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N° 24 > DÉCEMBRE 2010 Le journal d’information du BRGM EAU Une nouvelle ressource, les eaux usées page 4 GÉOTHERMIE Vers une gestion renouvelable des « stocks » géothermiques page 8 DÉCHETS MINIERS Des procédés biologiques de valorisation page 7

Le journal d’information du BRGM · 4 EAU projet au Service Eau du BRGM, est un concept de gestion active de l’eau très séduisant. Outre le soutien de la nappe, il permet le

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Page 1: Le journal d’information du BRGM · 4 EAU projet au Service Eau du BRGM, est un concept de gestion active de l’eau très séduisant. Outre le soutien de la nappe, il permet le

N° 24 > dÉCEmbrE 2010

Le journal d’information du BRGM

EAUUne nouvelle ressource, les eaux uséespage 4

GÉOTHERMIEVers une gestion renouvelabledes « stocks » géothermiquespage 8

DÉCHETS MINIERSDes procédés biologiques de valorisationpage 7

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Les outils de la « croissance verte »

En moins de dix ans, les écotechnologies se sont imposées dans tous les

secteurs de l’activité humaine, porteuses, comme le furent avant elles les nouvelles tech-nologies de l’information et de la communication, d’un véritable bouleversement de nos modes de vie et de production.

Technologies « propres » et économes en énergie, suscep-

tibles de répondre aux préoccupations liées au changement climatique, à la maîtrise de l’énergie et à une meilleure gestion des ressources et des milieux, elles couvrent désormais un large champ, à la fois outils de protection et de valorisation de l’environne-ment et procédés technologiques innovants qui investissent toutes les filières industrielles.

Le BRGM fut l’un des premiers acteurs de la recherche française à s’engager dans cette voie, avec ses propres programmes, dans le cadre de recherches partenariales conduites avec de grands groupes industriels ou sous l’égide de programmes européens (7e PCRD) ou d’appels à projets de l’Agence nationale de la recherche.

Son expertise plus que cinquantenaire dans le champ des géosciences constitue en effet un excep-tionnel socle scientifique et technique pour le développement d’écotechnologies visant tant la préservation que la valorisation des ressources naturelles. Ses différents programmes dédiés portent ainsi sur l’eau (polluants émergents, préser-vation et renouvellement de la ressource…), les ressources minérales (nouvelles ressources, procédés de valorisation…), les déchets (recyclage et valorisation…), la remédiation environnementale (traitement des sites et sols pollués, suivi…) et l’énergie (géothermie, stockage du CO2…).

Autant de contributions majeures en faveur de la « croissance verte » dans laquelle la France et l’Europe ont choisi de s’engager. n

Édito

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ENJEUX

Que recouvre exactement la notion d’écotechnologies ?Les écotechnologies regroupent une multitude de tech-nologies. La moitié des investissements en innovation est liée aux nouvelles technologies de l’énergie. Le second secteur concerne les technologies « propres » en matière d’efficacité énergétique et carbone pour les transports, le bâtiment ou l’industrie. On trouve enfin les technologies plus conventionnelles de l’environnement, de la surveillance des milieux aux technologies de traitement de déchets, effluents ou sols. Bien que la notion de « filière écotechnologique » soit récente, ce secteur est devenu un champ à part entière du financement de la recherche et de l’inno-vation, reconnu comme tel par les capitaux-risqueurs et les agences de financement de R&D.

En couverture : Système d’extraction en ligne et analyse des phytosanitaires dans l’eau. © BRGM – D. Depoorter.

Déjà partie prenante de l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie (Ancre), le BRGM a intégré en 2010 la nouvelle Alliance pour l’environnement (Allenvi*), qui regroupe douze acteurs clés de la recherche scientifique dans l’alimentation, l’eau, le climat et les territoires.« Allenvi est une alliance programmatique, explique Catherine Truffert, directrice de la recherche. Notre présence en son sein répond à un objectif majeur : pouvoir être force de propositions sur les grandes orientations françaises en matière de programmes de recherche dans les domaines relevant des priorités straté-giques du BRGM. Nous sommes ainsi impliqués dans onze des

quatorze groupes de travail de l’Alliance, qui ont trait au changement climatique, aux ressources naturelles, à l’eau, à la gestion des sols et du sous-sol, aux risques environne-mentaux et aux écotechnologies. »L’établissement copilote également depuis octobre, avec le Cemagref, le volet « Environ-nement » de l’Alliance Inter-Carnot, avec pour finalité, là encore, de contribuer à la définition des politiques de recherche en ce domaine.

Le BRGM fut l’un des vingt premiers établissements labellisés Carnot en 2006, pour sa politique de recherche partenariale. n

* Il existe quatre Alliances, nées sur l’initiative du ministère de la Recherche.

> LeBRGMintègrel’Alliance«Allenvi»

Les écotechnologies sontdésormais le deuxième champ d’investissement en innovation

Rencontre avec Philippe Freyssinet, responsable du département Énergie durable et Environnement à l’Agence nationale de la recherche(1).

(1) – L’ANR est une agence de financement de projets de recherche, académique ou finalisée. Son budget 2010 est de 935 M€. L’ANR finance environ 1 500 projets par an, dont plus de 200 portent sur des écotechnologies et sont à 85 %, en partenariat public-privé.

Catherine TruffertDirectrice de la Recherche

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Il se situe aujourd’hui, en termes d’investissements, juste derrière les Technologies de l’information et de la communication (TIC).

Quels facteurs motivent un succès aussi fulgurant ?Trois tendances se conjuguent : d’une part, le changement climatique oriente les stratégies de R&D sur l’énergie, avec notamment la nécessité de réduire massivement les émissions de gaz à effet de serre ; la raréfaction des ressources naturelles combinée à une demande croissante oblige, d’autre part, à repenser les systèmes de production et de consommation ; enfin, il y a le besoin de diminuer l’impact des activités humaines sur l’environnement et la santé.Cette convergence de facteurs oriente à l’échelle inter-nationale toutes les politiques publiques et industrielles vers le développement de technologies propres et plus durables. Tout comme les TIC l’ont fait, les écotechno-logies vont probablement bouleverser nos modes de vie, en matière de production industrielle, de mobilité, de conception urbaine et de consommation. Et de nouveaux modèles économiques vont émerger avec elles.

Quelle est l’implication de l’Agence nationale de la recherche ?Le champ de la « croissance verte » est une priorité de l’agence depuis sa création en 2005. L’ANR vient de lancer un nouveau cycle de programmation 2011-2013 qui réserve une large place aux technologies vertes dans une politique de soutien à la sortie de crise.Le département que je dirige, par exemple, a ainsi cinq nouveaux programmes consacrés à l’énergie et dédiés à la production et la gestion de l’électricité, l’efficacité énergétique et carbone, les biomatériaux et bio-énergies, le bâtiment et la ville durable, les transports terrestres durables.

En quoi le BRGM est-il bien placé pour répondre à ces nouveaux enjeux ?Le BRGM est un acteur prépondérant des technologies vertes, au sens large. Il a eu d’ailleurs de nombreux succès à l’ANR. En s’appuyant sur des techniques et des savoir-faire développés dans le domaine minier, de l’eau, de la géothermie ou de l’analyse, il a pu, en les transposant, développer des concepts très innovants qui trouvent aujourd’hui une application : le stockage souterrain du CO2, la dépollution des sols, des nappes et des sédiments, la valorisation des déchets ou encore la métrologie environnementale.Il existe encore un fort potentiel d’éco-innovation en matière d’ingénierie du sous-sol. Le sous-sol urbain représente un énorme enjeu pour les villes de demain, de même que le stockage d’énergie de masse (chaleur, froid, voire hydrogène) est amené à se développer. Et il reste un fort besoin d’innovation en matière de tri et valorisation des déchets, notamment comme nouvelles ressources de métaux rares. n

Former des praticiens de la gestion durable des ressources minérales, c’est l’ambition de l’École nationale d’applications des géosciences (Enag), créée en 2010 à Orléans par le BRGM en partenariat avec l’État, les collectivités locales (région Centre, Conseil

général du Loiret, ville d’Orléans…), des universités (la composante Observatoire des sciences de l’univers à Orléans, Rennes, Montpellier…) et l’Ifremer.Fruit d’une mission d’étude sur les besoins en formation et l’emploi dans le domaine des géosciences, confiée au BRGM par le ministère de la Recherche, l’Enag, qui fait appel à de nombreuses compétences internes et externes, accueille ses étudiants au niveau bac + 5 et les forme sur seize mois, dont six en entreprise.« Notre originalité, explique Dominique Guyonnet, son directeur, est de propo-ser un enseignement qui couvre tout le champ des ressources minérales, de l’exploration à l’après-mine en passant par l’exploitation, le traitement et la gestion des risques. L’objectif est de doter nos étudiants d’une double compétence en matière de géosciences (géologie et géotechnologies) et de gouvernance des ressources (législation minière, droit, économie, responsabilité et gestion humaine). »Douze étudiants ont intégré la première promotion. n

> Uneécoled’applications,l’Enag

École de terrain dans les Alpes. Interprétation géologique d’un panorama.

© BRGM.

Examen d’un affleurement (Monviso, Pian del Re). © BRGM.

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EAU

projet au Service Eau du BRGM, est un concept de gestion active de l’eau très séduisant. Outre le soutien de la nappe, il permet le stockage d’eau sans perte par évaporation à partir d’une ressource disponible toute l’année. Et en zone littorale, où les nappes sont cycliquement très sollicitées, il contribue à lutter contre le biseau salé, autrement dit le risque de pénétration souterraine d’eau de mer. »

Maîtriser les phénomènes« Notre objectif commun avec Veolia, poursuit J. Casanova, est de développer des outils méthodolo-giques permettant de concevoir et de gérer à long terme de tels systèmes, pour garantir leur fonctionne-ment optimal. Nous devons ainsi pouvoir prévoir le devenir des contaminants dans la zone non saturée du sol et la qualité de l’eau fournie à la nappe, dans différents cas de figure tenant compte de la qualité de l’eau injectée, de la nature du sol – dont les capacités épuratrices peuvent varier –, et de l’évolution de celui-ci dans le temps. »En ligne de mire, la mise au point d’un système qui puisse s’adapter à n’importe quel site au monde, en intégrant ses spécificités hydrologiques, géologiques, climatiques, etc.« Nous souhaitons, à terme, disposer d’un simulateur numérique générique susceptible, à partir de données telles que la composition de l’effluent, la composition minéralogique du sol et les conditions de milieux, de pré-dire les processus impliqués dans l’épuration des eaux. »Si l’intérêt est évident pour de nombreux pays du monde, la nécessité peut paraître moins immédiate en France où, sauf conditions locales ou saisonnières, le manque d’eau est rare. Mais le principe de réinjection d’eau usée ne doit pas être négligé : pour l’irrigation, la lutte contre le biseau salé, l’alimenta-tion de zones touristiques, mais aussi l’amélioration de la qualité des eaux de surface, où aboutit l’essentiel des eaux en sortie de station d’épuration.« 17 000 stations d’épuration, conclut J. Casanova, rejettent chaque année plus de 3 milliards de m3 d’une eau environnementalement compatible. Cette ressource considérable doit être prise en compte. » n

REGAL : mise au point d’un simulateur numérique des interactions eau, air, sol, pouvant être couplé à un modèle qui repro-duit au mieux l’écoulement des eaux.

ACTISOL : mise au point, à partir d’expéri-mentations in situ sur un bassin d’infiltration d’eaux usées traitées, d’une barrière miné-rale réactive offrant les performances épuratrices recherchées, par combinaison de géo-matériaux. Le procédé a vocation

à être adapté aux conditions géolo-giques locales.

Pilote REUSE : colonne de sol reconstitué avec infiltration d’eau usée traitée et moni-toring par bougies poreuses. Observation des phénomènes de pression, humidité, température, activité microbienne et trans-fert des polluants… n

> Lesrecherches BRGM/Veolia

Une nouvelle ressource, les eaux uséesCroissance démographique, urbanisation, irrigation… la demande en eau ne cesse de croître partout dans le monde. Face à une ressource globale limitée, la réutilisation des eaux usées est l’une des solutions envisagées. Le BRGM y travaille avec Veolia, dans le cadre d’un partenariat de recherche.

L a plupart des traitements visant à fournir de nouvelles ressources en eau (dessalinisation d’eau de mer, traitement d’eaux usées en usine expéri-

mentés dans les pays du Golfe, en Espagne, en Australie…) sont très lourds et coûteux, voraces en énergie et inadaptés à de nombreux contextes locaux.Utiliser les capacités épuratrices naturelles du sol pour parachever les processus de traitement opérés dans les stations d’épuration – et ainsi recharger les nappes souterraines – est, en revanche, une voie prometteuse dans laquelle le BRGM s’est engagé depuis plusieurs années.« La recharge artificielle des nappes par infiltration d’eaux usées traitées, explique Joël Casanova, chef de

Station d’épuration.© BRGM – F. Michel

Modélisation de la nappe du bas Gapeau avec prise en compte du biseau salé : vue 3D de l’altitude du toit des phyllades, roches constituant le substratum de l’aquifère.© BRGM.

Pilote REUSE. © BRGM – J. Casanova.

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QUALitÉ dES EAUX

«D

epuis dix ans, explique Hélène Pauwels, géochimiste et chef du projet AquaNano, le recours aux nanoparticules n’a cessé de

se développer. La taille extrêmement petite de ces matériaux leur confère en effet des propriétés physiques très intéressantes. » Utilisées pour leurs effets conducteurs, catalyseurs, désinfectants, cosmétiques… les nanoparticules sont présentes dans tous les secteurs de l’industrie, d’où leur inévitable introduction dans le milieu naturel.« Le projet AquaNano, poursuit H. Pauwels, dont le BRGM est coordinateur, vise à identifier les processus impliqués dans le transfert des nanoparticules inorga-niques dans les eaux souterraines, en fonction de leur nature, de leurs propriétés de surface, de la composition chimique de l’eau et des propriétés des aquifères. » Ces paramètres sont essentiels : une particule de zinc pourra se dissoudre dans une eau à faible pH, quand d’autres types d’aquifères seront, eux, propices à l’agrégation de certaines substances…« Nous confrontons une série de nanoparticules à différents types de milieux aqueux, via des expériences en flacon, en colonne et sur le terrain. Nous en attendons de pouvoir définir des paramètres de mobilité caractéristiques des différents types d’eaux et de milieux. » Ces travaux pourraient servir de base à une évolution de la surveillance des eaux souter-raines, voire déboucher sur de nouveaux traitements.

Nanosep, pour dépolluer les effluents« Avec Nanosep, explique Mohamed Bizi, physico-chimiste, initiateur et coordinateur du projet, le BRGM développe un procédé de séparation des nanoparticules des effluents industriels. » Conduit avec plusieurs partenaires industriels et universitaires, le projet vise un double objectif : dépolluer les effluents et récupérer les nanoparticules extraites afin de les recycler.« Nous travaillons à partir de suspensions industrielles, avec pour finalité d’agréger les nanoparticules en particules de quelques centaines de microns (macroflocs), afin de rendre possible leur extraction. Sur la base d’une caractérisation fine et complète (taille, forme, texture, propriétés de surface et physico-chimie du milieu) et d’un

Nanoparticules, un suivi indispensableDes centaines de nanoparticules(1) sont aujourd’hui utilisées dans l’industrie. Le transfert dans les milieux aquatiques de ces matériaux pouvant présenter un risque sanitaire, a conduit l’Agence nationale de la recherche à inclure ce thème dans ses appels à projets. Deux propositions du BRGM ont été retenues.

choix judicieux des réactifs d’agrégation, la combinaison des procédés usuels de séparation solide-liquide (floculation, filtration et flottation) permet de dépolluer efficacement les effluents visés. » Résultats complets en 2012. n

> Polluants émergents

(1) – Les nanoparticules sont des grains de matière dont au moins une des dimensions est inférieure à 100 nanomètres : 0,1 micron. Leur capacité à pénétrer en profondeur dans les organismes vivants explique leur dangerosité.© BRGM.

Analyse d’échantillons d’eaux pour détecter la présence de polluants émergents.© BRGM – D. Depoorter.

de la détection à la caractérisation Un grand nombre de molécules constituent aujourd’hui la grande « famille » des polluants émergents : nanoparticules, médicaments, cosmétiques, pesticides…Parce qu’on ne les détectait pas dans l’air, l’eau ou les sols – faute de techniques appropriées ou faute, tout simplement, de les y chercher –, ces produits avaient jusqu’alors échappé à toute réglementa-tion environnementale.Leur toxicité (effets cancérigènes, perturba-tions endocriniennes…) et la détection croissante de certains d’entre eux ont amené les pouvoirs publics à missionner plusieurs établissements de recherche et laboratoires. Le BRGM est l’un d’entre eux, partie prenante d’un groupe de travail européen sur les polluants émergents, d’un groupe de travail national sur les

médicaments, et membre du réseau Aquaref, laboratoire national de référence pour les milieux aquatiques.Objectifs visés : développer de nouvelles méthodes de détection (y compris pour des concentrations très faibles) afin de déceler la présence et le comportement des molé-cules dans les milieux, puis caractériser celles-ci, éléments devant permettre de prioriser les substances en fonction des dangers sanitaires et environnementaux qu’elles présentent, dans la perspective de réglementations futures (seuils limites de concentration, interdiction).Outre les substances médicamenteuses, les recherches du BRGM ont déjà également porté sur les muscs de synthèse. Deux types de molécules pour lesquelles le BRGM a établi des fiches méthodologiques aujourd’hui mises à disposition des laboratoires. n

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Prélévements dans la colonne de sédiments. © BRGM.

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SÉdiMENtS PoLLUÉS

adossé au pôle de compétitivité « Chimie-Environ-nement » en Rhône-Alpes, qui vise le traitement ciblé de millions de m3 de sédiments.

Caractériser et comprendre« Notre premier objectif est de comprendre la dyna-mique des PCB, leur devenir dans l’eau et leurs interactions avec les particules sédimentaires. C’est dans des colonnes inox, en laboratoire, que nous suivons pré-cisément le comportement dans le temps de sédiments pollués remis en suspension. »La caractérisation des PCB est un volet complémen-taire indispensable, objet de la mise au point de nouvelles techniques analytiques. Car la famille est vaste : 209 substances dont la toxicité, la volatilité et le potentiel de dégradation diffèrent.Quant au traitement proprement dit, fort des savoir-faire dans le domaine de la séparation solide/liquide acquis avec les granulats et les minerais, le BRGM expérimente plusieurs techniques visant à séparer les particules grossières des plus fines (qui contiennent a priori plus de PCB) afin de réduire les volumes à décon-taminer.

Des traitements biologiques« Pour la décontamination, explique Ph. Bataillard, nous explorons la voie de la biodégradation. Nous recher-chons les souches bactériennes capables de déchlorer les PCB et ainsi de les rendre moins toxiques. Nous en sommes au stade laboratoire, sur de petits réacteurs dans lesquels nous testons plusieurs formulations. »Le BRGM participe aussi au développement de cap-teurs spécifiques pour identifier la présence de PCB dans les eaux et éviter des analyses préalables com-plexes et coûteuses.« À terme, conclut Ph. Bataillard, en nous appuyant sur la modélisation du comportement des sédiments sous différentes conditions de contamination et de milieu, nous souhaitons être en mesure de préconiser des méthodes de gestion adaptées. » n

Objectif, décontaminer les cours d’eau…Les sédiments de nombreux cours d’eau français contiennent des PCB. Dans le cadre d’un plan national de lutte, le BRGM est associé à un vaste programme de recherche portant sur les sédiments contaminés du Rhône.

L’adoption de valeurs très res-trictives quant aux teneurs en PCB dans les denrées ali-

mentaires, du fait de leur toxicité, a récemment mis en lumière le problème sanitaire et environne-mental que posent ces substances, notamment quand les pêcheurs professionnels du bassin du Rhône se sont vus, en 2006, interdire de commercialiser leur pêche.« Les PolyChloroBiphényles, explique Philippe Bataillard, géochimiste, chef du projet PCB-Axelera pour le BRGM, sont des dérivés chimiques chlorés. Jusqu’à leur interdiction totale en 1987, leurs propriétés d’isolation électrique, de stabilité thermique, de résistance au feu, etc. leur ont valu d’être largement utilisés dans la fabrication de transforma-teurs électriques et d’appareils hydrauliques. »

Ainsi plusieurs décennies de rejets industriels ont-elles abouti à une

véritable pollution « historique », liée à l’accumulation de ces produits dans les sédiments de rivières.

L’expertise BRGM« Le problème, poursuit Ph. Bataillard, est que les PCB ne se dégradent pas dans l’eau, et que les sédiments où ils s’accumulent sont régulièrement remis en suspen-sion, lors de crues, de dragages de chenaux ou d’écluses envasés, voire d’effacement de barrages. »Le BRGM, dont l’expertise est ancienne (étude des roches sédimentaires, de la dynamique des rivières et de la sédimentation, exploitation de sables marins, traitement de sédiments de canaux, gestion des sites et sols pollués…), était tout désigné pour s’associer à une démarche consacrée à cette problématique. Il participe aujourd’hui au Programme PCB-Axelera(1),

(1) – PCB-Axelera regroupe plusieurs partenaires industriels et scien-tifiques : BRGM, CNRS, Suez Environnement… Le BRGM est aussi partie prenante d’autres programmes : impact environnemental du stockage de sédiments marins, comportement de l’arsenic dans les sédiments, mise au point de méthodes de gestion…

Colonnes permettant le suivi du comportement de sédiments pollués remis en suspension. © BRGM.

Sédiments pollués versés pour étude en colonnes inox.© BRGM.

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d’en extraire respectivement du cuivre (en bioréacteur) et du nickel (en tas). Un même procédé biologique a été développé en Ouganda (usine KCC) où, depuis plusieurs années, des bioréacteurs produisent du cobalt à partir de déchets miniers.« La finalité de ProMine est de transposer ces techniques aux déchets miniers européens, en identifiant les res-sources qu’ils contiennent, puis en ciblant les micro-organismes les plus efficaces, enfin en mettant au point les procédés adaptés. »Promesse d’une étape supplémentaire dans la maîtrise de ces techniques extractives, ProMine développe de nouveaux systèmes tant dans le domaine du traite-ment en tas qu’en bioréacteur. « Avec nos partenaires et dans la continuité du projet BioMine, poursuit P. D’Hugues, nous souhaitons mettre au point une technologie intermédiaire, plus efficace que le traitement en tas, mais moins complexe et moins vorace en énergie que le traitement en bioréacteur. »Pour l’heure, un pilote de laboratoire a été réalisé pour traiter des déchets provenant de Pologne, et effectuer des tests avec différentes familles de micro-organismes. n

Des procédés biologiques de valorisationHier considérés comme des déchets, les rejets de l’industrie minière constituent aujourd’hui de nouvelles ressources potentielles. Le volet 4 du projet européen ProMine, piloté par le BRGM, vise à développer des procédés biologiques d’extraction, afin de valoriser ces gisements de matières minérales secondaires.

Stériles miniers ou résidus de fonderie, c’est par millions de tonnes que l’industrie extractive a stocké en Europe ce qu’elle considérait il y a encore

peu comme des déchets. Mais la tension sur les marchés des matières premières, la raréfaction des ressources et le recours croissant de l’industrie à des métaux « stratégiques » ont changé la donne, au moment où les préoccupations environnementales et le concept de développement durable s’imposaient à nos sociétés.« Les déchets miniers, explique Patrick D’Hugues, responsable du projet, trouvent aujourd’hui un véritable regain d’intérêt. Alors même qu’une réglementation de plus en plus sévère impose de les traiter pour minimiser leur impact sur l’environnement, on découvre qu’ils recèlent, outre des résidus contenant parfois des teneurs encore importantes en métaux initialement recherchés, des métaux associés jusqu’alors ignorés et qui intéressent l’industrie moderne. »

Un savoir-faire BRGMPour traiter ces déchets, le BRGM dispose d’un savoir-faire issu notamment de deux anciens programmes de recherche, BioMine et BioShale, fondés sur l’utilisation de micro-organismes pour dégrader les minerais(1) afin

(1) – Sur le principe de la biolixiviation.

dÉCHEtS MiNiERS

Bactéries sulfato-réductrices utilisées pour traiter les effluents de l’industrie extractive.© BRGM.

Valoriser les déchets miniers grâce à des procédés

biologiques d’extraction.© BRGM.

ProMine est issu du 7e PCRD (Programme cadre de recherche et de développement de l’Union européenne). Il réunit 27 partenaires académiques, scientifiques et industriels européens. Objectif : dresser un inventaire exhaustif des res-sources minérales à l’échelle de l’Europe et mettre au point des procédés de valorisation.Sur quatre ans (2009-2013), ProMine comporte sept volets. Outre le volet 4 (ci-contre), le BRGM pilote le volet 1 : inventaire général des ressources, travail de recensement préalable puis de synthèse et d’har-monisation de toutes les cartes métallogéniques, monographies et synthèses existant en Europe, avec une visée prédictive. En rapprochant métallogénie et géologie, il s’agit d’identifier de nouvelles zones à fort potentiel et d’établir des cartes de prédictivité, préalable aux démarches de prospection. Le BRGM et ses partenaires ont également pour mission de recenser et caractériser l’ensemble des concentra-tions anthropiques issues de l’industrie extractive : stériles miniers, résidus de fonderie… qui sont autant de « ressources secondaires » dont l’Europe vise l’exploitation. n

> ProMine,uneambitioneuropéenne

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Publication du BRGM – 3, av. Cl.-Guillemin – BP 36009 – 45060 Orléans Cedex 2 – Tél. : 02 38 64 37 84 Directrice de la publication : Florence Vanin – Rédacteur en chef : Pierre Vassal – Rédaction : Jean-Louis Derenne – Conception et réalisation : Chromatiques éditions – Décembre 2010 – Dépôt légal à parution – ISSN : 1776-8994 – ISBN : 978-2-7159-2504-5 – Imprimé par un imprimeur Imprim’Vert sur du papier provenant de forêts durablement gérées.

En 2008, dans le cadre du Contrat de Projet État-Région Centre, le BRGM construisait sur son site orléanais une plateforme expérimentale pour tester les diffé-

rents échangeurs enterrés auxquels sont raccordées les pompes à chaleur géothermiques.« Notre ambition, explique Hervé Lesueur, responsable du projet, était d’expliquer les mécanismes responsables de la performance énergétique, en fonction de la nature des sols, des conditions climatiques et d’exposition et des sollicitations énergétiques des bâtiments. »La plateforme a donc été équipée de différentes sondes géothermiques verticales (jusqu’à 100 mètres de profon-deur), d’échangeurs horizontaux enterrés à un mètre et de forages sur aquifère. Deux ans plus tard, des résultats ont déjà été obtenus. Une thèse a ainsi été publiée sur les échangeurs horizontaux et – c’est une première –, leur fonctionnement a été modélisé, prélude à l’élaboration d’échangeurs innovants.« Notre travail, poursuit H. Lesueur, s’inscrit dans un contexte de déploiement significatif des différentes formes de la géothermie. » Le Grenelle de l’environnement envi-sage en effet d’ici 2020 une multiplication par six de l’uti-lisation de la géothermie. La géothermie superficielle y tiendra une grande place, tant pour le chauffage que pour le rafraîchissement.

De nouvelles voies de rechercheEn s’appuyant, notamment, sur la plateforme, le BRGM développe également aujourd’hui un nouveau concept : l’approche renouvelable de la gestion thermique du sous-sol.« Jusqu’à une période récente, explique H. Lesueur, on avait une approche « minière » de la géothermie : on se contentait de puiser la chaleur contenue dans les formations géolo-giques. Désormais, l’utilisateur devient acteur et peut amé-liorer la performance énergétique de son installation. Par exemple : sur des échangeurs enterrés, en boucle fermée, on peut contribuer à équilibrer les échanges thermiques en pompant de la chaleur l’hiver – ce qui refroidit le sol –, puis en extrayant ce froid en été, ce qui revient à accumuler de la chaleur pour l’hiver suivant. Le principe est identique

avec les fondations thermoactives, ou les champs de sondes géothermiques, dont le fonctionnement cyclique chaud-froid (chauffage-climatisation) permet d’équilibrer sur l’année les consommations thermiques et la régénération du sous-sol. »Cette approche durable de la gestion d’énergies peut s’étendre au stockage inter-saisonnier de chaleur dans les aquifères, par exemple en stockant la chaleur excédentaire produite en été par des usines d’incinération pour la réuti-liser en hiver afin de desservir un réseau de chaleur.Au-delà des enjeux individuels – équiper sa maison avec la géothermie –, ces recherches peuvent s’appliquer à l’échelle de quartiers, voire d’une ville entière… n

Vers une gestion renouvelabledes « stocks » géothermiquesDestinée à optimiser les performances des échangeurs enterrés des pompes à chaleur géothermiques, la plateforme expérimentale du BRGM explore de nouvelles perspectives de gestion dynamique et durable des ressources thermiques de notre sous-sol.

Dans le cadre du programme « Investissements d’avenir » (volet recherche du « Grand Emprunt »), le BRGM est partie prenante d’un projet qui propose de créer sous cinq ans, sur le campus de l’université d’Orléans, une plateforme de R&D en vraie grandeur de tous les systèmes de production et de gestion énergétique des bâtiments.Conçue également comme un démonstrateur cette plateforme permettra aux entre-prises de développer des technologies et combinaisons de technologies pour que les bâtiments consomment moins et au meilleur moment (période la plus économique).Les recherches du BRGM sur sa plateforme géothermique y trouveront, aux côtés d’autres procédés et techniques, toute leur pertinence.Portée par la région Centre, la ville d’Orléans et le Conseil général du Loiret, cette démarche associe l’université d’Orléans et le CNRS, le BRGM et les pôles de compéti-tivité S2E2 (Sciences et systèmes de l’énergie électrique) et DREAM (Durabilité de la ressource en eau associée aux milieux). n

> Unprojetdedémonstrateur

Les différents types d’échangeurs enterrés des pompes à chaleur géothermiques sur la

plateforme expérimentale du BRGM. © BRGM.

GÉotHERMiE

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