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SOMMAIRE LES SOINS PALLIATIFS EN FRANCE 1 Allocution d’ouverture 1 Jean-François MATTEI Ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées Prospective en soins palliatifs : besoins nouveaux 1 Dr Daniel d’HEROUVILLE Président de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) Résultats de l’enquête 2002 réalisée auprès des ARH 8 Dr Aude Le DIVENAH Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) Projection du film de la Fondation de France Vieillir et mourir accompagné, grand âge et soins palliatifs 10 Développer une culture de l’accompagnement 11 Marie de HENNEZEL Psychologue clinicienne, chargée de la Mission « fin de vie et accompagnement » Le comité de suivi du programme national de développement des soins palliatifs et de l’accompagnement 2002-2005 13 LES SOINS PALLIATIFS À L’ÉTRANGER : HISTORIQUE, POLITIQUES ET PRATIQUES PROFESSIONNELLES 21 Les recommandations du comité d’experts du Conseil de l’Europe sur l’organisation des soins palliatifs (2000-2002) 21 Dr Dick WILLEMS Professeur d’éthique médicale à l’université d’Amsterdam Les soins palliatifs en Angleterre 24 Avril JACKSON Information office, St Christophers’s Hospice, Londres Les soins palliatifs en Belgique 28 Dr Marianne DESMEDT Clinique Universitaire Saint Luc, Bruxelles L’Association européenne de soins palliatifs (EAPC) 32 Dr Marilène FILBET EAPC Le projet OMS de soins palliatifs en Catalogne : résultats à dix ans 33 Dr Xavier GOMEZ-BATISTE Institute Català d’Oncologia, l’Ospitalet Barcelone

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SOMMAIRE

LES SOINS PALLIATIFS EN FRANCE 1

Allocution d’ouverture 1Jean-François MATTEIMinistre de la santé, de la famille et des personnes handicapées

Prospective en soins palliatifs : besoins nouveaux 1Dr Daniel d’HEROUVILLEPrésident de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP)

Résultats de l’enquête 2002 réalisée auprès des ARH 8Dr Aude Le DIVENAHDirection de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS)

Projection du film de la Fondation de FranceVieillir et mourir accompagné, grand âge et soins palliatifs 10

Développer une culture de l’accompagnement 11Marie de HENNEZELPsychologue clinicienne, chargée de la Mission « fin de vie et accompagnement »

Le comité de suivi du programme national de développement des soins palliatifs et del’accompagnement 2002-2005 13

LES SOINS PALLIATIFS À L’ÉTRANGER : HISTORIQUE, POLITIQUES ET PRATIQUESPROFESSIONNELLES 21

Les recommandations du comité d’experts du Conseil de l’Europe sur l’organisation des soinspalliatifs (2000-2002) 21Dr Dick WILLEMSProfesseur d’éthique médicale à l’université d’Amsterdam

Les soins palliatifs en Angleterre 24Avril JACKSONInformation office, St Christophers’s Hospice, Londres

Les soins palliatifs en Belgique 28Dr Marianne DESMEDTClinique Universitaire Saint Luc, Bruxelles

L’Association européenne de soins palliatifs (EAPC) 32Dr Marilène FILBETEAPC

Le projet OMS de soins palliatifs en Catalogne : résultats à dix ans 33Dr Xavier GOMEZ-BATISTEInstitute Català d’Oncologia, l’Ospitalet Barcelone

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Les soins palliatifs en Italie 35Dr Michele GALLUCIUnité de soins palliatifs et prise en charge de la douleur, Hôpital de Desio

L’expérience du Québec 36Dr Serge DANEAULTUnité des soins palliatifs, hôpital Notre-Dame, Centre hospitalier de l’université de Montréal

Questions 39

Conclusion 41Dr Henri DELBECQUEDirecteur du Comité de suivi

Clôture 42Edouard COUTYDirecteur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS)

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 1

Les soins palliatifs en France

Allocution d’ouverture

Jean-François MATTEIMinistre de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées

Mesdames, Messieurs, ce qui nous réunit aujourd’hui est grave. Ce qui nous engage chacun d’entre nous,et moi comme vous. Le Ministre de la Santé n’a pas de primauté morale, il n’a pas à imposer sesconditions, cependant il me semble que je suis, dans ce rôle, le garant de la qualité du débat dans notresociété sur l’accompagnement de la fin de vie. Je suis d’autre part chargé de l’allocation des ressourcesdans le système de santé, c’est au fond ces deux aides : débat social d’une part et des moyens d’autre partque je voudrais aborder avec vous.

Le débat public sur la santé au sens large fait partie intégrante de ma conception de la santé publique. Et là,je tiens à saluer les organisateurs de cette journée, qui ont conjugué leurs efforts pour faire intervenir desexperts européens et je remercie nos invités étrangers de venir s’associer à nos réflexions. Je crois àl’apport du partage d’expérience pour faire avancer nos réflexions sur des sujets difficiles, analyser etpartager des solutions innovantes et indispensables pour que le débat reste en permanence de qualité.

Beaucoup d’entre vous savent, vous venez de le rappeler, que ce sujet -les soins palliatifs, me tientparticulièrement à cœur car il touche au plus profond du métier de tout soignant et au plus profond de lacondition humaine.

Le développement des soins palliatifs en France résulte avant tout d’un engagement du plan social etnotamment du mouvement associatif et professionnel avant celui des pouvoirs publics, il faut avoirl’honnêteté de le reconnaître dans quel rôle de pionnier a tenu le Sénateur Lucien NEUWIRTH dans ledomaine de la lutte contre la douleur, puis dans le développement des soins palliatifs, je pense égalementau docteur Henri DELBECQUE qui est à l’origine d’un premier rapport sur les soins palliatifs dès 1993 etqui coordonne encore aujourd’hui le Comité de Suivi du Programme National de Développement desSoins Palliatifs.

La mort devient pour notre société et pour chaque homme un sujet de préoccupation majeure dont lesdimensions métaphysiques rejoignent la crainte des épreuves infligées au corps. En résumé, la conditionhumaine, c’est toute cette réflexion qui nous est suggérée, les oppositions, les solutions extrêmes relèventsemble-t-il du divorce entre la conscience de plus en plus affirmée de la dignité de la personne et laméconnaissance de la mort. Nous avons peu à peu désappris la mort, elle a déserté nos foyers comme siavant que d’être mort, le mourant n’était déjà plus vivant.

En 1976, le Conseil de l’Europe, qui a poursuivi en 1998 sa réflexion sur la fin de vie, se déclaraitconvaincu que les mourants doivent mourir dans la paix et la dignité et si possible avec le réconfort et lesoutien de leur famille et de leurs amis. Et il ajoutait que la prolongation de la vie ne doit pas être en soi le

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but exclusif de la pratique médicale, mais doit viser avant tout à soulager les souffrances. C’est bien le sujetqui nous rassemble.

Cette dignité dont je parlais, est inhérente à l’existence de tout être humain, et si sa possession était due àdes particularités ou à une condition quelconque, la dignité ne serait pas également et universellement lepropre de tous les êtres humains. L’être humain est donc investi de dignité tout au long de sa vie. Ladouleur, la souffrance, la faiblesse ne peuvent l’en priver.

La dignité d’une personne ne peut pas lui être conférée ou lui être retirée, le respect qu’elle impliquen’appelle d’ailleurs pas de réciprocité concrète dans le cas par exemple des malades dans le coma. Croireque la dignité humaine peut être divisée ou encore limitée à certains stades ou état serait une certaine formede mépris à son égard.

L’obligation de donner l’accès aux soins palliatifs découle de cette prise de conscience que la dignitéhumaine est imprescriptible.

Une étape fondamentale a été franchie en juin 1999 par le vote à l’unanimité au Parlement d’une loi sur lessoins palliatifs. Cette loi affirme « le droit à toute personne malade dont l’état le requière d’accéder à dessoins palliatifs » et elle définit les conditions d’exercice de cette mission.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les soins palliatifs constituent « l’ensemble des soins actifsdonnés aux malades dont l’affection ne répond pas au traitement curatif. La lutte contre la douleur etd’autres symptômes comme la prise en considération de problèmes psychologiques, sociaux et spirituelssont primordiales. Le but des soins palliatifs est d’obtenir la meilleure qualité de vie possible pour lesmalades et leur famille. »

Et je redis ces mots que vous connaissez car ils doivent pénétrer en nous et nous animer. C’est dire que lessoins palliatifs constituent une approche holistique de l’être humain dans toutes ses dimensionspsychologiques et physiques.

Sur le plan de la politique de santé, un des objectifs majeurs est d’assurer à la population des soins palliatifsde qualité et appropriés. D’avantage encore, le degré d’humanité d’une société se juge au moins autant parles soins prodigués aux faibles et aux mourants que par d’autres réalisations souvent plus techniques et plusprestigieuses.

Un premier plan de développement des soins palliatifs a couvert la période 1999-2001 à l’initiative de monprédécesseur, il a permis de créer et de développer une culture de soins palliatifs à la fois chez lesprofessionnels de santé et dans le public, tenter ainsi d’améliorer la capacité de réponses. Les testsprincipaux ont été de recenser et de majorer l’offre de soins palliatifs en tendant à réduire les inégalitésentre les régions, de développer la formation de professionnels et l’information du public, d’avancer unprocessus de soutien aux soins palliatifs et en accompagnement à domicile.

Ce plan a été d’abord essentiellement consacré au développement des équipes mobiles et des unités desoins palliatifs, c'est-à-dire la création de structures nouvelles ou le renforcement des structures existantes.

L’offre de soin répartie sur l’ensemble du territoire s’est développée et son bilan nous sera présenté par laDirection de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins.

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Parallèlement, la Caisse Nationale d’Assurance Maladie a contribué au développement de soins palliatifspar le biais de son Fonds National d’Action Sanitaire et Sociale, le FNASS qui a permis de financer desactions de formations de bénévoles à l’accompagnement des personnes en fin de vie, et la rémunérationdes gardes-malades à domicile.

L’enseignement des soins palliatifs enfin s’est enrichi d’un module intitulé « Douleur, soins palliatifs etaccompagnement » est maintenant organisé dans le cadre du deuxième cycle des études médicales. Il y a24 diplômes universitaires qui forment chaque année 850 professionnels de disciplines différentes. Uncertain nombre de réseaux ont organisé la formation de leurs membres, en ce qui concerne les personnelshospitaliers, douleur et soins palliatifs figurent parmi les axes prioritaires des programmes de l’AssociationNationale de Formation des Hospitaliers.

Malgré cette avancée notable, il persiste encore de nombreux points d’amélioration que je souhaite inscriredans le nouveau programme national 2002, 2005, m’inscrivant ainsi dans la continuité d’une politiquenécessaire pour le développement des soins palliatifs. Trois points sont particulièrement soulignés :

1- l’offre de soins,

2- l’amélioration des pratiques professionnelles,

3- la sensibilisation et l’information de l’ensemble de notre société.

Chaque département doit disposer d’une offre en soins palliatifs dans les 4 années qui viennent. Au-delàdes structures hospitalières, je souhaite que se développe, conformément au souhait du personnel, la priseen charge des soins palliatifs au domicile, ou dans le lieu de vie habituelle. Vous le savez bien, alors que 75% des Français meurent à l’hôpital, plus de 70 % d’entre eux affirment vouloir mourir chez eux.

Les pratiques professionnelles si elles se sont déjà beaucoup améliorées doivent encore évoluer. Lesrecommandations de nos pratiques cliniques sont en cours d’explications par la NESS sur les soinspalliatifs. Elles seront largement diffusées début 2003 et devraient contribuer à réviser les pratiques dans cedomaine.

La sensibilisation et l’information du corps social sur les soins palliatifs et l’accompagnement constituent unautre axe d’amélioration de ce programme 2002-2005. Il vise à réhabiliter sociologiquementl’accompagnement des personnes qui vont mourir, et à clarifier la connaissance des professionnels et dupublic sur les différents services existants en matière de soins palliatifs et d’accompagnement.

Plusieurs actions sont en cours, notamment la désignation du centre François-Xavier LANOUX à lafonction de Centre National de Ressources, ce centre devrait ainsi contribuer à l’amélioration desconnaissances par la mise à disposition d’un service de documentation multimédia, l’aide à la recherche, laconduite d’actions et de formations exemplaires.

Le troisième axe du programme rejoint la mission que j’ai confiée à Marie DE HENNEZEL sur ce thème.

Il faut s’avoir s’interroger sur la manière dont elle considère la maladie et la mort. Il est primordial deprendre le temps nécessaire pour que ce débat aborde l’ensemble des questions et permette de prendre encompte la diversité des situations relatives à la fin de la vie.

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Accompagner le mourant jusqu’à ses derniers moments, apaiser ses souffrances, assurer jusqu’au bout laqualité d’une vie prenant fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage sont desobligations déjà inscrites dans le code de déontologie médicale.

Mais la loi du 4 mars 2002 vient renforcer ces dispositions encore en indiquant qu’ « aucun acte médical niaucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ceconsentement peut être retiré à tout moment », « quand la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté,aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée sauf urgence ou impossibilité, sans que lapersonne de confiance ou la famille ou à défaut un de ses proches ait été consulté ».

Voilà ce que dit le texte, il faut qu’il soit clair qu’il n’y a pas de limites à l’utilisation d’antalgiques et desédatifs dès lors qu’ils s’avèrent nécessaires pour soulager la personne au seuil de sa mort, même si cesoulagement accélère le moment de la mort.

Nous connaissons bien ce double effet, mais il ne faut pas cacher la difficulté de ces situations-là àaccompagner les gens à la fin de leur vie et sans l’intention de hâter leur mort, mais l’intention d’abord deles soulager. D’abord de faire en sorte qu’ils soient bien, sans cependant qu’ils anticipent leur mort non pasparce que la douleur physique ou psychique peut maîtriser le moment de leur mort, mais parce qu’ellesveulent en décider le jour. Cette demande ne rentre pas dans le cadre escompté.

La réponse à cette demande, en donnant délibérément la mort, reste un acte illégal. Cependant, il mesemble que la demande d’euthanasie n’est jamais que l’expression ultime et désespérée du refus de lasouffrance, de l’abandon et de la solitude. Si notre société accordait tout aux soins palliatifs et àl’accompagnement des mourants, nul doute que la demande d’euthanasie perdrait de sa légitimité.

C’est pourquoi de mon point de vue, il n’y a pas lieu de légiférer sur l’euthanasie quand l’urgence est demieux répondre à la nécessité d’accompagner le départ.

Le soulagement et l’accompagnement des personnes en fin de vie exigent une écoute et une évaluation dessituations au cas par cas. En concertation avec les membres de l’entourage et l’ensemble de l’équipe, leséquipes médicales non seulement à l’hôpital comme en ville doivent être formées, soutenues, dans cettetache difficile. Seule une diffusion des bonnes pratiques dans ce domaine permettra de supprimer lespratiques clandestines et illégales, qui parfois d’ailleurs sont le fruit du désespoir. Tel est le sens de lamission que j’ai confiée à Madame de HENNEZEL.

J’insiste sur l’importance de l’équipe pluridisciplinaire, aucun être humain ne peut affronter seul une chargeémotive aussi forte dans un cadre professionnel. C’est un travail d’équipe, un travail qui se transmet par laprofondeur humaine, c’est ça le sentiment de notre accompagnement. Bien évidemment, je serai à l’écoutede toutes les suggestions qui ont trait à la mobilisation de tous ceux qui sont ici nombreux, à tel point qu’il afallu changer de lieu, si j’ai bien compris.

Je tiens à rendre hommage à votre courage, à votre dévouement, à votre engagement dans cette cause.

Je vous assure, tout au long de ces journées de pratiques innovantes, issues d’expériences européennes,d’expériences canadiennes, soyez assurés que je me tiendrai personnellement informé du contenu de cestravaux. Au sens que la mission que j’aie confiée à Madame de HENNEZEL à côté des soignants de

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formations, il y a tous ces bénévoles qui eux aussi s’engagent et ont besoin d’être formés. Je peux vousdire que ce sujet est essentiel à bien des égards.

Tout à l’heure dans votre propos introductif, vous avez volontairement sans doute fait allusion à l’autrerepère de formation professionnelle qui est le début de la vie. On voit bien que ce qui anime aujourd’hui ledébat de la société, c’est d’une part l’acharnement procréatif et de l’autre côté la tentation de maîtriser lamort, d’occulter la vie et de maîtriser la mort. Notamment parce que ces deux périodes sont dans un douteet dans une incertitude insupportable pour une société qui a besoin de réponses carrées, qui est dans uneréférence technique permanente, et ce qui est flou, ce qui est incertain, ce qui est ambigu parfois estinsupportable. Il y a la tentation de dominer les choses, y compris sa vie et y compris la vie au début et à lafin. Je suis convaincu pour ma part que quels que soient les progrès techniques, quels que soient lesprogrès de la biologie, quels que soient les progrès de la science, c’est dans la condition humaine que detoujours s’interroger, sur le moment où on a commencé d’exister et sur le moment où on va cesserd’exister, et que ces questions sont pour nous existentielles au sens vrai du terme. Et qu’en définitive, envoulant tenter d’y apporter des réponses précises, en grignotant au début et en grignotant à la fin, j’allaisdire que c’est l’essentiel de notre humanité qu’on tente de dominer. Et les questions métaphysiques quisont même le propre de l’homme se conçoivent parce que ces débats sont en permanence récurrents dansune société en quête européenne. Dès qu’une société perd ses repères et ses valeurs, on voit bien qu’elles’approche des questions de la vie et de la mort en essayant de l’imposer pour se rassurer. Je peux vousdire, que si j’avais le sentiment que ma vie était clairement définie au début et maîtrisée à la fin, j’aurais lemême sentiment d’humanité car c’est à la fois cette solitude et cette infinitude qui fondent notre dignité etpar conséquent personne n’a le droit en agissant sur la fin de la vie de porter atteinte à cette dignité quinous échappe.

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Prospective en soins palliatifs : besoins nouveaux

Dr Daniel d’HEROUVILLEPrésident de la Société française d’accompagnement

et de soins palliatifs (SFAP)

Depuis quinze ans, les soins palliatifs ont connu une évolution considérable mais nous devons restermobilisés et vigilants car beaucoup reste à faire.

I. Développer les moyens des soins palliatifs

1. Les structures

Il est nécessaire de développer les soins palliatifs là où se trouvent les malades en tenant compte de ladiversité des situations : certains patients peuvent vouloir rester chez eux, d’autres préfèrent aller eninstitution et il existe des réponses différentes selon les régions ou les départements. Nous devons ainsiveiller à la complémentarité des différentes offres de soins palliatifs.

Plus précisément, concernant la prise en charge à domicile, la reconnaissance des libéraux et ledéveloppement du travail en équipe me semblent essentiels. La prise en charge en institution est mieuxdéfinie grâce à la circulaire du 19 février 2002 mais des précisions doivent être apportées.

2. Les acteurs

Il est indispensable de prendre en compte tous les acteurs. Il faut, d’une part, aider les bénévoles àdévelopper une dynamique propre en renforçant leur appartenance associative et en évitant leurinstrumentalisation par les professionnels et, d’autre part, faciliter l’implication de l’entourage grâce, parexemple, à l’instauration d’une allocation pour le congé d’accompagnement.

II. Retravailler sur les besoins

Les rapports, les études et la prise en compte des expériences menées à l’étranger permettent d’objectiverà nouveau les besoins pour définir une politique globale. Un travail en amont de la politique est doncnécessaire pour définir les champs d’intervention des soins palliatifs.

1. Les patients concernés par les soins palliatifs

Le nombre de demandes de soins palliatifs est croissant et de plus en plus de professionnels y recourent.Dans ce cadre, il convient de préciser la population concernée.

• Les personnes âgées sont rarement prises en compte quand elles n’ont pas de cancer.• Il manque une prise en charge spécifique pour les maladies neurologiques.

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 7

• Les personnes qui n’ont pas de lieu d’accueil sont parfois laissées pour compte.

2. Quelles sont les pathologies à prendre en compte ?

Les réponses données par les soins palliatifs ne sont pas toujours adaptées aux spécificités. Il convient dedifférencier :

• les personnes avec un handicap ;• les personnes atteintes de maladie chronique ;• les personnes atteintes de maladie grave ;• les personnes en fin de vie.

Ces aspects ne sont pas nouveaux mais ils ressurgissent aujourd’hui de manière criante. En particulier, ilexiste de nouveaux besoins en pédiatrie, réanimation, cancérologie.

III. Conclusion

Le développement des soins palliatifs et de l’accompagnement des malades suppose des initiatives localeset une politique nationale. A ce titre, le soutien du ministre me semble essentiel et l’action de la Direction del’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS), celle de la Direction générale de la santé et duComité de suivi favoriseront l’avancée des travaux.

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 8

Résultats de l’enquête 2002

réalisée auprès des ARH

Dr Aude Le DIVENAHDirection de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS)

Des crédits ont été délégués aux Agences régionales de l’hospitalisation pour faciliter le développementdes soins palliatifs. Une enquête annuelle permet d’évaluer l’utilisation de ces crédits en observantl’ensemble des structures existantes et les moyens humains affectés aux soins palliatifs. Cette enquêtedifférencie quatre types d’organisation.

I. Les équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP)

Il en existe aujourd’hui 291 contre 265 en 2001, soit une augmentation de 26 EMSP. Concernant lesmoyens humains, les EMSP mobilisent 1 073,60 équivalents temps plein (ETP), dont 254 ETP médicauxet 821,40 ETP non médicaux.

L’augmentation touche l’ensemble du territoire mais en valeur absolue, les régions apparaissent trèsinégalement dotées : l’Ile-de-France, avec 61 EMSP, est largement en tête devant les Pays-de-la-Loire,qui disposent de 20 EMSP ; le Limousin (3 EMSP) et la Corse (2 EMSP) sont les plus défavorisés.

La prise en compte des ETP des équipes mobiles pour 1 000 décès confirme en partie cette inégaledistribution : l’Ile-de-France, la région PACA, les Pays-de-la-Loire sont bien dotés alors que le Limousin,l’Auvergne, la Bretagne et la Corse ont peu de moyens humains.

II. Les unités de soins palliatifs (USP)

En 2001, il existait 92 USP, contre 91 cette année, un projet de création n’ayant pas abouti. Sur 1 198,08ETP, 109,56 sont médicaux et 1 088,52 non médicaux. L’absence de variation s’observe également àl’échelle régionale.

L’inégalité régionale est là aussi criante : alors que l’Ile-de-France dispose de 24 USP, cinq régions en sonttoujours privées, à savoir le Centre, le Languedoc-Roussillon, la Guadeloupe, la Guyane et la Réunion. Laprise en compte du taux de décès renforce le constat d’inégalité régionale.

La plupart des USP ont entre quatre et quinze lits.

III. Les lits identifiés

Le nombre de lits identifiés est passé de 232 en 2001 à 316 en 2002, soit une augmentation de 84 lits.Ceci montre qu’ils tendent à être appropriés par les services de soins des ARH.

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Les ETP correspondant sont au nombre de 74,96 répartis entre 4,18 médicaux et 70,78 non médicaux. Ilest donc essentiel de cibler du personnel soignant en effectifs conséquents.

Dans beaucoup de régions, les lits identifiés n’existent pas. Cependant, une telle absence ne traduit pasl’inexistence de soins palliatifs sinon la prédominance des lits USP et/ou des EMSP.

IV. Les réseaux de soins palliatifs

Ils étaient 38 en 2001 et sont désormais 46 : huit réseaux supplémentaires ont été créés et six réseaux sesont renforcés. Cependant, treize régions en sont encore dépourvues. Selon la circulaire de 2002, chaquedépartement devrait compter au moins un réseau de soins palliatifs en 2005.

V. Conclusion

Plusieurs constats se dégagent de cette étude :

• une augmentation globale de l’offre de soins palliatifs ;• une diversité du type et du niveau de l’offre selon les régions ;• le ralentissement de l’augmentation du nombre d’équipes mobiles ;• l’insuffisance en matière d’unités de soins palliatifs par rapport aux objectifs ;• la méconnaissance et le faible nombre des lits identifiés ;• le retard en matière de réseau de soins palliatifs.

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 10

Projection du film de la Fondation de FranceVieillir et mourir accompagné,

grand âge et soins palliatifs

I. Présentation du film

Thérèse DOSSIN, Fondation de France

Ce film s’inscrit dans un programme de développement des soins palliatifs soutenu par la Fondation deFrance. Il est conçu pour être un outil de sensibilisation et de formation destiné à l’ensemble des acteursdes soins palliatifs, en particulier les bénévoles, mais aussi au grand public.

Nous avons décidé de centrer le reportage sur les personnes âgées car il s’agit d’un domaine face auquelprédominent la méconnaissance ou l’indifférence. Ce film constitue également un hommage auxprofessionnels et aux bénévoles qui aident les personnes en fin de vie.

II. Projection du film réalisé par Carole Roussopoulos

Le film présente différents témoignages émanant aussi bien des personnes âgées que desprofessionnels ou bénévoles qui les accompagnent, comme ceux de l’Institut Jeanne Garnier ou desPetits frères des pauvres. Il met en perspective le rôle de chacun de ces acteurs et la perceptionqu’ils en ont.

Ainsi, les personnes âgées interrogées expriment généralement le désir d’être traitées en adultes.Quant aux familles, leur rôle d’aide vis-à-vis des professionnels est reconnu ; elles donnentégalement du sens à ce que vit le patient. Les médecins et les aides-soignantes témoignent de leursdifficultés face à la dégradation de l’état des patients, en particulier la perte de communicationverbale ; la mort est une réalité qu’ils côtoient sans cesse et avec laquelle ils doivent apprendre àvivre. Les bénévoles sont confrontés à cette même difficulté que les groupes de parole et lesformations peuvent aider à surmonter.

Enfin, l’indifférence de la société face aux « vieux » est à plusieurs reprises dénoncée par lespersonnes interrogées qui appellent à une évolution des mentalités : les changements doivent êtresanitaires mais aussi sociaux afin de parvenir à intégrer le vieillissement à notre parcours de vie.

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 11

Développer une culture de l’accompagnement

Marie de HENNEZELPsychologue clinicienne,

chargée de la Mission « fin de vie et accompagnement »

Au cours des nombreuses conférences auxquelles j’ai eu l’occasion de participer ces dernières années, j’airemarqué le besoin d’information et de sensibilisation de la population face à cette question : peut-onmourir, à l’hôpital ou au domicile, sans souffrir ou sans faire souffrir les siens ?

I. Le difficile travail des accompagnants

1. Les proches

Les familles se plaignent souvent d’être isolées et de ne pas trouver leur place à l’hôpital. Il est doncnécessaire de prendre des mesures pour que les familles puissent, par exemple, rester la nuit ou participer àla toilette du malade.

2. Les professionnels

Les médecins ont souvent un sentiment d’échec ou d’impuissance : ils se sentent démunis et sont soumisaux contraintes économiques de l’institution. Quant aux aides-soignants, leur rôle est insuffisammentreconnu, comme le montrent les témoignages des infirmières, qu’elles soient ou non libérales.

II. Sortir du malaise et du silence

Trop de personnes meurent dans la douleur et l’abandon, rendant le deuil particulièrement difficile pour lesfamilles. De plus, quand la charge du patient devient trop lourde, des demandes d’en finir sont parfoisexprimées par le patient, la famille ou les médecins.

Les raisons de cette insuffisance sont le manque de moyens techniques et humains mais aussi un manque deconfiance. En particulier, l’expérience des proches des malades est encore insuffisamment utilisée ettransmise car ceux-ci n’osent pas parler, non parce qu’il s’agit d’un sujet intime mais à cause du tabou quereprésente la mort, bloquant ainsi des échanges qui pourraient être fructueux.

Il s’agit de sortir du silence et du malaise, d’arriver à en parler pour briser la solitude des mourants. Telleest ma mission confiée par Jean-François Mattei.

III. Deux axes d’action et de réflexion

Nous souhaitons tous une fin paisible, entourés de respect et d’affection, ce qui suppose le développementd’une culture de l’accompagnement aussi bien dans la population que chez les professionnels de santé.

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1. La diffusion de la démarche palliative chez les professionnels de santé

La diffusion de la démarche palliative chez les professionnels de santé passe par le renforcement de laformation initiale et continue, par le développement des aspects techniques et humains et par la diffusion dela documentation sur les soins palliatifs afin de susciter la discussion au sein des équipes. Il s’agit dechanger le regard sur la mort. Un tel travail suppose de guider et soutenir psychologiquement lesprofessionnels confrontés à ces problèmes.

2. La resocialisation du mourir

Tant que notre société éludera la question de la mort, cette dernière restera l’échec de la médecine. Ilconvient donc de s’interroger sur la place de la mort dans notre vie en engageant une réflexion éthique etphilosophique.

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Le comité de suivi du programme nationalde développement des soins palliatifset de l’accompagnement 2002-2005

I. Présentation

Dr Henri DELBECQUE, Directeur du Comité

Après avoir présenté la composition du Comité de suivi, je préciserai ses missions et ses principesd’actions.

1. Les membres du Comité de suivi

Dans sa composition, le Comité de suivi reflète la diversité des acteurs impliqués dans les soins palliatifs.Ses membres sont issus de différents horizons :

• du Ministère de la santé, en particulier de la DGS, la DHOS, la DGAS et la DSS ;• de la CNAM ;• des professionnels de santé, dont les libéraux ;• des associations, comme la SFAP, l’UNASP ou la Fondation de France.

Au total, une quarantaine de membres se réunissent par commission. La complémentarité des compétencesau sein des différentes équipes nous a semblé essentielle pour assurer une continuité et une cohérence dansle suivi.

2. Les missions

Le plan quadriennal 2002-2005 est articulé autour de trois axes :

• les soins palliatifs à domicile ;• les soins palliatifs à l’hôpital ;• la sensibilisation de la société.

Dans chacun de ces domaines, le Comité a une triple mission.

a. Le recensement

Nous sommes avant tout un instrument de connaissance dont la mission est de fournir des donnéesprécises sur l’état et le développement des soins palliatifs en France. Afin d’effectuer ce recensement, nousdevons :

• définir des indicateurs simples, annuels, qui mettent en évidence les besoins et les résultats ;• faire le point sur les travaux existants et imaginer des études à mener ;

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• identifier les dysfonctionnements actuels ;• examiner les expériences et les avancées dans chaque région.

b. Les déplacements en région

Les contrastes entre les régions sont importants. Nous devons intervenir sur ce terrain pour encourager, enparticulier, le développement des équipes mobiles.

c. Informer, recommander, proposer

Une fois le recensement effectué, nous ferons part des résultats au Ministre, au public et aux médecins,ainsi que des recommandations et des propositions que nous jugerons adaptées.

3. Les principes d’action

Trois principes sous-tendent notre action.

• Premièrement, les principes de transversalité et d’indépendance visent à promouvoir un travail d’équipesans cloisonnements.

• Deuxièmement, le principe de non-substitution aux organismes nationaux existants signifie que nousagissons en interactivité avec ces derniers, dont nous sommes en quelque sorte les relais.

• Troisièmement, le principe d’évaluation périodique doit nous permettre de remettre en question notreintervention et de tirer les leçons des expériences passées.

Finalement, notre objectif est de passer de l’obscurité à la clarté, de la multiplication d’expériences isoléesà une stratégie cohérente, des incertitudes à la solidité et la pérennité des actions, des intentions à la réalité.Nous souhaitons faire présider la justice et l’équité dans la répartition des moyens et des ressources.

II. Groupe de travail « Domicile »

Dr Régis AUBRY

Je souhaite vous présenter les réalisations, les projets en cours et les perspectives d’action de notre groupede travail, en tâchant de n’être ni incantatoire ni irréaliste. Je tiens également à préciser que nous sommesdans une phase de création.

1. La formation des professionnels de santé

Plusieurs initiatives sont en cours de réalisation ou en projet.

• la formation pluridisciplinaire au travail en réseauCe projet sera financé par l’enveloppe réseaux mais d’autres contributions sont envisageables, commecelles des collectivités locales, du FAQSV et du PRS.

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• la formation des soignants aux soins palliatifsUn cahier des charges doit être réalisé sur ce sujet.

• la formation des bénévoles au domicile et au travail en réseauDans le cadre du FNASS, les crédits alloués à la SFAP pour ce type de formation seront prorogés.

• les personnels d’aide à domicileBien qu’ils soient insuffisamment pris en compte, ces acteurs sont essentiels car ils interviennent à lacharnière entre le social et le sanitaire, à un moment où ces deux sphères tendent à fusionner. Afin deles soutenir, nous réfléchissons à la revalorisation de leur fonction et à l’instauration d’une indemnisationdes gardes-malades pendant leur formation.

2. Les conditions particulières de rémunération des équipes à domicile

Le décret relatif aux conditions d’exercice des professionnels de santé délivrant des soins palliatifs àdomicile devrait être signé prochainement. Les soins et les dérogations seront pris sur l’enveloppe risquealors que la formation au travail en réseau et l’évaluation seront financées par la cinquième enveloppe.

3. La poursuite du développement de l’HAD et de l’activité des soins palliatifs en son sein

Depuis un an, le nombre de départements sans HAD est passé de 50 à 33, traduisant une croissancesignificative. Or 25 % de l’occupation des HAD concerne les soins palliatifs. Pour l’avenir, il convient demieux identifier les lits HAD entrant dans le cadre des soins palliatifs. On estime ainsi que 8 000 placesseraient nécessaires, au lieu des 4 500 actuelles. En outre, les personnels des SSIAD doivent êtrereconnus et formés car ils ont un rôle indispensable sur le terrain.

4. La poursuite de la mise en place des réseaux de soins palliatifs

Concernant le financement des réseaux, le décret a été signé le 25 octobre 2002 et le décret portant surl’organisation et l’évaluation est en cours de signature. Cependant, avant la mise en place des réseaux, ilest nécessaire d’évaluer les besoins : je vous invite à nous faire part de vos expériences et de vos attentes.Nous pouvons, par exemple, nous inspirer des CLIC : ces guichets d’accueil, d’orientation et de conseilpour les personnes âgées constituent une expérience de coordination des réseaux dans le champgérontologique.

5. Le développement de l’accompagnement à domicile par les bénévoles

La formation des bénévoles se développe progressivement mais il me semble essentiel de mettre en oeuvredes mesures pour la formation et l’accompagnement des familles et des aidants.

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6. La poursuite du soutien à domicile par la CNAM

La CNAM et la SFAP ont réalisé une évaluation du dispositif expérimental de maintien à domicile despersonnes en fin de vie. La formation des bénévoles à l’accompagnement à domicile fait également partiedes mesures en cours de réalisation.

De la salle

Quand allez-vous prendre en compte les professionnels libéraux hors réseau ?

Dr Régis AUBRY

Les libéraux participent déjà aux négociations mais il est vrai que ce partenariat n’est encore qu’uneébauche. Nous souhaitons lancer une enquête sur le terrain pour évaluer la situation.

De la salle

A travers l’association à laquelle j’appartiens, j’ai été confrontée aux problèmes concrets des malades ouaccompagnants, tels que les créances non payées ou les coupures d’électricité. Existe-t-il dans les réseauxdes liens avec des partenaires économiques et sociaux étrangers au monde de la médecine ? Je pense enparticulier aux avocats ou aux conseillers financiers.

Dr Régis AUBRY

Notre organisation est adaptative et je pense que nous évoluons dans la même direction que votreassociation.

De la salle

J’ajoute qu’il ne faut pas oublier les psychologues. Par ailleurs, qu’en est-il du statut juridique des réseauxaujourd’hui ?

Dr Régis AUBRY

Sur ce sujet, j’estime que le danger serait d’aller trop vite. Il convient de définir la coordination, c’est-à-dire les niveaux et les fonctions, puis de réfléchir à une structuration juridique. Je rappelle que nous sommesen train de mettre en place un système de soins qui n’existait pas auparavant : c’est un travail long etdifficile.

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III. Groupe de travail « Etablissements »

Dr Huguette MELEDER

Notre mission est d’approfondir les concepts de lits identifiés, d’unités mobiles de soins palliatifs (UMSP)et d’unités de soins palliatifs (USP) et de mettre au point un outil ou référentiel d’organisation des soinspalliatifs en établissement.

1. La localisation de l’activité des soins palliatifs

Notre groupe de travail, qui s’est réuni trois fois depuis sa création, s’est intéressé tout d’abord à lalocalisation de l’activité des soins palliatifs, en distinguant les lits identifiés en court séjour, en moyen séjourou en unités de soins de longue durée (USLD). Nous avons abouti à deux constats.

• la nécessité de travailler en réseauLes trois systèmes mentionnés fonctionnent généralement de manière indépendante. A mon sens, il nes’agit pas d’un problème de manque de moyens car bien souvent, il suffit de redéployer les activités :l’obstacle me semble davantage reposer dans certains « égoïsmes de service ».

• l’usager doit être au cœur du dispositifTrop souvent, les patients passent d’un service à l’autre sans que leurs attentes ou leur avis soient prisen compte.

2. Les travaux en cours

Nous souhaitons élaborer une grille de reconnaissance de l’activité des soins palliatifs afin d’aider lesdécideurs à mieux identifier cette activité et à éviter, par là même, la dispersion des moyens financiers.

Par ailleurs, nous travaillons sur la mise en place d’une grille d’évaluation du bon déroulement du plan quiprenne en compte les aspects quantitatifs, qualitatifs et les indices populationnels. A ce titre, il convient demieux définir certains indicateurs comme le taux de létalité par lit et la consommation d’opiacées.

De la salle

Je crains qu’on ne fasse parfois des soins palliatifs « de seconde zone », en particulier quand les patientsrequièrent des soins techniques.

Dr Huguette MELEDER

Il est vrai qu’il existe une inégalité dans l’offre de soins palliatifs : pour pallier la relative saturation des litsde court séjour, nous devons améliorer le passage vers les lits de moyen séjour, qui possèdent denombreux services de soins palliatifs.

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De la salle

Concernant les lits identifiés, il serait bénéfique de multiplier les échanges entre les ARH.

Par ailleurs, avant de travailler sur de nouveaux textes, il me semble nécessaire de rendre plus clair lerapport entre le public et le privé et de prendre en compte les inégalités régionales.

Dr Huguette MELEDER

De fait, nous promouvons les rencontres entre présidents d’ARH afin d’enrichir la réflexion.

Concernant votre autre remarque, je rappelle que notre groupe de travail s’est réuni trois fois seulement.De plus, nous ne souhaitons pas accélérer la mise en place d’une nouvelle tarification car nous attendonsles résultats des premières expérimentations.

IV. Groupe de travail « Société »

Aline SALOMOVICI

L’axe 3 du programme quadriennal a pour objectif la sensibilisation et l’information du corps social auxsoins palliatifs et à l’accompagnement. Cette dimension a toujours été considérée primordiale, comme lemontrent par exemple la circulaire Laroque en 1986, le rapport Delbecque en 1993 ou, plus récemment,les travaux menés en 1999 par le Sénat et le Conseil économique et social. Cependant, il reste encorebeaucoup à faire dans ce domaine.

1. Les objectifs du groupe de travail

Notre groupe de travail, représentatif des différents acteurs impliqués dans les soins palliatifs, s’est réuni àquatre reprises. Ses objectifs sont de plusieurs types :

• faire savoir que la réponse du monde médical ne s’arrête pas avec le diagnostic d’incurabilité ou de finde vie proche ;

• mieux faire connaître la loi visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs ;• clarifier la connaissance des termes pour éviter les confusions dommageables ;• encourager l’engagement bénévole des citoyens ;• renseigner précisément les professionnels et le public sur les offres en soins palliatifs et

accompagnement ;• réhabiliter la fin de vie dans la vie des citoyens.

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2. Les actions engagées et les projets

a. La réalisation d’une enquête d’opinion

Avant de débuter la campagne de communication, nous souhaitons réaliser une enquête d’opinion afind’évaluer les connaissances, les perceptions et les représentations sociales du public concernant les soinspalliatifs. Deux études sont actuellement envisagées.

Tout d’abord, la DGS prévoit une étude sur l’état des pratiques et des attitudes des professionnels desanté face à la fin de vie.

Par ailleurs, une étude exploratoire qualitative nous permettra de cerner l’univers sémantique de la mort, dudeuil, de la maladie ou de l’accompagnement et d’avoir un premier aperçu des connaissances et desattentes du public ; pour cette étude, les membres de notre groupe de travail feront probablement appel àdes intervenants extérieurs tels que les instituts d’étude.

Selon le calendrier prévisionnel, les résultats seront disponibles courant mai 2003, permettant ainsi depréparer l’action de communication entre mai et juin.

b. La campagne de communication

La campagne de communication est destinée aux professionnels et au public. Le budget étant actuellementinsuffisant pour couvrir l’ensemble du territoire, il est prévu d’agir sur quelques régions chaque année, lebut étant de terminer le processus en 2005. Nous envisageons également de promouvoir cette actionauprès des décideurs des établissements de santé grâce à une journée de lancement organisée par leministère.

c. Organisation d’Etats généraux sur les soins palliatifs et l’accompagnement

Ces Etats généraux auront pour objectif de sensibiliser le grand public ou les décideurs aux soins palliatifset à l’accompagnement, ainsi que d’encourager l’engagement bénévole. Une attention particulière seraportée aux régions les moins avancées.

d. Le Centre de documentation François-Xavier Bagnoud

Ce centre, créé en 1997, est en train de devenir le Centre national de ressources sur les soins palliatifs etl’accompagnement, dans le cadre d’un partenariat avec la SFAP. Sa mission est de mettre à disposition lestravaux dans le domaine des soins palliatifs, d’assurer la veille scientifique et de faciliter la formation et larecherche. Au-delà des missions propres d’un centre de documentation, il doit désormais offrir auxprofessionnels, au grand public et aux bénévoles des documents utiles et un soutien concrets pour lapratique des soins palliatifs. Par exemple, un numéro vert sera instauré.

e. Le congé d’accompagnement

La loi du 9 juin 1999 donne le droit aux proches de bénéficier d’un congé ou d’une réduction d’activitépour l’accompagnement d’une personne en fin de vie. Or, en raison d’un manque d’information et de sanon-rémunération, ce congé est très peu utilisé. Le groupe de travail prévoit de pallier ces deux carences.

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Finalement, notre objectif est d’orchestrer ces initiatives dans un calendrier cohérent et de veiller à ladimension solidaire dans laquelle s’inscrit notre groupe de travail.

De la salle

Il manque une analyse de la position du corps social sur la mort et sur l’angoisse de la solitude : pourquoi lamort est-elle tabou ?

Dr Henri DELBECQUE

Notre tâche étant avant tout organisationnelle, nous avons peu évoqué ce sujet. Cependant, il me sembleeffectivement indispensable de mener un débat de fond sur le lien thérapeutique aujourd’hui.

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Les soins palliatifs à l’étranger : historique,politiques et pratiques professionnelles

Les recommandations du comité d’experts du Conseil del’Europe sur l’organisation des soins palliatifs (2000-2002)

Dr Dick WILLEMSProfesseur d’éthique médicale à l’université d’Amsterdam

Le comité d’experts du Conseil de l’Europe a été institué en 2000 afin de définir des recommandationsapplicables aux pays membres. Je tiens à préciser que les recommandations présentées ici sont unepremière ébauche de nos travaux et ne sont donc pas définitives.

I. Pourquoi le Conseil de l’Europe s’intéresse-t-il aux soins palliatifs ?

1. Des buts et valeurs partagés

Les valeurs défendues par le Conseil de l’Europe rejoignent celles qui sous-tendent l’engagement dans lessoins palliatifs :

• les droits de l’homme et les droits des patients ;• la dignité humaine ;• la cohésion sociale ;• l’équité ;• la participation ;• la liberté de choix.

2. Promouvoir la coopération dans un cadre de forte diversité des situations nationales

Dans les pays d’Europe de l’Est, à savoir la Pologne, la Russie, la Roumanie et la Hongrie, les maladiesavancées et les soins palliatifs ont une image négative. La prise en charge de la fin de vie est considéréecomme un luxe propre aux pays développés et ne fait donc pas l’objet d’une politique soutenue. Pourcette raison, le personnel, les médicaments et les technologies dans le domaine des soins palliatifs sontinsuffisants.

Dans les pays d’Europe de l’Ouest, la situation des soins palliatifs est nettement plus favorable mais,comme le montrent les données de 2001 du projet Pallium, les différences sont également marquées. Parexemple, en Allemagne il n’y a qu’une équipe de soin, en Italie, on note l’absence d’unité pour les patientsdans les hôpitaux, les Pays-Bas insistent davantage sur la prise en charge à domicile, alors qu’en Grande-Bretagne, l’hôpital de jour est très développé.

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II. Résultats des travaux du comité d’experts

Les membres du comité d’experts proviennent, à part égale, d’Europe de l’Est et d’Europe de l’Ouest.Leur objectif était d’élaborer des recommandations aux 44 ministres de santé des pays membres duConseil de l’Europe.

1. Recommandations générales

Le comité d’experts recommande d’établir un cadre cohérent et complet au niveau national en matière desoins palliatifs. Il recommande également de mettre en réseau, aux niveaux national et international, lesorganismes, instituts de recherche et autres instances concernés par les soins palliatifs, de suivre lesrecommandations spécifiques en tant compte des particularités nationales et de favoriser une diffusionactive et contrôlée de la recommandation.

2. Recommandations spécifiques

a. Structures et services

Le comité d’experts recommande de considérer les différents lieux de soins, tels que le domicile, l’hôpitalou la maison de retraite, de promouvoir une coordination adéquate grâce à des réseaux régionaux, derendre accessibles les consultations et les soins palliatifs spécialisés, de soutenir les soignants nonprofessionnels et de favoriser le placement temporaire des patients pour alléger la charge familiale.

Je précise que nous n’avons pas trouvé d’accord sur la nécessité des spécialistes des soins palliatifs.

b. Politique et organisation

Le comité recommande de mener une étude d’évaluation des besoins en SP, d’élaborer d’un plan national,de favoriser l’accès aux opiacés et autres substances, de mettre l’accent sur les groupes défavorisés, dereconnaître et rémunérer de manière juste le soignant et de prévoir un rapport annuel national.

c. Qualité de soins et recherche

Les experts recommandent de définir et adopter des indicateurs pertinents, d’établir des lignes directricespour une meilleure pratique médicale et d’encourager la recherche scientifique sur les SP.

d. Equipe soignante, travail d’équipe et projet de soins

Il convient de promouvoir le travail pluridisciplinaire et de prendre en charge les patients et la santéprofessionnelle.

e. Le deuil

Les experts souhaitent que les questions liées au deuil soient prises en compte avant la mort du patient, quedes services de soutien soient prévus pour les proches et que les professionnels soient encouragés àreconnaître les signes de deuil complexe ou perturbé.

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Les soins palliatifs en France et à l’étranger Paris, le 17 décembre 2002Ministère de la santé, de la famille et des personnes handicapées 23

De la salle

Pouvez-vous préciser la notion d’observatoire national et régional ?

Dr Dick WILLEMS

Certains pays disposent déjà d’un centre de référence qui collecte les données. Notre recommandationvise à encourager le développement de structures similaires.

Dr Gilbert DESFOSSES, SFAP

Avez-vous élaboré une définition des soins palliatifs ? Abordez-vous la question de l’éthique ?

Dr Dick WILLEMS

Concernant la définition des soins palliatifs, nous nous référons à celle donnée par l’OMS en 1987, trèssemblable à celle de 2002, la différence étant que l’on parle de maladie « avancée » au lieu de « noncurable ». Concernant l’éthique, nous avons décidé de ne pas aborder la question de l’euthanasie en raisonde différences trop considérables entre les pays ; en revanche, nos recommandations en matièred’éducation insistent sur l’éthique.

De la salle

En tant qu’organisation internationale, ne prenez-vous pas le risque d’établir une politique souveraine quidéfavorise les avis multiples ?

Dr Dick WILLEMS

Il existe effectivement de nombreux points de désaccords mais dans ce cas, soit nous trouvons une formuleconsensuelle, soit nous éludons la question. Par ailleurs, les recommandations ayant souvent peu d’effets,je doute que notre politique puisse être souveraine.

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Les soins palliatifs en Angleterre

Avril JACKSONInformation office, St Christophers’s Hospice, Londres

Le mouvement des hospices et des soins palliatifs au Royaume-Uni est très divers. Il a pris naissance dansle secteur caritatif mais aujourd’hui, nous travaillons de plus en plus en collaboration avec le servicenational de santé. Deux principes me semblent essentiels : d’une part, chaque personne souffrant d’unemaladie incurable doit pouvoir bénéficier des soins palliatifs qui lui conviennent ; d’autre part, tous lessoignants doivent recourir aux soins palliatifs et faire appel à l’expertise de leurs collègues.

Enfin, je rappelle que, pour ne citer que l’exemple du cancer, chaque année plus de 200 000 nouveaux cassont décelés et plus de 120 000 personnes meurent. Il s’agit donc d’un sujet particulièrement important.

I. L’origine du mouvement des hospices et des soins palliatifs

• Jeanne GarnierEn 1843, cette Française fonde un hospice à Lyon destiné à procurer des soins aux mourants. Soninfluence a largement dépassé les frontières de la France.

• Sœur Mary AitkenheadSupérieure des Sœurs irlandaises de la charité, cette Irlandaise a ouvert le St Vincent’s Hospital àDublin, qui a ensuite conduit à la fondation de Our Lady’s Hospice for the Dying en 1879.

• Dr Cicely SaundersCette femme anglaise a été infirmière, travailleuse sociale et médecin. En 1967, elle fonde l’hospiceSaint Christopher. Selon elle, il est essentiel d’écouter les patients et les proches et de ne pas accepterqu’il n’y a « plus rien à faire ».

II. Les différents types d’intervention

1. Les unités de soins palliatifs résidentielles

La fondation Macmillan, qui s’efforce d’améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer, afondé plusieurs unités de soins palliatifs, les frais de fonctionnement étant pris en charge par le Ministère dela santé. Aujourd’hui, 59 000 patients y sont admis par an, 50 % retournent ensuite chez eux et la duréemoyenne des interventions est de 13,5 jours environ.

2. Les soins palliatifs à domicile

La plupart des patients préfèrent rester avec leurs proches chez eux au lieu d’être admis en unitérésidentielle. En 1969, l’hospice Saint Christopher établit un service d’accompagnement et de soins

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palliatifs à domicile, le premier au monde : les infirmières offrent un service d’écoute, de soutien et deconseil permanent ; les équipes travaillent en collaboration avec le médecin généraliste du patient.

Aujourd’hui, il existe 334 équipes de soins palliatifs à domicile, dont un tiers basé dans des unitésrésidentielles, 135 000 malades dont plus de 60 % des personnes mourant d’un cancer sont soignées dansce cadre.

3. Les équipes mobiles

En 1976, le Dr Thelma Bates fonde la première équipe mobile de soins hospitaliers sur le modèle del’hôpital St Luke à New York. On dénombre aujourd’hui 221 équipes mobiles multiprofessionnelles et 100services disposant d’un ou deux infirmiers spécialisés en soins palliatifs.

4. Day Care : les unités de soins palliatifs de jour

Ces unités, dont la première date de 1975, proposent aux patients des services variés : les soins sontmédicaux ou spirituels ; l’équipe compte, entre autres, un kinésithérapeute et un coiffeur. L’unité de jouroffre au malade la possibilité de continuer à vivre chez lui ; pour la famille du patient, elle est un relais quipermet de se reposer ou de se détendre.

Chaque année 32 500 patients sont soignés dans les 243 unités de jour existantes. Chaque servicedispose, en moyenne, de quatorze places par jour.

III. L’organisation générale des soins palliatifs au Royaume-Uni

1. Les acteurs

Il convient de rappeler que 95 % des maladies soignées dans des unités de soins palliatifs sontcancéreuses. Le Plan national contre le cancer s’efforce d’améliorer les soins et de réduire les inégalités ens’appuyant, en particulier, sur les Réseaux du cancer.

L’association Help the Hospices, représentant les hospices indépendants, est également un acteur depremier plan. Des associations professionnelles regroupent par ailleurs les différents intervenants des soinspalliatifs tels que les médecins, les travailleurs sociaux, les infirmières, les aumôniers ou les responsablesd’unités de jour.

2. L’éducation et la formation

La médecine palliative est reconnue comme une spécialité au Royaume-Uni. De nombreux cours etcolloques sont proposés par les hospices ou les services de soins palliatifs. La préoccupation actuelle estde mieux prendre en compte l’avis des « clients » des services de soins palliatifs.

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3. Le financement

Au Royaume-Uni, 75 % des unités de soins palliatifs résidentielles appartiennent aux hospices, c’est-à-direau secteur caritatif. Les soins étant gratuits pour les proches et les patients, le financement des hospicesprovient principalement des donations et collectes de fonds (30 %), du Ministère de la santé (28 %), delegs (23 %) et de magasins de charité (11 %). J’ajoute par ailleurs que les salaires des jeunes médecins enformation dans les hospices sont, pour la plupart, payés par le Ministère de la santé, ainsi que lesmédicaments. L’objectif est maintenant d’élargir l’accès aux soins palliatifs.

IV. Conclusion

Les soins palliatifs fonctionnent principalement grâce aux principes du bénévolat et du don qui sont trèsancrés dans les sociétés anglo-saxonnes. Environ 87 000 bénévoles interviennent à tous les niveaux d’unservice, aussi bien dans l’accompagnement des familles que le transport des malades ou l’administrationdes services.

L’un de nos principaux défis pour l’avenir est l’élargissement de l’accès aux personnes d’origine ethniqueminoritaire et aux personnes désavantagées comme les toxicomanes, les prisonniers, les personnes âgéesou les handicapés mentaux.

De la salle

Quelle est la place de la mort dans la société britannique ?

Avril JACKSON

La mort a longtemps été taboue mais elle fait de plus en plus l’objet de programmes d’éducation : untravail est mené avec les écoles pour discuter de cette question.

De la salle

La France compte moins de 5 000 bénévoles dans le domaine des soins palliatifs, ce qui est nettementmoins qu’au Royaume-Uni mais il me semble que leur fonction est différente de celle des bénévolesbritanniques.

Avril JACKSON

Effectivement, les fonctions des bénévoles sont plus larges au Royaume-Uni.

Marie-Claude DAYDE, infirmière-ressource libérale à Toulouse

Par exemple, au Royaume-Uni, les bénévoles peuvent accompagner les malades dans les unités de jour, cequi n’est pas le cas en France.

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De la salle

Les réseaux sont-ils institutionnalisés ou se créent-ils spontanément ?

Avril JACKSON

Les Réseaux du cancer viennent d’être établis par le Plan national contre le cancer et leur mise en place estpour l’instant difficile.

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Les soins palliatifs en Belgique

Dr Marianne DESMEDTClinique Universitaire Saint-Luc, Bruxelles

I. Les fondements de la politique de planification des soins palliatifs

1. Aperçu historique

Les soins palliatifs ont débuté grâce à des initiatives privées en 1985-1990. Après avoir financé quelquesprojets pilotes au début des années 90, l’Etat a mis en place une politique de planification à partir de 1995.Nous sommes actuellement dans une phase d’évaluation des mesures prises.

2. Principes fondamentaux

La politique de planification des soins palliatifs repose sur plusieurs principes :

• la création de services et de structures spécialisées ;• la répartition de l’offre de soins palliatifs sur l’ensemble du territoire ;• la prise en considération du milieu institutionnel et du domicile ;• l’intégration des services et des structures dans le réseau de soin existant ;• la mise en place d’une concertation systématique entre les différents intervenants ;

En toile de fond, le principe est que les soins palliatifs sont un droit pour chaque patient et un devoir pourchaque soignant.

II. L’organisation des soins palliatifs en Belgique

1. Les principales structures

a. L’unité de soins palliatifs

L’unité de soins palliatifs est l’une des premières structures mises en place. Il s’agit d’un service hospitalierspécialisé destiné aux patients souffrant d’une maladie incurable en phase terminale et qui nécessitent dessoins palliatifs. Il existe environ 360 lits de ce type, répartis en un ou deux sites par zone de300 000 habitants. Des normes structurelles et fonctionnelles visent à favoriser la convivialité du lieu etl’interdisciplinarité. Le personnel est constitué, entre autres, de médecins, d’infirmières, dekinésithérapeutes, d’assistants sociaux et de psychiatres. Le financement provient du gouvernement.

b. L’équipe de soutien à domicile

Disponible en permanence, cette équipe mobile spécialisée s’adresse aux patients en fin de vie séjournant àdomicile ou dans une structure apparentée telle que les maisons de repos ou les foyers d’accueil. Chaque

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zone de 300 000 habitants dispose d’une équipe constituée de médecins (0,1 ETP), de deux infirmières etd’un employé administratif à mi-temps. Ces équipes peuvent être renforcées selon les besoins de l’activitéet son financement est fixé par une convention avec la Sécurité sociale.

L’équipe de soutien à domicile peut être consultante, participative ou substitutive en fonction de son degréd’implication dans l’accompagnement du patient et de son rapport avec le soignant référent.

c. L’équipe mobile intra-hospitalière

L’équipe mobile intra-hospitalière s’adresse aux patients en fin de vie séjournant dans une institutionhospitalière de court séjour. Cette structure est de création récente et est désormais obligatoire danschaque hôpital, sous l’autorité conjointe du médecin en chef et du chef du département infirmier. Safonction est principalement la communication : elle a pour but de sensibiliser les professionnels aux soinspalliatifs.

d. Les soins palliatifs en maison de repos

Il s’agit de soutenir la prise en charge des patients en fin de vie séjournant en maisons de repos. Pourobtenir l’agrément, ces dernières doivent développer une structure de soins palliatifs composée d’unsoignant veillant à l’organisation et à la formation du personnel dans ce domaine.

e. Les soins palliatifs au domicile

Le « patient palliatif à domicile » est un malade atteint d’une ou plusieurs affections irréversibles dontl’évolution est défavorable avec une détérioration sévère de sa situation physique ou psychique que lesinterventions thérapeutiques ne peuvent enrayer, le décès étant prévu dans un délai inférieur à trois mois.Par ailleurs, le patient doit avoir des besoins physiques, psychiques, sociaux et spirituels nécessitant unengagement soutenu et exprimer le souhait de mourir à domicile ou dans une structure apparentée.

Si un patient remplit ces critères, il bénéficie d’une allocation couvrant les frais liés aux médicaments, auxmatériels et aux dispositifs de soins et d’un remboursement spécifique des soins.

2. La coordination entre les différentes structures

L’Association régionale de concertation est un organe de coordination réunissant au sein d’une mêmerégion les représentants des services et des structures de soins prenant en charge les patients en fin de vie.Il en existe une par zone de 300 000 habitants.

III. Un regard critique

Le dispositif belge présente des avantages certains :

• l’encadrement et le financement publics de l’offre de soins palliatifs ;• une répartition équitable sur l’ensemble du territoire ;• l’intégration des structures et des services dans le système de soins existant ;• la concertation obligée entre les différents intervenants.

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Toutefois, cette politique comporte également des inconvénients :

• l’orientation vers le malade en phase terminale ;• l’insuffisance du contrôle et de l’évaluation des structures mises en place ;• l’absence de distinction entre les modes aigus et chroniques des soins palliatifs dispensés ;• la non-reconnaissance des services et des structures universitaires ;• la politisation des organes de concertation.

De la salle

Ma remarque porte sur les équipes mobiles hospitalières et sur les soins à domicile : en France, il estdifficile d’imaginer que les équipes mobiles puissent travailler avec les soignants habituels.

Dr Marianne DESMEDT

La situation est similaire en Belgique : nous avons d’emblée mis de côté l’idée de substitution et la Sécuritésociale souhaite davantage un mode consultant, ce qui n’est pas encore acquis.

De la salle

Concernant les soins palliatifs à domicile, avez-vous évalué les transferts économiques générés ? Quellesont été les difficultés dans la mise en place du suivi du patient ? Que se passe-t-il si le patient vit pluslongtemps ?

Dr Marianne DESMEDT

Nous n’avons pas réalisé une évaluation des transferts économiques. Concernant la mise en place du suivi,la difficulté principale a été le coût de la garde-malade. Enfin, votre dernière question soulève un vraiproblème : les unités de soins palliatifs ne prennent pas le patient en charge plus d’un mois ; par ailleurs,après deux mois au domicile, le patient doit recommencer à payer des frais.

Dr Gilbert DESFOSSES

Y a-t-il eu des résistances lors de la planification, en particulier des enseignants ou universitaires ?

Dr Marianne DESMEDT

Les difficultés ont été nombreuses au départ mais le bilan est aujourd’hui plutôt positif. En particulier, ducôté francophone, trois universités se sont associées pour créer un diplôme de soins palliatifs.

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De la salle

N’existe-t-il pas une contradiction entre la politique en faveur des soins palliatifs et la loi sur l’euthanasie ?

Dr Marianne DESMEDT

En pratique, c’est la pression pour adopter la loi sur l’euthanasie qui a entraîné le développement des soinspalliatifs.

De la salle

Les équipes à domicile comprennent-elles une assistante sociale ? Les psychologues hospitaliersinterviennent-ils à domicile ? Quel est le lien entre les équipes hospitalières et les équipes à domicile ?

Dr Marianne DESMEDT

Dans le privé, certaines équipes disposent d’une assistante sociale. Les Associations régionales deconcertation ont par ailleurs mis en place l’intervention de psychologues à domicile. Enfin, les équipeshospitalières et à domicile doivent prendre contact.

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L’Association européenne de soins palliatifs (EAPC)

Dr Marilène FILBETEAPC

I. Objectifs

L’Association européenne de soins palliatifs – European Association for Palliative Care (EAPC) enanglais – est composée de 200 membres individuels et 28 associations membres collectifs. Ses objectifssont doubles. Elle entend, d’une part, être un lieu de rencontre à l’échelle internationale où lesprofessionnels et les mouvements nationaux puissent échanger leurs expériences et, d’autre part,promouvoir la connaissance, la recherche et la diffusion des informations en matière de soins palliatifs.

II. Activités

1. La communication sur les soins palliatifs

Les vecteurs de communication dont disposent l’EAPC sont le site Internet www.eapcnet.org, le Journaleuropéen des soins palliatifs, bilingue, la revue EAPC news & views et le journal scientifique et derecherche Palliative Medicine.

2. Les groupes de travail

Les différents groupes de travail ont pour thèmes la recherche en soins palliatifs, l’éthique, la gériatrie,l’éducation et l’Europe de l’Est.

Le prochain congrès aura lieu à La Haye en avril 2003.

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Le projet OMS de soins palliatifs en Catalogne :résultats à dix ans

Dr Xavier GOMEZ-BATISTEInstitute Català d’Oncologia, l’Ospitalet Barcelone

Le Dr Xavier Gómez-Batiste n’ayant pu se déplacer, son intervention est lue par le Dr MarilèneFilbet.

La Catalogne a été l’une des premières régions à développer des structures de soins palliatifs en Europe.Après la présentation du cadre général, je préciserai l’offre de soins palliatifs et les résultats du projetOMS.

I. Cadre général

1. Présentation de la Catalogne

La Catalogne compte 6,2 millions d’habitants. Il s’agit d’une « communauté autonome » où le système desanté, comme dans le reste de l’Espagne, est public. Les personnes âgées représentent 17 % de lapopulation, 13 000 personnes meurent du cancer chaque année, on évalue à 120 000 le nombre depersonnes dépendantes et la démence touche 100 000 personnes.

2. Les objectifs du projet OMS

Le projet OMS concerne les personnes atteintes du cancer, du sida et les personnes âgées. Il repose surles principes d’équité et de qualité, c’est-à-dire d’efficacité, d’efficience et de satisfaction des usagers.L’offre de soins palliatifs est définie par un plan et le financement est public.

II. L’offre de services en Catalogne (2001)

Dans les hôpitaux, il existe onze unités de soins palliatifs et trente équipes mobiles. Les centres socio-sanitaires, équivalents de nos hôpitaux gériatriques, comptent 31 unités de soins palliatifs et un hospicetraite spécifiquement les patients atteints du sida.

Par ailleurs, 52 équipes à domicile suivent en moyenne 274 patients par an. La durée médianed’intervention de ces équipes est de six semaines et 61 % des personnes suivies meurent à leur domicile.

A titre de comparaison, en 2000, l’Espagne comptait 81 unités de soins palliatifs, 112 équipes à domicileet 51 équipes mobiles hospitalières. La Catalogne est donc en avance sur le reste de l’Espagne en matièrede soins palliatifs.

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III. Résultats

1. Etendue et efficacité du dispositif

La couverture géographique du dispositif de soins palliatifs est de 95 % et 67,1 % des patients atteints decancer sont suivis. La consommation de morphine concerne 72 % des patients, contre 3,5 % en 1991. Parailleurs, 122 médecins à temps plein sont affectés dans des services de soins palliatifs.

D’un point de vue financier, grâce aux équipes à domicile, on estime que la réduction du coût d’un patientatteint de cancer est de 1 031 euros par mois. Au total, les soins palliatifs entraîneraient une économie de31 millions d’euros par an pour la Catalogne. Ces chiffres ne sont que des estimations mais ils laissent àpenser que les soins palliatifs sont moins chers qu’on ne le dit.

2. Education et formation

Les programmes de formation touchent plus de 5 000 professionnels. Ils se partagent en trois niveaux, àsavoir élémentaire, intermédiaire et avancé.

3. Points forts et points faibles

Le bilan est globalement positif :

• une couverture géographique étendue ;• la prise en charge aussi bien du cancer, du sida que de la gériatrie ;• l’implication forte du domicile ;• le financement public, assurant au patient la gratuité du suivi ;• l’efficacité, l’efficience et la satisfaction.

Cependant, des zones d’ombre persistent :

• une continuité des soins parfois mal assurée ;• une accessibilité restreinte ;• l’insuffisance de l’évaluation ;• l’insuffisante prise en compte des dimensions psychosociales ;• la faible implication des universitaires et des chercheurs ;• le risque de saturation des services et du personnel.

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Les soins palliatifs en Italie

Dr Michele GALLUCIUnité de soins palliatifs et prise en charge de la douleur, Hôpital de Desio

I. Aperçu historique

Les soins palliatifs existent depuis longtemps en Italie. Dès 1852, le Dr Giuseppe del Chiappa dans sonDiscours de la morale du médecin reconnaissait le devoir d’apporter espoir et consolation face à ladouleur des malades et d’essayer de pallier cette douleur lorsque l’on ne peut plus guérir.

Plus récemment, l’institution dirigée par le professeur Luigi di Bella avait pour but de soulager la fin de viedes malades mais son oeuvre a suscité une importante polémique et, ainsi, a fait des soins palliatifs le centred’un important débat politique.

Pour mettre fin à la controverse, quatre lois et décrets ont été publiés entre 1999 et 2001, mettant en placele système actuel. Ces textes définissent le financement des soins palliatifs, les standards de référence et lefonctionnement des réseaux.

II. La situation actuelle des soins palliatifs en Italie

La demande de soins palliatifs est estimée entre 241 000 et 286 000, la majeure partie provenant depatients atteints de cancer.

Concernant l’offre, en décembre 2001, il existait 168 centres de soins palliatifs et 152 associations à butnon lucratif ; en septembre 2002, on comptait 184 hospices financés par le Service sanitaire national et2 003 lits. L’inégalité régionale est très forte, tant du point de vue des centres de soins palliatifs que dunombre d’associations proposant des soins à domicile : le Nord est plus avantagé que le Sud.

A l’heure actuelle, la situation des soins palliatifs en Italie est donc paradoxale : de nombreux centres ontété construits dans le cadre d’une politique publique de grande ampleur mais le personnel nécessaire aufonctionnement de ces institutions est insuffisant. Cette insuffisance s’explique par deux facteurs. D’unepart, en dépit de l’existence de cinq masters spécialisés, la formation en soins palliatifs reste peu adaptéeaux besoins réels. D’autre part, la population et les professionnels sont mal informés sur ce programme.

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L’expérience du Québec

Dr Serge DANEAULTUnité des soins palliatifs, hôpital Notre-DameCentre hospitalier de l’université de Montréal

L’hôpital Notre-Dame, fondé en 1979, est le premier à avoir créer une unité de soins palliatifs en languefrançaise. Mon intervention constitue un témoignage de mon expérience dans cette institution et uneprésentation générale de la situation des soins palliatifs au Québec.

I. La demande actuelle en soins palliatifs

Le Québec compte 7,41 millions d’habitants, alors que la population française est de 60 millionsd’habitants. La structure par âge est équivalente dans les deux pays : le vieillissement de la populationentraînera une augmentation du nombre de décès et une diminution du nombre d’aidants. La demande desoins palliatifs sera donc croissante dans les années à venir.

Plus précisément, le cancer est l’une des principales causes de décès : 16 630 personnes sont mortes d’uncancer en 1999, 124 du sida, 1 581 du diabète, 5 449 de maladies de l’appareil respiratoire et 2 020 demaladies de l’appareil digestif. Les maladies de l’appareil circulatoire sont à l’origine de 18 195 décès.Dans nombre de ces pathologies, les soins palliatifs peuvent soulager le patient.

II. Les structures existantes

Le Québec dispose de 370 lits, soit un lit pour 20 000 habitants. Il existe quatre types de structures.

1. Les hôpitaux

La situation varie considérablement d’un centre à l’autre : certains hôpitaux ne disposent d’aucun servicestructuré de soins palliatifs, alors que d’autres ont des équipes ou des unités spécialisées.

2. Les centres d’hébergement et de soins de longue durée

Ces centres s’apparentent à des maisons de retraite. Ils disposent de 43 295 lits dont seulement 110dédiés aux soins palliatifs. Ainsi, les 18 à 33 % de personnes hébergées qui y décèdent chaque année n’ontpas accès à des soins palliatifs comparables à ceux dispensés en unités de soins.

3. Les résidences spécialisées en soins palliatifs

Ces structures sont équivalentes aux hospices : en tant qu’organismes sans but lucratif, ils fonctionnentgrâce à la générosité du public. Il en existe treize au Québec, soit 90 lits. La précarité du financement et

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l’absence de programmes d’assurance de la qualité des soins prodigués sont les deux points faibles de cesystème.

4. Les Centres locaux de service communautaire (CLSC)

Les CLSC sont des organisations publiques qui, sur un territoire donné, assistent les malades et leursproches chez eux. Bien que mourir au domicile soit le souhait de la plupart des Québécois, ce systèmeapparaît insuffisamment développé à plusieurs égards :

• une grande variabilité d’un territoire à l’autre ;• des modalités d’accès imprécises ;• une définition insuffisante des responsabilités des intervenants ;• la non disponibilité des médecins et des infirmières le soir et le week-end.

III. Les questions en suspens

En dépit des progrès en matière de soins palliatifs, plusieurs zones d’ombre subsistent.

1. Les autres pathologies terminales

L’âge moyen des patients admis à l’unité de soins palliatifs de l’hôpital Notre-Dame était de 63,1 ans et de71,6 ans pour les patients ayant un diagnostic autre que le cancer.

2. Le contrôle de la douleur

Les soins palliatifs ne permettent pas de supprimer toute douleur : avons-nous atteint une certaine limitedans le contrôle de la douleur ?

3. La prise en charge des symptômes autres que la douleur

L’atténuation de la douleur est l’objectif premier des soins palliatifs mais une enquête montre que, pour lespatients, une « bonne mort » dépend d’autres facteurs comme le fait d’être mentalement éveillé, de ne pasêtre un fardeau pour ses proches ou d’avoir tenté tous les traitements possibles pour la guérison.

4. Les aspects non pharmacologiques du mourir

Concernant l’usage des opiacés, pourquoi existe-t-il tant de différences entre les centres ?

5. La souffrance « intolérable » et la demande d’euthanasie

L’euthanasie fait l’objet de débats publics animés mais en pratique, peu de patients la demandent, mêmelorsque la souffrance est intense : ils craignent beaucoup plus l’abandon thérapeutique.

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6. Les différences entre les riches et les pauvres

Une étude menée sur les CLSC met en évidence que les très pauvres ont une probabilité plus faible demourir à domicile que le reste de la population ; de plus, la prévalence de la douleur intolérable à unesemaine du décès est plus élevée chez les plus démunis.

7. Les problèmes d’accessibilité dans le cadre de la crise des finances publiques

Contrairement à une idée répandue, on observe une diminution des dépenses de santé en fonction del’accroissement de la population âgée de plus de 65 ans. Cependant, la question des effets économiquesdes soins palliatifs subsiste et aucune réponse satisfaisante n’a encore été apportée.

IV. Conclusion

Depuis trente ans, le chemin parcouru a été considérable mais celui qu’il nous faut suivre maintenant esttout aussi immense. Pourrons-nous y arriver si nous restons en marge du système socio-sanitaire ? Peut-être est-il temps de retourner dans les rangs, au cœur de la médecine, des soins infirmiers et des professionspsychosociales.

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Questions

Maurice CHAUSSON, EAPC

Les bénévoles sont-ils nombreux au Québec ?

Dr Serge DANEAULT

Dans ce domaine, le Québec est plus proche de la Grande-Bretagne que de la France : dans l’institutionoù je travaille, il existe une liste d’attente d’environ 200 personnes souhaitant travailler comme bénévoles.En revanche, leurs fonctions s’apparentent à celles des bénévoles français : ils font de l’accompagnement etne remplacent pas d’autres catégories professionnelles.

Dr Michele GALLUCCI

En Italie, la tradition du bénévolat est peu développée, ce qui s’explique par l’implication des familles.

De la salle

Quels sont les facteurs qui ont permis d’accélérer la mise en place de la nouvelle législation en Italie ? Parailleurs, pourquoi n’est-il jamais question de soins palliatifs dans les services de psychiatrie ?

Dr Michele GALLUCCI

En Italie, le catalyseur a été l’affaire di Bella qui a convaincu le Ministre de la santé de prendre desmesures afin qu’une telle polémique ne resurgisse pas. C’est ainsi que 150 millions d’euros ont été investisdans la construction d’hospices aujourd’hui fermés par manque de personnel.

Dr Serge DANEAULT

La question des malades dans le domaine psychiatrique me semble très pertinente. Par exemple, àMontréal, certains malades ont été mis à la rue sans que l’on se préoccupe de leur sort.

De la salle

Comment expliquer une telle carence ?

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Dr Serge DANEAULT

Mon opinion est que les soins palliatifs se sont développés en priorité pour une clientèle relativement aisée,non pour les marginaux : actuellement, ils ne sont pas véritablement pris en compte dans la définition despratiques de soins palliatifs.

De la salle

Existe-t-il une approche différente entre les deux communautés qui composent le Canada ?

Dr Serge DANEAULT

Les principes sont les mêmes mais les manières de procéder sont différentes, afin de respecter lesparticularismes.

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Conclusion

Dr Henri DELBECQUEDirecteur du Comité de suivi

Je remercie les intervenants et le public pour cette journée exceptionnelle dont se dégagent plusieursconclusions.

Tout d’abord, l’offre de soins reste incomplète, aussi bien en milieu hospitalier qu’au domicile et certainessituations demeurent inacceptables, en particulier quand les médecins compromettent la sécurité ou la viedes malades.

Cependant, si des zones d’ombre persistent, la publication de nouveaux textes et le travail du comité desuivi marquent un progrès certain dans le développement des soins palliatifs en France, répondant ainsi àune forte attente sociale.

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Clôture

Edouard COUTYDirecteur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS)

Le bilan réalisé suite à l’enquête sur les ARH montre qu’un effort considérable a été accompli.Aujourd’hui, nous disposons de 291 équipes mobiles, de 91 unités de soins, de 316 lits identifiés et leséquivalents temps plein des professionnels sont passés de 1 117 à 2 342. Il est maintenant nécessaire depoursuivre cette action à travers les trois axes fixés par le ministre.

I. Les soins palliatifs à domicile

Le décret du 3 mai 2002 devrait être opérationnel dès l’année prochaine. Par ailleurs, le développementdes réseaux ville-hôpital pourrait être un levier pour la diffusion des soins palliatifs à domicile. Enfin, lesdernières difficultés juridiques et financières devraient normalement être levées. Ainsi, le socle juridique quipermettra le développement des soins palliatifs à domicile est aujourd’hui en place.

II. Les soins palliatifs dans les établissements de santé

Il s’agit d’accroître l’offre de soins et de réduire les inégalités régionales. Plusieurs objectifs sont définispour 2005 :

• créer une unité de soins palliatifs dans chaque CHU ou centre hospitalier de référence, chaque régiondevra avoir au moins un USP ;

• établir des lits identifiés dans tous les services concernés par les soins palliatifs ;• développer les équipes mobiles en les insérant dans les équipes de soins ;• rapprocher la lutte contre la douleur et les soins palliatifs ;• poursuivre la formation d’équipes hospitalières ;• finaliser les recommandations de l’ANAES en matière de bonnes pratiques cliniques ;• instaurer un outil de mesure de l’activité qui prenne en compte les soins palliatifs ;• mieux reconnaître le rôle des associations et des bénévoles.

III. L’information et la sensibilisation de la société

Le ministre a déjà développé cet aspect ce matin.

En conclusion, je remercie les organisateurs de cette journée ainsi que les participants car tout ce quipourra être fait pour le développement des soins palliatifs et de l’accompagnement se fera grâce à votresoutien et à votre action.