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Université marc Bloch
Strasbourg II
FACULTE DE Théologie catholique
Institut de droit CANONIQUE
Mémoire de MASTERSous la direction de Jean WERCKMEISTER
LES FEMMESSELON La PENSEE DE PAUL VI
(21 JUIN 1963 AU 6 AOUT 1978)
Christiane TOURNIERMai 2007
REMERCIEMENTS
- En préambule de ce travail sur « La pensée de Paul VI sur les femmes »,
je veux vivement remercier le professeur Jean Werckmeister de m’avoir
suggéré de réaliser cette recherche et de m’avoir conseillée et soutenue
dans cette réalisation.
- C’est avec plaisir que je remercie Claude Bosc, bibliothécaire du Centre
diocésain de Montciel, diocèse de Saint-Claude. Dans le même esprit, je
remercie aussi Emmanuel Tramaux, conservateur, de la grande
bibliothèque du Centre diocésain de la rue Mégevand à Besançon.
- Un grand merci à Pierre Compagnon, Chancelier du diocèse de
Saint-Claude pour les encouragements et la documentation et les
conseils prodigués avec amitié.
- C’est de tout cœur, que je remercie Danielle Vianney et Danielle Bécaud
des amies, pour leur collaboration à la mise en page et la relecture de
l’ensemble de ce travail.
Un merci particulier, à tous ceux qui ont encouragé cette recherche et
m’ont soutenue moralement pour mener à bonne fin cette étude.
- Souhaitant que cette recherche et l’ensemble de ces réflexions puissent
servir à mieux faire découvrir la pensée de Paul VI, sur la question des
femmes dans la société et en Eglise. Que le Message de Paul VI soit
éclairant et réconfortant pour toutes les femmes et que toutes soient
fières d’être ce qu’elles sont. Qu’il stimule le plus grand nombre à
2
collaborer à l’œuvre d’Evangélisation, bien au-delà des structures
ecclésiales et contribue à établir une civilisation de l’Amour.
SOMMAIRE
Remerciements
Abréviation
Sommaire
INTRODUCTION
Méthodologie
Analyse juridique et sociologique des années 1960 à 1980
Le climat préparatoire au Concile Vatican II
Présentation du plan, les trois parties successives
PREMIERE PARTIE
PAUL VI ET LE SOUCI DE LA PROMOTION DES FEMMES
1 – Avant Paul VI, Pacem in Terris de Jean XXXIII, 21 avril 1963
2 - D’après la Lettre apostolique « Octogesima adveniens » 1971
A - Faire reconnaître le statut de la femme pour faire cesser les
discriminations
B - Favoriser une égalisation progressive des droits fondamentaux
de l’homme et de la femme
3 – Collaboration à la mise en place de l’Année Internationale de la
Femme en 1975, un moyen pour promouvoir ses droits
4 – Favoriser l’éducation et le développement pour que les femmes
3
deviennent des artisans de Paix
5 – L’ Encyclique « Humanae vitae », 25 juillet 1968 : La considération
pour les femmes passe par des consignes d’éthique
DEUXIEME PARTIE
RECONNAISSANCE DE LA MISSION APOSTOLIQUE
DE LA FEMME
1 - Les femmes portent le souci de l’évangélisation dans tous les secteurs
de la vie humaine
2 - Participation des femmes au concile Vatican II
3 - Ce que dit le concile des femmes
4 - La participation des laïcs à la mission de l’Eglise dans le monde
5 - La proclamation de deux femmes « docteurs de l’Eglise.»
TROISIEME PARTIE
LA QUESTION DES MINISTERES FEMININS DANS LA VIE DE
L’EGLISE
1 – Selon le Motu proprio « Ministeria Quaedam », du 15 août 1972
2 – Selon la déclaration de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi « Inter Insigniores » du 27 janvier 1977
A .Emergence nouvelle de la question de l’ordination des femmes
B .Analyse des arguments en faveur de la déclaration « Inter Insigniores »
a – la Tradition
b – l’attitude du Christ
c – la pratique des apôtres
d – la valeur permanente de cette pratique
e - le sacerdoce ministériel à la lumière du mystère du Christ
f – le sacerdoce ministériel dans le mystère de l’Eglise.
3 – Réaffirmation des positions de Paul VI par ses successeurs,
Jean-Paul II et de Benoît XVI sur la question de l’ordination des
Femmes
4
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLES DES MATIERES
ABREVIATIONS
AL : Décret sur l’Apostolat des Laïcs. Apostolicam
actuositatem
AM : Décret sur l’activité missionnaire, Ad gentes
CIC : Code de Droit Canonique
GS : L’Eglise dans le monde de ce temps. Gaudium et
Spes
La DC : La Documentation Catholique
LG : Constitution dogmatique sur l’Eglise. Lumen Gentium.
MC : Messages du Concile
RDC : Revue de Droit Canonique
5
« du souci de la promotion de la femme,
à la reconnaissance de son apport spécifique
dans la mission de l’Eglise,
à l’exclusion des ministères ordonnés »
Pourquoi s’intéresser à la pensée de Paul VI sur les femmes ? Voici bientôt
40 ans que ce Pape est décédé et depuis s’est déroulée une multitude
d’événements aussi bien dans la société civile que dans l’Eglise.
Néanmoins, les années 1960 à 1975 restent une période charnière dans
l’histoire de la vie des femmes et de toute la société, tout au moins pour les
pays occidentaux. De très nombreux mouvements féministes se forment et
suscitent une réflexion en faveur du statut de la femme dans la société et
dans l’Eglise. Un foisonnement de mesures législatives permet aux femmes
de sortir de l’infériorité et de la soumission dans lesquelles leurs aînées ont
vécu. L’Eglise, souvent par le biais des mouvements d’action catholique est
obligée de dire une parole sur la dignité et l’égalité en droit des femmes.
Méthodologie
Ce travail a demandé de nombreuses recherches pour retrouver tous les
discours et les allocutions que Paul VI a adressés aux femmes durant son
pontificat. Cette collecte de documents a été pratiquée à partir de « La
Documentation Catholique », revue qui publie la quasi-totalité des messages
officiels de l’Eglise. A partir de l’ensemble de ces documents, j’ai effectué
une compilation des textes et tenté d’en dégager une ligne directrice. Peu à
peu se sont dessinées quelques grandes pistes qui ont permis le plan de ce
mémoire. Cette étude se limite à des considérations générales sur la
présence des femmes dans le monde et dans l’Eglise. Elle exclut celle de la
place particulière des femmes dans le mariage ainsi que toute considération
6
relative aux femmes consacrées dans la vie religieuse. Pour mieux saisir
l’impact de la pensée de Paul VI, j’ai essayé d’analyser la situation
juridique et sociologique de la femme des années 60 à 75, tout en ayant
conscience des limites de cette rétrospection, me semble t-il trop axée sur
notre Pays la France, alors que le Message du Saint Père a une portée
universelle et s’adresse à toutes les femmes quels que soient leur situation,
leur race ou leur pays. En parallèle, j’ai tenté de voir dans quelles
circonstances le Concile a été décidé et comment il fait partie intégrante du
travail de Paul VI.
La problématique de cette recherche est de découvrir à travers les écrits de
Paul VI ce qu’il dit sur les femmes. Il est favorable à leur promotion et à
leur participation effective à la mission évangélisatrice de l’Eglise. Il est
partie prenante de toutes les actions en faveur des femmes, que ce soit au
niveau de l’ONU où il a délégué un comité pour l’année internationale de la
femme, ou au niveau du Concile où il a appelé des femmes comme
observateurs ou encore dans l’institution du conseil des laïques qui inclut à
la fois la présence d’hommes et de femmes.
Par ses discours, il a soutenu les femmes africaines, protégé les plus
démunies et encouragé les militantes des cercles féminins d’Action
Catholique. Dans ses écrits, il a manifesté une attention particulière aux
mères, aux épouses et aux religieuses. Et il leur présente Marie comme mère
et comme modèle.
Néanmoins, par la déclaration Inter Insigniores, il insère un veto à
l’accession des femmes au sacerdoce et, de ce fait, à la possibilité de
participer au gouvernement de l’Eglise. Il s’agit :
- De voir comment Paul VI perçoit les femmes et ce qu’il préconise
pour favoriser leur promotion et son respect, y compris par
l’encyclique Humane vitae.
- De pointer ce qu’il fait pour leur donner une reconnaissance qu’elles
n’ont jamais eue dans l’Eglise en leur attribuant la citoyenneté de
laïques, en ouvrant les portes du Concile à une délégation féminine
et en promouvant deux saintes « docteurs de l’Eglise ».
- Pour comprendre sa pensée, sur la non-accession des femmes au
sacerdoce, il est indispensable d’analyser les arguments justifiant la
7
position du Magistère prise par la Congrégation de la Doctrine de la
Foi et de conclure que bien que les femmes n’aient pas toute la place
qui leur revienne, sans leur présence et leur engagement, l’Eglise ne
pourrait pas vivre.
Nous allons étudier successivement les différents secteurs de la vie des
femmes, et découvrir tout ce qui a bougé aux plans sociologique,
économique, juridique et éthique, et a entraîné de grands bouleversements
dans l’existence féminine.
- A - Analyse de la situation de la femme dans la société des
années 1960 à 1980
Parler de la situation de la femme dans l’Eglise nécessite de la situer dans la
société contemporaine de l’époque concernée. Pour comprendre le
mouvement féministe des années 60 à 75, il est nécessaire de faire un retour
en arrière et de voir comment les femmes étaient considérées dans la société
civile de l’époque. Pour pouvoir décrire cette situation, il faut reprendre
quelques évènements qui ont marqué la société. Cette analyse jette surtout
un regard sur la France et quelques pays européens.
Les années 60 à 75 sont caractérisées comme une période de grande
instabilité sociopolitique, marquées par les événements de mai 1968 qui se
traduisent par des émeutes estudiantines et une multiplicité de grèves dans
les entreprises et les services publics. Ce grand mouvement de crise, de
contestation du pouvoir et de l’autorité, donne une dynamique insoupçonnée
aux actions en faveur du féminisme et de l’affranchissement des contraintes
sociales. Un grand vent de liberté individuelle semble souffler, « il est
interdit d’interdire » et chacun entre dans un individualisme, qui hélas !
compromet le lien social et remet en cause les engagements moraux et
religieux.
C’est seulement le 21 avril 1944 que le Général Charles de Gaulle
promulgue l’ordonnance d’Alger accordant aux femmes le droit de vote et
d’éligibilité. C’est le 29 avril 1945 que les Françaises votent pour la
première fois, à l’occasion des municipales. Trente ans plus tard, en 1974,
est créé le secrétariat à la Condition Féminine confié à Françoise Giroud.
8
C’est seulement en 2000 qu’est votée la loi sur la parité : les partis doivent
présenter 50 % de femmes aux législatives sous peine de sanction
financière. En France, aujourd’hui encore, elles ne représentent que 12,3 %
des députés contre 45,3 % en Suède1.
Au niveau de l’évolution du statut de la femme dans la famille, l’époque qui
nous intéresse est riche en modifications. Le Code Civil de 1804 consacre
l’incapacité juridique de la femme mariée et c’est seulement en 1938
qu’avec la réforme des régimes matrimoniaux est supprimée cette
incapacité ; à partir de cette date, les femmes peuvent, en théorie, ouvrir
seules un compte en banque. Une loi du 13 juillet 1965 permet à la femme
mariée d’exercer une activité professionnelle sans autorisation de son mari.
Cette loi autorise également les épouses à gérer leurs biens librement. Elles
peuvent désormais ouvrir un compte à leur nom, même contre l’avis de leur
mari. C’est depuis 1970 qu’elles exercent, conjointement avec leur mari,
l’autorité parentale. Le père n’est plus le chef de famille et une loi de 1985
prononce l’égalité des époux dans la gestion des biens de la famille et de
l’éducation des enfants. Par une loi de 1987, l’autorité parentale peut être
conjointe dans le cas de divorce ou de concubinage. En 1949, Simone de
Beauvoir publie un essai retentissant sur la condition féminine, intitulé « Le
deuxième sexe ». Son ouvrage prône l’émancipation de la femme, possible
uniquement par l’acquisition de son indépendance. Elle dénonce ainsi une
société qui aliène la gent féminine et de laquelle il faut se soustraire pour
atteindre la liberté. D’après elle, « on ne naît pas femme, on le devient ».
Dès 1966, Betty Freidan, écrivain et féministe américaine, fonde
l’Organisation Nationale des Femmes, « National Organization Women »,
connue sous l’acronyme « NOW ». Elle cherche à lutter pour obtenir
l’égalité totale entre les deux sexes. Quelques années plus tôt, elle avait
publié un ouvrage retentissant sur la cause féministe : « La femme
mystifiée ». Dans cet essai, elle s’opposait au fait que le rôle de la femme au
sein de la société se limite seulement à sa vie maritale et maternelle. Selon
elle, la femme est engluée dans de fausses valeurs, ce qui l’empêche de
s’épanouir autrement qu’à partir de son rôle de mère et d’épouse.
1 La Vie n° 3210 du 8 mars 2007, p. 22.
9
L’année suivante, en 1967, le « Women’s Libération Movement » naît aux
Etats-Unis sous l’impulsion de quelques militantes du NOW ; appelée
« Women’s lib », l’organisation lutte en faveur de l’avortement et pour
l’égalité des sexes dans les milieux professionnels2.
En France, le 26 août 1970, le mouvement de libération des femmes est né.
Des groupes de femmes se réunissent afin de déposer une gerbe sur la tombe
du « Soldat inconnu » mais destinée à la femme inconnue, dénonçant ainsi
le manque de reconnaissance vis-à-vis des femmes. Elles sont arrêtées par la
police mais cet évènement donne naissance au Mouvement de Libération
des Femmes (M.L.F.). Sans leader, cette organisation va fédérer plusieurs
groupes de différentes tendances politiques, philosophiques ou
sociologiques. Selon les membres, la femme n’est pas suffisamment
entendue au sein de la société, bien qu’elle obtienne de plus en plus de
droits. La presse et l’édition seront leurs principaux moyens de
communication. Très vite, le mouvement prend de l’ampleur, notamment
grâce à Antoinette Fouque, Simone de Beauvoir ou encore, Christine
Delphy. Les actions de chaque groupe tourneront autour de la protection de
la femme, de la lutte pour ses droits et contre la violence, ainsi que pour
l’avortement.
Le 16 décembre 1977, les Nations Unies reconnaissent La Journée
Internationale de la Femme fixée à la date du 8 mars de chaque année. Dès
1910, une Conférence internationale des femmes socialistes se déroulait à
Copenhague et en avait lancé l’idée. En 1917, le 8 mars, une grande
manifestation de femmes ouvrières se déroulait à Saint Pétersbourg pour
l’amélioration des conditions de travail. Durant le début du XXème siècle,
une succession d’autres manifestations féminines s’organise partout dans le
monde, souvent à la date du 8 mars. En 1921, Lénine décréta lui-même la
journée internationale de la femme. En France, cette journée est officialisée
en 1982.
Nous assistons à un grand mouvement en faveur de la libération sexuelle de
la femme avec des lois en faveur de la contraception et de l’avortement.
Tout d’abord, une loi de 1920 les interdisait et ces actes étaient considérés
comme des crimes passibles de la Cour d’assises avec des sanctions de trois
2 http://www.linternaute.com/histoitr/cgi/categorie/imprimer.phpNf_id_categorie=107&…
10
mois à six ans de prison. La propagande en leur faveur était interdite. En
1939, le Code de la famille crée des brigades policières chargées de traquer
les « faiseuses d’anges » et en 1943, l’avortement devient un crime d’Etat,
puni de mort. Marie-Louise Girod, dite la « faiseuse d’anges », avorteuse
pendant la guerre, a été guillotinée le 30 juillet 1943. L’avortement
thérapeutique est autorisé en 1955 et la pilule contraceptive est mise au
point aux Etats-Unis. En 1956, a lieu la fondation de la Maternité Heureuse
par Marie-André Lagroua-Weil et Evelyne Sullerot et devient à partir de
1960, le Planning Familial.
Le 5 avril 1971, est publié « Manifeste des 343 » : sous l’impulsion du
Mouvement de Libération des Femmes, le journal « Nouvel Observateur »
publie une pétition portant 343 signatures de femmes. Toutes déclarent avoir
eu recours à l’avortement au cours de leur vie. L’ I.V.G., comme nous
l’avons signalé plus haut, était sévèrement punie à l’époque. Elles courent
des risques afin de changer la législation. Elles réclament, en effet, le droit
d’accéder librement à la contraception, ainsi que celui d’avorter en toute
légalité. Parmi ces signatures figurent celles de personnalités très en vogue,
telle que, Simone de Beauvoir, Catherine Deneuve, Jeanne Moreau,
Françoise Sagan… Le scandale est retentissant et poussera les politiques à
réfléchir et à préparer des projets de loi en faveur de la contraception et de
l’avortement, ce qui a provoqué des confrontations entre les adversaires de
la loi et ses protagonistes.
En 1967, le 28 décembre, la loi Neuwirth, légalise la contraception. Après
des débats passionnés, l’Assemblée vote le projet de la loi abrogeant celle
de 1920 qui l’interdisait. La contraception est désormais autorisée mais n’est
pas remboursée par la Sécurité Sociale. Elle le sera à partir de 1974. Le
Planning Familial est institué et les mineures peuvent y être accueillies dans
l’anonymat, et recevoir la pilule contraceptive, gratuitement, sans
l’autorisation de leurs parents. A partir de 1973, l’éducation sexuelle fait
partie intégrante des programmes dans les lycées et les collèges. C’est en
1974 qu’un grand mouvement féministe se mobilise en faveur du droit pour
l’avortement, suite au procès de Bobigny de 1972 où est jugée une jeune
fille mineure qui avait avorté, après un viol.
11
Ce procès devient politique autour de l’avortement et suscite de larges
débats : il aboutit à l’acquittement de la prévenue.
L’Interruption Volontaire de Grossesse (I.V.G.). a été dépénalisée en 1975,
sous l’impulsion de Simone Veil, ministre de la santé du gouvernement de
Valéry Giscard d’Estaing. Cette loi limite l’avortement à la femme « que
son état place dans une situation de détresse » et le prévoit sous deux formes
d’interruption : avant la fin de la dixième semaine ou pour des raisons
thérapeutiques. La loi est adoptée à titre expérimental et ratifiée par une loi
du 31 décembre 1979. L’avortement est pris en charge par la Sécurité
Sociale depuis la loi du 31 décembre 1982, la période de gestation passe de
10 à 12 semaines. L’avortement pour motif thérapeutique peut être pratiqué
au-delà du délai des 12 premières semaines et ce, jusqu’au dernier moment
de la gestation.
Dans les années 1960-1970, on assiste dans tous les pays européens à une
progression de l’activité professionnelle. Les chiffres sont significatifs : En
Europe, en 1960, 30% de la population active sont des femmes ; en 1996,
42.5%. En France, la féminisation s’est faite de manière soutenue et rapide.
En 1962, 6.6 millions de femmes et 13.2 millions d’hommes étaient actifs ;
en 1998, 11.7 millions de femmes et 14.1 millions d’hommes le sont. On
peut alors parler d’un changement de mentalité, de l’émergence de
nouveaux mouvements sociologiques et culturels 3: les femmes s’accrochent
plus à leur travail et veulent une carrière, une indépendance économique et
cela est manifestement relié au mouvement de libération de la fin des années
1960. Ces phénomènes sont concomitants. La scolarisation et la poursuite
des études sont des facteurs essentiels de l’insertion professionnelle des
femmes, mais des inégalités de salaire et de déroulement de carrière sont
flagrantes et subsistent. L’idée d’égalité et de non-discrimination entre
hommes et femmes surgit en 1946, dans le préambule de la Constitution : «
la loi garantit à la femme dans tous les domaines des droits égaux à ceux de
l’homme ». Une loi du 22 décembre 1972 garantit l’égalité de rémunération
pour des travaux de valeurs égales ; la loi du 4 juillet 1975 interdit à
l’employeur la rédaction de contrat de travail sexiste. La loi Yvette Roudy
3 Thébaud Françoise (sous la direction de) Histoire des femmes en Occident, V. Le XXe Siècle, collection Tempus Ed. Plon, 391 p.
12
du 13 juillet 1983 sur l’égalité professionnelle entre hommes et femmes
marque un changement : on passe d’un principe négatif de non-
discrimination à un principe positif d’égalité en terme de droit. Malgré
toutes ces lois en faveur de la femme, des discriminations subsistent et les
employeurs bénéficient de leur pouvoir discrétionnaire4.
Pendant cette période, des femmes se manifestent de manière
exceptionnelle :
- Le 16 juin 1963, la Soviétique Valentina Terechkova, 26 ans, est la
première femme à avoir effectué un vol spatial. Deux ans plus tôt,
son compatriote Youri Gagarine était le premier homme à quitter la
terre à bord de la capsule Vostok. Après 48 révolutions autour de la
Terre, 2 millions de kilomètres et 71 heures de vol, Valentina
Terechkova atterrira le 19 juin à Karaganda, dans les steppes de
Kazakhstan. En 1969, elle deviendra vice-présidente de la
Fédération internationale démocratique des femmes.
- Le 17 mars 1969, à 71 ans, Golda Meir succède à Lévi Eshkol au
poste de Premier Ministre. Ancienne secrétaire générale du Parti
social-démocrate, le Mapaï, elle a été également le premier
ambassadeur israélien en Russie entre 1948 et 1949. A son arrivée à
la tête de l’Etat israélien, Golda Meir annonce avec fermeté qu’elle
ne renoncera pas aux territoires gagnés lors de la guerre des 6 jours
(juin 1967). Golda Meir démissionne en 1974 après la guerre du
Kippour.
- Le 15 mai 1975, 22 ans après l’exploit de Edmund Hillary et
Tenzing Norgay, la Japonaise Junko Tabel, 36 ans, est la première
femme à vaincre l’Everest. Le toit du monde, situé dans l’Himalaya
à la frontière du Népal et de la Chine, culmine à 8850 mètres. Dix
jours plus tard, c’est la tibétaine Phantong qui réalisera l’exploit par
le versant chinois.
- Le 6 mars 1980, Marguerite Yourcenar est la première femme élue à
l’Académie Française. A 76 ans, l’auteur des « Mémoires
d’Hadrien » et de « l’Oeuvre au Noir » prend le fauteuil de Roger
4 Maruani Margareth, Travail et emploi des femmes, Repère la découverte, n°287
13
Caillois. Son admission aux côtés des « sages » a provoqué une vive
polémique parmi les académiciens.5
Ce survol sociologique et juridique de la situation de la femme dans les
années 1960 à 1980 est loin d’être complet, mais il laisse apparaître la
situation de la femme et les problèmes auxquels elle est confrontée pour
pouvoir acquérir une certaine autonomie et sortir de son rôle strict d’épouse
et de mère. Les mouvements de libération de la femme ont, à l’époque, une
audience, qu’ils ne peuvent pas avoir en 2007. Les progrès de la médecine,
une meilleure connaissance du cycle féminin permettaient d’envisager les
questions concernant la vie sexuelle des femmes avec plus d’objectivité et
de médicalisation. Cette question n’était plus uniquement de l’ordre moral,
mais relevait du registre de la santé et, par ce fait même, libérait les femmes
et les encourageait à s’affranchir de l’enseignement de l’Eglise.
Aujourd’hui, de nombreuses femmes vivent leur sexualité en tenant compte
des avis et des conseils des professionnels de la santé (médecins,
sexologues…) sans trop se sentir obligées d’appliquer les orientations
données par le magistère ecclésiastique. Du moment que les choses sont
légales, elles n’ont, pour certaines, pas l’obligation d’être morales. A partir
des différents points abordés, nous constatons que les femmes sortent d’une
humble soumission pour assumer à la fois leur vie intime et leur vie
professionnelle. Cependant, l’acquisition de l’autonomie et sa
reconnaissance restent relativement difficiles et, malgré les acquis sociaux,
sans cesse à reconquérir. L’ascension de l’Everest, la conquête de l’espace,
l’accession au plus haut poste en politique, l’admission à l’Académie
Française sont des exceptions et restent des cas isolés et privilégiés. A côté
de ces magnifiques réussites, la majorité des femmes sont mal reconnues
dans leur vie professionnelle et exercent des professions dans le secteur
tertiaire, souvent à peine rémunérées au SMIC, Salaire Minimum
Interprofessionnel de Croissance ; et elles sont, trop souvent, en cas de
difficultés économiques, les premières victimes des licenciements et du
chômage.
Paul VI est contemporain de tous ces remous et de tous ces
mouvements. D’après ses écrits, il semble parfaitement au courant des
5 Service « histoire » de linternaute.com
14
grandes aspirations de libération de la femme et de l’urgence de sa
promotion. L’évolution de la vie des femmes passe, désormais, par leur
propre autonomie financière. Le plus grand nombre tente de concilier la vie
familiale avec la vie professionnelle, mais ce phénomène se développe au
détriment de la vie de famille et de l’éducation des enfants. Les familles ne
sont plus constituées de 6 ou 8, voire 10 enfants comme après 1945, mais de
2 ou 3. La recherche du confort oblige à de nombreux investissements et
nécessite l’apport d’un double salaire. Les contraintes économiques passent
au premier plan des préoccupations et c’est ainsi que, peu à peu, se déplace
le centre d’intérêt et qu’insensiblement beaucoup de familles font passer la
recherche du bien-être et des loisirs avant la quête du spirituel.
Paul VI, en tant que Pasteur universel, se devait de rappeler le sens de la vie
et dire quelles sont les directions à prendre pour orienter sa vie selon les
Béatitudes, dans le respect de la vie de tous et de chacun. C’est ainsi, qu’il
s’est donné le devoir impératif d’écrire l’Encyclique Humane Vitae pour
rappeler la position de l’Eglise face à la contraception à l’avortement et au
respect de la vie. Il a, chaque fois que l’occasion lui en a été donnée,
défendu et fait valoir les droits de la femme, montré sa dignité, en rappelant
aussi qu’elle doit participer à la vie de l’Eglise.
- B – Le climat préparatoire au Concile Vatican II
La société des années 1960 à 1980 est riche en mutations sociologiques, de
tout genre. Cela a de réels retentissements sur la vie de l’Eglise et sur la
relation que les gens ont avec elle. Jean XXIII, et à sa suite, Paul VI, sentant
l’évolution des mentalités et le décalage qui se creuse de plus en plus avec
l’Eglise, lancent l’idée d’un Concile. De plus, dès les années 1950, des
théologiens sont sensibles à cette situation et leurs travaux vont apporter un
éclairage en faveur d’une rénovation de la vie de l’Eglise. Tout d’abord, le
Père Lagrange, dominicain, s’écarte du littéralisme biblique. (Ecole
Biblique et Archéologie Française de Jérusalem). Le courant libéral mené
par des théologiens comme Yves Congar, Karl Rahner et John Courtney
Murray, tente d’intégrer l’expérience humaine contemporaine au sein du
dogme chrétien. D’autres, comme Joseph Ratzinger, Henri de Lubac et Jean
15
Daniélou, cherchent à travers le mouvement patristique, une source de
renouveau grâce à une étude approfondie des textes des Pères de l’Eglise
des premiers siècles du christianisme. Les abbayes bénédictines tentent
également un renouvellement de la liturgie. Tous ces mouvements d’idées
concourent à l’émergence du nouveau concile.
Sa Sainteté Jean XXIII, le 29 janvier 1959, moins de trois mois après son
élection, à la fin de la semaine de prière pour l’Unité des Chrétiens annonce
son intention de convoquer le Concile, afin de :
- promouvoir le développement de la foi catholique,
- assurer le renouveau moral de la vie chrétienne,
- adapter l’Eglise aux besoins du temps présent.
Pendant les trois années qui suivent, il explicite quelle est son intention dans
de nombreux messages, notamment au sujet de la forme que doit revêtir le
Concile.
On raconte cette histoire : alors qu’on lui demande à quoi va servir le
Concile, il ouvre une fenêtre6 et déclare : « Je veux ouvrir largement les
portes de l’Eglise, afin que nous puissions voir ce qui se passe à l’extérieur,
et que le monde puisse voir ce qui se passe à l’intérieur de l’Eglise ». Il
invite les autres Eglises chrétiennes à envoyer des observateurs au Concile.
Nombre d’Eglises protestantes et orthodoxes acceptent. L’Eglise orthodoxe
russe, craignant les représailles du pouvoir soviétique, accepta de s’y rendre
seulement lorsqu’il est confirmé que le Concile n’abordera pas de questions
politiques. La préparation du Concile dure plus de deux ans. Jean XXIII
déclare le 21ème Concile œcuménique ouvert le 11 octobre 1962, lors d’une
session publique réunissant les 2540 pères conciliaires, tous évêques ou
supérieurs d’ordres religieux masculins, (où sont les femmes ? La moitié de
l’humanité !) et les représentants de 86 gouvernements et organismes
internationaux. Le Pape lit une allocution, intitulée « Gaudet Mater
Ecclesia », « Notre Mère l’Eglise se réjouit ». Au cours de ce discours, Il
repousse les idées des « prophètes de malheur, qui ne font qu’annoncer des
catastrophes » pour l’avenir du monde et de l’Eglise. Le Pape insiste sur
l’aspect pastoral et non doctrinal du Concile : « L’Eglise n’a pas besoin de
répéter ou de reformuler les doctrines ou les dogmes existants, mais plutôt
6 http://fr.wikipedia.org/wiki/IIe_concile_%C5%93cum%C3%A9nique_du_Vatican
16
de chercher à enseigner le Message du Christ à la lumière de l’évolution
constante du monde contemporain ». Il exhorte les Pères conciliaires à
« utiliser les remèdes de la miséricorde, plutôt que les armes de la sévérité ».
Le Concile se tient en quatre sessions plénières qui se déroulent entre le 11
octobre 1962 et le 8 décembre 19657 .
- 1ère session du 11 octobre 1962 au 8 décembre 1962,
- 2ème session du 29 septembre 1963 au 4 décembre 1963,
- 3ème session du 14 septembre 1964 au 21 novembre 1964,
- 4ème session du 14 septembre 1965 au 8 décembre 1965.
« L’homme propose, mais Dieu dispose » ; le Pape Jean XXIII décède le
3 juin 1963, et le 21 juin 1963 le Cardinal Jean-Baptiste Montini est élu
262e Pape sous le nom de Paul VI. Il annonce aussitôt qu’Il souhaite voir le
Concile se poursuivre. L’initiative du Concile revient bien à Jean XXIII,
mais l’ensemble des travaux est effectué sous l’impulsion et la
responsabilité de Paul VI. Il est impossible, ici, de reprendre le contenu des
sessions et d’en dégager les grands points, mais c’est dans ce contexte
bouillonnant d’idées et de réflexions que Paul VI livre sa pensée sur la
position de la femme dans la société et dans l’Eglise, ce qui donne du poids
à sa parole et à son enseignement. De plus, parler de la pensée de Paul VI
concernant les femmes, c’est tenter de voir comment les femmes sont à la
fois présentes à la société civile et à l’Eglise. C’est également voir comment
elles sont perçues par la hiérarchie catholique et relever la place qu’elle
laisse aux femmes dans la mission ecclésiale.
Présentation du Plan en trois parties successives :
La première partie, intitulée : Paul VI et le souci de la promotion des
femmes, où nous verrons que le féminisme n’est pas l’affranchissement des
principes moraux, selon la belle expression de Jean XXIII. A partir de
« Octogesima adveniens », nous dégagerons quelques pistes permettant de
favoriser l’autonomie et la promotion de la femme. Pour faire cesser toute
forme de discriminations, il est urgent de faire reconnaître le statut de la
femme. Il faut prendre toutes les mesures favorisant l’égalisation des droits 7 Alberigo Giuseppe, (sous la direction), Histoire de Concile Vatican II, version française sous la direction d’Etienne Fouilloux, Paris et Louvain, Les Editions du Cerf et Peeter, 2005.
17
fondamentaux de l’homme et de la femme. Afin de promouvoir les droits
de la femme a été instituée l’année internationale de la femme en 1975. Le
Pape Paul VI y a pris une part active. Pour favoriser le respect de la vie et de
la femme, le Pape a adressé l’Encyclique « Humanae Vitae ». Pour lui, la
considération de la femme passe par des consignes d’éthique.
La deuxième partie, intitulée : La reconnaissance de la mission
apostolique des femmes dans l’Eglise. Tout d’abord, Paul VI est le
premier Pape à inviter quinze femmes dont huit religieuses et sept laïques, à
être « observateurs » au Concile Vatican II, cela seulement à partir de la
troisième session qui se déroule du 14 septembre 1964 au 21 novembre de la
même année. Succinctement, nous essayerons de dégager ce que dit le
Concile sur l’engagement des femmes dans l’Eglise. A partir des
déclarations du Pontife, nous verrons comment les femmes peuvent apporter
leur participation à la vie de l’Eglise. Enfin, nous pourrons avec admiration
découvrir que Paul VI a proclamé deux femmes « docteurs de L’Eglise », ce
qui ne s’était jamais produit dans l’histoire.
La troisième partie abordera : La question des ministères féminins dans
l’Eglise, à partir du motu proprio « Ministeria Quaedam » et, surtout, de la
déclaration de la Doctrine de la Foi, « Inter Insigniores » concernant
l’exclusion du ministère sacerdotal aux femmes. Nous verrons dans quel
contexte cette question du sacerdoce des femmes émerge. Ensuite, nous
analyserons les arguments avancés par la Doctrine de la Foi, à savoir : ce
que dit la Tradition au sujet de la non-accession au sacerdoce par les
femmes. Ensuite, nous dégagerons l’attitude de Jésus par rapport à ce sujet,
Lui a choisi seulement des hommes en tant qu’apôtres, alors que les femmes
ont été les premières à témoigner de la résurrection. Enfin, nous analyserons
ce problème par rapport au sacerdoce ministériel à la lumière du mystère du
Christ et du mystère de l’Eglise.
Pour conclure, nous dirons que les femmes, tout en ne pouvant pas être
membres du corps sacerdotal et avoir part de façon directe au pouvoir de
gouvernement et de juridiction dans l’Eglise, ont un rôle spécifique et
irremplaçable, que l’égalité de droit n’entraîne pas forcément l’exercice des
mêmes fonctions. L’égalité dans la différence apporte une complémentarité.
18
C’est ainsi que la mission du Christ ne peut exister sans celle de Marie, sa
Mère.
Nous allons voir maintenant comment Paul VI voyait les femmes et
comment il avait le souci de leur promotion ; nous dégagerons les moyens
qu’il mettait en œuvre pour que les femmes puissent bénéficier de toute leur
dignité et épanouir toutes leurs capacités.
19
1ère PARTIE :
PAUL VI ET LE SOUCI DE LA PROMOTION DES
FEMMES
Paul VI, élu le 21 juin 1963, dès le début de son pontificat, apporte une
attention toute particulière à l’égard des femmes. Nous aurons l’occasion de
développer ses actions en faveur de la promotion et de l’engagement des
femmes dans l’Eglise.
1 – AVANT PAUL VI, JEAN XXIII DANS PACEM IN TERRIS, du 11
avril 1963 parle des femmes, parle des droits des femmes
Déjà, dans l’Encyclique Pacem in terris, publiée à Rome le 11 avril 1963,
Jean XXIII écrivait, dans le cadre de la description de la Société de son
époque : « L’entrée de la femme dans la vie publique, plus rapide peut-être
dans les peuples de civilisation chrétienne, plus lente, mais de façon
toujours ample, au sein des autres traditions ou cultures. De plus en plus
consciente de sa dignité humaine, la femme n’accepte plus d’être considérée
comme un instrument. Elle exige qu’on la traite comme une personne, aussi
bien au foyer que dans la vie publique »8. En même temps le IIe Concile du
Vatican, prenant conscience de la solidarité de toute l’Eglise avec « les joies
et les espoirs, les tristesses et les angoisses » du monde contemporain, a tenu
à condamner les injustices d’une discrimination fondée sur le sexe et à
revendiquer pour la femme, en même temps que le respect des droits et des
devoirs correspondant à sa nature, une participation responsable et totale à
toute la vie de la société.9
La femme n’accepte plus d’être considérée comme un instrument, elle veut
être traitée à part entière comme une personne, voilà ce que le bon Pape
Jean met en évidence.
8 Johannes XXIII, « Pacem in terris »9 Constitution pastorale Gaudium et Spes, N° 29/2, 60/3, DC 1966, n° 1464, col.216 et 247.
20
Paul VI, à partir de nombreux discours qu’Il prononce lors des audiences
manifeste un grand intérêt pour tout ce qui concerne les problèmes des
femmes dans la société et dans l’Eglise. C’est ce que je vais tenter de mettre
en valeur. A l’occasion de la rencontre des participants au Congrès de
juristes catholiques italiens, Le Pontife a énoncé quelques principes
fondamentaux, à propos du thème de leurs travaux : « La place de la femme
dans la société d’aujourd’hui ». Pour le Pape, ce thème est si important qu’il
mériterait d’être développé d’une façon beaucoup plus large et il dit :
« Comme quiconque observe les réalités actuelles, nous ne pouvons pas ne
pas voir le processus de transformations socioculturelles qui a entraîné
d’importants changements dans la position et le rôle de la femme. Le
passage, assez rapide à une société caractérisée par l’industrialisation, avec
les phénomènes qui l’accompagnent : urbanisation, mobilité et instabilité de
la population, transformations de la vie familiale et des relations sociales, a
mis la femme, elle aussi, au centre d’une crise des institutions et des mœurs.
Cette crise n’est pas encore résolue et ses répercussions se sont fait sentir
surtout sur les rapports familiaux, sur la mission éducative, sur l’identité
même de la femme en tant que telle et, surtout, la façon qui lui est propre de
s’insérer dans la vie sociale par le travail, les amitiés, l’action caritative et
les loisirs. L’esprit religieux, par conséquent, la pratique religieuse, s’en
sont ressentis. C’est pourquoi, nous nous trouvons aujourd’hui devant des
phénomènes de grande portée spécialement l’égalité et l’émancipation
croissante de la femme par rapport à l’homme, une nouvelle conception et
une nouvelle interprétation de ses rôles d’épouse, de mère, de fille, de sœur ;
son accession toujours plus large au travail professionnel, avec des
spécialisations toujours plus poussées ; sa tendance accentuée à préférer
travailler en dehors de chez elle, ce qui ne va pas sans dommages pour les
rapports conjugaux et surtout l’éducation des enfants… Il est clair que tout
ne doit pas être considéré comme négatif dans ce nouvel état de choses.
Dans ce contexte, peut-être pourra-t-il même être plus facile pour la femme
d’aujourd’hui et de demain de déployer en plénitude toutes ses énergies.
Le vrai problème consiste à reconnaître, respecter, et, lorsque cela est
nécessaire, retrouver les principes que constituent des valeurs
irremplaçables pour la culture d’un peuple évolué. Le Pape les rappelle
21
brièvement : « D’abord la différence de fonctions et de nature de la femme
par rapport à l’homme, d’où découle l’originalité de son être, de sa
psychologie, de sa vocation humaine et chrétienne ; sa dignité qui ne doit
pas être avilie, comme il arrive très souvent, qu’il s’agisse des mœurs, du
travail, de la promiscuité sans discrimination, de la publicité ou des
spectacles ; et nous ajouterons, la primauté qui revient à la femme sur tout le
domaine humain où se posent plus directement les problèmes de la vie, de la
souffrance, de l’assistance, surtout dans la maternité. »10
De sorte que, le Pape pense qu’Il peut formuler des vœux pour que la
femme puisse avoir part, de façon plus juste, à la vie de la société :
- Que soit reconnue la plénitude des droits civils, comme à l’homme,
s’il n’en est pas déjà ainsi.
- Qu’il soit réellement rendu possible à la femme d’exercer les mêmes
fonctions professionnelles, sociales et politiques que l’homme, selon
ses capacités personnelles.
- Que loin d’être méconnues, soient honorées et protégées les
prérogatives propres de la femme dans la vie conjugale, familiale,
éducative et sociale.
- Que soit rappelée et défendue la dignité de sa personne et de son état
de célibataire, d’épouse ou de veuve, et que soit donnée à la femme
l’assistance qui convient spécialement lorsque le mari est absent,
impotent, en prison, c'est-à-dire lorsqu’il n’est pas en mesure de
remplir sa fonction dans la famille.11
Après la messe qu’il a célébrée dans la Basilique Saint-Pierre, le dimanche
30 mai 1965, Paul VI s’est adressé dans les termes suivants au Centre
Féminin Italien12 : « Du fait de la transformation de la mentalité féminine, la
femme est entrée dans la vie publique et a pris conscience de sa propre
dignité. Cependant, le processus social qui doit assurer à la femme la pleine
10 Paul VI, Discours aux Juristes Catholiques Italiens, sur la place de la femme dans la société d’aujourd’hui, le 7 décembre 1974. DC. Du 19 janvier 1975 n° 1668, p 55-56.11 Idem, DC n° 1668, 19 janvier 1975. p 55.12 Le Centre Féminin Italien est l’organe fédératif des différentes organisations féminines catholiques italiennes. Il fêtait le 20ème anniversaire de sa création, à laquelle Mgr Montini avait collaboré, à la demande de Pie XII.
22
reconnaissance de ses droits, de ses positions, de ses responsabilités, n’est
pas encore achevé, il n’est pas toujours fondé sur des principes sûrs. Il faut
donc d’une part, exprimer plus largement et plus énergiquement les
principes de l’authentique féminisme, puis les déterminer par certains
critères fondamentaux concernant leur application juste et bienfaisante ; et
d’autre part, il faut être vigilant devant l’invasion, l’irruption même d’une
certaine mentalité qui affiche avec complaisance son absence de préjugés et
sa volonté de révolutionner la vie féminine… L’émancipation revendiquée
concerne, non pas tant l’abolition, maintenant acquise, des inégalités
sociales de la femme par rapport à l’homme, que la désagrégation des
principes moraux qui donnent encore à la femme une physionomie
traditionnelle. La femme moderne, privée de la Lumière chrétienne, veut
s’affranchir de cette physionomie comme d’une contrainte qui n’a plus de
valeur, afin de jouir de cette liberté rebelle et illimitée à laquelle les courants
matérialistes et hédonistes de notre temps l’ont initiée, sans s’embarrasser
de préjugés, et à laquelle la corrosion intérieure, logique et psychologique,
du nihilisme existentialiste l’a impitoyablement éduquée… La parfaite
égalité de nature et dignité et donc de droits est donnée dès la première page
de l’Ecriture ». Le Pape de continuer : « La justice qui t’est due ne consiste
pas, en effet, en une assimilation banale de ta vie au mode de vie masculin,
ni en une négation des aspirations profondes qui sont propres à ton âme.
Elle consiste dans le respect et l’élévation de ta féminité, laquelle est
d’autant plus satisfaite et heureuse que sa spécificité, son originalité, les
prérogatives de sa psychologie et sa fonction sont mieux reconnues. Tout
cela rend ta mission complémentaire de celle de l’homme, ne la déprécie
pas, ne l’avilis pas, mais valorise-la dans sa mission éternelle au service des
valeurs les plus hautes de la vie humaine13 ». Tout en reconnaissant la
promotion de la femme, le Saint Père met très vite en garde contre un
mouvement féministe qui laisserait de côté toutes les valeurs de la morale
chrétienne. Pour le Pape, le féminisme n’est pas l’affranchissement des
principes moraux, pour lui, c’est en affermissant dans la conscience des
femmes les principes de la sainte morale chrétienne, qu’on leur donnera les
bases et les moyens de leur promotion. Il reconnaît la mission spécifique de
13 DC, 30 mai 1965, n°1459, p 1063 à 1068.
23
la femme, celle-ci ne peut s’accomplir que dans la parfaite harmonie de sa
nature profonde.
2 - D’ APRES LA LETTRE APOSTOLIQUE « OCTOGESIMA
ADVENIENS » 1971
Dans la lettre apostolique « Octogesima Adveniens » pour le 80e
anniversaire de l’Encyclique « Rerum Novarum » adressée au Cardinal Roy,
Président du Conseil des Laïcs et de la Commission « Justice et Paix », Paul
VI veut inciter les fidèles à reprendre et à prolonger l’Enseignement de ses
prédécesseurs, en réponse aux besoins nouveaux d’un monde en pleine et
constante évolution. Il a conscience de la grande diversité des situations
dans lesquelles, de gré ou de force, les chrétiens se trouvent engagés, selon
les régions, selon les systèmes sociopolitiques, selon les cultures. Ici, ils
sont réduits au silence, soupçonnés et pour ainsi dire tenus en marge de la
société, encadrés sans liberté dans le système totalitaire. Là, ils sont une
faible minorité dont la voix se fait difficilement entendre. En d’autres
nations, où l’Eglise voit sa place reconnue, et parfois de façon officielle, elle
se trouve elle-même soumise aux contrecoups de la crise qui ébranle la
société, et certains de ses membres sont tentés par des solutions radicales et
violentes dont ils croient pouvoir espérer une issue heureuse. Tandis que
d’aucuns, inconscients des injustices présentes, s’efforcent de prolonger la
situation existante, d’autres se laissent séduire par des idéologies
révolutionnaires qui leur promettent, non sans illusion, un monde
définitivement meilleur.
A - Faire reconnaître le statut de la femme pour cesser les
discriminations
Le Saint Père présente l’ensemble de tous les problèmes nouveaux de la
société en pleine mutation : l’urbanisation et l’exode rural ; les difficultés de
vivre en chrétiens dans une société urbaine et industrialisée ; Il aborde les
difficultés des travailleurs, des jeunes, il tente d’analyser les causes des
discriminations de tout genre, il affirme un droit à l’immigration, il appelle à
l’imagination sociale pour créer des emplois, il rappelle la responsabilité des
pouvoirs publics face au développement des moyens de communication et
24
évoque les problèmes de l’environnement et dit : « Par une exploitation
inconsidérée de la nature, l’homme risque de la détruire et d’être, à son tour,
la victime de cette dégradation. Dans ce cadre, Paul VI se demande quelle
sera la place de la femme, dans ce monde en gestation ; Il affirme que dans
beaucoup de pays, un statut de la femme doit faire cesser la discrimination
effective et établir des rapports d’égalité dans les droits ; et le respect de sa
dignité doit faire l’objet de recherches et parfois de vives revendications. Le
Pape souligne bien : « qu’il ne s’agit pas de cette fausse égalité qui nierait
les distinctions établies par le Créateur lui-même et qui serait en
contradiction avec le rôle spécifique, combien capital, de la femme au cœur
du foyer aussi bien qu’au sein de la Société. L’évolution des législations
doit au contraire aller dans le sens de la protection de sa vocation propre en
même temps que de la reconnaissance de son indépendance en tant que
personne, de l’égalité de ses droits à participer à la vie culturelle,
économique, sociale et politique ».14
B - Favoriser une égalisation progressive des droits
fondamentaux de l’homme et de la femme
Dans une allocution à la première session de la Commission d’études sur la
femme dans la Société et dans l’Eglise en date du 17 novembre 1973, le
Saint Père, après un accueil chaleureux et des encouragements pour les
travaux de cet organisme, en rappelle les finalités :
« Il s’agit de recueillir, de vérifier, d’interpréter, de réviser, de mettre au
point les idées exprimées sur la fonction de la femme dans la communauté
moderne. Ce travail suppose évidemment que l’on revendique, protège et
assure la dignité de la femme, avec la conviction et la fierté que comporte
cet idéal. Il faut considérer en ce domaine, non seulement la personnalité de
la femme, son être, mais les valeurs féminines, les fonctions qui y
correspondent. Et sans doute cela nécessite-t-il une certaine attitude
défensive face à tout ce qui méconnaît cette dignité propre. A ce sujet, la
conception que la foi chrétienne a développée demeure plus que jamais
valable, moderne, féconde et, en certains points, intangible. Cette
14 Paul VI, Lettre apostolique « Octogesima adveniens » pour le 80e anniversaire de l’Encyclique « Rerum novarum », DC du 6 juin 1971, N° 1587, p 505.
25
conception appelle une égalisation progressive des droits fondamentaux de
l’homme et de la femme, et une plus grande prise de conscience de leurs
devoirs respectifs. Cette mise sur un même point d’égalité touche aussi les
fonctions sociales qu’ils assument l’un et l’autre. Pour assurer l’accès de la
femme à ces fonctions, sa participation, un progrès est prévisible, il est
possible et souhaitable, et en ce sens, il apporterait une nouveauté. Cela
suppose une confiance dans les capacités de la femme et un sérieux effort
d’éducation qui lui permette de jouer pleinement son rôle, spécialement
dans le domaine moral et humain. Il faudra, d’ailleurs, toujours veiller à ce
que la femme ne subisse aucun préjudice dans ce qui est lié essentiellement
à sa propre vie, à sa propre personnalité, à sa place dans la famille. Ce
travail d’observation, de recherche, de réflexion vous est confié avec l’aide
des théologiens et des experts pour un meilleur service de la femme et de la
société civile ou ecclésiale .»15
Nous l’avons déjà remarqué, le Saint Père ne cloisonne jamais l’action, il la
veut aussi bien dans la société civile qu’ecclésiale ; il insiste pour que ce
groupe mette bien au cœur de ses préoccupations la conception chrétienne
de la femme, celle qui correspond à la doctrine et à la vie de l’Eglise.
Dans cet esprit, le 29 octobre 1966, Sa Sainteté Paul VI a reçu les
participants au 52e Congrès national de la Société italienne d’obstétrique et
de gynécologie, après avoir accueilli les médecins avec grande
considération, il a exprimé sa conception humaine et chrétienne de la
femme : « Ce qui stimule notre pensée, ce n’est pas tant votre art et votre
savoir que la valeur d’idéal, la signification symbolique, la vision sacrée et
sublime que notre doctrine religieuse et notre formation humaniste
attribuent à la créature féminine, à la femme. Vous et nous, ici, nous ne
sommes pas sur le même plan. Mais nous voulons croire que, de même que
nous reconnaissons amplement la sphère de votre compétence, de même,
vous ne manquerez pas d’apprécier la perspective dans laquelle notre pensée
humaine et chrétienne considère la femme d’une façon différente de la
vôtre, mais non moins réelle »… « Pour nous, la femme est le reflet d’une
beauté qui la dépasse, le signe d’une bonté qui nous paraît sans bornes, le
15 Paul VI, Allocution à la première session de la Commission d’études sur la femme dans la société et dans l’Eglise, DC du 16 décembre 1973, n° 1644, p 1057.
26
miroir de l’être humain idéal, tel que Dieu l’a conçu, à son image et à sa
ressemblance. Pour nous, la femme est une vision de pureté virginale, qui
restaure les sentiments affectifs et moraux les plus élevés du cœur humain.
Pour nous, elle est dans la solitude de l’homme l’apparition de sa compagne
qui sait le don suprême de l’amour, la valeur de la collaboration et de l’aide,
la force de la fidélité et de la diligence, l’héroïsme habituel du sacrifice.
Pour nous, elle est la mère –inclinons-nous– la source mystérieuse de la vie
humaine, où la nature reçoit encore le souffle de Dieu, créateur de l’âme
immortelle. Pour nous, elle est la créature la plus docile à toute formation,
par conséquent, apte à toutes les fonctions culturelles et sociales,
particulièrement à celles qui sont le plus congénitales à sa sensibilité morale
et spirituelle. Pour nous, elle est l’humanité qui a la meilleure attitude
devant l’attrait religieux, l’humanité qui, lorsqu’elle suit sagement cet
attrait, s’élève et se sublime elle-même dans l’expression la plus authentique
de la féminité ; l’humanité qui, lorsqu’elle chante, prie, soupire ou pleure
semble ainsi converger naturellement vers une figure unique et suprême,
immaculée et douloureuse, la femme privilégiée, bénie entre toutes les
femmes, la Vierge, mère du Christ, Marie. Tel est, Messieurs, le plan sur
lequel nous rencontrons la femme. Il ne vous est certainement pas inconnu,
et il ne vous déplaît pas de vous élever, de temps en temps, de votre plan
jusqu’au nôtre, pour compléter votre perspective dans une vision
d’ensemble, ainsi que pour trouver réconfort et inspiration au milieu de vos
études et de l’exercice de vos soins »16.
Paul VI révèle dans cette allocution, une conception très élevée de la femme
à travers des images diverses et voit en elle toutes les capacités à acquérir
des formations et à accéder à toutes les fonctions culturelles et sociales.
Néanmoins, il ne se place pas au niveau de l’organisation hiérarchique de
l’Eglise.
Le Saint Père s’est aussi adressé aux femmes africaines ; spécialement dans
son message « Africa terrarum »17, Il reprend la mission de la femme en
général en insistant sur la situation particulière de la femme
africaine : « Dans le cadre de la famille, la femme occupe une place de 16 Allocution de Paul VI à des gynécologues italiens, DC n° 1482, 20 novembre 1966 pages 1921 à 1926.17 Paul VI, Message Africa terrarum , DC 19 novembre 1967, n° 1505, p 1953 et 1954.
27
premier plan. Sa position a subi, elle aussi, de profondes transformations.
Ainsi, elle voit s’ouvrir à elle de nouveaux champs d’activité dans les
écoles, les hôpitaux et dans les diverses formes de la vie politique et
administrative de l’Etat moderne. On peut regarder l’enseignement de
l’Eglise et l’esprit chrétien comme les causes principales de ce
développement. C’est donc à juste titre que « L’Eglise est fière d’avoir
magnifié et libéré la femme, d’avoir fait resplendir au cours des siècles,
dans la diversité des caractères son égalité foncière avec l’homme. »18 A la
femme africaine, il est demandé, aujourd’hui, de prendre plus pleinement
conscience de sa dignité, de sa mission de mère, du droit qui lui revient de
participer à la vie sociale et au progrès de l’Afrique nouvelle. A la femme
africaine, il est demandé en premier lieu de ne plus être considérée ou traitée
comme un simple instrument ; sa dignité de femme est respectée quand on
lui reconnaît sa liberté de personne, soit qu’elle veuille se marier –et alors,
elle a le droit de choisir librement son époux19- soit qu’elle préfère garder sa
virginité en se consacrant à Dieu et en se dévouant au bien de tous. Dans
l’exercice de sa mission maternelle, qui est pour elle la mission essentielle,
la femme africaine prodiguera à ses enfants ses soins affectueux, les suivra
dans leur croissance et les préparera à prendre conscience d’eux-mêmes et à
affronter les responsabilités de l’avenir. Dans l’exercice de ses activités
professionnelles et dans ses rapports sociaux, la femme apportera ce
dévouement, cette douceur et cette délicatesse, qui sont des qualités
typiquement féminines et qui, dans un monde dominé par la technique,
sauvegardent le sens des réalités et des dimensions humaines. La
participation à la vie sociale dans l’ordre politique et administratif constitue
également un de leurs droits et de leurs devoirs. Les femmes peuvent
influencer directement le renouveau des institutions sociales, surtout dans
des domaines qui touchent au mariage, à la famille et à l’éducation des
enfants. Quant à l’Eglise, fidèle à son œuvre de formation, elle invite les
femmes d’Afrique, comme celles du monde entier et de tous les temps, à
prendre comme modèle la figure de Marie, la Mère de Dieu, car « sa vie,
comme dit saint Ambroise, fut telle qu’elle peut offrir un modèle à tous ».20
18 Concile Vatican II, Message aux femmes, 8 décembre 1965.19 Concile Vatican II, Constitution Gaudium et Spes, n° 29.20 Saint Ambroise, De Virginibus, livre II, chapitre II, n° 15
28
3 - COLLABORATION A LA MISE EN PLACE DE L’ANNEE
INTERNATIONALE DE LA FEMME EN 1975 : un moyen pour
promouvoir les droits des femmes
Recevant le 6 novembre 1974, Madame Helvi Sipila, sous-secrétaire
générale de l’O.N.U., pour le développement social et les affaires
humanitaires et secrétaire générale de l’Année Internationale de la Femme,
Paul VI lui a adressé une allocution21 : « Nous saluons la représentante de
cette organisation, tâche assumée par les Nations Unies avec « l’Année
Internationale de la Femme » proclamée en 1975. Cette rencontre nous
donne l’occasion de vous exprimer la bonne volonté et l’attention avec
lesquelles nous voulons suivre cette initiative ». Le Pape rappelle qu’une
commission d’études a été créée en 1971, à la demande des participants au
Synode en vue de réfléchir à la pleine participation de la femme à la vie
communautaire de l’Eglise et de la Société.
Le thème retenu pour l’Année Internationale de la Femme « Egalité,
Développement et Paix » n’est pas sans susciter l’intérêt très vif de
l’Eglise. Après avoir brièvement commenté ce titre, le saint Père insiste :
« La femme d’aujourd’hui, pourra devenir plus consciente de ses droits et de
ses devoirs, et contribuer non seulement à sa propre élévation, mais aussi au
progrès qualitatif de la société humaine dans le développement et dans la
paix. La femme développera et préservera principalement dans la
communauté familiale en plein coresponsabilité avec l’homme, sa fonction
qui consiste à accueillir, donner et éduquer la vie en développant ses
potentialités. L’Année Internationale de la Femme a le très noble but de
valoriser toujours davantage la dignité et la mission de la femme.»
Le 18 avril 1975, Paul VI reçoit les membres de la Commission d’études sur
le rôle de la femme dans la société et dans l’Eglise dont les missions ont été
définies le 17 novembre 1973, ainsi que les membres du comité par
l’intermédiaire duquel cette Commission participe à l’Année Internationale
21 Paul VI, Allocution pour l’Année Internationale de la femme, DC n° 1665, 1e décembre 1974. p 1007.
29
de la Femme, organisée sous les auspices de l’O.N.U. en 1975 ; le Pape
affirme : « Cette œuvre de promotion demande une maturation progressive,
qui ne brûle pas les étapes. Il s’agit, en effet, de discerner avec sagesse. Les
questions sont délicates ; parler d’égalisation des droits ne résout pas le
problème qui est beaucoup plus profond : il faut viser une complémentarité
effective, afin que les hommes et les femmes apportent leur richesse et leur
dynamisme propres à la construction du monde, non pas nivelé et uniforme,
mais harmonieux et unifié, selon le dessein du Créateur ou pour reprendre le
terme de l’Année Sainte, renouvelé et réconcilié. Par ailleurs, il faut agir à
bon escient, non pas échafauder des programmes utopiques, conçus au
sommet par une élite et pour une élite, mais correspondre aux vrais besoins
du peuple, pour faire cheminer celui-ci ensemble, à travers des étapes
opportunes et réalistes. Il y a tant à faire dans ce domaine ! Faut-il
mentionner qu’il y a encore des millions de femmes qui ne jouissent pas des
droits essentiels ni des égards élémentaires » ? Le Pape se félicite que la
mise en route du travail de la Commission d’études sur les femmes ait
coïncidé très heureusement avec la préparation dans le monde de l’Année
Internationale de la Femme, proclamée par les Nations Unies en 1975.
L’Eglise, assure le Saint Père, est solidaire à part entière des buts assignés
par l’Année Internationale. De plus, le Saint-Siège est heureux d’accueillir
l’invitation qui lui est faite par l’Organisation des Nations Unies d’y
collaborer à son niveau. Paul VI fait remarquer que : « C’est toute l’Eglise
qui est concernée ; c’est dans les communautés locales qu’il faut susciter
une révision de vie sur la façon dont sont respectés et promus les droits et
les devoirs respectifs de l’homme et de la femme, et sur une participation
des femmes à la vie sociale d’une part, et, d’autre part, à la vie et à la
mission de l’Eglise.»
4- FAVORISER L’EDUCATION ET LE DEVELOPPEMENT POUR
QUE LES FEMMES DEVIENNENT DES ARTISANS DE PAIX
L’Année Internationale de la Femme ne vise pas seulement à obtenir
l’égalité des droits ; elle vise aussi à assurer la pleine intégration des
30
femmes dans l’effort global de développement et leur contribution
croissante au renforcement de la Paix entre les hommes et entre les peuples.
Paul VI, dans une lettre adressée à la secrétaire générale, le 19 juin 1975, à
l’occasion de l’ouverture de la conférence mondiale de l’Année
Internationale de la Femme qui se tenait à Mexico du 19 juin au 2 juillet,
relève qu’il s’agit de : « rendre justice à la femme, laquelle au cours de
l’histoire, et aujourd’hui encore, a été reléguée à une situation d’infériorité
par rapport à l’homme, et a eu, plus souvent que lui, à souffrir du sous-
développement et de la guerre. Il s’agit d’assurer concrètement la pleine
intégration de la femme à l’effort global de développement, ainsi que de
reconnaître et de promouvoir son apport à la consolidation de la Paix.
Quelle espérance pour l’humanité si, grâce à l’effort concerté de toutes les
bonnes volontés, les centaines de millions de femmes de toutes les régions
du monde pouvaient enfin mettre au service de toutes ces grandes causes,
notamment, celle de la réconciliation dans les familles et la société, non
seulement leur force numérique, mais aussi l’apport irremplaçable de leurs
dons d’intelligence et de cœur ! Cette espérance, nous l’avons évoquée à
l’occasion de la Journée mondiale de la paix. ».22 Cela a une résonance toute
particulière dans le cadre de cette Année Sainte. Dans la famille comme
éducatrice et dans tous les secteurs de la société, les femmes chrétiennes ont
un apport irremplaçable à fournir à la Paix du monde et à la construction
d’une société plus juste et plus fraternelle. Sans cet apport spécifique, le
Saint Père est convaincu que le progrès ne sera pas pleinement humain.
L’avenir de la société civile et de la communauté ecclésiale attend beaucoup
des femmes chrétiennes en raison de leur sensibilité et de leur capacité de
compréhension, de leur douceur et de leur persévérance, de leur générosité
et de leur humilité. Ces vertus si bien accordées à la psychologie féminine,
et magnifiquement épanouies dans la Vierge Marie, sont aussi des fruits de
l’Esprit.23 Afin que les femmes puissent être de puissants artisans de paix, le
Saint Père insiste sur l’importance de l’éducation, de la lutte contre
l’analphabétisme, qui joue un rôle néfaste, surtout chez les femmes des
régions rurales, en faisant obstacle à leur développement et en portant 22 cf. DC, 1975, n° 1667, p. 15.23 Paul VI, Allocution au Comité pour l’Année Internationale de la femme, DC, 4 mai 1975, n° 1675. p 403- 404.
31
atteinte à leurs droits essentiels ; et le Pape de rappeler l’Encyclique
Populorum Progressio, du 26 mars 196724 dont nous fêtons le quarantième
anniversaire durant ce mois de mars 2007 : « La faim d’instruction n’est pas
moins déprimante que la faim d’aliments : un analphabète est un esprit sous
alimenté. » n° 35
Recevant, le 18 septembre 1975, les participantes à la XIème Assemblée
Générale de l’Union Européenne Féminine qui s’était réunie à Frascati, sous
la présidence de Mme Diana Ellis (Angleterre), Paul VI leur a adressé une
allocution : « Votre visite est un témoignage de votre attachement à l’Eglise
du Christ, infatigable promotrice des valeurs humaines et chrétiennes, sans
lesquelles la société risque bien de connaître l’aventure ! » Le Pape félicite
chaleureusement cette délégation pour le travail accompli depuis vingt ans
au sein de l’Union Européenne Féminine et affirme : « Vous avez
certainement contribué à ouvrir les chemins d’une large reconnaissance du
rôle de la femme dans la vie civique et politique en vos différents pays
d’Europe. Votre culture, votre foi, vos responsabilités souvent très élevées
vous imposaient ce devoir. Vous avez eu le courage de ne pas vous
dérober »… « Nous vous exhortons à poursuivre la route commencée avec
réalisme et patience, mais aussi avec la foi et la charité de disciples du
Christ. Et le monde et l’Eglise verront la femme assumer, aux diverses
instances de la vie de son Pays, sa part indispensable de réflexion, de
décision et d’action. Et puisque nous nous adressons à des femmes
européennes, assurément bénéficiaires25 d’une civilisation longuement
imprégnée par le christianisme, mais également concernées par les multiples
aliénations sécrétées par la vie moderne, nous ne craignons pas d’inviter
toutes les femmes à s’engager plus que jamais pour sauvegarder les droits
imprescriptibles de la personne humaine, depuis sa conception jusqu’à son
dernier souffle. De cette manière, vous contribuerez à humaniser davantage
notre société dominée par la technique. C’est un besoin profond dont
l’urgence se fait sentir toujours plus vivement. »
De nouveaux mots apparaissent dans cette allocution : développement,
alphabétisation, élévation, progrès qualitatif et paix ; le Saint Père pense que 24 Encyclique Populorum Progressio, n° 35.25 Paul VI, Allocution à l’Union Européenne Féminine, le 18 septembre 1975, DC n° 1687,7 décembre 1975, p 1025.
32
la promotion des peuples passe par le rôle éducatif de la femme et par sa
propre promotion, il propose alors comme solide point de référence la figure
de la Très Sainte Vierge, « Elle peut être considérée comme le miroir
reflétant les espérances des hommes et des femmes de notre temps. »
5 - L’ENCYCLIQUE « HUMANAE VITAE » : LA CONSIDERATION
POUR LA FEMME PASSE PAR DES CONSIGNES D’ETHIQUE
L’encyclique « Humanae Vitae » sur le mariage et la régulation des
naissances est un document pontifical qui suscite de vives réactions dans le
monde et, spécialement, en France. Paul VI, dès le 23 juin 1964, est
préoccupé par le problème de la régulation des naissances. Pour lui, c’est
une question extrêmement délicate et complexe sur laquelle en raison de ses
implications religieuses et morales, il revient à plusieurs reprises. Avant
d’aborder cette question, le Pape a rappelé aux médecins gynécologues26 :
« Nous avons l’obligation de parler, c’est une question d’actualité. Nous
savons que vous attendez de nous une parole décisive sur la pensée de
l’Eglise à ce sujet ». Paul VI montre l’intérêt suprême que l’Eglise porte aux
questions concernant l’amour, le mariage, les naissances et la famille.
Avant de se prononcer sur la régulation des naissances, le Saint Père prend
de nombreuses précautions et Il affirme qu’il a examiné attentivement les
questions doctrinales et pastorales soulevées par ce sujet au cours de ces
dernières années. Il veut les étudier à la lumière des données de la science et
de l’expérience, particulièrement sur les plans médical et démographique,
pour donner au problème sa vraie et bonne solution, celle-ci doit être
intégralement humaine, c'est-à-dire morale et chrétienne. Pour mener à bien
cette réflexion, le Pape fait appel à une commission internationale vaste,
variée et très compétente. Cette commission se réunit en plusieurs sessions,
fournit un gros travail et remet ses conclusions au Pape, mais celui-ci ne
considère pas ce travail comme définitif, du fait que la question de la
régulation des naissances comporte de graves implications tant sur le plan
doctrinal que pastoral ou social. L’ensemble des recherches de la
commission fait apparaître l’énorme complexité et la redoutable gravité de
26 DC 1969 n° 1427 col. 817.
33
la question de la régulation des naissances. Après avoir remercié tous ceux
qui ont contribué à cette étude, le Pape ose dire : « Cela impose à Notre
responsabilité un supplément d’étude27. »
Le 12 février 1966, dans son allocution aux congressistes du Centre Italien
Féminin28, le Saint Père affirme : « qu’il ne lui est pas encore possible de
sortir de sa réserve sur ce qui concerne le grave et complexe problème
des normes relatives aux naissances ». Faisant de nouveau allusion à la
Commission Pontificale Spéciale qui a été chargée d’approfondir l’étude de
la question des naissances, il précise que le Magistère de l’Eglise peut
proposer des règles morales seulement lorsque il est certain d’interpréter la
Volonté de Dieu. Pour arriver à cette certitude, l’Eglise n’est pas dispensée
de faire des recherches ni d’examiner les nombreuses questions soumises à
sa considération. Les travaux, avoue le Pape, sont parfois longs et difficiles.
La préparation de l’Encyclique dure quatre ans et le Pontife dans une
allocution d’audience solennelle du 31 juillet 1968, Où il présente
l’Encyclique, sa préparation, son but et son esprit, ose dire :
« L’élaboration de cette étude Nous a fait beaucoup souffrir spirituellement.
Jamais Nous n’avons senti comme en cette circonstance le poids de notre
charge. Nous avons étudié, lu, discuté autant que nous avons pu, et nous
avons beaucoup prié. Nous devions répondre à l’Eglise, à l’humanité
entière. Nous devions, par devoir et aussi par liberté de Notre charge
apostolique, évaluer une tradition non seulement séculaire, mais récente,
celle de nos trois prédécesseurs. Nous étions obligé de faire nôtre
l’enseignement du Concile, que nous avions nous-même promulgué.
Nous étions enclin à pouvoir accueillir, jusqu’où Nous pensions pouvoir le
faire, les conclusions de la Commission instituée dès 1963 par le Pape Jean
et élargie par Nous-même mais, en même temps, Nous devions faire preuve
de prudence. Nous n’ignorions pas les vives discussions nées de tant de
passion et d’autorité… Nous entendions les voix si puissantes de l’opinion
publique et de la presse. Nous écoutions les voix des plus faibles, mais
beaucoup plus pénétrantes pour notre cœur de père et de pasteur, de tant de
personnes, de femmes très respectables, harcelées par le difficile problème
27 DC 1964 n° 1427 col. 1924.28 DC 1966 n° 1462 p 405-411 du 12 février 1966.
34
et encore plus par leur difficile expérience… Combien de fois, Nous avons
tremblé devant le dilemme d’une facile condescendance aux opinions
courantes, ou bien d’une sentence mal supportée par la société actuelle ou
qui fut arbitrairement trop lourde pour la vie conjugale…. Nous avons mis
Notre conscience dans la pleine et libre disposition à la voix de la vérité,
cherchant à interpréter la règle divine que Nous voyons surgir de l’exigence
intrinsèque de l’amour humain authentique, des structures essentielles de
l’institution du mariage, de la dignité personnelle des époux, de leur mission
au service de la vie, comme de la sainteté du mariage chrétien. Nous avons
réfléchi sur les éléments stables de la doctrine traditionnelle de l’Eglise,
spécialement sur les enseignements récents du Concile Vatican II.
Nous avons pesé les conséquences de l’une et l’autre décision et Nous
n’avons plus de doute sur notre devoir de nous prononcer dans les termes
exprimés par la présente encyclique.29» Paul VI affirme avoir mené ce
travail dans un grand esprit de charité et dans une sensibilité pastorale
envers ceux qui sont appelés à épanouir leur personnalité dans la vie
conjugale et dans la famille.
Ce sont les numéros 14 et 17 de l’Encyclique qui marquent les points de
controverse. Après avoir présenté les principes doctrinaux de l’amour
conjugal et ses caractéristiques, fondés sur une vision globale de l’homme,
le Saint Père affirme que l’amour conjugal exige des époux une conscience
de leur mission de « paternité responsable » dans le respect de la nature et
des finalités de l’acte matrimonial. L’acte conjugal imposé au conjoint sans
égard à ses conditions ni à ses légitimes désirs, n’est pas un véritable acte
d’amour et contredit, par conséquent, une exigence du bon ordre moral dans
les rapports entre époux30.
Dans le paragraphe n° 14, le Saint-Père explicite la morale chrétienne en
écrivant : « En conformité avec les points fondamentaux de la conception
humaine et chrétienne du mariage, nous devons encore une fois déclarer
qu’il est absolument à exclure, comme moyen licite de régulation des
naissances, l’interruption directe du processus de génération déjà engagé, et 29 Paul VI, préparation, but et esprit de l’encyclique, Allocution prononcée le 31 juillet 1968, à l’Audience générale DC du 1e septembre 1968, n° 1523 pages 1457 à 1459.30 n° 13 de Humanae Vitae, édition du Centurion p 36
35
surtout l’avortement directement voulu et procuré, même pour des raisons
thérapeutiques ».31 Est pareillement à exclure, comme le Magistère de
l’Eglise l’a plusieurs fois déclaré, « la stérilisation directe, qu’elle soit
perpétuelle ou temporaire, tant chez l’homme que chez la femme ».32
Est exclue également toute action qui, soit en prévision de l’acte conjugal,
soit dans son déroulement, soit dans le développement de ses conséquences
naturelles, se proposerait comme but ou comme moyen de rendre impossible
la procréation.33
On ne peut invoquer comme raisons valables pour justifier des actes
conjugaux rendus intentionnellement inféconds, le moindre mal ou le fait
que ces actes constitueraient un tout avec les actes féconds qui ont précédé
ou qui suivront, et dont ils partageraient l’unique et identique bonté
morale… Il n’est pas permis, même pour de très graves raisons, de faire le
mal afin qu’il en résulte du bien34, c'est-à-dire de prendre comme objet d’un
acte positif de volonté ce qui est intrinsèquement un désordre et par
conséquent une chose indigne de la personne humaine, même avec
l’intention de sauvegarder ou de promouvoir les biens individuels, familiaux
ou sociaux.
C’est donc une erreur de penser qu’un acte conjugal rendu volontairement
infécond, et par conséquent intrinsèquement déshonnête, puisse être rendu
honnête par l’ensemble d’une vie conjugale féconde ».
Le Saint-Père souligne la licéité des moyens thérapeutiques, ceux-ci peuvent
être employés pour soigner les maladies même si l’on prévoit qu’il en
résultera un empêchement à la procréation, pourvu que cet empêchement ne
soit pas, pour quelque motif que ce soit, directement voulu.35
Paul VI reconnaît la licéité du recours aux périodes infécondes, pour lui, il
ne faut pas recourir au contrôle artificiel des naissances, mais il est possible
31 Cf. Catéchisme Romanus Concilii Tridentini 2ème partie, ch.VIII ; Pie XI Enc. Casti Connubii, AAS 22, 1930, PP5628564 .Pie XII, Discorsi e Radiomessaggi VI, 1944, pp.191-192 ; Jean XXIII, Enc. Pacem in Terris, 11 avril 1963, AAS 55, 1963, pp., 259-260 ; Gaudium et Spes, n° 51.32 Cf.Pie XI, Enc. Casti Connubii, AAS 22, 1930, p.565 ; Décret du Saint-Office, 22 février 1940, AAS 32, 1940, p.73 ; Pie XII, AAS 43, 1951, pp. 8436-844 .AAS 50, 1958, pp 734-735.33 Jean XXIII, Enc. Mater et Magistra, AAS 53, 1963, p.447.34 Cf. Rom. 3, 8.35 Cf. Pie XII, Alloc. Au Congrès de l’Association italienne d’urologie, 8 octobre 1953 ; AAS 45, 1953, pp.674-675.
36
pour les espacer, l’Eglise enseigne qu’il est alors permis de tenir compte des
rythmes naturels, inhérents aux fonctions de la génération, pour user du
mariage dans les seules périodes infécondes et régler ainsi la natalité sans
porter atteinte aux principes moraux .
Le Pape voit de graves conséquences dans l’utilisation des méthodes de
régulation artificielle de la natalité, particulièrement une voie de facilité qui
ouvrirait ainsi à l’infidélité conjugale et à l’abaissement général de la
moralité. De plus, pour Paul VI, les risques d’abus sexuels pourraient être
plus nombreux vis-à-vis des femmes ; Il écrit au n°17 : « On peut craindre
aussi que les hommes en s’habituant à l’usage des pratiques
anticonceptionnelles, ne finissent par perdre le respect de la femme et sans
plus se soucier de l’équilibre physique et psychologique de celles-ci, n’en
viennent à la considérer comme un simple instrument de jouissance égoïste,
et non plus comme leur compagne respectée et aimée. » Le Pape
conclut: « L’Eglise en défendant la morale conjugale dans son intégralité,
sait qu’Elle contribue à l’instauration d’une civilisation vraiment humaine ;
Elle engage l’homme à ne pas abdiquer sa responsabilité pour s’en remettre
aux moyens techniques, elle défend par là même la dignité des époux. »
n° 18.
Cette Encyclique, dès sa publication a suscité en France de multiples
commentaires et des réactions passionnées. Interrogés de toute part, les
évêques ont attendu leur Assemblée plénière de Lourdes pour donner une
réponse collective sous la forme d’une note pastorale de l’Episcopat
français, courant novembre 1968. Ce document resitue l’Encyclique à la
suite de l’ensemble de l’enseignement du Concile sur l’amour conjugal et
son expression, sur la procréation et l’éducation des enfants, sur la
responsabilité des parents devant Dieu en rappelant les n° 49 et 50 de
Gaudium et Spes, la Constitution pastorale dans l’Eglise de ce temps.
Si l’intervention du Pape a provoqué de tels remous, c’est sans doute parce
qu’il aborde ce qui touche à la source même de la vie et que la civilisation
est actuellement en pleine crise de croissance. Les progrès sont
considérables et transforment la condition humaine. Les sciences confèrent
une emprise étonnante sur la création et même sur l’homme. Et, pour la
37
question qui nous préoccupe, les recherches sur l’amour et la sexualité ont
ouvert des perspectives nouvelles sur leur signification réciproque.
Comment, loin d’être asservi par ses propres conquêtes, l’homme y
trouvera-t-il l’occasion d’exercer une maîtrise éclairée et courageuse de sa
condition ? Dans quelle mesure peut-il user de l’extraordinaire puissance
que lui donnent ces découvertes pour agir sur lui-même ?
Les évêques concluent ainsi leur note, n° 23 : « Ce que le Pape crie à
l’humanité, c’est que l’homme est créé à l’image de Dieu. Rien de
pleinement humain ne peut être résolu par les seules techniques : l’amour
est de l’ordre du mystère, et doit être abordé avec l’infini respect dû à la
personne humaine. Autour du mariage et de l’amour se joue un des combats
les plus décisifs de notre temps. De son issue dépendent l’homme et la
société de demain. »
Beaucoup ont parlé de l’Encyclique du courage au service de la vie
humaine, c’est l’une des images fortes que je garde de Paul VI.
La régulation des naissances ne peut se faire que dans des couples
conscients de leur responsabilité, suffisamment éclairés des rythmes
biologiques de la femme et respectueux de l’un et de l’autre ; dans la lettre
adressée au Président des Semaines Sociales, le Pape montre bien qu’elle
doit être la dynamique qui informe la vie du couple.
Toujours préoccupé par les problèmes d’éthique, le Saint-Père, envoie une
lettre pontificale à Monsieur Alain Barrère, Président des Semaines
Sociales, pour la 59ème Session qui se tenait à Metz du 4 au 9 juillet 1972,
dont le thème était : « Couples et familles dans la Société d’aujourd’hui ».
Conscient de l’évolution des mentalités, due au développement industriel, à
la recherche du capitalisme et du matérialisme, le Saint-Père invite les
participants du Congrès à «cerner, selon une nouvelle approche, les relations
constitutives du couple et de la famille. Dans les rapports entre époux, à
l’heure où l’on tend heureusement à mettre en valeur les responsabilités
communes de l’homme et de la femme, dans divers secteurs de la vie
familiale, professionnelle, sociale, politique, il importe d’autant plus de bien
situer ce qui constitue leur différence mutuelle et profonde. Il serait irritant
d’en faire une théorie à partir du pur dimorphisme sexuel ; mais il y a sans
doute beaucoup de lumière à espérer d’une recherche qui montrerait
38
comment l’être corporel de chacun manifeste deux manières très originales
de réaliser l’être humain dans le monde, selon le dessein primordial du
Créateur : Il les créa homme et femme (Gn 1, 27). Certes, la culture
intervient toujours pour donner son expression et sa signification à cette
différence naturelle. Mais à considérer cette différence comme un simple
produit de l’histoire, on méconnaîtrait la réalité : histoire et nature sont
intimement mêlées. »
Paul VI précise ensuite : « N’est-il pas dans l’union de l’homme et de la
femme, le problème fondamental des rapports humains, et du donné naturel
qui se profile et qui trouve ainsi sa haute expression ? Ici, l’activité
créatrice, la liberté, le rapport personnel à autrui sont vécus à travers les
relations corporelles de deux êtres complémentaires, et, dans cette condition
charnelle maîtrisée, l’homme est appelé à retrouver l’unité mystérieuse et
féconde de l’esprit et du corps. Peut-être l’approfondissement d’une telle
réalité qui marque au-delà de l’histoire de chaque foyer, la marche de toute
l’humanité, éviterait-elle de dissocier ou d’opposer éthique de la nature et
éthique de la liberté personnelle, la première s’attardant à ne voir que le côté
biologique de l’homme, et la seconde s’engageant dans des voies marquées
d’un dangereux subjectivisme.
C’est à travers la même anthropologie réaliste que devra être surmonté un
autre dilemme : dilemme entre l’être personnel et l’être social, entre
l’autonomie de chacun des époux et l’unité de leur couple, entre leur
différence fondamentale et leur égalité foncière. N’est ce pas dans l’accueil
d’un autre différent de soi, dans la collaboration intime par des voies
complémentaires, que peut se réaliser une profonde communion des
personnes ?
Une telle unité, entre le corps et l’esprit, entre la personnalité de l’homme et
celle de la femme, n’est-ce pas une donnée acquise au départ et une fois
pour toutes ? Elle trouve son terrain de réalisation tout au long d’une vie et
elle reçoit un stimulant indéniable dans la décision d’une union fidèle et
indissoluble, comme dans l’Institution qui la garantit. Cette unité à faire par
chacun, grâce à une réflexion pratique qui éclaire au jour le jour chacun des
39
choix de l’histoire du couple et de la famille ».36L’ensemble de ce texte est
magnifique. Il met bien en évidence ce qui constitue la relation du couple ;
c’est dans la différence fondamentale et l’égalité foncière que doit se vivre
et se construire l’amour de l’homme et de la femme.
Dans une homélie prononcée le 29 juin 1978, Paul VI dresse le bilan de son
Pontificat, rappelant l’engagement qu’il a pris en citant les paroles mêmes
de l’Apôtre « J’ai combattu le bon combat ; j’ai terminé ma course, j’ai
conservé la foi ». Il poursuit, en rappelant ses encycliques et ses
exhortations les plus importantes, parmi lesquelles, il place Humane Vitae,
sur la valeur de la vie et de l’amour humain et il écrit : « La défense de la
vie doit commencer aux sources mêmes de la vie humaine. Ce fut là un
grave et clair enseignement du Concile qui, dans la Constitution Gaudium et
Spes, avertissait que la vie doit être sauvegardée avec un soin extrême dès la
conception : l’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables.37
Nous n’avons fait que rappeler cette consigne. Ces affirmations, nous les
avons faites uniquement en vertu de notre responsabilité suprême lorsqu’il y
a 10 ans, soit le 25 juillet 1968, nous avons publié l’Encyclique Humanae
Vitae.
Ce document était inspiré par l’enseignement intangible de l’Evangile, qui
confirme les normes de la loi naturelle et les exigences absolues de la
conscience sur le respect de la vie, dont la transmission est confiée à la
paternité et à la maternité responsables. Ce document revêt aujourd’hui une
actualité nouvelle et plus urgente encore, devant les atteintes portées par les
législations publiques à la sainteté indissoluble du lien du mariage et
l’intangibilité (au caractère sacré) de la vie humaine dès le sein maternel…
Il est écrit pour le bien du genre humain ».38
36 Paul VI, Lettre pontificale au Président de la 59ème session des Semaines Sociales de France à Metz du 4 au 9 juillet 1972. DC du 6-20 août 1972, n° 1614, pp. 716 à 719.37 Gaudium et Spes n° 51.38 Macchi Pasquale, dans l’intimité de Paul VI, méditations inédits et testament, traduction de Mahieu Patrice, Médiaspaul, avril 2006 p 45 et 45, 101 pages.
40
2ème PARTIE
RECONNAISSANCE DE LA MISSION APOSTOLIQUE
DE LA FEMME
Paul VI, nouvellement élu Pape, déclare le 3 juillet 1963 aux Présidentes
diocésaines de l’Union Féminine d’Action Catholique Italienne réunies à
Rome pour une session d’études sur l’apostolat et la pastorale : « Quoi de
plus admirable que l’amour maternel ! Il peut, d’une certaine manière, être
comparé à l’amour pastoral. Dans ce sens, les femmes catholiques peuvent
41
dire: « Nous sommes prêtes, nous aussi, à entrer dans le courant de cette
charité supérieure ; nous voulons, nous aussi, être toujours si proches de
l’Eglise et de ses pasteurs que nous soyons capables de lui apporter
n’importe quelle collaboration ». Aucune d’entre vous, ajoute-t-Il en
souriant, ne prétend avoir l’investiture canonique, fondement indispensable
de la vie pastorale, car elle suppose un mandat d’en haut ; mais l’esprit, oui.
C'est-à-dire que vous désirez sûrement nourrir vos âmes, vos pensées et vos
actions de ce grand amour, officium amoris, qu’est la vie pastorale. C’est un
devoir sublime que d’aimer, servir, sanctifier les âmes, vouloir pour elles
tout ce qui est possible de leur donner ». Paul VI insiste ensuite sur
l’évolution de l’Eglise qui n’est pas une personne isolée, mais devient une
grande famille qui se réunit autour du prêtre. Il montre que les femmes
catholiques sont devenues en quelque sorte les assistantes de toute la famille
spirituelle. Pour illustrer sa pensée, il évoque le passage des Actes des
Apôtres qui présente le témoignage de Lydie, la marchande d’étoffes
précieuses, qui offrit l’hospitalité à Paul et Silas dans sa maison. Les
militantes d’action catholique, peuvent être considérées comme des
collaboratrices diligentes des pasteurs. « Les femmes catholiques osent
descendre dans le concret, dans le réel. Elles ne se contentent pas de
formules purement polies, aimables, compatissantes, mais elles entrent dans
le vif des initiatives excellentes et de l’assistance positive et féconde ».
1 – LES FEMMES PORTENT LE SOUCI DE L’ EVANGELISATION
DANS TOUS LES SECTEURS DE LA VIE HUMAINE
Dans son allocution du 12 février 1966, aux Congressistes de Centre Italien
Féminin, Paul VI formule le souhait suivant : « Nous voulons exprimer une
fois encore le vœu que toutes les femmes italiennes qui ont à cœur
d’affirmer l’efficacité des valeurs morales et spirituelles du christianisme et
de la tradition civile de notre peuple dans la vie moderne, qui veulent
imprimer à la présence de la femme, dans la société, un caractère intelligent,
42
positif et fort, voudront donner leur franche adhésion à la formule pour
laquelle milite le Centre Féminin Italien. »39
Dans l’ensemble de ses interventions, le Souverain Pontife a le souci d’une
action évangélisatrice très large et capable de toucher tous les secteurs de la
vie humaine. Pour lui, la mission ne se limite pas à des cercles choisis et
privilégiés, mais elle doit transformer toutes les structures sociales et
politiques. Il convient d’être effectivement « Sel de la Terre ».
Paul VI dans son discours à la Fédération Mondiale des Jeunesses
Féminines Catholiques du 4 avril 1964 précisait que : « C’est dans les
humbles tâches de la vie quotidienne qu’il s’agit d’inscrire la dimension
universelle, de la vraie catholicité, inspirées par la charité chrétienne. Nous
sommes heureux de vous accueillir chez Nous et de vous exprimer Notre
satisfaction de vous voir engagées.
Quelle responsabilité l’Eglise ose confier à votre jeune âge ; de quelle
mission apostolique elle vous charge dans le monde ; quelle confiance elle
vous fait ! Elle sait de quelles grandes choses vous êtes capables, Elle
connaît la générosité qui vous anime, la flamme qui vous brûle ! Ne
rougissez jamais du nom de chrétien, soyez fières d’appartenir à l’Eglise
catholique. Où que vous soyez et travaillez, faites en sorte que le monde se
renouvelle à votre contact et que le Seigneur soit plus présent aux hommes,
l’Evangile plus connu et plus aimé par eux ! »
Le Saint-Père a adressé une lettre à l’Archevêque de Melbourne,
Monseigneur James Robert Knox, à l’occasion de la Conférence du Conseil
Australien des organisations des femmes catholiques qui s’est tenu du 12 au
19 octobre 1969: « Nous ne pouvons laisser passer l’occasion de la 24ème
Conférence du Conseil Australien des femmes catholiques sans envoyer un
message de salut et d’encouragements paternels … Nous vivons une période
de l’histoire où l’égalité fondamentale des femmes avec les hommes, leur
droit et leur devoir de prendre une part active à la vie publique, la
contribution particulière et irremplaçable qu’elles peuvent apporter au bien-
être politique, social et culturel de l’humanité sont reconnus comme sans
doute jamais auparavant. Conscients du rôle sans cesse croissant que les
39 DC 12 Février 1966, n° 1462, p 405 – 406.
43
femmes jouent dans la vie tout entière de la Société, le Second Concile a
déclaré qu’il était très important qu’elles apportent également un concours
accru dans les divers domaines de l’apostolat de l’Eglise Apostolicam
actuositatem art.940… Le monde a besoin de l’exemple de leur amour
désintéressé pour que la sainteté du mariage soit maintenue, de leurs
conseils et de leurs prières pour que les valeurs de l’éducation chrétienne
soient actualisées, de leur vigilance dévouée pour que la dignité et
l’autonomie de la famille soient défendues… Il n’est aucune sphère de
l’activité humaine qui ne puisse être irradiée par le pouvoir bienfaisant de la
femme. A notre époque de haute technologie, c’est à la femme qu’il revient
de veiller à ce que notre race ait un avenir sûr et humain.
Grâce à leur exemple, à leurs paroles et à leurs activités, les femmes
indiquent la route que l’humanité doit prendre en ce siècle de
transformation. Qu’elles tirent leur inspiration de la prière et du Message de
l’Evangile, restant tout près du Sauveur dans leurs peines et dans leurs
joies : lorsque les soldats regardaient Celui qu’ils avaient transpercé, une
femme se tenait près de la croix, l’âme transpercée par un glaive.
Et ce fut une femme aussi qui, se tenant tout près du tombeau, fut la
première à voir le Christ ressuscité et à apporter la joyeuse nouvelle de sa
glorification41. Voilà les pensées qui animent le cœur de Paul VI et qui
révèlent l’importance du rôle que peuvent jouer les femmes à la fois dans
leur foyer, dans la Société et au service de toute l’humanité. Le Saint-Père a
une conception très large de l’évangélisation et donne à toute l’action
humaine une dimension sacrée, ce qui engendre un regard positif de la
religion et la fait percevoir comme un souffle dynamisant, cela est très
stimulant et oblige à ouvrir les horizons.
Le Chef de l’Eglise insuffle un esprit apostolique qui touche toute la vie et
conçoit la mission moins comme une fonction, qu’une façon d’être. L’action
apostolique transcende l’institutionnel et vise à travers toutes sortes
d’activités à témoigner du message de l’Evangile. Cependant, le Pape sera le
40 Paul VI, Allocution au Comité pour l’Année Internationale de la femme, DC du 4 mai 1975, n° 1675, p 403.41 Paul VI, Lettre à l’Archevêque de Melbourne, Australie, DC, 7 décembre 1969, n°1552. col.1060 et 1061.
44
premier Pontife à inviter des femmes au Concile Vatican II. C’est ce que
nous allons voir.
2 - PARTICIPATION DES FEMMES AU CONCILE VATICAN II
Au cours de la 53ème Congrégation générale des travaux du Concile sur le
schéma « De Ecclesia »42, le Cardinal Suenens (Malines-Bruxelles) a
regretté : « Que les charismes des fidèles n’aient pas été assez pris en
compte… Dans l’Eglise se trouvent non seulement les apôtres, mais les
prophètes comme François d’Assise, et les docteurs comme saint Thomas. »
C’est alors que les pères conciliaires ont souhaité que le chapitre traitant du
Peuple de Dieu mette largement en évidence les dons du Saint-Esprit dans
l’Eglise et montre l’harmonie de la structure ministérielle et de la
configuration charismatique de celle-ci. Pour manifester de façon concrète
la conviction du Concile dans ce domaine, les pères ont souhaité que le
nombre des auditeurs laïcs soit augmenté et que leur recrutement soit
élargi ; que des femmes soient appelées parmi eux, car elles représentent
la moitié de l’humanité. Que soient appelés enfin des représentants des
religieux non prêtres et des religieuses. Dès le 28 octobre 1963, le Frère
Joseph Nicet, Supérieur des Frères des Ecoles Chrétiennes était nommé
expert au Concile. C’est dans une réponse aux vœux de Nouvel An à la
Fédération Mondiale des Jeunesses Féminines, que le Saint-Père dit avoir
été particulièrement sensible à la part prise par la prière pour le Concile par
les jeunes filles catholiques du monde entier, et à l’intérêt porté à ces
travaux. Quant au désir exprimé que des auditrices puissent assister, elles
aussi, aux séances conciliaires, on ne manquera pas de l’étudier en temps
opportun.43
Paul VI, dans une allocution prononcée le 8 septembre 1964, en la fête de la
Nativité de Marie, a affirmé : « Nous croyons que le jour est venu où il faut
mettre en plus grand honneur la vie religieuse féminine et lui donner une
plus grande efficacité. Et nous croyons que cela peut se faire en
perfectionnant les liens qui unissent la vie religieuse à la vie de l’Eglise 42 DC. 1er Décembre 1963, n°1413, Sur le peuple de Dieu et spécialement des laïcs, p 1565.1566.43 DC. 19 avril 1964, n°1422 p 499.
45
entière. Nous vous ferons, à ce propos, une confidence. Nous avons donné
des instructions pour que quelques femmes qualifiées et pieuses assistent
comme auditrices à plusieurs cérémonies solennelles et à plusieurs
congrégations générales de la troisième session du IIe Concile Oecuménique
du Vatican, c'est-à-dire aux questions pouvant intéresser particulièrement la
vie de la femme. Nous aurons ainsi, pour la première fois peut-être, présente
dans un Concile Oecuménique, une délégation féminine -peu nombreuse,
bien sûr, mais significative et en quelque sorte symbolique- de vous,
religieuses, d’abord, et ensuite, des grandes organisations féminines
catholiques afin que la femme sache combien l’Eglise l’honore dans la
dignité de son être et de sa mission humaine et chrétienne.44 ». C’est ainsi
que quinze femmes, huit religieuses et sept laïques ont participé à la
troisième et à la quatrième session du Concile, comme observatrices. Il a
fallu cinq ans de travail conciliaire pour enfin comprendre qu’il était
indispensable que des femmes soient présentes dans ce grand mouvement de
renouveau de l’Eglise, c’est un pas en avant bien timide, mais effectif. Les
femmes étaient bien placées pour parler de la famille, du mariage, de leur
mission dans la vie de l’Eglise et de la vie consacrée ; dans ces différents
domaines, elles auraient pu apporter un éclairage pertinent et fondé sur du
vécu. Malgré le petit nombre de femmes impliquées dans le travail de
réflexion et d’aggiornamento, de mise à jour de la vie de l’Eglise dans le
monde de ce temps. Les femmes sont présentes dans la réflexion et certains
textes précisent leur vocation et leur mission. Les pères, à la fin du Concile,
ont adressé des messages spécifiques à diverses catégories de personnes,
sans oublier d’en donner un aux femmes. Nous allons voir maintenant ce
que le Concile dit de la mission spécifique de la femme...
3 - CE QUE DIT LE CONCILE SUR LA SITUATION DES FEMMES
La société de l’homme et de la femme est l’expression première de la
communion des personnes, GS 12 § 4 Dieu n’a pas créé l’homme solitaire :
dès l’origine, « Il les créa homme et femme » ( Gen. 1, 27). Cette société de
l’homme et de la femme est l’expression première de la communion des
44 DC. 20 septembre 1964, n° 1432, p 1170 à 1174.
46
personnes, car l’homme de par sa nature profonde, est un être social, et sans
relations à autrui, il ne peut ni vivre, ni épanouir ses qualités. »
Le concile fait remarquer qu’il y a égalité foncière de la femme avec
l’homme, MC 730, qu’il existe une égale dignité personnelle de la femme et
de l’homme dans l’amour plénier qu’ils se portent :
GS 49 § 2. « L’amour conjugal conduit les époux à un don libre et mutuel
d’eux-mêmes qui se manifeste par des sentiments et des gestes de tendresse
et il imprègne toute leur vie… L’égale dignité personnelle qu’il faut
reconnaître à la femme et à l’homme dans l’amour plénier qu’ils se portent
l’un à l’autre fait clairement apparaître l’unité du mariage ». C’est pourquoi
toute forme de discrimination fondée sur le sexe est contraire au dessein de
Dieu. GS 29 § 2 souligne : « Toute forme de discrimination touchant les
droits fondamentaux de la personne, qu’elle soit sociale ou culturelle,
qu’elle soit fondée sur le sexe, la race, la couleur de la peau, la condition
sociale, la langue ou la religion, doit être dépassée et éliminée, comme
contraire au dessein de Dieu. Il est affligeant de constater que ces droits
fondamentaux de la personne ne sont pas garantis. Il en est ainsi lorsque la
femme est frustrée de la faculté de choisir librement son époux ou d’élire
son état de vie, ou d’accéder à une éducation et une culture semblables à
celles que l’on reconnaît à l’homme ».
Il existe de nouveaux rapports sociaux entre l’homme et la femme :
Dans l’exposé préliminaire de l’Eglise dans le monde de ce temps, les pères
du Concile ont tenté de cerner la condition humaine dans le monde de ce
temps en mettant en évidence de nombreuses évolutions sociologiques,
psychologiques et culturelles. Ces changements en profondeur entraînent
inévitablement des déséquilibres au niveau des personnes et suscitent de
nombreuses revendications. Dans ce cadre, les femmes, là où elles ne l’ont
pas encore obtenue, réclament la parité de droit et de fait avec les hommes.
GS 29 § 2.
Cette situation peut faire naître des « tensions au sein de la famille dues, soit
à la pesanteur des conditions démographiques, économiques et sociales, soit
47
aux conflits de générations successives, soit aux nouveaux rapports sociaux
qui s’établissent entre hommes et femmes.
Le message final du Concile affirme: « L’heure est venue où la vocation de
la femme s’accomplit en plénitude, acquiert dans la communauté une
influence, un rayonnement, un pouvoir jamais atteints jusqu’ici ». MC 730.
Dans le décret sur l’apostolat des laïcs, il est reconnu que : « Les femmes
ont une part de plus en plus active dans toute la vie de la Société, il est
important que grandisse aussi leur participation dans les divers secteurs de
l’apostolat de l’Eglise » AL 9.
Désormais, la femme travaille à présent dans presque tous les secteurs
d’activité et les pères conciliaires précisent dans GS 60 § 3 : « Il convient
qu’elles puissent pleinement jouer leur rôle selon leurs aptitudes propres. Ce
sera le devoir de tous de reconnaître la participation spécifique et nécessaire
des femmes à la vie culturelle et de la promouvoir. »
Hommes et femmes sont appelés à apporter une contribution particulière au
plan de Dieu, c’est ce qu’indique GS 34 §2 : « Les hommes et les femmes,
tout en gagnant leur vie et celle de leur famille, mènent leurs activités de
manière à bien servir la Société, ils sont fondés à voir dans leur travail un
prolongement de l’œuvre du Créateur, un service de leurs frères, un apport
personnel à la réalisation du plan providentiel dans l’histoire .»45
Dans leur hommage aux femmes, les pères conciliaires écrivent : « L’Eglise
est fière d’avoir magnifié et libéré la femme, fait resplendir au cours des
siècles son égalité foncière avec l’homme ». MC 730. A travers ce
magnifique texte, les vertus de la femme sont exaltées et ses fonctions sont
repérées, particulièrement, la mission de mère, mais aussi d’enseignante et
en plus, d’éducatrice : « Vous qui savez rendre la vérité douce, tendre et
accessible, attachez-vous à faire pénétrer l’esprit du Concile dans les
institutions, les écoles, les foyers, dans la vie de chaque jour… La mission
spécifique de la femme est la garde du foyer, l’amour des sources, le sens
des berceaux. Vous êtes présentes au mystère de la vie qui commence, vous
consolez dans le départ de la mort, vous réconciliez les hommes avec la
vie… Epouses et mères de famille, premières éducatrices du genre humain,
45 Johannes XXIII, Pacem in terris, 1963
48
dans le secret des foyers, transmettez à vos fils et à vos filles la tradition de
vos pères, en même temps que vous les préparez à l’insondable avenir.
Souvenez-vous toujours qu’une mère appartient par ses enfants à cet avenir
qu’elle ne verra peut-être pas. »
Les pères conciliaires insistent et soulignent : « Qu’il faut permettre à la
mère, dont les enfants surtout les plus jeunes, ont tant besoin, de prendre
soin de son foyer, sans toutefois négliger la légitime promotion sociale de la
femme ». GS 52 §1. Dans le chapitre V de Lumen Gentium, sur l’appel
universel à la sainteté dans l’Eglise est indiqué le chemin de sanctification
des époux. Il est aussi montré que, sous des formes diverses, les veuves, les
femmes célibataires par leur concours contribuent à la sainteté et à l’activité
de l’Eglise » LG 41. Les vierges consacrées, gardiennes de la pureté, du
désintéressement, de la piété, les femmes dans l’épreuve, chrétiennes ou
incroyantes, toutes sont appelées à témoigner et à garder l’audace des
grandes entreprises en même temps à témoigner de la patience et du sens
des humbles MC 730. Nous pouvons constater que le Concile insiste sur
l’égalité entre hommes et femmes et que toutes les formes de
discriminations à l’égard des femmes ne sont pas dans le plan de Dieu. Les
femmes doivent participer à la mission de l’Eglise, dans la société, il existe
de nouveaux modes de relations entre les hommes et les femmes et ces
dernières doivent pouvoir épanouir leurs dons au service de tous. Nous
allons voir que le Pape, à partir du Décret sur l’Apostolat des Laïcs et
d’autres allocutions, encourage et stimule les femmes à prendre part à la
mission de l’Eglise ; « Les laïcs tiennent de leur union même avec le Christ,
le devoir et le droit d’être apôtres. »
4- PARTICIPATION DES LAÏCS A LA MISSION DE L’EGLISE
DANS LE MONDE
Le décret sur l’apostolat des laïcs « Apostolicam actuositatem » est
promulgué le 18 novembre 1965. Ce décret sur l’apostolat des laïcs a été
approuvé en session plénière par la totalité des pères présents, sauf deux, à
savoir, 2340 voix contre 2. Pour la première fois, un Concile consacre la
participation des laïcs à la mission de l’Eglise dans le monde. C’est la
49
première charte conciliaire donnée à leur apostolat. Ce texte est à la jointure
entre « Lumen gentium » (chapitres 2 et 4) et « Gaudium et Spes », entre
l’Eglise telle qu’elle-même se pense et l’Eglise telle qu’elle agit dans
l’histoire des hommes. Des paroles simples et solides, qui ouvrent des
chemins. Le n° 9 du décret sur l’apostolat des laïcs reconnaît que les
femmes ont une part de plus en plus active dans toute la vie de la société, et
insiste pour dire, qu’il est important que grandisse aussi leur participation
dans les divers secteurs de l’apostolat de l’Eglise.
Ce décret sur l’apostolat des laïcs concerne aussi bien les hommes que les
femmes, tout est présenté en termes de participation. Les laïcs participent à
la Vie même du Christ par leur baptême et leur confirmation. Ils participent
ainsi à sa triple fonction de prêtre, prophète et roi. Les laïcs participent à la
mission évangélisatrice de l’Eglise et à sa vie. Avec toute l’Eglise, ils ont
mission de faire participer les hommes au salut de Jésus-Christ. L’apostolat
n’est pas un droit à négocier, c’est un devoir pour chacun. « La vocation
chrétienne est aussi, par nature, vocation à l’apostolat » (AL n°2).
La redécouverte fondamentale est celle du baptême. Avant toute analyse,
méthode ou organisation, l’apostolat relève du mystère du Christ. Avant
d’être laïc ou prêtre, nous sommes « chrétiens ». Tous les baptisés forment
le Peuple de Dieu et celui-ci a toujours été organisé, différencié. Ce qui
prime, c’est la mission commune. « Il y a dans l’Eglise diversité de
ministères, mais unité de mission. » (AL n°2).46 Il s’agit de rendre
témoignage au Christ sur toute la terre. L’apostolat est la mission de tout
baptisé. Ce témoignage à rendre au Christ ne peut trouver d’origine et de
source que dans une union vitale avec le Christ. Vie d’intimité avec le
Christ et vie quotidienne sont à mener de pair. Attachement personnel au
Christ et vie familiale ou professionnelle sont à tenir dans la cohérence et
l’harmonie. De plus, une qualité civique est demandée aux laïcs, c’est la
compétence professionnelle. Car la foi ne dispense pas de la qualification
46 Régnier Guy, « L’Apostolat des Laïcs, l’héritage du Concile », Desclée, p 57 à 59, 1985, 234 pages.
50
humaine, ni des vertus sociales qui sont le premier témoignage à donner par
chacun.
A l’occasion du IIIème Congrès mondial sur l’apostolat des laïcs, sur le
thème :
« Le peuple de Dieu dans l’itinéraire des hommes. » le dimanche 15
octobre 1967, Sa Sainteté Paul VI a concélébré la messe dans la Basilique
Saint Pierre avec 24 cardinaux et évêques, en présence de 300 participants
au congrès des laïcs et de quatre-vingt-huit observateurs non catholiques. Il
a prononcé une allocution fondamentale sur la place des laïcs dans l’Eglise.
Le Saint Père parle de la reconnaissance de la « citoyenneté » du laïcat dans
l’Eglise. Il veut mettre en évidence les acquisitions doctrinales proclamées
par l’Eglise en cette phase récente de son histoire, notamment au second
Concile œcuménique du Vatican : « L’Eglise a accordé au laïc, membre de
la société à la fois mystérieuse et visible des fidèles, une solennelle
reconnaissance. Voilà, si on peut dire, une reconnaissance ancienne.
L’Eglise a réfléchi sur sa nature, sur son origine, sur son histoire, sur sa
fonctionnalité , et elle a donné au laïc qui lui appartient, la définition la plus
digne et la plus riche : elle l’a reconnu comme incorporé au Christ et comme
participant à la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ lui-
même, sans pour autant méconnaître sa caractéristique propre, qui est d’être
un séculier, un citoyen de ce monde, d’exercer une profession profane,
d’avoir une famille, de s’adonner, en tout domaine, aux études et aux
intérêts temporels. L’Eglise a proclamé la dignité du laïc, non seulement
parce qu’il est homme, mais aussi parce qu’il est chrétien. Elle l’a déclaré
digne d’être, dans la forme et la mesure convenables, associé aux
responsabilités de la vie de l’Eglise. Elle l’a jugé capable de rendre
témoignage de sa foi. Aux laïcs, hommes et femmes, elle a reconnu la
plénitude des droits ; droit à l’égalité dans la hiérarchie de la grâce ; droit à
la liberté dans le cadre de la loi morale et ecclésiastique ; droit à la sainteté
conforme à l’état de chacun. » Le Pape insiste et assure que l’Eglise durant
le Concile a mis une certaine complaisance à manifester cette doctrine sur le
laïcat, tant sont nombreuses à ce sujet les expressions qui se lisent, se
répètent, s’entrecroisent dans plusieurs des documents conciliaires. Cette
reconnaissance de la « citoyenneté » du laïc dans l’Eglise de Dieu, nous
51
vous la redisons ici, heureux de confirmer la parole conciliaire ; heureux de
voir l’aboutissement d’un processus théologique, canonique et sociologique,
désiré depuis longtemps et par beaucoup d’esprits clairvoyants ; heureux de
fonder sur lui les espérances d’une Eglise authentique, rajeunie, rendue plus
apte à accomplir sa mission pour le salut chrétien du monde. Le Saint Père,
reprenant les divers textes du Concile, redéfinit la mission des laïcs. Tout
d’abord, il dit : « Le principe est posé, dans le texte même de la Constitution
dogmatique sur l’Eglise. Les laïcs réunis dans le peuple de Dieu et organisés
dans l’unique Corps du Christ, sous une seule tête, sont appelés, quels qu’ils
soient, à coopérer, comme des membres vivants, au progrès de l’Eglise et à
sa sanctification permanente… A tous les laïcs, par conséquent, incombe la
noble charge de travailler à ce que le dessein divin du salut parvienne de
plus en plus à tous les hommes de tous les temps et de toute la terre. »47
L’Eglise reconnaît donc le laïc, souligne le Pape, non seulement comme
fidèle, mais comme apôtre. Et en ouvrant devant lui un champ presque
illimité, elle lui adresse avec confiance l’invitation de la Parole
évangélique : « Allez, vous aussi travailler à ma vigne » (Matth., 20, 4).
Le décret conciliaire sur l’Apostolat des laïcs, après avoir à son tour posé
fermement le principe que « la vocation chrétienne est aussi, par nature,
vocation à l’apostolat » consacre deux chapitres entiers à détailler les
« divers champs » et les « divers modes » de cet apostolat. Paul VI
reconnaît, devant les membres du congrès des laïcs et des pères du Synode,
« Ces textes vous sont assurément familiers. Qu’il suffise de les avoir
mentionnés pour renforcer dans vos âmes, chers fils et chères filles, la
conviction inébranlable de la réalité de l’appel que l’Eglise vous adresse en
ce milieu du XXème siècle. » Le Pape souligne qu’il ne peut y avoir deux
hiérarchies parallèles dans l’Eglise, le décret sur l’apostolat des laïcs a soin
de rappeler, la structure de l’Eglise telle que le Christ l’a voulue à travers la
diversité des ministères : « C’est aux apôtres et à leurs successeurs que le
Christ a confié la charge d’enseigner, de sanctifier, et de gouverner en son
nom et par son pouvoir. » ( N°.2.)48
47 Const. Lumen Gentium n°3348 Décret sur l’apostolat des Laïcs, n° 3, « Apostolicam actuositatem », Concile Œcuménique Vatican II, Editions du Centurion, 1972,1012 pages.
52
Les tâches du laïc dans l’Eglise sont multiples et n’exigent pas
nécessairement le caractère sacerdotal. Il y a une nécessaire répartition des
tâches et il est important de délimiter le partage des responsabilités entre le
clergé et les laïcs. Une tâche essentiel du laïc, c’est la « re-sacralisation du
monde », c’est la « Consecratio mundi » ; « Le monde, c’est votre champ
d’action, votre apostolat, chers fils et filles, s’inscrit en opposition aux
courants de « sécularisation », de « laïcisation », de « désacralisation » Le
Concile vous l’a dit et redit : « les laïcs consacrent à Dieu le monde , ils
travaillent à la sanctification du monde, à l’assainissement des institutions et
des conditions de vie dans le monde » .
Ce sont les expressions mêmes des documents conciliaires. Et qu’est-ce que
tout cela, sinon re-sacraliser le monde en y faisant pénétrer ou revenir ce
souffle puissant de la foi en Dieu et au Christ, qui seul peut l’amener au vrai
bonheur et au salut. « Les laïcs doivent assumer comme leur tâche propre le
renouvellement de l’ordre temporel. Il leur appartient de pénétrer d’esprit
chrétien la mentalité et les mœurs, les lois et les structures de leur
communauté de vie. »49 Le Saint Père de continuer : « Nous vous le redisons
avec force : portez au monde d’aujourd’hui les énergies qui lui permettront
d’avancer sur les chemins du progrès et de la liberté, et de résoudre ses
grands problèmes : la faim, la justice internationale, la paix. »
Le Pape insiste sur l’importance de la spiritualité pour vivre la mission du
laïc dans le monde, ce que le Concile a mis en lumière au n° 4 du décret sur
l’Apostolat des laïcs : « Seule votre union personnelle et profonde au Christ
assurera la fécondité de votre apostolat, quel qu’il soit ; le Christ, vous Le
trouvez dans l’Ecriture, dans la participation active à la liturgie de la Parole,
à la liturgie eucharistique. Vous Le trouvez dans la prière personnelle et
silencieuse, irremplaçable pour assurer le contact de l’âme avec le Dieu
vivant, source de toute grâce. »
Sous l’impulsion du Concile Vatican II, Paul VI décrète la création du
« concilium de laicis » en la festivité de l’Epiphanie, le 6 janvier 1967 par le
motu proprio « Catholicam Christi Ecclesiam ». Ce document est centré sur
49 Populorum progressio, n.81.
53
l’apostolat des laïcs et l’activité de ce Conseil. Les principales attributions
de ce Conseil sont :
- « promouvoir l’apostolat au plan international, se tenir en liaison
avec l’apostolat aux plans national et international ; agir de façon à
devenir un lieu de rencontre et de dialogue au sein de l’Eglise, entre
la hiérarchie et les laïcs entre les diverses formes d’activités des laïcs
dans l’esprit de l’Encyclique « Ecclesiam suam » du 6 août 1964.
- « assister de ses conseils, la hiérarchie et les laïcs sur le plan des
activités apostoliques. »
- « faire des études pour contribuer à l’approfondissement doctrinal
des questions concernant les laïcs et surtout étudier les problèmes se
posant dans le domaine de l’apostolat et notamment de l’insertion
des laïcs dans la pastorale d’ensemble. Ces études pourront donner
lieu à des publications ».
- « donner et recevoir des informations sur l’apostolat des laïcs, et en
outre, constituer un centre de documentation qui pourra fournir des
orientations pour la formation et une aide précieuse à l’Eglise ».
En achevant ce discours clé sur le laïcat, Paul VI profite de la fête de sainte-
Thérèse en ce 15 octobre 1967, pour annoncer que Thérèse d’Avila et sainte
Catherine de Sienne seront proclamées Docteurs de l’Eglise. Dans les
conclusions de ce grand congrès sur l’apostolat des laïcs au paragraphe VI
concernant la femme dans l’Eglise, il est précisé :
Considérant que le baptême, en incorporant les êtres humains, hommes et
femmes, au Christ, les constitue, sans aucune distinction « personnes » dans
le Christ. Rappelant la parole de saint Paul condamnant toute discrimination
entre les êtres humains (Gal. 3, 28). Convaincu que la place réservée à la
femme dans l’Eglise est due à des facteurs sociaux et culturels, et que
l’évolution de la condition féminine va vers une parfaite égalité des droits
entre l’homme et la femme.
Le IIIème Congrès mondial pour l’apostolat des laïcs formule le vœu de
voir accorder à la femme tous les droits et toutes les responsabilités du
chrétien au sein de l’Eglise catholique, et souhaite qu’une sérieuse étude
doctrinale soit entreprise sur la place de la femme dans l’Eglise.
Le Congrès demande en outre :
54
1. Que des femmes compétentes fassent partie de toutes les
Commissions pontificales ;
2. Que des femmes qualifiées soient consultées au sujet de la
révision des canons qui concernent les femmes, afin que la dignité
féminine soit pleinement reconnue et que soient accordées à la
femme de plus grandes possibilités dans le service de l’Eglise.50
En 1975, le Concile atteint ses 10 ans. Pour les nouvelles générations, il est
déjà une grandeur du passé. Un synode romain est convoqué et la moitié des
participants n’étaient pas au Concile. Le but est de réfléchir : « A l’annonce
de l’Evangile aux hommes de notre temps » Le centre de gravité s’est
déplacé de l’Europe empêtrée dans la sécularisation, vers les jeunes Eglises
d’Afrique, d’Asie ou d’Amérique Latine. Leurs préoccupations sont d’abord
la première annonce du Message aux païens, mais aussi la christianisation
des cultures indigènes et le dialogue avec les autres grandes religions. Le
débat prend la teinte de l’un des textes les plus remarquables du Concile, le
décret « Ad gentes » sur l’activité missionnaire de l’Eglise. IL semble être
comme une résurgence de cette volonté d’incarnation, exprimée alors en
termes d’acculturation : l’Evangile part à la rencontre d’une culture et se
laisse informer par elle, tout en la transformant.51
Le Synode n’ayant pas réussi à produire un texte final en a chargé le Pape
Paul VI qui lui a donné la forme d’une Exhortation apostolique intitulée
« Evangelii nuntiandi » sur l’évangélisation dans le monde moderne parue
le 8 décembre 1975. Ce sont de magnifiques pages sur la mission des laïcs.
Les laïcs ont un rôle particulier : « Leur tâche première et immédiate n’est
pas l’institution et le développement de la communauté ecclésiale, c’est le
rôle spécifique des pasteurs, mais c’est la mise en œuvre de toutes les
possibilités chrétiennes et évangéliques cachées, mais déjà présentes et
actives dans les choses du monde. 52» 50 Paul VI, Allocution au III e Congrès mondial pour l’apostolat des laïcs, DC. n° 1504 du 5 novembre 1967. pages 1826 à 1883.
51 Régnier Guy, p 11152 Paul VI, Evangelii nuntiandi, Exhortation apostolique, 8 décembre 1975, n°70,
55
Le Saint-Père ajoute : « Ainsi prend toute son importance la présence active
des laïcs dans les réalités temporelles. Il ne faut pas pour autant négliger ni
oublier l’autre dimension : les laïcs peuvent aussi se sentir appelés ou être
appelés à collaborer avec leurs pasteurs au service de la communauté
ecclésiale, pour la croissance et la vie de celle-ci, exerçant des ministères
très diversifiés, selon la grâce et les charismes que le Seigneur voudra
déposer en eux .53»
Tout est dit avec les habituelles nuances de la pensée de Paul VI. Une Eglise
partie audacieusement à la transformation du monde, s’est redit le cœur de
sa foi et sa mission : acheminer les hommes vers la sainteté de Dieu.
Tout ce que nous venons d’écrire sur la mission des laïcs dans l’Eglise a été
repris dans le Code de Droit Canon de 1983, dans le livre II du Code
intitulé : « Le Peuple de Dieu », dans la première partie où sont définis ce
que sont les Fidèles du Christ, ainsi que leurs obligations et leurs droits.
Dans ce même souci d’évangélisation, le Pape prend l’initiative d’honorer
deux grandes saintes, des femmes exceptionnelles, qui, plus de cinq siècles
après leur mort, donnent encore le témoignage de leur attachement au Christ
et de leur appartenance à l’Eglise. Toutes deux, par leur vie donnée et par
leurs écrits, restent pour l’humanité des prophètes et des phares qui
illuminent nos ténèbres.
5 - PROCLAMATION DE DEUX FEMMES DOCTEURS DE
L’EGLISE
Le dimanche 27 septembre 1970, dans la Basilique Saint-Pierre de Rome,
Paul VI a solennellement décerné le titre de docteur de l’Eglise à sainte
Thérèse d’Avila54 qui devient ainsi la première femme à qui ce titre est
Paris, éd. du Centurion, p. 75.53 n° 73.54 Thérèse d’Avila est née le 28 mars 1515. Fille de Don Lorenzo, elle vécut avec ses huit frères et ses trois sœurs. A l’âge de quinze ans, son père la confia au couvent Notre-Dame des Grâces à Avila. Là naquit l’idée pour elle de devenir religieuse. En 1535, malgré une santé fragile Thérèse de Ahumada entra au Carmel de l’Incarnation. Elle prit l’habit le 2
56
reconnu dans l’Eglise.55 Voici quelques passages de l’homélie du Saint Père
pour cette proclamation : « Ce titre magistral, nous l’avons confirmé afin de
donner plus d’autorité dans sa famille religieuse, dans l’Eglise qui prie et
dans le monde, à son message toujours actuel : le message de la prière. Et
voilà la Lumière, que nous apporte sainte Thérèse, Lumière rendue plus
éclatante aujourd’hui par le titre de docteur qui lui est conféré. Ce message
de la prière nous arrive à nous, fils de l’Eglise, en une heure où l’on travaille
intensément à la réforme et au renouveau de la Liturgie. Il nous arrive à
nous qui, au milieu du bruit et de l’agitation du monde extérieur, sommes
tentés de céder à l’affairement de la vie moderne et de perdre les vrais
trésors de notre âme en voulant conquérir les séduisants trésors terrestres.56
Ce message de la prière, nous arrive au moment où l’introspection
psychanalytique décompose l’instrument fragile et complexe que nous
sommes, non plus pour en tirer les appels de l’humanité souffrante et
rachetée, mais pour écouter le trouble murmure de son subconscient animal,
le cri de ses passions désordonnées et son angoisse désespérée. Ce simple et
sublime message de la sage Thérèse nous demande de comprendre « le
grand bien que Dieu fait à une âme lorsqu’Il la dispose à désirer et
pratiquer l’oraison mentale ; parce que celle-ci, je pense, n’est qu’une
forme amicale de conversion, où il nous est donné bien souvent de nous
entretenir seul à seul avec Celui dont nous savons qu’Il nous aime ».
(Vida.8, 4-5.).
A ce message Paul VI fait une remarque sur la mission de la femme dans
l’Eglise : sainte Thérèse d’Avila est la première femme à laquelle l’Eglise
confère le titre de docteur. On ne peut pas ne pas penser à ce sévère
novembre 1553, elle put s’offrir totalement à son Divin Epoux qui la favorisa de grâces surnaturelles. Son projet fut de rendre au Carmel sa règle primitive. Elle confia cette œuvre à saint Joseph, Elle rencontra saint Jean de la Croix, qui fonda sous l’incitation de Thérèse, les Couvents des Carmes déchaux. Elle avait 52 ans lorsqu’elle entreprit ses fondations .Elle mourut le 15 octobre 1582 et fut béatifiée en 1614 et canonisée en 1622. Douée du talent de l’écriture, elle est l’auteur de multiples ouvrages mystiques et de spiritualité dont : Le Chemin de la perfection, Le château intérieur ou Les sept demeures, Les fondations et les Constitutions et de nombreux poèmes. Tous ses écrits sont le fruit de son expérience personnelle et de sa rencontre avec Dieu, ils sont là pour nous initier à la vie spirituelle. Elle a été proclamée docteur de l’Eglise par Paul VI le 15 octobre 1970.http://spiritualité3.free.fr/sainte_therese.html;
55
5639 Paul VI, Homélie du 27 septembre 1970, pour la proclamation de sainte Thérèse d’Avila, comme Docteur de l’Eglise, DC. N° 1572, 18 octobre 1970, pages 908 à 909.
57
avertissement de saint Paul : « Que les femmes se taisent dans les
Assemblées » (1 Cor., 14, 34), ce qui veut dire, aujourd’hui encore, que la
femme n’est pas destinée à avoir dans l’Eglise des fonctions hiérarchiques
de magistère et de ministère. Ce précepte apostolique serait-il violé
aujourd’hui ? Nous pouvons répondre clairement : non. En réalité, il ne
s’agit pas d’un titre qui comporte des fonctions hiérarchiques de magistère.
Mais en même temps, nous devons bien admettre que cela ne signifie en
aucune manière une moindre estime pour la mission de la femme dans le
peuple de Dieu.
Au contraire, lorsqu’elle entre dans l’Eglise par le baptême, la femme
participe au sacerdoce commun des fidèles qui l’habilite et l’oblige à
« professer devant les hommes la foi que par l’Eglise, elle a reçu de
Dieu ».57 Dans cette profession de foi, tant de femmes sont arrivées aux plus
hauts sommets, au point que leurs paroles et leurs écrits sont devenus une
Lumière pour guider leurs frères... Lumière devenue vie d’une manière
sublime pour le bien et le service des hommes. C’est pourquoi le Concile a
voulu reconnaître que les femmes sont appelées à une haute collaboration
avec la grâce divine pour instaurer le Royaume de Dieu sur la terre et en
soulignant la grandeur de leur mission, il n’hésite pas à les inviter à « aider
l’humanité à ne pas déchoir », à « réconcilier les hommes avec la vie », à
« sauver la paix dans le monde. » Vat. II, Message aux femmes58
L’homélie prononcée par Paul VI, le 4 octobre 1970, lors de la proclamation
de sainte Catherine de Sienne59 comme Docteur de l’Eglise, souligne les
57 Lumen Gentium chapitre 2 n°11.58 DC 1966, n° 1462, col. p55-56.
59 Catherine BENINCASA naquit à Sienne le 25 mars 1347 qui était à la fois le dimanche des Rameaux et le jour de l’Annonciation. En 1352, elle eut une vision du Christ Pontife et fit vœu de virginité. A l’âge de quinze ans sainte Catherine revêtit l’habit des sœurs de la Pénitence de saint Dominique (les mantelata) En 1368, après le retour à Dieu de son père et son mariage mystique avec le Christ, Catherine sauva ses frères pendant un coup d’Etat de Sienne. En 1370, elle donna son cœur à Jésus pour l’Eglise. A partir de 1375, elle prit la défense des intérêts du Pape et manifesta son souci de l’unité et de l’indépendance de l’Eglise, ainsi que du retour du Pape d’Avignon à Rome. Elle rencontra le pape Grégoire XI à Avignon. En septembre 1376, elle retourna à Sienne et Grégoire XI prit le chemin de Rome. Catherine continua son service d’ambassadrice du Pape auprès des villes italiennes toujours en pleine ébullition. En 1378, après le décès de Grégoire XI, Urbain VI est élu Pape. Cinq mois après cette élection tumultueuse et les maladresses de l’élu, malgré les
58
caractéristiques et les thèmes dominants de l’enseignement ascétique de la
sainte : « Catherine semble être la mystique du Verbe incarné, et surtout du
Christ Crucifié. Elle a exalté la vertu rédemptrice du sang adorable du Fils
de Dieu… Ce sang du Sauveur, la sainte le voit se répandre continuellement
dans le sacrifice de la messe et dans les sacrements, grâce au ministère du
prêtre, pour purifier et embellir le Corps mystique du Christ tout entier.
Aussi pouvons-nous dire que Catherine est la mystique du corps mystique
du Christ, c'est-à-dire de l’Eglise. L’Eglise est pour elle une mère
authentique à laquelle on doit soumission, respect et assistance. »
« L’Eglise n’est rien d’autre que le Christ Lui-même », ose-t-elle
écrire60d’où son respect et son amour passionné pour le Pontife romain.
Le Saint Père aime à rappeler l’activité intense de la sainte pour la Réforme
de l’Eglise, ses exhortations s’adressent principalement aux évêques ; elle
dit son indignation pour la paresse de beaucoup d’entre eux, pour leur
silence, alors que le troupeau qui leur est confié se disperse et court à la
ruine. Elle écrit à un haut prélat : « Vous ne pouvez plus vous taire, criez
avec cent mille langues. Parce que vous vous taisez, le monde se corrompt ;
l’Epouse du Christ blêmit parce qu’on lui suce le sang, c'est-à-dire le sang
du Christ »61.
Qu’entendait-elle par renouveau et réforme de l’Eglise ? Certainement pas
le bouleversement de ses structures essentielles, la révolte contre les
pasteurs, la voie ouverte aux charismes personnels, les innovations
arbitraires en matière de culte et de discipline… Elle répète, au contraire,
constamment qu’il faut rendre à l’Epouse du Christ sa beauté, qu’il faut
faire la réforme, non pas par la guerre, mais dans la paix et la tranquillité,
par les humbles et continuelles prières, sueurs et larmes des serviteurs de
Dieu.62 Il s’agit donc pour la sainte d’une réforme d’abord et avant tout
appels à la patience et les mises en garde de Catherine de Sienne, survinrent le Grand Schisme d’Occident et l’élection de l’antipape Clément VII (Robert de Genève). Catherine se battit pour que fût reconnu Urbain VI. La même année 1378, elle commença la rédaction de ses Dialogues. Catherine revint à Rome et y mourut l’âge de 33 ans. Bien que ne sachant pas écrire et ne connaissant pas le Latin, elle laissa derrière elle une œuvre considérable.Appartenant au tiers ordre dominicain, elle fut canonisée en 1461 par le pape Pie II, elle est patronne de l’Italie et a été déclarée docteur de l’Eglise par Paul VI, le 15 octobre 1970 en même temps que sainte Thérèse d’Avila. http://missel.free.fr/Sanctoral/04/29.php
60(Lettre 171, éd. Cit., III, 89) 61 Lettre au Cardinal d’Ostie, édition L. Ferretti, I, 8562 Cf. Dialogo, cap. 15, 86, p.44, 197.
59
intérieure, puis extérieure, mais toujours dans la communion avec les
légitimes pasteurs du Christ et, dans l’obéissance qui leur est due. Non
contente d’avoir donné un intense et très vaste enseignement de vérité et de
bonté, par sa parole et par ses écrits, Catherine a voulu sceller celui-ci en
offrant sa vie pour le Corps mystique du Christ qui est l’Eglise, elle n’avait
que trente trois ans. De son lit de mort, dans une petite cellule près de
l’Eglise Sainte Maria sopra Minerva, à Rome, entourée de ses fidèles
disciples. elle adressa au Seigneur cette émouvante prière, véritable
testament de foi et d’amour : « Dieu éternel, reçois le sacrifice de ma vie
pour ce Corps mystique de la sainte Eglise. Je n’ai rien d’autre à donner
que ce que tu m’as donné. Prends mon cœur et presse-le contre l’Epoux. »63
Le message de Catherine de Sienne, nouveau docteur de l’Eglise, est donc
celui d’une foi pure, d’un ardent amour, d’un don humble et généreux à
l’Eglise catholique et épouse du divin Rédempteur. Que ce message soit un
exemple pour tous ceux qui se glorifient d’appartenir à cette Eglise.
A travers les deux discours de Paul VI pour la proclamation de Thérèse
d’Avila et de Catherine de Sienne, nous constatons que le visage de ces
deux grandes figures de l’Eglise sont atypiques et ne correspondent pas à
une idée toute faite de la mission de la femme en Eglise. Le Saint-Père
reconnaît les dons de la nature et de la grâce et leurs propres charismes au
service de la vie de l’Eglise, bien que les femmes n’aient pas la possibilité
d’enseigner dans les églises, Il reconnaît que ces deux grandes mystiques
contribuent au développement et à l’approfondissement de la vie spirituelle
et de la prière personnelle par leurs écrits et leurs exemples. L’une et l’autre
ne se sont pas préoccupées de la place qui leur revenait, tout simplement,
elles ont, à partir de leur existence dans l’humble quotidien, tenté de
contribuer à la réforme de la vie religieuse et de créer de nouvelles
fondations de monastères. Ce fut le cas de Thérèse. Catherine, constatant la
crise que traversait l’Eglise, poussée par l’Esprit-Saint s’est sentie investie
d’une mission, celle de prévenir le Pape et les évêques et leur demander de
revenir à l’essentiel : la vie du Christ continuée dans son Eglise, le Corps
mystique. Le Saint-Père, en les proclamant toutes deux docteurs de l’Eglise,
reconnaît officiellement que la mission n’est pas uniquement d’ordre
63 Lettre 371, édition L. Ferretti, V, p. 301-302.
60
hiérarchique et institutionnel, mais qu’elle est, avant tout, l’œuvre de
l’Esprit-Saint et du charisme. Dans l’ordre de la grâce, les femmes ont une
mission privilégiée.
Nous allons cette fois aborder la troisième partie de notre réflexion sur la
pensée de Paul VI et essayer de comprendre pourquoi ce Pape, qui parle si
positivement de la femme et souhaite la voir impliquée dans la vie, ne s’est
pas prononcé en faveur de leur ordination. Nous tenterons d’analyser les
arguments qu’il met en avant pour conforter sa position de l’exclusion des
femmes dans le sacerdoce. Nous aborderons aussi la pensée des successeurs
de Paul VI, sur la question.
3ème PARTIE
LA QUESTION DES MINISTERES FEMININS DANS LA
VIE DE L’EGLISE
1 – QUE DIT LE MOTU PROPRIO « MINISTERIA QUAEDAM » ?
Le Motu proprio « Ministeria Quaedam » donné à Rome le 15 août 1973
supprime les ordres mineurs. Ces fonctions devront désormais être appelées
« ministères ». Les ministères peuvent être confiés à des laïcs, de telle sorte
qu’ils ne soient plus réservés aux candidats au sacrement de l’Ordre. Les
ministères doivent être maintenus dans toute l’Eglise latine, d’une manière
adaptée aux nécessités d’aujourd’hui, celui de lecteur et celui d’acolyte. Ce
motu proprio spécifie que seuls les hommes peuvent être institués lecteur ou
acolyte, conformément à la vénérable tradition de l’Eglise. Dans l’Eglise
se pose alors, une grande interrogation concernant l’accession des femmes
aux ministères institués, tout ce qui a été dit sur la promotion des femmes,
sur l’égalité des droits et de la dignité en vertu du baptême : « race élue,
61
sacerdoce royal, nation sainte, peuple racheté » (Petr 2.9), ne semble pas
être pris en compte.
Au cours du Synode sur le sacerdoce ministériel, le Cardinal Flahiff,
Archevêque de Winnipeg est intervenu au nom des évêques canadiens le 11
octobre 1971, où il a été question de la diversité croissante des ministères en
liaison avec les ministères propres aux laïcs. Ce Cardinal remarque, que
personne n’a soulevé la question des ministères des femmes et se pose la
question de savoir si tous les ministères seront réservés aux hommes.
Les arguments en faveur des ministères institués en faveur des hommes sont
les suivants :
a) Le Christ était un homme et non une femme.
b) Il a choisi douze hommes pour être les premiers pasteurs, aucune
femme.
c) Saint Paul a clairement dit que les femmes devaient se taire dans
l’Eglise, donc, elles ne peuvent être ministres de la Parole. ( 1 Co 14,
34.35.).
d) Paul a également dit que la femme ayant péché la première dans
l’Eden ne pouvait pas avoir d’autorité sur l’homme (1 Tim.2, 12.15.)
e) L’Eglise primitive a eu des ministres féminins, en particulier en
Orient et surtout jusqu’au VI ème siècle, mais ces ministères n’étaient
pas ordonnés. Et la conclusion est donc : le ministère est un métier
d’homme. Que les femmes se contentent du sort de la Sainte Vierge
et des autres femmes de l’entourage de Jésus : qu’elles soient les
servantes fidèles et dévouées.
Le Cardinal fait remarquer que cette démonstration ne peut plus être
considérée comme valide aujourd’hui. Nous savons que le sacerdoce de
l’Ancien Testament était uniquement masculin, en réaction contre les
cultes cananéens de la fertilité, dont les sacerdoces étaient surtout
féminins. Nous savons que Jésus ne pouvait pas changer si radicalement,
ni si rapidement l’image sociale de la femme dans la société où Il vivait,
même si déjà saint Paul pouvait dire qu’il n’y a plus ni homme, ni
femme devant Dieu (Ga3/28).
Nous savons également que plusieurs déclarations disciplinaires de Paul
ont seulement une portée sociologique, et non doctrinale, par exemple,
62
lorsqu’il impose aux femmes de se voiler la tête dans l’Assemblée
chrétienne (1 Co 11, 3-16). Par conséquent, je pense qu’il n’y a aucun
obstacle dogmatique qui s’oppose à ce que la question soit totalement
réexaminée.
Le Cardinal Flahiff souligne que des textes de Vatican II en particulier
dans Gaudium et spes et dans Apostolicam actuositatem sont
catégoriquement contre toute discrimination contre les femmes dans
l’Eglise. Il faut l’admettre d’excellentes chrétiennes, et d’autres
personnes trouvent que peu d’efforts sont faits pour réaliser ces
affirmations. L’évolution de la situation de la femme dans la société
moderne provient, en partie, de l’influence chrétienne et nécessite qu’il
faille agir sincèrement et sérieusement sur la situation de la femme en
Eglise. Le Cardinal Flahiff ne voit pas comment on peut éviter d’étudier
le rôle de la femme lorsque l’on considère la diversification croissante
des ministères. Pour Lui, ce serait manquer à un devoir envers un peu
plus de la moitié de l’Eglise, si le sujet n’était pas abordé. Il reconnaît
que la situation de la femme n’a pas évolué au même rythme dans toutes
les cultures, si bien qu’il est difficile d’avoir une même perception
universelle sur ce point. Mais cette situation a tellement changé en
plusieurs contrées qu’il est indispensable aux représentants de l’Eglise
de poser deux questions concernant les ministères possibles des femmes.
- Première question :
Etant donné, la reconnaissance progressive des droits égaux de la femme
tant en droit qu’en fait, l’injustice de toute discrimination à son égard,
devons-nous ou non soulever la question de leur rôle possible dans les
nouveaux ministères ?
- Deuxième question :
En même temps qu’apparaissent de nouveaux ministères, pour répondre
à de nouveaux besoins de la société en évolution, sous l’action de
l’Esprit-Saint, pouvons- nous déjà prévoir les nouveaux ministères les
plus adaptés à la femme, à sa nature, à ses dons et à sa préparation, dans
le monde de ce temps dont Gaudium et spes parle si éloquemment.
Le Cardinal de répondre : « A mon avis, la question est trop sérieuse
actuellement pour que le Synode la passe entièrement sous silence. Par
63
ailleurs, un traitement rapide ou superficiel serait décevant ; il pourrait
même être interprété comme une manifestation de plus de la domination
des hommes. Après une consultation officielle de plusieurs mois, les
évêques du Canada, en avril 1971, ont rencontré un groupe de
représentants hautement qualifiés de groupements de femmes
catholiques provenant de toutes les parties du pays. Ces femmes ont
exprimé clairement, fermement et modestement leurs souhaits. A la suite
de l’assemblée générale, les évêques du Canada ont presque
unanimement adopté la proposition suivante : Les représentants de la
Conférence Catholique Canadienne prient leurs délégués de
recommander au Saint-Père la formation immédiate d’une Commission
mixte (c'est-à-dire formée d’évêques, de prêtres, de laïcs des deux sexes,
de religieuses et de religieux) afin d’étudier en profondeur la question
des ministères féminins dans l’Eglise. »
Malgré une tradition vieille de plusieurs siècles opposée aux ministères
féminins, nous croyons que les signes des temps (dont le moindre n’est
pas le fait que déjà des femmes exercent avec succès des tâches
apostoliques et pastorales), nous obligent à entreprendre l’étude de la
situation présente et des possibilités pour l’avenir. Le Cardinal Flahiff
affirmait, dès 1971 : « Si nous ne commençons dès maintenant cette
étude, nous risquons d’être dépassés par les événements. »64
Paul VI aime à redire au Comité pour l’Année Internationale de la
Femme : « Beaucoup de groupes cherchent aujourd’hui l’inspiration
d’un renouveau dans la Parole de Dieu. Comment ne pas s’en réjouir,
tant qu’elle est interprétée avec rectitude, sans passion, dans la tradition
vivante de l’Eglise ? On se plaît à remarquer l’exemple de Jésus : la
nouveauté, l’audace même par rapport aux mœurs de son temps, de son
comportement vis-à-vis des femmes. Si les femmes ne reçoivent pas
l’appel à l’apostolat des Douze et donc aux ministères ordonnés, elles
sont cependant conviées à suivre le Christ comme disciples et
collaboratrices. Les femmes qui avaient accompagné Jésus depuis la
Galilée sont présentes à la Croix (Luc 23/49). Elles observent 64 Flahiff, Cardinal, archevêque de Winnipeg, au nom de l’épiscopat canadien, « Les ministères féminins dans l’Eglise » . DC du 7 novembre 1971- n° 1596, pages 988 et 989.
64
l’ensevelissement de Jésus et sont de nouveau là, au matin de la
résurrection (Luc 24/1-10). On peut dire avec raison : si le témoignage
des apôtres fonde l’Eglise, le témoignage des femmes contribue
grandement à nourrir la foi des communautés chrétiennes ».65
Le Pontife de continuer : « Nous ne pouvons pas changer le
comportement de Notre-Seigneur ni son appel aux femmes ; mais nous
devons reconnaître et promouvoir le rôle des femmes dans la mission
d’évangélisation et dans la vie de la communauté chrétienne. Ce ne sera
pas une nouveauté dans l’Eglise ; on en trouve des traces même dans les
communautés primitives ; et ensuite dans beaucoup de pages de
l’histoire de l’Eglise à travers les siècles, sous différents modes. Mais,
aujourd’hui, une plus nette avancée se dessine. Effectivement, depuis
plusieurs décennies, très nombreuses sont les communautés chrétiennes
qui bénéficient de l’engagement apostolique des femmes, tout
spécialement dans le domaine capital de la pastorale familiale.
Actuellement, certaines femmes sont même appelées à participer aux
instances de réflexion pastorale, soit au niveau diocésain, soit à
l’échelon des paroisses ou des doyennés. Il va de soi que ces nouvelles
expériences ont besoin de mûrir. Le Siège apostolique a lui- même
appelé quelques femmes particulièrement qualifiées, à prendre place
dans certains de ses organismes de travail ».66
Dans une allocution que Paul VI a adressée le 6 décembre 1976, aux
participantes du Congrès du Centre Italien féminin, il parle de l’attitude
novatrice de l’Eglise des premiers temps à l’égard des femmes et il
dit : « L’Eglise tout entière suit avec beaucoup d’intérêt et
d’appréhension les différents mouvements de revendication féminine qui
se proposent de parvenir à l’égalité avec les hommes, non seulement en
droit, mais aussi en fait67. Dans le christianisme, en effet, plus que toute
autre religion, la femme a, dès les origines, un statut de dignité spécial,
dont de nombreux et importants aspects sont attestés dans le Nouveau
Testament. Depuis, le rôle unique de la Très Sainte Vierge Marie, Mère
65 Paul VI, Allocution au comité pour l’année internationale de la femme, DC n° 1675, 4 mai 1975, p 403- 404.66 Idem DC. n° 1675.P403-404.67 Gaudium et Spes, 9.
65
de Jésus (Ac.2, 14) jusqu’à celui des femmes qui suivaient et assistaient
le Seigneur dans sa vie et son ministère public (Luc 8, 2-3). Elles ont
bénéficié de ses premières apparitions après sa résurrection
(cf Mt 28/1-2 ; Mc 16/1-8 ; Luc 24/1-11 ; 22-23 ; Jn 20/1-2). D’autres
avec Marie, étaient présentes avec les douze au Cénacle à la Pentecôte,
(Act.2/14). Il y a celles, également, nommées par saint Paul dans ses
lettres, en raison de leurs multiples fonctions au sein de la primitive
Eglise (Rm 16/1-2 ; Ph 4/2-3 ; Col 4/15 ; 1 Co./11.1 ; Tim 5/16). Il
apparaît avec évidence que la femme est appelée à faire partie de la
structure vivante et opérante du christianisme d’une façon si importante
qu’on n’en a peut être pas encore discerné toutes les virtualités. Si nous
ajoutons, dit le Pape, à ces précieuses données tous les textes qui
recommandent le respect pour chaque femme et l’amour singulier du
mari pour sa femme (Eph 5/25), nous trouverons également sur ce point,
une nouvelle confirmation que l’Eglise s’est présentée avec des traits
extrêmement originaux et novateurs dès sa première manifestation au
monde68 ».
Paul VI, dans une Allocution du 30 janvier 1977, s’est adressé aux
femmes après la publication du document de la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi, sur la question de leur non admission au sacerdoce.
« Ce document mérite d’être connu, même s’il ne dit rien de nouveau
sur la question, de la non- admission des femmes au sacerdoce, mais il
confirme la doctrine et la pratique de toujours, selon laquelle,
l’ordination au ministère sacerdotal est réservé aux hommes, c'est-à-dire,
ceux qui par vocation et par choix ecclésial, sont appelés à cette fonction
dans l’Eglise qui n’est pas accessible aux femmes. Le féminisme
moderne, même celui qui est sain et religieux, que nous respectons et
que nous favorisons, demande avec insistance, raison de cette inégalité :
pourquoi seuls les hommes et non les femmes, peuvent-ils recevoir le
sacerdoce ? Nous ferons tout de suite remarquer que cette inégalité de
fonction ne signifie pas une différence de dignité dans l’ordre objectif de
la grâce, ni donc une dévaluation dans la hiérarchie de la charité et de la
68 Paul VI, Allocution aux participantes du Congrès du Centre féminin Italien, le 6 décembre1976, DC du 2 janvier 1977, n° 1711, p 8.
66
sainteté (Ga 3, 28), où les femme de l’Evangile et Marie nous le
montrent, peuvent avoir une place et une mission primordiales. Mais la
vraie raison, c’est que le Christ a voulu qu’il en soit ainsi lorsqu’ Il a
donné à l’Eglise sa constitution fondamentale, son anthropologie
théologique, qui a toujours été suivie par la tradition de l’Eglise. Dans
un chœur, il y a le ténor et le soprano. Nous savons quelle harmonie et
quels effets artistiques naissent de leurs différences. Il ne s’agit pas de
donner la préférence à l’un aux dépens de l’autre. Il s’agit d’un ordre
fondé sur l’essence des personnes qui composent le chœur, d’une beauté
qui a pour origine la sagesse ontologique de la nature, c'est-à-dire du
Dieu Créateur ». Le pape insiste et dit « Permettez-nous d’inviter les
femmes particulièrement en ce moment où la solution est apportée à ce
problème, indûment envenimé par certaines formes de féminisme
intempérant, à comprendre que l’Eglise ne veut pas marginaliser la
précieuse fonction qui est la leur dans l’ensemble du plan pour le
royaume de Dieu et aussi pour le royaume temporel. Nous leur
exprimons plutôt la confiance que nous mettons dans leur incomparable
et indispensable collaboration. Nous les exhortons à s’acquitter avec une
nouvelle conscience et avec une vigueur plus grande de leur mission de
piété, de sagesse, de vertu, d’amour, en vertu de laquelle elles sont
magistralement reines avec Marie69 ».
2 – QUE DIT LA CONGREGATION POUR LA
DOCTRINE DE LA FOI DANS LA DECLARATION
« INTER INSIGNIORES »
Qu’en est-il dans l’Eglise catholique des décisions magistérielles relatives à
l’ordination des femmes, tant au diaconat qu’à la prêtrise ? Même si les
deux ministères sont différents et si la discipline de l’Eglise admet
maintenant les hommes mariés au diaconat permanent, quand il s’agit
d’ordonner des femmes, la décision est la même : « non ». Le diaconat,
69 Paul VI, Allocution : « Appel aux femmes », du 30 janvier 1977, DC du 20 février 1977, n° 1741, p 157.
67
comme la prêtrise, introduisent la personne dans l’ordre hiérarchique des
clercs, selon le canon 1024 du Code de droit canonique : « Seul un homme
reçoit validement l’ordination sacrée »70. C’est important, avant de présenter
le contenu de la déclaration sur la question de la non admission des femmes
au sacerdoce ministériel de voir dans quel contexte historique, le Pape Paul
VI a sollicité la Congrégation pour la Doctrine de la Foi pour rédiger ce
message.
A – Emergence nouvelle de la question de l’ordination des femmes
Les mouvements féministes, surtout au XIXème siècle, ont fait prendre
conscience, particulièrement aux femmes, de l’état de subordination dans
lequel était tenu le sexe dit faible, et de la nécessité de lutter contre cette
injustice pour l’émancipation de la femme. Les femmes chrétiennes, relisant
avec un sens plus critique et un esprit moins soumis les textes mêmes de la
tradition, ont senti s’éveiller en elles le besoin d’affirmer leur dignité
humaine fondamentale et une liberté spirituelle dont les avaient privées
légistes et moralistes masculins. A cause de cette ouverture vers une
nouvelle vision de la féminité liée à une redécouverte de la lecture biblique
et de l’histoire ecclésiastique, des femmes et aussi des hommes, en sont
venus à penser que la place des femmes dans l’Eglise, celle qu’elles tiennent
de leur baptême, pouvait et devait être reconsidérée par la théologie, comme
par le droit et la discipline de l’Eglise, jusques et y compris en ne leur
refusant plus la prêtrise dont elles étaient jusque-là exclues à cause de leur
sexe71.
Dans cette perspective, les Eglises de la Réforme commencent à consacrer
des femmes pasteurs. Ces décisions n’inquiètent pas les autorités
catholiques qui ne considèrent pas le pastorat réformé comme étant de
même nature que le ministère sacerdotal. Le mouvement est lancé. Dans
70 Bérère Marie-Jeanne, « L’ordination des femmes dans l’Eglise catholique, les décisions du Magistère DRC 46, 1996, p 7 à 20.71 Idem p 9.
68
l’Eglise anglicane, dès 1944, une femme est ordonnée prêtre à Hong-
Kong72; l’Eglise luthérienne de Suède, en 1958, elle aussi, ordonne des
femmes73.
A la vérité, l’admission des femmes au pastorat ne paraissait pas soulever de
problème proprement théologique, dans la mesure où les communautés
avaient rejeté le sacrement de l’ordre, en même temps qu’elles s’étaient
séparées de l’Eglise romaine. Mais une situation nouvelle, beaucoup plus
grave a été créée lorsque des communautés qui entendaient conserver la
succession apostolique74 ont voulu ordonner des femmes. Il a été procédé à
des ordinations de femmes, en 1971 et 1973. L’évêque anglican de Hong
Kong a ordonné trois femmes avec l’accord de son synode ; en juillet 1974,
à Philadelphie, chez les épiscopaliens a eu lieu l’ordination de onze femmes,
déclarée ensuite invalide par la Chambre des évêques. En juin 1975, enfin,
le Synode général de l’Eglise Anglicane du Canada réuni à Québec
approuvait le principe de l’accès des femmes au sacerdoce, suivi en cela, dès
juillet, par le Synode général de l’Eglise anglicane d’Angleterre : Le Dr
Coggan, Archevêque de Cantorbéry informait loyalement le Pape Paul VI
que : « Lentement mais constamment se répandait à l’intérieur de la
Communion anglicane la conviction qu’il n’y a pas d’objections
fondamentales, au plan des principes, à l’ordination sacerdotale des
femmes »75. Ce ne sont que des orientations, mais elles risquent d’être
rapidement suivies en pratique, ce qui introduirait un élément nouveau et
grave dans le dialogue avec l’Eglise romaine sur la nature du ministère et
qui a suscité une mise en garde d’abord de l’Archevêque des Orthodoxes en
Grande-Bretagne, Athënagoras de Thyade et du Pape Paul VI, lui-même.
C’est ainsi que ce dernier a écrit deux fois au Dr Coggan pour l’entretenir
72 Cette ordination avait été célébrée par l’évêque Hall, mais celle-ci avait dû renoncer à exercer son ministère sur l’intervention énergique des Archevêques d’York et de Canterbury, qui pour des motifs œcuméniques désavouèrent l’évêque de Hong Kong. DC n° 1714, du 20 février 1977 p 165.73 Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Commentaire au sujet de la déclaration sur « La question de l’admission des femmes au sacerdoce ministériel » DC 20 février 1977, n° 1714, p 165 et suivantes.74 Sur ce point, la position de l’Eglise catholique a été précisée par Léon XIII, Epist. Apostolicae Curae, le 13 septembre 1896, dans Léonis XIII acta, t.16 51897, p 258 à 275.75 Lettre du 9 juillet 1975 au Pape, dans l’Osservatore Romano, 21 août 1976, DC 1976, n° 1704, p 771
69
sur cette question de l’ordination des femmes76. Les instances œcuméniques
de l’époque ont d’ailleurs porté le problème devant la conscience de toutes
les dénominations chrétiennes, les obligeant à examiner leurs positions de
principe, notamment lors de l’Assemblée mondiale du Conseil
Oecuménique des Eglises à Nairobi, en décembre 1975.
Un événement d’un autre genre en a encore accentué l’actualité : c’est
l’organisation sous les auspices de l’O.N.U. de l’Année Internationale de la
Femme en 1975. Nous l’avons vu dans le précédent chapitre, le Saint-Siège
y a participé par « un Comité pour l’Année Internationale de la Femme » :
celui-ci comprenait quelques membres de la « Commission d’étude sur le
rôle de la femme dans la société et dans l’Eglise » qui avait déjà été
constituée en 1973. Faire respecter et promouvoir les droits et les devoirs
respectifs de l’homme et de la femme entraîne à réfléchir sur la participation
des femmes à la vie sociale d’une part, à la vie et à la mission de l’Eglise,
d’autre part.
On comprend que ces interrogations aient suscité dans les milieux
catholiques eux-mêmes, des recherches intenses, voire passionnées.
Certaines personnalités célèbres n’ont pas hésité à prendre parti hardiment,
estimant qu’il n’y avait « aucune objection théologique fondamentale à
l’éventualité des femmes prêtres77.»
Plusieurs groupements se sont créés en vue de revendiquer le Sacerdoce
pour les femmes et se sont réunis dans une conférence qui s’est tenue à
Détroit (U.S.A.) en Novembre 1975 sous le titre : « Women in future :
Priesthood now, a call for action ». Il était donc nécessaire que le Magistère
intervînt dans une question qui était posée de façon aussi vive dans l’Eglise
Catholique et qui avait des incidences graves au point de vue oecuménique.
Monseigneur Bernardin, président de la conférence épiscopale des Etats-
Unis, le 7 octobre 1976, déclarait qu’il se voyait « obligé de réaffirmer la
doctrine de l’Eglise selon laquelle les femmes ne doivent pas accéder au
76 Paul VI, Lettre au Dr Goggan, 30 novembre 1975 et 10 février 1976, DC 1976, n° 1704, p. 771.77Formule rapportée dans Le Monde dès 19-20 septembre 1965, que Jean Daniélou a prononcé pendant le Concile, à une réunion de l’Alliance Internationale Jeanne d’Arc. Il revient sur ce sujet, avec peut-être plus de nuance, dans l’interview donné au moment de sa promotion cardinalice, L’Express, n° 936, 16-22 juin 1969, p. 122, 124 : « Il faudrait examiner où sont les vraies raisons qui font que l’Eglise n’a jamais envisagé le sacerdoce des femmes. »
70
Sacerdoce. Il ne faut pas que les responsables de l’Eglise donnent
l’impression d’encourager, ne serait-ce que par leur silence, des espoirs et
des attentes déraisonnables. »
Le Pape Paul VI lui-même a rappelé le même enseignement, d’abord de
façon occasionnelle, notamment dans son allocution du 18 avril 1975 au
comité pour l’année internationale de la femme : « Si les femmes ne
reçoivent pas l’appel à l’Apostolat des Douze et donc au Ministère ordonné,
elles sont conviées à suivre le Christ comme disciple et collaboratrice…
Nous ne pouvons pas changer le comportement de Notre-Seigneur ni son
appel aux femmes »78. Il a dû ensuite se prononcer de façon expresse dans
son échange de l’Etre avec le docteur Coggan, Archevêque de Canterbury :
« Votre Grâce est évidemment bien au courant de la position de l’Eglise
Catholique sur cette matière : elle soutient qu’il n’est pas admissible
d’ordonner des femmes au sacerdoce, et cela pour des raisons vraiment
fondamentales79. » C’est sur son ordre que la Congrégation pour la doctrine
de la foi a examiné l’ensemble de la question, rendue complexe parce que,
d’une part, bien des arguments présentés dans le passé en faveur de la
doctrine traditionnelle ne sont guère soutenables aujourd’hui et que, d’autre
part, il faut évaluer les raisons nouvelles apportées par ceux qui demandent
l’ordination des femmes. Il devenait difficile de laisser plus longtemps sans
réponse une question précise, posée un peu partout, et qui polarise
l’attention au détriment même d’efforts plus urgents à promouvoir.
Nous allons maintenant analyser le contenu de cette déclaration de la
Congrégation pour la Doctrine de la Foi signée par le Pape Paul VI.
B – Analyse des arguments de la déclaration « inter insigniores »
Dans l’introduction, Paul VI reconnaît que toutes les formes de
discriminations touchant les droits fondamentaux de la personne doivent
être dépassées et éliminées comme contraires aux desseins de Dieu, en
premier lieu celles qui se fonderaient sur le sexe.80 L’égalité qui en résultera
doit procurer la construction d’un monde, non pas nivelé et uniforme, mais
78 D.C. 1975, page 403.79 Lettre du 30 novembre 197580 Gaudium et spes, 7 décembre 1965, n° 29, in D.C. 1966, n° 1464, col. 216.
71
harmonieux et unifié, si les hommes et les femmes y apportent leurs
richesses et leurs dynamisme propres, comme le précisait Paul VI aux
membres du Comité pour l’Année Internationale de la Femme, le 18 avril
1975.La déclaration montre que dans l’histoire de l’Eglise, des femmes ont
joué un rôle décisif et accompli des tâches de valeur remarquable. Il suffit
de penser aux fondatrices des grandes familles religieuses, comme sainte
Claire d’Assise, sainte Thérèse d’Avila. Celles-ci, d’autre part, et sainte
Catherine de Sienne ont laissé des écrits si riches de doctrine spirituelle que
le Pape les a inscrites parmi les docteurs de l’Eglise. Il est impossible
d’oublier le grand nombre de femmes qui se sont consacrées au Seigneur
pour l’exercice de la charité ou pour les missions, ni les épouses chrétiennes
qui ont eu une profonde influence dans leur famille, en particulier pour
transmettre la foi à leurs enfants. Le Saint-Père a fait remarquer que très
nombreuses sont déjà les communautés chrétiennes qui bénéficient de
l’engagement apostolique des femmes et que certaines de ces femmes sont
appelées à participer aux instances de réflexion pastorale, soit au niveau des
diocèses, soit à l’échelon des paroisses ; le siège apostolique a fait prendre
place à des femmes dans certains de ses organismes de travail. Nous l’avons
vu dans le précédent paragraphe, depuis un certain nombre d’années,
plusieurs communautés chrétiennes issues de la réforme du XVI ème siècle
ou apparues par la suite ont fait accéder des femmes au pastorat au même
titre que les hommes ; leur initiative a provoqué de la part des membres de
ces communautés des requêtes tendant à généraliser cette admission, aussi
bien d’ailleurs que des réactions en sens contraire. Cette situation constitue
donc un problème sur lequel l’Eglise catholique doit faire connaître sa
pensée d’autant plus que, dans divers secteurs de l’opinion, on s’est
demandé si, à son tour, elle ne devrait pas modifier sa discipline et admettre
les femmes à l’ordination sacerdotale.
Dans ces circonstances, et pour ces raisons, en exécution d’un mandat
qu’elle a reçu du Saint-Père, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi
estime devoir rappeler que : « l’Eglise, par fidélité à l’exemple de Son
Seigneur, ne se considère pas autorisée à admettre les femmes à l’ordination
sacerdotale, elle croit opportun dans la conjoncture actuelle d’expliquer
cette position qui sera peut-être ressentie douloureusement mais dont la
72
valeur positive apparaîtra à la longue, car elle pourrait aider à approfondir la
mission respective de l’homme et de la femme ».
Six arguments sont repris par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi
pour expliciter la position qu’elle a prise à la demande du Saint-Père. Nous
allons résumer ces points successivement.
a- la tradition est constante dans l’exclusion des femmes à
l’épiscopat et au presbytérat. Cette tradition a été religieusement
sauvegardée par les églises d’Orient. Ce n’est que dans les sectes
hérétiques des premiers siècles, principalement gnostiques qu’on a
relevé des tentatives pour faire exercer le ministère sacerdotal par des
femmes. Ces faits ont été très sporadiques et nous ne les connaissons
que par la réprobation sévère avec laquelle les signalent saint Irénée,
Tertullien, Firmilien de Césarée, dans une lettre à saint Cyprien,
Origène, dans un commentaire de la première Epître aux Corinthiens.
Comment interpréter la pratique constante et universelle de l’Eglise ? Il
est sûr, pour le théologien, que ce que fait l’Eglise, elle pouvait le faire,
puisqu’elle a l’assistance de l’Esprit-Saint : c’est un argument classique
que l’on retrouve souvent chez saint Thomas à propos des sacrements
Mais si l’Eglise ne l’a jamais fait jusqu’à aujourd’hui, est-ce une preuve
qu’elle ne pourra pas le faire par la suite ? Cette constatation négative
est-elle normative, ou s’explique t-elle par les circonstances historiques,
socioculturelles, c’est-à-dire dans le cas présent, par la condition de la
femme dans les sociétés antique et médiévale, par une certaine
conception de la supériorité masculine découlant de la culture ?
Gratien, dans son décret citant les Capitulaires Carolingiens et les
fausses Décrétales, cherchait plutôt à justifier par les prescriptions de
l’Ancien Testament l’interdiction faite aux femmes et déjà formulée
dans l’Eglise antique d’entrer dans le sanctuaire et de servir l’autel81.
C’est déjà ce qu’exprimaient, sous la forme d’une littérature apocryphe,
les documents antiques de la discipline ecclésiastique, originaire de
Syrie, comme la Didascalie des apôtres (milieu du IIIème siècle) et les
Constitutions apostoliques du début du Vème siècle. Saint-Jean 81 Dictum Gratiani in Caus. 34, q. 5, c.11, et Edit. Friedberg. T, 1, col. 1254, cf. R. Metz, la femme en droit canonique médiéval, dans Recueil de la société Jean Bodin 12, 1962, p. 59-113
73
Chrysostome, de son côté, comprenait bien, en commentant le chapitre
21 de Saint-Jean, que ce n’est pas sur une incapacité naturelle de la
femme que se fondait son exclusion du pastorat confié à Pierre, puisque,
remarquait-il, « même la plupart des hommes ont été écartés par Jésus
de cette immense tâche ». Tout au long des siècles, la tradition a
toujours été défavorable à l’ordination des femmes, les théologiens et les
canonistes ont été quasi unanimes à considérer que cette exclusion était
absolue et qu’elle avait une origine divine. Il y a eu cependant, chez
quelques auteurs du Moyen-Age, une hésitation que rapporte saint
Bonaventure. Elle est provoquée par le souvenir de l’existence des
diaconesses dans la primitive Eglise. Certains théologiens se sont
demandé si elles recevaient une véritable ordination sacramentelle. La
question du sacerdoce des femmes doit être reprise de façon complète,
sans idée préconçue. Cependant, la Congrégation pour la Doctrine de la
Foi a estimé qu’il fallait réserver cette question et ne pas l’aborder dans
le présent document.
b - l’attitude du Christ
Aux yeux de la Tradition, il apparaît que le motif essentiel qui anime
l’Eglise pour appeler uniquement des hommes à l’ordination et au
ministère proprement sacerdotal, c’est qu’elle entend demeurer fidèle au
type de ministère ordonné voulu par le Seigneur Jésus Christ et
religieusement maintenu par les apôtres. C’est la Tradition qui a sans
cesse proposé comme expression d’une volonté du Christ le fait qu’il
n’ait choisi que des hommes pour constituer le groupe des Douze. C’est
là, un fait indiscutable ; mais peut-on prouver avec une certitude absolue
qu’il s’agit d’une volonté délibérée du Christ ? On comprend que les
partisans d’un changement de discipline fassent porter tous leurs efforts
contre la valeur significative de ce fait. Ils objectent, notamment, que si
le Christ n’a pas fait entrer des femmes dans le groupe des Douze, c’est
parce que les préjugés de son temps ne le permettaient pas : une telle
imprudence eût compromis irrémédiablement son œuvre. Cependant, on
doit reconnaître que Jésus n’a pas hésité devant
74
d’autres « imprudences » qui, en effet, lui ont valu l’hostilité de ses
concitoyens, notamment sa liberté à l’égard des interprétations
rabbiniques du sabbat. A l’égard des femmes, son attitude a été
nettement novatrice : tous les commentaires reconnaissent qu’il a
enfreint bien des préjugés à leur égard, et les faits que l’on relève
forment un ensemble saisissant.
Les théologiens insistent sur une autre objection : si Jésus n’a choisi que
les hommes pour constituer le groupe des Douze, c’est dans une
intention symbolique : ils devaient représenter les ancêtres des douze
tribus d’Israël. Mt, 19, 28 ; cf. Lc 22.30, mais cette argumentation ne
saurait convaincre. Dans le peuple messianique, les Douze représentent
Jésus. C’est la vraie raison pour laquelle il convient que les apôtres
soient des hommes : ils agissent au nom du Christ et doivent continuer
son œuvre.
Le Pape Innocent III voyait un témoignage des intentions du Christ dans
le fait que les pouvoirs qu’Il a donné aux apôtres, Il ne les a pas
communiqués à sa Mère, malgré son éminente dignité. Cet argument est
un des plus fréquemment répétés dans la Tradition : les Pères présentent
Marie comme l’exemple de la volonté de Jésus et cela, dès le IIIème siècle
et il est particulièrement cher aux orientaux, jusqu’à aujourd’hui.
Cependant, il est vivement récusé par tous ceux qui plaident en faveur
de l’ordination des femmes : la maternité divine de Marie, la façon dont
elle a été associée à l’œuvre rédemptrice de son Fils, la situent à une
place totalement exceptionnelle et unique ; ce serait même, dit-on, ne
pas lui rendre justice que de la comparer aux apôtres et d’arguer du fait
qu’elle n’a pas pris rang parmi eux. En réalité, ces remarques ont
l’avantage de nous faire comprendre que, dans l’Eglise, il y a des
fonctions différentes : l’égalité des chrétiens s’harmonise dans la
complémentarité des tâches ; le ministère sacramentel n’est pas le seul
ordre de grandeur, ni forcément le plus élevé : c’est une forme de
service du Royaume.82
c- La pratique des Apôtres
82 cf. Commentaire de la déclaration par la Congrégation de la Foi, DC n°1714 du 20 février 1977, p 168 et 169
75
Le texte de la Déclaration souligne ce fait que Marie, malgré la place
privilégiée qu’elle occupe au Cénacle après l’Ascension, n’a pas été
proposée pour entrer dans le Collège des Douze, lors de l’élection de
Mathias. C’est également le cas de Marie-Madeleine et des autres
femmes qui, pourtant, ont été les premières à apporter la Bonne
Nouvelle de la Résurrection ; il est vrai que la mentalité juive
n’accordait pas une grande valeur aux témoignages des femmes. Il est
remarquable, cependant, que le livre des Actes et les Epîtres de saint
Paul soulignent le rôle exercé par des femmes dans l’évangélisation et
pour la formation individuelle des convertis. (Rom 16,3-12 ; Ph 4,3).
Priscille a entrepris de parfaire la formation d’Apollos (cf. Act. 18,26) ;
Phoebé est au service de l’Eglise de Cenchrées (cf. Rm 16,1).Tous ces
faits manifestent dans l’Eglise apostolique une évolution considérable
par rapport aux coutumes du judaïsme. Néanmoins, à aucun moment il
n’a été question d’ordonner ces femmes. Dans les épîtres pauliniennes,
des exégètes ont noté une différence entre deux formules de l’Apôtre : il
écrit instinctivement « mes collaborateurs » (Rm 16,3 ; Ph 4, 2-3) à
propos des hommes et des femmes qui l’aident d’une manière ou d’une
autre dans son apostolat ; mais il réserve le titre de « coopérateurs de
Dieu » (1Co 3, 9 ; 1Th3,2) à Apollos, Timothée et à lui-même, Paul,
ainsi désignés parce qu’ils sont directement voués au ministère
apostolique, à la prédication de la Parole de Dieu. Malgré leur rôle si
important au moment de la Résurrection -la collaboration des femmes-
l’Eglise ne s’est pas crue autorisée à admettre les femmes à l’ordination
sacerdotale.
d - Valeur permanente de cette pratique
C’est sur le caractère permanent de ce refus que portent, bien entendu,
les objections de ceux qui voudraient faire admettre la légitimité de
l’ordination des femmes. Ces objections relèvent d’arguments très
variés.
. la première objection est fondée sur les circonstances
historiques qui s’appuient sur l’attitude de Jésus ; cette attitude était
76
inspirée par la prudence : il n’aurait pas voulu risquer de compromettre
son oeuvre en allant à l’encontre des préjugés sociaux. La même
prudence se serait, dit-on, imposée aux apôtres. C’est ainsi que l’on a
accusé Saint-Paul de misogynie et qu’on trouve dans les Epîtres des
textes sur l’infériorité de la femme qui font aujourd’hui question pour
les exégètes et les théologiens. Deux des plus célèbres textes pauliniens
sur la femme sont-ils authentiques, ou bien faut-il y voir une
interpolation ? C’est d’abord 1 Co 14, 34-35 : “Que les femmes se
taisent dans l’assemblée, car il ne leur est pas permis de prendre la
parole; qu’elles se tiennent dans la soumission comme la loi elle-même
le dit. » Ces deux versets, qui manquent dans d’importants manuscrits et
ne sont pas cités avant la fin du second siècle, présentent des
particularités de style étrangères à Paul. C’est aussi, 1 Tm 2, 12 : « Je ne
permets pas à la femme d’enseigner et de gouverner l’homme. » dont
l’authenticité paulinienne est souvent contestée.
Peu importe que ces textes soient ou non authentiques : ils ont été
abondamment utilisés par les théologiens pour expliquer que la femme
ne peut recevoir ni pouvoir de magistère, ni pouvoir de juridiction ; c’est
surtout le texte de la première Lettre à Timothée qui fournit à saint
Thomas la preuve que la femme est dans un état de soumission ou de
service, parce que la femme a été créée après l’homme et qu’elle est la
première responsable du péché originel. Mais il y a de Paul d’autres
textes, ceux-là d’une authenticité indiscutée qui affirment que « le chef
de la femme c’est l’homme. » (1 Co 11, 3 : Ep. 5, 22, 24). Cette
anthropologie, en continuité avec les livres de l’Ancien Testament,
n’est-elle pas à l’origine de la conviction de Paul et de la tradition de
l’Eglise que les femmes ne peuvent recevoir le ministère ? Il est évident
que la société moderne récuse cette vision des choses et remarquons que
Paul ne se place pas au niveau philosophique mais au plan de l’histoire
biblique.
. Peut-on imaginer que l’Eglise abandonne ou évolue dans
ces conceptions traditionnelles de la femme ? Le principe est que
l’Eglise, elle-même, dans les divers domaines de sa vie assure le
discernement entre ce qui peut changer et ce qui doit demeurer
77
immuable. Comme le précise la déclaration, « quand elle estime ne
pouvoir accepter certains changements, c’est qu’elle se sait liée par la
conduite du Christ : son attitude, malgré les apparences, n’est pas alors
de l’archaïsme mais de la fidélité. Elle ne peut se comprendre vraiment
qu’à cette seule Lumière. L’Eglise se prononce en vertu de la promesse
du Seigneur et de la présence de l’Esprit-Saint, en vue de mieux
proclamer le mystère du Christ, d’en sauvegarder et d’en manifester
intégralement la richesse. » C’est à la lumière de ce principe qu’il faut
envisager un bon nombre de questions posées à l’Eglise dans les
nombreux plaidoyers qui ont été prononcés en faveur de l’ordination des
femmes.83
. On a fait remarquer également que, dans le cours des temps,
l’Eglise a accepté de confier à des femmes des fonctions vraiment
ministérielles, que l’Antiquité leur refusait au nom même de l’exemple
et de la volonté du Christ : il s’agit surtout de l’administration du
baptême, de l’enseignement, et de certaines formes de juridictions
ecclésiales.
. pour ce qui est du baptême, même les diaconesses de
l’Orient Syrien n’étaient pas admises à le donner et son administration
solennelle est toujours un acte hiérarchique réservé à l’évêque, aux
prêtres et accessoirement aux diacres. C’est le baptême d’urgence qui
peut être conféré, non pas seulement par des chrétiennes mais même par
des non baptisés, hommes ou femmes : sa validité ne requiert donc pas
le caractère baptismal ni à plus forte raison celui de l’ordination.
. pour ce qui concerne l’enseignement, une distinction
s’impose et cela, dès la primitive Eglise. Il y a des formes
d’enseignement ou d’édification accessible aux laïcs et dans ce cas,
Saint Paul désigne expressément les femmes : ce sont les charismes de
« prophéties » (1 Co 11, 15). En ce sens, rien ne s’opposait à donner le
titre de docteur à Thérèse d’Avila et Catherine de Sienne, comme on le
donne à des professeurs par exemple, à saint Albert le Grand. Autre
chose est la fonction officielle et hiérarchique d’enseignement du révélé, 83 Congrégation pour la doctrine de la foi, commentaire au sujet de la déclaration sur la question de l’admission des femmes au sacerdoce ministériel, DC n° 1714 du 20 février 1977, p. 170.
78
qui suppose la mission du Christ par les apôtres, transmise par eux à
leurs successeurs.
Des femmes ont participé à la juridiction ecclésiastique, le
Moyen Age a fourni des exemples : quelques abbesses ont accompli des
actes réservés normalement aux évêques, comme la nomination de curés
ou de confesseurs.
D’une façon plus générale et surtout dans l’anglicanisme, on cherche à
élargir le débat de la manière suivante : l’Eglise est-elle liée à l’Ecriture,
à la Tradition, comme à un absolu ? Alors qu’elle est un peuple en
pèlerinage et qu’elle doit écouter ce que dit l’Eglise ? Ou bien on
distingue entre les points essentiels sur lesquels il importe d’être
unanime et des questions de discipline qui admettent la diversité. On
considérerait, dès lors que l’ordination des femmes ressortissant à ces
aspects secondaires, ne nuirait pas au progrès de l’union des Eglises. Là
encore, c’est l’Eglise, qui par sa pratique et son magistère, détermine ce
qui exige unanimité et la distingue du pluralisme acceptable ou
souhaitable. Or, le problème de l’ordination des femmes touche de trop
près à la nature du sacerdoce ministériel pour qu’on puisse accepter qu’il
soit résolu dans le cadre d’un légitime pluralisme entre Eglises. C’est
tout le sens de la lettre de Paul VI à l’archevêque de Cantorbéry84.
e - Le Sacerdoce ministériel à la lumière du mystère du Christ
Après avoir rappelé la norme de l’Eglise et ses fondements, il est utile et
opportun d’éclairer cette règle en montrant la profonde convenance que la
réflexion théologique découvre entre la nature propre du sacrement de
l’homme, avec sa référence spécifique au ministère du Christ, et le fait que
seuls des hommes ont été appelés à recevoir l’ordination sacerdotale. Il ne
s’agit pas là d’apporter une argumentation démonstrative, mais d’éclairer
cette doctrine par l’analogie de la foi.
L’enseignement constant de l’Eglise renouvelé et précisé par le deuxième
Concile du Vatican, rappelé encore par le Synode des évêques en 1971 et 84 Congrégation pour la doctrine de la foi, commentaire au sujet de la déclaration sur la question de l’admission des femmes au sacerdoce ministériel, DC du 20 février 1977, n° 1714, p 171
79
par la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le 24 juin 1973, proclame
que l’évêque ou le prêtre, dans l’exercice de son ministère, n’agit pas en son
nom propre, in persona propria : il représente le Christ qui agit par lui : « Le
prêtre tient réellement la place du Christ », écrivait déjà au IIIème siècle
Saint Cyprien. C’est cette valeur de représentation du Christ que saint Paul
considérait comme caractéristique de la fonction apostolique (cf. 2, Co 5/
20 ; Ga 4/14). Elle atteint sa plus haute expression et un mode tout
particulier dans la célébration eucharistique qui est la source et le centre de
l’unité de l’Eglise ; le prêtre est le seul à pouvoir l’accomplir et il agit alors
non seulement par l’efficacité que lui confère le Christ, mais in Persona
Christi85 , tenant le rôle du Christ au point d’être son image même lorsqu’il
prononce les paroles de la consécration86.
La ressemblance au Christ, en tant qu’homme, est plus facilement reconnue
si le prêtre est lui-même homme, ce qui repousse la possibilité pour les
femmes de devenir prêtres. Mais pourrait-on dire que le Christ étant
actuellement dans la condition céleste, il serait désormais indifférent qu’il
soit représenté par un homme ou par une femme, puisque, « dans la
résurrection, on ne prend ni homme ni femme », selon Mat. 22, 30.
Au Moyen Age, certains théologiens disaient que le ministre n’agissait pas
seulement in persona Christi, mais aussi in persona Ecclesiae, c'est-à-dire
au nom de toute l’Eglise et pour la représenter. Puisque le prêtre représente
aussi l’Eglise, ne serait-il pas possible de penser que cette représentation
peut-être assurée par une femme ?
85 Constitution dogmatique, Lumen gentium, 21 novembre 1964, n°10 : « mais le prêtre investi du sacerdoce ministériel, en vertu du pouvoir sacré dont il jouit, forme et gouverne le peuple sacerdotal, accomplit en tenant le rôle du Christ le sacrifice eucharistique et offre celui-ci à Dieu au nom de tout le peuple » ; n° 28 : « … par la puissance du sacrement de l’ordre, à l’image du Christ, prêtre suprême et éternel, … ils exercent par excellence leur charge sacrée dans le culte eucharistique dans laquelle agissant en tenant le rôle du Christ… ».Décret presbyterorum ordinis, 7 décembre 1965, n° 2 : « … les prêtres, par l’onction du Saint-Esprit, sont marqués du caractère spécial et sont ainsi configurés au Christ prêtre, afin qu’ils aient le pouvoir d’agir en tenant le rôle du Christ Tête » ; n° 13 : « en tant que ministre des mystères sacrés, surtout dans le sacrifice de la messe, les prêtres tiennent de manière spéciale, le rôle du Christ… »86 Saint Thomas, Summa theologica, IIIe Pars, q. 83, art. 1, ad 3um : “il faut dire que (de même que la célébration du Saint-Sacrement est à l’image représentative de la croix du Christ), de la même façon le prêtre agit en tant qu’image du Christ dans le rôle et par la puissance duquel il prononce les paroles de la consécration. »
80
L’ensemble de ces réflexions permet de comprendre le bien-fondé de la
pratique de l’Eglise ; de conclure que les controverses élevées de nos jours
sur l’ordination de la femme sont, pour tous les chrétiens, une pressante
invitation à approfondir le sens le l’Episcopat et du Presbytérat ; à
redécouvrir la situation originale du prêtre dans la communauté des baptisés
dont il fait partie, mais dont il se distingue parce que dans les actions qui
exigent le caractère de l’ordination, il est pour elle, l’image, le symbole du
Christ lui-même.
f - Le sacerdoce ministériel dans le mystère de l’Eglise
Il est frappant de voir à quel point les questions soulevées dans la
controverse de la non ordination des femmes sont liées à une théologie de
l’Eglise. Lorsqu’on propose l’accès des femmes au sacerdoce parce
qu’aujourd’hui elles ont acquis le « leadership » dans bien des domaines de
la vie moderne, on semble oublier que l’Eglise n’est pas une société comme
les autres et qu’en elle, l’autorité, le pouvoir sont d’une nature très
différente puisqu’elle est, normalement, liée au sacrement de l’ordre. Pour
cette raison, on ne voit pas comment il est possible de proposer l’accès des
femmes au sacerdoce en vertu de l’égalité des droits de la personne
humaine, égalité qui vaut aussi pour les chrétiens. C’est ce que l’on peut lire
dans l’Epître aux Galates (3,28) : « Dans le Christ, il n’y a plus de
distinction entre l’homme et la femme », mais ce passage ne concerne
nullement les ministères. Il affirme seulement la vocation universelle qui est
la même pour tous. D’autre part, c’est surtout méconnaître complètement la
nature du sacerdoce ministériel que de le considérer comme un droit : le
baptême ne confère aucun titre personnel au ministère public dans l’Eglise.
Le sacerdoce n’est pas conféré pour l’honneur ni l’avantage de celui qui le
reçoit, mais comme un service de Dieu et de l’Eglise ; il fait l’objet d’une
vocation expresse, totalement gratuite : « Ce n’est pas vous qui m’avez
choisi ; c’est moi qui vous ai choisis et institués » (Jn 15, 16 ; cf. He 5, 4).
Parce que le sacerdoce fait l’objet d’une vocation expresse et gratuite de la
part de Dieu, il ne peut être revendiqué et ce serait une erreur de réduire
l’ordination des femmes, comme on le fait parfois, à une question
81
d’injustice. Un tel point de vue ne se justifierait que si l’ordination était un
droit accordé par Dieu à toute personne, et si les potentialités humaines de
quelqu’un ne pouvaient se réaliser totalement que par elle. Mais en réalité,
personne, homme ou femme, ne peut se prévaloir d’un droit à l’ordination et
étant donné que la charge épiscopale et sacerdotale est fondamentalement un
ministère de service, l’ordination ne complète en aucune façon l’humanité
de quelqu’un.87
La déclaration de la Congrégation de la Doctrine de la Foi se termine par
l’indication discrète d’un double effort à promouvoir. L’un est d’ordre
doctrinal et spirituel : nous avons à prendre mieux conscience de la diversité
des tâches dans l’Eglise où l’égalité n’est point identité… ; les rôles sont
distincts et ne doivent pas être confondus, ils ne donnent pas lieu à la
supériorité des uns sur les autres… le seul charisme qui peut et doit être
désiré, c’est la charité… Les plus grands dans le royaume des cieux, ce ne
sont pas les ministres mais les saints.
Le second effort, est d’ordre apostolique et social : il y a beaucoup à faire
pour que les femmes exercent aujourd’hui leur rôle capital, aussi bien pour
le renouvellement et l’humanisation de la société que pour la découverte,
parmi les croyants, du vrai visage de l’Eglise88.
Le seul charisme qui peut et doit l’être : l’Amour (1 Co 12,13). Il est bien
évident que le refus de l’ordination des femmes ne se fonde nullement sur
une infériorité par rapport à l’homme. Sans plus nous arrêter à de stériles
discussions, il appartient de tout mettre en œuvre en réponse aux appels
réitérés de Paul VI, pour que les femmes puissent trouver toute la place qui
leur revient dans l’Eglise et y exercer, davantage encore, des responsabilités.
Pour conclure sur la Déclaration de la Congrégation de la Doctrine de la Foi
sur la question de l’admission des femmes au sacerdoce, je m’inspire de ce
que Louis Ligier89 a dit dans son propre commentaire : cette déclaration
87 Bernardin, Président de la Conférence Nationale des Evêques des Etats-Unis, dans Origins Documentary Service, 16 octobre 197588 Etchegaray Roger, Président de la Conférence Episcopale Française, dans La présentation de la déclaration, DC du 20 février 1977 n° 1714 p.17489 Ligier Louis, La question du sacerdoce des femmes dans l’Eglise, D.C. n° 1742, p. 478 à 488 du 21 mai 1978. L. Ligier, S.J. était professeur de théologie sacramentelle à l’Université Pontificale Grégorienne, et consulteur de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi.
82
intervient au beau milieu du dialogue œcuménique. Avant tout, la
déclaration entend mettre en évidence que Rome veut ce dialogue. Dans son
texte elle ne cherche qu’à favoriser les conditions requises pour son
heureuse issue. De fait, en invitant les autres Eglises à ne pas introduire dans
leur discipline la nouveauté du ministère féminin, l’Eglise catholique veille
aux principes bien connus en matière œcuménique, et qui veut que, au
moment où se déroule un processus de réunion, il n’est pas convenable
qu’une Eglise introduise des usages qui mettront un obstacle au
rapprochement prévu avec les autres Eglises. Et quand l’Eglise catholique
déclare la non admissibilité des femmes au sacerdoce, elle n’est pas en train
de créer une nouvelle discipline : elle confirme seulement en face des
changements admis par d’autres Eglises issues de la réforme du XVIème
siècle, qu’elle reste fidèle à son attitude qui est antérieure au début du
dialogue.
Cette déclaration a, en outre, le mérite de proposer au dialogue œcuménique
sur les ministères, la clef centrale, celle de la sacramentalité du sacerdoce
ministériel. Avec son insistance sur la qualité sacramentelle du presbytérat
et de l’épiscopat, tous deux, signes du Christ, chef de l’Eglise, ce document
n’introduit pas de signe de principe nouveau : il renouvelle seulement
l’attachement de Rome aux propos du récent concile Vatican II, quand
Lumen Gentium affirme que les évêques, « d’une façon éminente et visible
tiennent la place du Christ lui-même, maître, pasteur et pontife et joue son
rôle. »90 Il est important que l’Eglise romaine répète la même dogmatique
que celle qu’elle avait formulée pendant le dernier Concile, et bien loin de
clore le dialogue, Rome veut par cette déclaration le maintenir au niveau
doctrinal et le place dans sa juste perspective.
Louis Ligier s’adresse aux religieuses et aux femmes qui auraient senti une
vocation sacerdotale et fait écho à cette magnifique prière que sainte
Thérèse de Lisieux a adressée dans une lettre à sa sœur, Sœur Marie du
Sacré-cœur pour l’anniversaire de sa profession, le 8 septembre 1896, elle
avait déclaré : « Je sens en moi la vocation de prêtre ; avec quel amour, Ô
jésus, je te porterais dans mes mains lorsque, à ma voix, tu descendrais du
ciel… Avec quel amour, je te donnerais aux âmes !… Mais, hélas ! tout en
90 Lumen gentium, n°21 vers la fin
83
désirant d’être prêtre, j’admire et j’envie l’humilité de saint François
d’Assise et je me sens la vocation de l’imiter en refusant la sublime dignité
du sacerdoce… Je voudrais éclairer les hommes comme les prophètes, les
docteurs, j’ai la vocation d’être apôtre… Je voudrais parcourir la terre,
prêcher ton nom et planter sur le sol infidèle ta croix glorieuse, mais, ô mon
Bien Aimé, une seule mission ne me suffirait pas, je voudrais en même
temps annoncer l’Evangile dans les cinq parties du monde et jusque dans
les îles les plus reculées… Je voudrais être missionnaire non seulement
pendant quelques années, mais je voudrais l’avoir été depuis la création du
monde et l’être jusqu’à la consommation des siècles… A l’oraison, mes
désirs me faisaient souffrir un véritable martyre, j’ouvris les Epîtres de
saint Paul afin de chercher quelque réponse. Les chapitres 12 et 13 de la
première Epître aux Corinthiens me tombèrent sous les yeux… J’y ai lu
dans le premier, que tous ne peuvent pas être apôtres, prophètes, docteurs,
etc., que l’Eglise est composée de différents membres et que l’œil ne saurait
être en même temps la main… La réponse est claire mais ne comblait pas
mes désirs, elle ne me donnait pas la paix…. Sans me décourager, je
continuais ma lecture et cette phrase me soulagea : rechercher avec ardeur
les dons les plus parfaits, mais je vais encore vous montrer une voie plus
excellente. Et l’apôtre explique comment tous les dons les plus parfaits ne
sont rien sans l’Amour… Que la charité est la voie excellente qui conduit
sûrement à Dieu. Enfin, j’avais trouvé le repos… La charité me donna la
clef de ma vocation… Je compris que l’Amour renfermait toutes les
vocations, que l’Amour était tout, qu’il embrassait tous les temps et tous les
lieux… En un mot, qu’il est éternel !… Alors, dans l’excès de ma joie
délirante, je me suis écriée : ô Jésus mon amour…, ma vocation, enfin, je
l’ai trouvée, ma vocation, c’est l’Amour !… Oui, j’ai trouvé ma place dans
l’Eglise, et cette place, ô Mon Dieu, c’est vous qui me l’avez donnée… Dans
le cœur de l’Eglise, ma Mère, je serai l’Amour…, ainsi je serai tout…, ainsi
mon rêve sera réalisé.91 »
Le Pape Pie XI après avoir canonisé sœur Thérèse de l’Enfant Jésus l’a
proclamée patronne de l’Oeuvre de saint Pierre apôtre pour le clergé
91 Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, manuscrit autobiographique, Carmel de Lisieux, 1957 p. 226 à 228.
84
indigène, puis en 1927, patronne des missions à côté de saint François
Xavier. Son témoignage émouvant illustre bien la déclaration « Inter
Insigniores » qui affirme : « les plus grands dans le royaume des cieux, ce
ne sont pas les ministres, mais les saints. »
3- REAFFIRMATION DES POSITIONS DE PAUL VI PAR SES
SUCCESSEURS, JEAN-PAUL II et BENOÎT XVI, SUR LA
QUESTION DE L’ORDINATION DES FEMMES
La déclaration « Inter Insigniores » a vingt ans ; la pensée de l’Eglise
concernant l’accession des femmes au sacerdoce n’a cependant pas évolué.
Jean-Paul II, par une lettre apostolique « ordinatio sacerdotalis » publiée le
22 mai 1994 en la solennité de la Pentecôte, confirme le refus de l’Eglise
catholique d’admettre les femmes au sacerdoce ministériel « Je déclare, en
vertu de ma mission de confirmer mes frères, que l’Eglise n’a en aucune
manière le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes et
que cette position doit être définitivement tenue par tous les fidèles de
l’Eglise . »92 Par cette lettre apostolique, le Pape ambitionnait de mettre un
terme aux discussions et aux revendications de plus en plus pressantes d’un
nombre de plus en plus considérable d’hommes et de femmes, de
théologiens et de théologiennes catholiques en faveur de l’ordination des
femmes. On retrouve dans ce document les arguments développés par la
Congrégation pour la doctrine de la foi dans la déclaration inter insigniores
et maintes fois réitérés par le Pontife tout au long de son pontificat. La
conclusion de la lettre apostolique « ordinatio sacerdotalis », l’impossibilité
de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, ne représentait pas une
grande surprise93. Il se fonde particulièrement sur les arguments que nous
avons évoqués plus haut dans le commentaire de la Déclaration de la
Congrégation de la Doctrine de la Foi.
Dans sa lettre apostolique Mulieres dignitatem, du 15 août 1988, Jean Paul
II insiste sur le dessein du Christ en n’appelant que des hommes à être ses
92 Jean-Paul II, « lettre apostolique ordinatio sacerdotalis », D.C., n° 2096, 19 juin 1994, n° 4, p. 552 93 Snyder Patrick, la femme selon Jean-Paul II, p. 212 (édition Fides, Québec Canada 1999) 253 pages.
85
apôtres… Seuls les apôtres reçoivent au cours du repas de la dernière Cène,
le commandement : « Faites ceci en mémoire de moi. » Selon, le Christ lui-
même qui a établi les douze, seul un homme peut recevoir le sacrement de
l’ordre et représenter le Christ in persona christi capitis94 .
Dans son exhortation apostolique post-synodale, « Pastores dabo vobis, »,
Jean-Paul II a voulu démontrer qu’il existe un lien identitaire entre l’homme
prêtre et le Christ. « Le prêtre trouve la pleine vérité de son identité dans le
fait d’être une participation spécifique et une continuation du Christ lui-
même… »95
Dans sa « Lettre aux femmes » pour souligner la conférence de Pékin, le
Pontife n’a pas négligé de réaffirmer que, en ce qui concerne le sacerdoce
ministériel, la dimension corporelle est fondamentale. « Il est aussi possible
d’accueillir une certaine diversité de fonctions, sans conséquence
désavantageuse pour la femme, dans la mesure où cette diversité n’est pas le
résultat d’un ordre arbitraire, mais découle des caractères de l’être masculin
et féminin.» 96 Dans cette lettre, Jean-Paul II présente aux femmes du monde
entier le modèle de Marie, qu’il considère comme « la plus haute expression
du génie de la femme. »97
Benoît XVI intervient régulièrement sur la place des femmes, souvent jugée
insuffisante dans l’Eglise. Le 26 mars 2006, il a pu dire : « Il est nécessaire
d’ouvrir aux femmes de nouveaux espaces et de nouveaux rôles à l’intérieur
de l’Eglise. Nous devons chercher de nouveau leur juste place dans
l’Eglise ». Au fil des interventions, il donne ainsi quelques pistes pour cette
« juste place » évoquant souvent « la dette de reconnaissance » que l’Eglise
a contractée à l’encontre des femmes. Le préalable est clair, pour le Pape
Ratzinger : « notre foi, comme la constitution du collège des apôtres par
Jésus ne nous permettent pas d’ordonner des femmes », donc pas de femme
prêtre. Mais le constat ne doit pas fermer toutes les portes : cela n’a pas
empêché des femmes d’exercer une « participation importante » et profonde 94 Jean-Paul II, exhortation apostolique post-synodale, christifiedeles laici , n°22 95 Jean-Paul II, exhortation apostolique post-synodal, pastores dabo vobis, D.C. n° 2050, 17 mai 1992, n°s 13, 14, 16, 17, 20, 21 et 29.96 Jean-Paul II, Lettre du pape aux femmes, DC. n° 2121, 6 et 20 août 1995, n°11 p. 62197 Ibid, n°10
86
dans le gouvernement de l’Eglise, qui pouvait aller jusqu’à critiquer les
évêques dans le cas de sainte Hildegarde, voire admonester les papes
comme sainte Catherine de Sienne. Lors d’une audience générale du 14
février 2007, consacrée au rôle des femmes à l’époque de Jésus dans
l’Eglise Primitive, Benoit XVI a utilisé l’expression « responsabilité de haut
niveau » pour qualifier leur place. Le Pape rappelle que les femmes sont
présentes et citées par les Evangélistes mais surtout que contrairement aux
hommes, elles n’abandonnèrent pas Jésus lors de la passion et furent ainsi
les premiers témoins de la résurrection. Benoît XVI, à partir des
considérations bibliques, esquisse quelques missions particulières pour la
femme. Tout d’abord, celle de l’évangélisation qui passe à la fois par la vie,
le cœur et l’intellect. Il reconnaît aussi, comme saint Paul, aux femmes, le
fait de pouvoir « prophétiser », c'est-à-dire parler dans l’assemblée sous
l’inspiration de l’Esprit-Saint, en vue de l’édification de la communauté. Le
Pape s’interroge même pour savoir si, « en dépit du fait que le sacrement et
le charisme soient le seul binôme dans lequel on réalise l’Eglise », le service
ministériel ne pourrait pas offrir aux femmes plus d’espace et de
responsabilités. Le 14 février 2007, il a aussi évoqué le « diaconat » des
femmes des premiers temps de l’Eglise : « Même si ce titre n’avait pas à
l’époque la valeur ministérielle de type hiérarchique, il exprime un véritable
exercice de responsabilité dans la communauté ». Pourtant, le Pape, dans sa
réflexion, se heurte au problème du lien entre ordination et gouvernement de
l’Eglise. Devant les prêtres de Rome, il note que « le ministère sacerdotal du
Seigneur, comme nous le savons, réservé aux hommes, est en tant que
ministère sacerdotal, un gouvernement au sens profond, à savoir qu’en
définitive, c’est le Sacrement qui gouverne l’Eglise. » C’est là, le point
décisif : « Ce n’est pas l’homme qui fait quelque chose, mais le prêtre fidèle
à sa mission qui gouverne, dans le sens où c’est le Sacrement ; c'est-à-dire
que par le Sacrement, c’est le Christ lui-même qui gouverne, dans
l’Eucharistie, comme dans les autres Sacrements, et ainsi c’est toujours le
Christ qui préside .98»
98 Gaulmyn de Isabelle, les Femmes, elles, n’ont pas abandonné Jésus, La Croix du Jeudi 8 mars 2007.
87
Le magistère catholique reste intransigeant par rapport à l’exclusion des
femmes du ministère sacerdotal. A l’heure où les femmes accèdent aux plus
hautes fonctions de l’Etat, cette position semble d’un autre temps et ne
correspond plus à l’esprit contemporain. Il est urgent, comme le dit Benoît
XVI, de reconsidérer le statut des femmes en Eglise et de voir comment ces
dernières peuvent être mieux reconnues et participer plus effectivement au
sacerdoce du Christ.
88
CONCLUSION
L’ensemble de ce mémoire m’a obligée à observer le message de Paul VI
donné aux femmes durant son pontificat. Le Pape a vécu une période
charnière pour la vie de l’Eglise et a su prolonger la réflexion de renouveau
engagée par le Concile. Dans l’Eglise de ce temps, tous les espoirs étaient
permis. A la suite du Concile, le Code de Droit Canon de 1917 est en cours
d’abrogation et le nouveau droit canonique est en cours d’élaboration, il ne
sera publié qu’en 1983 pour l’Eglise Latine et en 1990 pour les Eglises
Orientales. Nous l’avons vu, cette période est marquée par les mouvements
féministes, ceux-ci sont très dynamiques et stimulent les femmes à
revendiquer leur place dans la hiérarchie de l’Eglise. Paul VI conscient de
l’ensemble des revendications féminines, fait entendre sa voix et c’est avec
plaisir que j’ai découvert un Pontife soucieux de la promotion de la femme.
Pour Lui, cette promotion doit passer par la reconnaissance des droits tant
au niveau individuel qu’au niveau professionnel ; la justice est un facteur de
promotion, elle consiste dans le respect et l’élévation de la féminité. Pour le
Pape, le féminisme n’est pas dans l’affranchissement des principes moraux.
C’est en affermissant les principes de la morale chrétienne que l’on donnera
les bases et les moyens de la promotion de la femme. Dans un monde en
gestation, la reconnaissance d’un statut de la femme fera cesser les
discriminations et établira des rapports d’égalité. Le Saint-Père pense que la
promotion des peuples passe par le rôle éducatif de la femme et sa propre
promotion. Au mot « développement », il ajoute, les attributs suivants :
alphabétisation, élévation, progrès, paix.
A travers le travail concernant l’Encyclique Humanae Vitae, j’ai découvert
un Pape inquiet, hanté par le souci de donner à l’humanité une parole
concernant le respect de la vie, conscient des rebondissements que son
enseignement provoquerait dans les esprits. Cette grande question du
respect de la vie a occupé sa pensée jusqu’à son dernier souffle. Souvent à
travers ses allocutions, j’ai senti un Pape chaleureux, très au fait des
89
problèmes qui rongent et hantent la société, qui souhaite à partir de ce
contexte dire une parole d’espérance.
Une autre caractéristique de Paul VI, c’est son sens missionnaire et
apostolique. C’est dans cette attitude intérieure qu’il reçoit les différents
représentants des mouvements d’Action Catholique et les stimule à
collaborer à l’évangélisation par toute leur vie. Il est partisan que les
femmes apportent un concours accru dans les divers domaines de
l’apostolat. Attentif aux femmes, il est le premier Pape à inviter des femmes
à participer au Concile et à proclamer deux d’entre elles « docteurs de
l’Eglise ». Le Message conciliaire adressé aux femmes reste une louange en
l’honneur des femmes. Dans le même esprit missionnaire, le Saint-Père
encourage les femmes à participer à tous les secteurs de la vie de l’Eglise. Il
va jusqu’à affirmer, « la tâche des laïcs est de re-sacraliser le monde ». Pour
soutenir l’action des laïcs, il a créé le conseil des laïcs et promulgué le
Décret sur l’apostolat des laïcs. Un souffle nouveau dynamise l’Eglise et
chaque baptisé, homme ou femme, est engagé à donner le meilleur de lui-
même, à la suite du Christ.
Après avoir entendu toutes les paroles de Paul VI pour magnifier les
femmes et les stimuler dans leur mission de baptisées, est-il possible de
penser qu’il serait favorable à l’ordination des femmes ? A l’époque, des
femmes devenaient pasteurs, d’autres étaient ordonnées prêtres dans l’Eglise
anglicane. De plus, des pressions féministes poussaient le Magistère à se
poser des questions sur l’accession des femmes au sacerdoce. Dans ce
climat vindicatif et contestataire, Paul VI prend position et affirme rester
fidèle à la Tradition de l’Eglise et des apôtres. Cependant, le Saint-Père ne
veut en aucun cas marginaliser la collaboration des femmes, mais, elles ne
seront pas prêtres. Elles sont par le fait même exclues systématiquement du
pouvoir de gouvernement de l’Eglise. Ceci est clairement exprimé dans
« Inter Insigniores ». J. Paul II reprendra les mêmes positions éclairées par
les mêmes arguments dans « Ordinatio Sacerdotales » du 22 mai 1994.
L’enseignement du Pape est fort et vigoureux, marqué par le souci de
l’évangélisation et de la sanctification du monde. L’accent n’est pas
moralisateur, mais reste en ligne droite de la doctrine. Les écrits sont clairs
et stimulants et resteront d’actualité. Ils poussent à l’engagement
90
apostolique et ouvrent à ce qui fait le cœur de la vie humaine et chrétienne.
Pour Lui, il n’y a pas de dissociation entre l’humain et le spirituel.
A quand les femmes prêtres ? Benoît XVI n’a-t-il pas confié au Clergé de
Rome en mars 2006 : « Il est nécessaire d’ouvrir aux femmes de nouveaux
espaces et de nouveaux rôles à l’intérieur de l’Eglise ». Attendons avec
patience, mais agissons, est-il nécessaire d’être ordonnée pour témoigner de
la vie du Christ ? Est-il indispensable d’être prêtre pour évangéliser ?
Comme le dit la conclusion de « Inter Insigniores », « le charisme le plus
élevé, c’est la charité. »
Cette réserve constante manifestée par la hiérarchie de l’Eglise semble être
d’un autre temps. A l’heure où les femmes exercent des professions de
chirurgiens, de pilotes de ligne, d’architectes, de chercheurs, la position du
Magistère est totalement en décalage avec la société. L’Eglise est de droit
divin et les lois qui en relèvent sont intangibles. Faut-il, pour cela, se priver
de la richesse de femmes spirituelles et intelligentes qui se sentent appelées
au ministère sacerdotal ?
Inévitablement, le Pape et les évêques, devant la diminution des prêtres et la
rareté des vocations seront obligés, dans peu de temps, de faire appel à la
compétence et au dévouement des femmes. Peu à peu, nous constatons que
le visage de l’Eglise change, c’est peut-être moins flagrant à Rome que dans
les paroisses de base. Néanmoins, nous assistons à une féminisation lente,
mais progressive et irréversible des services ecclésiaux, cette nouvelle
situation est à prendre en compte.
Ne serait-il pas possible de restaurer le diaconat féminin qui a existé dans la
primitive Eglise et d’ordonner des femmes qui se sentent appelées au
ministère sacerdotal ? Pourquoi ne serait-il pas possible d’organiser des
célébrations à l’occasion de la prise en charge d’un office, la lettre de
mission restant un cahier des charges indispensable pour assurer la fonction
à laquelle la personne est appelée ?
A titre indicatif, je vais exploiter quelques statistiques concernant la
présence des femmes au niveau de la Curie romaine, du diocèse et des
paroisses. Force est de constater que plus on est dans les hautes sphères de
la hiérarchie, moins les femmes sont présentes et si elles le sont, c’est
toujours dans des rôles secondaires. Au niveau national, les femmes, là
91
aussi, ne peuvent pas être Présidentes de Commission et si elles sont
engagées, elles assurent les fonctions d’adjointes. Sur le plan diocésain,
lorsqu’elles sont en responsabilité, elles sont bien souvent en tandem avec
un prêtre délégué au service. Ce n’est qu’au niveau des paroisses qu’elles
ne sont pas seulement utiles, mais indispensables : Que serait l’Eglise sans
l’engagement des femmes ?
La Curie romaine, instance de gouvernement central de l’Eglise est
composée de dicastères. Les postes de Présidents et de secrétaires sont
réservés à des prêtres, en général, évêques, voire cardinaux, fonctions
inaccessibles aux femmes… La femme la plus élevée hiérarchiquement est
sous-secrétaire de la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée, ce qui
est bien le moins, si l’on considère que le nombre de religieuses dans le
monde est de 782032, pour 267334 prêtres diocésains, 130823 prêtres
religieux et 54620 religieux non prêtres, elles sont deux fois plus
nombreuses que les prêtres. (Statistiques de 2002). La féminisation de la
Curie est réelle, puisqu’elle est passée de 11% de femmes, en 1978, à 21%
en 2006. Les femmes occupent surtout des postes d’assistantes, même si
c’est une femme qui est responsable du site Internet de Vatican et une autre
présidente de l’Académie Pontificales des Sciences Sociales. Il reste encore
des dicastères sans femme, comme la Congrégation pour le culte divin et la
discipline des sacrements, qui s’occupe des questions liturgiques. On
recense quatre femmes parmi les permanentes de la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi. Quelques femmes encore ont été nommées
« consulteurs » de dicastères, mais elles sont rares, moins de 10 %. Le
Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens en compte deux, mais la
Congrégation pour la Doctrine de la Foi, aucune. Tout comme la
Congrégation des causes des saints, ce qui est faire bien peu de cas du
nombre de saintes femmes que compte l’Eglise catholique.99
En feuilletant le guide catholique de France, Editions 2007100, je constate
que bien souvent dans les diocèses, des femmes sont déléguées épiscopales
à l’information ; certaines sont chargées du service de la communication.
99 La Croix du 8 mars 2007.100 Conférence des Evêques de France, Guide 2007 de l’Eglise catholique de France, Bayard, Cerf, Fleurus, Mane, 295 pages.
92
D’autres sont directrices de la radio diocésaine, ou assurent la publication
du bulletin et effectuent la mise à jour de l’annuaire diocésain.
Au niveau de l’Assemblée plénière des évêques de France, une femme
mariée et mère de deux enfants est nommée adjointe au secrétaire général.
Neuf Conseils permettent à la conférence d’exercer collectivement sa
responsabilité. Chaque conseil comprend deux à neuf évêques et d’autres
membres choisis pour leur expertise. Je constate :
- Deux femmes font partie du conseil pour les questions canoniques,
sur neuf membres.
- Aucune n’est présente dans le Conseil pour les questions familiales
et sociales, ce qui me paraît inquiétant !
- Une femme est présente au Conseil pour la pastorale des enfants et
des jeunes.
- Trois femmes sont présentes au Conseil des affaires économiques,
sociales et juridiques.
- Aucune femme, au Conseil pour les Mouvements et Associations de
fidèles.
- Deux sont au Conseil pour les Relations avec le Judaïsme et aucune
dans le Conseil pour les relations interreligieuses et les nouveaux
courants religieux.
- Par le biais des Mouvements de Solidarité, deux ou trois femmes
font partie du Conseil pour la Solidarité.
Au niveau de grands services, les femmes sont peu présentes :
- Une femme est directrice adjointe au département de la famille au
niveau du Service national pour les questions familiales et sociales.
- Une est chargée de l’aumônerie des hôpitaux.
- Une est directrice adjointe du département : droits, libertés et paix,
Justice et Paix, France.
- Deux sont directrices adjointes au Service national pour
l’évangélisation des jeunes scolaires et étudiants, l’une, aux
aumôneries de l’Enseignement Public et l’autre, aux aumôneries
catholiques des universités.
Au niveau du diocèse de Saint Claude (Jura)
Trois femmes font partie du Conseil épiscopal élargi :
93
- Une est adjointe au vicaire général pour le suivi des Equipes
d’Animation Pastorale.
- Une est chargée de la formation permanente.
- Une représente le service diocésain de l’annonce de la foi.
A l’officialité interdiocésaine qui siège à Besançon :
- Deux femmes sont juges,
- Une est notaire.
Au service de la catéchèse, trois femmes sont responsables de la pastorale
catéchétique et une cordonne l’équipe de catéchuménat.101
Dans le diocèse, avec la restructuration des paroisses et la raréfaction des
prêtres ont été mises en place des Equipes d’Animation Pastorale. C’est
une réalité nouvelle qui fonctionne en s’appuyant sur le canon 517 § 2 : « Si
à cause de la pénurie de prêtres, l’Evêque diocésain croit devoir confier à un
diacre ou à une autre personne non revêtue du caractère sacerdotal, ou
encore à une communauté de personnes, une participation à l’exercice de la
charge pastorale d’une paroisse. Il constituera un prêtre qui, muni de
pouvoirs et de facultés du curé, sera le modérateur de la charge pastorale. »
Ces équipes sont constituées de cinq personnes, dont une pour chaque pôle :
liturgie, annonce de la foi, solidarité, affaires matérielles et coordination.
Dans le diocèse, il y a soixante équipes de E.A.P, composées à 80% de
femmes, elles assurent toute l’animation et la coordination de la vie
paroissiale en lien avec le curé. Il y a cinq membres dans chaque équipe, ce
qui représente environ trois cent personnes dont environ deux cent soixante
femmes. Pour assister les familles touchées par le deuil et pour aider à
préparer les obsèques, voire, les célébrer en cas d’absence du prêtre, des
référents équipes de funérailles sont mis en place. Deux ou trois
personnes par paroisse sont cooptées, ce qui représente encore cent vingt à
cent cinquante personnes environ. Là encore, les femmes sont majoritaires.
De plus, il faudrait encore dire que la majorité des catéchistes sont des
femmes et que l’essentiel de la transmission de la foi se fait par les femmes,
aussi bien au catéchisme qu’en famille. Que serait l’Eglise sans tout cet
investissement féminin quotidien et sur le terrain ? Dans les Facultés
101 Annuaire diocésain 2007, du Diocèse de Saint Claude, Jura.Evêché BP 39002 Lons-le-Saunier 202 pages.
94
Catholiques, de plus en plus de femmes ont acquis des titres universitaires
aussi bien en Théologie, qu’en Droit Canonique et assurent un enseignement
avec compétence et conviction ; l’une d’entre elles est d’ailleurs Doyen de
l’une de ces Facultés. Il semble bien regrettable de ne pas permettre à des
femmes engagées au service de l’Eglise d’aller au bout de leur vocation par
une ordination diaconale, voire sacerdotale. Aujourd’hui, la différence de
sexe intervient de moins en moins dans l’exercice d’une fonction ; ce qui
compte, c’est la compétence ; nous voyons des femmes pasteurs transmettre
le Message du Christ avec autant de force et de vigueur que leurs confrères
hommes. Parler de promotion et d’égalité, c’est bien, mais hélas ! la parité
est loin d’exister en Eglise… L’Eglise, d’ailleurs, n’est pas fondée sur des
lois humaines, mais sur le droit divin ; c’est tout ce qui en fait la différence
par rapport aux autres sociétés. C’est seulement avec le regard de la foi que
nous pouvons accepter la position du Magistère et admettre que seuls les
hommes puissent être prêtres « in persona Christi ». Paul VI a ouvert des
portes en instituant le laïcat, il faut poursuivre cette ouverture, s’interroger
et se demander s’il est vraiment indispensable d’être un homme pour
pouvoir être ordonné . La question sur la non accessibilité des femmes au
sacerdoce qui semble définitivement réglée par Jean-Paul II, reviendra
inévitablement à l’ordre du jour, tôt ou tard. Tout ce débat est peut-être
inutile ? Le rôle du Christ est primordial mais La Mission de Marie est
essentielle, avec les disciples, Elle était à la naissance de l’Eglise, le jour de
Pentecôte.
Paul VI en clôturant la troisième session du Concile, le 21 novembre 1964,
a déclaré formellement Marie, « Mater Ecclesiae », conformément à la
tradition catholique. En Elle rayonne à jamais la plénitude de la grâce. Qu’il
nous soit donné de marcher dans son sillage et de vivre une civilisation
d’amour.
95
BIBLIOGRAPHIE
SOURCES :
Jean XXIII : « Pacem in terris », fait à Rome 11 avril 1963. DC 21 avril
1963. n° 1398, p 520, l’entrée de la femme dans la vie publique.
ENCYCLIQUES DE PAUL VI
Ecclesiam suam « Comment l’Eglise doit accomplir sa tâche aujourd’hui »
6 août 1964 DC n° 1434.
Evangelii Nuntiandi « Sur l’évangélisation dans le monde moderne à
l’épiscopat, au clergé et aux fidèles de toute l’Eglise ». 1976. DC n° 1689.
Humanae Vitae « Sur le mariage et la régulation des naisances ». 25 juillet
1968, DC n° 1523.
Mysterium Fidei « Sur la doctrine et le culte de la Sainte Eucharistie »
3 septembre 1965. DC n° 1456.
Populorum Progressio « Sur le développement des peuples 26 mars 1967.
DC n° 1492.
Sacerdotalis Caelibatus « Sur le célibat sacerdotal ». 24 juin 1967, DC
n° 1498.
EXHORTATIONS APOSTOLIQUES
Marialis Cultus « sur le culte de la Vierge Marie » 2 février 1974,
DC n° 1651.
Evangelica Testificatio 29 juin 1971.
MOTU PROPRIO
Ministeria quaedam 15 août 1972, « tous appelés aux ministères »
LETTRE APOSTOLIQUE
Octogesima Adeveniens « Pour le 80e anniversaire de l’encyclique Rerum
Novarum. 1971 DC n° 1587.
96
LES 18 TEXTES CONCILIAIRES
Lumen Gentium « Constitution dogmatique sur l’Eglise, 21 novembre 1964, 53 pages.
Dei Verbum « Constitution dogmatique sur la Révélation divine » 18 novembre 1965, 11 pages.
Sacrasanctum Concilium « Constitution sur la sainte liturgie », 4 décembre 1963, 32 pages.
Gaudium et Spes « Constitution pastorale sur l’Eglise dans le monde de ce temps », 7 décembre 1965, 66 pages.
Christus Dominus « Décret sur la charge pastorale des évêques dans l’Eglise », 28 octobre 1965. 20 pages.Presbyterorum ordinis « Décret sur le ministère et la vie des prêtres », 7 décembre 1965, 25 pages.Optatam totius Ecclesiae renovationem “Décret sur la formation des prêtres », 28 octobre 1965, 13 pages.Perfectae Caritatis « Décret sur la rénovation et l’adaptation de la vie religieuse », 28 octobre 1965, 10 pages.Apostolicam actuositatem « Décret sur l’Apostolat des laïcs »,18 novembre 1965, 21 pages.Ad gentes divinitus « Décret sur l’activité missionnaire de l’Eglise »,7 décembre 1965, 31 pages.Unitatis redintegratio « Décret sur l’œcuménisme », 21 novembre 1964, 14 pages.Orientalium Ecclesiarum « Décret sur les Eglises Orientales, 21 novembre 1964, 10 pages.Inter mérifica « Décret sur les moyens de communication sociale », 4 décembre 1963, 9 pages.
Dignitatis Humanae « Déclaration sur la liberté religieuse », 7 décembre 1965, 10 pages.Nostra aetate « Déclaration sur les relations de l’Eglise avec les religions non chrétiennes », 7 décembre 1965, 10 pages.Gravissimum Educationis momentum « Déclaration sur l’éducation chrétienne », 28 octobre 1965, 10 pages.
Messages du Concile, 20 octobre 1962, 3 p. et du 8 décembre 1965, 6 p.
97
TEXTES SPECIFIQUES DE PAUL VI CONCERNANT LES
FEMMES
1963 :
Homélie du jeudi 12 septembre 1963 aux congrégations mariales.
L’attrait des valeurs spirituelles pour la jeunesse féminine d’aujourd’hui,
DC 4 août 1963, n° 1405 aux aumôniers diocésains de la jeunesse féminine
italienne.
Allocution à des femmes d’Action Catholique, 3 juillet 1964, in DC 18 août
1963, n° 1406.
Les charismes, Des « auditrices » laïques, des frères et des religieuses au
Concile, DC 1er décembre 1963. n° 1413, p. 1565 à 1566.
1964 :
Discours à la Fédération mondiale des jeunesses féminines catholiques,
4 avril 1964.
Allocution à des religieuses, le 8 septembre 1964. DC 20 septembre 1964,
n° 1432, p. 1170 à 1174.
1965 :
Allocution au Centre féminin italien, 30 mai 1964 in DC, 1963, n° 1459,
p. 1063 à 1068.
Allocution à la commission sur les problèmes de la population, de la
famille, de la natalité. 27 mars 1963. www. Vatican.
1966 :
Message aux Femmes, message du Concile à la clôture, le 8 décembre 1966
dans DC du 2 janvier 1966 n° 1462. p 56.
Allocution aux congressistes du Centre italien féminin, sur les problèmes du
mariage et de la famille, DC 12 février 1966, DC n° 1462, p.405 à 411.
Allocution à des gynécologues italiens, DC, 29 octobre 1966, DC n° 1482,
20 mai 1966 p. 1921 à1926.
Allocution aux abbesses et prieures des monastères de bénédictines d’Italie,
28 octobre 1966, DC n° 1482.20 novembre 1966 p. 1926 à 1932.
98
1967 :
Allocution de Sa Sainteté Paul VI au 3ème Congrès mondial pour
l’apostolat des laïcs, où il a été demandé une parfaite égalité entre Hommes
et Femmes dans l’Eglise ; DC du 5 novembre 1967, n° 1504 p 1826 -1884.
Message de Paul VI aux femmes africaines, dans DC 19 novembre 1967
n° 1505 p. 1954.
1968 :
Encyclique « Humanae Vitae » 25 juillet 1968.
Allocution prononcée par Sa Sainteté. Paul VI au cours de l’audience
générale du 31 juillet 1968. « Préparation, but et esprit de l’Encyclique » ;
DC 1e septembre 1968, n° 1523, p.1457 à 1460.
Réflexion de Paul VI sur « humanae vitae » aux membres de l’Institut
séculier « Pro familia » fondé par sa mère.
1969 :
Lettre à l’Archevêque de Melbourne, à l’occasion de la Conférence du
Conseil Australien des Organisations des femmes catholiques du 12 au
19 octobre 1969.« La participation de la femme à l’apostolat de l’Eglise ».
DC n° 1552, 7 décembre 1969, p.1060.1061.
« la femme dans le mystère de la vie contemplative », dans DC 8 septembre
1969, n° 1547 p. 810.
1970 :
Homélie prononcée lors de la proclamation de sainte Thérèse d’Avila,
Docteur de l’Eglise, 27 septembre 1970, DC n° 1572, 1970, p.908, 909.
Homélie prononcée lors de la proclamation de sainte Catherine de Sienne,
Docteur de l’Eglise, le 4 octobre 1970, DC n° 1573, 1er novembre 1970,
p. 956, 957.
1971 :
Lettre apostolique « Octogesima Adveniens » à Monsieur le Cardinal
Maurice ROY, Président du Conseil des Laïcs et de la Commission
Pontificale ‘ Justice et Paix ‘ à l’occasion du 80ème anniversaire de
l’Encyclique « Rerum Novarum », 14 mai 1971, DC n° 1587, du 6 juin 1971
p. 502 à 513.
Discours aux participants au symposium du conseil des Laïcs, 30 mars
1971. Www. Vatican
99
1972 :
Lettre Pontificale à Monsieur Alain BARRERE, à l’occasion de la LIXe
Session des semaines Sociales, Metz du 4 au 9 juillet 1972. « Couples et
familles dans la Société d’aujourd’hui ». DC n° 1614 des 6 et 20 août 1972
p. 716 à 719.
Lettre Apostolique, en motu proprio « Ministeria quaedam », réformant la
discipline de la tonsure, des ordres mineurs et du sous-diaconat dans
l’Eglise latine. www.cérémoniaire.net. 15 août 1972.
1973 :
Allocution à l’Union Internationale des Supérieures générales, 19 novembre
1973, DC n° 1644 du 16 décembre 1973 p. 1058,1059.
Allocution à la première session de la Commission d’étude sur la femme
dans la Société et dans l’Eglise, 14 novembre 1973 DC n° 1644
du 16 décembre 1972 p.1057
Allocution, du 6 novembre 1974, à l’occasion de l’année internationale de la
femme. DC n° 1665, 1er décembre 1974.
1974 :
Allocution adressée à des juristes catholiques lors de leur congrès, le
7 décembre 1974, DC n° 1668, DC du 19 janvier 1975, p.55, 56.
Allocution au comité pour l’année internationale de la femme, le 18 avril
1975, DC n° 1675, DC 4 mai 1975, p.403, 404.
Lettre à la conférence mondiale de l’année internationale de la femme à
Mexico. DC n° 1679 du 6 juillet 1975, p.604 à 606.
Exhortation Apostolique 22 mars 1974, Le culte Marial aujourd’hui de Paul
VI, présentation d’Antoine Wenger, Centurion, 95 pages.
1975 :
Homélie pour la béatification de Mère Marie-Eugénie, fondatrice des
religieuses de l’Assomption, 9 février 1975. www.assumpta.fr
Allocution à l’Union Européenne Féminine, 18 septembre 1975, DC du 1er
décembre 1975, n° 1687. p 1025.
1976 :
Allocution du 17 août à Castel Gandolfo, avant la récitation de l’Angélus,
l’Assomption et l’année de la femme. DC p 760. 1976.
100
Allocution prononcée le 14 septembre pour la canonisation d’Elisabeth
Séton, fondatrice des Sœurs de la Charité de saint Joseph, première sainte
américaine, proposée comme modèle en cette année de la femme. DC p 808
Déclaration de la Sacrée Congrégation de la Doctrine de la Foi «Inter
Insigniores » 15 octobre 1976, sur la question de l’admission des femmes
au sacerdoce ministériel. Www. Missa.org/inter_insigniores.php.
1977 :
Allocution sur la condition de la femme, le 6 décembre au congrès du
Centre Italien féminin DC du 2 janvier 1977, n° 1711 p. 8 et 9.
Allocution prononcée le 30 janvier dans laquelle Paul VI s’adresse aux
femmes, après la publication du document de la Congrégation de la doctrine
de la foi, sur la question de leur admission au sacerdoce, DC du 20 février
1977, n° 1714 « Appel aux femmes ».
1978 :
Discours prononcé sur le tombeau de sainte Catherine de Sienne
DC du 19 novembre 1978 n° 1752.
ENSEIGNEMENT DE JEAN PAUL II
Lettre apostolique « mulieris dignitatem, » sur la dignité et la vocation de la
femme, à l’occasion de l’Année mariale, 15 août 1988, DC du 20 novembre
1988, n° 1972 p. 1063 à 1088.
Exhortation Apostolique, post-synodale « Christifideles laici » sur la
vocation et la mission des laïcs dans l’Eglise et dans le monde, 30 décembre
1988, 65 pages,
http://www.vatican.va/holy_father/johan_paul_ii/apost_exhortations/docum
ents/hf_jp-i.
Lettre apostolique « Ordinatio sacerdotalis », sur l’ordination sacerdotale
exclusivement réservée aux hommes, 24 mai 1994, 3 pages.
http://www.vatican.
Lettre du Pape Jean-Paul II aux femmes, 29 juin 1995, 7 pages,
http://www.vatican.
101
Instruction « Sur quelques questions concernant « la collaboration des
fidèles laïcs au ministère des prêtres », 15 août 1997, 24 pages.
http://www.vatican.va/roman_curia/congregatons/cclergy/documents/rc_con
_interdic…
OUVRAGES :
ALBERIGO Giuseppe (sous la direction), Histoire du Concile Vatican II,
version française sous la direction d’Etienne Fouilloux, Paris et Louvain,
Les Editions du Cerf et Peeters, 2005.
AUBERT Marie-Joseph, Des Femmes Diacres, Un nouveau chemin pour
l’Eglise, préface de Régine PERNOUD. Beauchesne 216 pages, 1987.
BOUYER Louis, Mystère et ministères de la femme, Présence et pensée,
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BEHR-SIGEL Elisabeth, Le ministère de la femme dans l’Eglise, Cerf,
239 pages, 1987.
BODIN Jean, La femme, Editions de la librairie encyclopédique
Bruxelles 347 pages, 1959.
HOURCADE Janine, Pourquoi la Femme, préface de Louis BOUYER,
Desclée/Essai, 146 pages, 1992.
KELEN Jacqueline, Lettre d’une amoureuse à l’adresse du Pape, Editions
de la Table ronde, 144 pages, 2007.
MACCHI Pasquale, Paul VI à travers son enseignement, Edition François-
Xavier de Guibert., 351 pages, 2005.
MACCHI Pasquale, Dans l’intimité de Paul VI – Méditations inédites –
Testament. Editions Médiaspaul – 2006, 101 pages
PARENT Rémi et DUFOUR Simon, Les Ministères, Parcours, la
bibliothèque de formation chrétienne. Centurion, La Croix, 102 pages. 1993.
PELLETIER Anne- Marie, Le signe de la femme, Editions du Cerf, 256
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SYNDER Patrick, La femme selon Jean-Paul II, Lectures des fondements
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enseignement. FIDES, Bibliothèque nationale du Québec.1999.
102
THEBAUD Françoise (sous la direction de) Histoire des femmes en
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VILLENEUVE de Catherine, Vierges ou mères, Quelles femmes veut
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ANNUAIRE DIOCESAIN 2007, du Diocèse de Saint Claude, Jura.
Evêché BP 39002 Lons-le-Saunier202 pages.
ARTICLES DIVERS :
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catholique : les décisions du Magistère pages 7 à 20, dans Revue de Droit
Canonique n°46/1, 1996.
DOE Norman, les femmes dans les Eglises anglicanes du Royaume-Uni,
Pages 59 à 73. Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
FLORES-LONJOU Magalie, Accès aux ministères dans les Eglises et
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Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
JOUBERT Jacques, A propos d’une réponse de la Congrégation pour la
foi, pages 29 à 36. Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
HEYER René, La théologie féministe, pages 87 à 98. Revue de Droit
Canonique n°46/1, 1996.
MERCIER Jean, (propos recueillis par), « Femmes cathos en quête
d’identité », in La Vie, N° 3206, du 8 février 2007, pages 62 à 66.
G. SLEDZIEWSKI Elisabeth, « Ordinati sacerdolis » : frileuse Pentecôte,
pages 21 à 28, dans Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
Ad van der HELM, le statut de la femme dans l’Eglise catholique, pages
37 à 53, Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
TORFS Rik, Synthèse : quelques observations d’un canoniste. Pages 135 à
146. Revue de Droit Canonique n°46/1, 1996.
103
TURMEL Christiane, Les femmes en situation de responsabilité dans
l’Eglise Catholique en France, pages 53 à 58. Revue de Droit Canonique
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WILLAIME Jean-Paul, les responsabilités des femmes dans les Eglises
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WEIBET Nadine, Femme, pouvoir et Islam, page 105 à 114. Revue de
Droit Canonique n°46/1, 1996.
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Jésus » dans La Croix du Jeudi 8 mars 2007.
ARTICLES PUBLIES DANS LA DOCUMENTATION
CATHOLIQUE
DELL’ACQUA, substitut de Secrétairerie d’Etat, Lettre du 20 janvier
1964, p 499, DC 19 avril 1964 n° 142.
3ème Congrégation générale Dignité de la personne humaine
Chapitre 1 § 20, sur la dignité de la femme africaine, p 1598.
DC 6 décembre 1964, n° 1437, du 28 octobre 1964.
CONCAR Yves O.P. Les ministères féminins, dans DC du 3 juillet 1966
n° 1474, p.1248.
BOYER Charles, S.J, L’ordination des femmes, 20 juin 1965, n° 1450
p. 1102 à1106.
L’Eglise Réformée de France et le ministère pastoral de la femme, DC du
20 juin 1965 n° 1450 p.1103 à 1104.
Message des évêques de l’Afrique Equatoriale réunis du 11 au 15 juin
1965, aux chrétiens qui préparent une Afrique meilleure, place de la femme
africaine, p. 1410, 1411. DC 1er-15 août 1965, n° 1453.
LERCARO (Cardinal) Directives du « Concilium » aux évêques d’Afrique
du Nord, sur « les service des femmes à l’autel », janvier 1966, pour
l’application de la Constitution sur la Liturgie, dans DC 1er mai 1966
n° 1470.
OTTAWIANI (Cardinal), Travaux de la commission pontificale pour les
problèmes de la natalité, dans DC 15 mai 1966 n° 1471, p. 935 à 942.
104
ELLISON (Docteur) Le problème du sacerdoce des femmes chez les
anglicans exposé par le du 15 décembre 1966, dans DC du 19 février 1967,
n° 1488, p. 363.368.
Secrétariat Général de l’Episcopat français, Les divorcés non remariés et les
femmes séparées, note du DC du 1e octobre 1967, n° 1502, p. 1711 à 1716.
ARMAND Louis, Saint François de Sales, le précurseur de la promotion
des femmes, conférence de l’Académie Française prononcée à Annecy pour
le quatrième centenaire de la naissance de François de Sales. Le 9 septembre
1964, dans DC du 15 octobre 1967 n° 1503, p. 1799,1800.
LEGER (Cardinal) Allocution à Montréal le 20 septembre devant la Société
Canadienne de Droit Canonique, à l’occasion de la révision du Code de
Droit Canon. « Il est urgent de traiter la femme d’une façon plus conforme à
sa dignité », dans DC du 19 novembre 1967, n° 1505 p. 1997.
RENARD (Cardinal) Au service de la vie humaine, l’Encyclique du
courage, DC 1e septembre 1968, n° 1523, p.1460 à 1464.
Quelques déclarations sur l’Encyclique :
o Cardinal HEENAN, Archevêque de Westminster,
o Cardinal DOEPFNER, Archevêque de Munich,
o Cardinal TISSERANT, Doyen du Sacré Collège,
o Cardinal GARRONE,
o Cardinal ZOUNGRANA, Archevêque d’Ouagadougou,
o Cardinal LEFEVRE, Président de la Conférence Episcopale de
France.
o Mgr MARTY, Archevêque de Paris
o Mme RENDU, Présidente du C.L.E.R.
o Les « Equipes Notre Dame »,
o L’Action catholique générale : (ACGH. ACGF)
o Patriarche ATHENAGORAS,
o Docteur RAMSEY, Archevêque Anglican de Cantorbéry
Communiqué de l’Episcopat Italien sur l’Encyclique « Humanae Vitae ».
DC du 6 octobre 1968, n° 1525. p.1688.1694.
Réactions dans l’Eglise d’Allemagne p 1695.1700.
105
Déclaration de l’Episcopat Anglais sur l’Encyclique « Humanae Vitae »
DC du 20 octobre 1968. n° 1526. p.1791 à 1796.
Déclaration de l’Episcopat Autrichien DC 20 octobre 1968, n° 1526.
p. 1797 à 1801.
Note des évêques espagnols sur l’Encyclique p. 1802 DC 20 octobre 1968,
n° 1526, p.1802.
Les évêques italiens et l’avortement, 5 juin 1977 n° 1721 p. 523
JOURNET (Etude du Cardinal), La lumière de l’Encyclique « Humanae
Vitae », DC 3 novembre 1968. n° 1527, p. 1893 à 1897.
Lettre pastorale des Evêques Nordiques sur l’Encyclique « Humane Vitae »,
DC du 1e décembre 1968 n° 1529 p. 2067 à 2072.
Episcopat Français, Note pastorale l’Encyclique DC 1er décembre 1968.
n° 1529 p. 2055 à 2062.
RENARD (Cardinal), note pastorale des évêques de France. DC 1er
décembre 1968 n° 1529 p. 2063 à 2066.
DANIELOU Jean (Cardinal) Déclaration « sur le sacerdoce des femmes »,
le 22 juin 1969, dans DC 3.7 août 1969, n° 1545 p.135.
TORRELLA CASCANTE Ramon, Mgr, vice-président de la commission
Justice et Paix, Intervention de la délégation du Saint-Siège à la Conférence
mondiale de l’année internationale de la femme, à Mexico 7 et 21 septembre
1975, DC, n° 1682, p. 769 à 773.
SUENENS (Cardinal), Conférence sur le sacerdoce des femmes. Les
missions hommes et femmes sont différentes. DC 1e mars 1970, n° 1558
p 237, 238.
Troisième Instruction pour une juste application de la Constitution sur la
Liturgie, « problème du sacerdoce des femmes et de leur rôle dans la
liturgie »
p. 1014 dans DC du 15 novembre 1970, n° 1574.
Cinquième Assemblée plénière du Concile Pastoral de la province
ecclésiastique néerlandaise, Compte-rendu officiel du 12 janvier 1970 de la
« sur l’intégration de la femme dans le ministère y compris sacerdotal » p.
176, DC du 15 février 1970, n° 1557.
SEPER Franjo, (Cardinal préfet), de la Congrégation pour la doctrine de la
foi. Déclaration sur la question de l’admission des femmes au sacerdoce
106
ministériel « Inter insigniores » 15 octobre 1976, DC du 20 février 1977,
n° 1714, p 158 à 164.
Commentaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi sur la question de
l’admission des femmes au sacerdoce ministériel dans DC du 20 février
1977, n° 1714, p.165 à 173.
ETCHEGARAY, (Président de la Conférence épiscopale), Présentation de
la déclaration « inter insigniores », 25 janvier 1977 à Marseille. DC du
20 février 1977, p. 174,175.
LIGIER Louis, La question du sacerdoce des femmes dans l’Eglise
DC 21 mai 1978, n° 1742, p. 478 à. 487.
SITES INTERNET
http://fr.wikipedia.org/wiki/IIe_concile_%C5%93cum
%C3%A9nique_du_Vatican
http://www.linternaute.com/histoitr/cgi/categorie/imprimer.phpNf_id_categ
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http://www.vatican.
http://www.vatican.va/holy_father/johan_paul_ii/apost_exhortations/docum
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www.cérémoniaire.net
http://missel.free.fr/Sanctoral/04/29.php
http://spiritualité3.free.fr/sainte_therese.html
107
TABLE DES MATIERES
Remerciements........................................................................................................................... 2
Abréviations.................................................................................................................................................................................................................................................... 3.......................................................................................................................... ...................................................................................................................................................................................................................................................................
Sommaire.......................................................................................................................... 5
INTRODUCTION
Méthodologie..........................................................................................................................
6
Analyse juridique et sociologique des années 1960 à 1980..........................................................................................................................
8
Le climat préparatoire au Concile Vatican II..........................................................................................................................
15
Présentation du plan, les trois parties successives..........................................................................................................................
16
PREMIERE PARTIE
108
PAUL VI ET LE SOUCI DE LA PROMOTION DES FEMMES....................................................................................................... 20
1 – Avant Paul VI, Pacem in Terris de Jean XXXIII, 21 avril 1963..........................................................................................................................
20
2 - D’après la Lettre apostolique « Octogesima adveniens » 1971..........................................................................................................................
23
A - Faire reconnaître le statut de la femme pour faire cesser les
discriminations..........................................................................................................................
24
B - Favoriser une égalisation progressive des droits fondamentaux
de l’homme et de la femme..........................................................................................................................
25
3 – Collaboration à la mise en place de l’Année Internationale de la
Femme en 1975, un moyen pour promouvoir ses droits..........................................................................................................................
28
4 – Favoriser l’éducation et le développement pour que les femmes
deviennent des artisans de Paix..........................................................................................................................
31
5 – L’Encyclique « Humanae vitae », 25 juillet 1968 : La considération
pour les femmes passe par des consignes d’éthique.......................................................................................................................... 33
DEUXIEME PARTIE
RECONNAISSANCE DE LA MISSION APOSTOLIQUE
DES FEMMES
109
..........................................................................................................................
42
1 - Les femmes portent le souci de l’évangélisation dans tous les secteurs
de la vie humaine..........................................................................................................................
43
2 - Participation des femmes au concile Vatican II..........................................................................................................................
45
3 - Ce que dit le concile des femmes..........................................................................................................................
47
4 - La participation des laïcs à la mission de l’ Eglise dans le monde ..........................................................................................................................
50
5 - La proclamation de deux femmes « docteurs de l’Eglise.»..........................................................................................................................
56
TROISIEME PARTIE
LA QUESTION DES MINISTERES FEMININS DANS LA VIE DE
L’EGLISE ..........................................................................................................................
62
1 – Selon le Motu proprio « Ministeria Quaedam », du 15 août 1972.......................................................................................................................... 62
2 – Selon la déclaration de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi « Inter Insigniores » du 27 janvier 1977.......................................................................................................................... 68
A. Emergence nouvelle de la question de l’ordination des femmes..........................................................................................................................
69
B. Analyse des arguments en faveur de la déclaration « Inter Insigniores »
110
..........................................................................................................................
72
a – la Tradition........................................................................................................
74
b – l’attitude du Christ........................................................................................................
75
c – la pratique des apôtres..........................................................................................................................
76
d – la valeur permanente de cette pratique........................................................................................................
77
e - le sacerdoce ministériel à la lumière du mystère du Christ,........................................................................................................
80
f – le sacerdoce ministériel dans le mystère de l’Eglise.........................................................................................................
82
3 – Réaffirmation des positions de Paul VI par ses successeurs,
Jean-Paul II et de Benoît XVI sur la question de l’ordination des
Femmes..........................................................................................................................
86
CONCLUSION....................................................................................................... 89
BIBLIOGRAPHIE.......................................................................................................................... 96
TABLES DES MATIERES.......................................................................................................................... 109
111
112