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LE TRAITEMENT DES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES DANS LE CADRE DU PROGRAMME NATIONAL DE RENOVATION URBAINE ANALYSE TRANSVERSALE Rapport final Mai 2011 Julien LEPLAIDEUR Anne SAUVAYRE Vincent De BAECQUE Alain MELLET

Le traitement des quartiers anciens dégradés dans le cadre du PNRU

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LE TRAITEMENT DES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES DANS LE CADRE DU PROGRAMME NATIONAL DE

RENOVATION URBAINE

ANALYSE TRANSVERSALE Rapport final

Mai 2011

Julien LEPLAIDEUR Anne SAUVAYRE  

Vincent De BAECQUE Alain MELLET 

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SOMMAIRE    

INTRODUCTION – UNE EVALUATION TRANSVERSALE DE L’INTERVENTION DU P.N.R.U. DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES ........................................... 5

CHAPITRE 1 – CADRAGE : LES SPECIFICITES DE LA MISE EN ŒUVRE DU P.N.R.U. DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES .......................................................... 7

I. Le cadre socio-urbain : des patrimoines dégradés par l’obsolence du bâti et des dynamiques immobilières et sociales dépréciatives.......................................................... 8

Du modèle habitat social des années 1950-1970, à l’hétérogénéité de quartiers construits entre le XIIème et le XXème siècle..................................................................................................................8 Des quartiers anciens souvent centraux ou contigus au centre-ville ..................................................9 Entre marché de l’immobilier déprécié à l’échelle du quartier et marché de l’habitat détendu à l’échelle de la ville ...............................................................................................................................9 Des marchés locaux de l’habitat animés par des dynamiques diverses...........................................11

II. Le cadre institutionnel : des quartiers anciens déjà objet de stratégies et d’interventions publiques ...................................................................................................11

Des projets urbains souvent initiés en amont du lancement du PNRU ............................................12 Un PRU associé à des outils multiples, notamment concernant l’habitat .........................................13

III. Le cadre opérationnel : une démarche d’articulation et de transversalité plus ou moins aboutie.......................................................................................................................15

Une majorité d’opérateurs mobilisés conjointement sur l’urbain et l’habitat .....................................15 Les équipes PRU : d’un rôle de chambre de traduction à un rôle d’impulsion .................................16

CHAPITRE 2 – LES STRATEGIES URBAINES A L’ŒUVRE DANS LES PROJETS URBAINS EN QUARTIERS ANCIENS INTEGRANT L’INTERVENTION DU PNRU ......................... 19

I. Evaluer le traitement des quartiers anciens par le PNRU à l’aune de dynamiques et interventions plus larges.....................................................................................................19

L’objet de l’évaluation : l’intervention de l’ANRU au regard de l’ensemble du projet urbain.............19 Requalifier les quartiers anciens dégradés : pour quelle(s) finalité(s) ? ...........................................20

II. Esquisse de typologie des stratégies d’intervention dans les quartiers anciens dégradés ............................................................................................................................... 21

Une ambition urbaine renouvelée pour le quartier............................................................................21 Une « normalisation » de l’état du quartier .......................................................................................22 Au-delà d’une approche « quartier ».................................................................................................23

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CHAPITRE 3 – AMENAGEMENTS, EQUIPEMENTS ET COMMERCES : LES INTERVENTIONS URBAINES REALISEES DANS LE CADRE DES P.R.U. .................... 26

I. L’aménagement des espaces publics (voiries, places et jardins) : des approches différenciées en fonction du potentiel urbain conféré au quartier..................................26

L’intervention sur les voiries : désenclaver et mettre en valeur… lorsque le quartier participe de la stratégie urbaine globale...................................................................................................................27 La dédensification comme outil d’amélioration du cadre de vie : entre usages de proximité et projet(s) phare(s) pour la ville ...........................................................................................................27

II. La production d’équipements et de locaux commerciaux : de la nécessité de dépasser la seule entrée bâti .............................................................................................. 28

De l’équipement de proximité au marketing urbain à travers des équipements à haute valeur ajoutée ..............................................................................................................................................28 L’intervention sur les commerces : un enjeu rarement anticipé........................................................29

CHAPITRE 4 – LA STRATEGIE HABITAT DANS LES QUARTIERS ANCIENS : ARTICULATION DES DISPOSITIFS, DIVERSIFICATION DE L’OFFRE DE LOGEMENT ET RELOGEMENT.................................................................................................... 32

I. Une intervention de l’A.N.R.U. couplée à divers dispositifs d’intervention sur l’habitat .................................................................................................................................32

Le couplage plus ou moins abouti du PRU à l’OPAH-RU.................................................................32 L’apport des Opérations de Restauration Immobilière......................................................................34 Les réticences des organismes d’HLM face au « recyclage bailleur » .............................................37 Les opérations de Résorption de l’Habitat Insalubre (RHI) irrémédiable..........................................39 L’articulation des PRU avec la lutte contre l’habitat indigne .............................................................39 Un couplage indispensable mais encore trop formel des dispositifs associés à l’ANRU..................40

II. L’offre de logements produite : amélioration de la qualité des logement mais des stratégies d’habitat perfectibles .........................................................................................41

Des logements qui font l’objet de réhabilitations importantes mais rarement de restructuration......42 Diversification globale à l’échelle des PRU, mais approches différenciées d’un quartier à l’autre ...43 Une diversité des offres de logements pour amorcer la relance des quartiers, en conservant des marges de gentrification dans les quartiers à fort potentiel ..............................................................45

III. Le relogement : entre spécificité des enjeux et des approches concernant les occupants du parc privé / dégradé.....................................................................................46

Une sollicitation du logement conventionné qui interroge sur la place accordée à terme à ces ménages (fin de conventionnement alors que quartier rattrapé par les marchés immobiliers) ........47 Des stratégies très distinctes de relogement d’un site à l’autre........................................................48 Une mobilisation relative des bailleurs sociaux face à des profils différents et moins prioritaires que leur « clientèle »................................................................................................................................50

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CONCLUSION – BILAN DE L’EVALUATION TRANSVERSALE DU TRAITEMENT PAR LE P.N.R.U. DES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES ET PISTES D’EVOLUTION.............. 52

I. Intérêts et limites de l’intervention du PNRU dans les quartiers anciens dégradés53

Des avancées méthodologiques reconnues, un effet accélérateur réel ...........................................53 Un « contre-effet programme » renforcé par l’importance des logiques privées dans le fonctionnement des quartiers............................................................................................................54 Des pratiques et des logiques d’intervention à approfondir et combiner ..........................................56 Une approche urbanistique volontariste au détriment d’une stratégie fine pour le territoire.............56

II. Enjeux et pistes d’évolution.........................................................................................58

Plus de maturité dans la définition des projets locaux ......................................................................59 Plus de flexibilité dans le déroulement du programme .....................................................................59 Plus de transversalité dans l’action publique ....................................................................................60

 

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INTRODUCTION – UNE EVALUATION TRANSVERSALE DE L’INTERVENTION DU P.N.R.U. DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES Initié par la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003, le Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU) s’inscrit comme une étape importante dans la construction des politiques publiques en matière de requalification des quartiers anciens. Alors qu’il visait prioritairement les quartiers plus récents d’exclusion sociale, à dominante HLM, le constat d’une inadéquation importante entre les enjeux et besoins de certains secteurs urbains anciens, à dominante d’habitat privé a conduit à l’extension progressive du PNRU vers ces quartiers déqualifiés. Depuis la fin de l’année 2009, un programme spécifique (le Programme National de Rénovation des Quartiers Anciens Dégradés – PNRQAD) leur a même été dédié. Les pouvoirs publics reconnaissent par-là même l’intensité et la particularité des enjeux de ces quartiers et la nécessité de développer, face à ces enjeux, de nouveaux modes d’intervention s’inspirant de la démarche projet des PRU. Dans la perspective de la mise en œuvre de ce nouveau programme, le CES de l’ANRU a jugé important de tirer partie des expériences en cours sur la vingtaine de quartiers anciens ayant inauguré la méthodologie de projet des PRU et a pour cela missionné le groupement FORS-Recherche sociale / Fédération des PACT afin de réaliser une évaluation transversale du traitement des quartiers anciens dégradés par le PNRU. Cette mission d’évaluation de la mise en œuvre et des premiers effets de la rénovation urbaine dans plusieurs quartiers anciens n’est pas comprise ici comme une évaluation rétrospective qui consisterait à voir dans quelle mesure les objectifs fixés au lancement sont à ce jour respectés. Il s’est agit davantage de comprendre les mécanismes à l’œuvre dans le traitement des quartiers anciens dégradés, d’apprécier l’adéquation de la méthodologie proposée par l’ANRU aux diverses spécificités de ces sites et de mettre en évidence les types de blocage, les éléments de réussite et les conditions nécessaires au développement de ces projets. Méthodologie Pour mener à bien cette évaluation transversale, six sites d’études ont été retenus : Clichy-la-Garenne, Mulhouse, Perpignan, Roubaix, Thiers et Toulon. Sur chacun de ces sites, deux jours de visites des quartiers et de rencontres avec les acteurs locaux ont été organisés. Ces visites ont permis de mener des entretiens, individuels ou collectifs, avec les maires et autres élus en charge du projet urbain, les chefs de projet PRU et leurs équipes, les organismes d’HLM, les aménageurs, mais aussi les opérateurs intervenant sur l’habitat privé. Au cours de la deuxième phase, des entretiens complémentaires ont été menés auprès d’investisseurs privés intervenant sur le périmètre, alors que des groupes de travail étaient organisés localement sur une partie des sites afin de faire discuter les acteurs sociaux et

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acteurs de proximité (responsables de centres sociaux, directions d’écoles, associations, etc.) sur les premiers impacts ressentis de ces projets en termes d’évolutions sociologiques et d’appréciation du projet par les habitants. Par ailleurs, deux groupes de travail ont également été organisés au niveau national afin de mettre en discussion les analyses issues de la première phase avec, d’une part, les chargés de mission territoriale de l’ANRU qui suivent les projets urbains de ces six sites et, d’autre part, les porteurs locaux de projet de six territoires. Ces discussions ont ainsi permis d’affiner les analyses, mais aussi de renforcer l’approche comparative entre sites, de manière à dégager des enseignements généraux concernant le traitement des quartiers anciens dégradés, conformément à la commande. Plan du rapport Le présent rapport se compose de quatre chapitres et d’une synthèse conclusive. • Le premier chapitre présente ce qui fonde la spécificité de l’intervention du PNRU dans

les quartiers anciens dégradés, notamment en comparaison de l’intervention plus « classique » menée dans les quartiers dominés par l’habitat social.

• Le deuxième chapitre remet en perspective la démarche d’évaluation de l’action du

PNRU au regard des stratégies urbaines développées localement et, donc, de l’ensemble des outils mobilisés pour intervenir dans ces quartiers, par-delà les seuls financements de l’ANRU.

• Les troisième et quatrième chapitres détaillent les actions menées à ce jour dans le

cadre de ces projets sous l’angle des interventions sur l’environnement urbain (chapitre 3) et des interventions sur l’habitat (chapitre 4).

• La conclusion vient synthétiser et mettre en perspective les analyses produites dans le

rapport afin de dégager un certain nombre de pistes d’évolution afin d’améliorer, tant du point de vue de la pertinence que de l’efficacité, l’action d’un programme tel que le PNRU dans des quartiers aussi spécifiques que les quartiers anciens dégradés.

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CHAPITRE 1 – CADRAGE ET PROBLEMATISATION : LES SPECIFICITES DE LA MISE EN ŒUVRE DU PNRU DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES Les PRU, dans leur version la plus courante, sont conduits dans des quartiers qui ont pour qualité partagée d’être constitués, très majoritairement, par un habitat relativement homogène. Cette homogénéité découle de deux caractéristiques principales : le poids du parc social – géré et le plus souvent conventionné par quelques organisme HLM – sur le parc total de logements, et un bâti construit entre les années 1950 et 1970, selon les principes architecturaux de l’urbanisme de dalle et des grands ensembles. Ces deux caractéristiques ont en partie fondé la création de l’Agence Nationale de Rénovation Urbaine (ANRU). Pour autant, la vocation du Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU) est d’intervenir dans les Zones Urbaines Sensibles1 (ZUS) – et les quartiers « dérogations art.6 » qui font également valoir une concentration des difficultés sociales : une condition qui a permis à une vingtaine de sites en France de bénéficier du PNRU pour des quartiers anciens dégradés. Bénéficiaires du PNRU, ces quartiers anciens proposent cependant des cadres particuliers à la mise en œuvre du Programme, du point de vue :

– du contexte socio-urbain : forme, bâti, marchés immobiliers, dynamiques sociales, place dans la ville… ;

– du contexte institutionnel : stratégies locales, interventions antérieures… ; Ces particularités vont ainsi conférer à l’intervention de l’ANRU un rôle à la fois plus ciblé et plus dilué que le positionnement plus souvent ensemblier des PRU dans les quartiers d’habitat social.

                                                        1 Parmi les seuls territoires classés en ZUS, on dénombrait, en 2004, 38 quartiers où le taux de logements antérieur à 1914 est supérieur à 20% (dont 12 avec un taux supérieur à 50%) totalisant 103.000 logements – sur les 213.000 de ces secteurs (dont 71% sont antérieurs à 1948). Si l’on retient cette fois-ci un ratio de 15% de logements d’avant 1914, il convient de rajouter 17 ZUS comptabilisant 52.000 logements dont plus de 9.000 logements d’avant 1914, et un bâti dont presque la moitié (46%) est antérieure à 1948. Ainsi, parmi les ZUS de France, entre 5 et 10% ne répondent pas à « l’idéal-type » du quartier des années 1950-1970 géré par un nombre restreint de bailleurs sociaux.

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I. LE CADRE SOCIO-URBAIN : DES PATRIMOINES DEGRADES PAR L’OBSOLENCE DU BATI ET DES DYNAMIQUES IMMOBILIERES ET SOCIALES DEPRECIATIVES

Les quartiers anciens dégradés présentent certaines caractéristiques urbaines, immobilières et sociales qui les distinguent des quartiers d’habitat social – soit parce qu’il s’agit de problématiques qui leur sont propres, soit parce que ces problématiques s’y retrouvent avec une intensité plus vive encore.

Du modèle habitat social des années 1950-1970, à l’hétérogénéité de quartiers construits entre le XIIème et le XXème siècle En effet, à l’homogénéité de l’habitat de la majorité des sites en rénovation urbaine, s’oppose une minorité de PRU très hétérogènes dans leur habitat comme dans leur forme urbaine. Sur les 6 terrains d’étude retenus pour cette évaluation, on notera que les dates de construction des logements traités dans le cadre du PRU et des dispositifs associés couvre une période beaucoup plus large, allant du XIIème siècle dans les quartiers de Perpignan, à la fin XIXème – début XXème pour des communes comme Roubaix ou Mulhouse, en passant par le bâti médiéval du centre historique de Thiers, au cœur du Puy-de-Dôme, et de Toulon. De la même manière, l’extrême densité des quartiers méditerranéens (Toulon et Perpignan) se distingue des quartiers dominés par l’habitat individuel ouvrier à Roubaix, eux-mêmes

A Perpignan, des parcelles étroites et continues pour un bâti de haute densité

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différents de l’habitat ouvrier mais collectif de Mulhouse ou de Clichy-la-Garenne… Bref, d’un point de vue strictement bâti, les contextes d’intervention dans les quartiers anciens s’affirment comme très divers. Des quartiers anciens souvent centraux ou contigus au centre-ville A la différence de nombreux quartiers d’habitat social, il convient également de noter que les quartiers anciens dégradés des six sites étudiés sont, pour la plupart, des quartiers centraux dans la ville. Certains constituent le cœur historique de la ville (quartiers de Thiers et Toulon) sans pour autant jouer aujourd’hui ce rôle de centralité qui en est souvent attendu, quand d’autres (quartiers de Mulhouse et Perpignan) s’apparentent davantage à d’anciens faubourgs de centre-ville. Entre marché de l’immobilier déprécié à l’échelle du quartier et marché de l’habitat détendu à l’échelle de la ville Les quartiers anciens qui font l’objet d’une intervention de l’ANRU sont qualifiés de dégradés, du point de vue de l’immobilier, pour trois raisons principales :

– L’importance d’un parc vétuste, avec des logements allant de la non-décence à l’insalubrité ou menaçant péril ;

– Le poids de la vacance, qui peut concerner jusqu’à 40 à 60% du parc total de ces quartiers.

– L’existence du « second » marché du logement, c’est-à-dire d’un marché du logement destiné aux plus précaires et qui peut se caractériser par des rapports locatifs en dehors du droit (baux oraux dans le cadre de marchés « communautaires » comme à Mulhouse, propriétaires indélicats voire marchands de sommeil…), répondant parfois à des besoins spécifiques (cf. cas des vieux migrants, à Toulon et Clichy, par exemple) ;

Selon les sites, l’état du bâti est plus ou moins complexe à traiter. On notera, par exemple, le parcellaire particulièrement dense et problématique de l’habitat méditerranéen, avec des immeubles étroits (une fenêtre par étage bien souvent) et « collés » les uns aux autres, sans aucune aération en cœur d’îlot. A Mulhouse, les difficultés sont moins liées à la densité du bâti qu’à la configuration intérieure des immeubles, avec la présence des éléments de confort sur le palier qui oblige à une restructuration interne importante (de T3 à T2 par l’intégration des WC et salle d’eau dans les logements). Selon les sites encore, la vacance est plus ou moins importante. Généralement, on notera que, dans les quartiers les plus anciens (Thiers, Toulon, Perpignan), la vacance est deux à trois fois plus élevée que dans les quartiers historiquement ouvriers de Clichy-la-Garenne, Roubaix et Mulhouse, qui font encore l’objet d’un usage important. On note également la

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faible importance du parc social de droit dans ces secteurs, ne permettant pas de constituer une alternative au parc social de fait largement représenté. Par ailleurs, s’ajoute à l’obsolescence une dégradation qui s’auto-accentue : plus le bien apparaît comme déclassé, moins il justifie des investissements de remise en état, plus son image négative décourage l’implication de propriétaires en place ou celle d’acquéreurs susceptibles d’améliorer le bâti comme le quartier. Ainsi, les valeurs immobilières très faibles proposées par ces bâtiments attirent des accédants pauvres qui, pour des raisons diverses, n’ont pu se loger dans le parc social, ainsi que des investisseurs spéculatifs visant un rendement locatif important (souvent supérieur à 15% par an du fait de la tension sur le marché locatif) qui annule toute velléité de travaux (ceux-ci ne feraient que dégrader le rendement). Dans ces quartiers, on retrouve donc à la fois un bâti particulièrement vétuste et inadapté aux modes d’habiter contemporains est détenu par des propriétaires inertes : soit un terreau propice au développement d’un parc refuge pour les ménages pauvres et fragiles. En effet, ces quartiers concentrent d’importantes vulnérabilités économiques et/ou sociales, qu’il s’agisse de ménages depuis longtemps implantés sur le territoire (familles ouvrières, vieux migrants), en situation de rupture (familiale, professionnelle, de logement…) ou nouvellement arrivées sur le territoire et qui ne peuvent, pour des raisons administratives ou de pression sur le parc social, prétendre à un logement aidé. De manière générale, il convient également de noter la part importante des ménages d’origine étrangère dans ces quartiers qui y trouvent des solutions à leurs problématiques de logement particulières : loyer minimal ou partagé pour les vieux migrants, propriétaire bailleur appartenant à la même communauté… Mulhouse : une concentration des ménages fragiles dans la ville centre et les quartiers du PRU Mulhouse est une ville d’environ 110 000 habitants au sein d’une communauté d’agglomération qui en compte désormais quelques 260 000. Après un important essor à la fin du XIXe – début XXe lié au développement de grandes industries qui a permis à la ville de connaître une attractivité soutenues pendant de longues décennies, Mulhouse fait face, depuis les années 1980 et, de manière encore plus sensible, le milieu des années 1990, à une dégradation croissante de son contexte économique et social. Depuis le début de la décennie 2000, la commune est ainsi confrontée à une augmentation sensible du chômage, faute d’un « recyclage économique » suffisant pour permettre de proposer des emplois à une main d’œuvre locale traditionnellement ouvrière2 : ils représentent ainsi 42% des salariés à Mulhouse contre 36% en Alsace et 31% en France alors que, dans les 3 quartiers anciens concernés par le PRU, ces taux s’élèvent respectivement à 47% (Vauban-Neppert), 56% (Briand) et 58% (Franklin). Dans ce contexte, l’agglomération paraît fonctionner comme une « centrifugeuse ». Mulhouse apparaît ainsi comme une commune à la population pauvre et fragile (environ 13 000€ par U.C. ; plus

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de 25% de taux de chômage dans les 3 quartiers anciens PRU, contre moins de 12% à l’échelle de l’unité urbaine mulhousienne3), située au cœur d’une agglomération et d’un département riches. Les ménages en difficulté se concentrent ainsi dans les quartiers anciens (parfois plus encore que dans les quartiers d’habitat social) alors que les classes les plus aisées s’installent en périphérie, conformément aux tendances démographiques qui ont vu la population de Mulhouse croître de seulement 1,1% entre 1999 et 2007, contre 3,6% en 1ère couronne et 6,2% en 2ème couronne.

Des marchés locaux de l’habitat animés par des dynamiques diverses Bâti, vacance et nature de la demande déterminent donc en partie la situation de l’habitat de ces quartiers. Mais un autre facteur, déterminant, doit également être pris en compte tant il peut avoir un impact fort sur la stratégie immobilière développée localement : le marché de l’habitat à l’échelle de la ville et de l’agglomération. En effet, force est de constater d’importantes différences dans les contextes immobiliers locaux avec :

– D’un côté, les marchés locaux dynamiques. Dans cette catégorie, se retrouvent, à des degrés divers, les sites de Perpignan (plus fort taux de croissance démographique), Toulon (Préfecture départementale d’un des 3 départementaux côtiers de la région PACA – 2ème région la plus tendue après l’Ile-de-France) et Clichy-la-Garenne (commune de la première couronne parisienne desservie par un métro) ;

– De l’autre côté, les marchés locaux dépréciés (détendus ou avec une attractivité par défaut), parmi lesquels on compte : Thiers (sous-préfecture d’un département, le Puy-de-Dôme, à dominante rurale), Mulhouse (ville-centre peu attractive face aux communes du reste de l’agglomération4) et Roubaix (où la demande s’avère être, quasi exclusivement, de nature sociale, du fait de la concurrence de communes voisines qui tendent à capter les ménages des classes moyennes et supérieures).

II. LE CADRE INSTITUTIONNEL : DES QUARTIERS ANCIENS DEJA OBJET DE

STRATEGIES ET D’INTERVENTIONS PUBLIQUES Par-delà le cadre socio-urbain particulier que présente les quartiers anciens dégradés, une spécificité importante de l’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens dégradés découle du fait que cette intervention ne peut être assimilée au projet urbain. Dans ces quartiers, en effet, le projet urbain – qui, souvent, a pu préexister à la création de l’Agence – s’appuie sur une série de dispositifs / interventions, financées par la Ville, par l’ANRU mais aussi par l’Agence Nationale d’Amélioration de l’Habitat (ANAH) du fait de l’importance de l’habitat privé. Autant d’actions à articuler autour d’un projet d’ensemble.

                                                        3 Chiffres 2008 selon définition INSEE. 4 Conformément aux tendances démographiques qui ont vu la population de Mulhouse croître de seulement 1,1% entre 1999 et 2007, contre 3,6% en 1ère couronne et 6,2% en 2ème couronne.

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Des projets urbains souvent initiés en amont du lancement du PNRU Dans l’esprit de plusieurs décideurs locaux, beaucoup de ces quartiers semblent avoir changé de statut depuis la fin des années 1990, passant du quartier de relégation d’où sont parties les classes moyennes et/ou se concentrent ménages en situation d’exclusion (souvent les plus fragiles face au droit) à celui doté d’un potentiel urbanistique fort pouvant se révéler comme un atout pour le reste de la ville. Du fait de leur localisation et/ou de leur patrimoine historique, plusieurs de ces quartiers concernés par le PNRU (Thiers, Franklin ou Vauban-Neppert à Mulhouse, St-Matthieu et la Real à Perpignan, Toulon…) ne sont pas seulement abordés sous l’angle des difficultés qu’ils posent, mais également sous celui de leurs atouts et potentialités. Ces atouts, principalement de type « urbain » (proximité avec les aménités de la ville – équipements, services, commerces, voire transports – ou potentiel touristique / « de charme », etc.), tendent même parfois à conférer au quartier un rôle à l’échelle de la ville entière – voire, de manière moins perceptible, à l’échelle de l’agglomération. Ce « renversement d’image » s’est traduit, sous des formes plus ou moins abouties, par l’élaboration de stratégies urbaines de reconquête de certains quartiers qui a pu préexister au lancement du PNRU : – A Perpignan, le maire en poste jusqu’en 2008 (aujourd’hui président de l’agglomération)

avait, dès le milieu des années 1990, décrit son projet pour les quartiers anciens ; un projet qui sert encore de feuille de route à l’actuelle municipalité (dont il est resté le 1er adjoint). Localement, le PRU est donc perçu comme quelque chose « qui est juste venu en relais d’un projet urbain défini et porté jusque là par la Ville ».

– A Mulhouse, le début des années 2000 est l’occasion pour la Ville de lancer un Grand Projet de Ville (GPV) couvrant un périmètre large (4 quartiers, dont 3 repris dans le PRU) mais concentrant les interventions sur celui de Franklin, en parallèle d’un projet de développement des transports urbains (2 lignes de tramway créées et une ligne de « tram-train » reliant Mulhouse aux communes environnantes). Un marché de définition sur un second quartier, Vauban-Neppert, sera porté par la Ville en 2005-2006 et servira de trame à la préparation de la convention ANRU sur ce quartier. L’enjeu et le potentiel de ces quartiers étaient reconnus dès cette époque-là, « mais l’ANRU, par les moyens apportés, a incité à définir une vraie stratégie » ;

– Thiers, où une nouvelle équipe gagne les élections municipales de 2001 en s’appuyant notamment sur l’ambition d’une reconquête du centre ancien. Si cette ambition ne prend pas la forme d’un réel projet urbain, plusieurs principes seront par la suite formulés et repris dans le cadre de la convention ANRU. « on a croisé les besoins identifiés à travers la large concertation sur les quartiers de la Ville, notamment le centre ancien, et défini dans un projet 2002-2012, avec l’aubaine liée à la création de l’ANRU ».

A travers ces exemples, il est perceptible que, pour l’essentiel, les communes étaient engagées – et parfois avancées – dans une stratégie d’intervention urbaine sur leur(s) quartier(s) ancien(s) avant même le lancement du PNRU. En cela, le PNRU n’a pas initié

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l’intervention sur ces territoires spécifiques mais a plus généralement été intégré à une stratégie locale. Un PRU associé à des outils multiples, notamment concernant l’habitat La mise en œuvre de ces stratégies locales s’est avérée toutefois problématique pendant de nombreuses années, faute d’outils et de financements adéquats pour lever faire face à la complexité d’une intervention en quartiers anciens. On rappellera ainsi que : – Les mécanismes classiques d’amélioration de l’habitat (OPAH), incitant les

propriétaires à réhabiliter par le biais de subventions et d’ingénieries d’accompagnement diverses, se sont révélés inopérants dans certains quartiers, les acteurs privés étant impuissants ou non motivés pour agir à l’échelle où cela s’avère nécessaire. La difficulté principale dans cette démarche était le traitement des bâtiments les plus dégradés qui nécessitent l’intervention d’un opérateur mandaté par la collectivité maître d’ouvrage, les acteurs privés ne souhaitant pas intervenir du fait du déficit structurel de telles opérations.

– La démarche d’OPAH-RU s’inscrivait, elle, dans une logique d’approche plus large puisqu’elle permet de financer une étude pré-opérationnelle beaucoup plus complète (cf. la circulaire 2002-68 du 8 novembre 2002 sur les OPAH) et donc de prendre davantage en compte la dimension urbaine globale d’intervention sur le quartier concerné, ainsi que la conduite d’opération qui en découle. Pour autant, les subventions ne concernent, dans la mise en œuvre, que les interventions sur l’habitat en terme de travaux d’amélioration ou de restructuration.

La démarche de rénovation urbaine portée par l’ANRU est elle aussi fondée sur une logique globale d’intervention sur un quartier. A la différence de l’OPAH-RU, elle permet d’importants financements pour traiter aussi bien de la revitalisation du commerce et de l’activité économique que des équipements ou des infrastructures ainsi que pour requalifier de l’habitat (par réhabilitation ou démolition-reconstruction) et produire du logement social. Au regard des interventions déjà proposées par les OPAH, le PNRU apparaît donc comme un complément intéressant aux interventions qui pouvaient être menées jusqu’ici. En effet, pour beaucoup, il existait (et existe encore) le besoin d’une intervention publique forte pour enclencher une dynamique de requalification que l’action privée seule ne pouvait remettre en route. En cela, la participation de l’ANRU est apparue comme un moyen pour réaliser les interventions « de remise à niveau » devant occasionner cette dynamique de requalification ; mais cette participation ne saurait signifier une maîtrise de l’ensemble du projet d’aménagement. A l’inverse du modèle développé dans les quartiers dominés par l’habitat social, l’intervention de l’ANRU ne correspond pas au projet global du quartier, mais est une intervention complémentaire du droit commun. Ainsi, l’ANRU n’a vocation à intervenir que là où les outils existants s’avèrent insuffisants (notamment tout le dispositif incitatif financé par l’ANAH), en particulier pour les interventions sur le bâti le plus

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complexe (restructuration immobilière ou même foncière, curetage) et le traitement de l’environnement urbain. Le PRU en quartier ancien consiste donc en une action complémentaire au droit commun en finançant les « points les plus durs », de manière à permettre aux divers investisseurs de trouver un intérêt économique à intervenir à nouveau dans le quartier. Ainsi, l’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens dégradés repose sur des principes spécifiques : – Focaliser l’intervention sur les îlots et les actions où elle s’avère indispensable ;

– N’intervenir que là où les dispositifs de droit commun sont insuffisamment incitatifs (du fait de l’ampleur et de la complexité des interventions) pour que s’impliquent les partenaires privés ;

– Ne pas subventionner ce qui est déjà finançable par l’ANAH : d’une manière générale, seuls peuvent être financés les opérateurs mandatés par la puissance publique (SEM, opérateurs divers…).

Lorsqu’on traduit ces principes sous forme d’interventions, on retient que l’ANRU vient financer : - La réalisation de logements sociaux en acquisition-amélioration en quartier ancien,

dans le but de recréer une offre locative sociale compensant les démolitions d’habitat social. L’ANRU subventionnerait les surcoûts dus à la complexité du foncier et à l’état du bâti garantissant ainsi l’équilibre de telles opérations.

- Les interventions de curetage d’îlot et de remembrement foncier permettant de rendre utilisable à nouveau des tissus urbains trop denses et trop encombrés. L’ANRU subventionnerait, en complément des participations des autres partenaires locaux, ces interventions menées par des opérateurs publics.

- les travaux de restructuration de commerces pour les adapter aux besoins actuels de surface et d’organisation ainsi que pour rendre indépendants les logements actuellement liés aux baux commerciaux ;

- les travaux d’aménagement urbain liés à la restructuration des îlots (amélioration de la desserte et de l’accessibilité, aération du tissu, amélioration des équipements de quartier liés aux usages nouveaux attendus, facilitation du repérage et de la lisibilité notamment pour les activités économiques…).

In fine, la mise en œuvre du PNRU dans ces quartiers participe à un projet d’ensemble plus qu’elle ne l’organise. La vocation ensemblière associée à l’ANRU, selon le principe du guichet unique, ne s’exprime pas dans le cadre de ces projets en quartiers anciens – si ce n’est de manière formelle, au travers des conventions P.R.U. qui listent l’ensemble des actions développées sur le(s) périmètre(s) de projet. Autrement dit, la réussite du projet urbain de ces quartiers dépend de la mobilisation (et de l’articulation) de nombreux outils, en particulier concernant l’intervention immobilière : suivi-animation OPAH-RU, Opération de

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Restauration Immobilière (ORI), Résorption de l’Habitat Insalubre irrémédiable (RHI), procédures de lutte contre l’habitat indigne… Ainsi, sur les 6 projets étudiés lors de cette évaluation, on constate une utilisation quasi-systématique de tous ces outils d’intervention sur l’habitat. Le recours à des périmètres de protection du patrimoine – outil de conservation mais aussi vecteur de défiscalisation pour les investisseurs privés – concerne quant à lui tous les sites à l’exception de Clichy-la-Garenne (2 en Plans de Sauvegarde et de Mise en Valeur – PSMV – et 3 en Zone de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager). On notera toutefois que ces divers outils ne sont pas toujours mobilisés sur des périmètres identiques à ceux du PRU, les périmètres de protection pouvant s’étendre au-delà du territoire de projet, quand les ORI par exemple sont des dispositifs désormais ciblés à l’îlot. III. LE CADRE OPERATIONNEL : UNE DEMARCHE D’ARTICULATION ET DE

TRANSVERSALITE PLUS OU MOINS ABOUTIE L’intérêt porté par les villes à ces quartiers anciens – du fait de leur localisation, du patrimoine qu’ils représentent ou des difficultés qu’ils concentrent – ainsi que la nécessité de combiner une large palette d’outils pour espérer avoir un impact réel vont influer sur la manière de définir le cadre opérationnel de ces projets, que ce soit en termes de pilotage ou de mise en œuvre des opérations. Une majorité d’opérateurs mobilisés conjointement sur l’urbain et l’habitat Afin de mener à bien les conventions signées avec l’ANRU, les pouvoirs publics locaux ont recours, dans la majorité des cas, à l’intervention d’opérateurs extérieurs pour mener tout ou partie des interventions. Ces opérateurs (aménageurs ou bureaux d’études spécialisés) vont avoir des missions plus ou moins larges en fonction des territoires :

– des interventions ciblées qui concernent essentiellement la production de logements. Sont principalement concernés les bailleurs sociaux et des structures prenant en charge le relogement des ménages pour libérer les immeubles à traiter., mais également, à Perpignan, la SEM qui n’a en charge que le suivi du PRI « Révolution Française » ou le service habitat qui gère les RHI.

– les opérateurs peuvent se voir confiés plusieurs missions (le suivi d’OPAH-RU et une MOUS habitat indigne, par exemple, confiés à Urbanis) mais non l’ensemble des interventions prévues dans le projet urbain. Dans certains cas, il peut s’agir d’un même opérateur intervenant dans le cadre de deux directions / services distincts (comme cela était le cas à Roubaix avant que ne soit créée la SPLA) ;

– la totalité du PRU, c’est-à-dire à la fois le volet habitat (OPAH-RU, ORI, relogements) et le volet urbain (acquisitions, création d’espaces publics, voiries, équipements…). Cela est notamment le cas à Mulhouse où la SEM a monté un service dédié au

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renouvellement urbain, regroupant ainsi sous une même direction l’ensemble des composantes du projet urbain piloté par la Ville, dans le cadre d’une convention d’aménagement prévue jusqu’en 2022, soit bien au-delà de la fin prévue du PRU. Toulon et Clichy la Garenne fonctionnent également de façon identique.

Les équipes PRU : d’un rôle de chambre de traduction à un rôle d’impulsion Le pilotage des projets urbains dans les quartiers anciens rend compte de la diversité des organisations permises, par-delà le principe approprié de manière formelle ou effective d’une équipe-projet PRU. En effet, lorsqu’on détaille les organisations locales, plusieurs schémas se dégagent : – L’équipe-projet traductrice (cf. Mission PNRU de Perpignan). Son rôle apparaît moins

dans l’animation du projet urbain d’ensemble (PRU + dispositifs associés) que dans la reformulation des opérations menées par les différents services (voiries, équipements…) aux formats définis par l’ANRU. Sa principale mission est de « traduire » les dépenses engagées dans le cadre du projet urbain dans le langage budgétaire de l’ANRU, de manière à pouvoir bénéficier dans les délais des financements attendus. L’équipe est donc plus dans une posture de réception que d’animation, la stratégie d’ensemble de l’intervention dans les quartiers anciens étant portée par la Ville, au niveau du politique et de la direction générale. Les interventions habitat et les interventions urbaines sont ainsi traitées séparément, chaque opérateur rendant compte exclusivement à la direction générale et élus. Il y a ainsi de nombreux intervenants « techniques » (services municipaux, SEM, bureaux d’études, bailleurs sociaux, association…) qui agissent de façon plus ou moins indépendante sur la base des objectifs qui leur sont assignés. Le pilotage est un pilotage surtout politique.

– L’équipe-projet accompagnatrice. A Roubaix, le fonctionnement du GIP

Renouvellement Urbain de LMCU se rapporte à ce positionnement. Il joue un rôle essentiel dans le bon déroulement du projet, en assurant un suivi précis de l’avancement des opérations et en fournissant aux équipes de terrain, intégrées aux services de la Ville, les éléments nécessaires à la bonne conduite des différents projets dont ils ont la charge. Au niveau municipal, son positionnement est vécu comme celui d’une AMO, quand bien même, théoriquement, il s’agit du pilote du projet. Dans les faits, la fonction du pilotage stratégique et opérationnel est portée par la Ville, notamment le service urbanisme qui apparaît comme le principal animateur du PRU, avec les limites en termes de transversalité que cela signifie (le point d’étape réalisé en 2010 note d’ailleurs la nécessité de développer le « volet humain » du PRU, l’approche urbaine étant jusqu’ici très prédominante).

– L’équipe-projet animatrice, qui concerne les sites, comme Mulhouse, Clichy-la-

Garenne et Toulon, où est confiée à l’équipe projet le rôle global d’animation et de coordination de l’ensemble des acteurs. A Mulhouse, l’équipe-projet a non seulement en charge l’OPCU globale des multiples interventions prévues dans le PRU, mais joue surtout un rôle d’animation, à l’échelle des différents quartiers et de la Ville, afin

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d’assurer le bon déroulement des opérations, la coordination des services et de l’opérateur et faciliter la prise de décision du politique. La périodicité (hebdomadaire, mensuelle ou trimestrielle selon les réunions) des rencontres entre les multiples acteurs impliqués, encore une fois aux deux échelles quartier / ville, est le gage d’une réactivité forte des parties prenantes et donc d’une démarche projet effective. (cf. également encadré ci-dessous). La maîtrise d’ouvrage est organisée autour d’un pilote identifié et l’opérationnel concentré sur une seule et même structure ce qui se traduit par une forte capacité à décider et à agir finement et en cohérence.

– L’équipe-projet opérateur qui est la situation de Thiers dans laquelle l’équipe qui pilote

est également celle qui joue le rôle d’opérateurs pour l’ensemble des dispositifs mis en oeuvre. Ce que l’on peut penser gagner en cohérence induit également des limites fortes dans les capacités d’animation et d’efficacité. On y perd, notamment, un nécessaire regard global sur l’évaluation de l’action qui ne peut venir alors que des partenaires extérieurs.

A Mulhouse, un pilotage opérationnel animé par l’équipe PRU qui mobilise l’ensemble de la chaîne d’intervention (acteurs de terrain, différentes directions, Maire) A Mulhouse, dans la continuité de ce qui avait été préfiguré dans le cadre du GPV, la signature du PRU a permis de renforcer la gestion du projet, en formalisant certaines procédures de travail ou en créant une structure ad hoc dédiée au renouvellement urbain grâce au financement de l’équipe PRU par l’ANRU. On notera ainsi que, chaque semaine, des réunions sont organisées entre :

1. l’équipe-projet PRU (tous les quartiers concernés + réunion mensuelle pour chacun des trois quartiers anciens) ;

2. puis, les directions de service impliquées dans le projet (direction de projet et directions Ville : DGA, habitat, urbanisme, action territoriale) ;

3. et, enfin, avec le maire qui a souhaité conserver la délégation au renouvellement urbain – dont il était responsable lors de la précédente municipalité – au moment de la prise de ses nouvelles responsabilités ;

4. à cela s’ajoute un certain nombre d’instances, temps de rencontres, notamment les revues de projet trimestrielles ; celles-ci permettent en effet d’acter, en présence de la Ville et des opérateurs, l’avancement des réalisations, éléments de blocage et solutions envisagées opération par opération.

In fine, à travers l’ensemble de ces outils et le portage politique fort qui y est associé, la conduite de projet se fait de manière transversale et permet d’impulser, coordonner et suivre les interventions de chacun des acteurs impliqués. Pour un intervenant Ville qui évoque l’approche concernant les voiries : « l’ANRU a notamment permis de définir des priorités d’intervention, de manière à respecter le calendrier de 5 ans. Aujourd’hui, le fonctionnement de l’ANRU a permis de mieux travailler en temps contraint tout en créant de la transversalité entre services. » Ce travail de pilotage et coordination générale du projet est facilité par la mobilisation d’un opérateur unique, la SERM, dont la convention d’aménagement sur les quartiers anciens court pour la période 2007…2022, et qui a également en charge la mise en œuvre et le suivi des OPAH, ORI et

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relogements. Au sein de cette société, il existe un service spécifique dédié au renouvellement urbain, indépendant du service aménagement, composé d’une équipe qui intervient sur les différents dispositifs associés dans le cadre du projet urbain. Ainsi, outre la participation à certaines instances évoquées ci-dessous, l’équipe de la SERM est directement impliquée dans de nombreuses autres instances (commissions foncière, ORI, OPAH, commission locale de l’amélioration de l’habitat…) et est à l’origine de la création de l’une d’entre elle, en l’occurrence le comité de traitement de l’habitat indigne.

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CHAPITRE 2 – LES STRATEGIES URBAINES A L’ŒUVRE DANS LES PROJETS URBAINS EN QUARTIERS ANCIENS INTEGRANT L’INTERVENTION DU PNRU I. EVALUER LE TRAITEMENT DES QUARTIERS ANCIENS PAR LE PNRU A L’AUNE

DE DYNAMIQUES ET INTERVENTIONS PLUS LARGES La présentation du contexte – urbain et institutionnel – particulier que constituent les quartiers anciens dégradés permet de mieux circonscrire l’objet de l’intervention du PNRU dans ces territoires. En effet, il apparaît que cette intervention du PNRU :

– d’une part, est menée en parallèle d’autres actions essentielles qui fondent elles aussi le projet ;

– d’autre part, se confronte à des enjeux nouveaux ou qui s’expriment avec une acuité différente de celles notées dans les quartiers d’habitat social ;

Par conséquent, l’évaluation du traitement des quartiers anciens dégradés par le PNRU doit elle-même s’adapter à ce contexte spécifique. Ainsi, dans le cadre du présent travail, un certain nombre de choix dans le positionnement de l’évaluation et dans les problématiques retenues ont été effectués. L’objet de l’évaluation : l’intervention de l’ANRU au regard de l’ensemble du projet urbain La complexité, voire la subtilité de l’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens invite à ne pas considérer strictement cette intervention mais à s’intéresser plus largement aux projets urbains, au travers des diverses interventions qui les composent – notamment en termes d’habitat. L’ANRU perdant de sa fonction ensemblière dans ces quartiers, à la faveur d’interventions plus diffuses dans le quartier, concentrée sur certains points de blocage structurels, ce n’est pas seulement la stricte action de l’ANRU qui mérite d’être analysée au cours de cette évaluation mais bien le rôle dévolu / joué par celle-ci dans une stratégie d’aménagement ) portée par la collectivité (la ville ou l’agglomération ; une stratégie dont il convient d’interroger à la fois les fondements, les réalisations et les finalités. Ainsi, concernant l’objet de l’évaluation, il s’est agi de s’interroger sur :

– Le sens et la pertinence des projets locaux au regard des besoins sociaux, potentiels urbains ainsi que de la capacité d’action de la puissance publique et de mobilisation des acteurs privés ;

– La cohérence et l’articulation des interventions menées par les acteurs publics (et privés) au regard des objectifs visés localement dans le projet mais aussi du PNRU ;

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– L’impact de l’action du PNRU dans la conception, l’organisation et la mise en œuvre du projet urbain.

Requalifier les quartiers anciens dégradés : pour quelle(s) finalité(s) ? Les quartiers anciens dégradés sont principalement animés par des dynamiques privées, notamment en ce qui concerne leur fonctionnement immobilier. Cette prédominance des logiques privées vient interpeler l’intervention de la puissance publique, que ce soit en termes de finalités poursuivies, d’impacts générés ou d’organisation. La concentration de populations particulièrement fragiles – qui trouvent dans ces quartiers une offre de logements par défaut, faute d’offre adaptée à leurs capacités / besoins – est considéré comme un facteur de dépréciation. Requalifier le quartier peut dès lors signifier plusieurs choses : lutter contre le phénomène de concentration en faisant venir de nouvelles populations socialement plus intégrées (« gentrification » recherchée), maintenir les habitants du quartier en améliorant leurs conditions d’existence ou combiner les deux approches : arrivée mesurée de nouveaux habitants et maintien partiel de la population existante. La forte présence d’acteurs privés5 dans cette démarche fait d’ailleurs craindre que les investissements et aides consenties par la puissance publique ne créent un effet d’aubaine pour les investisseurs privés et n’engendre une forme d’enrichissement sans cause du fait de la valorisation vraisemblable (mais encore en devenir) du quartier. Plus fondamentalement, le risque est à terme que les ménages les plus défavorisés se trouvent évincés du quartier du moment que celui-ci retrouve de son attractivité grâce à une qualité générale améliorée ; bref, que la diversification espérée des profils sociaux des habitants ne se traduise à termes, par le jeu des effets d’un marché immobilier redynamisé, par une ségrégation « inversée » comparativement à l’état initial du quartier. Dans les projets sur les quartiers anciens dégradés, se retrouve donc une ambivalence qui a accompagné l’ANRU depuis son lancement : aider les populations en place (intervention à but social) et/ou redonner de la valeur au quartier (intervention à but urbain et immobilier). Si elle n’est pas nouvelle, force est de reconnaître que, dans un contexte marqué par l’importance des marchés privés, cette ambivalence originelle de l’ANRU se manifeste ici avec une acuité des plus vives. Ainsi, comment cette tension entre la réponse aux besoins des habitants actuels et le développement d’une offre urbaine et immobilière attractive pour une population future est-elle appréhendée dans les 6 PRU en quartiers anciens étudiés ?

                                                        5 Plusieurs centaines (voire milliers) contre quelques organismes HLM dans les quartiers de grands ensembles. 

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II. ESQUISSE DE TYPOLOGIE DES STRATEGIES D’INTERVENTION DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES

  L’esquisse de typologie des stratégies urbaines présentée ici rend compte synthétiquement des stratégies d’intervention retenues sur chacun des sites / quartiers. On constatera que cette typologie fait très directement écho à la question posée ci-dessus concernant la tension potentielle entre une approche qui vise à relancer l’attractivité d’un territoire et celle qui vise à répondre aux besoins des habitants Une ambition urbaine renouvelée pour le quartier Les projets « cœur de ville » sont développés sur des quartiers auxquels est attachée une ambition de les repositionner comme des secteurs stratégiques dans le fonctionnement de la ville dans son ensemble, notamment afin de leur conférer un rôle de centralité et de référence commune pour l’ensemble des habitants. L’objectif poursuivi est de passer d’un processus de dépréciation à un processus de mise en valeur devant participer à terme à l’identité positive de la ville entière. Ces projets s’inscrivent ainsi donc une logique de reconquête, afin d’impulser une dynamique de revitalisation forte et de relancer l’attractivité nécessaire pour leur faire jouer ce rôle urbain essentiel. Toute une partie de l’intervention publique vise donc à susciter (travail sur l’environnement urbain) et à soutenir les initiatives privées, notamment sous forme d’incitations (aides de l’ANAH, défiscalisation Malraux). Pour cela, les projets accordent une place importante à la qualité des interventions urbaines et immobilières, s’appuyant notamment sur la spécificité du patrimoine bâti et de la trame urbaine de ces quartiers, qui les distingue généralement du reste de la ville. Mise en valeur du patrimoine, aménagements ou équipements exemplaires à vocation communale, intercommunale voire touristique, redynamisation des activités et commerces sont ainsi les principaux piliers de l’intervention menée dans ces quartiers. Dans ces projets, l’approche a des accents volontaristes : le projet est construit sur la base de l’état projeté du quartier, en termes de rôle urbain, plus qu’à partir d’un diagnostic fin des besoins des habitants actuels. Il s’agit ainsi de changer les représentations liées au quartier mais aussi, plus fondamentalement sa vocation. Cette réorientation de la fonction du quartier se fait selon deux axes privilégiés :

– Le quartier a vocation à devenir le centre-ville, comme à Thiers et à Toulon. Pour ces sites, l’enjeu des commerces est particulièrement saillant, les commerces s’apparentant au moteur d’une attractivité « quotidienne » pour les habitants de la ville ou touristique, en complément du site et du patrimoine architectural existant ;

– La quartier a vocation à intégrer un cœur de ville élargi, tels que les quartiers de La Réal et St Matthieu à Perpignan ou Vauban-Neppert et Franklin à Mulhouse. Ces quartiers jouxtent en effet un centre-ville bénéficiant d’une dynamique sur laquelle il s’agit de s’appuyer pour relancer une attractivité de nature plus résidentielle,

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complémentaire de l’attractivité touristique ou quotidienne. La réactivation des marchés immobiliers locaux par le traitement qualitatif des logements et de l’environnement urbain (requalification de la trame viaire reliant au centre-ville), et le développement d’une offre de service de qualité (principalement en termes d’équipement scolaire) apparaissent en cela prioritaires.

Une « normalisation » de l’état du quartier Plusieurs quartiers (Briand à Mulhouse, St-Jacques à Perpignan notamment) sont inscrits dans le même périmètre PRU que des quartiers faisant l’objet d’un projet urbain volontariste, tel qu’évoqué ci-dessus. Néanmoins, les interventions proposées sur ces sites témoignent d’une approche différenciée sur ces quartiers, comparativement aux autres sites :

– Les équipements – réhabilités ou créés – sont pour la plupart des structures de proximité, à vocation éducative ou sociale. Ils visent à une meilleure réponse aux besoins de la population actuelle, plus qu’à un changement d’image (de type « marketing urbain ») ou à une relance de l’attractivité ;

A Toulon, Un potentiel urbain « dopé » par la localisation du quartier

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– Les voiries et aménagements urbains font l’objet d’une remise en état, afin éventuellement d’en renforcer la fonctionnalité (cf. marchés), mais plus rarement d’une mise en valeur ;

– La sollicitation des bailleurs sociaux dans la requalification de l’habitat est importante sur ces secteurs. Ils apparaissent ainsi comme les principaux intervenants immobiliers, notamment en cœur de quartier, certaines opérations privées étant ponctuellement portées aux franges du quartier.

A travers les types d’interventions menées, il ressort que ces quartiers ne font pas l’objet d’un véritable projet urbain qui viserait à donner un nouveau souffle au quartier (par un rôle urbain renouvelé ou une évolution sensible de la population. L’objectif est avant tout de freiner – voire bloquer – le processus de dépréciation et de « normaliser » le fonctionnement du secteur à travers des opérations ponctuelles / ciblées de requalification de l’habitat, des équipements, des voiries… La place attendue des organismes d’HLM dans le processus de requalification témoigne par ailleurs de la nécessité perçue localement de réintroduire une certaine forme de maîtrise publique dans le fonctionnement immobilier du quartier. De plus, cela atteste d’une certaine volonté de maintenir les populations en place en améliorant leurs conditions de vie plus que d’en attirer de nouvelles. L’approche s’avère donc, d’un point de vue strictement urbain, moins ambitieuse concernant la dynamique de changement ; néanmoins, cela signifie que les opérations, d’envergure moindre, sont aussi plus adaptées à la réalité sociale des habitants actuels.

Au-delà d’une approche « quartier » Si les deux projets types présentés ci-dessus correspondent à des approches clairement identifiables (une ambition urbaine renouvelée vs une normalisation de l’état du quartier), cette troisième catégorie doit être qualifiée de « protéiforme ». En effet, les projets de Roubaix et Clichy se caractérisent par l’absence de réelle dimension « quartier ». Le PNRU est, dans ces cas-là, mobilisé pour faire face à une problématique globale du territoire plus qu’une stratégie « quartier » : • A Roubaix : il s’agit de faire face à un contexte communal globalement déprécié du fait

de processus historiques profonds qui ont positionné la ville en tant que « nasse » sociale de l’agglomération. Les projets urbains sur l’ensemble de la ville, dont toute une partie bénéfice de financements de l’ANRU, s’inscrivent donc dans une stratégie globale de requalification / reconquête pour faire face à la concurrence des communes proches. La ville cherche ainsi à redevenir attractive à l’échelle de l’agglomération, comparativement aux communes de la métropole, tout en ayant conscience du caractère profondément social de sa population. En termes d’intervention, cela se traduit par des interventions multiples, voire tous azimuts, appartenant autant au registre d’une ambition urbaine renouvelée qu’à celui de la normalisation de l’état et du fonctionnement des différents secteurs traités (6 « pôles d’appui » à l’échelle de la ville, en plus d’un quartier d’habitat social également en PRU).

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• A Clichy : l’objectif visé est de lutter contre les risques de gentrification de la petite

couronne parisienne. Dans ce cas précis, le PNRU apparaît comme un outil mobilisé pour permettre une meilleure prise en compte des besoins sociaux du territoire plus que pour engendrer un processus de requalification déjà entamé par les initiatives privées. L’intervention de l’ANRU est donc un moyen de renforcer la lutte contre l’habitat indigne, notamment concernant l’accompagnement des ménages fragiles, la prise en compte de leurs besoins spécifiques et la mobilisation des bailleurs sociaux.

* * * * * * Ces derniers exemples, associés aux types de « projet » évoqués précédemment, témoigne de la diversité des intérêts / logiques qui ont conduit à la mobilisation du PNRU dans ces quartiers anciens dégradés. Cette diversité atteste par ailleurs d’une certaine malléabilité du PNRU aux enjeux locaux et aux logiques d’intervention des autres outils mobilisés dans le cadre du projet urbain, conformément à ce qui a été pointé précédemment quant aux spécificités stratégiques et opérationnelles de l’intervention locale du PNRU dans les quartiers anciens dégradés. Le PNRU s’apparente moins à un dispositif ensemblier qui oriente l’action publique selon des principes clairement énoncés, mais davantage à un outil au service de stratégies locales, ambitieuses et/ou pragmatiques. Les chapitres suivants visent à rendre compte de manière plus détaillée de la manière dont ces stratégies sont mises en œuvre opérationnellement (au titre du PNRU, mais aussi des autres dispositifs, notamment en faveur de l’habitat), des avancées ainsi permises aux limites actuelles de l’intervention dans ces quartiers.

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A Roubaix, une intervention du PNRU sur de multiples sites

A Clichy-la-Garenne, un

projet aux portes de

Paris

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CHAPITRE 3 – AMENAGEMENTS, EQUIPEMENTS ET COMMERCES : LES INTERVENTIONS URBAINES REALISEES DANS LE CADRE DES P.R.U. L’intervention de l’ANRU est notamment née du constat d’une approche trop strictement immobilière dès lors qu’il s’agissait d’intervenir dans des secteurs anciens à dominante privée. Ainsi, la circulaire de novembre 2002 sur les OPAH et PIG rappelait : « l’OPAH doit être l’expression d’un projet d’ensemble d’évolution de quartiers existants ». De ce point de vue, plusieurs des quartiers des sites enquêtés au cours de la présente évaluation sont appréhendés selon une logique de projet urbain. Comme cela nous l’a été répété à maintes reprises au cours de nos visites, la réalisation de ces projets urbains s’est trouvé « accélérée » par le lancement du PNRU, puisque l’ANRU a permis de faciliter l’intervention foncière – qui freinait financièrement le déroulement des opérations – en prenant à son compte 50% du déficit foncier des opérations de financer un certain nombre d’aménagements, d’équipements et de locaux commerciaux. Nature des interventions urbaines financées par le PNRU dans les quartiers anciens dégradés

Les travaux d’aménagement urbain liés à la restructuration des îlots : amélioration de la desserte et de l’accessibilité, aération du tissu, amélioration des équipements de quartier liés aux usages nouveaux attendus, facilitation du repérage et de la lisibilité notamment pour les activités économiques…

Les travaux de restructuration de commerces pour les adapter aux besoins actuels de surface et d’organisation ainsi que pour rendre indépendants des logements actuellement liés aux baux commerciaux ;

I. L’AMENAGEMENT DES ESPACES PUBLICS (VOIRIES, PLACES ET JARDINS) :

DES APPROCHES DIFFERENCIEES EN FONCTION DU POTENTIEL URBAIN CONFERE AU QUARTIER

Le traitement des espaces publics dans le cadre des PRU se fait selon plusieurs logiques, notamment de relier le quartier au reste de la ville ou de proposer de nouveaux espaces qualifiants susceptibles d’être porteurs d’une nouvelle attractivité.

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L’intervention sur les voiries : désenclaver et mettre en valeur… lorsque le quartier participe de la stratégie urbaine globale L’action menée sur les voiries constitue un des premiers leviers mobilisés par les communes pour requalifier les quartiers anciens et repositionner ces derniers sur la carte communale. Le traitement des franges, c’est-à-dire les entrées de quartier, font notamment partie des priorités d’intervention. A Perpignan, qu’il s’agisse de l’accès piétonnier depuis le cœur de ville attractif (quartier St-Jean) ou de la connexion aux axes de circulation qui bordent le quartier Saint-Matthieu, les interventions sur les voiries ont fait l’objet d’une réflexion forte visant à valoriser les entrées de ce quartier, à créer une continuité visuelle entre le quartier St-Jean et le quartier St-Matthieu et à inciter les habitants, piétons ou voitures, à traverser le quartier jusqu’ici isolé. Ce constat se retrouve notamment à Mulhouse où le quartier Franklin a fait l’objet d’un traitement qualitativement important (circulations douces), en lien avec les quartiers environnants, en particulier à travers une homogénéité de traitement des mails du quartier Franklin et de l’entrée de quartier de Vauban-Neppert. Mais le traitement des voiries est par ailleurs un élément particulièrement distinctif de l’attention portée aux quartiers en fonction de l’ambition donnée au futur de chaque secteur. Ainsi, si l’on reprend les mêmes exemples de Mulhouse et Perpignan, on notera que la requalification des voiries dans les quartiers Briand (Mulhouse) ou St-Jacques (Perpignan), lorsqu’elle existe, est sensiblement plus sommaire que celle de ces quartiers environnants à fort potentiel évoqués précédemment. L’absence de traitement de certaines entrées du quartier St-Jacques, comparativement aux réalisations de St-Matthieu, pourrait même laisser penser que le quartier est pensé selon une certaine forme d’autarcie. La dédensification comme outil d’amélioration du cadre de vie : entre usages de proximité et projet(s) phare(s) pour la ville Outre les voiries, les aménagements de l’espace public permettent, selon les sites, de produire / requalifier :

– Du stationnement. A Thiers, il s’agit d’une des principales réalisations en termes d’aménagement, à proximité immédiate de la mairie et des services et commerces environnants. Ces stationnements paraissent moins destinés à un usage résidentiel que pour permettre aux différents habitants de la commune de venir quotidiennement dans le centre ancien – participant donc de cette stratégie de repositionnement du quartier sur la carte de la ville. Dans les autres communes, cet aspect est moins frontalement affiché, même si certaines places de parking ont pu être créés suite à des dédensifications au cœur des quartiers de Perpignan ou si Mulhouse a choisi de conserver une part importante de stationnements sur la place Franklin malgré sa volonté d’en faire une place structurante du projet Grand Centre. Le renforcement de l’accessibilité voitures est un enjeu perçu mais rarement prioritaire dans les projets ;

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– Des places ou espaces verts de proximité. Les PRU sont l’occasion de nombreuses créations de places ou espaces verts de proximité, à travers une démarche de dédensification de l’habitat (Roubaix, Perpignan, Mulhouse…). Cette dédensification est ainsi pensée non seulement comme une opportunité de recréer de la lumière et des aérations pour améliorer de manière pérenne l’état des logements contigus, mais aussi comme un facteur de valorisation et d’attractivité. Dans certains cas, ce dernier atout peut toutefois apparaître fragile au regard des faibles aménagements proposés sur ces nouveaux espaces publics, témoignant d’une attention limitée portée à l’usage de ces équipements ;

– Des places ou des espaces verts à vocation communale. Au-delà des espaces publics de proximité qui viennent rythmer l’agencement des quartiers, chaque PRU semble construit autour de quelque(s) projet(s) phare(s) d’espaces publics : à Perpignan, la place de la République créée au moment de la signature de la convention qui constitue aujourd’hui un élément fort du cœur de ville ; à Mulhouse, les jardins Vauban-Neppert dessinés par l’architecte renommé Michelin ou la rénovation de la Place Franklin ; à Thiers, la Place Chastels à proximité de la Mairie, etc.

II. LA PRODUCTION D’EQUIPEMENTS ET DE LOCAUX COMMERCIAUX : DE LA

NECESSITE DE DEPASSER LA SEULE ENTREE BATI De l’équipement de proximité au marketing urbain à travers des équipements à haute valeur ajoutée Le constat de vocations différenciées selon les espaces publics travaillés se retrouve aussi très distinctement dès lors qu’on aborde la question des équipements produits dans le cadre des PRU : – Les PRU permettent en premier lieu la réalisation / réhabilitation d’équipements de

proximité. Chaque projet prévoit a minima une intervention lourde sur un centre social / maison des associations, ainsi que la restructuration d’une école. Dans ce dernier cas, le projet pour le bâtiment scolaire est généralement de très haute qualité, avec des programmes BBC ou apparentés, certaines écoles pouvant avoir un coût unitaire de plus de 10M€… Très importantes, ces dépenses sont néanmoins pensées comme prioritaires pour attirer les classes moyennes dans ces quartiers. Ainsi, c’est sans surprise que ces équipements de qualité sont développés dans les quartiers qui concentrent les interventions privées sur l’immobilier et les aménagements urbains les plus importants.

– Outre ces équipements de proximité, à la vocation sociale plus ou moins affirmée, les

PRU peuvent être l’occasion, plus occasionnellement, de produire des équipements dont l’attractivité se veut plus large que l’échelle du seul quartier, voire répond à une logique de dynamisation touristique. L’exemple le plus parlant est assurément

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celui de Perpignan où plusieurs interventions de ce type ont été menées : Couvent St Claire, Arsenal des Cultures Populaires, Couvent des Minimes. A travers l’intervention sur ces équipements (qui constituent l’Arc Gothique), en l’occurrence couplée à un travail d’animation via la tenue de festivals (Visa pur l’image, Carrefour des Suds…), il s’agit de faire regarder d’un œil neuf ces quartiers qui faisaient jusqu’ici pour beaucoup l’objet de représentations négatives. L’afflux de touristes invités à traverser ces quartiers à l’occasion de leurs visites constitue ainsi un moyen détourné pour inviter les habitants de la Ville à reconsidérer leur perception de ces secteurs. Même s’il n’a pas été financé dans le cadre du projet ANRU, le Musée La Piscine créé à Roubaix participe de la même démarche.

Ainsi, les équipements produits dans le cadre des PRU répondent à une logique de satisfaction des besoins des habitants mais aussi, plus globalement, à une stratégie de marketing urbain construite autour de certains équipements vitrines censés favoriser le changement d’image et donc, à termes, renverser l’attractivité de manière à attirer de nouvelles populations. Les écoles : une priorité qualitative sur les bâtis, mais insuffisamment adossée à une politique éducative globale Malgré des interventions importantes sur les équipements scolaires, avec des projets de réhabilitation pouvant s’élever à quelques 12M€, plusieurs communes restent confrontées au manque d’attractivité de leur offre scolaire globale. Instabilité des parcours scolaires (nombreux changements d’écoles au cours de l’année), saturation des capacités d’accueil des établissements (parfois malgré des propositions d’ouverture de postes par l’académie), départ d’un établissement privé renommé en périphérie de la ville, etc., sont les indices d’une approche de la question scolaire trop excessivement axée sur la qualité du bâtiment, par-delà des enjeux aussi essentiels que la quantité de l’offre scolaire ou sa diversité.

L’intervention sur les commerces : un enjeu rarement anticipé La problématique des commerces est un enjeu diversement abordé par les pouvoirs locaux même s’il est possible de noter que, dans l’ensemble, les PRU ne parviennent que très imparfaitement à traiter, faute de réelle stratégie (à l’exception de Toulon), la question des commerces. En effet, l’entrée proposée dans le cadre du PNRU concerne essentiellement la création de surfaces commerciales ce qui, au regard des contextes locaux, ne sauraient suffire pour développer une offre attractive de commerces quand bien même l’enjeu peut s’avérer crucial pour certains projets – et moins pour d’autres. En effet, il convient de remarquer que l’enjeu est plus ou moins vif selon les quartiers considérés. A Toulon, territoire le mieux outillé à ce jour, il s’agit de la pierre angulaire d’un projet destiné à faire du quartier ancien un centre historique dynamique et touristique. A Mulhouse, c’est davantage la cohabitation de commerces historiques et de commerces qualifiés « d’ethniques » sur une même rue qui interpelle les pouvoirs public. A Perpignan,

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les quartiers jouxtent la zone commerciale de la Ville, rendant moins essentielle une intervention de ce type. Il s’agit donc d’une moindre priorité, alors même que les rares surfaces commerciales ouvertes au titre du PRU peinent à trouver preneurs… Enfin, il y a un enjeu fort lié à l’offre commerciale globale, insuffisamment appréhendée en amont du projet. Dans l’agglomération, cette offre commerciale est jugée plus qu’abondante au regard de la population locale, notamment en périphérie, rendant dès lors plus délicate toute implantation dans le diffus du centre urbain. Il en est de même à Thiers, où l’offre dans la plaine vient directement concurrencer l’offre potentielle du centre ancien, jugée moins accessible. A Thiers, la construction récente d’une stratégie en faveur de l’activité commerciale Outre la mauvaise image du quartier, cette diminution alarmante est pour partie liée à la structuration d’une offre plus attractive du bas Thiers avec des enseignes « locomotives ». On assiste de ce fait à un mitage des commerces qui renforce la dynamique de délaissement existante. Même l’activité touristique n’est pas à même de contrecarrer cette désaffectation à l’exception des boutiques dédiées à la coutellerie. Une étude de redynamisation commerciale a été réalisée en octobre 2009 qui conclut à la nécessité d’une polarisation des interventions sur des secteurs ciblés et restreint pour redonner de la visibilité et faire revenir une clientèle plus large que les seuls habitants du quartier. 2 axes centraux ont de ce fait été retenus comme porteurs d’un potentiel de reconquête. Il s’agit dorénavant pour la Ville de concentrer ses actions autour de ces 2 axes comme moteur d’une attractivité durable à même d’agir sur la requalification du bâti. C’est cette réorientation qui a conduit la Ville à réduire le nombre de périmètre ORI pour les centrer sur un accompagnement de la revalorisation commerciale. Le projet commercial se décline en 14 actions à mettre en œuvre intégrant : déplacement des commerces existants pour structurer un pôle dynamique, implantation d’une enseigne de grande surface alimentaire de proximité, réaménagement des voiries ciblées, mise en place d’un FISAC, acquisitions de locaux stratégiques, etc.

* * * * * * * En résumé, cette analyse transversale des interventions urbaines (aménagements, équipements, commerces) proposées dans le cadre des PRU permet de faire ressortir plsuieurs éléments saillants : – Les PRU permettent un traitement important de l’environnement urbain – quoiqu’inégal

d’un quartier à l’autre. Ce traitement permet des réalisations de proximité qui peuvent améliorer la vie de ces quartiers, mais aussi des investissements de plus grande envergure (espaces publics ou équipements vitrines) destinés au retournement

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d’image de certains de ces quartiers et au meilleur ancrage de ces derniers dans le contexte urbain global ;

– L’approche des problématiques (commerces, écoles…) se fait principalement

sous un angle urbanistique, quand bien même il s’agit d’enjeux plus complexes pour que les investissements consentis trouvent leurs publics. Un constat qui appelle à une vigilance plus large, à savoir qu’un projet urbain ne saurait se substituer à un projet de territoire.

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CHAPITRE 4 – LA STRATEGIE HABITAT DANS LES QUARTIERS ANCIENS : ARTICULATION DES DISPOSITIFS, DIVERSIFICATION DE L’OFFRE DE LOGEMENT ET RELOGEMENT Pour mener à bien les projets urbains élaborés localement par les acteurs locaux, il s’est agi, pour ces derniers, de recourir à la « boîte à outils » des dispositifs permettant d’intervenir sur le logement et l’urbain, posant la question de la complémentarité stratégique de ces dispositifs et de leur articulation opérationnelle. Nature des interventions sur l’habitat financées par le PNRU dans les quartiers anciens dégradés

La réalisation de logements sociaux en acquisition-amélioration en quartier ancien, dans le but de recréer une offre locative sociale compensant les démolitions d’habitat social. L’ANRU subventionne les surcoûts dus à la cherté ou aux contraintes du foncier et à l’état du bâti garantissant ainsi l’équilibre de telles opérations ;

Les interventions de curetage d’îlot et de remembrement foncier permettant de rendre utilisable à nouveau des tissus urbains trop denses et trop encombrés. L’ANRU subventionne, en complément des participations des autres partenaires locaux, ces interventions menées par des opérateurs publics.

D’un point de vue plus technique, il s’agit, à travers l’intervention de l’ANRU, de :

Acquérir du bâti en mauvais état et inadapté,

Démolir les parties identifiées comme non-réhabilitables contribuant à l’apport nécessaire d’éclairement et à l’aération du tissu,

Restructurer et conforter le bâti conservé

Remettre sur le marché des surfaces brutes de logement réorganisées, en les cédant à un opérateur public (production de logement social locatif ou en accession) ou à un investisseur privé (production de logement locatif à loyer libre ou encadré, en accession libre ou sociale, suivant les engagements induits par les montages financiers) qui réaliseront les travaux d’équipement interne des logements (dont le programme est défini par le cahier des charges de l’opération).

I. UNE INTERVENTION DE L’A.N.R.U. COUPLEE A DIVERS DISPOSITIFS

D’INTERVENTION SUR L’HABITAT Le couplage plus ou moins abouti du PRU à l’OPAH-RU Comme il l’a été évoqué dans la partie précédente, les quartiers anciens dégradés des sites étudiés faisaient l’objet depuis plusieurs années d’interventions de la part de la puissance publique. Dans la plupart des cas, ces interventions ont même été menées en l’absence de

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réelle stratégie, dans une logique de maintien en état ou de mise aux normes du bâti. A Thiers, par exemple, les premières OPAH remontent ainsi à 1979 (pour une procédure créée en 1978) et reprennent dès le début des années 1990. A quelques nuances près, ce constat d’une intervention répétée au titre de l’amélioration de l’habitat vaut pour l’ensemble des sites, confirmant d’ailleurs à la fois l’intérêt de l’outil OPAH, mais aussi que leur vocation incitative était porteuse de certaines limites dès lors qu’il s’agissait de traiter les secteurs ou immeubles les plus dégradés. Depuis le début des années 2000, les collectivités locales se sont ensuite appuyées sur une version renforcée de ces OPAH : les OPAH-RU (Renouvellement Urbain), créées sur le constat de l’incapacité des acteurs privés à agir sur le parc le plus vétuste, soit de leur propre fait, soit parce que les caractéristiques du tissu ne permettent aucune amélioration durable sans intervention globale. L’action publique, en redonnant toute leur place aux outils coercitifs ou de maîtrise foncière, réinvestit la conduite des processus et procédures d’intervention et repositionne la nécessité d’un véritable projet urbain. Dans l’esprit de la circulaire de 2002 sur les OPAH, l’OPAH RU est d’abord un dispositif ensemblier qui se décline à travers la mise en œuvre d’actions diversifiées allant de l’incitatif au coercitif. En ce sens, les RHI, ORI et procédures d’expropriation ou d’insalubrité sont des outils de l’OPAH RU qui intervient alors comme expression du projet global. L’analyse des PRU montre pourtant que, si des OPAH sont toujours mises en œuvre sur tous les territoires, elles apparaissent comme des procédures complémentaires, voire d’accompagnement, à des stratégies d’interventions publiques fortes déclinées dans le PRU. Il en résulte une juxtaposition, avec une relative imperméabilité entre les deux pour partie liée à des logiques différentes entre les deux agences d’Etat :

– L’OPAH RU qui fait l’objet d’une convention signée avec l’ANAH et circonscrit à l’intervention sur le parc devant rester privé ;

– Le PRU, qui n’est pas une procédure en soi, objet d’une autre convention signée avec l’ANRU. En accompagnement des actions à vocation publique qu’il s’agisse des équipements, aménagements ou production d’une offre sociale nouvelle.

Les masses financières en jeu font du PRU le cadre principal autour duquel le pilotage s’organise. On note aussi un décalage dans le temps quasi systématique entre le suivi-animation des OPAH RU et la mise en œuvre du PRU qui renforce l’idée d’une autonomie des actions. Cette distorsion n’est pas sans nuire à la cohérence des stratégies d’intervention et la bonne lisibilité des résultats obtenus au regard des enjeux locaux. Quoiqu’il en soit, dans la logique de mobilisation des financements du PNRU pour les quartiers anciens, l’existence d’une OPAH-RU sur le périmètre d’intervention est une condition préalable. Chacun des sites retenus a donc connu une voire deux OPAH-RU. Avec des bilans contrastés d’un territoire à l’autre :

– A Thiers, après 4 années de vie du dispositif, seuls 47 logements avaient fait ou faisaient l’objet d’un traitement au titre de l’OPAH-RU, quand 207 devaient être traités sur 5 ans (soit moins de 23% des objectifs atteints) ;

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– A Mulhouse, ce sont quelques 220 logements qui ont été réalisés en 2 ans (bilan 2008-2009), soit plus de 31% des objectifs (700 logements en 5 ans). Cela équivaut à un rythme de traitement près de 2 fois et demi plus rapide que pour le centre ancien de Thiers ;

– A Toulon, 358 logements ont été réhabilités entre 2003 et 2008, et 220 logements vacants ont été remis sur le marché… L’OPAH RU a permis également une amélioration qualitative des logements, avec des recompositions (réunions de petits logements…). Devant ce succès, une OPAH RU va être relancée en 2011 – plus de 500 logements sont encore identifiés comme nécessitant encore des travaux de réhabilitation.

Dans l’ensemble, ces OPAH-RU ont permis des interventions massives sur le logement privé, puisque les objectifs d’intervention s’échelonnent, selon les sites de 200 à 1 200 logements à traiter. Pour autant, il convient d’avoir en perspective que, malgré le caractère massif de l’intervention, ces objectifs d’amélioration de l’habitat représentent une part minoritaire des logements du quartier (environ 20% du parc total des 3 quartiers de Perpignan). Indispensables à la revalorisation générale des quartiers, ces OPAH-RU ne sauraient cependant être considérées comme suffisantes d’un point de vue quantitatif, ni même d’ailleurs d’un point de vue qualitatif, dans la mesure où elles ne permettent pas d’intervenir en restructuration des îlots pour l’habitat le plus dégradé / le moins bien conçu originellement (comparativement aux attentes actuelles). L’apport des Opérations de Restauration Immobilière En parallèle ou à l’intérieur des OPAH RU, les Opérations de Restauration Immobilière (ORI, anciennement Périmètres de Restauration Immobilière – PRI) constituent des outils fortement développés dans le cadre des stratégies habitat mises en œuvre dans ces quartiers. A travers les DUP (Déclaration d’Utilité Publique) Travaux qui leur sont associées, et qui définissent des objectifs en terme de traitement de l’immeuble, les municipalités peuvent obliger les propriétaires à réaliser toute une série de travaux ou, les inciter voire les obliger à céder leur bien (à la Ville ou au concessionnaire) de manière à ce qu’un autre acteur prenne en charge les interventions attendues. Il s’agit désormais d’un levier essentiel de l’intervention sur le parc dégradé de ces quartiers puisqu’il permet d’intervenir sur plusieurs dizaines d’immeubles, représentant ainsi quelques centaines de logements traités supplémentaires. Tant quantitativement que qualitativement, l’ORI s’apparente à un complément crucial des OPAH-RU, voire plus que cela, comme le rapporte un opérateur : « En 2002, l’OPAH-RU devait être la locomotive, mais aujourd’hui, elle est plutôt en accompagnement de l’ORI. ». L’utilisation de cette procédure reste toutefois très variable d’un territoire à l’autre en terme :

– de cible : définition de périmètre à l’intérieur lesquels l’essentiel des immeubles sont concernés versus utilisation stratégique sur les immeubles les plus complexes pour lesquels les outils incitatifs ont montré leurs limites ;

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– d’exigence : de la prescription des travaux de conformité au règlement sanitaire départemental à des objectifs plus ambitieux de restructuration et/ou de requalification globale;

– d’utilisation soit tactique soit stratégique : seules quelques municipalités ont été au bout de la procédure en expropriant les propriétaires qui refusaient d’effectuer les travaux et ne souhaitaient pas vendre à l’amiable

Ces ORI ont en général 2 objectifs principaux :

– amener les propriétaires en place à réaliser des travaux d’entretien, voire d’amélioration grâce, si besoin, aux aides de l’ANAH et des collectivités ;

– les inciter à la vente au profit in fine d’investisseurs privés pour qu’ils réalisent les travaux nécessaires. Les biens sont alors acquis par l’opérateur qui a en charge l’animation des ORI qui les revend, en l’état après relogement des occupants, aux investisseurs avec un cahier des charges exigeant quant à la qualité des prestations souhaitées.

Globalement les résultats obtenus par l’intermédiaire des ORI sont plutôt positifs avec des degrés divers sur la qualité des travaux réalisés et un poids variable des opérations réalisées par des investisseurs privés en recherche de défiscalisation. Cependant, elle n’est pas sans comporter une limite importante : son efficacité est, dans les faits plus qu’en théorie, fortement conditionnée à l’attrait des opérations proposées pour des investisseurs privés. D’où deux conditions : – D’une part, l’ORI doit être située sur un périmètre couvert par un dispositif de

protection du patrimoine bâti – PSMV (Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur) ou AMVAP (Aire de Mise en Valeur du Patrimoine et de l’Architecture), anciennement ZPPAUP (Zone de Protection du Patrimoine Architectural Urbain et Paysager) – afin de permettre aux investisseurs de faire jouer le dispositif Malraux de défiscalisation. Il faudra alors que le montant des travaux et le taux associé de défiscalisation soient suffisamment intéressants pour que ces acteurs privés se positionnent. Cela était jusqu’à présent le cas et avait d’ailleurs permis que les opérations réalisées par les investisseurs soient parmi les plus abouties qualitativement6. Cependant, le « rabot » récent des niches fiscales est venu modifier les conditions de défiscalisation en plafonnant le montant des travaux soumis à défiscalisation et en abaissant le taux de 40% à 30%, lorsque les sites ne sont ni en PSMV, ni en PNRQAD. Ce régime différentiel PRU Quartiers Anciens / PNRQAD pourrait d’ailleurs s’avérer très problématique localement, les investisseurs étant généralement des investisseurs nationaux, se positionnant sur les « territoires » les plus rentables. Bref, cet outil apparaît fragilisé en ce qui concerne les quartiers faisant l’objet d’un traitement dans le

                                                        6 Une question se pose toutefois concernant la défiscalisation accordée aux investisseurs, puisque les travaux soumis à la défiscalisation ne sont censés concerner que ceux définis par la DUP Travaux, et non ceux figurant dans un éventuel cahier des charges complémentaires obligeant les opérateurs à des éléments supplémentaires de qualité.

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cadre du PNRU7, ce qui pourrait avoir deux conséquences : générer un portage important des biens acquis par les opérateurs, le temps de trouver un acteur susceptible de s’engager dans l’opération et venir perturber une dynamique de retour des investisseurs déjà complexe à mettre en marche et donc freiner la diversification attendue dans le cadre de ces projets.

– D’autre part, l’opération doit se dérouler sur un secteur à forte attractivité

potentielle. Ainsi, alors que les OPAH-RU couvrent généralement l’ensemble du périmètre du PRU, la restauration immobilière est une intervention plus ciblée qui, si elle n’est pas exempte d’un certain risque, doit être accompagnée de gages d’une action publique volontaire sur l’environnement urbain. Ainsi, l’ORI peut être qualifié d’outil immobilier privilégié sur les quartiers à fort potentiel / fort investissement. Cela signifie, a contrario, que les quartiers qui sont moins traités selon une logique de projet urbain (Briand à Mulhouse, St Jacques à Perpignan, Carnot-Pile à Roubaix…) ne bénéficient que rarement de cet outil. Pour ce type de quartier, à moindre potentiel, l’outil immobilier privilégié sera davantage le « recyclage bailleur », soit une opération sous maîtrise publique.

La généralisation à double tranchant des outils de protection du patrimoine Nombre de ces quartiers anciens ont comme caractéristique de constituer un patrimoine urbain remarquable (traduit par divers niveaux de protection). Les tensions qui apparaissent ça et là entre d’une part projets de requalification nécessitant des interventions lourdes et souvent des restructurations, et de l’autre un objectif de protection de tous les aspects patrimoniaux ou historiques, amènent des blocages des opérations, pourtant grandement nécessaires dans l’intérêt même de la conservation du patrimoine, l’excès d’exigences amenant à renoncer à la démarche de requalification d’un bâti souvent déjà à l’abandon. Sur un plan stratégique, une réflexion partagée entre opérateurs de requalification et « protecteurs » du patrimoine apparaît indispensable, afin de déboucher sur une meilleure compréhension réciproque garantissant à la fois faisabilité des opérations et pérennité du patrimoine, cette pérennité étant plutôt mise en cause par des attitudes intransigeantes. D’autre part, les ensembles urbains que constituent de nombreux centres anciens de villes moyennes, plus ou moins en déshérence et dont Thiers est une illustration, risquent de disparaître (à échéance de quelques décennies) par défaut d’entretien allant même jusqu’à l’abandon. Au travers et au delà de la protection du patrimoine, c’est un véritable enjeu d’aménagement du territoire qui se joue, le tissu de villes moyennes françaises constituant une armature importante de la qualité de vie et de l’attrait touristique de notre pays, lequel continue d’être la 1ère destination touristique mondiale.

                                                        7 Sur les 6 sites étudiés, 4 sont en ZPPAUP / AMVAP (Toulon, Mulhouse, Roubaix, Clichy-la-Garenne) contre 2 en PSMV – qui continueront donc à bénéficier d’une défiscalisation maximale.

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La préservation de ces quartiers représente de ce fait bien plus qu’un « simple » enjeu culturel, le paysage urbain français risquant de perdre sinon une de ses qualités essentielles. C’est là une dimension qui doit être prise en compte, avec les conséquences économiques qu’elle induit, dans la réflexion sur la requalification urbaine de tous les sites présentant une dimension patrimoniale forte et un degré de déshérence déjà avancé.

Les réticences des organismes d’HLM face au « recyclage bailleur » Le « recyclage bailleur » utilise au bénéfice d’organismes HLM le dispositif de « requalification d’îlot dégradé » financé par l’ANRU ; ce dispositif immobilier qui permet aux organismes d’HLM d’acheter à un prix aidé des surfaces acquises par la Ville (ou son opérateur) et remises, ou non dans un état minimal (voire livraison de « plateaux »), afin d’y réaliser les travaux d’aménagement nécessaires en vue de produire des logements sociaux. Il s’agit ainsi de substituer en partie un parc social conventionné à un parc social de fait. L’ANRU finance 50% du déficit foncier de l’opération, c’est-à-dire le différentiel entre les coûts acquisition + travaux minimaux par la Ville ou son opérateur et le prix de vente à l’organisme d’HLM, abaissé de manière à permettre au bailleur d’équilibrer son opération. Les acquisitions peuvent être réalisées de plusieurs manières, notamment au titre de l’ORI-DUP Travaux. Néanmoins, ces opérations se heurtent à certaines réticences des bailleurs sociaux. En effet, pour ces derniers, ce type d’intervention est problématique à plusieurs égards :

– La technicité d’une opération sur un bâti ancien nécessite une « culture » de ce type d’intervention dont ne disposent pas toujours les organismes d’HLM à quoi s’ajoute la fragilité de certaines structures anciennes (comme à Perpignan ou à Thiers) et les risques d’effondrement qu’elle entraine, pouvant amener à revoir les modalités opérationnelles (davantage de conservation du bâti ou évacuation préventive plus importante) ;

– Les surcoûts inhérents à ces interventions, malgré l’aide conséquente de l’ANRU, sachant que plusieurs opérateurs évoquent des coûts travaux parfois supérieurs à 2 000€/m2 et des subventions municipales d’équilibre pouvant atteindre jusqu’à 50 000€ / logement. Un coût d’autant plus élevé que les modes d’intervention ne sont pas toujours optimaux (voir encadré ci-contre sur l’intervention de PRSA à Perpignan, avec des coûts travaux inférieurs d’un tiers à ceux des opérateurs HLM) ;

– Le caractère chronophage de ces opérations qui, par leur technicité, nécessitent un suivi lourd pour un nombre de logements finalement limité (comparativement à une opération de construction neuve sur terrain nu) ;

– Les contraintes programmatiques liées aux périmètres de préservation du patrimoine qui peuvent freiner la réalisation des aménagements attendus par les demandeurs de logement (typologie, parking, espaces extérieurs, ascenseur…) et donc gêner la location effective du logement, dans les villes où les risques de vacance sont importants (Thiers, Mulhouse) ;

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– Les difficultés futures de gestion du fait d’un parc en diffus, constitué d’immeubles ne comptant chacun que quelques unités de logement. Cela peut signifier pour l’organisme d’HLM d’adapter ses modes de gestion pour un patrimoine qui ne représente qu’une partie minime de son parc.

Localement, la réalisation de ces logements sociaux peut donc s’avérer problématique, comme dans le quartier Briand de Mulhouse où il est prévu de revoir les objectifs à la baisse, à Perpignan, où la mort d’une personne habitant un immeuble mitoyen à une opération d’un office renforce les hésitations des opérateurs à s’engager dans ces interventions ou à Thiers, faute d’opérations d’une envergure suffisante pour pouvoir y réaliser les aménagements nécessaires à l’attractivité du produit. Entre difficultés de production et difficultés de gestion pour des organismes d’HLM classiques, il apparaît que le développement de l’offre sociale conventionnée dans les quartiers anciens dégradés se heurte à l’absence d’opérateurs spécialisés qui intègrent dans leur fonctionnement économique les limites évoquées ci-dessus. A côté des opérations d’acquisition-réhabilitation, les bailleurs ont en charge des opérations de constructions neuves soit après une RHI soit parce que le bâti n’était pas conservable en l’état. On note une très préférence des bailleurs sociaux pour ce type d’intervention qui correspond mieux à leurs pratiques et contraintes de production. Elles sont en général les premières à être réalisées en permettant aux maîtres d’ouvrage d’offrir des logements conformes à leurs standards tant en termes d’équipements et d’aménagement qu’en typologie ou efficience. Cela nous paraît devoir être mis en parallèle avec les exigences accrues des ménages sur la qualité du logement social par rapport à des attentes moins fortes vis à vis du parc privé.

A Thiers, un bâti ancien dégradé auquel s’ajoute une topographie peu évidente

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Les opérations de Résorption de l’Habitat Insalubre (RHI) irrémédiable Sur 3 des 6 sites enquêtés (Perpignan, Thiers et Roubaix), des opérations de RHI sont en cours et viennent compléter les interventions réalisées au titre du recyclage bailleur. Définies à une échelle plus large que l’immeuble, elles permettent généralement de réaliser des opérations de qualité, avec restructuration du cœur d’îlot, et de renforcer l’offre sociale produite localement, le financement de l’ANAH (supérieur à celui de l’ANRU dans le cadre du recyclage bailleur, avec 70% du déficit foncier de l’opération pris en charge) étant conditionné à cette contrepartie sociale. A Thiers, les deux RHI permettent ainsi de réaliser plus de la moitié des objectifs de production de logements sociaux sur le centre ancien, soit 48 des 86 logements attendus. L’articulation des PRU avec la lutte contre l’habitat indigne Tous les sites, à l’exception de Thiers, ont un Service Communal d’Hygiène et de Santé (SCHS) intégré aux services municipaux. Leur vocation à mettre en œuvre les procédures administratives liées à la salubrité des locaux d’habitation leur confère une place centrale dans la lutte contre l’habitat indigne. Positionnés souvent dans la même Direction que le service habitat, voire en son sein même pour Clichy notamment, leurs interventions ne sont évidemment pas limitées au périmètre du PRU mais couvrent l’ensemble du territoire communal. On constate toutefois une forte présence des SCHS dans les secteurs concernés par le PRU avec la mise en œuvre de nombreuses procédures coercitives à l’encontre des propriétaires privés. C’est la raison pour laquelle cette présence a pour principal objectif les interventions portées par les OPAH RU en lien avec les opérateurs concernés. On note que les immeubles inscrits dans un projet de maîtrise foncière font très rarement l’objet de procédure d’insalubrité ou de péril malgré les mesures de protection des occupants qui s’y rattachent.

Cette conjonction avec les OPAH ont conduit plusieurs villes (Mulhouse, Perpignan, Toulon) à instituer des groupes de travail spécifiques à la lutte contre l’habitat indigne. Ainsi à Mulhouse, le comité de traitement de l’habitat indigne qui a été progressivement mis en place, se réunit désormais mensuellement. Il a permis de refaire le point sur l’ensemble des arrêtés d’insalubrité pris par le SCHS depuis 10 ans, et de mettre en place un système de transmission de l’information vers la CAF, lorsqu’une situation non conforme à la décence est identifiée par l’opérateur dans le cadre de l’une ou l’autre de ses missions (notamment le relogement). Si l’intervention urbaine n’est pas déterminée dans le détail par les constats sur l’habitat indigne, elle a permis de renforcer l’action de lutte face à cette problématique ;

A Perpignan, la mise en place d’une MOUS spécifique a permis de faire évoluer la situation de l’habitat indigne. Entre 2003 et 2008, ce sont 580 visites avec le SCHS ont été faites donnant lieu à plus de 180 mises en demeures au titre du Règlement Sanitaire Départemental, 72 arrêtés d’insalubrité et près de 250 arrêtés de péril. Parallèlement, la Ville a transmis 16 dossiers au Procureur de la République pour l’engagement de poursuiteS pénales. outre les effets de droit que ces procédures induisent, elles ont eu également pour effet d’agir sur la rentabilité locative et le départ des marchands de sommeil du secteur. Ainsi, alors que, en 2004-2005, l’analyse des Déclarations d’Intention d’Aliéner (DIA) donnait

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à voir un prix au m2 des logements insalubres supérieur à celui des logements décents (1 164 € contre 1098 €, indicateur d’une meilleure rentabilité locative du parc dégradé), la situation s’est depuis renversée puisque, à la fin de la première OPAH-RU, en 2008, le prix au m2 du logement décent était désormais deux fois supérieur à celui du logement insalubre (1 737 € contre 952 €). Plutôt que d’articulation, on peut parler d’interactions plus ou moins vives entre les actions menées au titre de l’ANRU et les actions menées au titre de la lutte contre l’habitat indigne. Mais, quelles que soient l’intensité et la pertinence de ces interactions, les effets d’une logique de projet fondée sur des périmètres est une dimension rarement prise en compte:. Ainsi, plusieurs acteurs rencontrés sur les différents sites ont pu nous faire part de phénomènes de déplacement des problématiques vers des quartiers proches, plus que d’une résorption véritable des difficultés. A Mulhouse par exemple, la signature de la convention ANRU a signifié parallèlement une limitation du périmètre de projet à 3 quartiers au lieu des 4 originellement prévus (quartier de Bâle non retenu), l’OPAH-RU suivant la même logique. Aujourd’hui, certains intervenants locaux attestent d’un déplacement des accessions communautaires génératrices de conditions d’habitat indigne à ce quartier qui ne bénéficie ni des interventions massives consenties sur les quartiers voisins, ni même d’une veille particulière permettant d’entamer la première étape du traitement de l’habitat, à savoir le repérage des situations. De tels phénomènes ont également été signalé à Perpignan vers le quartier de la Gare ou à Thiers avec une paupérisation renforcée de certains secteurs situés plus au nord. Ce déplacement des dynamiques de paupérisation n’est pas sans poser la question de la place réservée aux occupants des quartiers des PRU dans le projet et la cohérence avec les actions du CUCS. Un couplage indispensable mais encore trop formel des dispositifs associés à l’ANRU Au regard des différents outils d’intervention sur l’habitat mobilisés dans le cadre du projet urbain (sous financement ANRU, ANAH ou autre), il apparaît évident que l’intervention du PNRU dans les quartiers anciens ne peut être assimilée à une intervention massive et isolée. OPAH-RU, ORI, périmètre sauvegardés, RHI, recyclages bailleurs, etc., sont autant de moyens mobilisés pour avoir une action à la fois diversifiée et d’envergure sur l’immobilier de ces quartiers. Certes, ces interventions ne permettent pas, comme souvent dans le cadre des PRU en quartiers d’habitat social, de traiter la quasi-totalité du parc mais, par leur addition, c’est une part non négligeable (entre un quart et un tiers du parc total environ) qui est susceptible de bénéficier d’une aide publique (sous une forme ou une autre) en vue d’une amélioration et d’une diversification de l’offre de logements, jusqu’à constituer une masse critique entrainant la dynamique de revalorisation du quartier. Pour autant, les réalisations peuvent, elles, parfois s’avérer compliquées et/ou insuffisantes pour contrer efficacement et durablement le problème de l’habitat dégradé des communes. Plusieurs points de vigilance méritent donc d’être notés : – L’instabilité des dispositifs de droit commun associés au programme

exceptionnel de rénovation urbaine fragilise la mise en œuvre de stratégies urbaines

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complexes et développées à moyen-long terme. Cela vaut lorsqu’on considère le calendrier de certains OPAH-RU, qui s’achèvent alors que le PRU n’en est qu’à mi-parcours (Roubaix, Toulon). Cela vaut également lorsqu’on analyse le contenu de ces dispositifs. Soumis à des législations nationales, ils peuvent voir leur contenu modifié pour des raisons extérieures aux logiques propres du PNRU. Il en est ainsi des OPAH, qui ciblent désormais les propriétaires occupants très modestes, ou de la défiscalisation Malraux, dont le rabotage fragilise l’attractivité comparativement à d’autres sites ;

– La faible présence d’opérateurs spécialisés, à la fois dans les interventions sur du

bâti ancien et la gestion de parcs dans le diffus, est un frein pour atteindre les objectifs de réalisation des logements sociaux sans fragiliser durablement les finances des opérateurs et de leurs partenaires. L’appareil de production en quartiers anciens apparaît encore à ce jour insuffisamment constitué pour permettre des modes d’intervention plus adaptés / des coûts travaux plus ramassés, alors que, dans le même temps, la complexité technique des opérations – et les responsabilités afférentes – peuvent venir freiner la mobilisation des entreprises susceptibles de prendre en charge ces opérations. Il y a un problème de culture professionnelle qui se fait particulièrement sentir chez les organismes d’HLM, plus habitués dans de nombreuses villes à intervenir en construction neuve.

– La concentration des interventions sur un périmètre circonscrit peut générer des

phénomènes de déplacement des difficultés plus que leur résorption effective. A travers cette remarque, il s’agit moins de pointer la logique de priorisation de l’action publique – qui, dans le contexte délicat des finances locales et nationales, apparaît comme un pré-requis – que l’absence de système de veille permettant d’anticiper les besoins d’intervention future.

II. L’OFFRE DE LOGEMENTS PRODUITE : AMELIORATION DE LA QUALITE DES

LOGEMENT MAIS DES STRATEGIES D’HABITAT PERFECTIBLES Ces différents dispositifs visent à renouveler l’offre de logements des quartiers selon principalement deux axes :

– Une amélioration de la qualité intrinsèque du bâti : éléments de confort, isolation, organisation spatiale et typologie ;

– Une évolution du statut du logement : entre relance des marchés immobiliers sous une forme « normalisée » et développement d’une offre accessible de qualité.

Le développement d’une offre nouvelle de logements, en substitution d’une offre préexistante (soit par réhabilitation-restructuration, soit par démolition-reconstruction), doit participer d’un renforcement de l’attractivité du quartier et d’une amélioration des conditions de vie de ses habitants. A ce titre, il constitue un instrument de l’évolution du peuplement du quartier. Ces évolutions sociologiques sont souvent des conséquences attendues du projet,

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si tant est toutefois que les besoins de ces futures populations aient été correctement anticipés et soient compatibles avec la conjoncture actuelle. Des logements qui font l’objet de réhabilitations importantes mais rarement de restructuration Les interventions sur le bâti dans le cadre des dispositifs associés au PRU évoqués précédemment ont permis une amélioration sensible de la qualité des logements traités qui va au-delà des interventions réalisées dans le cadre des précédentes OPAH, dont les interventions étaient plus limitées, moins fondamentales. A travers les opérations réalisées depuis le lancement de la procédure OPAH-RU, on constate que les maîtres d’ouvrage réalisent des travaux structurellement plus importants : – A Mulhouse, les interventions réalisées ces dernières années ont permis de traiter les

problèmes de non-décence (cf. salles d’eau et sanitaires dans les parties communes) alors que les opérations précédentes avaient privilégié les travaux d’enjolivement des parties extérieures. Ce travail sur les extérieurs se poursuit par ailleurs, mais fait désormais l’objet d’un financement spécifique dans le cadre de l’Aide à la Mise en Valeur du Patrimoine et des Espaces Résidentiels (AMVPER) accordée par la Ville (objectif de 300 façades traitées) ;

– A Perpignan, le montant moyen des travaux engagés est passé de 21,9 K€ / logement

privé lors de la 1ère OPAH-RU, à 28,8 K€, soit une augmentation de plus de 25% des montants engagés. Ce montant s’élève même à 133 K€ / logement dès lors qu’il appartient au parc social. Depuis 2003, ce sont environ 1 500 logements qui ont fait l’objet d’interventions, pour un territoire qui en compte quelques 6 000.

Ainsi, les projets urbains des quartiers anciens s’accompagnent d’une amélioration conséquente de la qualité du logement. Néanmoins, un certain nombre d’éléments vient freiner le développement d’interventions plus massives susceptibles de modifier plus en profondeur l’habitabilité des logements (typologie, aération…), malgré les financements du PNRU au titre de la dédensification notamment. Parmi ces éléments, on retiendra, outre la complexité technique des opérations de restructuration lourdes, la difficulté des porteurs d’opérations à réaliser les acquisitions mitoyennes indispensables au travail de remembrement parcellaire nécessaire pour ce genre d’interventions. Les acquisitions tendent en effet à se faire : soit à l’opportunité (à travers la préemption suite à des mises en vente), soit en fonction de l’état général du bâti (à travers l’ORI, qui ne garantit pas une cession du bien). Les opérateurs sont donc fortement dépendants des intentions des propriétaires pour mettre en œuvre leur stratégie d’intervention à une échelle plus grande que celle du seul immeuble. Les difficultés à mener des restructurations sont d’autant plus dommageables que, d’une part, elles viennent fragiliser la pérennité des investissements consentis pour réhabiliter le logement (traitement des conséquences plus que traitement de causes telles que l’absence d’aération à l’arrière dans des bâtiments profonds – cf. Perpignan), mais aussi qu’elles viennent resserrer la clientèle potentielle de ces biens rénovés :

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– A Thiers, les contraintes de restructuration, liées notamment au Plan de Sauvegarde et

de Mise en Valeur, empêchent la création de plateaux importants qui permettraient d’organiser les logements sur un seul étage, voire d’installer un ascenseur. Les personnes âgées, potentiellement attirés par les cœurs de ville où se concentreraient services, commerces et équipements, ne peuvent candidater durablement pour ce type de biens.

– A Mulhouse, la sortie des normes de non-décence avec la réintégration des pièces

d’eau à l’intérieur des logements entraîne la perte d’une pièce, faisant passer ces derniers de T3 à T2, alors même que la demande exprimée sur la ville est principalement orientée vers le T3-T4. S’il ne s’agit pas, bien sûr, de produire exclusivement à la typologie moyenne, la possibilité d’attirer des « familles », comme souvent entendu, paraît fragilisée par ce problème d’inadéquation de l’offre produite dans l’ancien.

Derrière ce problème des restructurations, se pose en fait une question plus fondamentale : dans quelle mesure les intentions du projet sont-elles compatibles avec les opérations effectivement réalisées / réalisables ? La forme du logement, on vient de le voir, est de ce point de vue problématique, tout comme peut l’être le « statut » de l’offre proposée, à savoir privée, intermédiaire, conventionnée, publique… Diversification globale à l’échelle des PRU, mais approches différenciées d’un quartier à l’autre L’intervention sur le logement dans les quartiers anciens dégradés se fait selon principalement 2 axes : la « normalisation » des marchés immobiliers privés par le traitement qualitatif de l’habitat et l’introduction ou le renforcement de l’offre sociale de logements, qu’elle soit portée par des acteurs privés (conventionnement) ou publics (organisme d’HLM). De manière à obtenir un volume suffisant de logements qui puisse avoir un effet levier sur l’ensemble de l’habitat des quartiers, ces interventions sont généralement associées (cf. supra) et permettent la sortie d’une large gamme de produits logements : PLA-I, PLUS, loyer conventionné, loyer maîtrisé, PLS, locatif libre ou accession. Le développement de ces divers produits de logements doit permettre de répondre aux besoins des différentes populations :

– l’offre très sociale est une manière de concurrencer l’offre de logements indignes sur laquelle étaient jusqu’ici obligés de se rabattre les ménages les plus précaires, faute de mieux ;

– l’offre intermédiaire ou libre dans des logements de qualité est une manière d’attirer une nouvelle population dans le quartier et donc de nourrir le processus de diversification de la population et de « déspécialisation » sociale du quartier.

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L’analyse des priorités de production de telle ou telle offre permet donc de définir quelles sont les intentions des porteurs de projet quant au peuplement futur des quartiers ; l’étude, de l’attractivité de ces différents produits est, quant à elle, un moyen d’avoir un premier aperçu de la réalité des changements sociologiques que connaissent ces quartiers et donc, in fine, un moyen d’évaluer la pertinence des stratégies mises en œuvre – à court, moyen ou long terme. Il est important de constater que plus que des différences de stratégie d’une commune à l’autre, il s’agit davantage d’approches différenciées d’un quartier à l’autre (plusieurs PRU concernent plusieurs quartiers), en fonction de l’attractivité – réelle ou potentielle - attachée à chacun d’entre eux. Au regard des 6 sites étudiés, tous les PRU se caractérisent par un large recours à la diversification de l’offre de logements dans toutes ses composantes. A Clichy-la-Garenne, la démolition du parc privé social de fait doit entraîner la reconstruction de 329 logements sociaux dont 203 PLA-I (84 en résidences sociales et maisons relais) et 126 en PLUS-CD ; parallèlement, il est attendu de l’OPAH-RU la sortie de 165 logements en loyer intermédiaire (environ 15€/m2, contre 22,5 € en moyenne sur le marché libre). Une première pondération est nécessaire à ce constat généralisé d’une large diversité des produits logements générés dans le cadre des PRU Quartiers Anciens : la part occupée par l’accession à la propriété reste assez sensiblement minoritaire – à Mulhouse, cela concerne à ce jour seulement une quinzaine de logements par exemple, sur les quelques centaines produits ou en cours de production. A l’échelle des quartiers, cette diversification s’avère alors nettement moins systématique. On distinguera ainsi deux axes de développement de l’offre de logements entre :

– les quartiers pensés au travers de leur potentiel urbain et sur lesquels la priorité est au développement d’une offre privée de qualité, en locatif conventionné ou non ;

– les quartiers pensés au travers de leurs difficultés sociales et sur lesquels ce sont principalement des logements sociaux, portés par des organismes d’HLM, qui sont attendus (malgré les difficultés de production notées précédemment).

La diversification de l’habitat à Perpignan Les investisseurs privés intervenant à Perpignan ont produit globalement 302 logements entre 2004 et 2009, soit 38% des logements locatifs traités sur la période, dont 115 en loyer conventionné social (38%). On note, depuis 2008, une inversion de tendance avec une majorité de logements à loyers libres contrairement aux années précédentes où le loyer conventionné prédominait. Les loyers de marché augmentant, les investisseurs peuvent désormais mieux équilibrer leurs opérations sans avoir recours à des aides financières. Par ailleurs, sur les 150 PLA-I prévus dans la convention, PRSA a produit 52 logements depuis le démarrage du PRU quasi exclusivement sur le quartier Saint-Jacques. L’OPH a produit de son

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côté 26 logements (livrés ou en cours) mais 17 sont actuellement bloqués notamment à la suite de l’effondrement d’un immeuble riverain d’une des opérations. A noter enfin que, si la part Propriétaires Occupants avait baissé de 13% entre 1990 et 1999, celle-ci a augmenté de quelques 22% entre 1999 et 2008, prioritairement sur le quartier Saint-Jean (hors-PRU), la Real et Saint-Matthieu ; leur part a continué à baisser dans le quartier Saint-Jacques. Un phénomène qui témoigne bien d’une reprise inégale de l’attractivité entre les différents quartiers compris dans le PRU.

Une diversité des offres de logements pour amorcer la relance des quartiers, en conservant des marges de gentrification dans les quartiers à fort potentiel Dans l’ensemble, les quartiers qui sont peu pensés au travers de leur potentiel urbain font rarement l’objet d’une production de logements par les acteurs privés : rares sont ces derniers susceptibles d’investir sans que le risque pris ne soit accompagné d’interventions fortes de la Ville sur le renouvellement du cadre urbain. Ce sont donc les bailleurs sociaux qui sont sollicités pour produire du logement de qualité dans ces quartiers, généralement sous réserve de contreparties (foncières notamment) pour réaliser des opérations ailleurs dans la ville ou dans l’agglomération Pour les quartiers auxquels est adossé un potentiel urbain important, l’intervention privée est généralement privilégiée, parfois associée à une production de logements PLS destinée aux classes moyennes. Dans ces quartiers où la logique de marché prédomine, on notera que les premiers temps des investissements se font généralement en sollicitant de manière importante les dispositifs ANAH qui permettaient jusqu’ici de financer une part importante des travaux sous réserve d’un plafonnement ultérieur des loyers. La part de logements conventionnés dans les premières années des PRU atteste d’ailleurs de l’intérêt des acteurs privés pour les aides à la pierre, quitte à ce que celles-ci soient socialement conditionnées, lorsque le « renversement d’image » n’en est encore qu’au stade d’hypothèse (cf. encadré supra – Perpignan). Cependant, dès lors que le basculement s’opère et que le marché se « normalise », les propriétaires bailleurs s’orientent plus sur des opérations non subventionnées pour maximiser leurs ressources locatives en les calant sur les loyers du marché pour améliorer leur rentabilité. En parallèle, il convient de conserver à l’esprit que le conventionnement des logements privés se fait sur une période limitée dans le temps (9 ans) soit, au regard de la temporalité des projets urbains, approximativement le temps que se manifeste l’éventuelle reprise d’attractivité du quartier. A terme, l’ensemble de ce parc conventionné est donc susceptible de basculer dans le champ du locatif libre. La diversification de l’offre de logements ne saurait dès lors être lue au premier degré, car il ne s’agit pas nécessairement d’un acte pérenne, mais d’un levier dont l’impact peut s’avérer limité.

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A un degré moindre, le développement des logements PLS dans le parc produit par certains organismes d’HLM dans les quartiers au fort potentiel urbain participe de la même stratégie. A Mulhouse par exemple, les deux bailleurs (d’envergure supra-régionale) arrivés récemment dans la commune ont privilégié, suite aux échanges avec la municipalité, le développement de l’offre de logements intermédiaires, notamment dans le quartier anciens de Franklin sur lequel se sont concentrées les premières interventions urbaines. Ne rencontrant pas actuellement une demande pour ces produits, les loyers proposés pour ces logements PLS n’excédent pas les plafonds de loyer PLUS mais pourraient, à terme, être révisés si une nouvelle dynamique immobilière sur ces secteurs voyait le jour. La diversification de l’habitat dans les quartiers anciens les plus intégrés dans une logique de revalorisation urbaine permet donc de conserver des possibilités de « mutation » des produits logements, de manière à pouvoir « coller » aux évolutions du marché. En d’autres termes, derrière l’apparente diversification permise par la diversité des produits logements mobilisables, se cachent des marges de gentrification plus ou moins importantes, et plus ou moins mobilisées en fonction du potentiel d’attractivité futur de chaque quartier. III. LE RELOGEMENT : ENTRE SPECIFICITE DES ENJEUX ET DES APPROCHES

CONCERNANT LES OCCUPANTS DU PARC PRIVE / DEGRADE Les relogements réalisés dans les quartiers anciens dégradés sont moins massifs que ceux généralement menés dans les quartiers d’habitat social. Cependant, de par l’origine résidentielle des ménages concernés, leurs taux d’effort (voire leurs modes d’habiter) originels, mais aussi les propositions de logement qui leur sont faites, la problématique des relogements en quartiers anciens apparaît complexe et même, à certains égards, ambiguë en ce qui concerne à la place faite aux habitants dans le cadre de certains projets. Une difficile quantification des relogements nécessaires en amont des opérations A Toulon, un travail fin de diagnostic logement par logement sur les immeubles à traiter a permis de (re)quantifier le nombre de ménages concernés, car la quantification d’origine surévaluait très fortement les besoins en relogement. Dans la convention, le nombre de relogements estimés correspondait au nombre de logements comptabilisés par îlots auquel était affecté le taux de 30% de vacance moyen sur le centre ancien. Mais tous les immeubles de chaque îlot ne font pas l’objet d’un traitement, et toutes les procédures ne nécessitent pas de relogement. Par ailleurs, le taux de vacance de certains bâtiments très vétustes était bien plus élevé et pouvait monter jusqu’à 70%. La combinaison de ces facteurs explique que le nombre de relogements à effectuer ait ainsi été réévalué de 750 à 382 ménages.

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Néanmoins, la ville fait état d’une centaine de « départs volontaires » entre les premières annonces faites d’une intervention sur le quartier et les enquêtes sociales exhaustives réalisées par la suite. Il est très difficile de savoir où sont partis ces habitants, et les acteurs sociaux ne connaissent la destination que de quelques-uns : il y a eu quelques décès, et certains sont repartis au pays ; d’autres ont été relogés directement par leur propriétaire dans un autre immeuble du centre ville non concerné par le PRU. Une sollicitation du logement conventionné qui interroge sur la place accordée à terme à ces ménages (fin de conventionnement alors que quartier rattrapé par les marchés immobiliers) Les ménages relogés dans le cadre du PRU (ou, parfois, d’opérations ayant précédé la signature de la convention ANRU) sont presque exclusivement des ménages logés dans le parc privé, soit en tant que locataires, soit en tant que propriétaires occupants. L’arrivée de ces ménages dans un parc privé dégradé est le résultat de parcours résidentiels très distincts, au sein desquels on peut notamment distinguer les ménages anciennement ou nouvellement arrivés :

– Les ménages anciennement arrivés. Parmi ces ménages se distinguent deux types de ménages. D’une part, les familles ouvrières (Roubaix, Mulhouse), installées depuis des dizaines d’années dans de l’habitat de mauvaise qualité (absence de sanitaire, d’eau chaude, humidité…) mais qui constitue pour eux une « norme » en termes de modes d’habiter et qui s’acquittent généralement de loyers très peu élevés ou sont propriétaires non-accédants. D’autre part, les « vieux migrants », arrivés pour la plupart entre les années 1950 et 1970, soit des hommes isolés qui vivent souvent en colocation8 (ou en colocation « tournante », selon le rythme des allers-retours de chacun avec le pays d’origine), dans des conditions très sommaires pour des prix très modestes, l’essentiel de l’argent gagné (de plus en plus les retraites de leur vie ouvrière) étant destiné à organiser la vie « au pays ». A ces deux catégories, peut être ajoutée le cas spécifique de la communauté gitane de Perpignan, installée depuis plusieurs siècles dans le quartier Saint-Jacques ;

– Les ménages nouvellement arrivés. Là encore, deux types de ménages ressortent avec une certaine acuité. D’une part, les ménages immigrés récemment arrivés sur le territoire national qui trouvent à se loger via les réseaux communautaires, dont une partie ont pu investir dans de l’habitat privé dégradé à bas coût (cf. Mulhouse). Dans de nombreux cas, leur situation locative s’avère fragile, car rarement traduite sous la forme d’un contrat officiel. D’autre part, on retrouve des ménages en situation de rupture (familiale, professionnelle, locative), qui n’ont pu trouver de place dans le parc social ou qui en ont été expulsés.

Toulon : Principales caractéristiques des ménages à reloger                                                         8 Avec l’exception de Clichy-la-Garenne, où les « vieux migrants » sont des anciens ouvriers des usines installées sur la commune, et souvent propriétaires de leur logement. En revanche, il est fréquent que le logement soit en multi-propriété.

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Les ¾ sont des personnes seules, principalement des hommes. 9% des ménages comptent plus de 3 personnes. 55% des chefs de ménage sont âgés de plus de 60 ans. Les revenus sont faibles : 77% des ménages à reloger vivent avec des revenus mensuels inférieurs au seuil de pauvreté, ce qui s’explique notamment par la faiblesse des revenus de travail (16% des ménages sont en activité, 36% vivent de minima sociaux ou pensions d’invalidité, 37% sont retraités). Par ailleurs, l’immense majorité paye des petites mensualités (75% des loyers sont inférieurs à 350 €, 55% des ménages ont un résiduel de loyer inférieur à 100 €), et les taux d’effort sont faibles, presque systématiquement inférieurs à 30% des revenus. Ces ménages sont locataires, et pour près de la moitié d’entre eux vivent depuis plus de 10 ans dans le centre ancien. Ce qui explique pourquoi 62% d’entre eux souhaitent rester sur place, ou éventuellement acceptent de s’installer dans un quartier périphérique. Ils refusent tous un déménagement dans les grands ensembles collectifs des autres ZUS de la ville.

Des stratégies très distinctes de relogement d’un site à l’autre Les relogements proposés aux ménages provenant du parc privé sont de nature très variés en fonction des sites d’étude. Cependant, il se dégage une caractéristique commune à l’ensemble des sites : les ménages du parc privé font, pour la plupart voire la quasi-totalité, l’objet de relogements dans le parc existant (Roubaix, un objectif affiché de 50% dans le neuf, quand seulement quelques uns ont été réalisés). Les raisons invoquées par les différents acteurs rencontrés (pilotes ou opérateurs) sont généralement :

– le taux d’effort et les modes d’habiter de ces ménages d’autant moins adaptés aux nouveaux standards du logement neuf que les normes de ces derniers ont évolué (cf. notamment maîtrise des consommations) ;

– le faible rythme des constructions neuves – sur site ou hors site – à Toulon et Clichy notamment.

Pour le reste, les stratégies de relogement peuvent s’avérer très éloignées d’un PRU à l’autre, témoignant de la relative inefficacité des canevas définis par l’ANRU pour encadrer les relogements en quartiers anciens. A Toulon, par exemple, 83% des ménages relogés l’ont été dans le parc social ; à Mulhouse, ce taux ne s’élève qu’à environ 30%, alors que la moitié des ménages ont bénéficié d’un relogement dans le parc conventionné, plus facile en termes de localisation. Dans cette ville, les propriétaires occupants ne sont pas pris en compte et bénéficient exclusivement du prix de rachat de leur logement par l’aménageur (environ 700€/m2) ; à Roubaix, 3 propriétaires occupants sur 7 ont été relogés dans le parc social (17 sur 19 en ce qui concerne les ménages originellement locataires dans le parc privé). Si l’accompagnement est une dimension intégrée par l’ensemble des PRU en Quartiers Anciens, les délais de cet accompagnement fluctuent d’un site à l’autre entre un accompagnement de un à deux mois après le relogement, à un an, avec enquête à domicile au bout de six mois…

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La disparité des budgets consacrés au logement avant relogement rend difficile l’analyse de l’impact financier des relogements, d’autant que les méthodes de calcul peuvent avoir un impact non négligeable sur la manière d’appréhender les résultats : à Roubaix, on constate ainsi une hausse des taux d’effort net9, mais une baisse du reste-à-vivre10… Mais ce sont aussi les registres de comparaison avant / après qui sont délicats à manier tant les écarts entre les niveaux de confort, d’une part, et les efforts budgétaires consentis pour se loger, d’autre part, peuvent être importants, dans certains cas, entre la situation initiale et la situation post-relogement11. Un public spécifique du parc ancien dégradé – les migrants âgés Dans deux des sites investigués, Toulon et Clichy-la-Garenne, une partie conséquente de la population à reloger est constituée de migrants âgés, installés depuis des décennies dans les petits logements du parc privé. Dans les deux villes, ces migrants se distinguent par leur statut, puisqu’ils sont systématiquement locataires dans le centre ancien de Toulon, alors qu’une partie des migrants du quartier PRU de Clichy est propriétaire de son logement. Cependant, ils partagent plusieurs caractéristiques :

- parvenus à la retraite, la plupart d’entre eux vivent dans le modèle des « aller-retour » au pays, se partageant l’année entre la France et leur pays d’origine (le Maroc dans les deux cas).

- leurs conditions de logement en France peuvent être qualifiées de spartiates (vétusté importante des logements, absence de sanitaires, très peu de meubles…) ; cependant, elles leur conviennent d’une certaine façon, avant tout pour leur très faible coût, qui leur permet d’envoyer de l’argent à la famille au pays et de bénéficier d’un double domicile.

- il s’agit d’hommes seuls qui pratiquent une sociabilité de proximité importante – une autre raison d’être attaché à leur logement et à leur quartier – mais qui, en revanche, sont très peu connus des services sociaux qu’ils sollicitent peu.

A l’origine des projets de rénovation, les deux villes avaient prévu, dans leur programme de construction de logements sociaux, de répondre aux besoins des migrants âgés par la création de résidences sociales ou de maisons relais / pensions de famille. Dans les deux cas, cette solution s’est finalement révélée inadaptée :

- elle est trop chère pour les personnes, et peu viable pour la structure. Les acteurs envisageaient de pouvoir compter sur des roulements dans les séjours en France – dans les faits, tout le monde part en même temps au pays, la structure aurait donc toute les chances d’être plus ou moins vide une partie de l’année, et donc de ne pas être rentable.

- la vie en foyer collectif, l’obligation du respect d’un règlement intérieur…, font l’objet d’un très fort rejet de la part de ces migrants.

                                                        9(Loyer + charges – Allocations logement)*100 / Ressources mensuelles 10 Ressources mensuelles – (loyer + charges + charges courantes obligatoires – allocations logement) / nombre d’occupants*30 11 Cette situation n’est pas sans rappeler les discours entendus lors de la création des grands ensembles qui ont entraîné le déplacement de populations importantes d’un habitat dégradé dans des quartiers de ville, vers les logements « tout confort » créés souvent en périphérie.

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Dans les deux PRU, les solutions en résidence sociale n’ont pu être mobilisées que dans un nombre marginal de situations. Certains des migrants se sont finalement installés définitivement dans leur pays d’origine, pendant que les autres sont relogés soit dans des logements relais, soit dans le parc social et/ou conventionné. Le gain important en condition de logement se paye alors par une perte importante de niveau de vie. Par ailleurs, à Clichy-la-Garenne, le PRU centre ancien comprend la démolition – reconstruction d’un foyer de travailleurs migrants d’ADOMA. Le nombre important de migrants âgés à suivre par les MOUS relogement a conduit la maîtrise d’ouvrage du PRU et ses partenaires, à mettre en place un « projet d’intervention en direction des publics migrants en accompagnement des opérations de rénovation urbaine ». A ce jour, les initiatives sont les suivantes : - une formation sur les problématiques spécifiques des migrants vieillissants a été proposée et

suivie par les services développement urbain, habitat, politique de la ville, santé, la SEMERCLI, le CCAS, le CLIC, le Conseil général… Plusieurs sessions ont été organisées.

- un diagnostic social a été produit en 2008 dans le cadre de cette formation, articulé sur 4 problématiques : vieillissement, habitat, social, santé. L’objectif était d’accompagner le relogement, à partir des constats de l’inadaptation des solutions de foyers et logements temporaires initialement envisagées pour une partie de ce public.

- un poste d’adulte-relais rattaché à la politique de la ville a été créé : il a une fonction de médiation entre les publics migrants (issus du foyer ADOMA comme de l’habitat indigne de la ville) et les institutions.

Une mobilisation relative des bailleurs sociaux face à des profils différents et moins prioritaires que leur « clientèle » Les organismes d’HLM sont diversement sollicités pour participer aux relogements. Dans certains cas, comme à Roubaix, la convention ANRU leur fixe respectivement un certain nombre de relogements à réaliser (généralement en proportion du patrimoine sur la commune), dans d’autres cas, à Mulhouse par exemple, les relogements se font au coup par coup, en s’appuyant notamment sur l’office communal. Mais, par-delà ces modes d’organisation, c’est la manière affichée par les organismes d’HLM d’appréhender ces relogements qui peut interpeler. En effet, beaucoup de bailleurs ne cachent pas une certaine réticence à réaliser des relogements de ménages issus du parc privé. Pour ces organismes, ces relogements peuvent poser problème à deux titres :

- Du fait du profil des ménages, dont le parcours résidentiel est peu connu et qui interroge donc les bailleurs quant aux capacités du ménage à respecter ses devoirs de locataires, que ce soit concernant le paiement des loyers et charges ou concernant le fonctionnement et l’entretien du logement. Ces inquiétudes apparaissent toutefois disproportionnées, les responsables de relogement ne faisant pas état de difficultés spécifiques, malgré la veille ou le suivi post-relogement qu’ils réalisent généralement ;

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- Du fait des parcours résidentiels de leur propre « clientèle ». En effet, dans le contexte actuel du logement, beaucoup de ménages ne peuvent se loger de manière décente que dans le parc social. Dès lors, se développe aujourd’hui de plus en plus la volonté de créer des parcours résidentiels ascendants à l’intérieur même du parc social. Les organismes d’HLM cherchent donc à utiliser leur parc le plus valorisé – les maisons individuelles notamment – pour loger prioritairement les ménages qualifiés de « plus méritants ». Le fait de casser cette logique de priorisation par le processus de relogements ANRU est donc parfois accepté à reculons, d’autant plus lorsqu’il s’agit de ménages extérieurs à leurs parcs – qui peuvent faire l’objet d’une priorité « quantitative » (trouver un logement) mais pas nécessairement « qualitative » (répondre au mieux aux aspirations résidentielles des ménages).

Ainsi, de la même manière que les organismes de logements sociaux peuvent être hésitants d’un point de vue patrimonial dès qu’il s’agit d’intervenir en quartiers anciens, les bailleurs HLM sont peu volontaires, du point de vue cette fois de leur gestion locative, pour reloger des ménages provenant de ces mêmes quartiers. Localement, c’est donc une démarche d’intéressement de l’organisme qui peut être parfois nécessaire, comme à Clichy, où le PRU a été le motif de faire un « donnant-donnant » avec les bailleurs : des terrains à bâtir contre des relogements dans leur propre parc (5 logements à construire contre 1 relogement).

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CONCLUSION – BILAN DE L’EVALUATION TRANSVERSALE DU TRAITEMENT PAR LE P.N.R.U. DES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES ET PISTES D’EVOLUTION L’analyse transversale des 6 PRU en quartiers anciens dégradés a permis de dévoiler une forte hétérogénéité des sites, mais aussi des intentions et des stratégies qui traversent ces différents quartiers. Cette diversité est d’autant plus remarquable qu’elle est révélatrice de besoins locaux importants et pendant longtemps « frustrés », faute d’outils adéquats pour faire face au niveau de complexité que signifie une intervention dans des quartiers anciens. L’ambition qui anime, par exemple, un projet comme Thiers n’est que très lointainement comparable à celle d’une commune comme Roubaix ; néanmoins, il est remarquable que, pour ces deux communes, le PNRU s’est non seulement révélé comme étant une nécessité, mais aussi comme un facteur d’espoir pour des sites jusqu’ici démunis face à l’ampleur des difficultés auxquelles ils étaient confrontés. Cette notion d’espoir n’est pas neutre : elle témoigne du fait que, pour plusieurs des quartiers étudiés, l’intervention du PNRU a plus ouvert des perspectives nouvelles que résolu par elle-même les dysfonctionnements constatés localement. Certes, la présente évaluation ne saurait prétendre juger de l’impact définitif de ces projets sur les quartiers étudiés : beaucoup de stratégies restent à affiner et de réalisations à mener jusqu’à leur terme, avant que ne puissent être appréciés pleinement les effets de l’intervention du PNRU. Néanmoins, entre les discours entendus de manière répétée se projetant d’ores et déjà dans un « ANRU 2 » et la perception sur le terrain de quartiers aux fonctionnements encore fragiles, il ressort que le besoin d’interventions urbaines et immobilières de grande ampleur devrait persister au-delà du PNRU12. Dans cette perspective, il apparaît donc utile de tirer un certain nombre d’enseignements quant aux modalités d’intervention telles que proposées et mises en œuvre jusqu’ici. En effet, si l’inscription de quartiers anciens dans le PNRU a permis à certains projets de voir leur mise en œuvre s’accélérer voire être rendue possible, certaines limites sont également perceptibles – l’adaptation du « modèle » ANRU au cadre spécifique d’intervention en quartier ancien, la place dévolue aux habitants, la maturité stratégique des projets – et sont à l’origine de plusieurs propositions en vue d’améliorer une intervention jugée unanimement utile et nécessaire.

                                                        12 L’annonce dès 2009 d’un Programme National de Rénovation spécialement dédié aux quartiers anciens dégradés, le PNRQAD, va donc en ce sens, même si de nombreux acteurs localement apparaissent circonspects quant aux moyens dévolus à ce nouveau programme.

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I. INTERETS ET LIMITES DE L’INTERVENTION DU PNRU DANS LES QUARTIERS ANCIENS DEGRADES

Le présent travail n’avait pas pour objectif d’évaluer une thématique particulière de la mise en œuvre des PRU dans les quartiers anciens, mais bien de saisir, à travers une analyse transversale des projets, l’apport éventuel du PNRU au traitement de ces quartiers. Il est ressorti de cette appréhension générale des projets un certain nombre d’éléments concernant :

– les plus-values apportées par l’ANRU concernant la conception et la mise en œuvre des projets : avancées méthodologiques et effet « accélérateur » apparaissent à ce titre comme les bénéfices les plus saillants ;

– les freins opérationnels à la pleine mise en œuvre de ces projets, qu’ils soient liés à l’articulation d’ensemble des outils mobilisés dans le cadre des projets urbains ou, plus spécifiquement, à l’application du mode opératoire du PNRU aux problématiques et spécificités de ces territoires ;

– certaines insuffisances d’ordre stratégique dans la conception des projets, conséquences parfois d’une approche trop strictement urbanistique des besoins locaux, oubliant des « conditions nécessaires » à la réussite des projets : compréhension des besoins sociaux, politique intercommunale de l’habitat, politique éducative, stratégie commerciale, intégration de facteurs structurels (aménagement du territoire, contexte économique)…

Des avancées méthodologiques reconnues, un effet accélérateur réel L’orientation d’une partie des financements du PNRU vers les quartiers anciens dégradés a d’abord permis à plusieurs des projets d’être envisagés sous un nouveau jour. En effet, si beaucoup de villes avaient commencé à réfléchir au devenir de leurs quartiers anciens en amont du lancement du Programme, beaucoup ne pouvaient envisager que des interventions ponctuelles dans le temps, au risque de « diluer » l’impact de ces projets sur les quartiers. Le PNRU a donc été perçu comme une opportunité forte pour dépasser ces interventions diffuses et permettre la réalisation d’un projet d’ampleur. Entre un effet « programme » et un effet « convention », le PNRU est ainsi apparu, dans des sites comme Mulhouse, Roubaix ou Toulon, comme un facteur essentiel de crédibilisation des projets urbains. • Localement, le PNRU est vu comme un moyen de mobiliser un haut niveau de

financement et donc de mener à bien des investissements massifs et complémentaires (en faveur de l’habitat, des espaces publics, des équipements, etc.), à l’échelle d’un ou quelques quartiers, en mesure de générer l’effet levier recherché sur ces territoires.

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• Par ailleurs, le PNRU étant un programme pluriannuel, les projets se sont vus conférer une certaine visibilité dans leurs financements. Cette visibilité est d’autant plus forte que les conventions viennent fixer les délais de réalisation / lancement de chaque opération. Pour des partenaires tels que les investisseurs privés, que les pouvoirs locaux cherchent à mobiliser sur ces quartiers, le PNRU fonctionne donc comme une preuve que le projet n’est pas seulement une intention générale mais bien un projet acté, politiquement porté et décliné selon un calendrier opérationnel précis.

• Parmi tous les outils mobilisés dans le cadre des projets urbains, le PNRU se dégage

par son caractère impliquant pour les acteurs. Les acteurs étant amenés, à travers les conventions PRU, à s’engager en amont du projet sur la réalisation d’opérations, le PNRU joue un rôle de « mise en ordre de bataille » des partenaires. Cette coordination se trouve d’ailleurs renforcée, sur la plupart des sites, par le suivi opérationnel réalisé par les équipes projet – a minima sur les actions financées par l’ANRU, plus largement sur l’ensemble des actions liées au projet urbain.

• En outre, la mobilisation du PNRU pour mener à bien les projets locaux est l’occasion de

monter en ingénierie de projets, que ce soit par la constitution d’équipes dédiées (équipe-projet) avec les recrutements afférents, l’adjonction de compétences extérieures ou la création d’instances partenariales nouvelles.

Bref, à travers ces séries d’engagements et l’accompagnement qui est proposé par le cadre d’intervention de l’ANRU, c’est la crédibilité d’ensemble au suivi proposé, le rythme de réalisations qui s’en trouve « accéléré », conformément à l’expression entendue lors de chaque rencontre. Ainsi, le PNRU permet à la fois de rendre concrètes et intangibles certaines dimensions du projet qui n’étaient jusqu’ici parfois que de l’ordre de l’intention ; mais le Programme permet également de s’assurer que ces interventions seront réalisées sur un temps ramassé et donc que les actions sur l’habitat seront effectivement accompagnées d’interventions sur l’environnement urbain. En cela, le PNRU répond aux attentes qui ont prévalu à sa mise en œuvre dans les quartiers anciens, conformément aux limites identifiées concernant notamment les OPAH-RU. Un « contre-effet programme » renforcé par l’importance des logiques privées dans le fonctionnement des quartiers Pour autant, si les projets urbains bénéficient d’un indéniable « effet programme », force est de reconnaître qu’ils subissent également un… « contre-effet programme ». Cette remarque, il est vrai, a déjà pu être entendue concernant des quartiers d’habitat social ; néanmoins, il apparaît que la translation d’un cadre d’intervention élaboré pour les quartiers d’habitat social à des quartiers dominés par l’habitat privé en accentue l’importance. En effet, pour plusieurs porteurs de projet ou opérateurs, le PNRU propose un cadre d’interventions qui prend insuffisamment en compte la spécificité d’une action publique dans un environnement privé – c’est-à-dire un environnement dont les acteurs sont, pour toute une partie, inconnus des services et mobilisés selon une stratégie de maximisation de leurs intérêts plus que de participation à un projet collectif d’intérêt général, mais aussi un

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environnement poreux à des dynamiques, notamment de marché, sur lesquels les pouvoirs publics n’ont une prise qu’indirecte. • Cet environnement particulier – comparativement à la grande majorité des projets

financés dans le cadre du PNRU – signifie d’être en mesure de faire preuve d’adaptabilité, en fonction de l’évolution de ce contexte, puisque l’ensemble des opérations prévues impliquent généralement des acteurs (propriétaires, investisseurs, occupants, commerçants…) qui ne font pas partie du partenariat initial tel que défini dans la convention. Saisir des opportunités qui se présentent (la cession d’un immeuble), contourner certains obstacles (la surenchère d’un propriétaire), temporiser ou accélérer dans la réalisation de telle ou telle opération (pour éviter par exemple l’arrivée d’offres de logement concurrentes) sont des logiques opérationnelles fondamentales de l’intervention dans un cadre privé qui s’avèrent peu compatibles avec une définition trop précise / trop précoce des opérations à mener et leur traduction dans des maquettes financières souvent considérées comme excessivement rigides.

• Le problème est d’autant plus saillant que les possibilités de négociation offertes par les

avenants sont longues à mettre en œuvre et donc peu adaptées au besoin général de réactivité perçu localement. Ainsi, par-delà la rigidité du canevas initial, c’est plus globalement l’échange entre l’ANRU et ses représentants et les pouvoirs locaux – techniques ou politiques – qui est interpelé sur certains sites, la démarche de projet demandée au niveau local peinant parfois à se traduire dans les relations entre le local et le national.

• Enfin, la courte durée sur laquelle se déroule le PRU (5 ans à compter de la signature

de la convention) est aussi un élément jugé problématique car, si elle garantit une certaine concentration des interventions, elle ne répond pas toujours au besoin de maturation du projet, ni à la nécessité faire fluctuer le rythme des opérations en fonction de l’évolution du contexte local, des négociations lors des acquisitions, des besoins sociaux perçus lors des relogements ou de la complexité technique de certains travaux.

L’application du modèle d’intervention PNRU au cadre spécifique des quartiers anciens dégradés – dont on a noté l’intérêt en termes de « réification » du projet – connaît certaines limites (durée trop brève, réactivité trop lente, rigidité du cadre initial) dans son adaptation à la nature des acteurs et des interventions menées sur ces secteurs. Derrière ces limites, il transparaît comme un décalage entre la culture originelle d’intervention de l’ANRU – surtout construite dans des contextes marqués par une importante maîtrise publique qui permet une anticipation beaucoup plus forte des opérations – et les contextes hétérogènes, sensibles aux dynamiques privées générées par divers facteurs (dynamiques économique et immobilière locales, phénomènes de concurrence intercommunale, évolution des législations nationales…) ; un décalage qui n’est d’ailleurs pas ignoré par l’Agence, puisque celle-ci a déjà procédé à des premiers ajustements dans la manière d’organiser l’intervention du PNRU dans ces quartiers anciens (forfaitisation de certains coûts, objectifs « volumétriques » plus qu’à l’adresse…).

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Des pratiques et des logiques d’intervention à approfondir et combiner Cette question de culture professionnelle ne saurait d’ailleurs se limiter à la seule intervention de l’Agence. Elle se retrouve également, sous des formes diverses, dans les pratiques des organismes d’HLM, voire dans les modalités de mise en œuvre de certains outils mobilisés pour mener à bien le projet urbain. En effet, l’analyse de la mobilisation des organismes d’HLM témoigne également de leurs difficultés à adapter leurs pratiques opérationnelles et de gestion à du bâti ancien, généralement en diffus. Surcoûts des opérations au regard des pratiques d’autres opérateurs plus spécialisés, taille limitée des opérations et dispersion du patrimoine, voire risques juridiques encourus sont autant d’éléments qui incitent les bailleurs sociaux à ne pas se positionner comme des acteurs moteurs des projets urbains de ces quartiers, mais davantage comme des partenaires prestataires des collectivités. Par ailleurs, le problème de logiques d’intervention pas suffisamment adaptées aux besoins des projets locaux n’est pas seulement un problème qui touche les acteurs habitués à intervenir dans les quartiers d’habitat social. Evolution des périmètres de préservation du patrimoine, changement de cibles dans les priorités de l’ANAH, resserrement des critères de défiscalisation Malraux, etc. sont autant de modifications survenues depuis le lancement des PRU en quartiers anciens. Or, ces outils étaient pleinement intégrés à la stratégie urbaine d’ensemble définie ; une stratégie qui se trouve donc fragilisée par une instabilité de plusieurs outils associés au PNRU pour traiter les quartiers anciens. Ainsi, alors que le PNRU présente des modalités d’intervention globalement visibles et pérennes le temps de mise en œuvre du programme, certains de ces outils associés s’inscrivent dans des temporalités distinctes et voient leur efficacité ou leur logique modifiées en fonction de facteurs extérieurs à la bonne tenue du projet d’ensemble. Une approche urbanistique volontariste au détriment d’une stratégie fine pour le territoire Plus globalement, la présente évaluation a permis de constater que, malgré les difficultés opérationnelles rencontrées, un palier avait été effectivement passé en ce qui concerne le traitement urbain des quartiers anciens dégradés. Interventions sur les voieries, réhabilitation voire création d’équipements, espaces publics, etc., sont autant d’interventions qui accompagnent désormais le traitement de l’habitat dans ces quartiers. En cela, il y a bien un renforcement de la stratégie d’ensemble, avec une plus forte intégration (perfectible encore) des dimensions urbaines et immobilières. Cependant, la prise en compte de la dimension urbaine peut parfois aller jusqu’à réduire l’appréhension de ces quartiers à une stricte approche urbanistique et mécaniste, centrée sur l’intervention « bâti », en pensant que des opérations immobilières et/ou d’aménagement vont produire les évolutions souhaitées en termes de représentations, peuplement, pratiques… L’ambition de normalisation / revalorisation / exploitation du potentiel des quartiers, renforcée par l’opportunité financière que représente le PNRU, a pu précipiter la mise en œuvre de projets insuffisamment construits sur une analyse fine :

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des rôles que peuvent jouer ces quartiers, notamment d’un point de vue social, mais aussi de leur insertion dans un environnement plus large, lui-même animé par des dynamiques qui influent sur le fonctionnement et l’attractivité de ces quartiers. En effet, ces quartiers font l’objet d’une intervention massive de la part des pouvoirs publics parce qu’ils concentrent notamment des publics fragiles. Or, ces publics habitent généralement ces quartiers car ils y trouvent une offre de logements par défaut. Or, force est de reconnaître que les besoins en logement spécifiques qu’exprime l’existence même de tels quartiers apparaissent insuffisamment pris en compte dans la stratégie d’ensemble :

• Le niveau de production de logements sociaux, comparativement au parc total de logements ne devrait, dans la plupart des cas, que faire fluctuer de manière assez marginale la part des logements sociaux dans ces quartiers. C’est le conventionnement de logements privés (pour une durée légale de 9 ans) qui est souvent privilégié, alors que certaines communes font le choix de développer principalement l’offre de logements intermédiaires afin d’attirer des populations moins fragiles. A moyen-long terme, il y a donc un risque (voire les premiers signes) que la gentrification, qui constitue souvent un des objectifs du projet, ne soit pas un processus maîtrisé, à cause d’une anticipation insuffisante des tendances ségrégatives que génère une reprise forte des marchés immobiliers. Bref, il est parfois à craindre que le quartier ne conserve son caractère social que le temps de la sortie des opérations mais que, une fois celles-ci réalisées, le renouvellement de population ne s’accélère au détriment des populations les plus modestes ;

• Le déplacement des problématiques sociales sur d’autres secteurs de la ville est également le signe de la nécessité d’appréhender plus globalement la problématique de l’habitat indigne et l’enjeu d’une réponse adaptée aux besoins sociaux des habitants de ces quartiers. Dans plusieurs quartiers, les projets urbains participent bien de la démarche de déconcentration des fragilités, mais n’intègrent que rarement les effets d’éparpillement voire de leur reconcentration des ménages vulnérables dans d’autres secteurs.

Derrière cette question du déplacement des difficultés se pose plus largement la question de l’insertion du quartier dans un territoire plus vaste dont les évolutions influent parfois fortement sur le fonctionnement de ce quartier. Or, cette appréhension « multi-échelle » des tenants et aboutissants du projet, de l’agglomération au quartier, est à ce jour trop peu travaillée en amont du projet pour ne pas fragiliser les investissements consentis au titre du développement commercial, de l’immobilier, de la politique éducative, etc. S’il est remarquable que les intercommunalités de la plupart des sites visités émergent voire montent en compétences, elles ne sont encore que trop rarement impliquées dans la stratégie de requalification de ces quartiers. Sans cela, les projets s’exposent à ne pas disposer des conditions structurelles nécessaires pour que les interventions sur le cadre « bâti » puissent produire les effets attendus : une politique de mixité sociale et de diversification de l’habitat dans tout le bassin de vie, une démarche d’équilibrage de l’offre commerciale (restriction des surfaces en périphérie au bénéfice du commerce de

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proximité…), une convergence fiscale des communes, une connexion du quartier aux transports publics…

* * * * *

En résumé, l’application du PNRU aux quartiers anciens dégradés a aidé les pouvoirs locaux à franchir une nouvelle étape dans le traitement de ces secteurs face auxquels ils ont pu souvent être démunis. Cette nouvelle étape a consisté, conformément aux besoins identifiés en amont du lancement du PNRU, à renforcer la réalisation parallèle d’opérations d’amélioration de l’habitat (requalification d’îlots dégradés, OPAH-RU, ORI, RHI…) et d’opérations d’aménagement. Ces interventions ont ainsi permis des améliorations parfois notables, parfois plus ponctuelles, du cadre « bâti » de ces quartiers, tant du point de vue urbain qu’immobilier. Malgré ces améliorations, plusieurs interrogations persistent quant à la pertinence de certaines stratégies développées localement pour requalifier durablement ces quartiers. Les insuffisances en termes de prise en compte de la place et des besoins des habitants, de neutralisation des phénomènes de concurrence territoriale ou d’intégration des effets sociaux à moyen-long terme de la requalification de ces quartiers, s’ajoutent ainsi à des difficultés plus opérationnelles et organisationnelles telles que des cultures professionnelles peu adaptées à ces contextes particuliers ou une instabilité des financements combinés au PNRU. Plusieurs évolutions des modalités d’interventions de l’ANRU dans les quartiers anciens dégradés peuvent cependant être envisagées afin de rendre les investissements consentis plus efficaces et plus pertinents au regard des besoins importants de ces sites. II. ENJEUX ET PISTES D’EVOLUTION Les limites observées dans la mise en œuvre des projets urbains qui bénéficient du PNRU appellent à ajuster les modalités d’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens dégradés, mais aussi à parfaire les stratégies et l’articulation des outils mobilisés pour ces projets. Trois besoins, complémentaires, ressortent ainsi plus particulièrement de cette évaluation transversale : • Renforcer la maturité des projets locaux, de manière à inscrire le projet urbain dans

un véritable projet de territoire ;

• Apporter plus de flexibilité au déroulement des projets urbains, pour s’adapter aux spécificités de l’intervention dans un cadre privé ;

• Développer la transversalité de l’action publique, afin d’assurer la complémentarité des interventions sur ces quartiers

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Plus de maturité dans la définition des projets locaux Rompre avec des approches parfois volontariste et mécanistes nécessite de sortir d’une logique qui revient parfois à juxtaposer les interventions. Pour cela, il est nécessaire de mieux prendre en considération les différentes échelles dans lesquels s’insèrent les quartiers. Cela doit notamment permettre d’identifier dans quelle mesure une intervention sur le cadre « bâti » pourrait être : mise à mal par d’autres interventions sur le reste du territoire (expl : développement d’une offre commerciale en périphérie), contrecarrée par l’absence de politiques globales à une échelle plus large (expl : PLH engageant en termes de mixité sociale ou de réponse aux besoins spécifiques de logement) ou accompagnée renforcée par l’activation d’autres leviers (expl : travail sur la sectorisation scolaire). L’élaboration, aux échelles pertinentes, de diagnostics ainsi que des études stratégiques à visée prospective (étude de démographie scolaire, qualification de la demande potentielle, analyse de l’offre globale de commerces…) pourrait constituer des étapes obligatoires en amont de la constitution des dossiers d’engagement et au fil du projet, et être pour cela en partie financées par l’Agence (cf. mission d’ingénierie du PNRQAD ou études pré-opérationnelles de l’ANAH). Outre ce travail de connaissance et de formulation des enjeux locaux présents et à venir, d’autres conditions préalables pourraient être ajoutées à l’octroi des financements, notamment en ce qui concerne la cohérence de la politique intercommunale (servitude de mixité sociale, cohérence SCOT et PLU…). Plus de flexibilité dans le déroulement du programme La nature programmatique du PNRU favorise la crédibilité du projet et offre des « garanties » en termes de réalisation ; néanmoins, il paraît nécessaire d’accompagner cet effet programme par une certaine flexibilité dans la mise en œuvre de projets se déroulant sur des sites peu maîtrisés par la puissance publique. Il s’agit, à travers cela, de favoriser la maturation stratégique sans que cela ne soit pénalisant pour les sites qui cherchent à approfondir leur stratégie (et limiter ainsi la sollicitation « opportuniste » du programme) et de développer une approche opérationnelle qui vise à répondre à l’esprit du projet d’ensemble en saisissant les opportunités qui émergent localement (et poursuivre ainsi la dynamique de projet entre le local et le national une fois le dossier validé par l’ANRU). Inscrire le programme dans une temporalité plus longue apparaît comme une condition importante pour faire de l’élaboration des projets (cf. supra l’objectif de mieux intégrer certaines dynamiques) un véritable temps d’échanges et d’approfondissement plus qu’un temps de formalisation d’intentions urbaines. Cela peut également aider à ne pas précipiter certaines interventions, afin notamment de donner aux pouvoirs locaux et opérateurs plus de souplesse dans les négociations avec les acteurs privés, d’adapter le rythme des livraisons de logement en fonction de l’évolution des marchés immobiliers locaux, mais aussi de saisir l’occasion du relogement pour enclencher un véritable travail d’accompagnement et d’insertion. Ces évolutions signifient par ailleurs qu’il s’agit moins d’enfermer chaque opération dans un calendrier et un financement, que de poser des objectifs plus généraux devant être respectés dans certains délais et dans le cadre d’une certaine

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enveloppe budgétaire. A défaut, d’un fonctionnement plus fongible des budgets, il s’agirait de mettre en place des procédures de révision assouplies et accélérées des projets. Plus de transversalité dans l’action publique Si le traitement des quartiers anciens dégradés par le PNRU a permis de renforcer ce volet à l’intervention publique sur ces sites, il est nécessaire désormais d’assurer un juste équilibre entre les approches urbaines, immobilières et sociales. Globalement, cela signifie mieux prendre en compte les besoins des habitants dans l’élaboration et la mise en œuvre des projets, mais aussi consolider la complémentarité de dispositifs utilisés au service d’une stratégie d’ensemble. Afin de répondre à ces enjeux, il est tout d’abord nécessaire de renforcer la cohérence des actions en « sanctuarisant » le fonctionnement des dispositifs associés dans le cadre d’un PRU (en termes de publics cibles et de niveaux de financement) afin qu’une stratégie d’ensemble ne se trouve fragilisée en cours de route par l’évolution d’un de ses éléments. Par-delà cette condition, passer du projet urbain au projet de territoire signifie développer la transversalité et la coordination du travail mené par les 3 agences :

– l’ANRU dont l’intervention se caractérise parfois par une approche trop « urbanistique » ;

– l’ANAH dont les outils mobilisés ne s’inscrivent pas nécessairement dans une démarche de projet ;

– l’ACSE dont les ambitions en termes de place des habitants et de réponse aux besoins sociaux sont parfois fragilisées par des objectifs opérationnels ou de revalorisation urbaine.

Pour développer ce traitement plus transversal des projets, il pourrait s’agir de faire émerger un suivi collectif par les trois agences des projets locaux – conformément d’ailleurs au schéma-type attendu pour les acteurs locaux. Pour cela, la mise en place de chargés de mission territoriale dans chacune agence (cf. « CMT » de l’ANRU) serait un premier facteur favorable à l’échange entre les agences et donc au renforcement de l’approche intégrée dans l’intervention sur ces quartiers.

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* * * * * * En conclusion, l’évaluation transversale du traitement par le PNRU des quartiers anciens dégradés permet de confirmer l’idée que l’intervention du PNRU se confronte, dans ces quartiers anciens, à un contexte nouveau, dominé par les dynamiques privées plus que par la maîtrise publique et par un cadre bâti à la fois riche patrimonialement et complexe à traiter techniquement. Pour autant, malgré ces spécificités, il convient de noter que certains bénéfices et limites de l’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens évoqués dans ces pages ne sont pas des constats nouveaux : gain en crédibilité et capacités organisationnelles, stratégies perfectibles de requalification ou précipitation dans l’élaboration et la mise en œuvre de certains projets sont effectivement des conclusions qui ont déjà pu être faites par ailleurs. Néanmoins, s’il n’y a pas de nouveauté réelle dans ces constats, ces bénéfices et limites s’expriment avec une intensité particulière dans ces quartiers. La mobilisation des acteurs privés, non intégré dans un cadre partenarial mais moteur essentiel de la requalification, rend en effet indispensable un positionnement fort et structuré de la puissance publique pour rassurer ces investisseurs face au contexte déprécié de ces sites ; mais les pouvoirs publics doivent également être en mesure de faire évoluer leurs interventions, en fonction des positions prises incertaines de ces multiples acteurs privés, des constats techniques découverts lors des opérations ou des changements de contexte (économique, immobilier) auxquels ces quartiers sont sensibles. Ainsi, si la puissance d’intervention permise par le PNRU paraît devoir être maintenue, sa mobilisation mériterait quant à elle d’être assouplie afin de composer davantage avec le contexte et les dynamiques locales. Cette nécessaire adaptation du modèle d’intervention de l’ANRU à ce cadre ancien et privé ne saurait toutefois être menée à sens unique. En effet, une autre spécificité de l’intervention du PNRU dans ces quartiers anciens vient du fait que le PNRU est une composante du projet plus qu’un « guichet unique » ou le cadre ensemblier de l’action sur ces quartiers. Dès lors, la pleine réussite des projets locaux passe par un renforcement des articulations entre les divers outils mobilisés, que ce soit en adaptant les modes d’intervention du PNRU à ce contexte privé mais aussi, en renforçant l’intégration de ces divers outils à une démarche de projet que le PNRU a permis d’affirmer localement. Ainsi, ces premières expériences d’intervention de l’ANRU dans les quartiers anciens témoignent de l’utilité d’un appui fort pour aider les collectivités locales à faire face aux enjeux sociaux et urbains qui touchent ces quartiers. Mais elles illustrent également à quel point la pertinence et l’efficacité des interventions menées sur ces quartiers ne pourront être trouvées qu’en s’appuyant sur une connaissance approfondie des dynamiques qui interfèrent sur le développement de ces quartiers et en dépassant un certain cloisonnement des modes d’interventions des uns et des autres, notamment des trois agences nationales – ANRU, ANAH, ACSE – sollicitées pour donner un nouvel avenir à ces quartiers.

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