24
Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 1 Les Ecdysozoaires I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes par Jon G. Houseman Dans ce labo vous allez observer deux groupes d’animaux, les Nématodes et les Crustacés, qui ont une symétrie bilatérale et qui montrent une cuticule externe composée de collagène et de chitine respectivement. Les spécimens de l’embranchement des Nématodes ou vers ronds possèdent un corps allongé et cylindrique qui se termine souvent en pointe à l'extrémité postérieure. Ils sont les animaux triploblastiques et pseudocœlomates. Chez ce groupe, une cavité (pseudocœlome) se développe à partir du blastocœle embryonnaire, et n'est pas complètement revêtue de mésoderme à l'intérieur. Le phylum des Nématodes a connu un grand succès évolutif en termes de diversité, avec plus de 90,000 espèces décrites. On les retrouve dans une grande variété d'habitats, en milieu marin, d'eau douce et terrestre. Bien que les espèces vivantes librement sont plus nombreuses, les formes parasites ont fait l’objet d'attention à cause de leur impact sur la santé humaine, les animaux domestiques, et les plantes agricoles. Comme chez les Plathelminthes, les nématodes ont des adaptations morphologiques, physiologiques ou reproductives pour un mode de vie parasite. Essayer de trouver quelques exemples de ces adaptations lorsque vous faites des observations des systèmes corporels, pendant votre dissection d’un nématode mâle ou femelle d’Ascaris lumbricoides. Les Nématodes Ascaris suum Les Nématodes constituent probablement l’un des groupes d’animaux qui comportent le plus d’espèces, peut-être même davantage que les Arthropodes. On ne connaît pas bien le nombre d’espèces de Nématodes, parce qu’ils ont tous une morphologie semblable et qu’il est difficile de dire si un spécimen appartient ou non à une espèce déjà répertoriée. Une autre difficulté vient du fait que la plupart des Nématodes sont de taille microscopique. Non seulement les petits Nématodes sont difficiles à identifier, mais les gros aussi posent des problèmes d’identification. Par exemple, les vers ronds du genre Ascaris sont parmi les plus gros Nématodes et ils parasitent le tube digestif d’un certain nombre de Mammifères, dont les humains et les cochons. On utilise pour cette séance de laboratoire des ascarides récoltés dans le tube digestif de cochons envoyés à l’abattoir, ainsi que des vers issus des déchets de l’industrie du porc. Le protocole de

Les Ecdysozoaires I: Les Nématodes, les Crustacés et …adamoliverbrown.com/wp-content/uploads/2013/03/Lab07_Nema_Crus… · Anatomie externe Comme tous les Nématodes, ... l’anus

Embed Size (px)

Citation preview

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 1

Les Ecdysozoaires I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes

par Jon G. Houseman

Dans ce labo vous allez observer deux groupes d’animaux, les Nématodes et les Crustacés, qui ont une symétrie bilatérale et qui montrent une cuticule externe composée de collagène et de chitine respectivement.

Les spécimens de l’embranchement des Nématodes ou vers ronds possèdent un corps allongé et cylindrique qui se termine souvent en pointe à l'extrémité postérieure. Ils sont les animaux triploblastiques et pseudocœlomates. Chez ce groupe, une cavité (pseudocœlome) se développe à partir du blastocœle embryonnaire, et n'est pas complètement revêtue de mésoderme à l'intérieur.

Le phylum des Nématodes a connu un grand succès évolutif en termes de diversité, avec plus de 90,000 espèces décrites. On les retrouve dans une grande variété d'habitats, en milieu marin, d'eau douce et terrestre. Bien que les espèces vivantes librement sont plus nombreuses, les formes parasites ont fait l’objet d'attention à cause de leur impact sur la santé humaine, les animaux domestiques, et les plantes agricoles. Comme chez les Plathelminthes, les nématodes ont des adaptations morphologiques, physiologiques ou reproductives pour un mode de vie parasite. Essayer de trouver quelques exemples de ces adaptations lorsque vous faites des observations des systèmes corporels, pendant votre dissection d’un nématode mâle ou femelle d’Ascaris lumbricoides.

Les Nématodes

Ascaris suum Les Nématodes constituent probablement l’un des groupes d’animaux qui comportent le plus d’espèces, peut-être même davantage que les Arthropodes. On ne connaît pas bien le nombre d’espèces de Nématodes, parce qu’ils ont tous une morphologie semblable et qu’il est difficile de dire si un spécimen appartient ou non à une espèce déjà répertoriée. Une autre difficulté vient du fait que la plupart des Nématodes sont de taille microscopique.

Non seulement les petits Nématodes sont difficiles à identifier, mais les gros aussi posent des problèmes d’identification. Par exemple, les vers ronds du genre Ascaris sont parmi les plus gros Nématodes et ils parasitent le tube digestif d’un certain nombre de Mammifères, dont les humains et les cochons. On utilise pour cette séance de laboratoire des ascarides récoltés dans le tube digestif de cochons envoyés à l’abattoir, ainsi que des vers issus des déchets de l’industrie du porc. Le protocole de

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 2

laboratoire de premier cycle mentionne souvent la faible possibilité d’être infecté par les œufs des spécimens et il insiste sur l’importance de se laver soigneusement les mains après la dissection. De toute manière, c’est ce qu’il faut toujours faire. La difficulté d’identification est illustrée ici par deux espèces en particulier : Ascaris suum, qui infecte les cochons, et Ascaris lumbricoides, qui parasite les humains. Même si le spécimen que vous allez étudier aujourd’hui est identifié A. lumbricoides, c’est-à-dire le parasite de l’être humain, ce n’est pas un A. lumbricoides; votre spécimen vient d’un cochon, et ses œufs ne peuvent pas vous infecter.

Spécimen conservé

Anatomie externe Comme tous les Nématodes, les ascarides ont un long corps cylindrique qui se termine en pointe à chaque extrémité. Les Nématodes sont sexuellement dimorphes, et

l’extrémité postérieure du mâle est recourbée, alors que celle de la femelle est normalement droite. Votre spécimen est-il mâle ou femelle? Est-ce le mâle ou la femelle qui a le corps le plus long? Si vous avez un spécimen mâle, examinez attentivement l’extrémité postérieure à la recherche des deux spicules copulateurs qui s’insèrent dans le gonopore (pore génital) de la femelle et maintiennent le mâle en place pendant l’accouplement. Chez certains spécimens, il se peut que les spicules copulateurs soient rétractés et donc non visibles. Examinez un autre spécimen mâle si vous ne pouvez pas voir les spicules copulateurs sur le vôtre. Si vous avez une femelle, n’oubliez pas d’examiner aussi un spécimen mâle. Si vous avez un mâle, n’oubliez pas d’examiner aussi un spécimen femelle, afin d’observer les différences entre les deux sexes.

Le corps est couvert d’une cuticule. Examinez attentivement la surface de la cuticule au microscope à dissection. La surface de la cuticule est-elle lisse? Comment la décririez-vous? Voyez la coloration de la cuticule et identifiez les deux paires de bandes longitudinales foncées qui courent le long du ver. Deux de ces bandes sont plus larges que les deux autres : ce sont les lignes latérales. Vis-à-vis les lignes latérales, en dessous de la cuticule il y a les canaux excréteurs. Comme leur nom l’indique, les lignes latérales sont sur les côtés de l’animal. Situées sur la face dorsale et la face ventrale, les deux bandes les moins larges correspondent à l’emplacement des cordons

Figure 1 Les extrémités antérieure d’un Ascaris.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 3

nerveux. Les quatre divisions délimitées à l’extérieur du corps par les quatre bandes correspondent aux quatre masses de muscles longitudinaux qui sont à l’intérieur. Vous ne pourrez pas distinguer les faces dorsale et ventrale tant que vous n’aurez pas examiné l’extrémité antérieure du ver.

Identifiez les extrémités antérieure et postérieure du ver. Dans le cas d’un spécimen mâle, c’est facile puisque l’extrémité postérieure est recourbée. Dans le cas d’une femelle, les deux extrémités ont le même aspect. Recherchez alors les trois lèvres qui entourent la bouche, tant chez les mâles que chez les femelles. Il y a une lèvre dorsale et deux lèvres latéro-ventrales (Figure 1). Pour identifier la lèvre dorsale, regardez sa position par rapport aux lignes latérales. Juste derrière les lèvres, repérez les deux amphides latérales sensorielles. Ces structures sensorielles de la tête constituent le caractère autapomorphique des Nématodes. Elles font toutefois l’objet de controverse parce qu’elles semblent être des cils modifiés. Pourquoi la présence de ces structures ciliaires modifiées est-elle inhabituelle pour un Ecdysozoaire? Vus de leur extrémité antérieure, les Nématodes semblent avoir une symétrie triradiale, ce qui est à l’origine de leur nom vernaculaire de vers ronds.

Sur la surface ventrale, localisez l’unique pore excréteur quelques millimètres derrière la bouche.

Anatomie interne Pour disséquer un ascaride, fixez le spécimen immergé sur un côté du plateau, afin que vous puissiez voir le détail des structures internes au microscope à dissection. Il est facile d’ouvrir le ver. À l’aide d’un scalpel, faites une incision sur toute la longueur du corps. Faites attention de ne pas couper trop profondément, afin de ne pas endommager les tissus sous-jacents. Si votre scalpel est muni d’une pointe acérée, insérez le scalpel juste en dessous de la cuticule, le côté coupant vers le haut, et faites-le glisser vers l’avant. Utilisez des épingles pour fixer la paroi du corps en l’éloignant des organes internes.

L’organisation interne (Figure 2) de ces animaux est simple. L’une des premières choses que vous allez remarquer est la manière dont les organes internes sont

Figure 2 Anatomie interne d’une femelle et d’un mâle Ascaris.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 4

suspendus dans la cavité corporelle sans qu’il y ait de mésentères pour les ancrer sur la paroi du corps. Comment l’organisation pseudocœlomate des Nématodes explique-t-elle cette absence de fixation mésentérique des organes à la paroi du corps? Examinez la surface interne de la paroi du corps et repérez les deux lignes latérales et les cordons nerveux que vous avez observés de l’extérieur.

Le tube digestif : La bouche s’ouvre sur le stomodeum (tube digestif antérieur), composé d’une cavité buccale à la paroi mince, suivie d’un pharynx musculeux. Une constriction marque la limite entre le pharynx et l’intestin (intestin moyen), qui a l’aspect d’un ruban plat passant entre les circonvolutions de l’appareil reproducteur. Le liquide pseudocœlomique des Nématodes est constamment soumis à la pression créée par la contraction des muscles de la paroi du corps. Cette pression interne élevée et l’absence de musculature de l’intestin moyen donnent à l’intestin son aspect de ruban plat. Un court rectum (intestin postérieur) plus fin et musclé se termine par l’anus à l’extrémité postérieure des ascarides mâles et femelles.

L’appareil reproducteur : Tant chez les mâles que les femelles, l’appareil reproducteur serpente dans tout le corps et est enroulé autour de l’intestin. L’appareil reproducteur femelle comporte deux tubules, alors que chez le mâle, il y a une seule gonade tubulaire. Quel est l’avantage de cette association étroite entre les appareils digestif et reproducteur?

Le pore génital de la femelle est situé à mi-longueur du corps. À l’intérieur, un vagin unique part de l’avant et rejoint les deux utérus, qui peuvent être pleins d’œufs. Les utérus poursuivent leur parcours vers l’arrière de l’animal, puis vers l’avant lorsqu’ils se rétrécissent pour devenir les oviductes. Ceux-ci serpentent et s’enroulent tout en devenant de plus en plus étroits. Chaque oviducte devient finalement deux ovaires filamenteux. De l’extérieur, il est presque impossible de dire où un utérus devient un oviducte, puis des ovaires. La seule modification physique apparente est le rétrécissement des gonades depuis le large utérus jusqu’aux délicates circonvolutions des ovaires.

Ouvrez un ver mâle en utilisant la même technique que pour la femelle et examinez l’unique testicule de l’appareil reproducteur. Le pore génital mâle et le conduit éjaculatoire sont situés à l’extrémité postérieure et marque la fin de l’appareil reproducteur. En allant vers l’avant, le conduit éjaculatoire s’élargit pour devenir la vésicule séminale, qui serpente dans le pseudocœlome jusqu’à ce qu’elle devienne le canal déférent. Celui-ci serpente aussi dans le pseudocœlome et se rétrécit pour former un testicule étroit et sans issue qui serpente lui aussi dans la cavité corporelle. Comme chez la femelle, il est presque impossible de dire où commence et où se termine chacune de ces structures dans les circonvolutions du tubule. Si vous n’avez pas vu les spicules copulateurs lorsque vous avez examiné l’anatomie externe de l’animal, identifiez-les maintenant.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 5

En raison de la simplicité de ces animaux, il se peut que certains autres systèmes et appareils soient absents. Y a-t-il un système nerveux? Qu’en est-il de l’appareil circulatoire et de l’appareil respiratoire?

Lames préparées Lorsque vous examinerez des lames préparées de coupes d’un mâle ou d’une femelle, veillez à bien aligner l’éclairage de votre microscope, afin de voir toutes les structures énumérées dans le présent guide d’observation.

La paroi du corps Examinez la paroi du corps sur une coupe d’un spécimen mâle (Figure 4) ou femelle (Figure 3). La couche externe est une fine cuticule qui protège le ver contre les sucs digestifs de son hôte. Par définition, une cuticule est une couche externe non vivante sécrétée par un syncytium épidermique sous-jacent. Vous pouvez distinguer la cuticule et l’épiderme par leur différence de coloration. La cuticule est une matrice sécrétée. Sur la lame préparée, elle a une coloration plus uniforme que l’épiderme cellulaire, où les diverses composantes cellulaires ont des intensités de coloration différentes. Quelle est la différence entre un syncytium épidermique et un tissu épidermique normal? Chez les Nématodes, la cuticule n’est pas renforcée par la chitine que l’on trouve communément chez de nombreux Ecdysozoaires. Au lieu de la chitine contenue dans la matrice cuticulaire, quel polymère fibreux renforce la cuticule des Nématodes?

Figure 3 Coupe transversale d’une femelle Ascaris.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 6

Sous l’épiderme, repérez les quatre blocs de muscles longitudinaux délimités par les lignes latérales de l’appareil excréteur et par les cordons nerveux dorsal et ventral. Chez les Nématodes, les muscles longitudinaux ont des ramifications directes sur les cordons nerveux, alors que chez d’autres animaux, il y a des nerfs qui vont des cordons nerveux aux muscles. Comment cette connexion unique entre les muscles et les cordons nerveux vous permet-elle de distinguer les cordons nerveux des

lignes latérales? La paroi du corps d’autres animaux possède généralement une couche externe de muscles circulaires et une couche interne de muscles longitudinaux. Les Nématodes sont dépourvus de muscles circulaires. Quel est l’effet de l’absence de muscles circulaires sur les mouvements des Nématodes? Examinez attentivement une ligne latérale; vous pourrez voir les deux composantes de l’appareil excréteur qui forment un canal excréteur au centre.

Anatomie interne Le grand espace visible au centre de la coupe transversale est la cavité corporelle, appelée pseudocœlome, qui contient les appareils digestif et reproducteur. Quelle est la différence entre un pseudocœlome et un véritable cœlome?

Repérez le tube digestif qui consiste en un intestin aplati dans l’axe dorso-ventral. Y a-t-il des muscles associés au tube digestif? Comment cela est-il lié à la présence d’un pseudocœlome?

Figure 4 Coupe transversale d’un mâle Ascaris.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 7

Les autres organes contenus dans le pseudocœlome font partie de l’appareil reproducteur enroulé que vous avez vu au cours de la dissection. Rappelez-vous que l’ovaire, l’oviducte et l’utérus de l’appareil reproducteur femelle sont pairs, et que les conduits les plus larges sont les utérus (Figure 3). Dans la coupe transversale, vous pouvez voir que les utérus sont remplis d’œufs munis d’une coquille. Les structures qui ont le plus petit diamètre (dont la coupe ressemble à des roues) sont les ovaires. Les cellules germinales sont disposées en rayons autour d’un noyau plein central appelé rachis, et cela donne aux ovaires l’aspect de roues de charriot. Les oviductes sont plus larges et ressemblent aux ovaires, mais le rachis central est remplacé par la lumière de l’oviducte. Vous pouvez aussi voir des œufs immatures à l’intérieur des oviductes.

L’appareil reproducteur mâle (Figure 4) est moins complexe et n’est pas pair, mais il serpente lui aussi entre l’avant et l’arrière de la cavité corporelle. La section la plus grosse est la vésicule séminale, qui contient le sperme. Le testicule est petit et plein, et possède un rachis central. Le canal déférent est creux et plus gros que le testicule. Les deux sont toutefois difficiles à distinguer.

Si une coupe de la région du pharynx est disponible, identifiez le pharynx triradié (Figure 5). C’est l’organisation de la musculature qui donne au pharynx sa structure triradiée et son aspect triangulaire en coupe transversale. La contraction des muscles pharyngiens ouvre le pharynx, et celui-ci suce la nourriture. Cela a pour effet d’étirer le revêtement cuticulaire du pharynx, qui se referme par élasticité lorsque les muscles se relâchent. La structure triradiée du pharynx est très efficace pour créer rapidement un grand espace pharyngien. Il y a une valve entre le pharynx et l’intestin. Lorsque le pharynx se referme, cette valve s’ouvre et laisse passer la nourriture dans le tube digestif.

Figure 5 Une coupe transversale à travers la région pharyngienne de l'Ascaris.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 8

Les Arthropodes Les Arthropodes sont un groupe d'animaux très abondants et diversifiés. Les Arthropodes représentent entre 75 et 80 % de toutes les espèces animales. En dépit de leur grand nombre, ils possèdent de nombreuses similarités. Tous les Arthropodes ont un exosquelette segmenté, des yeux composés et des appendices articulés. L'exosquelette, qui est composé de cuticule inerte sécrétée par l'épiderme sous-jacent, est un des facteurs expliquant le succès des Arthropodes. On a dit que le développement de la cuticule par les Arthropodes était aussi important à leur succès que le développement du plastique l'a été pour les humains. Alors que cela peut sembler être une exagération repensez-y pendant que vous observez les différents animaux pendant cette période de laboratoire. Souvenez-vous qu'ils ont tous été fabriqués avec cette cuticule qui a été sculptée et moulée pour former les fines pièces buccales d'un moustique tout comme la robuste pince du homard, sans oublier les ailes délicates des insectes.

Les Arthropodes et les représentants de plusieurs autres embranchements, dont les Nématodes, possèdent une cuticule de chitine. La présence de cette cuticule élimine la possibilité d’avoir des cils et la combinaison de l’absence de cils et d’une cuticule de chitine remplacée par la mue est caractéristique des Ecdysozoaires. Les Arthropodes se distinguent des autres Ecdysozoaires par la présence des yeux composés, d’un cœur tubulaire dorsal, d’appendice articulés, et de tagmes. Parmi les Arthropodes, la perte des yeux composés, le nombre de paires d’antennes, le type de pièces buccales (mandibulates ou chélicérates) et le type d’appendices (uniramés ou biramés) sert à départager les Uniramés des Crustacés et des Chélicérates. Ce sont ces caractères que vous observerez lors de votre survol de la diversité des Arthropodes.

Crustacés Les Crustacés comprennent une gamme très variée d'animaux allant du zooplancton marin, qui sont les herbivores principaux dans l'environnement pélagique, jusqu'aux énormes crabes dont l'envergure des pattes se mesure en mètres. La forme ancestrale possédait des appendices biramés attachés à chaque segment et deux tagmes: tête et thorax. Les appendices biramés simples (semblables sur chaque segment), étaient impliqués dans la respiration, la locomotion et l'alimentation.

Chez les Crustacés plus récents, les pattes ont tendance à être spécialisées pour l'une ou deux des trois fonctions ancestrales. Certaines sont spécialisées pour l'alimentation, d'autres servent à la locomotion, et certaines ne servent qu'à la respiration. Aux changements de fonctions correspondent également des changements de formes de ces appendices. On dit que ces appendices représentent une homologie sérielle puisqu'ils ont tous la même origine ontogénique mais ils ont des fonctions différentes. C'est pourquoi vous examinerez si en détail les appendices de l'écrevisse.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 9

Il vous serait impossible d'observer tous les types de Crustacés en une seule séance de laboratoire et l'écrevisse servira d'exemple pour le groupe entier. Ne faites cependant pas l'erreur de croire que l'écrevisse soit typique de tous les groupes de Crustacés.

Écrevisse L'écrevisse est un Crustacé omnivore répandu à travers le monde entier. Elle vit dans les ruisseaux et étangs où elle joue le rôle d'un nécrophage et se nourrit de tout ce qu'elle trouve. Elle est considérée par plusieurs comme un délice et fait partie de la cuisine traditionnelle dans le sud des États Unis et plusieurs régions d'Europe.

Examinez votre spécimen en tâchant d'identifier les structures caractéristiques des Arthropodes telles que la cuticule dure, les appendices articulés et les yeux composés. Tentez de plier doucement les diverses parties des appendices dans différentes directions pour comprendre comment les membres s'articulent. Localisez les membranes entre les parties articulées.

Anatomie externe de l'écrevisse Le corps est formé de deux tagmes: le céphalothorax et l'abdomen (Figure 6). Le céphalothorax est couvert dorsalement par la carapace et la jonction entre la tête et le thorax est visible au niveau du sillon cervical sur la carapace. Trois des huit pattes thoraciques sont fusionnées à la tête pour former les maxillipèdes. Le thorax a donc cinq paires d'appendices. Derrière le sillon cervical et parallèlement à l'axe du corps se trouvent deux sillons branchiaux qui indiquent la position des chambres branchiales sous-jacentes. L'organisation structurale de l'abdomen est simple: dorsalement des tergites recourbés se chevauchant et ventralement des sternites connectés par des membranes.

Examinez la surface ventrale de votre spécimen pour voir les appendices formant l'homologie sérielle. Les appendices sont biramés et sont formés d'un protopodite (la

Figure 6 Anatomie externe de l'écrevisse.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 10

composante la plus proximale), d'un exopodite (un rameau latéral ou externe qui provient du protopodite) et d'un endopodite (un rameau médian ou interne provenant du protopodite). Chacune de ces composantes peut être transformée de différentes façons. Certaines parties peuvent être fusionnées, agrandies ou simplement disparaître. Identifiez ces parties en vous référant aux diagrammes. Notez comment les parties sont modifiées par rapport à la structure de base de l'appendice biramé.

Appendices de l'écrevisse Observez votre spécimen et identifiez les appendices en partant des premiers: antennules, antennes, mandibules et enfin deux paires de maxilles (Figure 7).

Ces cinq appendices céphaliques sont retrouvés chez tous les Crustacés. Puis viennent trois maxillipèdes qui indiquent la jonction entre la tête et le thorax. Ces maxillipèdes sont des appendices thoraciques qui servent à l'alimentation. La première des cinq paires de pattes locomotrices (péréiopodes) est modifiée pour former un organe préhensile appelé chélipède (Figure 8). Les quatre autres paires de péréiopodes

Figure 7 . Les appendices de la tête et les maxillipèdes.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 11

suivent. Enfin, il y a six paires d'appendices abdominaux: cinq paires de pléopodes et une paire d'uropodes terminaux qui, combinée au telson, forme la queue de l'animal. Les deux premières paires de pléopodes sont modifiées et servent d'organes copulatoire chez le mâle. La plupart des pièces buccales ne seront pas apparentes jusqu'à ce que vous les enleviez, plus tard dans la dissection.

Avant de disséquer l'animal, enlevez une partie de la carapace pour exposer les branchies contenues dans la chambre branchiale. Les branchies sont-elles attachées aux pattes? Enlevez délicatement les appendices sur le côté où vous avez découpé la carapace. Séparez chaque appendice du corps au niveau de la membrane de l'articulation au corps. Ce faisant identifiez les trois parties principales de chaque appendice et faites un parallèle avec l'architecture générale d'un appendice biramé (Figure 7 et Figure 8). Note: l'endopodite est généralement plus gros que l'exopodite et peut être divisé en un maximum de 5 segments.

L'antennule est composée d'un coxopodite simple et d'un basipodite divisé en deux segments. La partie dorsale du coxopodite contient un statocyste qui est perceptible par une petite dépression à l'extérieur. Enlevez l'exosquelette sur le côté et examinez le statocyste au microscope. Enlevez délicatement l'antenne en vous assurant que le coxopodite y reste attaché. L'ouverture du système excréteur (la glande verte) est située sur le coxopodite.

Orientez votre spécimen sous le microscope à dissection de manière à bien voir les pièces buccales et retirez délicatement les appendices en partant du troisième maxillipède et en allant vers l'avant. Soyez sûr de tenir le coxopodite de chaque appendice avec votre pince, pour bien enlever l'appendice entier. Notez l'ordre dans lequel ces appendices se trouvent. Les maxillipèdes ne servent pas uniquement à manipuler la nourriture mais sont également impliqués dans la respiration. On retrouve des branchies sur la deuxième et le troisième maxillipède. Le troisième maxillipède illustre le mieux la structure typique des appendices de Crustacés avec un exopodite, endopodite et un épipodite partiellement modifié en branchie (Fig. 7). Contrairement à la première, la seconde maxille a un exopodite fusionné à l'épipodite coxal (scaphognathite). Les mandibules ont un coxopodite avec une zone pour broyer et une pour couper et le basipodite et l'endopodite forment une projection en forme de doigt.

Les pattes ambulatoires, les péréiopodes, sont les appendices les plus gros et les plus évidents. Elles n'ont pas d'exopodites mais portent toutes des branchies. La seconde et la troisième paire portent également des pinces. Les péréiopodes sont les derniers appendices thoraciques. Les appendices restants sont abdominaux. À l’exception des uropodes terminaux, ils sont tous appelés pléopodes (pattes natatoires). Chacun ressemble à la forme générale biramée. Les deux premiers pléopodes sont de forme différente chez le mâle. De quel sexe est votre spécimen?

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 12

Anatomie interne (Figure 9) Ouvrez votre écrevisse en faisant une coupe latérale de chaque côté de la carapace et dans la chambre branchiale jusqu'au rostre. Ne coupez pas trop profondément sinon vous allez détruire la musculature et les organes sous-jacents. Poursuivez la coupe le

Figure 8 Les appendices abdominaux et les péréiopodes.

Figure 9 Anatomie interne de l'écrevisse.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 13

long des bordures de l'abdomen vers le telson.

Système circulatoire Les Crustacés ont un système circulatoire ouvert ce qui implique qu'il n'y a pas de capillaires reliant les vaisseaux sanguins allant vers le cœur et ceux qui en proviennent (Figure 10). Ceci n'empêche pas les Crustacés d'avoir un réseau complexe d'artères et de veines qui alimentent les différents organes et ramène le sang qui a été oxygéné dans les branchies vers le cœur.

Examinez le cœur et les principaux vaisseaux sanguins. Le cœur est situé dans la cavité péricardique (sinus péricardique) qui contient le sang provenant des branchies. Ce sang pénètre dans le cœur par les ostioles. Si votre spécimen a été injecté au latex sous une pression trop forte il est possible que le cœur et/ou les ostioles soient endommagés. Le sinus péricardique est particulièrement fragile et il est possible que le latex ait envahi l'hémocœlome. Dans ce cas le cœur peut être révélé en enlevant le surplus de latex. Comment les ostioles fonctionnent-ils et comment permettent-ils au cœur de pomper le sang?

Vous devriez pouvoir examiner la majorité des vaisseaux sanguins. Une des branche de l'aorte antérieure devient l'artère optique. L'artère antérieure latérale se divise pour former l'artère antennaire et l'artère hépatique. L'aorte postérieure se divise en artères abdominales segmentaires. L'artère sternale va du cœur jusqu'à la surface ventrale de l'animal. Ces artères dirigent le sang dans toutes les parties du corps où il est libéré dans l'hémocœlome. Le sang dans l'hémocœlome est aspiré dans les branchies avant de retourner au cœur par le sinus péricardique.

Système reproducteur Les organes reproducteurs sont retrouvés tout près de la glande digestive. Les testicules et les ovaires sont devant et un peu en dessous du cœur. L'ouverture du pore

Figure 10 Le système circulatoire de l'écrevisse.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 14

génital mâle est à la base de la cinquième péréiopode et celle de la femelle à la base de la troisième. Les pléopodes du mâle sont modifiés pour faciliter le transfert du spermatophore.

Système digestif L'œsophage relie la bouche à l'estomac qui est situé juste derrière le rostre. La glande digestive (hépatopancréas) est formée d'une paire de diverticules reliés à l'intestin moyen. Pour observer le tube digestif, vous devrez enlever la glande digestive. Procédez délicatement car elle est attachée à l'intestin moyen et aux organes reproducteurs. Identifiez l'estomac (moulinet gastrique) qui se divise en une région cardiaque et une région pylorique (Figure 11). L'intestin moyen est court chez l'écrevisse mais plus long chez le homard. Dans sa partie antérieure on peut voir les gros muscles associés à l'estomac. Enlevez l'estomac en coupant au niveau de l'intestin et de l'œsophage. En le maintenant submergé dans un verre de montre, coupez-le en deux. Séparez les deux moitiés et observez les dents chitineuses médianes et latérales, ainsi que les soies chitineuses qui agissent comme des passoires. Toutes ces structures sont composées de chitine car elles dérivent de la partie antérieure du tube digestif tapissée de chitine.

Système excréteur Les glandes vertes sont des organes excréteurs situés dans la région ventrale de la tête près de la bouche. Une des différences entre l'écrevisse et le homard est la structure du tube. Retirez la glande pour l'examiner et identifier ces composantes.

Système nerveux Enlevez l'estomac et les autres viscères pour localiser les ganglions sous- et supra-œsophagiens ainsi que les nerfs connectifs. Identifiez le cordon nerveux et observez

Figure 11 L'estomac de l'écrevisse.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 15

sa morphologie dans chaque segment. Est-ce que tous les ganglions ont la même taille? Pourquoi pas? Examinez un œil composé sous le microscope à dissection.

Chelicerata

Araignées : la tarentule Même si les Insectes dominent le milieu terrestre, leurs cousins Chélicérates ont probablement été les premiers Arthropodes à vivre sur la terre ferme. Des Chélicérates ressemblant à des scorpions se nourrissaient des corps mous des premiers envahisseurs terrestres qui survivaient dans des milieux humides, par exemple des insectes et vers primitifs. Mais les Insectes ont relevé avec succès les défis du milieu terrestre en résolvant le problème de la perte d’eau. Avec l’acquisition du vol, cela a entraîné la première explosion de la diversité des Insectes; la seconde explosion est venue de la coévolution des Insectes et des plantes à fleurs. L’accroissement de la diversité des Insectes s’est évidemment accompagné d’un accroissement de la diversité de leurs prédateurs; ces prédateurs sont les Chélicérates. Les premières araignées utilisaient une forme de soie pour détecter les proies qui passaient par hasard sur les fils de soie posés à même le sol. Avec l’apparition d’insectes volants, les araignées commencèrent à suspendre leur toile pour les attraper en vol. Les araignées primitives comme la tarentule ne tissent pas de toile pour capturer leur proie. Elles utilisent leur soie pour tapisser des terriers ou construire des retraites où elles attendent et sautent sur leur proie.

À la différence des autres Arthropodes, les Chélicérates, notamment les araignées, ne possèdent pas d’antennes, et le cerveau secondaire qui intègre normalement les intrants sensoriels des antennes est absent. De plus, à l’exception des limules primitifs, la plupart des Chélicérates sont dépourvus d’yeux composés. Cela ne veut toutefois pas dire qu’ils sont aveugles. En général, quatre paires d’yeux simples (ocelles) détectent la quantité de lumière et, chez certaines araignées, ces yeux sont devenus suffisamment gros pour former des images. Au lieu de la vision, les araignées font d’abord appel au toucher et à la sensation de vibration. Des sensilles en forme de fente situées sur leurs pattes, de même que des soies sensorielles appelées trichobothries, détectent toutes les formes de vibrations, depuis les pas des proies qui se déplacent sur le sol jusqu’aux courants d’air produits par les proies qui approchent, en passant par le son et bien entendu les mouvements des proies prises dans les toiles d’araignée.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 16

Anatomie externe Le corps des Chélicérates comporte deux tagmes : un prosoma antérieur et un opisthosoma postérieur (Figure 12). Tous ne s’entendent pas sur les termes à employer pour désigner ces deux tagmes : certaines sources appellent le tagme antérieur céphalothorax, et le tagme postérieur abdomen. Le terme céphalothorax est le plus souvent réservé aux Arthropodes dont certains des appendices thoraciques ont rejoint ceux de la tête pour aider à l’alimentation. Un exemple classique de céphalothorax est celui de l’écrevisse, où les trois paires de pattes antérieures du thorax collaborent avec les trois paires d’appendices post-oraux de la tête pour former l’appareil d’alimentation. Dans ce cas, le céphalothorax est formé à partir de deux tagmes différents. Chez les Chélicérates, l’embryologie et la segmentation d’origine comportent un seul tagme antérieur portant six paires d’appendices : les chélicères, les pédipalpes et quatre paires de pattes locomotrices. Pour cette raison, on utilise ici les termes prosoma et opisthosoma dans la description des araignées et des autres Chélicérates.

L’une des premières choses que vous allez remarquer chez la tarentule est son revêtement velu formé de soies chitineuses. Tout comme la fourrure des Mammifères ou les plumes des Oiseaux, ce tapis dense de soies crée le long du corps une couche d’air immobile qui agit comme isolant et qui peut aussi jouer un rôle important pour empêcher la perte d’eau par les poumons lamellaires, principaux organes respiratoires de la tarentule. Comme on l’a mentionné plus haut, les soies sont également sensorielles et peuvent jouer un rôle important pour échapper aux prédateurs. La première défense de la tarentule consiste à se réfugier dans son terrier. Cependant, si la tarentule est capturée, ses soies se détachent facilement, de sorte que le prédateur se retrouve avec la bouche pleine de soies au lieu d’un repas. En Amérique du Nord et du Sud, ce moyen de défense des tarentules est perfectionné par la présence sur l’abdomen de soies barbelées et urticantes qu’elles projettent sur leurs prédateurs. Quel Mammifère projette des poils barbelés pour se défendre de ses prédateurs?

Figure 12 Vue dorsale de l’anatomie externe d’une araignée.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 17

Si les poils urticants touchent ou pénètrent les membranes sensibles des yeux, du nez ou de la peau, ils peuvent provoquer une réaction allant d’une légère démangeaison à une forte réaction, notamment dans les yeux ou les voies respiratoires. Une fois projetés, les poils urticants ne se régénèrent qu’à la mue suivante. Une tarentule « chauve » en est donc une qui a utilisé ce moyen de défense. Comme toutes les araignées, la tarentule possède un venin mais, mis à part de possibles réactions allergiques, ce venin n’affecte pas les humains et vise plutôt à maîtriser les petits insectes et vertébrés dont la tarentule se nourrit.

Le prosoma Il n’y a que peu ou pas d’indices de la segmentation primitive de la face dorsale de la tarentule, et une carapace dorsale recouvre le prosoma (Figure 12). Sous les poils de la carapace, vous pourrez peut-être voir des dépressions et renfoncements de la surface qui indiquent où se trouve la musculature sous-jacente de l’estomac suceur. Sur la face dorsale, devant la carapace, repérez les quatre paires d’yeux simples disposées sur deux rangées à la surface du tubercule optique. Certains de ces yeux regardent vers l’avant, et d’autres vers les côtés. La position et la taille des yeux varient selon les espèces d’araignées, mais leur nombre est presque toujours de huit. Les huit yeux de la tarentule sont-ils tous de la même taille?

Six paires d’appendices sont fixés au prosoma : les chélicères, les pédipalpes et quatre paires de pattes locomotrices. La paire d’appendices la plus antérieure est formée des chélicères qui possèdent deux segments : le crochet et le gros segment basal qui relie la chélicère au prosoma. Les glandes à venin, qui produisent un mélange d’enzymes digestives et de neurotoxines, sont situées dans le segment basal, et un conduit amène le venin jusqu’à un orifice situé à la pointe du crochet. On a déjà mentionné que les tarentules sont des araignées primitives. Une autre raison de les placer à la base de l’arborescence de l’évolution des araignées est le mode d’articulation des chélicères avec le prosoma. Chez les espèces évoluées, les crochets

Figure 13 Vue ventrale de l’anatomie externe d’une araignée.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 18

pivotent de côté vers l’extérieur, puis vers l’intérieur pour se rejoindre dans l’axe médian du corps. Chez les tarentules, les crochets pivotent vers l’avant, et non vers les côtés, puis vers l’arrière en direction du corps en tirant la proie pour la coincer contre le prosoma.

Derrière les chélicères, on trouve les gros pédipalpes formés de six segments. Examinez la face ventrale des pédipalpes, là où ils sont attachés au corps de la tarentule (Figure 13). Le gros segment basal est le coxa ou la hanche gnathobasique qui couvre la bouche et dont les bords acérés servent à broyer et à mastiquer la nourriture. Les Chélicérates se nourrissent en fait de liquide. Ils régurgitent sur leur nourriture des sucs digestifs avant de la mastiquer tout en y mêlant les sucs digestifs. Au bout d’un certain temps, ils pressent la nourriture et consomment la soupe liquide digestive ainsi extraite. Ils répètent le processus jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien à sucer, puis rejettent le restant de matériau indigestible. Quel nom donne-t-on à ce type de digestion?

Les pédipalpes des araignées sont sexuellement dimorphes. Chez la femelle, ils ressemblent aux autres pattes, à ceci près que le métatarse est absent. Chez le mâle adulte (Figure 14), leur extrémité est prolongée par une structure complexe semblable à un bulbe et appelée cymbium, formée de deux parties : le bulbe copulateur et le style (ou embolus), qui fonctionnent ensemble comme un compte-gouttes. Le mâle adulte tisse une petite toile spermatique sur laquelle il dépose une goutte de sperme par son orifice génital. Il trempe ensuite l’extrémité du style dans la goutte de sperme et aspire celle-ci dans le bulbe copulateur pour un usage ultérieur. Les araignées s’accouplent face à face : le mâle introduit son style dans l’orifice génital de la femelle et dépose le sperme dans la spermathèque (réceptacle séminal) de la femelle.

Une grande plaque sternale recouvre la face ventrale du prosoma (Figure 13). Sur son pourtour, la membrane pleurale relie la carapace dorsale et le sternum ventral. La membrane pleurale est difficile à voir parce qu’elle entoure les articulations de la hanche (articulations coxales) des quatre paires de pattes locomotrices. Chaque patte

Figure 14 Pédipalpe d’une araignée mâle.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 19

locomotrice possède sept segments. Ce sont, à partir du corps : la hanche, le trochanter, le fémur, la patella, le tibia, le métatarse, et enfin le tarse, qui porte des griffes.

L’opisthosoma L’opisthosoma d’une araignée est composé de douze segments, qui sont toutefois cachés par la cuticule membraneuse. Chaque segment comporte un tergite dorsal relié par des membranes pleurales à un sternite ventral. Le premier segment de l’opisthosoma est modifié en un pédicelle, resserrement qui relie l’opisthosoma au prosoma.

Les orifices des deux paires de poumons lamellaires ont l’aspect de fentes situées derrière le deuxième sternite sur la face ventrale de l’opisthosoma (Figure 13). Les poumons lamellaires sont formés de lamelles, qui sont des feuillets de fine cuticule, empilés comme les pages d’un livre, d’où leur nom de « book lungs » en anglais. Du point de vue des échanges gazeux, les poumons lamellaires ne constituent pas la surface la plus efficace pour un animal terrestre, parce que la grande surface exposée à l’air a un potentiel important de perte d’eau. Le fait que les poumons soient logés dans une cavité et en dessous d’une couche d’air immobile créée par les soies contribue à minimiser les pertes d’eau. En plus de ces adaptations structurales, les araignées minimisent les pertes d’eau en chassant la nuit et en se reposant dans un terrier le jour. La plupart des araignées ont un seul poumon lamellaire combiné à un système trachéal. On suppose que la trachée aide à contourner le problème de la perte d’eau dans la respiration. Les tarentules ont conservé les deux paires originales de poumons, et c’est une autre raison pour laquelle on les considère comme primitives. Le sillon épigastrique creusé dans la cuticule suit les orifices de la première paire de poumons lamellaires, et une plaque cuticulaire, l’épigyne, située entre les orifices des poumons et devant le sillon épigastrique, contient l’orifice de l’appareil reproducteur femelle. Au moment de l’accouplement, c’est dans cet orifice que le mâle insère la pointe de son style pour remplir les réceptacles séminaux.

Les filières et les papilles anales sont situées à l’extrémité postérieure de l’opisthosoma. Contrairement à la plupart des araignées, qui ont au moins six filières, les tarentules n’en possèdent que deux à quatre selon les espèces. Pourquoi les tarentules ont-elles moins de filières que les araignées qui tissent des toiles? On croit que les filières sont issues des appendices qui étaient à l’origine sur ces segments. Repérez la fente anale à la pointe des papilles anales.

Tiques et acariens Les tiques et les acariens comptent parmi les plus petits prédateurs du règne animal. Toutes les tiques se nourrissent de sang, surtout de Mammifères, mais on sait qu’elles s’attaquent à pratiquement tous les Vertébrés terrestres. Les acariens sont aussi des prédateurs mais, contrairement à tous les autres Chélicérates, certains acariens se nourrissent de la sève de plantes. Chez les tiques comme chez les acariens, la seule caractéristique des Chélicérates qui soit visible est la présence de quatre paires de

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 20

pattes; la division habituelle du corps en un prosoma et un opisthosoma est absente, et aucune segmentation n’est visible.

Parce qu’elles se nourrissent de sang, les tiques sont des vecteurs d’un certain nombre de maladies, dont la fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses et la maladie de Lyme. Les tiques se mettent à l’affût de leurs hôtes dans des graminées ou en hauteur dans des branches d’arbre. Dès qu’elles détectent un dégagement de chaleur corporelle et de dioxyde de carbone, elles se laissent tomber de la végétation et se fixent sur leur hôte. De nombreux randonneurs et campeurs sont au courant des pluies de tiques qui tombent à certaines époques de l’année, ainsi que de la nécessité de vérifier la présence de tiques à la fin de chaque journée passée dans la nature.

Les acariens sont plus petits que les tiques et, bien que certains d’entre eux puissent transmettre des maladies, ils en sont rarement la cause. La gale toutefois résulte d’une infection par des acariens. Les acariens sont des prédateurs importants des Insectes. Ils rampent dans leur système trachéal et le percent pour se nourrir de leur hémolymphe. Récemment, les abeilles et d’autres pollinisateurs ont connu une baisse spectaculaire de leur population, et cela a été attribué en partie à un acarien devenu résistant aux produits chimiques utilisés comme pesticides dans des ruches commerciales. Les acariens sont également d’importants prédateurs de la faune microscopique des sols, et d’autres espèces se nourrissent de la sève de plantes qu’elles sucent.

Lames préparées – Tique Dermacentor ou Ixodes Ces deux espèces permettent d’observer les principales caractéristiques des tiques. La principale différence entre les deux est que Dermacentor a des yeux sur les côtés du scutum. Chez les deux espèces, le corps est aplati dans le sens dorso-ventral, et la subdivision habituelle entre le prosoma et l’opisthosoma associée aux Chélicérates est

pratiquement absente. Au lieu de cela, on distingue à l’avant le capitulum (gnathosoma) portant les pièces buccales et, à l’arrière, l’idiosome auquel sont fixées quatre paires de pattes locomotrices.

Figure 15 Vue dorsale de l’anatomie externe d’une tique.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 21

Le capitulum La partie antérieure du corps s’appelle le capitulum et est formée de trois parties (Figure 15). La première est difficile à voir, mais la deuxième, qui porte les chélicères, et la troisième, qui porte les pédipalpes, sont faciles à identifier. Le capitulum est relié à l’idiosome par la base capitulaire (ou basis capituli), qui forme un anneau cuticulaire et s’insère dans un sillon de la partie antérieure de l’idiosome. Deux régions de la surface de la base capitulaire sont couvertes de petits pores, d’où leur appellation d’aires poreuses. Les pores sont les orifices des glandes dermiques situées en dessous.

Les tiques se nourrissent de sang. L’hypostome et les chélicères se combinent pour former une paille à boire qui pénètre dans la peau de l’hôte. Repérez l’hypostome en dessous des chélicères. L’hypostome est une extension du sternum et, si vous regardez attentivement, vous allez voir à sa surface des dents orientées vers l’arrière. Pourquoi les dents sont-elles orientées dans cette direction? Les chélicères sont en forme d’aiguille et comportent deux segments. Les pédipalpes comportent quatre segments et forment les côtés des pièces buccales perceuses. Les deuxième et troisième segments des pédipalpes ont sur leur face interne un sillon qui entoure l’hypostome et les chélicères. Le quatrième segment (le plus distal) est très petit et situé à la pointe du pédipalpe.

L’idiosome Le reste du corps est l’idiosome, formé par la partie postérieure du prosoma original et par l’ensemble de l’opisthosoma. Chez le mâle, le scutum durci recouvre toute la surface de l’idiosome, alors que chez la femelle, il n’en couvre que la partie antérieure. Le mâle et la femelle se nourrissent de sang, mais la femelle reste fixée plus longtemps sur son hôte et consomme davantage de sang; son scutum plus petit lui permet de faire de plus gros repas. Le bord de l’idiosome est découpé de onze festons rectangulaires. Une paire d’yeux simples se trouve près des bords antérieur et latéral du scutum. Chez Ixodes, les yeux sont imbriqués dans des tissus mous, à peu près au même emplacement. Vers le milieu de la face dorsale, l’idiosome comporte deux ouvertures, les fovéas, par lesquelles sont libérées les sécrétions des glandes fovéales.

Figure 16 Vue ventrale de l’anatomie externe d’une tique.

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 22

L’unique orifice génital est sur la face ventrale (Figure 16), près de la ligne médiane antérieure et derrière la plaque génitale. L’anus est au centre de l’idiosome, près de l’extrémité postérieure de la plaque anale. La plaque anale semble être formée de deux plaques à cause de la présence d’un sillon. Le pore génital, l’anus et la plaque anale sont absents de la nymphe immature. Les stigmates et les plaques spiraculaires qui les entourent sont derrière la dernière paire de pattes.

Les pattes de la première paire possèdent sept segments. Le tarse situé à l’extrémité de ces pattes comporte un organe en forme de coupe appelé organe de Haller. Cet organe sensoriel permet à la tique de repérer un hôte approprié pour se nourrir. Les autres pattes sont dépourvues d’organe sensoriel et possèdent une articulation tarsienne supplémentaire, et donc un huitième segment.

Lames préparées – acariens Comme on l’a mentionné plus haut, les acariens sont microscopiques et constituent un groupe d’animaux extrêmement diversifié. À cause de leur petite taille, on ignore le nombre d’espèces d’acariens. Certains estiment que plus d’un demi-million d’espèces restent à identifier. Cela ne serait pas surprenant, puisque les acariens sont devenus en grande partie des ectoparasites spécialisés des Insectes, qui constituent le groupe le plus diversifié d’animaux terrestres.

La partie antérieure du corps des acariens est le gnathosoma, qui porte les pièces buccales. La partie postérieure est divisée en deux parties : le propodosoma (à l’avant), qui porte les deux premières paires de pattes locomotrices, et le métapodosoma (à l’arrière) (Figure 17). La séparation entre les deux est généralement marquée par le sillon séjugal creusé dans la cuticule. Chez certaines espèces, ce sillon est absent. Il n’y a que peu ou pas de signes de la segmentation primitive de ces régions. Repérez les chélicères, semblables à des aiguilles, qui servent à pénétrer les tissus des organismes dont l’acarien se nourrit, et les pédipalpes, à l’aspect de pattes, qui ont une fonction sensorielle en plus de permettre à l’acarien de se fixer sur sa source de nourriture. Chez de nombreux acariens, la première paire de pattes est également sensorielle et fonctionne comme une paire d’antennes. Ces acariens se déplacent donc sur six pattes, d’où le risque de les confondre avec des insectes.

Figure 17 Anatomie externe d’un acarien folliculaire (A) et d’un acarien de la gale (B).

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 23

Même si certains acariens ont une cuticule entièrement rigide, la plupart ont un corps mou doté de plaques cuticulaires qui entourent les orifices respiratoires (stigmates) et l’anus. De nombreuses espèces ont également sur leur face ventrale des plaques sternales entre les pattes. Le corps des acariens est souvent couvert de soies qui ont une fonction mécanoréceptrice et chimiosensorielle.

Diversité des Arthropodes Les Arthropodes sont un groupe d'animaux très abondants et diversifiés. Les Arthropodes représentent entre 75 et 80 % de toutes les espèces animales. En dépit de leur grand nombre, ils possèdent de nombreuses similarités. L'exosquelette, qui est composé de cuticule inerte sécrétée par l'épiderme sous-jacent, est un des facteurs expliquant le succès des Arthropodes. On a dit que le développement de la cuticule par les Arthropodes était aussi important à leur succès que le développement du plastique l'a été pour les humains. Alors que cela peut sembler être une exagération repensez-y pendant que vous observez les différents animaux pendant cette période de laboratoire. Souvenez-vous qu'ils ont tous été fabriqués avec cette cuticule qui a été sculptée et moulée pour former les fines pièces buccales d'un moustique tout comme la robuste pince du homard, sans oublier les ailes délicates des insectes.

Les Arthropodes et les représentants de plusieurs autres embranchements, dont les Nématodes, possèdent une cuticule de chitine. La présence de cette cuticule élimine la possibilité d’avoir des cils et la combinaison de l’absence de cils et d’une cuticule de chitine remplacée par la mue est caractéristique des Ecdysozoaires. Les Arthropodes se distinguent des autres Ecdysozoaires par la présence des yeux composés, d’un cœur tubulaire dorsal, d’appendice articulés, et de tagmes. Parmi les Arthropodes, la perte des yeux composés, le nombre de paires d’antennes, le type de pièces buccales (mandibulates ou chélicérates) et le type d’appendices (uniramés ou biramés) sert à départager les Uniramés des Crustacés et des Chélicérates. Ce sont ces caractères que vous observerez lors de votre survol de la diversité des Arthropodes.

Il y a quatre classes d'Arthropodes: Trilobitomorpha, Crustacea, Chelicerata et Uniramia. Les Trilobites ont maintenant disparu et seules les trois autres classes subsistent encore aujourd'hui. Examinez les spécimens des différents types d'Arthropodes et déterminez à quelle classe ils appartiennent. Servez-vous des critères suivants. Les Chélicérates se nourrissent à l'aide de leurs chélicères, ont des membres uniramés, et n'ont ni antennes ni yeux composés. Les Crustacés se nourrissent à l'aide de leurs mandibules, ont des appendices biramés, deux paires d'antennes et des yeux composés. Les Uniramés se nourrissent en se servant de leurs mandibules, marchent à l'aide de pattes uniramées, ont une paire d'antennes et une paire de yeux composés.

Compte tenu de la simplicité relative de leur architecture, la diversité des Arthropodes est renversante. Observez l’ensemble des spécimens mis à votre disposition et classez-les en Crustacés, Uniramés ou Chélicérates. Soyez attentif! La cuticule des Arthropodes peut être façonnée en une multitude de formes et vous devrez donc

Ecdysozoaire I: Les Nématodes, les Crustacés et la diversité des Arthropodes© Houseman – page 24

examiner de près vos spécimens pour observer les caractéristiques ancestrales de chaque groupe.