd’association.

En Israël, les activistes féministes se sontorganisées, dès les années 60 et 70, pourcombattre la discrimination et la violenceenvers les femmes. Elles ont créé des foyerspour femmes battues dans les années 70 etont lancé des campagnes pour la réforme dela loi sur l’avortement et l’emploi. Lesorganisations de défense des droits desfemmes continuent à lutter contre le traficdes femmes et le harcèlement sexuel et,malgré quelques réussites au niveau de laréforme juridique dans ces domaines, la miseen œuvre de ces textes par les autorités, demême que la réaction sociale face au statutdes femmes dans la société, demeurent unchallenge86.

37

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 37

Page 42: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

A la fin des années 80 et au début des années90, les femmes palestiniennes à l’intérieurd’Israël ont commencé à former leurs propresorganisations autonomes pour traiter desquestions de discrimination et de violence àl’égard des femmes. Elles ont mis en place descampagnes de prise de conscience publique àpropos des crimes d’honneur, créé des aidestéléphoniques d’urgence et ouvert des foyerspour femmes battues. En 2002, après septannées d’incessant lobby au Parlement et decampagnes auprès de l’opinion publique,elles ont réussi à faire voter une loi autorisantles femmes palestiniennes - musulmanes,chrétiennes ou druzes - à choisir entre lestribunaux civils et religieux pour les affairesde divorce. Les activistes féministescontinuent à faire pression sur les autoritésafin que les lois qui interdisent la polygamieet les mariages précoces soient appliquées.

En Jordanie, le mouvement féministe abénéficié de l’atmosphère de libéralisationdes années 50 et a créé en 1954 la Fédérationdes femmes arabes, qui appelait àl’amélioration du statut de la femme et à leurdroit de vote. Toutefois, la fin du processus dedémocratisation en 1957, caractérisée parl’interdiction de tous les partis politiques, aconduit à la dissolution de la Fédération et amarqué la fin de cette période précoced’activisme public féminin. Au cours desannées 60 et 70, alors que le pays était sous laloi martiale, des organisations sponsoriséespar l’État ont dominé la scène et ont servi decourroie de transmission à la politique dugouvernement auprès des femmes. Cettepériode a laissé derrière elle un sentiment decrainte, dont l’activisme public féminin n’a puse remettre qu’après 198987.

Malgré les restrictions sur les libertés, lescontraintes financières et politiques et lemanque de ressources humaines, lemouvement féministe jordanien a, depuislors, réussi à mettre en place des activités delobby en faveur de l’égalité et contre laviolence à l’encontre des femmes. Lacampagne nationale contre les crimesd’honneur, menée tout au long de l’année1999 et soutenue par des membres de lafamille royale, a eu un grand impact et apermis de sensibiliser l’opinion publiquenationale et internationale à cette pratiquebrutale. Les ONG des droits des femmes sesont fortement mobilisées pour réunir dessignatures en faveur d’une pétition

demandant l’abolition d’une loi prévoyant laréduction, voire la non-application, de lapeine sanctionnant les personnes coupablesde crimes d’honneur.

Bien que le Parlement jordanien n’ait pasaccepté d’amender la loi - la chambre basseayant refusé en 1999 et 2000 de la modifier -le roi Abdallah a décidé en 2002 de la réviserpar décret royal. Les femmes activistes ontdepuis lors soulevé la question de la mise enœuvre de ce décret. Le roi Abdallah a en effetdissous la chambre basse du Parlement en2001, avant que le décret ne soit ratifié et leParlement pourrait très bien décider derefuser l’amendement lorsqu’il sera ànouveau réuni. Les activistes fémininesdoivent donc attendre, avant de savoir si cecombat contre les crimes d’honneur a étégagné ou non.

Malgré les restrictionssur les libertés, lescontraintes financières etpolitiques et le manquede ressources humaines,le mouvement féministejordanien a, depuis lors,réussi à mettre en placedes activités de lobby enfaveur de l’égalité etcontre la violence àl’encontre des femmes.

Au Liban, le mouvement féministe a étédéclenché par la présence d’institutionsd’enseignement européennes et américaines,caractérisées par leur libéralisme. Toutefois,la longue période de guerre civile explique,pour une grande part, le retard enregistrédans l’émergence d’un mouvement féministeorganisé88. Sous l’impulsion de présidents dela République progressistes, le droit de votedes femmes fut introduit en 1953 et la loi surl’héritage des communautés non-musulmanes en 1959.

Ce n’est que récemment que les femmes ontcommencé à s’organiser sur des bases non-

38

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 38

Page 43: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

communautaires pour combattre lesprincipales discriminations dont elles sontvictimes, sans distinction d’appartenancereligieuse. Le réseau «Conseil libanais pour lalutte contre la violence» (The LebaneseCouncil to Resist Violence Against Women,LECORVAW)89, composé de plusieurs dizainesd’ONG, est un parfait exemple illustrantl’émergence d’une nouvelle conscienceféministe dans ce pays.

En Palestine, les femmes ont commencé às’organiser dans les années 70, dans lesunions estudiantines, syndicales et autres, etont progressivement conquis leurindépendance politique et établi leurspropres organisations de défense des droitsdes femmes. Les femmes ont été très activespendant la première intifada (1987-1991),dans la gestion communautaire et la directionde projets générateurs de bénéfices pour lesfemmes. Au début des années 90, lesorganisations de défense des droits desfemmes ont entrepris des campagnes desensibilisation de l’opinion publique et mis enplace des aides téléphoniques d’urgence etdes centres d’aide et de conseil aux femmesvictimes de violence.

Les ONG ont saisi l’opportunité offerte en1998 par l’établissement de l’autoritépalestinienne pour constituer une coalitionappelée «Parlement modèle, les femmes et lalégislation», résultat d’une série d’atelierschargés d’analyser la discrimination contre lesfemmes dans la loi palestinienne (laquelleconsiste en des lois égyptiennes etjordaniennes contemporaines, ainsi qu’en deslois ottomanes et textes datant de l’époquedu mandat britannique). Cette coalition atenu des sessions parlementairessymboliques, au cours desquelles hommes etfemmes participèrent de façon égale auxdébats relatifs aux lois et aux pratiquesdiscriminatoires à l’égard des femmes. Dansce parlement fictif, la coalition recommandaque le Conseil législatif palestinien adopteune loi palestinienne unifiée de la famille,fondée sur l’égalité entre hommes et femmeset sur le respect des droits de la femme,recommandations pour la réalisationdesquelles les activistes féministes continuentde se battre. Malgré une opposition virulentedes islamistes à ce Parlement modèle, lesactivistes féministes ont réussi à faire figurerdans l’agenda national la question de ladiscrimination à l’égard des femmes dans le

droit de la famille et à lier les droits desfemmes aux droits de l’Homme en général.

L’occupation israéliennea également eu un effetdirect extrêmementnégatif sur la capacitédu mouvement desfemmes palestiniennes àmettre en œuvre sesprogrammes, à mobiliseret à s’étendre.

A la suite de cette campagne du Parlementmodèle, l’ONG Mashriqiatt (basée à Gaza), adressé une analyse comparative des lois dustatut personnel et des conventionsinternationales, pour présenter desrevendications visant à établir l’égalité dansle cadre du référentiel musulman.L’opposition des groupes islamistes a été unenouvelle fois virulente et les autoritéspalestiniennes ont pris le prétexte de cetteopposition et des difficultés liées àl’occupation et au conflit avec Israël pour nepas donner suite aux demandes dumouvement des femmes. Par conséquent, etironiquement, bien que le mouvement desdroits des femmes soit né au sein dumouvement de libération nationale, il est àl’heure actuelle menacé par laprépondérance de cette même lutte pour lalibération nationale90.

L’occupation israélienne a également eu uneffet direct extrêmement négatif sur lacapacité du mouvement des femmespalestiniennes à mettre en œuvre sesprogrammes, à mobiliser et à s’étendre. Enraison des restrictions à la liberté demouvement, les membres des organisationsde défense des femmes ont les plus grandesdifficultés à se déplacer entre - et même àl’intérieur de - Gaza et de la Cisjordanie. Deplus, les sérieuses restrictions internationalessur les déplacements font que les femmespalestiniennes se heurtent à de grandesdifficultés pour participer aux conférencesrégionales et internationales, pourtantessentielles à leur formation et à leur capacité

39

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 39

Page 44: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

à diffuser des informations sur le statut desfemmes dans les territoires palestiniensoccupés et sous le contrôle de l’autoritépalestinienne. Malgré ces difficultés, lesfemmes poursuivent malgré tout leur lutte enfaveur de la défense de leurs droits91.

2.1.2 Les réseaux pour la promotion

des droits des femmes dans la

région MENA

Depuis le début des années 90, et dans le butd’améliorer son efficacité, le mouvementpour les droits des femmes a commencé àregarder à l’extérieur des frontièresnationales et à développer des solidaritésrégionales et internationales. Il a égalementrecours aux instruments juridiques desNations unies pour diffuser des informationsrelatives à la discrimination et à la violencecontre les femmes.

Le Collectif 95 Maghreb Egalité, créé en1991/1992 et toujours actif à l’heure actuelle,a été la première expérience de mise enréseau d’associations féministes autonomesdans la région. Le Collectif a pu continuer às’étendre, malgré les difficultés de lasituation politique en Algérie et en Tunisie,grâce notamment à une structureinstitutionnelle flexible et à ses procédures deprise de décision, basées sur le consensus. Sonplan d’action pour 2001-2006 inclut lapréparation de rapports parallèles pour leComité CEDAW sur la mise en œuvre de cetteconvention par l’Algérie et la Tunisie, demême qu’une étude détaillée surl’acceptation par les sociétés du Maghreb desvaleurs d’égalité92.

Le réseau Aisha, autre réseau important dansla région, établi en 1993, comprend desorganisations démocratiques et autonomesde femmes arabes d’Algérie, d’Égypte, deJordanie, du Liban, du Maroc, de Palestine,du Soudan et de Tunisie. Alors que plusieursréseaux de femmes sont orientésprincipalement vers l’international, ce réseauvise à promouvoir un agenda féministerégional, avec pour objectif de remettre enquestion les lois et pratiques discriminatoires,tout en prenant en considération l’expérienceunique des femmes arabes. Ce réseau s’estattaché à superviser la mise en œuvre par lespays arabes de leurs obligationsinternationales, décrivant les abus contre les

femmes, soutenant l’indépendance desorganisations de défense des femmes vis-à-visdes gouvernements et des partis politiques,mobilisant lors des campagnes en faveur desdroits des femmes, soutenant la participationdes femmes à des postes de prise de décisionet examinant la façon dont sont représentéesles femmes et les filles dans les manuelsscolaires et dans les médias.

Depuis le début desannées 90, et dans le butd’améliorer sonefficacité, le mouvementpour les droits desfemmes a commencé àregarder à l’extérieur desfrontières nationales et àdévelopper des solidaritésrégionales etinternationales.

Le Tribunal des femmes arabes est un autreréseau arabe, créé en 1996 au Liban etcomposé d’ONG de plusieurs pays arabes. Ilvise à lutter contre la violence à l’égard desfemmes, autant sur le plan des législationsqu’au niveau des pratiques. Parmi sesobjectifs figure le transfert de laproblématique de la violence à l’encontre desfemmes de la sphère privée vers la sphèrepublique. Ce réseau se fixe aussi commeobjectif d’exercer des pressions sur lesgouvernements des pays de la région, afinqu’ils prennent des mesures de protection etde soutien aux femmes victimes de violence.En 1999, le Tribunal des femmes arabes alancé une campagne en faveur de l’égalitéentre les sexes, spécialement dans l’accès audivorce.

Sisterhood is Global Institute (SIGI) a été crééen Jordanie en 1998. Cet institut est lepremier centre de formation technologiqueet de communication de la région à offrir descours d’informatique et d’internet axés sur larecherche et la lutte en faveur des droits desfemmes. Il offre également des formationsdans le domaine de l’enseignement interactif

40

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 40

Page 45: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

et de la capacité d’apprentissage desconnaissances. Il a ouvert récemment unwebsite : www.amanjordan.org, et a créé uncentre de ressources sur la violence contre lesfemmes.

Le Réseau Maghreb/Machreq d’informationet de formation sur le genre regroupel’Égypte, le Liban, le Maroc, la Syrie, la Tunisieet le Yémen et, depuis peu, l’Algérie. Créé en2000, ce réseau est un lieu de débat, deformation et d’échange d’informations sur laquestion des femmes, des genres et dudéveloppement. En mars 2002, ce réseau ainitié une campagne régionale en faveur dudroit des femmes mariées à des étrangers detransmettre leur nationalité à leurs enfants.

D’autres réseaux de la région fonctionnentdans l’informel, comme le Réseau des centresd’écoute et d’assistance aux victimes deviolence contre les femmes dans les pays duMaghreb, qui se réunit régulièrement pouréchanger et consolider son expérience dans ledomaine de l’écoute et de l’assistance auxfemmes victimes de violence.

Dans plusieurs pays de larégion, les pouvoirs enplace ont utilisé lalégislation sur leslibertés publiques etassociatives pour limiter,entraver ou contrôlerentièrement lesinitiatives de la sociétécivile.

De nouvelles formes de réseautageélectronique ont vu le jour au cours desdernières années, grâce à l’évolution destechniques modernes de communication. Desréseaux électroniques se sont développéssurtout au Moyen-Orient, alors qu’auMaghreb on enregistre encore un retard dansce domaine, dû notamment au moindredéveloppement des infrastructurestechnologiques (ex. Algérie) ou au contrôlepar l’État de ces moyens de communication(ex. Tunisie).

Par leur engagement citoyen, les activistespour la promotion des droits humains desfemmes mènent un combat permanent pourla démocratisation de leurs sociétésrespectives. Dans leur action quotidienne,elles ont du mal à assumer et à assurerl’autonomie de leur projet et de leursstructures et à trouver les moyens matériels ethumains pour mener, d’une façon continue etpermanente, leurs activités en faveur desdroits des femmes dans la région.

2.2 Réactions des États et des

acteurs non-étatiques à ces

dynamiques en faveur de

l’égalité des genres

Avec sa lutte pour l’égalité des genres dansles sphères publique et privée, fondée sur unlangage de droits de l’Homme et dedémocratie, le mouvement de défense desdroits des femmes menace de remettre encause les structures du pouvoir politique,social et culturel de la société.

En raison de ce message fort en faveur del’élimination de la discrimination et de laviolence à l’égard des femmes, le mouvementa été la cible à la fois de tentativesd’instrumentalisation par les élites politiquesétatiques et d’une opposition virulente de lapart d’acteurs non-étatiques, particulière-ment des groupes islamistes93.

2.2.1 Réaction des États

Les gouvernements de la région, dans unetentative effrénée de contrôler tous lesaspects et toutes les fonctions de l’État, onteu recours à différents types de mesuresdestinées à entraver, sinon empêcher, touteforme d’expression citoyenne etindépendante, particulièrement de la partd’ONG autonomes.

Dans plusieurs pays de la région, les pouvoirsen place ont utilisé la législation sur leslibertés publiques et associatives pour limiter,entraver ou contrôler entièrement lesinitiatives de la société civile. En Syrie, auLiban et en Égypte, par exemple, au lieu desimplement déclarer leur existence, commec’est le cas dans les pays les plus ouverts, lesorganisations de la société civile doiventobtenir une autorisation gouvernementaleafin d’être enregistrées, processus qui peut

41

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 41

Page 46: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

prendre des années. En Tunisie, les ONG sontclassifiées en fonction de leurs activités ou deleurs objectifs (loi de 1992 sur lesassociations94). En Syrie, la loi n° 93 sur lesassociations privées et les institutions prévoitque l’Union des femmes syriennes (officielle)représente l’ensemble des femmes syrienneset, qu’à ce titre, il n’est pas permis de créer denouvelles associations de défense des droitsdes femmes. En ayant recours à différentstypes de législations, et en décidant quellesorganisations seront autorisées à fonctionnerlégalement, les pouvoirs en placeparviennent donc à contrôler à la fois lesacteurs et les activités de la société civile.

Un autre exemple de recours au droit pourréprimer la société civile est celui del’Égypte, où l’État a adopté en 1999 une loisur les ONG (n° 153, aussi connue sous lenom de loi sur les associations civiles et lesfondations). Cette loi restreintparticulièrement l’indépendance des ONGen exigeant que chaque financementétranger soit approuvé par l’État Cette loi aété déclarée inconstitutionnelle par la HauteCour constitutionnelle en juin 2000 etremplacée par une nouvelle loi en juin 2002,mais les restrictions demeurent.

Dans une stratégie de survie du régime, lesgouvernements vont consentir de petitesconcessions aux islamistes et autres groupesconservateurs dans la société, afin de rallier àeux ces intérêts politiques puissants. Endonnant satisfaction à certaines de leursdemandes, le régime en place peut ainsiapaiser ces groupes sans avoir toutefois àdesserrer son emprise sur le pouvoir.

Toutefois, les revendications des islamistes etautres groupes conservateurs ont souvent uneffet direct et négatif sur les femmes et sur lemouvement des femmes. Ces négociations sefont en effet généralement aux dépens desdroits des femmes et des organisations dedéfense de leurs droits. Le mouvement dedéfense des femmes dans la région n’étantpas aussi puissant politiquement et donc pasaussi menaçant pour l’assise du pouvoir quene le sont les mouvements islamistes, les Étatspréféreront marchander avec ces derniers,dans leur stratégie de maintien du contrôlepolitique.

En Algérie, ainsi, malgré une fortemobilisation des groupes féministes etlibéraux en faveur de l’adoption d’un code de

la famille plus progressiste en 1984, le régimealgérien a adopté un texte qui portel’empreinte d’un conservatisme social, et nond’une égalité entre tous les citoyens au seinde la société. Ce code autorise les hommes àêtre les tuteurs des femmes et a été perçu parbeaucoup comme un geste de l’État pourapaiser les leaders religieux. Dans la décenniesuivante, divers gouvernements ontrégulièrement mis la question de la révisiondu CSP à l’ordre du jour, afin de s’assurer lesoutien des démocrates et des groupes dedéfense des droits des femmes. Aucunamendement, toutefois, n’a vu le jour, enraison des craintes des différentsgouvernements qu’une révision du CSP nedresse les islamistes contre eux. En 1997, lechef du gouvernement a mis en place unecommission interministérielle, qui a proposédes amendements au code de la famille,soumis au Parlement. En 2002, d’autrespropositions d’amendements au CSP ont étéavancées. Mais, à ce jour, ces projets derévision n’ont pas abouti95.

… l’Union des femmessyriennes (officielle)représente l’ensemble desfemmes syriennes et, à ce titre, il n’est paspermis de créer denouvelles associations dedéfense des droits desfemmes.

Au Maroc, lors des polémiques etmobilisations autour du Plan d’action pourl’intégration des femmes au développe-ment96 (1999/2000), le gouvernement de El-Youssoufi a préféré faire marche arrière etlaisser tomber les organisations féministes etde défense des droits de l’Homme, aveclesquelles il avait coopéré pour élaborer lePlan. Le but était d’éviter un conflit, coûteuxpolitiquement, avec le mouvement islamisteofficiel (parti de la justice et dudéveloppement), qui soutenait songouvernement et avait une assise et unpouvoir politique significatifs.

42

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 42

Page 47: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Les États de la région tentent également decontrôler toute expression civique autonome,par la création de commissions, comités etautres structures para-officielles qui seprésentent comme des ONG ou comme desorganisations fédératrices, et qui constituentun phénomène presque généralisé dans lespays du MENA. Le gouvernement égyptien aainsi créé un Comité national de la femme(Majlis), à la veille de la conférence de Pékin(1995), dans le but de canaliser et decontrôler toutes les initiatives dans ledomaine de la revendication de l’égalité etde la promotion des droits des femmes. EnÉgypte, en Jordanie, en Tunisie, en Syrie et auLiban, les ONG autonomes de femmes ont desdifficultés à exister et à entreprendre desprojets et des activités indépendantes, face àdes structures officielles qui bénéficientd’appui et de facilités politiques etfinancières qui leur permettent d’étendreleur champ d’action. En plus d’être soutenuesfinancièrement par ces États, ces organismesreçoivent également d’autres financements,les bailleurs de fonds ayant tendance à lesaider car elles se présentent comme desréseaux nationaux (regroupant, par exemple,l’ensemble du mouvement des femmes).Certains pays et bailleurs de fondsn’accepteront de financer que lesorganisations reconnues par l’État, alorsmême que les ONG autonomes sont souventdans l’incapacité d’obtenir une tellereconnaissance officielle.

De façon un peu inattendue, certainesorganisations de défense des droits desfemmes, associations nationales oucommissions qui ont de bons réseaux, ontparfois réussi à obtenir le patronage officield’une première dame, d’une princesse oud’une autre personnalité de premier plan,étroitement liée au pouvoir politique ou auxmonarchies. Ce patronage officiel, limité à unrôle symbolique, fait que certainesorganisations parviennent à fonctionner sansingérence de l’État, en raison des conflitsinternes et de l’embarras que causerait augouvernement l’interdiction d’uneorganisation bénéficiant d’un tel soutienétatique ou royal.

Toutefois, après le 11 septembre, les États ontpris des mesures énergiques contre lesactivistes des droits de l’Homme, restreignantencore davantage les libertés d’expression etd’association et rendant encore plus difficile

la lutte des organisations de défense desdroits des femmes contre la discrimination etla violence.

2.2.2 Réaction des acteurs non-

étatiques

A côté des féministes «universalistes» décritesci-dessus, auxquelles ce rapport est largementconsacré, le mouvement des femmes dans larégion inclut également les islamistes, ou cequi est de plus en plus désigné par le terme«féminisme islamique». Dans l’ensemble despays du MENA, les groupes islamistes,presque toutes tendances confondues,tendanct à considérer les instrumentsjuridiques internationaux, et plusparticulièrement la Convention CEDAW et laplate-forme d’action de Pékin, comme lesinstruments d’une vaste conspiration, ourdiepar l’Occident et dirigée contre l’islam et lespays arabes. Si l’on en croit ces groupes, lessionistes et les impérialistes, sous couvertd’universalisme et de modernisme,chercheraient à détruire l’identité arabo-islamique, afin de permettre à l’Occidentd’asseoir sa domination sur les paysislamiques et de mieux exploiter leursressources97.

Pour certains islamistes,les femmes dumouvement pour l’égalitédes droits sont à la soldede l’Occident.

Ces groupes islamistes affirment, de plus, qu’àl’égalité onusienne consacrée par laDéclaration universelle des droits de l’Hommeet reprise par les activistes universalistes dedéfense des droits des femmes, il faut opposerla notion d’«équité» présentée comme étantplus respectueuse des différences entrehommes et femmes, de leur natureintrinsèquement complémentaire et de leursrôles respectifs. Par conséquent, alors que lesislamistes appellent aux droits égaux desfemmes dans le domaine de l’éducation, del’emploi et de la participation politique, cesappels restent confinés à l’intérieur d’un cadrereligieux qui préserve la traditionnelle divisiondu travail entre hommes et femmes98.

43

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 43

Page 48: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Les groupes islamistes sont ainsi violemmentopposés au mouvement de défense des droitsdes femmes, qui font appel aux droitsuniversels de l’Homme et aux instrumentsjuridiques internationaux pour imposerl’égalité des femmes dans la société. Pourcertains islamistes, les femmes du mouvementpour l’égalité des droits sont à la solde del’Occident. Ils essaient ainsi de jeter lasuspicion sur leurs croyances religieuses et surleur moralité, les accusant, par exemple, dedétourner à des fins personnelles l’argentoctroyé par les bailleurs de fonds. Dans descas plus extrêmes, des procédures pénalessont engagées contre des femmes activistes.Ce fut ainsi le cas de Toujane Faisal99,ancienne députée jordanienne, et de NawalSaadawi, en Égypte, qui s’est trouvéeimpliquée dans un procès d’apostasie intenté,cette fois-ci, par les islamistes100.

Un grand nombre de groupes islamistesprésentant leur argumentation d’un point devue culturel et religieux arabo-musulman, cesarguments sont perçus aux niveauxinternational et régional comme plusauthentiques et plus en phase avec latradition et la culture des pays de la régionMENA101. Les islamistes parviennent ainsi àacquérir une légitimité et un soutien public,en affirmant que la situation des femmesdans la région MENA est liée à des normesreligieuses et aux traditions culturelles, alorsque le mouvement féministe de promotionde la liberté et de l’égalité des femmes est,lui, perçu comme entièrement étranger auxtraditions culturelles arabo-musulmanes.

L’argumentation des islamistes vientcontredire le fondement même dumouvement des droits des femmes. Lesobligations universelles relatives aux droits del’Homme constituent le fondement juridiquede la promotion et de la protection des droitsfondamentaux des femmes, et les principesexprimés dans la Déclaration universelle sontl’essence qui légitime le mouvement desfemmes. Par conséquent, argumenter enfaveur de l’«équité» plutôt que de l’égalité,c’est vouloir maintenir une structure depouvoir opprimante pour les femmes etrefuser de chercher les racines de l’inégalitédes genres.

Face à cette légitimation culturelle etreligieuse, certains groupes et individualitésféministes102 ont pris l’initiative de

l’appropriation des textes religieuxfondateurs, à savoir le Coran et les Hadiths,en recourant à un effort d’interprétationprogressiste et à une lecture historique de cestextes, de façon à pouvoir légitimer leurdiscours et leur dénonciation du patriarcat.Toutefois, la stratégie d’une partie dumouvement féministe de la région MENA decombattre les conservateurs et les islamistessur leur propre terrain ne fait pas toujoursl’unanimité au sein du mouvement et faitl’objet d’analyses et de vives discussions ausein de la communauté des universitaires etdes activistes103.

L’argumentation desislamistes vientcontredire le fondementmême du mouvement desdroits des femmes.

La lutte contre le mouvement des droits desfemmes et la confrontation avec les acteursétatiques et non-étatiques se déroulent dansun contraste saisissant avec les efforts de larégion en vue d’une modernisation politiqueet économique. Ni les États, ni les acteursnon-étatiques, sont prêts à renoncer à leurmain-mise sur le pouvoir et à adopter lesréformes économiques, juridiques et socialesqui permettraient aux femmes de jouir de latotalité de leurs droits au sein de la société.

44

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 44

Page 49: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Notes79 Voir la première partie de ce rapport.80 Collectif 95 Maghreb Egalité, Violations flagrantes

des droits et violences à l’égard des femmes auMaghreb, Rapport annuel 1996/97.

81 M. Badran, «Independent Women : More than aCentury of Feminism in Egypt», in J. Tucker (éd.),Arab Women : Old Boundaries, New Frontiers,Indiana University Press, 1993.

82 Voir la section 2.2.2. de ce rapport.83 M. Badran, «Competing Agenda : Feminists, Islam

and the State in 19th and 20th Century Egypt», in D.Kandiyoti (éd), Women, Islam and the State,Macmillan, London 1991.

84 Jihane Sadate, épouse du président Anouar Sadate(président de l’Égypte entre 1970 et 1981), a tentéd’imposer une réforme du statut personnel enÉgypte en 1979. Mais cette réforme n’a pas durélongtemps car elle a été déclarée inconstitutionnelle

(pour vice de procédure) par la Haute Courconstitutionnelle en 1985.

85 Voir la section 1.1 de ce rapport.86 Pour de plus amples informations sur le mouvement

féministe en Israël, voir B. Swirsky et M. Safir (éds.),Calling the Equality Bluff : Women in Israel, NewYork, Pergamon Press, 1991.

87 Pour davantage d’informations sur le mouvementdes femmes en Jordanie, voir A. ’Amawi, Against AllOdds : Jordanian Women, Elections and PoliticalEmpowerment, Al-Kutbah Institute of HumanDevelopment and Konrad Adenauer Foundation,2001.

88 Pour plus de détails sur le mouvement féminin auLiban, voir L.R. Shahadeh, Women and War inLebanon, University Press of Florida, 1999.

89 Voir, en Annexe VII, l’adresse du site Web du réseauet d’autres réseaux de la région MENA.

90 Pour plus de détails, voir F. Labadi, P. Johnson, R.Hammami, et L. Welchmann, Islamic Family Law and

45

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Part II : Résumé

Le mouvement de défense des droits des femmes fonctionnant dans le cadre des droitsuniversels de l’Homme et des obligations juridiques internationales, les initiativesciviques en faveur de la promotion de l’égalité des genres dans la région tendent àêtre étroitement liées aux mouvements en faveur des droits de l’Homme et de ladémocratie qui sont, eux aussi, actifs dans la région.

Diverses organisations de défense des droits des femmes sont actives à travers leMaghreb et le Moyen-Orient, et la dernière décennie a été marquée par ledéveloppement par ces organisations de réseaux régionaux de femmes, destinés àcréer des solidarités et améliorer l’effectivité du mouvement.

Toutefois, les activistes féministes se heurtent à une opposition menée à la fois par desacteurs étatiques et non-étatiques. Les États de la région cherchent à garder lecontrôle de la société civile et utilisent différentes méthodes pour entraver l’action desorganisations non gouvernementales autonomes, y compris le recours à une législationrépressive, à la conciliation des intérêts conservateurs et islamistes et à la créationd’organismes non-gouvernementaux para-étatiques.

Les acteurs non-étatiques, en particulier les groupes islamistes, s’opposent eux aussiaux organisations de défense des droits des femmes. De tels groupes affirment que lesstandards internationaux des droits de l’Homme et les normes juridiquesinternationales invoqués par les féministes ne reconnaissent pas les différencesintrinsèques entre hommes et femmes.

Ainsi, alors que le mouvement des droits des femmes est actif à travers la région, il seheurte dans son action à des menaces sérieuses dues à des intérêts étatiques et non-étatiques.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 45

Page 50: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

the Transition to Palestinian Statehood : Constraintsand Opportunities for Legal Reform, sous le site websuivant : http://www.law.emory.edu/IFL/index2.html

91 Pour de plus amples informations, voir le rapport surle statut des femmes palestiniennes en fonction dela Convention CEDAW, publié en arabe en 2001 parle Women’s Center for Legal Aid and Counselling etle Programme des Nations unies pour ledéveloppement.

92 Pour plus de renseignements sur le Collectif 95Maghreb Egalité, voir :h t t p : / / w w w . c o s p e . i t / r e t e d o n n e /Associazioni/col_rabat.htm

93 Dans ce rapport, le terme «islamiste» désignecertains groupes politiques activistes, dont le but estprioritairement de gouverner et d’être gouvernésseulement par les principes islamiques tels qu’ils lesdéfinissent. Toutefois, ces groupes sont très divers ;alors que certains considèrent l’islam comme uneconstruction politico-religieuse monolithiquedestinée à contrebalancer des idéologiesoccidentales concurrentes, d’autres regroupent desactivistes politiques engagés dans uneinterprétation modernisante des écrits islamiques etde la shari’a (voir A. Afsaruddin (éd.), Hermeneuticsand Honor : Negotiating Female “Public” Space inIslamic Societies, 1999.

94 Voir H. Chekir, Le statut des femmes entre les texteset les résistances, Le cas de la Tunisie, Ed. Chama.

95 Pour plus de détails, voir M. Lazreg, The Eloquenceof Silence. Algerian Women in Question, Routledge,Londres, 1994.

96 Le Plan d’action pour l’intégration des femmes audéveloppement est un projet conceptuel élaborépar le gouvernement marocain en 1998, enpartenariat avec les organisations féministes et desdroits de l’homme. Il a fait l’objet d’un débat sansprécédent au Maroc et d’une polémique entre lescourants progressistes et modernistes, d’une part, etles courants conservateurs et islamistes, d’autre part.

97 R. Naciri, Les femmes arabes et l’intersection entrepatriarcat, racismes et intolérance. Communicationau panel de l’UNIFEM, Conférence mondiale contrele racisme, la discrimination raciale, la xénophobieet l’intolérance qui y est associée, Durban. Afriquedu Sud, septembre 2001.

98 Au Maroc, le porte-parole du mouvement islamique(al-Adl wa Ihsane) et fille du leader du mouvement,appelle à une lecture des droits des femmes dans lecadre d’un système référentiel musulman.

99 À la suite de la publication sur un site Internet d’unelettre ouverte au Premier ministre, l’accusant d’avoirprofité financièrement de la décision de doubler lestarifs d’assurance des voitures, Toujane Faisal a étéarrêtée le 29 mars 2002 et condamnée par la cour desûreté de l’État à dix-huit mois de prison, peinemaximale prévue par la loi. En juin 2002, Toujane aentamé une grève de la faim et a finalement étégraciée pour raisons humanitaires, après queplusieurs appels aient été lancés par desorganisations droits de l’homme.

100 Aujourd’hui âgée de soixante-dix ans, NawalSaadaoui est psychiatre, écrivain féministe

égyptienne et bien connue pour son engagementnational et international en faveur de la défense desdroits fondamentaux des femmes. En avril 2001, unavocat islamiste a engagé une action (hisba) devantles tribunaux, afin que soit prononcée l’annulationde son mariage pour hérésie ayant entraînél’apostasie. En 2002, un jugement de non-lieu a étérendu en sa faveur. Pour plus de détails, voirhttp://news.bbc.co.uk/2/hi/middle_east/1430497.stm

101 R. Naciri, Les femmes arabes et l’intersection entrepatriarcat, racismes et intolérances, op. cit.

102 Voir, par exemple, F. Mernissi, Women and Islam : AnHistorical and Theological Enquiry, Basil Blackwell,Oxford, 1991 et L. Ahmed, Women and Gender inIslam : Historical Roots of a Modern Debate, YaleUniversity Press, 1992.

103 Voir notamment M.H. Lucas, Stratégies des femmeset des mouvements de femmes dans le mondemusulman par rapport aux fondamentalismes : del’entrisme à l’internationalisme, Women LivingUnder Muslim Laws, Document no 2, 1990 ; D.Kandiyoti (éd), Women, Islam and the State,Macmillan, Londres, 1991 ; D. Kandiyoti, «Islam andpatriarchy : a comparative perspective», in N. Keddieet B. Baron (éds), Women in Middle Eastern History: Shifting Boundaries in Sex and Gender, YaleUniversity Press, 1991 ; Women Living Under MuslimLaws, 1991, Dossier 7/8, M. Badran, «CompetingAgenda : Feminists, Islam and the State in 19th and20th Century Egypt», in D. Kandiyoti (éd), Women,Islam and the State, Macmillan, London, 1991.

46

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 46

Page 51: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

En novembre 1995, à Barcelone, la conférenceministérielle euro-méditerranéenne a réuni lesministres des Affaires étrangères des quinzepays membres de l’UE et les douze paysméditerranéens partenaires et a officiellementlancé le Partenariat euro-méditerranéen (PEM).La conférence de Barcelone a abouti àl’adoption à l’unanimité des vingt-sept pays dela Déclaration de Barcelone, ainsi que duprocessus de conclusion d’accords d’associationentre tous les partenaires méditerranéens etl’UE. Avec cette Déclaration, chaque Étatsignataire a accepté les trois volets duPartenariat : un partenariat politique et desécurité, un partenariat économique etfinancier et un partenariat dans les domainessocial, culturel et humain. Les partiessignataires se sont également engagées à «agirconformément à la Charte des Nations unies età la Déclaration universelle des droits del’Homme, ainsi qu’aux autres obligationsrésultant du droit international, notammentcelles qui découlent des instruments régionauxet internationaux auxquels elles sont parties».Cet engagement à respecter les droits del’Homme est également réaffirmé dans l’article2 de l’accord d’association.

Les activistes et organisations féministes de larégion MENA qui avaient suivi étroitement leprocessus d’établissement du PEM, ont accueillifavorablement le Partenariat et sespotentialités de promotion des droits desfemmes. Toutefois, la mise en place desinstruments politiques, institutionnels etfinanciers du PEM à Barcelone en 1995, a étéréalisée en l’absence des femmes, et plusparticulièrement celles de la rive sud de laMéditerranée. Cette absence de représentationdes intérêts des femmes lors de l’établissement

du PEM s’est reflétée, à son tour, dans l’absencede la question des femmes à la fois dans laDéclaration et dans les accords d’association.

Sept ans après la création du PEM, l’écrasantemajorité des organisations féministes et dedéfense des droits des femmes n’est toujourspas concernée par ce processus. Très peu deprogrès ont été enregistrés dans l’intégrationdes droits des femmes dans le PEM. Toutefois,plusieurs de ces associations pour lapromotion des droits des femmes et certainespersonnalités féminines considèrent lePartenariat comme un moyen d’encouragerl’ouverture de leurs sociétés aux valeursuniverselles, au nombre desquelles les droitsdes femmes, comme fondement de l’élabora-tion d’une société juste et démocratique.

3.1 La mise en œuvre du Partenariat

euro-méditerranéen néglige les

droits des femmes

La mise en œuvre du Partenariat et dudialogue en son sein, se situent à la fois auxniveaux multilatéral et bilatéral. Au niveaumultilatéral, le PEM encourage lacoopération régionale entre l’UE et les vingt-sept États signataires sur diverses questions,sur la base de la Déclaration de Barcelone.

La coopération multilatérale sur la questiondes femmes est définie de façon peuconvaincante dans la Déclaration deBarcelone. La seule mention faite aux femmesdans ce texte figure dans le volet n° II, relatifà la coopération économique et financière,dans laquelle les participants reconnaissaient

«le rôle clé des femmes dans ledéveloppement et s’engagent à

47

Part IIIDroits des femmes

dans le processus du Partenariat euro-méditerranéen

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 47

Page 52: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

promouvoir la participation active desfemmes dans la vie économique etsociale et dans la création d’emplois».

En ne faisant qu’une référence marginale auxfemmes, et seulement dans un contexteéconomique et financier, les partenaires duPEM n’ont pas réussi à reconnaîtrel’indivisibilité des droits des femmes, desdroits de l’Homme et de la démocratisation.Au contraire, la référence aux femmesressemble à un simple ajout et le statut desfemmes est traité en tant que problème socialà part, au même titre que la pauvreté,l’analphabétisme, la formation ou la créationd’emplois.

Les accords d’association, qui représentent leniveau bilatéral de coopération entre lesÉtats partenaires individuels et l’UE,n’adressent pas, eux non plus, la question desdroits des femmes dans le cadre des droits del’Homme et de la démocratie. Alors que cesaccords traitent essentiellementd’arrangements commerciaux et delibéralisation, ils comprennent une clausegénérale relative au respect des droits del’Homme, qui précise que le respect desprincipes démocratiques et des droits del’Homme fondamentaux constitue un«élément essentiel» des accords. Toutefois, iln’existe, là-encore, ni disposition ni mentionspécifique et distincte du respect des droitsdes femmes.

Cette quasi-absence de référence aux droitsdes femmes éloigne la réalisation de l’objectifd’intégration des genres104 auquel l’Unioneuropéenne et les pays partenaires du PEM sesont engagés. Plus particulièrement,l’absence d’intégration des genres àl’intérieur du PEM vient contredire lespolitiques de l’UE, ainsi que les obligationsdes États membres du PEM en vertu du droitinternational.

L’UE s’est engagée à incorporer les genresdans différents domaines, y compris dans lacoopération en matière de développement,comme indiqué dans différents documents-clés105. De plus, le Conseil des ministres adécidé que chaque Présidence devraitchercher à intégrer les questions relatives àl’égalité et au genre dans au moins deuxconseils autres que le Conseil Emploi etPolitiques sociales, habituellement en chargede cette question (cet engagement a été misen œuvre, pour la première fois, sous la

présidence française, au deuxième semestrede l’année 2000 puis, par la suite, par laprésidence suédoise au premier semestre2001).

Cette quasi-absence deréférence aux droits desfemmes éloigne laréalisation de l’objectifd’intégration des genresauquel l’Unioneuropéenne et les payspartenaires du PEM sesont engagés.

Le désintérêt pour les femmes dans le PEMvient également violer les obligationsinternationales des États partenaires du PEM.Conformément à la Déclaration de Pékin106,l’UE et les États partenaires qui ont déjàadopté la Déclaration, ont l’obligationpositive d’inclure une analyse par genre dansl’élaboration, la mise en œuvre, la supervisionet l’évaluation de toutes leurs politiques et detous leurs programmes, afin de s’assurer qu’ilsaspirent bien à des résultats nondiscriminatoires, s’acheminent vers uneégalité des genres en général et atteignenten pratique cet objectif.

Chaque partenaire a aussi ratifié la Chartedes Nations unies et accepté la Déclarationuniverselle des droits de l’Homme qui, toutesdeux, condamnent la discrimination sur labase du sexe. De plus, la Déclaration deBarcelone prévoit elle-même que les Étatssignataires s’engagent à agir conformémentà la Charte et à la Déclaration universelle, àdévelopper l’État de droit et la démocratiedans leur système politique et à respecter lesdroits de l’Homme et les libertésfondamentales.

Ainsi, malgré la maigre référence aux droitsdes femmes dans les documents fondateursdu PEM, l’UE et les États partenaires sonttenus non seulement d’intégrer les genres,mais également de lever les réserves qu’ilsont faites à la convention CEDAW afin demettre en oeuvre le principe d’égalité107.

48

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 48

Page 53: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

3.1.1 Quelques initiatives en faveur

des droits des femmes dans le

PEM

Quelques initiatives positives d’intégrationdes droits des femmes dans le PEM ont étéenregistrées ces dernières années. Après unerecommandation de la réunion euro-méditerranéenne des ministres des Affairesétrangères en novembre 2001, relative à laprise en compte des principes de l’égalité deschances dans tous les aspects du Partenariat,cette question a, pour la première fois, étéinscrite à l’ordre du jour de la réunion duComité d’association UE-Maroc, tenue enmars 2002. Les deux parties sont tombéesd’accord pour intégrer l’égalité des chanceset les besoins spécifiques des femmes dans ledialogue Maroc-UE, dans tous les projets decoopération y compris les projets MEDA108.Ce serait un pas très positif si cette initiativeétait généralisée à tous les paysméditerranéens ayant signé des accordsd’association avec l’UE.

Le rôle de la présidence belge a été trèsimportant en 2001 dans la mise en exerguede la question des droits des femmes dans lePEM, au-delà de la sphère strictementéconomique. La présidence belge a insisté surla nécessité d’intégrer les genres dans les troisvolets du Partenariat euro-méditerranéen,déclarant

«la nécessité de développer dansl’avenir une approche en termes degenre et d’égalité dans l’ensemble desvolets du P.E.M»109.

L’importance de l’intégration des genres aégalement été soulignée en ce qui concernela coopération bilatérale à l’intérieur du PEM.Sous la présidence belge, il a été demandé àla Commission européenne d’évaluer lesprogrammes du Partenariat euro-méditerranéen du point de vue de l’égalité,pour estimer dans quelle mesure ilsimpliquent des programmes relatifs auxfemmes et l’effet que les activités menées ontpu avoir sur la vie de ces dernières. Il s’agitdonc d’évaluer les programmes du PEM àtravers l’intégration des genres.

La présidence belge a également présenté lepremier programme régional euro-méditerranéen sur le renforcement du rôledes femmes dans la vie économique. Ceprogramme régional a été entériné en

novembre 2001 par la réunion euro-méditerranéenne des ministres des Affairesétrangères et devrait être mis en œuvre par laCommission européenne à travers lesprogrammes MEDA à compter de 2004. LaCommission européenne finance égalementquelques programmes et projets relatifs auxdroits des femmes, au niveau bilatéral.

Le rôle de la présidencebelge a été trèsimportant en 2001 dansla mise en exergue de laquestion des droits desfemmes dans le PEM, au-delà de la sphèrestrictement économique.

Le Parlement européen a également insistésur la question des droits des femmes et de ladiscrimination entre les genres dans la régionMENA, en adoptant en 2002 un rapport surles droits des femmes et l’égalité des chancesdans les pays méditerranéens, qui poseclairement la question des droitsfondamentaux et des droits civils des femmes,notamment le problème de la discriminationcontre les femmes dans les codes du statutpersonnel110. Le Parlement a demandé à laCommission européenne de suivre lesrecommandations du rapport.

Le Parlement européen a aussi demandé à laCommission européenne d’entreprendre uneévaluation par les genres des différentsprogrammes initiés à l’intérieur duPartenariat, dans le but d’évaluer dans quellemesure les projets relatifs aux droits desfemmes sont intégrés dans les activités defaçon générale111.

Une autre initiative a eu lieu en 1999, avec lacréation du Forum euro-méditerranéen desfemmes parlementaires. Le Forum a depuislors appelé à la création d’un groupe detravail spécifique sur les droits des femmes,dans le cadre du Forum parlementaire euro-méditerranéen général. La troisième réuniondu Forum euro-méditerranéen des femmesparlementaires s’est tenue à Madrid enoctobre 2002112.

49

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 49

Page 54: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

3.1.2 Bilan de l’intégration des

genres dans le PEM

En dépit des quelques évolutions positivesénoncées ci-dessus, une réticence subsistedans le dialogue politique entre lespartenaires du PEM et à l’intérieur desorganes du PEM, quant à l’intégration desdroits des femmes dans le Partenariat.

Alors que l’engagement de l’UE en faveur del’intégration des genres et les quelquesinitiatives timides à l’intérieur du PEM enfaveur de la promotion des droits des femmessont des avancées positives qu’il fautencourager, ces engagements et initiativesdoivent être mis en œuvre, si on ne veut pasqu’ils se réduisent à de vaines promesses. Sil’Union européenne veut faire progresser lesdroits des femmes et réduireconsidérablement la discrimination à leurégard, elle doit affecter les ressourcespolitiques et matérielles nécessaires afin demettre en œuvre ses engagements.

Depuis la conférence de Barcelone, lesministres des Affaires étrangères des vingt-septpartenaires se sont réunis périodiquement, àMalte (1997), à Palerme (1998, réunioninformelle), à Stuttgart (1999), à Lisbonne(2000, réunion informelle), à Bruxelles (2001) età Valence (2002). En outre, plusieurs réunionsministérielles sectorielles ont été organisées aucours de cette période. Mais, à l’occasion detoutes ces réunions, la question de l’intégrationdes femmes dans le PEM n’a été que rarementsoulevée et uniquement sous l’aspect relatif àla coopération dans le domaine social etéconomique.

Si, en novembre 2001, la réunion euro-méditerranéenne des ministres des Affairesétrangères a approuvé le programme euro-méditerranéen régional sur la promotion durôle des femmes dans la vie économique, lesparticipants ont mis l’accent sur la nécessitéde promouvoir le rôle des femmes dans lerespect des valeurs religieuses et culturelles.Or, cette mention restrictive est en parfaitecontradiction avec la Déclaration de Pékin,adoptée par l’ensemble des partenaires, selonlaquelle s’il convient de ne pas perdre de vuel’importance des particularismes nationaux etrégionaux et la diversité historique, culturelleet religieuse, il est du devoir des États, quelque soit leur système politique, économiqueet culturel, de promouvoir et de protégertous les droits de l’Homme et toutes les

libertés fondamentales. Par conséquent, alorsque le programme régional abordera l’unedes questions fondamentales relatives à la viedes femmes, il ne remettra pas en questionles structures «religieuses et culturelles» quipropagent l’inégalité entre les genres.

… l’invocation du respectdes valeurs culturelles etreligieuses sert deprétexte aux décideurs depart et d’autre de laMéditerranée, pourjustifier leur manque devolonté dans le domainede l’égalité des genres.

Un autre exemple des réticences à mettre encause le status quo apparaît dans le discoursqu’a tenu Louis Michel, vice-Premier ministreet ministre belge des Affaires étrangères,devant le Forum régional euro-méditerranéen sur le rôle des femmes dans ledéveloppement économique, dans lequel il aévoqué la nécessité de «ne pas mettre labarre trop haut ni trop bas. Il faut que lespropositions correspondent à ce que lasociété comprend et accepte»113.

Le recours à l’explication «culturelle etreligieuse» pour ne pas traiter des droits desfemmes avec plus de vigueur dans le PEM, faitdes droits des femmes une question culturelleou religieuse et, par conséquent, unequestion domestique relevant des affairesinternes des partenaires.

En fin de compte, l’invocation du respect desvaleurs culturelles et religieuses sert deprétexte aux décideurs de part et d’autre dela Méditerranée, pour justifier leur manquede volonté dans le domaine de l’égalité desgenres. Il en résulte que les idées et pratiquessous-jacentes, à l’origine du statutsubordonné des femmes dans la société,demeurent inchangées. Au Maroc, ainsi, lademande des femmes pour les coursd’alphabétisation est supérieure à celle deshommes, y compris de la part des femmes lesmoins jeunes. Ce ne sont donc pas les normesculturelles et traditionnelles qui freinent le

50

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 50

Page 55: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

progrès dans ce domaine, mais bien lapauvreté ainsi que le manque de volontépolitique et l’absence de choix.

Certaines des réformes politiques etéconomiques promues par le PEM ont deseffets négatifs sur les droits des femmes dansla région MENA. Toutefois, sous couvert derespect des valeurs «culturelles etreligieuses», les différents pays des deux rivesde la Méditerranée continuent à privilégierleurs intérêts politiques et économiques, audétriment des droits des femmes. Lasensibilité de la question de leurs droits estutilisée comme prétexte pour ne pasconsidérer les femmes comme des citoyennesmais comme appartenant àla sphère privée.

Il en résulte que les projets mis en place dansle cadre du PEM pour promouvoir les droitsdes femmes sont des petits projets, qui necherchent qu’à apporter des solutionsponctuelles et spécifiques à despréoccupations particulières considéréescomme particulièrement féminines, commel’alphabétisation, l’hygiène, l’économiedomestique, la vulgarisation agricole et lesactivités génératrices de revenus. Touteinitiative de promotion des droits des femmesdans le PEM devrait trouver sa source dansune tentative concertée de modifier lesstructures sociales qui perpétuent ladiscrimination et la violence envers lesfemmes, ou qui les empêchent de réaliser latotalité de leurs droits humainsfondamentaux.

Les projets des femmes, en règle générale,ont davantage insisté sur le rôle économiquedes femmes que sur l’incorporation desgenres. Toutefois, cette approche est contre-productive vraiment loin d’être satisfaisante,dans la mesure où les femmes participentdéjà à l’économie de leur pays, mais que cettecontribution n’est pas reconnue, etqu’appeler à une augmentation de leurparticipation entraîne essentiellement unaccroissement de leurs responsabilitésdomestiques, déjà très lourdes. De plus, lesbénéficiaires de ces projets sont souvent desfemmes entrepreneurs alors que ce ne sontpas elles qui ont le plus besoin d’être aidées.

Par ailleurs, insister uniquement sur lesprojets générateurs de revenus et sur lamicro-entreprise, revient souvent à imposeraux femmes les plus pauvres un surcroît detravail, alors qu’elles sont déjà responsables

de façon générale sinon exclusive, des tâchesdomestiques et des enfants. Mêmelorsqu’elles arrivent à surmonter ces obstaclesafin de participer à de tels projets etprogrammes, les femmes courent le risque devoir leurs gains contrôlés par les membresmasculins de leur parenté ou par desintermédiaires, en raison de leurs droitslégaux plus limités, de leur manqued’indépendance et des règles socialesrelatives à l’accès au salaire et au contrôle surla propriété.

Interventions etprogrammes sontsupposés être neutres etreposent souvent surl’hypothèse implicite queleurs résultatsprofiterontautomatiquement etéquitablement auxfemmes autant qu’auxhommes.

Le problème n’est pas que les femmes neparticipent pas suffisamment à l’économie,mais que leurs contributions sontgénéralement confinées à la sphère privée,où elles ne sont pas entièrement etofficiellement reconnues. Plusieurs freinsd’ordre juridique et politique limitent lecontrôle et la valorisation par les femmes deleur participation et c’est dans la sphèreprivée qu’il faut chercher les obstacles et lesraisons de l’exclusion ou, parfois, de l’auto-exclusion des femmes des activitésprofessionnelles et de la prise de la décisiondans la sphère publique. Les femmes nepeuvent participer pleinement à la viepublique car les règles et relations quistructurent l’ordre privé reposent sur unestructure qui exige leur obéissance etmaintient leur subordination. Ce qui limite,bien évidemment de façon significative leurschoix individuels et collectifs.

Le genre n’est généralement passuffisamment pris en compte lors de

51

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 51

Page 56: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

l’élaboration des politiques. Interventions etprogrammes sont supposés être neutres etreposent souvent sur l’hypothèse impliciteque leurs résultats profiteront automatique-ment et équitablement aux femmes autantqu’aux hommes. De même, il est égalementprésumé que les programmes ciblés sur lesfemmes leur seront facilement accessibles. Or,ce n’est pas toujours le cas, parce que lasituation des hommes et celle des femmessont différentes en termes de contraintes etd’opportunités. Non pas que les politiques etles programmes de développement n’aientciblé que les hommes ou aient volontairementdécidé d’être difficiles d’accès pour lesfemmes, mais le manque de statistiques et deconnaissance des contraintes pesant sur lespopulations ciblées, font que les effortsconsentis ont profité aux couches sociales quiavaient la capacité de capter les opportunitésoffertes. Les services et équipements offertspar les programmes de «neutralité desgenres», comme le crédit, l’accès au marchéou la formation, étant moins accessibles auxfemmes qu’aux hommes, risquent d’accroîtreencore plus les inégalités déjà existantes. Lesinstances décisionnelles devraient doncdépasser la seule mise en place de services,d’équipements et d’infrastructure etdevraient évaluer, dans une perspective degenres, les capacités et besoins locaux afin des’assurer que les programmes bénéficientréellement de façon équitable aux groupescibles.

L’intégration des genres dans toutes lesinitiatives du PEM restera limitée, tant que ladiscrimination sociale sous-jacente contre lesfemmes ne sera pas remise en question. Parconséquent, il est nécessaire d’aller au-delàd’initiatives isolées et limitées dans ledomaine des genres et il faut que l’UE et lesÉtats partenaires consacrent la volontépolitique nécessaire à améliorer le statut desfemmes. Cela implique d’incorporer lesgenres dans toutes les politiques, tous lesprogrammes et projets du PEM et, dans lemême temps, de mettre en place desprogrammes d’action affirmative et desprogrammes spécifiquement adressés auxfemmes.

Manque d’attention aux dynamiques sur lesgenres dans la région MENALa faible attention portée aux différencesexistant entre hommes et femmes quant à

leurs rôles, intérêts, besoins et statuts dans laplanification des programmes du Partenariat,conduit à une vision partielle et parfois faussede la réalité des conditions de vie des femmesdans la région MENA.

L’intégration des genresdans les programmes dedéveloppement irait au-delà d’un simple agrégatde données par sexe …

Sept ans après le début du processus departenariat, peu d’initiatives en termesd’études et de bases de données sontdisponibles sur les femmes des pays de larégion MENA. D’une façon générale,persistent les clichés et les stéréotypes quiperçoivent les femmes de la rive sud de laMéditerranée comme des êtres uniformes,résignées à leurs conditions de vie. Lescompétences et les expertises féminines dusud sont également méconnues et, parconséquent, peu associées à l’élaboration etau suivi des programmes et projets duPartenariat.

De plus, les communications de laCommission européenne et les rapportsannuels du MEDA sur le Partenariat n’ontpas encore réussi à incorporer uneévaluation des droits des femmes au niveaubilatéral ou multilatéral, en raison del’absence de statistiques sur les femmes(indicateurs de genre) et de l’absence deprocédures permettant une analyse pargenre114. L’absence d’une telle analyseempêche toute compréhension des effets etde l’efficacité des programmes MEDA, ycompris ceux spécialement destinés àsoutenir les femmes dans leur activitééconomique et sociale.

L’incorporation d’un plus grand nombred’études qualitatives et quantitatives sur lesfemmes dans la région MENA estindispensable, afin de dresser une imageplus dynamique des contextes socio-économiques et politiques dans lesquels lesfemmes de la région évoluent. De tellesétudes devraient faire appel à l’expertise dechercheurs et d’ONG de défense des droitsdes femmes de la région MENA et devraient

52

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 52

Page 57: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

être utilisées et diffusées à grande échelle,afin d’évaluer – et de modifier – lespolitiques et programmes du PEM relatifs àl’inégalité entre les genres.

L’intégration des genres dans les programmesde développement irait au-delà d’un simpleagrégat de données par sexe et impliqueraitque les concepts, les définitions, lesclassifications et les méthodologies decollecte de l’information traduisent ladiversité des situations vécues. Cela supposeégalement le développement de nouveauxindicateurs, capables de répondre à denouveaux questionnements, commel’élimination de la violence domestique,l’influence sur le processus de prise dedécision ou une nouvelle répartition desressources entre les différents membres duménage.

L’approche de l’intégration par le genre,soutenue par une meilleure connaissance desstatistiques relatives aux femmes et au genre,permettrait également d’éclairer, de façondynamique, les contraintes mais aussi lespotentialités, et d’ouvrir à l’analysel’exclusion systématique des femmes de lasociété par différents individus et collectivitésgrâce à l’utilisation de diverses règles etnormes. Pour ce faire, les politiques macro-économiques, notamment d’ajustementstructurel et du commerce, devraient tenircompte, au niveau de leur élaboration et deleur mise en oeuvre, de leurs impacts surl’interdépendance des rôles des femmes etdes hommes, tant dans la production quedans la reproduction, l’accès, le maintien et lecontrôle des ressources.

Evaluation du financement par l’UE desprojets relatifs aux droits des femmes dansla région MENALes programmes MEDA I et MEDA II115 ont étémis en place par l’UE pour mettre en œuvreles niveaux bilatéral et multilatéral decoopération du PEM. Ce sont les principauxinstruments financiers de l’UE, chargés de lapoursuite des objectifs des accordsd’association et de la Déclaration deBarcelone, par le biais de dotationsbilatérales et régionales, respectivement.MEDA I (1995-1999) est intervenu en faveurde quatre types d’opérations : le soutien àl’ajustement structurel (9% du total desengagements) ; le soutien à la transitionéconomique et au développement du secteurprivé (38%) ; les projets classiques dedéveloppement (42%) et, enfin, lesprogramme régionaux (11%)116. Il a été suivide MEDA II (2000-2006), qui couvre à peu prèsles mêmes domaines prioritaires117, tels qu’ilssont présentés et définis dans les cadresstratégiques régionaux et nationaux, ainsique dans les programmes indicatifs118.

Il résulte de la quasi-absence de mention desfemmes dans la Déclaration de Barcelone etdans les accords d’association, que les projetsrelatifs aux droits des femmes n’ont reçuqu’un financement modeste de la part desprogrammes MEDA. Bien que lesengagements MEDA I et MEDA II aient tousdeux prévu des fonds spéciaux pour lapromotion des droits des femmes, ces projetsont toujours été limités aux domainessociaux et économiques et même lefinancement n’a pas toujours été garanti. Àce jour, aucun programme régional axéexclusivement sur les femmes n’a été financéet mis en œuvre avec succès sur la base duprogramme MEDA.

Le programme régional MEDA sur lerenforcement du rôle des femmes dans la vieéconomique, qui devrait être lancé en 2004,est une avancée positive qu’il faut saluer.Mais il ne vise que les femmes dans la vieéconomique et les fonds attribués sont trèsmodestes (5 millions d’euros seulement). Lescahiers des charges de ce programmedevraient être formulés de façonsuffisamment large pour pouvoir y inclure unvaste champ de projets. De plus, il devraitêtre suivi et complété par des programmesplus ambitieux.

53

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Un atelier régional sur la violence contre lesfemmes, 20-22 octobre 2001 (SIGI).

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 53

Page 58: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

En 2001, le programme mondial «Initiativeeuropéenne pour la démocratie et les droitsde l’Homme» (IEDDH)119 a remplacé leprogramme régional MEDA-Démocratie, quiavait été mis en place en 1996 pour souteniret compléter le dialogue politique et lacoopération dans le volet du Partenariatrelatif au respect de la démocratie et desdroits de l’Homme. Le programme IEDDHdonne la priorité à certains pays de la région(Algérie, Israël, Palestine, Tunisie et Turquie),d’une part, et à certains thèmes horizontaux,comme le renforcement de ladémocratisation, la bonne gestion publique(good governance) et l’État de droit120,d’autre part. La situation discriminatoire desfemmes, et les violences dont elles sontvictimes dans la région MENA, n’ont pas étéjugées suffisamment critiques pour êtreretenues comme thèmes spécifiquesprioritaires dans le cadre de ce programme.

Les projets soumis au financement au titre del’IEDDH sont tenus d’indiquer dans quellemesure ils intègrent les femmes. L’IEDDH aégalement tenté à plusieurs reprises, cesdernières années, d’intégrer la question desgenres dans ses projets. Toutefois, lacondition de l’intégration des genres n’estpas considérée comme un critère réellementdéterminant dans la sélection des projets àfinancer121.

Différentes contraintes font que les projetsrelatifs aux droits des femmes ont desdifficultés à capter des financements. Toutd’abord, le IEDDH finance des projets degrande envergure. Il manque par conséquencede souplesse et est inaccessible à un grandnombre d’organisations féministes du Sud. Deplus, le financement est généralement destinéà mettre en œuvre des activités ponctuelles etne vise que rarement le renforcement descapacités institutionnelles des ONG du Sud(locaux, personnel opérationnel compétent,etc.). Bien que le IEDDH ait récemmentintroduit des programmes de micro-projets,qui devraient être opérationnels d’ici 2003,seulement trois pays de la région MENA(Algérie, Tunisie et Turquie) font partie desquinze pays cibles de l’IEDDH pour 2002-2004.Par ailleurs, en raison du poids des contraintesqui pèsent sur elles, les organisations dedéfense des droits des femmes, surtout sur larive sud de la Méditerranée, ont souvent unebase institutionnelle fragile et ont beaucoupde difficultés à accéder à l’information sur les

procédures et structures de l’UE, ce qui renddifficile l’accès au financement de l’UE. Vients’ajouter à l’absence de financement MEDA etEIDDH, le fait qu’aucune donation allouée auxÉtats partenaires à travers la Banqueeuropéenne d’investissement (1996-2000)122

n’a visé des projets relatifs aux femmes.

La situationdiscriminatoire desfemmes, et les violencesdont elles sont victimesdans la région MENA,n’ont pas été jugéessuffisamment critiquespour être retenuescomme thèmesspécifiques prioritairesdans le cadre de ceprogramme.

3.2 Initiatives de la société civile en

faveur des droits des femmes

dans la région MENA

Le processus de Barcelone a eu le mérited’ouvrir un débat non seulement sur laquestion du partenariat économique maiségalement sur le renforcement de lacitoyenneté, la démocratie et les droits del’Homme dans la Méditerranée. Grâce à ceprocessus, des réseaux citoyens ont vu le jouret certains d’entre eux ont pu bénéficier dusoutien financier du programme MEDA-Démocratie et d’autres lignes budgétaires.

Parmi ces réseaux, le Réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme(REMDH)123 qui regroupe environ soixante-dix ONG droits de l’homme, expertsindividuels et activistes dans les pays de l’UEet de la région MENA. Les droits des femmessont une des priorités thématiques-clés.

Un autre réseau est celui initié par l’Institutde la Méditerranée (Instituto per ilMediterraneo, IMED, Italie)124 et plusieursassociations et syndicats d’Algérie, du Maroc

54

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 54

Page 59: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

et de Tunisie. Conçu à l’origine comme unréseau informel chargé de réaliser desenquêtes sur la citoyenneté des femmes desdeux rives de la Méditerranée, il est passé àune deuxième phase qui consiste à mettre enplace le projet «Actions positives pour lesdroits de citoyenneté des femmes et l’égalitédes chances au Maghreb (2001-2004)»,soutenu par la Commission européenne.

Mais toutes les initiatives n’ont pas étécouronnées de succès. Certaines ont vu le jourpuis disparu et d’autres doivent encore fairela preuve de leur viabilité. En Europe, lesréseaux majeurs n’ont généralement pasréellement tourné leurs regards vers la rivesud de la Méditerranée. Quant aux ONG dusud, elles semblent ne pas disposer desinformations suffisantes à propos dufinancement de l’UE et de l’expérience enmatière de coopération internationale et leurintervention s’est souvent limitée à servird’agences d’exécution de projets élaborés,soumis au financement et signés par les ONGdu nord actives dans la région. De plus, lemouvement des droits des femmes dans leMENA ne connaît généralement passuffisamment bien le processus deBarcelone125. Par ailleurs, le manque dedémocratie et les législations relatives aufinancement en vigueur dans certains pays dela région MENA, qui permettent à certainsÉtats de contrôler toutes les relationsfinancières avec les bailleurs de fondsétrangers, contribuent aussi à limiter lescapacités des ONG à capter ces financementspour mettre en œuvre des projets communs.

… le mouvement desdroits des femmes dansle MENA ne connaîtgénéralement passuffisamment bien leprocessus de Barcelone.

Les délégations de l’UE dans les pays de larégion pourraient jouer un rôle importantdans le renforcement des capacités des ONGde défense des droits des femmes et leurimplication dans le PEM. Or, elles ne sont pastoujours suffisamment équipées au niveaufinancier, logistique ou diplomatique pour

soutenir des ONG souvent harcelées par leursgouvernements respectifs. Ce fut le cas pourle projet de la Maison de la citoyenneté desfemmes (Attanassouf) en Tunisie, pourtantappuyé par la Commission européenne dansle cadre de IEDDH, qui ne reçut aucun soutiensur place de la part de la délégation locale del’UE, lorsque le gouvernement tunisien lapressa de mettre fin à ses activités. Lesinstitutions européennes devraient doncassurer un niveau suffisant d’expertise dans ledomaine des genres au sein de leur personnelau niveau central mais aussi dans leursreprésentations et délégations auprès desÉtats partenaires. Des spécialistes de laquestion des genres devraient être nommésau niveau des politiques, des servicestechniques et au niveau opérationnel.

Le Forum civil euro-méditerranéen, réunionofficielle de la société civile de la région, estsoutenu par la Commission européenne etpar le gouvernement du pays dans lequel ilest tenu, et se déroule en marge des réunionsministérielles euro-méditerranéennes. Cesforums civils ont beaucoup contribué à lasolidarité entre les sociétés civiles des deuxrives de la Méditerranée. Ils se sont tenusrégulièrement depuis la création du PEM àBarcelone et ont été l’occasion pour lesactivistes et les organisations de la sociétécivile de se rencontrer et de présenter desrecommandations au Partenariat officiel.

La bataille pour faire émerger la dimensiondes droits de l’homme a été rude. En 1995,lors du 1er Forum civil de Barcelone, ni ladimension droits de l’Homme, ni la dimensiondroits des femmes n’étaient présentes. Cesquestions n’ont commencé à être abordéesque dans le cadre du Forum civil de Stuttgarten avril 1999, avec l’organisation d’un ateliersur les droits de l’Homme traitantspécifiquement des droits des femmes dans larégion MENA.

Le début de la deuxième intifada, et leboycott des organisations palestiniennes, ontfait que le Forum civil de Marseille a traitéessentiellement du conflit du Moyen-Orient.Cependant, la question des droits des femmesa été débattue lors d’une session de l’ateliersur l’État de droit et la démocratie.

Lors du Forum civil de Valence (avril 2002), unatelier consacré aux droits des femmes aréussi à faire un certain nombre depropositions pour promouvoir les droits des

55

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 55

Page 60: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

femmes dans le région MENA, sans réussirpour autant à être pleinement représentatifdes mouvements de défense des droits desfemmes de la région. Mais les problèmes liésà l’organisation et au choix des ONGparticipantes ont fait que ces Forums n’ontpas toujours réussi à être représentatifs del’ensemble de la société civile ou à avoir unimpact sur le procédure du PEM126. Toutefois,depuis le Forum de Stuttgart et ensuite celuide Marseille, la question des droits del’Homme, de la démocratie et des droits desfemmes a commencé à émerger et à prendreune place importante dans les débats de cesforums.

Les délégations de l’UE …ne sont pas toujourssuffisamment équipéesau niveau financier,logistique oudiplomatique poursoutenir des ONGsouvent harcelées parleurs gouvernementsrespectifs.

56

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

Part III : Résumé

Les progrès ont été lents dans la promotion des initiatives relatives aux droits desfemmes dans le PEM et ont été marqués par un certain nombre de défis. Les femmes,spécialement celles de la région MENA, n’étaient pas présentes lors de la création duPartenariat. La Déclaration de Barcelone ne contient qu’une seule référence aux droitsdes femmes, en relation avec le rôle des femmes dans le développement économique,et aucune mention spécifique ne figure dans les accords d’association. Une tendancecontinue à exister, au sein du PEM et des institutions de l’UE, à considérer les droits desfemmes comme une question culturelle et religieuse, à traiter comme une affaireinterne, ce qui entraîne donc un désintérêt pour les droits des femmes dans le dialoguepolitique au sein du PEM. Le manque de sensibilité à l’égard de la question des genresest encore aggravé par l’absence d’intérêt pour les dynamiques sociales qui sont à labase des inégalités entre les genres dans la région MENA. Les programmes quiabordent la question des droits des femmes sont encore rares et adoptent uneapproche du sommet vers la base, sans se préoccuper des racines de l’inégalité entreles genres.

Les États partenaires du PEM devraient respecter leurs obligations juridiquesinternationales relatives aux droits des femmes, en adoptant une politique effectived’intégration des genres. En plus de cette approche dans les trois volets du PEM, desactions affirmatives et des programmes spécifiques ciblés sur les femmes devraient êtremis en place. L’UE devrait également offrir davantage de possibilités de financementaux organisations de défense des droits des femmes, et les élaborer de façon à cequ’elles correspondent aux besoins de ces organisations et réseaux, en prenant enconsidération leurs différentes capacités. La société civile dans la région MENA estactive dans le domaine de la démocratie, des droits de l’Homme et des droits desfemmes. L’UE et ses États partenaires devraient, eux aussi, respecter leurs obligationsinternationales en soutenant davantage l’action de la société civile, afin de réaliserune égalité à travers le PEM.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 56

Page 61: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

57

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Notes104 L’intégration des genres est définie par la

communication de la Commission Intégrer l’égalitédes chances entre les femmes et les hommes dansl’ensemble des politiques et actions communau-taires (COM(96), 67) comme suit : «Il s’agit, cefaisant, de ne pas limiter les efforts de promotion del’égalité à la mise en œuvre de mesures spécifiquesen faveur des femmes, mais de mobiliserexplicitement en vue de l’égalité l’ensemble desactions et politiques générales, en introduisant dansleur conception de façon active et visible l’attentionà leurs effets possibles sur les situations respectivesdes femmes et des hommes (gender perspective).Cela suppose d’interroger systématiquement cesactions et politiques et de prendre en considérationces effets possibles dans leur définition et leur miseen œuvre.»

105 L’intégration de la question du genre dans lespolitiques de l’UE a été énoncées dans les textessuivants : Commission européenne, L’intégration desquestions du genre dans la coopération audéveloppement, Communication COM (1995), 423,18 septembre 1995 ; Commission européenne,Intégrer l’égalité des chances entre les femmes et leshommes dans l’ensemble des politiques et desactions communautaires, Communication COM(1996), 67, 21 février 1996 ; Commissioneuropéenne, Vers une stratégie-cadrecommunautaire en matière d’égalité entre lesfemmes et les hommes, COM (2000), 335, 7 juin 2000; Conseil européen, L’intégration des questions dugenre dans la coopération au développement,règlement, décembre 1995 ; Conseil européen,L’intégration des questions du genre et de l’égalitédans la coopération au développement, règlement,décembre 1998.

106 La Déclaration de Pékin a été adoptée en 1995, lorsde la 4e Conférence mondiale sur les femmes.

107 Voir en Annexe V l’état des ratifications par les paysdu MENA de la Convention CEDAW et, en AnnexeVI, les articles ayant fait l’objet de réserves par lesÉtats lors de la ratification.

108 Voir la note de bas de page n° 115 pour plusd’informations sur les programmes MEDA.

109 Voir le discours de Mme Onkelinx, vice-Premierministre belge et ministre de l’Emploi et de l’Egalitédes chances, à la Conférence ministérielle euro-méditerranéenne, 20 novembre 2001 sous :http://europa.eu.int/comm/employment_social/intcoop/news/speech_onkelinx.pdf

110 Rapport de R. Kratsa-Tsagaropoulou sur lLapolitique de l’UE vis-à-vis des pays méditerranéenspar rapport à la promotion des droits des femmes etde l’égalité des chances dans ces pays, approuvé enfévrier 2002.

111 ibid.112 Pour plus d’informations, voir http://www.europarl.

eu.int/meetdocs/delegations/EMED/20021017/emed20021017.htm

113 Forum tenu à Bruxelles le 13 juillet 2001.114 Rapport Rodi Kratsa Tsagaropoulou, op. cit.

115 MEDA est l’abréviation française de MEsuresD’Accompagnement. Les questions de politiques etde programmation de l’aide de la Commissioneuropéenne sont sous la responsabilité de ladirection générale des relations extérieures alorsque sur la base des documents du programme,l’office de coopération de l’Europe-Aid gère lesprojets, de leur identification jusqu’à leurévaluation.

116 Voir le règlement du Conseil n° 1488/96.117 Voir http://www.europa.eu.int/comm/external_

relations/euromed/meda/meda2_obj.htm118 Voir le règlement du Conseil n° 2698/2000. Pour plus

de détails sur les programmes du MEDA, voirhttp://europa.eu.int/comm/europeaid/projects/med/fw_medin_en.htm

119 Le budget consacré à ce programme s’élève à 100millions d’euros par an.

120 Pour le document de programmation de l’IEDDHpour 2002-2004, voir http://www.europa.eu.int/comm/external_relations/human_rights/doc/eidhr02_04.htm

121 Pour plus d’informations, voir : Integration ofGender in the European Initiative for Democracyand Human Rights (EIDHR) 2001-2002,Memorandum, Europe-Aid F3 : http://www.europa.eu.int/comm/europeaid/projects/eidhr/pdf/gender_eidhr-2002.pdf

122 Dans le cadre du Partenariat euro-méditerranéen,l’Union européenne finance trois types d’activités dela Banque européenne d’investissement au titre duMEDA. Pour plus d’informations voir :http://europa.eu.int/comm/europeaid/projects/med/regional/eib_en.htm.

123 Pour plus d’informations sur le REMDH, voir :www.euromedrights.net

124 Pour plus d’informations sur le IMED et le projet,voir. www.imednet.it

125 Au cours d’enquêtes sur le terrain menées dans lecadre de la préparation de ce rapport, nous avonsinterrogé des dirigeants d’organisations de défensedes droits des femmes, ainsi que différentes femmesactivistes dans la région MENA, sur leurconnaissance du PEM. Nos conclusions sont que, si lamajorité a exprimé son intérêt pour le PEM, ellemanquait des connaissances de base sur sa structure,sa politique et ses activités.

126 Une plate-forme non gouvernementale pour leforum civil euro-méditerranéen a été créée enfévrier 2003, en vue de réformer le format du forumcivil et de renforcer son efficacité. Voir :http://www.euromedrights.net/english/barcelona-process/civil_society/HR_activities/civilforum.htm

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 57

Page 62: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Les femmes du MENA font facequotidiennement à des pratiquesdiscriminatoires et à la violence, qui portentatteinte à leurs droits humainsfondamentaux. Plusieurs organisations de larégion luttent activement en faveur de lapromotion des droits des femmes et ont uneffet positif sur la diffusion de la prise deconscience sur cette question et du lobbyingen faveur de l’obtention de changementsjuridiques. Toutefois, ces organisationsdoivent faire face à une forte hostilité, tantde la part d’acteurs étatiques que d’acteursnon-étatiques. Dans ce contexte, lePartenariat euro-méditerranéen, créé en1995, constitue une opportunité unique pourtenter de faire progresser les droits desfemmes, les droits de l’Homme et ladémocratie dans la région MENA.

Le PEM, toutefois, n’a pas été au niveau desattentes de la plupart des organisations dedéfense des droits des femmes qui ont assistéà la naissance du Partenariat. Bien que l’UEait pris un certain nombre de mesurespositives pour introduire une plus grandesensibilité à la question du genre dans sesactivités dans le cadre du Partenariat, cedernier est toutefois encore loin d’avoirincorporé entièrement les genres dans lestrois volets de la Déclaration de Barcelone età tous les niveaux, que ce soit la formulation,la mise en œuvre, la supervision oul’évaluation des programmes et initiatives duPartenariat.

Le Partenariat pourrait contribuer à uneamélioration importante des droits desfemmes dans la région MENA, s’il décidait demettre en œuvre les droits de la femme, sanstergiversations ni exceptions, dans le cadredes droits universels de l’Homme, tels qu’ilssont acceptés par toutes les parties auPartenariat dans la Déclaration de Barcelone.Pour ce faire, les programmes actuels etfuturs du Partenariat devraient êtreharmonisés avec les standards internationauxrelatifs au respect et à la promotion desdroits des femmes. Le PEM devrait, enfin etsurtout, adopter de nouvelles mesures afin de

dé-légitimiser le recours à des arguments«culturels et religieux» afin de justifier ladiscrimination et la violence envers lesfemmes dans la région MENA, qui entraventla réalisation des droits des femmes.

La société civile doit jouer un rôle central toutau long du processus d’harmonisation. Enparticulier, les femmes doivent êtresystématiquement consultées et associées auxtrois volets du Partenariat euro-méditerranéen.

La volonté politique de l’ensemble despartenaires des deux rives et de l’UE estégalement décisive pour faire en sorte que lePartenariat, avec le soutien de la sociétécivile, puisse devenir un mécanismed’amélioration de la vie des femmes et deshommes de la région.

Le présent rapport lance donc un appel à tousles membres du Partenariat euro-méditerranéen, afin qu’ils soutiennent defaçon active l’incorporation de la questiondes droits de l’Homme et de la démocratiedans le Partenariat, reconnaissant ainsi quel’égalité des genres forme une part intégralede tout dialogue relatif aux droits del’Homme, à la démocratie et audéveloppement.

58

Conclusion générale

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 58

Page 63: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

59

’Abla, ’A., Against All Odds : JordanianWomen, Elections and Political Empower-ment, Al-Kutbah Institute of HumanDevelopment and Konrad AdenauerFoundation, 2001.

Abu-Lughod, Lila, Le mouvement des femmeset son évolution au Moyen-Orient (enarabe), Conseil Supérieur de la Culture, no

120, 1999.

Afsaruddin, Asma (éd.), Hermeneutics andHonor : Negotiating Female «Public» Spacein Islamic/ate Societies, 1999.

Agence pour le développement des relationsinterculturelles (ADRI/IEREM), Actes duColloque : Le statut personnel dans lespays du pourtour de la Méditerranée, 24-25 février 1993.

Ahmed, L., Women and Gender in Islam :Historical Roots of a Modern Debate, YaleUniversity Press, 1992.

Association démocratique des femmes duMaroc (ADFM), Degré d’adhésion desMarocains et Marocaines aux valeurségalitaires, Etude sondage non publiée,Rabat, 2000.

Association démocratique des femmes duMaroc (ADFM), Rapport parallèle à laConvention CEDAW, Rabat, 2001.

Association marocaine des droits des femmes(AMDF), La violence à l’encontre desfemmes, quelle protection? (en arabe),Casablanca, 1997.

Badran, M., «Independent Women : Morethan a Century of Feminism in Egypt», inTucker, J. (éd.), Arab Women : OldBoundaries, New Frontiers, IndianaUniversity Press, 1993.

Badran, M., «Competing Agenda : Feminists,Islam and the State in 19th and 20th CenturyEgypt», in Kandiyoti, D. (éd.), Women,Islam and the State, Macmillan, London,1991.

Banque Mondiale, Le développement au seuildu 21ème siècle, Rapport sur le développe-ment dans le monde, 1999/2000.

Bessis, S. et Belhassen, S., Femmes duMaghreb. L’enjeu, J.C Lattes/Ceres ; Eddif,1992.

Boormans, M., Statut personnel et famille auMaghreb de 1940 à nos jours, Paris-LaHaye, Mouton, 1987.

Bouatta, Ch., «De quelques violences àl’égard des femmes», in Les Algériennes,citoyennes en devenir, IMED, 1999.

Chekir, H., Le statut des femmes entre lestextes et les résistances, Le cas de laTunisie, Ed. Chama, Tunis, 2000.

CIMEL et INTERRIGHTS, «Roundtable onStrategies to Address ’Honour Crimes’. ASummary Report», Yearbook of Islamic andMiddle Eastern Law, Vol. 6, 1999-2000 andDirectory : Initiatives to Address ’HonourCrimes’.

CMF – MENA, Women’s Rights in the ArabMedia, 2000.

Coalition des ONG égyptiennes pour leCEDAW (Egyptian Non-governmentalorganisations Coalitions on CEDAW),Shadow Report, 2000.

Collectif 95 Maghreb Egalité, Etude sondagesur le degré d’adhésion aux valeurségalitaires au sein de la populationalgérienne, 2000-2001.

Collectif 95 Maghreb Egalité, Violationsflagrantes des droits et violences à l’égarddes femmes au Maghreb, Rapport annuel1996/97.

Collectif 95 Maghreb Egalité, LesMaghrébines entre violences physiques etviolences symboliques, Rapport annuel1997/98.

Comité contre l’esclavage Moderne (CCEM),Rapport 2001.

Commission européenne, L’intégration desquestions du genre dans la coopération audéveloppement, Communication COM(1995), 423, 18 septembre 1995.

Commission européenne, Intégrer l’égalité deschances entre les femmes et les hommes

Bibliographie citée dans le texte

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 59

Page 64: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

dans l’ensemble des politiques et des actionscommunautaires, Communication COM(1996), 67, 21 février 1996.

Commission européenne, Vers une stratégie-cadre communautaire en matière d’égalitéentre les femmes et les hommes,Communication COM (2000), 335, 7 juin2000.

Commission européenne, Le rôle de l’Unioneuropéenne dans la promotion des droitsde l’Homme et de la démocratie dans lespays tiers, Communication COM (2001),Bruxelles, 8 mai, 2001,

Commission européenne, Intervention deMme Onkelinx, vice-première Ministre etministre belge de l’Emploi et de laPolitique d’égalité des chances à laconférence ministérielle du Partenariateuro-méditerranéen, novembre 2001.

Conseil européen, L’intégration des questionsdu genre dans la coopération audéveloppement, règlement, décembre1995.

Conseil européen, L’intégration des questionsdu genre et de l’égalité dans la coopérationau développement, règlement, décembre1998.

Conseil européen, La stratégie commune del’UE à l’égard de la région Méditerranée,Santa Maria de Feira, juin 2000.

Daoud, Z., Féminisme et politique auMaghreb, Eddif, 1996.

EuropeAid F32, Integration of gender in theEuropean Initiative for Democracy andHuman Rights (EIDHR), 2001- 2002.

Fédération internationale des droits del’Homme (FIDH), Algérie, les violencescontre les femmes : l’état des lieux en 2001,Rapport adressé à la Rapporteuse spécialede la Commission des droits de l’Hommesur les violences à l’égard des femmes.

Friedrich Ebert Stiftung (éd.) en cooperationavec le Réseau euro-méditerranéen desdroits de l’Homme et le Forum des citoyensde la Méditerranée, Human Rights andCivil Society in the Mediterranean, Reportfrom the Euro-Mediterranean PartnershipConference, Stuttgart, 15-16 avril 1999.

Hijab, N., Laws, Regulation and PracticesImpeding Women’s Economic Participationin the MENA Region, Rapport ronéotypé,Banque Mondiale, avril 2001.

Hotline for Migrant Workers, Trafficking inWomen in Israel, 2001.

Human Rights Watch, Rapport Mondial, 2000.

Human Rights Watch, Rapport Mondial, 2001.

Institut de la Méditerranée (Instituto per ilMediterraneo, IMED, Italie), Projet«Actions positives pour les droits decitoyenneté des femmes et l’égalité deschances au Maghreb», 2001/2004, financépar la Commission européenne, DG RELEX- Démocratisation et droits de l’Homme(EIDHR), MEDA.

Kandiyoti, D., «Contemporary FeministScholarship and Middle East Studies», inGendering the Middle East : EmergingPerspectives, Syracuse University Press,1996.

Kandiyoti, D., «Islam and Patriarchy : aComparative Perspective», in Keddie, N.and Baron, B. (éds.), Women in MiddleEastern History : Shifting Boundaries in Sexand Gender, Yale University Press, 1991.

Kandiyoti, D., Women, Islam and the State,Macmillan, Londres, 1991.

Labadi, F., Johnson, P., Hammami, R. etWelchmann, L., Islamic Family Law and theTransition to Palestinian Statehood :Constraints and Opportunities for LegalReform, 2002 (see http://www.law.emory.edu/IFL/index2.html).

Lazreg, Marnia, The Eloquence of Silence.Algerian Women in Question, London,Routledge, 1994.

Lucas, M.H., Stratégies des femmes et desmouvements de femmes dans le mondemusulman par rapport aux fondamental-ismes : de l’entrisme à l’internationalisme,Women Living under Muslim Laws,Document no 2, 1990.

Mernissi, F., Women and Islam : An Historicaland Theological Enquiry, Basil Blackwell,Oxford, 1991.

Ministère de la planification et desprojections économiques, Direction de lastatistique, Les emplois du temps de lafemme au Maroc : enquête nationale sur lebudget temps des femmes, 1997/1998.

Moghadam, Valentine, Modernizing Women :Gender and Social Change in the MiddleEast, American University in Cairo, 1994.

60

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 60

Page 65: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

61

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

Naciri, R., Les femmes arabes et l’intersectionentre patriarcat, racismes et intolérance,Communication au panel de l’UNIFEM,Conférence mondiale contre le racisme, ladiscrimination raciale, la xénophobie etl’intolérance qui y est associée, Durban,Afrique du Sud, septembre 2001.

Naciri, R., «Engaging the State : the WomenMovement and Political Discourse inMorocco», in Miller, C. and Razavi, S. (éds.),Missionaries and Mandarins, FeministEngagement with DevelopmentInstitutions, Intermediate Technologiepublications en association avec l’Institutde recherché des Nations unies pour ledéveloppement social, 1998.

Nations Unies, Commission des droits del’Homme, Rapporteuse spéciale sur laviolence, Rapport sur la violence contre lesfemmes, (E/CN.4/2000/68) et (E/CN.4/2000/68/Add1).

New Woman Research Center, The ArabWomen’s Movement : Tunis, Palestine,Egypt and Sudan. 1995.

Parlement européen, Résolution sur lastratégie commune de l’UE, arrêtée par leConseil européen de Feira, juin, 2000.

Parlement Européen, Rapport de Rodi Kratsa-Tsagaropoulou sur «La politique de l’UEvis-à-vis des pays méditerranéens parrapport à la promotion des droits desfemmes et de l’égalité des chances dansces pays», février 2002.

PNUD, Rapport mondial sur le développementhumain, 2001.

PNUD, Rapport mondial sur le développementhumain, 2002.

PNUD, Rapport sur le développement humainarabe, 2002.

Secrétariat d’État à la solidarité, la famille etl’enfance (Maroc), Plan d’action nationalpour l’intégration des femmes dans ledéveloppement, 1998.

Shehadeh, L.R. (éd),Women and War inLebanon, University Press of Florida, 1999.

Swirski, B. et Safir, M., (éds.), Calling theEquality Bluff : Women in Israel, New York,Pergamon Press, 1991.

UNIFEM, Le progrès des femmes à travers lemonde, Rapport biennal, 2000.

The Working Group on the Status ofPalestinian Women in Israel, The status ofPalestinian Women Citizens of Israel, NGOReport on CEDAW, 1997.

Women Center for Legal Aid and Counselling(WCLAC), Report on the status ofPalestinian Women according to theCEDAW, 2001 (en arabe).

Women Living under Muslim Laws (RéseauFemmes sous lois musulmanes), Lesfrontières mouvantes du mariage et dudivorce dans les communautés musulmanes,Dossier spécial, 1996.

Women Living under Muslim Laws, Dossier7/8, 1991.

World Organisation Against Torture (OMCT),Violence against Women. For theProtection and Promotion of the HumanRights of Women, 2001.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 61

Page 66: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

62

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 62

Page 67: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Fatwa : Consultation sur un point de droit.

Fiqh : Terme technique servant à désigner la science du droit musulman et,plus tard, la somme des déductions des juristes.

Habous ou Waqf : Biens de main-morte.

Hadith : Récits désignant la tradition rapportant les actes et les paroles duprophète. Toutes les traditions rapportées ne sont pas acceptées parla science des hadith. Seules, les traditions dites authentiques(confirmées par la transmission) constituent des sources principales.

‘Idda : Délai de viduité ; période de continence de la femme veuve oudivorcée avant qu’elle ne soit autorisée à se remarier.

Ijtihad : Littéralement «effort», c’est en droit musulman le terme techniquepour désigner l’usage du raisonnement individuel.

Jebr : Contrainte matrimoniale.

al Khul‘ : Divorce appartenant à l’épouse moyennant compensation versée àl’époux.

Nafaqa : Entretien financier.

Shariâ : Voix du seigneur. Commandements divins. Lois impératives.

Talaq : Répudiation.

Tatliq : Divorce judiciaire par la femme.

Wali : Mandataire, tuteur, tuteur matrimonial.

Wassiya Wajiba : Testament obligatoire.

Wilaya : Tutelle, puissance.

63

AnnexesAnnexe I : Glossaire

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 63

Page 68: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

64

127 Plusieurs informations sont puisées du rapport de N. Hijab, op. cit.

ALGÉRIE CSP Loi de 1984.

Mariage : âge, Homme, 21 ans. Femme, 18 ans.tutelle Art. 11 : la tutelle matrimoniale est obligatoire. Le tuteur légal est le pèreet consentement ou le plus proche parent de sexe masculin.

Art. 9 : le consentement des 2 parties au mariage est obligatoire. Le mariagen’est valable que si la dot est payée.

Polygamie Art. 8 : le mariage de plus d’une épouse est permis.

Divorce Art. 49 : le divorce ne peut être prononcé que par le tribunal et après unetentative de réconciliation. Il peut intervenir par décision du mari, parconsentement des 2 époux ou par demande introduite auprès du tribunalpar la femme sous certaines conditions fixées par l’art. 53 (voir tableau ci-dessous).Art. 54 : la femme peut demander le divorce en payant une compensation àson mari (khul‘). En cas de désaccord entre les époux sur le montant de cettecompensation, le juge peut le fixer mais il ne doit pas dépasser l’équivalentde la dot.

Garde des enfants Art. 87 : donne le droit à la mère d’être tutrice légale de ses enfants en casde décès du père.

Autres dispositions Art 39 al. 1 : l’épouse doit obéissance à son mari.Art. 52 : si le juge estime que la demande de répudiation introduite par lemari n’est pas raisonnable, il peut décider d’octroyer une réparation pour lepréjudice subi par l’épouse.Art. 66 : la gardienne qui contracte mariage avec toute personne autrequ’un proche parent (à degré prohibé) de l’enfant, perd son droit de garde.

ÉGYPTE CSP Loi n° 25 de 1925 amendée par la loi n° 25 de 1929 et loi n° 100 de 1985.

Mariage : âge, Homme, 18 ans.tutelle Femme, 16 ans.et consentement

Divorce Le mari a le droit de divorcer quand il veut et sans obligation de justifier sademande. La femme peut demander le divorce dans certaines conditionstrès restrictives. Dans tous les cas, elle doit apporter la preuve du préjudicesubi et c’est le juge qui décide en dernier lieu.Art. 20 de la loi n° 1 de 2000 sur le statut personnel : les époux peuvent semettre d’accord sur le khul‘. Sinon, l’épouse peut obtenir un divorce devantles tribunaux, à condition de renoncer à tous ses droits financiers et derestituer la dot.

Garde des enfants Les garçons peuvent rester sous la garde de leur mère jusqu’à l’âge de 10ans ; les filles jusqu’à 12 ans (le juge peut étendre l’âge jusqu’à 15 ans pourles garçons ou jusqu’au mariage de la fille). La mère divorcée et gardienneperd son droit de garde si elle se remarie.

Annexe II : Codes du statutpersonnel dans la région MENA127

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 64

Page 69: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

65

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

ISRAËL Les différentes communautés religieuses ont chacune leurs propres lois dustatut personnel en accord avec l’art. 51 (a) de la loi de 1922 du mandatbritannique, qui est encore appliquée, et de la loi sur les droits égaux pourles femmes (Women’s Equal Rights Law) de 1951 et de 2000, qui stipulentque les dispositions de cette loi ne n’appliquent pas aux domaines dumariage et du divorce.

JORDANIE Loi du statut personnel (loi de 1976)

Mariage : âge, Homme, 18 ans. Femme, 18 ans128.tutelle et Art. 9/10 : le tuteur matrimonial est un parent mâle musulman et sainconsentement d’esprit de la future mariée.

Art. 19 : La femme peut exiger dans le contrat de mariage que le mari nel’oblige pas à quitter le pays et qu’il n’épouse pas une 2e épouse. Elle peutégalement demander à avoir le droit de demander le divorce.

Polygamie Art. 40 : l’homme marié à plus d’une femme doit assurer une absolue égalitéet équité entre ses épouses et ne doit pas les faire habiter dans la mêmemaison sans leur consentement.

Divorce Art. 87 : le mari peut déléguer une autre personne pour répudier sa femmeet déléguer, par écrit, ce droit à sa femme. Sous certaines conditions (art.113-116, 120, 123, 125, 126, 127, 131, 132), l’épouse a le droit de demanderle divorce en apportant la preuve du préjudice ou des sévices subis et c’estau juge d’en décider.Art. 134 : en cas de divorce arbitraire, le juge accorde une compensation àl’épouse, qui n’excède pas l’équivalent d’un an d’entretien.

Garde des enfants Art. 154 : le mari est tuteur légal des enfants, la femme en a seulement lagarde.

Autres dispositions Art. 167 : l’époux est responsable de l’entretien de son(es) épouse(s).Art. 37 : la femme mariée doit obéissance et cohabitation à son époux. Elleest obligée de suivre ce dernier partout à condition qu’il assure sa sécurité.Dans le cas contraire, elle perd son droit à l’entretien (nafaqa).Art. 39 : Le mari doit entretenir sa femme et bien la traitir et cette derniérelui doit obéissance.Art. 68 : l’épouse qui travaille à l’extérieur sans le consentement de l’épouxperd son droit à l’entretien.Act n° 34 : le père est chef de famille. En cas de décès ou de perte de sanationalité, alors que sa(es) femme(s) et enfants sont des nationaux, le chefdu famille est la première épouse ou l’aîné des enfants.

LIBAN Les différentes communautés religieuses ont chacune leurs propres lois dustatut personnel.

MAROC CSP (Moudawwana, loi de 1957/58, amendée en 1993).

Mariage : âge, Homme, 18 ans. Femme, 15 ans.tutelle et Art. 12 : la tutelle matrimoniale est un droit de la femme. La femme âgée deconsentement plus de 21 ans et orpheline de père peut se passer de tuteur matrimonial.

Polygamie Pour être polygame, le mari doit informer sa première et sa future épouse.L’épouse peut stipuler dans le contrat de mariage que son mari soitmonogame.Art. 30 : la première épouse peut s’adresser au juge pour demander ledivorce, si elle estime que le remariage de son mari lui cause un tort.

128 Un amendement introduit en décembre 2001 a élevé l’âge du mariage de 15 à 18 ans pour les femmes et de 16 à18 ans pour les hommes. Toutefois, en janvier 2002, le département principal de justice islamique a indiqué cinqexceptions à cette règle, conformément auxquelles le juge peut autoriser des mariages avant l’âge légal.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 65

Page 70: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Divorce Art. 48 al. 1 : l’homme a le droit de répudier son épouse sans être obligé demotiver sa décision.Art. 48 : stipule que la répudiation ne peut être enregistrée sans la présencedes deux époux et après autorisation du juge. La femme peut demander ledivorce au tribunal dans les mêmes conditions très restrictives existant dansles autres pays du MENA.

Garde des enfants Art. 102 : en cas de divorce, la garde des enfants est dévolue en priorité à lamère (fille : 15 ans ; garçon : 12 ans).Art. 99 : après cet âge, les enfants peuvent décider avec lequel des 2 parentsils veulent vivre.Art. 148 : le tuteur légal est le père. Si ce dernier est décédé ou a perdu sacapacité civile, la mère majeure devient tutrice mais elle ne peut disposer dupatrimoine de ses enfants mineurs sans la permission du juge.

Autres dispositions Art. 36 : l’épouse doit obéissance à son mari. En cas de divorce et mêmerépudiée, la femme ne dispose de moyens de subsistance que durant lacourte période l’‘idda. Après cette période, si elle ne travaille pas (ce qui estle cas dans la majorité des cas), elle peut se retrouver sans moyens desubsistance et sans domicile.Art. 105 : la gardienne qui contracte mariage avec toute personne autrequ’un proche parent (à degré prohibé) de l’enfant perd son droit de garde.

PALESTINE Lois appliquées : Gaza : Code du statut personnel égyptien.Cisjordanie : Code du statut personnel jordanien.

SYRIE CSP (Loi n° 34 de 1975).

Mariage : âge, Homme, 18 ans. Femme, 16 ans.tutelle Art. 21 : la tutelle matrimoniale est obligatoire pour la femme uniquement.et consentement Art. 18.2 : le juge peut décider de marier le garçon à 15 ans et la fille à 13

ans.Art. 48.2 : la musulmane ne peut épouser un non musulman alors que lecontraire est autorisé.

Polygamie Art. 17 : la polygamie est autorisée (4 épouses).

Divorce Art. 91 : donne le droit de répudiation au mari (unilatéral et inconditionnel).Art. 105-115 : la femme doit demander au juge de la divorcer, sous certainesconditions très restrictives.

Garde des enfants Art. 74 : la femme doit obéissance à son mari en contrepartie de l’entretien.Art. 73 et 74 : si elle travaille à l’extérieur sans sa permission, elle perd sondroit à l’entretien.

TUNISIE CSP (majella, amendée en 1993).

Mariage : âge, Homme, 20 ans. Femme, 17 ans.tutelle Art. 6 : le mariage du mineur est subordonné au consentement du tuteur etet consentement de la mère.

Polygamie Art. 18 : la polygamie est interdite.

Divorce Art. 30 : le divorce ne peut être que judiciaire.Art. 31 : le divorce intervient par : 1) consentement mutuel ; 2) à la demandede l’un des époux pour cause de préjudice ; 3) à la demande du mari ou dela femme.Art. 32 : le divorce est déclaré après tentative de conciliation de la part dujuge de la famille.

Garde des enfants Art. 57 et 60 : instaurent la co-responsabilité parentale par rapport auxenfants durant le mariage.

66

Women’s Rights The Middle East and North Africa

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 66

Page 71: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Section 67 : en cas de divorce ou décès, la garde des enfants est dévolue àl’un des parents en fonction de l’intérêt de l’enfant.Art. 154 : le père est tuteur des enfants mineurs ; en cas de décès oud’incapacité, la mère est tutrice légale des enfants.

Autres dispositions Art. 23 : les époux se doivent respect mutuel et coopération dans la conduitedes affaires familiales et l’éducation des enfants. Le mari, chef de famille, al’obligation d’entretenir son épouse et ses enfants. La femme doitcontribuer aux dépenses familiales, si elle a des biens.

TURQUIE Code civil 1926, amendé en 1992 et en 2001.

Mariage : âge, 18 ans pour les deux sexes (art. 11), mais cet âge peut être 17 ans pour letutelle garçon et 15 ans pour la fille, avec le consentement des parents et si le jugeet consentement estime qu’il y a de bonnes raisons (art. 88).

Autres dispositions Art. 302 : en cas de naissance, si le père déclare que sa femme est demauvaises mœurs, le bébé n’est pas reconnu par le père qui n’est pas tenude pourvoir à ses besoins.

● Dans ces pays également, la femme n’a le droit de demander le divorce que si elle entame une procédurejudiciaire (très longue parfois) et si elle apporte les preuves du préjudice subi. Ce préjudice est défini par la loi :défaut d’entretien, infirmité précédant la consommation du mariage, refus par le mari de remplir les devoirsconjugaux, emprisonnement du mari pour plus d’un an, absence non justifiée pour plus d’1 an, etc.

● Dans les pays où les lois musulmanes sont appliquées, la mère divorcée est gardienne de ses enfants mais elleperd le droit de garde si elle épouse un homme qui n’a pas une parenté à degré prohibé avec les enfants.

● Dans tous les pays du MENA où la religion musulmane est une source de codification, la législation sur l’héritageadopte partout la règle de l’inégalité entre les hommes et les femmes. Le principe fondateur est qu’au mêmedegré de parenté par rapport au défunt, les hommes héritent du double de la part des femmes.

● Dans certains pays où plusieurs lois religieuses sont appliquées, le mariage entre des personnes appartenant àdeux religions différentes est impossible. Dans les pays musulmans, le mariage de la musulmane avec un nonmusulman est interdit alors que la réciproque est autorisée.

67

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 67

Page 72: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

68

ALGÉRIE Code de la nationalité 1970.

Statut des femmes La femme mariée avec un étranger garde sa nationalité etce dernier ne peut l’obliger à prendre sa nationalité.

Femmes vis-à-vis des époux La femme ne transmet pas sa nationalité à son épouxétranger.

Femmes vis-à-vis des enfants Art. 6 et 7 : peut acquérir la nationalité, l’enfant né d’unpère algérien, d’une mère algérienne et d’un père inconnuou apatride ; l’enfant né en Algérie d’une mère algérienneet d’un père étranger né lui-même en Algérie, sauf sil’enfant renonce à la nationalité dans l’intervalle d’uneannée précédant sa majorité.

ÉGYPTE Loi n° 26 de 1975.

Femmes vis-à-vis des époux La femme ne transmet pas sa nationalité à son épouxétranger.

Femmes vis-à-vis des enfants Art. 2 : est égyptien :- l’enfant né d’un père égyptien ;- l’enfant né en Égypte d’une mère égyptienne et d’unpère inconnu ou apatride ;- l’enfant né hors l’Égypte d’une mère égyptienne et d’unpère inconnu ou apatride.Il a le droit de demander la nationalité une année avantl’âge légal.

JORDANIE Code de la nationalité jordanienne.

Statut des femmes Acte n° 6/1954 : La femme jordanienne peut conserver sanationalité en cas de mariage avec un étranger.

Femmes vis-à-vis des époux Depuis l’amendement de 1996 du registre civil et de laprocédure d’obtention du passeport, la femmejordanienne mariée à un étranger peut obtenir un livret defamille indépendant en tant que chef de famille, sur lequeldoit être portée la nationalité du mari. Mais les enfants nepeuvent être portés que sur le registre du père.

Femmes vis-à-vis des enfants L’enfant né d’un père jordanien a la nationalitéjordanienne.

LIBAN

Statut des femmes La loi du 11/1/1960 donne le choix à la femme de garder sanationalité ou de prendre celle de son époux.

Annexe III : Genre et nationalité

dans les pays du MENA

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 68

Page 73: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Femmes vis-à-vis des époux La femme étrangère a le droit d’obtenir la nationalité deson époux libanais, mais le contraire n’est pas possible.

Femmes vis-à-vis des enfants Décret n° 15/1925 : la mère libanaise n’a pas le droit detransmettre sa nationalité à ses enfants, sauf en casd’enfant illégitime ou en cas de décès du père étranger.

MAROC Dahir de 1958.

Statut des femmes La femme garde sa nationalité si elle épouse un étranger.

Femmes vis-à-vis des époux La femme étrangère mariée à un Marocain peut acquérirla nationalité de son mari. La femme marocaine n’a pasautomatiquement ce même droit : son mari doit résider auMaroc, parler la langue arabe et introduire une demandede naturalisation.

Femmes vis-à-vis des enfants L’enfant ne peut prendre la nationalité de sa mère que s’ilest né au Maroc, d’un père inconnu ou apatride ou àcondition qu’il réside au Maroc et déclare, 2 ans avant samajorité, vouloir l’acquérir.

SYRIE Code de la nationalité (Loi 276 de 1969).

Statut des femmes La femme mariée à un étranger garde sa nationalité.

Femmes vis-à-vis des époux La femme ne transmet pas sa nationalité à son époux.

Femmes vis-à-vis des enfants Art. 3 du code de la nationalité : seul le père syrien peuttransmettre la nationalité à ses enfants.

TUNISIE Loi n° 63 de 1963, amendée par la loi n° 62 de 1993.

Femmes vis-à-vis des époux Art. 13 : la femme étrangère mariée à un Tunisien aumoment où le mariage est célébré acquiert la nationalité,si elle est déchue de sa nationalité d’origine en épousantun étranger.

Art. 14 : l’étrangère mariée à un Tunisien peut demanderla nationalité dans les 2 ans qui suivent son mariage.Art. 21 : peut être naturalisé l’étranger ayant épousé uneTunisienne et résidé au moins 5 ans dans le pays.

Femmes vis-à-vis des enfants Art. 6 : est tunisien l’enfant né d’un père tunisien, d’unemère tunisienne et d’un père inconnu ou apatride ;l’enfant né en Tunisie d’une mère tunisienne et d’un pèreétranger, qui déclare vouloir continuer à vivre en Tunisie etqui introduit une demande l’année précédant sa majorité.Avant 19 ans, le demandeur peut devenir tunisien surdéclaration conjointe des 2 parents.

Art. 18 : le mineur étranger adopté par une personneayant la nationalité tunisienne acquiert la nationalité à ladate du jugement d’adoption à condition qu’il soitcélibataire.

69

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 69

Page 74: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

70

ALGÉRIE

ÉGYPTE

JORDANIE

L’autorisation dumari/père pourobtenir lepasseport estobligatoire.

Acte n° 2 : lapermission dumari pourl’obtention dupasseport estobligatoire129.

Les femmes ontdes difficultés àfaire voyager leursenfants avec elles.Même avecl’autorisation,elles peuvent êtreinterdites devoyage par le pèreet/ou l’époux, à lasuite d’unedemande adresséeà l’autoritécompétente.

La femme doitvivre au domicilede son mari etsuivre son épouxpartout s’ilgarantit sasécurité.

Art. 66 : latitulaire du droitde garde, semariant avec unepersonne non liéeà l’enfant par uneparenté de degréprohibé, estdéchue de sondroit de garde.Celui-ci cesse parrenonciation àcondition que celane compromettepas l’intérêt del’enfant.

Annexe IV : La liberté de mouvement des femmes

dans certains pays du MENA

Passeport(dispositions Loi sur la

Pays légales) Pratique Résidence Autres

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 70

Page 75: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

71

Moyen-Orient et Afrique du nord Droits des femmes

LIBAN

MAROC

TUNISIE

Si la loi 11/68relative aupasseport n’opèreaucunediscriminationentre les deuxsexes, les autoritésavaient l’habitudede demander lapermissionmaritale. Unecirculaire de 1974a mis fin à cettepratique.

En 1994, lacirculaire n° 3035de 1990 quiexigeait lapermissionmaritale pourl’obtention d’unpasseport a étéannulée. Unenouvelle circulaireautorise le mari às’opposer auvoyage de safemme parobjection écriteadressée àl’autoritécompétente.

Les enfantspeuvent être missur le passeport del’un des parents,avec leconsentement del’autre parent.Dans la pratique,le consentementdu seul père estexigé. La femmen’a pas besoin del’autorisationmaritale pourvoyager. Mais,dans la réalité, il ya des contraintes.

Le droit musulmanautorise le mari àfaire revenir deforce sa femme audomicile conjugal,appelé maison del’obéissance (beitat-ta‘a).

Art. 35 du CSP :l’époux a le droitde fixer ledomicile conjugal.Il peut recourir àla justice pourfaire revenir safemme audomicile conjugal.Art. 107 : la mèregardienne doitvivre là oùdemeure son mari(tuteur légal desenfants) ; sinon,elle peut perdre ledroit de garde.

Art. 105 : lagardienne quicontracte mariageavec toutepersonne autrequ’un procheparent (au degréprohibé) del’enfant ou avecson tuteurtestamentaire,perd son droit degarde, à moinsqu’elle ne soitelle-même satutricetestamentaire oula seule nourriceque l’enfantaccepte.

Art. 58 : letitulaire du droitde garde, de sexeféminin, doit êtrenon-marié, sauf sile juge décide lecontraire dansl’intérêt del’enfant ou si lemari est parent àun degré prohibéde l’enfant oututeur de celui-ci.

Passeport(dispositions Loi sur la

Pays légales) Pratique Résidence Autres

Aucune restriction n’est imposée dans les différentes loistunisiennes à la liberté de mouvement de la femme.

129 Une nouvelle loi adoptée en novembre 2002 autorise les femmes à obtenir un passeport sans l’autorisation écritedu mari.

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 71

Page 76: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Pays Date de ratification Réserves et déclarations130

Algérie 1996 art. 2 ; art. 9(2) ; art.15(4) ; art. 16 et art. 29(1). Huit Etats ont fait des objections à l’égard de ces reserves.

Égypte 1981 art. 2 ; art. 9(2) ; art.16 et art. 29. Quatre États ontfait

des objections à l’égard de ces réserves.

Israël 1991 art. 7(b) ; art. 16 et art. 29(1).

Jordanie 1992 art. 9(2) ; art. 15(4) ; art. 16(1)(c), (d) et (g).Un État a fait des objections à ces réserves.

Liban 1997 art. 9(2) ; art. 16(1)(c), (d), (f), (g) et art. 29(1). Quatre États ont fait des objections à l’égard de ces réserves.

Maroc 1993 art. 2 ; art. 9(2) ; art. 15(4) ; art. 16 et art. 29(1). UnÉtat

a fait une objection à l’égard des réserves.

Palestine

Syrie N.R131 130 art. 2 ; art. 9(2) ; art. 15 ; art. 16(1)(c), (d), (f), (g) ; art. 16(2) et art. 29(1).

Tunisie 1985 art. 9(2) ; art. 15(4) ; art. 16(c), (d), (f), (g), (h) et art. 29(1). Trois États ont fait des objections à l’égard de ces réserves.

Turquie* 1985 Art. 9(1) et art. 29(1)

* La Turquie est le seul pays du MENA à avoir signé le protocole facultatif à la Convention CEDAW en septembre2000, mais elle ne l’a pas encore ratifié.NR : non ratifiée.

130 Pour plus de informations, voir : http://untreaty.un.org/ENGLISH/bible/englishinternetbible/partI/chapterIV/treaty10.asp#N16

131 Le 28 mars 2003, la Syrie a entamé le processus de ratification de cette convention.

Annexe V : État des ratificationspar les pays du MENA

de la Convention CEDAW(mars 2002)

72

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 72

Page 77: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Article 2

Les États parties condamnent la discriminationà l’égard des femmes sous toutes ses formes,conviennent de poursuivre par tous les moyensappropriés et sans retard une politiquetendant à éliminer la discrimination à l’égarddes femmes et, à cette fin, s’engagent à :

a) Inscrire dans leur constitution nationaleou toute autre disposition législativeappropriée le principe de l’égalité deshommes et des femmes, si ce n’est déjàfait, et à assurer par voie de législationou par d’autres moyens appropriésl’application effective dudit principe ;

b) Adopter des mesures législatives etd’autres mesures appropriées assorties, ycompris des sanctions en cas de besoin,interdisant toute discrimination à l’égarddes femmes ;

c) Instaurer une protection juridictionnelledes droits des femmes sur un piedd’égalité avec les hommes et garantir, parle truchement des tribunaux nationauxcompétents et d’autres institutionspubliques, la protection effective desfemmes contre tout acte discriminatoire ;

d) S’abstenir de tout acte ou pratiquediscriminatoire à l’égard des femmes etfaire en sorte que les autorités publiqueset les institutions publiques seconforment à cette obligation ;

e) Prendre toutes mesures appropriées pouréliminer la discrimination pratiquée àl’égard des femmes par une personne,une organisation ou une entreprisequelconque ;

f) Prendre toutes les mesures appropriées, ycompris des dispositions législatives, pour

modifier ou abroger toute loi, dispositionréglementaire, coutume ou pratique quiconstitue une discrimination à l’égard desfemmes ;

g) Abroger toutes les dispositions pénalesqui constituent une discrimination àl’égard des femmes.

Article 7 (b)

Les États parties prennent toutes les mesuresappropriées pour éliminer la discrimination àl’égard des femmes dans la vie politique etpublique du pays et, en particulier, leurassurent, dans des conditions d’égalité avecles hommes, le droit :

b) De prendre part à l’élaboration de lapolitique de l’État et à son exécution,occuper des emplois publics et exercertoutes les fonctions publiques à tous leséchelons du gouvernement ;

Article 9 (2)

Les États parties accordent à la femme desdroits égaux à ceux de l’homme en ce quiconcerne la nationalité de leurs enfants.

Article 15 (4) :

Les États parties reconnaissent à l’homme et àla femme les mêmes droits en ce qui concernela législation relative au droit des personnes àcirculer librement et à choisir leur résidenceet leur domicile.

Article 16

1. Les États parties prennent toutes lesmesures appropriées pour éliminer la

73

Annexe VI : Articles de laConvention CEDAW ayant

fait l’objet de réserves de la partdes États du MENA

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 73

Page 78: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

discrimination à l’égard des femmes danstoutes les questions découlant du mariage etdans les rapports familiaux et, en particulier,assurent, sur la base de l’égalité de l’hommeet de la femme :

a) Le même droit de contracter mariage ;

b) Le même droit de choisir librement sonconjoint et de ne contracter mariage quede son libre et plein consentement ;

c) Les mêmes droits et les mêmesresponsabilités au cours du mariage etlors de sa dissolution ;

d) Les mêmes droits et les mêmesresponsabilités en tant que parents, quelque soit leur état matrimonial, pour lesquestions se rapportant à leurs enfants ;dans tous les cas, l’intérêt des enfants estla considération primordiale ;

e) Les mêmes droits de décider librement eten toute connaissance de cause dunombre et de l’espacement desnaissances et d’avoir accès auxinformations, à l’éducation et auxmoyens nécessaires pour leur permettred’exercer ces droits ;

f) Les mêmes droits et responsabilités enmatière de tutelle, de curatelle, de gardeet d’adoption des enfants, oud’institutions similaires, lorsque cesconcepts existent dans la législationnationale ; dans tous les cas, l’intérêt desenfants est la considération primordiale ;

g) Les mêmes droits personnels au mari et àla femme, y compris en ce qui concernele choix du nom de famille, d’uneprofession et d’une occupation ;

h) Les mêmes droits à chacun des époux enmatière de propriété, d’acquisition, degestion, d’administration, de jouissanceet de disposition des biens, tant à titregratuit qu’à titre onéreux.

2. Les fiançailles et les mariages d’enfantsn’ont pas d’effets juridiques et toutes lesmesures nécessaires, y compris desdispositions législatives, sont prises afin defixer un âge minimal pour le mariage et derendre obligatoire l’inscription du mariagesur un registre officiel.

Article 29 (1)

Tout différend entre deux ou plusieurs États-parties concernant l’interprétation ou

l’application de la présente Convention quin’est pas réglé par voie de négociation estsoumis à l’arbitrage, à la demande de l’und’entre eux. Si, dans les six mois qui suivent ladate de la demande d’arbitrage, les partiesne parviennent pas à se mettre d’accord surl’organisation de l’arbitrage, l’unequelconque d’entre elles peut soumettre ledifférend à la Cour internationale de Justice,en déposant une requête conformément auStatut de la Cour.

74

Droits des femmes Moyen-Orient et Afrique du nord

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 74

Page 79: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

Centre arabe de ressources et d’informationsur la violence à l’encontre de la femme(www.amanjordan.org)

Centre de la femme arabe pour la formationet la recherche (CAWTAR, Tunis)(www.cawtar.org.tn)

Collectif 95 – Maghreb égalité(email : [email protected])

Forum des femmes arabes (Aisha)(www.nisaa.org)

Gender Practitioners. Réseau électroniqueinternational de discussion, H-Gender-MidEast (Universite americaine du Caire)(www.aucegypt.edu/academic/igws)

Projet de liaison et d’information sur legenre pour la région duMachreq/Maghreb (MACMAG GLIP, Liban)(www.macmag-glip.org)

Réseau Arab Women Connect (Bureaurégional de l’UNIFEM, Jordanie)(www.arabwomenconnect.org)

Réseau Arab Women Media Centre, Jordanie(www.ayamm.org)

Sisterhood is Global Institute (SIGI)(www.sigijordan.org)

Réseau international de solidarité : WomenLiving under Muslim Laws.(wluml.org )

75

Annexe VII : Réseaux desfemmes dans le MENA

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 75

Page 80: L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de ... · L’intégration des droits des femmes du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord dans le Partenariat euro-méditerranéen

R6476 EMHRN Women's Report FR 03/06/2003 11:23 AM Page 76