par Christian Régnier

Lavoisier et la physiologie de l'homme (1)

Le temps de la chimie Avant de s'intéresser à la physiologie des animaux (et de I'homme), Lavoisier et ses élèves accomplirent la « révolution )) de la chimie.

C onsidéré comme le fondateur (1727-1781), contrôleur géné- de la chimie moderne, Lavoisier ral des finances, l'avait (1743-1794) énonça le célèbre nommé au poste de régisseur

principe : Rien ne se perd, rien ne se de la Régie des poudres et sal- crée. II proposa une nouvelle dénomi- pêtres à I'Arsenal à Paris. nation des éléments, ainsi l'esprit de Lavoisier équipa (à ses frais) : B~~ relief ion des Vénus » devenait I'acide acétique, son laboratoire d'instruments savantr autour de Lavoisier qui commente l'a huile de vitriol », I'acide sulfurique, coûteux, constitua une biblio- au tableau ses expériences sur l'oxydation. la K laine philosophique », l'oxyde de thèque, s'entoura de savants zinc, le a sel sédatif », I'acide boracique, talentueux de formations diverses. Ce En 1793, il proposa I'owertured'un musée la liqueur fumante de Libavius », laboratoire devait être l'un des mieux destinéàcollecterlesinstrumentsemployés le nitrate d'étain, le « vitriol de Mars », équipés d'Europe. Fait nouveau pour danslesxiencesmathématiques. le nitrate de cuivre ... Ces noms nou- l'époque, il constitua une véritable Le 1"août 1793, Condorcetfitadopter veaux décrivaient précisément la équipe - le a groupe de l'Arsenal D - et par la Convention un système métrique nature chimique des corps mais il man- mit en placetoutes lesconditionsdeson « provisoire D fondé sur la définition du quait encore aux chimistes la désigna- succès. C'est en 1785, à l'Arsenal, devant mètre - du grec metron, mesure », tion exacte des éléments. Lavoisier f i t une assistance nombreuse de savants, comme la dix-millionième partie du aussi entrer les gaz dans l'univers de la que Lavoisier f i t sa grande expérience quart du méridien terrestre. Le mètre chimie, en les identifiant, en les pesant démontrant la composition de l'eau permettaitdecaractérisertouteslesnou- et en les analysant. L'hydrogène, (expérience qualitativeet quantitative). velles unitésde mesuredevolumeset de l'azote et l'oxygène furent les trois pre- Un siècle plus tard, un autre chimiste poids comme le c grave » (gramme). miers gaz à être étudiés. Pour ce faire, Marcellin Berthelot (1827-1907) expri- Imprégné de la philosophie des il s'inspira largement destravauxetdes mait son opinion sur l'œuvre de Lavoi- Lumières, ayant réclamé avec force expériences du chimiste anglais Joseph sier : K ce qu'on ne saurait contester à l'abolition des corvées, ayant proposé Priestley (1733-1804) qui avait décou- Lavoisiec c'estqu'ilaiteud'abordlaclaire la création des caisses de secours pour vert l'oxygène en 1772. vue de la théorie; théorie que ses travaux les pauvres et les personnes âgées, élu

Au-delà d'une nouvelle nomencla- antérieurssurlerôledel'oxygènedansla député suppléant aux États généraux, ture chimique, Antoine de Lavoisier formation des oxydes et des acides enthousiasmé par les premiers travaux bouleversa le raisonnement scienti- devaient faire pressentir à tous les chi- des assemblées, Lavoisier paya de sa vie fique en le fondant désormais sur misteséclairésde l'époque. Ilosa lepre- sa charge de fermier général. II s'agis- l'analyse des faits : << Ne conserver que mierproclamer la composition de l'eau, sait d'une des fonctions les plus haïes les faits qui ne sont que des données vérité quiallait devenir l'une des pierres de l'Ancien Régime ; autorisés à lever et de la nature, e t qui ne peuvent nous angulairesde la science chimique ». percevoir les impôts, les fermiers géné- tromper [...]. Ne chercher la vérité que Nommé à l'Académie royale des raux avaient fait construire le mur dans l'enchaînement des expériences sciences dès 1768, Lavoisier en fut le entourant Paris afin de limiter les et des observations ». dernier trésorier jusqu'à sa dissolution fraudes aux octrois de la ville. Après un

Pour accomplir cette a révolution » le 8 août 1793 ; Condorcet (1743-1794), procès bâclé, Antoine Laurent de Lavoi- de la chimie, Lavoisier adopta aussi autre grande victime de la Révolution, sier fut guillotiné à Paris, le 8 mai 1794 une méthodologie. En 1775, Turgot en fut le dernier secrétaire perpétuel. avec d'autresfermiers généraux.

30 1 AMCpratique / no 148 1 avril 2006