1
J Chir 2004,141, N°6 • © Masson, Paris, 2004 395 Revue de presse 2) Il est dommage que l’échoendoscopie n’ait pas été réalisée systématiquement avant et après RCT dans cette étude. Il est important également d’évaluer les résultats de la fonction ano- sphinctérienne et la continence dans les deux groupes. 3) Cette étude très importante brise un tabou en chirurgie co- lorectale carcinologique. Il est urgent de mettre en route une étude randomisé comparant, après réponse complète post- RCT, l’abstention-surveillance à la chirurgie d’exérèse de l’adénocarcinome du bas rectum. Mots-clés : Rectum. Traitement. Cancer. Radiochimiothérapie. Le contrôle radiologique systématique de l’anastomose oeso-jéjunale après gastrectomie totale est-il justifié ? P.J. Lamb, S.M. Griffin, M.V. Chandrashekar, D.L. Ri- chardson, D. Karat, N. Hayes Prospective study of routine contrast radiology after total gastrectomy. Br J Surg 2004;91:1015-1019 Les auteurs ont évalué l’intérêt d ‘une opacification systémati- que de l’anastomose oeso-jéjunale avant la réalimentation et après gastrectomie totale (GT). Ils ont inclus prospectivement, 76 malades ayant eu une GT. Une sonde d’alimentation jéjunale était poussée en trans-anas- tomotique, et en cas de dissection médiastinale, une jéjunosto- mie d’alimentation était réalisée. Les malades pouvaient boire 25 ml/h dès J1 et l’alimentation jéjunale était débutée dès J2. Deux contrôles radiologiques de l’anastomose, à l’aide d’un produit hydrosoluble puis de baryte en cas d’examen normal, ont été réalisées systématiquement à J5 et J9 Les résultats de J5 n’étaient pas communiqués aux chirurgiens. L’alimentation orale étant reprise à J9 si le patient allait bien. En cas de signes cliniques de fistule (fièvre, douleurs abdominales, signes de sepsis ou écoulement digestif par le drain), une opacification de l’anastomose et/ou une endoscopie, en cas de négativité ou de non-faisabilité de l’opacification, étaient réalisées en urgen- ce. Parmi les 76 malades, 4 malades n’ont pas eu d’opacification de contrôle à ces dates (3 décès précoces avant J5, une ventila- tion prolongée). Parmi les 72 restants, 7 malades ont eu, avant J5, une suspicion clinique de fistule anastomotique. Les signes sont apparus à J3 (n = 1), J4 (n = 4) et J5 (n = 2). Cinq malades ont eu une opacification, et 2 ont eu une endoscopie d’emblée car ils étaient ventilés. Les opacifications ont confirmé dans 3 cas sur 5 une fistule. Une endoscopie a été du être réalisée chez les 2 autres, et a confirmé la fistule. Deux malades ont été réo- pérés et sont décédés, et 5 ont été traités médicalement et 2 sont décédés. Les 65 malades restants ont eu les 2 opacifications systémati- ques à J5 et J9. A J5, 2 images de fistules ont été identifiées, mais n’ont pas été confirmées à J9. A J9, 3 images de fistules « limitées » ont été identifiées, toutes après une imagerie nor- male à J5. Ces malades, asymptomatiques, n’ont pas été traités différemment des autres. La mortalité hospitalière a été de 9 % (soit 7 malades : 4 après une fistule clinique et 3 sans fistule). Les malades chez lesquels une fistule « limitée » avait été identifiée sur l’opacification de J9 et qui étaient asymptomatiques, ont tous eu des suites sim- ples et une durée d’hospitalisation non modifiée. Les auteurs concluent que la radiographie de contrôle systé- matique n’a pas d’intérêt. En effet, dans leur série : 1. elle n’a eu aucun rôle diagnostique chez les malades qui avaient des symptômes cliniques de fistule, et elle a même igno- ré une fistule chez 2 malades, que l’endoscopie a confirmé ; 2. elle a découvert cinq fistules « limitées » asymptomatiques, dont la prise en charge clinique n’a pas été modifiée ; 3. l’indication de l’opacification de contrôle doit être limitée aux malades suspects de fistule. En cas de résultats négatifs ou de malades intubés, ils recom- mandent une fibroscopie. Commentaires 1) La réalisation d’une opacification de contrôle après GT est une pratique usuelle des chirurgiens alors que son utilité n’a pas été démontrée [1]. Cette étude suggère qu’elle est inutile, ne révélant pas toutes les fistules cliniquement évidentes (3/5), et révélant des fistules asymptomatiques (3/65) qui peuvent être négligées. 2) Cependant les auteurs n’ont jamais réalimenté leurs mala- des avant le 9 e jour postopératoire. Ceci pourrait expliquer pourquoi les fistules uniquement radiologiques sont restées asymptomatiques. Leurs conclusions ne peuvent donc être pri- ses en compte qu’à condition d’avoir cette même conduite pos- topératoire, et de pouvoir, comme eux, assurer une alimenta- tion entérale précoce (J2) par une sonde jéjunale ou une jéjunostomie chez tous les malades. 3) Sur le plan pratique, cette étude permet de remettre en cau- se le dogme de l’opacification systématique des anastomoses oeso-jéjunales. Il est logique d’opacifier les malades ayant une suspicion clinique de fistule. Dans les autres cas, on peut re- commander de ne reprendre l’alimentation orale qu’à J9, à condition d’avoir institué une alimentation entérale précoce. Il est intéressant de noter qu’en Angleterre, ou les chirurgiens font leurs endoscopies, ils n’hésitent pas à faire une endoscopie à J7 pour vérifier une anastomose… Mots-clés : Estomac. Diagnostic. Fistule. Anastomose oeso-jéjunale. 1. Br J Surg 2001;88:1157-1168. Le risque de récidive après cure de hernie inguinale est lié au type d’anesthésie réalisée ! P. Nordin, S. Haapaniemi, W. van Der linden, E. Nilsson Choice of anesthesia and risk of reoperation for re- currence in groin hernia repair. Ann Surg 2004;240:187-192 Le registre des hernies en Suède regroupe 80 % des unités de chirurgie où sont réalisées des cures de hernies de l’aine. Les chirurgiens y ont colligé de façon prospective, après chaque cu- re de hernie, des données concernant les caractéristiques des malades, le type de hernie, la méthode de réparation, le type de suture employée, l’anesthésie, les complications postopéra- toires, et les réinterventions pour récidive. Les malades ont pu être suivis efficacement grâce à l’utilisation de leur numéro d’identification. En 10 ans, 59823 cures de hernies ont été colligées dans ce re- gistre. Elles ont été réalisées sous anesthésie générale (AG) chez 30192 malades (50,5 %), sous anesthésie locorégionale (ALR) chez 22 901 malades (38,3 %), et sous anesthésie locale (AL) chez 6 730 malades (11,2 %). L’évolution du pourcentage de cure de hernies réalisées sous AL avec le temps montre une augmentation croissante avec un pic à 19 % depuis le début des années 2000. Parallèlement le taux d’ALR a diminué de 75 à

Le contrôle radiologique systématiquede l’anastomose oeso-jéjunale après gastrectomie totale est-il justifié ?: P.J. Lamb, S.M. Griffin, M.V. Chandrashekar, D.L. Richardson,D

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Le contrôle radiologique systématiquede l’anastomose oeso-jéjunale après gastrectomie totale est-il justifié ?: P.J. Lamb, S.M. Griffin, M.V. Chandrashekar, D.L. Richardson,D

J Chir 2004,141, N°6 • © Masson, Paris, 2004

395

Revue de presse

2) Il est dommage que l’échoendoscopie n’ait pas été réaliséesystématiquement avant et après RCT dans cette étude. Il estimportant également d’évaluer les résultats de la fonction ano-sphinctérienne et la continence dans les deux groupes.3) Cette étude très importante brise un tabou en chirurgie co-lorectale carcinologique. Il est urgent de mettre en route une

étude randomisé comparant, après réponse complète post-RCT, l’abstention-surveillance à la chirurgie d’exérèse del’adénocarcinome du bas rectum.

Mots-clés :

Rectum. Traitement. Cancer. Radiochimiothérapie.

Le contrôle radiologique systématique de l’anastomose oeso-jéjunale après gastrectomie totale est-il justifié ?

P.J. Lamb, S.M. Griffin, M.V. Chandrashekar, D.L. Ri-chardson, D. Karat, N. Hayes

Prospective study of routine contrast radiology aftertotal gastrectomy.

Br J Surg 2004;91:1015-1019

Les auteurs ont évalué l’intérêt d ‘une opacification systémati-que de l’anastomose oeso-jéjunale avant la réalimentation etaprès gastrectomie totale (GT).Ils ont inclus prospectivement, 76 malades ayant eu une GT.Une sonde d’alimentation jéjunale était poussée en trans-anas-tomotique, et en cas de dissection médiastinale, une jéjunosto-mie d’alimentation était réalisée. Les malades pouvaient boire25 ml/h dès J1 et l’alimentation jéjunale était débutée dès J2.Deux contrôles radiologiques de l’anastomose, à l’aide d’unproduit hydrosoluble puis de baryte en cas d’examen normal,ont été réalisées systématiquement à J5 et J9 Les résultats deJ5 n’étaient pas communiqués aux chirurgiens. L’alimentationorale étant reprise à J9 si le patient allait bien. En cas de signescliniques de fistule (fièvre, douleurs abdominales, signes desepsis ou écoulement digestif par le drain), une opacificationde l’anastomose et/ou une endoscopie, en cas de négativité oude non-faisabilité de l’opacification, étaient réalisées en urgen-ce.Parmi les 76 malades, 4 malades n’ont pas eu d’opacificationde contrôle à ces dates (3 décès précoces avant J5, une ventila-tion prolongée). Parmi les 72 restants, 7 malades ont eu, avantJ5, une suspicion clinique de fistule anastomotique. Les signessont apparus à J3 (n = 1), J4 (n = 4) et J5 (n = 2). Cinq maladesont eu une opacification, et 2 ont eu une endoscopie d’embléecar ils étaient ventilés. Les opacifications ont confirmé dans 3cas sur 5 une fistule. Une endoscopie a été du être réalisée chezles 2 autres, et a confirmé la fistule. Deux malades ont été réo-pérés et sont décédés, et 5 ont été traités médicalement et 2sont décédés.Les 65 malades restants ont eu les 2 opacifications systémati-ques à J5 et J9. A J5, 2 images de fistules ont été identifiées,mais n’ont pas été confirmées à J9. A J9, 3 images de fistules« limitées » ont été identifiées, toutes après une imagerie nor-male à J5. Ces malades, asymptomatiques, n’ont pas été traitésdifféremment des autres.

La mortalité hospitalière a été de 9 % (soit 7 malades : 4 aprèsune fistule clinique et 3 sans fistule). Les malades chez lesquelsune fistule « limitée » avait été identifiée sur l’opacification deJ9 et qui étaient asymptomatiques, ont tous eu des suites sim-ples et une durée d’hospitalisation non modifiée.Les auteurs concluent que la radiographie de contrôle systé-matique n’a pas d’intérêt. En effet, dans leur série : 1. elle n’a eu aucun rôle diagnostique chez les malades quiavaient des symptômes cliniques de fistule, et elle a même igno-ré une fistule chez 2 malades, que l’endoscopie a confirmé ;2. elle a découvert cinq fistules « limitées » asymptomatiques,dont la prise en charge clinique n’a pas été modifiée ;3. l’indication de l’opacification de contrôle doit être limitéeaux malades suspects de fistule. En cas de résultats négatifs ou de malades intubés, ils recom-mandent une fibroscopie.

Commentaires

1) La réalisation d’une opacification de contrôle après GT estune pratique usuelle des chirurgiens alors que son utilité n’apas été démontrée [1]. Cette étude suggère qu’elle est inutile,ne révélant pas toutes les fistules cliniquement évidentes (3/5),et révélant des fistules asymptomatiques (3/65) qui peuventêtre négligées.2) Cependant les auteurs n’ont jamais réalimenté leurs mala-des avant le 9

e

jour postopératoire. Ceci pourrait expliquerpourquoi les fistules uniquement radiologiques sont restéesasymptomatiques. Leurs conclusions ne peuvent donc être pri-ses en compte qu’à condition d’avoir cette même conduite pos-topératoire, et de pouvoir, comme eux, assurer une alimenta-tion entérale précoce (J2) par une sonde jéjunale ou unejéjunostomie chez tous les malades.3) Sur le plan pratique, cette étude permet de remettre en cau-se le dogme de l’opacification systématique des anastomosesoeso-jéjunales. Il est logique d’opacifier les malades ayant unesuspicion clinique de fistule. Dans les autres cas, on peut re-commander de ne reprendre l’alimentation orale qu’à J9, àcondition d’avoir institué une alimentation entérale précoce. Ilest intéressant de noter qu’en Angleterre, ou les chirurgiensfont leurs endoscopies, ils n’hésitent pas à faire une endoscopieà J7 pour vérifier une anastomose…

Mots-clés :

Estomac. Diagnostic. Fistule. Anastomose oeso-jéjunale.

1. Br J Surg 2001;88:1157-1168.

Le risque de récidive après cure de hernie inguinale est lié au type d’anesthésie réalisée !

P. Nordin, S. Haapaniemi, W. van Der linden, E. Nilsson

Choice of anesthesia and risk of reoperation for re-currence in groin hernia repair.

Ann Surg 2004;240:187-192

Le registre des hernies en Suède regroupe 80 % des unités dechirurgie où sont réalisées des cures de hernies de l’aine. Leschirurgiens y ont colligé de façon prospective, après chaque cu-

re de hernie, des données concernant les caractéristiques desmalades, le type de hernie, la méthode de réparation, le typede suture employée, l’anesthésie, les complications postopéra-toires, et les réinterventions pour récidive. Les malades ont puêtre suivis efficacement grâce à l’utilisation de leur numérod’identification.En 10 ans, 59823 cures de hernies ont été colligées dans ce re-gistre. Elles ont été réalisées sous anesthésie générale (AG)chez 30192 malades (50,5 %), sous anesthésie locorégionale(ALR) chez 22 901 malades (38,3 %), et sous anesthésie locale(AL) chez 6 730 malades (11,2 %). L’évolution du pourcentagede cure de hernies réalisées sous AL avec le temps montre uneaugmentation croissante avec un pic à 19 % depuis le début desannées 2000. Parallèlement le taux d’ALR a diminué de 75 à