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www.depecheveterinaire.com 4 VIE DE LA PROFESSION La Dépêche Vétérinaire | N°1245 du 8 au 14 février 2014 Les maladies émergentes infectieuses seront toujours d’actualité dans toutes les espèces Jeanne BRUGÈRE-PICOUX Professeur honoraire de pathologie médi- cale du bétail et des animaux de basse cour de l’école vétérinaire d’Alfort SANTÉ PUBLIQUE La majorité des maladies émergentes ou résurgentes observées en France ces dernières décennies sont des zoonoses. Elles ont été parfois la cause de crises sanitaires sans précédent. Le commerce international croissant des animaux domestiques et sauvages ou de denrées alimentaires d’origine animale, l’intro- duction accidentelle ou volontaire d’es- pèces animales dans des zones géogra- phiques nouvelles et l’engouement récent pour de nombreuses espèces exotiques sont à l’origine de l’émergence ou de la résurgence de ces zoonoses. Ces maladies peuvent être apportées par des vecteurs spécifiques, des aliments ou des animaux. Revue de détails. Maladies vectorielles De nombreux facteurs sont à l’origine de l’émergence des maladies vectorielles obser- vées en France ou en Europe depuis quelques années (sous-estimation de ces maladies, climat, échanges commerciaux...). L’émer- gence du virus du Nil occidental aux États-Unis en 1999 ou de la fièvre catarrhale ovine et du virus Schmallenberg en Europe démontrent que, une fois installé dans une nouvelle contrée, un virus peut se propager sans qu’il soit possible de l’éliminer facilement. La crainte d’importer de nouvelles arboviroses dans un pays jusque-là indemne est donc par- faitement justifiée. La fièvre catarrhale ovine, due à un Orbivirus transmis par un arthropode piqueur du genre Culicoides, est une maladie spécifique des ruminants qui était considérée comme exo- tique jusqu’en 1998 malgré quelques foyers observés dans la péninsule ibérique. Quelques sérotypes (8 sur 24) ont ainsi circulé en Europe dans la région méditerranéenne mais la plus grande surprise fut l’émergence du sérotype 8 en Belgique, Allemagne, Pays- Bas, France et Luxembourg puis sa propaga- tion rapide sur le territoire français à partir de juillet 2007. A partir de 2008, un autre sérotype a diffusé à partir de l’Espagne, obligeant la mise en œuvre d’une campagne de vaccination mas- sive des troupeaux en 2009 pour lutter contre cette maladie à déclaration obligatoire. L’apparition d’une autre maladie d’origine vec- torielle touchant également les ruminants quelques années plus tard, pendant l’été 2011, dans la même zone géographique, nous amène à nous poser la question de l’origine de ces deux affections virales émergentes : animal porteur du virus importé ? Vecteur importé, notamment avec des fleurs (l’enzoo- tie ayant débuté autour de Maastricht, carre- four aérien mondial du commerce des fleurs) ? Ces maladies émergentes ne sont pas des zoonoses mais le risque de l’importation d’une troisième infection qui serait zoonotique ne peut être exclu. Par ailleurs, les ruminants sau- vages représentent un risque non négligeable de réservoir de virus permettant la réinfection d’un cheptel non protégé, en particulier par une vaccination. Le Flavivirus du Nil occidental (VNO) est connu depuis longtemps sur de nombreux continents et les oiseaux sauvages en sont les réservoirs essentiels. En effet, les oiseaux infectés développent une virémie suffisante pour permettre l’infection des vecteurs (mous- tiques du genre Culex principalement). En Europe, cette affection a été observée avec des cas humains en Roumanie (1996 à 1997) et en République tchèque (1997) et des cas équins ont eu lieu en Italie (1998) et en France (2000). L’émergence duVNO dans les pays européens jusque là épargnés par des mala- dies humaines graves ne doit pas être écartée en Europe avec l’exemple historique de son apparition il y a 10 ans à NewYork. En effet, la survenue d’une mortalité anormale chez des corneilles dans un zoo du Bronx à NewYork en 1999 fut pour le CDC* d’Atlanta un « problème uniquement vétérinaire », le VNO n’étant pas connu dans cette région géo- graphique. Mais lorsque la relation entre la surmortalité des corneilles dans le Bronx et les encéphalites humaines fut établie, le CDC d’Atlanta mit en place en 2000 une surveillance du VNO sur le territoire américain (ArboNET) et le VNO est maintenant la cause principale des encéphalites humaines arbovirales aux Etats-Unis avec des séquelles à long terme. Les moustiques sont les principaux respon- sables de la transmission de cette zoonose mais des contaminations interhumaines ont été aussi observées (transplacentaire, iatro- gène par transplantation d’organe ou transfu- sion sanguine). De même, on a pu noter le risque lié au contact avec les animaux infectés comme, par exemple, une contamination par aérosols chez des employés d’un élevage de dindons. D’autres flavivirus émergent en Europe comme dans le monde. Par exemple, le virus Usutu (du nom d’une rivière du Swaziland où il fut isolé la première fois), découvert en 2001 pour la première fois en Europe à Vienne (Autriche) lors d’une surmortalité inquiétante chez les corbeaux de cette ville, a été égale- ment isolé depuis dans d’autres pays euro- péens (Suisse, Royaume-Uni, Hongrie et Italie) et il pourrait s’agir d’un agent zoonotique. La fièvre de la vallée du Rift (FVR) transmise par les moustiques et touchant le bétail (en particulier le mouton) reste une zoonose redoutée en particulier depuis 1977, lors de l’atteinte de pays jusque là indemnes et/ou lors d’épidémies plus meurtrières comme en Egypte (1977–1979) avec plus de 200 000 cas humains dont 594 morts. La FVR préoccupe tous les acteurs de la santé animale ou humaine car le risque d’une pro- pagation dans d’autres zones géographiques jusque-là épargnées comme l’Europe, l’Asie ou le continent américain est possible du fait de la présence des vecteurs potentiels. Les pays maghrébins sont en première ligne en particulier du fait des échanges nombreux peu ou non contrôlés de petits ruminants via les routes trans-sahariennes avec les pays voisins et le risque d’un transfert de la FVR vers l’Eu- rope, en particulier la France, depuis un pays maghrébin ne peut être considéré comme nul. Ces maladies vectorielles sont souvent des zoonoses et la maladie animale représente un signe d’alerte pour avertir d’un éventuel risque pour l’Homme. L’exemple de la propagation depuis 1999 du VNO aux Etats-Unis (et dans les pays voisins) démontre l’importance qu’il faut accorder aux « animaux sentinelles » qui, par un taux de mortalité anormale, peuvent annoncer une maladie émergente menaçant l’Homme. Maladies d’origine alimentaire L’apparition de l’encéphalopathie spongi- forme bovine (ESB) en 1985, au Royaume- Uni, a eu des conséquences catastrophiques tant dans le domaine médical humain et vété- rinaire que dans l’économie agricole. L’émer- gence de l’épidémie fut d’abord d’origine ali- mentaire chez les bovins. M Des rats importés de Hongrie en tant que NAC étaient porteurs de cowpox. L’Allemagne fut le premier pays à lancer l’alerte en 2009, suivie par la France. M Les Suédois ont diminué le risque de salmonellose lié aux reptiles de 12 à 6 % entre 1996 et 2000 par une campagne d’information dans les médias. Ansosyns-Fotolia.com Henri Brugère PPP «Le risque d’un transfert de la FVR vers l’Eu- rope, en particu- lier la France, depuis un pays maghrébin ne peut être considéré comme nul.» Dossier

Les maladies émergentes infectieuses seront toujours … · Culicoides, est une maladie spécifique des ruminants qui était considérée comme exo- ... Si l’on compare les maladies

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VIE DE lA PROFESSIOn

La Dépêche Vétérinaire | N°1245 du 8 au 14 février 2014

Les maladies émergentes infectieusesseront toujours d’actualité dans toutesles espècesJeanne BRUGÈRE-PICOUXProfesseur honoraire de pathologie médi-cale du bétail et des animaux de basse courde l’école vétérinaire d’Alfort

SAnté PUBlIqUE

la majorité des maladies émergentes ourésurgentes observées en France cesdernières décennies sont des zoonoses.Elles ont été parfois la cause de crisessanitaires sans précédent. le commerceinternational croissant des animauxdomestiques et sauvages ou de denréesalimentaires d’origine animale, l’intro-duction accidentelle ou volontaire d’es-pèces animales dans des zones géogra-phiques nouvelles et l’engouementrécent pour de nombreuses espècesexotiques sont à l’origine de l’émergenceou de la résurgence de ces zoonoses.Cesmaladies peuvent être apportées par desvecteurs spécifiques, des aliments oudes animaux. Revue de détails.

Maladies vectoriellesDe nombreux facteurs sont à l’origine del’émergence des maladies vectorielles obser-vées en France ou en Europe depuis quelquesannées (sous-estimation de ces maladies,climat, échanges commerciaux...). L’émer-gence du virus du Nil occidental aux États-Unisen 1999 ou de la fièvre catarrhale ovine et duvirus Schmallenberg en Europe démontrentque, une fois installé dans une nouvellecontrée, un virus peut se propager sans qu’ilsoit possible de l’éliminer facilement.

La crainte d’importer de nouvelles arbovirosesdans un pays jusque-là indemne est donc par-faitement justifiée.

la fièvre catarrhale ovine, due à un Orbivirustransmis par un arthropode piqueur du genreCulicoides, est une maladie spécifique desruminants qui était considérée comme exo-tique jusqu’en 1998 malgré quelques foyersobservés dans la péninsule ibérique.

Quelques sérotypes (8 sur 24) ont ainsi circuléen Europe dans la région méditerranéennemais la plus grande surprise fut l’émergencedu sérotype 8 en Belgique, Allemagne, Pays-Bas, France et Luxembourg puis sa propaga-tion rapide sur le territoire français à partir dejuillet 2007.

A partir de 2008, un autre sérotype a diffuséà partir de l’Espagne, obligeant la mise enœuvre d’une campagne de vaccination mas-sive des troupeaux en 2009 pour lutter contrecette maladie à déclaration obligatoire.

L’apparition d’une autre maladie d’origine vec-torielle touchant également les ruminantsquelques années plus tard, pendant l’été 2011,dans la même zone géographique, nousamène à nous poser la question de l’originede ces deux affections virales émergentes :animal porteur du virus importé ? Vecteur

importé, notamment avec des fleurs (l’enzoo-tie ayant débuté autour de Maastricht, carre-four aérien mondial du commerce des fleurs) ?

Ces maladies émergentes ne sont pas deszoonoses mais le risque de l’importation d’unetroisième infection qui serait zoonotique nepeut être exclu. Par ailleurs, les ruminants sau-vages représentent un risque non négligeablede réservoir de virus permettant la réinfectiond’un cheptel non protégé, en particulier parune vaccination.

le Flavivirus du Nil occidental (VNO) estconnu depuis longtemps sur de nombreuxcontinents et les oiseaux sauvages en sont lesréservoirs essentiels. En effet, les oiseauxinfectés développent une virémie suffisantepour permettre l’infection des vecteurs (mous-tiques du genre Culex principalement).

En Europe, cette affection a été observée avecdes cas humains en Roumanie (1996 à 1997)et en République tchèque (1997) et des caséquins ont eu lieu en Italie (1998) et en France(2000). L’émergence du VNO dans les payseuropéens jusque là épargnés par des mala-dies humaines graves ne doit pas être écartéeen Europe avec l’exemple historique de sonapparition il y a 10 ans à NewYork.

En effet, la survenue d’une mortalité anormalechez des corneilles dans un zoo du Bronx àNewYork en 1999 fut pour le CDC* d’Atlantaun « problème uniquement vétérinaire », leVNO n’étant pas connu dans cette région géo-graphique. Mais lorsque la relation entre lasurmortalité des corneilles dans le Bronx etles encéphalites humaines fut établie, le CDCd’Atlanta mit en place en 2000 une surveillancedu VNO sur le territoire américain (ArboNET)et le VNO est maintenant la cause principaledes encéphalites humaines arbovirales auxEtats-Unis avec des séquelles à long terme.

Les moustiques sont les principaux respon-sables de la transmission de cette zoonosemais des contaminations interhumaines ontété aussi observées (transplacentaire, iatro-gène par transplantation d’organe ou transfu-sion sanguine). De même, on a pu noter lerisque lié au contact avec les animaux infectéscomme, par exemple, une contamination paraérosols chez des employés d’un élevage dedindons.

D’autres flavivirus émergent en Europecomme dans le monde. Par exemple, le virusUsutu (du nom d’une rivière du Swaziland oùil fut isolé la première fois), découvert en 2001pour la première fois en Europe à Vienne(Autriche) lors d’une surmortalité inquiétantechez les corbeaux de cette ville, a été égale-ment isolé depuis dans d’autres pays euro-péens (Suisse, Royaume-Uni, Hongrie et Italie)et il pourrait s’agir d’un agent zoonotique.

la fièvre de la vallée du Rift (FVR) transmisepar les moustiques et touchant le bétail (enparticulier le mouton) reste une zoonoseredoutée en particulier depuis 1977, lors del’atteinte de pays jusque là indemnes et/oulors d’épidémies plus meurtrières comme enEgypte (1977–1979) avec plus de 200 000 cashumains dont 594 morts.

La FVR préoccupe tous les acteurs de la santéanimale ou humaine car le risque d’une pro-pagation dans d’autres zones géographiquesjusque-là épargnées comme l’Europe, l’Asieou le continent américain est possible du faitde la présence des vecteurs potentiels. Lespays maghrébins sont en première ligne enparticulier du fait des échanges nombreux peuou non contrôlés de petits ruminants via lesroutes trans-sahariennes avec les pays voisinset le risque d’un transfert de la FVR vers l’Eu-rope, en particulier la France, depuis un paysmaghrébin ne peut être considéré comme nul.

Ces maladies vectorielles sont souvent deszoonoses et la maladie animale représente unsigne d’alerte pour avertir d’un éventuel risquepour l’Homme. L’exemple de la propagationdepuis 1999 du VNO aux Etats-Unis (et dansles pays voisins) démontre l’importance qu’ilfaut accorder aux « animaux sentinelles » qui,par un taux de mortalité anormale, peuventannoncer une maladie émergente menaçantl’Homme.

Maladies d’origine alimentaireL’apparition de l’encéphalopathie spongi-forme bovine (ESB) en 1985, au Royaume-Uni, a eu des conséquences catastrophiquestant dans le domaine médical humain et vété-rinaire que dans l’économie agricole. L’émer-gence de l’épidémie fut d’abord d’origine ali-mentaire chez les bovins.

MDes rats importés de Hongrie en tant que NAC étaientporteurs de cowpox. L’Allemagne fut le premier paysà lancer l’alerte en 2009, suivie par la France.

MLes Suédois ont diminué le risque de salmonelloselié aux reptiles de 12 à 6 % entre 1996 et 2000 par unecampagne d’information dans les médias.

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«le risque d’untransfert de laFVR vers l’Eu-rope, en particu-lier la France,depuis un paysmaghrébin nepeut êtreconsidérécomme nul.»

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VIE DE LA PROFESSION

La Dépêche Vétérinaire | N°1245 du 8 au 14 février 2014

Malheureusement, l’exceptionnelle pressioninfectieuse de l’ESB dans le cheptel bovin bri-tannique permit de démontrer que la barrièred’espèce entre le bovin et l’Homme pouvaitêtre franchie par le prion bovin puisqu’il a falludes millions de bovins infectés pour observer177 cas de variant de maladie de Creutzfeldt-Jakob (vMCJ) au sein du Royaume- Uni.

Comme il n’y a pas eu de nouveaux cas devMCJ depuis plusieurs années au Royaume-Uni, on pourrait penser en avoir fini avec cettemaladie. C’est oublier que nous n’avonsobservé que des vMCJ homozygotes sur lecodon 129 (Met-Met) donc prédisposés à unecourte durée d’incubation.

Or le British Medical Journal signale la dernièreanalyse concernant l’évaluation du portageasymptomatique du prion bovin dans la popu-lation britannique à partir des résultats obtenussur l’étude de 32 441 échantillons d’appen-dices récoltés dans des hôpitaux : 16 se sontrévélés positifs (dont la moitié Met-Met) d’oùune estimation d’une personne infectée sur2000**, soit plus que la dernière estimation(qui était d’une personne sur 4 000).

Ce portage asymptomatique représente unrisque non négligeable soit de transmissioniatrogène par le sang (on a déjà observé quele prion bovin avait pu être transmis par trans-fusion sanguine chez l’Homme, à la différencede la MCJ classique***), soit par les instru-ments chirurgicaux.

Le fait qu’il y ait d’autres personnes infectéesnon Met-Met ne permet pas d’exclure égale-ment l’apparition d’une seconde vague de casde vMCJ dans cette population prédisposéeà une durée d’incubation plus longue.

La mondialisation du commerce favorise l’im-portation de nouveaux agents patho-gènes (nouvelles souches de salmonellesou autres bactéries notamment antibioré-sistantes, norovirus...) par l’intermédiaire desaliments. Citons en particulier les importationsclandestines des viandes de brousse salées,boucanées ou fumées ne permettant pas l’éli-mination des parasites (toxoplasmes, cysti-

cerques, trichines...) ou les viandes d’oursrapportées par des chasseurs persuadés dela qualité du produit du fait qu’il proviennentd’animaux chassés en pleine nature sauvage.

C’est ainsi qu’il y eut 17 cas de trichinelloseen France en 2005 non seulement chez leschasseurs mais aussi chez les convives invitésà consommer la viande importée.

Maladies émergentes ou résur-gentes hébergées par les ani-maux vivantsParmi les maladies émergentes pouvant repré-senter un risque d’importation par des ani-maux (porteurs ou réservoirs asymptoma-tiques, malades en cours d’incubation...), lesexemples sont nombreux parmi les animauxde production, les animaux sauvages et/ou lesanimaux de compagnie : virus Nipah, virusinfluenza A hautement pathogène de sous-type H5N1 véhiculé par les volailles et/ou lesoiseaux sauvages, germes pathogènes liés àl’importation d’animaux de compagnie (chiensenragés importés illégalement du Maroc, ratsde compagnie infectés par le virus du cow-pox...).

La plupart des agents pathogènes émergentsreconnaissent souvent comme réservoir leschauve-souris.

L’importation en Europe d’animaux de compa-gnie ou sauvages représente un risque réel enparticulier de zoonose. D’ailleurs l’engoue-ment pour les nouveaux animaux de compa-gnie (NAC) a permis d’observer l’émergencede nouveaux risques. A part le lapin, les nou-veaux animaux de compagnie ne sont pastoujours recommandés pour les enfants.

Les petits rongeurs comme le hamsterpeuvent être porteurs de tularémie ou du virusde la chorioméningite lymphocytaire. Leschiens de prairie, porteurs éventuels de Yersi-nia pestis, sont interdits d’importation enEurope. Deux exemples ont mis en évidencele risque éventuel de poxviroses apportées parcertaines espèces de rats importés :

- le premier est l’épisode de l’importation dela variole du singe (Monkeypox) survenu dansles états du Midwest américain en 2003 avecplus de 70 cas humains identifiés ; la sourceétait l’exposition à des chiens de prairie infec-tés, eux-mêmes ayant été exposés à des ratsde Gambie, rongeurs importés d’Afrique versles Etats-Unis pour être vendus comme ani-maux de compagnie ;

- le second exemple est européen : il s’agit derats importés de Hongrie en tant que NAC (undessin animé destiné aux enfants fit à cetteépoque l’apologie de cet animal de compa-gnie) et porteurs d’un autre orthopoxvirus, lecowpox ; l’Allemagne fut le premier pays àlancer l’alerte en 2009 et la France fut ensuitetouchée.

Enfin, nous soulignerons le risque réel et sous-estimé des salmonelloses transmises par lesreptiles (plus de 90 % sont porteurs asymp-tomatiques de salmonelles) qui devraient êtredéconseillés en tant que NAC, en particulieren la présence d’enfants, d’autant plus qu’untraitement ne permet l’élimination de l’agentpathogène.

Ainsi 3 à 5 % des cas de salmonellosehumaine aux Etats-Unis sont associés à uncontact avec des NAC, le plus souvent desreptiles. Les années 90 ont pourtant permisde noter une augmentation à la fois de cesNAC et des cas de salmonelloses pouvant leurêtre rattachés.

Par exemple, les importations d’iguanes auxEtats-Unis ont augmenté de 431 % entre 1989et 1993. On a pu observer une corrélationentre l’augmentation de l’importation desiguanes verts et les infections humaines parle sérotype assez rare de Salmonella entericaMarina.

Le bulletin épidémiologique hebdomadaire del’Institut de veille sanitaire de janvier 2014****confirme ce risque de salmonellose : sur 41jeunes enfants âgés de moins de 5 ans atteintsde salmonellose en 2012, 13 (soit 32 %)avaient été exposés à des reptiles présentsdans le foyer. Les principaux animaux incrimi-nés étaient des tortues mais l’un des deux casde méningite était la conséquence d’uncontact direct avec un lézard domestique.

A l’instar de plusieurs pays, une informationsur ce risque croissant est essentielle. A titred’exemple, les Suédois ont pu diminuer cerisque de 12 à 6 % entre 1996 et 2000 par unecampagne active d’information dans lesmédias. Il est urgent d’en faire de même enFrance.

Enfin, d’autres affections pourraient encoreémerger. Si l’on compare les maladies desvolailles, des porcs ou du chien, on peut sou-ligner l’émergence il y près de 30 ans du cir-covirus chez le porc, alors que l’on connaissaitdepuis beaucoup plus longtemps les circovirusaviaires (agents de l’anémie infectieuse dupoulet ou de la maladie du bec et des plumesdes psittacidés).

Ces virus immunodépresseurs existent aussichez l’Homme et peuvent faire l’objet d’unecontamination iatrogène par le sang. Depuispeu, un circovirus a été découvert chez le chienaux Etats-Unis (Californie, Ohio) et serait sur-tout responsable de vomissements et de diar-rhées... n

* Centre de référence des maladies émergentes : CenterDiseases Control ou CDC.** Soit une prévalence dans la population de 493 par million(intervalle de confiance à 95 %, de 282 à 801 par million).*** Seule une expérimentation récente permet de suspecterce risque de transmission iatrogène lors de MCJ classique.**** http://www.invs.sante.fr/beh/2014/1-2/2014_1-2_1.html

«Un circovirusdécouvert chezle chien auxEtats-Unis seraitresponsable devomissements etde diarrhées.»

P P PDossier

MCheval atteint d’encéphalite à virus West Nile.

MLes maladiesimmunodépres-sives des animauxsemblent mieuxconnues que chezl’Homme lorsqu’ils’agit d’une patho-logie de groupe setraduisant surtoutpar des retards decroissance. Dansle cas de l’anémieinfectieuse dupoulet, on observedes lésionscaractéristiques :anémie liée à uneaplasie médul-laire, hémorragiessous-cutanées oucutanées pouvantse compliquerd’une dermatitegangréneuse.

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