Les Cafés géographiques à Meudon le 8 octobre 2016

Une balade de Bellevue à Vélizy et Meudon-la-Forêt

La terrasse de Bellevue

La terrasse de Bellevue nous offre un aperçu du paysage parisien, au-delà du méandre de la Seine et de l'île Séguin : de

gauche à droite, soit du nord-ouest au sud-est, le mont Valérien, la Défense, le Trapèze de Boulogne, la tour Bouygues

au pont du Garigliano.

Un panorama décrit par Armand Frémont : « Beauté d'un grand méandre de la Seine au dessin d'une parfaite pureté,

avec ses longues îles alluviales comme l'île Seguin et l'île Saint-Germain, son lobe convexe en partie basse au coeur de

l'amphithéâtre, ses coteaux, ses belvédères et ses boisements tout autour de la rive concave, le tout comme dans un

parfait traité de géographie classique. Beauté supérieure, depuis les meilleurs points de vue, d'un panorama presque

sans limite vers l'est jusqu'à la capitale, à faire rêver les princes et les princesses sur les terrasses du XVIII e siècle ou

les premiers conquérants de l'espace au XIXe siècle dans leurs aérostats », in préface de Billancourt et ses îles, Histoire

d'un site, 1994.

Source : Atlas des paysages et des projetsurbains des Hauts-de-Seine, État-Conseild’architecture, d’urbanisme etd’environnement des Hauts-de-Seine,http://www.paysages.hauts-de-seine.developpement-durable.gouv.fr

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Géographe et meudonnais, Jean Muracciole nous explique un siècle et demi d'évolution industrielle :

Une zone industrielle au XXe siècle : nombreux constructeurs automobiles dont Chausson, Renault qui s'implante dans

l'île Séguin puis au Bas Meudon dans les années 1920, Citroën à Javel, cartoucherie Gévelot et usine d'incinération des

déchets d'Issy-les-Moulineaux, magasins militaires de l'île Saint-Germain, avec des immeubles taudifiés du Bas-

Meudon, le tout rythmé par les sirènes des usines dans lesquelles travaillèrent Simone Weil et Chou en Laï.

Evolution vers le tertiaire supérieur au XXIe siècle : installations de sièges sociaux, concurrentiels de la Défense ; le

chantier de construction de la cité de la musique dans l'île Séguin est bien visible de la terrasse de Bellevue.

La recherche scientifique : le bâtiment du CNRS, établissement hydrothermal au XIXe siècle, puis école d'Isadora

Duncan, voué aux recherches style concours Lépine dans les années 1920, puis à la recherche fondamentale, à l'étude

du froid, aujourd'hui délaissé et convoité par les promoteurs.

Carrières pour l'exploitation du blanc de Meudon et des champignonnières, dans des terrains inconstructibles mais

là aussi convoité par les promoteurs, du côté de la colline Rodin.

Coupe géologique de la colline Rodin

Source : Galoyer A., La Géologie à Meudon, Bulletin de l'information géologique du Bassin parisien,, vol. 27, n°4, pp. 5-6, in

Comité de sauvegarde des sites de Meudon, n°131, juin 2012, p. 6.

De haut en bas :

La meulière de Montmorency (altitude de la forêt : 170 m) surmonte 40 m d'épaisseur de sable de Fontainebleau (de

120 à 160 m d'altitude), anciennement utilisé dans les verreries du Bas-Meudon. Le calcaire grossier du lutétien

(altitude 60 m) était exploité en carrières à ciel ouvert ou souterraines. L'argile plastique du sparnacien a servi à la

construction de l'Orangerie. La craie du crétacé supérieur (altitude 40 m) était exploitée dans des carrières souterraines

pour le blanc de Meudon. 2

Un domaine royal proche de Versailles devenu centre de recherche

Entre Versailles et Paris, devant beaucoup à Louvois et à Le Nôtre, la Grande Perspective, une des plus longues et des

plus méconnues du XVIIe siècle, reste un élément structurant. Domaine classé, l'avenue du Château abrite quelques très

belles villas réservées à des fortunés du monde du cinéma ou du sport, sur des hauteurs tranquilles à 10 mn en train de

la gare Montparnasse. Passent ici les ombres de Wagner, du physicien Planté, des Russes blancs, du thomiste Maritain,

de Jules Verne et de son éditeur Hetzel, du mécène Gabriel Thomas.

La IIIe République a offert ce magnifique domaine royal aux astronomes et aux chercheurs en aérodynamisme.

Morcelée et défigurée, la Grande Perspective se cache au regard du promeneur, qui pourra se souvenir du passé

aéronautique et des dirigeables devant le hangar Y, déplorer la quasi destruction des châteaux de Meudon et admirer, de

la grande terrasse, l'incomparable vue sur Paris.

S'asseyant à l'ombre des marronniers, le lecteur aura le choix entre Les Liaisons dangereuses : Choderlos de Laclos fut

officier d'artillerie sur la terrasse lors de la Convention, et Rigodon, dernier roman de Céline, qui mourut le jour même

du point final non loin d'ici, route des Gardes, en 1961. A moins de se plonger dans les Mémoires de Saint-Simon, qui

habita le Château Neuf après la mort du Grand Dauphin.

Le vallon de Meudon photographié par Emmanuel de Martonne, après 1897. Source : MédiHAL, Centre pour la communication scientifique directe (CCSD), Centre national de la recherche scientifique.

Cette visite doit beaucoup aux travaux de deux associations, Les Amis de Meudon et Le Comité de sauvegarde des sitesde Meudon, ainsi que de ceux de Jean Ménard, que nous avons le plaisir d'accueillir pour notre déjeuner au restaurantLa Mare aux Canards, dans la forêt de Meudon.

Tous les numéros du Bulletin des Amis de Meudon : www.amisdemeudon.com

Les derniers numéros du Bulletin du Comité de sauvegarde des sites de Meudon : www.sauvegardesitemeudon.com

De la forêt réseau hydraulique à la forêt loisirs

Forêt la plus proche de Paris, la forêt domaniale de Meudon, avec ses 1 000 hectares, accueille 4 millions de visiteurs

par an sous ses châtaigniers.

L'aménagement au XVIIe siècle d'un immense réseau hydraulique destiné à approvisionner les jets d'eau du château

de Meudon a modifié l'aspect de la forêt : étangs, canalisations, moulins à eaux, réservoirs. Ce réseau est en cours de

restauration depuis une quinzaine d'années par l'association Arhyme (Association pour la réhabilitation du réseau

hydaulique du domaine royal de Meudon : arhyme.asso.over-blog.com), partenaire des Cafés géographiques pour cette

journée. Pierre Durand, président de l'association Arhyme, nous explique le fonctionnement du réseau hydraulique.

Ici chassait Louis XVI en ces heures tragiques du 5 octobre 1789, où le peuple vint chercher le roi pour l'emmener aux

Tuileries, comme le rappelle Michelet dans son Histoire de la Révolution française :

« Tout le monde savait l'événement ; le roi seul ne le savait pas. Il était parti le matin, comme à l'ordinaire, pour la

chasse ; il courait les bois de Meudon. »... « On avait trouvé le roi ; il était revenu de Meudon, sans se presser. »

Au XXe siècle, passage de la forêt promenade dominicale à la forêt loisirs, dominée par la Tour hertzienne, avec des

équipements qui au pire l'éventrent, comme la nationale 118, au mieux la grignotent : restaurants, centre hippique, urban

football, tir à l'arc, VTT, course à pied, athlétisme, lycée hôtelier, avec des enclaves d'autres communes. La forêt

demeure une exploitation forestière avec l'ONF, d'où des conflits d'usage.

Source : Atlas des paysages et des projets urbains des Hauts-de-Seine, État-Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnementdes Hauts-de-Seine, http://www.paysages.hauts-de-seine.developpement-durable.gouv.fr

Sur cette carte des chasses du roi datant de la fin du XVIIIe siècle, l'axe vert quasi méridien de la Grande Perspective estbien marqué de Bellevue (au nord, près de la Seine), à l'actuel Pavé blanc, à proximité du Petit Clamart, en passant parla terrasse de Meudon et l'étang de Chalais.Dans la forêt, les grandes allées cavalières et les carrefours en étoile pour la chasse à courre se sont maintenus en partiejusqu'aujourd'hui, avec leur toponymie.Les limites de l'actuelle zone tertiaire de Vélizy suivent les limites sud de la forêt de l'époque.

La zone tertiaire de Vélizy

Benoit Fricaudet, des Cafés géographiques, nous présente la zone tertiaire de Vélizy dont il est familier, travaillant parici.De la gare routière, nous mesurons l’évolution des bâtiments, passant d’usines dédiées à la fabrication à de véritablescampus de bureaux modernes, qui redéfinissent les normes et offrent plus de services aux salariés : auditorium,conciergerie (avec coiffeur et possibilités de commander des biens), cafétérias, salles de sport… En contrepartie lesalarié travaille plus longtemps dans son open space… pardon, dire plutôt espace collaboratif ! Un lieu d'accès difficile, une zone enclavée, malgré la nationale 118. Depuis fin 2014, le tramway permet d'accéder àChâtillon Montrouge, terminus de la ligne 13 du métro, en une demi-heure. Les aménagements autour du tramway ontpermis une requalification urbaine. En attendant le téléphérique, qui devrait relier le pont de Sèvres à Meudon-la-Forêtle long de la nationale.

Source : Atlas des paysages et des projets urbains des Hauts-de-Seine, État-Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnementdes Hauts-de-Seine, http://www.paysages.hauts-de-seine.developpement-durable.gouv.fr

Le vert n’avait pas sa place dans la zone, qui tourne littéralement le dos à sa forêt : pignons aveugles, barrièremétallique, parking.

Meudon-la-ForêtSur les traces du vaste ensemble immobilier créé par l'architecte Fernand Pouillon : au début des années 1960, les 2 600logements de la résidence Le Parc, des immeubles en pierre de taille offraient le confort moderne à des populations quin'y avaient pas accès auparavant : chauffage par le sol, ascenseur s'arrêtant à tous les étages.« Les bassins de Versailles, les allées de son parc me servirent de modèle. Je dressai un projet monumental, cyclopéen,pour loger les moins fortunés. D'immenses piles de pierre constituaient les façades : ainsi qu'un paravent. » FernandPouillon, Mémoires d'un architecte, 1968.55 ans après sa construction, Meudon-la-Forêt apparaît plutôt comme une réussite, de par la qualité des espacesextérieurs, de son approche urbaine, mais surtout par la maîtrise du processus complet d'une opération de promotionimmobilière.

Michel Giraud

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