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la crue de 1910 n° 37 novembre - décembre 2009 Au fil de la Seine Le Journal de «La Seine en Partage» L’association de ceux qui aiment et qui protègent la Seine un siècle après

Les risques d'rue centennale de la Seine

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Page 1: Les risques d'rue centennale de la Seine

la crue de 1910

n° 37 novembre - décembre 2009

Au fil de la SeineL e J o u r n a l d e « L a S e i n e e n P a r t a g e »L ’ a s s o c i a t i o n d e c e u x q u i a i m e n t e t q u i p r o t è g e n t l a S e i n e

un siècle après

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Au fil de la Seine / novembre - décembre 2009 3

NOVEMBRE / DECEMBRE 2009N°37 L’éditoriald’yves jégo

4, rue du Pont Louis Philippe 75004 Paris Tél. 01 42 78 36 60 - www.seineenpartage.frAssociation loi de 1901 - Déclaration en sous préfecture de Provins (77) - N° 0773003154 Parution au journal officiel n°2794 du 7 juillet 2001 Siret 411 126 703 000 12 – code APE 913 E

Au Fil de la Seine Directrice de la publication et rédactrice en chef : Pascale DugatMaquette : priscillasaule.com / 86500 MontmorillonImprimerie : Iropa / 76000 RouenAbonnement 5 numéros 15 € / anEditions Seine en partage. Il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement sur quelques supports que ce soit le présent ouvrage (art L.122-4 et L.122-5 du code de la propriété intellectuelle) sans autorisation de l’éditeur.

Ce document participe à la protection de l’environnement :

il est imprimé par Iropa. Ce document

est imprimé avec des encres végétales.

Le 1er décembre, « La Seine en Partage » tiendra son colloque d’automne. Nous avons choisi comme thème de

cette grande réunion : « La Crue de 1910, un siècle après ».

Qu’on se rassure, nous n’avons pas l’intention de ressasser le passé. Ce n’est pas notre genre. Mais nous faisons trois constats : 1) Tous les experts sont formels : une crue centennale est certaine dans les mois ou les années à venir, 2) Toutes les mesures prises depuis un siècle seront insuffisantes pour limiter réellement les dégâts d’une telle inondation, dégâts qui seront d’ailleurs bien pires que ce qu’ils ont été en 1910 car nous avons considérablement urbanisé et industrialisé des zones inondables, 3) L’Etat a attribué aux élus locaux des responsabilités sans leur donner les moyens de les assumer.

Ces trois constats exigent notre mobilisation, l’ouverture d’un vrai grand débat public et, plus encore, des prises de décision. Il est toujours absurde et parfois criminel de se fermer les yeux devant un péril programmé. S’écrier, comme on le fait trop souvent à propos de tout et de n’importe quoi, « Après nous, le déluge ! » est une plaisanterie de très mauvais goût s’agissant des dangers d’une inondation car nous risquons fort bien, nous-mêmes, de connaître le déluge en question. Et ce ne sera, alors, pour personne le moment d’« ouvrir le parapluie », autre formule trop à la mode.

Depuis quelques années, la planète a connu des catastrophes sans précédent. Dans les pays les plus pauvres, le tsunami du Sud-est asiatique, comme dans les pays les plus riches, le cyclone de la Nouvelle-Orléans. On peut, naturellement, participer au débat qui oppose les fanatiques du progrès aux passionnés de la protection de la nature. Fallait-il dévaster nos forêts, supprimer les haies de nos champs, bétonner nos cours d’eau, modifier nos climats, s’attaquer à la couche d’ozone,

faire fondre les pôles ? Nous avons, sans doute, commis bien des erreurs en jouant ainsi les apprentis sorciers.

Mais ne confondons pas tout. La première inondation dévastatrice de nos régions, du moins la première à être recensée, date du… IXème siècle et, en 1910, personne ne s’en était encore pris à la forêt amazonienne. La colère des eaux n’a pas grand-chose à voir avec les errements de notre civilisation de progrès (ou de consommation).

C’est un tout autre débat qu’il faut ouvrir. De toute urgence.

Quand, demain, le niveau de la Seine atteindra 8 mètres, que ferons-nous ? Là est la seule vraie question. Nous, l’Etat, nous, les responsables des collectivités, nous, les citoyens. Avant de chercher à savoir pourquoi la Seine atteindra ces 8 mètres, il faut savoir ce que nous ferons pour sauver les populations, protéger tant bien que mal les biens, maintenir une vie quotidienne acceptable. Et prendre des décisions et, plus encore, les mettre en œuvre. En répartissant clairement les responsabilités des uns et des autres. Et en donnant à chacun les moyens d’assumer ces responsabilités.

C’est de tout cela dont nous débattrons au cours de notre colloque. Dans ce numéro d’« Au fil de la Seine » nous vous présentons déjà certains éléments de réflexion. Mais « La Seine en Partage » a pris d’autres initiatives pour que chacun puisse se mobiliser davantage face aux risques des inondations. Notre ami Michel Valache vous les rappelle dans son « mot du président ».

Commémorer la Crue de 1910 doit être, pour nous tous, l’occasion d’une prise de conscience collective qui doit mener à des prises de décisions.

Y.J.

03 Editorial d’yves jégo Une crue centennale Un siècle après, les risques sont toujours là et les dangers bien pires

04 Le mot du président Un colloque, des expositions, un livre document

05 Un anniversaire pour ne pas oublier et mieux se préparer par Pascale Popelin

08 Interview gérard Mignot, 280 établissements scolaires pourraient être inondés

11 Interview Dominique grandjean, Que deviendraient les animaux en cas d’inondation ?

14 Interview Thierry Dianne, « Si les Grands lacs relâchaient beaucoup d’eau, tout viendrait sur notre agglomération »

16 Interview Michel Bourgain, « Il faut sensibiliser l’opinion au risque d’une inondation »

18 France Télévisions et Radio France seraient mobilisées

20 Interview Frédéric gudin, « La proportion des bâtiments construits en zone inondable n’a cessé de progresser »

23 Interview olivier Brière, « Si le risque était davantage pris au sérieux tout le monde ferait ce qu’il faut pour se protéger »

26 Interview Benoît Deleu, « Le Canal Seine-Nord n’aura aucune incidence sur les crues de la Seine »

28 1910-2010 La Seine en Partage vous aide à commémorer la crue centennale

30 Crue 1910, kit de communication

31 Colloque Crue 1910 un siècle après

32 La Crue de 1910, au fil de la Seine Le premier livre présentant la crue

Dossier réalisé par Virginie Brancotte

Un siècle après,les risques sont toujours làet les dangers bien pires

Une crue centennale

BUREAU

Président-Fondateur : M. yves jEgo, député de Seine-et-Marne, maire de Montereau-Fault-Yonne

Président : M. Michel VALACHE, vice-président de la Chambre de Commerce et de l’Industrie de Paris

Présidents d’Honneur : M. Antoine RUFENACHT,ancien ministre,maire du Havre

M. gérard MILLET, maire de Melun

Vice-présidents : M. Pierre BoURgUIgNoN, député de Seine-Maritime, maire de Sotteville-lès-RouenMME. odile FoURCADE, conseillère générale des Hauts-de-SeineM. Pascal PoPLIN, président des Grands lacs de SeineM. jacques-Henri SEMELLE, élu à la communauté de communes des Deux Fleuveset de Montereau-Fault-Yonne

Secrétaire général : M. guy SIMoNNoT, maire de Marnay-sur-Seine

Secrétaire général adjoint : M. Adolphe LAMoT, association de protection des usagers et riverains des eaux navigables du Vauvray (A.P.U.R.E.)

Trésorier : M. jean DELAUNAy, adjoint au maire aux affaire fluviales de Conflans-Sainte-Honorine, vice-président du syndicat mixte de Seine et Oise

Trésorier adjoint : M. Vincent PAUL-PETIT, maire de Seine Port

LES MEMBRES DU CONSEIL D’ADMINISTRATIONTous les membres du Bureau sont membres du Conseil d’AdministrationM. gérard ANCELIN, vice-président du Conseil général de l’Aube, maire de Nogent-sur-Seine,M. jean-Louis AyME, président de l’association « les Amis de la Grenouillère »M. Alain CARLIER, Association Défense pour l’Habitat FluvialM. Bastien CoRIToN, maire de Caudebec-en-Caux M. guy DoLLAT, Périgny-la-Rose, vice-président de l’association des maires de l’Aube, président du syndicat mixte de l’aménagement de la vallée de la SeineM. jean-Michel MAUREILLE, Saint-Pierre-d’Autils M. jean-Louis TESTUD, adjoint au maire de Suresnes

Déléguée générale : MME. Pascale DUgAT

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« La Seine en Partage » a pris l’habitude d’organiser tous les ans un grand colloque d’automne. Le principe en est simple : réunir, sur un grand problème qui concerne la riveraineté, tous les « acteurs du fleuve » -élus, responsables économiques, associations-, tous les meilleurs spécialistes de la question abordée et tous les dirigeants des organismes officiels chargés de l’entretien et du devenir du fleuve.

Les premiers évoquent les problèmes auxquels ils sont (ou seront) confrontés sur le terrain, les deuxièmes présentent les réalités du dossier, les contingences matérielles, les exigences techniques, les derniers parlent de leur travail quotidien et des projets qu’ils élaborent. Chacun peut poser des questions aux uns ou aux autres, chacun doit répondre aux questions des uns et des autres.

L’expérience a démontré que, bien souvent, les uns et les autres s’ignoraient jusqu’alors et, plus encore, qu’ils ne soupçonnaient pas les questions que pouvaient se poser les autres et, moins encore, les réponses qui pouvaient y être apportées. Nos colloques permettent à tous de « tout mettre sur la table ».

Cette année, nous avons saisi l’occasion de la commémoration du centenaire de la Crue de 1910 pour traiter des inondations, problème essentiel, bien sûr, pour tous les riverains.

Chacun s’avoue pratiquement désarmé devant la perspective d’une crue semblable à celle de 1910. Personne ne peut rien contre la montée des eaux. Les Grands Lacs de Seine nous feront gagner 50 centimètres. C’est beaucoup mais, au-delà, ce sera l’inondation.

Il faudra alors évacuer les populations, fermer des entreprises, certaines écoles, transporter les biens les plus précieux, organiser les secours, le ravitaillement, les transports, l’eau potable, l’électricité, etc., assurer la poursuite d’une vie quotidienne dans des circonstances épouvantables.

Nous débattrons de tout cela au cours de notre colloque qui se tiendra le 1er décembre à l’Assemblée Nationale en étudiant les responsabilités, le rôle de chacun et les moyens dont les uns et les autres disposeront.

On hésite toujours à imaginer les scénarios catastrophes. Mais là, nous n’avons pas le choix. On sait que la catastrophe interviendra un jour, demain peut-être. Il s’agit donc d’imaginer les solutions pour y faire face. Mais les solutions ne seront réalistes que si chacun a pu se faire entendre.

Parallèlement à ce colloque, « La Seine en Partage » a pris d’autres initiatives pour mieux vous aider à mobiliser l’opinion publique face aux dangers de la crue.

je rappelle à tous les maires riverains que « La Seine en Partage » met gratuitement à leur disposition sur son site Internet tout le matériel nécessaire pour qu’ils puissent organiser chez eux une exposition présentant ce qu’a été la Crue de 1910 dans leur commune.

je rappelle aussi que « La Seine en Partage » fera paraître le 1er décembre un livre « La Crue de 1910 au fil de la Seine » qui sera le premier ouvrage présentant, avec plusieurs centaines de photos et de pièces d’archives souvent inédites, la crue tout au long de la Seine, dans pratiquement toutes les communes qui ont été touchées. Ce « livre du centenaire » est un document essentiel qui fera date. Vous pouvez le commander dès maintenant à notre secrétariat (164 pages, 20 €).

Nous sommes tous, nous autres riverains, menacés par une crue centennale, nous devons tous nous y préparer.

Michel Valache,Président de La Seine en Partage.

Chaque jour, des hommes et des femmes, barragistes, techniciens, administratifs, ingénieurs, élus des Grands lacs de Seine, travaillent à

protéger la métropole parisienne et tout le bassin amont de la Seine des petits caprices de la nature. Pourtant un jour, l’eau reviendra dans Paris, comme en 1910. Les experts sont formels, c’est une certitude dont seule la date est inconnue.

En janvier 1910, comme fréquemment dans son histoire, la Seine déborde de son lit. Le phénomène atteint une ampleur exceptionnelle. Le Zouave du pont de l’Alma a de l’eau jusqu’aux épaules. La cote maximale du fleuve atteint 8,62 mètres, le 28 janvier 1910. La crue paralyse les Parisiens pendant un mois.

Tirant les leçons des conséquences de cette inondation, les pouvoirs publics ont entrepris d’importants travaux de prévention, tout au long du XXe siècle : surélévation des murs de quais,

LE MoT DU PRéSIDENTMichel VALACHE

Les dangers d’une crue centennale

Un colloque, des expositions,un livre document« La Seine en Partage » se mobilise à vos cotés

par pascal popelin, président des grands lacs de seine

UN ANNIVERSAIREPOUR NE PAS OUBLIER

ET MIEUX SE PREPARER

« Nous sommes toujours vulnérables »

LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

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Les Grands lacs de SeineCréés en 1969, les Grands lacs de Seine sont un établissement public interdépartemental dont la mission est de réguler la Seine et ses affluents en particulier la Marne, l’Aube et l’Yonne, sur l’ensemble du bassin versant.

Avec ses 4 ouvrages d’une capacité totale de 830 millions de m3,ils assurent une double mission :• Atténuer les crues de la Seine et de ses principaux affluents en hiver et au printemps pour protéger le bassin à l’amont de Paris• Soutenir les débits d’étiages de ces cours d’eau en été et en automne pour éviter les sécheresses et les restrictions d’eau dans l’agglomération.

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approfondissement du lit de la Seine, reconstruction de certains ponts qui gênaient l’écoulement des crues, installation de stations de pompage et construction de quatre grands lacs réservoirs, gérés aujourd’hui par les Grands lacs de Seine.

Depuis la grande crue de 1910, d’autres crues remarquables sont survenues sur le bassin de la Seine, même si elles furent moins longues et de moindre ampleur : janvier 1924 et janvier 1955, notamment. Elles ont provoqué des dégâts significatifs. Mais depuis plus de cinquante ans, aucun épisode majeur ne s’est reproduit, conduisant à l’oubli de ce risque.

Pourtant, malgré les nombreux aménagements réalisés depuis cent ans, la vulnérabilité de l’agglomération parisienne et de son amont demeurent. L’évolution de notre mode de vie n’y est pas pour rien : de nombreuses zones inondables sont aujourd’hui largement urbanisées et les bâtiments exposés à la submersion n’ont pas tous été conçus pour être hors d’eau en cas de grande crue. Les réseaux de transports se sont considérablement développés. Nous sommes de plus en plus dépendants de techniques qui résistent mal à une inondation (électricité, télécommunications…). Une étude pilotée par les Grands lacs de Seine et conclue en 1998 évaluait à plus de 12 milliards d’euros le coût des dommages pour l’économie (hors réseaux) d’une nouvelle crue centennale sur le bassin de la Seine.

Pour réduire les dommages d’une crue majeure, la réglementation nationale et une directive européenne adoptée en 2007, qui sera transcrite fin 2009, imposent à l’Etat de mettre en œuvre une politique de prévention à l’échelle du bassin de la Seine. C’est en partie l’objet du plan Seine (2007-2013) pour lequel l’Etat, les Grands lacs de Seine, l’Agence de l’eau Seine-Normandie et plusieurs collectivités se sont engagés. Ce plan a été validé en novembre 2006.

Les Grands lacs de Seine interviennent d’une part, sur le volet de la réduction de la vulnérabilité des biens et des personnes face au risque d’inondation, d’autre part, sur le territoire de la Bassée en Seine-et-Marne.

LA REDUCTION DE LA VULNERABILITEDES BIENS ET DES PERSONNES

L’objectif des Grands lacs de Seine est de conduire les propriétaires installés en zone inondable à prendre les mesures nécessaires pour limiter les conséquences sur leurs biens et permettre un redémarrage plus rapide de l’activité socio-économique.

En Ile-de-France, les conséquences du risque d’inondation par débordement sont aujourd’hui considérables. Certaines grandes entreprises et administrations (RATP, hôpitaux, musées …) ont entrepris d’effectuer, depuis 2000, des diagnostics de vulnérabilité et d’initier des actions pour la réduire. Depuis peu, des collectivités territoriales font de même pour leurs collèges, unités de production de repas, crèches, maisons de retraite …

Le projet d’aménagement de la Bassée, étudié par les Grands lacs de Seine depuis 2001, consiste à retenir les eaux de la Seine pour laisser passer une crue de l’Yonne, en cas de simultanéité de ces deux évènements. En évitant la concomitance des deux phénomènes, l’ouvrage imaginé améliorerait fortement la protection de la région capitale.

Il serait donc dédié à l’écrêtement des crues. D’une capacité d’environ 55 millions de mètres cube, il permettrait un abaissement supplémentaire de 30 à 60 cm de hauteur d’eau, selon les lieux et les crues. On estime à 3 milliards d’euros le montant des dommages

LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

qu’un tel ouvrage pourrait éviter en cas de crue centennale. Il permettrait de surcroît de protéger de nombreux réseaux souterrains (RATP, EDF, SNCF, opérateurs téléphoniques). Des villes comme Ivry et Alfortville seraient mises hors d’eau pour des crues de type 1910. Montereau-Fault-Yonne serait mise hors d’eau pour des crues analogues à celles de 1955 et 1982.

Un cinquième ouvrage dans la Bassée pourrait aussi permettre une revitalisation durable des milieux alluviaux et plus généralement constituer un projet global fédérateur pour tous les usages et potentialités que recèle cette réserve d’eau régionale (gisement de matériaux, archéologie, navigation, agriculture, loisirs …).

Le coût de réalisation du projet est estimé à 500 millions d’euros. Les Grands lacs de Seine en poursuivent actuellement la mise au point sur le plan technique, en parallèle aux recherches de financement. Dans la meilleure hypothèse, les travaux pourraient commencer à partir de 2014. Si l’on veut bien considérer que les dommages liés aux crues de l’Yonne ont toujours généré les grandes pointes de crue dans la capitale, la réalisation de ce cinquième ouvrage constitue la priorité des politiques de lutte contre le risque d’inondation dans l’agglomération parisienne.

Le centième anniversaire de la crue de 1910 est l’occasion de nous rappeler que l’Homme, malgré tous les progrès de son savoir, ne domine pas complètement les éléments. Nous devons donc nous préparer le plus sérieusement et le plus efficacement possible au retour, un jour, d’une grande crue à Paris et dans le bassin de la Seine.

Pascal PopelinPrésident des Grands lacs de Seine

Auteur de « Le jour où l’eau reviendra »*

*« Le jour où l’eau reviendra » Editions Jean-Claude Gawsewitch - Parution le 3 décembre 2009

« Je sais tout »La Grande Revue de Vulgarisation Scientifique

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Que se passerait-il dans les établissements scolaires en cas de crue majeure de la Seine ? Les chefs d’établissement et les enseignants sauraient-ils réagir ? Des plans de protection sont-ils prêts ?

Afin de préparer l’éventualité de cet évènement, la direction de l’Eau du Conseil général des Hauts-de-Seine a identifié quarante et un sites du département situés en zone inondable et vulnérables au risque de crue (collèges, parcs, centres techniques et centres sociaux, pouponnière, foyer d’accueil pour enfants). Pour chaque site, un diagnostic de vulnérabilité a été établi qui a donné lieu à un plan de réduction de la vulnérabilité. Chacun de ces plans a été décliné en trois fiches : « avant la crue » (dès aujourd’hui), « pendant la montée de la crue » (gestion de crise) et « après la décrue » (remise en service). L’inspection académique a été étroitement associée à l’élaboration des plans concernant les collèges.

Gérard Mignot est chargé de mission sécurité à l’inspection académique des Hauts-de-Seine, consultant risques majeurs de l’ONS (Observatoire national de la sécurité des établissements scolaires ) et secrétaire général de l’IFFO-RME (institut français des formateurs risques majeurs et protection de l’environnement). Il nous présente les mesures mises en place dans son département en prévision d’une nouvelle crue importante de la Seine.

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C ombien d’établissements scolaires seraient concernés par

une crue de la Seine dans le département des Hauts-de-Seine ?Il y aurait approximativement 280 établissements touchés dans les Hauts-de-Seine. Le chiffre est approximatif car la cartographie des zones inondées n’est pas très précise. A un mètre près, un établissement peut être inondé ou non.

Certains établissements disposent d’un Plan Particulier de Mise en Sureté (PPMS). Comment le risque de crue y est-il pris en compte ? Le PPMS pourrait entrer en action dans le cas d’une montée brutale des eaux, piégeant le personnel et les élèves mais il ne s’applique pas au cas d’une crue centennale. Contrairement à la majorité des risques majeurs, imprévisibles, la montée des eaux est lente lors d’une crue. Les établissements scolaires seraient fermés par anticipation quelques 48 heures avant l’arrivée de l’eau. Les vies humaines ne sont donc pas en danger. La responsabilité du chef d’établissement s’exerce néanmoins pour la prise en compte des conséquences de l’inondation.

Quelles sont ces conséquences ?En cas d’inondation, il y aura une longue période de

déscolarisation qui pourrait durer deux ou trois semaines. La déscolarisation peut toucher aussi des établissements non inondés à cause des coupures de courant ou de téléphone et de la difficulté des enseignants à rejoindre leur poste compte tenu des difficultés de circulation à prévoir.Ensuite, quand l’eau s’en va, il faut faire un état des lieux pour évaluer les dégâts. Dans le cas des établissements anciens, aux murs en meulière, un coup de nettoyeur haute-pression peut suffire à un retour à la normale. Pour les constructions modernes avec des parois en placoplâtre, les dégâts peuvent être bien plus longs à réparer, allongeant la période de fermeture des établissements et de déscolarisation.Quelles solutions sont prévues pour la prise en charge des élèves dans le cas de fermeture des établissements scolaires ? Il est très difficile d’anticiper sur les dégâts occasionnés. Si une commune n’a que certains de ses établissements scolaires inondés, elle peut répartir les élèves sur d’autres établissements ou les accueillir dans des bâtiments provisoires. Mais dans le cas d’une commune qui pourrait être entièrement inondée comme Villeneuve-la-Garenne ou Gennevilliers, le problème est plus délicat à régler. De plus, personne ne sait à l’avance où seront transférées les familles déplacées et donc, dans quel

établissement doivent être placés les enfants pour ne pas être éloignés de leur famille.

Se sentir concerné par un risque hypothétique

Le rôle du responsable d’un établissement scolaire est donc de limiter les dégâts ? Le plus important est le travail de mitigation, c’est-à-dire de réduction de la vulnérabilité des enjeux. Le risque majeur est en fait le croisement d’enjeux et d’aléas. Il n’est pas possible d’agir sur les aléas mais la protection des enjeux peut être renforcée. Un chef d’établissement doit avoir réfléchi à ce qu’il devra faire entre l’annonce de fermeture de son établissement et l’arrivée de la crue, pour pouvoir mettre à l’abri le plus de matériel possible.

Le Conseil général des Hauts-de-Seine a élaboré des plans de réduction de la vulnérabilité face aux crues de la Seine pour les collèges. En quoi consistent ces plans ? Nous travaillons en étroite collaboration avec le Conseil général. Des fiches ont été établies pour permettre aux chefs d’établissement de réfléchir à ce qu’ils doivent faire avant, pendant et après une crue. Il faut imaginer, par exemple, que

hauts-de-seine :

280 établissements scolairespourraient être inondés

On s’y prépare

Un pompier opère, à Courbevoie, le sauvetage d’une fillette.Couverture du journal hebdomadaire « Le Monde Illustré » N°2758 C

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les photocopieurs rendus hors d’usage ne pourront certainement pas être remplacés rapidement pour cause de pénurie de ce type de matériel après une crue. L’enjeu principal est de pouvoir revenir le plus vite possible, après une crue de la Seine, à la situation normale. Pour cela, des experts sont passés dans les collèges pour faire des préconisations. Des fiches sont rédigées par le chef d’établissement et son personnel en fonction de ces préconisations. Tous les collèges identifiés comme inondables dans le département sont aujourd’hui en possession de ces fiches. Vous avez participé à la mise en place de ce programme. Quelles ont été les difficultés rencontrées ? Les chefs d’établissement ont déjà mille et un problèmes à régler au quotidien. Ils ne se sentent pas forcément concernés par un risque, très hypothétique, d’inondation. Pour eux, c’est un problème qui peut attendre après-demain. Il a été difficile de sensibiliser à la nécessité de se protéger et de mettre en exergue les difficultés du retour à la normale. Les plans d’organisation des secours peuvent-ils êtres les mêmes d’un établissement à l’autre ? Ils sont forcément différents car les hauteurs d’eau seraient différentes. Les fiches comprennent une échelle qui permet de savoir, pour chaque hauteur d’eau, les équipements qu’il faut commencer à mettre à l’abri. Si ce genre de choses est improvisé, non organisé d’avance, cela ne peut que mal se passer. Personnel et élèves sont-ils conscients du risque ? Nous allons profiter de la commémoration du centenaire de la crue de 1910 pour développer la sensibilisation dans les collèges. Il y a des enseignants

qui utilisent pour leurs cours des images d’inondations dans d’autres pays ou régions, sans savoir que leurs élèves habitent dans des zones inondables.

Comment les parents seraient-ils prévenus de la fermeture de l’établissement de leurs enfants ? Les parents seraient d’abord prévenus par les médias qui annonceraient les fermetures progressives des établissements, puis par des courriers ou des mots dans le carnet de correspondance. La crue laisse le temps de s’organiser. Pourtant dans certains DICRIM, la consigne « n’allez pas chercher

vos enfants à l’école » est encore associée au risque de crue. Au contraire, en cas de crue, il faudra aller chercher les enfants. Qu’en feraient les enseignants sinon ?

Des simulations sont-elles effectuées dans les établissements scolaires ?Il est déjà difficile pour les gestionnaires de réaliser ces fiches. Ils ne sont pas prêts à réaliser un exercice, qui devrait se dérouler en l’absence des élèves, et nécessiterait de démonter le matériel informatique pour le remonter après l’exercice. Mais nous le préconisons quand même.

Professeur et chef de service à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort, Dominique Grandjean est également colonel et vétérinaire biologiste en chef des sapeurs pompiers de Paris. Avec son équipe forte de quinze personnes et de quatre vétérinaires, il intervient dès qu’il est question d’animaux ou de risque biologique. Les animaux dangereux en difficulté ou blessés sur la voie publique sont de sa compétence. Autant dire que cet amoureux du Grand Nord et des chiens de traîneaux est un habitué des interventions délicates. En cas de crue importante de la Seine, il serait l’un des premiers sur le terrain pour prendre en charge les problèmes liés aux animaux des zoos et des animaleries mais aussi aux animaux domestiques… et à leurs maîtres. Il répond à nos questions.

Que deviendraientles animaux

en cas d’inondation ?

rien n’a été prévu s’inquiète le professeur grandjean

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L’inondation - Un épisode de l’oeuvre de la Croix Rouge.Revue « L’ILLUSTRATION » n°3493

PARIS - Jardin des PlantesLes Ours blancs

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Q uand on parle de crue centennale de la Seine, on pense davantage aux hommes et aux biens qu’aux animaux. Quels problèmes peuvent-ils poser ?

Il y a trois types d’animaux à prendre en compte. Les animaux domestiques tout d’abord qu’il faudrait récupérer et gérer, puis les animaux des laboratoires. Une ville comme Paris comporte plusieurs animaleries expérimentales qui peuvent être inondées. Des problèmes sanitaires peuvent également se produire avec la diffusion d’agents pathogènes. Enfin, il y a la faune sauvage.

En cas de catastrophe naturelle, le pourcentage de personnes qui trouvent la mort en revenant chercher leurs animaux est énorme. Comment l’éviter ? Le Japon et les Etats-Unis ont beaucoup travaillé sur le sujet. Ils ont montré que le retour dans la maison pour aller rechercher les animaux était très fréquent et générait beaucoup de sur-accidents. Pour le moment, nous avons peu d’expérience sur ce sujet en France car il ne s’est pas produit d’événements majeurs en milieu urbain.

Pensez-vous que les Parisiens sont suffisamment informés sur la conduite à tenir en cas d’alerte, notamment avec leurs animaux ?Non, ils n’ont aucune information. Il y aurait deux solutions. Soit nous demandons aux gens d’évacuer une zone et il faut un moyen de transport pour leurs animaux, des caisses, qu’ils n’auront pas. Soit, les gens évacués doivent signaler aux sauveteurs la présence d’un animal pour que les équipes de secours puissent lui fournir eau et nourriture. Les Sapeurs Pompiers sont dotés d’équipes animalières et de vétérinaires qui seraient là pour remplir cette mission.

Quelles seraient les autres missions de votre équipe en cas de crue majeure ?En plus de ces missions, nous participerions à la recherche de personnes non localisées avec des chiens de recherche. Nous aurions aussi à gérer les animaux divers qui vont se retrouver libérés par la montée de l’eau.

Comment se passerait la prise en charge des animaux des zoos et des fermes pédagogiques, comme le zoo du Jardin des Plantes ou la ferme de l’île Seguin qui sont en zone inondable ? Si les animaux n’ont pas été évacués avant, il est certain qu’ils parviendront à sortir de leurs enclos. Il n’existe pas de plan particulier. L’animal est du domaine du biologique et ce domaine n’est pas pris en compte dans le Schéma Départemental d’Analyse et de Couverture des Risques (SDACR) qui dresse l’inventaire des risques pour la sécurité des biens et des personnes et évalue les moyens de secours nécessaires. Les laboratoires qui

travaillent en milieu urbain sur des organismes hautement pathogènes peuvent subir une inondation ou un attentat, une explosion. Ils ne sont pourtant pas pris en compte non plus.

Plusieurs dizaines de milliers de reptiles dangereuxen région parisienne

Quels problèmes pourraient poser les « NAC », les « Nouveaux Animaux de Compagnie », serpents, mygales…? Ils poseraient des problèmes en terme de récupération et de gestion mais c’est notre problématique quotidienne et nous la connaissons bien. Il est certain qu’en cas de crue, des animaux dangereux se retrouveraient dans la nature. Les reptiles sont particulièrement nombreux, il y en a peut-être plusieurs dizaines de milliers dans la région parisienne. Le problème est de savoir ce qu’on en fait après les avoir récupérés. En 1997, j’avais écrit un gros rapport sous l’égide de l’Iaurif sur les animaux dangereux. Il y était préconisé que les situations difficiles liées à ces animaux soient gérées par les sapeurs pompiers et c’est le cas. Je posais aussi le problème du devenir des animaux capturés qui n’a jamais été abordé. Aujourd’hui, il n’existe aucun endroit pour les accueillir. C’est le système D qui prévaut. Même les zoos les refusent.

Quelle serait la solution à mettre en place pour ces animaux dangereux ?Il faudrait que les collectivités locales investissent dans une plate-forme sanitaire animalière qui pourrait être par exemple localisée sur l’Ecole Vétérinaire d’Alfort, ce qui permettrait de profiter de la main d’œuvre en grande partie gratuite des étudiants vétérinaires. Nous pourrions ensuite créer des relations avec des plates-formes définitives en France et à l’étranger. Si une crue arrivait demain, comment interviendrait votre équipe ?Nous travaillerions 24 heures sur 24. Nous pouvons nous faire aider par les équipes de maîtres-chien même s’ils ne connaissent bien que les chiens. J’organiserais une grande assemblée générale à l’école d’Alfort pour demander des volontaires parmi mes cinq cents étudiants. J’aurais sûrement ainsi trois à quatre cents volontaires pour nous aider.

A la brigade des Sapeurs Pompiers de Paris, vous êtes en charge des risques biologiques. L’inondation d’hôpitaux ou de laboratoires peut-elle provoquer la dissémination de produits dangereux ou d’agents infectieux ?

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Cela dépend des organismes, certains supportent l’eau, d’autres non. Les virus grippaux par exemple ou le charbon aiment l’eau. S’ils se retrouvent dans l’eau, leur durée de survie serait suffisante pour qu’ils se retrouvent en aval de Paris. Les conséquences de l’inondation des laboratoires seraient importantes du point de vue sanitaire mais aussi pour les animaux d’expérimentation qui s’y trouvent et pour les programmes de recherche. Vingt ans de recherche sur une souche animale peuvent être annihilés par la perte des animaux.D’autres risques sont liés à l’arrivée en surface des rats qui vivent habituellement dans les égouts. Ils peuvent être porteurs de leptospirose, voire même de peste.

Qu’est-ce qui pourrait être amélioré pour la prise en charge des animaux et la gestion des problèmes qui leur seraient liés en temps de crue ?Il faudrait lister les possibilités et les scénarios par avance. Mais pour cela, il faudrait reconsidérer la place de l’animal dans notre société, en particulier en milieu urbain. Pour le moment, seule la protection des personnes et des biens est prise en compte. Il faudrait prendre en compte les personnes, les animaux et les biens car les animaux ont des dimensions affectives, pécuniaires et de risque biologique. Si on accorde un fonds d’âme à l’animal, ne serait-ce que parce qu’il est capable de souffrir, il faudra bien à un moment le mettre dans les priorités au-dessus d’une chaise. Les lois évoluent, en général après un évènement majeur. S’il n’y avait pas eu la catastrophe de Seveso, il n’y aurait pas eu la loi Seveso.

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CHATeNAy-SUR-SeINe(Seine-et-Marne)

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LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

Page 8: Les risques d'rue centennale de la Seine

C omment se présente le réseau aquatique sur le territoire du syndicat ?Nos cent vingt kilomètres de cours d’eau sont composés de canaux et de quatre

bras de Seine en parallèle qui traversent Troyes et l’agglomération troyenne. Au cours des siècles précédents, la Seine a été divisée pour les besoins des activités industrielles, tanneries, teintureries, moulins… Quand la force motrice de l’eau a été abandonnée à la fin du XIXème siècle, les ouvrages ont été abandonnés aussi. Nous avons donc un réseau complexe et obsolète. L’autre particularité

est que la Seine n’est pas domaniale sur notre territoire, elle appartient à des propriétaires privés qui possèdent les berges et la moitié du lit.

Quelles sont les missions du SAVSAT dans ce contexte ? Au tout début, l’objectif était de réintroduire l’eau dans la ville. 20% du réseau est busé, une grande partie des autres cours d’eau est bordée par le réseau routier. Nous voulions améliorer la qualité environnementale des cours d’eau avec des vélovoies, des berges arborées, des cheminements piétons…

Le SAVSAT, syndicat d’aménagement de la vallée de la Seine de l’agglomération troyenne établi à La Chapelle-Saint-Luc, a pour vocation de prévenir les inondations, d’assurer la surveillance et l’entretien des digues, de participer à la préservation et à l’amélioration des cours d’eau et milieux humides et de sensibiliser la population. Le syndicat gère un territoire qui s’étend sur quatorze communes, totalisant 130.000 habitants, et comprend cent vingt kilomètres de cours d’eau, quinze kilomètres de digues, dix-sept ouvrages et cinq déversoirs.Créé en 2003, ce syndicat mixte a mis en place un plan pluriannuel de programmation d’un coût total de dix millions d’euros, financé par l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, l’Europe par l’intermédiaire du FEDER, l’Etat dans le cadre du Plan Seine, la région Champagne-Ardenne, le Conseil général de l’Aube et le comité départemental de tourisme. Thierry Dianne est directeur général des services du SAVSAT. Il nous parle des réalisations et des projets du SAVSAT dans le cadre de la lutte contre les inondations.

« Si les Grands lacs relâchaient beaucoup d’eau, tout viendrait sur notre agglomération »selon thierry dianne, directeur général du savsat

inquiétudes dans la région troyenne

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LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

Mais le diagnostic réalisé en 2004 a montré l’état de dégradation avancé dans lequel se trouvait le réseau. Comme l’a dit alors le président du syndicat, Valéry Denis, « Nous voulions nous faire beau et juste aller chez le coiffeur mais nous nous sommes rendu compte que nous avions d’abord besoin d’une visite chez le médecin ». C’est de ce constat qu’est né le programme de travaux 2007-2012.

Quelles sont les différentes phases de ce programme ? Le programme comporte cinq phases d’un an d’un coût de deux millions chacune. Il vise à la mise en sécurité des ouvrages qui sont soit restaurés, soit effacés. Nous mettons en place des systèmes modernes de clapets mobiles automatisés et même télégérés pour remplacer les anciennes portes qui étaient jusque là manœuvrées grâce à des roues crantées. En automatisant, nous gagnons en sécurité.

Le risque d’inondation est-il fort sur le territoire de la SAVSAT ?Il existe mais, dans l’esprit des Troyens, le risque a disparu depuis la construction des barrages réservoirs Seine et Aube. Tout le monde pense que nous sommes désormais tranquilles. La plupart ignorent que, en cas de besoin, les réservoirs restituent leur eau, non pas en aval de l’agglomération, mais en amont. S’il y avait un jour un gros problème qui oblige la direction des lacs à relâcher beaucoup d’eau, tout viendrait sur l’agglomération et en particulier dans la partie centrale, la plus urbanisée.

15 km de digues en très mauvais état

Quelles sont les dernières grandes inondations qu’a connues l’agglomération troyenne ?La crue de 1910 a marqué les esprits. Depuis, il y a eu des épisodes importants de crues en 1955 et en 1983. Cette année-là, il y avait un mètre d’eau dans certaines communes. Les habitants se déplaçaient en barque dans les rues. Cela a été l’occasion d’une vraie prise de conscience du risque.

La sensibilisation de la population est l’une de vos attributions. Quelles actions menez-vous ?Nous communiquons beaucoup via les médias. Nous avons signé des conventions de partenariat avec des établissements scolaires professionnels pour former les élèves aux bonnes pratiques et recréer une culture des cours d’eau. Nous accueillons beaucoup de stagiaires dans un but pédagogique. Enfin, il existe une convention entre l’agglomération et l’Unesco pour organiser des interventions dans les écoles primaires. Deux personnes de mon équipe

interviennent ainsi régulièrement dans les écoles. Enfin, dans la dernière phase du programme en cours, il est prévu d’installer des panneaux lumineux au bord des cours d’eau à des points stratégiques de l’agglomération. Ils indiqueront le nom de la rivière, le niveau actuel, le niveau de côte d’alerte et un code simple de trois couleurs, vert, orange, rouge, en fonction de la dangerosité de la situation.

Le programme prend-il en compte l’aspect environnemental lié aux cours d’eau ?Lors de la restauration des ouvrages, nous travaillons chaque fois en prenant en compte le milieu aquatique et la vie piscicole. Systématiquement, lors des réfections, nous installons des passes mixtes pour poissons et canoës. Quand le programme quinquennal de travaux sera terminé, les poissons et les canoës pourront parcourir la Seine dans toute l’agglomération troyenne.

De quels outils disposez-vous pour obliger les riverains à procéder aux mesures d’entretien qui leur incombent ?Les collectivités publiques qui possèdent 20% de notre linéaire nous ont confié la compétence. Nous n’avons donc pas de problèmes de ce côté. Les problèmes viennent des 80% du linéaire qui sont privés. Pour pouvoir pénétrer chez les riverains et entretenir nous-mêmes, nous devons signer des conventions avec chaque propriétaire. A titre d’exemple, sur un petit affluent de 7 km de long que nous venons de traiter, nous avons envoyé cinq à six cents conventions. Environ un tiers est revenu signé. Nous n’intervenons qu’une fois, en général pour abattre des arbres. Pour la suite, nous étudions la possibilité de facturer nos interventions ultérieures aux riverains.

Quels seront les objectifs du prochain programme de travaux ?Nous sommes en train de réfléchir à un futur programme sur l’entretien de nos quinze kilomètres de digues qui sont en très mauvais état. L’importance du programme dépendra des résultats du diagnostic qui va être réalisé le plus rapidement possible.

Sauriez-vous comment réagir en cas d’alerte de crue majeure ?Nous travaillons actuellement avec la Préfecture et la Protection Civile pour établir un code global avec les Grands Lacs de Seine. Le problème en cas de crue ne serait pas de gérer nos ouvrages mais de prendre en compte l’eau qui nous arriverait des lacs. C’est pourquoi nous participons à la remise à jour du Plan Particulier d’Intervention (PPI) des Grands Lacs qui a des répercussions directes sur le PPI de l’agglomération.

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Page 9: Les risques d'rue centennale de la Seine

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Maire de l’Ile-Saint-Denis (Seine Saint-Denis),

L’Ile-Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, est l’une des sept communes de France dont le territoire est entièrement situé sur une île. Lovée dans un méandre de la Seine, la commune occupe un territoire de cent hectares et regroupe 7.200 habitants. Trois groupes de deux ponts la relient aux communes limitrophes. Dévastée par la crue de 1910, l’Ile-Saint-Denis a vu son sol rehaussé depuis cette grande crue. Seuls quelques bâtiments sont encore au niveau de la ville de 1910. L’île reste cependant particulièrement vulnérable si une nouvelle crue centennale survenait. Michel Bourgain est maire de l’Ile-Saint-Denis depuis 2001. Il est également vice-président de la communauté d’agglomération Plaine Commune et vice-président de l’Association des Maires de France. Nous l’avons interrogé sur les mesures prises par la commune dans l’éventualité d’une nouvelle crue centennale.

MICHEL BOURGAIN : « Il faut sensibiliser l’opinion

au risque d’une inondation »40% de la commune sont inondables

Q uelles ont été les conséquences de la crue de 1910 pour l’île ?

L’île a été presque totalement inondée. Il existe des photos d’époque qui montrent la partie urbanisée, qui rassemblait alors quelques 2.500 habitants, complètement sous l’eau. Les champs qui entouraient la ville étaient certainement inondés aussi. Il n’y avait alors ni remblais, ni murets pour arrêter l’eau.

Quelle serait aujourd’hui la part de la commune inondée si une nouvelle crue centennale se produisait ? Des remblais ont été réalisés avant les années 50 avec des gravats de démolition. 60% de la superficie de la commune est désormais au-dessus de la ligne des eaux pour une crue de type centennal. La zone d’activité, une zone de vingt-deux hectares qui va devenir l’écoquartier fluvial, et la zone naturelle qui couvre trente hectares ne seraient pas inondés.

16 Au fil de la Seine / novembre - décembre 2009

Par contre, les 40% restants qui comprennent la partie la plus urbanisée, la zone historique centrale, sont toujours inondables.

L’Ile-Saint-Denis est une commune insulaire. La culture particulière propre aux îles est-elle encore présente chez les habitants ? L’insularité est un élément fondamental de notre identité. Le rapport à l’eau est très important et les crues sont partie intégrante de la relation à l’eau. Mais le souvenir des crues était lié à la culture marinière qui a disparu avec la diminution du trafic fluvial de commerce. Les derniers mariniers s’éteignent peu à peu. Il n’y a plus d’accostage de péniches marchandes depuis longtemps. Les crues de la Seine ne sont plus qu’un lointain souvenir. La crainte des inondations ne s’est pas transmise.

Les habitants de la commune ont-ils conscience qu’une crue centennale peut encore se produire ?Non. Ces trente dernières années, la régulation du cours de la Seine a fait qu’aucun évènement catastrophique ne s’est produit. Quand nous expliquons aux gens qu’il peut encore y avoir une crue centennale, c’est totalement abstrait pour eux.

Des épisodes de montées des eaux se sont-ils produits ces dernières années ? J’habite sur la commune depuis trente-cinq ans et je n’ai jamais vu d’inondation mais il y a parfois des infiltrations dans les caves. Je me souviens aussi qu’une année, les péniches étaient très hautes. Elles arrivaient au niveau des portes dans les murettes. Il n’y avait pas encore de batardeaux. Les portes étaient murées avec des parpaings quand l’eau montait. La dernière crue importante a eu lieu en 1955. Les murettes ont été rehaussées

récemment à la hauteur d’eau atteinte par cette crue de 1955.

Tout est-il prêt aujourd’hui pour affronter une crue type 1910 ?Si la crue arrivait maintenant, nous ne serions pas prêts mais nous le serons dans quelques mois. Notre Plan Communal de Sauvegarde (PCS) devrait être finalisé au deuxième semestre 2010. Le document est bien avancé. Il établit en particulier des règles d’urbanisme. Par exemple, en centre ville, il doit y avoir un appartement refuge au premier étage quand le rez-de-chaussée est occupé par un commerce. Il reste encore quelques cases à remplir dans le PCS mais ce n’est déjà plus un brouillon.

Savoir qui fait quoi, à quel moment

Quels sont les points qui ne sont pas encore réglés ? Il va falloir mettre au point l’articulation des rôles de chacun en cas de crue, les pompiers la préfecture, la police, la commune. Quelle est l’organisation de ces différents intervenants ? Comment les interventions de chacun s’harmonisent-elles entre elles ? Qui fait quoi ? A quel moment ? Tous ces points ne sont pas encore fixés. Il reste aussi beaucoup de problèmes concrets à régler. Ainsi, nous avons recensé tous les lieux de la commune pouvant servir de refuge aux victimes d’une crue. Nous sommes prêts de ce côté-là mais est-ce à la ville d’acquérir des lits de camp ou l’armée peut-elle les fournir ? C’est un exemple des problèmes concrets qu’il faut envisager avant que l’évènement ne se produise.

Comment sensibilisez-vous la population au risque de crue ? A l’occasion de la mise en place

de notre Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI), nous avions ressorti les photographies de la crue de 1910 sur la commune et présenté une exposition. Depuis, nous rappelons l’existence du risque dès qu’une occasion se présente. Quand une inondation catastrophique arrive quelque part, même dans un autre pays, nous en parlons dans notre journal municipal en rappelant que cela peut arriver chez nous aussi car nous sommes sur une île. L’information de la population est prévue dans le Plan Communal de Sauvegarde. C’est presque la partie la plus facile à mettre en place.

Dans le cadre du Plan Communal de Sauvegarde, vous mettez en place une réserve communale de sécurité civile, un groupe de personnes volontaires placé sous votre autorité et capable d’accomplir des missions de soutien et d’assistance aux populations en cas de crise majeure. Comment se passe cette mise en place ?Lors des dernières montées des eaux qui ont produit des infiltrations dans des sous-sols parfois habités, les employés communaux et communautaires ont aidé les personnes touchées à mettre meubles et électroménager à l’abri. La réserve, c’est une douzaine de volontaires qui connaissent bien la ville, formés et encadrés par le responsable sécurité de la mairie, qui viendront en renfort des employés municipaux. Le rôle de ces volontaires est aussi de réactiver la culture du risque. La mise en place de la réserve nécessite des manœuvres annuelles, des exercices qui permettront de montrer à la population que le risque existe. La mesure est très rassurante pour les populations qui savent, qu’en cas d’inondation, des gens sont formés et prêts à intervenir.

ILe SAINT-DeNIS (Seine-Saint-Denis) Quartier des Allumettes et du Saule-Fleuri

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LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

Le rôle de la radio comme de la télévision en cas de crise consiste à informer sur l’évolution des évènements mais aussi à rassurer les habitants et à faire passer

des messages de sécurité. « N’allez pas chercher vos enfants à l’école, ils sont pris en charge sur place » ou « evitez d’encombrer les routes et les réseaux de communications » sont des messages primordiaux dans les premières heures d’une crise. Des messages pratiques concernant la circulation ou le ramassage scolaire nécessitent également une diffusion rapide et justifient une organisation au préalable du partenariat à mettre en place dans ces situations extrêmes.

Les pionniers en la matière ont été la préfecture de l’Hérault et France Bleu Hérault qui ont signé la première convention de ce type en 2003. Dans ce département, la fréquence des inondations, notamment dans l’agglomération de Montpellier, a conduit les journalistes radio locaux à être fortement impliqués dans les épisodes de crise.

Claude Perrier, qui était alors directeur de France Bleu Hérault, a souhaité officialiser la mobilisation de ses équipes. Par cette convention, la Préfecture s’engage à communiquer toutes les informations relatives à la situation, son évolution, ses conséquences, les mesures de protection ainsi que les consignes et les conseils de sécurité. Elle prévoit également la présence d’un journaliste au centre opérationnel départemental (C.O.D.). Son rôle est autant d’informer ses auditeurs que de participer à la rédaction des messages en direction de la population. Du côté de la Préfecture, l’accord avec France Bleu Hérault assure au Préfet la certitude de pouvoir intervenir sur les ondes dès l’annonce de la crise, bien plus vite que ne peut le permettre la presse écrite ou la télévision.

D’autres conventions ont été signées dans la foulée par France Bleu Hérault avec les mairies de Montpellier puis de Lunel. Toutes deux entérinent la présence d’un journaliste aux PC de crise. Obligation lui est faite de respecter les règles de confidentialité et de déontologie inhérentes au fonctionnement du PC.

Opérateur d’importance vitaleDepuis 2006, il existe des conventions nationales

de partenariat signées par le Ministère de l’Intérieur, Radio-France et France Télévisions. Ces conventions nationales sont relayées localement par d’autres

conventions signées entre les Préfectures et les directions locales de France Bleu et de France Télévisions.

La convention nationale entre le Ministère et France Télévisions établit notamment que « en situation de crise, France Télévisions est tenu de diffuser les messages d’alerte à la population et les consignes de sécurité » et s’engage à diffuser gracieusement les communiqués du Ministère. En cas d’urgence, le ministre de l’Intérieur est habilité à faire procéder à l’interruption immédiate du programme normal. Le rôle du média est, avant la crise, d’informer la population sur les risques et les mesures de prévention ; pendant la crise, de faire le lien entre les autorités de l’Etat et la population et de relayer les consignes comportementales ; après la crise, d’informer la population pour faciliter le retour à une situation normale. La convention reconnaît les journalistes comme des « partenaires de la chaîne de communication de crise, indépendants mais responsables ». Légalement, l’Etat a de toute façon la possibilité de réquisitionner les médias.

Pour Philippe Mauger, coordinateur des mesures de défense et de sécurité civile pour France Télévisions, qui a suivi l’élaboration de la convention, il paraît néanmoins plus intéressant de mettre en œuvre un partenariat. « Il y a à l’intérieur de nos maisons des réticences à surmonter. Les journalistes sont souvent vus comme des empêcheurs de tourner rond. De l’autre côté, toute intervention de la puissance publique est vue avec méfiance. Grâce à cette convention, nous participons à des exercices communs qui modifient ces réflexes. Ils nous permettent de nous connaître et de mesurer les responsabilités des uns et des autres ».

La convention a déjà été mise en œuvre lors de la tempête Klaus en janvier 2009 avec France 3 Aquitaine. Philippe Mauger était aux premières loges : « Dès que Météo France a alerté, nous avons immédiatement modifié le programme. Les trois-quarts du journal ont été mis de côté et des gens de Météo France ont été invités sur le plateau.

Les conseils donnés très tôt à la population ont permis d’éviter qu’il y ait des victimes. Des émissions spéciales ont ensuite été programmées le soir et les jours suivants autour de la problématique des dégâts. Le nombre de prises d’antennes et de reportages a été démultiplié ».

En cas de crue de la Seine, France Télévisions entrerait en action de la même manière. La première étape serait sans doute la mise en action du plan d’alerte propre à France Télévisions, dont les locaux sont situés en bord de Seine. Classé « opérateur d’importance vitale » et équipé en conséquence, le média continuerait à émettre même en cas de coupure d’électricité. Il est moins sûr que les téléspectateurs pourront eux aussi continuer à jouir de l’électricité nécessaire à la réception des émissions. La radio, qui peut être alimentée grâce à des piles, possède sur la télévision l’avantage de pouvoir se passer d’électricité.

en cas d’inondations

France Télévisions et Radio Franceseraient mobilisées pour prévenir

et informer la populationLors d’un évènement climatique exceptionnel, la radio et la télévision sont les moyens de communication les plus adaptés à une communication de crise. Présentes dans chaque foyer, toutes deux permettent une information immédiate et permanente. Des conventions signées entre le Ministère de l’Intérieur, France Télévisions et Radio France établissent avec précision le partenariat entre Etat et médias en cas de crise. Au niveau local, les rôles des fréquences du réseau de France Bleu et des délégations régionales de France 3 font l’objet d’autres conventions signées avec les Préfectures.

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20 Au fil de la Seine / novembre - décembre 2009 Au fil de la Seine / novembre - décembre 2009 21

Les inondations sont considérées comme le premier grand risque naturel en France. Une commune sur quatre, près de trois cents agglomérations, sont concernées par ce risque. Une crue majeure de la Seine produirait des dégâts considérables dans l’une des zones les plus densément peuplées de France, voire d’Europe. Si cette éventualité se produisait, quel serait le rôle des compagnies d’assurance ? La Mission des sociétés d’assurance pour la prévention des Risques Naturels (MRN) est

une association qui regroupe la Fédération Française des Sociétés d’Assurance et le Groupement des Entreprises Mutuelles d’Assurance. Créée en 2000, elle a pour buts de mieux connaître les risques naturels et d’apporter une contribution technique aux politiques de prévention. Frédéric Gudin du Pavillon est président de la Mission Risques Naturels. Il est également directeur des assurances d’entreprises agricoles à la Fédération Française des Sociétés d’Assurance.

selon frédéric gudin du pavillon,président de la mission risques naturels

LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

C onfirmez-vous le chiffre d’une commune sur quatre concernée par le risque inondation en France ? Il est certainement inférieur à la réalité.

L’exposition au « risque inondation » est largement sous-estimée. Nous avons très souvent indemnisé des gens dans des communes qui sont considérées comme non inondables par les services publics.

Quelle est la particularité du système français d’indemnisation des catastrophes naturelles ? Le système français est fondé sur le principe de la solidarité nationale. En France toutes les personnes qui possèdent un « contrat d’assurance Dommages » sont couvertes contre les catastrophes naturelles alors que tout le monde n’est pas exposé au risque. Tout le monde paye la même surprime, même ceux qui habitent un dixième étage loin d’un cours d’eau. Le choix a été fait de mutualiser le coût des évènements climatiques. La seconde caractéristique est que l’assurance « contre les catastrophes naturelles » est obligatoire, non

pas dans le sens où l’assurance « habitation » est obligatoire, mais dans la mesure où le risque catastrophes naturelles figure automatiquement dans toute assurance « habitation ». Enfin, le système français est caractérisé par l’intervention de l’Etat qui doit avoir reconnu l’état de « catastrophe naturelle » pour qu’il y ait indemnisation.

Quels sont les avantages et les inconvénients de ce système ? L’avantage premier est que, grâce à ce système, tout citoyen français peut être couvert pour un prix modique, ce qui n’est pas le cas dans les autres pays d’Europe. Lors du tremblement de terre qui a secoué les Abruzzes en Italie en avril dernier, par exemple, très peu de gens étaient assurés. En France, tout le monde est assuré.En revanche, le système présente l’inconvénient de ne pas inciter à la prévention. Dans la mesure où tout le monde est couvert, il ne paraît pas prioritaire de réduire le risque. Depuis que le régime « catastrophes naturelles » a été mis en place en 1982, on constate

TROyeS (Aube)La rue du Labourat après le désastre

l’inquiétude des assureurs

« La proportion des bâtiments construits enzone inondable n’a cessé de progresser »

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d’ailleurs que la proportion de bâtiments construits en zone inondable n’a cessé d’augmenter.

Les catastrophes naturelles sont de plus en plus violentes et fréquentes. Le régime peut-il être mis en danger ? Pour le moment, le régime est équilibré. Il a fait la preuve de sa bonne adéquation aux besoins d’indemnisation des victimes. Mais nous entrons effectivement dans une phase de changements climatiques qui risque de modifier la fréquence de survenance des évènements. Si cette fréquence devenait trop importante, le système serait déséquilibré et la solidarité remise en question. Pour l’instant, 12% des primes Dommages sont consacrés au risque catastrophes naturelles, ce qui représente environ 20 euros par personne.

« Que les services publicss’intéressent davantage à la prévention »

En quoi les sociétés d’assurance sont-elles concernées par la prévention ? Nous intervenons dès le moment de la souscription. Un assureur doit accompagner son assuré. Plus l’assuré peut se prémunir contre les risques, plus sa relation à l’assureur est simple. L’intérêt de se préoccuper de prévention est également économique. Pour le moment, nous sommes sûrs que la prime « catastrophes naturelles » est suffisante mais si elle ne l’était plus, nous n’avons pas de souplesse pour augmenter cette prime. Pour cette raison aussi, la prévention est importante pour nous.

Que peuvent apporter les assureurs dans la réflexion sur les actions préventives ?Nous sommes présents sur tous les fronts de la prévention. Nous avons un rôle à jouer par notre expertise et notre connaissance du retour d’expérience post-sinistre. Vis à vis des services publics, nous jouons le rôle d’un aiguillon. La prévention est une affaire, non pas individuelle, mais collective. Ce n’est pas parce que vous construisez un mur autour de votre propriété que vous allez empêcher l’eau de monter. C’est

pourquoi nous voudrions que les services publics s’intéressent davantage à la prévention.

La prévention du risque inondation pourrait-elle être améliorée ? La connaissance du risque et sa cartographie doivent être améliorées. L’atlas des zones inondables n’est pas complet, il n’est pas homogène car réalisé par différentes instances, et n’est pas suffisamment connecté aux Plans Particuliers d’Intervention (PPI). Les PPI ne sont pas établis partout où cela serait nécessaire et certains PPI existent dans des zones qui ne sont pas exposées. La France est en train de transposer la directive européenne de 2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation. L’obligation d’une évaluation préliminaire du risque inondation va amener une amélioration notable de la connaissance du risque.

La Caisse Centrale de Réassurance (CCR) avait estimé en 2001 le coût d’une crue de type centennale en région parisienne à 5 milliards d’euros. Quelle serait aujourd’hui votre estimation ? Un coût de 5 à 10 milliards correspond à l’estimation des coûts directs, c’est à dire les frais de remplacement du mobilier détruit, les frais de pompage et la remise en état. Si l’on considère l’ensemble des coûts, avec les coûts indirects, les frais de perte d’exploitation pour les professionnels par exemple, le montant peut être estimé entre 15 et 40 milliards d’euros, une fourchette de chiffres avancée par la FFSA en 2005. A ces montants s’ajouteront des coûts économiques dans tout le pays. Paris est au cœur de l’activité en France. En cas de crue majeure de la Seine, l’activité serait freinée dans l’ensemble du pays.

Manufacture Nationale de SèVReS (Hauts-de-Seine)Atelier de montage - Affaissement du sol causé par les infiltrations

SèVReS (Hauts-de-Seine)Le Ponton de la Station du Pont de Sèvres22 Au fil de la Seine / novembre - décembre 2009

LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

les architectes face aux inondations

« Si le risque était davantage pris au sérieuxtout le monde ferait ce qu’il faut pour se protéger »

selon olivier brière d’« architectes de l’urgence »

PUTeAUx (Hauts-de-Seine)Rue des Pavillons après l’inondation

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LES RISqUES D’UNE CRUE CENTENNALE

Q uand ont eu lieu les inondations de la Somme en 2001, quels sont les constats qui vous ont conduit à créer la fondation « Architectes de l’urgence » ?

En 2001, dans la Somme, l’eau est restée très longtemps. Comme les instances publiques réagissaient peu, la grogne est montée dans la population. Nous, architectes, nous nous sommes demandés ce que nous pouvions faire. Au niveau gouvernemental, une enveloppe a été débloquée pour les inondations et le Ministère de la Culture s’en est vu attribué une partie. Le ministère voulait l’utiliser pour protéger et nettoyer les églises de la Somme. Il m’a semblé que les églises ne risquaient pas grand chose alors que nous avions beaucoup de sinistrés qui attendaient une expertise. Nous avons donc monté une association que le ministère a financée. Nous étions une vingtaine. Nous avons pu réaliser des expertises, prévenir les gens dont les maisons étaient ébranlées. Certaines ont été évacuées, d’autres étayées. Nous avons aussi réalisé un inventaire des dégâts qui a permis à l’Etat d’estimer le nombre d’habitats provisoires à prévoir.Dans votre site Internet, vous soulignez la capacité des architectes à travailler avec des

intervenants divers, élus, ingénieurs, assureurs, locataires et propriétaires. En quoi cela est-il un plus en cas de catastrophe naturelle ? Dans notre pratique professionnelle, nous sommes des créatifs mais aussi des gens de synthèse. Nous avons l’habitude de faire le bâtiment avec des gens différents chacun très spécialisé dans son métier. Aucun d’entre eux ne peut faire le bâtiment sans un architecte. Nous ne sommes pas omniscients mais nous sommes habitués à faire la synthèse des différents points de vue.

Des accords avec les sociétés d’assurance

Quel rôle pouvez-vous jouer avant les crues, en terme de prévoyance ? Nous aimerions travailler sur la prévoyance mais il n’est pas facile de mobiliser les moyens et il faudrait que nous soyons missionnés pour cela. Le plus important serait que les gens soient mieux informés. Si le risque était davantage pris au sérieux, tout le monde ferait ce qu’il faut pour se protéger.

La fondation « Architectes de l’urgence » a été créée en avril 2001 suite aux inondations de la Somme. Elle réunit des architectes, des ingénieurs et des planificateurs qui mettent leurs compétences professionnelles au service des victimes de catastrophes, qu’elles soient naturelles, technologiques ou humaines. En huit ans d’existence, les « Architectes de l’urgence » ont déjà participé à vingt-huit actions dans vingt-quatre pays différents grâce à l’implication de plus de mille architectes. Mise en sécurité, reconstruction des maisons, des écoles et des infrastructures, installations de réservoirs d’eau et réhabilitation des moyens de transport sont à leur actif. En France, ils sont intervenus lors des inondations de mars 2001 à Blendecques (évaluation du sinistre, aide aux sinistrés, diagnostics individuels), à Toulouse en septembre 2001 après l’explosion du site AZF (remise de fiches d’urgence et d’analyse individuelle des sinistres, visites des logements) ou encore dans le Gard lors des violentes inondations de septembre 2002 (assistance et conseils aux familles sinistrées, estimation des dégâts aux logements).Olivier Brière est architecte et dirige l’agence BG Concept installée à Compiègne. En 2001, lors des inondations de la Somme, il était président du Conseil de l’Ordre des Architectes de Picardie et a été l’un des fondateurs d’ « Architectes de l’urgence ». Il nous explique quel pourrait être le rôle de la Fondation si une crue majeure de la Seine se produisait.

Les inondations posent surtout des problèmes dans les bâtiments récents, plus fragiles que les constructions anciennes. Est-il possible de concevoir aujourd’hui des bâtiments qui résisteraient aux inondations ? Il y a deux aspects à prendre en compte. Le premier est d’éviter au maximum d’avoir à évacuer les gens. Car le problème est toujours de savoir où accueillir les gens évacués. Le second aspect est de trouver les solutions qui résistent le mieux à une inondation. Même quand les gens ne sont pas évacués, il leur faut l’électricité, l’eau et le chauffage. Il n’est pas difficile de concevoir des installations qui ne soient pas vulnérables aux inondations. On peut imaginer par exemple qu’un parking souterrain soit inondé sans problèmes pour les gens qui vivent au-dessus. Mais même si les connexions sont protégées dans l’immeuble, il n’est pas certain que les connexions publiques fonctionneraient encore.

Quelles seraient vos premières réactions après l’annonce de l’arrivée d’une crue majeure de la Seine ? Nous serions mobilisés très vite. Il y a dix mille architectes inscrits à l’Ordre des architectes en Ile-de-France. Nous pouvons nous mettre à la disposition de la Protection Civile pour détecter les situations de danger sur le bâti. Un autre de nos rôles consisterait à évaluer le nombre de gens à évacuer et à reloger. Nous avons développé une méthode d’estimation grâce à des analyses d’images satellites affinées par des données terrain. Nous pouvons participer à la sécurisation et à l’évaluation.

Après la crue, quelles pourraient être vos actions ? Lors des inondations de la Somme, nous avions mis en place des accords avec les principales sociétés d’assurance. Dès lors qu’il y avait expertise de notre part, les assureurs acceptaient de débloquer entre un tiers et la moitié des remboursements sans même aller sur place. C’était un gros avantage pour les sinistrés qui attendent parfois un expert six mois ou un an. Si nous parvenons au même type d’accord en cas de crue de la Seine, nous pourrons éviter la détresse de l’attente pour de nombreux sinistrés.

La conservation du patrimoine culturel, architectural et historique est l’une des missions que vous vous êtes fixées. Comment cela se passerait-il en cas de crue majeure à Paris ? Notre culture d’architectes est fondée sur la préservation du patrimoine. C’est donc un sujet important pour nous. Mais il n’existe pas de plan de bataille particulier. Au mieux, nous avons collectionné un peu de documentation sur cette question.

Votre rôle ne s’arrête pas à l’urgence. Après la crise, vous intervenez lors de la phase de reconstruction. Quel est alors votre rôle ?Nous faisons de la reconstruction dans le cadre de l’aide humanitaire. Quand nous intervenons à l’étranger, nous levons des fonds, nous sommes dans une logique de don. Quand nous intervenons en France, ce n’est pas de l’aide humanitaire. Nous laissons travailler les architectes.

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PARIS - Un déménagement au Quai de Billy

ASNIèReS(Hauts-de-Seine)

Le Quai d’Asnière

POISSy (yvelines) - Rue de Paris

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Q uelles seront les impacts de la création du nouveau canal pour la gestion des crues ? Le canal Seine Nord a bien un rôle à

jouer dans la gestion des crues dans la vallée de l’Oise. Le canal va de Compiègne dans l’Oise aux environs de Cambrai dans le Nord-Pas-de-Calais. Sur environ 20 km, entre Compiègne et Noyon, il est localisé dans la vallée de l’Oise. L’ouvrage a été conçu pour qu’en période de grande crue de l’Oise, comme cela s’est passé en 1993 et 1995, le canal offre une capacité d’évacuation supplémentaire de l’eau de l’Oise vers l’aval.

Que devient l’eau de la crue évacuée vers l’aval ? Le surplus d’eau arrive dans la Seine mais en début de crue, ce qui n’aurait aucune incidence sur l’aval. Le canal n’a en fait qu’une incidence très localisée, sur le secteur situé entre Compiègne et Montmacq, ce qui représente une longueur d’une dizaine de kilomètres. A cet endroit, le canal offre la possibilité de diminuer le niveau d’eau en période de crue de 20 cm en moyenne à Compiègne et d’un mètre à Montmacq. Nous

avons calculé qu’il permet d’atténuer l’importance de l’inondation pour cinq cents habitations. La diminution du coût des dommages en moyenne pour les cinquante ans à venir a été estimée à 3,7 millions d’euros par an. Pour une crue centennale, la diminution des coûts serait de 22 millions d’euros et de 9 millions d’euros pour une crue type 2001.

Des élus de communes riveraines, notamment de l’Oise, se sont inquiétés d’un risque accru d’inondation lié au canal. Que leur répondez-vous ? Nous avons toujours été attentifs au fait que le canal n’augmente pas les débordements à l’aval. La prise en compte de cette donnée nous était d’ailleurs imposée par le Ministère de l’Ecologie. Nous avons vérifié les incidences de la construction du canal grâce à des modélisations hydrauliques réalisées par les bureaux d’étude Sogreah et Ingerop. C’est à la suite de ces études que nous avons prévu, afin d’écrêter les crues, la construction d’un bassin de surstockage qui sera situé au nord de Montmacq, sur la commune de Chiry-Ourscamps. Il faut donc rassurer les maires de l’aval. Le seul impact du canal sur le niveau d’eau est très localisé et serait bénéfique en cas de crue.

Les travaux de creusement du canal Seine-Nord doivent commencer en 2010 pour une ouverture prévue en 2015. Le futur ouvrage, d’une longueur de 105 km, permettra de relier le bassin fluvial de la Seine au reste du réseau européen, en raccordant à terme les ports de l’Atlantique et de la Mer du Nord à ceux de la Mer Noire. Le nombre d’emplois généré par le chantier est estimé à 4.000. Une fois opérationnel, le canal pourrait permettre de créer de 10 à 15.000 emplois. Monstre de technicité au service du commerce international, le futur canal Seine-Nord présente des avantages non négligeables au regard du développement durable. Il est estimé que d’ici 2020, 17 millions de tonnes de marchandises emprunteront chaque année le canal, supprimant de la route près de 700.000 camions. Benoît Deleu est adjoint au chef du projet canal Seine-Nord Europe à Voies Navigables de France. Nous l’avons interrogé sur les conséquences de la construction du futur canal sur la gestion des crues et les inondations dans les bassins de l’Oise et de la Seine.

« Le Ca nal Seine-Nord n’aura aucune incidence sur les crues de la Seine »

répond benoît deleu, chef-adjoint du projet

répondant aux inquiétudes des riverains

Le canal n’aurait donc aucune incidence dans la vallée de la Seine en cas de crue importante ? Il n’a aucune incidence en aval de Compiègne dans la vallée de l’Oise, il n’en aurait donc pas non plus dans la vallée de la Seine.

Le canal pourrait-il servir d’exutoire aux eaux de la Seine en cas de crue ? Il n’a pas été imaginé que le canal serve de dérivation d’eau pour les crues de la Seine. En terme d’ordre de grandeur, les débits sur la Seine sont bien trop importants pour que le canal ne puisse les accepter.

Les impératifs de la gestion des crues ont-ils influé sur le choix du tracé définitif ? Les nécessités de la gestion des crues ont influé moins sur le tracé que sur la conception du canal qui a pris en compte la protection contre les inondations. Nous avons notamment, c’est un élément très important, travaillé en concertation avec les associations de riverains qui avaient été inondés en 1993 et 1995 ainsi qu’avec l’Entente Oise Aisne qui est chargée de l’aménagement des bassins de l’Oise et de l’Aisne et la Direction Régionale de l’Environnement (DIREN). Nous avions le choix de positionner la première écluse d’accès au canal en amont ou en aval. Le positionnement en aval aurait conduit à une réduction du lit majeur de l’Oise et aurait pu créer des effets négatifs. Il a donc été décidé de placer cette écluse le plus en amont possible afin que le canal puisse offrir une capacité d’écoulement supplémentaire. Un déversoir, c’est à dire un seuil en béton calé légèrement en dessous des digues du canal, est prévu en aval de l’écluse pour récupérer l’eau en cas de débordement.

La part fluviale du transportpassera de 9% à 13%

Le premier projet prenait exclusivement en compte la dimension « infrastructure de transport ». Suite à un avis du gouvernement, vous avez

décidé de prendre également en compte une dimension « développement du territoire ». Quelles ont été les conséquences stratégiques de cet ajout pour le projet définitif ? Le projet prévoit maintenant quatre plates-formes multimodales le long du tracé. Ces sites permettent de massifier la marchandise pour la transporter par bateaux et créent un lien avec la voie ferrée. Ces quatre plates-formes sont comparables dans leur fonction aux sites portuaires qui peuvent se trouver sur la Seine.

Dans quelle mesure les régions traversées par le canal vont-elles profiter d’un développement économique ? Les effets économiques se feront sentir à la fois dans les régions traversées avec la création d’activités nouvelles sur les plates-formes et de nombreux nouveaux emplois, mais aussi dans d’autres régions desservies par les voies fluviales. La construction du canal permettra de mailler plus densément le réseau de voies fluviales et de mieux positionner les installations portuaires dans les échanges interrégionaux de marchandises. Il aura notamment des incidences sur le développement des installations portuaires en Ile-de-France avec une augmentation globale du trafic de marchandises sur le Port de Paris. L’évolution prévue du trafic cinq ans après la mise en service du canal Seine Nord est de 4,5 millions de tonnes supplémentaires par rapport au trafic sans le canal. Le canal aura aussi pour effet de diminuer les coûts de transport sur le bassin de la Seine en apportant davantage de marchandises et en améliorant la productivité des bateaux qui peuvent désormais intervenir sur d’autres marchés en fonction des hausses et des baisses d’activité dans le bassin de la Seine et qui peuvent aussi mieux rentabiliser leurs voyages en évitant de revenir à vide. La part fluviale du transport de marchandises sur le périmètre de la Seine pourrait passer de 9% aujourd’hui à 12 ou 13% à l’ouverture du canal. Cela entraînera une augmentation des marchandises transportées en mode fluvial et une diminution du nombre de camions sur la route.

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PARISLa Crue de la Seine

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la prévision hydrométéorologique opérationnelle :

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Quelques éléments de contexteLa recherche de solutions efficaces pour prévoir

l’aléa crue et prévenir le risque inondation a conduit au rapprochement de deux disciplines complémentaires que sont l’hydrologie et la météorologie. C’est ainsi que le concept de prévision hydrométéorologique opérationnelle a été imaginé dans les années 70. Électricité de France (EDF) dont les activités de production sont très dépendantes des conditions hydrologiques, l’a mis en oeuvre au début des années 80 à la Division Technique Générale (DTG). L’intérêt de cette activité à EDF ne s’est ensuite jamais démenti. Son périmètre, initialement limité aux besoins de gestion des aménagements hydroélectriques, s’est peu à peu étendu à l’ensemble du parc de production auquel il apporte aujourd’hui une aide reconnue pour répondre à trois enjeux : la sûreté des installations, le respect des exigences réglementaires et l’optimisation de la gestion de la ressource en eau.

Cette activité concerne des bassins très variés, de quelques dizaines à quelques milliers de km2, le plus souvent montagneux, mais pas exclusivement, et comprenant tous les types de régime hydrologique.

Le risque crueD’une manière générale et sauf cas particulier

(cf. encadré), les barrages gérés par EDF n’ont pas vocation à écrêter le volume ou la pointe des crues sur un bassin versant contrairement à ceux qui sont

exploités par des organismes tels que l’Institution Interdépartementale des Barrages-Réservoirs du Bassin de la Seine (IIBRBS) sur le bassin de la Seine. Les exploitants d’EDF doivent cependant respecter une règle absolue : Assurer la sûreté de l’ouvrage et ne pas aggraver les conséquences de la crue. Ils appliquent par conséquent une gestion transparente qui consiste à faire en sorte que le débit sortant du barrage ne soit jamais supérieur au débit entrant.

Les Centres de Production Nucléaire d’Électricité (CNPE) situés au bord des fleuves, ont été conçus de manière à rendre très faible le risque d’inondation. Certaines actions d’exploitation sont cependant nécessaires pour maintenir les installations en état sûr lorsque le débit du fleuve atteint des niveaux exceptionnels.

Dans les deux cas, les prévisions de débit sont un outil d’aide à la décision précieux pour les gestionnaires des ouvrages.

Les outils de surveillanceCes enjeux de sûreté ont conduit à mettre en

place une organisation opérationnelle qui garantit les ressources pour les activités de surveillance. Deux centres de prévisions, l’un situé à Toulouse, l’autre à Grenoble, assurent une surveillance permanente avec du personnel sous astreinte. Les prévisionnistes disposent de moyens déportés à leur domicile leur permettant d’assurer une surveillance 24h/24.

La surveillance du risque hydrologique s’appuie d’abord sur un important réseau de mesures de terrain - pluviométrie température débit – dont une grande partie (700 points de mesure) est gérée directement par les équipes d’EDF. L’Entreprise fait également appel, dans le cadre de partenariats, à d’autres gestionnaires de réseaux d’observations tels que Météo France et les Services de Prévisions des Crues (SPC).

DTG dispose également de produits de prévisions météorologiques jusqu’à J+6 qui lui sont fournis par Météo France.

Données d’observations et prévisions météorologiques constituent les données d’entrée des modèles de prévisions des débits. Ces derniers ont une bonne capacité à reproduire la réaction du bassin versant à un épisode pluvieux. La performance globale de la prévision reste encore limitée pour l’essentiel, par la capacité des modèles météorologiques à prévoir les précipitations. C’est dans ce domaine principalement que devraient porter les actions de recherche et de développement technique de la communauté scientifique.

Les limites qui viennent d’être exprimées dans la capacité de prévoir les débits, conduisent les prévisionnistes à réfléchir sur des méthodes de communication de leurs prévisions qui intègrent les incertitudes en affichant un intervalle de confiance autour de la prévision. L’utilisateur final de la prévision peut alors prendre une décision en fonction du niveau de risque qu’il est prêt à accepter. Ainsi si l’enjeu est

fort, la mise en alerte pourra être déclenchée dès que la probabilité de dépassement d’un seuil atteint une chance sur dix seulement.

En amont de Montereau, EDF contribue à la surveillance du bassin de la Seine en mettant en œuvre des prévisions de débits au droit du barrage de Crescent situé sur le bassin de la Cure affluent de l’Yonne. Elles permettent l’anticipation des crues plusieurs jours à l’avance, donnant les moyens à l’exploitant de l’Unité de Production Est de réaliser le cas échéant un creux préventif sur la retenue et d’informer le Service de Prévision des Crues, la Préfecture de l’Yonne et l’IIBRBS. Les gains escomptés sont pour la région parisienne de 6 à 10 cm sur les lignes d’eau de la Seine en crue à Paris et pour le département de l’Yonne de 20 à 40 cm sur les lignes d’eau de l’Yonne en crue à Auxerre.

Situé à l’aval des barrages réservoirs Aube et Seine, le CNPE de Nogent quant à lui dispose d’un système d’alerte dont les différents seuils sont surveillés par la DTG à l’aide d’un modèle de prévision hydrométéorologique.

l’expérience d’Électricité de France

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Immeuble Jacques Chaban-Delmas - 101, rue de l’Université - 75007 Paris

9H00 Accueil des participants et ouverture du colloque Yves JEGO, président-fondateur de l’association, député de Seine-et-Marne, maire de Montereau-Fault-Yonne Michel VALACHE, président de l’association, vice-président de la CCIP

9H30 1910 toujours présent dans la mémoire collective : • Les riverains savent mais… ne veulent pas savoir. Michel VALACHE• Les grandes inondations de la Seine au cours des siècles. Louis HUBERT, directeur délégué de bassin, DIREN Ile-de-France

10H00 Qu’a-t-on fait depuis 1910 ?a) Pour limiter la crue :• Le rôle des Grands Lacs de Seine. Pascal POPELIN, président des Grands Lacs de Seine• Les aménagements du fleuve et des rivières. Gilles CHERIER, direction des Rivières Ile-de-France à l’AESN Thierry DIANNE, directeur général du syndicat d’Aménagement de la Vallée de la Seine de l’Agglomération Troyenneb) Pour limiter les dégâts de l’inondation :• Le Conseil Général des Hauts-de-Seine se prépare à une crue majeure : l’exemple d’un collège et d’une pouponnière. Anne GUILLON, directrice de l’Eau• Les mesures prises pour la lutte contre les inondations sur la rivière de l’Oudon. Gilles GRIMAUD, maire de Segré, président de la Communauté de Communes du canton de Segré et du Syndicat Mixte de la lutte contre les inondations sur le bassin de l’Oudon• Architecture et urbanisme face aux inondations. Bruno DUQUOC, architecte• Le réseau multipartenarial de prévention du risque inondation sur le bassin de la Meuse. Jacques JEANTEUR, président de l’Etablissement Public d’Aménagement de la Meuse et de ses affluents, conseiller régional de Champagne Ardennesc) Les dispositions législatives :• Mesures préventives et urbanisme. Brigitte MAZIERE, inspectrice générale de l’équipement honoraire• Évaluation de la pertinence de la couverture des PPRNI : Seine et autres bassins. Sarah GERIN, Ingénieur d’études à la MRN, doctorante CIFRE à l’Université de Paris Diderot• Législateurs et riverains : François LONCLE, député de l’Eure, ancien ministre

13H00 Déjeuner

14H15 Une catastrophe qu’on sait inévitablea) Les premières crues du XXIème siècle : Guy DANIEL, 1er adjoint de Sommières (30) en charge du risque inondation, membre du bureau du syndicat interdépartemental d’aménagement du Vidourle, inondations 2002 Gilles DUMAS, maire de Fourques (30), vice-président du Syndicat Mixte interrégional d’aménagement des digues du delta du Rhône et de la mer, inondations 2003 Eric DOLIGE, sénateur, président du Conseil Général du Loiret (45) président du Centre Européen de Prévention des Risques d’Inondation Jean-Pierre HURTIGER, vice-président du Conseil Général, maire de Gien, président de la commission Bâtiment et Construction du SDIS du Loiret, inondations 2003b) Les dégâts potentiels de la prochaine crue centennale : Roland NUSSBAUM, directeur de la mission des sociétés d’assurances pour la connaissance et la prévention des risques naturels

15H15 Qui fait quoi ?• Principe du management global de l’Etat. Hubert SEILLAN, professeur en droit du danger aux universités de Bordeaux et de Paris Descartes, rédacteur en chef de la revue Préventique Sécurité, directeur général du Groupe Préventiquea) L’Etat• Disposition Spécifique ORSEC inondations de la Zone de Défense de Paris. Etat des lieux et réponse de la Préfecture de Police à la crise. Martine MONTEIL, Préfet Secrétaire Général de la Zone de Défense de Paris, Préfecture de Police• Sur le terrain être prêt au pire. Hervé MARTEL, directeur général du Port autonome de Paris, chef de la navigation de la Seine, directeur interrégional du bassin de la Seine, Voies navigables de Franceb) Les collectivités• Les obligations et les responsabilités des maires en matière de lutte contre les inondations. M° Véronique FONTAINE ou M° Arnaud CHARVIN, avocats au Département Droit public de FIDAL Cabinet d’Avocats c) Les entreprises et la culture du risque : Pascal BOMBARDIER, ERDF, directeur territorial Val-de-Marne Jean-François DEPIERRE, directeur Régional Lyonnaise des Eaux Michel PLASSE, directeur Régional Ile-de-France VEOLIA Environnement

16H15 Les grands projets et la prise en compte des risques d’inondation François KOSCIUSKO-MORIZET, maire de Sèvres, vice-président du Conseil Général des Hauts-de-Seine, président du SIAVRM Thierry DUCLAUX, directeur général de Voies navigables de France Gérard SEIMBILLE, président de l’Entente Oise Aisne, 1er adjoint à la mairie de Pontoise

17H00 Clôture du Colloque Louis HUBERT, directeur délégué de bassin, DIREN Ile-de-France Michel VALACHE

Conditions d’inscription : Pour les administrations, les établissement publicset les collectivités territoriales, votre inscription doit être accompagnée obligatoirement d’un bon de commande ou d’un ordre de mission. Dès réception de votre inscription, vous recevrez une facture dûment établie.

Annulation : Elle doit être obligatoirement formulée par écrit, par [email protected] ou par fax 01 42 78 36 60.Pour les annulations formulées moins de 72 heures avant le colloque les frais d’inscription et du déjeuner ne seront pas remboursés.

Le nombre de places étant limité, merci de vous inscrire au plus tôt et de préciser l’identité des personnes qui vous accompagneront. Cette invitation ainsi qu’une pièce d’identité vous seront demandées à l’accueil. Nous vous remercions de retourner ce bulletin dûment rempli, accompagné de votre règlement, à : La Seine en Partage, Pascale Dugat - 4, rue du Pont Louis-Philippe 75004 PARIS

Pour les adhérents : 20 € x .............. personne(s) .............................. €Pour les non adhérents : 65 € x .............. personne(s) .............................. € Déjeuner (facultatif) : 35 € x .............. personne(s) .............................. € Soit un total de ............................. €

Participation aux frais du colloque par personne

Nom ...................................................................................... Prénom.........................................................................

Fonction ...........................................................................................................................................................................Tél. ......................................................................................... Fax.....................................................................................

Courriel .............................................................................................................................................................................Adresse ............................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

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