22

Le prix de l'incompétence · 2018. 4. 12. · Title: Le prix de l'incompétence Author: Kerdellant Christine Created Date: 5/20/2011 6:08:21 PM

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    1

Embed Size (px)

Citation preview

  • le prix de l'incompétence

  • DU MÊME AUTEUR

    Les Cheminots, génération TGV, Critérion, 1991 Les Nouveaux Condottiere, Calmann-Lévy, 1992

    Les Chroniques de l'ingénieur Norton, Belfond, 1997

  • Christine Kerdellant

    le prix de l'incompétence

    histoire des grandes erreurs de management

    DENOËL IMPACTS

  • Ouvrage publié sous la direction de RENAUD DE ROCHEBRUNE

    © by Éditions Denoël, 2000 9, rue du Cherche-Midi, 75006 Paris

    ISBN 2.207.24842.9 B 24842.0

  • Sommaire

    Introduction 11

    1. Qu'importe l'ivresse pourvu qu'on ait le flacon 21 Se tromper sur le produit lui-même

    2 Le mirage du consommateur mondial 65 Croire que l'on vend aux Américains comme aux Français

    3. Le facteur ne sonne qu'une fois 101 Rater une marche technologique ou marketing

    4. Ne le dites pas avec des chocolats 137 La maladresse de communication

    5. On a grand tort d'avoir trop tôt raison 179 Lancer un produit en avance sur son époque

    6. Et pourtant, les études étaient formelles 215 Croire aveuglément aux études de marché

    7. Même les bonnes idées sont mortelles 237 Le vieillissement et l'absence de remise en cause

  • 8. Les arbres ne montent pas jusqu'au ciel 279 Croire à la croissance éternelle

    9. Poker perdant 317 Se faire « escroquer » ou être naïf en affaires

    10. Techno-couacs 351 Prendre une décision trop loin du terrain

    11. Ils étaient les meilleurs 379 Ne pas savoir diriger

    12. 1 + 1 = 3 ou 0 413 Rater la fusion de deux entreprises

    Conclusion 443 Sources 455 Cas étudiés 469 Remerciements 473

  • A Pierre-Alexandre

  • INTRODUCTION

    « N'oubliez jamais que la bêtise aussi a sa place dans la causalité historique et qu'à côté des radiotélescopes, elle contribue à éclairer la notion de l'infini. »

    Jean Bourdarias

    « Un patron, disait Marcel Bich, ça prend sept bonnes décisions pour deux foireuses et une carrément mau-vaise. » Le roi du stylo-bille, du rasoir et du briquet jetables parlait en connaissance de cause : ses trois grands succès ont été suivis de quelques demi-échecs dans les planches à voile, la haute couture ou les col-lants, et d'un vrai ratage : le parfum à 20 francs. Même les entrepreneurs visionnaires sont faillibles, et ce livre en forme de bêtisier va montrer à quel point le baron avait raison.

    En 1982, deux consultants en stratégie américains, Tom Peters et Bob Waterman, publiaient Le Prix de l'excellence, un essai sur les meilleures entreprises du monde. La France le découvrit un an plus tard au moment où s'amorçait, après deux années de pouvoir socialiste, un mouvement de réhabilitation des entrepre-neurs unique dans l'histoire. IBM, Levi's, Boeing, Atari, Avon, Amoco ou Delta Airlines figuraient parmi ces modèles portés aux nues. Pourtant, huit ans après, le

  • leader mondial de l'informatique était quasi moribond. Puis Levi's et Boeing ont connu à leur tour les affres des plans de restructuration à répétition. Amoco a déversé son pétrole sur les côtes bretonnes, tandis qu'Avon, Atari ou Delta Airlines ont été rachetés ou se sont mis sous la protection du Chapter 11, la loi américaine sur le redressement judiciaire. Sur cinquante-sept firmes amé-ricaines citées en exemple par Peters et Waterman, les deux tiers ont connu des difficultés ou carrément fait faillite. Faut-il en déduire que le palmarès n'était pas sérieux? Pas du tout, prétendent les intéressés, c'est seulement la preuve que la stabilité n'existe plus et qu'il faut se remettre en cause en permanence.

    Mais pourquoi les Mozart de la stratégie ont-ils souf-fert plus que les autres ? Est-ce parce que, bardés de lau-riers et de certitudes, ils ont manqué de flair en rejetant les idées qu'ils n'avaient pas eues les premiers? Pour-quoi IBM s'est-il fait doubler - en chiffre d'affaires comme en capitalisation boursière - par son ancien pro-tégé Microsoft? Une partie de l'explication a résidé, comme on le verra au chapitre 3, dans son absence d'humilité : IBM, leader incontesté dans son domaine, se croyait à l'abri de l'erreur. À quoi bon instaurer des garde-fous dans une pépinière de champions ? Pourquoi se battre pour être le meilleur lorsqu'on est déjà reconnu comme tel? Chez Microsoft, Bill Gates n'a jamais cessé de répéter que personne n'était infaillible et qu'il fallait se sentir un « underdog », un challenger permanent, même lorsqu'on collectionnait les premières places. Pour mieux gagner, il cultivait la peur de perdre. Résultat, seules les lois antitrust peuvent désormais don-ner un coup d'arrêt à son expansion.

    Les success stories ont toujours fait rêver. Pourtant, aujourd'hui, les trop belles histoires ne sont plus cré-dibles dans le monde des affaires. Les marchés évoluent trop vite, les retournements de situation sont trop rapides pour que rien ne soit définitivement acquis.

  • Sony, Sega ou Nintendo jouent leur suprématie tous les deux ou trois ans, à chaque fois qu'ils sortent une nou-velle console. Les frontières des marchés deviennent floues : le téléphone mobile ne concurrence pas seule-ment le téléphone fixe. Il menace les éditeurs de jour-naux, la télévision, tous ceux qui se positionnent sur le marché du temps libre. De quoi inciter les managers à la modestie, eux dont ce n'est pas la qualité première. Les entreprises familiales, si elles ne sont pas parfaitement gérées, ne prospèrent plus sur leur pré carré ; à l'autre extrémité du spectre, des monopoles publics s'effondrent, et les technocrates découvrent avec stu-peur leurs usagers changés en clients. Même les « petits princes du cash-flow » - Vincent Bolloré est bien placé pour le savoir, lui qui s'est trouvé en grande difficulté après le rachat de l'armateur Delmas-Vieljeux - ont essuyé des revers. Les « échec stories » jalonnent l'his-toire économique.

    « Tous les managers font des erreurs », admet Alain Mine, qui inspira Carlo de Benedetti dans son raid man-qué sur la Société générale de Belgique, et qui raconte, dans le chapitre 4, comment l'idée leur en était venue et quelles fautes ils ont commises. L'erreur, comme la gra-vitation, est universelle. Nul n'échappe à la loi d'Icare. Chacun rêve de voler et, un jour, s'approche trop près du soleil. Même des groupes comme Danone ou Disney, qui tiennent le haut du pavé, ont eu leur lot de fausses bonnes idées, d'études mal ficelées, de décisions précipi-tées, de projets avortés et de grands desseins qui finissent à la corbeille. L'application de méthodes éprouvées n'est pas une garantie de succès quand les «fondamentaux» du métier changent régulièrement. «Une entreprise performante qui sent que la concep-tion de son métier est remise en cause a tendance à fer-mer les yeux et à faire comme si tout allait bien », nous a un jour confié Peter Drucker, le plus célèbre des experts en sciences des organisations.

  • Pour Paul Valéry, être compétent, c'était même « se tromper selon les règles ». De fait, c'est après la plus grosse étude de marché jamais réalisée sur la planète que le patron de Coca-Cola a décidé, en 1985, de chan-ger le goût de sa boisson mythique. Résultat, il a réussi à faire descendre ses compatriotes mécontents dans la rue. C'est aussi après une batterie de tests et de recherches en tous genres que Ford a lancé en 1957 la fameuse Edsel, la voiture qui devait plaire à tout le monde et n'a plu à personne - sinon aux humoristes américains dont elle est devenue le souffre-douleur. Au point que la pauvre Edsel est aujourd'hui un nom commun qui figure dans le Webster's, le Petit Larousse américain, comme synonyme de loser. Mais c'est sans procéder à la moindre étude que le patron de Kodak a éconduit l'inventeur du Polaroid, après lui avoir genti-ment expliqué que les gens n'étaient «pas pressés d'avoir leurs photos». C'est aussi, à l'instinct, obsédé par son souci de faire des économies, que le patron de Peugeot a refusé l'Espace que lui apportait Matra sur un plateau. Qu'ils décident seuls, au feeling, ou en s'entou-rant de conseils et d'études, tous ceux qui doivent choi-sir sont faillibles.

    Il n'existe pas, par définition, de «théorie de l'erreur». Dans les écoles de gestion, les erreurs commises par les décideurs sont étudiées sous forme de cas pratiques. Mais les théoriciens économiques se sont toujours intéressés à la manière dont les dirigeants pre-naient leurs décisions. Ainsi le prix Nobel d'économie Herbert Simon a-t-il développé la théorie de la « ratio-nalité limitée du décideur ». Le grand chercheur améri-cain a montré qu'un dirigeant, si performant soit-il, ne prenait jamais la meilleure décision dans l'absolu mais la décision qui lui apparaissait la meilleure parmi celles qu'il lui était possible d'envisager à un instant t. Pour-quoi cette restriction? Parce que ni son information ni sa rationalité ne sont parfaites. Il est rare qu'il puisse

  • connaître toutes les conséquences de ses choix; il n'existe d'ailleurs aucun critère qui ait valeur absolue pour les évaluer. Son comportement doit donc être considéré comme celui d'un satisfying animal et non pas d'un optimizing animal. Autrement dit, le dirigeant ne choisira pas la meilleure solution mais celle qui satisfait le mieux aux critères de rationalité qui sont les siens. Comme le dit joliment Herbert Simon : « L'exploration d'une meule de foin pour y trouver la plus fine aiguille et l'exploration de la même meule pour en trouver une assez fine pour pouvoir coudre ne sont pas du même ordre. »

    Le théoricien canadien Henry Mintzberg, qui, lui, étu-die depuis près de trente ans la manière dont les mana-gers utilisent leur temps, a constaté qu'ils consacraient en moyenne moins de neuf minutes à chaque sujet méri-tant décision. Leur emploi du temps est si morcelé, ils subissent une telle pression de l'immédiat et du super-ficiel qu'ils sont obligés de raisonner à court terme et d'agir avec brusquerie.

    De fait, tous les récits contenus dans ce livre montrent à quel point les dirigeants jouissent d'une rationalité limitée et prennent souvent leurs décisions à la légère. Mais si les théories de Simon et Mintzberg nous aident à comprendre comment on commet des erreurs, elles n'expliquent pas pourquoi on en commet tant. Les satis-fying animais qui tiennent le mauvais rôle dans notre palmarès de l'échec ont des circonstances atténuantes. La plus sérieuse, c'est que l'analyse est paralysante : le manager qui ne voudrait décider qu'en « totale connais-sance de cause » ne déciderait jamais. « Les décisions ne se prennent pas, elles se cueillent, aime à dire Henri Lachmann, le P.-D.G. de Schneider. Elles s'imposent lorsqu'elles sont mûres. » De là à dire que c'est faute de les avoir laissées mûrir que certains n'en goûtent que l'amertume...

    Les grandes erreurs commises par ces expérimenta-teurs que sont les managers sont si nombreuses qu'on

  • s'épuiserait à ne recenser que les plus connues. En ce qui concerne les seuls lancements ratés, il existe à New York un musée des « produits qui ont échoué » conte-nant plus de 15 000 pièces, et qui ne cessera jamais de s'enrichir. Car l'innovation est une activité à haut risque : elle affiche un pourcentage d'échec de 70 %, selon une étude menée au début des années 80 par les consultants américains Booz-Allen et Hamilton. Mais l'absence d'innovation peut se révéler plus mortelle encore.

    Alors que nous observons depuis de nombreuses années la vie des entreprises, et singulièrement les rai-sons de leurs échecs, nous avons constaté que les erreurs commises par les dirigeants revenaient avec une éton-nante régularité. Autrement dit, on retrouve toujours les mêmes fautes et les mêmes dysfonctionnements, comme si l'expérience des uns ne profitait jamais aux autres. Il était donc assez aisé d'établir une typologie. Celle qui a été choisie comporte une douzaine d'erreurs types, qui correspondent aux chapitres du livre. Bien sûr, on trouvera des exceptions et des cas non catégori-sâmes, comme ce patron de société qui « disjoncte » et se met à vendre à perte parce qu'il veut conquérir 100 % du marché, ou celui qui découvre, le jour où son usine brûle, qu'il a fait confiance à un faux courtier en assurances. Nous n'avons gardé que les erreurs régu-lièrement commises par des managers jugés compétents. Une centaine de cas ont été sélectionnés, dans les sec-teurs d'activité les plus variés, de l'automobile au tou-risme en passant par l'édition ou le prêt-à-porter. Vingt d'entre eux sont largement développés parce qu'ils sont particulièrement représentatifs d'un type d'erreur. Les autres sont plus rapidement évoqués, soit parce qu'ils reproduisent exactement le même schéma que le cas principal, soit parce qu'ils possèdent une moins grande valeur didactique. Certaines histoires sont familières au grand public mais désormais, parce que quelques années ont passé et que les acteurs s'expriment plus facilement

  • - au moins sous couvert d'anonymat -, nous avons pu apporter des éléments nouveaux, voire découvrir des épisodes oubliés des sagas officielles. Nous avons ainsi « revisité » (chapitre 9) la fameuse affaire de Elf et des avions renifleurs pour tenter de comprendre comment un major de Polytechnique, considéré comme le meil-leur « technocrate » de sa génération, avait pu se mon-trer plus crédule qu'un enfant de cinq ans devant un professeur Tournesol qui prétendait voir au travers des murs.

    Les douze erreurs types identifiées peuvent être dis-tribuées en deux catégories : d'abord, celles qui résultent d'une décision ponctuelle sur un aspect précis d'un produit ou d'un service. Ce sont le plus souvent des erreurs de marketing au sens large. On retrouvera ces « bugs » dans les six premiers chapitres. C'est la Mer-cedes classe A qui ne tient pas la route parce que son centre de gravité est placé trop haut, ou les croissants surgelés Danerolles au goût si déroutant que, bien que 80 % des ménages français aient tenté l'expérience (un record), 10 % seulement la renouvelleront (un autre record). C'est aussi l'absence de complexes de Renault qui veut réapprendre à conduire aux Américains parce qu'ils noient systématiquement les moteurs de leur Dau-phine lorsqu'elle refuse de démarrer en hiver.

    Deuxième catégorie, les grandes erreurs de manage-ment qui sont le résultat de dysfonctionnements globaux inhérents à la culture d'entreprise ou à la manière de fonctionner du manager : l'immobilisme, la mégaloma-nie, la défaillance des systèmes de contrôle, l'absence de vraie gestion des ressources humaines, etc. Ces erreurs -qui ne sont plus des « bugs » mais, parce qu'elles sont diffusantes, de véritables « virus » - sont recensées dans les six derniers chapitres. C'est la lente dérive du Club Med, qui offre encore au milieu des années 90 des cases sans électricité ni serrure pour 4 000 francs la semaine, en demandant aux GM d'apporter leur lampe de poche

  • et leurs serviettes de toilette. C'est aussi l'incapacité de Jean-Yves Haberer à former, motiver et surtout contrô-ler ses collaborateurs, qui conduira le Crédit Lyonnais à la catastrophe en moins de trois ans.

    Ce choix contient une part d'arbitraire, car aucun des petits (et grands) drames que nous relatons n'est impu-table à une bévue unique. Comme les accidents de train, les échecs trouvent souvent leur origine dans une conjonction d'anomalies et un enchaînement de cir-constances « improbable ». Même si l'on identifie géné-ralement une dominante, les erreurs commises par les managers ne sont jamais d'un type « pur » : elles sont, par nature, multidimensionnelles. L'endormissement et l'absence de remise en cause, traités au chapitre 7, peuvent conduire à rater une marche technologique ou marketing, erreur qui fait l'objet du chapitre 3, avec l'exemple d'IBM et du PC. De même, on retrouvera souvent une politique de communication défaillante - le sujet du chapitre 4 - dans les « techno-couacs », ces bourdes de technocrates qui croient pouvoir penser en managers, analysés au chapitre 10 où l'on évoque notamment l'inénarrable introduction du logiciel Socrate à la SNCF.

    Si l'absence de vision ne fait pas l'objet d'un chapitre isolé, c'est que cette erreur est transversale : on la retrouve dans (presque) toutes ces histoires peu glo-rieuses. Les chefs d'entreprise n'en ont d'ailleurs pas le monopole. Les médias ont rappelé avec un bel ensemble, lorsque Thomson Multimédia a été introduit en bourse et valorisé à 21 milliards de francs fin 1999, qu'Alain Juppé avait déclaré trois ans plus tôt que la société ne valait pas un franc. Mais qui se souvient que Jean Peyrelevade, le « sauveur » du Crédit Lyonnais, un des rares patrons auxquels la gauche et la droite font indistinctement appel, avait prophétisé en 1975 la fin de la suprématie économique américaine dans un essai baptisé La Mort du dollar 1

  • De même, l'excès de diversification - la difficulté de bien exercer plusieurs métiers à la fois - n'a pas fait l'objet d'un chapitre spécifique, mais il est évoqué à plu-sieurs reprises, notamment lorsque nous traitons des déboires des conglomérats et des échecs des fusions-acquisitions (chapitre 12) ou des excès commis au nom de la recherche de la taille critique (chapitre 8).

    Des groupes comme Nestlé, Renault ou Danone sont plus souvent cités que d'autres au fil des chapitres. Pour-tant, ils ne se trompent pas davantage, bien au contraire. Mais lorsqu'on lance beaucoup de produits de grande consommation, médiatisés de surcroît, on s'expose for-cément à un plus grand nombre d'échecs publics. Si l'erreur ne fait pas plus l'entreprise que l'hirondelle ne fait le printemps, on reconnaît une société performante à la manière dont elle la traite.

    Ce livre n'a pas d'ambitions théoriques au sens strict du terme. Néanmoins nous avons essayé, au-delà d'un certain nombre de considérations de bon sens, de relier les erreurs identifiées comme des « standards » avec les travaux des penseurs en gestion. Il ne s'agit pas néces-sairement des dernières thèses en vogue : ainsi, pour donner un exemple, la théorie des conventions, qui sus-cite depuis quelques années beaucoup de débats chez les chercheurs en économie et en gestion, n'est pas citée parce qu'elle ne s'appliquait de manière édifiante à aucun exemple de ce livre.

    On sous-estime trop souvent le poids de l'ignorance et de l'erreur dans l'Histoire. C'est parce qu'il cherchait les Indes que Christophe Colomb a découvert l'Amérique, et grâce à une erreur de manipulation que Alexander Fleming a identifié la pénicilline. Erreur n'est donc pas toujours synonyme d'échec. Inversement, l'échec ne constitue pas forcément une erreur. Antoine Riboud, le créateur de BSN, n'a pas réussi son OPA sur le verrier Saint-Gobain en 1969. Mais ce remake raté de David contre Goliath lui a servi de tremplin : il s'est fait un

  • nom plus vite qu'avec une campagne de publicité et, faute d'avoir atteint, par son rachat, la taille critique dans le verre, il l'a abandonné pour se consacrer à l'ali-mentaire. Il est passé du contenant au contenu. Cette reconversion exemplaire a donné naissance à Danone, le fleuron français de l'agroalimentaire.

    « Je crois beaucoup à la nécessité d'avoir de temps en temps de sérieux échecs ; ça fait rebondir et ça permet d'aller plus loin», a écrit Antoine Riboud dans ses Mémoires. Une manière de paraphraser Nietzsche et sa célèbre maxime : « Tout ce qui ne me tue pas me forti-fie. » Le chapelet de bourdes et d'impérities dont ce livre a fait son miel constituera sûrement un fortifiant vigoureux pour toutes les victimes de la « loi de Bich »...

    Nota : Pour ne pas rendre la lecture fastidieuse avec des notes multiples, nous avons renvoyé, chapitre par chapitre, en fin d'ouvrage le recensement des principales sources utilisées (autres que le recueil des témoignages des acteurs des cas évoqués) : historiens des affaires, auteurs d'ouvrages et d'articles dans des magazines économiques ou des revues de management, analyses et études théoriques, etc.

  • CouvertureTitreTable des matièresIntroduction