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Societe d’Etudes Latines de Bruxelles L'élément religieux dans les poésies de Catulle Author(s): Marcel Renard Source: Latomus, T. 5, Fasc. 3/4 (JUILLET-DÉCEMBRE 1946), pp. 351-357 Published by: Societe d’Etudes Latines de Bruxelles Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41516555 . Accessed: 15/06/2014 19:55 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Societe d’Etudes Latines de Bruxelles is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Latomus. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.34.79.101 on Sun, 15 Jun 2014 19:55:50 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'élément religieux dans les poésies de Catulle

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Societe d’Etudes Latines de Bruxelles

L'élément religieux dans les poésies de CatulleAuthor(s): Marcel RenardSource: Latomus, T. 5, Fasc. 3/4 (JUILLET-DÉCEMBRE 1946), pp. 351-357Published by: Societe d’Etudes Latines de BruxellesStable URL: http://www.jstor.org/stable/41516555 .

Accessed: 15/06/2014 19:55

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L'élément religieux

dans lee poésies de Catulle

Parmi les thèmes qui ont inspiré Catulle, la religion passe pour n'avoir tenu qu'une place peu considérable. En effet, l'amant de Lesbie semble bien avoir été un esprit fort peu religieux et la plu- part de ses commentateurs considèrent comme évident qu'il n'a guère été sensible qu'au charme de la fiction mythologique.

Une fréquentation déjà longue du poète nous a cependant con- vaincu que les éléments de son œuvre qui touchent à la religion méritent une attention plus grande que celle qu'on leur accorde généralement. Nous voudrions en esquisser ici la démonstration en attendant de pousser les recherches dans le détail.

Sans prétendre faire de Catulle un mystique, nous montrerons brièvement qu'il a éprouvé une vive curiosité pour le phénomène religieux et que, tout incroyant qu'il fût, il a, sous l'empire de certaines circonstances, éprouvé intensément le besoin de chercher un appui au delà de l'humain.

Bien que ni la mention des divinités du panthéon antique ni leurs attributions non plus que le rôle qu'elles jouent ne soient les plus suggestifs à cet égard, il convient cependant d'en dire quelques mots au début de cet exposé.

Beaucoup parmi les plus considérables des dieux gréco-romains portent un nom latin : Iupiter, luno, Sol , Diana [Latonia 0, Lu- cina, Luna , Triuia], Venus , Liber , Neptunus, Orcus. Ce sont pour- tant des traits helléniques qui se trouvent souvent évoqués à leur propos. Minerve n'est même mentionnée que comme l'habitante d'Itone (64, 228), la protectrice d'Athènes (64, 222 et 229), la déesse du Triton (64, 395). A côté de Sol (63, 39 et 64, 271), nous rencon- trons Phoebus. Diane est essentiellement la divinité née au pied de l'olivier délien ; sous l'influence grecque (2) elle est identifiée à Ju-

(1) Premier emploi (34, 5) de cette forme adjective. (2) Cf. Cic., De nat. deor., 2, 68.

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non Lucine comme Ilithyia à Artémis et sa dénomination de Triuia rappelle la Tqioôï riç hellénique (poème 34). De même que Théocrite (7, 116) identifie Diônè et Aphrodite, pour Catulle (56, 6) Diona n'est autre que Vénus. Cette dernière est si bien l'Aphrodite alexandrine qu'elle est conçue, comme elle, sous ses divers aspects : de là les pluriels du type Veneres Cupidinesque (3, 1 et 13, 12). Elle est la déesse d'Uries en Apulie et d'Ancone, mais elle est aussi celle d'Idalie, d'Amathonte, de Golges, de Cnide, de Durazzo et de l'Eryx (36, 12-15 ; 61, 17 ; 64, 72 et 96 ; 68b, 11-51). Le Latin Liber erre au sommet du Parnasse, il conduit le cortège des Thya- des, Delphes est l'un des principaux centres de son culte (64, 390- 393) ; il est le fils de Thyoné (27, 7), le florissant Iacchus, menant un thiase qui n'a rien d'italique (64, 251 sqq.). La mention de Nep- tune avec la savante distinction de son rôle de dieu des eaux marines et de divinité des sources, des rivières et des lacs 0 est également alexandrine. Si nous rencontrons le nom d'Orcus plutôt que celui de Pluton, il n'en est pas moins vrai que l'évocation des Enfers est fréquente dans la littérature grecque et que lorsque Catulle décrit, comme le dira Ronsard après lui,

[Le] lieu d'où plus on ne retourne,

mainte expression du poète latin rappelle les Alexandrins (2). D'ail- leurs, c'est encore un procédé de la poésie alexandrine que celui de la métonymie, même quand il s'agit de noms latins (cf. 4, 20 ; 63, 36 ; 86, 6, etc.). Et quand nous voyons le poète attribuer au dieu de la guerre l'appellation archaïque de Mauors (64, 394), ce n'est pas qu'il veuille insister sur son caractère romain puisqu'il le cite après avoir mentionné, à propos de Bacchus, le Parnasse et Delphes, et qu'aussitôt après il nomme la Tritonis era et la « vierge de Rham- nonte » : donc ici encore nous ne quittons guère l'ambiance hellé- nique d'autant plus que Catulle a pu songer aux interventions d'Arès et d'Athèna dans V Iliade (cf. 5, 430 et 461 ; 11, 713). C'est par conséquent la qualité archaïque et poétique du mot (8) qui le

(1) Cf. L. Delatte, Vterque Neptunus dans L'Antiquité Classique, t. 4 (1935), pp. 45 sqq.

(2) Cf. Catulle, 3, 11 sqq. et Théocrite, 12, 19 et 17, 120, Anth. Pal ., 7, 199, 4 ; 7, 203, 4 ; 7, 211, 4, etc.

(3) Cf. Paul-Festus, p. 147 M.

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l'élément religieux dans LES POÉSIES DE CATULLE 353

lui a fait retenir sans compter que cette forme lui permettait une allusion étymologique (x).

Si ces considérations que nous avons voulues très brèves (2) n'avaient d'autre but que de rappeler combien Catulle distingue peu les dieux grecs des dieux romains, elles ne présenteraient guère d'utilité. Il n'était pas mauvais toutefois de les renouveler pour re- mettre quelque peu l'accent sur le fait que notre auteur a prêté une vive attention aux divinités du panthéon antique et à certains de ses aspects particuliers, surtout helléniques. Et il n'y avait pas là que le souci d'érudition d'un poète savant, nourri d'œuvres alexan- drines et désireux d'étoffer son œuvre au moyen d'évocations my- thologiques plus ou moins brillantes, plus ou moins rares. La cu- riosité pour le phénomène religieux le poussait aussi : la preuve en devient manifeste si Ton considère les mentions des cultes orien- taux contenues dans son œuvre et la façon dont il parle de ceux-ci.

Sans doute devons-nous négliger l'allusion au temple de Jupiter Ammon (7, 5), issue probablement d'une source alexandrine. Peut-être doit-il en être de même pour Harpocrate, cité comme le symbole de la discrétion (74, 4 et 102, 4). Mais nous voyons ailleurs Catulle, à une époque où précisément les religions orientales enva- hissent Rome, se montrer bien au fait de certaines d'entre elles. Ainsi, le culte de Sérapis (10, 26), dont il nous révèle le succès dans le milieu des affranchies qu'il fréquente. Il est en outre le premier auteur latin à parler de Priape (8), installé depuis peu dans la capi- tale romaine. Dans le poème 47 (v. 4), le dieu de Lampsaque est simplement cité pour stigmatiser les obscènes débauches de Pison, mais dans une priapée transmise par Terentianus Maurus (2754) il nous apparaît comme le dieu des jardins en conservant sa natio- nalité d'origine, pontique, en même temps que sont rappelés ses temples des rives de la mer Noire. Et n'oublions pas que Catulle avait sans doute traité plusieurs fois le sujet (cf. Nonius Marcellus, p. 134 M). Faut-il mentionner aussi le poème 63, parfois bien mal

(1) Cf. Cic., De nat. deor.f 2, 26, 67 et 3, 24, 62. Avec ce passage de Catulle on comparera Lucrèce, 1, 32 et 473.

(2) Ainsi que nous l'avons dit, nous nous sommes limité aux principaux dieux. Le relevé des divinités secondaires et surtout des mythes héroïques ne ferait que montrer davantage, comme on sait, les traits helléniques du pan- théon catullien.

(3) Cf. Varron, Ant . rom., fr. 59.

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jugé? Écrire, en effet, comme René Pichón (*) que « l'idée d'ana- lyser les sentiments que peut éprouver Attis après sa mutilation n'est pas... d'un goût très sain », c'est apprécier l'œuvre d'un faux point de vue, d'après la mentalité moderne, sans comprendre, comme Catulle a su le faire, la sensibilité d'un mysticisme exacerbé que contribue à traduire le vertige du mètre galliambique. Grâce à son tempérament passionné, le poète a justement saisi la propension orientale pour les religions à mystères, les transes collectives qu'exacerbent les musique rituelles. Il en a compris toute la fré- nésie sacrée. Il a perçu comment, dans ces pratiques, la personna- lité s'abolissait et se dissolvait dans l'ensemble du corps des fidèles en même temps qu'elle se vivifiait de l'exaltation commune. C'est aussi l'émotivité de sa nature qui rend Catulle apte à traduire, avec quelque chose du souffle qui anime l'œuvre d'Euripide, la délirante agitation des Bacchantes et leurs transports orgiaques (64, 54 sqq.) dans ce qu'ils ont de plus mystique et de plus oriental, allant jusqu'à rendre par les sonorités du vers les sourds accents des tambourins, le tintement aigu des cymbales, les rauques mugisse- ments des cors et les notes stridentes de la flûte (64, 261-264) (2). Il vaut aussi la peine de relever que toutes ces évocations sont posté- rieures au séjour en Bithynie : c'est au cours de son voyage dans le Proche-Orient que Catulle les a saisies sur le vif.

Jusqu'ici il n'a guère été question que de la curiosité de Catulle à l'égard des religions. Nous n'avons rien dit de ses propres croyan- ces. Évidemment, il est clair que le poète ne croit plus aux dieux du panthéon gréco-romain ; les Veneres alexandrines, des invoca- tions irrespectueuses au possible comme celle de Diona au milieu de tel poème grivois (56, 6), la façon dont sont rappelées les infi- délités de Jupiter (68, 98/138 sqq.) et bien d'autres exemples le démontrent. Mais c'est là trancher de manière trop sommaire. En effet, ce que nous venons de dire à propos de la façon dont Ca- tulle traite de certains cultes orientaux prouve à tout le moins déjà la faculté de comprendre, sinon de partager l'émotion religieuse. Quelques bons critiques d'ailleurs se sont bien rendu compte que, même en parlant de ces dieux dans lesquels il n'a plus foi, Catulle « s'émeut des mythes » (8).

(1) Histoire de la littérature latine (Paris, 1897), p. 290. (2) Cet endroit n'est pas le seul du poème 64 sur lequel il y aurait beaucoup

à dire : cf. entre autres passages les vv. 384-408. (3) L'expression est d'Albert Grenier, Le génie romain (Paris 1938), p. 275.

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L'ÉLÉMENT RELIGIEUX DANS LES POÉSIES DE CATULLE 355

Il convient aussi de se demander dans quelle mesure ce sceptique est libéré des contraintes, quand il parle de présages, du mauvais œil ou de croyances analogues, et le cas est fréquent même pour un auteur ancien. N'oublions pas qu'il avait écrit un ouvrage sur les incantations amoureuses (1). Était-ce là pure recherche, unique- ment un poème didactique?

Quoi qu'il en soit, certaines de ses œuvres nous le montrent très

respectueux du culte, et précisément du culte romain. Au fond, ceci n'est pas pour surprendre, car si on a peut-être trop répété que notre poète est grec par certains aspects de son art, on n'a pas assez dit qu'il est resté profondément romain de tempérament. Si les personnalités du monde divin, telles que les lui présente le mythe, n'emportent pas son adhésion, il est beaucoup plus sen- sible aux valeurs symboliques du culte.

Le gracieux épithalame 61 en est un excellent exemple. Nous n'avons pas à démontrer à nouveau comment les souvenirs grecs s'y intègrent harmonieusement aux traits spécifiquement romains. Ce qui importe ici, c'est de noter dans ce poème la gravité de ton qui s'y rencontre chaque fois qu'il y est question de notions cul- tuelles romaines, même au milieu des évocations les plus riantes et à côté de plaisanteries parfois scabreuses. La Vénus du poème 61 n'est plus la légère et floue déesse alexandrine ; elle apparaît bien plutôt comme le symbole des légitimes amours et cette conception n'est pas sans rejoindre par certains aspects celle de Lucrèce.

L'hymne à Diane (poème 34) confirme cette façon de voir. Tout en comportant, comme nous l'avons rappelé plus haut certains traits helléniques, cette œuvre présente les caractéristiques d'une composition destinée à une cérémonie religieuse romaine. Nous ne pouvons naturellement dire si elle a été effectivement chantée, mais en tout cas elle a au moins été composée en corrélation avec une fête en l'honneur de Diane (2). Il s'y trouve une sorte de sin- cérité poétique qui en fait tout autre chose qu'un exercice litté- raire. Nous serions tenté d'y voir un « sérieux» procédant d'une attitude de l'esprit assez semblable à celle qu'Horace adoptera plus d'une fois.

Cette attitude de Catulle - nous la dirions volontiers cérébrale -

(1) Pline, N. #., 28, 19. (2) Cf. Rev . des études latines , t. 8 (1930), pp. 211-212 (L. Herrmann). Latomus V. - 22.

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transparaît en d'autres circonstances, ainsi dans la façon dont il parle de Fides (cf. 30, 11). Dans ce cas, il y a même une sincérité d'accent qui naît de la grande valeur morale conférée par le poète à la sincérité de la parole donnée (cf. 109, 6). Il est aussi très carac- téristique qu'il s'agisse en l'occurrence d'une entité abstraite.

Où le sentiment intervient encore, c'est à propos du foyer. Il ne pouvait en être autrement chez un poète aussi romain au fond que Catulle et attaché autant qu'il l'était aux joies et aux affections familiales. Aussi est-ce bien plus ce milieu tendrement aimé que le Lare protecteur lui-même que nous trouvons évoqué lors du joy- eux retour à Sirmio (poème 31).

Cet amour des siens, ainsi qu'on sait, a dicté au poète les vers émouvants dans lesquels il a rappelé la mort de son frère. Ici en- core, c'est le sens de la tradition plus qu'une foi déterminée qui nous a valu le chef-d'œuvre Multas per gentes ... (poème 101), avec ses sobres formules rituelles et la simplicité dépouillée de sa douleur contenue (*).

Le problème de l'au-delà n'a d'ailleurs pas été sans préoccuper Catulle. Le poème 3, quand il évoque les Enfers, est sans doute loin de graves préoccupations. Dans le poème 5 déjà, le vieux motif de la brièveté de la vie et de l'éternité du néant devient comme un adjuvant du plaisir, un adjuvant non dépourvu d'amertume... Mais c'est son amitié pour Calvus qui devait dicter à Catulle ses plus beaux vers sur la mort (poème 96) : le début de cette con- solation sur la perte de Quintilia est tout plein de l'incertitude de l'au-delà.

Cependant son poème le plus profondément religieux, Catulle le tirera de son amour meurtri. Le tourment et le désespoir de son cœur saignant feront retrouver à ce sceptique les accents les plus profonds. Le poème 76, Si qua recordanti ... contient en effet des élans comme en ont eu peu d'esprits infiniment plus religieux. Ces vers, d'un mouvement venu tout entier du cœur et dans les-

(1) Tennyson, Fretter Ave atque Vale , a bien compris l'âme catullienne quand sa mémoire lui rappelait le poème 101 précisément à Sirmio, où s'élevait la maison de campagne de la famille de Catulle :

There to me thro' all the groves of olive in the summer glow, There beneath the Roman ruin where the purple flowers grow, Came that « Ave atque vale » of the Poet's hopeless woe, Tenderest of Roman poets nineteen-hundred years ago.

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quels on sent les forces humaines arrivées à leur limite, contiennent l'appel le plus désespéré, le plus angoissé qui ait jamais jailli d'une âme douloureuse. Trahi dans sa passion, défaillant, le poète, dans sa faiblesse et sa souffrance, ne trouve plus que la prière. Prière d'autant plus émouvante qu'elle vient d'un homme depuis long- temps sans foi déterminée et qui veut malgré tout chercher un appui au-delà de l'humanité.

De même Pétrarque, longtemps déjà après la mort de Laure et pour s'arracher à l'obsession de son souvenir, invoquera l'aide de la Vierge. Mais le pressant appel de Catulle, pour être un cri de souffrance arraché du cœur par la pensée d'une vivante, pour jaillir d'une âme sans foi précise, n'est-il pas infiniment plus tra- gique?

Ainsi, bien loin de n'avoir attaché aux mythes qu'une valeur poétique, Catulle a fait preuve à leur propos d'une réelle curiosité. Celle-ci s'est notamment manifestée à l'égard des religions orien- tales, dont il a bien saisi l'esprit, et ici son voyage en Asie Mineure a été déterminant. Nous le voyons aussi montrer pour le culte romain un attachement cérébral conditionné non par la croyance, mais par le sens de la tradition. Il arrive même que, chez ce poète du cœur, ce qui n'est qu'une attitude de l'esprit se teinte souvent de sentiment. Et c'est précisément l'influence de ses sentiments - affection fraternelle, amitié pour Calvus, amour trahi - qui a dicté à Catulle les plus beaux de ses poèmes dans lesquels l'élément

religieux occupe une place de quelque importance.

Bruxelles . Marcel Renard.

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