Le Kabyle Tasaḥlit : spécificités morphosyntaxiques

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  • 7/27/2019 Le Kabyle Tasalit : spcificits morphosyntaxiques

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    sinag - Asinag, 6, 2011, p. 95-114

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    Les spcificits morphosyntaxiques du parler kabyle

    dAokas 1 Berka Abdelaziz

    Universit de Bjaa (Algrie)

    Drus mai (baher) n tezrawin i d-illan f yiwaliwen i wumi (mamu) ssawalen tasalit, gar-asent awal n Weqqas (Aokas). Isem yakan n tsalit i ssexdamen deg temnat nBgayet (Bjaa) i ssemgiriden (ssemxallafen) d teqbaylit, immal-edd amzaray-nnes

    (lxilaf) d tmeggarut-a. Iswi n tezrawt-ad d umlan n umzaray illan gar wawal n Weqqasd yiwaliwen n teqbaylit yettwassnen, lada tin (tanna) n Ssumam d tin n temnat nTizi-Ouzou, ma (mtadd is) ilaq d tid-nnien (tinni-yanin) n tmazit akken (fadd) add-idhe ugar umzaray-a. Ad nezrew da (id) tulmisin tilasnayin, tid n wemyag dudui illan deg-sent kigan (bezzaf), ur nella ida akken (bac) ad tent-nezrew akk (akw )da. Ad d-naf dakken (belli) kra deg-sent ur gant tulmisin deg teqbaylit ka(n) (ukan),walayenni deg tmazit akk.

    Trs peu dtudes linguistiques sont consacres aux parlers dits tasa lit , dont celuidAokas 2, situs lest et au sud-est de Bgayet (Bjaa), et stendant jusquauxfrontires avec les wilayas de Jijel lest et Stif au sud-est. La dnominationmme de tasa lit (de larabe sael littoral ) quon oppose gnralement dans largion taqbaylit (kabyle), renseigne sur la spcificit de ce parler dans lensembledu kabyle . Lobjet du prsent article est de mettre en vidence les spcificitsde ce parler par rapport aux autres parlers kabyles plus connus, notamment ceux dela Soummam 3 et de la Grande Kabylie (dsormais abrgs en S. et G.K.respectivement), et de le comparer chaque fois dautres parlers amazighes pourmieux apprcier la spcificit en question. Nous nous limiterons ici au traitementdes particularits morphosyntaxiques en nous intressant plus particulirement auverbe et aux dictiques, et nous verrons que beaucoup de ces spcificits

    1 Aokas est une petite ville du littoral, situe vingt-cinq km lest de Bjaa (chef-lieu dewilaya).2 A lexception de deux mmoires de magistre (v. bibliographie), aucun autre travaildimportance et surtout aucune publication de linguistique na trait de ce parler, mme silest le parler tasa lit le mieux document avec notamment les travaux ethnographiques deSlimane Rahmani datant des annes 1930-1940. 3 Ce sont les parlers de la rgion du sud-ouest de Bjaa, situs au sud du Djurdjura,comprenant notamment Sidi-Aich, Ighzer Amokrane, Akbou et Tazmalt et qui ne sedistinguent pas vraiment de ceux de la Grande Kabylie (la wilaya de Tizi-Ouzou et sesenvirons) situs au nord du Djurdjura. Lessentiel des travaux et publications delinguistique kabyle (dictionnaires, grammaires) ont en effet trait de ces parlers.

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    locales correspondent des rapprochements avec dautres parlers, et quedautres le sont non seulement au niveau du kabyle, mais bien lchelle delamazighe.

    Larticle se divise en deux grandes parties, nous y aborderons dans la premire, etplus longuement, le verbe et nous verrons que les spcificits sont nombreuses etconcernent aussi bien le verbe lui-mme que ses modalits priphriques : lindicede personne, le prtrit ngatif, le participe, la ngation, les modalits dorientationspatiales et surtout les modalits prverbales de laoriste/aoriste intensif qui sont lchelle de lamazighe des prverbes sui generis. Nous aborderons dans la secondepartie les dictiques qui prsentent, eux aussi, des spcificits en tout type :pronoms indpendants, pronoms personnels affixes, rgimes directs en particulier,pronoms dmonstratifs, indfinis et relatifs.

    I. Au niveau du verbe

    Les particularits sont prsentes tant au plan paradigmatique, avec des diffrencesau niveau de la morphologie de lindice de personne, des dsinences du verbedtat, du participe, du prtrit ngatif quau plan syntagmatique, avec desdiffrences concernant la ngation verbale, la morphologie positionnelle du groupeverbal, etc.

    1. Lindice de personne : cest une modalit obligatoire du verbe enamazighe, amalgame au thme constitu de la racine et de la modalit aspectuelle.Cest un lment prfix, suffix ou ambifix. Voici le tableau des indices depersonnes du parler dAokas :

    Personne IndiceSing. 1 re

    2me 3me m.3me f.

    - t-ti/y-t-

    Pl. 1 re 2me m.2me f.3me m.3me f.

    n-t-mt-mt-n-nt

    A lindice de la 2 me pers. du sing. t- (ou t- dans la rgion de Bjaa) correspondun ambifixe diffrent par son suffixe dans le parler dAokas : t-t . Le deuximelment tant une dentale occlusive sourde qui serait une volution pardpharyngalisation du [ ]4 de la rgion de Bjaa, elle-mme une volution par

    4 Dans le parler chleuh qui prsente le mme indice de la 2 me pers. (v. par ex. Boumalk,2003 : 14) est atteste dans des manuscrits de la priode almohade, crits en graphie arabe,une forme de cet indice o la consonne suffixe est emphatique t- (Chaker, 2004 : 45).

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    assourdissement du phonme [ ], occlusif dental pharyngalis, des parlers du sudqui a donn par spirantisation le spirant des parlers S. et G.K.Une diffrence aussi concernant lusage de lindice de la 3 me pers. du masc. sing. :

    i/y-. La forme i- est plus utilise dans le parler dAokas o on la trouve dans tousles contextes, lexception du contexte postvocalique qui entrane unedissimilation de cette voyelle en semi-voyelle y ; contrairement aux parlers S. etG.K o le i- nest attest que devant une consonne suivie dune voyelle (iCV-)(Chaker, 1983 : 112) :

    Ikcem (entrer + prtrit) , irwel (fuire + prtrit) , iddem (prendre + prtrit) (Aokas)/ yekcem, yerwel, yeddem (S. et G.K.)

    2. Au niveau du verbe dtat : dans le parler dAokas, les indices de personnedes verbes dtat sont les mmes quel que soit laspect, alors que dans les parlers S.et G.K. ils ont une forme particulire au prtrit o ils sont suffixs au verbe. Unexemple avec le verbe wri /iwri tre jaune ; jaunir ; plir :

    Aokas : wri e 5 , tewri et, iwri , tewri (sing.)/ newri , tewri em, tewri emt,wri en, wri ent (pl.)

    S. et G.K. : werri e , werri e , werri , werri et (sing.)/ werri it (pl.).Il faut souligner cependant que ce nest pas une spcificit du parler dAokas auniveau panamazighe. Beaucoup de parlers amazighes, comme le chleuh, letamazight, le rifain, le mozabite ne connaissent pas cette distinction. Cetteconfusion des formes semble tre une volution et non un archasme, puisque enchleuh prmoderne , on trouve des traces de cette conjugaison indices de

    personne suffixs des verbes dtat (Kossmann, 2000b : 237).

    3. Le prtrit ngatif : la particularit du parler dAokas concernantlopposition prtrit vs prtrit ngatif, est que, lorsque le thme verbal au prtritse termine par une voyelle, lopposition des deux aspects nest pas marque,contrairement aux parlers S. et G.K o elle peut tre marque.

    Aokas : Iwfa/ul iwfa trouver + 3 me pers. sing. + schme de prtrit/ng. +trouver + 3 me pers. sing. + schme de prtrit ;

    Izla/ul izla gorger ;

    Idda/ul idda marcher ; aller , etc.S. et G.K. : yufa/ur yufi ;

    yezla/ur yezli ;

    yedda/ur yeddi , etc.

    5 On prfre toutefois lusage de la forme adjective la forme conjugue pour toutes lespersonnes, lexception de la troisime du singulier : d awra ay lli litt. cest jaune que

    je suis (je suis jaune) , plutt que wri e , forme pratiquement hors dusage. On peut direpar contre indiffremment iwri /tewri ou d awra /d tawra t.

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    Cest l une amorce de sa possible neutralisation lavenir, ce qui est dj le casdans certains parlers amazighes o le thme du prtrit ngatif nexiste plus. Cestle cas, titre dexemple, des parlers chleuhs de la plaine du Sous (Boumalk,op. cit. : 23). Lionel Galand justifie cette tendance par le fait que ce thme faitdouble emploi avec la ngation (1977 : 288) et est de ce fait redondant .

    4. Le participe : Aissou (2007 : 98) dans son mmoire de magistre, affirme que dans le parler dAokas il est attest seulement au prtrit et laoriste intensif ,contrairement au parler dIrjen, de Grande Kabylie, o le participe est attest mme laoriste. En ralit, cette forme verbale incompatible avec les modalits du genreet du nombre est atteste mme laoriste dans ce parler, mais avec une marquespcifique. Il sagit, en loccurrence, du prfixe i-, le mme que celui de lambifixei-n des autres parlers et des autres formes verbales, sachant quil est invers auprtrit ngatif ( n-i ). Voici des exemples qui montrent son existence laoristedans ce parler :

    - I -a d cekk ay di uss Cette nuit, cest toi de monter la garde 6 [on diraitara y assen , dans les parler S. et G.K, et ad i assen dans la rgion de Bjaa, o lerelatif ay/i tombe au lieu de samalgamer la modalit prverbale ou se maintenir] ;

    - Tura d kunwi ay di kem f imma-twen maintenant, cest vous de jugervotre mre [on dirait ara y ekmen , dans les parlers S. et G.K, et ad iekmen , dansla rgion de Bjaa], etc.

    Il se peut que le schme actuel du participe laoriste soit une volution,probablement par analogie avec celui de la 3 me pers. du sing., trs frquent dans lediscours, ou plus simplement par rosion phontique dans le cadre du principe

    dconomie linguistique, et danalogie (la forme existe dj), puisque un seul affixe,en loccurrence le i-, peut rendre le participe. Dailleurs, lrosion de cetteconsonne sonante ne se produit pas dans ce parler quen dbut de mots, elle seproduit mme en finale. Des mots comme itri, aksum ont des pluriels dpourvus decette consonne finale : itra, ikesma :

    - lin-as itra g-gallen-is Les toiles sont tombes dans ses yeux (elle a uneophtalmie purulente) ;

    - anis kkan i u an ay d'ikken ikesma (exemple ci-dessus).

    6 Les exemples donns ici sont tirs dun corpus lexicographique vari (contes, proverbes,devinettes, posie et autres textes en prose) qui nous sert de base llaboration dundictionnaire bilingue tasahlit (parler dAokas)-franais.

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    Le prverbe ara qui est issu dune contraction du relatif i/ay et de la modalitprverbale ad/a (Chaker, 1983) 7 , nest pas connu dans le parler dAokas quiconserve la succession des deux morphmes telle quelle.

    On retrouve le mme schme du participe laoriste en chleuh : A loppos desparticipes de laoriste intensif et du prtrit, le participe de laoriste nest pasaffect par la dsinence finale n. Il est toujours prcd de la particule prverbalede futur ra/rad , crit Boumalk dans son Manuel de conjugaison du tachelhit (op. cit. : 26).

    5. La ngation : au niveau morphologique, la modalit discontinue de ngationde lnonc verbal est spcifique au parler dAokas 8 : au ur ara ne + verbe +pas des autres parlers, correspond un ul ula . La diffrence se situe au niveaudes deux consonnes sonantes : la vibrante antrieure r et la latrale l. Il sagit enloccurrence dune latralisation de la vibrante r , phnomne moins connu en

    amazighe que le rhotacisme, cest--dire une volution vers le r dune autreconsonne, en particulier la latrale. Dans le parler de Chemini (dans la rgion deSidi Aich, Bjaa) ou celui de Boghni ( Tizi-Ouzou), par exemple, on trouve lephnomne inverse : cest la consonne l qui a une articulation plus proche dunevibrante que dune latrale 9. Cette volution 10 est quasi systmatique au niveaumorphmatique dans ce parler : ulad pas encore , awel que ne - optatif-ngatif , al jusqu , etc., wer ad, awer et ar dans les parlers S. et G.K.

    7 Dautres berbrisants comme K. Nat-Zerrad (affirmation personnelle) et AminaMettouchi ne partagent pas cette analyse. Dans un article consacr la grammaticalisationde cette modalit, cette dernire crit que Les deux ara , qui sont gnralement considrscomme des homonymes, sont issus du mme lexme, et que leur grammaticalisation sestfaite dabord travers la structure ngative pour ensuite par analogie et ranalyse stendre la structure relative (Mettouchi, 2001 : 215). Un des exemples intressants quelledonne pour confirmer son hypothse est le suivant : ihi a gma ur asn D n- i ara T -n Donc, mon frre, on ne leur a rien laiss tter ( p. 230).8 Cette spcificit morphologique de la modalit discontinue de ngation ul ula ou ul ani(Tichy, louest dAokas) semble tre celle des parlers tasahlit au niveau non seulement dukabyle, mais aussi de tous les dialectes amazighes. On peut se rfrer en loccurrence louvrage dirig par Caubet D. et Chaker S. (1996), notamment lexcellente synthsedAmina Mettouchi (p. 177-195). Le premier lment ul existe cependant en Tumzabtcomme morphme de ngation.9 Ce phnomne de rhotacisme est plus connu en rifain o il affecte aussi bien les mots dufond lexical amazighe que les emprunts larabe (Cadi, 1987 : 22) : ur (< ul) cur ,tasrit (< taslit ) marie , rqa (< lqa ) rencontrer 10 A. Basset crit ce propos que Le cas du r est plus complexe. Altr, il donnegnralement une impression auditive l, mais sans confusion, dans un mme parler, commeme la fait trs justement remarquer M. Renisio, entre tisira moulin et tisila chaussures (1952 : 7). Ce qui nest trs justement pas le cas du parler dAokas o,par exemple, le morphme de ngation ul se confond avec le substantif ul cur : wellehul ilha , peut tre traduit aussi bien et surtout par par Dieu quil nest pas bon , que par par Dieu le cur est bon . Confusion qui ne pose pas vraiment problme puisque lecontexte ou/et la situation permet toujours daccder au sens voulu.

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    En outre, il nexiste pas dquivalent dans les autres parlers de la modalit dengation de lnonc, en particulier verbal, att a qui, place au dbut, infirme son contenu :

    - att a i a-yi-dd baba awrit Je nai pas dhritier (je dispose seul de mesbiens) (litt. att a (ngation) il ma laiss mon pre un hritier) ;

    - att a ure -dd lila-w Je nai pas rempli mon rcipient (litt. att a(ngation) jai rempli mon rcipient) ;

    - l il n tura att a i le La gnration daujourdhui nest pas utile (litt. lagnration daujourdhui att a (ngation) elle est utile) , etc.

    Rabhi, cit par Aissou (2007 : 142), affirme que cet lment a lavantage dtre"conomique" en ce sens quil na aucun effet sur le syntagme verbal devantlequel il suffit de [le] placer pour obtenir un nonc ngatif . Il suffiteffectivement de retrancher le mot att a pour obtenir des noncs positifs, sansaucun autre changement.Il existe aussi dans le parler dAokas un adverbe de ngation qui lui est spcifiqueet quon ne retrouve pas dans les parlers kabyles occidentaux, y compris dans celuide la rgion de Bjaa. Cest ladverbe uhu non , quon retrouve par contre entumzabt avec le mme sens et la mme prononciation [oho], transcrit par Delheure(1984 : 73) par des u avec un point souscrit qui transcrit lemphase. Il est attestaussi en chleuh (Dray : 336). Voici quelques exemples dans le parler dAokas :

    - uhu ! ul ttwelliwe ul illa non ! il nest pas question que je rentre (litt. non !ul (ngation) je rentre ul (ngation) il y a (tre + accompli + 3 me pers. sing.)) ;

    - yiwet tenna-yas uhu i ybe aniyen-i i dd-iwsan lune a dit non ces trangersqui sont venus ;- tufam kra ni uhu ? avez-vous trouv quelque chose ou non ? , etc.

    6. Les modalits prverbales de laoriste/aoriste intensif : ici la spcificitest double : morphologique et fonctionnelle. Les formes ad 11 /a de ces modalitssont attestes dans ce parler, mais elles le sont surtout en posie et dans dautresdiscours labors (proverbes, serments, etc.) :

    - mi d-wellan a yi-d-refden * ad ellin f nnbi zizen lorsquon viendra meprendre * on priera sur le prophte valeureux

    - ad yili d lbaz * ddaw-es me a le yur quil soit un faucon * qui rgne surtous les oiseaux ;

    - ad wwte lenak-iw s imce , umma aqerdac ad icce je vais me frapper les joues avec un grand peigne laine, parce quune carde glisserait , etc.

    11 Cette particule, ad , se trouve, sauf erreur , dans tous les parlers amazighes (Basset,1952 : 36-37).

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    Les formes les plus connues de ces modalits dans ce parler sont di/i , qui sont lesseules utilises dans la conversation courante aujourdhui et quon retrouve aussi,videmment, dans tous les contextes o lon trouve les deux premires formes :

    - m

    i

    at-isbedd s u irec * tugdut dit

    ferrec quand il laura mis debout sur unseul pied * la dmocratie clora ;- ul ri i wacu * ma yekker yiwen i iddu * d i at-tencel tidi je ne sais

    pourquoi * lorsque quelquun se met marcher * il transpire (litt. elleexhale de lui la sueur) ;

    - awi-dd tame ut d uzgen, mi di yu uzgen di dd- teqqim tme ut prends unefemme et demi, quand le demi spuise il resterait une femme ; etc.

    Dans notre corpus, mme dans cette langue labore, ce sont ces deux derniresformes qui sont les mieux reprsentes.

    Mais au plan fonctionnel, la particularit du parler dAokas est que les deuxprverbes di et i nont pas les mmes valeurs, notamment aspectuelles et modales,contrairement ad et a qui sont de simples variantes contextuelles . Alors que lamodalit di correspond globalement aux deux formes attestes dans les parlers S. etG.K, une partie de leurs emplois, la modalit i exprime avec le verbe quelleprcde un procs postrieur par rapport un autre exprim laoriste ou auprtrit, une sorte de rsultatif. Aussi, la trouve-t-on aprs un verbe support.

    - d i at- te ef taddart alamma i tel eq tejma t il est arrt par les villageoisqui le retiennent jusqu larrive de la djema (litt. il le retiendra le village

    jusqu ce quelle arrivera la djema) ;

    - d i

    iruii

    wi il ira faire patre (litt. il ira il patra) ;- u i t wellit i ur imawlan-im va retourner chez tes parents (litt. va tu

    retourneras chez tes parents) ;- ib a i i jwej i mmi-s il veut marier son fils ;- ihi ilaq i nerr ife iwej anis i dd-ikka donc, on doit remettre ltincelle

    lendroit do elle tait partie , etc.

    Dans le premier exemple, son emploi avec le verbe quelle dtermine, correspondau prtrit dans les parlers S. et G.K :

    - ad t-

    te

    ef taddart alamma tel eq-ed tejma t.Dans les autres cas, son usage correspond celui de ad :

    - ad iru ad ikes il ira faire patre ; yeb a ad yejwej il veut se marier ,etc.

    Le prverbe i semploie aussi pour exprimer un procs imminent ou prochetemporellement et qui nest pas ncessairement postrieur celui dun verbeemploy prcdemment :

    - Nekk di ibe , tura i y-dd-tceyy et edd i essasen i wexxam Moi je vaismabsenter, maintenant tu menverras quelque gardien la maison ;

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    - ass-a di n u i newwes, i neffe i wedrar Aujourdhui nous allons nouspromener, aller en montagne , etc.

    On la trouve galement aprs la conjonction miqal lorsque, au moment o ,

    exprimant un procs quasi concomitant un autre exprim avec la modalitdi (dans les parlers S. et G.K cest la modalit ara quon trouverait dans cecontexte) :

    - miqal i t kecmet i ur-es dak-sselse seba tqendar lorsque cest lemoment de rentrer chez lui, je te vtirai de sept robes ;

    - Miqal i dd-isreg yiwen uqerruy dak-dd-tafeg yiwet n tqendurt Lorsquilsortira une tte, une robe te volera .

    Mais, si lon examine plus attentivement ces noncs, on remarquerait que lesprocs exprims avec la modalit i sont plutt postrieurs ceux exprims avec di :le personnage ne rentrera en effet que lorsquil aura t vtu de sept robes. Ce quiconfirme ce que nous avons crit ci-dessus.Cette concomitance est par contre plus vraie quand le deuxime procs est exprimdans un nonc non verbal :

    - miqal i int-isu, d netta ay d el an n ala in quand il les aura eues, ilsera le roi des rois (litt. cest lui le roi des rois) .

    On trouve aussi le prverbe de laoriste i devant des conjonctions comme bac pour que , qbel avant que, de , o il est employ dans le verbe de lasubordonne qui peut prcder la principale en nonc focalis :

    - d i isseddu did-es tame ut-is bac i dd-iq u il emmne avec lui sa femmepour rgler son affaire ;

    - qbel i neggzet a er ani di terset avant de sauter il faut savoir o se poser(litt. avant tu sauteras sache o tu te poseras) .

    On trouve encore cette modalit en noncs coordonns par la conjonction ni ou , mais dans le second verbe de lnonc complexe, juste aprs cetteconjonction :

    - att-sqedcen ni i qedcen seyyes am tuye ils lutiliseront ou sen servirontcomme les autres [la langue].

    Nous sommes tent, aprs lexpos de ces diffrents contextes dapparition de cettemodalit, de conclure que cest la forme i + aoriste qui sest substitue en grandepartie dans ce parler celle du simple aoriste qui sest considrablement rsorb auprofit de cette nouvelle forme, mais aussi de celle du prtrit. La seule valeurquil semble avoir aujourdhui, si lon excepte celle de l impratif , et dans desdiscours ayant gnralement une certaine profondeur historique (contes,proverbes), cest celle d enchanement , dnomination de Fernand Bentolila(1981), cest--dire une forme dnotant une consquence automatique etinvitable ou vidente en soi dune action prcdente , crit K.-G. Prasse, traduitet cit par Leguil (2000 : 285). Cet aoriste enchan est donc situ dans unnonc contraint, dpendant dun autre nonc exprim dans une autre forme

    verbale :

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    - telemt acu b i , i t ftet idurar i dd-awi aman terrt-in tu sais ce que jeveux, fais que les montagnes souvrent (litt. tu ouvriras les montagnes), que

    je ramne de leau et referme-les ;-

    i ur-edd tibe iwt, iqql-edd yawf-edd iselfan-is il remplit une bouteille,revint et trouva ses beaux-frres ;- imi aqerruy-iw d ini, wan ib an i ihde yini puisque ma tte est une pierre

    de foyer, celui qui veut parler qu'il dise , etc.

    Quand la forme verbale de la principale est au prtrit, on a tendance enchaner aujourdhui dans la langue courante avec un autre prtrit. Dans ledeuxime exemple on dirait plutt : iqql-edd iwfa-dd iselfan-is. Quant laoriste dutroisime exemple exprimant ce que Bentolila appelle l ordre dsinvolte quiconsiste affirmer hautement son indiffrence lgard dune action possible detel ou tel protagoniste (1981 : 150), il peut tre remplac par la forme i + aoriste

    quon retrouve dans un nonc linguistique quivalent :- wib an a daw i y aja ayyaw celui qui veut un ennemi quil attende sonneveu .

    Lindice de la troisime personne du singulier i- sest ici dissimil en y- pourrompre le hiatus, mais ce contexte peut aussi phontiquement entraner llision duprverbe i- qui ferait confondre les deux formes verbales. Dans le contexte suivantle prverbe i peut stre lid :

    - wib an zzin aqmamas, i nu axxam alemmas Celui qui dsire la beautsans tche, doit se diriger vers la maison du centre .

    Cest dautant plus plausible que cette voyelle slide souvent dans un contexteprvocalique. Dans lexemple suivant o cette voyelle nest pas articule, elle estsuivie de la voyelle a du pronom affixe ( as- ) du deuxime verbe et de la voyelle i-,indice de la 3 me pers. du sing. du troisime verbe :

    - u (i) as-tanit i baba-m (i) irr iman-is d ama un va dire ton pre defaire semblant dtre malade .

    Ce sont deux contextes o laoriste nu nest pas admissible. Dans le premier,lattraction de laffixe personnel implique lexistence dun prverbe qui lauraitattir. Lusage de laoriste en loccurrence impliquerait une suffixation du pronompersonnel ( u tanit-as ). Dans le deuxime, la valeur de non-rel , une autrednomination de Bentolila (1981), quexprime le verbe err nest pas celle delaoriste nu qui est une forme valeur neutre (ni rel, ni non-rel) (Bentolila, op.cit. : 150). Dans les parlers S. et G.K on utiliserait dans le mme contexte la formead/a + aoriste : ua(d) (a)s-tini i bab-am ad yerr iman-is Les deux formes, aoriste nu et prverb par i, ont en commun dans le parlerdAokas de ne pas figurer en dbut dnonc. Lanalyse de Lionel Galandconcernant laoriste qui [] nest pas le premier verbe de lnonc. Parconsquent sa prsence suffit lier en quelque faon la proposition dans laquelle ilse trouve celle qui prcde (1977 : 298) sapplique tout autant la forme i +aoriste qui semble ravir aujourdhui cette position laoriste dans le parler

    dAokas. Le mme auteur la par ailleurs bien not dans un article consacr

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    laoriste sans particule : Dans lusage courant du kabyle et du touareg, il[laoriste sans particule] a cd la place dautres formes, inaccompli ou aoristeavec particule (Galand, 2002 : 266).

    En fait de spcificit, il y a l une particularit verbale de ce parler, aussi bien surle plan de la forme que du sens, non seulement au niveau du kabyle, mais bien lchelle panamazighe.

    7. Les modalits dorientation spatiale : ce niveau aussi, nous relevons unediffrence morphologique et mme syntaxique, dans le sens d ordre des mots dans le discours. La consonne dentale sonore de cette modalit verbale estglobalement tendue dans le parler dAokas, alors quelle se ralise le plussouvent (Chaker, 1983 : 138) comme une simple occlusive dans les parlers S. etG.K. La seule variante qui se ralise dans ce parler, dans un contexte post-vocalique, comme une simple occlusive moyennement tendue est d(d) :

    - awi-d xali-s amne son oncle ;- Ifka 12-yi-dd Rebbi ul iccu Dieu ma donne sans avarice , etc.

    Mais la spcificit la plus vidente ce niveau, est lexistence dune variante add qui prcde toujours un pronom personnel affixe rgime direct, 3 e pers. (sing. etpl.) :

    - I f-add-it u iliw-enn, inehr-add-it 13 almi t-taddart Logre le prit et leconduisit jusquau village ;- Lxalat-nnsen madd-in- rant ttze ritent Leurs femmes, quand elles les

    virent, lancrent des youyous ;- ilaa-y-add-in, inna-yasen : akan di dd-ib en yiwen ! il sadressa eux et

    leur dit : "Que personne ne se retourne !" ;- iwfa-y-add-it g-gebrid, i edda isa ef-add-it almi d axxam il la trouva sur

    son chemin et laida jusqu chez-elle , etc.

    Diffrence concernant aussi la variante - edd quon retrouve dans ce parler mmedans un contexte post-vocalique exclu pour les parlers kabyles occidentaux, ycompris celui de la rgion de Bjaa :

    - irgazen ttemye ran, wa iterra-y-edd i wa les hommes sappelaient, lunrpondant lautre ;- kulci inna-y-edd-i il ma tout dit (litt. tout il me la dit) ;

    12 La forme la plus connue de ce verbe est ekf , ayant subi une interversion de ses deuxconsonnes. Cest cette forme qui est cependant atteste en touareg, parler souvent qualifide conservateur par les berbrisants, ce qui veut dire que linterversion peut aussi streproduite dans lautre sens.13 Le pron. rg. dir. 3 e pers. du sing. nest pas dans ce contexte (suffix add ) (a)t/(a)tt pour le masculin et le fminin respectivement (v. tab. plus loin), mais it commun aux deuxgenres, ce qui constitue une autre spcificit morphosyntaxique de cette modalit.

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    - netta att a iwsa-y-edd s tkercett-enn lui ntait pas venu avec les tripes ,etc.

    Dans les autres parlers, objet de notre comparaison, on dirait plutt : yettarra-d ;

    inna-yi-t-id ; yusa-d. Au plan syntaxique, lordre o la particule dorientation spatiale est suivie dupronom personnel affixe semble tre une spcificit du parler dAokas nonseulement au niveau du kabyle, mais lchelle panamazighe du moins dans lesparlers tudis o cette modalit, quelle soit place avant ou aprs le verbe, suittoujours le pronom affixe au lieu de le prcder (Basset, op. cit. : 33-34) : ye ef-it-id l ul ; mi ten-id- rant, etc.

    II. Au niveau des dictiques

    Les spcificits morphologiques sont ici nombreuses. On les trouve tant auniveau des pronoms indpendants qu celui des pronoms affixes et autresdictiques.

    1. Les pronoms indpendants : le tableau suivant (Rabhi, 1994 : 101 ;Aissou, 2007 : 152) illustre bien les particularits de ce parler :

    Il ressort de ce tableau quentre formes courtes et formes longues les diffrencesavec les parlers S. et G.K concernent quasiment toutes les personnes. La seulepersonne dont les formes sont identiques est la 3 me pers. du singulier, fminin etmasculin, qui ne possde pas de formes allonges. Cette identit nest pas totalesi lon considre laspect phontique, puisque les formes dAokas sont articulesavec une consonne dentale [T] occlusive, alors quelle est affrique [Ts] dans lesautres parlers objet de notre comparaison.

    Personne Forme courte Forme allonge1re 2me m.2me f.

    3me

    m.3me f.

    nekk cekk kemm

    nettanettat

    nekkina/nekkintacekkina/cekkintakemmina/kemminta

    --

    Singulier

    1re m.1re f.2me m.2me f.3me m.3me f.

    nekninkentikunwikunemtinuhninuhenti

    neknim/neknit nkentim/nkentit kunwim/kunwit kunnemtit nuhnim/nuhnit nuhentim/nuhentit

    Pluriel

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    2. Les pronoms personnels affixes 14 : les particularits concernent surtout lespronoms personnels affixes de verbe rgime direct.

    2. 1. Les pronoms personnels affixes de verbe rgime direct

    Pron. pers. suffix au verbe prfix au verbeSing. 1 re

    2me m.2me f.3me m.3me f.

    -(i)yi-(y)ik -(y)im-(y)(a)t -(y)(a)tt

    (i)yi-ik-im-(a)t-(a)tt-

    Pl. 1 re m.1re f.2me m.2me f.3me m.3me f.

    -(y)ane -(y)ante -(y)iwen-(y)ikumt -(y)in-(y)int

    a en-a ent-iwen-ikumt-in-int-

    La diffrence avec les parlers S. et G.K. concerne donc quasiment lensemble despersonnes 15. Mise part la premire personne qui possde aussi dans ce parler la

    14 Faute despace, nous prsenterons ici en note les spcificits des pronoms affixes deprpositions, de noms et noms de parent qui concernent toutes la 2 me pers. fm. pl. Pour

    les prp. cest -(a)kumt , correspondant dans les parlers S. et G.K. (a)k w

    ent/-(a)kunt . Cettediffrence se rpercutera au niveau des pronoms affixes du nom qui sont construits sur ceuxde la prposition avec prfixation dun dterminant (Galand, 1966). On retrouve une formeproche dans le parler tachaouit (Penchoen, 1973 : kmt : 62). Pour les noms cest -nkumt,correspondant nk went/-nkunt dans les parlers S. et G.K., et la variante - nnun du pl. masc.

    nwen , non atteste dans ces derniers. Et cest enfin : -tkumt, pour les noms de parent,correspondant dans les parlers S. et G.K. tk went/tkunt . La quasi-identit des affixes post-nominaux et post-prpositionnels confirme que les prpositions berbres doivent treconsidres comme danciens noms (Nom + affixe personnel = Prposition + affixepersonnel) (Chaker, 2004 : 52).15 Mises part la troisime personne du singulier et, un moindre degr, la premirepersonne du pluriel, la ressemblance est troublante avec une srie spciale des pronomsrgimes directs du parler touareg de lAr qui ont une forme spciale (sauf la 1

    re personne) lorsquils viennent immdiatement aprs une forme verbale dpourvue dindice

    suffix, sil sagit dun verbe accompli [prtrit] en e/a/ (comme g(u)- ) (Galand,2002 : 132). Ces pronoms sont les suivant : sing. i ; ik, im ; e, et. Pl. ana ; iw n, ikmt ; en,ent , les personnes sont spares par des ; . Pour la 3 me pers. du pluriel, des formesidentiques sont attestes en touareg de lAhaggar : masc. in, fm. int , quAndr Bassetexplique moiti par la disparition de llment pronominal t (1952 : 33). Reste expliquer la prsence de la voyelle i qui lest aussi pour toutes les autres personnes, lexception de la 1 re du pluriel (et mme de 3 me du sing. pour le parler dAokas). Ellepourrait donc tre un archasme conserv dans ce parler ; ou une volution par analogieavec les autres personnes qui le contiennent ; ou encore le rsultat dun amussement du t dabord en h, phnomne trs connu en chaouia et un peu moins dans le parler dAokas,puis en y, par semi-vocalisation du h, et enfin en i, par vocalisation du y.

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    variante vocalique i (-i, i-), connue dans les autres, atteste surtout en posie 16,toutes les autres personnes sont plus ou moins diffrentes. La voyelle i pour la 1 re pers. intervient aprs un verbe finale vocalique ; et le yod (y), pour les autrespersonnes, sintercale pour rompre le hiatus. On retrouve aussi la forme it du pron.aff. 3

    mepers. du sing., masc. et fm. indiffrencis, aprs la particule de direction add qui nadmet pas les formes canoniques (a)t/(a)tt, mais aussi dans les discours

    littraires (posie, proverbe) qui recourent au paradigme dune sorte de konkabyle, comme P. Galand-Pernet et A. Bounfour le soutiennent pour les parlersmarocains : La kon existe au niveau des dialectes ; cest ainsi quil y a unekon tachelhit (P. Galand-Pernet), incontestablement aussi une kon tamazightdont les agents sont les Imedyazen et une kon rifaine (Bounfour, 2007 : 12).Voici quelques exemples de lusage de cette forme qui possde une varianteabrge i :

    - I ef-add-it u iliw-enn, inehr-add-it almi t-taddart L'ogre le prit et le

    conduisit jusqu'au village ;- iwfa-yadd-it u ilas g-gebrid, i edda isa ef-add-it almi d axxam Un lion latrouva sur son chemin et laida jusqu chez-elle ;

    - Uhu ! aya s ur-i be ed-it ! Non! cela loigne-le de moi ! ;- Zuzen-it, zuzen-it ay i es ! Berce-le, berce-le sommeil ! ;- D lehlak illan g mmi tserget-add-i Fais sortir le mal dont est atteint mon

    fils , etc.

    2. 2. Les pronoms personnels affixes de verbes rgime indirect : ici lidentit

    des formes est quasi totale. A lexception de la premire personne du pluriel, o ladiffrence est plus vidente avec la forme prfixe a en- 17 , une mtathse de ane ,pronom suffix, qui existe comme variante dans les parlers G.K., de la forme a ,plus connue. La voyelle a des formes suffixes tombe devant la particule daoristea.

    16 amek ib a ay di-nehhe il me mnera par le bout du nez (litt. comme il veut quil meconduira) ; bnan-i lehl-iw axxam les miens m'ont bti une maison , etc.17 Cette forme de pron. aff. rg. indir. de la 1 re pers. du pluriel est celle, unique pour cettepersonne, du parler chaouia (Penchoen, 1973 : 66). Elle pourrait donc provenir de cedialecte qui fut en contact direct avec lest de Bjaa il ny a pas longtemps. La rgion deJijel nest quasi compltement arabise que depuis quelques dizaines dannes. Il pourraitaussi sagir dune simple mtathse comme il en existe beaucoup dans ce parler.

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    Pron. pers. suffix au verbe prfix au verbe

    Sing. 1 re 2me m.

    2me

    f.3me

    -yi-(y)ak

    -(y)am-(y)as

    iy-ak-

    am-as-

    Pl. 1 re m.1re f.2me m.2me f.3me m.3me f.

    -(y)ane -(y)ante -(y)awen-(y)awent/-akumt -(y)asen-(y)asent

    a en-a ent-awen-awent-/akumt asen-asent-

    3. Les pronoms dmonstratifs : les particularits sont ici plus nombreuses quepour les pronoms personnels affixes de nom et de prposition. Elles concernent defaon ingale tous les types dmonstratifs. Nous reprendrons ici les listes quasiexhaustives donnes par Aissou ( op. cit. : 170-177) dans son travail decomparaison des parlers dAokas et dIrjen en modifiant un peu leur prsentation etparfois leur contenu.

    3. 1. Les dictiques de proximit : le d qui exprime la proximit, paropposition n exprimant lloignement en amazighe (v. par exemple lesparticules dorientation spatiales), nest pas courant dans les formes rduites, alorsquil est constant dans les formes allonges. Lallongement qui exprime enparticulier un renforcement de lexpression implique dabord lajout de cetteconsonne, parfois doublement : wadakad celui-ci , tadattad celle-ci , etc. Ilressort du tableau ci-dessous que mises part les formes les plus rduites ( wa, ta etwi, ti ) qui sont communes aux parlers objet de notre comparaison, toutes les autressont spcifiques au parler dAokas.

    Nombre Genre Formes rduites Formes allongesSing. Masc.

    Fm.

    Wa(d) celui-ci

    Ta(d) celle-ci

    Waha/wadaka(d)/wahadaka (