Avant-ProposAuthor(s): Colette FeuillardSource: La Linguistique, Vol. 36, Fasc. 1/2, Les introuvables d'André Martinet (2000), pp. 5-7Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/30249300 .

Accessed: 16/06/2014 00:27

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AVANT-PROPOS

par Colette FEUILLARD Universite Reni-Descartes, Paris V

Ce numero special de La Linguistique ddi6 A la memoire de son fondateur, Andre Martinet, disparu il y a plus d'un an, est consacr6 A la reedition de certains de ses articles, anciens pour la plupart, et publics dans des revues le plus souvent A diffusion limitee, d'oui le titre xcLes introuvables>>, suggere par son epouse, Jeanne Martinet'. Le choix de ces articles n'a obei A aucun critere prealable de selection, si ce n'est leur << raret >>, mais a repondu A un xc coup de coeur>> de chacun des partici- pants A cet hommage. Nombreux sont ceux qui auraient sou- haite se joindre A eux et qui n'ont pu le faire pour des raisons strictement &ditoriales.

Les articles retenus ne cherchent pas A presenter une retros- pective de la penseie d'Andr6 Martinet; un seul volume n'y aurait pas suffi. Ils offrent ne'anmoins une illustration des preoccupa- tions essentielles de l'auteur, meme si certains domaines sont absents, comme la dialectologie, I'acquisition du langage, l'interlinguistique, ou peu representes, ce qui est malheureuse- ment le cas de l'indo-europeen, qui lui tenait particulihrement A

coeur. Ils temoignent en tout cas du souci constant de Martinet de rendre compte de tout << ce qui touche au langage et aux lan- gues dans leur fonctionnement comme instrument de communi-

1. Nous tenons A remercier tres chaleureusement Jeanne Martinet, qui a mis sponta- n6ment A notre disposition tous les documents dont nous avions besoin et qui, par sa dispo- nibilit6 constante et son aide de tous les instants, a contribu6 grandement A la realisation de ce numero.

Nos remerciements s'adressent aussi A Nathalie Bil, Nadeige Couthon, Macha Glouk- hova et Gacle Paradis pour l'aide matirielle qu'elles nous ont apport6e.

La Linguistique, vol. 36, fasc. 1-2/2000

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6 Colette Feuillard

cation et d'expression, dans leurs variations dans l'espace et le

temps, et dans leurs interf6rences mutuelles >>2. Le caractbre generaliste de la linguistique, qu'il a toujours

defendu, apparait non seulement dans ses r&f6rences aux langues les plus diverses3 et A leur realite multiforme, qu'elles soient

<prestigieuses>> ou <<minoritaires>>, orales ou &crites, qu'elles refletent un usage standard ou regional, mais aussi dans le choix de perspectives tant6t diachronique, tant6t synchronique, la

dynamique occupant dans cette dernimre une place fondamentale, sans qu'il y ait une quelconque confusion entre les deux; cette

approche g6n6rale des faits est aussi r6v616e par l'int6ret que Martinet manifestait a tous les domaines de la langue, phon6- tique, phonologie, syntaxe, axiologie... Son respect du fonctionne- ment des langues l'a amend6 A d6velopper une linguistique fonc- tionnelle r6aliste, oil I'observation et la description des faits

prennent le pas sur une formalisation trop pouss6e et sur une recherche d'universaux, qui, eu 6gard aux donn6es, pourrait paraitre abusive. C'est aussi la raison pour laquelle il convient, d'un point de vue theorique et m6thodologique, de n'etre esclave << ni des concepts...cr66s, ni des criteres...choisis >, car << certains criteres qui permettent une description simple et un classement facile de certaines langues aboutissent dans d'autres cas A des

rapprochements ou A des divorces arbitraires >>4. Ce d6sir de ne

pas s'enfermer dans un cadre trop rigide et le recours permanent au principe de pertinence communicative, pose des le depart, ont

permis A la fois la continuit6 et l'6volution de la pens6e, sans que cela porte atteinte aux fondements et a la coherence de la theorie. Cette evolution se manifeste entre autres sur le plan ter-

minologique: ainsi le morphoneme, mentionn6 dans son premier 6crit5, a d6finitivement disparu et le morpheme a fait place au moneme, de maniere A mettre l'accent sur le sens et non plus sur la forme6. Une fois l'unit6 significative minimale clairement

2. Andre Martinet, Avant-Propos, La Linguistique, 1, Paris, PUF, 1965, p. 5. 3. Cf. par exemple l'index des langues mentionn6es dans Syntaxe ginirale, Paris,

A. Colin, 1985, p. 261-262. 4. Andr6 Martinet, Accents et tons, dans La Linguistique synchronique, Paris, PUF, 1968,

p. 161. Cet article est reproduit p. 299. 5. Andr6 Martinet, Remarques sur le systime phonologique du frangais, B.S.L., 34,

1931, reproduit p. 329. 6. Andr6 Martinet, Mot et synth&me, dans Studies in functional syntax, Etudes de syntaxe

fonctionnelle, Miinchen, Wilhelm Fink Verlag, 1975, reproduit p. 425.

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Avant-propos 7

caracterisee, le concept de syntheme a pu voir le jour pour desi-

gner des complexes de monemes au comportement syntaxique et semantique analogue A ceux des monemes et diff6rent de celui du syntagme, A savoir les derives et les composes, par exemple. Cette distinction nette entre forme et sens a 6galement permis de red&- finir la morphologie et de lui attribuer une valeur ope'ratoire par- ticulierement f6conde.

II ne saurait etre question de faire ici une 'tude deitaillke des changements operas au fil du temps; toutefois, ces remarques montrent a quel point il est necessaire de replacer les articles dans leur contexte historique, pour comprendre certaines varia- tions7. L'ordre chronologique aurait pu guider la presentation des textes; un regroupement thematique, bien que partiellement arbitraire et souvent ddlicat A effectuer, a finalement 6te prf6rei, afin de mettre en valeur quelques-uns des domaines de recherche abord6s par Andre Martinet, temoignages de la richesse de sa

pensee, toujours actuelle, et source inepuisable d'inspiration.

7. Notamment en matikre de transcription phon6tique.

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