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81 Sophie Madeleine « Le complexe pompéien du Champ de Mars au IVe siècle, témoin de la réappropriation idéologique Julio-Claudienne » Schedae, 2007, prépublication n° 6, (fascicule n° 1, p. 81-96). Schedae, 2007 Le complexe pompéien du Champ de Mars au IV e siècle, témoin de la réappropriation idéologique Julio-Claudienne Sophie Madeleine Ingénieur de recherche, Centre Interdisciplinaire de Réalité Virtuelle (CIREVE) Université de Caen Basse-Normandie [email protected] La journée d’études « Héritages et traditions encyclopédiques dans l’Antiquité tardive » est intéressante sous plusieurs aspects mais c’est le choix chronologique qui nous a motivée : celui du Bas-Empire qui marque, dans le cas de Rome, la charnière entre l’empire païen et l’empire chrétien. Le IV e siècle est une époque riche, déjà privilégiée par P. Bigot et I. Gismondi qui l’ont choisie pour leur évocation en plan relief de la Rome antique 1 . Le règne de Cons- tantin marque l’apogée monumental de la Ville et l’avantage de ce choix est que l’on travaille sur la dernière strate archéologique de l’Antiquité, a priori la mieux conservée, et qu’il est possible de se pencher sur des bâtiments tardifs emblématiques de Rome, comme la basi- lique de Constantin, encore bien préservée. Cette communication est peut-être un peu en marge de la tradition encyclopédique stricto sensu, mais notre problématique rejoint celle de cette journée d’études : nous allons nous intéresser à la transmission architecturale d’un complexe construit au I er siècle a. C., pour voir comment il a évolué jusque sous l’Antiquité tardive. Dans quelle mesure l’état du IV e siècle garde-t-il la mémoire d’un bâtiment tel qu’il avait été conçu cinq siècles auparavant ? Les innovations apportées au cours des restaurations ont-elles bouleversé l’organisation architecturale de l’ensemble ou l’héritage est-il scrupuleusement maintenu ? Bien plus qu’un simple état des changements intervenus jusqu’à cette période charnière de l’histoire, cette communication vise à montrer comment le complexe pompéien du Champ de Mars, cons- titué du premier théâtre en pierre de la Ville (le théâtre de Pompée), d’un temple à Vénus Victrix, d’un portique abritant des œuvres d’art et d’une curie, a été l’objet de réappropria- tions idéologiques qui en modifient radicalement la lecture dans son état du IV e siècle. Nous dresserons l’état de cette « ville dans la Ville » à la fin de la République, afin de voir selon Prépublication n° 6 Fascicule n° 1 1. Le plan relief de P. Bigot (échelle 1/400) est exposé à l’Université de Caen Basse-Normandie, à la Maison de la Recherches en Sciences Humaines (www.unicaen.fr/rome), celui d’I. Gismondi (échelle 1/250) est au Musée de la civilisation romaine de Rome.

Le complexe pompéien du Champ de Mars au IV e siècle, témoin … · 2014. 10. 8. · celui du Bas-Empire qui marque, dans le cas de Rome, la charnière entre l’empire païen

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    Sophie Madeleine« Le complexe pompéien du Champ de Mars au IVe siècle, témoin de la réappropriation idéologique Julio-Claudienne »

    Schedae

    , 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    Schedae

    ,

    2007

    Le complexe pompéien du Champ de Mars au IV

    e

    siècle, témoin de la réappropriation idéologique Julio-Claudienne

    Sophie Madeleine

    Ingénieur de recherche, Centre Interdisciplinaire de Réalité Virtuelle (CIREVE)

    Université de Caen Basse-Normandie

    [email protected]

    La journée d’études « Héritages et traditions encyclopédiques dans l’Antiquité tardive »

    est intéressante sous plusieurs aspects mais c’est le choix chronologique qui nous a motivée :

    celui du Bas-Empire qui marque, dans le cas de Rome, la charnière entre l’empire païen et

    l’empire chrétien. Le IV

    e

    siècle est une époque riche, déjà privilégiée par P. Bigot et I. Gismondi

    qui l’ont choisie pour leur évocation en plan relief de la Rome antique

    1

    . Le règne de Cons-

    tantin marque l’apogée monumental de la Ville et l’avantage de ce choix est que l’on travaille

    sur la dernière strate archéologique de l’Antiquité,

    a priori

    la mieux conservée, et qu’il est

    possible de se pencher sur des bâtiments tardifs emblématiques de Rome, comme la basi-

    lique de Constantin, encore bien préservée.

    Cette communication est peut-être un peu en marge de la tradition encyclopédique

    stricto sensu

    , mais notre problématique rejoint celle de cette journée d’études : nous allons

    nous intéresser à la transmission architecturale d’un complexe construit au I

    er

    siècle

    a. C

    .,

    pour voir comment il a évolué jusque sous l’Antiquité tardive. Dans quelle mesure l’état du

    IV

    e

    siècle garde-t-il la mémoire d’un bâtiment tel qu’il avait été conçu cinq siècles auparavant ?

    Les innovations apportées au cours des restaurations ont-elles bouleversé l’organisation

    architecturale de l’ensemble ou l’héritage est-il scrupuleusement maintenu ? Bien plus qu’un

    simple état des changements intervenus jusqu’à cette période charnière de l’histoire, cette

    communication vise à montrer comment le complexe pompéien du Champ de Mars, cons-

    titué du premier théâtre en pierre de la Ville (le théâtre de Pompée), d’un temple à Vénus

    Victrix

    , d’un portique abritant des œuvres d’art et d’une curie, a été l’objet de réappropria-

    tions idéologiques qui en modifient radicalement la lecture dans son état du IV

    e

    siècle. Nous

    dresserons l’état de cette « ville dans la Ville » à la fin de la République, afin de voir selon

    Prépublication n° 6 Fascicule n° 1

    1. Le plan relief de P. Bigot (échelle 1/400) est exposé à l’Université de Caen Basse-Normandie, à la Maisonde la Recherches en Sciences Humaines (www.unicaen.fr/rome), celui d’I. Gismondi (échelle 1/250) est auMusée de la civilisation romaine de Rome.

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    Schedae

    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    quel schéma idéologique Pompée avait conçu cet ensemble architecturé. Ensuite l’ensemble

    des modifications intervenues entre sa construction et le IV

    e

    siècle seront évoquées avec

    notamment une nouvelle proposition d’interprétation de trois textes latins de Valère Maxime,

    Properce et Suétone qui, nous semble-t-il, méritent d’être lus sous un nouvel éclairage.

    Nous verrons comment la réappropriation idéologique opérée sous les Julio-Claudiens

    s’est maintenue jusque sous l’Antiquité tardive. À travers l’exemple du complexe pompéien,

    nous voulons montrer toute la richesse d’une étude architecturale de la ville de Rome au

    IV

    e

    siècle : certains bâtiments construits sous la République ou à l’époque augustéenne ont

    beaucoup évolué jusqu’au Bas-Empire et c’est justement la comparaison des lectures qu’il

    est possible d’opérer entre les différentes époques de l’Antiquité qui permet d’en avoir

    une vision complète. Comprendre un bâtiment à une époque donnée n’a qu’un intérêt

    limité. Par contre, envisager un ensemble architecturé dans son évolution pour voir com-

    ment les habitants d’une ville y ont vécu, comment les différentes générations l’ont vu évo-

    luer, comment il a pu devenir l’instrument de propagandes politiques parfois antagonistes,

    révèlent toute sa richesse. Nous voulons ici marquer tout l’intérêt de la restitution virtuelle

    diachronique de Rome, telle qu’elle est pratiquée dans l’équipe « Plan de Rome. Sources

    anciennes et technologies multimédia » de l’Université de Caen Basse-Normandie, avec

    comme point de départ l’époque charnière de l’Antiquité tardive : le règne de Constantin.

    1 – Le complexe lors de sa construction par Pompée

    1.1 – Le plan au sol

    Le décentrage de la curie lié à des contraintes urbanistiques

    A l’extrémité est du portique de Pompée, était installée une curie qui servait notam-

    ment à accueillir les réunions du sénat les jours où des spectacles étaient organisés dans le

    théâtre de Pompée. L’emplacement de la curie de Pompée nous est connu par deux sources :

    l’archéologie et la

    Forma Vrbis Romae

    , un plan de marbre du III

    e

    siècle, gravé sous les Sévère,

    qui représente le plan au sol de la Ville. Nous avons la chance de posséder un nombre assez

    important de fragments originaux de la

    Forma Vrbis

    concernant le complexe de Pompée.

    À la Renaissance, des érudits ont également dessiné des fragments qui étaient à l’époque

    conservés et qui ont aujourd’hui disparu. Ces copies, les

    codices

    du Vatican, peuvent être

    utilisées en complément des fragments originaux et des relevés archéologiques pour dres-

    ser un plan au sol du complexe (figure 1).

    L’espace séparant les fragments 8 et 10 de l’ensemble dessiné par les fragments 2, 3

    et 4 (figure 1) est donné par l’archéologie : le portique occupe 180 m de long

    2

    . On se rend

    compte que pour des contraintes urbanistiques (respect des constructions antérieures, pré-

    sence de la

    Palus Caprae

    , c’est à dire le marécage du Champ de Mars, souhait de ne pas

    trop s’éloigner du centre monumental) et la volonté d’orienter la

    cauea

    à l’est pour des

    considérations météorologiques, Pompée ne pouvait pas implanter son complexe ailleurs

    sans en diminuer la taille. Ensuite, l’agencement de la zone sacrée du Largo Argentina

    (fragments 2, 3 et 4) fait que la curie de Pompée ne peut pas être installée au centre du

    portique. Notre placement des fragments sur le plan d’ensemble est validé par plusieurs

    contrôles : les traits figurés sur les fragments 2 et 10 se rejoignent parfaitement (points A

    et B) et la taille de la curie sur la

    Forma Vrbis

    (21 m sur 24 m) est en accord avec les fouilles

    archéologiques. Pompée a été obligé de penser l’aménagement de son portique avec une

    asymétrie dans la composition du côté est (comprenant la curie).

    2. Gros 1993, 148-149.

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    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    Le portique des origines :les possibles atténuations de l’asymétrie engendrée par la curie décentrée

    Il est probable que les architectes de la fin de la République ont tenté de masquer

    cette anomalie à la vue et nous allons tenter de comprendre comment. Pour ce faire, deux

    textes sont à rapprocher, l’un de Properce et l’autre de Valère Maxime, pour lesquels nous

    allons proposer de nouvelles interprétations.

    Scilicet umbrosis sordet Pompeia columnis

    porticus, aulaeis nobilibus Attalicis,

    et platanis creber pariter surgentibus ordo,

    flumina sopito quaeque Marone cadunt,

    Figure 1 : Plan restitué d’après les fragments de la

    Forma Vrbis Romae

    et l’archéologie.

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    Schedae

    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    et leuiter nymphis tota crepitantibus orbe

    cum subito Triton ore recondit aquam.

    Sans doute, il est bien laid, ce portique de Pompée aux colonnes ombreuses, aux fameuses

    tapisseries d’Attale, et toutes ces rangées bien égales de platanes et tous ces flots, que laisse

    tomber un Maron assoupi et par la ville entière le doux glouglou de l’onde, quand soudain le

    Triton aspire l’eau de sa bouche

    3

    .

    Eius instinctu Q. Catulus Campanam imitatus luxuriam primus spectantium consessum

    uelorum umbraculis texit. Cn. Pompeius ante omnes aquae per semitas decursu aestiuum

    minuit feruorem.

    Sous son impulsion Quintus Catulus, imitant l’amour du luxe des Campaniens, fut le premier à

    placer les sièges des spectateurs à l’ombre de toiles. Pompée prit l’initiative de faire couler de

    l’eau à travers les travées pour adoucir la rigueur de l’été

    4

    .

    Properce nous parle de rangées bien égales de platanes, sans faire mention d’un dou-

    ble bois, tels qu’on le voit sur la

    Forma Vrbis

    du III

    e

    siècle et tel qu’il est décrit pour la pre-

    mière fois dans les sources littéraires par Martial

    5

    . Nous pensons que pour atténuer l’asymétrie

    du portique, le plus logique pour Pompée était de planter un bois unique et conséquent

    de platanes, qui ferait la même largeur que le double bois plus tardif représenté sur la

    Forma

    Vrbis

    . Avec ce bois unique, la porte centrale du mur de scène (la

    ualua regia

    ) et la curie ne

    peuvent pas être vues ensemble et du coup, la curie doit nettement moins paraître décen-

    trée qu’avec le schéma à double

    nemus

    qui sera construit plus tard. La suite du texte de

    Properce parle ensuite de « flots que laisse tomber un Maron assoupi et d’un Triton qui

    aspire l’eau de sa bouche ». Voici le schéma qui vient immédiatement à l’esprit : de l’eau

    entre dans le portique (en quantité assez importante :

    flumina

    ) par une fontaine dont le per-

    sonnage principal est Maron. C’est le personnage qui dans l’Odyssée donne à Ulysse l’outre

    de vin, qui lui permettra d’enivrer le cyclope. On peut imaginer que dans le portique de

    Pompée, l’eau coulait justement d’une outre rappelant la légende. Ensuite, l’eau sort du

    portique par une évacuation monumentale : un bassin dans lequel l’eau se vide par la bouche

    d’un triton en un bruit à la fois doux (

    leuiter

    ) et fort (

    tota crepitantibus orbe

    ).

    Mettons ce texte en parallèle avec celui de Valère Maxime. Comme il est question

    d’une nouveauté de Pompée (

    Cn. Pompeius ante omnes)

    , nous pensons qu’il s’agit d’une

    allusion à son complexe du Champ de Mars. L’expression qui nous intéresse est

    aquae per

    semitas decursu

    . Une première interprétation possible serait celle d’un écoulement dans

    des canaux à l’air libre dans les circulations de la

    cauea

    du théâtre (c’est l’interprétation de

    R. Combès). Le sens premier de

    decurro, is, ere

    est « descendre en courant, dévaler, se

    précipiter, s’abaisser en pente ». L’eau arriverait donc en haut de l’édifice, certainement à

    l’aide de machines élévatoires et elle redescendrait ensuite dans la

    cauea

    , pour rafraîchir

    les spectateurs. Mais par où descendrait cette eau ? Le texte nous parle de

    semita

    signi-

    fiant « voie latérale, sentier, ruelle, chemin de passage ». Pour que l’eau rafraîchisse effica-

    cement les spectateurs, il faudrait qu’elle circule dans la

    cauea

    sans être emprisonnée dans

    des tuyaux, à l’air libre, mais sans chute directe pour éviter les nuisances sonores. Il y aurait

    dans ce cas plusieurs canaux à l’air libre, qui circuleraient dans le théâtre de Pompée, du

    haut vers le bas de la

    cauea

    . La technique à mettre en place aurait été compliquée, car il

    fallait élever l’eau à 25 mètres pour qu’elle arrive en haut de la

    cauea

    . À l’époque de Valère

    3. Prop. 2, 32, 7 à 16 (texte, trad. et comm. P. Fedeli, Leipzig, Teubner, 1994 ; texte, trad. et comm. D. Paganelli,Paris, Les Belles Lettres, 1961).

    4. Val. Max., 2, 4, 6 (texte, trad. et comm. R. Combès, Paris, Les Belles Lettres, 1995).5. Mart. 2, 14,

    cf. infra

    .

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    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    Maxime, le Champ de Mars était loin de tout aqueduc. Le plus simple aurait été de faire

    venir l’eau de l’

    Aqua Appia

    , à partir de l’Aventin, mais l’opération aurait nécessité de gros

    travaux et nous n’en avons pas de traces. L’eau qui alimentait le Maron de Properce et les

    semitae

    de Valère Maxime venait probablement du Tibre par des canaux qui, comme

    l’euripe de l’époque augustéenne alimentant le

    stagnum

    d’Agrippa, suivaient une pente

    naturelle.

    Pour élever l’eau en haut des gradins, il fallait donc obligatoirement utiliser une machine.

    Les deux machines à avoir un débit conséquent sur une hauteur d’élévation correcte sont

    la chaîne à godets et la noria. Une chaîne à godets peut élever 5 litres à la seconde sur une

    vingtaine de mètres et une noria plus de 20 litres à la seconde sur une hauteur qui sera sen-

    siblement définie par son diamètre

    6

    . La capacité d’une noria serait plus proche des besoins

    du théâtre pour alimenter ces canaux mais, même en envisageant des machines de 10 m

    de diamètre (ce qui est considérable du point de vue de l’encombrement), il en faudrait au

    moins trois, installées en paliers, pour élever l’eau jusqu’en haut de la

    cauea

    . Une noria

    n’élève en effet pas l’eau sur la totalité de son diamètre : il faut au moins retrancher 1,5 m

    pour le puisage et le déversement. L’encombrement de ces trois norias aurait été notable.

    La solution de chaînes à godets (installées en deux paliers ?) est plus facilement imaginable.

    Où pouvaient être situées ces machines élévatoires à deux ou trois niveaux dans le théâtre ?

    Elles n’étaient certainement pas visibles pour les spectateurs à l’intérieur de la

    cauea

    pour

    au moins deux raisons : l’esthétisme et le problème du bruit. Dans un théâtre entièrement

    recouvert de marbre, il est d’ailleurs difficile d’imaginer ces machines peu esthétiques

    offertes à la vue. Le mécanisme du rideau de scène lui-même était caché à la vue du public.

    L’autre difficulté soulevée par ces aménagements est le bruit. Il n’était pas question que

    ces machines élévatoires imposent un fond sonore lors des représentations, bruits de fonc-

    tionnement qui sont pourtant impossibles à éviter (grincements, frottements…). Dans la

    même perspective, l’écoulement de l’eau sur la pente de la

    cauea

    aurait occasionné des

    nuisances sonores parasitant le jeu des acteurs. À partir de ces constatations, nous voudrions

    émettre une autre hypothèse pour comprendre ce texte. Si les

    semitae

    qu’évoque Valère

    Maxime ne peuvent pas, pour les raisons techniques exposées ci-dessus, être des circula-

    tions dans le théâtre, pourquoi ne pas les imaginer dans le portique ? Le texte de Valère

    Maxime parle d’un aménagement construit par Pompée mais ne précise pas qu’il s’agit du

    théâtre. Le mot

    semita

    est utilisé par Varron pour l’allée centrale du portique de sa volière

    donnant accès à la tholos

    7

    . Or, cette allée est précisément entourée de deux bassins d’eau…

    Nous aurions donc pu avoir dans un état primitif du portique une circulation d’eau sur les

    côtés du bois de platanes,

    semitae

    étant à interpréter comme les allées du portique et non

    comme des circulations dans lesquelles passe l’eau.

    Per

    serait à prendre au sens de « le long

    de ». Le texte serait dans ce cas à traduire par « Pompée prit l’initiative de faire couler de l’eau

    le long des allées pour adoucir la rigueur de l’été ».

    On remarque sur les courbes de niveau actuelles une baisse d’altitude entre l’est et l’ouest

    du portique. Si la tendance était la même dans l’Antiquité, l’eau devait circuler de l’est vers

    l’ouest, alimentée par le Tibre. Nous pensons donc qu’au moment de sa construction, le

    portique de Pompée devait avoir l’aspect schématisé sur la figure 2.

    Pour être en conformité avec le texte de Properce qui parle de deux statues, il semble

    que les deux

    semitae

    devaient se rejoindre pour que les canaux soient alimentés par la même

    6. Bonnin 1984.7. Varro.,

    Rust

    . 3, 5, 12.

  • 86

    Schedae

    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    fontaine et aient une même voie d’évacuation. En plaçant le Maron juste dans l’axe de la

    curie et le Triton dans l’axe de la

    ualua regia

    , la densité du bois de platanes devait empê-

    cher l’œil de percevoir le défaut d’alignement des deux fontaines. Du côté de la curie, l’ali-

    gnement entre l’exèdre et la fontaine de Maron pouvait atténuer la position dissymétrique

    du bâtiment dans la largeur du portique.

    1.2 – La dimension idéologique à la fin de la République :une préfiguration des forums impériaux

    Il convient ici d’insister sur le lien fort qui est créé entre la statue de Vénus

    Victrix

    (placée

    dans la

    cella

    du temple homonyme) et celle de Pompée, placée vraisemblablement sur la

    présidence de la curie, au centre de cette pièce : les deux sont sensiblement alignées. L’exis-

    tence d’une statue de Vénus est très probable, puisque la plupart des temples accueillent

    dans leur

    cella

    la divinité à laquelle ils sont dédiés. D’autre part, des monnaies représentant

    Vénus

    Victrix

    ont circulé, notamment des deniers émis en 44

    a. C

    8

    . La présence de la statue

    de Pompée est quant à elle attestée par plusieurs sources littéraires :

    Le lieu même semblait marqué par la divinité, pour favoriser leur dessein : c’était un des porti-

    ques entourant

    le théâtre,

    où se trouvait une salle garnie de sièges,

    dans laquelle se dressait

    une statue de Pompée

    que la ville lui avait élevée, lorsqu’il avait orné ce quartier de portiques

    et de son théâtre

    9

    .

    Ce que j’ai rapporté jusqu’ici peut être l’effet du hasard ; mais la salle où eut lieu la scène du

    meurtre, celle où le Sénat se réunit ce jour-là, contenait

    une statue de Pompée

    , qui avait

    dédié cet édifice comme un ornement ajouté à son théâtre : cette circonstance prouve mani-

    festement que l’action fut conduite par un dieu qui avait assigné et marqué ce lieu pour un tel

    événement. On dit aussi que Cassius avant l’assassinat tourna les yeux vers la statue de Pom-

    pée et l’invoqua en silence, bien qu’il fût attaché à la doctrine d’Epicure : l’imminence du

    drame répandait dans son âme, semble-t-il, un enthousiasme et une émotion qui chassaient

    ses anciennes opinions

    10

    .

    Il semble que le complexe pompéien du Champ de Mars, avec son alignement sym-

    bolique des statues de Pompée et de Vénus (même s’il n’est pas parfait dans la forme) est

    le point de départ de toute l’idéologie qui sera plus tard reprise dans les forums impé-

    riaux

    11

    . Si l’on compare, par exemple, le complexe de Pompée et le forum de César, l’un

    et l’autre s’organisent en longueur, avec un temple à l’une des extrémités et des portiques

    sur chacun des longs côtés. La place du forum de César correspond à la

    porticus post scae-

    nam

    du complexe pompéien du Champ de Mars. Les deux temples sont dédiés à Vénus :

    Vénus

    Victrix

    pour Pompée et Vénus

    Genitrix

    pour César, qui affirme ses ascendances divines.

    8. Sauron 1994, 253.9. Plutarque,

    Brut

    us, 14 (texte K. Ziegler,

    Plutarchi Vitae parallelae

    , vol. 2.1, 2

    e

    édition, Leipzig, Teubner, 1964,p. 135-179, texte, trad. et comm. R. Flacelière et E. Chambry, Paris, Les Belles Lettres, 1978) : Kai; to; tou'tovpou qei'on ei\nai kai; pro;" aujtw'n: stoa; ga;r h\n miva tw'n peri; to; qevatron ejxevdran e[cousa, ejn h|/ Pomphi?outi" eijkw;n eiJsthvkei, th'" povlew" sthsamevnh", o{te tai'" stoai'" kai; tw'/ qeavtrw/ to;n tovpon ejkei'non ejkovsmhsen.

    10. Plutarque,

    Caesar

    , 66 (texte K. Ziegler,

    Plutarchi Vitae parallelae

    , vol. 2. 2, 2

    e

    édition, Leipzig, Teubner, 1964,p. 253-337, texte, trad. et comm. R. Flacelière et E. Chambry, Paris, Les Belles Lettres, 1975) : JO de; dexavmeno"to;n fovnon ejkei'non kai; to;n ajgw'na cw'ro", eij" o}n hJ suvgklhto" hjqroivsqh tovte, Pomphi?ou me;n eijkovna keimevnhne[cwn, Pomphi?ou dV ajnavqhma gegonw;" tw'n proskekosmhmevnwn tw'/ qeavtrw/, pantavpasin ajpevfaine daivmonov"tino" uJfhgoumevnou kai; kalou'nto" ejkei' th;n pra'xin e[rgon gegonevnai. kai; ga;r ou\n kai; levgetai Kavssio"eij" to;n ajndriavnta tou' Pomphi?ou pro; th'" ejgceirhvsew" ajpoblevpwn ejpikalei'sqai siwph'/, kaivper oujkajllovtrio" w]n tw'n jEpikouvrou lovgwn: ajllV oJ kairo;" wJ" e[oiken h[dh tou' deinou' parestw'to" ejnqousiasmo;nejnepoivei kai; pavqo" ajnti; tw'n protevrwn logismw'n.

    11. Pour de plus amples informations sur les forums impériaux

    , cf

    . Amici 1991 ; Bauer 1987.

  • 87

    Schedae

    ,

    2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    On sait que le lien est fort car au départ, c’est également vers Vénus

    Victrix

    que s’est

    tourné César, lorsqu’il avait fait vœu de construire un temple à Vénus dans la nuit du 8 au

    9 août 48 a.

    C

    . en cas de succès lors de la bataille de Pharsale, qui l’opposait justement à

    Pompée. Ce n’est que par la suite que le temple fut définitivement reconnu comme celui de

    Vénus

    Genitrix

    12

    . Dans les deux cas, les

    cella

    des temples sont dans la prolongation du petit

    côté de la

    porticus

    et, à chaque fois, il s’agit de temples à absides, ménageant un espace

    pour la statue cultuelle de la déesse

    13

    . Le temple est toujours parfaitement centré par rap-

    port à la place (ou à la porticus), ce qui accentue l’unité architecturale de l’ensemble.

    La disposition des statues honorant les constructeurs des deux édifices est elle aussi

    comparable : on trouve dans les deux cas une statue en l’honneur de César 14 ou de Pom-

    pée, placée dans l’axe central du temple. Une statue équestre de Jules César occupe ainsi

    le centre de la place du forum Iulium et la statue de Pompée, se trouve dans la curie. Les

    deux hommes tiennent une place centrale dans leurs complexes respectifs, et à chaque fois,

    ils sont placés dans l’alignement de la statue de Vénus, qui se trouve dans le temple associé.

    Il existe donc une dimension idéologique indiscutable dans le choix de disposition de la

    statuaire. Il se créait un dialogue entre l’imperator et sa déesse tutélaire, pour protéger le

    complexe et plus largement la Ville.

    La symbolique des dates d’inauguration des complexes est également importante

    dans les deux cas, et finalement très proche. Le temple de Vénus Genitrix a été dédié le

    26 septembre 46 a. C., c’est-à-dire exactement le même jour que le quatrième triomphe

    de Jules César. Or nous savons que Pompée avait lui aussi inauguré son théâtre à une date

    symbolique, le 29 septembre 55, date de son anniversaire et de son troisième triomphe (le

    29 septembre 61 a. C.) 15. Enfin, la reconstruction de la curie du forum républicain par César,

    suivant l’alignement de son nouveau forum, n’est pas sans rappeler l’incorporation d’une

    curie au portique de Pompée.

    Le forum d’Auguste mérite également une comparaison avec le complexe pompéien

    et le forum de César, les trois apparaissant relativement proches. Toute la question est de

    savoir si l’inspiration du forum d’Auguste vient de César ou si Auguste avait conscience

    que l’idée originale était celle de Pompée. La disposition est là encore sans équivoque : la

    Figure 2 : L’alignement des statues de Pompée et de Vénus Victrix.

    12. Cf. App., Civ. 3, 28, 107 ; 2, 68, 281 et Hanson 1959.13. Gros 1967, 503 à 566, dit que le temple de Vénus Genitrix fut le premier temple à Rome à être muni d’une

    abside, mais nous savons aujourd’hui que le tout premier fut celui de Vénus Victrix, accolé à la cauea duthéâtre de Pompée. La correction a déjà été proposée par Royo 1987, 47-49.

    14. Plin., Nat. 34, 18.15. Cic., Fam. 7, 1 ; Plin., Nat. 7, 158 ; Plut., Pomp. 52 ; D. C. 39, 38 et Cic., Pis. 27, 65.

  • 88

    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    présence d’une place tout en longueur, axée sur un temple qui en définit l’axe longitudinal

    et qui comprend une abside, correspond à la disposition du complexe pompéien du Champ

    de Mars. Pour couronner le tout, la place est ceinte de deux portiques sur ses longs côtés,

    ce qui rappelle la porticus post scaenam. La disposition de la statue d’Auguste (quadrige

    dédié à Auguste Pater Patriae 16) dans l’axe de celle de Mars Vltor, divinité tutélaire du

    forum, correspond à la volonté de Pompée d’être représenté face à Vénus Victrix. Nous

    insistons ici sur le fait que la cella du temple de Mars Vltor accueille non seulement la sta-

    tue de Mars, mais aussi probablement celle de Vénus, de César et de Cupidon 17. Vénus

    est donc toujours au centre du forum, comme dans les complexes césarien et pompéien.

    Dans le cas du forum d’Auguste, la symbolique idéologique est encore plus forte car, dans

    l’axe perpendiculaire à celui défini par l’alignement Mars Vltor/Auguste, deux autres sta-

    tues se font face : celle d’Enée et celle de Romulus, avec le lien de descendance que nous

    connaissons.

    Le forum de Nerva, inauguré en 97 p. C. 18, est le dernier des forums impériaux à suivre

    ce schéma. Nous laissons volontairement de côté le forum de Trajan, de même que le forum

    de la Paix, car leur structure est différente.

    L’organisation architecturale voulue par Pompée était donc particulièrement judicieuse :

    elle le plaçait en véritable imperator avant l’heure, précurseur du régime qui se mettra en

    place quelques années plus tard. Voyons maintenant comment toute cette fine orchestration

    a été renversée, détournée par l’idéologie Julio-Claudienne vers ses propres intérêts et com-

    ment cet état s’est maintenu jusque sous l’Antiquité tardive.

    2 – L’état du complexe au IVe siècle,suite aux travaux Julio-Claudiens

    2.1 – La « disparition fonctionnelle » de la curieAprès le meurtre de Jules César, Dion Cassius nous apprend que la curie a été murée

    car il s’agissait d’un lieu néfaste, dans lequel plus personne ne devait rentrer :

    On ferma sur le champ la salle où il avait été tué, et, dans la suite, on la convertit en latrines19.

    Avec cette fermeture du bâtiment, la curie perd toute fonctionnalité : elle reste debout

    comme symbole de l’histoire, mais c’est là sa simple fonction. Quand Dion Cassius parle

    d’une transformation en latrines, il semble extrapoler la réalité, puisqu’au IIIe siècle, épo-

    que où est gravée la Forma Vrbis, la curie semble bien toujours là, dessinée avec 21 m sur

    24 m, dimensions confirmées par l’archéologie. Deux latrines d’époques différentes sont

    bien attestées dans cette zone par l’archéologie, mais toutes deux décalées par rapport à

    la curie 20.

    16. Res Gestae, 35.17. Cf. Bauer 1987, 763-770.18. Cf. Aur. Vict., Caes. 12, 2.19. Dion Cassius, Historia romana, 47, 19, 1 (texte U. P. Boissevain, Cassii Dionis Cocceiani historiarum Roma-

    narum quae supersunt, 3 vol. Berlin : Weidmann, 1 : 1895 ; 2 : 1898 ; 3 : 1901, texte, trad. et comm. V. Boisséeet E. Gros, Paris, Librairie Firmin Didot frères, 1863) : tov te oi[khma ejn w|/ ejsfavgh, paracrh'mav te e[kleisankai; u{steron ej" a[fodon meteskeuvasan.

    20. Lugli 1970, 420.

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    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    2.2 – Le changement de place de la statue de Pompéeau-dessus de la ualva regia : une humiliation ?

    Nous savons par Suétone, que suite au meurtre de Jules César perpétré dans la curie

    de Pompée, la statue de ce dernier fut déplacée :

    Pompei quoque statuam contra theatri eius regiam marmoreo Iano superposuit translatam e

    curia, in qua C. Caesar fuerat occisus.

    Il fit aussi transporter la statue de Pompée hors de la curie où César avait été assassiné, et la

    plaça en face de la galerie contiguë à son théâtre*, au sommet d’un arc de marbre21.

    Nous pensons qu’il serait plus juste de traduire contra theatri eius regiam par « contre

    la porte royale de son théâtre ». Pompée serait ainsi placé dans une niche au-dessus de la

    porte principale de la scène, de la même manière que les archéologues ont placé une sta-

    tue d’Auguste au théâtre d’Orange. Nous pensons que ce changement de place sonne

    comme une ironie tragique de la part d’Auguste, qui ne s’est pas contenté d’abandonner

    la statue de Pompée quand la statue a été murée.

    Suite à une suggestion proposée par C. Jacquemard, professeur le latin à l’Université

    de Caen lors de la soutenance de notre thèse 22, nous pensons que le placement de cette

    statue pourrait être synonyme de l’anéantissement politique de Pompée et cela à double

    titre. La première « ironie tragique » d’Auguste serait de mettre Pompée sous l’égide d’une

    Vénus Victrix, en position d’infériorité statique (la niche sur la ualua regia est bien plus basse

    que le temple avec la statue de Vénus, situé à 25 m au-dessus du niveau de l’orchestra alors

    que dans un premier temps, Pompée était surélevé dans la curie, dominant de 4 m le reste

    du portique 23). En plus la différence de hauteur entre la statue de Pompée autrefois placée

    dans la curie et celle de Vénus Victrix était gommée par le mur de scène qui empêchait une

    vue simultanée des deux. Maintenant, avec le déplacement de l’effigie de Pompée, cette

    différence est très visible. On notera que sur les forums impériaux, la statue de l’empereur

    et celle de la divinité tutélaire sont sensiblement à la même hauteur, le podium du temple

    correspondant au socle de la statue équestre. La deuxième ironie est que la veille de la bataille

    de Pharsale, Pompée rêve qu’il est dans son théâtre et que la foule l’acclame tandis qu’il rend

    hommage à Vénus Victrix :

    Pendant la nuit, Pompée se vit en songe entrant dans son théâtre aux applaudissements de la

    foule, et ornant lui-même de nombreuses dépouilles le temple de Vénus Victrix. Cette vision,

    d’un côté, était encourageante, mais, de l’autre, assez inquiétante, car il craignait d’apporter

    lui-même la gloire et l’éclat de la victoire à César, dont la race remontait à Vénus 24.

    Pompée se rend compte à cet instant qu’il prend des risques en se plaçant sous la pro-

    tection de la déesse tutélaire de son ennemi 25. Il décide donc au matin de la bataille de

    changer de protecteur et de combattre sous le patronage d’Hercule inuictus, qui le mènera

    à sa perte. Auguste humilie définitivement Pompée en plaçant sa statue sur la scène qu’il

    21. Suétone, Vitae Caesarum, Diuus Augustus, 31, 9 (texte M. Ihm, Leipzig, Teubner, 1908, texte, trad. etcomm. H. Ailloud, Paris, Les Belles Lettres, 1961 (1931)).

    22. « Le complexe pompéien du Champ de Mars, Une ville dans la Ville. Restitution virtuelle d’un théâtre àarcades et à portique au IVe siècle p. C. », thèse soutenue le 31 mai 2006.

    23. Gianfrotta 1968-1969, 25-125.24. Plutarque, Pompeius, 68 (texte B. Perrin, Plutarch’s lives, vol. 5. Cambridge (Mass.), Harvard University

    Press, 1917 (repr. 1968) : 116-324, texte, trad. et comm. R. Flacelière et E. Chambry, Paris, Les Belles Lettres,1973). Cf. aussi Appien B. C. 2, 68-69.

    25. Mudry 1991, 77 à 88.

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    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    venait justement de reconstruire26 (humiliation importante car il est le descendant de son

    ennemi). Finalement, c’est cette dernière ironie tragique qu’avait certainement pressenti

    Pompée dans son rêve la veille de la bataille de Pharsale et, triste destinée du héros tragique,

    c’est en tentant d’échapper à son sort dont il a connaissance par une prémonition mysti-

    que qu’il se jette dans les bras du destin. Pompée avait choisi la dramaturgie des héros grecs

    quand il a inauguré son théâtre, en y faisant jouer Le cheval de Troie et Clytemnestre 27.

    Auguste illustre par ce changement de place de la statue de Pompée que ce dernier a

    rejoint la « famille » des héros tragiques. Sa curie est murée et, de l’illustre triumuir, il ne reste

    plus qu’un personnage humilié par son destin tragique.

    2.3 – Un nouveau plan au sol du portique,symbole d’une nouvelle dimension idéologique

    Dès Auguste, le complexe de Pompée a perdu une partie de la valeur idéologie de sa

    construction avec d’une part le murage de la curie et d’autre part le déplacement de la statue

    de Pompée sur la ualua regia. Et pourtant, ce n’est que le début : le portique va prendre

    un tout autre visage sous le règne de Claude, anéantissant encore un peu plus l’idéologie

    pompéienne. Rappelons qu’à l’époque de Pompée, rien n’indique la présence d’un arc dans

    le portique. Par contre, deux sources nous indiquent que par la suite, un arc de triomphe a

    été implanté dans le portique de Pompée. La première est littéraire : Suétone nous apprend

    que Claude dédia à cet endroit un arc honorifique en l’honneur de Tibère.

    Tiberio marmoreum arcum iuxta Pompei theatrum, decretum quidem olim a senatu uerum

    omissum, peregit28.

    En l’honneur de Tibère, il [Claude] fit dresser près du théâtre de Pompée l’arc de marbre que

    lui avait autrefois voté le sénat mais que l’on avait négligé de construire.

    Cet arc est resté debout jusqu’au Moyen Age puiqu’en 1303-1374, Francesco Petrarca

    dans le Familiarium rerum liber, parle de « l’arc de Pompée » :

    Voici l’arc de Pompée, voici son portique, voici le Cimbre de Marius29.

    Ensuite, le cadre chronologique étant posé, une deuxième source permet de situer avec

    précision cet arc dans le portique : la Forma Vrbis Romae. Sur ce plan, la technique de repré-

    sentation des arcs et souvent la même : des rectangles représentent les piliers de l’arc et des

    arcs de cercle opposés figurent l’arche. C’est la technique utilisée pour l’arc de Tibère qui

    nous intéresse (figure 3) 30.

    26. Auguste, Res Gestae diui Augusti (monumentum Ancyranum) 20, (texte trad. et comm. J. Gagé, Paris, LesBelles Lettres, 1935).

    27. Cic., Epist. 7, 1 : « Quel plaisir trouver dans Clytemnestre à un défilé de quelques six cents mulets, ou, dansle Cheval de Troie, à voir trois mille cratères, ou dans certains combats, tout l’équipement divers del’infanterie et de la cavalerie ? ». Le texte précise un peu plus haut qu’on parle des jeux données par Pom-pée pour l’inauguration de son théâtre. Il n’y a aucun doute sur le contexte de ces représentations.

    28. Suet., Claud. 11, 3, (Texte M. Ihm, Leipzig, Teubner, 1908, trad. et comm. H. Ailloud, Paris, Les Belles Lettres,1961).

    29. Cité par Valentini 1953. Le cimbre de Marius est un château d’eau où se réunissent l’aqua Marcia, l’aquaGiulia et l’aqua Claudia et qui se situe entre la porte majeure et la porte San Lorenzo, près de l’égliseSant’Eusebio. Au Moyen-âge il était appelé Castello dell’aqua Marcia ou trofei di Mario car les deuxpanoplies qui ornaient les niches extérieures rappelaient les triomphes de Marius. Il fut même pendant untemps appelé ad Cimbrum. On a appelé ce monument le Cimbre de Marius car une des panoplies pou-vait ressembler à celle d’un Cimbre, que Marius avait défait en sauvant ainsi sa patrie. Cf. Marliani 1588 ;Rodocanachi 1914 ; Picard 1957 ; Richard 1965.

    30. Cf. Reynolds 1999.

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    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    Rappelons que sous Claude, c’est à dire au moment de l’érection de cet arc, la statue de

    Pompée avait déjà quitté le portique pour rejoindre le mur de scène du théâtre de Pompée.

    Du coup, c’est Tibère qui devient le nouveau garant du portique qui est désormais utilisé

    pour la propagande julio-claudienne. Il semble que les architectes de Claude ne se soient

    pas arrêtés en si bon chemin et les sources anciennes nous le confirment. Pour la première

    fois dans l’ensemble de la littérature latine, Martial parle d’un double bois de platanes, tels

    que nous le voyons sur la Forma Vrbis 31 :

    Inde petit centum pendentia tecta columnis, illinc Pompei dona nemusque duplex32.

    De là, il se dirige vers le toit que supportent cent colonnes et ensuite vers le monument dû à

    la générosité de Pompée, avec ses deux bouquets d’arbres.

    Cette transformation est essentielle car elle a une double conséquence : désormais une

    allée centrale se dessine et elle met considérablement en valeur l’arc de Tibère par rapport

    auquel elle est parfaitement centrée. Le regard est inexorablement attiré par l’arc de Tibère,

    qui donne accès à la ualua regia. Ce sont les constructions Julio-Claudiennes qui sont désor-

    mais mises en valeur : l’arc et le mur de scène restauré par Auguste 33. La deuxième consé-

    quence est que la curie de Pompée, déjà murée, apparaît cette fois complètement décentrée :

    ce n’est plus elle qui est le fleuron du portique et elle se trouve reléguée au rang de simple

    exèdre sans intérêt.

    Pour que la lecture idéologique soit parfaite et que l’ensemble du portique soit tourné

    vers la nouvelle dynastie au pouvoir, les architectes devaient régler un dernier problème : les

    semitae avec les deux fontaines du Triton et du Maron atténuant l’asymétrie du portique

    devaient gêner. La solution trouvée est remarquable : les deux fontaines ont été détruites

    (elles ne figurent pas sur la Forma Vrbis Romae et aucun témoignage littéraire ne les men-

    tionne après Properce) pour être remplacées par quatre rangées de fontaines venant ceindre

    le double bois de platanes. Ces fontaines sont symbolisées par des carrés de 2 m sur 2 m

    sur la Forma Vrbis avec un point au milieu qui représente certainement la statue décoratrice

    (même principe que le Maron et le Triton d’époque républicaine) 34. Ces fontaines sont

    Figure 3 : L’arc de Tibère sur la Forma Vrbis Romae.

    31. Cf. supra et figure 1.32. Mart. 2, 14 (texte D. R. Shackleton, Leipzig, Teubner, 1990, trad. et comm H. I. Izaac, Paris, Les Belles Lettres,

    1961 (1930)).33. Auguste, Mon. Anc. 20.34. Cf. Figure 1.

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    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    également attestées par l’archéologie, puisque du ciment hydraulique a été repéré dans le

    portique à espacements réguliers 35. Entre la République et l’Empire, les avantages des ins-

    tallations hydrauliques ont ainsi perduré. Pour alimenter ces fontaines, il était nécessaire

    d’avoir de l’eau sous pression et donc que l’Aqua Virgo arrive au Champ de Mars. Cet

    aménagement a été disponible en 19 a. C. Au vue de la datation de l’arc, il nous semble

    raisonnable de penser que la destruction des semitae, remplacées par les fontaines, la

    construction de l’arc et le percement du bois sont contemporains et datent tous sensible-

    ment de l’époque Claudienne.

    Ensuite, divers éléments nous poussent à penser que l’état du portique que nous venons

    de dresser n’a pas changé jusqu’au IVe siècle et à plus long terme jusqu’à la destruction du

    complexe. Le premier est la Forma Vrbis, qui marque l’état du IIIe siècle. Nous sommes au

    moins sûre que jusqu’à cette époque, rien n’a bougé. Ensuite, l’arc est attesté comme étant

    debout jusqu’à une date tardive36 : il n’a pas été remplacé. Nous avons dépouillé l’ensemble

    des textes de la littérature latine, de la littérature grecque, étudié les témoignages écrits et

    iconographiques du Moyen Age à la Renaissance : si des restauration sont attestées après le

    IVe siècle, aucun changement architectural n’est repérable. Nous avons tout de même trouvé

    une planche de 1848 qui fait apparaître une porticus Iovia et Herculea, ce qui correspondrait

    à l’état du complexe après l’incendie de Carin 37 : à cette époque on aurait selon l’Histoire

    Auguste reconstruit deux portiques indépendants, compris dans l’espace du portique de Pom-

    pée. Le premier s’appellerait Porticus Iouia et il serait dédié à l’empereur Dioclétien, l’autre

    appelé Porticus Herculea serait dédié à Maximien 38. Nous précisons que Iouius était le sur-

    nom de Dioclétien et Herculeus celui de Maximien. Cet état est daté chronologiquement entre

    284 et 305 p. C. C’est celui qu’a choisi de représenter I. Gismondi sur son plan relief de la

    Rome du IVe siècle. Nous allons expliquer pourquoi, à notre avis, cette interprétation est dou-

    teuse et pourquoi sur notre reconstitution du IVe siècle, nous avons maintenu un portique avec

    des fontaines et des platanes. Deux textes sont utilisés pour légitimer l’idée d’un double por-

    tique couvert, dédié à Jupiter et Hercule, et qui, selon toute probabilité, prendrait la place

    du nemus duplex. Le premier est un passage de la vie de Carin, dans l’Histoire Auguste :

    On offrit à la curiosité du public un acrobate…, en outre, une machine de théâtre dont les flammes

    consumèrent la scène, que Dioclétien, par la suite, fit reconstruire avec plus de magnificence

    encore qu’auparavant39.

    Pour prouver que l’on parle bien du théâtre de Pompée, il faut ensuite confronter ce

    texte avec les chroniques de 354 p. C :

    Diocletianus et Maximianus imper. Ann. XXI m. XI dies XII Cong. Dederunt * DL. His imper. Multae

    operae publicae fabricatae sunt : senatum, forum Caesaris, basilica Iulia, Scaena Pompéi, porticos

    II, nymfea III, templa III, Iseum et serapeum, arcum nouum, thermae Diocletianas…40

    Or dans ces deux cas, on nous parle bien d’un incendie de la scène du théâtre de Pom-

    pée, mais c’est tout. Les II porticos qui sont mentionnés dans les chroniques de 354 ne sem-

    blent pas dépendre du théâtre de Pompée. Il peut s’agir de n’importe quels portiques de

    35. Gianfrotta 1968-1969, 25-125.36. Cf. supra le texte de Francesco Petrarca.37. Cf. Hist. Aug., Carin. 19.38. Cf. C.I.L. 6, 255 et 256.39. Hist. Aug., Car. 19.40. Chron. A. 354, 148.

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    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    la Ville. Deux inscriptions du C.I.L. (C.I.L. 6, 255 et 6, 256) font bien allusion à ces deux por-

    tiques, mais aucune ne les localise à côté du théâtre de Pompée :

    GENIO IOVII AVG

    IOVIA PORTICV EIVS A FVNDAMENTIS

    ABSOLVTA EXCVLTAQVE

    AELIVS DIONYSIVS V C OPERI FACIVNDO

    GENIO HERCVLEI AVG

    HERCVLEA PORTICV EIVS

    A FVNDAMENTIS ABSOLVTA

    EXCVLTAQVE

    AELIVS DIONYSIVS V C OPERI FACIVNDO

    Nous pensons donc que c’est un rapprochement abusif fait entre ces deux inscriptions

    et la juxtaposition des termes Scaena Pompei, porticos II dans les textes des chronographes

    de 354 qui a conduit à cette méprise. Pour conforter notre raisonnement, aucune trace archéo-

    logique de quelque portique couvert n’a été retrouvée lors des fouilles dans le portique de

    Pompée. En revanche les traces de ciment hydraulique, régulièrement espacées, confirment

    l’existence des fontaines et des analyses de terre effectuées sous le teatro Argentina mon-

    trent qu’il y avait de la verdure à l’époque antique (certainement les platanes dont parlent

    les sources) 41.

    Ces sources tendent à montrer que le double bois de platanes est resté en place

    jusqu’à une époque très avancée, dépassant largement le cadre de l’Antiquité tardive.

    L’étude du devenir du complexe pompéien de construction tardo-républicaine à l’époque

    tardive est donc particulièrement intéressante. L’idéologie de départ est complètement ré-

    exploitée par les Julio-Claudiens, qui n’hésitent pas en modifiant le complexe relativement

    succinctement (perçage du bois pour le couper en deux parties égales, aménagement d’un

    arc et remplacement de canaux d’eau à l’air libre par des fontaines) à bouleverser une lec-

    ture idéologique qui avait été bien pensée. On note que les changements architecturaux

    importants ont été réalisés au tout début de l’empire. Ensuite, comme en témoigne la Forma

    Vrbis et les sources littéraires, on ne constate plus de changement important. Ce désinté-

    ressement nous semble venir de la date de construction du complexe et du côté novateur

    de son architecture qui avait fait des envieux au début de l’empire : premier théâtre à cauea

    creuse (premiers emplois de l’opus caementicium et des voûtes) et premier jardin public de

    l’histoire de Rome. À l’époque Julio Claudienne, il n’y avait pas d’équivalent : les deux théâ-

    tres qui suivront seront plus petits et ne seront pas des complexes (pas de temple, pas de

    curie). Faute de pouvoir faire mieux ou même aussi bien que Pompée et pour ne pas laisser

    dans le tissu urbain une marque de puissance d’un homme opposé à la dynastie au pouvoir,

    les Julio-Claudiens se sont réapproprié les lieux. Ensuite, les années passant, le complexe

    de Pompée a pris de l’âge, son architecture a vieilli et les techniques employées ne rivali-

    saient plus avec les nouvelles constructions. Qu’est ce qu’un Trajan, qui avait rasé une col-

    line de Rome pour construire son forum (là aussi un véritable complexe) avec temple, place,

    bibliothèques, marché… pouvait envier au complexe de Pompée ? Absolument rien. C’est

    certainement pour cette raison que passée une certaine époque, il n’y a plus de détournement

    41. Pour l’absence de trace archéologique des portiques de Iovia et Herculea à l’emplacement du théâtre dePompée, cf. Gros 1997, 148 et 149. Pour les fouilles attestant la présence de ciment hydraulique, cf. Gian-frotta 1968-1969, 25-125.

  • 94

    Schedae, 2007, prépublication n°6, (fascicule n°1, p. 81-96).

    idéologique du complexe pompéien. Le bâtiment reste une des spécificités architecturale

    de la Ville, les Romains en restent fiers42 mais se contentent de le restaurer, sans vouloir par-

    ticulièrement se le réapproprier43. La réappropriation idéologique des bâtiments existe

    cependant encore sous l’Antiquité tardive. En témoignent les modifications architecturales

    effectuées sur la basilique de Constantin au IVe siècle suite à la victoire de Constantin sur

    Maxence après la bataille du pont Mulvius. La basilique est innovante dans sa structure,

    puisqu’elle repose uniquement sur des voûtes en béton, à la différence des anciennes basi-

    liques du forum construites sur des colonnes, architraves et charpentes classiques. Du coup,

    Constantin se l’approprie en bouchant l’entrée de Maxence (côté temple de Vénus et Rome),

    en perçant sa nouvelle entrée côté via sacra et en déboulonnant vraisemblablement la tête

    de la statue colossale (12 m de haut) de son ennemi pour y installer la sienne.

    42. C’est au théâtre de Pompée que sera emmené Constance II lors de sa visite à Rome en 357 p. C., cf. Amm.16, 10, 16.

    43. Restauration de la scène attestée jusqu’en 507-511 p. C. sous Théodoric (Cassiodore 39, 38) et dernièrerestauration de la cauea entre 395 et 425 p. C. (C.I.L. 6, 1191).

    Figure 4 : Le Portique du IVe siècle centré sur l’arc et le décentrage de la curie (au fond).

    Figure 5 : L’ambulatio centrale menant à l’arc de Tibère et au nouveau mur de scène au IVe siècle.

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