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H. SIMON * IPAG PREPAS CONCOURS 2011/2012 Page 1 LE FOND DOCUMENTAIRE Ce petit document dit « fond documentaire » est organisé en deux parties. La première est consacrée aux moyens méthodologiques à mettre en œuvre pour vous permettre de confectionner votre fond documentaire personnel. La seconde présente un exemple de fiche dont l’objet est de présenter de façon synthétique un thème qui fait nécessairement partie de tout fond documentaire digne de ce nom. Méthode de confection et d’exploitation du fond documentaire La confection de votre fond documentaire, véritable boîte à outils de l’épreuve de culture générale, s’échelonnera sur plusieurs mois. C’est un travail au long cours qui suppose de votre part, au préalable, d’avoir compris quels en sont les impératifs fondamentaux (I). Sa confection (III) débutera par la collecte des informations qui en feront la substance (II), lesquelles seront exploitées de façon systématique en préparation du jour de l’épreuve (IV). I. Les impératifs fondamentaux Trois impératifs vont s’imposer à vous dans les prochains mois de préparation. Le premier est relatif à la gestion du temps. Une des clefs de votre succès, tant pour la préparation que pour l’épreuve-même le jour J, réside dans une gestion maîtrisée du temps (A). Le deuxième impératif est la gestion de votre espace. Souvent négligé, il est malheureusement facteur de perte de temps (B). Enfin troisième impératif, probablement le plus important : la production d’un travail de qualité; qui ne se mesure pas au temps passé sur votre préparation, mais au caractère exploitable de votre fond documentaire (C). A. La gestion du temps Avant de vous lancer dans la préparation, prenez le temps de réfléchir à la gestion de votre emploi du temps. La culture générale n’est pas la seule épreuve de votre concours, vous serez tenu de vous consacrer aux autres matières. Alors posez-vous la question suivante : « Combien de temps puis-je affecter à la préparation de la culture générale ? ». De la réponse à cette question dépend l’organisation de votre travail. Tout d’abord, une première remarque s’impose : ne perdez pas de temps. Commencez votre préparation le plus tôt possible. Rappelez-vous La Fontaine : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point ». Vous entrez dans une période pendant laquelle vous êtes un coureur de fond. Il faut trouver très rapidement un rythme de travail comme le coureur va chercher à rythmer sa foulée. Ce rythme doit être tenu pendant toute la durée de la préparation. Prévoyez des temps de respiration pendant lesquels votre travail sera moins soutenu. Cette course de fond se finira par un sprint qui vous mobilisera le dernier mois avant le concours. Le rythme

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LE FOND DOCUMENTAIRE

Ce petit document dit « fond documentaire » est organisé en deux parties.

La première est consacrée aux moyens méthodologiques à mettre en œuvre pour vous

permettre de confectionner votre fond documentaire personnel.

La seconde présente un exemple de fiche dont l’objet est de présenter de façon synthétique un

thème qui fait nécessairement partie de tout fond documentaire digne de ce nom.

Méthode de confection et d’exploitation du fond documentaire

La confection de votre fond documentaire, véritable boîte à outils de l’épreuve de culture

générale, s’échelonnera sur plusieurs mois. C’est un travail au long cours qui suppose de votre part,

au préalable, d’avoir compris quels en sont les impératifs fondamentaux (I). Sa confection (III)

débutera par la collecte des informations qui en feront la substance (II), lesquelles seront exploitées

de façon systématique en préparation du jour de l’épreuve (IV).

I. Les impératifs fondamentaux

Trois impératifs vont s’imposer à vous dans les prochains mois de préparation. Le premier est

relatif à la gestion du temps. Une des clefs de votre succès, tant pour la préparation que pour

l’épreuve-même le jour J, réside dans une gestion maîtrisée du temps (A). Le deuxième impératif

est la gestion de votre espace. Souvent négligé, il est malheureusement facteur de perte de temps

(B). Enfin troisième impératif, probablement le plus important : la production d’un travail de

qualité; qui ne se mesure pas au temps passé sur votre préparation, mais au caractère exploitable de

votre fond documentaire (C).

A. La gestion du temps

Avant de vous lancer dans la préparation, prenez le temps de réfléchir à la gestion de

votre emploi du temps. La culture générale n’est pas la seule épreuve de votre concours, vous

serez tenu de vous consacrer aux autres matières. Alors posez-vous la question suivante :

« Combien de temps puis-je affecter à la préparation de la culture générale ? ». De la réponse

à cette question dépend l’organisation de votre travail.

Tout d’abord, une première remarque s’impose : ne perdez pas de temps. Commencez

votre préparation le plus tôt possible. Rappelez-vous La Fontaine : « Rien ne sert de courir, il

faut partir à point ». Vous entrez dans une période pendant laquelle vous êtes un coureur de

fond. Il faut trouver très rapidement un rythme de travail comme le coureur va chercher à

rythmer sa foulée. Ce rythme doit être tenu pendant toute la durée de la préparation. Prévoyez

des temps de respiration pendant lesquels votre travail sera moins soutenu. Cette course de

fond se finira par un sprint qui vous mobilisera le dernier mois avant le concours. Le rythme

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idéal est de consacrer à la culture générale environ une heure à une heure et demi par jour sur

sept jours. Bien sûr, ce temps est indicatif et ne doit pas être pris au sens formel, comme nous

le verrons un peu plus tard.

Ensuite, réfléchissez à un programme de travail. Il organisera le temps consacré à la

culture générale. Prévoyez, par exemple, de traiter un nouveau thème tous les trois jours.

Ecrivez-le et prenez un engagement vis-à-vis de vous-même. Soyez souple et ferme à la fois.

Fixez-vous des objectifs (tel thème sera traité au plus tard pour telle date) et laissez-vous de la

marge dans les moyens pour les atteindre (la collecte est parfois tributaire de la chance ou du

hasard des lectures).

Prenez conscience du fait qu’il y a un certain plaisir intellectuel à préparer cette

épreuve. Elle vous oblige à vous ouvrir au monde et à essayer de le comprendre, à saisir le

sens des évolutions en cours. Chaque activité de la journée peut être utile à enrichir votre fond

documentaire et pourra être imputée sur le temps de préparation. Une sortie au cinéma, au

théâtre ou au concert est un moment où, tout en vous distrayant, vous pourrez collecter des

informations qui vous seront utiles pour vous enrichir. Votre esprit doit être en éveil

permanent, soyez à l’affût de tout, systématisez cette attitude réceptive. Toute votre vie,

personnelle et professionnelle, peut être une source d’informations exploitables.

Enfin, réservez-vous une période de la journée ou de la semaine pendant laquelle vous

exploiterez les informations que vous aurez collectées et notées. Cette période sera passée

devant votre bureau à confectionner votre fond documentaire (voir II B ci-dessous).

Pour cela, vous aurez eu le souci d’organiser votre espace.

B. La gestion de l’espace

Les conditions matérielles sont essentielles; pourtant, elles sont souvent négligées par

les candidats. Ayez dans votre appartement un endroit réservé à votre préparation. Il s’agit

d’une évidence. Malheureusement, l’expérience prouve que de nombreux candidats perdent

un temps précieux tout simplement par manque d’organisation de l’espace. Ce conseil est

valable pour toutes les épreuves du concours.

Dans l’endroit ainsi déterminé (votre bureau par exemple), vous stockerez votre fond

documentaire de culture générale constitué d’un certain nombre de dossiers. Pour chaque

thème traité, un dossier rassemblera de façon synthétique les définitions, informations et

références utiles au thème (voir II A ci-dessous).

La confection de ce fond suppose de votre part la production d’un travail de qualité.

C. La production d’un travail de qualité

Travailler beaucoup n’est pas nécessairement synonyme de travail de qualité. Méfiez-

vous des réflexes de l’écureuil : stocker une masse de documents. Dans le contexte de votre

préparation, la photocopieuse ou le scanner est le meilleur ami comme le pire ennemi. Il ne

sert à rien de photocopier l’ensemble d’un ouvrage, d’un article ou d’une fiche de synthèse

sans travail d’appropriation. Passer des heures devant la photocopieuse ou Internet vous

rassurera peut être, mais sera totalement inefficace le jour de l’épreuve.

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Pour être efficace, votre travail de préparation, qui s’appuiera sur le programme de

travail que vous aurez eu le souci d’établir au tout début de la préparation, sera organisé en

deux temps.

Un premier temps sera consacré à la collecte des informations. Dans un deuxième

temps, à partir des informations collectées, vous vous attacherez à la confection de votre fond

documentaire.

II. La collecte des informations

La collecte d’informations, pour être efficace, doit s’appuyer sur une grille de lecture. Votre

grille de lecture sera constituée par des thèmes (pour le choix des thèmes voir V A ci-dessous). A

chaque fois que vous collectez une information que vous considérez comme intéressante ou

importante, demandez-vous pour quel thème elle est pertinente. Si aucun thème ne semble pouvoir

l’accueillir alors qu’elle vous paraît importante malgré tout, constituez un nouveau dossier

thématique.

Pour que votre collecte soit fructueuse, il y a lieu de se demander quelles sont les sources à

exploiter (A), puis comment les traiter (B).

A. Identification des sources d’informations

Par définition, vos sources d’informations sont multiples et variées. Bien évidemment,

une place de choix sera laissée aux informations écrites. A ce sujet, on ne peut que conseiller

de suivre un petit stage de lecture rapide ou au moins d’acquérir un ouvrage qui traite du

sujet. Ce type de méthode vous apprendra à lire de façon rapide et efficace des documents et à

repérer dans un texte les informations qui vous intéressent. Si l’écrit est important dans la

collecte d’informations, d’autres sources peuvent bien sûr être exploitées.

Les sources d’information peuvent être regroupées en sept catégories :

1. La première catégorie est constituée par tous les documents, cours et séminaires

qui vous sont proposés dans le cadre de votre préparation

Ces informations ont l’avantage d’être parfaitement adaptées à l’épreuve de

culture générale de votre concours. Bien entendu, il va sans dire que les différents

thèmes traités pendant les cours ou TD sont autant de documents qui ont été élaborés

pour vous aider à confectionner vos dossiers. En outre, toutes les connaissances que

vous êtes tenus d’acquérir pour les matières techniques du concours sont autant de

sources à exploiter. Bien entendu, elles seront utilisées dans l’optique spécifique de la

culture générale.

2. Une deuxième catégorie est constituée par la presse quotidienne

La lecture du « Monde » chaque jour est indispensable. Si vraiment ce quotidien

vous semble définitivement rébarbatif, reportez-vous sur « Libération » ou le « Figaro ».

Préférez toutefois le premier. N’hésitez pas à exploiter les publications annexes comme

« Les Dossiers et Documents du Monde » ainsi que le cd-rom du quotidien. Cette lecture

est indispensable pour être au fait de l’actualité, mais aussi des débats qui agitent la

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société française et internationale. Mais prenez garde de ne pas perdre trop de temps lors

de la lecture de votre quotidien. Privilégiez les articles de fond aux articles factuels. « Le

Monde » propose régulièrement des dossiers sur un thème d’actualité. La lecture d’un

article doit se faire le crayon à la main pour noter les informations utiles. Il est rare de

trouver un article qui mérite d’être photocopié et de figurer tel quel dans vos dossiers.

3. La troisième catégorie regroupe les revues

Parcourez régulièrement, sans forcément les lire, les revues telles que « Le

Débat », « Commentaire », « La Revue des Deux Mondes », « Esprit »…Leurs

sommaires vous donneront une idée des problématiques actuelles. N’oubliez pas, elles

constituent des sources inépuisables de sujets de concours.

4. Portez une attention particulière aux ouvrages de synthèse

Toutes les collections de type « Que sais-je », les différents ouvrages comme la

collection « Repères » éditée aux éditions La Découverte, la collection « Mise au Point »

édité par Ellipses sont une autre source facilement exploitable. Les éditions de La

Documentation Française sont riches de ce type de collections : « Problèmes politiques

et sociaux », « Les Cahiers Français » ou « Les documents d’Etudes ». Tous ces

ouvrages ou collections peuvent vous faire gagner un temps précieux. Ils font, de façon

synthétique, le point sur un sujet et vous donnent des clefs de compréhension des

problématiques en œuvre. Ces collections sont de véritables mines d’informations.

5. Les encyclopédies sont également une source possible, bien que difficile à manier

Je suis un adepte de « Encyclopaedia Universalis »; d’autres éditions existent sur

le marché. Attention cependant à ne pas vous laisser noyer par la masse d’informations

qu’elles contiennent. Il faut, pour utiliser cette source d’information, faire un gros effort

de résumé et de synthèse des articles que vous y trouverez. Ne négligez pas les formes

électroniques de ces encyclopédies. Ainsi le dernier cd-rom de « Encyclopaedia

Universalis » représente un excellent outil, avec la contrainte d’un travail de synthèse.

6. La catégorie des informations audiovisuelles ou les Web est également une source

intéressante

Les sources classiques, bien sûr, comme le cinéma, certaines émissions de

télévision (« Envoyé spécial » sur F2, «Théma » sur Arte), mais aussi celles plus

modernes comme Internet sont autant de gisements inépuisables d’informations.

Attention cependant, pour le Web, le risque est grand de perdre du temps : maîtriser

parfaitement un ou plusieurs moteurs de recherche est une condition sine qua non de

succès. Sinon, évitez cet outil impérativement, il est extrêmement chronophage. De plus

recouper toujours les informations, beaucoup de bêtises circulent sur la toile. .

7. Enfin votre vie quotidienne, vos activités professionnelles, culturelles ou autres ne

sont pas des sources à négliger

En effet, votre vie personnelle, culturelle et professionnelle est autant de sujets de

réflexion.

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L’ensemble de ces informations ainsi collectées sera traité pour être facilement

exploitable au moment des révisions.

B. Le traitement de l’information

C’est une phase essentielle de votre travail. Aucune information ne doit être intégrée

dans vos dossiers sans avoir été, au préalable, traitée. En mettant l’accent dans un deuxième

temps sur certaines erreurs à éviter (2), on se concentrera d’abord sur les caractéristiques d’un

bon traitement de l’information (1).

1. Les caractéristiques d’un bon traitement de l’information

Tout d’abord, lisez les documents que vous sélectionnez pour vos dossiers. C’est

une évidence, mais de nombreux candidats se contentent de les stocker sans vraiment

les lire. S’il s’agit d’un document suffisamment synthétique et exploitable pour être

intégré à votre fond, n’hésitez pas à utiliser le surligneur pour mettre en évidence les

points importants.

Ensuite, familiarisez-vous avec la prise de notes. Lorsque vous lisez un article du

« Monde », d’une revue ou d’un manuel, faites-le un crayon à la main. Par exemple,

dans un article de journal, il est rare de trouver plus de deux ou trois idées exploitables.

Ces idées doivent être notées. Le reste (les effets de style, « la mayonnaise » dont tout

article est constitué) sera oublié et éliminé. Cette réécriture vous assure une bonne

mémorisation et favorise l’appropriation de l’idée ou de l’exemple.

Enfin, évertuez-vous à vous constituer toute une série de mots clefs qui vous

rappelleront un ensemble d’informations. Ces mots clefs vous facilitent le travail de

traitement et améliorent votre productivité. Dans tous les cas, aucune information ne

doit figurer dans votre dossier sans avoir, au préalable, été traitée.

Le traitement des informations que vous aurez collectées sera effectué de façon

régulière. Votre emploi du temps doit prévoir des plages pendant lesquelles vous ferez

ce travail. L’idéal est de programmer deux séances de travail par semaine. L’une en

milieu de semaine, l’autre en début ou en fin de semaine (par exemple le samedi et le

mercredi). Une séance par semaine est un minimum.

Certaines erreurs sont à éviter.

2. Les erreurs à éviter

Une des premières erreurs à éviter est l’utilisation de documents longs et

complexes. Ces documents ne sont pas exploitables. Le fait de les conserver dans vos

dossiers ne vous apportera aucune plus-value.

Evitez également de vous constituer des dossiers trop épais. Un dossier

thématique opérationnel ne contient que dix à quinze pages au maximum. Ce qui vous

fait tout de même, pour un fond documentaire contenant cinquante dossiers

thématiques, de 500 à 750 pages de documents. Il sera très difficile d’aller au-delà.

Ces deux erreurs seront facilement évitées si vous ne tombez pas dans l’illusion

déjà évoquée de la photocopieuse, du scanne à tous prix ou du téléchargement à tout va.

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Enfin, une dernière erreur consiste à classer dans vos dossiers des documents non

traités au préalable. Ne commettez jamais cette erreur. Si vous ne pouvez traiter une

information, quelle qu’en soit la raison, gardez-là de coté et remettez ce travail à plus

tard. Ne la classez pas dans votre dossier en vous disant que vous la traiterez plus tard.

Ce comportement deviendra très vite habituel et obérera le caractère opérationnel de

votre fond.

Il est temps maintenant d’aborder de façon concrète la réalisation de votre fond

documentaire.

III. La confection de votre fond documentaire

La confection de votre fond documentaire est la clef de voûte de votre préparation à l’épreuve

de culture générale. Il vous permet de disposer d’un outil qui structure la masse d’informations que

vous devrez traiter. Le jour de l’épreuve, vous disposerez d’une véritable boite à outils facile

d’utilisation et très efficace.

Ce fond documentaire sera organisé de façon thématique (A). On détaillera ensuite le contenu

d’un dossier thématique-type (B).

A. Le principe mis en œuvre : l’approche thématique

L’approche thématique, pour la préparation de l’épreuve de culture générale, n’est pas

évidente a priori. Elle recèle un caractère artificiel dans la mesure où le choix du thème est

toujours discutable. De plus, le classement d’une information dans un thème plutôt que dans

un autre est souvent un exercice difficile, à la limite de l’arbitraire surtout lorsque

l’information se situe à la marge de l’un ou de l’autre desdits thèmes.

Pourtant les inconvénients de l’approche thématique peuvent, à la réflexion, présenter

un avantage décisif pour la préparation de l’épreuve de culture générale. Le choix des thèmes

suppose au préalable un travail personnel de réflexion. Qu’est-ce qu’un thème pertinent ?

Comment l’identifier ? Quelles sont les limites à lui fixer ? Quel type de thèmes choisir ? Il

n’y a pas de réponse univoque à toutes ces questions.

Cependant, il est possible d’identifier trois caractéristiques auxquelles le thème choisi

répondra nécessairement pour être pertinent : il doit être suffisamment large (1), ouvert (2) et

retracer les problématiques actuelles ou incontournables (3). Quelques exemples vous

permettront d’amorcer votre réflexion (4).

1. Etre large

Il sera suffisamment large. Il rassemblera toute une série de sous-thèmes qui le

nourriront. Un thème trop étroit deviendra très vite sec et ne pourra être utilisé de façon

efficace pour la recherche de l’information. Par exemple, un thème sur « le mariage »

apparaît trop étroit. En effet, s’il peut s’agir d’un thème à part entière pour la

préparation d’une épreuve de droit civil, il est inadapté à l’épreuve de culture générale.

Le mariage n’est qu’une des formes, aujourd’hui nombreuses, de constitution de la

cellule familiale de base. C’est pourquoi un thème plus adapté serait « la famille ». Le

mariage en est une des thématiques, mais l’union libre, le PACS ou la recomposition

après divorce sont autant de sujets qui donnent de la richesse au thème de la famille.

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Une précision s’impose : il n’est pas nécessaire que le thème choisi se résume en

un seul mot; il peut être l’association de plusieurs notions comme par exemple

« démocratie et citoyenneté ». Les relations entre les notions seront la complémentarité,

l’opposition...

2. Etre ouvert

Le thème doit être suffisamment ouvert à des enjeux connexes et autoriser des

liaisons aisées avec d’autres thèmes. Ainsi, pour reprendre le thème de « la famille »,

celui-ci non seulement permet d’avoir une vision des problématiques liées à la cellule

familiale, mais donne également une ouverture vis-à-vis des thèmes comme les

politiques publiques qui ont des effets sur la famille, le rôle de cette dernière dans les

problèmes de violence juvénile ou de tensions dans les banlieues. Ce travail de liaison

entre les thèmes est un des plus profitables. Il vous entraîne à exercer une réflexion

personnelle sur les thèmes.

3. Refléter les problématiques actuelles ou incontournables en utilisant le

prisme du concours que vous préparé.

Le thème retracera des problématiques actuelles ou incontournables. En fait, il

s’agit des thèmes que doit maîtriser « l’honnête homme du XXIème siècle » et qui sont

a fortiori indispensables au haut fonctionnaire territorial que vous aspirez à devenir. Les

thèmes seront en phase avec l’actualité. Si vous n’échapperez pas à une réflexion

traitant, par exemple, de la mondialisation, il faudra également évoquer les thèmes

incontournables comme « démocratie et citoyenneté ».

4. Quelques exemples de thèmes

Pour vous aider dans le choix de vos thèmes, une liste vous est proposée ci-

dessous. Toutefois, elle n’est pas exhaustive.

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Argent

Art

Civilisation

Corps / Moi

Culture

Citoyenneté / Démocratie

Crimes contre l’Humanité / Totalitarisme

Education

Ecologie

Economie

Egalité / Inégalité / Equité

Elite / Sélection

Etat / modernisation

Europe (L’idée de l’)

Famille

Femme

Francophonie

Guerre

Histoire / Mémoire

Humanité

Idéologie

Identité / Minorité

Immigration

Individu / Individualisme

Intellectuel / Engagement

Informatique / Internet

Jeunesse / Enfance

Justice

Justice internationale

Justice / Prison / Peine

Langues / Francophonie

Liberté / Libéralisme

Médias

Modernité / Post modernité

Mondialisation

Morale / Valeurs

Mythe / Utopie

Nation / Nationalisme / Patrie

ONU *

Organisations internationales

Pauvreté / Exclusion / Marginalité

Philosophie

Politique / Partis

Pouvoir / Responsabilité

Progrès

Racisme

Religion / laïcité

République

Retraite

Risques et principe de précaution

Sciences / éthique

Sport

Société de consommation / Publicité

Solidarité

Syndicats / Associations

Travail / Loisirs

Terrorisme

Urbanisme

Vieillesse / Mort

Ville

Violence

…….

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Le choix des thèmes est forcément critiquable et doit être critiqué. Faites ce travail

critique. Il vous obligera à réfléchir à la pertinence des choix opérés en fonction de votre

propre sensibilité et du concours que vous préparez..

Une fois que vous aurez choisi votre liste de thèmes – liste qui doit être évolutive

tout au long de la préparation – vous constituerez pour chaque thème un dossier.

Le contenu de ce dossier est fondamental pour disposer d’un outil de travail

performant.

B. Le contenu d’un dossier type du fond documentaire

En pratique, chaque dossier doit être confectionné sous forme de chemise. Cette

chemise rassemblera impérativement et au minimum la définition des notions et des termes

clefs du thème (1), quelques rappels historiques (2), une ou plusieurs fiches de synthèse (3),

une ou plusieurs références (4) et éventuellement, en fonction de l’objet du thème, quelques

éléments chiffrés (5).

1. La définition des notions et des termes- clefs du thème

Ce travail de définition est important, car il vous permettra au moment de l’épreuve

d’économiser beaucoup de temps. En effet, au moment d’aborder un sujet, vous devrez

avoir le réflexe de définir les termes clefs. Effectuer ce travail tout au long de la

préparation vous donnera une habitude de cet exercice qui n’est pas toujours, loin s’en

faut, aussi évident qu’il n’y paraît.

Méfiez-vous des simplifications abusives et ayez toujours à porté de mains un bon

dictionnaire. Car définir un terme comme « culture » par exemple n’est pas aisé.

Plusieurs approches sont possibles. Il faut tenter de poser correctement les termes de la

définition, surtout si plusieurs sens sont possibles.

Pour des exemples de définitions, reportez-vous aux thèmes traités.

2. Quelques rappels historiques

Il ne s’agit pas de faire un travail historique complet, mais de rappeler les grands

événements qui ont marqué le thème que vous traitez. C’est indispensable. On ne peut

comprendre les évolutions contemporaines sans une dose d’histoire.

N’oubliez pas que le correcteur, le jour de l’épreuve, attend de vous la capacité de

replacer le sujet dans son contexte historique. Les correcteurs reprochent souvent aux

candidats leur faible faculté de se situer dans le temps.

3. Plusieurs fiches de synthèse

Ces fiches explicitent les différentes problématiques liées aux thèmes ou qui

exposent un point saillant. Attachez-vous à rédiger des fiches qui reprennent les faits et

chiffres nécessaires à la compréhension du thème, qui traitent des notions fondamentales

et qui présentent les évolutions en cours.

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Ces fiches devront être facilement exploitables. En aucune façon, le dossier ne doit

contenir des documents qui n’ont pas été au préalable traités par vous. Vous devez vous

approprier ces fiches.

De même, ces fiches sont autant d’occasions pour réaliser des plans détaillés; ce qui

sera un entraînement à l’épreuve proprement dite.

4. Plusieurs références bibliographiques ou artistiques

Les références sont des ouvrages littéraires, les œuvres artistiques au sens large,

qui, le jour de l’épreuve, seront utilisées dans votre copie pour montrer au correcteur que

vous êtes ouvert sur le monde et que vous savez exploiter ce que des grands auteurs ont

écrit en vous appuyant sur ce qu’ils ont exprimé sur le sujet en question pour étayer vos

arguments. Ces références seront très variées.

Certaines sont incontournables comme celles constituées par les grands mythes de

la culture occidentale tels Antigone, Faust, Don Quichotte...ou celles qui convoquent les

grands auteurs français ou étrangers, d’hier et d’aujourd’hui. Ainsi n’hésitez pas à

exploiter les classiques que vous aurez forcément rencontrés pendant vos études

secondaires (Rousseau, Flaubert, Hugo…). N’oubliez pas les textes qui ont fait date : la

Déclaration des Droits de l'Homme par exemple.

D’autres références peuvent être constituées par les œuvres cinématographiques, la

peinture ou la sculpture.

L’efficacité commande de choisir des références susceptibles d’être utilisées dans

plusieurs thèmes. Cependant, elles doivent impérativement illustrer le thème de façon

pertinente. Méfiez-vous des contresens dans l’utilisation de références mal maîtrisées.

5. Éventuellement des éléments chiffrés

Certains thèmes doivent être illustrés par des chiffres. La palette est très large. Ce

sont des chiffres émanant de statistiques la plupart du temps qui marquent l’évolution

quantitative du thème étudié. Pour un thème comme « démographie », par exemple, vous

ne pouvez faire l’économie de quelques statistiques.

IV. L’exploitation du fond documentaire avant le concours

Votre fond documentaire ne sera pas une simple boite de stockage, mais un outil qui va vivre et

évoluer tout au long de la préparation à l’épreuve de culture générale. Vous ne devez pas passer une

semaine sans avoir enrichi votre fond à partir des informations collectées. Les moments où vous

travaillerez sur votre fond et qui vous permettront de vous approprier et de maîtriser vos

connaissances doivent être prévus dans votre emploi du temps; c’est un impératif.

Un mois avant la date du concours, l’exploitation de votre fond documentaire deviendra la

priorité. Le but est de mémoriser le maximum d’informations contenues dans vos dossiers. Il ne

s’agit pas de bachoter, mais de vous imprégner de toutes les problématiques que vous aurez

développées dans votre fond documentaire tout au long de la préparation. En outre, apprenez par

cœur les citations extraites des œuvres que vous aurez choisies en références. Elles pourront vous

servir en phrase d’accroche pour une introduction bien « balancée » ou pour illustrer les

développements de votre dissertation.

Pendant ce mois de sprint final, astreignez-vous à lire vos dossiers pendant une heure chaque

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jour. Rattachez tout ce que vous aurez classé dans vos fiches à l’actualité immédiate en essayant

d’analyser les événements dont vous êtes le spectateur (ou l’acteur).

Faites systématiquement un travail de mise en perspective historique de ces événements. Cet

exercice vous entraîne à utiliser votre fond documentaire comme une boite à outils, faculté qui vous

sera très utile le jour du concours.

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CULTURE

Définitions

Définir le terme « culture » est un exercice qui semble voué à l’échec tant le mot contient des

conceptions différentes, parfois contradictoires. KROEBER et KLUCKHOHN ont, en 1952, dressé

l’inventaire des multiples manières d’utiliser le terme « culture » depuis le XVIIIe siècle, au cours

duquel il a commencé à être appliqué aux sociétés humaines. A partir de cet inventaire, Jean Pierre

MARTINON déduit deux types de définitions possibles : une définition restreinte, qui utilise le terme

de culture pour la description de l’organisation symbolique d’un groupe, de la transmission de cette

organisation et de l’ensemble des valeurs étayant la représentation que le groupe se fait de lui-même,

de ses rapports avec les autres groupes et de ses rapports avec l’univers naturel; une définition plus

large utilise le terme de culture aussi bien pour décrire les coutumes, les croyances, la langue, les

idées, les goûts esthétiques et la connaissance technique que l’organisation de l’environnement total

de l’homme, c’est-à-dire la culture matérielle, les outils, l’habitat et plus généralement tout

l’ensemble technologique transmissible régulant les rapports et les comportements d’un groupe social

avec l’environnement. En rester là serait nécessairement partiel. La culture est aussi un concept plus

universel encore, qui décrit la volonté de s’élever et de travailler son âme, de cultiver ses idées;

développée à son terme, cette culture des idées devient la philosophie, ce qui fait dire à CICERON :

« Cultura animi philosphia est » (la philosophie est la culture de l’âme). Cette approche trouve son

apogée au siècle des Lumières, où les efforts de la raison sont tendus vers la définition d’une

conception unique de la culture, qu’elle soit scientifique ou littéraire. Ainsi l’Homme, dans la

diversité de ses usages et de ses modes de vie, serait un et la culture une ouverture sur l’autre. La

culture permettrait de distinguer la spécificité de l’humanité dans sa diversité à celle de l’état de

nature, de l’animalité brute. Pourtant, la culture apparaît également dans son sens traditionnel comme

le legs de certaines œuvres qui constituent une sorte de système de références obligées (Racine,

Corneille, Shakespeare, Beethoven, Léonard de Vinci…) que doit maîtriser tout individu dit cultivé.

Dans ce sens, la culture est perçue comme un moyen de sélection et un instrument de reconnaissance.

Elle devient alors le privilège d’une classe sociale. Finalement, la définition de la culture reste un

débat qui n’est pas près de s’achever. D’autant plus qu’aujourd’hui une conception unifiée de la

culture semble s’éloigner un peu plus encore. En effet, la culture est perçue comme mouvante

puisqu’elle recouvre pour certains toute production humaine. En bref, tout est culturel : cette vision

domine dans le milieu des sciences sociales. De même, au nom d’une revendication différentielle,

souvent nationale (voire régionale), une culture pour tous les hommes est rejetée pour une affirmation

d’une pluralité des cultures. Enfin, de nouveaux concepts ont vu le jour telle la culture de masse qui

s’attache au mode de transmission culturelle.

Notions en rapport :

C’est aux Etats-Unis qu’ont été créés les néologismes de « mass media » – terme qui englobe la

grande presse, le cinéma, la radio, la télévision – et de « mass culture » traduit par « culture de

masse » – qui embrasse la culture produite, jouée et diffusée par les mass media. Ce rapprochement

de deux notions extrêmement équivoques, « culture » et « masse », ne peut se soustraire aux

contradictions que rencontre le terme « culture ». Cependant, pour définir la culture de masse, on

peut retenir celle proposée par Edgard MORIN dans son article consacré à cette notion dans

l’Encyclopaedia Universalis : « Entendons ici la culture de masse comme une culture produite en

fonction de sa diffusion massive et tendant à s’adresser à une masse humaine, c’est-à-dire à un

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agglomérat d’individus considérés en-dehors de leur appartenance professionnelle ou sociale ».

Ainsi, ce type de culture est entièrement déterminé par le support qui la véhicule. En fait, c’est au

cours de la première moitié du XXème siècle, et singulièrement à partir des années trente, avec

l’entrée dans le champ de préoccupations des grandes firmes qui les utilisent, de la classe politique,

de l’intelligentsia, de larges secteurs de l’opinion publique des mass media que la culture de masse

s’est développée. Très rapidement, dès la première décennie de l’après guerre, l’intelligentsia ressent

très fortement le fait que ce type de culture dont la caractéristique est la diffusion de masse peut être à

la fois une menace contre ses valeurs artistiques et intellectuelles et une source d’abêtissement ou

d’aliénation pour les populations qui la subissent. Si la culture de masse est devenue un objet

d’études, les intellectuels, dans les années d’après guerre, aux Etats-Unis comme en Europe, tendent

à voir dans la culture de masse une pseudo-culture, un « kitsch », du toc. Certains adoptent un mépris

hautain pour la « barbarie » de cette prétendue culture, la vulgarité plébéienne, la marchandise de

série et de grande consommation; d’autres voient dans la culture de masse l’instrument fondamental

de l’asservissement, de l’aliénation, de la manipulation du peuple. Cette opposition à la culture de

masse se retrouve paradoxalement dans tout le champ politique, de l’extrême droite à l’extrême

gauche.

Éléments chiffrés

Quelques chiffres sur les pratiques culturelles des Français

(Source : ministère des affaires étrangères)

Les Français consacrent environ 6 heures par jour à la télévision, à la radio et à la presse. Ils

regardent la télévision pendant 3 h 20, écoutent la radio pendant 2h et lisent les journaux durant 37

minutes.

La télévision, bien qu’étant le média le plus pratiqué, est à la fois moyen d'information et

véhicule culturel; elle a vu son audience diminuer ces dernières années. Cette baisse, qui peut paraître

contradictoire à un moment où le nombre de chaînes diffusées par satellite ou par câble ne cesse de

s'accroître, s'explique par un certain désintérêt des téléspectateurs pour les programmes présentés. Un

Français sur deux n'est plus satisfait par la télévision.

La radio demeure un média très utilisé, malgré la concurrence de la télévision. Les Français

l'écoutent chez eux (64%), mais aussi en voiture (17%), sur leur lieu de travail (16%) ou dans les

magasins. Ils possèdent en moyenne 6 postes (radio-cassette, radio-réveil, tuner, autoradio...).

Concernant la presse écrite, les Français lisent 7 millions de quotidiens nationaux par semaine

et 18 millions de quotidiens régionaux. Il est à noter que ces chiffres sont très inférieurs à ceux de la

plupart des grands pays industrialisés. En effet, 20 quotidiens pour 1 000 personnes se vendent en

France, soit deux fois moins qu'au Royaume-Uni, mais également qu'en Allemagne et en Italie (34)

ou en Espagne (31). Actuellement, 36,5 % des Français lisent un quotidien tous les jours ou presque,

14,5% trois à cinq fois par semaine, 23,5% une à deux fois par semaine, 17% au moins une fois par

semaine, 10,1% deux à trois fois par mois, 15,4% moins d'une fois par mois. Le titre le plus lu est le

quotidien sportif « L'Equipe » (2,5 millions de lecteurs). Ils lisent en revanche beaucoup de

magazines (1,4 par jour en moyenne), disposant d'un large choix parmi les 2 500 titres diffusés dans

les kiosques.

Le cinéma

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Plus d'un Français sur deux va au cinéma en moyenne de quatre à cinq fois par an. Ce sont les

jeunes qui constituent l’essentiel de la clientèle (85% des moins de 25 ans contre 25% des plus de 60

ans) : ils représentent 40% des entrées. Par catégories socio-professionnelles, 80% des chefs

d'entreprises, cadres et professions libérales vont au cinéma au moins une fois par an, contre 60% des

professions intermédiaires, 41% des ouvriers et 26% des retraités. Les habitants des villes,

notamment de Paris et de ses environs, sont plus nombreux que ceux des petites villes ou des villages

(72% contre 47%).

Le théâtre

Environ 700 000 spectateurs assistent en moyenne aux quelque 1 600 représentations données

par les cinq théâtres nationaux. 2,9 millions se rendent aux 28 700 représentations des 61 scènes

nationales tandis que les théâtres privés de Paris accueillent 2,4 millions de spectateurs pour 11 800

représentations. Il est à noter que 8% des Français font du théâtre en amateur.

La musique

Les Français ont acheté environ 145 millions de CD et plus de 45 millions de cassettes. Leurs

goûts les portent vers les variétés internationales (49% de leurs achats), les variétés nationales (43%)

et la musique classique (8%).

L'opéra et la danse

Environ 600 000 spectateurs (350 000 pour les opéras et 250 000 pour les ballets) ont assisté

aux quelque 300 représentations de l'Opéra de Paris. Environ 700 000 autres spectateurs se sont

partagés les spectacles présentés par les 13 théâtres lyriques de France (880 représentations). 75%

d'entre eux ont suivi les opéras, 15% les ballets et 15% les concerts.

Les musées

Environ 13 millions de Français ont visité des musées l'an dernier (ils n'étaient que 10 millions

en 1980). Les seuls musées de la ville de Paris ont accueilli 1,3 millions de personnes pour des

expositions temporaires et 350 000 pour des collections permanentes.

La lecture

Contrairement à ce qui est souvent dit, les Français sont de plus en plus nombreux à lire : 91%

lisent au moins un livre dans l'année, contre 75% en 1989 et 70% en 1973. Si l'on compte moins de

"gros lecteurs" (17% lisent plus de 25 livres par an, contre 19% il y a dix ans), on trouve plus de

"petits lecteurs" (32% lisent moins de 10 livres par an contre 28% il y a dix ans). En revanche,

globalement, le nombre de livres achetés stagne, voire diminue (l'édition a connu en 1996 une baisse

d'activité de 3%, son plus mauvais résultat depuis quinze ans). Les Français semblent s'intéresser

davantage à la littérature générale et à la bande dessinée qu’aux ouvrages scientifiques et techniques.

Les dépenses culturelles des Français

(Source : ministère des affaires étrangères)

Les Français consacrent 4% de leur budget aux dépenses culturelles. Elles se répartissent ainsi

(en milliards d’euros) :

Presse : 5,6

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Livres : 4,2

Disques et vidéocassettes : 3,8

Redevance et abonnement TV : 3,6

Spectacles : 2,9

Radio et télévision : 2,6

Hi-fi et magnétoscopes : 2,3

Objets d'art : 1,7

Photo : 0,8

Cinéma : 0,8

Les dépenses culturelles publiques

Le budget du ministère de la culture est de 2,78 milliards d’euros en 2005. Ce montant ne rend

pas complètement compte du financement public de la culture qui s’établit autour de 13 milliards

d’euros, répartis par moitié entre l’Etat et les collectivités territoriales.

La culture, un marché parmi d’autres

(Source : ministère des affaires étrangères)

Les Français dépensent près de 24 milliards d’euros dans l’acquisition de matériel et de

supports audiovisuels ainsi que dans l’achat de livres, de journaux, de revues et de places de

spectacles. Ajouté à cette consommation culturelle des ménages, celle des entreprises, de l’Etat et des

collectivités territoriales, le marché qui en découle représente un montant d’environ 30,5 milliards

d’euros.

Ce marché connaît une croissance soutenue depuis plus d’une décennie. En tête de ce marché,

avec un chiffre d’affaire de plus de 15,2 milliards d’euros, se trouvent les entreprises de presse,

l’édition et les industries graphiques. Le secteur de l’audiovisuel comprenant la télévision, les

industries du disque et du cinéma, avec un chiffre d’affaires d’environ 10,67 milliards d’euros, se

place en deuxième position. Le marché de l’art représente lui aussi un enjeu économique non

négligeable (cf. la fiche consacrée au thème de l’art).

Les entreprises du secteur culturel emploient plus de 440 000 personnes réparties comme suit :

Professions de l’audiovisuel et du spectacle vivant 117 000 Dont Artistes des spectacles 45 000

Cadres, techniciens et ouvriers des spectacles 72 000

Professions des arts plastiques et des métiers d’art 125 000 Dont Artistes plasticiens 22 000

Stylistes/décorateurs 43 000

Photographes 16 000

Métiers d’art 44 000

Professions littéraires 72 000 Dont Journalistes et cadres de l’édition 61 000

Auteurs littéraires 11 000

Cadres / techniciens de la documentation et de conservation 52 000

Professeurs d’arts 35 000

Architectes 39 000

(Source INSEE)

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Quelques repères

La contre-culture (d’après Alain TOURAINE, Encyclopaedia Universalis)

C’est aux Etats-Unis que la notion de contre-culture est née. L’influence américaine s’est

étendue surtout à l’Europe occidentale. Partout la contre-culture s’est mêlée aux nouveaux

mouvements contestataires, en particulier parmi les étudiants, sans jamais se confondre avec eux et

parfois en marquant nettement la distance entre le changement culturel et le conflit politique.

La contre-culture est d’abord le fait de ceux qui rompent soit avec les études, soit avec les

formes habituelles de la vie professionnelle. C’est le refus de l’« aliénation ». Cette forme de contre-

culture correspond à l’état de la société des Etats-Unis des années 60, qui ne connaît pas de grands

conflits sociaux internes, à cause à la fois d’une très forte croissance économique et de l’acuité de la

guerre froide et des conflits internationaux. Parce que la classe dirigeante et l’élite politique se sont

identifiées à un type d’économie et de culture, le refus ne peut être que total et on ne peut que rejeter

un type de société, d’institutions et d’organisations qui apparaît comme intégrateur et manipulateur,

égoïste et, selon le mot de Herbert MARCUSE, « unidimensionnel ».

Cet abandon est une protestation, l’expression d’un manque et le désir d’échapper à une

organisation sociale qui apparaît comme étouffante. Des premiers beatniks au personnage de « Easy

Rider », un nouveau mythe de la route du voyage apparaît aux Etats-Unis, qui avaient si longtemps

vécu en repoussant leurs frontières et qui se sentent de plus en plus enfermés dans des limites non

seulement géographiques, mais surtout professionnelles et morales. Ce refus est le fait de jeunes gens

de niveau social élevé : 55 à 70% des beatniks et des hippies viennent des classes moyenne et

supérieure, de la bourgeoisie.

Plus nombreux, les hippies ont souvent été des jeunes gens rompant avec leur famille ou leur

école, prenant la route, surtout en direction de la Californie. San Francisco, le quartier de Haight-

Ashbury en particulier, devint le centre principal du mouvement : des milliers de hippies s’y

rassemblèrent, notamment à l’occasion du gigantesque « love-in » de 1967.

De jeunes Européens, surtout du Nord, se mêlent aux Américains. Vers 1972, environ 1500

jeunes Français se trouvent ainsi en Inde. Si Katmandou est le lieu le plus fréquenté, Goa constitue

aussi un centre important et, en Europe même, les Baléares, et surtout Ibiza et Formentera, sont des

lieux de rassemblement.

Cette culture parallèle oppose souvent des valeurs à d’autres, l’expression de soi à

l’instrumentalisation de l’individu, la personne à la règle, le groupe à la bureaucratie. Elle n’est pas

constamment contestataire puisqu’elle ne se préoccupe pas souvent de nommer et d’attaquer un

adversaire. Cette contre-culture ne peut être analysée qu’en termes culturels. Elle est aussi

l’expression d’un conflit de générations. C’est aussi une action politique qui analyse la société dite

capitaliste ou technocratique, définie par sa capacité à manipuler non plus seulement le travail, mais

la consommation, l’information, les transports, l’éducation. La figure de MARCUSE domine cette

contestation culturelle et sociale, menée à la fois au nom de FREUD et au nom de MARX et qui voit

dans les « marginaux » l’agent principal de la lutte contre une intégration sociale remplaçant la

contrainte par la tolérance.

Cependant, il serait faux d’identifier la contre-culture à un mouvement social et politique et de

considérer que la jeunesse a remplacé la classe ouvrière comme acteur central des luttes sociales.

Mais il serait plus faux encore de n’y voir que déviance et marginalité ou, à l’inverse, pure innovation

et créativité. Cette contre-culture se développe au moment où un changement de culture et de société

n’est pas encore accompagnée par une transformation de la scène sociale et politique, qui se trouve

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ainsi vide : les anciens conflits sont pris en charge par les institutions, les nouveaux sont encore

confus.

Dans les années 1969-1975, un recul net, parfois presque complet, de la contre-culture peut être

observé. Pourtant, l’entrée en crise économique des sociétés occidentales, l’abandon de l’espoir de

transformations sociales, associés au recul très rapide de l’idéologie marxiste, ont provoqué un

certain retour à la contre-culture. Ainsi, par exemple, les mouvements régionaux en France, qui ont

connu des échecs politiques répétés, se replient sur une action culturelle dans laquelle se retrouvent

ex-révolutionnaires et ex-traditionalistes. De la même façon, l’entrée en lice des mouvements

écologistes, comme en Allemagne, porteurs d’une « culture alternative », semble marquer la

renaissance de cette contre-culture liée à des enjeux politiques. Les rassemblements des alter-

mondialistes dans le Larzac sont aussi les prémices d’une nouvelle contre-culture qui se cherche.

L’art public aujourd’hui en France

(d’après Caroline CROS, Encyclopaedia Universalis)

Depuis les années 1980, en France, la politique de commandes d’œuvres d’art a connu une

véritable impulsion et s’est développée en partenariat avec les régions et les collectivités territoriales.

Un véritable « art public » semble avoir émergé. Celui-ci ne concerne pas uniquement l’érection

d’une statue (équestre, funéraire, ornementale…), d’un monument figé pour l’éternité, ni même la

conception d’un décor, mais bien au contraire, il traduit la volonté tant des commanditaires que des

artistes de confronter le passant de la fin du XXe siècle à des formes nouvelles : une inscription

murale (Lawrence WEINER sur le phare de Calais ou dans le jardin des Tuileries à Paris), des

caissons lumineux (Mario MERZ à Strasbourg)…

Pour faire état de cette tendance, il convient de constater qu’elle n’est pas nécessairement

récente (I), mais qu’elle a connu du fait des innovations en matière d’art plastique (II) une nouvelle

impulsion avec pour corollaire une certaine décentralisation (III).

I. La commande publique : une pratique ancienne

Pour ne remonter qu’au sortir de la Révolution, la commande publique est essentiellement un

outil au service du pouvoir servant à magnifier l’image de l’Etat. Le XIXe siècle multiplie les

commandes de sculptures destinées à orner arcs historiés, façades d’édifices, monuments funéraires,

civils ou religieux. La commande assure aussi le maintien de la peinture d’histoire, du décor, du

portrait ou de l’ornement, peint ou sculpté.

Pour financer ces réalisations, de nombreuses souscriptions publiques sont alors ouvertes par

une municipalité, une société savante ou un groupe de personnes. La souscription publique

s’accompagne de la mention « Monument offert par souscription », qui a plus d’importance dans

certains cas que le nom du sculpteur. La fidélité au programme défini en amont – thème, support,

dimensions, matériaux ou iconographie – demeure essentielle et prime souvent sur la qualité

artistique des projets retenus.

Avec la commande des Bourgeois de Calais (1889), Rodin est le premier artiste à rompre avec

cette soumission aux contraintes imposées par le commanditaire. Il réussit à imposer son point de

vue, en réduisant la hauteur du socle, habituellement monumental et inaccessible, pour mettre le

groupe sculpté à la portée du public. Il installe ainsi la première sculpture publique « indépendante »

dans la ville. Mais cette « audace » devait provoquer, pour plusieurs décennies, le « divorce » entre la

sculpture contemporaine, dont le musée allait devenir l’unique lieu de présentation, et l’opinion

publique.

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Ce n’est qu’à partir des années 1930, avec l’arrivée de Jean Zay au ministère de l’Education

nationale, que les premiers signes avant-coureurs d’un retour de l’art dans l’espace public peuvent

être constatés. Le ministre relance la commande publique et encourage une rupture avec la tradition

monumentale qui a marqué tout le XIXe siècle. La contrainte du programme trop strict est

abandonnée, les commandes peuvent être ouvertes à des artistes exclus de l’Académie. L’Etat tente,

en réaffirmant son soutien à la création vivante, de réconcilier le public avec l’art de son temps.

A Paris, l’Exposition internationale de 1937 est l’occasion de lancer un important ensemble de

commandes pour la décoration du palais de la Découverte (Léger, Herbin, Lipchitz et Laurens) ainsi

que pour les nombreux pavillons temporaires : celui des Temps modernes (Le Corbusier), des

Artistes modernes (Pingusson et Gleizes pour « l’accompagnement d’architecture ») ou de l’Air

(Robert et Sonia Delaunay). Neuf cents commandes ont accompagné cette manifestation

exceptionnelle.

Parallèlement à ces commandes, marquées par un souci d’ouverture aux courants novateurs,

Jean Zay ébauche les prémices du 1 p. 100 (enveloppe budgétaire réservée sur le budget global d’une

construction publique et destinée à la commande d’une œuvre d’art) en proposant une mesure selon

laquelle 1,50 p. 100 des crédits de construction d’établissements d’enseignement seraient destinés à

la commande de travaux de décoration, confiés à « des artistes en difficulté ».

De la même façon, les années d’après-guerre sont marquées par le retour de la sculpture dans

l’environnement quotidien qu’est la ville ou le jardin public. Plusieurs expositions temporaires à

l’extérieur du musée en sont à l’origine. Parmi celles-ci, citons Espace Architecture Forme Couleur,

organisée par le groupe Espace à Biot en 1954.

II. Une nouvelle impulsion

Les années 1960-1970 sont marquées par l’émergence de courants artistiques novateurs qui

échappent au seul domaine des musées. Le « Land Art », le « Earth Art », l’art minimal et

conceptuel, qui revendiquent l’inscription de l’œuvre dans un site élargi (paysage, désert, espace

urbain), rendent alors inévitable et supposent le renforcement de la commande publique. En France,

des artistes comme Jean DUBUFFET, Jean TINGUELY ou encore Jean Pierre RAYNAUD font

aussi évoluer la notion de commande publique. Ils entreprennent, sans l’aide de l’Etat, la construction

de projets utopiques qui relèvent davantage de l’architecture que de la sculpture traditionnelle. Au

même moment, le ministère de la Culture, dirigé par André MALRAUX, commande respectivement

à Marc CHAGALL et à André MASSON le décor des plafonds de l’Opéra Garnier et du Théâtre de

l’Odéon. Une attention à la qualité des villes nouvelles apparaît également en 1974.

Mais c’est l’arrivée de Jack LANG au ministère de la Culture qui marque un véritable tournant

dans l’histoire de la commande publique. Le ministre renforce la commande publique en affectant un

fonds budgétaire important à la Délégation aux arts plastiques. Parmi les engagements du ministre,

on peut citer par exemple sa visite à Jean DUBUFFET en 1983 pour lui commander une œuvre

monumentale pour Paris. L’artiste propose la Tour aux figures, conçue en 1970, construite (hauteur :

24 mètres) sur l’île Saint-Germain à Issy-les-Moulineaux; entre autres réalisations : Les Deux

Plateaux, commandés à Daniel BUREN pour la cour d’honneur du Palais-Royal; la polémique qui a

entouré ce projet symbolise la difficulté qu’éprouvent les Français à concilier patrimoine et

modernité.

Les projets suscités en province sont plus nombreux encore et attestent de cette nouvelle

impulsion politique. Apparaissent les premiers partenariats et les conventions de villes avec Nîmes,

Strasbourg, Amiens, Blois, quelques-unes des municipalités les plus soucieuses d’inscrire l’art dans

la ville.

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Le souci d’inscrire la création contemporaine dans des sites aussi divers que la ville, les jardins,

le paysage, les édifices cultuels et historiques, de rompre avec le mode allégorique et narratif de la

commande, de valoriser le point de vue de l’artiste, d’encourager les initiatives en-dehors de Paris et

de veiller à la pluridisciplinarité des réalisations constitue désormais les principaux enjeux de l’art

public. Devant l’enthousiasme des partenaires et la nécessité de répondre à la diversité des demandes,

l’Etat a pris la décision de déconcentrer la commande publique auprès des Directions Régionales des

Affaires Culturelles (D.R.A.C.).

De nouveaux modes opératoires sont inventés. Des comités d’experts (un groupe restreint

constitué de spécialistes issus de plusieurs disciplines), chargés de définir la nature des commandes

en tenant compte du contexte, de son histoire, de sa topographie urbaine et de ses besoins, sont mis

en place. Des commandes photographiques, littéraires ou historiques sont suggérées pour préparer ce

travail d’analyse. Le retour des tramways dans plusieurs grandes villes et les restructurations urbaines

nécessaires sont autant d’espaces de réflexion et d’expérimentations pour le renouvellement de la

commande publique. Les interventions d’artistes, de paysagistes, de designers ou d’architectes

permettent alors une véritable intégration de l’art dans la cité.

Plan détaillé : « La politique culturelle en France »

En se fondant sur son histoire et sur des considérations politiques, économiques et sociales (I),

la France a développé une politique culturelle interventionniste non dénuée de toute contradiction

(II).

I. Les fondements de la politique culturelle en France

a) Des fondements historiques et politiques

historique

La tradition d’intervention du pouvoir en matière culturelle remonte à François

Ier et Louis XIV, qui soutiennent les artistes par des bourses et commandent des

oeuvres d’art. Cette tradition s’est perpétuée après la révolution. Les commandes

publiques et les grands travaux tels que réalisés sous la présidence de Georges

POMPIDOU ou François MITTERRAND procèdent de cette même logique.

De plus, l’idée d’une politique culturelle a été érigée en un droit

constitutionnel. Le préambule de la constitution de 1946, repris dans celle de 1958,

stipule que la « nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction,

à la formation professionnelle et à la culture. ». Dans cette logique, le ministère de

la culture, créé en 1956 sous la direction de d’André MALRAUX, est une grande

nouveauté; il regroupe des domaines autrefois dispersés : les arts et lettres

relevaient jusque-là de l’éducation et le cinéma de l’industrie. L’existence de ce

ministère est, du reste, une spécificité française.

politique

Pour un auteur comme Adam SMITH, la culture est une nécessité politique.

Elle dissipe, comme il le dit, la mauvaise humeur des nations. Une vie culturelle

riche, un grand nombre de spectacles…améliorent la qualité de vie générale. Les

spectacles et les fêtes contribuent à apaiser les tensions collectives.

Ainsi, l’Etat organise-t-il des festivals et événements qui sont autant de rituels

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modernes qui assurent la cohérence du lien social. La vie culturelle d’un pays est

gage de liberté. L’art est un élément essentiel de la vie politique en démocratie.

Les oeuvres d’art révèlent les conflits, posent les questions de fond; le théâtre

est un lieu de réflexion politique, c’est d’ailleurs pourquoi les régimes totalitaires

ont tous encadré leurs artistes et généré un art officiel.

La culture est un élément du prestige international d’un Etat. A ce titre, il est

un enjeu de pouvoir.

b) Des considérations économiques et sociales

économiques

Le soutien à la création artistique aurait d’abord des conséquences indirectes

sur les industries culturelles. Le théâtre est un laboratoire de recherche et un vivier

pour le cinéma, le cinéma d’auteur pour le cinéma grand public, lequel engendre

d’importants profits.

De la même façon, les arts et la culture contribuent au tourisme. En France,

l’investissement culturel est ainsi devenu partie intégrante des politiques

d’aménagement du territoire. Le conflit des intermittents de l’été 2003 a rappelé,

s’il le fallait, que les festivals, au-delà de leur impact culturel, ont également un

impact parfois de tout premier plan pour les économies locales.

Enfin, au niveau international, l’existence d’une vie culturelle riche et de haute

qualité est un argument pour la venue d’étudiants étrangers comme pour

l’installation de sièges sociaux de multinationales ou d’organisations

internationales. Dépenser pour la culture, c’est attirer des populations fortunées qui

dépensent sur place leurs revenus.

L’intervention de l’Etat en matière culturelle est également justifiée par la

particularité du produit culturel. Si les arts ont bien une influence positive sur la vie

économique, c’est sous la forme d’une externalité. De fait, le bien culturel a un

caractère de bien collectif : sa consommation par un individu n’est pas exclusive de

la consommation de la même quantité du même bien par un autre individu. Il est

indivisible et profite globalement à l’ensemble de la communauté. Ainsi l’Etat, en

répartissant le financement de ce bien entre tous les contributeurs fiscaux, évite

qu’une partie des citoyens adoptent un comportement de « passagers clandestins »,

c’est-à-dire se refusent à financer un bien dont ils profitent, directement ou

indirectement.

Enfin, le développement culturel, par les aides à la création, a pour but de

constituer un legs pour les générations futures; et l’entretien du patrimoine vise à ne

pas épuiser les biens dont nous avons hérité.

Sociales

Des considérations sociales sont également présentes dans la politique

culturelle de la France. Elle vise à assurer un minimum de subsistance aux artistes.

En effet, même si les chiffres concernant l’écart sont variables et controversés, les

artistes touchent globalement moins que les autres professions. Il existe de grandes

disparités entre les générations (le salaire augmente plus qu’ailleurs avec l’âge) et

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entre les branches (les acteurs et metteurs en scène sont mieux payés que les

danseurs et les musiciens). Il existe surtout d’énormes disparités entre les

individus : certaines stars ont des revenus très élevés, tandis que la majorité des

artistes se contentent de revenus très faibles.

Les carrières des artistes sont incertaines; le succès peut ne jamais venir; il peut

ne pas durer, d’autant plus que le monde des arts entretient modes et reniements

pour des raisons commerciales (renouvellement des produits qui incite à la

consommation).

L’organisation même de l’activité, autour de projets, entraîne un recours massif

à l’intermittence, qui là encore n’assure pas la stabilité aux artistes. Pour s’assurer

une certaine stabilité, ou tout simplement parce qu’ils ne parviennent à vivre de leur

activité artistique, particulièrement dans leur jeunesse, les artistes exercent une

activité secondaire. Celle-ci peut être directement en lien avec leur art

(enseignement de la musique pour les musiciens…), ou plus distante (vendeur à la

FNAC, hôte d’accueil pour les comédiens).

II. Une politique culturelle très interventionniste et non dénuée de contradictions

a) Les modes d’interventions des collectivités publiques

La politique culturelle se traduit par un interventionnisme qui est d’abord

financier. Le budget de l’Etat comme celui des collectivités territoriales (cf.

« Eléments chiffrés ») permettent de financer des activités culturelles soit

directement par des subventions, soit indirectement par la construction de biens

d’équipement, par exemple. Ce n’est d’ailleurs pas toujours le budget du ministère

de la culture qui porte les projets. Le ministère de l’éducation nationale ou même

dans une moindre mesure d’autres ministères contribuent également à la mise en

œuvre de la politique culturelle en France.

Ensuite, l’intervention de l’Etat est également réglementaire : quotas imposés

aux chaînes nationales et radios, statut particulier pour les intermittents du

spectacle…

Enfin, les budgets publics n’étant pas extensibles, l’Etat comme les

collectivités territoriales essayent de favoriser la pratique du mécénat privé. Si

celui-ci est une pratique très ancienne, qui remonte à l’Antiquité, il est aujourd’hui

le mode de financement principal de la culture dans les pays anglo-saxons,

notamment aux Etats-Unis. La France reste encore en retrait par rapport à ces

modèles, mais tente de développer cette pratique par des incitations fiscales.

b) Une politique non dénuée de toute contradiction

Le ministère de la culture, à mi-chemin de l’éducation et de l’industrie, doit

remplir une double mission : favoriser d’une part l’entretien du patrimoine et la

création culturelle et favoriser d’autre part l’accès du plus grand nombre à la

culture. Or ces deux missions sont parfois en contradiction l’une avec l’autre. Le

débat se centre autour de l’opposition entre élitisme et démocratisation de la

culture. En effet, ce sont les plus riches et les plus instruits qui vont au spectacle, au

musée…Une politique de hausse de la qualité a de ce fait des effets anti-

redistributifs.

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De plus, certaines politiques de subventions signeraient le triomphe de l’intérêt

du producteur sur l’intérêt des consommateurs. L’excès de subventions dans

certains domaines peut entraîner une politique de surqualité, qui privilégie les

expositions les plus savantes, les spectacles les plus novateurs, par laquelle les

artistes cherchent à plaire avant tout à leurs pairs, et qui entraîne un risque de

rupture avec le public.

De la même façon, certains analystes remettent en question les effets externes

bénéfiques des dépenses culturelles. D’une part, rien ne prouve que des sommes

comparables dépensées autrement n’auraient pas entraîné des retombées

comparables, voire supérieures. D’autre part, dans le cas du tourisme, il est possible

que les dépenses culturelles n’enrichissent une ville ou une région qu’au détriment

des autres.

En outre, l’argument de l’externalité positive a des conséquences

potentiellement néfastes : la volonté de rechercher des retombées à court terme pour

toute dépense culturelle conduit à privilégier folklore et arts formatés au détriment

de projets plus ambitieux ou à plus long terme, dont les retombées sont moins

certaines.

Par ailleurs, les objectifs d’une politique culturelle peuvent être très différents,

voire contradictoires. Une politique de prestige international ou de qualité de vie

locale mobilise des moyens différents, mais qui peuvent s’exclurent. La culture

peut être conçue comme le maintien d’une tradition (nationale ou locale) qui

cimente une identité déjà existante, ou comme un lieu de recherche et de réflexion

sur l’avenir, qui ouvre le pays à l’étranger; les moyens à mettre en œuvre pour

favoriser ces deux pans peuvent également se télescoper.

La difficulté d’arbitrage entre ces contradictions fait de la politique culturelle

une politique difficile à manier.

Autres pistes de réflexion

Culture et science : La science fait-elle partie de la culture ? Existe-t-il une science de

la culture ?

Culture et enseignement : La culture doit-elle être enseignée ? En quoi l’enseignement

procède-t-il de la culture ?

Culture et cultures : Existe-t-il une culture universelle ? Y a t-il une culture générale

ou des cultures générales ?

Références et bibliographie

Jean DOMENACH : « Une culture qui ne serait pas une insurrection permanente de

l’esprit ne serait qu’une industrie de plus »

Marin KARMITZ : « Une société sans créations, sans créateurs est une société sans

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mémoire, sans identité, sans cohérence sociale – sinon celle de regarder les mêmes

émissions de « loisirs » à la même heure, et d’avoir ainsi une paix sociale qui est celle

des cimetières » extrait de « La création face aux systèmes de diffusion », rapport du

commissariat général au plan

FONTENELLE : « Un esprit cultivé est pour ainsi dire composé de tous les esprits

des siècles précédents »

Pierre DEHAYE : « Si le savoir est collecte et ramassage, la culture est travail de

l’esprit sur soi-même » extrait de « Un même mystère », Albin Michel, 1985

André MALRAUX : « On ne peut pas faire un art qui parle aux masses quand on n’a

rien à leur dire » extrait de « Antimémoires », Gallimard, 1987

Ferdinand FOCH : « Il n’y a pas d’homme cultivé, il n’y a que des hommes qui se

cultivent »

Mac MAHON : « La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert »

*

Pierre BOURDIEUX et Jean Claude PASSERON : « Les héritiers », 1964

Alain FINKELKRAUT : « La défaite de la pensée »; Gallimard, 1987

Hannah ARENDT : « Crise de la culture »; Gallimard, 1989

Julien BENDA : « La trahison des clercs »; Grasset, 1990

Walter POMMEREHNE et Bruno FREY : « La Culture a-t-elle un prix ? Essai sur

l’économie de l’art » Commentaire; Plon, Paris, 1993

Marc FUMAROLI : « L’Etat culturel. Essai sur une religion contemporaine »; Edition

de Fallois, 1991

Gilles LIPOVETSKY : « L’empire de l’éphémère : la mode et son destin dans les

sociétés modernes »; Gallimard, 1991