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Fruits - Vol . 12, n° 1, 1957 - 9 LES PRINCIPES DE BAS E des méthodes modernes de préparatio n des Jus de fruits(i ) pa r P . DUPAIGN E Chef de Laboratoire à l'Institut de Recherches fruitières outre mer (I . F. A . C . ) Lorsque l'on consulte les statistique s de production des jus de fruits dans l e monde, on est frappé de constater qu e depuis de nombreuses décades, le s États-Unis viennent largement en tête , au point que les autres productions na- tionales semblaient presque négli- geables (en 195o par exemple, États - Unis : 96 °,) . On est tenté alors de dire que seul , l'exemple américain est à imiter si l'o n veut développer la production e n France et Union française ; en parti- culier les techniques américaines qu i font la preuve de leur efficacité et leu r rentabilité, seraient à adopter en le s transposant simplement à notre échelle . Ceci est à mon avis une erreur pour plu - sieurs raisons : en premier lieu les équi- pements industriels des deux pays ne sont pas comparables ; il est inutile, ou il serait coûteux de créer une industri e du concentré-congelé puisque les point s de vente des denrées congelées sont e n nombre encore très réduit en France . En second lieu, nous ne travaillons pa s avec les mêmes normes que les États- Unis, nous manquons d'acier inoxy- dable, nos boîtes de conserve sont plu s chères, notre verrerie doit effectuer de s rotations et n'a pas toujours une qua- lité égale, la matière première elle - r . Étude effectuée à la demande d u groupe de travail jus de Fruits de l ' Institu t National d'Hygiène, en liaison avec le Hau t Comité d ' Étude et d' Information sur l'Alcoo- lisme . 2 même étant bien moins abondante et moins industrialisée, est moins cons - tante, ce qui oblige à changer souven t de fabrication . Autrement dit, la solu- tion de paresse qui consiste à importe r les usines directement des États-Unis est fort onéreuse, car mal adaptée a u travail en Europe . Tout ceci ne veut pas dire que nou s devons nous désintéresser des tech- niques américaines pour ne dévelop - per que les nôtres ; il faut aussi envi- sager l'avenir, certainement marqué par une industrialisation plus poussée , le développement du froid artificiel , peut-être des procédés nouveaux de sté - rilisation, etc .. . Les techniques son t d'ailleurs en pleine évolution aux États - Unis et il est profitable de les suivr e avec attention . Sans entrer dans le détail, nous allon s essayer de dégager quelques grand s principes qu'il ne faut pas perdre d e vue lorsque l'on tente d'améliorer le s méthodes de production et de distri- bution des jus de fruits . 56 600 500 JUS DE FRUIT S PRODUCTION, CONSOMMATION, EXPORTATIO N ET IMPORTATION FRANCAISES EN 1936 ET DE 1950 A 1956,EN MILLIERS D' HL . (LES CHIFFRES DE 1956 SONT PROVISOIRES ) 400- 300- 200 - 100- 1936 55 53 51 54 1950 52

LES PRINCIPES DE BASE des méthodes modernes de préparatio

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Fruits - Vol . 12, n° 1, 1957

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LES PRINCIPES DE BAS Edes méthodes modernes de préparatio n

des Jus de fruits(i )pa r

P. DUPAIGN EChef de Laboratoire à l'Institut de Recherches fruitières outre mer (I . F. A. C . )

Lorsque l'on consulte les statistiquesde production des jus de fruits dans l emonde, on est frappé de constater qu edepuis de nombreuses décades, le sÉtats-Unis viennent largement en tête ,au point que les autres productions na-tionales semblaient presque négli-geables (en 195o par exemple, États-Unis : 96 °,) .

On est tenté alors de dire que seul ,l'exemple américain est à imiter si l'o nveut développer la production e nFrance et Union française ; en parti-culier les techniques américaines qu ifont la preuve de leur efficacité et leu rrentabilité, seraient à adopter en le stransposant simplement à notre échelle .Ceci est à mon avis une erreur pour plu -sieurs raisons : en premier lieu les équi-pements industriels des deux pays nesont pas comparables ; il est inutile, ouil serait coûteux de créer une industri edu concentré-congelé puisque les point sde vente des denrées congelées sont ennombre encore très réduit en France .En second lieu, nous ne travaillons pa savec les mêmes normes que les États-Unis, nous manquons d'acier inoxy-dable, nos boîtes de conserve sont pluschères, notre verrerie doit effectuer de srotations et n'a pas toujours une qua-lité égale, la matière première elle -

r . Étude effectuée à la demande d ugroupe de travail jus de Fruits de l ' Institu tNational d'Hygiène, en liaison avec le Hau tComité d ' Étude et d' Information sur l'Alcoo-lisme .

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même étant bien moins abondante etmoins industrialisée, est moins cons -tante, ce qui oblige à changer souven tde fabrication . Autrement dit, la solu-tion de paresse qui consiste à importe rles usines directement des États-Unisest fort onéreuse, car mal adaptée autravail en Europe .

Tout ceci ne veut pas dire que nou sdevons nous désintéresser des tech-niques américaines pour ne dévelop-per que les nôtres ; il faut aussi envi-sager l'avenir, certainement marqué

par une industrialisation plus poussée ,le développement du froid artificiel ,peut-être des procédés nouveaux de sté -rilisation, etc . . . Les techniques sontd'ailleurs en pleine évolution aux États -Unis et il est profitable de les suivr eavec attention .

Sans entrer dans le détail, nous allonsessayer de dégager quelques grand sprincipes qu'il ne faut pas perdre d evue lorsque l'on tente d'améliorer le sméthodes de production et de distri-bution des jus de fruits .

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JUS DE FRUIT S

PRODUCTION, CONSOMMATION, EXPORTATIO NET IMPORTATION FRANCAISES EN 1936 ETDE 1950 A 1956,EN MILLIERS D' HL .(LES CHIFFRES DE 1956 SONT PROVISOIRES)

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Le milieu à stabiliser .

Pour faciliter la compréhension desopérations qui sont nécessaires dansla préparation des jus de fruits, il fau tbien connaître leur composition, leurétat physique et les transformation sdont ils sont le siège .

Il est courant, dans une certaine pro-pagande, de dire que les jus de fruitssont des liquides vivants, comme on l edit aussi du lait ou du sang . II est plus

exact de dire qu'ils proviennent de tis-sus vivants, puisque selon la définitio nlégale ils sont produits par la pressio ndes fruits frais, sains et mûrs ; par lasuite, naturellement, on ne peut plusparler de vie puisqu'il n'y a plus d estructure cellulaire ni de multiplica-tion. Cependant, les échanges conti-nuent avec l'atmosphère, et surtou tune transformation des constituant sse poursuit activement au sein du li-quide ; en outre, au bout de quelquesheures une prolifération intense de mi-cro-organismes provoque des nouvelle stransformations du milieu et le déna-ture rapidement . En effet, les jus d efruits et de légumes à de rares excep-tions près (airelle, oignon) constituentdes milieux de culture parfaits pourtoutes sortes de micro-organismes, e ngénéral acidophiles : levures, moisis-sures, bactéries lactiques par exemple .

Le mélange, provoqué par la pres-

sion, des divers liquides et colloïdes qu iétaient séparés dans les cellules, occa-sionne des réactions chimiques et en-zymatiques qui aboutissent à des dégra-dations des constituants naturels et àl'apparition de nouveaux constituants ;en outre interviennent dans ces réac-tions des composés étrangers aux fruit set qu'il est difficile d'éviter : l'oxygèneen premier lieu, dissous dans le liquidecomme dans l'eau (on sait que l'oxy-gène est plus soluble dans l'eau que

l'azote) et à la surface en contact ave cl'air ; les métaux aussi, comme le fe rou le cuivre qui peuvent interveni rcomme catalyseurs, les résidus de trai -tement des fruits, les solutions de net-toyage des fruits et du matériel si l elavage est insuffisant, les hypochlo-rites de l'eau, etc . . .

Ainsi la connaissance du milieu ju sde fruits et de son évolution nous tracela voie dans les méthodes qui devrontêtre choisies pour sa préparation et s astabilisation de même il ne faut pasperdre de vue le but qui est très parti-culier : il s'agit d'offrir au consomma-teur des boissons qui rappellent le plu spossible, par leur arôme et leur fraî-cheur, la saveur du fruit frais, tout e ngardant au mieux ses qualités nutri-tionnelles et tout en étant de présen-tation agréable . En effet, l'intérêt duconsommateur (qualités nutritionnelle set organoleptiques) doit rejoindre celui

du producteur de fruits, qui est de déve-lopper la consommation des fruits, pouraboutir en définitive à une oeuvre d'in-térêt public (alimentation équilibré edes populations, antialcoolisme, ré-sorbtion des excédents fruitiers) .

Problèmes de stabilisation .

Puisque l'industrie des jus de fruitsn'est pas une industrie de transforma-tion comme celle du vin ou seulementune distribution comme celle du laitfrais, elle est en réalité une industrie deconserverie en nature, après quelque sopérations d'affinage destinées à pré-parer le produit pour le rendre attrac-tif et consommable .

Le problème de la stabilisation estdouble, d'après ce qui ressort de l acomposition du milieu tel que nousl'avons décrit après le pressurage :

i° Éviter autant que possible que le sactions chimiques qui se produisententre les constituants mis en présenceartificiellement par le pressurage, e tcatalysées par les enzymes naturels e tles métaux introduits accidentellement ,ne se développent trop rapidement e naltérant les qualités naturelles du jusfrais : brunissement, oxydation, goûtde passé, amertume, etc . . .

z° Interdire le développement desmicro-organismes qui, dès le début, ac-tivent les altérations en agissant pa rleurs ferments et qui, après un certaintemps, dénaturent complètement le ju sen métabolisant les constituants le splus importants .

En général on néglige trop le premierproblème pour s'arrêter au secon dparce qu'il paraît plus urgent à ré-soudre .

Examinons maintenant, à la lu-mière de ces principes, quelle devr aêtre la marche à suivre dans une pré-paration scientifique des jus de fruits .

Extraction .

Il s'agit de faire sortir de la pulpe d efruits, par pression, le liquide qu'elle scontient afin de pouvoir obtenir un jusfacilement transformable en boisso npar affinage .

Pour le raisin, en Europe tout a umoins, on utilise les procédés classique s

PHOTO I .Table d ' extraction d ejus d'agrumes Colin .

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de vinification, pour des raisons de tra-dition, de matériel existant, d'habi-tudes dans la vendange, etc . . . On peutvendanger en comportes si la vendangeest saine, fouler, presser au pressoi rmécanique ou hydraulique ou encore àla presse continue (qui donne un moûttrès chargé) . Si la vendange est moinsbelle, il est préférable de l'apporter àl'usine en récipients de petite taille pou réviter l'écrasement des grappes, puisde laver le raisin avant de l'égrapperet le fouler .

Lorsque l'installation est mixte, onréserve au jus de raisin le produit del'égouttage en cuve de la vendange fou-lée : c'est le jus de goutte ou de saignée ;le reste est laissé à la vinification . Cejus de goutte est riche en sucre et facileà clarifier, mais il est pauvre en ta-nins, colorants et autres principes pro -venant de la pellicule .

Le procédé américain consiste à trai-ter le raisin comme une baie dont onveut retirer surtout les arômes et lescolorants : après égrappage les grainssont chauffés, puis passés à la press econtinue ; le jus est donc très chargé etfortement aromatisé, ce qui, avec lescépages américains, donne des bois-sons peu recommandables pour le goûtfrançais .

Les baies (cassis, framboise, gro-seille) sont donc traitées, en Europe ,pour en retirer le maximum d'arômes ;aussi leur jus n'est pas consommabl epur, mais en mélange avec d'autre sjus sucrés ou dans les boissons .

La pomme, étant donné la résistancede sa pulpe, doit être déchiquetée pa rune râpe ou un broyeur à marteau xavant d'être soumise à l'extractionsous une presse hydraulique .

Cette extraction n'est possible quepar une répartition de la pulpe en pa-quets superposés, dans des toiles depresse séparées par des clayettes debois qui permettent le drainage . Lejus qui en sort est déjà relativementdébarrassé des débris cellulosiques .

La poire est traitée, soit comme lapomme, soit comme les fruits à noyaux .Ceux-ci (abricot, pêche, prune) sont engénéral transformés en pulpe par pas-sage à la presse continue ou à la pas-soire, avant ou après dénoyautage .Maison les traite aussi parfois - c'est

souvent le cas de la cerise - à la pressehydraulique en paquets.

Passons maintenant aux agrumes .Les oranges, les pomelos et les citronsne sont jamais pressés en vrac, pou réviter le passage dans le jus des es-sences de l'écorce qui, étant riches enterpènes, s'oxyderaient en donnant dessaveurs désagréables de térébenthine .On a donc dû mettre au point des ma -

PHOTO 2 . - Clarificateur-débourbeu rAlfa-Laval .

chines qui extraient le jus de la pulp esans le mettre en contact avec l'écorce ,en général en reproduisant mécanique -ment le travail manuel du presse-ci-tron (photo 1) .

Le cas des mandarines est spécial ,car elles peuvent être facilement éplu-chées à la main avant de passer au pres -soir continu .

L'ananas enfin est passé à la pressecontinue après écorçage ; d'ailleurs l aplupart du temps on ne fait de jus d'ana-nas qu'avec les parties de la pulpe qu ine sont pas retenues pour la fabrica-tion de la conserve en tranches .

La tomate que l'on peut considérercomme un fruit ou un légume, pass edans une découpeuse avant de donnerson jus dans une presse continue, soità froid, soit à chaud .

Les autres légumes dont autant decas d'espèce ; le jus limpide est obten upar un broyage suivi de pressurage e npaquets .

Les précautions à prendre lors de cesextractions visent à éviter l'oxydationet la contamination par les métaux ,donc : rapidité, emploi de métaux inoxy-dables, propreté des toiles et du bois,emploi de matières plastiques (toiles e nnylon, vannes et tuyauteries en polys-tyrènes otf vinyle) .

Affinage .

L'affinage dépend du jus que l'on dé -sire obtenir ; pour le jus de tomate ,d'agrumes ou d'ananas, il consister aseulement à les tamiser pour enleve rles pépins ou les particules grossières ;pour les jus de pomme ou de raisi nil consistera à les clarifier plus oumoins complètement, par centrifuga-tion (photo 2), débourbage naturel o uau froid, collage divers, filtration enfin .

Les traitements physiques sont auto-risés, ainsi que certains collages clas-siques ; le traitement enzymatique n'estpas mentionné dans la législation, mai ssera sans doute aussi autorisé ; le trai-tement au ferrocyanure est interdit .

On peut aussi ranger dans ces opéra-tions la désaération, qui est indispen-sable pour certains jus, et l'homogénéi-sation parfois pratiquée pour éviter l aformation rapide d'un dépôt dans le sflacons au repos .

Toutes ces opérations doivent êtrepratiquées avec discernement pour évi-ter les oxydations et la contaminationpar les métaux, les saveurs étrangèreset les micro-organismes .

Un certain affinage sera toujoursnécessaire ; cependant il se peut que l epublic en vienne à préférer aux jus bril-lants des jus légèrement troubles,moins affinés par conséquent, et con-servant mieux l'arôme naturel du fruitqui vient d'être pressé .

Stabilisation .

L'emploi des antiseptiques et des an-tibiotiques a été préconisé pour obteni rdes jus de fruits à bas prix ; ces procé-dés sont interdits et c'est heureux, ca rs'ils peuvent empêcher les fermenta-

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tons, ils n'agissent pas sur les réac-tions lentes, chimiques ou enzyma-tiques . Leur autorisation permettraitde présenter au public des jus de qua-lité insuffisante, bien que stables biolo-giquement, et dangereux au point d evue de l'hygiène du tube digestif .

Cependant l'utilisation de l'anhydrid esulfureux est autorisée pour la conser-vation provisoire, et utilisée sur un egrande échelle pour le jus de raisin .En effet, cet antiseptique peut être en -levé dans les jus destinés à la commer-cialisation, par une opération de désul-fitation qui consiste à décombine rl'acide sulfureux et à l'entraîner pa révaporation .

Peu de désulfiteurs, malheureuse-ment, sont bien conçus et bien cons-truits ; beaucoup sont de simples éva-porateurs en cuivre ou en acier émaillé,travaillant souvent à l'air libre, c'est -à-dire à trop forte température . Avecl'augmentation rapide de la productiondes jus de raisin en France, il est permi sd'espérer que les quelques constructeursayant réalisé des appareils convenable spourront les multiplier .

Restent les procédés physiques d estabilisation . Actuellement, trois son tutilisables : le froid, la filtration sté-rile et la chaleur . L'action des rayonsultraviolets est décevante, car elle né-cessite une forte puissance pour lesjus rouges et les jus troubles et produi tdes altérations . Quant aux recherchessur les rayons ' et les rayons X, ellesen sont à leur début aux États-Unis.

PHOTO 3 . - Congéla -teur Daubron .

Le froid est certainement un procédépresque idéal : il ralentit les actions chi-miques, enzymatiques et biologique set permet donc de conserver pour unedurée illimitée les qualités naturelle sdu jus frais . Aussi a-t-il été envisagédepuis longtemps, à la fois pour la con -servation provisoire en vrac et pour l adistribution . Notons que c'est essentiel-lement l'emploi du froid (entre - 2 0et -- io°) qui a fait le succès du con-centré-congelé d'orange aux États-Unis, plus que le procédé de concentra-tion partielle avec réincorporation d ejus frais .

En Europe, de nombreuses tenta-tives ont été faites pour conserver l ejus soit en blocs, soit en neige . Ellesont échoué pour une simple raison d eprix de revient et par manque d'équi-pement frigorifique dans la distribu-tion des produits congelés ; mais, e nobservant avec quelle rapidité se déve-loppent ces derniers produits en Scan-dinavie et Grande-Bretagne, on peutpenser que le froid est bien un procéd éd'avenir pour la stabilisation des ju sde fruits.

Rappelons aussi que le froid, ménagécette fois, a seul permis le développe -ment spectaculaire des exportation sfrançaises de jus de raisins vers l'Alle-magne ; mais il s'agit là d'une conser-vation toute provisoire pour la durée del'affinage et du transport en vrac .

C'est d'Allemagne, par contre, quenous est venu le procédé de filtratio nstérile, en application d'ailleurs des tra

vaux de Pasteur ou Chamberland . Lesjus, une fois clarifiés, passent à tra-vers des plaques filtrantes en carton -amiante, qui retiennent les plus finesparticules, en particulier les levures e tmoisissures ; il est donc pratiquemen tstérile (les bactéries ne pouvant s'y dé-velopper) et à l'abri des fermentation ss'il n'est pas recontaminé .

L'avantage du procédé est de ne ja-mais chauffer le jus, s'il est embouteill éde façon stérile .

L'inconvénient est que les actionsenzymatiques ne sont pas stoppées ,bien que le jus soit déjà très appauvripar les clarifications et filtrations . Enoutre, au point de vue de la pratique in -dustrielle, il est difficile de réaliser lesconditions nécessaires d'asepsie descuves, pompes, tuyauteries, remplis-seuses, bouteilles et bouchages .

Le procédé le plus largement utilis éest l'emploi de la chaleur. Comm enous l'avons vu, les jus de fruits étan tacides sont bactéricides et seules leslevures et les moisissures (sauf dans l ecas des jus de tomate) sont susceptible sde s'y développer ; or, ces organismessont thermolabiles, au moins pour leur sformes en activité, de sorte qu'unesimple pasteurisation à 65° suffit àéviter les fermentations . Deux chauf-fages à 65° au moins, séparés par u nrepos de 24 ou 48 heures, permettentde détruire les formes actives, puis lesformes sporulées après leurs germina-tions : c'est ce qu'on appelle la tyndal-lisation .

En général on se contente d'un chauf -fage unique à 72-75° : c'est ce qu'onpeut appeler la pasteurisation basse, l aplus facile . Elle peut s'appliquer direc-tement sur le jus avant embouteillage ,au moyen d'un appareil échangeur d echaleur, chauffé à l'eau chaude ou à l avapeur détendue ; dans ce cas, on rem-plit à chaud les récipients avant de le sfermer .

Plus généralement, on remplit àfroid, on ferme définitivement le réci-pient en laissant un espace libre pourla dilatation, puis on pasteurise pa rimmersion, ou pulvérisation à l'eauchaude ; la durée totale de l'opérationdépasse 1/2 heure (photo 4) . Ce pro -cédé facile est sûr puisque le récipien test pasteurisé en même temps que le

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Tableau I .

Production américaine par espèces .En million d'hl, en 1955 ou par prévision, en 1956 .

Jus appertisés Jus congelés Concentrés a uau 1 /6

Concentrés a uau 1 /4 congelé s

Pomme o . 8Raisin 0,9 0,090Ananas 3Tomate 4Orange 2 .3

0 .014

0 .16 2, 6

Pomelojus refroidi : o, 6

1 .5

0,009 0,04MélangeOrange-pomelo 0 .5 0,02Citron 0,18

0,03

0,022 0,03

Nectars 0 .5limonade : 0,3 1

Prune juice . o,6

Production totale, volume ramené en jus frais : 27 millions d'hectolitres .

jus ; il a l'inconvénient de laissercelui-ci au chaud pendant trop long-temps, et de laisser au contact du ju sun volume d'air appréciable, qui pro -duit ensuite des altérations chimiques .

Aux États-Unis, la verrerie étantperdue ne retourne pas à l'usine, évi-tant le transport des verres vides et lesmachines à laver ; les bouteilles son tdéjà propres et peuvent être remplie ssans inconvénient par du jus chaud ,puis capsulées immédiatement . Quel-ques usines en France procèdent ainsi ,évitant l'espace libre en achevant à lamain le remplissage complet et en bou-chant avec des capsules à spot de caout -chouc .

De plus en plus on équipe les usinesavec des pasteurisateurs continus ca-pables d'obtenir une pointe de tem-pérature plus élevée, par exempl ero secondes à 95-980 : c'est ce que l'o nappelle improprement, les flash-pasteu-risateurs . Un tel chauffage n'occasionn epas de goût de cuit, car sa durée es tréduite, mais a l'avantage d'inactiver e ngrande partie les enzymes responsable sdes oxydations et brunissements ains ique de la destruction des pectines .

Poussant plus loin ce chauffage, o narrive maintenant à des température sde l'ordre de 12o à 15o n pendant untemps très bref, avec comme résultatune inactivation complète des enzymes ,une stérilisation presque totale et uneabsence de goût de cuit . Bien entendul'installation nécessaire doit être entiè-rement automatique (régulation et cir -

cuits de sécurité), en acier inoxydabl epoli, de formes étudiées pour éviter le sespaces morts et les mouvements tour -billonnaires où la surcuisson risquerai tde se produire .

Après la pointe de chauffage, le jusest rapidement ramené à la tempéra-ture de remplissage, celui-ci est effec-tué sans tarder, suivi du bouchage oudu sertissage, puis les récipients eux -mêmes sont refroidis .

Par ce procédé, on obtient des jus d efruits conservant au mieux leurs quali -tés et leur aspect ; aussi est-il en plein

développement malgré les investisse-ments qu'il entraîne .

La pasteurisation gagne aussi du ter -rain en ce qui concerne la stabilisationprovisoire en grands récipients ; ceux-c isont remplis soit à chaud, soit de préfé -rence à froid après stérilisation de stuyauteries, des parois et de l'atmo-sphère interne, avec du jus qui a étépastetirisé au moyen d'un échangeu rcontinu . Après quoi le remplissage dé-finitif des récipients fractionnaires né-cessite une seconde pasteurisation, aufur et à mesure des besoins de la vente .

Pttoro ¢. - Pasteurisateur Gasquet à gran drendement .

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PHOTO 5 . - Ensembl e

d 'appareils A . P . V . e n

acier inoxidable installé s

dans une usine de ju sde fruits .

Il reste à dire quelques mots d'unautre procédé de stabilisation provi-soire, qui donne toute satisfaction mai snécessite des investissements impor-tants : l'imprégnation à la dose de 1,5 0 ,de gaz carbonique, qui agit alors commeantiseptique . Suivant la température degarde, la pression nécessaire pour main -tenir ce taux de solubilité peut allerde 6 à 12 kg'cm 2 , nécessitant pour lescuves une épaisseur d'acier assez con-sidérable . Bien entendu, il n'est paspas question de maintenir une tell epression dans les bouteilles, aussi le ju sdoit-il être désaturé avant d'être em -

bouteillé, puis pasteurisé . Le gaz car-bonique n'entre pas en réaction avecles constituants du jus, il se dégag edonc immédiatement ; il offre l'avan-tage d'entretenir une atmosphère ré-ductrice et d'éviter ainsi l'oxydatio nlente qui peut se produire dans lestanks de garde de jus pasteurisé o umaintenu sous froid .

Remplissage, conservation en ré-cipient définitif .

Beaucoup d'essais restent à faire surle récipient idéal : est-ce le verre pour

sa propreté et son inertie, le fer-blan cpour sa facilité d'emploi et de transport ,le fer ou le métal verni évitant les im-portations d'étain, les plastiques rigide sou souples, les complexes ? Dans l'éta tactuel de notre technique et de nos ap-provisionnements, les récipients les pluscourants sont en verre ou en fer-blanc ;des tentatives sont faites avec des bon-bonnes de plastique semi-rigide (dis-tributions dans les écoles) et des sachetsde Rilsan ou de Mylar dont la soudur epeut résister à la chaleur. Bien entendu ,lorsqu'il s'agit seulement de distribue rdes jus congelés ou refroidis non sou -mis à une pasteurisation, tout réci-pient imperméable peut convenir ;ainsi un grand nombre de laiteries amé -ricaines livrent en même temps que l elait des boîtes en carton paraffiné d ejus d'orange produit en Floride, flash-pasteurisé, refroidi et transporté e nciternes sous froid . Ceci exige une orga-nisation sans défaut de la chaîne d ufroid et du système de distribution . I lavait été question en 1955 de l'appli-quer à une distribution massive au Sa-lon de l'Enfance, mais on a dû y renon -

Pnoro 6 . - Petit appareil de pasteurisationartisanal ou familial .

Tableau II .

Productions nationales .En milliers d'hectolitres, selon diverses sources .

États-UnisAllemagneSuisseEspagneItaliePhilippinesS . AfriqueCanadaFranceIsraëlHollandeDanemarkYougoslavieAutricheGrèceAlgérieMarocMarocA .-O . FImportations Canada

Grande-Bretagne .Allemagne

19 20095 4560

27 222 818 o168I1 5Io 59 08o

1 31 31 31 2

68o436122

22 2 7 5I 2I 2

71 836 427 0

18 68 o45507 61 5

I II I20

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cer et transporter des jus de raisin sou sforme pasteurisée, pour le livrer en ré-cipients de carton imperméabilisé à con -sommer immédiatement .

Il est bon de noter, pour terminer ,que les jus de fruits, malgré toutes le sprécautions prises, s'altèrent progres-sivement et gagnent à être consommé srapidement . Divers facteurs entrent enligne de compte dans cette altératio ninéluctable : oxygène présent, métau xcatalyseurs, action de la lumière, mai ssurtout et en première place, action de

la température . c'est-à-dire de l'acti-vité moléculaire . Autrement dit, le seulprocédé utilisable pour garder long -temps une solution aqueuse aussi com -plexe est le froid ; que le jus soit pur ouconcentré, ses réactions chimiques in -ternes sont d'autant plus actives qu esa température est plus élevée . Un autr emoyen pour éviter l'emploi des bassestempératures, si l'on veut conserver l aqualité, serait de supprimer l'eau, véhi-cule nécessaire pour les réactions chi-miques, et de maintenir la poudre ainsi

obtenue en atmosphère inerte ou sou svide : mais si une telle réalisation estpossible à l'échelle du laboratoire, ell ene l'est pas encore dans des condition ssatisfaisantes quant à la qualité ou a uprix de revient, à l'échelle industrielle ,tout au moins pour les jus de grand econsommation comme le raisin ou l apomme ; pour la tomate les résultat ssont encourageants, ainsi que pour le sjus dont le prix élevé justifie une pré-paration coûteuse, comme la fram-boise, le cassis ou l'abricot .

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