53
Le Livre Bleu Tome 2 Synthèse des travaux et recommandations du deuxième Forum de la Mer El Jadida du 7 au 11 mai 2014

Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Le Livre Bleu

Tome 2

Synthèse des travaux et recommandations

du deuxième Forum de la Mer

El Jadida – du 7 au 11 mai 2014

Page 2: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Le Forum de la Mer remercie chaleureusement tous les participants de la deuxième édition du Forum de la Mer pour leur présence et plus particulièrement tous les intervenants pour la qualité de leurs interventions et le niveau des débats qu’ils nous ont offert. Un grand merci à Yannick Léger et Thomas Martinetti, rédacteurs passionnés et assidus, sans lequel ce Livre Bleu n’aurait pas vu le jour. Bonne lecture !

Page 3: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Sommaire

Edito – Le Bien Commun…………………………………………………………………………………………… 4 Séance plénière inaugurale……………………………………………………………………………………….. 5 Droit de la Mer…………………………………………………………………………...…………………………… 14 Conférence de Gilles Bœuf : océan, biodiversité, ressources……………………………………… 21 Pêche durable, aquaculture, biodiversité et ressources halieutiques.………………………… 27 Financement et assurance pour la pêche artisanale…………..……………………………………… 35 Ressources et environnement…………………………………………………………………………………. 41 Conférence des Ecrivains de Marine : rencontre littéraire avec la Mer………………………. 49 Tourisme bleu et aménagement du littoral………………………………………………………………. 51 Séance plénière de clôture……………………………………………………………………………………… 56

Page 4: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Edito Le Bien Commun

De la Mer, les rédacteurs de l’Appel de la Haute Mer ont écrit : « S’il appartenait { une seule nation, un tel trésor serait chéri. ». Cette assertion, simple et éloquente, recèle un corollaire logique mais pénible à admettre : les outrages que subit la Mer viennent du fait qu’elle est un bien commun de l’humanité, qu’elle n’appartient { personne tout en appartenant à tous. Il s’agit l{ d’une énième illustration de la théorie de la « tragédie des communs », dont les tenants préjugent qu’un bien universel - comme la Mer et ses ressources, par nature et faute de droits de propriété - finira immanquablement par être surexploité.Plus optimistes et convaincus qu’une approche collective « permettra de sauvegarder et de gérer durablement les richesses de ce bien commun unique », les signataires de l’Appel de Paris pour la Haute Mer ont invoqué « une gouvernance internationale partagée, transparente, démocratique » et se sont résolument engagés à agir dans ce sens. Et si ce qui est valable { l’échelle internationale l’était également au niveau national ? Une gouvernance collective, guidée par la transparence et la conscience du bien commun, nous permettrait-elle de nous assurer de la protection, du développement et de l’exploitation durables de la Mer et du littoral marocains ? L’état, les entreprises, les associations, les syndicats, les citoyens pourraient-ils réfléchir et travailler ensemble dans le partage et la démocratie pour développer « l’économie bleue » dans le respect de l’environnement ? Assurément, si les intérêts de toutes les parties prenantes étaient bien compris et que l’évitement et les déclarations sans lendemain étaient enfin remplacés par le dialogue constructif et les actions structurantes. A titre individuel, c’est l’appropriation de l’espace public qui est de première nécessité. La découverte et la connaissance de l’environnement naturel sont des préalables à son respect et constituent la voie royale vers un développement durable. La responsabilité d’un travail de fond sur les mentalités incombe aussi bien { l’état qu’{ la société civile, aux médias et aux éducateurs. Il est grandement temps de s’atteler { convaincre nos enfants que les rues, les plages, les forêts, le désert et la Mer leur appartiennent. En attendant que la Mer et le Littoral soit réellement considérés comme tels, le Forum de la Mer est et restera un bien commun à tous ceux qui y participent ! Des officiels et partenaires qui nous manifestent leur soutien aux étudiants qui participent aux ateliers, […], de « Fleur de Passion » qui a traversé les mers pour nous rejoindre aux Jdidis qui nous ont généreusement accueillis, de nos frères sénégalais à nos amis portugais qui ont répondu à notre invitation, des prestigieux Ecrivains de Marine à l’enfant qui jouait sur la plage, le Forum de la Mer appartient { tous ! Mehdi Alaoui Mdaghri, Fondateur du Forum de la Mer Edito paru dans le supplément TelQuel spécial Forum de la Mer, le 20 juin 2014.

Page 5: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Séance plénière inaugurale Officiels et grands témoins

Modérateur : Vincent PERRAULT, LCI.

Le journaliste Vincent Perrault a assuré l’introduction de cette séance d’ouverture. Selon lui, cette édition est celle de la confirmation après le pari lancé en 2013. Elus, industriels, société civile et médias ont travaillé durant l’année pour développer l’économie bleue. La mer doit apporter { chacun d’entre nous des raisons d’espérer.

Mais le développement du littoral et de son infinité d’horizons posent d’énormes enjeux dont les réponses, multiples et protéiformes, sont encore mal maîtrisées. Comment concilier les intérêts des uns et des autres ? Et avant tout, les intérêts de l’Homme dans son environnement sur le long terme ? « Respectons la Mer, généreuse, elle partage, elle donne ». Cette année encore, le Forum de la Mer nous invite à tourner le regard vers le large, davantage même que l’an dernier, et encourage les échanges internationaux. Symbole de cet esprit d’ouverture et d’initiative qui caractérise l’équipage du Forum, le partenariat exceptionnel avec le Portugal et le Sénégal cette année. Aziz RABBAH - Ministre de l’Equipement, du Transport et de la Logistique.

S’inscrivant dans la lignée des objectifs et des prérogatives de l’administration qu’il dirige, Monsieur Aziz Rabbah entend assurer la mission qui lui est confiée : développer la Mer, mais en la respectant, car on ne peut bâtir que sur un terrain favorable, propice et solide. Et si la Mer qui borde les côtes marocaines devait ne plus être attractive, c’est l’ensemble du pays qui en pâtirait.

Page 6: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Le Ministre a développé un discours d’engagement et de prospection. Il a égrené sa feuille de route : soutenir les réseaux de transport maritime, renforcer la connexion avec les pays européens, tisser des alliances de fret et de routage avec l’ensemble des infrastructures portuaires partenaires, européennes ou africaines notamment. En parallèle de ces orientations de politique de développement, le Ministre affirme cependant que ces dernières ne peuvent être mises en œuvre et devenir opérationnelles sans concertation avec les élus locaux. Pour illustrer son propos « les villes gagnent la Mer comme le Maroc regagne la Mer », le Ministre s’appuie sur les exemples d’Agadir, et le développement de son infrastructure portuaire, de Tanger, qui présente une vision loin de l’archétype du développement purement immobilier, ou de Safi, et sa conversion par la requalification des ports de la ville. L{ se situe le cœur du discours du Ministre : repenser la vocation des ports marocains. Pour cela, Aziz Rabbah a défini la stratégie du ministère concernant la mer : rénover les textes, réformer le cadre institutionnel, le cadre de concertation, développer les infrastructures (extension, requalification), développer les services maritimes, regagner l’industrie navale. Cette stratégie s’appuie sur des principes clés et résolument ancrés dans le XXIème siècle : respect de l’environnement, qualité, sécurité. Cette stratégie, pour être mise en œuvre, devra reposer sur la formation, le développement de la ressource humaine, et la constitution de pôles de développement portuaires et maritimes. Pour conclure, si la mer est un facteur de développement économique et social, elle doit s’intégrer dans un schéma global tenant compte de l’ensemble des intrants connexes. Hakima EL HAITE - Ministre Déléguée auprès du Ministre de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement, chargée de l'Environnement.

Pour Hakima El Haite, les temps ont changé : les marocains regardent la Mer. C’est en ce sens qu’elle exhorte le Forum à apporter des solutions concrètes aux problématiques et enjeux liés à la Mer et aux Marocains. La Ministre déléguée à l’environnement fait ce constat implacable : la Mer est une richesse naturelle, halieutique, patrimoniale, culturelle, humaine. La protéger, c’est protéger l’Homme, c’est protéger l’économie.

Page 7: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

La Ministre réalise une démonstration de la gestion de la Mer sur le territoire marocain : d’un côté, des créations d’emplois, une véritable dynamique de développement et une modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande partie de la population est désormais concentrée sur le littoral. De l’autre, ce sont 90% des rejets industriels rejetés à la Mer sans être traités, des problèmes d’érosion dues aux activités anthropiques, ayant entrainé la perte de 7 plages et 15 en cours de disparition ! Ce seul fait, grave ou insignifiant suivant les convictions portées, influe néanmoins sur une réalité : il coute 0,52% du PIB sans compter les coûts humains et sanitaires. En cause, selon la Ministre, l’absence d’une vision, d’une gestion intégrée des zones littorales. Si des programmes existent (Plages propres, Plan national d’assainissement liquides et solides des villes côtières…), ils sont trop disparates et sans liens forts les uns avec les autres. Ce manque de synergie est une question d’actualité au niveau national. Le gouvernement milite ainsi pour une approche de gestion intégré et durable du territoire car tout le monde est concerné par les questions qui touchent au littoral. Cette absence de vision intégrée, Hakima El Haite l’explique par le manque d’ancrage juridique, qui pour la première fois va voir le jour. La Loi cadre de mars 2014, précise désormais que « le littoral est un bien de la nation » (art 6 &7.) La Ministre indique, que dès lors, une Loi Littoral sera adoptée, et est en cours de discussion au niveau interministériel. Cette dernière sera présentée au Parlement d’ici la fin de l’année et résoudra une anomalie de taille : le Maroc est un des rares pays à ne pas disposer de Loi Littoral, alors même qu’il dispose de 3 500 km de côte ! Cette loi apporte un impératif de besoin de protection de l’environnement, qui de fait, se transforme en protection de l’économie. En conclusion, la Ministre espère que la loi est venue poser les jalons de la protection du littoral et les principes de planification. Mais la société civile est aussi partie prenante au même titre que les Pouvoirs Publics et le monde économique. Cette conclusion du débat n’est pas anodine ; elle est prise en compte dans le débat interministériel en cours, pour que la stratégie qui sera définie ait force de loi.

Page 8: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Rupert JOY - Ambassadeur, Chef de la Délégation de l’Union Européenne au Maroc.

Le représentant de l’Union Européenne durant ce Forum partage le sentiment des intervenants précédents, et loue les merveilles naturelles du Maroc. Il rappelle que l’Union Européenne était déjà présente lors de la première édition. L’évènement doit être soutenu, insiste-t-il ; pas tant pour se retrouver, que pour l’impact potentiel et l’effet levier sur les populations « des deux rives de la Méditerranée ».

Mer et océans fournissent des services écosystémiques, génèrent de l’innovation, de la croissance et de l’emploi. Pour preuve,

Il s’agit donc d’un sujet crucial pour l’UE avec des interactions inéluctables. Comme le reconnaît Rupert Joy, les défis et avancées politiques en matière de gestion maritime et de pêche sont certains depuis le forum 2013, ce qui en fait un évènement de référence. L’UE travaille désormais avec le Maroc sur une approche maritime intégrée en Méditerranée et développe une approche commune sur l’Atlantique avec un projet de gouvernance maritime dont le programme comporte les objectifs suivants :

- Amélioration du milieu marin contre la pollution des navires, - Etablissement d’une carte de vulnérabilité des côtes marocaines.

Un

ion

Eu

rop

éen

ne

23 pays côtiers

2 200 ports de commerce

5,4 millions d'emplois

500 milliards € de Valeur Ajoutée /an

Page 9: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Amadou SOW - Ambassadeur de la République du Sénégal au Maroc.

L’Ambassadeur de la République du Sénégal souligne l’importance de la manifestation en particulier pour déclencher un nouveau cycle de concertation et de coopération entre pays africains et investisseurs. Le Forum de la Mer est un évènement de nature à « insuffler un dynamisme nouveau entre pays africains visant à préserver l’unité des peuples. »

Le développement des ressources humaines, les réformes institutionnelles, la coopération régionale et internationale, le développement du secteur maritime, la surveillance dissuasive des eaux, la mise en place d’un cadre juridique partagé sont autant d’impératifs et de sujets essentiels capables d’être traités par le Forum de la Mer qui constitue, en cela, un espace de rencontre de référence en Afrique. Amadou Sow détaille les caractéristiques géographiques du Sénégal : seulement 700 km de côte atlantique, mais 212 000 km² de territoires maritimes. Ces atouts constituent les éléments clés du développement économique et social du pays qui a adopté plusieurs plans stratégiques :

- Plan Sénégal émergent, - Pêche et aquaculture, - Mise en place d’une véritable économie maritime adaptée à la pêche durable et la

préservation de la biodiversité. Le Sénégal encourage ainsi la réhabilitation des mangroves, « trésors naturels » qui sont un exemple de milieu riche de diversité où l’homme peut durablement puiser nourriture et autres bienfaits. Le Maroc et le Sénégal, pays frères et amis, partagent des intérêts économiques de longue date, liés par plusieurs accords de coopération économiques et scientifiques (Contrôle plus efficaces des eaux ; Signature d’une convention générale de transports maritimes ; sureté maritime et portuaire ; Signature d’un mémorandum d’entente…) La présence du Sénégal au Forum de la Mer est justifiée car il offre un cadre d’espace important d’échange entre différents acteurs maritimes et portuaires d’Afrique.

Page 10: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Mouâad JAMAÏ - Gouverneur de la Province d’El Jadida.

Le Gouverneur de la Province se réjouit du retour à quai du Forum de la Mer à El Jadida. Déclinant sa stratégie d’action depuis sa nomination, il s’interroge sur l’articulation de 3 axes et leur interaction pour un développement durable du littoral :

- Stratégie éducative en particulier dans le milieu rural, - Santé, - Développement territorial du littoral.

Pour le Gouverneur, la direction est claire : pour développer durablement les zones côtières, les rendre vivables et prospères tout en les protégeant, il faut développer également l’arrière-pays. Aujourd’hui, plus de 75% des investissements sur la Province sont réalisés sur le littoral. S’il n’y a pas d’orientations de ces financements, tout sera concentré sur le littoral, donc moins de plages sauvages, davantage de disparition des côtes, et in fine une perte d’attractivité du territoire, et notamment son intérêt touristique. C’est pour cette raison que le Gouverneur souhaite s’impliquer activement au sein du Forum de la Mer : concilier les intérêts des parties prenantes avec pour centre des finalités la place de l’Homme dans son environnement, ce qui demande intelligence et concertation.

« Si nous fermons les yeux, demain, nous n’aurons plus rien. La mer reprend ce qu’on lui prend. La nature revient. »

De fait, la Province s’engage pour la préservation de ses plages : 4 sont certifiées « pavillon bleu » sur les 23 au niveau national. El Jadida est également pilote sur de nombreux projets écologiques. Pour toutes ces raisons, le désenclavement est une notion importante. Importante à prendre en compte dans les schémas directeurs développés jusqu’{ maintenant uniquement sur le littoral. Important également parce qu’il est lié { un aspect démocratique essentiel : celui de l’accès à la mer pour tous.

Page 11: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Tarik KABBAGE - Maire d’Agadir.

Le Maire d’Agadir a longuement insisté : Agadir est avant tout la capitale d’une grande région agricole avec un arrière-pays riche en écosystèmes diversifiés. C’est autour de ces piliers que s’est dynamisée la Ville, le développement portuaire répondant au besoin d’exportation de la production agricole, et bénéficiant, par la suite, de l’apport du flux touristique au tournant des années 70.

Ce passage en revue du développement d’une des plus grandes villes du Maroc montre, une fois de plus, que le développement maritime ne saurait être une réalité sans attaches paysannes, traditionnelles, culturelles et patrimoniales. Il démontre également, dans un autre registre, la complexité sociale et anthropologique marocaine. Le développement de la ville est cependant fragile car lié { l’évolution des ressources naturelles ainsi qu’{ sa situation géographique à proximité du Sud-Maroc. Cette dernière, selon Tarik Kabbage, est une menace bien moins sérieuse, réelle et urgente que la menace climatique. Il en veut pour preuve le désastre écologique ayant eu lieu durant l’hiver 2013 où des centaines de tonnes de sables ont disparu, engloutis par les flots. Il interpelle donc l’ensemble des participants et des intervenants sur la réalité et les risques que fait encourir le changement climatique sur le pays, sur la population. Cette expérience négative, le Maire l’attribue essentiellement aux constructions qui contournent le cordon dunaire, modifiant l’ordre immuable des courants. Faute d’un cadre juridique contraignant, le front de mer n’a pu être laissé vierge de construction. En ce sens, Tarik Kabbage a salué la naissance prochaine d’une Loi Littoral au Maroc, et encouragé les acteurs du Forum de la Mer { œuvrer sans relâche pour trouver des solutions durables { l’occupation et au développement des zones côtières.

Page 12: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Abdelhakim SOUJDA - Président du Conseil de la Commune d’El Jadida.

Le Président du Conseil de la Commune d’El Jadida met en avant le fait que la Ville a mis tous les moyens pour conserver une propreté sanitaire et esthétique du littoral, notamment par l’incitation { l’investissement par les entreprises dans des stations d’épurations. Le Conseil de la Commune d’El Jadida s’est appuyé sur l’université pour développer une économie littorale durable.

Plusieurs partenariats ont ainsi été signés avec des centres de recherche pour asseoir une stratégie conforme aux normes environnementales en vigueur, soulignant la qualité de la démarche conduite par la Ville. Mehdi ALAOUI MDAGHRI - Fondateur du Forum de la Mer. Mehdi Alaoui Mdaghri retrouve dans cette nouvelle édition le plaisir de la discussion et de l’échange. C’est une des raisons d’être du Forum de la Mer : faire des vagues ! Mais c’est aussi une plateforme d’échanges crédible, et c’est pour cette raison que le Forum de la Mer s’inscrit dans la continuité, pour cela que le Livre Bleu est une production essentielle. Cette nouvelle édition voit s’agréger de nouveaux partenaires, se concrétiser de nouveaux projets. D’enfants il en sera bien sûr question tout au long du Forum, avec une opération nettoyage des plages, un « Archipel des enfants », qui recevra, grâce à la participation du Ministère de l’Education Nationale, plus 2 000 petits moussaillons sur 4 jours, y compris des enfants habitants { une heure de car et qui pourtant n’ont jamais vu la Mer. Le tout agrémenté d’activités sportives et culturelles et de sensibilisation au littoral et à la Mer. Le fondateur du Forum de la Mer conclura sur cette volonté de faire participer tout le monde, car la Mer appartient à chaque marocain et il nous appartient de partager l’amour de la Mer.

Page 13: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Atelier 1 : Droit de la Mer « Instruments juridiques pour une meilleure gestion intégrée des zones côtières »

Modérateur : Mustapha FAKHIR, Maritime News. Le mot de la séance : « Le Forum de la Mer permet le renforcement de la « maritimité » du Maroc, de sa perception, de sa culture. Il permet aux marocains de s’approprier leur héritage maritime pour s’approprier l’avenir, et fait émerger l’écocitoyenneté en lieu et place de l’égo-citoyenneté. » Pr. Miloud Loukili. Les enjeux de la séance : Le droit de la mer définit juridiquement d'une part les espaces maritimes (eaux intérieures, mer territoriale, zone contiguë, zone économique exclusive, plateau continental, haute mer, régimes particuliers des détroits internationaux et des Etats archipels), d'autre part les droits et les devoirs des Etats dans ces espaces. Face aux volontés d’étendre les zones économiques exclusives, les enjeux de la sécurisation des convois maritimes et la dégradation des conditions environnementales, les Etats disposent-ils d’un cadre de travail suffisant pour concilier navigation, exploitation des ressources économiques et protection du milieu marin ? Les chiffres clés :

- 1993 : l’année de création du premier Ministère en charge de l’environnement au Maroc

- 2 000 : le nombre d’associations œuvrant dans le domaine de l’environnement au Maroc

- 1 million de km² : le territoire maritime du Maroc pour 710 000km² de superficie terrestre.

Page 14: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

La politique du Gouvernement et les enjeux environnementaux dans la Loi cadre portant création de la Charte Nationale de l’Environnement Mohamed BENYAHIA - Directeur des partenariats, de la coopération et de la communication au Ministère Délégué à l’Environnement. En préalable à la définition de la politique gouvernementale, Mohamed Benyahia a tenu à préciser que le Forum de la Mer et le Gouvernement vont établir un partenariat renforcé pour les prochaines éditions afin de mieux traiter les questions relatives à l’écologie marine et littorale. Pour le Directeur des partenariats et de la coopération, le Forum de la Mer constitue une plateforme d’échanges des bonnes pratiques indispensable { la conduite d’une politique de plus en plus efficiente au Maroc par les opportunités de rencontre qu’elle occasionne. Retraçant l’histoire de l’écologie politique au Maroc, le représentant du Ministère délégué { l’Environnement souhaite, sous l’impulsion du Gouvernement, accélérer la connaissance et la prise en compte des enjeux environnementaux dans le débat public et les politiques de développement économique, avec un axe de travail majeur : l’évaluation des coûts de dégradation de l’environnement et stimuler des réactions opérationnelles des ministères « développeurs ». La prise en compte de l’environnement au niveau politique n’est pourtant pas ancienne au Maroc. Mohamed Benyahia rappelle qu’un Ministère avait été créé en 1993, soit il y a seulement 20 ans. A cette occasion, les années 90 avaient permis l’activation de mécanismes de concertation et de coordination. Cette période coïncide, selon le Directeur en charge de la communication, { l’éveil de la société civile sur ces questions sur le territoire du Royaume. Aujourd’hui, ce sont plus de 2 000 associations qui travaillent dans le domaine de l’environnement au Maroc. Corollaire de cette effervescence du débat public, une production d’outils juridiques de plus en plus importante, qui constituent aujourd’hui, le cadre de travail opérationnel du Développement Durable. 20 ans de construction et de recherche de solutions concrètes ont permis d’investir les nombreux domaines liés { la gestion de l’environnement (Loi « déchets » en 2006, Lancement des programmes de mise { niveau environnementale pour la qualité de l’air, du littoral, des plages, etc….) de créer un arsenal juridique conséquent, et d’intégrer les collectivités territoriales dans la mise en œuvre de ces politiques. En parallèle, le budget du Ministère a été décuplé dans les années 2000. Témoin de cette prise en compte de l’environnement comme agrégateur central de l’ensemble des politiques de développement, la réforme constitutionnelle de 2011 constitutionnalise la notion de développement durable et le droit à un environnement sain.

Page 15: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Comme l’indique le représentant du Ministère Délégué { l’Environnement, cette construction conduit naturellement { la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable. Un premier texte précédé par une concertation très large avec l’ensemble des parties prenantes, mobilisant pas moins de 16 ateliers régionaux et la synthèse de plus de 6 000 recommandations : pour aboutir à loi cadre promulguée en mars 2014. Le projet de Loi Littoral Fouad ZYADI - Directeur du contrôle et de la Réglementation au Ministère Délégué à l’Environnement. Présenté en janvier 2013, le projet de Loi Littoral, d’autant plus vital que le Maroc dispose de 3 500 km de côtes, prévoit l’instauration de schémas d’aménagement, de protection, de mise en valeur et de conservation du littoral aussi bien sur le plan national que régional. Ces schémas, valides sur une durée de 10 ans, devraient permettre la mise en place, en partenariat avec les organismes concernés, des grandes lignes de la protection et de la mise en valeur des côtes marocaines tout en respectant l’aspect écologique et en l’intégrant dans les politiques sectorielles, notamment dans les domaines de l’industrie, du tourisme, de l’urbanisme et des travaux d’infrastructure. En lien avec l’intervention de Mohamed Benyahia, Fouad Zyadi rappelle qu’il s’agit de la première loi relative { l’environnement post-Charte. Elle met donc { l’épreuve les capacités à traduire les principes généraux de la loi cadre en pratiques contraignantes. Pour le Directeur du contrôle et de la Réglementation cette loi répond à une nécessité, puisque le littoral, jusqu’ici, ne disposait d’aucune reconnaissance juridique et n’était donc pas protégé : tout était permis. Le premier objectif de la loi est donc la définition de l’objet qu’elle protège. Il s’agit de la première définition juridique du littoral au Maroc.

- Elle considère tout le milieu littoral : eaux territoriales, côté terre et cordons dunaires.

- Elle institue une bande de 100 mètres interdite à toute construction à laquelle est adjointe une bande de 200 mètres soumise { une étude d’impact.

- Enfin, bien sûr, elle met en place un système de contrôle du respect de loi. En conclusion, sans passer d’un laxisme irresponsable { une juridisation extrémiste, la Loi Littoral entend préserver un équilibre entre exploitation et sanctuarisation, assurer le libre accès au littoral et développer la connaissance du milieu par la recherche scientifique.

Page 16: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

L’évolution des Zones Economiques Exclusives Pr. Miloud LOUKILI - Juriste, Professeur à l’Université Mohammed V de Rabat. Retraçant l’histoire du Droit Maritime, le juriste nous rappelle que le Droit de la mer est la branche la plus ancienne du droit et la base de la diplomatie. La mer apprend la fidélité, l’amour, la cordialité. Le Professeur Loukili définit le Maroc comme « la presqu’île occidentale de l’Orient ». Cette exception géopolitique se concrétise au niveau atlantique. Le Maroc est ainsi l’acteur principal dans l’élaboration du droit de la Mer, et plus précisément de l’objet de son intervention : c’est de l’Afrique qu’est née la zone économique exclusive (Sénégal, Guinée). Une Zone Economique Exclusive (ZEE) est, d'après le droit de la mer, un espace maritime sur lequel un État côtier exerce des droits souverains en matière d'exploration et d'usage des ressources. La Chambre des représentants a adopté, en 1980, une loi instituant une zone économique exclusive de 200 miles marins au large des côtes marocaines. A l’automne 2013, le Maroc a lancé des études pour l’extension de son plateau continental. Le gouvernement a mis en place une commission provisoire pour la délimitation du plateau continental sur la rive atlantique. Ces résultats devraient permettre d’établir un tracé en concertation avec les pays concernés par cette délimitation maritime, notamment l’Espagne (îles Canaries) et le Portugal (îles Madère). Prolongement du territoire terrestre sous la mer, le plateau continental, d’après le droit de 1982 et la Convention de Montego Bay, se définit sur une largeur de 200 miles marins et ne doit pas dépasser 350 miles à partir des côtes : il est la projection de la souveraineté économique. Selon le juriste, les Zones Economiques Exclusives ont bouleversé la carte du monde. La France est ainsi la 2ème puissance maritime du monde avec un territoire marin de 11 millions km2. Pour bien montrer l’importance de ces zones, le Professeur Loukili met en perspectives certaines données. La superficie terrestre du Maroc est de 710 000km² alors que son territoire maritime est d’1 million de km². Incontestablement bien situé sur le plan géopolitique, bi-océanique (Atlantique, Méditerranée), riverain d’un des détroits les plus importants au monde, le domaine maritime marocain suscite bien des convoitises et des regards. Les ZEE revêtent une importance stratégique capitale, au moins tout autant, sinon plus que le territoire terrestre. Le Professeur Loukili en veut pour preuve le cas de l’Algérie, 2,4millions de km², plus grand pays africain après dislocation du Soudan, géant terrestre, mais qui ne possède qu’une ouverture maritime sur la Méditerranée. Le pays louche sur l’Atlantique, et

Page 17: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

ambitionne le Sahara pour trouver un couloir sur la Mer, comme jadis la Russie souhaitait s’étendre vers « les mers chaudes ». Comme le précisait le professeur de droit en introduction, le droit de la Mer, base de la diplomatie, est un appel à la conciliation et à la modération. En ce sens, le juriste émet une proposition forte : créer un organe fédérateur chargé de la mer. Un Ministère de la Mer est selon lui d’une importance cruciale. En conclusion, le Professeur Loukili pose un objectif au Forum : « sortir d’ici avec le renforcement de la « maritimité » du Maroc, de sa perception, sa culture, s’approprier l’héritage maritime pour s’approprier l’avenir, faire émerger l’écocitoyenneté en lieu et place de l’égo-citoyenneté. » L’approche intégrée de la politique maritime : l’exemple de l’Union Européenne. Anaïd PANOSSIAN - Experte juridique recommandée par la Commission Européenne, Docteur en Droit de la Mer et Droit de la pêche. L’UE s’est positionnée depuis 1999 sur l’approche intégrée des enjeux liés { la Mer. C’est { cette époque qu’elle a publié un programme incluant des principes généraux de bonne gestion des zones côtières en Europe, une méthodologie, des options politiques en matière de stratégie européenne d’Aménagement Intégré des Zones Côtières (AIZC). L'UE a réalisé de 1996 à 1999 une évaluation de ses Gestions Intégrées des Zones Côtières (GIZC), { travers l’étude de divers programmes et projets dans l'UE, aboutissant à une Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2002, qui incite les États membres à développer des stratégies pour mettre en œuvre cette approche sur leur littoral . Selon Anaïd Panossian, l’étude des bonnes et mauvaises pratiques révèle un usage de la mer de plus en plus intensif. Est-ce { dire que les programmes mis en œuvre sont inutiles ? Non répond, l’experte. Au contraire, ils permettent aux Etats-Membres d’apporter des actions correctives pour obtenir de meilleurs résultats pour une gestion plus optimale de l’environnement. Dans un second temps, l’experte en Droit de la Mer et de la Pêche réaffirme un rôle clé de la planification et la gestion intégrée : elle n’a pas uniquement une vocation environnementale, mais plutôt celle de coordonner l’ensemble des actions ayant trait aux activités maritimes en limitant les conflits des opérateurs économiques dans des conditions durables. Chaque Etat-Membre procède à son évaluation selon des critères communs. La consultation des parties prenantes dans l’élaboration des planifications est au cœur du processus (ONG, Représentants des secteurs économiques, des collectivités territoriales, pouvoirs publics, société civile). Ce processus peut cependant engendrer des conflits de compétences au niveau des autorités, administrations comme le montre l’exemple de la France.

Page 18: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Pour pallier à ces déficiences, l’experte préconise que l’évaluation devienne la compétence exclusive de l’UE. Selon elle, ce schéma peut servir d’exemple pour le Maroc. En résumé, l’intégration de l’ensemble du processus conduit { la cohérence de la coordination entre toutes les politiques. Cette philosophie doit rester { l’esprit du Maroc maritime en construction : penser global. Ne pas développer de politiques sectorielles. Des textes à la pratique Hassan OUKACHA - Président de la Fédération des Pêches Maritimes.

Le projet de loi de Finances a mis en place depuis janvier 2014 pour les professionnels de la pêche l’application de 20% de TVA aux engins et matériel de pêche, qui en étaient jusqu’{ présent exonérés. En 2013, lors de la première édition du Forum de la Mer, Hassan Oukacha avait débuté son propos par une demande : celle de la création d’un Ministère de la Mer au Maroc. Rappelant le poids de la pêche dans les exportations marocaines (1,5 milliards d’euros), le Président de la Fédération des Pêche Maritimes a insisté sur la valeur ajoutée apportée par les pêcheurs. « Le Maroc ne dispose pas de richesses halieutiques » a-t-il indiqué. « Il dispose d’une ressource qui ne devient richesse que par les hommes, les métiers et les savoir-faire ». Orientant son propos vers la gestion de la ressource, il a mis l’accent sur la responsabilité partagée des différents acteurs. Des pêcheurs tout d’abord, des autorités administratives ensuite, appelées à renforcer les contrôles. Sur ce point, Hassan Oukacha demande à ce que la politique de gestion des ressources soit définie en lien avec les avis scientifiques, et non en fonction d’enjeux géopolitiques et sociaux. Des consommateurs enfin, en particulier pour les pays importateurs, qui doivent exiger une traçabilité du produit final (en vigueur avec l’UE mais { développer avec d’autres). Il a souligné le nécessaire développement de l’aquaculture avec un objectif de production de 200 000 tonnes contre 500 tonnes seulement aujourd’hui. Selon Hassan Oukacha « Les pêcheurs parlent de la pêche, mais n’ont pas de vision de la Mer ». Pourtant, 71% de la planète est constituée par les océans, qui recouvrent 371 millions de km². Ces espaces juridiquement complexes, sont soumis { l’arbitrage de l’ONU depuis la Convention de la Mer de 1982 à Montego Bay qui fixe le cadre juridique international. Depuis son adoption et la création des Zones Economiques Exclusives, les Etats côtiers se ruent sur la conquête des mers pour affirmer leur droit sur les ressources biologiques et non biologiques et ont davantage pensé aux fonds sous-marins qu’{ la pêche, regrette le Président de la Fédération des Pêches Maritimes.

Page 19: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Conférence : Gilles Bœuf Océan, biodiversité, ressources

Biologiste français. Professeur à l'Université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC, Paris VI), Gilles Bœuf est le président du Muséum National d'Histoire Naturelle Gilles Bœuf a articulé sa conférence autour de trois axes : les océans, la biodiversité et les ressources océaniques.

Les océans… Le biologiste nous le rappelle, la vie est apparue dans les océans il y 3,85 milliards d’années. La vie ayant colonisé tous les espaces par la suite, le milieu marin ne concentre plus que 13% des espèces vivantes actuelles. S’il en est { l’origine, l’Océan est également un des avenirs de l’Humanité. Le milieu océanique le plus riche est le récif corallien : entre 5 000 et 6 000 espèces au km² contre plus de 50 000 dans les forêts. Les Océans sont donc relativement pauvres en termes de diversité. En termes de volume, les océans représentent 99% de la biosphère, l’espace habitable par le vivant. L’Océan n’est pas une carte unidimensionnelle mais un volume. Une masse, dont la matière, l’eau, est 800 fois plus dense que l’air et 60 fois plus visqueuse.

Page 20: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

La « Chaire développement durable, énergie et société » se propose d’étudier les croisements entre la biodiversité et l’humanité. L’Homme est propriétaire de sa biodiversité mais la rapidité du développement des sociétés contemporaines détruit tout et surtout les écosystèmes. Le Professeur cite quelques exemples de cette destruction massive et rapide : 88 millions d’hectares de forêt ont disparu, du seul fait de l’activité anthropique en seulement 20 ans. Les forêts primitives couvraient 91% de la surface de Madagascar au début du XXème siècle, 50% en 1950, 12% aujourd’hui…

La biodiversité en danger D’un point de vue opérationnel, la diversité c’est :

- Une priorité scientifique (comprendre sa genèse, ses fonctions et enrayer son érosion),

- Un enjeu économique (ressources biologiques et génétiques à valoriser et partager),

- Un enjeu éthique (droit à la vie des espèces), - Un enjeu social (partage des valeurs et des avantages).

Le concept de biodiversité associe étroitement les sciences de la nature et celles de l’homme et de la société. Gilles Bœuf nous interpelle : Comment sauver le bien-être écologique de la planète ? Comment maintenir l’harmonie ? Et in fine, comment permettre la survie de l’espèce humaine ? Car pour le biologiste, il n’y a pas de détours concernant la biodiversité : la tuer c’est se tuer. Certes, il n’est pas question pour l’Homme de ne pas se développer, mais comment dans un changement global climatique ? Pour le scientifique, on ne peut pas arrêter le changement climatique, il est trop tard. Parce que la meilleure entreprise du monde est la vie, le maître de conférences en appelle au développement d’une vision « éco-centrée ». Il en appelle à plus de partage et de respect pour mieux vivre dans les années qui viennent. L’homme de science se fait homme de lettre, homme de l’être : « l’Être humain est une ode à la diversité » et rappelle qu’il y a plus de bactérie dans un corps humain que de cellules humaines. Gilles Bœuf met en garde : il ne faut pas confondre « nature » et biodiversité, qui est la faction vivante de la nature, qu’il convient de protéger contre la météorite de l’arrogance. Il nous apprend que c’est l’apparition du sexe qui a engendré la diversité biologique. On y trouve alors l’explication de l’écart phénoménal existant entre la biodiversité terrestre et marine. La raison est la nature de l’Océan lui-même, « un Océan de liberté ». Très ouvert et donc très peu biodivers ; alors que la surface terrestre, davantage exposée,

Page 21: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

avec des milieux ouverts et fermés, a généré plus de spécialisation des espèces, avec plus de symbiose, plus de compétition. C’est également l’explication du peu d’espèces endémiques, car elles se dispersent dans la masse de l’océan. Il nous le rappelle encore, la vie est une entreprise. Le vivant optimise avec des coûts d’énergies excessivement importants. Cette connaissance, cette science, doivent engendrer chez l’Homme un Bio-mimétisme, la bio-inspiration, cette capacité à s’inspirer du vivant pour appliquer au développement de ses activités des principes optimum et réellement durables. Ainsi, la perte de biodiversité est également la perte du savoir génétique des espèces, et donc de solutions profitables { l’Homme… { jamais perdue. Gilles Bœuf dresse pourtant un panorama de ce que la biodiversité peut nous apporter. Environ 50 % des molécules actives aujourd’hui utilisées en pharmacie sont extraites ou synthétisées à partir de produits naturels. Plus de 25 000 produits ont été isolés d’organismes marins et certains sont passés en utilisation courante : anti cancer Ara-C, anti-viral Ara-A ; nucléosides isolés d’éponges, bryostatine (de bryozoaire), antiviraux bactériens (anti-HIV)... Sondes moléculaires, 30 % des substances ont été trouvées chez les spongiaires, Anti-cancéreux, antibiotiques, antiviraux, anti-fungi, immunostimulants, immunosuppresseurs, facteurs,de croissance, régénérateurs osseux, outils moléculaires, etc… Cette notion de service rendu par les écosystèmes a été estimée en 2005 lors de « The Millenium Ecosystem Assessment » qui a chiffré { titre d’exemple la pollinisation par les abeilles { 180 milliards d’euros par an. Mais comme le rappelle l’écologue, les extinctions nous font perdre des savoirs que nous n’aurons peut-être plus les moyens d’inventer seuls. Comment en effet rivaliser avec des milliards d’années d’évolution… L’humain est pourtant directement mis en cause dans la disparition de 8 000 à 10 000 espèces par an. Ainsi, au-delà de la perte de biodiversité, de vivant, ce sont des solutions qui disparaissent, comme « le plus fabuleux sonar que la nature ait inventé » avec une espèce de dauphin aujourd’hui éteinte. Les exemples de bio-inspiration sont pourtant nombreux et devraient nous inciter à davantage d’humilité et de respect dans notre approche post-moderniste, { l’image de Leonard de Vinci, ou plus près de nous, du Shinkansen, le TGV japonais dont la forme est calquée sur le martin pêcheur, son revêtement sur les hiboux, ou d’autres rapaces plus généralement dans l’aviation, permettant de réaliser des économies de carburant. Dans ce contexte, comment le vivant réagit-il aux agressions ? Comme le titrait la revue scientifique Nature, se dirige-t-on vers une 6ème grande crise d’extinction ? La destruction des habitats et milieux naturels, la pollution, la surexploitation des stocks, la dispersion d’espèces invasives (dont une algue marocaine qui s’est retrouvée en

Page 22: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Tasmanie via des ballasts de pétroliers) sont autant d’indices nous orientant malheureusement vers une réponse positive, selon Gilles Boeuf. La liste rouge des espèces menacées établie par l’UICN qui mesure les taux de disparition dans les océans n’est pas un bon critère selon Gilles Boeuf. Il faudrait plutôt calculer l’effondrement des stocks qui lui paraît plus pertinent. Dans le même ordre d’idées, le Professeur insiste sur le fait qu’il n’existe pas d’espèces remarquables, elles le sont toutes ! « Il faut se battre pour sauver toutes les espèces, même les moustiques. On ne peut pas garder X et perdre Y. Si l’un disparaît l’autre risque aussi de s’éteindre », insiste-t-il. Dès lors, les progrès de l’humanité, liés aux progrès scientifiques sont-ils à remettre en cause ? Quand l’humain s’est sédentarisé il y a 12 000 ans, on comptait 5 millions d’humains. Au moment de la Révolution française, à la fin du 18ème siècle, 700 millions. Aujourd’hui, plus de 7 milliards… L’écologue se veut alors optimiste. Nous n’avons jamais eu autant de moyens pour nous en sortir. Jamais eu autant de connaissance et technologie. Il convient cependant de changer de paradigme, de sortir de l’arrogance et de la cupidité et de mieux partager les ressources.

Les ressources océaniques D’après un article prospectif paru dans la Revue Sciences, en 2048, le dernier poisson aura disparu. Un système aveugle pourrait conduire à cela. L’effondrement des stocks est alarmant, de même que la taille des spécimens pêchés. Marque de notre manque de patience, la capture de sujets juvéniles empêche la reconstitution des stocks, illustrée par le fait que la plupart des records du monde de pêche soient antérieurs à 1950. Ce déséquilibre naturel entraine des déséquilibres économiques : d’énormes efforts d’armement des navires sont consentis, pour des résultats stables : « il n’y a jamais eu autant de bateaux, de palangres, de chaluts et de filets, mais on ne pêche pas plus. » En outre, le réchauffement climatique induit une conséquence invisible pour le consommateur, mais réelle pour les professionnels et va engendrer un grand déséquilibre géopolitique : la pêche est moins équatoriale et plus arctique. L’écologue nous le confirme, la pêche est un des produits les plus échangés au monde : on pêche ici, on vend ailleurs. Le poisson est une des matières premières les plus échangées (40%), comparée au blé (20%) ou au riz (5%). 37% des captures sont transformées en farine de poissons et en huiles pour l’aquaculture et l’élevage. Plus que la pêche intensive, le spécialiste conseille de conserver le poisson pélagique : on y obtient un rendement économique beaucoup plus intéressant.

Page 23: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Les objectifs de l’approche écosystémique des pêches, à travers la construction de pêcheries viables dans des écosystèmes marins productifs, sont les suivants :

- Eviter la dégradation des écosystèmes, telle que mesurée par les indicateurs environnementaux et de bon état écologique,

- Minimiser le risque de changement irréversible des assemblages naturels et des processus écosystémiques,

- Obtenir et maintenir les bénéfices écosystémiques à long terme sans compromettre les écosystèmes,

- Produire les connaissances suffisantes sur les processus écosystémiques pour considérer les conséquences prévisibles des actions humaines,

- Si les connaissances sont insuffisantes, des mesures de gestion robuste et précautionneuse pour les écosystèmes doivent être mises en œuvre.

Cette solution est à développer, rappelle celui qui a été élu au bureau de l'IPBES des Nations Unies. Car si l’aquaculture est en plein essor, elle peut conduire à la perte de la moitié des mangroves mondiales, alors qu’une pêche gérée est possible et profitable. Il en veut pour preuve le modèle du Sea Ranching. Conclusion Les activités anthropiques peuvent conduire l’Humanité au désastre. L’approche de la biodiversité telle qu’elle est aujourd’hui ne pourra pas permettre la survie du vivant, et en bout de course des Hommes, qui risquent d’être condamnés { s’entre-dévorer tant ils auront faim. La transformation du milieu océanique { l’œuvre est un avertissement : en 30 ans, le P.H. des océans a été acidifié alors qu’il est resté stable pendant des millions d’années. Quand il y a un changement, il y a une réponse. Voilà pourquoi la diversité. L’Homme pourra t’il s’adapter { lui-même ?

Page 24: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Atelier 2 : Pêche durable, aquaculture, biodiversité et ressources halieutiques « Gestion des ressources halieutiques : préserver et innover pour exploiter durablement »

Modérateur : Khalid KARAOUI, Journaliste, France 24. Le mot de la séance : « La mer est un trésor que l’on épuise et que beaucoup de marocains ne connaissent plus. Il faut réconcilier le monde de la Terre et le monde de la Mer. » Karim Chaouki, Pêcheur, El Jadida. Les enjeux de la séance : Autrefois considérées comme inépuisables, les ressources halieutiques mondiales sont aujourd’hui surexploitées. Le Maroc est particulièrement concerné et les pécheurs lancent un cri d’alarme devant la raréfaction des stocks et la diminution de la taille des prises. Avec l’industrialisation de la pêche et l’accroissement de la consommation, quelles solutions apporter à ce défi écologique, économique et social ? Les chiffres clés :

- le Portugal est le 1er pays consommateur de poisson dans l’UE et le 3ème dans le monde,

- La zone économique exclusive de l’île Maurice représente 1.9M de km² soit 1000 fois sa surface terrestre,

- 3ème secteur d’exportation derrière le pétrole et l’acide phosphorique, la pêche représente au Sénégal 17% des emplois et couvre 75% des besoins en protéines animales,

- Au Maroc, 30% des captures de poissons sont rejetées en mer. Mettre en place des mécanismes de régulation permettant une gestion durable des stocks et des écosystèmes marins. Abdellatif BERRAHO - Docteur en océanographie, ex-Directeur Général de l’INRH.

Docteur en océanographie, ancien Directeur Général de l’Institut National des Recherches Halieutiques (INRH), Abdellatif Berraho a mis l’accent sur la gestion des stocks qui doit être parfaitement intégrée à celle des écosystèmes marins. Ainsi, pour être efficace, une bonne gestion des ressources halieutiques doit s’appuyer sur 2 piliers. Tout d’abord, les acteurs économiques doivent disposer avec l’aide du milieu scientifique marin d’une bonne connaissance des ressources marines ; ce qui implique de connaître les espèces pêchées (biomasse, zones et périodes de recrutement et de reproduction…). Disposant d’une flotte d’observation, l’INRH apparait comme l’outil d’investigation privilégié pour mener à bien cette mission. Sur la base de ce diagnostic, il est alors nécessaire de construire avec l’ensemble des acteurs concernés par cette activité un plan national de gestion des ressources.

Page 25: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Dans le cadre de sa stratégie nationale de gestion des ressources halieutiques, le Ministère de la Pêche Maritime s’est engagé dans cette voie et à mis en place deux mécanismes importants :

- La définition d’un quota de pêche saisonnier en fonction de la biomasse des espèces,

- L’instauration d’un repos biologique automnal (période de recrutement) et printanier (période de ponte).

Cette stratégie a d’ores et déj{ permis d’obtenir de premiers résultats concrets en endiguant la surexploitation de nombreuses espèces comme le poulpe. Toutefois, pour trouver leur pleine efficacité, Abdellatif Berraho a rappelé que les plans de gestion de pêcherie doivent plus impliquer l’ensemble des professionnels du secteur. Exploitant la ressource, les pécheurs jouent également un rôle de sentinelles marines sur l’état des stocks sur les témoignages desquelles les pouvoirs publics doivent nécessairement s’appuyer. En outre, la lutte contre les rejets de la pêche reste un enjeu fort encore insuffisamment traité : 30% des captures de poisson sont rejetés en mer et altèrent la biodiversité marine. Visant une meilleure sélectivité dans le prélèvement de la ressource halieutique, une réglementation plus contraignante des engins de pêche peut notamment y concourir. Co-construire la politique de gestion des ressources halieutiques avec le monde scientifique, responsabiliser le consommateur, valoriser les déchets : l’exemple portugais Narcisa BANDARRA - Chercheur à l’institut de recherche de la Pêche et de la Marine (Portugal). Compte-tenu des perspectives démographiques, de la raréfaction des stocks et des effets bénéfiques de cette alimentation pour la santé, il est primordial de trouver un mode de gestion durable des ressources halieutiques mondiales. Chercheuse à Institut de Recherche de la Pêche et de la Marine (IPIMAR) au Portugal, Narcisa Bandarra a rappelé que la gestion des stocks est un enjeu essentiel pour son pays qui est le 3ème pays consommateur de poisson dans le monde. Pour une bonne gouvernance, le monde de la recherche, { l’image de l’IPMAR au Portugal, doit être étroitement associé à la définition des politiques en matière de gestion des ressources et d’aquaculture. Narcisa Bandarra a également insisté sur la nécessité pour les pouvoirs publics d’éduquer et de responsabiliser le consommateur final, en bout de chaine, car ses choix orientent directement l’offre économique. Soucieux de satisfaire le consommateur, les

Page 26: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

industriels peuvent alors être tentés de s’engager dans des démarches de qualité et de respect de l’environnement en labellisant leurs process de production et leurs produits. Le développement d’une pêche et d’une aquaculture durable passe également par la valorisation des rejets industriels avec l’idée d’en faire de nouvelles ressources. Dans cette perspective, la récupération des acides gras Omega 3 aux applications larges et particulièrement bénéfiques pour la santé doit être selon elle privilégiée. Enfin, une alimentation basée sur les produits de la mer est également un enjeu de santé publique. Des projets de promotion de cette alimentation auprès du grand public et de recherche sur le poisson maigre visent { lutter contre le développement de l’obésité et pourraient être utilement essaimés au Maroc. Ressources halieutiques : un enjeu de sécurité alimentaire et énergétique de premier plan. Motichand SEEBAH - Secrétaire Général de la Primature de la République de Maurice. Avec 1.9 millions de km², la Zone Economique Exclusive de la République de l’île Maurice constitue un enjeu essentiel pour un pays dont la surface terrestre se limite à 1996 km². En 2012, l’économie océanique représentait 10,8% du PIB du pays et d’importantes perspectives de développement. Rappelant les enjeux de sécurité alimentaire, de lutte contre la dépendance énergétique et de promotion des énergies marines renouvelables, Motichand Seebah, Secrétaire Général de la primature de la République de Maurice, a rappelé que l’exploitation des ressources halieutiques est au cœur de la stratégie de développement durable du pays. Reposant sur les principes d’efficacité économique, d’équité dans l’accès { la ressource maritime, de préservation des ressources, de respect des partenaires sociaux et des engagements internationaux, une stratégie de développement économique intégrée a ainsi été définie avec l’ensemble de la société civile mauricienne. Elle vise une meilleure connaissance océanique, l’exploitation des fonds marins pour les ressources fossiles et minérales, la promotion d’une pêche et d’une aquaculture durable, le développement de l’activité portuaire, des services maritimes et de l’Energie marine renouvelable. Motichand Seebah a rappelé que l’économie océanique, loin d’être un secteur clos, impacte un nombre important d’activités terrestres tels que le ravitaillement et la reconstruction navale, le traitement industriel des produits de la mer, l’assurance maritime, les biotechnologies marines, et l’activité croisiériste.

Page 27: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Prendre en compte de manière intégrée les enjeux de la mer dans l’aménagement et le développement du Maroc Régis TOUSSAINT – Président Directeur Général de COFREPECHE. Enjeu stratégique pour les Etats comme l’actualité en Mer de Chine, en Arctique ou en Antarctique nous le rappelle, la mer fait l’objet de toutes les convoitises dans un contexte mondial de raréfaction des ressources. Milieu complexe et fragile fait d’interactions d’une grande diversité, l’exploration et l’exploitation humaine de la mer doivent être planifiées pour être durables et responsables. Avec conviction, Régis Toussaint, Président Directeur Général de Cofrepêche, a rappelé que bien souvent, en matière d’aménagement par exemple, on ignore les enjeux de la mer, réduite dans les schémas du littoral à un aplat bleu sur une carte. La planification marocaine n’exprime pas suffisamment les enjeux maritimes dont la traduction est multiple : interactions entre mer et terre, potentiels d’usage et d’exploitation, contraintes de protection, diversité des écosystèmes… Rappelant que les produits de la mer, fragiles et limités, sont indispensables à la vie sur terre, il a souligné le caractère planifiable de la pêche dans une finalité de durabilité et de responsabilité. S’exerçant dans un contexte environnemental, technologique, économique et social évolutif, cette activité possède en effet ses contraintes d’usage, ses exclusions et ses complémentarités et a ses prolongements { terre avec les ports, l’industrie et les services. Pour Régis Toussaint, l’intérêt des opérateurs et de la collectivité est de pratiquer une pêche durable et responsable caractérisée par :

- Un respect de la ressource (engins de pêche, réglementation, quotas, partage de la connaissance entre les pécheurs et scientifiques),

- Un respect de l’environnement (tri { bord, déchets, énergie), - Un respect des produits (entretien bateau, conservation à bord, traçabilité,

valorisation), - Un respect des personnes (sécurité, bien être, formation).

En parallèle, les efforts de recherche devront être poursuivis en associant davantage les opérateurs afin d’innover en matière de bateaux du futur, d’engins de pêche sélectifs, de valorisation des produits et d’aménagement maritime. Au regard de ces enjeux, il a donc appelé le Maroc à bâtir au plus vite une politique ambitieuse et intégrée en matière d’économie maritime. La création d’un Conseil de la Mer souhaitée par le Ministre marocain de l’Equipement, des Transports et de la Logistique lors de ce Forum en constitue une première étape même si ses contours devront être précisés.

Page 28: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

La cogestion des pêcheries, un mode de gouvernance efficace de la pêche locale au Sénégal. Mamadou MBAYE - Pêcheur, Sénégal. Long de 718 km, le littoral sénégalais s’articule autour d’une multitude d’écosystèmes côtiers et comprend 226 sites de pêche. La pêche constitue un enjeu essentiel pour le pays : il crée des emplois, nourrit les populations et soutient l’économie nationale. Le nombre d’emplois générés par la pêche représente 17% de la population active et constitue le 3ème secteur d’exportation derrière le pétrole et l’acide phosphorique. Essentiel pour la sécurité alimentaire du pays, il couvre 75% des besoins en protéines animales de la population. Pêcheur sénégalais, Mamadou Mbaye a indiqué qu’{ l’image du Maroc, le principal problème du pays est la surpêche qui se traduit par une raréfaction des ressources démersales et pélagiques côtières. Cela entraine l’appauvrissement des communautés de pêche artisanale, des conflits professionnels et un sous-approvisionnement du marché local (usines, ménages, sites de transformation), avec d’importantes conséquences sur l’emploi local. Face à cette difficulté, le Sénégal a placé la cogestion de la pêche au cœur de sa politique de préservation et de valorisation des ressources halieutiques. Gouvernance associant l’ensemble des acteurs locaux (administration, professionnels de la pêche, notables, élus locaux) dans la gestion des pêcheries, elle trouve une traduction concrète à travers les Conseils locaux de pêche artisanale (CLPA) dont les missions sont de :

- Structurer les acteurs de la pêche, - Assister l’administration dans les opérations d’agrément, de suivi et contrôle des

activités, - Participer à la définition et au suivi des mesures de gestion et de conservation

afin de préserver les écosystèmes marins. En lien avec l’Etat, ce mode d’organisation a permis de développer les compétences des acteurs, l’accès { de nouveaux marchés porteurs, la préservation des espèces de poissons menacées, et la réduction des conflits professionnels. Fort de ses succès, la cogestion des pêcheries est devenue un modèle dont beaucoup d’autres communautés africaines s’inspirent et qui pourrait être transposé au Maroc.

Page 29: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Les marocains ne connaissent pas suffisamment la mer. Karim CHAOUKI - Pêcheur, EL Jadida. Karim Chaouki, commence son intervention par un proverbe marocain qui dit en substance que « celui qui sort en mer est considéré comme perdu et (que) chacun de ses retours à terre est une renaissance ». Karim Chaouki, pêcheur à El Jadida, a rappelé que la mer a toujours joué un rôle important dans l’imaginaire marocain. Partir en mer pour le pêcheur est une aventure dont il ne sait pas s’il reviendra vivant, un défi permanent pour assurer la survie de sa famille. A l’image de ses confrères, il a constaté ces dernières années, une réduction considérable des ressources de la mer qui menace leur survie. La surexploitation et l’absence de repos biologique menacent de disparition certaines espèces comme le calamar ou la sardine. D’autres pratiques comme l’arrachage sauvage de certaines algues { forte valeur ajoutée { l’image de l’agar-agar ou du concombre de mer entrainent immanquablement une raréfaction de la ressource et pose la question de la sensibilisation de la population aux ressources de la mer et à leur bonne exploitation. Conclusion de l’atelier : Plusieurs facteurs explicatifs peuvent être avancés dans le phénomène de surpêche : le manque de formation des pêcheurs qui ont trop intensément exploité la ressource, l’insuffisance des mesures d’aménagement faute de contrôle, la pollution industrielle galopante… Ce phénomène commence à avoir des conséquences visibles au Maroc ou au Sénégal, où l’on constate une diminution de la taille des poissons et où dans certains endroits, les pécheurs émigrent faute de ressources locales suffisantes. Fort de ce constat, les intervenants ont indiqué la nécessité de sensibiliser les pêcheurs et la population locale sur les problématiques de préservation de la mer et sur les méfaits de la surpêche.

Page 30: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Atelier 3 : financement et assurance pour la pêche artisanale « De la solidarité aux outils ad hoc »

Modérateur : Khalid KARAOUI, France 24. Le mot de la séance : « Le temps que mettent ses vêtements à sécher, les poches du pécheur sont déjà vides. » Proverbe marocain. Les enjeux de la séance : La pêche artisanale est une activité à risque aux revenus irréguliers et les pêcheurs ont difficilement accès au financement. Quelles solutions financières inventer pour sécuriser le parcours des pécheurs et leur permettre de développer les investissements nécessaires à leur activité ? Les chiffres clés :

- Le tissu économique marocain comprend 93% de PME, dont 80% de TPE. - Le taux de bancarisation de la population marocaine est passé de 34 à 54% en 3

ans. - Près d’1 million de microcrédits d’un plafond de 50 000 de dirhams contractés

au Maroc soit 40 milliards de dirhams en 2013. - 6 millions de micro-entrepreneurs marocains éligibles au système du

microcrédit. L’accès à l’offre bancaire, un levier indispensable pour le développement de l’activité de la pêche Abdelhak BENANANE - Directeur animation commerciale, Al Barid Bank. Née il y a 3 ans et regroupant déjà 6 millions de clients, Al Barid Bank est une filiale bancaire de détail de la poste marocaine créée pour répondre à certains enjeux nationaux de développement économique. L’objectif recherché est notamment le développement de la bancarisation de la population marocaine par la mise { disposition d’une offre bancaire simple, diversifiée et industrialisée. La clientèle rurale ou périurbaine à bas revenus et aux rentrées irrégulières en constitue la cible privilégiée. Abdelhak Benanane, Directeur de l’animation commerciale { Al Barid Bank, a souligné que la population des marins pécheurs est un segment de clientèle particulièrement visé. En s’appuyant sur des partenariats nationaux et internationaux, des solutions bancaires spécifiques ont été mises en place pour cette profession { l’image des microcrédits.

Page 31: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Parmi les actions régionales développées, celle de la Province d’Agadir a touché 25 000 personnes et les centres de pêche d’Imssouane, Imi Ouaddar, Taghazout, Agadir port, Tiznit, Aglou, Sidi Ifni et Tan-tan.

Elle a concerné en priorité les marins pêcheurs exerçant une activité de pêche artisanale (petites barques dont le nombre de personnes varie entre 3 et 5) ou côtière (barques dont le nombre de personnes varie entre 10 et 15).

Plusieurs journées de sensibilisation ont permis le recensement des besoins spécifiques aux pêcheurs : souhait de virement des allocations familiales sur leurs comptes chèques, désir de versement de leurs émoluments par l’Office National de la Pêche sur leurs comptes, accès { des produits d’épargne (CEN et Tawfir), { des produits de retraite spécifiques (Damane), accès à des produits d’assurance (Aman et Rahma) et à crédits immobiliers.

Sur la base de ce diagnostic, un premier package bancaire a été développé permettant de bancariser 46% du panel ciblé soit 11 700 pêcheurs. Cette expérience permettra à terme de bâtir une stratégie nationale de solutions bancaires adaptée aux problématiques des marins pêcheurs permettant de faire effet de levier sur le développement de leur activité. La micro-assurance, un outil de sécurisation et de développement de l’activité des pêcheurs Saadia NOURI - Directrice Générale Adjointe Assurances de personnes et partenariats – AXA Assurances Maroc. AXA Assurance Maroc est une filiale du groupe AXA, l’un des premiers groupes d'assurance dans le monde et la première marque mondiale d’assurance. Acteur majeur dans son secteur d’activité, AXA Assurance Maroc est la 3ème compagnie du pays en termes de part de marché. Avec 500 millions de clients dans le monde dont 44,5 millions en Afrique, le marché de la micro-assurance est en plein essor et constitue pour les pays émergents une véritable opportunité de développement économique. Largement composé de PME (93%) et de TPE (80%), le tissu économique marocain semble de ce point de vue particulièrement réceptif à ce dispositif. AXA apporte son soutien aux micro-entrepreneurs afin d’assurer la continuité de leurs projets et d’accompagner leur développement. Pour Saadia Nouri, Directrice Générale Adjointe, Services aux Clients Entreprises et Développement Epargne & Prévoyance à AXA Maroc, la micro-assurance est une véritable opportunité de sécurisation du parcours économique des pêcheurs et un levier de développement pour leur activité.

Page 32: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Une large étude a concerné ce public afin de proposer des solutions d’assurances adaptées aux besoins. Un package « produits dommages et prévoyance » a été développé permettant de couvrir à coût abordable les pêcheurs tout au long de leur vie. Pour les marins pêcheurs, une assurance prévoyance (Assurance décès emprunteur, capital décès prévoyance, couverture des frais d’obsèques) et une micro-assurance hospitalisation couvrant les pertes de revenu suite à un accident ou une maladie ont été proposées alors que pour les pêcheurs commerçants exerçant dans un local précis, une assurance dommages aux biens (Assurance Incendie-Inondation pour les biens) semblait mieux convenir. Responsabiliser les consommateurs grâce à une monnaie sociale : le projet « My Drop in the Ocean » David FRENCH - Directeur Exécutif, The Changing Oceans Expedition. Pour David French, de la Fondation Antinea et Directeur Exécutif du projet The Changing Oceans Expedition, l’acte de consommation n’est pas anodin pour l’environnement et constitue une opportunité à saisir pour promouvoir des modes de production plus respectueux de la nature. Rappelant que chaque produit ou service proposé a un coût environnemental et social qui reste opaque et sous évalué pour le consommateur, il a fait le constat que les entreprises qui investissent pour être plus écologiques ne trouvent souvent pas de retour dans leur chiffre d’affaire, voire sont pénalisées à cause du surcout généré sur le produit, faute d’une sensibilisation suffisante des clients. La Fondation Antinea cherche à sensibiliser la population à propos des effets de la consommation sur les océans. En 2008, un travail cartographique a permis de visualiser l’impact des activités humaines sur la mer sur la base de plusieurs critères (gaspillage, pollution, biodiversité, gaz à effet de serre, acidification des océans, surexploitation des ressources halieutiques…). Ce travail a mis en évidence que 41% des océans sont fortement impactés par seulement 17 activités humaines. Fort de ce constat, le projet « My drop in the océan » tente de responsabiliser le consommateur et de lui offrir le pouvoir d’agir { travers une monnaie destinée à récompenser les actions durables en faveur de l’environnement. Lorsqu’on achète des produits ou services labellisés éco-responsables, on génère des points de fidélité appelés « gouttes d’eau », qui constituent une sorte de monnaie digitale du type « bitcoin ». Celle-ci pourra être investie par la suite dans des projets de développement durable. Cette approche { l’avantage d’engager toutes les parties prenantes, financeur, producteur ou consommateur dans l’amélioration du système économique. Le projet pilote devrait démarrer en automne 2014 aux USA, en Suisse et au Kenya. David French pose la question : pourquoi pas demain au Maroc ?

Page 33: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Les perspectives de financement de la pêche et de l’aquaculture grâce à la micro-finance Didier KRUMM - Directeur Général Maroc, PlaNet Finance. Didier Krumm, Directeur Général de PlaNet Finance Maroc, a présenté l’action conduite par l’Institut de micro-Finance PlaNet Finance au service du développement de la pêche et de l’aquaculture marocaine. Le microcrédit se définit comme un petit crédit à court terme à dimension sociale fléché sur l’investissement productif. L’idée est de permettre le développement de l’entreprenariat en permettant { des personnes aux revenus modestes dans l’informel qui n’ont pas accès aux services bancaires de développer une activité dont les revenus permettront de rembourser cette créance. Au regard de ces critères, les pêcheurs constituent une cible privilégiée pour le microcrédit même s’il n’existe pas pour le moment de produit spécifique. Cet outil de financement peut leur permettre de financer leur activité et de tester sa viabilité économique, afin d’accéder en cas de succès { l’ensemble des services bancaires ou d’assurance. Didier Krumm a toutefois souligné la dimension sociale de ce type de financement en rappelant qu’il était nécessaire de mettre l’accent sur l’accompagnement des accédants notamment en matière de formation professionnelle et de renforcement de leur capacité de production. Opportunités et risques des outils de financement de la pêche artisanale au Sénégal Fatou FAYE - Réseau des femmes de la pêche artisanale du Sénégal. Au Sénégal, les femmes constituent la catégorie sociale dominante du secteur de la pêche artisanale (70%) sur laquelle repose l'avenir de la profession. La pêche artisanale joue un rôle essentiel dans l’industrie agroalimentaire sénégalaise car elle fournit 80 % des matières premières nécessaires pour les produits de transformation. Fatou Faye, Présidente de l’Union des Femmes de la Pêche Artisanale au Sénégal, a rappelé qu’un des freins principaux au développement de l’activité reste l’accès au crédit dont les taux restent trop élevés. Une vraie réflexion est à mener sur le sujet et le microcrédit peut, selon elle, constituer une alternative crédible au système bancaire classique. Toutefois, elle a rappelé que le système de crédit occidental ne peut pas être transposé sans adaptation dans certaines cultures africaines. Sans sensibilisation et accompagnement, il peut s’avérer dangereux pour des populations qui maitrisent mal ses mécanismes et qui n’ont pas la culture de l’endettement.

Page 34: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Accompagner les pécheurs dans la diversification de leurs activités Karim CHAOUKI – Pêcheur, El Jadida. Avec ce proverbe, « le temps que mettent ses vêtements à sécher, les poches du pécheur sont déjà vides », Karim Chaouki a rappelé que les pêcheurs, dont l’activité est indispensable à la survie alimentaire du pays, sont des personnes modestes qui ne gardent pas la richesse qu’ils génèrent en mer. Intervention de David French : les pêcheurs ne devraient pas avoir de dette car compte-tenu de leur utilité, c’est la planète qui devrait en avoir à leur égard. Les états devraient leur accorder des crédits à des conditions privilégiées et mettre en place des mesures d’accompagnement pour faciliter leur activité. D’autres intervenants ont objecté que le microcrédit ne répond pas { l’ensemble des problématiques des marins pêcheurs. Certaines monocultures ne permettent pas aux pêcheurs de disposer de rentrées régulières leur permettant de rembourser de tels crédits. Didier Krumm indiqu qu’il est nécessaire de diversifier leur savoir-faire et leur expertise pour développer d’autres activités complémentaires et notamment l’activité de transformation, qui génère la plus forte valeur ajoutée. Saluant les solutions d’assurance proposées, un marin pécheur présent dans le public a toutefois rappelé que l’Office National des Pêches marocain pouvait aussi apporter sous conditions des aides financières nécessaires. Plus que l’accès au crédit, les pêcheurs ont une nouvelle fois rappelé que c’est surtout la surpêche qui menace toute la profession…

Page 35: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Atelier 4 : ressources et environnement « Eau, Energies, Sable : 3 500 km de côtes, des ressources… et des défis »

Modérateur : Vincent PERRAULT, LCI. Le mot de la séance : « En matière de développement, le territoire n’est pas un simple lieu, mais un véritable milieu dont il faut tenir compte. » Christopher Longmore. Les enjeux de la séance : Les ressources littorales du Maroc sont fondées sur le triptyque : Eau, Energies, Sable. Confronté à un développement industriel et urbain important et à une raréfaction des ressources, le pays doit relever en ce début du XXIème siècle le défi du développement durable, en s’appuyant sur l’éco-responsabilité des acteurs économiques et des citoyens et sur les innovations vertes comme le dessalement de l’eau de mer ou le dragage des fonds marins. Les chiffres clés :

- Le sable est la 2ème ressource mondiale utilisée après l’eau. - Le Maroc importe aujourd’hui 96% de ses besoins énergétiques. - Le Maroc est le 1ère exportateur de phosphate brut et d’acide phosphorique. - Le taux d’accès { l’eau potable est passé de 27% en 1995 à 92% en 2013. - 3,4 millions de marocains bénéficient de l’assainissement liquide. - Le lagunage naturel représente encore 65% des procédés d’épuration. - le sable de dragage au Maroc est estimé en 2012 à 1 million de m3 soit 5% de la

production de sable. - Le prix de revient de l’éolien off-shore en mer du nord a chuté de 40% en 5 ans.

La stratégie eau de l’OCP : concilier croissance industrielle et préservation des ressources en eau Abdeljalil BOURRAS - Responsable coordination projet dessalement, OCP Group. Avec plus de 90 ans d’expérience dans la mine et de 45 ans en chimie, l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) est le premier exportateur mondial de phosphate brut et d’acide phosphorique et un acteur majeur de l’agriculture mondiale. Avec 6% du PIB, cette activité reste locomotive pour le développement économique du Royaume. Le Maroc étant un pays semi-aride, la préservation de ses ressources naturelles en eau est un véritable enjeu environnemental et constitue une priorité pour OCP Group dont l’industrie en pleine expansion est grande consommatrice. Celle-ci a développé une approche innovante et responsable pour la gestion de ses besoins en mettant en place un vaste programme « eau » qui s’articule autour de trois leviers :

Page 36: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

- Optimisation de l’utilisation de l’eau sur l’ensemble de la chaine de création de valeur,

- Abandon des prélèvements des eaux souterraines et réallocation géographique des eaux de surface,

- Mobilisation des ressources en eau non conventionnelles : dessalement d’eau de mer et réutilisation des eaux usées traitées.

Abdeljalil Bourras, Responsable Projet Dessalement, a indiqué que le groupe prévoit de nouveaux projets de dessalement d’eau de mer avec l’objectif d’en produire 100 Mm3/an. Centrée sur deux unités de dessalement a Jorf Lasfar (75 Mm3/an) et Safi (25 Mm3/an), cette stratégie permettra à terme de couvrir les besoins futurs de ces sites industriels. S’agissant de la protection du littoral, l’OCP tente d’assumer son rôle d’entreprise éco-responsable en assurant un double lavage et une solubilisation des rejets, en choisissant les points de rejet les moins impactants, en contrôlant systématiquement la température des eaux de refroidissement, la composition du rejet et la qualité des eaux du littoral. Action de l’ONEE-Branche Eau en matière d’assainissement liquide et protection de l’environnement Abdellah BAHASSI - Direction de l’assainissement et de l’environnement, ONEE. En matière d’approvisionnement en eau, les missions de l’Office National de l’Eau et de l’Electricité (ONEE) sont multiples et comprennent la planification et la programmation des investissements, la réalisation d’études et d’équipement des projets, la gestion pour les communes du service de distribution d’eau potable et de l’assainissement liquide et le contrôle des eaux distribuées ou rejetées. Les orientations royales formulées lors du Conseil Supérieur de l’Eau et du Climat en 2001 ont amené les acteurs du secteur de l’eau autour de l’ONEE à une meilleure gestion de la demande, { l’amélioration de l’approvisionnement en eau potable en milieu rural et à une meilleure protection de l’environnement. Grâce à près d’1 milliard d’euros d’investissements, l’ONEE a fait passer le taux d’accès { l’eau potable de 27% en 1995 à 92% en 2011 et la capacité d’assainissement à 180.000 m3/j avec la mise en place de 46 stations d’épuration pour 3,2 millions de bénéficiaires. En matière de procédé d’épuration, si le lagunage naturel reste prédominant (65%) compte-tenu des conditions climatiques du pays et de la rusticité du procédé, l’ONEE développe de nouveaux procédés plus économes en foncier, en énergie et en rejets afin de faire face au développement urbain. Doté d’un demi-milliard d’euros, le programme d’investissement 2014-17 vise à renforcer la capacité d’épuration du pays (+147.000m3/j) grâce un développement du réseau de stations et de canalisations qui permettra de couvrir 1,2 M de personnes supplémentaires.

Page 37: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Parmi les projets en cours, Abdellah Bahassi a évoqué ceux du Grand Nador, du bassin de Sebou ou d’Oum Er Rabbia impliquant plusieurs dizaines de villes et comprenant des investissements de dépollution et d’infrastructures de traitement. Les futurs projets d’aménagement et de restructuration de la zone périurbaine de Casablanca ou le projet d’aménagement du Nord du Pays apparaissent particulièrement ambitieux et visent l’installation d’un procédé d’épuration moderne par boues activées. A côté de cette politique de grands travaux, L’ONEE mène une politique de préservation de la ressource et accompagne les acteurs dans des démarches éco-responsables en :

- Mettant en œuvre les Plans de Gestion Environnementale et Sociale pour les projets d’assainissement et d’AEP,

- Réduisant ses rejets liquides et solides des stations de potabilisation et d’épuration,

- Réalisant des études de délimitation des périmètres de protection des zones menacées et des études d’impact sur l’environnement,

- Contrôlant la pollution des eaux souterraines et superficielles, - Assistant les communes et les industriels en matière de protection de

l’environnement , - Sensibilisant le grand public sur la consommation de cette ressource.

Projets et Perspectives en matière d’énergies de la Mer et du Littoral marocain Mustapha ENZILI - Chef de la division Énergies Renouvelables, ADEREE. Le Maroc importe aujourd’hui 96% de ses besoins énergétiques. Sachant que les ressources solaires, éoliennes et hydrauliques sont très importantes, le développement de ce secteur est un enjeu national. Si pour le moment les énergies renouvelables représentent 6,7 % du mix énergétique, l’objectif affiché par le gouvernement est de parvenir à 42% en 2020. Mustapha Enzili, Chef de la Division énergies renouvelables { l’Agence Nationale pour le Développement des Energies Renouvelables et de l’Efficacité Energétique (ADEREE), a rappelé que les 3500 km de côtes du Maroc constituent un milieu privilégié pour le développement de différents types d’énergies renouvelables : éolien et solaire aujourd’hui, énergies marines et algo-carburants demain. Afin de mesurer finement les potentialités du pays, l’ADEREE a réalisé un Atlas interactif des Energies Renouvelables (Eolien, Solaire et Biomasse) début 2013 (www.aderee.ma\atlas-ER) qui sera prochainement étendu à aux énergies marines. En matière d’énergie éolienne, Essaouira, Tanger et Tétouan avec des vitesses moyennes annuelles entre 9,5 à 11 m/s à 40 mètres et Tarfaya, Taza et Dakhla avec des vitesses moyennes annuelles entre 7,5 m/s à 9,5 m/s à 40 mètres, présentent des conditions favorables et plusieurs parcs éoliens ont été réalisés à proximité des zones côtières de Tétouan, Tanger, Essaouira, Akhfennir et Laâyoune.

Page 38: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Le potentiel éolien offshore semble aussi conséquent mais les coûts d’installation (le double par rapport à une installation on-shore), les profondeurs en atlantique et les impacts sur l’environnement restent des données à étudier. Les zones côtières disposent aussi d’un important gisement solaire qu’il convient de ne pas négliger. Pour Mustapha Enzili, les énergies de la mer occuperont demain une place de choix dans le mix énergétique marocain : l’énergie marémotrice (énergie des mouvements de flux et de reflux des marées), l’énergie hydrolienne (énergie des courants marins) et l’énergie houlomotrice (énergie des vagues). Dans cette perspective, l’ADEREE prévoit le lancement d’études de sites pour identifier les zones côtières les plus favorables pour accueillir des projets de ce type. En matière d’applications, les possibilités sont larges et l’ADEREE travaille { un projet de dessalement d’eau de mer au bénéfice des régions de Tan-Tan et d’Essaouira. Plus localement, l’exploitation des énergies marines, éoliennes et solaires représente une opportunité importante pour la production d’électricité et l’eau potable pour les villages de pêcheurs et petits ports. Investir dès à présent dans l’éolien off-shore marocain Christopher LONGMORE - Managing Director, Marine Renewable Energy Ltd. Marine Renewable Energy Ltd est une société basée à Brest et à Southampton spécialisée dans l’information en ligne sur les énergies marines renouvelables. Grâce à un travail de veille permanent par des journalistes expérimentés et des réseaux d’experts, elle publie régulièrement des informations sur le développement de la filière. Christopher Longmore, Managing Director, considère que les énergies marines renouvelables sont un enjeu essentiel de réduction de la facture énergétique et de préservation de l’environnement pour le Maroc. Compte-tenu de l’importance du linéaire littoral marocain, l’houlomoteur et l’éolien off-shore apparaissent comme les innovations européennes les plus transposables. Le réseau fluvial particulièrement dense autour de l’Atlas constitue également un environnement d’implantation favorable pour l’houlomoteur. Certains prototypes placés en aval de stations hydrothermiques pourraient obtenir des résultats intéressants. De la même manière, l’ensemble des ports marocains pourrait constituer un terrain d’implantation intéressant pour les houlomoteurs { clapet. Toutefois { une certaine échelle, leurs potentialités en matière de production d’énergie semblent limitées compte-tenu de la configuration des forces océaniques au large des côtes marocaines. Christopher Longmore a davantage plaidé en faveur de l’éolien off-shore qui semble une solution plus prometteuse.

Page 39: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Si son coût est actuellement le double de l’éolien terrestre, la tendance est clairement à la baisse et ces derniers devraient se rejoindre en 2020 comme l’atteste l’importance des investissements européens dans le secteur. En outre, compte-tenu d’une relative simplicité technique et d’une grande résistance face aux aléas climatiques, ces éoliennes pourraient être utilement développées au Maroc et implantées en mer via remorquage { l’image des expériences portugaises ou espagnoles. Rappelant qu’en matière de développement, le territoire n’est pas un simple lieu mais un véritable milieu, Christopher Longmore souhaite que le Maroc, { l’image de l’Algérie, développe sa propre solution éolienne en s’inspirant des innovations européennes. Les énergies renouvelables ne peuvent constituer une solution totale, mais elles doivent bénéficier d’un soutien politique fort pour favoriser leur pleine expansion. Ce soutien doit se traduire par la mise en place d’un régime juridique favorable, d’investissements en matière d’infrastructures locales et de R&D pour solutionner notamment le problème du stockage énergétique. S’engager en faveur d’une gouvernance environnementale afin de préserver l’équilibre sédimentaire du littoral Naïma HAMOUMI - Professeur, Faculté des sciences, Rabat.

Interfacées autour de 3 grands domaines marins (Océan atlantique, Détroit de Gibraltar, Mer méditerranée) et d’une surface considérable (2500km de côte pour une ZEE d’1M de km²), les marges continentales marocaines sont un espace d’une grande richesse mais aussi d’une grande fragilité. Présentant une multitude d’écosystèmes (7137 espèces) et de paysages variées (147 plages, baies, estuaires, lagunes...), cet espace constitue la principale plateforme de développement économique du pays (pêche, aquaculture, tourisme, import-export…). Professeur spécialisée en géologie marine (sédimentologie, géomorphologie et géochimie) à la Faculté des sciences, Université Mohammed V Agdal à Rabat, Naima Hamoumi préfère parler de « continuum » pour marquer l’interdépendance existante entre le littoral et le plateau continental. Au cœur de cet espace se sont accumulés durant le quaternaire des sédiments qu’il faut préserver. Ces dernières décennies, des facteurs anthropiques ont profondément modifié les équilibres d’échanges existants entre le littoral et le continent et réduit drastiquement les apports des sédiments continentaux. Les retenues des barrages et les aléas climatiques aggravés par les aménagements des cours d'eau et l’endiguement des embouchures, les infrastructures portuaires, les aménagements et ouvrages de protection, les infrastructures touristiques, l’urbanisation galopante, les activités touristiques, l’exploitation du sable sur le littoral et en offshore en sont les principales causes.

Page 40: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Ce déséquilibre sédimentaire s’est traduit matériellement par la disparition et l’érosion intensive de plus d’une vingtaine de plages, un recul régulier du trait de côte, un affaissement des dunes fixées, une progression de la désertification et l’infiltration d’eau marine dans le continent. Naima Hamoumi a également alerté les participants sur l’impact des extractions en milieu marin qui engendre d’importantes modifications du milieu marin quelles que soient les précautions prises : modification du substrat et de la topographie des fonds, de la flore et de la faune benthique, etc. L’épuisement des stocks sédimentaires constitue un risque majeur pour la préservation des écosystèmes littoraux et marins et donc pour le développement du Maroc. Ce constat aggravé par les perspectives de croissance démographique, de littoralisation et de réchauffement climatique plaide donc en faveur d’une gouvernance environnementale. Le dragage des fonds marins, une alternative durable à la surexploitation des dunes et des côtes Hassan AYAD - Directeur Général, Rimal.

Fondée par l’Etat marocain en 1984, la société Rimal est une filiale de Drapor, leader sur le marché du dragage. Il s’agit de l’unique fournisseur de sable de dragage au Maroc. Le dragage consiste en l’extraction ou le prélèvement de matériaux du fond marin et leur transport dans le but d’une valorisation des matériaux prélevés. Cette activité aux applicatifs variés joue un rôle essentiel dans l’aménagement et le développement du territoire : dragage d’entretien des ports et des chenaux d’accès, dragage pour les travaux neufs, dragage pour la protection du littoral, dragage pour la construction de terre-pleins, dragage pour la production de sable… Hassan Ayad, Directeur Général de Rimal, a souligné que l’activité de dragage de sable présente de fortes potentialités pour le secteur du bâtiment et des travaux publics, fort pourvoyeur d’emplois au Maroc, puisqu’elle permet la fourniture des matériaux de construction. Il a rappelé que cette technique a fait ses preuves et que le Japon, la Hollande, la Grande Bretagne ou la France, leaders du marché, s’approvisionnent depuis de nombreuses années en mer pour leurs besoins en sable et graviers. Le développement démographique et économique du Maroc a mécaniquement entrainé un accroissement des besoins et une raréfaction des ressources. Selon l’Association Professionnelle des Cimentiers (APC), la consommation de sable ne cesse de progresser. Entre 2000 et 2010, elle est passée de 15 à 30 millions de tonnes. L’Association Professionnelle du Sable estime à 45 millions de tonnes les besoins en 2015 et 60 millions de tonnes en 2020. Pour répondre aux besoins du Bâtiment et des Travaux Publics, les différents acteurs du secteur ont mené des recherches visant à diversifier les sources en sable de construction

Page 41: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

alimenté essentiellement aujourd’hui par les plages et les dunes du littoral (40% sable d’oued et 43% sable de dunes). Celles-ci ont permis de mettre sur le marché d’autres types de sable tel que le sable de concassage et le sable de dragage qui répondent aux caractéristiques techniques fixées par la norme marocaine pour le béton. Depuis 2002, le dragage du sable est reconnu par l’Etat marocain comme une solution alternative à la surexploitation des dunes et des côtes qui débouchent sur des massacres écologiques sur la côte. Certains intervenants ont noté toutefois que les études d’impact de dragages de sable ne sont toujours pas transparentes et qu’elles pouvaient entrainer aussi des impacts relativement conséquents pour l’environnement. D’autres participants ont rappelé qu’il était important pour le Maroc de développer l’industrie du recyclage du verre, génératrice de sable car cela permettra de diversifier les sources d’approvisionnement.

Page 42: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Conférence : Rencontre littéraire avec la Mer

Les écrivains de Marine. Fondée en 2003 par Jean-François Deniau en partenariat étroit avec la Marine Nationale française, l’association des Ecrivains de Marine regroupe vingt écrivains français ayant une connaissance et une pratique de la mer. Dans une convention signée avec le ministère de la Défense, les Ecrivains de Marine s'engagent à « collectivement à servir la marine, favoriser la propagation et la préservation de la culture et de l’héritage de la mer, et plus généralement la promotion de la dimension maritime de la France. » Les Ecrivains de Marine peuvent embarquer sur les navires de la Marine Nationale et sont autorisés à porter l'uniforme. Ils sont assimilés au grade de capitaine de frégate. Ils étaient présents à El Jadida ce 9 mai 2014 : Marie DABADIE, Déléguée aux Ecrivains de Marine. « Les Ecrivains de Marine » Amiral BELLEC, de l’Académie de Marine, historien, peintre de la Marine, et écrivain. « Le Maroc et la Mer » « Malgré sa longue histoire, la dimension maritime du Maroc pas assez pise en compte. Nous devons ici faire passer le message du fait maritime marocain, parler de l’héritage maritime du Maroc et ne pas laisser passer la chance du 3ème millénaire océanique. Le prosélytisme du Forum de la Mer est nécessaire. » Patrick POIVRE D’ARVOR, Journaliste, producteur et écrivain. « La mer, source d’inspiration pour les écrivains » « La Mer est l’avenir de l’homme. Lorsqu’un homme, fétu de paille, se retrouve face à la mer, il se sublime. » Patrice FRANCESCHI, Ecrivain, aventurier, pilote et marin. « La ligne de séparation » « L’Homme trace des frontières mouvantes, la Mer constitue une frontière réelle, fixe et intangible ; elle sépare le monde des normes et le monde de la Liberté. »

Page 43: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Titouan LAMAZOU, Navigateur, artiste et écrivain. « L'inspiration dans le déplacement et la solitude du voyage » « La Mer est un éloge de la lenteur, du mouvement et de la solitude. La destination attise la curiosité de découvrir l’horizon, l’autre, l’exotisme, le divers. » Special guest : Zoé LAMAZOU, journaliste et écrivain. « Une saison de chasse en Alaska » « Les voyages permettent de comprendre les défis auxquels les territoires et les peuples sont confrontés. Il faut forer et ouvrir de nouvelles autoroutes maritimes. »

Page 44: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Atelier 5 : Tourisme bleu et aménagement du littoral « Vers un aménagement durable du territoire »

Modérateur : Mustapha FAKHIR, Maritime News. Le mot de la séance : «Quand le dernier arbre aura été abattu, la dernière rivière empoisonnée, le dernier poisson pêché, alors vous découvrirez que l’argent ne se mange pas » - Proverbe indien Les enjeux de la séance : A l’heure où 90% du commerce s’effectue par voie maritime et où les activités et les hommes se concentrent sur les côtes, l’aménagement du littoral marocain est un enjeu majeur pour le développement du pays. Comment concilier, dans une logique de durabilité, le développement de l’artisanat, de l’industrie et du tourisme sur le littoral et la préservation de ses ressources ? Les chiffres clés : Le littoral marocain, c’est :

- Plus de 50% de la population, - 80% des travailleurs permanents, - 92% des industries, - 14 sites écologiques, - 145 plages, - 67 % de la valeur ajoutée.

Vers une stratégie publique intégrée d’aménagement et de développement du littoral Jaouad MOUABIT - Direction de l’Aménagement du Territoire, Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Politique de la Ville. La nécessité d’une Stratégie Nationale de Gestion Intégrée du Littoral Marocain s’est affirmée au vu des enjeux actuels de préservation et de développement de cette partie du territoire. Sur les côtes, l’étalement urbain sauvage en faveur d’un tourisme toujours plus lucratif a été favorisé dans les années 90 par l’absence de législation protectrice du littoral et d’outils de planification. Jawad Mouabit, Chef du Service des Espaces Sensibles à la Direction de l’Aménagement du Territoire, a rappelé les grands principes de la politique d’aménagement durable du littoral marocain (équité sociale, efficacité économique, préservation des ressources) et ses principaux outils législatifs.

Page 45: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Basée sur un diagnostic sans complaisance, une Charte Nationale de l’Aménagement du Territoire (CNAT) co-construite avec l’ensemble de la société civile, a acté les principales orientations de cette politique dont le Schéma National de l’Aménagement du Territoire (SNAT) se veut la traduction opérationnelle. Concernant le littoral, ce dernier vise en particulier à :

- Planifier les aménagements nationaux et régionaux du littoral, - Définir les conditions d’urbanisation, - Instaurer les mécanismes de protection des zones fragiles, - Encadrer les activités d’exploitation des ressources de la mer ou des rivages, - Garantir l’accès { la mer et la bonne gestion du domaine maritime, - Adopter des mesures spéciales de préservation des zones d’intérêt touristique ou

urbain.

Jawad Mouabit a rappelé que les collectivités ont également toute leur place dans cette stratégie d’aménagement du littoral grâce au Schéma Régional d’Aménagement du Territoire (SRAT) dont le programme d’actions centré sur des compétences de proximité est contractualisable avec l’Etat afin d’assurer la cohérence d’ensemble. Il a également plaidé { terme en faveur d’une approche publique spécifique des problématiques du littoral à travers une stratégie nationale de gestion intégrée du littoral marocain qui devait prochainement voir le jour. Celle-ci permettrait de construire une vision d’aménagement et de développement de zones côtières et pourrait s’appuyer sur des outils de planification adaptés assurant l'intégration des différents secteurs (logement, activités, loisirs…) { l’image du Schéma Directeur de l’Aménagement de l’Urbanisme du Littoral (SDAUL). Positionner le Maroc sur le marché de la plaisance et du tourisme balnéaire

Sghir EL FILALI - Directeur de la régulation et développement des ports, ANP.

L’économie maritime marocaine connait actuellement d’importantes mutations qui ont conduit le Maroc { bâtir une ambitieuse stratégie d’aménagement et de développement portuaire. Cette « stratégie portuaire 2013 » a enclenché une nouvelle dynamique urbano-portuaire centrée sur le redéploiement des espaces portuaires, une restructuration des interfaces Ville/Ports et une requalification des anciens bassins portuaires vers d’autres activités telles que la plaisance. Dans cette stratégie, le développement des activités de plaisance et du tourisme balnéaire a toute sa place car elles jouissent d’un fort potentiel de développement. Toutefois, le pays connait un déficit structurel en matière d’infrastructures portuaires dédiées { ce type d’activité. L’offre actuelle est relativement faible et inégalement répartie sur une dizaine de ports de natures diverses (marinas réservées exclusivement à la plaisance, ports intégrés de plaisance – pêche, marinas intégrées dans des ports de commerce…).

Page 46: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Dans le cadre de cette nouvelle stratégie portuaire, Sghir El Filali, Directeur de la régulation et développement des ports à l’Agence Nationale des Ports, a ainsi indiqué que l’offre plaisancière marocaine sera prochainement étoffée dans le cadre de projets de requalifications portuaires (requalification du port de Tanger ville, d’Essaouira, d’Al Hoceima, de Safi, etc) et grâce à la création de 6 ports de plaisance le long du littoral marocain. Valoriser les potentiels du domaine public maritime marocain Sanae EL AMRANI - Chef de la division planification et finance, Direction des Ports et du Domaine Public Maritime. Fort de ses 3 411 km de Domaine Publique Maritime (DPM), le Maroc ambitionne de jouer un rôle moteur dans l’économie de la mer. Cette zone à la géographie variée (falaises, plages, embouchures, lagunes) concentre d’importants atouts de développement tels que les ports, l’industrie navale, le tourisme, la plaisance, l’énergie, l’eau, la pêche ou l’aquaculture. Dans une logique de développement durable, le gouvernement souhaite y concentrer les investissements tout en protégeant et valorisant durablement ses ressources et en organisant le partage des usages. Piloté par le Ministère de l’Equipement et des Transports, un futur Schéma Directeur de Valorisation du Domaine Public Maritime s’appuiera sur un diagnostic stratégique de patrimoine et un atlas interactif des potentiels marins et côtiers afin de proposer des scénarii crédibles de développement. Dans cette stratégie, Sanae El Amrani, Chef de la Division Planification et Financement à la Direction des Ports et du DPM, a souligné que le développement des infrastructures portuaires et la valorisation des plages du Maroc en étaient deux axes majeurs. Capital économique pour les collectivités locales littorales et autres opérateurs économiques, les plages demeurent, généralement, exploitées d’une manière anarchique. Faute de schéma d’aménagement, les concessions sont largement dominées par des autorisations d’occupations temporaires du DPM et les activités économiques se développement sans contrôle véritable. Le futur schéma prévoit donc la mise en place de Plans d’Utilisation et de Gestion des Plages avec l’objectif de mettre en valeur ces plages et d’assurer une meilleure organisation de l’espace et des activités implantées.

Page 47: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Reconnaitre et accompagner le développement du trafic plaisancier Younes ALAHIANE - Chef de quartier maritime de la circonscription d’El Jadida et Oualidia, Direction de la Marine Marchande. La liberté de navigation est l'un des principes les plus anciens du Droit maritime et la Convention des Nations Unies sur le Droit de la mer y fait largement référence. Toutefois, les états ont capacité à agir sur le trafic qui se situe sur leur domaine maritime. Le Code de Commerce Maritime marocain du 31 mars 1919 définit la navigation commerciale et en arrête une typologie : le long cours, le grand cabotage, le cabotage, le bornage, la grande pêche, la pêche au large et la petite pêche. Younes Halahiane, de la Direction de la Marine Marchande d’El Jadida, a rappelé que la navigation de plaisance ne dispose pas au Maroc d’un régime particulier et est considérée comme une navigation d’agrément pure. Les mêmes dispositions applicables aux autres types de navires s’appliquent donc { l’exception de la conduite maritime où aucun diplôme ou brevet n’est exigée. Régie par le Décret N° 2-06-472 du 4 août 2008, la Direction de la Marine Marchande a pour missions :

- de proposer toutes mesures législatives et réglementaires relatives à la construction, { l’équipement, { la gestion et l’administration des navires de commerce, de servitude et de plaisance et de leur armement et veiller à leur application,

- d’assurer le contrôle et l’inspection des navires de commerce, de servitude et de plaisance ainsi que la conduite des enquêtes nautiques les concernant,

- de procéder au jaugeage et { l’immatriculation des navires de commerce, de servitude et de plaisance.

Confronté au développement de cette activité et afin de l’accompagner au mieux, le gouvernement a élaboré un projet de loi relatif à la navigation de plaisance. Structurée autour de 8 chapitres, cette loi posera les règles en matière de navigation et de circulation, d’immatriculation et identification, de conduite et de formation, d’homologation des navires et des véhicules nautiques à moteur et des engins de plage, d’assurance, d’exploitation à but lucratif et d’infractions et de sanctions et permettra de réguler un secteur en pleine expansion. Lever les freins au développement des sports de plaisance et en promouvoir l’attrait auprès de la population Mehdi ALAZEMMOURI - Directeur Général MK Motors S’il salue la volonté du gouvernement de développer l’offre portuaire dédiée { la plaisance, Mehdi Alazemmouri, représentant les professionnels du nautisme et Directeur Général de MK Motors, la juge surcalibrée au regard des perspectives de développement du secteur.

Page 48: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Rappelant que le nautisme reste une activité embryonnaire au Maroc, il regrette que son développement reste fortement entravé par la lourdeur et l’inadaptation des contrôles de la Marine Marchande. La plaisance reste encore une activité économique exogène essentiellement pratiquée par les touristes étrangers et intéresse encore trop peu la population locale. Afin de développer et diversifier l’activité et de lui donner un ancrage local, il est nécessaire de sensibiliser la population et notamment les enfants à cette pratique ludique et sportive. Structurer des dynamiques de développement urbain autour de la pêche dans les provinces du sud Maroc Hassan MISTROU - Coordonnateur adjoint du programme pêche, Agence du Sud. L’Agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du Sud du Royaume a pour mission de proposer des stratégies et des programmes d’aménagement et de développement dans la partie méridionale du Maroc.

L’intervention de l’Agence du Sud porte sur 58% du territoire marocain (Guelmim-Es-Semara, Laâyoune-Boujdour-Sakia-el-Hamra, et Oued-ed-Dahab-Lagouira) et sur plusieurs secteurs d’activité économique (villages de pêche, infrastructures, habitat et développement urbain, agriculture et élevage, tourisme et artisanat, etc.).

Conformément au discours royal de mars 2002, Hassan Mistrou, Coordinateur régional du Programme Pêche de l’Agence du Sud a rappelé l’importance du secteur de la pêche artisanale dans cette stratégie de développement. Celle-ci souffre dans ces provinces, de plusieurs difficultés telles que le manque d’équipements ou de services publics, de formation des professionnels aux techniques de navigation, de pêche et de stockage du produit, d’un habitat digne ou d’un accès malaisé au crédit. Associant autour de l’Agence du sud, l’Office National des Pêches et différents ministères, cette stratégie publique s’est traduite par la définition d’un programme de réalisation de 10 villages de pêche sur le sud littoral pour un montant de 921 millions de dirhams. L’idée est de développer autour du secteur de la pêche de véritables métropoles intégrées disposant de l’ensemble des infrastructures et services publics nécessaires (restructuration de la profession et organisation de réseaux de commercialisation, accès { l’eau, { l’électricité, { l’assainissement, aux services administratifs, { la santé…) et de créer une dynamique de développement. A terme, cette stratégie vise la création de 14 000 emplois directs et 9 000 indirects autour de la pêche, l’amélioration des conditions de vie des habitants et la protection de l’environnement des zones littorales et de la biodiversité marine.

Page 49: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Agadir, un littoral fragilisé et menacé qu’il convient de préserver face à la spéculation immobilière Tarik KABBAGE - Maire d‘Agadir. A travers l’histoire, la ville d’Agadir a longtemps bénéficié d’une baie remarquable protégée par les dunes et les mouvements marins qui permettaient de reconstituer ses plages. Photos { l’appui, Tarik Kabbage, Maire d’Agadir, a montré que par la faute d’un développement urbain non contrôlé du littoral, des millions de m3 ont disparu en quelques décennies. De 1953 à 2014, les digues du port ont dévié les courants et modifié la plage de la ville qui s’engraisse au nord et s’érode au sud. Le cordon dunaire, lui, a progressivement disparu suite aux aménagements sauvages en bord de mer autorisés généreusement par l’Etat { des promoteurs immobiliers. Opposé à ce développement sauvage et anarchique qui menace son littoral, accusé de dire non { l’investissement, le Maire d’Agadir considère que l’Etat a une lourde responsabilité dans cette dégradation et doit réagir rapidement en s’appuyant sur les projets communaux. Conscient de son caractère support pour le développement de la ville, il a rappelé avec force la nécessité de protéger le littoral contre les programmes immobiliers sauvages en deçà de la ligne des 100 mètres, la privatisation des plages et les rejets ménagers et industriels sur la côte, et l’importance de promouvoir un autre modèle d’aménagement plus durable et respectueux de l’environnement. L’idée de la municipalité serait notamment d’aménager le front de mer pour la préserver et en faire un lieu de vie culturel accessible { l’ensemble des habitants. Saluant le futur projet de loi sur le littoral marocain, il a regretté que, pour l’heure, ce soit la spéculation immobilière hôtelière et le développement des carrières sauvages qui dominent et défigurent la côte sur fond de corruption des autorités de contrôle.

Page 50: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Séance plénière de clôture « Un appel pour la mer et le littoral »

Remise des prix Seal Lab’ Aziz FASSOUANE - Directeur ENCG Settat. Le directeur de l’ENCG Settat a tout d’abord défini l’esprit du Sea Lab : un appel à projets pour le développement durable, la promotion et la protection des zones littorales sur le thème : Quel littoral pour demain ? L’objectif du Sea Lab’ est de donner de la visibilité aux initiatives concrètes et travaux de recherches entrepris dans les universités marocaines et les établissements de recherche, afin de permettre aux étudiants et chercheurs de présenter leurs propositions et résultats à des experts et professionnels de la Mer, de communiquer dans un événement de portée internationale et de rencontrer des entreprises engagées susceptibles d’accompagner ces projets vers leur réalisation.

Il félicite, au nom du Jury, l’ensemble des projets présentés, tous d’une excellente qualité. Sur les 6 candidats sélectionnés, 2 projets ont terminés ex æquo : « Le faucon de l’île de Mogador » et la « Contribution { l’étude de la lagune de Khnifiss ». Jean-Pierre Glasser, Président de l’Ecole de Voile des Glénans a remis le prix aux deux équipes lauréates : un séjour d’une semaine au centre des Glénans, afin d’apprendre la

Page 51: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

pratique de la voile et comprendre la Mer par la pratique. Comme il l’a lui-même indiqué, les Glénans sont « une école de Voile, une école de vie ». Jean-Pierre Glasser a pu réaffirmer son soutien au Forum de la Mer, et la logique du soutien de son association à cet évènement qui, au-delà du plaisir intellectuel, du plaisir de la rencontre et de l’échange, est une rencontre d’amitié. Brigitte Borneman, membre du jury, a pour sa part remercié l’initiative de mettre les jeunes chercheurs au centre du Forum et insisté sur le devoir de communication des travaux de recherche. « Une recherche sans communication n’a pas de valeur » a-t-elle martelé. A ce titre, pour être accompagné, les projets soutenus seront présentés dans « Marine Renewable News », afin qu’ils soient connus et reconnus. Remise du Trophée des étudiants Mehdi ROUIZEM - Directeur, Ecole de Voile Bautilus. Titouan LAMAZOU - Navigateur, artiste et écrivain. Autre temps fort de cette séance de clôture, la remise du Trophée des étudiants, dont la genèse a été décrite par Mehdi Rouizem. L’an dernier ce sont 500 enfants qui ont découvert la mer, dont des étudiantes. 4 étudiantes se sont entrainées depuis pendant 6 mois et ont participé à une régate. Ce prix vient les récompenser. Pour Titouan Lamazou, c’est la preuve de la capacité de séduction et d’engagement de la Mer et des activités sportives : aller au-delà de soi-même, des appréhensions et de l’inconnu dont il loue par ailleurs leur apport essentiel car elles mettent en relation directe l’individu avec la nature. La Mer « enrichit les âmes et les esprits. »

Page 52: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

Un appel pour la Mer et le Littoral Gilles BŒUF - Président du Museum National d’Histoire Naturelle de Paris. Miloud LOUKILI - Professeur, Université Mohammed V, Rabat. Intervenants particulièrement remarquables de cette édition du Forum de la Mer, les Professeurs Gilles Bœuf et Miloud Loukili ont décidé, en accord avec l’organisation du Forum, de lancer un Appel pour la Mer d’El Jadida. A ce titre, ils seront nommés co-Présidents du Conseil Scientifique du Forum de la Mer d’El Jadida pour la troisième édition de 2015. Pour Miloud Loukili cette séance n’est pas une clôture. Comment pourrait-elle l’être ? La mer est toujours renouvelée, toujours repensée. C’est une suspension des travaux pour mieux les reprendre. Le Forum de la Mer cumule deux atouts certains : le charme de la côte et l’appel du large. Il salue la qualité de l’accueil de la Province, qui, rappelle-t-il, porte le nom donné par le neveu d’un sultan alaouite. Cet Appel pour la Mer est une contribution modeste mais indispensable. Il est également un appel pour un Ministère ou un Observatoire de la Mer au Maroc. Gilles Bœuf, quant à lui, a rappelé cette évidence trop souvent oubliée : l’océan est unique, il n’y en a qu’un sur toute la Terre, et au-delà, dans tout notre système solaire. La vie apparaît dans les océans { partir d’une cellule mère. Il créé la diversité biologique pour créer des êtres uniques, et cet Océan est stable depuis 100 millions d’années. Le Littoral également, mince frange de passage entre la terre et l’océan, est en danger. Pour l’écologue, cet Appel pour la Mer est surtout un cri : « Arrêtons de créer la richesse sur la destruction, de se rémunérer en exploitant la nature qui, elle, se régénère sur le vivant ! » avec cette conclusion presque optimiste : « le climat est parti, mais les écosystèmes peuvent être préservés. » Il en appelle également au rôle des Femmes : moins d’arrogance et de cupidité. Plus enclines au partage et au respect de par leur place biologique. Mehdi Alaoui Mdaghri prend cet engagement pour la troisième édition : renforcer la dimension globale du forum par une approche transversale de toutes les disciplines ayant trait aux océans, et l’instauration déj{ actée d’un atelier sur la bio inspiration. Clôture du Forum Mouâad JAMAÏ - Gouverneur de la Province d’El Jadida. Le Gouverneur de la Province soutient le Forum de la Mer depuis ses débuts. En 2013, il avait déclaré que la Province devait se développer selon un modèle basé sur une plus grande durabilité autour de trois piliers, tous liés à la mer :

Page 53: Le Livre Bleu - forumdelamer.orgforumdelamer.org/wp-content/uploads/2015/05/FDM2_Livre_Bleu_29.03... · modification profonde de la carte démographique du Royaume, puisqu’une grande

- le tourisme balnéaire (avec de belles réalisations d’infrastructures touristiques, mais aussi le Pôle Urbain de Mazagan, un projet de ville verte étendue sur 1500 ha),

- l’agriculture et la pêche maritime (avec notamment une meilleure exploitation des algues marines),

- le développement industriel des ports d’El Jadida (24% des exportations marocaines y transitent avec une ambition de 65 % d’ici 2020) et de Jorf Lasfar.

C’est cette feuille de route que suit la Province avec cet enjeu crucial de la recherche d’un équilibre entre économie bleue et protection de l’environnement. Pour Mouâad Jamaï cette 2ème édition du Forum n’appelle pas à se projeter pour la 3ème édition… mais pour la 20ème édition ! Il faut ancrer le Forum sur El Jadida, dans une continuité afin d’être accompagné dans la durée et construire sur des fondations solides, non sur du sable ! En écho au Sea Lab’ et { la vocation scientifique affichée pour l’avenir, le Gouverneur souhaite associer l’Université d’El Jadida aux prochaines éditions afin de créer une synergie entre les différents acteurs du territoire et travailler sur un plan stratégique de long terme afin d’évaluer l’impact du Forum. Et toujours cette volonté affichée d’assurer la pérennité.

Conclusion Mehdi ALAOUI MDAGHRI - Fondateur du Forum de la Mer. Ainsi s’achève cette deuxième édition du Forum de la Mer, qui selon les mots de son fondateur fut d’une grande richesse avec un indéniable sentiment d’amélioration. Les cinq thématiques identifiées ont davantage été travaillées sur le contenu, sur le fond, le tout en adoptant une démarche itérative avec les partenaires. Cette seconde édition a d’ores et déj{ permis d’identifier des thématiques nouvelles pour 2015 : la bio-inspiration, la mer espace de migrations, etc. Installant résolument le Forum dans les préoccupations de son temps… pour préparer l’avenir.