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Développer une culture de l’écrit, former des lecteurs effica- ces et motivés dans un monde en perpétuelle évolution: tel est l’un des enjeux principaux des systèmes éducatifs. Par ailleurs, il semble que nous soyons passés d’une ère centrée sur la clôture du texte et ses mécanismes, à une centration sur le sujet lecteur: former des lecteurs, former des lettrés. Si la lecture est une compétence, une activité scolaire, elle est aussi un plaisir... C’est une activité valorisée et valori- sante; lire est utile pour vivre mieux, pour être “plus”, pour mieux découvrir et penser le monde. Tel était le thème de la deuxième édition des “Entretiens Na- than de la francophonie” au centre culturel français dont nous reproduisons une des interventions, vu son importance, avec l’aimable collaboration de la mission culturelle française, les éditions Nathan et la librairie “La Phénicie”. Avec un bouquet d’articles variés, nous présentons à nos lec- teurs nos vœux pour une Nouvelle Année 2005, pleine de réussite, de progrès et d’espoir... Marcelle HARIZ JABBOUR Le Goût de Lire

Le Goût de Lire

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Page 1: Le Goût de Lire

Développer une culture de l’écrit, former des lecteurs effica-

ces et motivés dans un monde en perpétuelle évolution: tel

est l’un des enjeux principaux des systèmes éducatifs.

Par ailleurs, il semble que nous soyons passés d’une ère

centrée sur la clôture du texte et ses mécanismes, à une

centration sur le sujet lecteur: former des lecteurs, former

des lettrés.

Si la lecture est une compétence, une activité scolaire, elle

est aussi un plaisir... C’est une activité valorisée et valori-

sante; lire est utile pour vivre mieux, pour être “plus”, pour

mieux découvrir et penser le monde.

Tel était le thème de la deuxième édition des “Entretiens Na-

than de la francophonie” au centre culturel français dont

nous reproduisons une des interventions, vu son importance,

avec l’aimable collaboration de la mission culturelle française,

les éditions Nathan et la librairie “La Phénicie”.

Avec un bouquet d’articles variés, nous présentons à nos lec-

teurs nos vœux pour une Nouvelle Année 2005, pleine de

réussite, de progrès et d’espoir...

Marcelle HARIZ JABBOUR

Le Goût

de Lire

Page 2: Le Goût de Lire

2 didactique et formation

Le Goût de LireDeuxième édition des Entretiens Nathande la Francophonie au CCF de Beyrouth

Pour conduire de jeunes enfants à avoir durablement le goût de lire, les ensei-

gnants doivent conjuguer deux domaines de préoccupations: faire construire des

compétences solides et cultiver une appétence pour les écrits et leur décou-

verte.

Dans le but de faciliter la réalisation de ce vaste programme, le CCF de Beyrouth

a organisé des rencontres marquées par plusieurs interventions de haut niveau.

M. Frédéric Clavier, conseiller culturel près l’ambassade de France, a présenté

la “deuxième édition des Entretiens Nathan de la Francophonie” à Beyrouth.

Notre Collègue Maha Husseini Mazraani, qui a assisté à ces rencontres, nous a

communiqué le texte de l’intervention de Madame Viviane Bouysse “Les che-

mins de la lecture”. Son intervention a traité des enjeux, des facettes, des mo-

dalités et des conditions de cet apprentissage de la lecture, complexe et long.

Les chemins de la lecture

� 1- Les enjeux de l’apprentissage

1-1- Les finalités de l’enseignement de la lecture:

� technique: 2 facettes (décoder, comprendre)

� culturelle: faire découvrir et comprendre destextes, des auteurs, des “codes” qui organisentl’univers des livres

� réflexive: apprendre à utiliser la lecture pouraccéder à des connaissances nouvelles, pourconfronter des idées, pour son plaisir, pour or-ganiser sa vie sociale...

� d’ordre psycho-affectif: faire découvrir que lalecture aide à “grandir” - “Pour se connaître, ilfaut pouvoir s’imaginer.” Gianni Rodari

1-2- Les compétences requises du lecteur expert

� linguistiques: lexique et syntaxe

� encyclopédiques: savoirs culturels

� logique: capacités à établir des relations detous ordres (internes au texte, entre texte etcontexte, entre tel texte et d’autres textes,etc.)

� rhétoriques: connaissance des genres et desconstructions langagières associées.

� 2- Des étapes bien identifiées

2-1- A la maternelle: entrer dans le monde des

écrits et commencer à s’intéresser au fonctionne-

ment de la langue:

� la (re)connaissance de la langue écrite

� l’acculturation: beaucoup d’histoires racon-tées et/ ou lues

� la clé du code: le principe alphabétique

2-2- Au cycle II: apprendre à lire

� la reconnaissance des mots

� la compréhension des textes

� l’acculturation continue.

2-3- Au cycle III: savoir lire pour...

� la polyvalence de la lecture: droits du lecteur,“protocoles” de lecture

� les apprentissages disciplinaires avec la lec-ture

� la littérature en vraie grandeur

� la quantité, gage de qualité.

Page 3: Le Goût de Lire

didactique et formation 3

� 3- Des modalités et des conditionsfavorables

3-1- Une pédagogie rigoureuse, diversifiée, géné-

reuse

� rigueur des progressions

� diversité des “régimes” de lecture

� intégration de références culturelles dans laclasse: incarner un lecteur curieux, heureux

3-2- L’expérience de la sociabilité autour de la

lecture:

� interactivité autour des livres, surtout avec lespetits

� échanges entre lecteurs: s’enrichir du point devue des autres, partager ses bonheurs de lecteur

� rencontres d’auteurs, de lecteurs experts: lalecture ne se réduit pas à une affaire d’école

3-3- Des conditions “techniques”

� formation: littéraire, didactique, pédagogique

� équipements: des livres de toute sorte et d’au-tres écrits.

Viviane Bouysse*

Pour donner goût à la lecture:Le livre [Par Hélène Waysbord*]

Approcher la lecture et susciter le goût delire à travers la matérialité de l’objet livre et deses différentes composantes; la fabrication dulivre, son histoire, son évolution appréhendéescomme autant de chemins vers le texte. La ma-niement, la découverte sensible qui n’excluentaucun public, y compris les handicapés, consti-tuent le premier accès pour aller du support aucontenu.

Sur le plan didactique:

A l’époque de la photocopie, de la dispersiondans le virtuel, de l’éclatement d’informationset du couper /coller, le livre ancre la formationdans une configuration stabilisée. Le livre cons-titue pour l’élève une totalité organisée, un dé-but, une fin, c’est-à-dire un parcours et desperspectives construires. Il accompagne laconstruction de soi, surtout au début de la scola-rité, en constitue l’outil de référence permettant,

sans exclure aucune des technologiesnouvelles, d’y accéder dans leur com-plexité.

Sur le plan visuel:

D’emblée, la mise en page et la typo-graphie sont des choix qui font sens.Aborder le livre comme scénographiepermet aux élèves de se retourner versleur environnement, pour l’interprétercomme un livre.

Sur le plan esthétique:

Le livre est inséparable de l’imagesous toutes ses formes: texte image dansles calligraphies ou calligrammes, pho-to, illustration, infographie. Texte etimage constituent une entité indisso-ciable où le visuel fait sens, où l’images’enrichit du texte selon un rapportcomlexe, mais jamais redondant.

* Hélène Waysbord est Inspectrice générale honoraire deFrançais en charge de l'Année du Livre à l'école en 2004.

P R O G R A M M E

– Introduction de Frédéric Clavier

– Les chemins de la lecture par Viviane Bouysse*

– Lecture d’Images écrites par Nada Moghaizel Nasr

– Le goût des autres Défense et illustration des anthologiesde textes à l’école par Didier de Calan

– Pause café - Visite productions des élèves et expositionNathan Syros

– Lecture d’Autres Images écrites de Nada MoghaizelNasr

– Pourquoi et Comment devient - on écrivain de littératurejeunesse par Janine Teisson

– Pour donner goût à la lecture: le livre par Hélène Ways-bord

– Lecture Des Choses simples par Nada Moghaizel Nasr

– Conclusion par Didier de Calan

* Vivianne Bouysse a été institutrice maître formateur puis psychologue scolaire pen-dant 15 ans. Ensuite elle est inspectrice de l’éducation nationale puis responsable deformation des inspecteurs du premier degré pendant 11 ans. Depuis 1998, elle estchef du burreau des écoles à la direction de l’enseignement scolaire.

Page 4: Le Goût de Lire

4 didactique et formation

La lecture est-elle solubledans le schéma narratif?

Oscillant entre “textualisme” et “livrisme”, la péda-

gogie de la lecture semble privilégier l’étude du

fonctionnement des écrits au détriment de

l’acquisition d’une compétence culturelle de lec-

teur.

L’école prend en compte dans ses program-mes la diversité des écrits. La didactique de la lec-ture se construit sur des outils issus de recherchessur la langue et les discours, sur le lecteur qui ap-prend ou sur les pratiques de lecture. Or, plusl’écrit - donc la lecture - et les moyens d’enseigne-ment se diversifient, plus cela se traduit par des ac-tivités formelles. Pour les apprentis lecteurs, lesexpériences de lecture sont des exercices à proto-cole uniformisant, renvoyant à un référentiel decompétences sous-entendus par des options théori-ques formalistes. On vise plus l’appropriation demodèles invariants et en nombre limité, que l’in-vestigation des significations, foisonnantes et fluc-tuantes. L’analyse suivante met en évidence desaspects récurrents de cet enseignement, plus conçucomme une évaluation permanente de comporte-ments stéréotypés que comme un processus deconstruction d’une pratique sociale et culturelle.Sans nier l’utilité des activités décrites ni leurs pré-supposés théoriques, il s’agit de les restituer et deles réorienter dans le sens d’un apprentissage abor-dé comme l’accès à un univers saturé de phénomè-nes signifiants: option pédagogique d’autant plusdéfendable que les enfants sont jeunes et quel’école constitue pour beaucoup le seul lieu de lec-ture.

Des couvertures, albums et bibliothèques

Couvertures de livres, albums, bibliothèques,demeurent des supports d’exercices déculpabili-

sants (on utilise les livres) n’ayant qu’un rapportlointain avec la lecture; les élèves deviennent desanalystes en herbe qui utilisent les écrits moinspour ce qu’ils portent que pour ce qu’il faut en sa-voir scolairement.

Rares sont les classes où l’on ne traite pas descaractéristiques des couvertures de livres: auteur,illustrateur, éditeur, titre, accroche de quatrième...L’objet ainsi décomposé perd toute significationpour le lecteur qui est dans la même situation quelorsqu’il analyse une phrase. De même lorsqu’onfait anticiper l’histoire à partir de la couverture:avec si peu de détails, l’élève devine plus qu’il neraisonne1. En fait, on oublie que les couverturesorientent le regard du lecteur potentiel et qu’il fau-drait reconnaître la capacité à exprimer ses choix etrejets (trier) comme une compétence de lecteur àenseigner; par exemple à partir des couvertures. Enrendant aux couvertures leurs fonctions, le péda-gogue permettrait que se constitue un comporte-ment authentique consistant à exprimer des désirset des besoins de lecture, pas seulement à désignerdes composantes de couverture.

On observe la même chose concernant le travailsur le rapport image/texte dans les albums: re-mettre les images dans l’ordre, raconter à partird’elles, les apparier au texte... sont des tâches inté-ressantes si elles ne se confondent pas avec la lec-ture. Sinon, les élèves pour qui la lecture ne sepratique qu’à l’école s’en forgent une représenta-

Page 5: Le Goût de Lire

didactique et formation 5

tion faite de jeux-exercices. L’album se prête bienà cette dérive à cause de son public constitué dejeunes enfants qui ne savent pas ou pas bien lire.Les lectures plurielles, intégrales2 et commentéesde livres, devraient faire partie du processus d’en-seignement au même titre que les séances de cons-truction/déconstruction du lien image/texte.

De même, l’existence des bibliothèques quin’implique pas une modification de l’enseigne-ment ne modifie pas les pratiques des jeunes lec-teurs. Les activités se limitent aux tris etclassements sans but réel. En documentation, il y atrès peu de recherches en liaison avec les discipli-nes enseignées pour découvrir confirmer ou appro-fondir des connaissances. Et l’approche desfictions se limite à la lecture suivie alors que desactivités de type club de lecture pourraient être dé-veloppées avec profit: lire à plusieurs pour dé-battre, lire pour d’autres, dresser un palmarès delivres lus, découvrir un genre, un auteur, les ver-sions différentes d’un récit, dramatiser des lectu-res...

Le sens n’est pas soluble dans lesstructures

Au niveau textuel, l’utilisation de silhouettesvisuelles, algorithmes de textes et autres structuresdu récit, est omniprésente et caricaturale.

Ainsi, écrire dans le cadre d’une correspon-dance scolaire peut passer par des séances de tris,de repérage de “blocs” typographiques, de puzzleou de réécriture d’une partie effacée, l’analyse for-melle de la lettre occultant l’intention initiale. Il enest de même des textes prescriptifs: le montaged’un objet est souvent précédé d’une initiation à lalecture de la notice (visualiser les “blocs”: titre, in-grédients, ustensiles, opérations; reconstituerl’ordre des opérations). Bien que matérialisée pardes exercices, la lecture devient une abstraction:ici, la technologie - ou la correspondance scolaire -est posée d’abord comme un problème d’identifi-cation d’un type d’écrit. Or, la compréhension netient pas à un quelconque savoir lire spécifique deces textes mais à leur fonctionnement réel.

Un autre domaine où la pédagogie de la lecturepêche par simplisme, est celui de l’utilisation desalgorithmes des textes. La description, par le biaisde la tâche de repérage des éléments d’un portrait,en fournit un bon exemple. D’abord, on privilégiele repérage circonscrit (un passage) alors qu’en de-hors des présentations de personnages, les portraitssont dispersés sous forme de notations descripti-ves, choisies en fonction de nécessités narratives.Ensuite, on oublie que la compréhension du per-sonnage passe autant par ce qu’on en dit (descrip-tion) que par ce qu’il fait (narration) ou ce qu’il dit(dialogue). On peut ne pas voir qu’un personnageest courageux, menteur, etc., parce que cette quali-té n’est pas nommée (le courage de X ou X estmenteur), mais se déduit des actes (X affronte desadversaires) ou des paroles (X dit un mensonge).Le sens passe moins par l’isolement de données ty-piques que par les liens établis entre des donnéesdiscursives différentes. Ceci implique de bien po-ser le problème: par exemple, comprendre c’est sedemander “qui est le personnage” avant “commentest-il décrit?” qui n’est qu’un moyen de valider laréponse à la première question.

Concernant la lecture des récits intégraux, leproblème soulevé demeure. La tendance majori-taire consiste à corréler compréhension et mise àjour d’une structure. Pour cela, on se réfère sou-vent au schéma quinaire3 alors que tous les récitsne fonctionnent pas selon ce modèle. Surtout, il nefaut pas confondre la restitution d’une histoire ens’aidant du schéma narratif (ce qui n’est déjà pas simal) et l’accès à sa signification. Ainsi, une classea étudié trois récits: un conte merveilleux, l’épi-sode du cyclope dans l’Odyssée, et un mythe in-dien nord américain racontant d’où viennent lapluie et l’arc-en-ciel. Chaque fois, la mise en évi-dence des cinq parties du schéma narratif a margi-nalisé la recherche de la signification en questionspréparatoires, expression du sentiment général, re-levé de données. Enfin, un tableau de recueil desétats initiaux, perturbations, etc., a montré qu’unconte merveilleux égale un épisode d’épopée an-tique, égale une légende... Or, l’important pourcomprendre ces textes, c’est moins leur schéma di-recteur commun que leurs spécificités: le merveil-

Page 6: Le Goût de Lire

6 didactique et formation

leux, exprimé dans notre exemple parl’humanisation d’objets, caractéristique de l’ima-ginaire enfantin; la primauté de l’intelligence surla force bestiale en repérant ce qui oppose Ulysseau Cyclope; l’explicitation magique d’un phéno-mène naturel dans la légende indienne, par compa-raison avec son explicitation scientifique.

Ces outils visent avant tout la théorisation demécanismes constitutifs des discours. Ils permet-tent de dégager des catégories formelles, pas dessignifications. Sans nier leur rôle pédagogique ilfaut en établir les limites: le sens passe moins par lerepérage premier de structures abstraites que par lasocialisation des écrits, c’est-à-dire par leur ins-cription dans une perspective de communicationclairement affirmée.

L’enseignement de la lecture fait sonmarché

L’acquisition de comportements de lecteur ensituation est aussi importante que celle de techni-ques de décryptage. Pour cela, on a pensé à diversi-fier l’offre de lecture afin de provoquer en retour ladiversification des pratiques. Ainsi, les écrits dansleur diversité ont fait irruption à l’école, vite rattra-pés par des options didactiques et pédagogiquesqui les ont réduits à des sujets d’exercice. Les ma-nuels scolaires illustrent cette dérive, qui sau-poudre leurs pages d’exemples décontextualisés:lettres, notices, tableaux, etc. De même, en BCD,on privilégie les animations qui prennent la formed’exercices: le puzzle de couverture est plus sou-vent reconduit que le défi lecture; les rondes de li-vres, à partir des composantes de couverture sereproduisent plus que les palmarès de livres néces-sitant des lectures intégrales, discutées... Le péda-gogue pense aussi peut-être que la fuite en avantdans l’offre suffit à créer la demande de lecture

chez l’apprenant. Or, les activités proposées, fus-sent-elles variées et ludiques, ressortissent d’unrapport solitaire - scolaire - entre le lecteur et letexte: ces procédures standardisées, donc évalua-bles (déchiffrement, connaissances factuelles...)sont privilégiés au détriment des buts qui nécessi-tent d’apprendre à socialiser la lecture. En gagnantla maîtrise du code écrit, l’apprenti-lecteur entre ensolitude4 s’il n’est pas membre a priori d’un réseaude connivence (la famille surtout) demandeurd’échanges à partir de la lecture. Apanage de l’en-seignant, la demande se limite aux performances àsanctionner, alors qu’une véritable compétence delecteur a plus de chances de s’établir lorsqu’on ap-prend aussi à s’inclure dans des réseaux de lecturevariés et motivés. Les clubs de lecture, mini-collo-ques, rencontres avec des professionnels du livre etde l’écriture, enquêtes et publications diverses,etc., constituent autant d’occasions de dire qued’apprendre à lire, authentiquement.

Christian LOMBARDINI

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Adam J.-M, Éléments de linguistique textuelle, Paris, Marda-ga, 1990.

Butlen M., “L’offre de lecture à l’école”, in Didactique de lalecture, regards croisés, Toulouse, Presses Universitairesdu Mirail, 1996.

Butlen M., Couet M. & Desailly L., Savoir lire avec lesBCD, CRDP-Créteil, 1996.

Cassagnes P., Garcia-Debanc C. & Debanc J.-P., 50 activi-tés pour apprivoiser les livres en classe ou en BCD, CDDPTarbes & CRDP Midi-Pyrénées, 1994.

Chartier A.-M. & Hébrard J., Discours sur la lecture1880-1980, Paris, BPI-Centre G. Pompidou, 1989.

Les Cahiers Pédagogiques N°380,

Janvier 2000

1. Au contraire, si l’histoire est une machine à lire la couverture (Denis Roche a donné le livre commeune machine à lire le titre) son utilisation a posteriori devient plus riche.

2. C’est-à-dire respectant la solidarité image/texte.3. État initial/perturbation/action(s)/Résolution/état final.4. De la découverte silencieuse des textes, aux questionnaires écrits puis aux corrigés collectifs

oraux.

Page 7: Le Goût de Lire

didactique et formation 7

Évaluer des compétences,ou ne pas se tromper de cible

Jamil est enseignant defrançais (langue seconde d’en-seignement) en 9e année del’enseignement de base. Pourévaluer les acquis de ses élè-ves en langage oral, il organiseune séance d’“exercices struc-turaux oraux”. Il a construitune cinquantaine de phrasestrès proches de celles qui ontété travaillées préalablementen classe: il tire au sort unephrase, la lit devant tous lesélèves et demande à l’und’entre eux de la transformerselon certains paramètres cor-respondant aux objectifs visés.Chaque élève doit ainsi trans-former oralement trois phrases.

L’épreuve d’évaluationconstruite par Jamil est inté-ressante: elle porte sur l’oralalors que ce domaine fait rare-ment l’objet d’évaluation, ellese fonde sur une démarchesystématique en fonction desobjectifs poursuivis, elle offreaux élèves plusieurs possibili-tés de montrer ce qu’ils saventfaire, elle évalue des perfor-mances sur lesquelles un ap-prentissage a réellement étéeffectué, l’aspect “tirage ausort” garantit une certaine ob-jectivité, etc.

Néanmoins, elle présentedifférentes difficultés qui fontqu’au bout du compte on peutémettre certaines réserves, àpartir d’une triple question:cette épreuve est-elle perti-nente, valide et fiable?

Suite à notre demande à Monsieur

Xavier ROEGIERS directeur du

BIEF, cet article a été envoyé de

Bruxelles par Monsieur Fran-

çois-Marie GERARD, directeur ad-

joint.

Il s’agit de trois caractéristiques essentielles, différentes mais com-plémentaires, de toute épreuve d’évaluation:� la pertinence est le caractère plus ou moins approprié de l’épreuve, se-

lon qu’elle s’inscrit dans la ligne des objectifs visés (DE KETELE etalii, 1989);

� la validité est le degré d’adéquation entre ce que l’on déclare faire (éva-luer telle ou telle dimension) et ce que l’on fait réellement;

� la fiabilité est le degré de confiance que l’on peut accorder aux résultatsobservés: seront-ils les mêmes si on recueille l’information à un autremoment, avec un autre outil, par une autre personne, etc.?

Pour comprendre l’importance de ce triple questionnement, il est in-téressant de se référer à l’exemple du tir à l’arc proposé par LAVEAULTet GREGOIRE (1997, 2002) et adapté par DE KETELE et GERARD(2004). Imaginons qu’on souhaite évaluer la compétence d’un trappeur àchasser du gibier grâce à son arc. Il doit pour ce faire être capable de réa-liser un tir groupé sur une cible mouvante. Deux épreuves sont mises enplace: d’une part, un tir de 5 flèches sur une cible classique, et d’autrepart, un tir de 5 flèches sur une cible mouvante semblable à du gibier. Lessituations suivantes peuvent dès lors exister:

Dans la situation A, le tir est non fiable parce que dispersé sur toute lasurface de la cible fixe. Il est non valide, parce que la mesure manque deprécision et ne peut attester l’atteinte de l’objectif. Il est enfin non perti-nent puisqu’il ne correspond pas à l’objectif recherché et ne mesure doncde toute façon pas ce que je déclare vouloir mesurer. Dans la situation B, letir est groupé mais rate systématiquement la cible. Il est fiable (la mesuremontre que le tireur sait faire un tir groupé), mais non valide parce que

Page 8: Le Goût de Lire

8 didactique et formation

cette mesure ne me permet pas de vérifier qu’il estcapable d’atteindre la cible.

Dans la situation C, le centre de la cible,c’est-à-dire l’objectif, est atteint et la mesure estdonc valide, mais elle n’est pas fiable parce qu’onne peut certifier que ce sera toujours le cas.

Dans la situation D, le tir est groupé et touche lemille, mais la cible n’est pas la bonne (par rapportà la compétence visée). La mesure est donc fiableet valide, mais non pertinente.

Les situations E à H présentent des situationspertinentes par rapport à la compétence visée. Lessituations E, F et G ont cependant des problèmesde validité et/ou de fiabilité, alors que la situationH détermine une mesure à la fois fiable, valide etpertinente. Elle seule permet de certifier que letrappeur est compétent.

Ces derniers mots sont importants: l’évaluationa pour objectif de certifier que le trappeur est com-pétent pour chasser du gibier, tout comme Jamilvoudrait certifier, grâce à son épreuve d’évalua-tion, que les élèves sont compétents pour s’expri-mer oralement dans une conversation.

Quelle est cette compétence? Au terme de la 9e

année de l’enseignement de base dans l’apprentis-sage du français, la compétence suivante pourraitêtre visée:

Dans une situation de communication orale (exposé,conversation) et à partir d’un support, produire unmessage oral correspondant aux divers actes de parolede la vie courante.

Caractéristiques du support:

- écrit: documents authentiques(courts, clairs et accessibles)

- oral: document sonore de courte duréedocument audio et/ou visuel

Si Jamil évolue dans un système d’enseigne-ment qui a adopté une telle compétence commeobjectif de formation, on voit tout de suite quel’épreuve d’évaluation qu’il a conçue n’est paspertinente par rapport à cette compétence: ce n’estpas parce que les élèves seraient à même de trans-former les phrases proposées qu’ils pourraient pro-duire des actes de parole dans une situation decommunication. La maîtrise de tels exercicesoraux structuraux peut bien sûr être un passagepour pouvoir produire des actes de parole: c’estune ressource au service de la compétence. Mais siJamil souhaite évaluer la compétence, il ne peut se

contenter d’évaluer une ressource. Il doit - pourpouvoir avoir une évaluation pertinente - présenterune situation d’évaluation qui correspond à lacompétence, c’est-à-dire ici une situation de com-munication complexe qui permettra aux élèves deproduire le message oral attendu. Par exemple,l’élève est invité à participer à un débat à la radiosur le développement urbain. Il devra présenteroralement durant 5 minutes sa position en tenantcompte de son contexte de vie. Ensuite, un débataura lieu pendant lequel il devra interagir avecd’autres intervenants (d’autres élèves).

L’épreuve élaborée par Jamil n’est donc paspertinente, du moins s’il s’inscrit dans une ap-proche par les compétences, qui cherche à déve-lopper la possibilité par les apprenants demobiliser un ensemble intégré de ressources pourrésoudre une situation-problème appartenant à unefamille de situations (LE BOTERF, 1994; REY, 1996;PERRENOUD, 1997; FOUREZ, 1999; DE KETELE,2000, 2001 a et b; ROEGIERS, 2000, 2003, TILMAN,2000; DOLZ & OLLAGNIER, 2002; JONNAERT,2002; REY, CARETTE, DEFRANCE & KAHN, 2003,AUBRET, J. & GILBERT, P., 2003).

Cette épreuve présente également des difficul-tés en termes de validité, c’est-à-dire qu’elle nepermet pas d’évaluer pleinement ce qu’elle déclarevouloir évaluer, à savoir la maîtrise de la transfor-mation de phrases. En effet, les phrases proposéessont “très proches de celles qui ont été travailléespréalablement en classe”. Il est important den’évaluer que des objectifs qui ont été préalable-ment appris, mais cela ne signifie pas que les maté-riaux doivent être identiques à ceux utilisés durantl’apprentissage. Si c’est le cas, l’évaluation portesur des “savoir-reproduire” et non pas des “sa-voir-faire”. En d’autres termes, l’épreuve ne per-met pas de certifier que les élèves sont capables de“transformer des phrases”, mais bien de “redire lestransformations de phrases telles qu’elles ont étéapprises”. Pour toute évaluation, il importe que lessituations proposées soient nouvelles, sauf bien sûrsi l’objectif est d’évaluer la restitution de défini-tions, de propriétés, de dates... Dans une approchepar les compétences, cet objectif de restitution nesera jamais au cœur de l’évaluation, car la compé-tence se situe à un niveau de résolution de problè-mes et non pas de reproduction.

L’épreuve proposée par Jamil présente égale-ment des difficultés de fiabilité, ce qui signifiequ’on ne peut pas avoir une confiance totale dansles résultats auxquels elle conduira. Chaque phrase

Page 9: Le Goût de Lire

didactique et formation 9

tirée au sort est lue devant toute la classe et l’élèveconcerné effectue les transformations. Avec de tel-les conditions de passation, être le premier élèvequi répond ou le dernier n’est pas indifférent: il estvraisemblable que le dernier élève aura eu l’occa-sion de s’entraîner mentalement. Comme il n’estpas possible de certifier que sa production seraitidentique s’il avait été le premier élève, on peut af-firmer que l’épreuve n’est pas fiable. C’est une desdifficultés des épreuves orales: pour assurer leurfiabilité, il faudrait mettre en place un dispositifqui évite l’influence des autres sur la production,ce qui implique dans la plupart des cas une passa-tion individuelle de l’épreuve orale. C’est vrai quecela alourdit le processus, mais à quoi bon évaluersi l’évaluateur ne peut pas faire confiance aux ré-sultats de l’évaluation!

L’épreuve discutée est donc à la fois non perti-nente(1), non valide et non fiable. Elle correspond àla situation A de l’exemple du trappeur chassant dugibier.

Il n’est certes pas facile d’élaborer des épreuvesentièrement pertinentes, valides et fiables. L’ap-proche par les compétences ne facilite certainementpas les choses: elle amène à évaluer les acquis des

élèves à travers des situations complexes exigeantune production elle aussi complexe de la part desélèves. Les techniques classiques permettant d’as-surer et de vérifier la validité et la fiabilité desépreuves d’évaluation ne peuvent pas être utiliséestelles quelles (DE KETELE & GERARD, 2004).

L’important nous semble être que tout évalua-teur se pose des questions par rapport à l’épreuvequ’il est en train d’élaborer et/ou d’utiliser:� l’épreuve est-elle pertinente? Permet-elle d’éva-

luer les objectifs visés par le système éducatif?Correspond-elle aux compétences à développer?

� l’épreuve est-elle valide? Évalue-t-elle bien ceque je déclare évaluer? Le dispositif me per-met-il de le garantir? Mes critères permettent-ilsde vérifier ce que je déclare vouloir vérifier?

� l’épreuve est-elle fiable? Obtiendrais-je les mê-mes résultats si j’évalue à un autre moment? Sic’est quelqu’un d’autre qui fait l’évaluation?L’utilisation que je fais des critères est-elle lamême pour tout le monde?

François-Marie GERARD

Directeur Adjoint du BIEF, Bureau Internationalpour l’Enseignement et la Formation

BIBLIOGRAPHIE

AUBRET, J. & GILBERT, P. (2003). L’évaluation des compé-tences, Sprimont: Mardaga.

DE KETELE, J.-M. (2000). En guise de synthèse: Convergen-ces autour des compétences, in BOSMAN, C., GERARD,F.-M, ROEGIERS, X. (Éds). Quel avenir pour les compé-tences? Bruxelles: De Boeck Université, pp. 187-191.

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(1) Du moins si elle s’inscrit dans un enseignement fondé sur l’approche par les compétences.

Page 10: Le Goût de Lire

10 fiches pratiques

Andrée Chedid:L’escapade des saisons

Les poèmes présentés dans cette séquencesont extraits d’un recueil publié au début del’année 2003, alors qu’Andrée Chedid obtenait leprix Goncourt de la poésie pour l’ensemble de sonœuvre. Ils permettront, aux enseignants qui le dési-rent, d’aborder l’étude d’un court recueil poétiqueen se consacrant à l’exploration d’un thème fré-quemment abordé par l’auteur de Rythmes: celuide la fuite du temps. Cette séquence comporte éga-lement un poème inédit d’Andrée Chedid.

Descriptif de la séquence

Support et orientation

Les cinq poèmes, reproduits ci-après, sont ex-traits d’une section de Rythmes qui comporte dixpoèmes rassemblés sous le titre “L’escapade dessaisons”. Nous pensons que les cinq autres textesdu recueil pourraient être lus aux élèves et affichésdans la classe.

Objectifs d’ensemble

• Dégager les spécificités sémantiques et formel-les d’un court recueil d’Andrée Chedid.

• Faire découvrir aux élèves l’un des thèmes ma-jeurs de la poésie lyrique.

• Faciliter le passage à l’écriture créative des élè-ves et à l’oralisation du texte poétique.

Référence aux programmes

Écriture: sensibilisation à l’écriture créative.

Oral: mise en voix de textes poétiques.

SÉANCE � Prise d’indices

Objectifs et déroulement: la séance d’intro-duction a pour objet de présenter les poèmes

d’Andrée Chedid et d’amener les élèves à émettredes hypothèses de lecture à partir d’un relevé d’in-dices. Ce travail implique que tous les poèmes ducorpus leur aient été préablement distribués.

Questions

Le paratexte

1) À l’aide d’un dictionnaire ou de votre ma-nuel de français, définissez aussi clairement quepossible la notion de paratexte.

2) En vous fondant sur une observation des tex-tes distribués, dites ce que nous apprennent les di-vers éléments du paratexte.

Le titre du recueil

1) Étudiez le titre donné à cette courte sectionde Rythmes en vous fondant:

• sur le sens dénoté des deux noms qui le compo-sent;

• sur les divers sens connotés de ces noms.

2) Quel(s) thème(s) ce groupe nominal intro-duit-il?

Les textes

1) En vous appuyant sur une analyse deschamps lexicaux, montrez que chacun des poèmesdistribués aborde cette thématique.

2) La liste suivante comporte le titre des dixpoèmes du recueil d’Andrée Chedid. Réalisez untableau dans lequel vous indiquerez, chaque foisque vous le pourrez, le rapport que vous pouvezétablir entre chacun de ces titres et le thème géné-ral du recueil.

1. L’escapade des saisons 6. Maisons

Page 11: Le Goût de Lire

fiches pratiques 11

2. À la solde du soleil 7. Marées

3. Cheminer 8. Actualité

4. Rappelle-moi 9. L’Après

5. Pierres 10. Jeunesses

Éléments de réponse

Le paratexte

1) La notion de paratexte désigne les divers élé-ments qui entourent le texte proprement dit: nomde l’auteur, titre et sous-titre, références éditorialesde l’ouvrage, éventuelles préface et postface, notesde bas de page, etc.

L’observation du paratexte peut permettred’identifier les conditions d’énonciation d’uneœuvre et contribue à déterminer les attentes du lec-teur. Son action est de l’ordre de l’influence.

2) Les divers éléments du paratexte permettrontaux élèves d’identifier:

• le nom de l’auteur: Andrée Chedid;

• le titre du recueil: Rythmes;

• le titre de la section présentée: “L’escapade dessaisons”;

• le nom de l’éditeur: Gallimard;

• la date de publication: 2003.

Le titre du recueil

1) Analyse lexicale du titre “L’escapade dessaisons”.

� Sens dénoté

• Le terme “escapade”, issu de l’italien “scappa-ta” qui signifie “échappée”, désigne le fait des’échapper d’un lieu ou d’une situation;

• le terme “saison” désigne chacune des quatregrandes divisions de l’année; une époque ca-ractérisée par le climat et l’état de la végéta-tion.

� Sens connotés

Ce titre, qui est emprunté au premier poème durecueil (”Je t’aime / Dans l’escapade des sai-sons”, v. 20), fait métaphoriquement référence à lafaçon dont s’échappent les saisons de la vie.

2) Par ce groupe nominal, Andrée Chedid intro-duit le thème de la fuite du temps.

Les textes

1) En dépit de leurs différences, tous les poè-mes distribués aux élèves abordent cette théma-tique de la fuite du temps.

• “L’escapade des saisons” (Texte 1) fait référenceaux liens qui unissent le passé au présent (”Jet’aimais” / “Je t’aime”) et accorde une placeprépondérante à l’évocation du temps: “sousl’ombrage des ans” (v. 4); “Aux jardins del’aube” (v. 6); “Au déclin des jours” (v. 8);“Dans les foucades du printemps” (v. 18); “Auxportails du temps” (v. 24).

Titres Significations(s)

1. L’escapade dessaisons

Le temps nous échappe;

les saisons de la vie sont passagères.

2. À la solde du so-leil

Un jour, notre planète qui dépend dusoleil, s’éteindra.

3. Cheminer La vie est un chemin, une successiond’instants.

4. Rappelle-moi Le poète en appelle aux souvenirs.

5. Pierres Témoins du passé, les pierres résis-tent mieux que nous à l’usure dutemps.

6. Maisons Nos maisons “nous protègent desorages du temps”.

7. Marées Comme les marées, nos vies sontsoumises à des cycles. Le temps lesemporte vers de lointains rivages.

8. Actualité Profitons du jour présent, de ce quiest actuel.

9. L’Après Qu’y aura-t-il “après” la mort?

Qu’importe: l’essentiel est de vivrepleinement cette vie charnelle et pé-rissable.

10. Jeunesses La jeunesse est le printemps de lavie; après elle, d’autres saisons vien-dront.

Page 12: Le Goût de Lire

12 fiches pratiques

Texte 1:L’escapadedes saisons

Je t’aimaisDans l’orage des sèvesJe t’aimeSous l’ombrage des ans

Je t’aimaisAux jardins de l’aubeJe t’aimeAu déclin des jours

Je t’aimaisDans l’impatience solaireJe t’aimeDans la clémence du soir

Je t’aimaisDans l’éclair du verbeJe t’aimeDans l’estuaire des mots

Je t’aimaisDans les foucades du prin-tempsJe t’aimeDans l’escapade des saisons

Je t’aimaisAux entrailles de la vieJe t’aimeAux portails du temps.

Texte 2:À la solde du soleil

À force de n’existerQu’à la solde du SoleilLa Terre se lassera-t-elleDe la tenace orbite?À force de se plierAux mesures des astresLa Terre déclinera-t-elleSous l’emprise du temps?À force d’ignorerLe secret des planètesLa Terre succombera-t-elleAu vide sidéral?À force de se soumettreÀ cette course servileLa Terre en rébellionCherchera-t-elle d’autres issues?

Texte 3: Pierres

Les vieux mursAux pierres inégalesS’élèventSelon la mainLe lieuEt le hasardRugueux et tendresIls épousent les ansS’allient aux feuillagesNos rêves s’y agrippentEt les traversentParfois...

Texte 4: L’Après

Que m’importe cet “après”Au cœur blafardÀ la mémoire dissoute

Que n’importe d’errerLoin des chemins vécusD’enfoncer passions et sou-venirsDans l’océan impassibleQue m’importe de flâner

Loin des visages reconnusEt de m’ancrer dans l’infiniIrréversible?

Texte 5: Jeunesses

On eut beau la flatterCélébrer ses atoursMa jeunesse s’engouffraDans la gorge du temps

Elle cessa de fleurirPour rejoindre sans détresseLa trame usuelleQui mène à l’ultime champ

L’été prit le relais

D’autres et d’autres jeunessesS’aventuraient déjàEn leurs corps flamboyants.

• “À la solde du soleil” (Texte 2) laisse entendreque l’histoire de notre planète est temporaire,passagère, précaire, parce qu’elle dépend d’unsoleil qui finira par s’éteindre.

• “Pierres” (Texte 3) évoque “Les vieux murs” quirésistent au temps et “épousent les ans” (v. 8).

• Dans le poème intitulé “L’Après” (Texte 4),Andrée Chedid exprime sa volonté de ne passonger à cet “après” que délimite la mort, pours’attacher à la vivante proximité des “cheminsvécus” (v. 5) et “des visages reconnus” (v. 9).

• Avec “Jeunesses (Texte 5), poème sur lequel seclôt le recueil, l’auteur évoque la façon dont

“(sa) jeunesse s’engouffra / Dans la gorge dutemps” (v. 3-4).

2) Ce travail implique que l’on procède par as-sociation d’idées et recherche de connotations.(Voir tableau)

Prolongements

Recherche documentaire

Cette séance d’ouverture sera l’occasion defaire rechercher aux élèves des renseignements surla vie et l’œuvre d’Andrée Chedid. Au terme deleurs recherches, ces derniers rédigeront une no-

Page 13: Le Goût de Lire

fiches pratiques 13

tice biographique mettant en évidence les originessyrio-libanaises de l’écrivain; sa naissance auCaire en 1920; la parution d’un premier recueil enanglais, en 1943, sous le pseudonyme d’A. Lake(On the Trails of my Fancy); sa venue en France en1946; les grandes orientations de sa carrière litté-raire.

Lectures complémentaires

Au cours de la séquence, chaque élève pourraitêtre amené à lire une œuvre d’Andrée Chedid dansson intégralité, puis à préparer une fiche de lectureou une présentation orale de cette œuvre. Bien desouvrages pourront leur être proposés, parmi les-quels:

• des recueils de poèmes: Textes pour un poème;Poèmes pour un texte; Territoires du souffle(éditions Flammarion);

• des récits: La Maison sans racines; L’Enfantmultiple; Le Message (éditions Flammarion);Petite Terre, Vaste Rêve (éditions Pauvert). Ànoter que ce dernier recueil entretient d’éviden-tes relations avec Rythmes qui fut rédigé à lamême époque;

• un récit biographique, au titre évocateur, que laromancière consacra à sa propre mère: Les Sai-sons de passage (éditions Flammarion).

SÉANCE 2 � Pour une lecture de“L’escapade des saisons”

Objectifs et déroulement: cette troisièmeséance, consacrée à la lecture analytique du poèmequi donne son titre au recueil, permettra aux élèvesd’entrer pleinement dans l’univers poétiqued’Andrée Chedid. Les axes d’étude que nous pro-posons tendent à décrire le fonctionnement d’unpoème dont on ne cherchera pas à expliquer ou tra-duire les métaphores.

Questions

La structure du texte

1) Quelles particularités les diverses strophesde ce poème présentent-elles? Répondez à cettequestion en tenant compte des mètres utilisés, du

jeu des temps verbaux et d’une figure de construc-tion aisément identifiable.

2) Comment chaque strophe s’organise-t-ellesur le plan syntaxique? Justifiez votre réponse enindiquant la nature et la fonction de chaque groupede mots.

3) Quelle utilisation Andrée Chedid fait-elledes rimes dans ce poème? Répondez en vous ap-puyant sur des exemples précis.

Le chant d’amour

1) Par l’observation des pronoms personnels,dites quels sont les personnes qu’évoque et ras-semble ce poème.

2) Quel sentiment le poète exprime-t-il dans cetexte? Justifiez votre réponse.

3) De quelle manière les groupes nominaux dechaque strophe évoquent-ils le passé et le présent?

4) Quelle est, selon vous la tonalité de cepoème? Justifiez votre réponse.

Éléments de réponse

La structure du texte

1) Sur le plan structurel, ce poème présentetrois particularités aisément identifiables:

• chaque strophe du texte repose sur l’alternancede vers courts (”Je t’aimais”, v. 1 / “Je t’aime” ,v. 3) et de vers plus longs (”Dans l’orage des sè-ves”, v. 2 / “Sous l’ombrage des ans”, v. 4);

• le verbe aimer est conjugué à l’imparfait dans lepremier vers de chaque strophe (”Je t’aimais”,v. 1, 5, 9, 13, 17, 21), puis au présent dans le troi-sième vers (”Je t’aime”, v. 3, 7, 11, 15, 19, 23);

• l’ensemble du poème est rythmé par la repriseanaphorique de ces verbes qui donnent au lec-teur la sensation que chaque quatrain est com-posé de deux distiques correspondant au passéet au présent.

• Distique 1: “Je t’aimais / Dans l’orage des sè-ves” (� Passé)

• Distique 2: “Je t’aime / Sous l’ombrage des ans”(� Présent)

Page 14: Le Goût de Lire

14 fiches pratiques

2) Cette structure est renforcée par l’organisa-tion syntaxique de ces distiques qui présentent lemême schéma grammatical:

• Je (pronom sujet) t’ (pronom complément) ai-mais (verbe) aux jardins de l’aube (groupe no-minal étendu, complément circonstanciel).

On notera que les compléments circonstanciels,qui constituent les éléments variables du poème,reposent également sur la même structure gram-maticale puisqu’ils comportent (à l’exception duvers 10) un nom commun suivi d’un complémentdu nom:

• Dans l’estuaire (nom) des mots (complémentdu nom)

3) L’originalité formelle de ce poème résidedans la façon dont Andrée Chedid utilise la rime.On remarquera que l’auteur de Rythmes renonceaux rimes traditionnellement placées en fin devers, pour des rimes intérieures particulièrementsuggestives:

“Dans l’orage des sèves” / “Sous l’ombragedes ans” (v. 2 et 4); “Dans l’éclair du verbe” /“Dans l’estuaire des mots” (v. 14 et 16); “Dans lesfoucades du printemps / Dans l’escapade des sai-sons” (v. 18 et 20)

Cet élément de versification n’est pas exemptde signification: en opérant un tel glissement, lepoète enclôt la musicalité au sein même de sonpropre texte.

Le chant d’amour

1) L’emploi des pronoms personnels contribueà donner un caractère intimiste à ce poème qui meten relation un “Je” et un “Tu”.

Le pronom personnel sujet “Je” désignel’émettrice du poème (Andrée Chedid).

En recourant au pronom personnel “t’”, cettedernière s’adresse directement à son destinataire.

2) Par la répétition des groupes verbaux “Jet’aimais” / “Je t’aime”, Andrée Chedid fait del’amour le sentiment dominant du poème. L’inlas-sable répétition de ce verbe et son double ancragetemporel (passé / présent) démontrent que l’amouraspire au “dur désir de durer” dont parlait la

poésie de Paul Éluard. Ce verbe, répété à douzereprises, rythme le poème comme les heures ryth-ment le temps qui s’écoule.

3) Les groupes nominaux de chaque strophecontribuent à distinguer passé et présent.

La plupart reposent sur de subtils jeux d’oppo-sitions: l’aube et le crépuscule (strophe 2), l’impa-tience et la clémence (strophe 3); les “entrailles dela vie” et les “portails du temps” (strophe 6).

D’une façon générale, le premier groupe nomi-nal de chaque strophe connote la jeunesse, la nais-sance du jour et le renouveau de la nature, tandisque le second évoque le vieillissement, la tombéedu soir et la fuite du temps.

4) On remarquera, au terme de cette étude, que“L’escapade des saisons” présente toutes les ca-ractéristiques d’un poème lyrique: rédigé à la pre-mière personne et rythmé par des anaphores, cepoème exalte, sur un mode métaphorique, les sen-timents qu’éprouve le poète. Par l’évocation de lanature, de la fuite du temps et de l’amour, AndréeChedid retrouve des thèmes universellement por-tés par la poésie lyrique.

SÉANCE 4 � Poètes, vos papiers!

Objectifs et déroulement: cette quatrièmeséance est destinée à faire vivre un temps d’écri-ture créative aux élèves. On pourrait imaginer quele travail débute dans le cadre de la classe et sepoursuive individuellement, à la maison, pendantune période d’une dizaine de jours (à l’occasiondes vacances). Les productions feront ensuite l’ob-jet d’une présentation en classe et d’une petite ex-position au CDI.

Activités

Sujet

Andrée Chedid conçoit souvent ses poèmessous la forme de séries, ainsi qu’en témoignent lestitres suivants: Poèmes pour un texte; Textes pourun poème; Quinze verbes pour un parcours; Septtextes pour un chant; Sept textes pour un herbier.

Page 15: Le Goût de Lire

fiches pratiques 15

Le court recueil intitulé Terre re-gardée, paru en 1957, est égalementcomposé de poèmes dont les titres se res-semblent: “Terre secrète”; “Terre chaleu-reuse”; “Terre parcourue”; “Terreintérieure”; “Terre des soifs”, etc.

Comme Andrée Chedid, rédigez unesérie de poèmes que vous rassemblerezen un court recueil.

Guide de travail

� Sensibilisation

Si cela peut vous aider, inspirez-vousde ce texte inédit d’Andrée Chedid, ex-trait d’une courte série de poèmes inti-tulée “Cinq verbes pour une question”(voir document 2). Observez égalementle brouillon de ce poème (document 3):vous constaterez que l’écriture poétiqueest véritablement le fruit d’un travail.

� Rédaction

Plusieurs idées pourront vous per-mettre de constituer votre série. Vouspouvez choisir, par exemple:

• une période clairement définie pendantlaquelle vous écrirez chaque jour unnouveau poème: “Sept poèmes pourune semaine”; “Dix textes pour les va-cances d’automne”; “Douze vers pourune journée inoubliable”, etc.

• un même thème sur lequel vous porte-rez différents regards: “Trois chantsd’amour pour un vidage”; “Huit nomspour un enfant à naître”; “Poèmes desquatre saisons”; “Quatre saisons pourun poème”; “Cinq poèmes d’amour enguerre”, etc.

• une même attitude que vous adoptezpour différents sujets:

- “Écouter le vent”; “Écouter letemps”; “Écouter l’ami”; “Écouterl’envie”;

- “Peindre la nuit”; “Peindre le jour”;“Peindre la pluie”; “Peindrel’amour”, etc.

• une série de poèmes consacrés à dessentiments qui vous semblent impor-

tants: “Sept qualités pour une vie heureuse” (Amitié -Amour - Tendresse - Confiance - Tolérance - Respect - Pa-tience);

• une série de poèmes conçus à partir de classes de mots oude modes d’expression clairement définis: “Trois adjectifspour un paysage”; “Quatre verbes pour un ami”; “Sixnoms propres pour un voyage”; “Cinq verbes pour une ex-clamation”; “Farandole des conjonctions”; “Sarabandedes articles”, etc.

� Fabrication

Vous accorderez un soin particulier à la réalisation maté-rielle de l’objet-livre, qui pourrait tirer sa forme du sujet quevous aborderez. Quatre éléments devront être confectionnéspar vos soins:

• la couverture, qui peut être cartonnée ou plastifiée, conçueà la main ou avec un ordinateur;

• les feuillets, que vous fabriquerez à partir de feuilles pliéesou découpées, de papier de soie ou de tissu;

• la reliure, cousue ou agrafée, pour laquelle vous utiliserezune réglette serre-dos, une reliure spirale avec perforationou une toile encoltée;

• les illustrations (photographies, dessins à la plume, aqua-relles, etc.) qui figureront in-texte ou hors-texte.

Par Bruno DOUCEY

N.R.P. N° 2 - 2003

Page 16: Le Goût de Lire

16 fiches pratiques

Mobiliser ses idéesautour d’unthème d’étude

Définir encompréhension

• Dans quel(s) en-semble(s) le sujet est-ilcompris?

On comparera le sujetavec les autres éléments dumême ensemble.

Exemple: la violence.

• On comparera ainsi laviolence:

1. avec les autres for-mes de délinquance, le vol,le crime, les autres problè-mes de société: la pauvreté,le chômage;

2. avec les comporte-ments humains: la commu-nication, l’amour, lasollicitude;

3. avec des idéologies: lepacifisme, le socialisme.

C’est aussi une patho-logie, un moyen de s’affir-mer, une forme d’éducation,une pulsion, un moyen desurvie, un comportementsexuel, une forme de culture,un trait de caractère.

Définir uneextension

On recherche tous leséléments qui constituent laviolence.

L’agressivité, le si-lence, les rapports domi-nant/dominé, les degrés deviolence, le vandalisme, lesdégradations... mais aussile désarroi, les films, lesjeux vidéo, l’alcool, la

Comment aborder un thème aussi délicat que celuide la violence avec des élèves de collège? Leur inté-rêt pour un sujet de débat parfois difficile à parta-ger avec des adultes passe par la nécessité de lesamener à organiser leurs idées, qu’elles soient for-malisées en questionnement ou en argumentaire.

Les techniques souvent utilisées en documenta-tion, avant une recherche documentaire pour“questionner un objet d’étude”, s’avèrent fruc-tueuses dans cette perspective puisqu’elles per-mettent de construire progressivement desrelations de sens entre idées et notions apparen-tées au domaine dont on souhaite mener l’investi-gation. Elles peuvent soit donner lieu à un travailde recherche ultérieur, soit permettre de mener undébat en classe.

Et si on organisaitun débat?

drogue, la guerre, la cen-sure, les punitions...

Définir par latypologie

Violence...– physique,– verbale,– faite à soi-même,– psychologique,– légale,– gratuite,– sociale (inégalités),– politique,– familiale,– scolaire,– raciale,– médiatique,– sexuelle,– morale (sectes), etc.

Définir par lanégation

• Ce n’est surtout pas:– la douceur,– la cruauté,– l’autorité,– la loi,– la force,– nouveau, inévitable, gra-

tuit, une façon de ré-soudre les problèmes,

– à ne pas prendre au sé-rieux,

– ni à monter en épingle,– un problème uniquement

de jeunes.• Ne serait-ce pas:

– une déviance?– un moyen de pression?– un moyen de chantage?– la seule, la dernière solu-

tion, la solution finale?– la légitime défense?

Définir dans unrapportcause/conséquence

• D’où vient la vio-lence? Quelles sont ses ori-gines?– Est-elle apparue avec

l’homme? Est-elle ac-quise? innée?

– Quels facteurs la favori-sent?

– Est-elle provoquée parl’environnement,l’éducation? les rela-tions?

– Est-elle due à la peur, aumanque d’argent, auxinégalités, à une patho-logie, à la concurrence,à la souffrance, au pou-voir, à l’incitation deleaders?• Les conséquences

quand elle survient:– les blessures, le désordre,

la mort, la criminalité,les handicaps, les trau-matismes, la ségréga-tion, la répression, deschangements de valeurs,la montée des extrémis-tes;

– mais aussi la nécessitéd’écoute, de dialogue,un progrès social;

– la non-violence.– Elle peut aller jusqu’au

génocide.

Définir en cherchantdivers points de vue

Du point de vue:– politique,– religieux,– philosophique,– biologique, génétique,– familial, éducatif,– de la justice, des droits de

l’homme, de l’entraideinternationale, de laprotection de l’enfance,de la défense des droitsdes femmes,

– de l’urbanisme,– culturel,– sportif,– animal,– sexuel,– économique,– de la santé,– militaire.

La capacité critiques’aiguisera en fonction del’outil méthodologiquedont on s’est équipé avantla prise d’information ou lacommunication.

NRP N°5 - 1999

Page 17: Le Goût de Lire

experiences et temoignages 17

Le Liban, présent à Bruxelles:Lutte contre l’échec et ledécrochage scolaires

Dans le cadre de coopération entre le Ministère de l’Education et del’Enseignement supérieur (MEES) et le Centre Libanais pour l’Educa-tion Spécialisée (C.L.E.S), un dînerde Gala fut organisé par ce dernier,le 13 Mai 2004, au Parlement Euro-péen, sous le haut patronage deMonsieur Pat Cox, Président du Par-lement Européen et en présence de:

Son Excellence Monsieur l’Ambassa-deur du Liban, Fawzi Al-Fawaz

Son Exellence Monsieur l’Ambassa-deur, Envoyé spécial de l’Union Eu-ropéenne pour le processus de paixau Moyen-Orient, Marc Otte

Madame la Présidente du Parlementde la Communauté Française, Fran-çoise Schepmans

Madame la Présidente del’Assemblée de la Commission Com-munautaire Française, Caroline Per-soons

Monsieur le Ministre Président duCollège de la Commission Commu-nautaire Française de la Région deBruxelles Capitale, Eric Tomas

Monsieur le Ministre d’Etat et Dépu-té, François Xavier de Donnea

Monsieur le Député Bourgmestre deSaint Gilles, Charles Picqué

Monsieur le Député et Vice-Prési-dent du Parlement Bruxellois, MarcCools.

Madame Juliana Traboulsi Eid repré-sentant le Bureau de l’Orientationpédagogique et scolaire au MEES, aprésenté tous les axes de coopéra-tion et leurs conséquences sur lalutte contre l’echec et le décro-chage scolaries.

Ci-après, l’intervention intégrale de

Mme Traboulsi.

Excellences, Messieurs les ministres, Messieurs les dé-putés,

Medames et Messieurs

Je suis très heureuse d’être parmi vous ce soir pour parta-ger l’expérience que le Ministère Libanais de l’Education esten train de réaliser, dans le cadre de sa lutte contre l’échec etle décrochage scolaires, et ceci grâce aux efforts conjuguésde toutes les personnes concernées, grâce notamment à l’aidebénévole apportée par le Centre Libanais pour l’EducationSpécialisée (CLES)

En fait, notre collaboration avec le CLES remonte àl’année 1999, date à laquelle, Mme Carmen Chahine, ainsique Mme Marianne Klees et Mr Xavier Otte, ont présenté auDirecteur général de l’Education le projet de créer une écolespécialisée pour les enfants souffrant de troubles d’apprentis-sage. Ce projet paraissait très ambitieux à l’époque, le Libanse remettant péniblement d’une guerre douloureuse qui avaitduré 20 ans. Ce projet ne s’est donc pas concrétisé, mais il aété le prélude à une coopération fructueuse entre le Ministèrede l’Education et le CLES, coopération qui continue en se dé-veloppant et en s’enrichissant.

Le premier fruit de cette coopération fut une session deformation en septembre 2002 offerte gratuitement par leCLES à 100 enseignants et conseillers pédagogiques des sec-teurs public et privé, session dont le but était de cerner avecprécision la nature des troubles d’apprentissages, d’en identi-fier les mécanismes et de rechercher les facteurs de cause quiles déterminent.

Une grande vague de sensibilisation a suivi cette sessiondans les milieux scolaires et a engendré chez les enseignantset éducateurs le besoin d’en savoir davantage, d’approfondirleurs connaissances dans le domaine de ces troubles.

Page 18: Le Goût de Lire

18 experiences et temoignages

C’est pourquoi, la 2ème session de formation qu’a offerte le CLES en septembre

2003 aux mêmes enseignants était sous forme d’ateliers de travail dans le but d’appro-

fondir les connaissances théoriques dans ce domaine et d’offrir aux enseignants des

outils pratiques pour détecter, et, dans certains cas, remédier.

Une troisième session, prévue pour Septembre 2004 est en train de se préparer en

concertation entre le Ministère de l’Education (direction de l’Orientation Pédago-

gique) et le CLES, et portera sur d’autres troubles d’apprentissage.

Et afin que la formation soit plus adaptée et plus pertinente, une spécialiste belge

(Mme Anne-Marie Frère) a effectué au mois d’Avril un voyage au Liban et a visité les

écoles publiques et privées afin de déterminer les besoins et les attentes.

Pour ma part, j’avais déjà passé un mois en Belgique (le mois de Novembre), à

l’aimable invitation du CLES dans le but de connaître les structures belges de

l’enseignement spécialisé et j’avais été frappée et touchée par toute l’attention et le

soin dont le système éducatif belge entoure l’enfant en difficulté.

A côté de ces formations qui ont ouvert de nouveaux horizons à nos enseignants et

à nos conseillers, je suis heureuse de vous annoncer que le CLES a mis bénévolement

à la disposition des écoles publiques les services d’une équipe pluridisciplinaire

formée d’une logopède (orthophoniste), d’une psychomotricienne et d’une psycho-

logue, qui traitent les enfants en difficulté dans les locaux du CLES, après les avoir vi-

sités dans leurs écoles. Et le nombre de demande d’aide ne cesse d’augmenter. (Je

tiens à signaler que ces services coûtent cher au Liban et sont donc difficilement ac-

cessibles aux petits enfants défavorisés qui forment la majorité de la population des

écoles publiques).

Je voudrais aussi signaler, dans le cadre de la coopération entre le Ministère Libanais

de l’Education et le CLES que la brochure rédigée par Mme Marianne Klees et Mme

Arlette Bourgueil sur la dyslexie-dysorthographie est entrain d’être traduite en Arabe

par le bureau d’Orientation Pédagogique au Ministère de l’Education et sera imprimée

par le CLES pour être distribuée dans les écoles à la rentrée de Septembre 2004.

Notons, pour terminer, qu’un vaste projet de coopération a été présenté par le

CLES au Ministère en Mars 2004. Il a reçu l’approbation de M. le Ministre de

l’Education.

Il comporte les points suivants:

- Mettre en place 8 centres spécialisés dans les 8 départements du Liban dans le but

de diagnostiquer et de traiter les troubles d’apprentissage.

- Créer des classes spéciales à l’intérieur des écoles publiques

- Former des enseignants aux méthodes adaptées aux troubles d’apprentissage

- Editer un lexique en langue arabe pour les concepts et termes scientifiques se rap-

portant à ce domaine.

Souhaitant que ce projet se réalise, je tiens à remercier chacun des membres du

CLES pour sa collaboration et les efforts déployés pour aider l’enfant libanais à ap-

prendre et préparer le monde de demain, mais surtout, surtout à être un enfant heureux,

heureux de vivre parce qu’il s’intégre bien dans la société dans laquelle il vit.

Juliana Traboulsi Eid

Page 19: Le Goût de Lire

experiences et temoignages 19

de stage de Formationà l'Analyse et la Critique de Film

La critique de cinéma est plusqu’une lecture, un résumé incita-tif. Le film n’est pas un objet deconsommation, il va au-delà pourmontrer comment le monde réa-git. Il y a des choses à considérer,à garder même dans les mauvaisfilms parce qu’une critique ne selimite pas à “c’est bien” ni à“c’est pas bien”. Aujourd’hui, laplace de la critique de cinéma estrestreinte, la plus longue critiquequ’on peut faire ne dépasse plusdes deux pages qui présentent lecinéaste, un peu du contenu, un ju-gement et ce que le film dit etcomment. Les journaux quoti-diens font quelques lignes de cri-tique, à titre d’exemple, au Liban,on met des étoiles pour évaluer unfilm. Or, la meilleure critique c’estquand on sort du film pour aborderle cinéma comme un art du récit,de l’espace, du son, du temps et dela durée. C’est quand on sait voir,écouter, lire, comprendre et jugerselon des critères et des élémentsspécifiques au cinéma.

Les objectifs et les modalitésde l’analyse filmique tels qu’ilsont été définis dans la grille dustage;

Distinguer la grammaire ciné-matographique de la mise enscène à travers un bref rappel desévolutions esthétiques et des tra-vaux sur des extraits de filmsclassiques comme Vigo, Vertov,Renoir, Welles... Etudier “l’évo-lution du regard”, angles critiqueset enjeux du débat cinéphilique,par des lectures de textes, discus-sion, visionnement et étude defilm “Fenêtre sur cour” d’Hit-chcock. Etudier les “angles criti-ques sur un film” à travers un filmde Godard “Le petit soldat”(1960). Faire de la critique, au-jourd’hui et maintenant sur unfilm de J.P Rappeneau. Les ap-prenants de chaque école rédige-ront un commentaire sur ce filmdans le cadre du concours.

Nous présentons, ci-après,quelques éléments d’analyse fil-mique:

Quelques éléments d’analysefilmique

Le décor

� Eléments naturels� Eléments artificiels� Les relations entre ces éléments

� Formes géométriques de ceséléments

� Position respective dans la pro-fondeur du champ

� Fonction dramatique des élé-ments

Le cadrage

� Les échelles de plan privilégiées� Leur variation au cours de l’ac-

tion

La Lumière

� Contrastée ou non� Réaliste ou non� Effets de lumière� Variation de lumière au cours de

l’action

La couleur

� Dominantes� Contrastes� Saturation

Les mouvements

� Mouvements dans le cadre� Mouvements du cadre� Vitesse� Rapport entre mouvements et

actions

Le montage et le rythme

� Longueur des plans� Variation de la longueur des plans� Procédés d’articulation et signi-

fication

La bande son

� Musique diégétique ou ex-tra-diégétique

� Fonction expressive� Orchestration� Place dans le plan sonore� Bruits divers

Dans le cadre de formation à l’Audiovisuel, le Centre Culturel Fran-çais a organisé une session de formation autour du thème “l’Ana-lyse et la Critique de film”, animée par M. Philippe AZOURY,enseignant à l’Université Paris III, documentaliste-archiviste à lacinémathèque française, critique de film au journal “Libération”.Responsables du Ministère de l’Education et de l’Enseignement Su-périeur (MEES) enseignants des cycles de l’Education de base, coor-dinateurs pédagogiques des écoles publiques et privées, ontparticipé à ce stage qui s’est étalé sur quatre jours, le 8, 10, 11 et12 Mars 2004.

Notre collègue Véra ZEITOUNI SALIBA, a suivi ce stage, représen-tant la Direction de l’Orientation Pédagogique et Scolaire (DOPS)au MEES et a fourni à la Revue Liaisons le compte rendu suivant.

Page 20: Le Goût de Lire

20 experiences et temoignages

Les Paramètres Techniques

Le PlanLe plan est une unité cinéma-

tographique minimale; c’est cetagencement spatiotemporeld’images et de sons contenu entredeux collures du ruban-film:- le plan est une unité spatiale:

c’est une longueur que l’onpeut mesurer, une seconded’image (standard 35 mm).C’est une image mobile bi-di-mensionnelle;

- le plan est une unité tempo-relle: n secondes (ou minutes)de durée. Un plan de deux se-condes = deux secondes detemps réel. On parle de “pré-sent filmique” ou “scénique”.

Les plans sont concaténés entreeux dans le syntagme élargi queconstitue le texte filmique. Lemontage à but narratif organise for-mellement le texte en récit. Formede l’expression et forme du conte-nu sont donc étroitement liés.

L’echelle des plans:Le très gros plan (ou insert

s’il cadre un objet): montre un dé-tail du corps, du visage ou d’unobjet en lui conférant une impor-tance dramatique;

Le gros plan cadre le seul vi-sage; l’expression du comédiensuppose traduire ses émotions,ses sentiments, ses pensées;

Le plan rapproché: le per-sonnage est cadré à mi-poitrine;en élargissant le champ visuel, lacaméra permet de montrer desgestes du personnage (début del’action);

Le plan américain (serré à lataille, large à mi-cuisses): le per-sonnage peut agir plus librementdans l’espace. On s’aperçoit queplus on s’éloigne du visage pluson s’écarte de l’analyse “psycho-logique” pure;

Le plan moyen: cadre le per-sonnage dans sa hauteur;

Le plan d’ensemble (ou plangénéral): cadre un groupe de per-

sonnage dans un décorspécifique;

Le plan de grand ensemble:montre de larges portions d’es-pace (paysages, foules).

Les angles de prises de vues:Normal: la caméra est paral-

lèle au sol;Plongée: la caméra filme le

sujet par “dessus”, ce qui peutparfois donner une sensationd’écrasement;

Contre-Plongée: la camérafilme le sujet par “dessous”, cequi parfois le magnifie.

Les mouvements de cameraTravelling: la caméra est juchée

sur l’épaule du cadreur, sur unegrue, sur un chariot (trav. Avant, ar-rière, latéral, en profondeur...).

Travelling optique = zoomPanoramique: la caméra pi-

vote sur son axeTrajectoire: travelling + pano-

ramique

L’espace au cinéma

� Le cadre: le pourtour del’image. Au cinéma le ca-drage est limité par le cadreque constitue la fenêtre del’appareil de prise de vues,auquel correspond (en prin-cipe), le cadre de l’image fil-mique et celui de l’appareil deprojection.

� Le profilmique: “Tout ce quiexiste réellement dans lemonde (ex: l’acteur en chair eten os, le décor au studio, etc.),mais qui est spécialement des-tiné à l’usage filmique; no-tamment: tout ce qui s’esttrouvé devant la caméra et aimpressionné la pellicule”.

L’espace profilmique etl’espace du tournage sont for-cément contigus, l’un ex-cluant l’autre.

� Le champ: la porton de l’es-pace cadrée par la caméra,dans sa largeur, dans sa hau-teur, mais aussi dans sa pro-fondeur.

� Le contrechamp: la portionde l’espace contiguë, situéedans une direction opposée auchamp.

� Le hors champ: la portion del’espace située hors du cadre,qui n’est pas filmé, qui a pul’être ou qui le sera. Dans lesfilms d’horreur, il recèle les

menaces qui peuvent surgir àtout moment. Noël Burch dis-tingue six portions différentesde hors champ: les quatre cô-tés du cadre, l’espace situéderrière la caméra et l’arrièredu décor. On remplace parfoisles termes techniques dechamp et de hors champ pardes déictiques plus compré-hensibles par les élèves, cequi donne par exemple: Ici,pour le champ, visible, pré-sent; et permet de distinguerdans le hors champ un espaceproche et un lointain: Là - cequ’on appelle le hors champ,invisible et virtuel, Ailleurs =

Page 21: Le Goût de Lire

experiences et temoignages 21

l’autre espace, lointain, nonvisible, non contigu que la ca-méra a déjà exploré ou n’ex-plorera jamais, mais dont ilest peut-être question dans lesparoles des personnages. Horschamp proximal / distal.Les éléments spatiaux permet-

tent d’aborder le film en privili-geant les éléments visuels (lescouleurs, les lignes, les formesgéometriques et les règles deconstruction de l’image) afin derepérer différentes représenta-tions formelles, liées aux inten-tions narratives de l’auteur.

Nous proposons à titred’exemple les impressions géné-rées par les formes géométriquessimples.

Formes géométriques simples Impressions

Carré Stabilité, calme

Rectangle horizontal Tranquilité, repos

Rectangle vertical Puissance, dramatisation, chaleur

Triangle ascendant Elévation, spiritualité

Triangle descendant Insécurité, oppositon, écrasement

Triangles sans côtésparallèles avec le format

Homogénéité

Losange vertical Equilibre

Losange vertical Malaise, étroitesse

Losange avec 4 angles égaux Pesanteur

Trapèze horizontal Activité

Ovale horizontal Mouvement, tristesse,mélancolie

Ovale vertical Changement, instabilité

Cercle Harmonie, équilibre, douceur, introversion, mondeclos, cycle

Les personnages

L’effet-Personnage auCinéma

Le personnage filmique estun être d’images mobiles, desons et parfois de mentionsécrites.

Le personnage est un être

d’images mobiles. Il se définit

iconiquement par:

� Sa présence dans l’image, seulou en relation avec d’autres per-sonnages [ici]

� Sa présence sous la forme d’un

regard subjectif [”caméra sub-jective”], le personnage se subs-tituant à la caméra ouexceptionnellement, dans lesfilms de fiction, lorsqu’il regardela caméra [regard à la caméra]

� Son absence momentanée maissa présence proche [contre-champ et hors-champ proche:là]

� Son absence totale

[hors-champs lointain: ailleurs]

Le personnage est un être de sons. Il se définit acoustiquement

par:

� Les paroles audibles qu’il prononce à l’image: le personnage s’ex-prime, il s’adresse aux autres personnages à l’image

� Les paroles inaudibles: le narrateur filmique peut choisir d’empê-cher une information capitale d’arriver aux oreilles du spectateur enla rendant inaudible [cas de paralipse]

� Les paroles audibles qu’il prononce dans le hors-champ: un person-nage absent à l’image peut être entendu par les autres [et le specta-teur], on parle alors de hors-champs sonore

� Ses silences qui renseignent le spectateur sur un aspect de sa person-nalité

� Les paroles qui flottent sur la bande-images [voix off]: un person-nage absent ou présent à l’image peut n’être entendu que par les spec-tateurs, c’est le cas de la voix off, voix over ou voix-je selon lesterminologies

� Les paroles que les autres prononcent sur sa personne [en son ab-sence ou sa présence], propos plus ou moins intenses que d’autrestiennent sur lui. Ils s’expriment à son sujet en son absence [parexemple dans un hors champ qui ne s’actualisera pas selon la dialec-tique champ / contrechamp]

� Les phrases musicales qui accompagnent sa présence et ses actes: lamusique joue un grand rôle dans la caractérisation d’un personnage.Elle peut renforcer l’expression de mouvements intérieurs impos-sible à traduire par l’image ou les mots. Elle peut aussi rythmer unesituation [on pense à la musique des dessins animés]. La présence

Page 22: Le Goût de Lire

22 experiences et temoignages

physique attestée d’un person-nage s’accompagne parfoisd’un leitmotiv. Sa présence phy-sique cachée ou absente peutêtre révélée aux spectateurs parcertaines phrases instrumenta-les. Mais la musique peut êtreliée à un événement particulier,englobant situation et personna-ges dans un même “halo” musi-cal. Tous les effets musicauxsont produits pour diriger lespectateur.

� Les bruits qu’il fait et ceux quil’interpellent: le personnagepeut émettre des bruits caracté-ristiques physiologiques, méca-

niques, électroniques [films de science-fiction] etc... qui signalent saprésence même lorsqu’il n’est pas visible. Le personnage réagit demême à certains bruits qui attirent son attention.

Le personnage est un être de mots écrits. Les mentions écrites enri-chissent le savoir du spectateur.

� Toute information écrite relative à un personnage doit être relevée

par l’analyse. En règle générale, le film commence toujours par ungénérique. Certains génériques mentionnent en regard des noms descomédiens, les noms des personnages qu’ils interprètent. Le cinémaparlant hérite du cinéma “muet” des cartons narratifs qui expliquentcertaines situations. Dans le cinéma sonore, le rôle de l’écrit estmoindre. On l’utilise dans sa fonction de relais, pour signifier ce quel’image à elle seule ne peut dire. Lorsqu’une ellipse spatio-temporelleest trop importante, le réalisateur a recours à ce genre de procédé. Ilpeut s’en servir afin de provoquer un effet de citation: clin d’œil auxfilms des “Premiers temps” du cinématographe.

Les raccords visuels

Les figures de raccordsvisuels:

� Le raccord de regard: unplan montre un personnage quiregarde hors-champ, le plansuivant nous montre l’objet dece regard. Si cet objet est unautre personnage qui lui donnela réplique, peut s’instaureralors la dialectique duchamp-contrechamp, figureutilisée pour mettre en scènedes dialogues (la division del’espace diégétique en deuxfragments contigus permettantde briser la monotonie d’unplan cadrant l’intégralité duface à face). Le cadreur veille àce que l’orientation des re-gards ne se contredisent pas endéterminant une ligned’horizon virtuelle à ne pastransgresser lors du déplace-ment de la caméra (règle des180°).

� Le raccord de mouvement etle raccord sur un geste: lemouvement d’un sujet ou d’un

objet doté d’une vitesse etd’une direction donnée dansun plan, est continué dans lesuivant (direction et vitesseidentiques). Le cadreur veille àce que la direction des mouve-ments soit respectée: un sujeten mouvement doit entrer dansle cadre du côté opposé à celuid’où il est sorti dans l’imageprécédente (raccord de direc-tion). On peut raccorder égale-ment deux mouvements surchamp (un premier travellingavec un second, dans la mêmedirection par exemple). Ungeste accompli par un sujet estcommencé dans un plan etachevé dans le suivant (avecchangement du point de vue dela caméra).

� Le raccord dans l’axe: unmême événement est traitédans la continuité en deuxplans successifs; le deuxième,filmé suivant la même direc-tion et dans le même axe op-tique que le précédent (aveccependant un léger décalage de

30°) mais proche ou éloigné parrapport au premier; ce type de rac-cord remplace les zooms ou lestravellings avant-arrière, le légerdécentrage de 30° évitant l’effet“pompe” du zoom!

En ce qui concerne les raccordsde regard ou de mouvement, il n’estpas nécessaire que les plans reliésentre eux par des raccords de cetype aient été tournés dans un décoridentique qui assurerait en grandepartie la continuité visuelle; au con-traire, les raccords visuels (et nousle verrons, sonores) permettent desuturer avec le moins de hiatus pos-sible, “en douceur”, des fragmentsspatio-temporels hétérogènes, sépa-rés par des ellipses (raccords de re-gards dans une conversationtéléphonique, raccords des mouve-ments d’un ou plusieurs véhiculesou personnages...).

Le Titre du Film

� Le titre est destiné à attirer le pu-blic et bien que relevant du codede la langue, il constitue la pre-

Page 23: Le Goût de Lire

experiences et temoignages 23

mière image du film. Il per-met des anticipations,opération fondamentale dela didactique de la lecturede l’écrit et de l’image. Ilentretient une relation à lafois de dépendance et d’au-tonomie avec le co-texte fil-mique: il fait corps avec lefilm, il l’étiquette ou le ré-sume, le commente et il lereprésente à l’extérieur.C’est l’élément le plus dif-fusé du texte filmique.

� Publicitaire: il représente lefilm dans les encarts, sur lesaffiches, les articles, dansles émissions de télévision,dans les bandes-annonces;

� Référentielle: c’est la partielinguistique du film quivaut pour le tout (synec-doque): Tarzan désigne lerôle central du personnageéponyme (bien qu’il ne soitpas le seul personnage de cefilm d’animation);

� Descriptive: il peut évoquerl’ambiance.

� Narrative: il peut résumerl’action, Astérix et Obélixcontre César (il s’agit de larésistance gauloise contre lecolonisateur romain);

� Conative: (centrée sur le ré-cepteur) en interpellant lelecteur, le titre engage lespectateur potentiel;

� Poétique: il peut jouer surles mots et avec des imagessur l’affiche. La typo-graphie peut être utiliséecomme une image égale-ment.

Le Générique de Film

C’est autour des ces années1912-1913 que le génériques’inscrit en ouverture du film. Ilne comporte alors que le nomdu producteur qui signe le film

de sa marque et le protège ainsides pastiches. Petit à petit lenom du réalisateur fait son ap-parition. Les acteurs de théâtrecélèbres exigent que leursnoms figurent au génériqueparce que leur art ne se passepas de réclame [affiche]. Il s’al-longe enfin des noms des tech-niciens et se diversifie pourdevenir ce qu’il est aujourd’huien ses multiples formes.

En règle générale, le géné-rique se situe à l’orée du film. Ilassure le passage du monde réelau monde fictionnel. Le monderéel: celui de l’espace de récep-tion dans lequel le spectateurvient de s’installer, et celui del’espace de la fabrication dufilm - Le monde fictionnel: ce-lui qui est censé commencer àla fin de ce générique. Il lui ar-rive de terminer un film, ce quiest de plus en plus fréquentpour les films à grands specta-cles qui mobilisent des arméesde techniciens et/ou de casca-deurs. Qu’il ouvre ou qu’ilferme un film, il se tient sur leseuil du récit filmique commeune préface ou une postface surle seuil du livre. Sa positionspatiale et le type de relationqu’il entretient avec le reste del’œuvre, le générique est para-textuel [le paratexte ext ce quipar quoi le texte se montre: sesseuils - titres, notes, préface,postface, etc...

Généralement, il se présentesous la forme d’un texte écrit. Illui arrive, chose plus rare,d’être énoncé sous la formed’un texte oral, dit en voix offsur un fond d’images filmiques(...)

Quelle que soit sa place et saforme, le générique c’est déjàdu film, même si ce n’est qu’unbout de film dans le film. Touten étant déjà le film, il tient un

discours relatif au film, un commen-taire sur ce film comme produit. C’estpour cela que son étude a sa placedans la recherche des traces de l’énon-ciation cinématographique. Un rappelsous forme de citation: “L’énoncia-tion est l’acte sémiologique par lequelcertaines parties du texte nous parlentde ce texte comme d’un acte” (C.Metz).

La TemporalitéCinématographique:Les éléments Temporels

� La séquence: unité narrative,c’est un bloc de scènes. Des ellip-ses spatio-temporelles plus oumoins conséquentes séparent lesscènes entre elles: la séquence,c’est du temps virtuel.

� Le plan-séquence: tourné et mon-tré en temps réel, dépassant encela les limites spatio-temporellesd’une définition restreinte du mot!C’est un bloc de scènes tournéesen un seul plan - on parle à ce sujetde “montage dans le plan”. Le pro-blème de tout exercice rétroactifde “découpage” consiste à déga-ger et à justifier les frontières dusegment analysé.

� Avec l’ellipse, qu’elle doit obligéeou expressive, le temps est impli-cite. Sans les ellipses il n’y auraitpas de film. Les ellipses de mon-tage servent à supprimer destemps faibles, inutiles à l’intérieurde la scène, ou entre les scènes, àl’intérieur d’une séquence. Cesont des ellipses obligées: pas derécit romanesque, pas de récit fil-mique sans suppression des tempsmorts: les ellipses servent à “dé-graisser” le récit des scènes ou desséquences qui l’alourdissent ou leralentissent. Elles servent à donnerun rythme au récit. L’ellipse demontage agit au niveau de lascène, c’est une ellipse “tech-nique”. Mais elle sert aussi àconcentrer l’attention du specta-

Page 24: Le Goût de Lire

24 experiences et temoignages

teur sur les personnagesprincipaux et les événe-ments majeurs.

� La scène: unité encore res-sentie comme concrète etanalogue à celle que nousoffrent le théâtre ou la vie.Unité dramatique, elle peutêtre constituée de plusieursplans, séparés par des ellip-ses temporelles (élimina-

tion des moments inutilespour l’action): c’est alors dutemps pseudo - réel; si lesplans se concatènent dansune stricte continuité tem-porelle, sans ellipse, ellerestitue alors du temps réel.

� Le plan:

- ce qui est photographié parle caméra (le clap) du mot

“Action” à l’ordre “Coupez”.

- ce qui est une fois filmé est gardéau montage comme unité spa-tio-temporelle du récit.

Entre le filmage et montages’opère obligatoirement une transfor-mation par coupe: minimale lorsqu’onsupprime le clap et les ordres du réali-sateur, ou substantielle.

Pistes de Travail

A- Analyser une l’affiche

Etude du texte:

� Calligraphie: l’image desmots (police, corps, couleurs)

� Place du texte sur l’affiche

Etude du titre: travail surla syntaxe et la sémantique

Etude de l’image:

� Formes / couleurs / composi-tion

� Dessin, peinture ou photo-graphie?

� Rapport texte / image

Rôle de l’affiche:

� La publicité du film: questiondu destinataire

� La taille et les lieux où elle estcollée, les journaux et les ma-gazines dans lesquels elle estreproduite

Prolongements:

Arts plstiques: travail sur lemouvement des affichistes, créa-tion d’affiches, (pour la jaquettedes flms vidéos créés par des en-fants, travail calligraphique...),comparaison d’affiches

B- Etudier une séquencede film

La narration� Au cours de cette séquence

que découvre le spectateur?

� Apprend-il au même momentqu’un personnage, les nou-velles péripéties?

� Comment réagit chaque per-sonnage? Cela fait-il évoluerla situation?

� Quelles en sont les consé-quences au niveau drama-tique (surprise, suspense,tension, dénouement)?

La photographie

Le cadre

� Quelles grosseurs de plan,quels angles, quelles focalessont utilisés?

� Repérer l’alternance des ca-drages dans la succession desplans.

� Comment l’image est-ellecomposée?

� Quelles sont les lignes domi-nantes et les points forts?

� Quels mouvements de camérasont utilisés?

� Quelles est la signification etla portée de ces choix techni-

ques dans la lecture et lacompréhension de la scène?

La lumière

� Où sont situées les sources de lu-mière? comment l’image est-ellestructurée par la lumière?

� Comment les comédiens sont-ilsplacés? comment se déplacent-ilspar rapport aux éclairages?

La mise en scène

Emplacements et déplacements

� Où est placée la caméra? Combien ya-t-il d’axes de prise de vues?

� Où sont placés les comédiens dans lecadre? Comment se déplacent-ilspar rapport à la caméra?

� Dans l’ensemble, a-t-on privilégié ledéplacement des acteurs par rapportaux mouvements du caméscope oul’inverse?

Le jeu des acteurs

� Comment est présenté le caractèredes personnages (attitude, regard,élocution...)?

� Qu’est ce qui justifie le comporte-ment de chaque personnage? quellessont ses motivations profonds?

La bande son� Quelle ambiance est créee par la mu-

sique?

Page 25: Le Goût de Lire

experiences et temoignages 25

� Influence-t-elle le déroule-ment du récit?

� Y a-t-il des sons, des bruits si-gnificatifs?

� Y a-t-il une voix off?� Les plans sonores (1er plan,

plan éloigné...) sont-ils per-ceptibles?

� Perçoit-on des voix horschamp?

Le rythme et le montage� Combien compte-t-on de

plans? Quelles sont leurs du-rées respectives?

� Quels sont les raccords utilisésentre les plans: regards, mou-vements de caméra, objets?

� Comment sont-ils rythmés?

� Y a-t-il des ellipses?

� Quels événements composentla bande son?

� Où se placent les change-ments de plans sonores parrapport aux changements deplans images?

� Quels effets provoquent laperception simultanée del’image et du son?

C- Analyser une fiction:Rédaction d’une fichetechnique

Titre du film:

Expression verbale

� Dégager le sens général del’histoire. Raconter l’histoireen quelques phrases.

� Le titre est-il percutant?

La structure de l’intrigue

� Repérer les différentes partiesdu récit. Quelle st la chrono-logie de l’action?

� Toutes les actions du film sepassent-elles au présent?

� Y a-t-il des flash-back (re-tours en arrière)? Commentsont-ils annoncés?

Les lieux

� Indiquer le nombre de lieuxdifférents où se déroule l’his-toire.

� Enoncer les lieux. Pourrait-ondessiner le plan du lieu où sedéroule l’action principale?

Les personnages

� Recenser les différents per-sonnages.

� Quels sont leurs prénoms? re-lever les stéréotypes de cer-tains prénoms.

� Caractériser l’aspect des per-sonnages et préciser l’impor-tance de leur aspectvestimentaire.

� Quel est le caractère domi-nant de chacun des principauxpersonnages? quelle est leurfonction?

� En quoi leur voix est-elle enrapport avec leur image?

� Quel est leur mode de lan-gage? En quoi ce langage per-met-il de mieux lescaractériser?

Le temps

� Quelle est la durée du film?Correspond-t-elle à la duréedu récit? L’action est-ellemontrée dans sa totalité (y at-il une ellipse)?

Le son

� Quelle ambiance crée la mu-sique?

� Citer un son (ou un ensemblede sons) qui permet de mieuxsituer l’action.

� Les dialogues (leur naturel, ladiction, le timbre de la voix):quelles informations nous ap-portent-ils sur les personnages?

� Quel rôle joue la voix-offdans le déroulement du récit?

L’écriture filmique

� Quels sont les dispositifs fil-miques utilisés dans le récit à

travers le choix des angles de prisede vues et les mouvements de la ca-méra?

– Les plans: leur rythme et leur durée.Quelle impression créent-ils?

– Le point de vue: qui voit? qui ra-conte?

– Le cadrage: l’image et son échelle.Que met-il en valeur?

– Les champs et hors champs. Com-parer ce qui est vu et montré et cequi ne l’est pas.

– Les angles de prise de vues et lesmouvements de la caméra. Repérerceux qui ont été utilisés.

– Les fondus et les effets spéciaux.Qu’apportent-ils?

– Le choix de la couleur, du sépia, dunoir et blanc. Pourquoi certainesteintes ont-elles été choisies?

Le genre du film

Dans quelle catégorie peut-onclasser le film (documentaire, fiction,récit historique, cinéma expérimen-tal...)?

Au cours de ce stage, nous avonspu illustrer toutes ces approches à tra-vers le visionnement et l’analyse sys-tématique de certains films etséquences.

Nous vous proposons la liste deces films qui sont disponibles à la mé-diathèque du centre culturel françaiset nous espérons pouvoir en donnerune approche critique dans le pro-chain numéro citons:“Vertigo”, d’Alfred Hitchcock 1958(séquence de 15 mn)

“Fenêtre sur cour” d’Hitchcock 1954

“Le petit soldat” de Jean Luc Godard1960

“Bon voyage” de JP Rappeneau.

BIBLIOGRAPHIE1. Serge Daney, Ciné-journal (Cahiers du ci-

néma, 1985)

2. André Bazin, Qu’est-ce que le cinéma?(CERF)

3. Louis Skorecki, Les violons ont toujoursraison (PUF, 2001)

Page 26: Le Goût de Lire

26 litterature

Lauréat du prix Méditerrannée pour son roman “Origines”

Le prix Méditerrané a été décerné à Amin Maalouf pour son der-

nier ouvrage: “Origines” (éditions grasset).

A l’occasion du 20ème anniversaire de ce prix, la récompense a

été remise, mercredi 9 juin 2004 à Paris en présence de nom-

breuses personnalités, notamment Sylvie Fadallah, ambassa-

deur du Liban, qui a déclaré: “En honorant Amin Maalouf c’est,

aussi, le Liban que vous honorez, ce dernier jardin de la langue

française au Proche-Orient. Si nous tenons à cultiver cette

langue, c’est parce qu’elle défend les valeurs universelles et les

idéaux de liberté, de justice, de démocratie et de progrès que

nous partageons avec vous depuis longtemps. Nous y trouvons la

vertu première de la francophonie... Je remercie le jury d’avoir

donné au Liban cette chance: celle d’offrir l’œuvre humaniste

de notre lauréat en cadeau à la France et à la francophonie”.

Nous proposons l’article de Christine Rousseau consacré à

l’écrivain libanais, et paru dans le Monde-Edition Proche-Orient

juillet 2004.

En rencontrant cet homme, dont la chaleur n’a d’égales que laréserve et la timidité, on imagine les difficultés qu’Amin Maalouf adû surmonter pour composer cette belle fresque intime et familialequi s’étend sur plus d’un siècle. Un livre que l’écrivain libanais porteen lui depuis longtemps, bien avant Les Croisades vues par les Ara-bes (J’ai Lu, n° 1916), son premier grand succès, comme il l’ex-plique, d’une voix douce, posée: “Je me suis toujours sentidépositaire de la mémoire des miens mais je ne pouvais pas écriretant que mon père et ma grand-mère étaient en vie. Après leursmorts, j’ai résisté encore car ce n’est pas dans mon tempérament deme dévoiler.”

Cette pudeur extrême alliée à un certain goût du secret aura rai-son, un temps, de sa “tentation” de mémorialiste. Après des détourspar la fiction, ce désir pourtant se précise. Que l’on pense au Rocherde Tanios (Prix Goncourt 1993, Le Livre de poche, n° 13 891), dontle nom est une variation sur celui de son arrière-grand-père Tannous;ou encore à son essai, Les Identités meurtrières (Le livre de poche, n°15 005), dans lequel il évoque Botros, son grand-père, figure cen-trale d’Origines. Mais c’est Gebrayel, le frère de ce dernier, mort àCuba en 1918, qui lui fait signe par-delà le temps, grâce à trois de seslettres que la mère d’Amin Maalouf lui a confiées. Curieux de

connaître cet homme quin’avait été qu’une “figurefantomatique”, l’écrivain in-terroge ses proches, se docu-mente, et se rend au Liban,où il retrouve une mallecontenant tous les papiers deson grand-père. “En décou-vrant ce qu’il avait écrit deproprement littéraire, unepièce de théâtre et des poè-mes et aussi, dans son cour-rier, son désir d’être un jourpublié, je me suis dit que jen’avais pas le droit de passercette fois par le roman pourraconter sa vie.”

Débute alors une longueenquête qui, depuis la mon-tagne libanaise, l’entraîneaux Etats-Unis puis à Cuba,où s’est installé Gebrayelvers 1899, après avoir quittéson pays à 18 ans sans parve-nir à entraîner Botros, sonaîné. Moins fougueux, en ap-parence, ce dernier, élevé àl’école de Khalil (son futurbeau-père) et des missionnai-res protestants, cherche savoie dans l’enseignement. ABeyrouth puis à Zahleh, onremarque le jeune professeurélégant, brillant orateur etpoète, qui va nu-tête, signed’une farouche indépen-dance aux codes vestimentai-res. Mais sa petite notoriétécache mal les dilemmes d’unhomme complexe et instable.

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Les mêmes que connaîtra plus tard son petit-fils: “De cette terre, on émigre depuistoujours pour les mêmes raisons; et avec les mêmes remords que l’on ressassequelque temps, tout en se préparant à les enterrer.”

A l’inverse de son cadet, homme d’affaires dont l’ascension rapide sera stoppéepar un accident de voiture, la greffe cubaine ne prend pas sur Botros. Après un séjourde cinq ans (1901-1905), il revient au Liban, plus entreprenant que jamais, porté parla révolution des Jeunes-Turcs dont les aspirations nationalistes vont vite le déce-voir. Loin de renoncer au rêve d’un Orient moderne et prospère, capable de rivaliseravec l’Occident, ce “don Quichotte” nourri des idées des Lumières, se lance dans lecombat. A 41 ans, après avoir trouvé une femme à sa mesure, Nazeera, Botros crée,en 1913, l’Ecole universelle, ouverte aux filles et aux garçons de toutes confessions.Une gageure dans un pays où le communautarisme se renforce et où la mixité est loind’être acquise.

Dès lors, rien n’épargne ce laïque qui, de surcroît, refuse de baptiser ses enfants,leur laissant le choix à leur majorité. Malgré la guerre scolaire avec Malatios, le curéqui dirige l’école catholique du village; les conflits familiaux avec son frère Théodo-ros, prêtre melkite, et la terrible famine de 1915, Botros tient bon. Jusqu’à l’arrivéedes Français vers qu’il se tourne naturellement. Mais ses idéaux de justice, de tolé-rance, son culte de la connaissance, ne pèsent guère face au jeu des grandes puissan-ces. “Non seulement on ne l’aidera pas, écrit Amin Maalouf, mais on le combattrabien plus férocement encore que par le passé, de quoi lui faire regretter le bon vieuxtemps de l’Empire ottoman...” Empli d’amertume et de désillusion, cet humanistetrop en avance sur son temps meurt en 1924. Sa femme reprend le flambeau jusqu’en1935, date à laquelle elle quitte Achkré pour Beyrouth, où ses enfants et ses pe-tits-enfants poursuivront leurs études. Et pour certains, à leur manière, le combat deBotros.

Un combat pour un Orient différent qu’Amin Maalouf montre très bien dans celivre d’hommage, de dettes et de réconciliation, où il ne cache rien - c’est l’une desforces du récit - de ses sentiments, ses émotions, ses colères, son abattement parfois,son tiaraillement entre l’honnêteté du mémorialiste et sa pudeur... Et surtout, du re-mords qu’il éprouve à s’être fait le complice de la “stérile dignité du silence”. En lerompant, le petit-fils de Botros n’a pas seulement renoué avec la branche cubainemise au ban par les siens à la mort de Gebrayel, il a surtout forcé “quelques portesinitmes” qui lui permettront, on l’espère, de poursuivre ce chemin des Origines jus-qu’à son père.

EXTRAIT

“Pour moi, en tout cas la poursuite des origines apparaît comme une reconquêtesur la mort et l’oubli, une reconquête qui devrait être patiente, dévouée, acharnée,fidèle. Quand mon grand-père avait eu, à la fin des années 1880, le courage de déso-béir à ses parents pour aller poursuivre ses études dans une école lointaine, c’est àmoi qu’il était en train d’ouvrir les chemins du savoir. (...) Peu importe ce qu’il avaitpu espérer lui-même; du moment que les seules traces de sa vie sont à présent dansmes mains, il n’est plus question que je le laisse mourir d’oubli.”

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28 litterature

Il y a 150 ans naissait Arthur Rimbaud aujourd’hui

célébré comme l’un des plus grands poètes fran-

çais. Nous publions, ci-après un hommage, signé

Phillipe Sollers, à l’auteur d’une saison en enfer”

Ce petit volume, le seul publié par l’auteur de son vivantsans aucun effet (il a fallu quarante ans pour le découvrir), est unexplosif à long terme. Il a la même portée fulgurante en françaisque les Pensées de Pascal et les Poésies de Lautréamont. On nele lit pas vraiment, on l’éprouve, on le subit, on l’apprend parcœur. “L’ennui n’est plus mon amour. Les rages, les débauches,la folie, dont je sais tous les élans et les désastres - tout mon far-deau est déposé. Apprécions sans vertige l’étendue de mon in-nocence.”

Haute métaphysique vécue, auto-exorcisme en plein déferle-ment d’un nihilisme désormais global, Une Saison est-il un livrereligieux? Bien sûr, mais très au-delà de ce que nous entendonspar ce terme. Récit non pas d’une conversion, mais d’une muta-tion, d’une transmutation. Expérience unique (”alchimie duverbe”), risquée, au cœur de la perte de soi, dissociation et dé-lire.

En principe, on ne revient pas de cette aventure brûlante queRimbaud n’hésite pas à appeler “damnation”. Ce nouveauvoyageur ne visite pas l’enfer comme Dante: il le vit de l’inté-rieur, il y est plongé, il en sort, il va encore écrire ses extraordi-naires Illuminations, puis se taire et disparaître dans salégende...

Rimbaud, en 1873, va avoir 19 ans. Il précise la date de sa ré-daction: avril-août. Il a déjà écrit d’admirables poèmes, dont il

fait une petite anthologie rectifiéedans Une saison. Il a vécu tous lesdésordres et toutes les hallucinationspossibles, il revient de Londres et deBruxelles où Verlaine, égaré, lui atiré dessus. Verlaine visait-il réelle-ment un jeune homme très beaunommé Rimbaud? Mais non, avecune grande intuition, il faisait feu surUne Saison en enfer en train des’écrire.

On voit qu’André Breton, en ré-pétant que Rimbaud avait eu pourmot d’ordre de “changer la vie” (ex-pression qui équilibre à ses yeux le“transformer le monde” de Marx)parle, en réalité, comme la viergefolle. Rimbaud n’a rien prescrit, sauf“la liberté libre”. “Je veux la libertédans le salut” est le contraire del’agenouillement comme du slogan

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politique. Un jeune Français vient tout simplement de s’apercevoir qu’il vit aumilieu d’un peuple “inspiré par la fièvre et le cancer”, sur “un continent où lafolie rôde”. Ce n’est certes pas la suite des événements historiques qui va luidonner tort. “Les criminels dégoûtent comme des châtrés; moi je suis intact, etça m’est égal.”

D’où viennent la destruction, l’autodestruction, la folie? De la haine de labeauté. La beauté attire le mal, le désir de déformer, de souiller. Peut-on s’évaderde cette rengaine humaine, trop humaine? Sans doute, et l’alchimie du verbe(couleur des voyelles, forme et mouvement des consonnes) devrait en principecréer “un verbe poétique accessible, un jour ou l’autre, à tous les sens”.

Rimbaud le dit: “Je devins un opéra fabuleux.” Dans sa Saison, il sauve l’es-sentiel de ses incomparables trouvailles (”Elle est retrouvée! Quoi? l’éternité”),tout en décrivant les menaces que l’expérience fait peser sur sa santé. “Aucun dessophismes de la folie - la folie qu’on enferme -, n’a été oublié par moi: je pour-rais les redire tous, je tiens les système.” Il sait qu’il a découvert une autre raisonque la raison antérieure, une raison musicale, une nouvelle forme d’amour.

D’où cette conclusion abrupte: “Cela s’est passé. Je sais aujourd’hui saluerla beauté.” Cette “heure nouvelle” de raison va être “très sévère”. Elle va récu-ser “les mendiants, les brigands, les amis de la mort, les arriérés de toutes sor-tes”. Le “combat spirituel”,aussi brutal que la batailled’hommes, demande qu’onsoit “absolument moderne”. Ilne s’agit plus de littérature oude poésie, mais d’action di-recte (”rire des vieilles amoursmensongères, frapper de honteces couples menteurs - j’ai vul’enfer des femmes là-bas”).Dans quel but singulier? “Il mesera loisible de posséder la vé-rité dans une âme et un corps.”C’est tout. Rimbaud, commechacun ou chacune, était pos-sédé. Il ne l’est plus. C’estlui-même, avant d’inscrire ladate de son récit, qui soulignela dernière phrase.

Le Monde

Edition Proche-Orient

Juillet 2004

“JADIS, si je me souviens bien, ma vie était un festin oùs’ouvraient tous les cœurs, où tous les vins coulaient. Un soir,j’ai assis la Beauté sur mes genoux.

- Et je l’ai trouvée amère. - Et je l’ai injuriée. Je me suisarmé contre la justice.

Je me suis enfui. Ô sorcières, ô misère, ô haine, c’est à vousque mon trésor a été confié!

Je parvins à faire s’évanouir dans mon esprit toute l’espé-rance humaine. Sur toute joie pour l’étrangler j’ai fait le bondsourd de la bête féroce. J’ai appelé les bourreaux pour, en pé-rissant, mordre la crosse de leurs fusils. J’ai appelé les fléaux,pour m’étouffer avec le sable, le sang. Le malheur a été mondieu. Je me suis allongé dans la boue. Je me suis séché à l’airdu crime. Et j’ai joué de bons tours à la folie.

Et le printemps m’a apporté l’affreux rire de l’idiot.”

Page 30: Le Goût de Lire

30 informations

Apprendre et enseigner avec

Une démarche originale d’apprentissage dufrançais

Considérant que l’apprentissage d’une langue a tout à

gagner quand il s’appuie sur une approche plurielle et

moderne du monde, que la télévision est un des grands

moyens d’immersion dans la langue cible et qu’elle cons-

titue avec Internet, une source de motivation et de dé-

couverte pour les apprenants, TV5 a développé un

dispositif pédagogique spécialement conçu pour les en-

seignants de français, langue seconde ou étrangère, et

pour les apprenants.

L’exploitation pédagogique des programmes

Des fiches pédagogiques disponibles gratuitement surwww.tv5.org/enseignants proposent des activités sur unequarantaine d’émissions pour enrichir les cours à tous les ni-veaux et pour tous les publics.

La lettre pédagogique est consacrée chaque mois à l’ex-ploitation des contenus inédits d’une émission. Elle estenvoyée à plus de 20 000 enseignants, tout comme la lettred’information mensuelle consacrée aux programmes.

La variété des thématiques abordée à l’antenne:

L’actualité: 16 rendez-vous quotidiens internationaux etnationaux des journaux spécialisés, des entretiens et débatsgéopolitiques.

Les questions de société, l’économie, les sciences, lasanté: les meilleurs magazines produits par les télévisionspartenaires ou par TV5.

La musique, la littérature, la mode, le cinéma, la gas-tronomie et le design sous toutes les latitudes: des émis-sions propres ou venues d’ailleurs.

La richesse et la diversité des cultures: des émissionsspéciales “24 heures à...” pour découvrir les villes les plusprestigieuses du monde.

L’histoire, la découverte, la géopolitique, la musique: 5cases hebdomadaires de documentaires.

Les “grandes causes” (sida, faim dans le monde...) etles événements politiques majeurs: des rendez-vous excep-

tionnels pour accompagner la vie dela planète.

Le cinéma sur le petit écran: desfilms récents, de grands classiques,les échos des festivals à travers lemonde.

TV5, c’est aussi des émissions dedivertissement, des émissions pourenfants, des compétitions sportives,des bulletins météo, susceptiblesd’inspirer une foule d’activités péda-gogiques (consultez www.tv5.org/programmes ou télétexte, page 300 etsuivantes).

Des dispositifs multimédiaslibrement accessibles en ligneet immédiatementexploitables

L’aventure pédagogique des citésdu monde

Sur www.tv5.org/citesdumonde,la collection des “Cités du monde”offre des portraits, des lieux caracté-ristiques et un panorama des activitésquotidiennes des habitants dans lesgrandes métropoles visitées par TV5.

Sur www.tv5.org/ap, un dispositifpédagogique pourl’auto-apprentissage ou la classe, àpartir des textes, des vidéos, des pho-tos et des sons qui donnent à voir etentendre Bamako. Bruxelles, Buca-rest, New York, Québec, Saint-Pé-tersbourg.

35 exercices par ville auto-corri-geables et classés par niveaux, par ob-jectifs et par rubriques.

20 parcours thématiques pour desanimations en classe.

Page 31: Le Goût de Lire

informations 31

Des clips pour écouter, lire et chanter

Sur www.tv5.org/musique:

Une rencontre avec des centaines d’artistes quifont la richesse des musiques francophones et quisont régulièrement invités par la Rédaction de TV5ou le magazine “Acoustic”.

L’accès aux paroles de leurs chansons, à des ex-traits de leurs clips en ligne, à leurs biographies et àl’agenda de leurs tournées internationales.

Et sur www.tv5.org/enseignants:

Chaque semaine, une fiche pédagogique sur unnouveau clip sous-titré en français.

Les autres ressources de tv5.org, à l’usagedes enseignants et des apprenants

La rubrique “langue française et francophonie”

sur www.tv5.org/lf

– Un dictionnaire multifonctions (définitions, sy-nonymes, conjugaisons).

– Les fameuses dictées de Pivot, avec leurs corri-gés.

– Des jeux de lettres (mots fléchés, mots mêlés,quiz).

– “La francophonie en images”: panorama despersonnalités, espaces et savoirs francophones.

– L’actualité littéraire.

La rubrique “cinéma” sur www.tv5.org/cinema

– Les bandes-annonces des films francophones.– L’actualité cinématographique des courts-mé-

trages.– Le guide du jeune cinéaste et des métiers du ci-

néma.– Un banque de données sur le film africain.– La rubrique du magazine “Les yeux dans

l’écran”.

TV5 à la rencontre des enseignants

Le site www.tv5.org/enseignants

Toute la gamme des outils pédagogiques y fi-gure, ainsi que le mode d’emploi du dispositif. LesLettres pédagogiques et d’information de TV5(envoyées par courriel sur simple inscription via lesite), les événements professionnels, une biblio-graphie spécialisée et l’annonce des opérationsspéciales.

Des formations “Apprendre et enseigner avec TV5”

Des initiations et formations approfondies sontrégulièrement organisées dans différents pays, àl’initiative d’associations d’enseignants, d’univer-sités, de ministères locaux de l’Education, d’Insti-tuts, de centres culturels ou d’AlliancesFrançaises. Elles sont assurées par les formateursdes organismes partenaires de TV5 et/ou les mem-bres de réseau des formateurs TV5.

Elles permettent de donner aux enseignants uneméthodologie pour l’utilisation des documents deTV5 en classe et sont l’occasion de fructueuxéchanges d’expériences...

Retrouvez sur le site l’agenda des formationsdes organismes partenaires de TV5.

Un réseau de formateurs TV5

Grâce à ces formations, le réseau de formateurs“Apprendre et enseigner avec TV5” s’étend à plusde 35 pays. Consultez leur liste, pays par pays, surwww.tv5.org/enseignants

Les animations de classes

Chaque année, TV5 organise des concours desti-nés aux professeurs de français et à leurs élèves. Cesopérations ponctuelles rencontrent un accueil en-thousiaste. Elles invitent les enseignants à proposerune activité ludique et collective, stimulent la créa-tivité des élèves et concourent à créer une émulationet un lien entre les classes du monde entier.

L’enseignement du français dans le mondeconcerne 900 000 professeurs et 85 millions d’élèves.

Lancé en 1996, “Apprendre et enseigner avecTV5” a été conçu principalement en collaborationavec le Cavilam de Vichy.

Plusieurs autres partenaires pédagogiques (leCIEP de Sèvres, des Alliances Françaises dont leCELF à Bruxelles, des Universités...) y concourentpériodiquement.

Le dispositif, accesible gratuitement, a déjà étéadopté par plusieurs dizaines de milliers d’ensei-gnants dans le monde.

Contact

– Direction des relations internationales et insti-tutionnelles

– Service de la promotion et de l’enseignementdu français

– 19, rue Cognacq Jay - F-75007 Paris– Courriel [email protected]

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32 hommage

Né à Deir el-Kamar, Chouf - Liban

Formation

1950-1952: Atelier privé de César Gémayel1952-1955: Etude de peinture à l'Académie

Libanaise des Beaux-Arts.1956-1959: Séjour à Paris:

– Ecole Nationale des Beaux-Arts– Académie de la Grande Chaumière– Atelier André Lhote.

Dès la fin 1959 de retour à Beyrouth, il colla-bore aux différentes activité de la vie artis-tique libanaise, arabe et internationale.

Enseignement

1960-1965: Professeur de peinture et dedessin aux Ecoles Normales Libanaise.

1965-1990: Professeur à l'Université Liba-naise (Institute des Beaux Arts).

1975-1978: Professeur à l'Université du St.Esprit (Kaslik) Faculté des Beaux-Arts.

Autres Activités

1957: Elu membre de l'Association des ar-tistes peintres et sculpteurs libanais.

1958: Elu secrétaire général de l'Associa-tion des artistes peintres et sculpteurs li-banais.

1968: Membre fondateur de DAR El-FANNWAl ADAB.

1969: Elu président de l'Association desartistes peintres et sculpteurs libanais.

1971: Président de la délégation libanaiseau Congrès des Arts plastiques arabes(Damas, Syrie).

1971: Membre fondateur de la fédérationinter-arabe des Arts plastiques (Damas,Syrie). Elu trésorier de cette fédération.

1972: Président de la délégation libanaise auCongrès des arts plastiques des paysarabes (Hammamath, Tunis).

Expositions personnelles

1957: Galerie LA LICORNE.1958: Atelier du peintre.1961: Galerie El-Hoss - PIKAL.1963: Centre Culturel Français.1964: L'ORIENT.1967: Galerie L'AMATEUR.1970: Galerie ONE.1971: Théâtre ROMEO LAHOUD.1972: Galerie SPIRALE.1973: Galerie MODULART.1975: Centre d'art Göteborg Suède.1976: GRAFINGER KUNSTKABINET

GRAFING (Allemagne Fédérale)1985: Galerie LA TOILE Rimal.

Expositions Collectives au Liban

Salon du Printemps à l'UNESCO, depuis 1954.Salon d'Automne au Musée Sursock depuis

1962.1960: Galerie EL-HOSS - PIKAL.1964: Centre Culturel, Zahlé.1965: Cinq générations de peintres libanais

(L'ORIENT)1966: Galerie ONE.1968: DAR EL-FANN WAL ADAB.1968- 1969, 1970: Centre Culturel, Tripoli

(Liban).1969: Centre Culturel, HAMASKAINE.1983: Galerie ELCIR.

Manifestations Artistiques Internatio-

nales

1958: Salon des Indépendants (Grand - Palais, Pa-ris).

1959-1962-1965: Biennale de Sao-Paolo (Brésil).1960-1963: Biennale de Paris (France).1961: Biennale d'Alexandrie (Egypte).1966: Groupes de Peintres libanais à Paris, organisé

par l'ORIENT.1966: Groupes de Peintre libanais, Musée de Lon-

dres (Angleterre).1971: Groupes de Peintres libanais, Smithssonian

Art Museum Washington (USA).1971: Groupes de Peintres des pays arabes, Musée

d'art contemporain Damas (Syrie).1972: Manifestation des Arts plastiques des artistes

arabes à Alger (Algérie).1982: International Fair of Contempory Art, Basel

(Suisse).1985: Biennale des arts plastiques des pays arabes,

Koweit (Koweit).

Prix et Lauréats

1963: 1er prix de la Presse Libanaise.1965: Prix honorifique Musée Sursock.1965: Lauréat de l'Orient.1965: 1er prix de l'Institut Culturel Italien.1966: 1er prix du ministère de la Justice (Carton

pour Tapisserie)1968: 2ème prix du Musée Sursock.1983: Chargé par le bureau:

Art & Design Consultants (Genève) pour la réali-sation de trois tapisseries: salon d'honneur del'aéroport de Riad, Banque Centrale de Riad.

1985: Prix honorifique de la biennale des arts plasti-ques des pays arabes (Koweit).

Nous retenonsici uniquementles textes enfrançais parmila multitudedes témoigna-ges en arabecomme ceuxde Ounsi ElHajj, Akl Awit,Fayçal Sultan,Nazih Khater,etc...

… Un art très loin de la désincarnation progressive des géomètres ou du lyrisme rassurant des tachistes: par la fougueet l'emportement que guident les chevaux du chevalet et que martèlent les pattes de la palette, Najm réintroduit la sen-sualité dans le concert naguère calme des agencements plastiques. Sa peinture met les pieds de l'aventure dans le platdu conformisme esthétique, d'autant plus libre qu'elle est concertée, travaillée, élaborée. Car enfin le jeu subtil des trans-parences, la superposition des plans et la manœuvre rigoureusement hélicoïdale qui mène couleurs, et lignes à la chargene s'obtiennent pas dans la confusion de l'instant; ils sont fruits d'un long apprentissage. C'est un manège de terre etd'acier, de sang et d'herbe, de chair et d'enfance qui tournoie dans les œuvres de Najm, et leur donne cet aspect d'in-fini,de perpétuel possible, de tout-est-permis. (André BERCOFF 1964)

… Mounir Najem est avant tout un très beau peintre qui,dans un style à la limite de l'abstraction, sait suggérer lapoésie des vieilles maisons arabes et la magie des paysa-ges méditerranéens: une facture sobre, mais savante,chargée d'une poésie délicate et profonde...(Georges BOUDAILLE 1967)

… Les toiles de Mounir Najem sont pleintes jusqu'auxbord, comme découpées sur une expérience plus large,et d'une couleur qui, même lorsqu'elle entre enébullition,est cependant maîtrisée par les passions du peintre et,peut-être, par une révolte... (René HABACHI 1963)

Pour rendre hommage au peintre Mounir Najem, décé-dé en 1990, une cérémonie a été organisée le30/11/2004, sous le patronage du Président de la mu-nicipalité de Deîr el Kamar M. Dory Chamoun, pour lapose de la première pierre du monument sur lequelsera érigé le buste de l'artiste. Cette louable atten-tion est dûe à l'initiative du député, M. Georges DibNehmé, en collaboration avec le Lions Club Liban/Tu-nisie/France. Le projet sera inauguré le 22/5/2005/.