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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2010) 9, 291—296 ÉTUDE ORIGINALE Les maladies neuromusculaires chez l’enfant : place et définition des soins palliatifs ? Neuromuscular disorders in childhood: The time for palliative cares? Isabelle Desguerre , Christine Barnerias Service de neurologie pédiatrie, centre de référence maladies neuromusculaires Necker, centre de référence maladies neuromusculaires GMNH„ hôpital Necker—Enfants-malades, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France Rec ¸u le 19 mars 2010 ; accepté le 19 mars 2010 Disponible sur Internet le 8 octobre 2010 MOTS CLÉS Maladie neuromusculaire ; Douleur ; Arthrodèse ; Duchenne ; Amyotrophie spinale ; Enfant Résumé Un certain nombre de maladies neuromusculaires et maladies neurodégératives chez l’enfant ont à terme une issue fatale. L’évolutivité de ces pathologies est variable mais conduit dans tous les cas à une perte progressive de l’autonomie motrice et respiratoire pour les mala- dies neuromusculaires associées à une dégradation des fonctions cognitives pour certaines. L’objectif de l’équipe médicale sera de maintenir un projet de vie pour ces enfants en tenant compte de leur perte d’autonomie et d’anticiper les complications spécifiques à chaque patho- logie. Les parents et l’enfant sont des partenaires indispensables à toute décision médicale. Les complications orthopédiques chez un enfant en croissance seront au premier plan et source de douleurs et de dégradation des fonctions motrices: un cercle vicieux s’installe. L’utilisation d’orthèses de correction comme les gestes chirurgicaux seront décidés au cas par cas mais aussi de fac ¸on pluridisciplinaire avec les parents. Les décisions d’assistance ventilatoire par VNI ou trachéotomie seront le fruit d’une discussion pluridisciplinaire où les parents comme l’enfant doivent être partenaires. Certaines myopathies congénitales très sévères ou amyotro- phies spinales de type 1 conduiront à proposer d’emblée un accompagnement palliatif visant au confort. Les parents sont l’interlocuteur principal et doivent être partie prenante des déci- sions thérapeutiques (gastrostomie, aspirations, intervention orthopédique). L’évolution de ces pathologies sur plusieurs années nécessite toutefois un projet qui ne peut être unique- ment palliatif au sens restrictif du terme. La prise en charge de ces patients doit donc être multidisciplinaire, adaptée au fur et à mesure de l’évolution de la pathologie. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (I. Desguerre). 1636-6522/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medpal.2010.09.006

Les maladies neuromusculaires chez l’enfant : place et définition des soins palliatifs ?

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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2010) 9, 291—296

ÉTUDE ORIGINALE

Les maladies neuromusculaires chez l’enfant :place et définition des soins palliatifs ?

Neuromuscular disorders in childhood: The time for palliative cares?

Isabelle Desguerre ∗, Christine Barnerias

Service de neurologie pédiatrie, centre de référence maladies neuromusculaires Necker,centre de référence maladies neuromusculaires GMNH„ hôpital Necker—Enfants-malades,149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France

Recu le 19 mars 2010 ; accepté le 19 mars 2010Disponible sur Internet le 8 octobre 2010

MOTS CLÉSMaladieneuromusculaire ;Douleur ;Arthrodèse ;Duchenne ;Amyotrophie spinale ;Enfant

Résumé Un certain nombre de maladies neuromusculaires et maladies neurodégératives chezl’enfant ont à terme une issue fatale. L’évolutivité de ces pathologies est variable mais conduitdans tous les cas à une perte progressive de l’autonomie motrice et respiratoire pour les mala-dies neuromusculaires associées à une dégradation des fonctions cognitives pour certaines.L’objectif de l’équipe médicale sera de maintenir un projet de vie pour ces enfants en tenantcompte de leur perte d’autonomie et d’anticiper les complications spécifiques à chaque patho-logie. Les parents et l’enfant sont des partenaires indispensables à toute décision médicale.Les complications orthopédiques chez un enfant en croissance seront au premier plan et sourcede douleurs et de dégradation des fonctions motrices : un cercle vicieux s’installe. L’utilisationd’orthèses de correction comme les gestes chirurgicaux seront décidés au cas par cas maisaussi de facon pluridisciplinaire avec les parents. Les décisions d’assistance ventilatoire parVNI ou trachéotomie seront le fruit d’une discussion pluridisciplinaire où les parents commel’enfant doivent être partenaires. Certaines myopathies congénitales très sévères ou amyotro-phies spinales de type 1 conduiront à proposer d’emblée un accompagnement palliatif visant auconfort. Les parents sont l’interlocuteur principal et doivent être partie prenante des déci-sions thérapeutiques (gastrostomie, aspirations, intervention orthopédique). L’évolution de

ces pathologies sur plusieurs années nécessite toutefois un projet qui ne peut être unique-ment palliatif au sens restrictif du terme. La prise en charge de ces patients doit donc être

au fur et à mesure de l’évolution de la pathologie.

multidisciplinaire, adaptée © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (I. Desguerre).

1636-6522/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.medpal.2010.09.006

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KEYWORDSNeuromusculardisorders;Pain;Arthrodesis;Duchenne;Spinal motor atrophy;Standard care;Child

Summary Some neuromuscular disorders and degenerative diseases in childhood have a fatalissue. The variability of these diseases is important but most of the time, progressive lost ofmotor and respiratory autonomy and sometimes cognitive impairment are the issue. The aimof the medical support is to propose a real life project for the children with the maximalautonomy and to anticipate the complications. The child and his parents are always partnersof the discussion. In case of paralytic disorders, orthopedic disorders are frequent and mustbe prevented. A vicious circle can be initiated between contractures, orthopedic disorders andpain. In this case, the support of orthesis or orthopedic surgery could be proposed in accordancewith the parents and the child. A ventilator support is also frequently proposed with non-invasiveventilation or sometimes with tracheostomy after multidisciplinary evaluation. In case of severecongenital myopathy or spinal motor amyotrophy type 1, the palliative cares are proposed onfirst line because of the fatal prognosis. In all the cases, the parents are the principal actorsof the medical supports and participate to the decisions (enteral nutrition through tube orgastrostomy, aspirations, ventilatory support). The palliative care or supportive care have tobe initiated with a multidisciplinary team, in relationship with the family of the child, dependingon the severity of the disease.© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

es maladies neuromusculaires sont chez l’enfant pour lalupart d’origine génétique et à l’annonce d’une patholo-ie invalidante et évolutive s’ajoute la problématique duisque génétique de récurrence dans la fratrie, pour unerossesse à venir ou la descendance. Les progrès de la géné-ique dans les 20 dernières années ont permis d’identifieres gènes responsables d’un grand nombre de maladies neu-omusculaires et de comprendre la fonction de la protéineéficiente pour un certain nombre d’entres elles. La phy-iopathologie et les interactions cellulaires de ces maladieseuromusculaires est en cours de décryptage dans l’objectif’améliorer le pronostic fonctionnel de ces enfants à défaut’une correction complète qui reste l’espoir de la thérapieénique. À l’heure actuelle, nos objectifs sont donc, d’uneart, d’assurer un diagnostic le plus précis possible avec unearactérisation génétique pour permettre un conseil géné-ique éclairé et éventuellement un diagnostic prénatal etans le même temps, assurer une prise en charge optimaleui à défaut de guérir doit permettre à l’enfant, malgréon handicap, une croissance, une socialisation et une sco-arisation optimales. Le projet ne se limite donc pas à uniagnostic médical précis mais doit comprendre un projet deie cohérent pour l’enfant et sa famille. L’évolutivité de cesathologies est variable mais conduit souvent à une perterogressive de l’autonomie motrice pour les maladies neuro-usculaires associées à une atteinte des fonctions cognitivesans quelques cas.

L’objectif de l’équipe médicale est demaintenir un projet de vie pour ces enfants entenant compte de leur perte d’autonomie et

d’anticiper les complications spécifiques à

chaque pathologie.

Le premier temps est le temps diagnostic qui peut par-ois être long et complexe pour préciser la pathologie,

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omme les myopathies congénitales, ou au contraire trèsourt, voire trop court pour annoncer une maladie neu-ologique grave à issue rapidement fatale, comme danses amyotrophies spinales type 1 (ASI). Il y a donc laoexistence d’une démarche diagnostique avec des exa-ens qui peuvent être invasifs (électromyogramme, biopsieusculaire, prélèvements sanguins) et d’une démarche’accompagnement pour assurer de l’autonomie à l’enfant,n avenir et pallier à ses déficiences, voire parfois discu-er d’emblée un accompagnement palliatif en cas d’issueatale rapide (arrêt de réanimation, espérance de vie deuelques mois).

es scénarios diagnostiques

e nouveau-né en réanimation

e nouveau-né hypotonique et paralytique en réanimationvec une dépendance ventilatoire nécessite un diagnosticapide. En effet, une discussion éthique de poursuite dea prise en charge réanimatoire si la dépendance ventila-oire se confirme va rapidement se poser et les choix seeront selon l’évolution supposée de la maladie et donc dea caractérisation. Le pédiatre est donc confronté à un dis-ours ambivalent avec les parents où l’urgence diagnostique’est pas obligatoirement thérapeutique mais plutôt pronos-ique en termes d’autonomie future motrice, ventilatoire,ntellectuelle. L’examen clinique constate une atteintearalytique des membres, de la face, des muscles respi-atoires et des déformations orthopédiques inconstantesarthrogrypose). Les outils diagnostiques sont réduits dans’évaluation en réanimation et souvent le bilan compren-ra imagerie cérébromédullaire, prélèvements génétiques

t biopsie musculaire. Les diagnostics les plus fréquentsont la myotonie de Steinert congénitale à transmissionaternelle, les amyotrophies spinales, les dystrophies mus-

ulaires congénitales, les myopathies structurelles typeémaline, myotubulaire de mauvais pronostic et certaines

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Maladies neuromusculaires et médecine palliative chez l’en

myopathies structurelles type central core, les syndromesmyasthéniques congénitaux de meilleur pronostic fonction-nel.

Le nourrisson hypotonique d’âge inférieur àtrois ans

La seconde situation diagnostique et de prise en chargeest la maladie neuromusculaire révélée par une hypoto-nie paralytique la première année de vie. Le diagnostic leplus fréquent est celui d’amyotrophie spinale de transmis-sion récessive autosomique (1/6 000 naissances). L’absencede protéine SMN empêche la survie des motoneurones avecune perte progressive des motoneurones de la corne de lamoelle. Il existe classiquement trois formes : type 1 (débutavant quatre mois, pas de tenue de tête), type 2 (débutaprès quatre mois, pas d’acquisition de la marche), type 3(début après un an avec marche acquise). La forme pré-coce type 1 ou Wernig Hoffman s’accompagne d’une atteintebulbaire progressive et d’une paralysie des intercostauxconduisant à une insuffisance respiratoire avant l’âge d’unan [1—2]. La sévérité de l’atteinte paralytique motriceet respiratoire évolutive conduit généralement après dis-cussion avec la famille à une prise en charge palliativenon invasive visant au confort sans mesure réanimatoire :installation de mousse pour éviter les déformations orthopé-diques, aspirations nasopharyngées, oxygénothérapie, voirenutrition entérale en cas de fausses routes[1]. L’atteintedes fonctions cérébrales supérieures dans certains casde dystrophies musculaires congénitales rend plus diffi-cile l’évaluation des besoins et de la douleur de l’enfant.Les parents sont alors l’interlocuteur principal et doiventêtre partie prenante des décisions thérapeutiques (gastro-stomie, intervention orthopédique, etc.). A contrario, lediagnostic d’amyotrophie spinale type 2, plus tardive ou demyopathie congénitale devant un retard moteur, conduità proposer une prise en charge rééducative orthopédiqueet respiratoire intensive dans l’objectif de favoriser unecroissance harmonieuse, limiter les complications ortho-pédiques et respiratoires liées aux paralysies et favoriserl’autonomie de l’enfant (appareillage, fauteuil électrique).Le diagnostic de ces pathologies se fera par des ana-lyses en biologie moléculaire (étude du gène SMN dansl’amyotrophie spinale), une biopsie musculaire pour carac-tériser les anomalies structurelles dans les myopathiescongénitales et orienter les analyses génétiques. La priseen charge de ces enfants sera nécessairement multidisci-plinaire avec un suivi très régulier cardiaque, respiratoire,orthopédique, fonctionnel avec des ergothérapeutes etpsychologiques. Les complications orthopédiques chez unenfant paralytique en croissance sont fréquentes, pour-voyeuses de douleurs et de dégradation des fonctionsmotrices et d’une perte de chance et d’autonomie :un cercle vicieux s’installe sans attitude préventive [2].L’utilisation d’orthèses de correction (corset, appareillagedes membres inférieurs de nuit ou de jour) comme lesgestes chirurgicaux seront décidés au cas par cas et de

facon pluridisciplinaire avec les parents car ils demandentune adhésion de l’enfant et des parents au projet rééduca-tif.

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e trouble de la marche chez l’enfant de pluse trois ans

a myopathie de Duchenne Muscular Dystrophy (DMD) estce jour la dystrophie musculaire progressive la plus

réquente chez l’enfant avec une évolution inexorable, pro-ressive conduisant au décès dans la troisième décennie3]. L’incidence de la dystrophie musculaire de Duchennest évaluée à 1/3500 naissances mâles au pays de Galles.es données sont confortées par celles de la base de Ley-en, avec une prévalence de 23,7/100 000 naissances mâles1/4213) [4]. La transmission est récessive liée à l’X aveceux tiers de mère transmettrice. Le gène de la dystro-hine est localisé en Xp21. C’est le plus grand gène connu,dentifié en 1987. Il correspond à environ 1 % du génomet de 1 à 5 % du chromosome X, 90 % du gène est composé’introns et la séquence codante de 86 exons comprend septéquences promotrices liées aux premiers exons. L’absenceomplète de la protéine musculaire conduit à un phénotypeuchenne, alors que la présence de dystrophine en quantité

nsuffisante ou tronquée produit les formes intermédiairesu les variantes de myopathies de Becker. L’amélioratione la survie est liée à l’amélioration de la prise en chargerthopédique, au dépistage précoce des complications car-iaques et respiratoires mais aucune thérapeutique curative’est applicable à ce jour.

La description clinique évolutive dans quelques grandeséries confirme les grandes caractéristiques cliniques dea DMD [5—6]. Les constantes néonatales sont normales,insi que le développement staturopondéral initial. Sur uneérie de 283 DMD avec un suivi de deux à dix ans, uneétérogénéité clinique est indiscutable en termes de forceusculaire mais aussi de fonction cardiaque et respiratoire

5]. La série de la base de Leyden porte sur 473 DMD nésntre 1961 et 1982 [4]. Le diagnostic est plus précoce quand’enfant a un retard psychomoteur global témoignant d’unetteinte cognitive (4,6 vs 5,8 ans). Les principaux symptômesonduisant au diagnostic étaient : le retard moteur (31,7 %),es chutes fréquentes (8,7 %), la marche tardive (6,8 %),e retard psychomoteur (5,7 %), la difficultés à monter lesarches (3,4 %), la faiblesse musculaire (2,6 %), l’hypotonie

2,3 %), les CK élevées dans un contexte familial évocateur1,5 %) et de découverte fortuite (1,2 %). Notre expérienceur une série de 75 patients suivis régulièrement sur dix ansst la même avec une perte de la marche vers 10,6 ans enoyenne [7]. Les trois principales causes du décès sont car-iaques (30 %), insuffisance respiratoire (25 %) et infectionulmonaire (18,6 %).

L’évolution motrice des patients dans cette pathologieose bien l’ensemble des problèmes et décision théra-eutiques auxquelles sont confrontés les médecins danses maladies neuromusculaires de l’enfant. Entre troist six ans, la marche est en hyperlordose, dandinantet le signe de Gowers apparaît témoignant du déficitusculaire pelvien. Entre six et 11 ans, la force musculaire

u niveau des ceintures décroît de facon quasi linéaire avecne atteinte symétrique mais prédominante dans certains

uscles conduisant à des déséquilibres et des rétractions

endineuses asymétriques. Des rétractions au niveau deséchisseurs de hanches et tendons d’Achille s’installentarfois avant six ans, toujours entre six et 11 ans [5]. La

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lmmais leur diagnostic repose sur la même stratégie d’analyse

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erte de la force musculaire n’est pas corrélée de faconinéaire à la perte de fonction, telle que la montée des esca-iers avec ou sans aide, la distance de marche, le relevée la position assise à debout [6]. La prise en charge desétractions tendineuses des membres inférieurs reste dif-cile et contestée sur certains points. L’usage d’orthèsese nuit, mollets plantes ou cruropédieuses est préconiséar certaines équipes dès le début de l’enraidissement duendon d’Achille. Pour d’autres, les orthèses sont unique-ent indiquées de jour pour permettre une marche aidée

orsque la force musculaire décroît ou l’usage de sériee plâtre réducteurs en cas de rétractions modérées. Lesénotomies des membres inférieurs lors de rétractions desendons d’Achille, des fléchisseurs de hanches ou des ten-eurs du fascia lata ne permettent pas de reprendre unearche perdue mais sont proposées par certaines équipes

près la perte de marche pour éviter le bassin oblique etermettre de poursuivre une verticalisation passive [7—8].a scoliose est quasi constante. Sur une série anglaise de23 DMD, dont un sur trois était sous corticoïdes, 77 % desatients avaient une scoliose avec un angle supérieur à0◦ à un âge moyen de 12 ans. Seuls 50 % d’entre eux ontté arthrodésés et la survenue de la scoliose est corré-ée à l’âge de perte de marche [9]. Pourtant, la prisen charge chirurgicale améliore la durée et la qualité deie des patients de facon indiscutable, ainsi que la fonc-ion respiratoire si elle est réalisée au bon moment avantne déformation orthopédique trop importante et avec uneonction respiratoire (capacité vitale [CV] > 1 L) et cardiaquencore préservée (fraction d’ejection du ventricule gaucheFEVG] > 50 %) [10]. En France, le choix de l’arthrodèse duachis entre 12 et 15 ans est quasi systématique [7].

L’atteinte des muscles respiratoires est la cause princi-ale du décès en l’absence de prise en charge. L’atteintees muscles respiratoires ne s’exprime sur le plan cliniqueue tardivement, après 12 ans en moyenne, alors qu’elle estrécoce si on analyse finement la physiologie et la capacitée travail des muscles expiratoires. La surveillance et lesrises en charge respiratoires proposées sont assez standar-isées. L’existence d’une CV inférieure à 680 mL expose àn fort risque d’hypercapnie nocturne et nécessite donc unupport ventilatoire nocturne [11]. L’usage de la ventilationon invasive (VNI) chez les patients atteints de DMD a for-ement amélioré la survie des patients de l’ordre de dix ans11] et encore davantage si le patient a été arthrodésé [12].es équipes anglo-saxonnes, en particulier celle de Bach,ont en revanche très hostiles au support ventilatoire surrachéotomie qui est proposé chez les patients atteints deMD en France dès que l’autonomie ventilatoire du patientst inférieure à six heures sur 24 heures [13].

L’atteinte cardiaque dans la myopathie de Duchenne estien connue, souvent asymptomatique jusqu’à 15 ans. Dans’expérience francaise, des anomalies plus précoces sontdentifiées à l’échographie cardiaque sur la cinétique duentricule gauche et en scintigraphie myocardique avantême l’âge de dix ans dans 20 % des cas [9]. Un traitementréventif par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC)st préconisé dès l’âge de dix ans chez les patients DMD et

méliore la survie à long terme [9].

La nutrition pose deux différents types de questions chezes patients DMD. Il est tout d’abord nécessaire de se réfé-er aux courbes spécifiques établies pour les enfants DMD.

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I. Desguerre, C. Barnerias

n outre, 40 % des patients DMD développent une obésité enehors de toute prise de corticoïdes, avant l’âge de 12 ans ete la perte de la marche que cette prise de poids précipite14], sans explication physiologique ou hormonale à ce jour.ar ailleurs, après 18 ans, 44 % des DMD sont dénutris mêmen tenant compte de la fonte musculaire dans les calculs desndices de masse corporelle avec des difficultés de mastica-ion et déglutition au premier plan qu’il est nécessaire derendre en charge.

L’atteinte cognitive dans la DMD reste encore malomprise. L’absence ou la diminution des transcrits de laystrophine dans le système nerveux principalement danses dendrites des cellules pyramidales du cortex et de’hippocampe, ainsi que dans les cellules de Purkinje duervelet, conduit à des déficits cognitifs variables. Depuisa description initiale de Duchenne en 1868, un déficit cog-itif a été mis en évidence avec un QI moyen de 85 chez lesatients, avec 30 % des patients présentant un QI inférieur70. Il existe une dissociation des QI verbal et performancen faveur du QI performance, contrairement à ce qui pour-ait être attendu (différentielle de cinq à huit points) [15].lle rend plus complexe l’intégration scolaire et les projetsrofessionnels.

La prise en charge pluridisciplinaire de cespatients paraît donc indispensable et reconnue

par toutes les équipes [16].

Elle a permis, en particulier grâce au suivi orthopédique,ardiaque et respiratoire, d’améliorer la survie des patientsais aussi la qualité de vie [11]. Les équipes francaises

ssurent depuis 15 à 20 ans ce type de suivi pluridisciplinaireoordonné et de ce fait ont acquis une expérience dans larise en charge des patients DMD assurant une meilleureurvie à long terme dans un état orthopédique, respiratoireardiaque plus satisfaisant [7].

Il n’existe pas à ce jour de traitement spécifique dea DMD mais différents essais hormonaux, immunosuppres-eurs et pharmacologiques ont été réalisés. L’expériencees pays anglo-saxons a conduit à proposer une corticothé-apie systématique au long cours à la dose de 0,75 mg/kgar jour pour la prednisone ou 0,9 mg/kg par jour pour leéflazacort assez précocement (> 6 ans). Le bénéfice prin-ipal invoqué est un gain sur l’âge de perte de marchee deux ans en moyenne selon les équipes [17]. Le main-ien des corticoïdes après la perte de marche dépend de’expérience des équipes qui soulignent un bénéfice sur laonction respiratoire, l’installation de la scoliose et mêmeour certains, beaucoup plus controversé sur la cardiomyo-athie. Les effets secondaires sont bien sûr surveillés aulus près mais inévitables : cataracte, ostéopénie, obésité,iabète et hypertension artérielle [17].

Les autres dystrophies musculaires progressives de’enfant sont beaucoup plus rares (sarcoglycanopathies,yopathies facioscapulo-humérale), voire exceptionnelles

e la biopsie musculaire (analyse des protéines parmmuno-histochimie et Western blot). D’autres dystrophiesusculaires progressives de l’adulte peuvent avoir un débutans la seconde décade, comme les déficits en calpaine

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Maladies neuromusculaires et médecine palliative chez l’en

(myopathie des ceintures, les déficits en dysferline avecune atteinte à prédominance distale, les déficits en cavéo-line avec des phénomènes de rippling très évocateurs. Ellesnécessitent le même type de prise en charge.

Certaines situations critiques méritentd’être soulignées

La discussion en réanimation

La discussion en réanimation de la poursuite du projetthérapeutique peut se poser à différents moments. Enpériode néonatale, l’absence d’autonomie ventilatoire sansperspective future d’amélioration de l’autonomie motriceet respiratoire (myopathie myotubulaire ou némaline), laconnaissance d’une atteinte cognitive sévère associée àl’atteinte motrice (dystrophie musculaire congénitale avecmalformations cérébrales associées, dystrophie myotoniquede Steinert congénitale) avec un diagnostic précis conduira àdiscuter un arrêt des thérapeutiques invasives et un accom-pagnement palliatif. Lors de décompensation respiratoireaiguë chez un enfant lourdement handicapé sans pers-pective d’amélioration ou de récupération de l’autonomierespiratoire, la décision d’intubation puis de trachéoto-mie sans possibilité de support ventilatoire non invasif vaconduire à une réflexion multidisciplinaire et éthique. Ilest important que cette situation ait été anticipée avec lesparents et l’enfant pour éviter une prise de décision dansl’urgence souvent dramatique.

L’assistance ventilatoire reste la décision laplus emblématique des choix thérapeutiques qui

se posent dans les maladies neuromusculairesévolutives.

La mise en place d’une VNI, de plus en plus préconiséedoit être expliquée à l’enfant et à la famille. L’éducation estfondamentale pour assurer la réussite et une adhésion à ceprojet contraignant. Les études s’accordent pour dire quela mise en place d’une VNI, gérée de bonnes conditions, encas d’insuffisance respiratoire sévère ou de pneumopathiesrépétées améliore la qualité de vie, la survie et diminue lenombre des hospitalisations [11—12]. En revanche, la déci-sion d’assistance ventilatoire sur trachéotomie reste plusproblématique à gérer et il n’existe pas de consensus inter-national [13]. En France, la décision est prise au cas par casaprès discussion éclairée avec la famille car cette décisionmodifie souvent les modalités de scolarisation et d’insertionsociale de l’enfant et donc son projet de vie.

La décision d’alimentation entérale surgastrostomie

La décision d’alimentation entérale sur gastrostomie est une

décision qui est plus simple à gérer. Elle est prise à des âgesdifférents (nourrisson en cas d’ASI ou MC, adolescent en casde DMD), peut être transitoire pour encadrer une périodeopératoire et complémentaire d’une alimentation orale sila déglutition le permet. Elle s’inscrit dans un projet global

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t ne signe pas obligatoirement une perte d’autonomie duatient. Elle nécessite toutefois une éducation des parentsar elle va être gérer à domicile ensuite [2].

a décision d’un geste opératoirerthopédique

es gestes orthopédiques proposés sont le plus souventalliatifs et non curatifs. Ils visent à réduire une défor-ation orthopédique et à assurer à l’enfant le confort

t l’autonomie motrice optimale en tenant compte de’évolutivité de sa maladie. Il est donc très important’expliquer à l’enfant et aux parents la finalité de la chi-urgie qui sera encadrée par un passage en réanimationarfois et une rééducation longue. Le choix du moment tien-ra compte de la nécessité chirurgicale mais aussi de l’étatsychologique de l’enfant et de son projet.

eux études différentes illustrent bienotre propos sur la prise de décision

ne enquête francaise rétrospective multicentrique portantur la prise en charge de 106 enfants atteints d’amyotrophiepinale type 1 sur la période de 1989—1999 permet d’illustrera problématique mais aussi les questions qui restent enuspens. Le délai court entre l’âge moyen du diagnosticquatre mois) et l’âge moyen du décès (sept mois) rend dif-cile la mise en place de structure type HAD (<25 %). Leait que le lieu et l’âge du décès soient inconnus dans 25 %es cas montrait le drame de l’annonce du diagnostic et’un pronostic sévère avec une rupture avec l’équipe qui annoncé le diagnostic. Le lieu du décès confirmait que lehoix de soins palliatifs sans passage en réanimation a étéhoisi le plus souvent : domicile (18 %), hôpital pédiatrique45 %), réanimation (11 %). Les modalités de prise en chargetaient peu invasives mais le confort n’était pas privilégiée facon évidente : gavage (27 %), aspiration (33 %), gastro-tomie (3 %), trachéotomie (2 %), appareillage de confort21 %) et sédation ou morphiniques (15 %). Cette premièrenalyse des données a permis d’améliorer les pratiques’accompagnement et une nouvelle évaluation est en coursur la période de 1999 à 2009.

L’expérience danoise dans la myopathie de Duchenne aontré l’amélioration indiscutable de la survie après la mise

n place de la VNI chez les adolescents DMD ( + dix ans)t surtout de la qualité de vie. Cette enquête montre enffet de jeunes adultes sévèrement handicapés mais aveces projets de vie, une organisation autonome de vie parapport à leur famille et des activités sociales privilégiéest rendues possibles grâce à l’intervention de services occu-ationnels dédiés. Il est donc important lorsqu’on évoque lesoins palliatifs chez ces patients DMD de bien comprendre laimension humaine et de projet de vie et non de fin de viebligatoirement [11].

La définition des soins palliatifs dans les maladies neu-

omusculaires dans les différents pays (États-Unis, Granderetagne, Canada, France) est différente. Un groupe deravail réunissant différentes équipes impliquées dans lesaladies neuromusculaires a permis d’identifier les points

ommuns mais aussi les divergences en termes de définition,

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oyens et organisation de santé dans les différents pays. Desriorités et un consensus se sont dégagés et correspondentux différents aspects que j’ai évoqués précédemment. Desuides de prise en charge ou standard care sont en cours’élaboration ou publiés, même si la place des soins pallia-ifs n’y est pas clairement définie [1,2,16].

onclusion

’évolution des pathologies neuromusculaires chez l’enfantur plusieurs années ou dizaine d’années nécessite unéel projet qui ne peut être uniquement palliatif au sensestrictif du terme. Le bénéfice d’une prise en chargeultidisciplinaire a amélioré l’espérance de vie et la qua-

ité de vie de ces enfants dans les 15 dernières annéese facon significative. L’absence de mesures préventivesrthopédiques, nutritionnelles aboutit à une dégradationajeure du confort de vie de l’enfant : dénutrition, luxa-

ion de hanches, scoliose, insuffisance respiratoire. La prisen charge de ces patients doit donc être multidisciplinaire,palliative ou supportive » et réadaptée au fur et à mesuree l’évolution de la pathologie en collaboration avec lesarents et l’enfant.

onflit d’intérêt

ucun.

éférences

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