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L'architecture sacrée. Le message du triangle

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L'ARCHITECTURE SACRÉE

Le Message du Triangle

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Ouvrages du même auteur

Le Jeu de l'histoire et du hasard, Ed. RSR, Lausanne, 1972. L'Histoire commence à Bimini, Ed. Robert Laffont, Paris, 1973. Les Conquérants du Pacifique, Ed. Robert Laffont, Paris, 1975. Le Suaire de Turin, Ed. Alain Lefeuvre, Nice, 1979. Les Juifs en Amérique ancienne, Ed. du Rocher, Monaco, 1983. La Symbolique du jeu d'échecs, Ed. Veyrier, Paris, 1985.

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Pierre Carnac

L'ARCHITECTURE SACRÉE

Le Message du Triangle

✓ Éditions Jean Boully

Page 6: L'architecture sacrée. Le message du triangle

@ Editions Dangles, 1978. @ Editions Jean Boully, 1989. ISBN: 2-87818-003-8

Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est interdite sans l'autorisation préalable et écrite des Editions Jean Boully.

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A tous ceux qui créeront l'éveil paroxystique des idées étouffées dans le suaire de l'admis...

Architecture sacrée (encre Michel Mille)

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(Photo SUIl- ViOl

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Le Danube aux Portes de fer (Yougoslavie-Roumanie) d»6 Djerdap - Cazane (la chaudière) ; l'endroit où le fleuve est le plus étroit

(170 m) et le plus profond (à environ 50 km de Lepenski Vir).

« Non seulement, ces œuvres forcent notre admiration, mais elles évoquent une quantité de problèmes complexes. Si le sens des nouvelles découvertes était souvent mystérieux et inexpli- cable, elles permettaient du moins de soupçonner une chose : que les manifestations, en face desquelles nous nous trouvions, étaient déjà beaucoup trop développées pour exprimer la forme la plus ancienne de l'idéal humain pensé et senti. »

K. Lindner

« La vraie méthode n 'est-elle pas d'interpréter les idées des Anciens à la lumière de leurs textes et de leurs monuments, sans s'ingénier à faire rentrer toutes ces idées dans des cadres simplistes tracés d'avance ? »

Paul Dhorme

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Avant-propos

La plus ancienne ville d'Europe découverte à ce jour, où se trouve-t-elle ?

L'urbanisme scientifique — fondé sur l'emplacement calculé et arrêté selon les données d'un plan général de l'agglomération, et conçu d'après des règles topographiques établies et répétées de façon consciente — où débute-t-il ?

La construction des premiers habitats réalisés selon un plan fondé sur un module de base rigoureusement exact, où se place-t- elle ?

L'unique disposition connue d'un centre habité suivant la solution correcte d'un problème classique d'algèbre (le plus grand nombre de maisons type dans le plus petit espace disponible), où a- t-elle été surprise ?

La plus ancienne construction « arithmologique » d'un habitat mettant à jour des rapports numériques clefs, entre les éléments fondamentaux d'une bâtisse, où a-t-elle été découverte ?

La sculpture ornementale et figurative des galets, en tant que sources d'ouvrages plastiques intégrés dans la géométrie « inté- rieure » de la maison, où fait-elle son apparition en Europe ?

Le premier grand art abstrait et figuratif débouchant sur le monumental à partir de la sculpture des galets, où connut-il ses premiers Maîtres européens ?

La plus ancienne scène d'exaltation animalière du Soleil, vrai document-premier de la conception trinitaire du Soleil, où a-t-elle été révélée ?

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La première pièce maîtresse de l'iconographie du Déluge, où a- t-elle été esquissée ?

Arrêtons-nous ! Pour toutes ces questions — et combien d'autres analogues ne peut-on encore poser ? — la réponse est unique : à LEPENSKI VIR !

Lepenski Vir ? Un nom qui, il y a un peu plus d'une décennie, était totalement inconnu. Un point sur le Danube, placé en face du tourbillon nourricier de Lepena, en amont des célèbres Portes-de-fer, qui séparent les Carpates des Balkans, quelque part en Yougoslavie...

La « ville », car il y a tous les motifs pour la considérer en tant que ville, fondée en cet endroit quelque sept mille cinq cents ans ou même huit mille ans auparavant par des Cro-Magnon venus d'ailleurs, représente par le plan en trapèze de ses habitats et l'art sculptural des adorateurs de l'homme-poisson qui la construisirent et l'habitèrent, un site qui ne le cède en rien, en matière d'extraordi- naire, aux grands hauts lieux de l'archéologie et de la protohistoire de l'homme.

La découverte de Lepenski Vir ne fut pas — comme le furent celles de Tiahuanaco ou des grottes d'Altamira et de Lascaux — une œuvre de pure fortune. Fouillé et présenté au monde par d'excellents professionnels, Lepenski Vir eut la chance de sortir au jour sans destructions de valeurs archéologiques dues à l'enthousiasme ou au zèle des découvreurs, sans bouleversement de données historiques. Des expositions internationales telles que celle du Grand-Palais, de Paris, en 1972, présentèrent ses aspects hors du commun au grand public. D'importantes revues spécialisées ou de vulgarisation réservèrent des pages pleines d'éloges à ce véritable joyau de l'archéologie danubienne ; le chef de ses découvreurs décrivit le site dans un excellent livre de présentation scientifique...

Puis... ce fut le silence ou la diminution de l'importance des découvertes...

On avait déjà trop parlé ! Aucune grande école, aucune grande histoire de l'art ne

daignent commencer leurs cours ou leurs pages sur l'histoire de la plastique européenne ou — dans le fond, sur l'histoire générale de la plastique — par l'étude des galets sculptés de Lepenski Vir.

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Aucun grand traité d'histoire de l'architecture, ou cours spécialisé en la matière, ne démarrent encore leurs premiers chapitres par l'analyse des habitats au plan-trapèze de Lepenski Vir.

Aucun des savants réputés de la préhistoire européenne ou mondiale ne s'est décidé à placer la civilisation des chasseurs- pêcheurs des parages du tourbillon de Lepena en tête de la suite des grandes civilisations préhistoriques d'Europe.

L'histoire de la géométrie ignore l'existence des géomètres capables d'utiliser comme plan de construction un trapèze dyna- mique à ouverture de 60°, et surtout de le tracer correctement sur le sol il y a 7 500 ou 8 000 ans ; l'histoire des symboles, celle de la magie, l'arithmologie, la numérologie, négligent purement et simplement les données les concernant si abondamment fournies par les vestiges de Lepenski Vir ; l'histoire de la pensée humaine ignore, elle aussi, les leçons qu'elle en pourrait tirer...

Même si l'on parle parfois de Lepenski Vir, l'image est fugitive, peu approfondie, incomplète ; elle se borne à deux ou trois lignes de simple mention. On entend même des objections... Il y a des gens qui doutent de la vraie ancienneté de cette étonnante civilisation carpato- balkano-danubienne, cela malgré la rigueur scientifique qui a présidé, d'alpha à oméga, à toutes les opérations de fouille et de préservation du site.

Une ville sur le Danube il y a 7 500 ans ? Des habitats construits à partir d'un plan géométrique préconçu et reposant sur l'utilisation d'un module-unité de mesure entrant sans reste dans les principales dimensions de la maison, trois mille cinq cents ans avant la pyramide de Khéops ? Des architectes jouant à l'urbanisme quelques millénaires avant Sumer ?

Allons, allons... il y a sans doute quelque chose qui ne va pas... changeons de sujet !

Voilà pourquoi nous pensons bien humblement qu'il faut nous occuper de Lepenski Vir, la première « ville » d'Europe, un monceau de vestiges qui contestent — et non sans raison — certaines idées acquises des uns et des autres...

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CHAPITRE 1

La civilisation du trapèze

« Qui refuse d'aller au-delà des faits les atteint rarement »

Theodore Huxley

L'engouement de certains peuples de l'Antiquité pour les symboles de la géométrie est connu depuis bien longtemps.

Octogones, hexagones, cercles, carrés, triangles divers se retrouvent dans les plans des fameux effigy-mounds, tertres à contours géométriques mais aussi zoo- et anthropomorphes de l'Amérique du Nord, ou dans les célèbres dessins-alignements de la Nazca au Pérou, tout comme dans les tracés anthropomorphes de grandes dimensions récemment découverts au Chili ou en Argentine.

La présence du carré et du cercle dans les civilisations de la Chine et de l'Indochine est, elle aussi, depuis longtemps étudiée.

D'ailleurs, pourrait-on concevoir la création culturelle des hommes des mégalithes, tout en leur ôtant l'art dont ils se sont servis pour célébrer le cercle ou le triangle rectangle dans des monuments tels ceux de Stonehenge ou Aveburry en Angleterre, Carnac, Kerlescan ou Crucuno en Bretagne, Mos'na au Yémen ; ou encore dans bien d'autres « monuments » semblables éparpillés en Livonie, Suède, Danemark, Tunisie, Algérie, Baléares, le reste du monde méditerranéen, au Pérou (dans la presqu'île de Sillustani sur le lac Titicaca), en Inde ou Indonésie, à Ceylan, etc. ?

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Quoi qu'il en soit et, même si ces gens manifestaient un fort penchant pour certaines figures géométriques, du point de vue chronologique, il était déjà bien tard, trop tard même ! Et puis, dans tous ces endroits, le rôle joué par la géométrie d'un certain symbole, dans le quotidien des gens du coin, est bien loin d'en faire le peuple du symbole respectif Un peuple de l'hexagone, tel celui des abeilles. Un peuple du carré ou du triangle, sinon même du losange.

Cela ne veut pas dire tout de même qu'un tel peuple n'ait jamais existé. En effet, depuis quelques années il est connu, on vient de le

découvrir. Il s'agit des émules d'une géométrie assez particulière et qui ont constitué, de la sorte, et durant de longs millénaires ce que l'on pourrait appeler le peuple du trapèze. Le peuple du plus impossible des trapèzes égarés dans la géométrie architecturale des arrières ancêtres, car dépourvu de modèle dans la nature immédiate, et difficile à inventer et même à tracer, en dehors des procédés de raison géométrique bien consentie.

La civilisation bâtie par ces géomètres d'exception, tout à fait insouciants des futures divisions et classifications des historiens et spécialistes d'un lointain avenir, dura assez longtemps sur place, avant de s'évanouir de la même mystérieuse façon qu'elle avait surgi, il y a quelque huit millénaires. Cette civilisation sut se forger, dudit trapèze, l'image de marque de son passage à travers l'histoire.

Sans prédécesseurs identifiés, ou plutôt reconnus, et apparem- ment sans successeurs prévus par les certificats de descendance historique requis par la rigueur scientifique moderne, ces gens — les hommes de Lepenski Vir, site proche des fameuses Portes-de-fer du Danube, et dont la présence fut mise à jour depuis une décennie par les patientes fouilles de l'archéologue yougoslave Dragoslav Srejovic, avaient bâti — à travers leur trapèze — la plus ancienne « ville » d'Europe connue à ce jour.

1. Module et longueur de temps Un petit vallon... une ouverture de terrain en fer à cheval

presque insignifiante, débouchant sur le Danube, tout juste en face du tourbillon des eaux de Lepena si riche en poissons et aussi —

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Site géographique de Lepenski Vir

maintenant on le sait — berceau d'une des plus étonnantes civilisations écloses à l'aube de la préhistoire connue de l'Ancien Monde. Un site bien boisé, ancré au vieux fleuve en amont des gorges des Portes-de-fer, taillées par le cours impétueux des ondes rapides dans la roche des montagnes, pour séparer les Carpates — au Nord — des Balkans — au Sud — par une frontière d'eau large par endroits d'à peine 200 à 300 mètres.

C'est l'endroit où, à partir de 1965, on découvrit les restes superposés de plusieurs couches de civilisations, qui se continuaient sur un parcours temporel de plus de sept millénaires. Leur enchaînement, noté par les spécialistes — à l'instar de ce qu'ils font pour des sites de si longue vie, toujours reprise, et de ce qu'ils firent autrefois à Troie — par des nombres latins successifs, laissa percer à jour les étages correspondant à PROTOLEPENSKI VIR, LEPENSKI VIR 1 (a à e), LEPENSKI VIR II (a et b), LEPENSKI VIR III (a et b)... Une assez longue présence qui jette un véritable pont historique comblant un vide local qui s'étend des héritiers des Gravettiens du paléolithique supérieur jusqu'aux temps des premières civilisations agricoles du bassin danubien — celle dite de Starcevo-Crish, par exemple.

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En effet, le faciès culturel du paléolithique supérieur — dont le nom est dû au gisement français de la Gravette — le Gravettien, avait connu une énorme diffusion, allant des Pyrénées à l'Oural. Partout on avait retrouvé les burins de forme spéciale et les pointes effilées à bords rectilignes et retouches abruptes, ayant servi probablement d'armature aux sagaies des Gravettiens et ce sont également eux qui ont légué à l'archéologie de l'Europe et de l'Asie occidentale les statuettes féminines typiques, dont les célèbres Vénus de Lespugue et les statuettes non moins connues de Brassempuy, Grimaldi, Willendorf et autres. Des statuettes qu'on qualifia pendant un certain temps, à tort, d'aurignaciennes et que les Gravettiens créèrent il y a quelque 30 000 ans.

Bien plus tardive, et typique pour le néolithique de l'Europe centrale et balkanique, la civilisation Starcevo-Crish connut son épanouissement après la fin du Ve millénaire (avant notre ère), en Bulgarie, Yougoslavie, Hongrie et en Roumanie jusqu'en Ukraine. Des villages de huttes ou même des maisons en bois revêtues d'argile, construites régulièrement abritaient ces gens, célèbres pour leurs herminettes de pierre polie à section dissymétrique et leurs poteries spécifiques. Néanmoins aucun vestige local n'aurait pu placer entre les Vénus des Gravettiens et les maisons en bois revêtues d'argile des paysans de Starcevo-Crish, les maisons-trapèzes de Lepenski Vir !

a) La première ville d'Europe Lepenski Vir n'est point un site archéologique quelconque.

Selon les plus anciens vestiges mis à jour, c'est une « ville », qui se développe à ses premiers commencements sur une bande étroite de terrain longue de quelque 70 à 90 mètres et qui longe la rive assez basse du Danube tumultueux.

Les foyers des habitats découverts, de forme rectangulaire, larges de 25 cm et longs de 120 à 130 cm (pour les dimensions intérieures), construits en blocs de pierre calcaire, marquent les maisons, dont l'orientation d'ensemble constitue comme une sorte d'éventail. Une distance allant de 8 à 10 mètres sépare deux habitats voisins (leurs foyers).

Présente déjà aux premiers stades de cette civilisation, cette maison sui generis se retrouve dans la nouvelle « ville » de Lepenski

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Vir 1 occupant — somme faite — une surface « urbaine » totale de plus de 2 000 mètres carrés recouverte de bâtisses bien serrées les unes contre les autres. Les quelque quatre-vingts maisons fouillées jusqu'en 1971 ont révélé des aspects déjà difficiles à imaginer.

En effet, le plan général des bases de ces habitats présente l'aspect d'un secteur tronqué à ouverture régulière de 60°. Il s'agit d'une figure géométrique apparemment sans équivalent, ou modèle, dans la nature. Cela revient à constater que les architectes de Lepenski Vir n'ont pas copié ou reproduit, mais qu'ils ont adopté le fruit d'une pensée abstraite (en fait seulement apparemment abstraite comme on va le voir), et qui devait leur fournir la forme absolument inhabituelle et intégralement inventée du plan de leurs habitats.

Tout cela se passait il y a quelque 8 000 ans, presque cinq millénaires et demi, sinon plus, avant qu'un certain « incertain » Pythagore ait fait démarrer l'histoire classique de la géométrie.

En fait, rien de plus vague que la personne physique de Pythagore même ( - 570 à - 496 vraisemblablement). Maître d'une école philosophique de Crotone en Italie méridionale, le philosophe est censé être le fondateur d'un courant de pensée dont la longue histoire devait durer plus de dix siècles, et dont les doctrines sont rattachées par les uns au maître lui-même, par les autres à ses élèves et suivants ; d'où un certain doute quant à la personne du philosophe même.

Pour Pythagore le monde était plongé dans un air infini. La multiplicité et le nombre apparaissent — selon sa théorie — et se manifestent dans les choses, grâce à l'air sans limites qui les engendre. Hérodote et autres auteurs anciens attribuèrent aussi à Pythagore les doctrines de la métempsycose et de la respiration cosmique ; on lui imputa également la fameuse invention du théorème qui porte son nom. Il s'agit en fait de la 47e proposition du premier livre du géomètre Euclide, selon laquelle, dans tout triangle rectangle, le carré construit sur l'hypothénuse est égal à la somme des carrés construits sur les deux cathètes du triangle. En fait, la relation était connue bien auparavant en Ancienne Egypte, en Mésopotamie et en Inde. Même les hommes des mégalithes la connaissaient et l'avaient exprimée en

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clair, comme ils le firent dans les éléments dimensionnels du plan de l'alignement de pierres rectangulaire de Crucuno, en Bretagne ( 1 ).

b) Le plan commence par le triangle Bâtir selon un plan tel que celui des habitats de Lepenski Vir

n'était pas une chose tellement simple, surtout si l'on devait tenir compte aussi de l'intégration de la demeure à base de trapèze dans le plan général du site. Il fallait trouver le juste rapport entre les dimensions clefs de la maison et celles de la surface accordée au site pris en « entier ».

Pour édifier l'habitat de façon isolée, il aurait suffi de tracer sur le terrain un triangle équilatéral et de l'amputer par la suite de l'un de ses sommets. Néanmoins, il faut dire que même cette opération apparemment assez simple nécessitait au moins une corde et trois piquets, plus le savoir de géométrie projective pratique s'y rapportant.

Pour placer un certain nombre d'habitats dans un petit vallon, il fallait partir de rapports bien établis entre les éléments déterminants de la maison et ceux du vallon lui-même. Une certaine information mathématique, portant sur la façon dont la largeur de la façade de la future maison pouvait s'inscrire dans les étages de largeur du vallon capables chacun de contenir une rangée de « n » maisons, était indispensable (2), d'abord sur un plan (qui ne devait pas manquer), et ensuite dans l'espace réel.

Tout laisse voir que ces deux problèmes furent résolus. Selon les spécialistes modernes, les constructeurs du site

commencèrent par déterminer la longueur de la façade de la maison, pour en transporter ensuite la valeur physique sur les côtés latéraux dudit triangle, dont les sommets déterminaient la surface intérieure de la maison qu'on voulait édifier.

Un triangle équilatéral... Une fois tracé ce triangle et pour suivre ce qu'on pourrait

qualifier de besoins techniques de la construction, on l'amendait en le

1. Voir à ce sujet notre précédent livre : L 'Histoire commence à Bimini ( Laffont éd., Paris, 1973, p. 115).

2. Il s'agit certes, de « n » factorielle.

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Géométrie et mesure Plan d'une maison de Lepenski Vir M = module F = Foyer G = Galet central

Décomposition en petits triangles équilatéraux à base M et position du Ifoyer (F)

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raccourcissant vers l'arrière-corps de la future bâtisse et en l'élargissant vers sa façade. On gagnait ainsi vers le devant une surface circulaire, tout en restant dans le jeu des dimensions du triangle initial, pour l'essentiel de ses formes et dimensions.

Les mensurations des assises de ces maisons — entreprises par les archéologues — démontrèrent que, tant le raccourcissement que l'élargissement en question, n'étaient point le fruit du hasard ou de l'arbitraire. On dépeça le triangle d'une façon qu'on pourrait qualifier de scientifique, vu qu'il fut toujours raccourci d'un quart de la longueur de son côté, tandis que la façade gagnait l'arc de cercle correspondant à celui fourni par un cercle dont le centre se serait trouvé dans le sommet perdu du triangle et dont le rayon aurait été égal à la largeur de la façade même.

De cette façon la largeur de l'arrière-corps entrait trois fois dans la longueur des côtés latéraux et quatre fois dans l'ouverture (droite) de la façade. Les côtés gardaient trois quarts de la largeur de la même façade. Grâce à cette disposition, la longueur de l'arrière-corps entrait comme multiple entier, dans toutes les dimensions clefs du trapèze de base.

En termes d'architecture, cela revient à dire que cette longueur arrière — tellement présente dans les éléments dimensionnels du plan de la bâtisse — sert de module de base au projet de l'édifice.

Nulle part et jamais — si l'on veut s'en tenir aux fouilles archéologiques effectuées jusqu'à présent dans le monde — une telle maison ne fut construite par qui que ce soit. Elle demeure l'invention traduite en réalité des architectes danubiens d'il y a quelques millénaires.

Tout cela pour parler le langage à deux dimensions de la plate géométrie plane...

Mais la maison à module précis de Lepenski Vir n'a pas seulement des assises ; elle a aussi une superstructure en bois, il est vrai, et qui continue la symphonie géométrique de son plan. Cette superstructure donne à l'habitat l'air d'une toiture continue, mais quelle toiture !

Il s'agit d'une solution de continuité en bois, allant de la façade vers la plus étroite des bases du trapèze et qui fait de la maison une sorte de boîte à base trapézoïdale, arrondie en secteur conique, régie

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Projections idéales de la toi- ture des maisons F = foyer

par le même immanquable module. En effet celui-ci demeure présent, et l'intervalle qui sépare les poutres de la construction de cette toiture surplombant la façade est toujours divisible par le double du module. Tout comme pour le cas des côtés du plan de la maison, cette division est sans reste. L'intervalle qui sépare les poutres des côtés latéraux est divisé à son tour, et toujours sans reste, par le même module.

Un extraordinaire jeu de dimensions, dira-t-on, pour se cantonner dans les rapports de pure géométrie.

On peut dire qu'en fait le triangle équilatéral du départ consiste en 16 triangles équilatéraux de côté égal au module, le trapèze résultant de l'amputation du sommet du triangle initial, n'étant plus composé que de 15 petits triangles équilatéraux de côté égal au

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module. Ainsi le périmètre du « grand » triangle comprend 12 fois la longueur du module.

c) Le dix et le jeu des nombres

Si on regarde les choses dans toute leur profondeur, on se rend bien compte qu'à travers le jeu des dimensions, c'est un autre jeu qui perce, celui des nombres.

1 m, 2 m, 3 m, 4 m... ne représentent en fait que la succession 1 , 2, 3, 4... où le module de base représente l'unité.

Ne doit-on pas alors se souvenir que 1 + 2 + 3 + 4 = 10? Dans les Commentaires d'Hiéracles sur les vers dorez de

Pythagore, rétablis sur les manuscrits et traduits en françois avec des remarques, le sieur Dacier, garde des livres du Cabinet du roi de France — et qui avait publié ledit ouvrage chez Rigaud, en 1706 — écrivait : « En effet, en assemblant les nombres depuis un et jusqu 'à quatre, cette addition fait dix, puisqu'un, deux, trois et quatre font dix ; et le quatre est au milieu arithmétique entre l'un et le sept, parce qu'il surpasse l'un du même nombre dont il est séparé par le sept, et ce nombre est le trois, quatre étant au-dessus d'un, comme sept au- dessus de quatre. Or les vertus et propriétés de l'un et du sept sont très belles et très excellentes car l'unité comme principe de tout nombre renferme en elle la puissance de tous les nombres et le sept comme vierge et sans nuire a en second la vertu et la perfection de l'unité, puisqu'il n'est engendré par aucun nombre contenu dans l'intervalle des dix... »

Apparemment c'est du bric-à-brac numéral. En fait — et c'est pour cela que nous avons cité tout le passage — ce n'est qu'un très court résumé de cette magie des nombres qui constitua la source du grand engouement des pythagoriciens pour le DIX — nombre souverain formé par l'addition des premiers quatre nombres, premiers à leur idée et donc aussi sacrés.

Pythagore, et surtout les siens, furent les premiers et parmi les plus tenaces investigateurs du monde sans fin des nombres.

Parmi les inventions de taille attribuées à Pythagore qui, ayant longtemps séjourné en Egypte, avait fait partie de la caste des prêtres

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Projection idéale F = foyer G = galet

Projection corrigée

Oiseau fantastique et œuf du monde ? Non, simple projection développée de la toiture des habitats de Lepenski Vir.

Vue supposée

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pharaoniques, on compte une manière — tout à fait propre — d'envisager les rapports entre les nombres et la géométrie. Renversant la vapeur, et renonçant à obtenir des mesures, c 'est-à-dire des nombres à partir des figures géométriques, Pythagore et les siens mirent sur pied une géométrie à partir des nombres, où les nombres se firent donner une forme géométrique propre : triangle, carré, rectangle...

Pour obtenir selon les pythagoriciens la physionomie géomé- trique des divers nombres, il était nécessaire de disposer un certain nombre de points de façon régulière. Le nombre de ces points était celui dont le total exprimait le nombre qu'on voulait représenter. De cette façon le neuf carré lui-même, devenait un nombre carré même dans son expression « extérieure », tout comme le huit devenait rectangulaire ou le dix triangulaire...

Huit Neuf ' Dix ou Dix

La notation en triangle équilatéral du dix devint la plus usuelle, étant donné son importance magique.

Il suffit de jeter un coup d'œil sur le dix pythagoricien formulé en triangle équilatéral pour voir que si on remplace unité ou point par module de Lepenski Vir, on tombe de façon indéniable sur le triangle équilatéral fondamental des habitats de ce site.

Cela signifie qu'en fait le jeu des modules dans les dimensions horizontales du

trapèze dynamique ouvert à 60° n'est qu'une des expressions ultérieures du dix sacré dit plus tard, si tard, pythagoricien.

Nombre sublime — la fameuse TETRAKTYS pythagoricienne, se révAlant, comme on l'a déjà dit, de la somme des premiers quatre nombres — le dix contient également autant de nombres pairs (cinq, à savoir : 2, 4, 6, 8, 10) que d'impairs (cinq, à savoir : 1, 3, 5, 7 et 9),

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et de nombres premiers que de nombres composés. Pour le célébrer, les pythagoriciens l'avaient inscrit dans leur conception de l'Univers, qu'ils considéraient comme fait de sphères tournantes emboîtées les unes dans les autres, en permanent carrousel autour d'un feu central, autre que le Soleil. Terre, Lune, Soleil, Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne avaient leurs sphères. On y ajoutait encore la sphère des étoiles fixes et uniquement pour la cause sainte du dix en question, une seconde Terre, vraie Terre de science-fiction, car anti- Terre, à l'opposite de la nôtre, de façon qu'elle ne puisse être jamais vue...

Au-dessus de cette vraie physique du Nombre selon laquelle toutes les choses créées devaient être constituées de points matériels isolés les uns des autres, les pythagoriciens construisirent toute une métaphysique riche en interprétations et en symbolismes parfois aberrants. Ainsi après l'UN, immuable source mystique de tous les autres nombres et symbole de la Raison-maîtresse de l'Univers, deux devenait... l'opinion qu'on se fait des choses ! Dans une telle série où trois exprimait la trinité, quatre l'équité et cinq le... mariage (union du premier chiffre masculin, car impair, trois, avec le premier chiffre féminin, car pair, deux), le DIX était censé désigner la matière, ce qui surajoutait à sa valeur exceptionnelle.

Aller au-delà du dix, entrevu à travers la figuration ponctuelle du module de l'habitat de Lepenski Vir, c'était inutile sur le plan magique... Mais pour rester audit module, il faut dire que la même représentation en aurait pu faire aussi l'expression — toujours pythagoricienne — d'un autre nombre triangulaire, le quinze, dont la figuration dérive du même triangle. Cela faisant, on s'inscrivait déjà dans une suite de nombres dits polygonaux (pentagonaux, hexago- naux... dodécagonaux, etc.).

La présence du module dans le plan des habitats en question tend à démontrer que les constructeurs avaient conscience de certains éléments d'arithmogéométrie, qui feront les délices des futurs pythagoriciens, et sans la connaissance desquels, le rythme géomé- trique de la maison de Lepenski Vir reste difficile à expliquer.

Néanmoins il est encore à préciser que les pythagoriciens tirèrent assurément leur grand savoir de sources égyptiennes, reconnues par les anciens Grecs. Les hiérophantes, des pharaons furent — en fait — les premiers à inscrire le Dix sur leurs tablettes à

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écrire, comme on l'a vu, triangulairement, à l'aide de petits points. Suivant le savoir égyptien, les pythagoriciens enseignèrent que décade et tétrade étaient étroitement liées et que la Tetraktys devait être formée et exprimée par l'addition de la monade (un point), de la dyade (deux points), de la triade (trois points) et de la tétrade (quatre points).

La passion pour la Tetraktys fut telle que certains des néo- pythagoriciens et, par la suite, tous ceux qui se réclamèrent du même courant de pensée, construisirent un double de la Tetraktys, en remontant de la monade du sommet vers une nouvelle tétrade, supérieure, symétrique à la première. C'était le reflet de l'en deçà dans Y au-delà (vu l'abstraction divine de la Tetraktys même). Mais, et le mais est de taille, si l'on compte les points de la double Tetraktys, on en trouve 19 (vu la monade commune). Cela veut dire que la divine perfection descendue par le truchement de cette nouvelle figuration, supplémentaire en fait et en idée, dans le manifesté, n'est plus une décade mais une ennéade (neuf points, d'où aussi le sacré de ce neuf, dans les traditions numérologi-ques anciennes se réclamant ou non, des néo-pythagoriciens).

On traduisit ce 19 — comme les néo-pythagoriciens l'ont fait, par l'expression occulte du cycle luni-solaire de 19 années. De toute façon, les platoniciens ont repris avec aisance le symbole de la double Tetraktys — que certains auteurs ont rapproché aussi du Labrys, la double hache crétoise, à cause de sa forme. D'ailleurs les mêmes

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La double Tétraktys

platoniciens ont eu l'idée d'utiliser les intervalles d'entre les points de la divine Tetraktys. Elle se transforme ainsi dans un groupe triangulaire de 28 points, reflet, dit-on, des 28 signes du zodiaque lunaire, dans le triangle-ciel. C'était aussi une occasion de relier le sept (4 x 7 = 28) au dix de la Tetraktys, de façon à en augmenter la force magique. Mais les platoniciens n'inventèrent rien en faisant tout cela. (Voir Annexe 1, en fin d'ouvrage.)

Des points marquant des surfaces triangulaires à la façon de ceux du triangle de la décade ont été rencontrés sur maints objets provenant, non seulement de l'époque du fer, mais aussi de l'époque du bronze. De cette manière, des dispositions analogues, telles celles des cercles pointillés d'une pendeloque appartenant au trésor de Cruseilles (IIIe siècle de notre ère, époque romaine), ou celles des dix saillies ovales disposées de manière décroissante sur d'autres lignes horizontales sur le tablier triangulaire de la déesse Cybèle (Pergame, ne siècle avant notre ère) doivent être moins redevables à des influences pythagoriciennes qu'à un héritage local. Un héritage dû à la transmission de formes largement utilisées et diffusées sur un immense espace géographique, et qui avait atteint les pythagoriciens comme pour renforcer les données traditionnelles qu'ils avaient puisées en Egypte. Les historiens des religions ont dûment établi que bien avant l'époque de Pythagore, certaines populations très

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Le triangle-ciel à 28 signes

anciennes d'Europe et d'Asie se servaient du triangle à dix points pour figurer l'expression conjointe du Soleil et de la Lune.

Sans avoir précisément surpris un tel aboutissement à Lepenski Vir, nous sommes obligé d'observer que la source de la Tetraktys « égyptienne » se plaçait, selon les mêmes Egyptiens, en dehors du temps et de l'espace égyptiens proprement dits. En effet, ces premiers usagers de la divine Tetraktys la faisaient provenir — selon la tradition — de leurs lointains et légendaires, mais aussi combien

Les derniers tracés des Shemsou-Hor sur les tapis de Tunisie

Symbole de l'homme (tapis Berbère de Tunisie décoré du triangle-tête renfermant la sommation de 1 à 4 = Dix, voire de « l'homme-dix »).

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réels, initiateurs, les SHEMSOU - HOR, venus de l'Ouest lointain, et qui appartenaient vraisemblablement à une vieille vague de Cro- Magnon... ce qui, comme on va le voir, rapproche le dix en question des gens de Lepenski Vir. (Voir Annexe 2, en fin d'ouvrage.)

La Tétraktys des... modules

De toute façon, ces approches numérologiques — qui, pour Lepenski Vir étaient déjà, dès les premiers débuts, un objet de recherche — ont contribué à leur transcription dans les proportions des éléments géométriques et dimensionnels des habitats de ces proto-géomètres, déjà hantés par la magie des nombres...

Un, deux, trois, quatre...

d) UN ou le principe L'unité, le central, l'unique, le milieu, mais aussi l'entier prêt à

s'épanouir tout en se divisant, dans le monde infini des nombres dont il est le germe et aussi le maître divin, car générateur...

Néanmoins, il faut dire que l'UN, personnification dans l'image du trait vertical, représente non seulement l'axe, la colonne ou le pilier, mais également l'homme debout, le phallus et certes aussi le bâton de commandement, le sceptre ; en somme, une foule d'objets se prêtant à des interprétations magiques, et qui conduisent vers l'un principe.

De nos jours, les philosophes du nombre distinguent — comme l avait fait René Guénon — l'un de l'unicité, le premier restant abandonné à la représentation de l'homme actif — mort ou couché le trait n est plus vertical, montant — l'homme complice des oeuvres

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sacrées ou profanes de la création de toutes sortes. Quant à l'unicité, elle demeure l'expression de Dieu comme être et maître tout autant mystique qu'absolu.

Autrefois — et, il nous faut remonter sur l'échelle du temps juqu'aux pythagoriciens, pour lesquels la monade en tant que mère des nombres (leur génitrice et génératrice) ne pouvait être l'un d'eux, même si le premier devenait dans le fait le UN:.principe — un commun et un principe indistincts de l'unicité, se confondaient dans la première expression de l'unité, mais non dans celle de l'impair. En effet, étant donné la position « hors série » du « un », le premier nombre impair devenait le... trois.

La connaissance consciente du triangle — figure qui, tout comme le trois est le plus petit nombre comprenant le pair et l'impair (2 + 1 = 3), est la surface la plus simple et la génératrice de tous les polygones — avait offert aux premiers de ses usagers la possibilité d'intégrer de façon visible le trois dans le principe. Elle leur avait donné l'occasion de réaliser une forme unique tout en partant de trois éléments distincts (les côtés), ce qui allait être reprojeté sous forme d'unicité magique, dans la carrière symbolique du triangle auprès des Anciens. Un symbolisme qui n'est pas encore prêt à s'éteindre.

Sur ce chemin, les gens de Lepenski Vir connurent l'unicité du module de base de leurs habitats (mesure unique de leur grand triangle et de leur trapèze uniques eux aussi), une unicité consistant tout justement en cela que ledit module entrait sans reste dans les principales dimensions de leurs habitats. Un module qui a, chez eux, le même rôle qu'aura plus tard chez les gens des mégalithes le yard mégalithique mis en évidence par les passionnantes recherches entreprises dernièrement par le professeur anglais Alexander Thom. Il s'agit de l'étalon de mesure unique, constant (cette fois-ci) et pratique, utilisé par les gens des mégalithes dans la projection de leurs plans et la construction de leurs monuments. Ne peut-on dire, en somme, que les gens de Lepenski Vir furent, dans le principe, les inventeurs de l'étalon des proportions dans la construction, un précurseur en quelque sorte du yard mégalithique, et un lointain aïeul du mètre moderne ?

L'existence même d'un tel « étalon », unique pour un même type dimensionnel de maisons, est une manifestation implicite de l'UN principe.

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Le fait d'avoir marqué aussi le centre des maisons par un galet, témoigne de la même connaissance usuelle de l'UN principe et peut- être aussi des débuts de la grande tradition des nombres, tant magiques que sacrés.

e) Le deux qui crée Dualité, double, biface, opposition et en même temps couple et

complémentarité, union des contraires ainsi que symbole attitré de l'opposition, le deux fut aussi le nombre clef de tous les dédoublements et de toutes les ambivalences. Il présida en tant que principal élément numéral de la division (celle qui fait surgir la moitié et par cela l'égalité), aux plus diverses relations entre l'entier, le tout, et la partie. L'esprit et la matière, le maître et Yœuvre (s'il s'agit du créateur et de la créature, sinon même du Créateur et de la Création), le bon et le mauvais, le mal et le bien, le bénéfique et le maléfique, le masculin et le féminin, le blanc et le noir, Dieu et le diable se réclament d'une certaine expression première de la dualité.

« Source de la division », le partage en deux précède tous les autres. En idée et en principe, le deux lui aussi est unique en tant qu'unité des contraires, surtout lorsqu'il endosse la forme du germe de l'évolution qui mène au progrès, ou celle de l'involution qui débouche sur la catastrophe. Deux est aussi l'inexprimé d'où peuvent sortir des couples d'actions (également) contraires. Néanmoins ce faisant, le deux retrouve son sens d'entité génitrice, une personnalité de mère et ce faisant, aussi un... sexe. Devenu expression du principe féminin, nombre de la matrice féconde, deux désigne la mère, la femme. Il devient leur nombre.

On comptait: un, deux... homme, femme... mâle, femelle... trois... fruit (produit de l'incorporation de l'UN dans le DEUX, traduit par l'addition 1 + 2, pour faire du trois la somme, le tout, mais aussi sur l'autre plan, le fruit, l'enfant...).

Mais restons au deux... Deux représente aussi les deux portes, les deux portes de l'âme

qui monte aux célestes demeures par la Lune et descend sur la Terre par le Soleil, d'où le couple Lune-Soleil, symbole largement utilisé des « deux portes ».

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L'ARCHITECTURE SACRÉE

Constructeur dès son origine, l'homme ne ces- sera, à travers les âges, d'embellir la demeure sacrée au cœur de laquelle il établit ses dieux. Lui donnant les proportions issues des rythmes de la nature, il l'intégra dans son environnement et l'humanisa, tout en faisant de la géométrie son propre langage.

Ainsi naquit l'architecture sacrée, aux propor- tions apparemment mystérieuses, également tribu- taires d'unités de mesure empruntées au corps humain et au jeu des fruits de la géométrie (triangle, carré, cercle). Harmonie géométrique, mais aussi céleste, où centre du monde et rêves humains pren- nent corps et esprit.

Un ouvrage documenté, précis et direct, qui montre la complexité des rapports de l'art de l'architecte avec le nombre et la magie.

L'auteur : Docteur d'État ès-lettres et sciences humaines, auteur de plusieurs livres consacrés à la conquête humaine du monde et à la symbolique, infatigable globe-trotter de l'extraordinaire, Pierre Carnac est un passionné de l'aventure civilisatrice de l'homnie.

125 F

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