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Les lymphomes, une pathologie en augmentation

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Page 1: Les lymphomes, une pathologie en augmentation

43 pratique

thérapeutique

Actualités pharmaceutiques n° 498 Septembre 2010

Les lymphomes

constituent une pathologie

maligne dont l’incidence

a particulièrement cru

ces dernières décennies.

Elle peut survenir à tous les

âges et constitue, dans certains

cas, une urgence thérapeutique.

Les lymphomes étaient, au début des années 1990, la pathologie maligne dont l’incidence augmentait le plus

rapidement et ce, dans le monde entier1. En 2006, ils représentaient l’hémo pathie maligne la plus fréquente, se situant au 8e rang des cancers dans l’Union européenne2. Un doublement de l’incidence de cette pathologie a ainsi été noté sur les trois dernières décades3. Pour autant, il n’est pas possible de l’expliquer complètement en raison de connaissances biologiques, notamment géniques, encore insuffisan-tes4. En revanche, nous savons qu’un terrain d’immunodépression constitue un facteur de risque propice au déve-loppement de cette pathologie, si bien qu’une sérologie VIH (virus de l’immu-nodéficience humaine) est effectuée dès qu’un lymphome est diagnostiqué.Les proliférations lymphomateuses se définissent comme l’ensemble de la pathologie tumorale clonale dévelop-pée aux dépens des cellules du tissu lymphoï de ganglionnaire mais aussi extra-ganglionnaire. Il existe deux grands types de lymphome : le lym-phome de Hodgkin et les lymphomes non hodgkiniens.

Comment se présente un lymphome ?Cliniquement, diagnostiquer un lymphome n’est pas facile, les symptômes cliniques et biologiques de la maladie pouvant être très variés. Les principales présentations sont la présence d’adénopathies périphériques,

d’une fièvre au long cours et de sueurs nocturnes, une splénomégalie, un prurit inexpliqué ou encore des manifestations cutanées en cas de lymphome cutané.Les lymphomes peuvent se présenter sous la forme d’une urgence thérapeutique :– détresse respiratoire dans les lympho-mes médiastinaux ;– masse abdominale avec tableau occlusif dans les lymphomes abdominaux ;– compression médullaire.

Comment est réalisé le diagnostic de certitude ?Le diagnostic est histologique et nécessite soit une ponction ganglionnaire à l’aiguille fine, soit une biopsie-exérèse ganglion-naire. L’examen anatomo-pathologique permet de classer la maladie en : maladie de Hodgkin caractérisée

par la présence de cellules de Reed-Strenberg ; lymphome non hodgkinien, l’examen

morphologique de la tumeur précisant son architecture (folliculaire ou diffus) et l’aspect des cellules (petites ou grandes), et l’étude immunophénotypique définis-sant le type, B ou T.L’examen anatomopathologique doit être complété par un examen cyto génétique à la recherche d’anomalies acquises

(présentes uniquement dans les cellules tumorales) : translocation chromosomale 14-18 dans les lymphomes folliculaires, translocation 11-14 dans les lymphomes du manteau … De même, une analyse des cellules tumorales est effectuée en biolo-gie moléculaire.Toutes ces caractéristiques permettent de classer les lymphomes en bas grade (peu agressif comme le lymphome folliculaire ou le lymphome à petites cellules) et haut grade (comme le lymphome du manteau ou le lymphome à grandes cellules).Les lymphomes de Hodgkin sont de meilleur pronostic que les lymphomes non hodgkiniens. Quant aux lymphomes non hodgkiniens de bas grade, ils ont globalement une survie longue mais les guérisons sont exceptionnelles5. Dans les lymphomes agressifs, celle-ci est obtenue dans 47 % des cas aux dépens d’un trai-tement lourd5.Un bilan d’extension est nécessaire afin de localiser précisément la maladie : examens d’imagerie : imagerie thora-

cique, abdominale et pelvienne, TEP-Scan dans certaines formes ; hémogramme à la recherche de cellu-

les lymphomateuses au frottis (rares au diagnostic), d’une anémie et d’autres anomalies… ;

Les lymphomes, une pathologie en augmentation

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SIP

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N/C

HU

Lille

Maladie de Hodgkin stade III.

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thérapeutique

Actualités pharmaceutiques n° 498 Septembre 2010

bilan hépatique à la recherche d’anoma-lies évocatrices d’une atteinte du foie ; myélogramme et ponction-ostéo-

médullaire en quête d’une atteinte de la moelle ; ponction lombaire à la recherche d’une

atteinte neurologique.Localiser précisément la maladie permet ainsi de la classer (tableau 1).Un bilan d’évolutivité est également nécessaire : bilan inflammatoire, LDH…Ainsi, certains facteurs sont de mauvais pronostic :– l’âge > 60 ans ;– le stade clinique (stade III ou IV) ;– un taux de LDH élevé ;– l’atteinte d’au moins deux sites extra-nodaux ;– la présence des signes généraux suivants : fièvre, sueurs profuses, amai-grissement (plus de 10 % du poids corpo-rel les six derniers mois).

Quels sont les principes thérapeutiques ?Les décisions thérapeutiques sont prises en concertation pluridisciplinaire. La chirurgie n’est pas indiquée dans des pathologies très chimiosensibles.

La chimiothérapie ne peut être débutée qu’après bilan préthérapeutique : – rénal, – hépatique, – cardia que en cas de prescription d’anthra-cyclines, – transfusionnel en prévision…Les lymphomes non hodgkiniens B, les plus fréquents, repose sur la chimio-thérapie et l’immunothérapie (anticorps anti-CD 20).L’association radio-chimiothérapie est utilisée dans la maladie de Hodgkin car la pathologie présente souvent une extension locorégionale. Ceci explique les complications à long terme à type d’hypothyroïdie, sténoses des artères coronaires, leucémies aiguës et cancers secondaires.

Quel est le rôle du pharmacien d’officine ?Le traitement étant avant tout hospitalier, le pharmacien intervient dans la délivrance et le conseil des médicaments prescrits suite à la chimiothérapie : des antibiotiques suite à une aplasie

médullaire (encadré) ; des bains de bouche pour prévenir une

mucite, souvent à base d’ampho téricine B (Fungizone®) et de bicarbonate de sodium ; des facteurs de croissance hémato-

poïétiques afin de réduire les périodes de neutropénie et d’anémie tels léno grastine (Granocyte®), filgrastine (Neupogen ®) pour la lignée granuleuse et alpha époïétine (Néorecormion®) et bêta-époïétine (Eprex®) pour la lignée rouge ; des antivomitifs pour diminuer la fréquen ce

des vomissements post-chimiothérapie (antagonistes D2 , sétrons et antagonistes des récepteurs de la substance P). �

François Pillon

Pharmacien, Dijon (21)

[email protected]

Utilisation de l’antibiothérapie en ambulatoire chez les patients neutropéniques en post-chimiothérapieLa fièvre se définit par deux fois 38 °C à 4 heures d’intervalle ou une seule fois au-dessus de 38,5 °C.

La neutropénie se définit par moins de 500 polynucléaires neutrophiles/mm3 (neutropénie courte

< 7 jours versus neutropénie de longue durée > 7 jours).

Les neutropénies fébriles nécessitent une prise en charge rapide et adaptée, si possible

dans les 4 heures suivant le début de la fièvre et sans attendre le résultat des différents prélèvements.

Les ordonnances de sortie comportent des antibiotiques agissant sur les germes Gram négatif et les

germes intracellulaires. Il s’agit d’une bi-antibiothérapie synergique et bactéricide per os : cefpodoxime

(Orelox®) 200 mg 2 fois/jour ou amoxicilline + acide clavulanique (Augmentin®) 1 g 3 fois/jour en

association avec ofloxacine (Oflocet®) 200 mg 2 fois/jour ou ciprofloxacine (Ciflox®) 500 mg 2 fois/jour.

Dès l’apparition d’une fièvre post-chimiothérapie, le pharmacien doit inciter le patient à prendre

ses antibiotiques et à contacter son médecin traitant pour que celui-ci réalise un examen et recherche

des signes de gravité (tension artérielle systolique < 80 mmHg, dyspnée, polypnée, tachy cardie

> 90 pulsations/minute, signe de choc, existence d’un foyer pulmonaire) nécessitant une hospitalisation.

En absence de signes de gravité, le patient peut rester en ambulatoire. Le traitement est alors poursuivi

jusqu’à la sortie d’aplasie.

Source : Hughes et coll. Guidelines for the Use of Antimicrobial Agents in Neutropenic patients with

Cancer, CID, 2002; 34: 730-51.

Recommandations

Tableau 1 : Classification d’Ann Arbor

Stades Territoires atteints

Stade I Un seul territoire ganglionnaire atteint

Stade II Au moins deux territoires ganglionnaires atteints du même côté du diaphragme

Stade III Atteinte ganglionnaire sus- et sous-diaphragmatique

Stade IV Atteinte viscérale (foie, poumon) ou médullaire

NB : La rate est assimilée à un territoire ganglionnaire.

Références1. Carli PM, Boutron MC, Maynadié M et coll. Increase

in the incidence of non Hodgkin’s lymphomas: evidence

for a recent sharp increase in the France independent of

AIDS. Br J Cancer 1994; 70: 713-15.

2. Ferlay J, Autier P, Boniol M et coll. Estimates

of the cancer incidence and mortality in Europe

2006. Ann Oncol 2007; 18: 581-92.

3. Alexander DD, Mink PJ, Adami HO et coll.

The non-Hodgkin lymphomas: a review of the

epidemiologic literature. Int J Cancer 2007; 120

(Suppl 12): 1-39.

4. Wang SS, Davis S, Cerhan JR et coll. Polymorphisms

in oxidative stress genes and risk for non-Hodgkin

lymphoma. Carcinogenesis 2006; 27(9): 1828-34.

5. Bossard C, Belhadj K, Reyes F et coll. Expression

of the granzyme B inhibitor PI9 predicts outcome

in nasal NK/T-cell lymphoma: results of a Western

series of 48 patients treated with first-line

polychemotherapy within the Groupe d’Etude des

Lymphomes de l’Adulte (GELA) trials. Blood 2007;

109: 2183-9.