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Les services zootechniques et les pauvres Une initiative mondiale Collecte, coordination et partage de données d'expérience Les services zootechniques et les pauvres Plus de 600 millions de petits agriculteurs et pasteurs élèvent près d’un milliard de têtes de bétail. L’élevage peut contribuer à réduire la pauvreté dans de nombreux pays en développement – d’autant que la demande mondiale de produits d’origine animale tels que la viande et le lait ne cesse d’augmenter. Pourtant, la plupart des petits pasteurs – 95 pour cent – vivent très au-dessous du seuil de pauvreté et n’ont même pas les moyens d’acheter leurs propres produits d’élevage. Le présent ouvrage montre que les politiques et pratiques actuelles en matière d’élevage ne tiennent pas compte des besoins des petits exploitants, qu’elles les empêchent en fait de profiter des nouveaux débouchés, et propose des stratégies qui contribueront à donner aux éleveurs ruraux les outils dont ils ont besoin pour se libérer de la pauvreté. DANIDA BANQUE MONDIALE Agriculture, forêt et pêche Ministère royal des affaires étrangères du Danemark. 2, Asiatisk Plads DK-1448 Copenhague K., Danemark Tél.: +45 33 92 00 00 Fax: +45 32 54 05 33 Courier électronique: [email protected] Systèmes d´élevage et de parcours Division consultative technique Fonds international de développement agricole Via del Serafico 107, Rome, Italie Tél.: +39 06 5459 2455 Fax: +39 06 5459 2018 Courier électronique: [email protected] Département de l'agriculture et du développement rural de la Banque mondiale (DADR). Banque mondiale 1818 H street, N.W. Washington, D.C., 20433, États-Unis Tél.: +1 202 473 0347 Fax: +1 202 522 3308 Courier électronique: [email protected] DANIDA BANQUE MONDIALE

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Les services zootechniques et les pauvres

Une initiative mondialeCollecte, coordination et partage de données d'expérience

Les services zootechniques et les pauvres

Plus de 600 millions de petits agriculteurs et pasteurs élèvent près d’un milliard de têtesde bétail. L’élevage peut contribuer à réduire la pauvreté dans de nombreux pays endéveloppement – d’autant que la demandemondiale de produits d’origine animale tels que la viande et le lait ne cesse d’augmenter.Pourtant, la plupart des petits pasteurs – 95 pour cent – vivent très au-dessous du seuilde pauvreté et n’ont même pas les moyensd’acheter leurs propres produits d’élevage.

Le présent ouvrage montre que les politiques et pratiques actuelles en matière d’élevage ne tiennent pas compte des besoins des petitsexploitants, qu’elles les empêchent en fait de profiter des nouveaux débouchés, etpropose des stratégies qui contribueront à donner aux éleveurs ruraux les outils dont ils ont besoin pour se libérer de la pauvreté.

DANIDA BANQUE MONDIALE

Agriculture, forêt et pêcheMinistère royal des affaires étrangères du Danemark.

2, Asiatisk PladsDK-1448 Copenhague K., Danemark

Tél.: +45 33 92 00 00 Fax: +45 32 54 05 33Courier électronique:

[email protected]

Systèmes d´élevage et de parcoursDivision consultative technique

Fonds international de développement agricole

Via del Serafico 107, Rome, ItalieTél.: +39 06 5459 2455Fax: +39 06 5459 2018Courier électronique:[email protected]

Département de l'agriculture et du développement rural de la Banque mondiale (DADR).

Banque mondiale1818 H street, N.W.

Washington, D.C., 20433, États-Unis Tél.: +1 202 473 0347Fax: +1 202 522 3308Courier électronique:

[email protected] BANQUE MONDIALE

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Les services zootechniques et les pauvres

Une initiative mondialeCollecte, coordination et partage de données d’expérience

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© Fonds international de développement agricole (FIDA), 2004. Tous droits réservés.

Le présent rapport est le fruit d’un effort conjoint du FIDA, de la DANIDA, de la Banque mondiale, du DAAS, de l’université de Reading et d’institutions nationales duBangladesh, de la Bolivie, du Danemark, de l’Inde et du Kenya. Les opinions qui y sont

exprimées ne reflètent pas nécessairement celles de ces différentes organisations. Les appellations employées dans cette publication ne constituent en aucun cas une

prise de position, de la part du FIDA et de ses partenaires, quant au statut juridique d’un quelconque pays ou territoire, ou quant au tracé de ses frontières.

ISBN 92-9072-038-7

Photographies FIDA: R. Faidutti, couverture; G. Ludwig, vi; G. Bizzarri, xx; R. Grossman, 6; C. Nesbitt, 44; P. Zanettini, 66; G. Ludwig, 118; C. Nesbitt, 128

Composition: Fonds international de développement agricole

Imprimé en Italie par Ugo Quintily S.p.A.Rome, mars 2004

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Avant-propos vii

Remerciements ix

Résumé xi

Introduction 1

Chapitre 1 – Les éleveurs pauvres 7Nombre d’éleveurs pauvres 9Les systèmes de production des pauvres 10Le rôle de l’élevage pour les pauvres 12L’élevage et les groupes spécialement vulnérables 21Service dont ont besoin les éleveurs 30L’impact du développement de l’élevage sur les pauvres 39

Chapitre 2 – Prestation de services zootechniques 45Prestataires de services 45Financement des services zootechniques 60

Chapitre 3 – Des services zootechniques axés sur la pauvreté 67Renforcer les capacités des ruraux pauvres et de leurs organisations 68Assurer un accès plus équitable aux ressources naturelles productives et à la technologie 78Élargir l’accès aux services financiers et aux marchés 99Le VIH/sida et les services zootechniques 115

Chapitre 4 – Mesures recommandées 119Recherche des rendements les plus élevés 119Renforcer l’inclusion 120Mettre l’accent sur les problèmes clés 121

Références 129

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Table des matières

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Figures

Figure 1.1: Le cycle de la pauvreté pour les éleveurs pauvres 4Figure 1.2: Classement des meilleurs investissements 14Figure 1.3: Classement des sources de revenus 15Figure 1.4: Principaux problèmes mentionnés par les éleveurs 31Figure 2.1: Multiples avantages des organisations de producteurs

et des institutions communautaires 58Figure 3.1: Cadre et objectifs stratégiques du FIDA 68

EncadrésEncadré 1.1: L’élevage dans le district de Koraput 11Encadré 1.2: Lucia, veuve de l’ouest du Mexique 15Encadré 1.3: Introduction en République-Unie de Tanzanie

de chèvres à double usage nourries en enclos 18Encadré 1.4: Les Nandi au Kenya 26Encadré 1.5: Vues des agriculteurs concernant les systèmes

de culture en Bolivie 33Encadré 1.6: Les femmes en tant que liens avec la communauté

dans le programme de développement intégré de l’élevage à Koraput, dans l’Orissa 38

Encadré 1.7: Animaux laitiers et réduction de la pauvreté parmi les femmes dans le district de Ganjam, dans l’Orissa 40

Encadré 2.1: Le cas du Danemark: amélioration de la productivité de l’élevage au moyen de services consultatifs 49

Encadré 2.2: La loi sur la participation populaire en Bolivie 51Encadré 2.3: Vues sur la participation 52Encadré 2.4: Coûts de transaction de la prestation de services

aux pauvres 53Encadré 2.5: Modèle d’élevage de volaille au Bangladesh 55Encadré 2.6: Leçons tirées d’une campagne de vaccination de la volaille

réalisée dans le cadre du programme de développement intégré de l’élevage à Bastar (Inde) 62

Encadré 3.1: Services de vulgarisation pour les femmes au Pakistan 72Encadré 3.2: Cinq carences des services de vulgarisation en Inde 73Encadré 3.3: Stages pratiques pour agriculteurs pour une gestion

intégrée des ravageurs en Indonésie 77Encadré 3.4: La composante élevage du programme de renforcement

de la sécurité alimentaire au Cambodge 77Encadré 3.5: Surcharge au Botswana 79

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Page 6: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Encadré 3.6: Un projet d’élevage de lapins au Togo 83Encadré 3.7: Expérience tirée des projets de développement des petits

exploitations laitières au Zimbabwe 84Encadré 3.8: Modèle d’élevage de volaille en semi-liberté 85Encadré 3.9: Introduction de chèvres Boer parmi les petits exploitants

du Botswana 86Encadré 3.10: Services vétérinaires fournis par les coopératives laitières 90Encadré 3.11: Deux exemples de participation communautaire aux

services zoosanitaires 93Encadré 3.12: L’élevage de poules Sonali par les femmes pauvres

sans terre au Bangladesh 95Encadré 3.13: Reproduction nucléaire 97Encadré 3.14: Groupes d’auto-assistance dans la région d’intervention

du programme de développement intégré de l’élevage à Koraput, dans l’Orissa 105

Encadré 3.15: La réussite du système de microcrédits pour l’élevage de volaille au Bangladesh 107

Encadré 3.16: Prêts aux sociétés laitières féminines dans l’Orissa 109

TableauxTableau 1.1: Nombre et habitat des éleveurs pauvres 9Tableau 1.2: Typologie des éleveurs pauvres 12Tableau 1.3: Place occupée par l’élevage dans le revenu des riches

et des pauvres 16Tableau 1.4: Raisons de l’élevage d’animaux en Bolivie, en Inde

et au Kenya 22Tableau 1.5: Méthodes utilisées pour définir les besoins et biais

correspondants 34Tableau 1.6: Services zootechniques et contraintes liées à la pauvreté 36Tableau 2.1: Caractéristiques des prestataires de services 47Tableau 2.2: Possibilités d’introduire un système de paiement par

les usagers des services zootechniques 64Tableau 3.1: Principales caractéristiques de deux systèmes financiers 101Tableau 3.2: Commercialisation du lait dans l’agglomération

de Nairobi, au Kenya 113Tableau 4.1: Recommandations concernant les questions transversales 122Tableau 4.2: Domaines d’intervention dans les divers systèmes

de production 124

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Page 7: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP
Page 8: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Environ 900 millions des 1,2 milliard de personnes vivant dans l’extrêmepauvreté habitent dans les zones rurales. La plupart d’entre elles tirent leurnourriture et leur revenu de l’agriculture, mais elles manquent souvent desmoyens qui leur permettraient de le faire avec efficacité. Les ressources en terreset en eau sont souvent rares, les routes sont parfois impraticables, les servicesfinanciers parfois inexistants et les nouvelles technologies souvent hors de portée.

Plus grave encore, ceux qui pratiquent une agriculture de subsistance sontsouvent à la merci des caprices de la nature: une inondation peut emporter leursbiens et une sécheresse peut détruire leur seule source de revenu.

L’élevage est une activité cruciale pour les ruraux pauvres. On estime que plusde 600 millions de petits exploitants pauvres possèdent près d’un milliard detêtes de bétail. Le bétail peut non seulement porter de lourdes charges, êtreutilisé pour la culture des champs et servir de moyen de transport, mais ilreprésente également un bien précieux pour les ruraux: il constitue une formede monnaie, souvent prêtée ou donnée, et sa vente peut être une source rapided’argent en cas de besoin. Le revenu tiré du bétail et de l’élevage permet auxfamilles pauvres d’avoir de quoi manger, de mieux se nourrir, d’envoyer leursenfants à l’école et d’acheter des médicaments pour elles-mêmes comme pourleurs animaux.

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Avant-propos

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Compte tenu de l’importance de l’élevage pour les ruraux pauvres, le FIDAs’est associé en 2001 avec l’Agence danoise de développement international(DANIDA), le Service danois de conseils agricoles (DAAS), l’Université deReading et la Banque mondiale pour préparer le présent rapport et faciliter laplanification de services plus efficaces en matière d’élevage de façon à améliorerla situation des ruraux pauvres. Ce partenariat, auquel s’est associé leDépartement du développement international du Royaume-Uni, l’initiative pourla politique d’élevage en faveur des pauvres de l’Organisation des Nations Uniespour l’alimentation et l’agriculture (FAO), et l’Agence des États-Unis pour ledéveloppement international (USAID), se poursuit en 2004. Ses membreschercheront à identifier comment remédier durablement au problème posé parl’accès limité des ruraux pauvres à des services et à des technologies essentiels.

Il importe de bien comprendre qu’offrir aux agriculteurs des services enmatière d’élevage ne signifie pas simplement leur fournir des semences pour lesaliments pour bétail, des fournitures vétérinaires et des outils agricoles: il fautégalement leur donner les moyens de chercher par eux-mêmes à échapper à lapauvreté. Ils doivent pouvoir se faire entendre au sein des organisations et descoopératives locales qui offrent ces services et intervenir dans le choix des serviceset des technologies qui répondent le mieux à leurs besoins.

L’augmentation rapide de la demande de viande et de lait dans le monde endéveloppement représente une très grande chance pour des millions d’éleveursruraux. Alors que la communauté internationale cherche comment atteindre les objectifs de développement du Millénaire et réduire l’extrême pauvreté, ilfaudrait clairement accorder une plus grande attention à ce secteur important, eten particulier à l’amélioration des services dans le domaine de l’élevage. Le FIDAestime qu’un accès plus large aux races productives, aux soins vétérinaires, auxoutils, aux systèmes de crédit, à la formation, aux technologies et aux marchéspermettrait à de nombreux agriculteurs pauvres de prendre des mesures pouréchapper à la pauvreté.

Le Président du FIDALennart Båge

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Page 10: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le présent rapport, rédigé par Sanne Chipeta, Egil Hoydahl et Johannes Krogdu Département danois des services consultatifs agricoles et Cees de Haan de la Banque mondiale, marque l’aboutissement d’un vaste effort mené de concertpar de nombreux partenaires. Il est fondé sur une analyse détaillée des ouvragespubliés et des études de cas, et sur les nombreuses réunions que l’équiperesponsable de l’étude, de l’Université de Reading (Claire Heffernan) et duDépartement danois des services consultatifs agricoles (Sanne Chipeta), a euesavec beaucoup de parties prenantes intéressées au Bangladesh, en Bolivie, enInde (État de l’Orissa) et au Kenya.

Les études de cas ont été établies avec l’appui financier de DANIDA et duFIDA par Sam Chema et Leonard Oruko au Kenya; Vinod Ahuja, PramodiniPradhan et P. Venkatramaiah en Inde (Orissa); Hafezur Rahman et Nasrin Jahanau Bangladesh; Miguel Morales Sanchez, Ronald Bellot Alcazar et Abel Rojas enBolivie; et Flemming Just au Danemark. Les études de cas concernant leBangladesh, la Bolivie et l’État de l’Orissa ont été présentées lors de séminairesnationaux auxquels ont participé les parties prenantes du secteur local del’élevage. La préparation et la réalisation des études de cas n’ont été possibles que grâce au temps et aux efforts fournis par Helge Brunse, Cornell Dash etSandya Dash, conseillers de DANIDA dans l’État de l’Orissa; Jan Morrenhof,conseiller de la Direction du développement et de la coopération de la Suissepour le programme de gestion des ressources naturelles dans l’État de l’Orissa;

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REMERCIEMENTS

Page 11: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Jørgen W. Hansen et Nazir Ahmed, conseillers de DANIDA au Bangladesh; etSven Nielson, Per Rasmussen et Abel Rojas, conseillers de DANIDA en Bolivie.Le groupe de développement de l’élevage de l’Université de Reading et, enparticulier, Federica Misturelli et Dafydd Pilling ont fourni un concours précieux.

L’équipe du Département danois des services consultatifs agricoles a reçu un appui technique de Frands Dolberg de l’Université d’Aarhus; Anders Permindu Poultry Network; et Poul Henning Pedersen de l’Institut des scienceszootechniques, l’un et l’autre de l’Université royale danoise des sciencesvétérinaires et agronomiques; et Eyvind Kristensen de DANIDA.

Le groupe d’éditeurs du FIDA qui a commenté le projet initial était composéde Rodney Cooke, Annina Lubbock, David Kingsbury et Desiree Hagenaars. Leprojet de rapport a été présenté à un atelier que le FIDA a organisé à Rome àl’intention des parties prenantes les 24 et 25 mars 2003. Cet atelier a rassembléun grand nombre d’experts de l’élevage et points focaux des principalesorganisations et institutions bilatérales et multilatérales de développement, ainsique des hauts fonctionnaires des quatre pays étudiés et des participants à d’autrespays en développement. L’atelier a reçu le plein appui de la direction générale duFIDA et a été ouvert par le Vice-Président du Fonds, Cyril Enweze, et clos par sonPrésident, Lennart Båge.

La préparation du rapport a été facilitée par les indications données par lesmembres du Comité directeur, Cees de Haan de la Banque mondiale, JorgenHenriksen du Ministère royal danois des affaires étrangères, et Ahmed E.Sidahmed du FIDA, qui a géré et coordonné l’atelier.

Pour l’édition, les auteurs ont bénéficié de l’appui de Seth Beckerman,consultant de la Banque mondiale, et des services linguistiques du FIDA. AntonioRota et Theodoros Boditsis de la Division consultative technique du Fonds ontfourni un appui technique et une aide à la production.

Rodney Cooke, directeur de la Division consultative technique du FIDA aappuyé avec constance ce projet. L’aide apportée par Phang Roy, présidentadjoint du FIDA (Département des affaires extérieures), et Sandra McGuire,directrice de la Division de la communication, est hautement appréciée.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Page 12: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La communauté mondiale s’est engagée à réduire le niveau de la pauvretémondiale de moitié d’ici à 2015 ainsi que d’améliorer les moyens de subsistancedes éleveurs pauvres, dont le nombre est estimé à quelque 600 millions, quipeuvent beaucoup contribuer à la réalisation de cet objectif. La rapidité aveclaquelle la demande de produits de l’élevage augmente dans le monde endéveloppement parallèlement à la croissance économique offre des possibilitésnouvelles de réduire la pauvreté pour autant que des politiques et institutionsappropriées soient en place.

Ce rapport évalue les possibilités qui s’offrent aux éleveurs pauvres debénéficier de ces nouveaux débouchés pour les produits de l’élevage. L’accès à desservices zootechniques de qualité sera à cet égard l’un des facteurs les pluscritiques. Ce document a pour but de rassembler à l’intention des décideurs desinformations sur la façon dont pourraient être conçus et appliqués des serviceszootechniques plus efficaces en faveur des pauvres. Il définit tout d’abord unprofil des éleveurs pauvres, puis décrit les résultats qu’ont donnés par le passédivers prestataires de services et types de services pour les éleveurs pauvres. Ils’achève sur un plan d’action. Les informations et analyses figurant dans ledocument sont fondées sur une étude des ouvrages disponibles et sur des étudesde cas réalisées au Bangladesh, en Bolivie, au Danemark, en Inde (dans l’État del’Orissa) et au Kenya.

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RÉSUMÉ

Page 13: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les éleveurs pauvres

L’analyse que contient le chapitre 1 parvient à la conclusion que l’élevage peut êtreun élément indispensable des systèmes de subsistance de beaucoup de populationsrurales et urbaines pauvres des pays en développement, qu’il peut jouer un rôlecrucial dans les systèmes agricoles et qu’il peut atténuer la vulnérabilité desménages. Toutefois, les politiques actuellement suivies aux échelons national etmondial ainsi que les services zootechniques existants privilégient souvent laproduction à grande échelle. Un accroissement de la production de l’élevage, à luiseul, ne contribuera donc pas nécessairement à réduire la pauvreté. Au contraire,s’il n’est pas ciblé comme il convient, le développement de l’élevage risqued’évincer les éleveurs pauvres. Si l’on veut que les interventions dans le secteur del’élevage parviennent à réduire substantiellement et de façon généralisée lapauvreté, il importe de s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et desatisfaire les besoins essentiels des communautés qui dépendent de l’élevage dansdes domaines comme la santé, l’éducation et le logement. Les serviceszootechniques peuvent apporter une contribution à cet égard en autonomisant lescommunautés d’éleveurs et en relevant leurs revenus, comme l’ont montré lesprojets de réduction de la pauvreté axés, par exemple, sur la production laitièreen Inde et l’élevage de volaille au Bangladesh. Les services zootechniques nepourront cependant pas résoudre tous les problèmes liés à la pauvreté.

Il importe donc au plus haut point que les pouvoirs publics adoptent desstratégies globales et efficaces de réduction de la pauvreté, notamment despolitiques d’”habilitation” visant à s’attaquer aux causes profondes de lapauvreté et à promouvoir le développement des services zootechniques dont ontbesoin les pauvres.

Le chapitre 1 contient en outre une analyse du rôle que peut jouer ledéveloppement de l’élevage dans les moyens de subsistance des femmes etd’autres groupes vulnérables, comme les ménages affectés par le VIH/sida.

L’indispensable perspective sexospécifiqueLes femmes jouent un rôle important dans l’élevage et l’expérience montrequ’une approche ciblée des services zootechniques et de la conception desprogrammes de développement de l’élevage accroît, d’une manière générale,leur impact sur la réduction de la pauvreté. Les efforts déployés pour accroîtrel’accès des femmes aux ressources productives et naturelles comme la terre, lecheptel et le crédit et renforcer le contrôle qu’elles exercent sur ces ressourcesrehaussent l’influence et la condition sociale des femmes.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Page 14: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

VIH/sidaLes ménages affectés par le sida ont particulièrement besoin de serviceszootechniques. L’épidémie a en effet, en aggravant la pauvreté et en réduisant laproduction de l’élevage, un impact sérieux dans les régions affectées,particulièrement en Afrique subsaharienne. Aussi est-il essentiel que lesprogrammes de développement du secteur de l’élevage tiennent compte desincidences du VIH/sida sur la fourniture de services ainsi que des besoinsspécifiques des ménages affectés. Ces besoins sont semblables à bien des égardsaux besoins de caractère général des ménages pauvres, mais les ménages et lescommunautés doivent s’attacher tout particulièrement à former les jeunesorphelins à l’élevage et aux technologies connexes, dont le rendement est élevépar rapport au travail investi.

Prestation des services zootechniques

Les systèmes de prestation de services doivent autonomiser les usagersLe chapitre 2 examine divers systèmes de prestation de services et les points fortset points faibles des divers types de prestataires de services. Selon le gain qu’ilspeuvent apporter, les usagers pauvres sont disposés à payer des services fourniset peuvent le faire. En outre, le principe du recouvrement des coûts contribuebeaucoup à impliquer les usagers dans la prestation des services et parconséquent à améliorer la durabilité des systèmes. La conclusion générale qui sedégage est la suivante:

Les systèmes qui rendent les prestataires de services responsables devant leursusagers et qui donnent à ces derniers la liberté de choisir parmi plusieursprestataires renforcent le pouvoir de négociation des usagers et améliorent laqualité et la durabilité des services.

Les rôles des secteurs public et privé doivent être clairement définisLa répartition des responsabilités entre les secteurs public et privé en matière deprestation de services s’infléchit peu à peu vers l’octroi au secteur privé d’un rôleaccru en matière de prestation directe de services, tandis que celui du secteurpublic privilégie progressivement la surveillance de la qualité, particulièrementdes services qui ont un impact du point de vue des “biens publics”, comme les défaillances des marchés, le risque moral ou les externalités. Le chapitre 2donne plusieurs exemples de la façon dont la participation du secteur public à laprestation directe des services entrave le développement du secteur privé.

RÉSUMÉ

xiii

Page 15: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

D’un autre côté, la réduction de la pauvreté est un bien public et, si la mise enœuvre de mesures de réduction de la pauvreté peut être confiée à des acteursprivés, garantir un environnement approprié et cibler les ressources disponiblessur des activités de réduction de la pauvreté dans des domaines commel’infrastructure, l’éducation et la recherche demeurent l’une des responsabilitésdu secteur public.

Les services zootechniques peuvent être fournis par divers acteurs, mais si l’onveut que des services utiles et efficaces soient fournis aux pauvres, les éleveurspauvres sont ceux qui doivent au premier chef décider de l’étendue et ducontenu des services. Une intégration plus étroite des éleveurs pauvres auxdébats qui débouchent sur l’élaboration des documents de stratégie pour laréduction de la pauvreté est essentielle si l’on veut que ces producteurs aient voixau chapitre. Les méthodes participatives, à elles seules, ne suffisent pas. En effet,elles privilégient souvent les concepts et l’expérience des facilitateurs. Laprincipale conclusion sur ce point est donc la suivante:

Le renforcement des institutions communautaires, des petites entreprisesprivées et des organisations de producteurs constitue le plus important moyende réduire la pauvreté.

Des services zootechniques orientés vers la réduction de la pauvreté

Habilitation et autonomisation des ruraux pauvresLe chapitre 3, plus particulièrement consacré à leur orientation, montre que lesservices zootechniques, qui permettent aux ruraux pauvres de réduire leurpauvreté, leur permettent également d’agir. Cet examen s’inspire du Cadrestratégique élaboré par le FIDA pour permettre aux ruraux pauvres desurmonter leur pauvreté (FIDA, 2002a). Les services zootechniques sont parconséquent analysés au regard de la mesure dans laquelle ils permettent:

■ de renforcer la capacité des ruraux pauvres et de leurs organisations;■ d’assurer un accès plus équitable aux ressources naturelles productives et

aux technologies; et ■ de faciliter l’accès aux services financiers et aux marchés.

Les conclusions sur lesquelles débouche ce chapitre sont exposées ci-après.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

xiv

Page 16: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il faut renforcer les organisations auxquelles appartiennent les pauvresLes petits producteurs peuvent tirer profit des efforts entrepris pour s’attacherde concert à identifier leurs besoins, à structurer la demande et à réaliser deséconomies d’échelle dans la prestation des services. Des organisations deproducteurs qui sont véritablement entre leurs mains peuvent autonomiser lesagriculteurs et faciliter la prestation de services répondant à leurs besoins enmême temps qu’aux normes de qualité requises. La réalité est néanmoins quel’implication du secteur public s’est souvent traduite par la mise en placed’organisations imposées du sommet, peu démocratiques et exclusives et que leséleveurs pauvres n’en sont généralement pas membres ou, s’ils le sont, n’ontguère leur mot à dire. La situation désavantagée dans laquelle se trouvent lespauvres en termes de droit, d’instruction, de savoir et d’influence politiqueentraîne beaucoup de problèmes et de contraintes.

Il est par conséquent essentiel de renforcer la capacité des organisationsauxquelles appartiennent les éleveurs pauvres et qui sont véritablementconstituées “à partir de la base”.

Il importe de développer d’urgence les services consultatifsLes éleveurs pauvres ont désespérément besoin de services consultatifss’occupant notamment de la diffusion d’informations sur la production defourrage, du transfert de technologies bon marché et du perfectionnement descompétences en matière d’élevage et de gestion. Par le passé, ces services n’ontguère retenu l’attention et le concept de services consultatifs pour les pauvres doitpar conséquent être élaboré presque de toutes pièces. Ces services consultatifsdevraient mettre l’accent sur les connaissances et les systèmes d’apprentissage denature à mettre les éleveurs mieux à même de s’organiser pour rechercherinformations, conseils et formation auprès de sources efficaces. Il faut, à cetégard, mettre à l’épreuve des systèmes de services d’agriculteur à agriculteur etdes systèmes intégrés de culture et d’élevage, qui peuvent offrir une occasion deconjuguer dans le cadre de services de vulgarisation agricole utiles les efforts dedéveloppement et de nouvelles initiatives plus récentes.

Il faut assurer un accès équitable à des ressources limitées comme la terre et l’eauPour beaucoup d’éleveurs pauvres, les perspectives d’avenir dépendront de lapossibilité d’avoir un accès équitable à la terre et à l’eau et de pouvoir comptersur des régimes d’utilisation des sols qui se prêtent aussi à un système pastorald’élevage. La pénurie croissante de terre et d’eau a de sérieuses incidences sur la priorité qui doit être accordée à l’élevage dans différentes localités et au

RÉSUMÉ

xv

Page 17: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

sein de groupes de populations pauvres. L’accent doit être mis sur le développement de systèmes de production et d’exploitation qui soient fondéssur la production de fourrage ou l’utilisation d’autres ressources tout en tenantcompte des ressources limitées, sous forme de travail et de terre, dont disposentles agriculteurs pauvres.

Les éleveurs pauvres doivent être associés à la génération de technologiesLes efforts visant à améliorer les technologies qu’utilisent les éleveurs pauvresdoivent avoir pour principal objectif de stabiliser les systèmes de production etdoivent donc mettre l’accent sur les technologies qui comportent peu de risqueset qui n’exigent que peu d’intrants. Une attention accrue devrait être accordéeaux animaux (souvent petits animaux) qu’élèvent les pauvres, aux terres qu’ilsoccupent (souvent des terres marginales situées dans des régions reculées) et auxproduits qu’ils vendent (lait, œufs et produits alimentaires du terroir). Si l’on veutque les technologies générées répondent aux besoins prioritaires des pauvres, ilest essentiel d’associer ces derniers à l’identification des priorités et au suivi desrecherches sur les zootechnologies.

L’accès aux services zoosanitaires est essentielLe secteur privé peut jouer un rôle important dans la prestation des serviceszoosanitaires, et il peut également le faire pour les éleveurs pauvres. Toutefois,comme les services vétérinaires classiques ne sont pas économiquement viablesdans les régions marginales, il importe de renforcer les systèmes à faible coût,dont les systèmes communautaires d’agents zoosanitaires sont un exemple. Detels systèmes sont utilisés dans de nombreuses régions. Des services deprophylaxie et de vaccination peuvent être organisés dans un contextecommunautaire au profit des éleveurs pauvres.

Des stratégies d’hybridation appropriées sont nécessairesBeaucoup des caractéristiques des espèces locales, comme leur résistance auxintempéries et aux maladies et leur polyvalence, sont très importantes pour leséleveurs pauvres. Cependant, à mesure que les systèmes de production et lesmarchés évoluent, il apparaît des possibilités de mettre au point d’autresstratégies de croisement orientées vers les besoins des éleveurs pauvres. Cetteapproche doit associer ces derniers à la détermination des priorités et à laformulation des stratégies ainsi qu’à la planification et à la mise en œuvre desprogrammes d’hybridation. Les systèmes communautaires de sélection, joints àun noyau de troupeaux d’élite gérés par des associations d’éleveurs offrent despossibilités intéressantes.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Page 18: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’accès aux services financiers est une condition préalable de l’accroissement de la production de l’élevageDes systèmes appropriés d’épargne et de crédit pouvant satisfaire les besoinsstatistiques et tenant compte des contraintes particulières des pauvres sont unecondition indispensable à l’accroissement de la production de l’élevage. Souvent,les pauvres n’ont guère accès aux services financiers mais, dans les quelques casoù un accès au crédit a été offert, il a été très apprécié et, d’une manière générale,bien utilisé. La vulnérabilité des pauvres, toutefois, constitue un problèmeparticulier pour les institutions de crédit.

Les systèmes de microcrédit mettent des capitaux à la disposition des ménages pauvresLes services de microcrédit fournis par le biais d’organisations nongouvernementales (ONG) au Bangladesh ont été couronnés d’un succèsremarquable. La réussite de ces systèmes est probablement due à leur approchecollective et au développement des services d’appui nécessaires. Toutefois, en dépitde la fourniture de crédits aux familles pauvres, il n’en demeure pas moins que les“extrêmement pauvres” – c’est-à-dire la tranche de 10 à 15% la plus pauvre de lapopulation – ne bénéficient pas des systèmes de microcrédit. Les raisons de cetteexclusion apparente devraient être identifiées et des mécanismes spéciaux mis aupoint pour atteindre ces groupes. L’appartenance des pauvres à des organisations deproducteurs bien établies et dotées d’un capital solide pourrait aider à intégrer lesplus pauvres des pauvres car ces organisations peuvent offrir une garantie de sorteque leurs membres puissent obtenir des prêts bancaires pour investir dans l’élevage.

L’accès aux marchés est une autre condition préalable au développement de l’élevageL’amélioration de la situation économique des éleveurs pauvres dépendra del’accès qu’ils auront aux débouchés pour pouvoir vendre leur production. Lalibéralisation des marchés nationaux dans le contexte d’un marché mondialfaussé par l’existence de subventions à la production et de ristournes àl’exportation dans les pays développés aurait des résultats désastreux pour lespauvres. Les distorsions doivent être éliminées de sorte que les producteurspauvres puissent accroître leur production. Les organisations de producteurssont un aspect indispensable des efforts entrepris pour défendre et renforcer lacompétitivité des éleveurs pauvres dans un marché libéralisé.

Les systèmes de financement peuvent autonomiser les usagersLes mécanismes de financement des services zootechniques peuvent beaucoup contribuer à autonomiser les éleveurs, leurs organisations et leurs

RÉSUMÉ

xvii

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communautés pour peu qu’ils soient conçus comme il convient. Dans tous lescas où il est nécessaire de cofinancer ou de financer intégralement les servicesau moyen de deniers publics, il importe d’identifier des modèles definancement de nature à acheminer les fonds par l’entremise des éleveurs ou deleurs organisations, ce qui permettra aux usagers de choisir le prestataire deservices qu’ils préfèrent.

Mesures recommandées

La conclusion du chapitre 4 est que les politiques et les pratiques de prestation deservices zootechniques doivent être modifiées de manière à ce qu’elles répondentaux besoins des pauvres et recommande à cette fin plusieurs mesures.Premièrement, il importe de mieux comprendre les domaines dans lesquels ledéveloppement de l’élevage peut contribuer le plus efficacement à la réduction dela pauvreté pour pouvoir allouer d’une façon aussi stratégique que possible lesressources limitées qui sont disponibles. Deuxièmement, il faut remédier àl’absence d’inclusion des pauvres aux processus de développement et auxprocessus politiques. De nouvelles formes d’organisation de la prestation desservices et de participation à ces derniers ainsi que, d’une façon plus générale, audébat relatif aux politiques des pouvoirs publics doivent être identifiées, mises àl’essai et généralisées.

Le chapitre 4 identifie également, à la lumière des conclusions du chapitre 3,certains des principaux aspects à prendre en considération pour développer lesservices zootechniques. Il faudra en particulier identifier les besoins spécifiques àl’intérieur de chaque catégorie de systèmes de production.

Les conditions ci-après devront être remplies si l’on veut promouvoir undéveloppement de l’élevage qui favorise les pauvres:

■ avoir une bonne connaissance des secteurs dans lesquels se trouvent lesgroupes et les systèmes de production offrant le plus grand potentiel dedéveloppement de l’élevage;

■ disposer d’informations sur l’impact des services zootechniques sur laréduction de la pauvreté;

■ disposer de mécanismes pour suivre de façon coordonnée l’impact desactivités entreprises sur la situation des pauvres;

■ élaborer un cadre commun pour la conception et l’exécution des projets; et■ rassembler et diffuser les enseignements tirés.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Établissement d’un réseau mondialIl faudrait mettre en place un réseau mondial de parties prenantes du secteur del’élevage et des autres secteurs intéressés pour intensifier les efforts visant àréorienter les politiques et les pratiques pour que des services zootechniquessoient fournis aux pauvres. Ce réseau jouerait un rôle de catalyseur pour lesactivités de plaidoyer et d’innovation et de base de connaissances pour l’échangede données d’expérience en rassemblant les enseignements tirés et en mettant àl’épreuve sur le terrain des approches novatrices dans le cadre aussi bien desprogrammes existants que des nouveaux projets pilotes qui seront entrepris auniveau des divers systèmes de production.

Pour mettre en place ce réseau, il faudrait créer un fonds qui serait géré parun petit secrétariat placé sous la supervision d’un comité directeur. Ce fondsmondial pour les pauvres constituerait le principal moyen d’appuyer le systèmed’apprentissage et de gestion du savoir proposé ainsi que la coordination de lacollecte et de la diffusion d’informations parmi une large gamme d’organismes etde praticiens qui œuvrent en faveur du développement de l’élevage.

RÉSUMÉ

xix

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Page 22: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La lutte contre la pauvreté est l’un des principaux objectifs de la communauté mondialeLa communauté mondiale s’est engagée à réduire de moitié la pauvreté dans lemonde d’ici à 2015. Or, on estime que 75% des pauvres vivent en milieu rural etque 600 millions d’entre eux élèvent des animaux. Les moyens de subsistancefondés sur l’élevage doivent par conséquent être l’une des principales cibles desefforts entrepris pour atteindre cet objectif ambitieux. L’accès à des serviceszootechniques de qualité peut beaucoup contribuer à aider les ménages qui sonttributaires de l’élevage à sortir de l’ornière de la pauvreté.

Ce document a pour objet de mettre des informations à la disposition desdécideurs pour leur permettre de concevoir et d’introduire des serviceszootechniques efficaces axés sur les besoins des pauvres, de sorte que le secteurde l’élevage puisse être utilisé comme un outil plus puissant dans la lutte contrela pauvreté mondiale. Il contient un profil des éleveurs pauvres et décrit lesrésultats qu’ont donnés par le passé divers prestataires de services et les types de services.

La demande des produits de l’élevage augmente rapidementLe secteur mondial de l’élevage connaît à l’heure actuelle une période demutation rapide. L’urbanisation croissante et l’élévation des revenus se traduisentpar une augmentation spectaculaire de la demande de viande et de lait dans lemonde en développement, ce qui entraîne une concentration des petitesexploitations au sein de grandes unités commerciales, spécialement dans le cas del’élevage de porcs et de volaille (Delgado et al., 1999). Ces tendances sont

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INTRODUCTION

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renforcées par le rôle changeant que joue l’élevage dans différentes régions dumonde en développement, où les moyens de subsistance jadis diversifiésdeviennent tributaires d’un seul produit. Ainsi, l’augmentation de la demande etla structure changeante du secteur offrent aux petits exploitants des possibilitésd’améliorer leur situation économique, mais créent simultanément un risquesignificatif que les pauvres soient évincés, l’environnement érodé et la sécuritéalimentaire mondiale compromise (de Haan et al., 2001).

Cette demande croissante des produits de l’élevage crée non seulement desdifficultés mais aussi des possibilités nouvelles de réduction de la pauvreté parmiles ménages pauvres d’éleveurs.

Ainsi, le développement de l’élevage doit jouer un double rôle, à savoir satisfairela demande croissante de viande et de lait d’une population mondiale de plus enplus nombreuse et aider à réaliser les objectifs de développement du Millénaireen matière de réduction de la pauvreté. Dans le meilleur des cas, cependant, lesprojets de développement de l’élevage n’ont que très peu contribué aux effortsde réduction de la pauvreté. Une étude récente de Livestock in Development(LID, 1999) est parvenue à la conclusion que la majorité des projets de serviceszoosanitaires n’ont pas l’impact escompté sur les pauvres car leur conception etleur exécution n’ont pas été dûment orientées vers la réduction de la pauvreté.

Au cours des cinq dernières années, toutefois, on a constaté une netteamélioration dans la conception des systèmes de prestation de services en faveurdes pauvres. Ce document, après avoir fait un résumé de cette expérience,analyse certains des très nombreux ouvrages publiés et, sur la base d’enquêtes surle terrain et d’un dialogue avec les éleveurs pauvres, les prestataires de serviceset les décideurs du Bangladesh, de la Bolivie, du Kenya et de l’État indien del’Orissa, examine les questions soulevées dans les ouvrages.

L’élevage peut réduire la vulnérabilité des pauvresPour les pauvres, l’élevage peut être un moyen important, mais pas le seul, deréaliser leur potentiel. La vente et la consommation de produits animaux peuventréduire la vulnérabilité des ménages aux variations saisonnières de la productionvivrière et des revenus, renforcer la sécurité alimentaire et améliorer la situationnutritionnelle des plus vulnérables, surtout des femmes, des enfants et despersonnes âgées.

Élever des animaux peut également, pour les ménages, amortir des chocscomme les sécheresses et d’autres catastrophes naturelles. Posséder des animauxpeut mettre les ménages et les individus mieux à même de s’acquitter de leursobligations sociales et de rehausser leur identité culturelle. Le bétail est

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

2

Page 24: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

également une importante source de garantie pour les pauvres et permet ainsi àbeaucoup de ménages d’avoir accès à des capitaux et à des crédits. L’élevageconstitue, par conséquent, un capital important qui, s’il est bien administré, peutpermettre aux ménages de sortir d’une pauvreté abjecte et de commencer àprofiter des bienfaits d’une économie de marché.

Il faut identifier les causes profondes de la pauvretéToute tentative de réduire la pauvreté doit être fondée sur une parfaitefamiliarité avec les causes et les conséquences de la pauvreté. Les causesprofondes de la pauvreté, dans les systèmes de subsistance fondés sur l’élevage,sont nombreuses et varient selon les conditions et les systèmes de production.Dans beaucoup de ces derniers, les moyens de subsistance se détériorent par suitede la diminution ou de la dégradation de ressources comme la terre et l’eauentraînées par le rétrécissement de la superficie des exploitations, le déboisementet l’érosion, la baisse de fertilité des sols et, dans les régions très peuplées, ladégradation des ressources en eau et en terre.

L’accroissement démographique exerce des pressions sur beaucoup desystèmes fondés sur l’élevage. Selon les estimations figurant dans l’étude intituléeWorld Agriculture: Towards 2015/2030 (FAO, 2002a) récemment publiée parl’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les pays en développement auront besoin au cours des 30 prochaines années de120 millions d’hectares de terre en plus pour leurs cultures. La ruée sur les terresarables enregistrée dans les hautes terres de l’Afrique de l’Est prive des millionsde ménages d’une superficie de terre suffisante pour survivre, et les agriculteurssédentaires sur les terres arables, partout en Afrique et dans le centre de l’Asie,évincent rapidement les populations pastorales. Des millions d’éleveurs pauvres,dans le sud de l’Asie, sont privés de terre par la privatisation croissante de terrescommunes. Enfin, les programmes de conservation des ressources naturelles,conçus selon le modèle du conflit entre les utilisations humaines et naturelles dela terre, déplacent peu à peu les communautés.

Si la mondialisation et la libéralisation des marchés encouragent l’expansionen général, les transformations qu’elles entraînent peuvent avoir un impactnégatif sur les pauvres si elles ne vont pas de pair avec des mesures de sauvegardeadéquates. Dans les pays en développement, les petits exploitants auront desérieuses difficultés à avoir accès aux marchés mondiaux aussi longtemps que lespays développés continueront de subventionner lourdement leurs propresélevages ou de protéger leurs propres exploitants au moyen de normes sanitairesinjustifiées. De plus, en écoulant à bas prix leurs propres excédents deproduction sur les marchés mondiaux, les pays développés font une concurrencedéloyale aux petits producteurs, même sur les marchés nationaux de ces derniers.

INTRODUCTION

3

Page 25: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Enfin, les politiques actuelles, dans un contexte d’inobservation des règlesenvironnementales et de régimes d’importation qui privilégient des systèmes deproduction industrielle à grande échelle, favorisent les grandes exploitations etévincent les éleveurs pauvres tributaires d’une production de petite envergure.

Derrière ces causes profondes apparentes se dissimule souvent une marginalisa-tion politique et organisationnelle plus profonde des groupes et des individus quisouffrent de la pauvreté.

Le “cycle de la pauvreté” décrit ce phénomèneLa figure 1.1 illustre les rapports de causalité entre les causes profondes de lapauvreté, ses caractéristiques et les conditions qui doivent être remplies, et lespossibilités qui doivent exister pour que les pauvres puissent sortir de l’ornière.On verra, dans cette figure, que les causes profondes de la pauvreté relèventde l’environnement “handicapant” dans lequel vivent les éleveurs pauvres.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

4

Figure 1.1: Le cycle de la pauvreté pour les éleveurs pauvres

Causes profondes de la pauvreté■ Manque d’influence politique■ Manque d’accès à la terre et à l’eau■ Distorsion des marchés■ Instabilité politique

Réalisation du potentiel de l’élevage■ Renforcement de la sécurité alimentaire■ Augmentation des revenus■ Accumulation d’avoirs■ Connaissances et influence accrues

Éleveurs pauvres

Capacités■ Aspirations■ Aptitude■ Motivation■ Connaissances

Ressources■ Ressources naturelles■ Avoirs■ Revenus■ Capital

Services zootechniques améliorés■ Habilitation des pauvres■ Technologies appropriées■ Accès équitable à la terre et au capital

Besoins de caractère général■ Bonne santé■ Logement■ Sécurité alimentaire■ Éducation

Besoins propres à l’élevage et besoins connexes■ Débouchés■ Services zoosanitaires■ Services consultatifs■ Formation■ Services d’hybridation■ Services financiers

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Les ressources et les capacités des éleveurs pauvres, pour limitées qu’elles soient,ne suffisent pas pour élever les animaux. Tant que les besoins des pauvres neseront pas satisfaits et que leurs capacités et leurs ressources ne seront pasrenforcées, ils demeureront enfermés dans le cercle vicieux de la pauvreté. Demeilleurs services zootechniques pourraient néanmoins répondre aux besoins deséleveurs, leur permettre d’avoir plus facilement accès aux ressources et renforcerles capacités des pauvres.

Les besoins de caractère général doivent manifestement être satisfaits enmême temps que ceux qui sont plus propres à l’élevage. Cela signifie que, si l’onveut que les éleveurs pauvres puissent échapper au cycle de la pauvreté et tirerparti des avantages que peut apporter l’élevage, il faudra s’attacher à améliorerles services zootechniques ainsi que ceux qui tendent à satisfaire des besoins decaractère plus général.

Renforcer la capacité des pauvres et s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté: rupture du cycle de la pauvretéCe document analyse différentes possibilités d’intervenir au niveau desservices zootechniques de manière à renforcer les capacités des pauvres et à leurpermettre ainsi de mieux tirer parti des avantages que peut apporter l’élevage,conformément à leurs aspirations. Certaines interventions, cependant, n’aurontguère d’impact si l’on ne s’attaque pas efficacement aux causes profondes de lapauvreté.

Les stratégies de réduction de la pauvreté doivent aller de pair avec des politiquesd’habilitation qui soient suffisamment générales mais qui aient également unimpact au point d’intervention pour atténuer les causes profondes de la pauvretéet promouvoir ainsi le développement de services zootechniques axés sur lesbesoins des pauvres.

INTRODUCTION

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La pauvreté a d’innombrables visages mais, en dépit de cette diversité, beaucoupd’éléments communs aussi. La plupart d’entre eux sont liés à l’accès limité qu’ontles pauvres aux droits, aux avoirs ou aux services.Ainsi, les pauvres:

■ n’ont pas voix au chapitre en ce qui concerne la formulation des politiques et la structure des services;

■ n’ont qu’un accès limité à l’éducation et ont par conséquent des tauxd’analphabétisme élevés;

■ n’ont pas accès comme il conviendrait aux services de santé;■ n’ont qu’un accès limité à la terre et à l’eau ou n’ont pas de sécurité

de jouissance dans leurs droits sur les ressources;■ n’ont guère accès aux avoirs;■ ont un revenu familial peu élevé;■ ont peu accès au crédit, aux services de vulgarisation et aux autres

services agricoles; et ■ ont un accès limité aux marchés.

Les éleveurs pauvres constituent un groupe extrêmement disparate et sonttributaires d’une large gamme de produits de l’élevage et des services connexes.Pour certains ménages, l’élevage ne représente qu’une faible proportion desactivités économiques mais, dans d’autres, il constitue la seule source de

7

CHAPITRE 1

LES ÉLEVEURS PAUVRES

Page 29: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les éleveurs pauvres ne tirent pas assez

profit de leurs animauxpour subsister

subsistance (Heffernan et Misturelli, 2000). Les tentatives de classerles éleveurs pauvres en catégories en fonction du nombred’animaux qu’ils possèdent et du degré de dépendance desménages à l’égard de leur production peuvent par conséquentinduire en erreur. Par exemple, un éleveur pauvre peut être unéleveur d’Amérique centrale qui a 25 têtes de bétail, un agriculteurqui a une petite exploitation mixte dans les hautes terres d’Éthiopie et seulement un bœuf, et une agricultrice de subsistance duBangladesh qui n’a peut-être que quelques poulets. Un agriculteurqui a quelques bœufs pour cultiver sa propre exploitation et qu’ilpeut louer à des voisins peut être très aisé, tandis qu’un pasteur duSahel ayant le même nombre d’animaux risque de vivre dans unepauvreté extrême.

Le degré de pauvreté parmi les éleveurs est donc fonction nonpas tant du nombre d’animaux qu’ils possèdent et de la capacité desubvenir à leurs besoins essentiels, mais aussi des dimensionssociales et économiques plus larges qui caractérisent l’accès auxressources et aux avoirs, la capacité de faire face à des risques et àdes chocs et le degré de marginalisation politique (Heffernan etSidahmed, 1998; Banque mondiale, 2000). Dans le présent rapport,c’est la définition ci-après qui a été utilisée.

Les éleveurs pauvres sont les éleveurs qui sont exposés à des risques économiques ou sociaux et qui sont politiquementmarginalisés et dont les animaux, tout au plus, leur permettent desubsister ou de satisfaire leurs besoins nutritionnels journaliersminimums (voir Heffernan et Sidahmed, 1998; Banque mondiale,2000).

Ainsi, par définition, les éleveurs pauvres ne tirent pas assezprofit de leurs animaux pour subvenir durablement à leurs besoinsde base, mais sont tributaires dans une mesure considérable duproduit de leurs animaux.

S’il y a lieu de mettre spécialement l’accent sur les éleveurs plutôtque, d’une façon générale, sur la population représentée par lespauvres des régions rurales et des zones périurbaines, c’est pourdeux raisons. Premièrement, les programmes de développementpeuvent avoir un impact plus marqué si les besoins des éleveurs sontsatisfaits comme il convient. Deuxièmement, les objectifs deréduction de la pauvreté auront plus de probabilités d’être atteints

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

8

Page 30: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

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si l’attention est centrée sur des résultats spécifiques, par exemplel’accroissement des revenus provenant de l’élevage.

D’un autre côté, on risque de négliger d’autres groupes de pauvres (parexemple, les ménages déplacés ou affectés par le sida, les agriculteurs desubsistance pauvres qui cultivent de petits lopins de terre ou les pauvres desquartiers périurbains) qui peuvent avoir perdu leur bétail ou qui n’y ont jamaiseu accès, mais qui pourraient néanmoins bénéficier d’une telle activité. Enfin, il y a aussi les éleveurs pauvres pour qui l’élevage n’est pas une option commemoyen de réduire la pauvreté car ils n’ont pas la base de ressources, lamotivation et les débouchés nécessaires. Pour ces groupes, il faudra définir desstratégies de sortie.

Nombre d’éleveurs pauvres

Pour saisir la contribution potentielle que l’élevage peut apporter à la réductionde la pauvreté, il faut essayer d’estimer le nombre de pauvres qui possèdent desanimaux et, en particulier, le nombre de pauvres pour qui l’élevage pourraitdevenir un moyen de sortir de la pauvreté. L’approche la plus généralementutilisée pour parvenir à une telle estimation consiste à calculer le nombreapproximatif d’habitants d’une zone d’élevage spécifique et à affiner ensuite cechiffre en appliquant des critères de pauvreté pour identifier ceux qui sontpauvres. Cette méthode a été appliquée pour la première fois dans LID (1999)(Tableau 1.1).

Tableau 1.1: Nombre et habitat des éleveurs pauvres (en millions)

Zone agroécologique Catégorie d’éleveurs pauvres

Pacage Exploitations Éleveurs sansextensif mixtes pauvres terre

Aride ou semi-aride 63 213

Tempérée (y compris les hautes terres tropicales) 72 85 156

Humide, subhumide et subtropicale 89

Total partiel 135 387 156

Total 678

LID (1999).

Page 31: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

600 millions d’éleveurs pauvres

Il importe d’approfondir lesconnaissances et

de rassembler des informations

plus précises

Selon la classification des systèmes mondiaux d’élevage de Sere etSteinfeld (1996) et du nombre total de pauvres calculé parThornton (2001), il semblerait que 556 millions d’éleveurs viventau-dessous du seuil de pauvreté.

Sur la base du tableau 1.1 et de l’estimation ci-dessus, un chiffretotal d’environ 600 millions paraît une estimation raisonnable, etc’est celui utilisé dans le présent document.

Ces chiffres doivent, néanmoins, être considérés avec prudence.Les estimations supposent que la pauvreté est également répartieentre les régions et les systèmes de production. Cela signifie quecertains systèmes de production risquent d’être négligés, parexemple les citadins qui possèdent des animaux et les marchands de bétail, et que la proportion d’éleveurs pauvres risque d’êtresurestimée dans d’autres systèmes. Pour estimer avec plus deprécision le nombre et la répartition des éleveurs pauvres et desautres groupes pauvres qui pourraient tirer profit de l’élevage, ilfaut, premièrement, rassembler des données supplémentaires aumoyen des enquêtes sur les ménages usuelles et procéder à desévaluations qualitatives de la pauvreté comme celles tirées desévaluations participatives de la pauvreté. Ces données qualitatives etquantitatives peuvent, par pays, aider à affiner et à éclairer lesefforts tendant à déterminer aussi bien l’identité que l’habitat deséleveurs pauvres. Deuxièmement, il faut identifier les systèmes deproduction et les régions où vivent des éleveurs pauvres pour quiun développement de l’élevage serait une possibilité de sortir del’ornière de la pauvreté ou qui sont si pauvres qu’ils ont besoind’autres types de moyens de subsistance.

Les systèmes de production des pauvres

Les éleveurs pauvres n’ont souvent que des ressources minimes.Comme indiqué ci-dessus, ils n’ont pas assez d’animaux ni deressources pour soutenir leur production. Le tableau 1.2 décrit unetypologie simple fondée sur trois grandes catégories d’éleveurs –pasteurs, petites exploitations mixtes et citadins – et certaines desprincipales caractéristiques de chaque système de production.L’intention de ce tableau n’est pas de définir rigoureusement

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

10

Page 32: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’élément qui distingue le plus lesproducteurs pauvres de ceux qui sont plusaisés est l’accès auxintrants et auxressources

chacune des différentes catégories, mais plutôt de proposer un cadre initial permettant d’établir une différenciation entrecertains des sous-groupes. Le tableau montre que les éleveurspauvres élèvent des animaux très divers et ont recours à différentesméthodes d’élevage. L’élément qui distingue considérablement les producteurs pauvres de ceux qui sont plus aisés est le manque d’accès aux intrants et aux ressources nécessaires àl’élevage.

Leur vulnérabilité est également un élément de différenciationdes pauvres. Chaque système de production est sujet à diversfacteurs qui peuvent affecter les producteurs relativement aisés,mais qui peuvent être dévastateurs pour les pauvres. Par exemple,une sécheresse conduira un pasteur pauvre au dénuement le plus total beaucoup plus vite qu’un pasteur ayant des troupeauxplus nombreux. L’encadré 1.1 décrit comment des ressourcescomme les systèmes d’irrigation et la terre dictent le systèmed’élevage.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

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Encadré 1.1: L’élevage dans le district de Koraput

Dans le district de Koraput, l’étude de cas réalisée dans l’État indien de l’Orissa

a constaté que la base de ressources du village influait beaucoup sur le nombre

de ruminants que possédaient les habitants. Or, il existe une corrélation

positive entre la décision d’élever de grands ruminants et l’élément comme

la disponibilité:

■ d’irrigation pour l’agriculture intensive;

■ de terres cultivables; et

■ de fourrage et de résidus de récoltes.

Ainsi, les villages dont les champs sont irrigués ont une plus grande proportion

d’habitants qui possèdent du bétail et des buffles et moins d’habitants qui

élèvent de petits ruminants. En revanche, dans les villages où il n’y a pas

d’irrigation, on trouve une plus forte proportion d’habitants qui élèvent de

petits ruminants. Dans les villages dont les habitants n’ont pas de ressources

comme la terre et qui sont intégralement tributaires pour leur survie d’un

salaire journalier, moins nombreux encore sont ceux qui élèvent de petits

ruminants.Étude de cas de l’Orissa.

Page 33: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le rôle de l’élevage pour les pauvres

L’approche fondée sur la création de moyens de subsistancedurables a suscité un regain d’intérêt sur le rôle de l’élevage sur lesmoyens de subsistance des pauvres et l’impact qu’il peut avoir à cet égard. Selon cette approche, les animaux sont considérés enquelque sorte comme un capital financier, social et naturel (McLeodet Wilsmore, 2001). En outre, l’élevage peut renforcer le capitalhumain et beaucoup contribuer à réduire la malnutrition. Cesdivers rôles sont examinés en détail ci-dessous.

Formes de capital■ Le capital financier est défini comme étant les ressources

financières dont disposent les gens – épargne, crédit,assurance et pension – et qui leur offrent différentespossibilités de subvenir à leurs besoins (Carney, 1998).

■ Le capital social est défini comme étant les “caractéristiquesde l’organisation sociale, comme confiance, normes etréseaux, qui peuvent améliorer l’efficience de la société aumoyen d’actions coordonnées” (Putnam, 1993).

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

12

Producteur

Pasteur

Petites exploitationsmixtes agriculture/élevage

Citadin

Habitat

Milieu rural

Milieupériurbain

Milieu rural

Milieupériurbain

Taudisurbains

Caractéristique principale

Accès plus limité àdes ressourcesnaturelles comme lespâturages et l’eau,manque d’accès auxmarchés, nombre detêtes non viable, rationon optimal par âgeet par sexe dutroupeau.

Exiguïté desexploitations,métayage, manquede ressources (travailet terre).

Sans terre, moindreaccès aux services.

Espèces d’animaux

Bovins, caprins,ovins, camélidés,yaks

Principalementcaprins, ovins

Bovins, buffles,caprins, ovins,porcs, volaille

Vaches laitières,volaille, porcs

Volaille, caprins,ovins, buffles,bovins, porcs

Tableau 1.2: Typologie des éleveurs pauvres

Capital financier, social et humain

Page 34: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

■ Par “amélioration” du capital humain, on entend icil’élargissement de la gamme de choix qui s’offrent à l’êtrehumain (Martinussen, 1996) grâce à l’amélioration desconnaissances, à l’élévation des revenus et à une plus grandeautonomie en termes de prise de décisions.

Les animaux constituent essentiellement un capital financierPour beaucoup de ménages pauvres, les animaux constituent laprincipale forme d’épargne. En tant qu’investissement, rares sontles autres ressources qui peuvent accroître le capital comme lepeut l’élevage. Lorsque les temps sont difficiles, les ménagespauvres peuvent vendre des animaux pour obtenir rapidement del’argent. De plus, les animaux, y compris le fumier qu’ilsproduisent, constituent souvent une importante source derevenus. Lors d’une étude comparative des éleveurs pauvres de laBolivie, de l’Inde et du Kenya, Heffernan, Nielsen et Misturelli(2001) ont demandé aux ménages d’indiquer, dans l’ordre, quelsétaient à leur avis les investissements les plus productifs (Figure1.2). Dans les trois pays, l’élevage est arrivé avant les affaires et lelogement.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

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Vulnérabilités

Sécheresse, termes del’échange, instabilitépolitique, accès difficile auxmarchés, aux technologieset à l’innovation.

Manque d’accès auxressources productives des animaux, vol.

Sécheresse, coût desintrants, accès aux services,pressions démographiques.

Coût des intrants.

Espace pour les animaux,cadre juridique, santéhumaine, accès à l’eau.

Type d’élevage

Migration

Propriétaires absentéistes,garde des animaux par desmembres de la famille oudes gardiens rémunérés

Entrave, coupe de fourrage,parcours

Alimentation en stalle, coupede fourrage, bord de route

Bord de route, déchetteries,achat de fourrage

Principaleproduction

Lait, fibres

Viande

Énergie, engrais,viande, œufs

Lait, viande, œufs

Viande, lait, œufs

Heffernan et al. (2002).

Pour beaucoup de ménages pauvres, les animaux constituentla principale formed’épargne

Page 35: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les risques sont plus grands pour

les producteurs pauvres

Il a été demandé aux éleveurs et aux agriculteurs de classer, dansl’ordre, les sources de revenus les plus importantes pour le ménage.En dépit de la grande diversité des activités réalisées, l’élevage estvenu en tête, par ordre d’importance pour le revenu familial, parmila plupart des ménages de l’Inde et du Kenya. Il y a naturellementeu des différences d’une région à une autre d’un même pays. Parexemple, dans le cas des systèmes mixtes de production en Bolivie,la vente des produits agricoles vient en tête de liste, mais celan’aurait probablement pas été le cas dans l’altiplano. Les réponsespourraient être différentes aussi au Kenya selon les systèmes decultures (Figure 1.3).

En dépit des avantages qu’il peut apporter, toutefois, l’élevage estégalement pour les pauvres une opération risquée. Comme lesménages pauvres n’ont aucun revenu disponible limité pour acheterdes intrants, les risques sont plus grands pour les producteurspauvres, spécialement parce qu’ils ne peuvent pas limiter lamortalité de leurs animaux. En outre, les revenus provenant del’élevage peuvent varier selon les saisons, ce qui peut affecter lespauvres. Les ménages pauvres ont des besoins et doivent générer

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

14

Figure 1.2: Classement des meilleurs investissements

Animaux

Logement

Épargne fo

rmelle

et info

rmelle

Éducatio

n

Affaire

s

Agricultu

re

Bijoux

Aménagement d’un puits

Aider autru

i

60

50

40

30

20

10

0

Pourcentage de réponses

Bolivie (n=498)

Inde (n=1011)

Kenya (n=236)

Heffernan et al. (2002).

Page 36: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

des revenus pour se nourrir et satisfaire leurs autres besoinsessentiels pendant toute l’année, et risquent par conséquent de setrouver dans l’impossibilité de bénéficier des hausses saisonnièresdes prix (Encadré 1.2).

Les animaux constituent également un capital socialLes animaux contribuent de façon importante à entretenir lesrelations sociales. Le prêt ou le don d’animaux contribue à créer unsentiment d’appartenance et à resserrer les relations sociales, et sonten même temps l’un des éléments au regard desquels peut êtreévalué le capital social de la famille et du ménage.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

15

Encadré 1.2: Lucia, veuve de l’ouest du Mexique

“Lorsque ma vache met bas, je dois lutter pour garder le veau au moins un an

pour pouvoir le vendre un peu mieux. S’il survit jusqu’à la saison des pluies, le

veau, ayant brouté de l’herbe, pèsera davantage. Malheureusement, par suite

de maladies ou d’autres crises, je ne peux pas attendre et je dois vendre le veau

et, à ce stade, je suis déjà endettée jusqu’au cou.”

Villarreal (2001).

Figure 1.3: Classement des sources de revenus

Élevage

Trava

il salarié

occasio

nnel

Petit co

mmerce

Affaire

s

Emploi

Loca

tion d’un lo

gement

ou d’une chambre

Mendici

Agricultu

re

Fonds r

eçus d

e

l’étra

nger

45

40

35

30

25

20

15

10

5

0

Pourcentage de réponses

Kenya (n=254)

Inde (n=1195)

Bolivie (n=585)

Heffernan et al. (2002).

Le prêt ou le don d’animauxcontribue à créer unsentiment d’appartenanceet à resserrer les relations sociales

Page 37: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Woodcock et Narayan (2000) sont parvenus à la conclusion quele capital social joue un triple rôle: il crée un sentimentd’appartenance, il établit des passerelles et a un effet d’intégration.Le sentiment d’appartenance reflète le lien qui existe entre lesmembres de la proche famille et les passerelles établies par le capitalsocial sont les liens plus ténus qui existent entre personnes d’originegéographique ou ethnique ou de professions différentes. L’effetd’intégration du capital social tient aux relations qui s’établissententre les pauvres et les institutions formelles comme les ONG ou lesautorités. Dans beaucoup de ménages pauvres, les animaux sontpartagés ou prêtés entre membres de la famille et amis ou sontélevés pour le compte de propriétaires absents (Beck, 1994;Heffernan et Misturelli, 2000). Ces arrangements peuvent êtreextrêmement divers, allant de simples contrats de location à desprêts plus complexes qui peuvent s’étendre sur plusieursgénérations. Les animaux peuvent également être donnés sousforme de cadeaux et contribuer ainsi à cimenter les réseaux sociauxet à resserrer les obligations communautaires entre ménages(Lesorogol, à paraître).

Toutefois, les arrangements de partage des animaux ne sont pastous fondés exclusivement sur des réseaux sociaux. En Bolivie, parexemple, les agriculteurs pauvres participent souvent à Al-Partido,

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

16

Les animaux peuventcontribuer à cimenter les

réseaux sociaux

Pays

Éthiopie

Égypte

Kenya

Pakistan

Philippines

Household Income from Livestock (%)

624

6314

6338

59

310

Tableau 1.3: Place occupée par l’élevage dans le revenu desriches et des pauvres

Indicateur de richesse/ de pauvreté

Revenu du ménage

Propriété foncière

Revenu du ménageprovenant de laproduction laitière

Revenu du ménage

Revenu du ménage

Catégorie

Très pauvrePauvre

Sans terreGrandes exploitations

Tranche inférieure de 20%Tranche supérieure de 20%

Tranche inférieure de 20%Tranche supérieure de 20%

Tranche inférieure de 20%Tranche supérieure de 20%

Delgado et al (1999).

Page 38: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les systèmestraditionnels derépartition des animauxpeuvent jouer un rôle desécurité sociale

Le rôle des animaux en tant que capital socialpeut devenir moinsfréquent

un système de partage et d’élevage des animaux à caractèrecommercial. La plupart des programmes de “crédit en nature” (deHaan et al., 2001) sont fondés sur un principe commercial quiconsiste à transférer à d’autres membres de la communauté unepartie de la portée mise bas par les animaux.

Dans les sociétés pastorales d’Afrique orientale, les prêts sontgénéralement moins fréquents que les dons d’animaux (Heffernan etMisturelli, 2000). De plus, aussi bien les prêts que les dons n’ontgénéralement pas la même orientation commerciale et sont fondésdavantage sur divers types d’arrangements relevant du capital social.Ainsi, les prêts comme les dons font l’objet de transactions aussi bienformelles qu’informelles (Heffernan et Misturelli, 2000). Dansbeaucoup de communautés, par exemple, la dot est payée sous formed’animaux et les dons d’animaux sont fréquents lorsque des amis oudes voisins traversent des temps difficiles. En Afrique de l’Ouest, enrevanche, les éleveurs tendent à répartir leurs troupeaux entreplusieurs parents de façon à diviser les risques liés aux sécheresses etaux maladies. Dans le Sahel, des animaux peuvent également êtreprêtés moyennant rémunération, soit que les animaux mis bas soientpartagés, soit qu’il soit versé un loyer en espèces.

Dans le cas des pasteurs d’Afrique orientale, il existe desmécanismes traditionnels de reconstitution des troupeaux auxéchelons aussi bien de la communauté que de l’individu. Lesmembres les plus aisés de la tribu des Boran, par exemple, sontcensés donner chaque année des animaux aux membres plusdémunis de la tribu, sur une base déterminée par les anciens, ce quicontribue à garantir la sécurité sociale des membres de lacommunauté. De même, parmi les pasteurs Masaï, la terre et l’eau,comme les animaux, font partie des systèmes traditionnels,complexes, de propriété commune. Ces systèmes permettent à tousles membres de la communauté d’avoir accès aux ressources les plusimportantes et jouent par conséquent un double rôle de sécuritésociale et de règlement des conflits (Loft, 2002).

Toutefois, le rôle des animaux en tant que capital social peutdevenir moins fréquent à mesure que celui de l’élevage devient peuà peu une activité commerciale plus orientée vers la production.Dans une étude effectuée parmi les pasteurs kényens, par exemple,Heffernan et Misturelli (2000) ont constaté que les animaux jouentun rôle formel dans les successions, les dots et les autres cérémoniesbeaucoup plus important que le rôle informel, à savoir les dons.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

17

Page 39: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’élevage peut contribuer à entretenir le capital naturelL’intégration de l’élevage à l’agriculture peut améliorer la durabilitédes systèmes agricoles car les animaux peuvent être utilisés commemoyens de traction et de transport, améliorent la fertilité des sols etaccroissent la productivité et les possibilités de gains des ménagespauvres tout en aidant ces derniers à financer l’achat d’intrantsagricoles.

Quelques études récentes contiennent des exemples de cas danslesquels l’intégration de l’élevage et des cultures a amélioré laproductivité et la rentabilité des exploitations de 50 à plus de 100% (Lekule et Sarwatt, 1996; Rangnekar, 1997; Ogle, 1996;Zerbini et Larsen, 1996). Gryseels (1988) a découvert l’existenced’une corrélation positive entre la propriété d’animaux et lerendement par hectare si les gains provenant de la vente d’animauxsont utilisés pour acheter des intrants agricoles. On trouvera, dansl’encadré 1.3, un exemple de cas où l’utilisation du fumier produitpar les chèvres pour enrichir la terre a considérablement accru lerendement céréalier des systèmes agricoles.

Cependant, si l’élevage peut contribuer à entretenir lesressources naturelles, une réduction générale de la disponibilité deressources naturelles comme les terres communes utilisées pour lepacage peut affecter les éleveurs pauvres. Beaucoup de ces dernierssont tributaires des terres communes pour le pacage de leursanimaux, mais ces ressources se rétrécissent constamment du faitdes pressions de plus en plus intenses qu’exercent sur la terrel’accroissement démographique et le développement en général.Par exemple, Jodha (1992) a constaté que, dans divers États del’Inde, les ressources communes avaient diminué de 31 à 55%

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

18

Encadré 1.3: Introduction en République-Unie de Tanzanie de chèvres à double usage nourries en enclos

Le fumier produit par les chèvres a été rassemblé et utilisé pour enrichir la terre,

ce qui a considérablement accru le pH du sol et les nutriments qu’il contient,

et ainsi indirectement la production. Les rendements des cultures de maïs sont

passés de 450 à 1 450 kg/acre, le sorgho de 380 à 900 kg/acre et le mil de 370

à 780 kg/acre. En outre, le revenu monétaire tiré de la production de légumes

a augmenté de 206% par an.

Shirima (2001).

L’intégration del’élevage à l’agriculture

peut améliorer laproductivité des

exploitations

Les terres communes de pacage se rétrécissent

Page 40: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

pendant la période 1951-1981. Le développement commercialaccélère parfois ce processus. LID (1999) a trouvé plusieursexemples d’exploitations commerciales dont avaient bénéficié deséleveurs aisés qui avaient ensuite privatisé les terres communes etainsi en avaient exclu les agriculteurs voisins pauvres. Undéveloppement de l’élevage qui ne tient pas compte aussi de lapauvreté peut évincer les éleveurs pauvres.

Les animaux que détiennent les pauvres dans les taudis urbainssurpeuplés constituent une menace particulière pour les ressourcesnaturelles. Les animaux font concurrence aux humains qui doiventpartager avec eux les rares ressources en eau disponibles tandis queleurs excréments entraînent des risques pour la santé humainecomme pour l’environnement par le biais à la fois de la pollutiondes sols et de l’eau ainsi que de la transmission de maladies del’animal à l’homme.

Le rôle de l’élevage dans la gestion de l’environnement estdiscuté dans les publications d’un réseau mondial appelé Livestock,Environment and Development (de Haan et al., 2001), qui décrivent lasituation et l’impact environnemental de l’élevage dans le monde.

L’élevage peut accroître le capital humain et atténuer la malnutritionL’élevage peut enrichir de différentes façons le capital humain. Les études de cas du Bangladesh et de l’État de l’Orissa sont des exemples de la façon dont les pauvres ont accru leursconnaissances et réussi à rehausser leur condition aux yeux de lacommunauté et des familles en élevant des animaux et ens’organisant au sein de groupes communautaires et d’associationsde producteurs.

Dans une étude de l’impact d’un projet de développement del’élevage au niveau de la petite exploitation au Bangladesh, Nielsen(1996) a constaté que les revenus étaient accrus pour toutes lesfemmes participantes. Le surcroît de revenus était utilisé pouracheter plus d’aliments, pour envoyer les enfants à l’école etacquérir des avoirs comme de la terre. En outre, les femmesparticipaient davantage à la prise de décisions dans la famille. Cesconstatations ont été confirmées par une étude réalisée récemmentde l’impact du modèle d’élevage de volaille en semi-liberté auBangladesh. Les femmes ont déclaré que l’élevage de volaille avaitaccru leur voix au chapitre en matière financière au sein de la

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

19

La production del’élevage peut habiliterles groupes vulnérables

Page 41: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’élevage peut améliorer la situation

nutritionnelle desfamilles pauvres

Les aliments d’origineanimale jouent un rôle

particulier dans lanutrition infantile

famille et avait rehaussé leur condition aux yeux de la société(Lund, 2002).

L’élevage peut également améliorer la situation nutritionnelledes familles pauvres. La malnutrition est souvent due à la fois à un manque d’accès aux aliments, à l’ignorance des principesnutritionnels et à l’inégalité qui caractérise la répartition desressources au sein des familles. Le surcroît de revenus réguliersprovenant de l’élevage peut donc accroître l’accès aux aliments des membres de la famille. Simultanément, une amélioration duniveau d’instruction et de la condition des femmes réduitconsidérablement la malnutrition non seulement pour elles maisaussi pour leurs enfants. Eklund (2002) décrit comment les projets d’amélioration de la situation nutritionnelle au Népal ont démontré que la malnutrition chez les enfants diminueconsidérablement à mesure que le niveau d’instruction et lacondition de leurs mères s’améliorent.

La consommation même de petites quantités d’aliments d’origineanimale peut beaucoup améliorer le régime alimentaire des enfantsdans le monde en développement. Plusieurs études montrent que la consommation de produits animaux a un impact positif sur ledéveloppement physique et cognitif des enfants, et on sous-estimesouvent la contribution que même de modestes quantités d’alimentsd’origine animale peuvent apporter au développement des enfantsdes familles pauvres (Neumann et Harris, 1999). Ces dernières,cependant, consomment très peu d’aliments d’origine animale etmangent surtout des céréales ou des tubercules, même si elles élèventdes animaux. C’est ce qu’ont confirmé les études de l’impact sur lanutrition des projets de développement de l’élevage de volaille auBangladesh. Habituellement, les produits animaux étaient venduspour obtenir l’argent nécessaire à l’achat d’autres aliments comme leriz, les fruits et le poisson. Néanmoins, les projets de promotion del’élevage de volaille ont eu un impact substantiel sur la situationnutritionnelle des enfants et des mères (Roos et al., 2002). Celamontre l’importance que l’élevage peut revêtir dans le domaine de lanutrition, même si les produits de l’élevage ne sont pas consommésdirectement par les familles.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

20

Page 42: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’élevage et les groupes spécialementvulnérables

Les femmes jouent un rôle important dans l’élevageLes femmes constituent parmi les éleveurs un groupeparticulièrement vulnérable. Ainsi, il est évident que les femmessont soumises à davantage de contraintes et à des contraintes plussévères que les hommes. Elles jouent néanmoins un rôle trèsimportant dans l’élevage dans presque tous les pays endéveloppement.

Dans les communautés africaines, ce sont généralement lesfemmes qui doivent s’occuper des travaux agricoles et des animaux(Curry, 1996). En Asie, les femmes des communautés pauvress’occupent elles aussi des animaux (Rangnekar, 1998; Ramdas etSeethalakshmi, 1999). Comme ce travail est accompli principalementpar des femmes pauvres, il reste souvent invisible ou tout au moinssous-estimé.

Ces dernières décennies, des études approfondies ont été menéessur la corrélation entre le sexe et l’élevage. Divers auteurs ont essayéd’adapter les cadres existants pour systématiser les études à ce sujet (Tangka, Jabbar et Shapiro, 2000; Banque asiatique dedéveloppement, 2000). La majorité des études portent sur larépartition des tâches, la propriété et le contrôle des ressources etl’accès à celles-ci (Bravo-Baumann, 2000; Tangka, Jabbar et Shapiro,2000; Banque asiatique de développement, 2000). Selon Curry(1996), toutefois, les cadres qui sont axés exclusivement sur larépartition des tâches entre hommes et femmes et sur le contrôleexercé sur les animaux ne tiennent pas compte du rôle d’autresmembres de la famille ni, d’une manière plus générale, de ladynamique des rôles des hommes et des femmes dans la prise dedécisions touchant le soin des animaux. Les idées reçues en ce quiconcerne l’impact du sexe sur la propriété du cheptel sont que cesont les hommes qui exercent un contrôle sur les grands animauxtandis que, habituellement, les femmes ne possèdent que de petitsanimaux et de la volaille (Bravo-Baumann, 2000). Toutefois, lecontrôle exercé sur les animaux et les produits de l’élevage estsouvent déterminé par la fonction économique que les diversanimaux ont au sein du ménage. Dans les régions où l’élevage depetits animaux, de volaille et de porcs constitue une importantesource de revenus pour la famille, la gestion des troupeaux et des

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

21

Le contrôle exercé sur les animaux est souvent déterminépar la fonctionéconomique de cesderniers au sein du ménage

Page 43: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

basses-cours est souvent confiée à l’homme qui dirige le ménage. Parconséquent, tout cadre d’étude de l’impact du sexe sur l’élevage doitprendre en considération le rôle que jouent les animaux dans lesdomaines aussi bien de la production que de la vie familiale.

Les idées concernant les animaux varient selon le sexeLes attitudes et les idées concernant les animaux varient souventselon le sexe. Par exemple, Thomas-Slayter et Bhatt (1994) ontrelevé que, dans un village du Népal, les hommes considéraientl’acquisition de buffles comme un investissement tandis que lesfemmes s’acquittaient davantage des problèmes de gestion àprévoir, comme l’alourdissement de leur charge de travail.Heffernan, Nielsen et Misturelli (2001) ont également constaté quel’idée que les membres des ménages pauvres se faisaient desanimaux et de leur rôle variait selon le sexe (Tableau 1.4).

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

22

Rôle des animaux

Effectifs de l’échantillon

Sécurité alimentaire

Revenus

Achat d’aliments

Droits de scolarité

Investissements

Mode de vie traditionnel

Dot

Crédit

Cérémonies

Prestige social

Traction

Combustible, fumier

Loisir

Autres raisons

Total

Femmes

120

60%

15%

5%

10%

10%

100%

Hommes

125

36%

8%

12%

16%

16%

4%

4%

4%

100%

Femmes

209

30%

38%

19%

3%

1%

1%

2%

2%

4%

100%

Hommes

348

30%

45%

11%

4%

2%

4%

1%

3%

100%

Femmes

410

17%

63%

6%

2%

1%

11%

100%

Hommes

606

19%

59%

6%

2%

4%

2%

8%

100%

Kenya Bolivie Inde

Tableau 1.4: Raisons de l’élevage d’animaux en Bolivie, en Inde et au Kenya

Heffernan, Nielsen et Misturelli (2001).

Page 44: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Comme le montre le tableau, la majorité des femmes kényennesconsidéraient les animaux comme un moyen de garantir la sécuritéalimentaire de la famille, tandis que les hommes y voyaient unmoyen de subvenir aux besoins actuels, comme l’achat d’aliments etles droits de scolarité, et une forme d’investissement.

En Bolivie, le produit des réponses a été différent. Dans ce pays,aussi bien les hommes que les femmes considèrent les animauxcomme une source de revenus et une garantie de la sécuritéalimentaire future. Toutefois, les hommes apprécient beaucoup lesanimaux comme aides dans l’exécution de travaux agricoles tels quele labour, ce qui confirme la répartition traditionnelle des tâches enBolivie, la préparation et le travail de la terre relevantprincipalement de la responsabilité des hommes.

En Inde, aussi bien les hommes que les femmes ont mis en reliefle rôle des animaux dans la génération de revenus et la sécuritéalimentaire. Chose intéressante, peu d’hommes ont dit que le fait deposséder des animaux rehaussait le prestige social du ménage.

Ces divergences de vues peuvent susciter dans le travail desconflits familiaux. En Inde, par exemple, les femmes se plaignaientsouvent du travail supplémentaire que représentait la possessiond’animaux. De même, dans un village mexicain, un groupe defemmes se sont plaintes du travail que leur imposaient les animauxappartenant à leurs maris. Selon elles, les animaux étaient un avoirimproductif que leurs maris n’achetaient généralement que parcequ’ils y voyaient un moyen de rehausser leur prestige et leurpouvoir au sein de la communauté locale. Les Mexicaines, enrevanche, considéraient que la volaille était un avoir facilementutilisable pour nourrir la famille et les porcs comme uninvestissement viable qui pouvait facilement être réalisé en cas debesoin (Villarreal, 2001).

Propriété et contrôle des animauxOn considère généralement que les femmes, même si elles sontpropriétaires des animaux dont elles s’occupent, n’exercent sur euxqu’un contrôle limité. En Afrique de l’Est, par exemple, les femmesdes sociétés pastorales et agropastorales reçoivent généralementdes animaux lors de cérémonies traditionnelles, mais en achètentrarement. Les animaux sont donnés à la femme pour lui constituerune dot, ou bien lui sont donnés par le mari ou les hommes de lafamille (Joekes et Pointing, 1991; Watson, 1994; Smith-Oboler,

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

23

Les femmes, bien que parfoispropriétaires desanimaux, n’ont guère de contrôle sur eux

Page 45: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

1996). Les femmes peuvent également hériter d’animaux maisleur part est habituellement inférieure à celle de leurs proches de

sexe masculin (Joekes et Pointing, 1991; Talle, 1988). Talle (1988)note que, chez les Masaï, les femmes ne possèdent les animaux quenominalement mais n’exercent guère de contrôle réel sur leurproduction. Ces limites affectent aussi bien les bovins que les petitsanimaux. Même si, dans des circonstances exceptionnelles, le marin’est pas présent, les femmes doivent consulter les parents de sexemasculin avant de pouvoir vendre des animaux. En revanche,Smith-Oboler (1996) a constaté que les femmes Nandi exercent une forte influence sur les décisions concernant l’élevage, mêmelorsque les animaux, officiellement, appartiennent aux hommes.Divers produits sont souvent alloués aux différents groupes selonleur sexe. Les femmes Fulani, par exemple, vendent tout le lait et peuvent utiliser à leur gré le produit de la vente tandis que cesont les hommes qui se réservent le produit de la vente desanimaux.

Les concepts de propriété et de contrôle sont souvent confondus,notamment parce que la ligne de démarcation entre la propriétéeffective et la propriété de facto des animaux est souvent peu claire.Agarwal (1998) fait observer que l’égalité entre hommes et femmesau regard du droit que leur reconnaît la loi de posséder des biensne garantit pas une égalité de propriété effective, pas plus que lapropriété ne garantit un contrôle. L’étude définit par conséquent la propriété réelle comme un régime de propriété tel que l’éleveur,par ses décisions concernant la vente et la gestion de son troupeau,a un véritable droit d’aliénation aussi bien des animaux que de leurs produits.

Néanmoins, les concepts rigoureux de propriété qui existent enOccident peuvent être inapplicables parmi d’innombrables groupesd’éleveurs du monde en développement. C’est ainsi que Smith-Oboler (1996) relève que, dans les systèmes indigènes de propriétéd’Afrique, aucune personne ne détient sur les animaux les droits quidécoulent implicitement, en Occident, de la “propriété” de quelquechose. Dans le cas de la plupart des animaux, les droits de contrôleque détient un individu sont limités par les droits sur le mêmeanimal que détiennent d’autres personnes. Rares sont les études àavoir tenu compte de cet élargissement des concepts de propriété.La plupart des ouvrages ont été axés sur la latitude qu’ont lesfemmes de vendre les animaux ou leur production.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

24

Page 46: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les femmes ont souventun rôle particulier dansl’élevage de volaille

Posséder des animauxpeut réduire lavulnérabilité du ménageau VIH/sida

Enfin, en dépit de l’avertissement ci-dessus touchant la corrélationétroite qui existe entre les rôles des hommes et des femmes et le rôleéconomique des animaux, la propriété de volaille constitue souventun cas exceptionnel. On s’accorde en effet à reconnaître que lavolaille et leur production appartiennent légitimement aux femmes,qui peuvent les gérer et les contrôler comme elles l’entendent.

Les femmes apportent beaucoup de travail aux soins des animauxLes femmes sont à l’origine d’une proportion considérable dutravail que suppose s’occuper d’animaux dans la plupart dessystèmes de production, bien que la portée et le degré desresponsabilités propres aux hommes et aux femmes puissent varier.D’une manière générale, les femmes jouent le rôle prédominantdans les systèmes de culture mixte et s’acquittent de la plupart destâches concernant les animaux. Dans le sud de l’Asie, les femmesaccomplissent de 70 à 80% du travail lié à l’élevage (Rangnekar,1998; Tulachan et Karki, 2000).

Dans les sociétés pastorales traditionnelles, les femmes consacrentmoins de temps à s’occuper des animaux qu’à leurs autres activités.C’est ainsi par exemple que Bekure et al. (1991) ont estimé qu’enmoyenne, les femmes passent 2,5 heures par jour à s’occuper desanimaux, contre 6 heures pour leurs travaux domestiques.Néanmoins, les tâches et la charge de travail sont manifestementréparties selon le sexe. Les femmes s’occupent traditionnellementdes tâches domestiques, tandis que les hommes sont les acteurs surla scène publique (Talle, 1988). Les femmes se chargent de la traiteet s’occupent des jeunes animaux et, le cas échéant, de ceux qui sontmalades, tandis que les hommes jouent essentiellement un rôle degestion et de supervision. Ce sont eux qui se renseignent sur lasituation des parcours, la disponibilité d’eau et les débouchés et quiprennent ensuite les décisions (Bekure et al., 1991). Souvent, ce sontles hommes qui supervisent l’abreuvement et la garde destroupeaux. De même, ce sont les hommes qui, au sein du ménage,prennent la majorité des décisions concernant la vente ou l’abattagedes animaux. Dès un très jeune âge, les enfants participent à la gardedes troupeaux. Les filles gardent surtout les petits animaux, et lesgarçons et les adolescents le bétail (Bekure et al., 1991; Laswai et al.,1999). En revanche, l’étude réalisée en Bolivie fait apparaître untableau différent dans les systèmes d’agriculture mixte de l’altiplano

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

25

Page 47: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le VIH/sida aggrave la pauvreté et lavulnérabilité des

ménages pauvres

andin, où les femmes et les filles sont celles qui s’occupentprincipalement de toutes les activités concernant les animaux, ycompris la garde des troupeaux et des petits animaux.

Les femmes peuvent perdre leurs rôles stratégiquesLorsque l’élevage devient plus commercial, les rôles des hommes etdes femmes peuvent changer et les femmes risquent de perdre lecontrôle qu’elles avaient précédemment sur les revenus provenantdes animaux. Au pire, les femmes jadis productrices deviennentouvrières d’exploitations commerciales (Encadré 1.4).

L’élevage et le sidaLa pandémie de VIH/sida a de sérieuses répercussions sur l’élevagecar elle accroît la pauvreté et la vulnérabilité des éleveurs pauvres.L’élevage représente, néanmoins, pour les ménages affectés unmoyen de faire face à la crise. Il est par conséquent essentiel que lesprogrammes de développement de l’élevage tiennent compte desbesoins spécifiques des ménages affligés par le sida.

Le sida est une réalité et une menace majeure en Afriquesubsaharienne, où il est à l’origine d’une énorme aggravation de la pauvreté, et l’épidémie prend peu à peu des proportionsconsidérables aussi en Asie et en Amérique latine. Avec le temps,

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

26

Encadré 1.4: Les Nandi au Kenya

Parmi les Nandi, les animaux font partie des biens traditionnels du ménage. Partradition, les animaux étaient hérités et contrôlés par les hommes. Les femmesavaient accès aux produits de l’élevage dans le cadre de leur rôle de gérantedu ménage et de leur obligation de nourrir la famille. Une fois mariée, unefemme pouvait recevoir des animaux qui puissent produire du lait pour elle-même et ses enfants. Les animaux ne pouvaient pas être aliénés par leshommes. Les hommes et les garçons avaient droit au lait du matin, et lesfemmes et les filles au lait du soir.

Avec la commercialisation croissante de la production laitière, les grandstroupeaux de zébus sont peu à peu remplacés par des troupeaux moinsnombreux de bovins croisés, habituellement achetés avec l’argent du mari etpar conséquent considérés comme son bien. Les droits des femmes sur le laitprovenant de vaches spécifiques disparaissent progressivement. Comme le laitdu matin est désormais vendu, le lait du soir doit subvenir à toute laconsommation du ménage.

Huss-Ashmore (1996).

Page 48: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les orphelins risquent de perdre les avoirs de la famille comme la terre, le capital et le bétail

le VIH/sida change, amplifie et aggrave les manifestations de la pauvreté. Néanmoins, presque toutes les caractéristiques de lapauvreté ont pour effet d’intensifier la vulnérabilité à l’infection etd’aggraver l’impact de la maladie (Topouzis et du Guerny, 1999).Dans les régions rurales affectées par le sida, les ménages nepeuvent plus consacrer autant de temps aux activités agricoles. EnÉthiopie, où le temps consacré à l’agriculture était de 33,6 heurespar semaine, n’est maintenant plus que de 11,6 à 16,4 heures parsemaine parmi les ménages affectés par le sida (Loewenson etWhiteside, 2001). Cela se traduit par une baisse de la productionagricole et des revenus, et une augmentation de l’insécuritéalimentaire. Les ménages qui comportent des malades voientégalement leurs dépenses augmenter, par exemple pour payer lessoins médicaux, les aliments spéciaux dont ont besoin les maladeset, finalement, l’enterrement et les funérailles. Or, ces coûts sontsouvent couverts par la vente d’animaux.

Si un membre de la famille tombe malade et meurt, le conjoint estsouvent infecté lui aussi et quitte le ménage, qui devient un grouped’orphelins et peut-être de personnes âgées n’ayant ni la force ni lescompétences nécessaires pour produire les aliments en quantitéssuffisantes ou gagner un revenu. En outre, dans de nombreusesrégions, les coutumes successorales traditionnelles veulent que lesveuves et les orphelins renoncent à des avoirs comme le logement, laterre, le capital et le bétail. Le bétail et éventuellement les petitsanimaux peuvent être confisqués par les autres membres de lafamille, ce qui condamne le ménage à la misère (Engh et du Guerny,2000; Barnett, 1994).

Posséder des animaux peut atténuer la vulnérabilité desménages au VIH/sida. Les animaux peuvent être utilisés pourgénérer un revenu monétaire régulier ou bien peuvent être venduspour couvrir le coût des soins médicaux, des enterrements, etc.(Barnett, 1994). Simultanément, les animaux de trait peuventréduire la quantité de travail nécessaire dans les champs et lesfamilles qui possèdent des bœufs peuvent, en cas de besoin, leséchanger contre un apport de travail. Les petits animaux jouent unrôle particulier dans les ménages affectés par le VIH/sida. Souventles femmes ont des droits plus solides sur les petits animaux, parexemple sur la volaille et parfois sur les moutons et les chèvres,lorsque le mari disparaît. En outre, il semble souvent plus facilepour les femmes de gérer les petits animaux en période de crise

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

27

Page 49: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Améliorer l’égalité entre les sexes peut

réduire la vulnérabilité

Il faut accorder une attention spéciale

aux ménages dirigés pardes femmes et par

des enfantsLa formation spécifique

des jeunes orphelins

lorsqu’elles n’ont pas de terres de pacage ou d’aide pour garder lestroupeaux (Haslwimmer, 2001).

Selon plusieurs auteurs, par exemple Loewenson et Whiteside(2001), il existe une étroite corrélation entre la vulnérabilité au sidaet l’inégalité entre les sexes. On peut donc apparemment affirmerque rehausser la position des femmes au sein de la société et de lafamille, comme l’ont fait certains programmes de promotion del’élevage axés sur la réduction de la pauvreté, peut contribuer àréduire la vulnérabilité des communautés pauvres au sida.

Si beaucoup de problèmes affectent tous les groupes d’éleveursvulnérables et pauvres, certains problèmes propres à l’infection parle VIH/sida doivent particulièrement retenir l’attention si l’on veutque les ménages puissent participer au développement de l’élevage.Premièrement, comme beaucoup de services privilégient leshommes, le ménage, lorsqu’il perd un homme adulte, peutégalement perdre son accès aux services.

Si l’on veut que ces ménages puissent occuper la place qui leurrevient dans le secteur de l’élevage, les programmes doivent êtrespécifiquement conçus en leur faveur. Cela signifie qu’il fautaccorder une attention accrue aux ménages dirigés par des femmeset des enfants, qui ont un problème supplémentaire, à savoir qu’ilsont perdu une partie de leurs avoirs et de leurs compétences enmatière d’élevage, de sorte qu’ils ont besoin d’une formationspécifique ou d’un transfert systématique de connaissances et decompétences par les autres membres de la communauté.

Les familles affectées par le sida ont spécifiquement besoin:■ d’une prestation de services zootechniques axés sur

les ménages dirigés par des femmes et des enfants;■ d’un transfert de compétences et de connaissances d’une

génération à l’autre;■ de droits successoraux légaux ou coutumiers garantis

(les deux étant aujourd’hui souvent contradictoires);■ d’un accès au crédit pour éviter de devoir vendre des animaux

ou pour pouvoir reconstituer les troupeaux en cas de besoin; et■ de technologies de nature à accroître la productivité

du travail:– intégration de l’élevage aux systèmes de culture;– octroi d’une importance accrue aux petits animaux; et– accès aux animaux de trait.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

28

Page 50: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il faut sensibiliser lescommunautés au droitsuccessoral

Les mécanismes de crédit peuvent être utiles

Technologies permettant deséconomies de travail

Les lois successorales doivent garantir l’accès des veuves et desorphelins à la terre et aux animaux. Cependant, le droit coutumieret la législation sont souvent contradictoires, ce qui signifie qu’à elleseule, une loi ne peut pas suffire. Il faut mieux sensibiliser lescommunautés de façon qu’elles puissent renoncer aux pratiquesinappropriées.

Il peut être très utile pour les familles en période de crise d’avoiraccès à des établissements de crédit et à des prêts modiques. Si ellesont accès au crédit, les familles affectées n’auront pas besoin devendre leurs avoirs productifs, comme leur bétail, lorsqu’elles ontbesoin d’argent. En outre, de petits prêts pour l’achat d’animauxpeuvent faciliter la reconstitution des troupeaux lorsque lesménages ont été forcés de vendre leurs animaux ou que lesanimaux sont morts par suite de problèmes de gestion.

Le travail constitue souvent le principal problème pour lesménages affectés par le sida, de sorte qu’il faut accroître lerendement du travail. Par exemple, lors d’une étude réalisée enRépublique-Unie de Tanzanie (Barnett, 1994), il est apparuclairement que les ménages qui possèdent des bœufs sont moinsvulnérables au sida que ceux qui n’en ont pas. L’accès à desanimaux de trait réduit l’apport de travail nécessaire et permet demener à bien de façon plus productive les travaux indispensablesde semis et de désherbage. Les familles qui possèdent des bœufspeuvent également, lorsque cela est nécessaire, échanger leursbœufs contre un apport de travail. Il ne faut pas oublier que lesfemmes sont spécialement vulnérables et qu’il est très difficile pourelles d’établir un ordre de priorité parmi leurs différentes tâchesétant donné que ce sont elles, pour l’essentiel, qui doivent soignerles malades et diriger la famille après un deuil. On trouve dans lesouvrages beaucoup d’exemples de cas dans lesquels des ménagesdirigés par des veuves ou des orphelins ont commencé à éleverquelques animaux, comme de la volaille et des porcs, ou même desabeilles, pour survivre. L’élevage de petits animaux n’exige pasautant de travail, et les investissements et les risques qu’il supposene sont pas excessifs pour les groupes vulnérables.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

29

Page 51: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le manque d’accès aufourrage et à l’eau

constitue le problème leplus sérieux

Service dont ont besoin les éleveurs

Les services dont ont besoin les éleveurs pauvres devraient êtredéfinis dans un contexte plus large des systèmes de prestation deservices en général dans tous les domaines. En effet, il n’arrive quetrop souvent que les problèmes qui se posent soient analysés commesi l’économie, la politique, les services techniques et les structuressociales pouvaient être isolés.

Ce qui suit est fondé sur ce que l’on sait des caractéristiquesgénérales de la pauvreté, et plus spécifiquement de la pauvreté chezles éleveurs, l’idée étant de déterminer comment ces caractéristiquesrisquent d’empêcher les pauvres de tirer parti des possibilitésqu’offre l’élevage.

Problèmes liés à l’élevagePour les pauvres, l’élevage durable suscite divers problèmes. LID(1999) a rangé les problèmes des pauvres en trois grandescatégories:

■ achat des animaux et de l’infrastructure;■ entretien des troupeaux; et■ commercialisation des produits de l’élevage.

Pour pouvoir acheter les animaux et l’infrastructure, les ménagesdoivent avoir accès à des capitaux et à des mécanismes de crédit.Pour entretenir leurs troupeaux, les ménages doivent maintenir lesanimaux en bonne santé et avoir accès à des services zoosanitaires.Pour vendre les produits de leur élevage, les pauvres doivent avoiraccès à des débouchés fiables.

Ces besoins sont également reflétés dans l’étude de Heffernan etal. (2002), qui ont demandé à plus de 1 700 ménages de la Bolivie,de l’Inde et du Kenya d’établir un ordre de priorité. La figure 1.4montre que la plupart des ménages interrogés ont déclaré que le manque d’accès au fourrage et à l’eau constituait pour eux leproblème le plus sérieux. Les maladies animales constituaient leprincipal problème pour 20% environ des éleveurs. Indépendam-ment de ces contraintes majeures, toutefois, les autres problèmesidentifiés variaient beaucoup selon les pays et les districts. Le vol,par exemple, était considéré comme un problème grave parmi lescommunautés pastorales du Kenya. En Inde, les éleveurs urbains sesouciaient surtout d’avoir un espace suffisant pour élever leurs

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

30

Page 52: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

animaux et étaient préoccupés par la faiblesse de la production,tandis que les accidents – principalement lorsque des animaux setrouvaient attrapés dans du fil barbelé – venaient parmi lesproblèmes cités en tête de liste en Bolivie. En outre, un certainnombre de participants ont déclaré ne pas en savoir assez surl’élevage et la santé animale.

Cette discussion des problèmes que soulève l’entretien desanimaux met en relief deux éléments:

■ Les problèmes auxquels sont confrontés les éleveurs pauvressont remarquablement semblables en dépit des variationsenregistrées selon les régions et les pays. Dans les trois pays, le manque de fourrage et d’eau et le manque de servicesvétérinaires étaient considérés comme les principauxproblèmes par des ménages d’éleveurs.

■ À la différence de l’étude de LID (1999), les problèmes liés à l’achat d’animaux n’ont pas été considérés commeprédominants. De même, le manque de débouchés pour laproduction n’a pas été considéré comme un problèmeinsurmontable.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

31

Figure 1.4: Principaux problèmes mentionnés par les éleveurs

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Pourcentage de réponses

Inde (n=1024)

Bolivie (n=514)

Kenya (n=247)

Heffernan et al. (2002).

Page 53: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

En milieu urbain, les éleveurs pauvres ont peine à avoir accès aufourrage et spécialement à l’eau, tout comme l’état de santé desanimaux est particulièrement affecté, les éleveurs pauvresconnaissant généralement mal les pratiques à suivre et ne disposantpas d’espace suffisant pour les animaux.

Qui définit les besoins des pauvres?La plupart des évaluations des besoins ont été réalisées par despersonnes de l’extérieur plutôt que par les pauvres eux-mêmes.L’encadré 1.5 illustre l’absence de corrélation entre les besoinsperçus par les organismes de développement et par les agriculteurset comment les ressources peuvent être mal orientées.

Les personnes de l’extérieur et les pauvres voient les problèmesde ces derniers sous des angles différents. En outre, il existe un biaisconsidérable dans les évaluations des besoins et l’identification despriorités, selon les vues et la motivation des parties prenantes dontil s’agit et selon les méthodes utilisées. Les ouvrages peuvent, engros, être classés en trois catégories, selon la méthodologieemployée pour définir les besoins (Tableau 1.5).

Il apparaît que toutes les méthodes introduisent un biaisextérieur. La méthode participative est celle qui peut se rapprocherle plus des vues des pauvres eux-mêmes, mais elle est contrôlée parles facilitateurs, et ses résultats dépendent par conséquent del’approche suivie par ces derniers. De plus, les exploitants eux-mêmes introduisent également des biais dans les méthodesparticipatives: ils tendent à donner les réponses dont ils pensentqu’elles favoriseront des projets futurs ou que c’est ce que lesfacilitateurs veulent entendre. Lors d’une évaluation réalisée enAfghanistan, les exploitants vivant dans les régions où il n’existe pasde services vétérinaires avaient tendance à exagérer leurs problèmesdans l’espoir que ces services leur seraient fournis plus rapidement(Schreuder et al., 1996).

Les décideurs, que ce soit au sein des gouvernements nationauxou des organismes de donateurs, exercent une influence considérablesur la détermination et l’interprétation des besoins des pauvres, carc’est leur interprétation qui dictera les politiques qui, en définitive,orienteront le développement des services zootechniques.L’interprétation des décideurs dépend de la façon dont ils envisagentla pauvreté, du système à l’intérieur duquel ils opèrent et, endéfinitive, du mandat qui leur a été confié par les institutions

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

32

Ce sont les pauvres qui devraient définirleurs propres besoins

Les personnes del’extérieur et les pauvres

envisagent les problèmesde ces derniers de façons

différentes

Toutes les méthodesintroduisent un

biais extérieur

Page 54: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

démocratiques. La plupart d’entre eux appartiennent aux éliteslocales ou mondiales, ce qui influe leur conception de la pauvreté etdes besoins des pauvres. Pour réagir comme il convient aux besoinsréels des pauvres, il est indispensable que ces derniers définissenteux-mêmes leurs priorités, leurs besoins et leurs exigences. Par voiede conséquence:

Les projets et les services doivent reposer sur des mécanismes deprestation de nature à promouvoir la satisfaction des besoins et la réalisation des priorités identifiées par les éleveurs pauvres eux-mêmes.

Nécessité de services zootechniques axés sur la pauvretéLes contraintes de caractère général qui caractérisent la pauvretéont des conséquences spécifiques du point de vue de la capacité deséleveurs pauvres de bénéficier du développement de l’élevage et des services zootechniques, lesquels sont habituellement considérés

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

33

Encadré 1.5: Vues des agriculteurs concernant les systèmes de culture en Bolivie

Il a été réalisé en Bolivie une étude de la productivité agricole pour identifier les

vues des agriculteurs concernant l’évolution de leurs systèmes de culture au

cours des dix années précédentes. Les constatations tirées ont été les suivantes:

■ 82% des agriculteurs croient que les rendements de leurs récoltes sont

en baisse;

■ 79% des agriculteurs croient que la productivité de l’élevage diminue; et

■ 84% des agriculteurs disent avoir réduit le nombre des animaux qu’ils

élèvent.

La cause, selon les agriculteurs, est: “La terre est fatiguée!”

Des 265 ONG qui collaborent à des projets agricoles dans la zone couverte

par l’étude:

■ aucune ne s’occupe de la fertilité des sols; et

■ quelques-unes seulement s’occupent de l’accroissement

de la production de fourrage.

Pourquoi ces ONG ne tiennent-elles pas compte des besoins réels des

agriculteurs? Les agriculteurs locaux n’ont été ni associés, ni consultés, lors de

la planification et de la conception des programmes.

Morales (1999).

Page 55: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

34

Méthodes

Évaluation de laproductivité de l’élevageet des contraintes quientravent objectivementune plus grandeproductivité

Analyses fondées sur les statistiques et lesconnaissances desexploitants, les systèmesde production et lesconditions locales

Méthodes participatives:différentes méthodesutilisées pour lesévaluations des besoins,l’objectif étant cependantde permettre auxagriculteurs de définireux-mêmes leursproblèmes et leursbesoins

Biais implicite

Point de vue de l’extérieur.

Souvent l’évaluation est très spécialisée,ne s’intègre pas à une perspective pluslarge des contraintes qui limitent laproductivité et est axée sur lesrendements plutôt que sur uneproduction durable.

Ces analyses reflètent les vues desagriculteurs et la réalité concrète.

Les services de vulgarisation sont plusgénéralement en contact avec lesagriculteurs plus aisés et plusdynamiques et n’évaluent pas la situationdes pauvres.

En outre, l’évaluation peut être fausséepar les aspirations des techniciens etrefléter leur relation avec leurs idéestechniques et les pratiques en vigueur.

L’évaluation peut être biaisée selon lescritères de sélection des participants(aisés, pauvres, hommes, femmes, etc.).

Si la participation des membres les pluspauvres des communautés n’est pasconsidérablement accrue, les intéressésne sont pas pris en compte, et tel estparticulièrement le cas des pasteurs dufait qu’ils se déplacent constamment.

Il est souvent extrêmement difficiled’évaluer le biais que les facilitateursimposent aux résultats du processus. Ilexiste des exemples qui montrent que lesrésultats peuvent être considérablementfaussés selon l’approche du facilitateur(Chambers, 1997).

Besoins définis par

Scientifiques

Services devulgarisation,organismes dedéveloppement

Scientifiques,services devulgarisation,organismes dedéveloppement

Tableau 1.5: Méthodes utilisées pour définir les besoins et biais correspondants

Heffernan et al. (2002).

Page 56: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les serviceszootechniques dont les pauvres ont besoinsont ceux qui tendent à surmonter lescaractéristiques de la pauvreté

L’implication des femmesse traduit par un impactpositif significatif sur lesmoyens de subsistancedes ménages

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

35

comme des services purement techniques. Toutefois, l’analyse quiprécède de la corrélation entre les caractéristiques de la pauvreté etl’accès aux services montre que les services zootechniques dont lespauvres ont particulièrement besoin sont ceux qui tendent àéliminer aussi bien les contraintes liées à la pauvreté que lesproblèmes propres à l’élevage. Le tableau 1.6 présente uneillustration succincte de l’impact des caractéristiques générales de lapauvreté sur le développement de l’élevage et des serviceszootechniques, particulièrement du point de vue des femmes.

Les pauvres risquent facilement d’être invisibles pour lesprestataires de services car ces derniers n’écoutent pas leursdemandes. Il importe d’adopter une approche plus ciblée demanière à rehausser la visibilité des éleveurs pauvres pour lesprestataires de services et à faire en sorte que les éleveurs puissentactivement identifier et exiger les services dont ils ont besoin.Les approches axées sur la pauvreté sont par conséquent:

■ fondées sur l’initiative communautaire;■ holistiques; et■ sexospécifiques.

Une approche axée sur la pauvreté doit également être sexospécifiqueIl faut accorder beaucoup plus d’attention aux aspectssexospécifiques du développement de l’élevage. Comme lesfemmes jouent souvent un rôle crucial dans ce domaine, il fautmettre davantage l’accent sur leurs besoins spécifiques, en faisantde leur satisfaction une priorité à la fois immédiate et stratégiquedans la conception et la prestation des services zootechniques.

Les femmes sont souvent considérées comme un puissantmoteur de développement. Quelques auteurs font valoir que lesfemmes adoptent souvent plus rapidement les nouvellestechnologies que les hommes et sont par conséquent de meilleurscatalyseurs du progrès technologique. La productivité del’agriculture augmenterait peut-être plus rapidement si desressources accrues étaient mises à la disposition des femmes(Mullins et al., 1996). Plusieurs études réalisées en Afrique et enAsie (Dolberg, 2001; Mullins et al., 1996) confirment que lesfemmes consacrent généralement une proportion plus importantedu revenu familial à l’alimentation du ménage et à l’éducation desenfants. Si les femmes y participent, les activités commerciales

Page 57: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

36

Contrainte de caractèregénéral

Pas de voix au chapitre dans laformulation des politiques oul’organisation des services

Accès limité à l’éducationForte incidence del’analphabétisme

Le manque d’hygiène et un accès limité aux services de santé réduisent la productivité des activités

Accès limité à la terre et à l’eauet insécurité des droits d’accèset de propriété

Accès limité aux avoirs (parexemple, aux animaux)

Faiblesse des revenus du ménage

Accès limité au crédit

Accès limité aux services devulgarisation et autres servicesagricoles et zootechniques

Accès limité aux marchés

Contraintes propres aux femmes

Cette contrainte est particulièrement communeparmi les femmes du monde entier.

Il est clairement établi que la situationdésavantagée dans laquelle se trouvent lesfemmes en matière d’enseignement limite leurproductivité.

Contraintes liées à l’état de santé des femmes:Des maladies intestinales, une mauvaisenutrition, des grossesses trop rapprochées et la mutilation génitale des femmes peuventréduire leur capacité productive.Souvent, c’est sur les femmes que reposent lesresponsabilités et le travail que représentes’occuper des malades de la famille.

Les facteurs qui limitent le droit des femmes deposséder, de contrôler et d’hériter de la terresont généralisés.

Les facteurs qui limitent le droit des femmesd’hériter des avoirs sont généralisés.

Souvent, ce sont les femmes qui ont le moinsaccès aux possibilités de gains.Même lorsqu’elles ont un revenu, il se peutqu’elles n’aient pas le droit de le contrôler.

Souvent, les femmes n’ont pas accès au crédit, et cela est particulièrement vrai des ménagesdirigés par des femmes.

La plupart des services ne sont axés que sur leshommes.

Souvent, il est plus difficile aux femmes d’avoiraccès aux marchés du fait de leurs responsabilitésfamiliales ou d’obstacles culturels.

Tableau 1.6: Services zootechniques et contraintes liées à la pauvreté

Page 58: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

37

Conséquences sur la possibilité pour les services zootechniques d’atteindre les pauvres.

Les services peuvent ne pas être adaptés aux besoins des agriculteurs.Les agriculteurs ne sont pas impliqués dans la prestation des services.La plupart des services négligent les femmes.

Des technologies plus perfectionnées exigeant un degré élevé de compétences enmatière de gestion peuvent ne pas être fiables.La formation aux nouvelles technologies doit être simple et concrète.Il est indispensable de superviser l’appui fourni.

Beaucoup de familles sont pauvres en travail, de sorte que des technologies à forteintensité de main-d’œuvre ou des services pour lesquels les agriculteurs doivent sedéplacer ne sont pas viables.Ce problème est particulièrement marqué parmi les ménages dirigés par des femmes.Les technologies qui imposent un travail supplémentaire aux femmes échouentsouvent, aspect qui est fréquemment négligé dans les programmes de productionde fourrage.

L’accès au fourrage et aux ressources en eau est rare ou peu sûr, ce qui limite la production de l’élevage.Cela peut décourager les femmes d’investir dans l’amélioration de la terre, le matériel agricole et l’achat d’animaux.

Proportionnellement, les exploitants pauvres possèdent moins d’animaux, et les petits animaux sont plus importants.Il est difficile d’investir dans l’achat d’animaux et dans de nouvelles technologies.En période de crise, la famille peut être obligée de vendre ses animaux si cesderniers constituent leur seul avoir.

La famille est trop vulnérable pour risquer d’adopter des technologies nouvelles.Une technologie exigeant des intrants onéreux peut ne pas être viable.Des services zootechniques doivent être bon marché.

Il est difficile d’investir dans l’achat d’animaux et de nouvelles technologies.En période de crise, la famille peut être obligée de vendre ses animaux si elle n’a pas accès au crédit.

Les agriculteurs et surtout les agricultrices pauvres ne peuvent pas tirer parti desnouvelles technologies ou des nouveaux débouchés.Les ménages dirigés par des femmes sont particulièrement désavantagés.

Il se peut que les éleveurs n’accroissent pas leur production au-delà du niveau de subsistance, n’ayant pas de débouchés pour vendre l’excédent.

Heffernan et al. (2002).

Page 59: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

d’élevage à petite échelle peuvent par conséquent avoir un impactsignificatif sur la situation nutritionnelle et les moyens desubsistance des ménages. Ces activités auraient un impactparticulièrement marqué sur les ménages dirigés par des femmes.Beaucoup d’études font apparaître que le fait de donner auxagents de vulgarisation de sexe féminin une formation spécialepour qu’elles puissent collaborer avec les éleveurs de sexe féminina un impact direct et positif sur la productivité de l’élevage(Dolberg, 2001; Rahman et al., 1997; Curry, 1996; Panin etBrümmer, 2000; Farooq et al., 2000; Gueye, 2000; Rangnekar,1998; Matthewman et Morton, 1997).

Beaucoup de programmes ne tiennent pas compte du rôle quepeuvent jouer les femmes dans la réalisation de leurs propres droitsau développement. Les études de cas réalisées dans l’État de

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

38

Encadré 1.6: Les femmes en tant que liens avec la communauté dans le programme de développement intégré de l’élevage à Koraput, dans l’Orissa

L’approche de prestation de services zootechniques bon marché à la base du

programme de développement intégré de l’élevage a été le recours à des

agents chargés d’assurer la liaison avec la communauté. Dans chaque village,

la communauté a choisi une femme et un homme, et une femme du village a

été formée pour qu’elle puisse jouer le rôle de lien avec la communauté, de

sorte que les villageoises puissent participer au programme. La formation a

porté sur les premiers secours, la vaccination des oiseaux de basse-cour, le

déparasitage des moutons et des chèvres et la castration des boucs. Il a été

distribué à ces agents du matériel essentiel tel que bouteilles thermos, vaccins

et trousses de médicaments. Certaines des femmes formées ont été équipées

de bicyclettes.

En l’occurrence, toutefois, utiliser des femmes comme liens avec la

communauté n’a pas ajouté grand-chose au système de prestation de services.

La plupart des femmes choisies n’avaient guère d’instruction, et le rôle d’agent

communautaire était relativement nouveau pour les femmes et par

conséquent difficile à remplir. Pour qu’elles aient pu fonctionner efficacement,

elles auraient dû recevoir une formation supplémentaire et il aurait fallu

renforcer leur assurance pour les préparer à assumer des rôles nouveaux qui

vont à l’encontre des traditions.

Étude de cas de l’Orissa.

Page 60: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

l’Orissa et au Bangladesh donnent des exemples de pratiques axéessur le rôle des femmes dans le développement de l’élevage. Cesétudes montrent que, lorsque les approches suivies tendent àaccroître la participation des femmes pauvres, beaucoup d’entreelles ont pu améliorer les conditions de vie de leur ménage.Cependant, lorsque leur participation ne contribue pas à satisfaireleur besoin fondamental d’influence et d’autonomisation sur leplan social, l’impact produit sera toujours limité par les faiblescapacités qui sont habituellement le fait des femmes pauvres.

C’est ce qu’a confirmé Seeberg (2002) dans le contexte du projet de développement participatif de l’élevage entrepris auBangladesh. Ce projet, qui était axé sur la création d’activitésgénératrices de revenus pour les femmes pauvres, aurait puautonomiser les femmes sur le plan économique, mais n’a pas remisen question les structures du pouvoir ou les relations entre les sexesétablies. Le projet n’a donc eu qu’un impact limité, en fait, surl’autonomisation économique des femmes. Par exemple, les femmesn’avaient pas accès aux marchés et devaient avoir recours à desproches de sexe masculin pour vendre leur production.

L’impact du développement de l’élevage sur les pauvres

À quelques exceptions près, les programmes de promotion del’élevage n’ont guère eu d’impact sur les pauvres, comme lemontrent les analyses d’ensemble qu’a faites le Département dudéveloppement international du Royaume-Uni au sujet de 800projets et programmes de ce type (LID, 1999). Les auteurs ontconstaté que la majorité des projets et programmes de promotionde l’élevage n’ont pas eu d’impact significatif sur les pauvres pourles raisons suivantes:

■ des technologies ont été mises au point, mais n’ont pas ététransférées aux pauvres;

■ les technologies qui ont effectivement été transférées nerépondaient pas aux besoins et aux capacités des pauvres; et

■ dans les cas où les technologies appropriées ont ététransférées avec succès, leurs avantages ont généralement étécapturés par les agriculteurs ou les éleveurs plus aisés.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

39

Il faut satisfaire le besoin fondamentaldes femmes d’influenceet d’autonomisationsociale

Par le passé, lesprogrammes dedéveloppement del’élevage n’ont guère eud’impact sur les pauvres

Page 61: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La promotion de l’élevage, lorsqu’elle

est inappropriée, peutavoir un impact négatif

Le même rapport contient la conclusion suivante:“L’examen auquel nous avons procédé de la documentationrelative aux projets techniques et aux projets de prestation deservices n’a pas fait apparaître d’impact généralisé et durable surles moyens de subsistance des pauvres. Bien qu’il n’y ait eu quequelques îlots de réussite, les études, les appréciations desdonateurs et les rapports d’évaluation que nous avons analysésportent à conclure que les projets techniques et les projets deprestation de services n’ont pas réussi à produire un impactbénéfique durable sur les pauvres.”

L’exemple donné dans l’encadré 1.7 montre que, dans certainscas, lorsque les ménages sont à tel point marginalisés et ont accès àsi peu de ressources, la promotion de l’élevage, si elle n’est pasappropriée, peut avoir un impact négatif et accroître la vulnérabilitédes pauvres, spécialement si les interventions ne sont pas appuyéespar des programmes de formation et des services consultatifsadéquats. La viabilité économique de tels projets doit êtremûrement réfléchie étant donné qu’ils représentent un risquesérieux pour les éleveurs pauvres.

Ce scénario a été corroboré par une analyse des projets de la Banque mondiale (de Haan et al., 2001).“L’analyse du portefeuille de projets de développement de l’élevagemontre que nos opérations actuelles, à la Banque mondiale, sont

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

40

Encadré 1.7: Animaux laitiers et réduction de la pauvreté parmi les femmes dans le district de Ganjam, dans l’Orissa

Le système de crédit aux exploitations laitières dirigées par des femmes

analysé dans l’étude de cas de l’Orissa tendait à aider les femmes sans terre à

élever des bufflesses laitières. Pour beaucoup des ménages sans terre en

question, le pacage et l’alimentation des animaux représentaient un réel

problème. Parfois, les enfants ont abandonné l’école pour garder les troupeaux

et les aliments préparés coûtaient trop cher pour que la production de lait soit

rentable. De plus, les services consultatifs fournis concernant l’alimentation et

la gestion des troupeaux ont été déficients. Ainsi, 90% des veaux sont morts

du fait de l’insuffisance des services vétérinaires et du manque de nutrition

appropriée. Ce système a laissé un certain nombre de ménages participants

endettés.

Étude de cas de l’Orissa.

Page 62: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

encore caractérisées par un manque d’orientations spécifiques versl’atténuation de la pauvreté et l’environnement, comme entémoigne la faiblesse des investissements dans les régions les pluspauvres du monde (Asie centrale, Asie du Sud et Afriquesubsaharienne), dans le développement des activités pastorales etl’élevage des petits animaux et, dans une certaine mesure, dans lesprogrammes d’amélioration de la santé et de la nutrition animales,qui sont au nombre des principales contraintes auxquelles lespauvres sont confrontés.”

De Haan et al. (2001) relèvent en outre que, depuis les années70, la Banque mondiale n’a pas apporté le même appui aux projetsde promotion de l’élevage. Ainsi, six des projets agricoles en coursconcernent exclusivement l’élevage, et une cinquantaine de projets– sur un portefeuille total de 270 projets agricoles – ont descomposantes concernant l’élevage. La réduction des prêts estimputable en partie à la médiocrité des résultats donnés par lesprojets pendant les années 70 et 80. Apparemment, les donateursconsidèrent que les projets et programmes concernant l’élevagen’ont pas eu l’impact escompté.

Cette absence d’orientation vers la pauvreté s’explique parplusieurs raisons. Premièrement, en Afrique surtout, les servicesont à juste titre été axés sur les besoins les plus prioritaires dumoment, comme la maîtrise de maladies contagieuses, telles que la peste porcine. Deuxièmement, les projets lancés pendant cette période ont été conçus essentiellement pour accroître laproduction vivrière plutôt que pour s’attaquer directement auxproblèmes d’inégalité. Ces projets étaient fondés sur la théorie du “ruissellement” selon laquelle, à un moment ou à un autre,l’expansion économique finit par toucher les pauvres.Troisièmement, les projets avaient habituellement été conçus etexécutés par le biais de services zootechniques du secteur public.Les prestataires de services avaient tendance à faire preuve du biaisclassique en faveur des agriculteurs plus aisés, et tel était le cas aussides spécialistes de l’élevage des principaux donateurs et institutionsfinancières. Enfin, certaines des technologies spécifiques quiauraient pu être utiles pour les pauvres, comme des vaccinsrésistants à la chaleur, des espèces de fourrage résistant à lasécheresse et des espèces locales améliorées des plus résistantes,n’étaient pas encore disponibles et commencent seulementaujourd’hui à être appliquées.

CHAPITRE 1: LES ÉLEVEURS PAUVRES

41

Page 63: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les serviceszootechniques plus

nouveaux, davantageaxés sur la réduction de

la pauvreté, ont unimpact considérable sur

les éleveurs pauvres

Programmes récents comportant une orientation vers la pauvretéRécemment, toutefois, il est apparu un certain nombre deprogrammes de développement de l’élevage qui sont nettementaxés sur la lutte contre la pauvreté. Les études de cas réalisées dansl’Orissa, au Bangladesh et en Bolivie contiennent des détails sur lesrésultats donnés par des services zootechniques orientés vers lespauvres, dont certains ont réussi à réduire considérablement lapauvreté parmi les groupes d’éleveurs vivant dans une pauvretéextrême. Par exemple, le programme combiné de microcrédit et dedéveloppement de l’élevage de volaille au Bangladesh a atteint au moins 8 millions de ménages pauvres sans terre, et son impactsur l’élévation des revenus et l’amélioration de la situationnutritionnelle est tout à fait impressionnant. Le programme dedéveloppement coopératif des laiteries en Inde, dont bénéficientactuellement quelque 9 millions de ménages pauvres, en est unautre exemple. Les chapitres 2 et 3 décrivent plus en détail certainsdes points forts et des points faibles de ces interventions.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

42

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Page 65: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

45

La question clé est de savoir qui entraîne le système de prestationde services

Les prestataires deservices sont-ilsresponsables devant les usagers?

Prestataires de services

L’élément le plus déterminant de l’orientation en faveur despauvres d’un service quelconque est probablement la nature etl’identité du prestataire de services. La façon dont le service estfourni et qui le fournit déterminent si les pauvres deviennent desbénéficiaires passifs ou sont au contraire autonomisés et habilités àagir. Comme c’est cela que l’on vise, la principale question est desavoir qui entraîne le système: l’éleveur ou le prestataire de services?Deux questions connexes sont les suivantes:

Devant qui les prestataires de services sont-ils responsables?Qui paie le prestataire de services?

Les systèmes dans lesquels les prestataires de services sontresponsables devant les usagers et qui laissent à ces derniers laliberté de choisir parmi plusieurs prestataires mettent les usagersmieux à même de négocier et d’exiger des services appropriés dequalité. Cela vaut également pour les éleveurs pauvres.

Le rôle des secteurs public et privé dans la prestation des servicesLa responsabilité d’une certaine tâche dépend de la nature de celle-ci. Umali et al. (1994) propose un modèle de répartition des rôlesentre les secteurs public et privé en matière de prestation de services

CHAPITRE 2

PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

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LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

46

La réduction de lapauvreté est dans

l’intérêt général

vétérinaires. En principe, ces services, qui sont essentiellement desbiens privés car ce sont les usagers individuels qui en profitentintégralement, devraient être fournis par le secteur privé. Lesprincipaux biens privés qu’englobe la prestation de serviceszootechniques sont notamment les services vétérinaires cliniques, laplupart des vaccinations, la vente de services pharmaceutiques,l’insémination artificielle et autres services de croisement, desaliments pour le bétail et la plupart des services financiers. Dans lecas des services qui profitent à la communauté tout entière, commeles vaccinations contre les maladies les plus contagieuses, les servicesd’assainissement et le contrôle de la qualité, le secteur public devraitintervenir. Les services consultatifs et de formation sont en principedes biens privés mais ont des avantages moins immédiats pour lesusagers, de sorte que le secteur public doit intervenir pour faciliterleur développement.

L’argument défendu ici est que la réduction de la pauvreté est unbien public et que le secteur public doit intervenir, spécialementpour créer un environnement propice, promouvoir une réglementa-tion et mettre en place un mécanisme de contrôle approprié desorte que les services fournis parviennent aux pauvres.

La qualité des services dépend dans une large mesure de lapersonne ou de l’entité devant laquelle le prestataire de services est responsable et de la corrélation qui existe entre le revenu du prestataire de services et les résultats que doivent obtenir les usagers.

Le tableau 2.1 donne un aperçu des principaux prestataires deservices, de leur autorité de tutelle et de leurs sources de revenus.Parfois, les responsabilités sont mal définies et les usagers setrouvent liés par d’autres types de rapports de dépendance, commedans le cas de l’élevage de volaille au Bangladesh, où le microcréditet les services techniques sont fournis sous forme d’enveloppes parla même ONG.

Un environnement changeantDans la plupart des pays en développement, c’est traditionnelle-ment les institutions gouvernementales qui administrent les serviceszootechniques, mais la situation évolue rapidement. Beaucoup depays ont entrepris des ajustements économiques majeurs, et

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CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

47

notamment une réforme des services publics, ce qui ne manque pasd’avoir une influence marquée sur la prestation des serviceszootechniques. Dans une enquête sur les effets de l’ajustementstructurel sur la prestation des services vétérinaires dans 13 paysd’Afrique, Gauthier et al. (1999) ont montré que les effectifs dupersonnel du secteur public ont stagné à la suite des ajustements etque le nombre de vétérinaires et d’assistants vétérinaires privés aaugmenté. Les services publics tendaient à être concentrés sur les

Système de prestation

Services publicscentralisés

Services publicsdécentralisés

ONG nationale

ONG locale

Services privés

Organisationsde producteurs

Systèmesinformels

Prestataire de services

Personnel techniquedu ministère

Personnel techniquedes services locaux duministère

Personnel techniquede l’ONG

Personnel de l’ONG

Particuliers, personnelou propriétairesd’entreprises privées

Personnel desorganisations deproducteursEntreprises privées

InstitutionstraditionnellesGroupes nonstructurés d’usagers

Revenus conditionnés par

Principalement,budget national

Budget national,mais prioritéslocales

Politique etfinancement desdonateurs

Politique etfinancement desdonateurs

Capacitéséconomiques etpriorités des usagers

Capacitéséconomiques etpriorités des usagers

Capacitéséconomiques etpriorités des usagers

Responsable devant

Ministère

Administrationlocale

Siège central del’ONGDonateur(Usagers?)

Donateur(Usagers?)

Propriétaire del’entreprise etusagers

Conseil dedirection del’organisation deproducteursUsagers

Usagers

Tableau 2.1: Caractéristiques des prestataires de services

Page 68: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

48

Le secteur public doit créer

un environnementpropice

domaines faisant intervenir des biens publics, encore quepartiellement seulement du fait de chevauchement de fonctions. Àla suite des ajustements, les services zootechniques avaient souventété intégrés aux services consultatifs de caractère général. Certainsservices, comme ceux d’insémination artificielle, avaient été réduitsen l’absence d’un secteur privé viable.

Responsabilité du secteur public, mais exécution par le secteur privéLa responsabilité du secteur public ne signifie pas nécessairement,toutefois, que les services doivent être fournis par le secteur public.Ce dernier peut assumer la responsabilité d’appuyer le développe-ment de systèmes privés de prestation de services dans les domainesoù ces services risquent de ne pas être rentables dans l’immédiat,par exemple en matière de développement des marchés. Le secteurpublic peut également jouer un rôle dynamique dans les domainesoù des considérations sociales rendent une intervention de l’Étatnécessaire pour garantir un accès équitable aux services.

En ce sens, assumer la responsabilité signifie créer un environnementpropice et parfois fournir un financement par le biais d’organisationsprivées.

Un bon exemple de mesures adoptées par un gouvernementnational pour créer un environnement propice est celui dudéveloppement de l’élevage au Danemark. Bien que leGouvernement danois ne se soit jamais immiscé dans la gestion, nin’ait jamais entrepris de créer des institutions, le développement del’élevage était considéré comme d’intérêt public. Cela a conduit àdonner à l’élevage une nette orientation vers le marché, et l’élevageest ainsi devenu la base de l’expansion économique du pays. Legouvernement a créé un environnement propice et fourni un appuifinancier limité (Encadré 2.1).

Services publics centralisésLe plus souvent, la prestation de services aux éleveurs par lesdépartements techniques de l’État s’est avérée être à la fois peuefficace et onéreuse.

Certains services, comme les vaccinations contre les maladiescontagieuses, les mesures de quarantaine et le contrôle de l’innocuité

Page 69: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

49

Planification et suivi à un niveau quiéchappe à l’influencedes usagers

Les pauvres ne peuventpas commenter laqualité des services

des produits alimentaires, doivent, pour être efficaces, être planifiéset surveillés au niveau central. D’autres, cependant, comme lesservices consultatifs et l’accès aux ressources naturelles, sont pour laplupart planifiés au plan national, à un niveau qui échappe àl’influence des usagers. En pareils cas, il n’est pas possible pour lesgestionnaires locaux de répondre à des besoins locaux spécifiques.De plus, les services parviennent rarement jusqu’aux producteurspauvres car les politiques du gouvernement central sont axées sur la croissance macroéconomique plutôt que sur la réduction de la pauvreté.

Les mécanismes d’information en retour touchant la qualité desservices publics centralisés dépendent de la condition et du pouvoirdes usagers ou groupes d’usagers dont il s’agit. Les riches éleveursayant une influence politique peuvent avoir l’occasion decommenter la qualité du système. Les secteurs les plus pauvres, enrevanche, n’auront pas l’assurance nécessaire et, même s’ils l’ont,

Encadré 2.1: Le cas du Danemark: amélioration de la productivité de l’élevage au moyen de services consultatifs

“Au Danemark, l’amélioration de la productivité a été due dans une largemesure à la diffusion des connaissances, qui a été assurée surtout par desconseillers agricoles. C’est dès 1871 qu’une association locale d’exploitants aemployé le premier conseiller agricole. D’autres ont ensuite suivi cet exemple,mais les associations locales n’en avaient pas toutes les moyens. Une révisionde la loi sur l’élevage, en 1887, a accéléré ce mouvement. Aux termes de lanouvelle loi, l’État prendrait à sa charge la moitié de la rémunération duconseiller. De ce fait, avant la Première Guerre mondiale, le nombre deconseillers a décuplé et a atteint 137.

D’une manière générale, il n’y avait au XIXe siècle que peu de contactsentre les métiers et l’État, mais la loi sur l’élevage peut être considérée commel’une des lois professionnelles les plus importantes. Elle a encouragé uneamélioration de la qualité des croisements en instituant un système de prix lorsdes foires au bétail. Elle a également encouragé la création d’associationsd’exploitants et le soin d’organiser les foires a été confié aux associationslocales. En outre, un exploitant non membre d’une association ne pouvaitrecevoir que la moitié du prix.

Il y a lieu de souligner que les conseillers étaient employés non pas par l’Étatmais par les associations locales d’éleveurs ou de petits exploitants.”

Étude de cas au Danemark.

Page 70: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

50

La décentralisationrapproche la prise dedécisions des usagers

La déconcentration, à elle seule, ne change

pas les attitudes

l’influence politique requise pour se faire entendre. De ce fait, lesprestataires de services ne chercheront aucunement à répondre auxbesoins des éleveurs pauvres. Il n’est donc pas surprenant que, lorsdes enquêtes sur le terrain, les éleveurs pauvres se plaignentsouvent du manque de considération et d’intérêt du personnel deterrain des services publics (Heffernan et Misturelli, 2000).

D’une manière générale, les questions liées à l’élevage sontabsentes des documents de stratégie pour la réduction de lapauvreté. De telles stratégies et les plans d’investissementcorrespondants ont été préparés par plusieurs gouvernements,spécialement en Afrique subsaharienne et dans quelques paysd’Asie, en étroite consultation avec la société civile, le secteur privéet les autres parties prenantes. Le fait que ces documents soientmuets sur les questions touchant l’élevage indique par conséquentque les éleveurs, et les éleveurs pauvres en particulier, manquentd’influence politique.

Services publics décentralisésLa décentralisation peut être un moyen d’améliorer l’efficience desservices publics car elle rapproche la prise de décisions des usagers.Beaucoup de pays en développement font aujourd’hui l’expériencede la démocratisation et des efforts considérables ont été investisdans la décentralisation du pouvoir de décisions, de l’administrationet de la fourniture de services techniques au profit des autoritéslocales. La décentralisation des services techniques est généralementinspirée de deux modèles:

■ décentralisation de l’administration des services à l’intérieurdes départements fonctionnels, certains pouvoirs desurveillance étant déconcentrés au profit des conseilscommunautaires locaux; et

■ délégation complète de la responsabilité de la prestation deservices au profit des autorités locales.

La déconcentration, à elle seule, ne change pas les attitudes desprestataires de services. Il se peut qu’elle améliore l’efficacité des services, mais elle laisse de côté le problème majeur quicaractérise les services publics centralisés. Elle n’entraîne qu’untransfert partiel des responsabilités, lesquelles continuent dedépendre, par le biais des structures déconcentrées, desdépartements fonctionnels.

Page 71: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

51

Les pauvres sont souvent privés de toute influence

Des services publics décentralisés peuvent donc être plus efficacesque des services centralisés que si les responsabilités sontdécentralisées elles aussi au profit des autorités locales, lesquellessont à leur tour responsables devant les parties prenantes locales.

L’inconvénient est, toutefois, que les services peuvent facilementse politiser et être influencés par les structures locales du pouvoir,qui ne font aucune place aux pauvres, comme l’a constaté Berdegué(1997) dans son étude des services consultatifs agricoles de l’unitémunicipale d’assistance technique en Colombie. Les secteurs les pluspauvres des communautés n’ont souvent aucune influence. C’est ceque l’on constate également dans le contexte de la mise en œuvre dela loi sur la participation populaire en Bolivie (Encadré 2.2).

Le problème consiste par conséquent à accroître la participation età renforcer l’organisation des secteurs pauvres des communautés.

Organisations non gouvernementalesLes ONG nationales et internationales peuvent être d’efficacesprestataires de services si:

■ les éleveurs pauvres participent à l’identification des besoinset à la conception des activités;

■ il est suivi une méthodologie qui garantit la pleineparticipation du groupe cible à l’ensemble du processus;

■ le succès de l’ONG est évalué à la lumière de son impact réelsur les usagers et leur autonomisation; et

■ l’ONG emploie un personnel formé comme il convient.

Encadré 2.2: La loi sur la participation populaire en Bolivie

Un exemple de décentralisation comportant un solide élément de

démocratisation est la loi sur la participation populaire à la planification locale

en Bolivie. Cette loi a pour but d’accroître la participation de toutes les parties

prenantes locales à la planification et à la prestation des services au plan local.

Plusieurs enquêtes ont, néanmoins, montré que les éleveurs pauvres ne sont

toujours pas satisfaits du rôle qui leur a été réservé dans le processus de prise

de décisions. Les secteurs les plus pauvres des communautés ne sont pas

représentés dans le processus car les pauvres sont rarement organisés.

Anderson (1999); Bojanic (2001).

Page 72: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

52

Les ONG peuvent être d’efficacesprestataires de services si elles

y associent le groupe cible

Les intérêts des ONG ne sont pas

identiques à ceux du groupe cible

Un grand nombre d’ONG s’occupent de fournir des serviceszootechniques aux éleveurs pauvres. Beaucoup d’organismesdonateurs considèrent les ONG comme des prestataires de services plus efficaces aux populations pauvres que les institutions gouvernementales. Plusieurs ONG internationales (parexemple, Vétérinaires sans frontières, Intermediate TechnologyDevelopment Group, Heifer International Foundation et FARM-Africa) ont réussi à lancer des services consultatifs zoosanitaires etzootechniques au profit de certains des éleveurs les plus pauvres etles plus marginalisés d’Afrique de l’Est et d’Afrique de l’Ouest.L’étude de cas au Bangladesh décrit les activités des ONG nationalesqui assurent la liaison, avec d’assez bons résultats, entre legouvernement et les éleveurs pauvres, encore que l’on puisses’interroger sur la qualité des services techniques et l’efficacité duciblage sur la pauvreté.

Les ONG reçoivent leurs ressources, pour l’essentiel, des grandsdonateurs et sont donc essentiellement responsables devant cesderniers. Certaines d’entre elles opèrent selon des politiques trèsidéalistes et sont vouées au travail avec les pauvres. Beaucoupd’ONG, qui travaillent avec les pauvres, cherchent surtout à créerun espace de travail pour les organisations et leur personnel. Lesmembres, les organes directeurs et le personnel des ONGappartiennent notamment aux élites locales et ont rarement desintérêts qui coïncident avec ceux des groupes cibles. En outre,beaucoup d’ONG ne peuvent pas satisfaire les besoins des pauvrescar elles n’utilisent pas de méthodes participatives appropriées etn’associent pas les groupes cibles à la conception et à l’exécution des

Encadré 2.3: Vues sur la participation

Un groupe de dirigeants de 12 ONG associées à la mise en œuvre du

programme participatif de développement de l’élevage au Bangladesh a été

incapable de donner une réponse satisfaisante à la question: comment le

programme est-il participatif? Ils ne connaissaient pas la signification réelle de

la participation, et le programme avait été conçu et exécuté comme un tout

sans aucune association des bénéficiaires au processus de prise de décisions.

Après que l’on eut beaucoup insisté pour savoir quelle approche avait été

suivie, la réponse finale a été: “Nous les participons”.

Observations des auteurs au Bangladesh.

Page 73: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

53

Responsabilité directedevant les usagers

activités, ce qui limite leur efficacité. L’encadré 1.5 (Morales, 1999)décrit un exemple, et l’encadré 2.3 expose une anecdote à ce sujet.

Services privésLes prestataires privés de services zootechniques ont un atoutpotentiel en ce sens qu’ils sont directement responsables devant lesusagers. Les entreprises privées peuvent avoir une bonne raisond’améliorer le rendement financier de l’élevage pour les usagers carcela déterminera la viabilité économique de leurs entreprises. Onest donc porté à penser que la privatisation des services relevant dela catégorie des “biens privés” les orientera davantage vers lesbesoins et la demande et améliorera par conséquent leur viabilité.Les services privés paraissent être efficaces dans les régions où lesagriculteurs sont plus aisés et plus instruits et ont la capacitéd’exiger des services de qualité.

Un élément critique du succès est le degré de concurrence qui estinstauré. Les coûts de transaction sont trop élevés pour que desservices privés puissent être fournis efficacement dans les régionsreculées et peu peuplées où vivent la plupart des éleveurs pauvres(Encadré 2.4).

Encadré 2.4: Coûts de transaction de la prestation de services aux pauvres

La prestation de services aux pauvres coûte cher, en termes de personnel et dedépenses d’exploitation, parce que:

■ le personnel ne peut pas avoir accès à des informations écrites sur lesmédicaments de remplacement disponibles et sur l’endroit où ilspeuvent être obtenus;

■ accéder aux pauvres en milieu rural coûte plus cher, du fait desdéplacements et du temps nécessaire, qu’en milieu urbain où la densitédes points de services et des points de vente des intrants estgénéralement plus forte;

■ dans un environnement multiethnique dans lequel les pauvresappartiennent souvent à des minorités, du personnel plus qualifié estindispensable; et

■ les agriculteurs qui appartiennent à des organisations ou à un groupeethnique prédominant ont plus de chances d’avoir des contacts efficacesavec d’autres exploitants et ont par conséquent accès à plusd’informations que les exploitants marginalisés.

Ndungu (2000).

Page 74: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les modèles classiques ne sont

pas viables

Des modèles différents reliant

les partenaires locauxaux professionnels

du secteur privé

Les ONG mobilisent les groupes

communautaires etdéveloppent les petites

entreprises privées

Le système a été efficace en matière

de microcrédit, mais pasde services techniques

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

54

Si un modèle classique composé de vétérinaires et d’agents devulgarisation professionnels et de banques agricoles à caractèrecommercial est considéré comme souhaitable en pareil contexte, ilest impossible d’instaurer une concurrence parfaite caractériséepar un nombre suffisant d’acheteurs et de vendeurs, l’absence debarrières à l’implantation sur le marché, la diffusion d’informationsexactes auprès de tous et des produits et des services homogènes.Selon ce modèle, les éleveurs n’ont pas de liberté de choix, ni unpouvoir suffisant de négocier les prix et la qualité des services carles marges bénéficiaires n’autorisent qu’un nombre limité deprestataires de services hautement qualifiés.

Toutefois, de plus en plus d’indications portent à conclure que des modèles différents d’interventions du secteur privé ou de partenariats des secteurs public et privé peuvent donner de bons résultats pour les éleveurs pauvres. D’autres modèles dedéveloppement des systèmes privés de prestation de servicesfondés sur des réseaux d’agents locaux à temps partiel sontactuellement à l’essai dans beaucoup de pays d’Afrique et d’Asie. Ilimporte de mettre en place des systèmes fondés sur des agentszoosanitaires communautaires ou reliés aux communautés,combinés aux éléments plus professionnels des secteurs privé et public.

Combinaison des rôles des acteurs dans les systèmescommunautaires de prestation de servicesLe modèle d’élevage de volaille élaboré au Bangladesh (Encadré2.5) est un exemple de l’établissement de services privatisés au seinde communautés très pauvres, ainsi que du lien établi entreinstitutions gouvernementales, ONG et secteur privé afin deréduire la pauvreté grâce au développement de l’élevage.

Plusieurs études et évaluations ont montré la contribution quece modèle peut apporter aux efforts visant à améliorer les moyensde subsistance des pauvres (Nielsen, 1996; Pitt et al., 1999; Lund et al., 2002). L’idée selon laquelle l’État devrait appuyer ledéveloppement du secteur privé par le biais des ONG quimobilisent les groupes communautaires, ainsi que la création depetites entreprises privées pour la fourniture de services au niveaudes communautés paraît intéressante. Ce modèle a montré qu’ilpermet de fournir efficacement des microcrédits aux éleveurspauvres, mais des études récentes ont fait apparaître des

Page 75: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

55

défaillances significatives dans la fourniture des services techniques(Lund et al., 2002). Ces défaillances paraissent tenir à la nature dulien entre les institutions formelles et le système communautaire. Iln’existe actuellement aucune structure établie qui permette auxéleveurs pauvres de réagir aux services fournis.

Encadré 2.5: Modèle d’élevage de volaille au Bangladesh

Ce système fonctionne sur la base d’une chaîne modèle qui garantit lafourniture des services nécessaires à la communauté. Le système reposeessentiellement sur les agriculteurs clés qui élèvent de la volaille, et tous lesmaillons de la chaîne sont de petites entreprises privées.

■ Les agriculteurs clés alimentent le marché en œufs au moyen de cinqpoules pondeuses améliorées, élevées en semi-liberté.

■ Les agents de services vaccinent la volaille et dispensent les traitementssimples.

■ Les obtenteurs modèles élèvent les espèces originelles et fournissent desœufs aux mini-éclosoirs.

■ Les mini-éclosoirs distribuent des poussins d’un jour aux éleveurs depoussins.

■ Les éleveurs de poussins distribuent de jeunes poules aux agriculteursclés.

■ Les fournisseurs d’aliments achètent leurs matières premières sur lemarché et livrent des aliments préparés à tous les éleveurs.

■ Les collecteurs ramassent les œufs et les transportent jusqu’aux marchéspour y être vendus.

Adapté de Fattah (1999).

6Mini-éclosoirs

40Éleveurs de poussins

26Obtenteurs modèles

10Fournisseurs d’aliments

10 Collecteurs d’œufs

100Agents de services

Marché communautaireOeufs

Gouvernement etentreprises privées

Vaccins et médicaments

GouvernementPoussins d’un jour

3 900 Agriculteurs clés

GouvernementEspèces originelles

Page 76: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Système dominé par les services

gouvernementaux et les ONG

Lier les microcrédits et les services

techniques n’a pas pour effet

d’autonomiser les usagers

Les organisations deproducteurs peuvent

autonomiser leursmembres

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

56

Le secteur public finance, coordonne et supervise les ONG quimobilisent les groupes communautaires et qui, de l’extérieur de lacommunauté, fournissent les microcrédits et les services techniquesqui sont nécessaires.

Cependant, cette approche est mise en œuvre et dominée par lesinstitutions gouvernementales et les ONG. Les éleveurs de volaillene participent aucunement à la conception, à la planification ou à laprise de décisions et sont totalement tributaires des ONG qui sontresponsables des crédits et des services techniques. Les ONG, à leurtour, sont responsables devant les services gouvernementaux et lesdonateurs qui financent les programmes.

En outre, lier la fourniture de microcrédits et la prestation deservices techniques au sein d’une seule et même organisation suscitedeux problèmes. Premièrement, lorsque les usagers reçoivent uncrédit d’une ONG et dépendent de celle-ci pour obtenir les servicesnécessaires, ils ne sont pas autonomisés dans leur relation avecl’ONG en sa qualité de prestataire de services. Deuxièmement,l’ONG, logiquement, concentre ses efforts sur les microcrédits carces derniers constituent l’aspect rentable de l’intervention, et elletend à négliger les services techniques.

Il faut, lorsque de tels partenariats sont créés, bien admettre qu’il est peu probable que les ressources fournies par le secteurpublic pour les services zootechniques augmentent dans la plupartdes pays et que de nouvelles priorités devront être assignées ausecteur public.

Organisations de producteursLes organisations de producteurs, si elles sont véritablement uneémanation des producteurs et sont contrôlées par ces derniers,peuvent autonomiser leurs membres et faciliter la prestation deservices répondant aux besoins et aux normes de qualitéappropriées. Il peut s’agir d’organisations structurées commeassociations d’agriculteurs, coopératives de commercialisation ouassociations d’épargne et de crédit, ou bien de groupes moinsstructurés ou d’institutions communautaires comme groupes devillages, groupes d’auto-assistance ou institutions administrées pardes chefs traditionnels.

L’histoire du développement de l’élevage au Danemark montreque les petits producteurs ont tout intérêt à s’organiser et à travaillerensemble pour identifier les besoins et regrouper les demandes.

Page 77: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les plus pauvres ne sontpas membresd’organisations deproducteur

Les organisations deproducteurs peuventfournir des services decommercialisation et desservices techniques

Les organisations deproducteurs peuventégalement avoir desobjectifs politiques

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

57

Les études ont constaté que les éleveurs les plus pauvresn’appartiennent généralement à aucune organisation structurée deproducteurs (Staal et al., 1998; Morton et Miheso, 2000; Staal et al.,2001). Les raisons de cette exclusion presque systématiquedemeurent assez peu claires. Il intervient probablement différentsfacteurs, mais le peu d’instruction, de temps et de ressources qu’ontles plus pauvres y contribue certainement beaucoup.

Si l’on veut que les éleveurs pauvres puissent tirer parti despossibilités qui s’offrent, il faut trouver le moyen de mettre en place des organisations dont ils puissent faire partie.

Sur le plan formel, les organisations de producteursappartiennent au secteur privé, mais se distinguent nettement desautres prestataires de services privés en ce sens qu’elles constituentune émanation des producteurs et sont contrôlées par ces dernierset que leurs objectifs et leurs opérations varient. Indépendammentdes services de commercialisation, ces organisations fournissentsouvent d’autres services. Par exemple, beaucoup de coopérativeslaitières en Inde et au Kenya non seulement ramassent et vendentle lait, mais fournissent des services techniques et distribuent lesintrants.

D’un autre côté, mélanger la commercialisation et la prestationde services risque d’entraîner une confusion des fonctions relevantdes biens publics et des fonctions relevant des biens privés et unsubventionnement croisé et, de ce fait, la persistance de systèmes de prestation de services non viables. C’est ce qu’a montré lemouvement coopératif en Inde qui, au début des années 90, aobtenu une protection spéciale contre la concurrence du secteurcommercial (Banque mondiale, 1999). La figure 2.1 illustre lesmultiples avantages que les organisations de producteurs et lesinstitutions communautaires peuvent offrir à leurs membres.

D’autres organisations de producteurs ont un caractère pluspolitique et servent principalement à négocier dans l’intérêt desagriculteurs. Ces organisations sont communes dans les paysdéveloppés, mais n’ont que récemment commencé à faire leurapparition dans les pays en développement, par exemple en Bolivie,où les syndicats d’agriculteurs ont une influence politique trèsmarquée. En Inde, le mouvement des coopératives laitières aégalement assumé un puissant rôle de plaidoyer pour ses membres.

Page 78: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

58

Les usagers peuventcommenter directement

la qualité des services

L’ingérence dugouvernement limite les

avantages

La planification et la fourniture des services de l’organisationrelèvent de la responsabilité d’un conseil composé de représentantsdes producteurs. Les membres de l’organisation élisent le conseilqui recrute les cadres de direction et le personnel technique. Le rôledu conseil, joint au mandat dont ses membres sont investis par leurscollègues de l’organisation, permet aux usagers de commenter laqualité des services et de se plaindre de la mauvaise qualité desintrants ou du peu d’empressement du personnel.

Regrettablement, beaucoup d’organisations coopératives decommercialisation ont été soumises d’emblée au contrôle et à laréglementation des pouvoirs publics, souvent par l’entremise deministères ou de départements des coopératives. Fréquemment, celaa eu pour effet de transformer les coopératives, de facto, enorganisations paraétatiques et, souvent, les agriculteurs des pays endéveloppement considèrent que les coopératives appartiennent àl’État et sont contrôlées par lui. Dans certains cas, l’équipe dedirection des coopératives est soumise à un contrôle étroit despouvoirs publics. Tel est le cas dans certains États de l’Inde, où lesecteur public est très largement représenté aux conseils desassociations des États qui fixent le prix du lait à la consommation, lessalaires, et ainsi de suite (Chandler et Kumar, 1998), ce qui affecte laviabilité des coopératives.

Figure 2.1: Multiples avantages des organisations de producteurset des institutions communautaires

Plaidoyerauprès des pouvoirs

publics Facilitationdu crédit

Fourniture d’intrants agricoles

ou d’espècesaméliorées

Débouchés

Négociationdes prix

Diffusion de l’information

Échange de donnéesd’expérience

Autonomisationpolitique

Fourniture de serviceszootechniques

Fourniture deservices consultatifs

Fourniture d’intrants

Associations d’agriculteursCoopératives de commercialisation

Institutions communautairesGroupes villageois

Associations d’épargne et de créditAssociations d’éleveurs

Page 79: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La libéralisation descoopératives a privilégiédivers modèles

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

59

Lorsque les subventions ont été éliminées progressivement à lasuite d’ajustements structurels, la plupart des coopérativescontrôlées par l’État ont fait faillite et ont été fermées ou vendues àdes entreprises privées. Parfois, les associations d’agriculteurs enont conservé une part, comme dans le cas des laitières industrielles(PIL) en Bolivie, où l’association d’exploitants, la Fedelpas, détientencore 60% des actions. Dans certains cas, combiner de grandesentreprises privées à des organisations de producteurs peutaméliorer leur viabilité économique, mais cela présuppose desorganisations de producteurs solides qui aient les capacités denégocier pour défendre les intérêts des producteurs et desexigences réalistes.

Au Kenya, le secteur laitier a été intégralement libéralisé et lesquelques coopératives laitières qui restent sont en fait aux mainsdes producteurs. Après la libéralisation, les coopérativesproprement dites ont subsisté autour des grandes villes et desgroupes d’auto-assistance sont apparus dans les régions plusreculées. Dans une étude de la façon dont les petits producteurs delait du Kenya considéraient les services zootechniques, Morton etMiheso (2000) ont constaté que les membres des coopérativesacceptaient pour leur lait un prix inférieur à celui payé par d’autresentreprises car ils appréciaient les services supplémentaires quefournissait la coopérative. C’est la même situation qui prévaut enInde, où les membres des coopératives acceptent des prixinférieurs à ceux qui sont pratiqués sur les marchés non structurésdu fait qu’ils jouissent de débouchés plus sûrs pour leurs produitset qu’ils peuvent bénéficier d’une enveloppe de servicessupplémentaires.

Bien que les producteurs de lait du Kenya aient considéré que les coopératives soulevaient beaucoup de problèmesd’organisation et de gestion, ils n’en étaient pas moins extrêmementsatisfaits d’être propriétaires de l’organisation et de son actif,particulièrement dans le cas des petites coopératives. Les membresdes groupes d’auto-assistance avaient le même sentiment, mais sefaisaient une idée négative des coopératives, qu’ils considéraientcomme excessivement paperassières, trop influencées par lespouvoirs publics, non transparentes, corrompues, mal gérées etlentes dans le versement des paiements dus aux producteurs.

Étant donné les avantages potentiels que les organisations deproducteurs peuvent apporter aux petits exploitants, il est essentiel

Page 80: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Celui qui paiecommande, et les

pauvres sont disposés à payer

Les pouvoirs publicsdoivent fournir un

appui par le biaisd’organisations

de pauvres

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

60

de renforcer les capacités des organisations dont sont membres leséleveurs pauvres. Cette question est examinée plus en détail au chapitre 3.

Financement des serviceszootechniques

Élaboration de systèmes de financement des serviceszootechniques pour les pauvresObliger les usagers à payer les services reçus peut beaucoupcontribuer à promouvoir l’autonomisation des éleveurs, de leursorganisations et de leurs communautés si de tels mécanismes sontappliqués comme il convient. Les éleveurs pauvres sont fortsouvent disposés à payer les services zoosanitaires. Dans différentesétudes des services vétérinaires en Inde et au Kenya, Ahuja et al.(2000) et Heffernan et Misturelli (2000) ont constaté que le prix desservices n’est pas une considération majeure pour les éleveurspauvres, lesquels se préoccupent surtout de l’accès aux services etde leur qualité.

Dans le cas des services que les usagers seraient disposés à payerà longue échéance, mais qu’il peut être particulièrement difficilepour les pauvres de rémunérer, le secteur public devrait appuyer ledéveloppement des services de telle sorte que les éleveurs puissentpeu à peu définir leurs besoins et exiger des services de qualité.Une formule peut constituer à acheminer des fonds publics parl’entremise d’organisations de producteurs ou d’institutionscommunautaires, lesquelles soit fourniraient elles-mêmes lesservices à leurs membres, soit les sous-traiteraient avec desprestataires privés.

Le retour à la gratuité ou au subventionnement des servicespublics n’est pas réaliste dans le cas des services qui constituentmanifestement des biens privés. Toutefois, des paiements officieuxsont fréquemment de règle même si, officiellement, les servicessont fournis gratuitement. Les quelques services qui sont fournisgratuitement ne bénéficient pas aux éleveurs pauvres, mais plutôtà ceux qui sont plus aisés et plus influents (Ahuja et al., 2000).

Le défi consiste à mettre au point un système de paiement desservices constituant des biens privés, comme les traitements

Page 81: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les prix sont un facteur limitatif

Un système de paiement des servicespar les usagers dépend des avantages apportés

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

61

vétérinaires cliniques et l’insémination artificielle, qui soient à laportée des pauvres mais qui soient également financièrementintéressants pour les prestataires. Les études mentionnées ci-dessusrévèlent également qu’en fait, les éleveurs pauvres dépensent peuen services vétérinaires, de sorte que les prix importent, même s’ilsne constituent pas la principale considération.

Dans l’étude réalisée en Inde, les éleveurs de la tranche derevenus inférieure étaient environ 30% moins disposés à payer lesservices que les éleveurs de la tranche supérieure. Dans le cas duKenya, 13% seulement des éleveurs ont mentionné le prix desservices comme une contrainte majeure, bien qu’il ressort d’unecomparaison que les éleveurs dépensaient environ 50% de moinsque ce qu’ils auraient “idéalement” dû dépenser. La différencerésulte probablement d’un manque d’accès joint à une incapacitéde payer. Les résultats pratiques qu’ont donnés les systèmescommunautaires paraissent confirmer ces conclusions. De plus, lafacilité avec laquelle un système de paiement par les usagers peutêtre appliqué dépend principalement des avantages immédiats.Les éleveurs se montrent très disposés à payer des servicesvétérinaires curatifs, spécialement lorsque les animaux ont unevaleur de production élevée. Ils le sont aussi dans le cas des soins préventifs si un abaissement du taux de mortalité présente un avantage commercial immédiat, mais l’éleveur hésiteranaturellement à payer de tels services si une réduction de lamortalité ne se traduit pas par un revenu en espèces plus élevé.L’encadré 2.6 décrit les enseignements tirés d’un projet dedéveloppement de l’élevage en Inde.

Il est manifestement difficile de convaincre les éleveurs de payerdes services précédemment gratuits, spécialement si une meilleurequalité n’est pas garantie. Une étude des petits éleveurs de bétail en Zambie a constaté que les intéressés répugnaient à payer lesservices vétérinaires fournis par l’État alors qu’ils étaientprécédemment gratuits. Les éleveurs qui payaient effectivement lesservices n’en profitaient pas pleinement et se plaignaient de lamauvaise qualité (Chilonda et Huylenbroeck, 2001).

Dans le cas d’autres services, comme les services de conseils,dont les avantages apparaissent essentiellement à plus longueéchéance, un système de rémunération immédiate et intégrale parles usagers peut poser un problème. Comme la réduction de lapauvreté est considérée comme un bien public, un soutien continu

Page 82: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

par l’État du financement de ces services est justifié lorsque lesservices sont axés sur les pauvres, mais cela n’est pasnécessairement le cas pour les éleveurs plus aisés. Le tableau 2.2résume les possibilités d’introduire un système de paiement par lesusagers de plusieurs services sélectionnés.

Viabilité financière des services vétérinaires privésIl ne suffit pas d’identifier des sources durables de financement,mais il faut aussi garantir l’attrait commercial des services. Il ressortd’enquêtes menées auprès de prestataires de services pendant plusde trois ans au Kenya, au Maroc et au Bengale occidental (l’un desÉtats les plus pauvres de l’Inde) que le revenu net provenant des services était de 10 000 USD, 12 000 USD et 3 500 USDrespectivement, en comparaison de 40 000 USD, par exemple, au

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

62

Encadré 2.6: Leçons tirées d’une campagne de vaccination de la volailleréalisée dans le cadre du programme de développement intégré del’élevage à Bastar (Inde)

“L’attitude du groupe cible concernant les avantages de l’initiative de

vaccination de la volaille est déroutante: lorsque nous demandons aux

villageois quels sont les avantages du projet, il arrive souvent qu’ils ne puissent

en mentionner aucun. Cependant, lorsqu’on leur demande spécifiquement si

le programme de vaccination de la volaille a des avantages, ils nous disent que

oui, évidemment, ils ont maintenant plus de poulets qui survivent plus

longtemps, mais que cela ne s’est pas encore matérialisé par une

augmentation du revenu familial. Cette constatation est confirmée et

correspond aux constatations tirées de projets semblables réalisés dans les

régions tribales adjacentes, où les éleveurs ne se soucient guère de poursuivre

les vaccinations après la fin du projet, lorsqu’ils doivent payer les services.

Selon la culture tribale indienne, la volaille joue un grand rôle social et

cérémonial, par le don et par le sacrifice, mais pas de rôle commercial. Si les

poulets tombent malades, ils sont quand même mangés, de sorte que la

question tient surtout au moment auquel ils le seront et, comme le rôle

commercial fait défaut, une volaille plus âgée et plus dodue, souvent, ne se

traduit pas par un avantage monétaire direct.

Si l’on veut que ces communautés adoptent réellement les services de

vaccination, il faudrait par conséquent que la volaille ait un rôle plus productif

et plus commercial.”Observations des auteurs à Bastar (Inde).

Page 83: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

63

Canada (Sen et Chander, 2001). La vente de médicamentsconstitue une importante source de recettes, mais celle provenantdes traitements était plus importante dans tous les pays examinés.Ainsi, les revenus, bien que modestes dans les pays endéveloppement, correspondent généralement aux rémunérationsversées dans la fonction publique. Les revenus des assistantsvétérinaires et des agents zoosanitaires communautaires varientdavantage. Quelques études ont montré qu’en Inde, les niveaux derevenus sont intéressants dans le cas des agents zoosanitairescommunautaires. Ils étaient parfois plus élevés que ceux quetouchaient les fonctionnaires de même catégorie (de Haan,communication personnelle), mais les études montraientégalement que les revenus varient beaucoup et tombent souvent àdes niveaux tels qu’ils ne permettent pas de vivre s’ils constituent laseule source de gains. Il est donc recommandé d’envisager plussouvent d’organiser un travail à temps partiel avec des personnesd’une certaine maturité, comme des commerçants ou des éleveursdynamiques.

Page 84: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

64

Type de services

Soins zoosanitaires curatifs

Soins zoosanitaires préventifs, sans exclure les externalités

Soins zoosanitaires préventifs, y compris les externalité

Services de reproduction

Fourniture d’intrants

Services financiers

Commercialisation

Information sur les marchés

Promotion des débouchés

Formation des éleveurs

Services de conseils

Appui organisationnel

Formation des professionnels

Formation des prestataires de services à assise communautaire

Surveillance de la qualité

Génération de technologie

Paiement immédiat possible pour les éleveurs pauvres

Déjà en place

Possible pour des animaux de hautevaleur ou la production commerciale

Le recouvrement intégral des coûts de l’insémination artificielle n’est pasdifficile et est possible dans le casd’animaux de haute valeur

Très possible

Très possible

Très possible

Possible dans certains cas lorsque laformation a des avantages immédiats

Tableau 2.2: Possibilités d’introduire un système de paiement par les usagers des services zootechniques

Page 85: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 2 : PRESTATION DE SERVICES ZOOTECHNIQUES

65

Biens publics: pas de possibilités de système de paiement par les usagers

Reste un bien public

Les programmes de conservation desespèces et de sélection des espèceslocales demeurent des biens publics

Le développement de l’infrastructurenécessaire à l’accès aux services demeureun bien public

Le développement de l’infrastructure etdes structures commerciales demeure un bien public

Dans certains cas, une intervention peutêtre dans l’intérêt public

Responsabilité publique

Dans certains cas, une intervention peutêtre dans l’intérêt public

Essentiellement une responsabilitépublique

Essentiellement une responsabilitépublique

Possibilités de mise en place, à longterme, d’un système de paiementpar les usagers

Un paiement partiel tendant àcompenser les externalités pourrait être possible s’il existe de solidesorganisations communautaires

Systèmes d’enregistrement à mettre enplace sur une base commerciale à longterme

Possible pour les produits de haute valeur

Pourrait être possible, mais les capacitésdoivent être renforcées pour constituerdes organisations solides

Paiement partiel possible avec le temps

Paiement partiel possible avec le temps

Pourrait être possible avec le temps

Peut être possible avec le temps, maisexige de solides capacités et un appui du public

Peut être possible avec le temps, maisexige de solides capacités et un appui du public

Page 86: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP
Page 87: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

67

Pour la plupart des prestataires, fournir des services zootechniques répondantaux besoins des éleveurs pauvres représente un défi formidable. Ils sont en faitaccoutumés à ce qu’on leur demande d’accroître la production, plutôt qued’améliorer l’équité.

Ce chapitre évalue la mesure dans laquelle les divers services zootechniquessont orientés vers la pauvreté et indique comment ils pourraient être améliorés.Il présente des services qui sont exempts du biais technique caractérisantactuellement beaucoup de services et qui peuvent surmonter les contraintes decaractère général liées à la pauvreté dont il a été question au chapitre 1. Le Cadrestratégique du FIDA pour 2002-2006, Œuvrer pour que les ruraux pauvres se libèrent dela pauvreté, constitue le cadre à l’intérieur duquel ont été structurés les services carc’est dans ce contexte plus large que la prestation des services zootechniques doitêtre replacée (FIDA, 2002a). La figure 3.1 illustre brièvement le cadre et lesobjectifs stratégiques du FIDA.

Des services zootechniques sont présentés dans le présent chapitre selon lestrois objectifs stratégiques susmentionnés:

■ renforcer les capacités des ruraux pauvres et de leurs organisations;■ permettre un accès plus équitable aux ressources naturelles productives

et à la technologie; et■ élargir l’accès aux services financiers et aux marchés.

CHAPITRE 3

DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Page 88: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

68

Il faut renforcer les institutions

communautaires, lespetites entreprises

privées et lesorganisations de

producteurs

Les questions liées à la problématique hommes-femmesintéressent tous les secteurs et il en est tenu compte dans toutes lesconsidérations qui suivent. La section finale examine le rôle que ledéveloppement de l’élevage et les services zootechniques peuventjouer dans les régions affectées par le sida, en fonction des besoinsdes communautés affectées.

Renforcer les capacités des rurauxpauvres et de leurs organisations

Pour autonomiser, il importe de renforcer les institutionscommunautaires, les petites entreprises privées et les organisationsde producteurs. C’est ce que l’on a souligné au chapitre 2, mais laréalité demeure que, fréquemment, les éleveurs pauvres n’ont accèsqu’à des institutions faibles, voire à aucune institution, leurs droits,leur niveau d’instruction, leurs connaissances et leur influencepolitique étant limités. Il faut par conséquent s’attacher en toutepriorité à renforcer les capacités des éleveurs pauvres et de leursorganisations et à transformer les divisions professionnelleshabituelles en de nouveaux domaines de coopération.

Appui organisationnelPour permettre aux membres des organisations de producteurs de renforcer les procédures démocratiques, d’améliorer la

Figure 3.1: Cadre et objectifs stratégiques du FIDA

Objectifs stratégiques

Œuvrer pour que les ruraux pauvresse libèrent de la pauvreté

Avoirs financiers et marchésÉlargir l’accès aux servicesfinanciers et aux marchés

Avoirs productifs et technologieAssurer un accès plus équitable

aux ressources naturellesproductives et à la technologie

Capital humain et socialRenforcer les capacitésdes ruraux pauvres et de leurs organisations

Page 89: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

69

Il faut autonomiser les membres desorganisations pour leurpermettre de renforcerles procéduresdémocratiques etd’améliorer latransparenceéconomique

L’exclusion des pauvresest une réalité, et lesinstitutions formelles nesuffisent pas

Il faut acquérir plusd’expérience pratiquede l’inclusion despauvres

gouvernance et de garantir une gestion économique transparente,il faut leur apporter un solide appui sur le plan organisationnel.Dans le monde en développement, les coopératives de producteurset les organisations d’agriculteurs ont été créées généralement grâceà l’appui organisationnel fourni par les pouvoirs publics ou lesONG. Cela s’est traduit par l’apparition de groupes dirigés selondes méthodes autocratiques imposées, ce qui, à son tour, s’est reflétédans l’apparition de pratiques peu démocratiques et peu claires ausein de communautés où les traditions démocratiques font déjàdéfaut. On s’est trouvé ainsi en présence d’un bouillon de culturefertile pour la fraude et la mauvaise gestion.

Il y a peu de réponses faciles à ces problèmes, et les institutionsformelles par l’entremise desquelles les pauvres sont censésparticiper ne sont pas adéquates (Webster, 1999). C’est ce qu’aconfirmé le programme de recherche sur l’organisation locale etl’atténuation de la pauvreté rurale mené par le Centre danois derecherches sur le développement. Cette étude a cherché àdéterminer comment la démocratisation, la société civile et lapromotion des institutions locales peuvent contribuer à transformerles groupes marginalisés en participants actifs à la réduction de la pauvreté. L’étude a constaté que, dans de nombreux contextes, lapauvreté est considérée comme la faute et la responsabilité despauvres (Webster, 1999; Heffernan et Misturelli, 2000; Morton etMiheso, 2000). L’exclusion des pauvres des processus et desinstitutions démocratiques peut donc être si sévère et si systématiquequ’une participation des pauvres n’est tout simplement pas possible.

Il faut acquérir plus d’expérience pratique pour trouver lemoyen de faire participer activement les groupes marginalisés auxorganisations et ainsi aux processus politiques qui constituentl’environnement dans lequel ils produisent. L’étude de Webster(1999) montre que trois conditions préalables doivent être rempliessi l’on veut inclure les pauvres aux processus organisationnels etpolitiques:

■ mettre en place des structures institutionnelles inclusives quifacilitent la participation;

■ faire comprendre que la pauvreté et la réduction de lapauvreté constituent réellement des problèmes; et

■ renforcer, parmi les groupes marginalisés, les pratiquessociales et politiques de nature à faciliter leur participationaux processus politiques.

Page 90: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

70

Conditions préalables àl’inclusion des pauvres

Il faut élargir le conceptdes organisations

On ne peut introduirede nouvelles

technologies parmi leséleveurs pauvres que si

ces derniers ont un accèsadéquat à des services

d’appui comme laformation et les conseils

Ce dernier point signifie qu’il faut admettre qu’il existe despratiques établies au sein des organisations communautaires et desréseaux informels. Ces pratiques sont souvent négligées, maispourraient contribuer à faciliter la participation des pauvres à laconception et à la fourniture des services zootechniques. Il est doncsuggéré de suivre une stratégie qui:

■ tende à renforcer la capacité des organisations auxquellespuissent être associés les éleveurs pauvres; et

■ tienne compte des organisations communautaires et desréseaux informels de pauvres qui existent déjà.

Les types d’organisations à cibler doivent, par conséquent, êtreélargis au-delà des organisations de producteurs, coopératives etautres associations classiques de manière à englober les institutionstraditionnelles, les clubs et les groupes informels d’éleveurs pauvres.

Un problème sérieux sera de relier les organisations à assisecommunautaire aux institutions responsables de la formulation despolitiques. Il faudra pour cela redoubler d’efforts au niveau desorganisations faîtières et simultanément s’employer à encouragerdes réformes et des changements d’attitude parmi les décideurs desorte qu’ils puissent écouter les exigences de la base.

Services consultatifs et perfectionnement des compétencesPrincipaux besoins des éleveurs pauvresL’expérience acquise pendant les études de cas montre que, si l’onveut introduire avec succès de nouvelles technologies parmi leséleveurs pauvres, il faut simultanément leur garantir un accès à desservices d’appui comme des services de formation et des servicesconsultatifs. Le chapitre 1 a identifié le manque de fourrage et detechnologies bon marché comme des problèmes majeurs danspresque tous les pays en développement. Les systèmes deproduction qui peuvent aider les éleveurs actuels et potentiels àaméliorer leurs exploitations diffèrent souvent des systèmestraditionnels, et beaucoup d’éleveurs “potentiels” pauvres n’ont pasou ont perdu les savoirs traditionnels par suite de conflits, dedéplacements familiaux ou de pertes de membres de la famillecausées par le sida. L’adoption de technologies appropriées peutn’être possible que si les éleveurs pauvres sont préparés à adopterde nouvelles technologies dans des domaines comme l’élevage, laproduction de fourrage et la gestion.

Page 91: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

71

Très peu d’attention a été accordée auxservices consultatifszootechniques

Les activités ne sont pas orientées vers les pauvres

On manqued’institutionscompétentes et de professionnelsdûment qualifiés

Des services consultatifs appropriés peuvent avoir un impactLes services consultatifs et les services de perfectionnement descompétences peuvent avoir un impact très marqué sur les éleveurspauvres s’ils sont centrés sur la technologie et les systèmes deproduction auxquels le groupe cible peut aisément avoir accès. Unbon exemple est décrit dans l’encadré 3.1.

Jusqu’à présent, peu de casJusqu’à présent, il n’a été fait que très peu de cas des servicesconsultatifs dans le domaine de l’élevage.

Fréquemment, l’élevage est géré par l’entremise d’undépartement gouvernemental ou, plus souvent, d’un ministèreautre que celui qui est responsable de l’agriculture. Toutefois, pources départements ou ministères de l’élevage, la santé animaleconstitue la principale préoccupation et l’accent est mis surtout surles services vétérinaires, une priorité peu élevée étant accordée auxservices consultatifs zootechniques. C’est ainsi par exemple qu’enInde, le Département national de l’élevage alloue moins de 10% deson budget à la diffusion d’informations (Matthewman et Morton,1997; Morton et Wilson, 2000). Il y a eu néanmoins des cas,particulièrement en Afrique subsaharienne, où les servicesconsultatifs concernant aussi bien l’élevage que la gestion ont étéintégrés au département de vulgarisation du Ministère del’agriculture ou au département chargé des services de vulgarisationagricole.

Cependant, le personnel de ces départements n’a souvent pasd’expérience de l’élevage; les services consultatifs dans ce domainedemeurent peu prioritaires et les activités ne sont pas orientées versles pauvres (de Hann et al., 2001).

D’une manière générale, il y a peu d’institutions compétentes etde professionnels dûment qualifiés. Par exemple, on a constaté lorsd’une étude de cas réalisée au Burkina Faso que les agriculteursconsidéraient que la qualité et la disponibilité des servicesconsultatifs pour l’élevage fournis par les services gouvernementauxdu vulgarisation étaient pires que celles qui existaient dansn’importe quel autre secteur, tout en précisant qu’ils avaient besoinsurtout de conseils sur la production animale (Bindlish et al., 1993).Lorsque des services consultatifs étaient fournis, les spécialistesavaient tendance à choisir leur propre groupe cible, qui étaitcomposé principalement d’exploitants aisés et “performants” ayant

Page 92: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

72

Encadré 3.1: Services de vulgarisation pour les femmes

au Pakistan

Dans le cadre d’un projet réalisé au Pakistan pendant un an, des agents devulgarisation de sexe féminin ont dispensé une formation et fourni desservices de vulgarisation aux agricultrices pour les aider à améliorer leursélevages de volaille. Indépendamment de cette formation et de ces conseils,les femmes ont seulement eu accès à des vaccinations et aux médicaments.

Les agents de vulgarisation avaient reçu pour instruction de développer lesystème traditionnel d’élevage de volaille que pratiquaient déjà les femmes etde tenir compte des ressources limitées dont disposaient ces dernières. De cefait, les dépenses d’exploitation n’ont guère augmenté. Par exemple, lesfemmes qui achetaient des brisures de riz sur le marché pour nourrir les jeunespoussins ont été encouragées à acheter des aliments spécialisés pour poussinen quantités telles que leur coût ne dépasse pas celui des brisures de riz.

Cette intervention a eu un impact significatif sur la productivité desélevages de volaille.

Parmi les nouvelles pratiques proposées, ce sont les pratiques de vaccinationet d’élevage partiel en poulailler qui ont été adoptées le plus facilement.D’autres pratiques améliorées concernant par exemple l’alimentation, lasélection des œufs, l’incubation et les soins aux poussins et aux poules n’ontpas été adoptées aussi souvent, mais néanmoins à des taux satisfaisants.

Les éleveuses, n’ayant probablement pas assez de ressources pour adopter

toutes les pratiques suggérées, ont accordé la priorité à celles qu’elles jugeaient

les plus importantes.

Farooq et al. (2000).

Femmes appliquant les technologies améliorées (%)

Paramètre

Vaccination des poulets

Élevage partiel en poulailler

Pratiques améliorées d'élevage de poussins

Pratiques améliorées d'élevage de poules

Avant la formation

25

7

15

20

Comparaison des résultats après une année de formation

Paramètre

Nombre de volatiles

Production d’œufs par poule

Mortalité globale (%)

Avant la formation

18,7

57,4

41,8

Après la formation

30,8

97,6

17,8

Après la formation

100

93

64

70

Page 93: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les conseils donnés aux exploitants“performants” ne sontsouvent guère utilespour les pauvres

assez de ressources pour adopter des systèmes d’élevage intensif(Morton et Wilson, 2000).

Cette approche imposée du sommet repose sur l’hypothèse selon laquelle les technologies adoptées par les exploitants dits“performants” atteindront ceux qui le sont moins par un effet de“ruissellement”. Le problème que soulève cette approche est que leséleveurs performants sont généralement plus aisés, peuvent plusfacilement mobiliser des ressources, sont plus instruits et possèdentplus de terre. Souvent, les conseils donnés à ces exploitantsperformants ne sont pas adaptés à ce dont les pauvres ont besoin.

Ce qui fait défaut dans ce système:■ une participation des pauvres;■ des systèmes économiques de diffusion de l’information;■ la génération de technologies appropriées et de suggestions

répondant aux besoins des pauvres; et■ des professionnels de l’élevage dûment qualifiés.

Vers de nouveaux systèmes: connaissances et apprentissageLa stratégie devrait consister à repenser le système et s’orienter versdes systèmes d’acquisition de connaissances et d’apprentissage denature à développer les compétences techniques tout en renforçantles capacités de l’éleveur lui-même de rechercher, d’organiser oud’exiger une information, une formation et des avis auprès desources compétentes.

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

73

Encadré 3.2: Cinq carences des services de vulgarisation en Inde

■ Le système de services de vulgarisation est fondé sur un transfert de

technologies à partir du sommet et sur une interaction avec les exploitants

aisés et “performants”.

■ L’accent est mis principalement sur les grands ruminants (bovins et buffles).

■ L’accent est mis sur les systèmes d’élevage intensif, particulièrement pour

la production laitière, tandis que les autres rôles de l’élevage sont négligés.

■ Les services sont concentrés dans les régions à fort potentiel.

■ Les services sont fournis pour des hommes et par des hommes et négligent

le rôle clé que les femmes jouent dans l’élevage des animaux.

Conroy et Rangnekar (1999).

Page 94: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’intégration des serviceszootechniques aux

services agricoles devraitpermettre de fournir des

services dans lesdomaines de la

prophylaxie, de lanutrition et de la

production de fourrage

Il importe de développer

les compétences de gestion

Les services devulgarisation agricole

traversent une périodede réforme

L’Initiative de Neuchâtel encourage

des services consultatifsaxés sur la demande

et sur la pauvreté

Les services agricoles et zootechniques peuvent être intégrésComme la plupart des éleveurs pauvres ou des éleveurs en puissancecultivent aussi diverses récoltes, il importe de mettre au point unsystème qui conjugue les composantes “biens publics” des serviceszoosanitaires et les services consultatifs agricoles et zootechniques ausein d’un seul et même système intégré. Si les conseillers sont assezcompétents en matière d’élevage, un tel système intégré pourraitpermettre de s’attaquer comme il convient aux problèmes quesoulèvent les soins prophylactiques, la nutrition et le manque defourrage dans les régions où prédominent les exploitations mixtes.

Un autre aspect important, souvent négligé, est celui dudéveloppement des compétences de gestion, de sorte que lesnouveaux systèmes de services consultatifs devront tendre àrenforcer beaucoup plus les connaissances touchant la gestionéconomique des systèmes de production pour faire en sorte que lespauvres puissent bénéficier de l’élevage.

Cependant, les services consultatifs agricoles se trouvent aussiaux étapes initiales d’un processus de développement. Dans laplupart des cas, le système généralisé de services mobiles deformation agricole et de vulgarisation fournis par des organismesgouvernementaux a été peu efficace et peu viable. Il ressort d’uneévaluation récente du FIDA (FIDA, 2001) que les technologiesdiffusées n’étaient pas appropriées et ne répondaient pas auxbesoins des exploitants pauvres, et que la plupart des organismes devulgarisation ne s’occupaient ni de cibler, ni d’atteindre lesagriculteurs pauvres. Beaucoup de pays en développement ont, parconséquent, entrepris de réformer de fond en comble les services devulgarisation agricole; et il apparaît peu à peu de multiplesapproches nettement axées sur les communautés et sur les besoinset les initiatives des agriculteurs eux-mêmes.

Un groupe d’organisations internationales de donateurs quis’occupent du développement de l’agriculture et des services devulgarisation agricole – rassemblées sous l’égide de l’Initiative de Neuchâtel – a lancé un débat intéressant sur la promotion etl’organisation de systèmes consultatifs agricoles et sur leur rôle dansle développement rural. Cette initiative offre d’intéressantespossibilités de développer des services consultatifs et des systèmesd’information axés sur la demande. Une étude récente a évalué lespossibilités de mettre un accent plus marqué sur la pauvreté(Christoplos et al., 2002).

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

74

Page 95: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il existe de bonnespossibilités de conjuguerles efforts

Les attributions et les critères deperformance doiventêtre clairement définis et le financement doitêtre adéquat

Les agriculteurs peuventformer leurs collègues

Les communautésd’agriculteurs peuventobtenir elles-mêmes desservices sur une basecontractuelle

Même si ces efforts n’ont pas encore permis de dégager assezd’informations pour qu’ils puissent être élargis à l’échelle nationale,il existe de bonnes possibilités de conjuguer cette initiative à l’actionentreprise pour développer les services consultatifs zootechniques.

Il peut être utilisé des systèmes à assise communautaireLa tendance est aujourd’hui à des services de vulgarisation à assisecommunautaire. Plusieurs pays ont mis en place à titreexpérimental des systèmes qui permettent aux communautés desous-traiter les services, par concours, à des prestataires publics ouprivés. Les systèmes de bons, qui permettent aux producteurs dechoisir leurs propres prestataires de services, sont des variantes dumême modèle de mise au concours. Les systèmes à assisecommunautaire, qui conjuguent les services zoosanitaires et lesservices consultatifs, ont donné des résultats mitigés et nefonctionnent vraiment que si les tâches et les critères deperformance sont définis clairement et que si le financement estadéquat. D’une manière générale, l’idée selon laquelle l’agentzoosanitaire communautaire peut, indépendamment de sesattributions normales, fournir des services consultatifs sansfinancement supplémentaire ne s’est pas matérialisée.

En Ouganda, il a été introduit dans le cadre du programmecogéré de services de vulgarisation et de formation des agriculteursfinancé par DANIDA des services consultatifs d’agriculteurs àagriculteurs, l’Association nationale des agriculteurs ougandaisfaisant appel à des agriculteurs-relais pour dispenser une formationà leurs collèges dans des disciplines agricoles spécifiques(Kagwisagye, 1997).

Quelques mesures et innovations très intéressantes ont étéintroduites en Amérique latine en ce qui concerne la fourniture deservices consultatifs aux communautés d’agriculteurs. Berdegué(1997) décrit l’exemple d’un projet d’appui aux transferts detechnologies entre communautés paysannes de l’altiplano péruvien.Ce projet avait pour but d’appuyer directement les communautésd’agriculteurs de sorte qu’ils puissent recruter leurs propresconseillers, qui pouvaient être des “experts” très divers, agronomes,vétérinaires, artisans ou agriculteurs considérés localement commeexperts dans différents domaines. En dépit de quelques problèmesde démarrage dus au fait que la demande de services était suscitéepar les conseillers plutôt que par les agriculteurs eux-mêmes,

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

75

Page 96: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Apprentissage de la part aussi bien

des professionnels que des éleveurs

Stages pratiques pour agriculteurs

le projet a donné de bons résultats, et les agriculteurs ont peu à peudemandé aux conseillers des services spécifiques dont ils avaientparticulièrement besoin et bénéficié des interventions ainsi misessur pied.

Des processus d’apprentissage sont nécessairesIl faudrait adopter une approche tout à fait nouvelle pour faciliterl’apprentissage de la part aussi bien des éleveurs que desprofessionnels. Habituellement, les professionnels de l’élevage n’ontpas l’expérience d’une action axée sur la réduction de la pauvreté.Ce qui faut par conséquent, c’est transformer l’agent devulgarisation classique en un conseiller et en un partenaire clé surlequel les exploitants puissent compter pour prendre leursdécisions concernant leurs fermes et leurs systèmes de culture. Dansune telle optique, un dialogue constant doit se poursuivre entre leconseiller et les agriculteurs, l’intention étant d’optimiser lesrendements pour ces derniers, compte tenu des ressourcesdisponibles, tout en renforçant leurs connaissances et leurs capacitésde gestion. Les services usuels de vulgarisation répondent rarementaux besoins des éleveurs pauvres qui n’ont guère accès auxressources. Des processus flexibles de transfert de technologies etd’apprentissage qui permettent aux éleveurs pauvres d’appliquerdes principes généraux à leur propre situation et de modifier lessolutions proposées à la lumière de leurs besoins spécifiques sontpar conséquent indispensables.

En même temps que le développement des compétencestechniques, les processus d’apprentissage doivent contribuer àautonomiser les éleveurs et à leur donner assez d’assurance pourqu’ils s’impliquent pleinement dans les processus et les systèmesd’apprentissage.

Le concept de stages pratiques pour agriculteurs a été élaboré lorsde la mise en œuvre de programmes intégrés de gestion desravageurs. Ces stages pratiques pour agriculteurs encouragent les processus d’apprentissage qui permettent aux agriculteursd’approfondir leurs connaissances et de prendre des décisions sur labase de leurs propres observations et de leurs propres expériences etd’échanges d’idées avec leurs collègues. Le conseiller professionnel seborne à jouer un rôle de facilitation dans ces processus.

La viabilité financière et la durabilité de ce concept ontnéanmoins suscité des doutes (Quizon, Feder et Murgai, 2001).

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

76

Page 97: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il faut trouver lesmoyens d’apprendre à moindre frais

Il importe de trouver des formes d’apprentissage qui puissent êtreappliquées à moindre frais et qui reposent sur une approcheconjointe

Le concept fondamental d’apprentissage pourrait être élargi demanière à développer l’idée de stages pratiques pour éleveurs etélaborer ainsi des technologies appropriées pour les éleveurspauvres au moyen d’un processus d’apprentissage par la

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

77

Encadré 3.3: Stages pratiques pour agriculteurs pour une gestion

intégrée des ravageurs en Indonésie

Des groupes comptant jusqu’à 25 agriculteurs se réunissent une fois par

semaine pendant les 12 semaines que dure la période végétative du riz

pour comparer, sur la base d’une analyse participative des agrosystèmes, les

résultats obtenus dans une rizière où sont appliquées des pratiques de gestion

intégrée des ravageurs et dans une rizière témoin. Pour cela, les petits groupes

d’agriculteurs doivent observer les rizières et les régions avoisinantes pour

capturer et identifier les divers insectes et micro-organismes qui s’y trouvent

et en tirer des conclusions. Plusieurs autres sujets sont également abordés

lors des réunions, et il est notamment réalisé des exercices de dynamique

de groupe. Les stages pratiques pour agriculteurs ont suscité beaucoup

d’enthousiasme parmi les intéressés, qui ont pris de l’assurance et qui ont

beaucoup réduit les quantités d’insecticides qu’ils utilisent.

Groot et Röling (1997).

Encadré 3.4: La composante élevage du programme de renforcement

de la sécurité alimentaire au Cambodge

Des stages pratiques pour agriculteurs constituent le principal fondement de

toutes les activités menées dans le contexte du programme spécial de

renforcement de la sécurité alimentaire au Cambodge. Ce programme

comporte une composante de promotion de l’élevage de porcs, de volaille et

de canards. Les groupes de villageois constituent des associations d’éleveurs

qui planifient et organisent les activités. L’expérience acquise jusqu’à présent

a été encourageante. Les vaccinations et l’amélioration des pratiques

d’élevage ont permis de ramener le taux de mortalité des poulets de 76% à

24%. On dit que ces stages ont appris aux agriculteurs à réfléchir et à prendre

des décisions.Khieu (1999).

Page 98: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Observations,apprentissage

par la découverte,discussions en groupe

et partage de donnéesd’expérience

Pour les pauvres, il est de plus en plus

difficile d’avoir accès aux terres communes

de pacage et aux terres arables pouvant

servir à la culture de fourrage

découverte, de discussions en groupe, d’échange de donnéesd’expérience et d’observations. Les membres des groupespourraient ainsi étudier des exemples concrets et apprendre àexpérimenter et à observer. La même approche encourageraitprobablement les membres des groupes à mieux définir les servicesqu’ils attendent des prestataires.

Assurer un accès plus équitable auxressources naturelles productives et à la technologie

La réduction de la pauvreté passe par l’expansion économique,laquelle, dans le secteur de l’élevage, dépend directement de l’accèsaux ressources naturelles. Dans beaucoup de régions du monde,cependant, la base de ressources naturelles productives est soumiseà des pressions croissantes et les pauvres sont peu à peu évincés. Ilimporte par conséquent d’élaborer d’urgence des politiques et demettre en place des institutions de nature à garantir une répartitionéquitable de la terre et des ressources hydrauliques. Pendant denombreuses années, le développement de la technologie a privilégiédes solutions pointues aux problèmes de production, dont lespauvres n’ont pas bénéficié car elles sont pour eux hors de portée.

La section ci-après examine la mesure dans laquelle les pauvresont accès à la terre, à l’eau et aux technologies et analyse les servicesqui pourraient faciliter l’accès des éleveurs pauvres à ces ressources.

Accès à la terre et aux ressources hydrauliquesLa terre et l’eau sont des ressources de plus en plus raresNourrir leurs animaux représente un défi majeur pour beaucoupd’éleveurs pauvres. La base de ressources se rétrécit et l’accès despauvres aux terres communes de pacage ou aux terres pouvantservir à la production de fourrage se trouve menacée. La récenteétude mondiale de la FAO, World Agriculture: Towards 2015/2030(FAO, 2002a), estime qu’au cours des 30 prochaines années, les pays en développement devront, s’ils veulent nourrir leurspopulations de plus en plus nombreuses, mettre en valeur 120 millions d’hectares de terres en plus pour y planter descultures vivrières. C’est surtout en Afrique subsaharienne et en

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

78

Page 99: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le surpacage dégrade les sols

Amérique latine que la superficie des terres arables devra êtreaccrue. Selon toute probabilité, les nouvelles utilisations qui serontfaites de ces terres supplémentaires réduiront encore plus l’accèsaux terres communes et plusieurs pays connaîtront un problèmede pénurie de terres. Jodha (1992) a constaté qu’en Inde, pendantla période 1950-1985, les terres communes se sont contractées demoitié, que le nombre de points d’eau dans ces régions a diminuéde deux tiers environ et que 20% des terres où paissaient jadis desbovins étaient désormais utilisées par de petits ruminants.

Depuis lors, la situation s’est encore dégradée. Dans les régionsarides ou montagneuses, beaucoup d’éleveurs pauvres sonttributaires des terres communes. Comme, dans beaucoup de cesrégions, la population s’accroît tandis que les pressions sur lesterres disponibles s’intensifient, le surpacage devient une causefréquente de dégradation des sols, ce qui entraîne une spirale dedétérioration de la qualité des quelques ressources disponibles etd’aggravation de la vulnérabilité aux changements climatiques.L’encadré 3.5 donne un exemple de ce phénomène au Botswana.

Les systèmes d’élevage extensif sont soumis à d’intenses pressionsLa plupart des systèmes d’élevage extensif sont sérieusementmenacés car les terres appropriées se rétrécissent de plus en plus, ceque viennent encore aggraver l’insécurité des droits fonciers et lafréquence des graves sécheresses. Les cultures envahissentprogressivement des régions à potentiel élevé comme le fond desvallées et d’autres terres humides qui constituent des réserves

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

79

Encadré 3.5: Surcharge au Botswana

Lors d’une étude de l’élevage de caprins au Botswana, les principales

contraintes identifiées ont été les suivantes:

“Le grand nombre d’animaux élevés dans les villages a entraîné une

surcharge et un grave surpacage, spécialement en hiver, lorsque les

pâturages naturels se réduisent à néant. De ce fait, non seulement

l’alimentation des animaux est inadéquate, mais encore la qualité des

pâturages se dégrade chaque année. Comme, souvent, les aliments

supplémentaires coûtent trop cher, les animaux meurent de faim, ce qui se

traduit par des pertes considérables.”

Mrema et Rannobe (2001).

Page 100: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’agriculture empiète sur les réserves

utilisées pourle pacage pendant

la saison sèche

Outils de prédiction des sécheresses,

vente précoce des animaux et

reconstitution rapide des troupeaux et constitution

de réserves de fourrage

Il faut intégrer les animaux d’élevage et les animaux

sauvages

critiques pour le pacage pendant la saison sèche dans les systèmesd’élevage extensif. Des conflits apparaissent peu à peu, par exempleau Sénégal et en Mauritanie (Horowitz et Salem-Murdock, 1993)ainsi qu’au Nigéria (Maina, 1999). En outre, l’accès aux pâturagesdans les régions arides est déterminé par l’accès aux points d’eau, etles agriculteurs sédentaires et les éleveurs aisés empêchent les autresd’y avoir accès (Pratt et al., 1997).

Il est essentiel de disposer d’outils permettant de prédire lessécheresses dans les régions d’élevage extensif (Stuth, 2002). Dessystèmes d’intervention rapide sont encore plus essentiels, maisplus difficiles à établir, de sorte qu’ils apparaissent plus lentement,bien que plusieurs systèmes intéressants aient récemment été mis àl’essai dans le cadre de projets financés par la Banque mondiale etle FIDA en Éthiopie, au Kenya et en Mongolie. Ces systèmesconsistent notamment à encourager la vente d’animaux avantl’arrivée de la sécheresse et la reconstitution des troupeaux dès quecelle-ci s’achève, à stratifier la production de manière à élever dejeunes animaux dans les zones à faible potentiel et à finir de lesengraisser dans les régions à potentiel élevé, à constituer desréserves de fourrage et même à organiser des systèmes d’assurancedu bétail (Skees, 2002).

Les programmes de conservation des sols et de la sauvagine quine tiennent pas compte de la relation entre l’homme et la naturesont à l’origine d’autres pressions encore sur les communautéspastorales. Des exemples en sont les vastes zones de conservationde la Vallée du Rift en Afrique orientale et les zones de conservationde Mara, Serengeti et Ngorongoro, qui se trouvent sur les terrespastorales traditionnelles des Masaï. Alors même que, depuis dessiècles, le bétail a constitué un élément naturel de l’écologie de lasavane et que toutes les études anthropologiques confirment queles Masaï et la sauvagine vivent dans une coexistence mutuellementbénéfique, la plupart des programmes de conservation continuentde susciter des conflits. On fait actuellement l’essai en Afriqueorientale de projets pilotes d’intégration des animaux d’élevage etdes animaux sauvages qui donnent aux communautés pastoralesune plus large part des avantages de la conservation encontrepartie d’une intégration plus harmonieuse des différentesespèces d’animaux (de Haan, Steinfeld et Blackburn, 1997). Cesprojets tiennent compte également de la nécessité d’éviter lapropagation des maladies ainsi que des habitudes de pacage et

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

80

Page 101: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il faut analyser les perspectives dessystèmes d’élevage du point de vue des disponibilités de fourrage

devront être suivis de près pour pouvoir être exécutés à plusgrande échelle s’il y a lieu.

Les systèmes mixtes sont tributaires d’aliments sur le déclin L’accroissement rapide de la population se traduit par uneutilisation plus intensive des sols et une diminution de l’accès à laterre dans les systèmes mixtes qui prédominent dans les hautesterres ainsi que dans les régions humides et irriguées. Les alimentsétant souvent limités, les animaux sont sous-alimentés et nepeuvent pas développer tout leur potentiel (Staal et al., 2001).

Pendant l’atelier qui a réuni les parties prenantes en vue del’étude de cas au Bangladesh, la discussion a évoqué la question ducoût de la production laitière pour les exploitants pauvres presquedépourvus de terre. Les terres disponibles sont extrêmementlimitées et la dépendance à l’égard d’aliments achetés limitebeaucoup les possibilités de réduire les coûts. De même, comme l’amontré Bebe (2003), les pressions accrues qui s’exercent sur laterre dans les hautes terres du Kenya entraînent une utilisationplus intensive des sols, une dépendance accrue à l’égard desaliments achetés et une composition des troupeaux qui ne peutplus garantir des animaux de remplacement. À long terme, de telssystèmes ne sont pas viables et sont incapables de fournir desmoyens de subsistance adéquats. Il pourra s’avérer nécessaire deréduire le nombre d’exploitants qui pratiquent un élevage intensifà base de ruminants de manière à garantir des approvisionnementsadéquats en aliments et à permettre une dynamique appropriéeparmi les troupeaux des autres exploitations. Pour que de telschangements soient possibles, une économie non agricole viable est indispensable.

Technologies appropriées adaptées aux besoins des pauvresLes éleveurs pauvres ont besoin de technologies améliorées defaçon à pouvoir améliorer la productivité de leurs troupeaux.Cependant, ces technologies doivent être adaptées à leurs besoinset tenir compte des contraintes et de la vulnérabilité des pauvres sil’on veut qu’elles puissent être adoptées avec succès. En outre, ellesdoivent être appuyées par des services adéquats dans des domainescomme la formation, les services consultatifs, l’approvisionnementen intrants et les services de commercialisation. Le chapitre 1 adiscuté des problèmes qui caractérisent la situation des pauvres, et

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

81

Page 102: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le degré devulnérabilité

détermine la facilitéavec laquelle les

ménages peuventpasser d’une activité

à une autre

la section ci-après indique quelques-unes des conditions préalablesde caractère général qui doivent être remplies pour pouvoirdévelopper les technologies et les services zootechniques dont lespauvres ont besoin.

Pour qu’elles répondent aux besoins des pauvres, leszootechnologies doivent:

■ minimiser les risques;■ être axées sur les animaux auxquels les ménages pauvres

ont accès;■ exploiter les connaissances et les compétences

traditionnelles;■ faire appel à du matériel approprié;■ exiger un capital minimum;■ pallier la pénurie de fourrage;■ s’attaquer aux problèmes générés par les maladies animales;■ fournir des matériels génétiques appropriés;■ tenir compte de la main-d’œuvre disponible; et■ être durables et rentables.

Minimiser les risquesLes systèmes où prédominent les petites exploitations traditionnellesreposent habituellement sur des bases solides qui encouragentla sécurité alimentaire à long terme parmi les ménages pauvres.Le degré de vulnérabilité dépend de forces exogènes comme lespolitiques macroéconomiques, les prix des produits de base etles changements climatiques. La vulnérabilité dépend également defacteurs internes comme l’accès aux ressources, les dotations enressources et le degré de pauvreté. Ensemble, ces facteursdéterminent avec quelle facilité les ménages peuvent passer d’uneactivité à l’autre, ce qui est l’un des principaux éléments de lastratégie de gestion des risques des pauvres.

N'importe quel risque, s’il se matérialise, peut avoir desconséquences catastrophiques sur l’existence fragile des ménagesles plus pauvres. Ces derniers préfèrent généralement diversifierleurs activités afin de minimiser les risques. Ils veulent réduire auminimum les variations de la production, de dépenses et derevenus plutôt que maximiser la productivité d’une activitédéterminée (Zoomers, 1999). Ainsi, toute amélioration proposéedoit avoir essentiellement pour but de stabiliser le système de

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Page 103: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Le risque que supposel’innovation ne doit pas aggraver le degré de vulnérabilité

Les technologies fondées sur les pratiques existantes sont celles qui ont les plus grandes chances de succès

production au moyen des technologies existantes caractérisées parpeu de risques et peu d’intrants. Les autres ménages, qui ont accèsà des petites réserves de travail, de capital ou d’autres ressourcespouvant être utilisées pour accroître la productivité, sont moinsvulnérables et peuvent prendre des risques accrus.

Toute analyse des facteurs de risque liés à l’introduction detechnologies doit aller de pair avec une évaluation de la question de savoir si le degré de vulnérabilité ne sera pas aggravé. Il estindispensable, lorsque l’on cherche à faire adopter une technologiequelconque, de déterminer si le risque accroît le degré devulnérabilité. L’encadré 3.6 donne un exemple de la façon dontl’introduction d’une technologie inappropriée a aggravé lavulnérabilité des petits exploitants au Togo.

Celles qui ont le plus de chance de réussir sont les technologiesqui exploitent les pratiques que suivent les éleveurs pauvres et quin’introduisent que des changements modérés supposant peu decoûts. D’un autre côté, lorsque le développement de l’élevage exigede gros investissements, comme l’achat de vaches laitières ou desabris très onéreux, il faut prévoir un élément d’assurance, commecela a été le cas, par exemple, du projet de développement

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

83

Encadré 3.6: Un projet d’élevage de lapins au Togo

Au Togo, une communauté de petits paysans élevait des lapins dans le cadre d’un système de production intégré aux systèmes d’exploitationtraditionnels. Tout allait très bien jusqu’à ce qu’un agent de vulgarisationintroduise de nouvelles technologies.

■ Les fourrages locaux ont été remplacés par des aliments concentrésachetés.

■ Les clapiers ont été remplacés par des cages en grillage achetées.■ Les petites exploitations ont été agrandies.

Les éleveurs ont alors été exposés à des risques économiques accrus, lescoûts de production ayant augmenté, et l’idée qu’ils bénéficieraient d’un agrandissement de leurs exploitations ne s’est pas matérialisée enl’occurrence. Le projet s’est effondré et a compromis les moyens desubsistance que les exploitants tiraient de l’élevage de lapins.

Lukefahr et Preston (1999).

Page 104: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les ménages pauvrestendent à élever de plus petits animaux

Il faut réorienter les services de

manière à englober les petits animaux

communautaire de l’élevage et des laiteries au Bangladesh, où lecoût de l’assurance des animaux achetés a été incorporé à lacomposante microcrédit du projet.

Mettre l’accent sur les animaux auxquels les ménages pauvres ont accèsLes efforts de développement de l’élevage axé sur les espècesd’animaux que les exploitants possèdent déjà ont pour effet deréduire les risques car les intéressés savent comment opérer. D’unemanière générale, les ménages pauvres élèvent des petits animauxplutôt que des grands et, souvent, on constate une corrélation entrela pauvreté et la taille des animaux. Plus les ménages sont pauvreset plus importants sont les petits ruminants, la volaille ou lesabeilles, ce qui est encore plus évident dans le cas des femmes carces dernières ont souvent plus largement accès aux petits animaux.Les femmes jouent un rôle particulier dans le petit élevage devolaille car les poules et leur production sont généralementconsidérées comme faisant partie des avoirs dont les femmespeuvent disposer comme elles l’entendent.

Cependant, comme plusieurs auteurs (Chambers, 1997; de Haanet al., 2001) l’ont fait observer, les programmes de développementde l’élevage privilégient nettement les projets et les services axéssur les bovins (Encadré 3.7). Si ces services étaient réorientés demanière à englober aussi les petits animaux, ils pourraient avoir unimpact plus marqué sur les ménages pauvres.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

84

Encadré 3.7: Expérience tirée des projets de développement despetits exploitations laitières au Zimbabwe

L’une des principales hypothèses était que le développement des activitéslaitières au niveau des petits exploitants se traduirait par une plus grandeefficience économique et une plus grande équité. Cette hypothèse n’a pasété confirmée par l’expérience. Seuls les gros exploitants aisés ont pu selancer dans la production laitière car ils sont les seuls à pouvoir assumer lesrisques que suppose cette nouvelle entreprise. L’investissement financierqu’exige une exploitation laitière est au-delà des moyens et des possibilitésde crédit des exploitants ruraux pauvres, y compris les ménages dirigés pardes femmes, qui ne peuvent habituellement pas participer à de petitesexploitations laitières, même au niveau le plus modeste.

Hanyani-Mlambo, Sibanda et Oestergaard (1998).

Page 105: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les technologies doivent s’intégrer ausystème traditionneltout en accroissant les capacités

Exploiter les connaissances et les compétences traditionnellesÉtant donné les contraintes que le faible niveau d’instruction et lemanque d’accès aux connaissances et à l’information représententpour les éleveurs pauvres, des technologies axées sur les besoins despauvres doivent exploiter les connaissances et les compétencesexistantes. Les technologies améliorées qui s’adaptent aux systèmestraditionnels de production et qui ont pour effet d’accroître lescapacités ont plus de chance d’être adoptées et de donner desrésultats que des concepts de production tout à fait nouveaux. C’estce que démontre le modèle d’élevage de volaille en semi-libertéqu’ont adopté les femmes pauvres sans terre au Bangladesh(Encadré 3.8) (Fattah, 1999; Alam, 1997).

Exiger un capital minimum et faire appel à du matériel appropriéLe manque de capital, d’avoirs et de revenus monétaires est unesérieuse contrainte pour les éleveurs pauvres, de sorte que, si l’onveut qu’ils répondent aux besoins des pauvres, les technologies et lesservices doivent encourager des technologies qui n’exigent pas degros investissements ou des intrants onéreux. En outre, les servicesd’appui fournis pour encourager l’adoption de la technologiedoivent être accessibles et économiques. Cela vaut aussi pour lematériel. Par exemple, dans certains cas, l’insémination artificielle

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

85

Encadré 3.8: Modèle d’élevage de volaille en semi-liberté

“Ce modèle est fondé sur le fait qu’au Bangladesh, la plupart des femmes

rurales élèvent de la volaille. Les volatiles se nourrissent traditionnellement de

ce qu’ils trouvent autour de la maison, et ce qu’elles produisent, même si c’est

peu, appartient aux femmes et vient compléter leurs moyens de subsistance.

Le modèle d’élevage amélioré exploite les connaissances et les

compétences que les femmes ont déjà acquises. La technique est améliorée en

ce sens que ce modèle combine un petit nombre de poules pondeuses croisées

et des troupeaux traditionnels d’espèces locales et introduit un modèle

d’alimentation fondé sur la semi-liberté. Les poules mangent ce qu’elles

trouvent la moitié de la journée et reçoivent un complément d’aliments

achetés pour encourager la ponte. En outre, le modèle comporte un élément

santé et certaines femmes reçoivent une formation à la vaccination contre la

maladie de New Castle et la variole des oiseaux.”

Observations des auteurs.

Page 106: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les principalescontraintes sont

le manque d’accès à la terre et le manque

de main-d’œuvre

est une technologie appropriée, mais elle est fréquemment hors deportée pour les pauvres car le matériel et les intrants sont chers.Cependant, les prestataires de services ne sont pas intéressés par destechnologies moins coûteuses comme la technique de conservationde la semence à température ambiante et les stations de monte.

Un autre exemple de technologie inappropriée est décrit dansl’encadré 3.9.

Pallier la pénurie de fourrage et d’eauLes recherches ont débouché sur la mise au point d’un certainnombre d’options technologiques concernant la production defourrage par les petits exploitants ainsi qu’une utilisation plusefficace des résidus de récolte comme le fourrage. Dans bien des cas,cependant, rien ne porte à penser que les petits exploitants adoptentles nouvelles technologies de production de fourrage, essentielle-ment parce que les contraintes réelles sont le manque d’accès à laterre et le manque de main-d’œuvre. Lorsque des terres sontdisponibles, le facteur déterminant est le rendement économique dutravail selon qu’il est produit des cultures vivrières ou des alimentspour le bétail. L’expérience du Kenya montre clairement que, si les incitations économiques sont adéquates, les agriculteurscommenceront à cultiver du fourrage, comme de l’herbe Napier, àgrande échelle (Bebe, 2003). Dans l’altiplano bolivien, lesagriculteurs qui ont des débouchés réguliers et peuvent vendre à unprix rémunérateur les aliments qu’ils produisent pour les animauxont été nombreux à adopter de nouvelles méthodes de productionde fourrage dans le cadre d’un système complexe de rotation des

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

86

Encadré 3.9: Introduction de chèvres Boer parmi les petits exploitants

du Botswana

Au Botswana, il a été organisé un programme de subventions pour faciliter

l’introduction de boucs Boer parmi les petits exploitants. Une étude de la

production caprine dans le pays a ultérieurement fait apparaître que la

mortalité élevée parmi les produits de ces boucs était devenue un problème

majeur. L’aggravation du taux de mortalité avait été due à une mauvaise

gestion et à l’incapacité des éleveurs de fournir les conditions appropriées à

ces espèces, ce qui aurait coûté trop cher.

Mrema et Rannobe (2001).

Page 107: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les risques pour la santéanimale dépendent dutype de système deproduction

Il faut mettre au point,pour que les pauvrespuissent en bénéficier,des méthodes robusteset des médicaments quipuissent être conservés àla température ambianteet aient des effetsdurables

Les pauvres ont besoinsurtout d’espèces localesou d’espèces croiséesnon exotiques

cultures de pommes de terre, de quinoa et d’oignons ainsi que deluzerne et d’avoine dont ils tirent du foin (observations des auteurs).

Lorsque des terres sont disponibles et que les éleveurs peuventcompter sur des débouchés fiables et peuvent vendre à un prixrémunérateur les aliments qu’ils produisent pour les animaux, ilsadoptent facilement les nouvelles technologies de production defourrage.

S’attaquer aux problèmes liés aux maladies animalesPour les pauvres, les maladies animales constituent généralementune contrainte majeure. La mortalité élevée entraînée par lesparasites et les maladies infectieuses constitue, dans les paystropicaux en particulier, un sérieux obstacle. Ces problèmes sontétroitement liés au type de systèmes de production, les risques étantles plus grands pour les systèmes les plus intensifs. Au Kenya, parexemple, les taux de mortalité des bovins et des veaux sontbeaucoup plus élevés dans les systèmes intensifs d’alimentation enstalle des petits exploitants que dans les systèmes moins intensifs depacage en liberté. La plupart des technologies vétérinaires ont étéaxées sur les grands animaux et sont fondées sur des technologiesassez onéreuses qui exigent des installations de réfrigération et demultiples applications par an.

Il faut mettre au point, pour que les pauvres puissent enbénéficier, des méthodes préventives et curatives plus robustes etdes médicaments qui puissent être conservés à la températureambiante et qui aient des effets durables. Perry et al. (2001) ontessayé, en établissant parmi elles un ordre de priorité, d’identifierles principales maladies qui affectent les animaux qu’élèvent lespauvres et les méthodes les plus efficaces pour s’y attaquer.Néanmoins, bien que cet effort ait été couronné de succès, laprincipale conclusion qui s’est dégagée a été que les technologiespouvant être utilisées pour maîtriser ces maladies devaient êtrereplacées dans le contexte des systèmes d’exploitation en général.

Fournir des matériels génétiques appropriésLes éleveurs pauvres ont besoin d’animaux d’origines génétiquesappropriées. Les études publiées contiennent plusieurs exemplesde programmes d’introduction de nouvelles espèces incapables des’adapter aux conditions qui caractérisent les exploitations des

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

87

Page 108: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La plupart des servicesvétérinaires sont axés

sur les grands animaux

pauvres. L’encadré 3.9 décrit brièvement les résultats d’un telprogramme. Si les éleveurs aisés peuvent gérer avec succès desespèces exotiques, les pauvres ont généralement besoin d’espèceslocales ou d’espèces croisées non exotiques qui sont résistantes auxconditions locales et qui ont besoin de moins d’apports extérieurs.Cependant, les programmes gouvernementaux de promotion del’élevage privilégient souvent les espèces exotiques, les pouvoirspublics y voyant la “baguette magique” qui permettra d’obtenir uneaugmentation substantielle de la production.

Services zoosanitairesIl a souvent été accordé une priorité élevée aux services zoosanitaires,qui ont traditionnellement relevé de la responsabilité du secteurpublic, encore que l’on ait constaté récemment une tendance à unerépartition plus efficace des tâches entre les secteurs public et privédans la plupart des pays. Ce mouvement a été encouragé par lesajustements structurels dont il a été question au chapitre 2.

Comment satisfaire les besoinsLes éleveurs doivent, pour maintenir leurs animaux en bonnesanté, avoir accès à divers types de services zoosanitaires. Ils doivent,en particulier, avoir:

■ accès à des mesures préventives comme les vaccinations et lalutte contre les parasites internes et externes;

■ un approvisionnement fiable en produits pharmaceutiquesvétérinaires clés, particulièrement pour les petits animaux; et

■ une formation à l’administration des principaux produitspharmaceutiques et aux traitements.

La plupart des services vétérinaires publics mettent l’accent surles grands animaux, mais les études de cas réalisées dans l’Orissa etau Bangladesh offrent de bons exemples des possibilités qui existentd’organiser des systèmes de soins préventifs pour les petits animauxet la volaille qui peuvent avoir des effets significatifs sur les moyensde subsistance des éleveurs pauvres. À Koraput, dans l’État del’Orissa, les vaccinations et le déparasitage de la volaille et deschèvres ont donné de bons résultats et ont considérablement réduitles taux de mortalité. La vaccination des volatiles a égalementcontribué directement au succès du modèle d’élevage introduit au Bangladesh.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Page 109: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

D’une manière générale, les programmes de vaccination ont unimpact substantiel sur la production animale et sur les moyens desubsistance car ils réduisent la vulnérabilité et la nécessité detraitements coûteux ultérieurs. Les vaccinations contre les maladiesles plus contagieuses (Liste A de l’Office international desépizooties) sont planifiées au niveau central, et les campagnes devaccination englobent généralement les pauvres. Les services sontbeaucoup moins fiables, en revanche, dans le cas des maladiesmoins contagieuses (Liste B de l’Office international des épizooties),et les pauvres, fréquemment, n’y ont pas accès.

La nécessité de services de diagnostic varie selon lesconnaissances de chaque éleveur. Il arrive fréquemment que ceuxqui commencent seulement à élever des animaux ne sachent pascomment les soigner et s’en occuper et, pour ces derniers, desservices de diagnostic sont particulièrement très importants lorsqueleurs animaux tombent malades. Beaucoup d’éleveurs pauvres enmilieu urbain qui ont perdu leurs attaches avec leurs originesrurales sont dans ce cas. Pour une large part, les éleveurstraditionnels se suffisent à eux-mêmes dans ce domaine.

Subventionnement des services zoosanitaires et privatisationAu cours des dix dernières années, on a essayé d’établir unerépartition plus rationnelle des tâches entre les prestataires deservices zoosanitaires des secteurs public et privé, mais il subsiste deschevauchements considérables et même une concurrence déloyaleentre les vétérinaires publics et privés. Dans le sud de l’Asie, parexemple, les vétérinaires publics sont autorisés à faire payer lesservices qu’ils fournissent en dehors des heures normales de travailet n’ont donc guère de raison de se mettre à leur propre compte(Ahuja et al., 2000). En Afrique subsaharienne, la privatisation a été plus prononcée, et on estime qu’il existe aujourd’hui quelque2000 vétérinaires privés. Normalement, la privatisation commencedans les zones à fort potentiel mais, lorsque celles-ci sont saturées,on constate une pénétration graduelle dans les zones à faiblepotentiel, comme le montre la situation au Kenya (Owango et al.,1998) et au Maroc. Il est peu probable, toutefois, que des servicesvétérinaires privés du type classique soient économiquement viablespour de telles régions (Oruko, Upton et McLeod, 2000; Stem etSode, 1999; Ndungu, 2000). Des modèles mieux appropriés deprestation de services privés faisant appel à des assistants

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Les services de soinspréventifs pour des petits animauxdonnent de bonsrésultats

Le subventionnementdes services entrave la privatisation

La privatisationcommence dans les zones à fortpotentiel

Des modèles bonmarché de privatisationsont nécessaires dansles zones à faiblepotentiel

Page 110: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les coopératives peuvent permettre

aux producteurs pauvres de réaliser

des économies d’échelle

Élargir le champd’opérations des

agents zoosanitairescommunautaires

vétérinaires et à des pharmaciens existent actuellement danscertaines régions à faible potentiel.

Fourniture de services zoosanitaires par le biais de coopératives de commercialisationLes réformes politiques axées sur la privatisation ont créé au Kenyaun créneau intéressant pour les coopératives laitières qui souhaitentélargir leurs activités et combiner la commercialisation de lait etd’autres services. Certaines des petites coopératives se sont associéespour recruter des vétérinaires qui peuvent aussi permettre auxusagers qui ont besoin de leurs services de bénéficier d’économiesd’échelle.

Prestation de services communautairesLes agents zoosanitaires communautaires deviennent peu à peu unélément vital du système de prestation de services vétérinaires,spécialement dans des régions marginales où des servicesprofessionnels privés classiques pourraient ne pas être économique-ment viables. L’élargissement du champ d’opérations des agents etleur formation à des traitements plus divers ont amélioré les serviceszoosanitaires. De tels systèmes peuvent atteindre un double objectif:

■ les agents peuvent satisfaire de façon plus souple les besoinsdivers de la communauté et par conséquent être mieuxappuyés par celle-ci; et

■ le fait qu’ils peuvent grâce à leurs activités accroître leurrevenu constitue un encouragement pour les agents.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Encadré 3.10: Services vétérinaires fournis par les coopératives laitières

Lorsque l’exploitant a besoin de consulter un vétérinaire, il remet

habituellement une note au camionneur qui arrive, tôt le matin, pour chercher

le lait. Cette note est transmise au bureau de la coopérative et le vétérinaire

se rend sur place le même jour. Les services fournis sont payés par les usagers

au prix coûtant. Le montant dû est déduit en fin de mois du montant revenant

à l’intéressé pour ses ventes de lait. Les exploitants qui ne sont pas membres

des coopératives peuvent également obtenir les services du vétérinaire

moyennant un droit supplémentaire et un paiement en espèces.

Owango et al. (1998).

Page 111: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

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Problèmes de qualité des servicescommunautaires

Les agents zoosanitairescommunautairespeuvent fournir desservices de qualité

Des services de hautequalité exigent unsystème d’appuitechnique

Plusieurs parties prenantes se sont plaintes de la qualité desservices fournis par les agents zoosanitaires communautaires,particulièrement des pratiques consistant à dispenser des dosesinsuffisantes, ce qui peut se traduire par l’apparition d’élémentspathogènes résistants, ou des doses excessives, ce qui peut êtredangereux pour la consommation humaine.

Une étude des services fournis par les agents zoosanitairescommunautaires au Ghana et au Mozambique (Dasebu et al., 2003)montre, cependant, que ces agents dispensaient plus souvent queles agents des services de l’État une dose correcte d’acaricides et devermifuges, encore que ce pourcentage, de 50%, porte à penserqu’on peut faire mieux. Aussi bien les agents communautaires queceux des services de l’État étaient beaucoup plus précis que leséleveurs, lesquels dispensaient presque tous des doses insuffisantes.Habituellement, les problèmes de qualité sont dus au manque desystèmes d’appui technique appropriés (Stem et Sode, 1999),surtout dans le cas des systèmes publics (Catley, 1996).

Conditions préalables à des services communautaires de qualitéPlusieurs conditions doivent être remplies si l’on veut qu’il puisseêtre fourni des services communautaires de haute qualité.

Les systèmes communautaires peuvent fournir des services dehaute qualité si les conditions ci-après sont réunies:

■ les agents sont sélectionnés et appuyés par la communauté;■ en cas de besoin, les agents fournissent des services

zoosanitaires sous forme d’un emploi à temps partiel;■ une formation suffisante et appropriée et des cours de

recyclage sont organisés;■ les agents sont polyvalents et fournissent des services qui

peuvent accroître leur revenu;■ les usagers couvrent intégralement le coût des services

fournis et ceux-ci sont conçus sur une base commerciale;■ les approvisionnements en médicaments sont réguliers;■ il est assuré une supervision par des professionnels et un

contrôle de la qualité; et■ il est fait le nécessaire lorsque les usagers sont mécontents.

En élaborant un programme de formation efficace et reconnu et en dispensant une formation suffisante, les pouvoirs publicspourraient faciliter l’établissement de services communautaires debonne qualité.

Page 112: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les communautéspauvres peuvent

recruter et rémunérer pendant

de nombreusesannées des agents

zoosanitairescommunautaires

L’approche ne peutpas être qualifiée

de “communautaire”si elle est imposée

du sommet

L’équilibre entre les sexes exige une

approche ciblée

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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La distribution gratuite de médicaments à titre de secoursd’urgence en période de sécheresse ou d’épidémie compromet laviabilité des services vétérinaires ou paravétérinaires privés et est àéviter, ou bien doit être gérée par le biais des réseaux privésexistants, même si cela coûte plus cher.

Catley et Leyland (2001) ont analysé les tendances de laparticipation communautaire à la prestation des soins zoosanitaires.Les auteurs ont pris comme exemple deux interventionscommunautaires pour illustrer les différentes approches (Encadré 3.11).

Le premier exemple montre que les communautés pauvrespeuvent sélectionner des agents zoosanitaires communautaires et lesrémunérer pendant de nombreuses années si elles sont suffisammentassociées au processus et s’entendent d’emblée sur les problèmes àrésoudre et sur l’idée qui inspire le projet. Alors qu’il s’agissait dansun premier temps d’organiser une vaccination contre la peste bovine,cette approche communautaire a réussi à développer les servicescliniques de base. Plutôt que d’axer exclusivement ses efforts sur lamaîtrise d’une seule maladie, la communauté s’est attachée dès ledébut à la durabilité des services en tenant dûment compte durecouvrement de leur coût et de l’établissement de réseaux grâce à lacréation de liens entre les agents zoosanitaires communautaires et lesvétérinaires privés. Cependant, reste à voir si la durabilité à longterme de ces services pourra être garantie après que l’ONG qui lesappuie aura mis fin à son assistance.

Le second exemple est celui de l’application d’une approche qui,bien que dite “communautaire”, avait été imposée à partir dusommet, de sorte que la participation de la communauté auprogramme avait été éphémère.

Les aspects sexospécifiques des services vétérinairesLes ouvrages consultés abordent à peine la question du biais enfaveur des hommes qui caractérise les services vétérinaires. Enoutre, ils contiennent des hypothèses tout à fait contradictoiresquant à l’impact de ce biais sur les services communautaires.Certains prétendent que les agents zoosanitaires communautairessont généralement plus attentifs aux sexospécificités que lesvétérinaires classiques; d’autres soutiennent le contraire.Cependant, à l’intérieur de structures traditionnelles du pouvoirdominées par les hommes, il est extrêmement improbable qu’à eux

Page 113: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

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Encadré 3.11: Deux exemples de participation communautaire auxservices zoosanitaires

Développement des services vétérinaires primaires dans les régionsd’élevage extensif de la Corne de l’Afrique

Ce programme a eu recours à des agents zoosanitaires communautaires pours’attaquer à un certain nombre de problèmes spécifiques identifiés par leséleveurs, y compris la peste bovine. Les contacts avec les communautés étaientpris par l’intermédiaire des institutions locales. Un ordre de priorité parmi lesproblèmes identifiés a été établi, des solutions ont été recherchées et lesprogrammes ont été conçus en coopération avec les communautés au moyen deméthodes participatives. Les agents communautaires ont reçu une formationdans le cadre des programmes mais, par la suite, ont fourni leurs services auxéleveurs sur la base du recouvrement intégral des coûts. Les agents étaientexclusivement responsables devant la communauté et pouvaient consulter desvétérinaires privés s’ils avaient besoin d’un appui technique.

Le programme a débouché sur l’éradication de la peste bovine dans la régiond’Afar, en Éthiopie, ainsi que sur une diminution spectaculaire du nombre de casdans le sud du Soudan. La présence continue des agents zoosanitairesautonomes et l’appui constant que leur ont apporté les instances locales de la prise de décisions témoignent de l’impact social qu’a eu le programme.

Programme communautaire de lutte contre la mouche tsé-tsé au moyend’appâts et de pièges dans des villages du Kenya, de l’Ouganda, de la Zambie et du Zimbabwe

Pour l’exécution du programme, on avait décidé de prendre contact avec lescommunautés par le biais de l’administration locale ou du personnel spécialisé.Les communautés n’ont été associées ni à la détermination des priorités, ni à la conception du programme. Ce sont même des professionnels extérieurs aux communautés qui ont décidé où devaient être placés les pièges. Lescommunautés ont reçu gratuitement des médicaments vétérinaires, et lestravailleurs chargés de fabriquer les pièges étaient rémunérés par le programme.

Du point de vue technique, l’impact de l’intervention a été limité à uneréduction temporaire des populations de mouches. Bien que les résultats aientvarié d’une région à l’autre, la conception du programme s’est traduite par unegestion communautaire à long terme généralement assez mauvaise des appâtset des pièges.

Pour autant que l’on sache, les communautés n’ont pas, après la fin duprogramme, conservé de ressources, d’institutions ou de mécanismes dediffusion de l’information.

Page 114: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Il faut définir desobjectifs et des

stratégies appropriésen matière dereproduction

animale

Association deséleveurs pauvres

Les espèces localespossèdent des

caractéristiquesextrêmement

importantes pour lespauvres

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

94

seuls, des services communautaires puissent garantir qu’uneattention égale soit accordée aux besoins des hommes et desfemmes. Pour cela, il faut mettre en œuvre une approche ciblée,comme dans le cas des femmes chargées d’assurer la liaison avec lescommunautés dans le contexte du programme de développementintégré de l’élevage à Koraput, dans l’Orissa, des femmes chargéesde diffuser le nouveau système d’élevage de volaille au Bangladesh,ou des femmes qui ont été employées pour vacciner la volaillecontre la maladie de New Castle en Indonésie.

Services de reproductionLes éleveurs pauvres doivent avoir accès à des programmes dereproduction et à des matériels génétiques qui soient appropriésaux conditions particulières dans lesquelles ils opèrent, ainsi qu’auxmultiples rôles que les animaux jouent dans leurs moyens desubsistance. Ils doivent, par conséquent, être associés à la sélectiondes objectifs prioritaires et des critères, ainsi qu’à la conception desprogrammes de reproduction.

Les caractéristiques génétiques des espèces locales se sontdéveloppées sur des périodes de plusieurs siècles. À mesure que lessystèmes évoluent peu à peu pour passer d’une productionpolyvalente à un rôle plus étroit et plus spécialisé, les objectifs etstratégies en matière de reproduction animale doivent être adaptés.Des stratégies de croisements fondées sur des espèces exotiquesimportées de systèmes intensifs de production industrielle n’ontgénéralement pas donné de bons résultats pour les pauvres car cesespèces exigent des intrants substantiels.

L’accent devrait être mis sur l’amélioration génétique des espèceslocales. Celles-ci sont en effet résistantes aux conditions locales, qu’ils’agisse de sécheresses, de maladies ou d’altitude. Beaucoupd’espèces locales présentent des caractéristiques génétiquesremarquables qui revêtent une importance capitale pour lespauvres. On peut citer comme exemples les zébus en Afrique,naturellement résistants à des maladies transmises par des vecteurscomme la theilériose, les espèces de taureaux, de bovins et demoutons résistants à la trypanosomiase africaine, que l’on trouveprincipalement à l’ouest du continent, et les espèces de porcs qui, enChine et au Mexique, ont une remarquable capacité de digestiond’aliments fibreux locaux (Geerlings, Mathias et Köhler-Rollefson,2002; Cunningham, 1995).

Page 115: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Les technologiesmodernes de croisementdevraient être utiliséespour améliorer laproductivité des espèces locales

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Les stratégies de croisement traditionnelles qui prévalent encoreaujourd’hui ont été fondées surtout sur des caractéristiquesextérieures aux phénotypes plutôt que sur des résultats, les obtenteursne pouvant pas mesurer, évaluer et suivre les caractéristiquesproductives. Les programmes “modernes” d’hybridation n’ont,souvent, pas pris en considération l’importance des caractéristiquesdes espèces locales. Il faudra à l’avenir appliquer les technologiesmodernes d’hybridation pour améliorer la productivité des espèceslocales sans pour autant sacrifier les caractéristiques positives qu’ellesprésentent pour les pauvres. On pourra, pour cela, procéder à descroisements d’espèces ou bien introduire des programmes de sélectionplus efficaces des espèces locales.

Des croisements se traduisent rapidement par des améliorationsLe croisement d’espèces améliore rapidement la productivité desanimaux. Les animaux croisés peuvent faire face aux conditionslocales et aider les éleveurs pauvres à réduire la pauvreté si lesméthodes de gestion, les ressources et la situation des marchés sontfavorables. Les croisements ont été largement utilisés, partout dansle monde, pour accroître la production laitière, y compris au niveaudes petites exploitations, dans des pays comme le Kenya et l’Inde,ainsi que dans beaucoup de pays d’Amérique latine. Cette méthodea été utilisée avec succès aussi pour obtenir des espèces de volaille quiprésentent des avantages pour les pauvres (Encadré 3.12).

Encadré 3.12: L’élevage de poules Sonali par les femmes pauvressans terre au Bangladesh

La poule Sonali est un croisement entre la poule égyptienne Fayuomi et le coqrouge du Rhode Island. La poule Sonali est “faite sur mesure” pour être élevéepar les ménages pauvres au Bangladesh. Dans ce pays, les femmes pauvressans terre avaient essayé différentes espèces croisées pour en trouver une quiconjugue la ponte la plus féconde, le taux de mortalité le plus faible et le profitunitaire le plus élevé dans des conditions d’élevage en semi-liberté et lessystèmes de gestion préférés localement. Les éleveuses ont découvert que lecoq rouge du Rhode Island transmet la caractéristique qui accroît la pontetandis que la poule égyptienne Fayuomi transmet également l’instinct de larecherche de nourriture. De plus, la taille et la couleur de la poule Sonali sonttrès prisées de sorte qu’aussi bien la viande que les œufs se vendent bien surles marchés locaux.

Rahman et al. (1997).

Page 116: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

L’insémination artificielle doit être

appuyée par une bonne infrastructure

Beaucoup de laiteries sont

revenues àl’insémination

naturelle

Des centres de monte peuvent

être une formule appropriée dans

les régions reculées

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

96

Un croisement réussi dépend de la qualité du matériel génétiqueLes petits exploitants ont habituellement très peu de vacheslaitières, parfois pas plus d’une ou deux. Aussi ont-ils recours, dansde nombreuses régions, aux services d’insémination artificielleofferts par l’État, les organisations de producteurs ou lescoopératives laitières. L’insémination artificielle doit être appuyéepar une infrastructure solide, des communications rapides et unegestion de haute qualité. Elle se prête surtout aux régions deproduction intensive dotées d’une bonne infrastructure, d’unesolide organisation et de services d’appui adéquats. Les coopérativeslaitières fournissent souvent un appui technique pourl’insémination artificielle et la semence des reproducteurs. AuKenya, ces services sont de plus en plus fréquemment offerts pardes sociétés internationales d’insémination artificielle.

Pour beaucoup de laiteries, cependant, l’insémination artificiellen’a donné que des résultats mitigés et une grande proportiond’entre elles reviennent à l’insémination naturelle du fait de faiblestaux de fécondité ou de l’inadéquation des matériels génétiques.Ainsi, les exploitants sont disposés à payer plus cher les services demonte naturelle. Au Kenya, le nombre d’inséminations a chuté dansdes proportions considérables après la privatisation et l’introductionde systèmes de recouvrement des coûts (Bebe, 2003). En Bolivie, leslaiteries hésitent beaucoup à avoir recours à l’inséminationartificielle car les taux de fécondité ont été peu élevés et les vachescroisées ont du mal à s’adapter au mal d’altitude. Ainsi, les servicesd’insémination artificielle doivent continuer d’être subventionnés,même par les coopératives en Inde (Banque mondiale, 1999), et lesubventionnement peut également contribuer à améliorer la qualitédes services.

Des centres villageois de monte pourraient être une autreformule intéressante dans les régions où le manque d’infrastructureou de communications empêche d’avoir recours aux méthodesd’insémination artificielle. De tels centres ont été créés sur une basecommerciale dans plusieurs pays, mais ils comportent le risque defaciliter la propagation de maladies. Une attention particulière doit,par conséquent, être accordée aux précautions sanitaires.

L’élevage d’espèces améliorées de volaille suppose unapprovisionnement régulier en animaux de remplacement. Utiliserdes volailles croisées avec des espèces exotiques introduit unedépendance critique à l’égard d’un approvisionnement centralisé

Page 117: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

L’élevage de variétésaméliorées de volaille suppose unapprovisionnementrégulier en animaux de remplacement

Le croisement peutdiluer d’importantesressources génétiqueslocales

Association descommunautés à la gestion des espèces locales

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d’animaux originels ou de poussins d’un jour. La viabilité d’un tel système dépend de l’efficacité du système de distribution. Lesystème peut donner de bons résultats dans des régions à fortedensité de population dotées d’une infrastructure adéquate, maisentraînera inévitablement des problèmes dans les régions moinspeuplées où le manque d’infrastructure entrave le système dedistribution. Par exemple, la transposition du système d’élevage devolaille introduit au Bangladesh dans des communautés plusdispersées du Malawi a soulevé précisément de tels problèmes.

Stratégies appropriées pour les espèces localesLes stratégies de croisement avec des espèces exotiques ont desinconvénients manifestes. En particulier, elles risquent de diluer lesressources génétiques spéciales des espèces locales et ainsi susciterdes problèmes pour les exploitants pauvres en ressources. Ilimporte par conséquent de mettre au point une plus large gammede systèmes communautaires de croisement par sélection avec desespèces locales. Geerlings, Mathias et Köhler-Rollefson (2002)offrent cinq études de cas qui illustrent comment les programmesde croisement qui entretiennent et développent les espèces localespeuvent améliorer les moyens de subsistance des ruraux pauvres.

L’accent doit être mis sur l’association des communautésd’éleveurs à la gestion des ressources génétiques locales. Un modèleprometteur est le système de reproduction nucléaire ouvert(Encadré 3.13), qui a donné d’excellents résultats en Côte d’Ivoireavec les moutons locaux (FAO, 2002) et qui est actuellement

Encadré 3.13: Reproduction nucléaire

Les animaux génétiquement les mieux dotés sont rassemblés par sélection

parmi les troupeaux locaux pour constituer un noyau d’animaux d’élite,

souvent dans un élevage d’État. Il est établi un programme efficace de

dépistage et de sélection, et les meilleurs mâles sont conservés comme

reproducteurs pour le troupeau “noyau” et les autres sont distribués aux

éleveurs ayant fourni les animaux ou utilisés par les organismes locaux

d’insémination artificielle. Le troupeau “noyau” peut rester ouvert aux

meilleures femelles des troupeaux originels. Des tests de performance sont

réalisés sur l’ensemble de la population. Smith (1988).

Page 118: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Un approvisionnementrégulier en intrants, y

compris en crédit, crée des possibilités

nouvelles

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

98

introduit par la Banque mondiale en Inde pour les moutons et lesbuffles, et au Ghana pour les chèvres, les moutons et les porcs. Onne connaît pas encore les résultats de ces deux derniersprogrammes mais il semble, jusqu’à présent, que les généticiens del’État accordent une attention extraordinaire aux élevages d’État et aux troupeaux d’élite, mais négligent l’approvisionnement destroupeaux au niveau des villages.

Accès aux intrantsLe manque d’intrants fiables entrave souvent le développement de l’élevage. Les intrants nécessaires varient selon le système deproduction, mais peuvent généralement être rangés en quatrecatégories:

■ médicaments à usage vétérinaire et vaccins;■ suppléments alimentaires;■ matériels génétiques (semence pour l’insémination

artificielle, espèces originelles, poussins d’un jour, etc.); et■ outillage et matériel.

Dans bien des pays, le processus de libéralisation a facilité l’accèsaux intrants lorsque les entreprises privées ont commencé à lescommercialiser. Cependant, ces entreprises ont eu tendance àconcentrer leurs efforts sur les régions bien intégrées, tandis que,pour les éleveurs qui se trouvent dans les régions plus reculées oùl’infrastructure est défaillante, avoir accès aux intrants demeuredifficile et cher. Des partenariats public-privé, c’est-à-dire la sous-traitance de la distribution par les fournisseurs et producteursprivés ou organisations communautaires, peuvent être un moyend’améliorer l’accès aux intrants dans les régions rurales ainsi qued’en réduire le coût unitaire de manutention et de transport.

Un autre aspect est que les intrants doivent être abordables.Habituellement, les éleveurs pauvres n’ont pas les moyensd’adopter des technologies qui exigent des intrants onéreux. Desservices intégrés garantissant un approvisionnement fiable enintrants, y compris en microcrédit, pourraient offrir aux éleveursdes possibilités nouvelles.

Page 119: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Les pauvres n’ontpresque pas accès aux services d’épargne et de crédit

Les ruraux utilisent leurs troupeaux commeune banque, mais lespauvres ont moinsd’animaux sur lesquels ils puissent faire fond

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Élargir l’accès aux services financiers et aux marchés

L’accès aux services financiers est une condition préalable au développement de l’élevageSi l’on veut accroître la production des éleveurs pauvres, il importede mettre en place des mécanismes appropriés d’épargne et decrédit qui tiennent compte des besoins et des contraintes spécifiquesdes pauvres. Néanmoins, il est souvent difficile en milieu rural demettre l’épargne à l’abri; les taux d’intérêt sur les dépôts sontsouvent moindres que ceux des produits par l’élevage et,fréquemment, les pauvres ne peuvent pas obtenir de prêts desétablissements bancaires classiques. Les banques s’intéressentsurtout aux prêts de plus grande importance et exigent unegarantie que les pauvres ne peuvent pas offrir. Normalement, lesanimaux ne sont pas acceptés comme garantie et les femmes setrouvent souvent dans une situation particulièrement désavantagée.

Les ruraux utilisent fréquemment leurs troupeaux comme unesorte de banque d’investissement. Les animaux sont en effet unavoir aisément réalisable. Ils sont un investissement, offrent uneassurance, peuvent être utilisés pour couvrir des dépensesimportantes, comme l’achat d’intrants agricoles et peuvent servir demonnaie d’échange en période de crise. Si l’on veut que les éleveursruraux puissent utiliser leurs animaux de manière plus productive,il faudra trouver d’autres moyens de garantir leurs bénéfices,d’investir et de couvrir leurs frais. En outre, les pauvres ont moinsd’animaux sur lesquels ils puissent faire fond s’il surgit une crise.Faute de tels avoirs productifs, ils sont plus vulnérables auxchangements et n’ont aucune possibilité d’investir dans de nouvellesactivités. Pour améliorer la productivité de l’élevage, il faut toujoursfaire un apport en capital et avoir accès au crédit, et ce sont donc làdeux conditions préalables qui devront être remplies pour que lesplus pauvres puissent investir dans l’élevage.

Mécanismes d’épargne et de créditDéveloppement des marchés financiers rurauxLes pays en développement ont fait l’essai de différents modèlespour améliorer la production agricole par le biais de mécanismes decrédit. Depuis 20 ou 30 ans, le crédit à la production agricole arevêtu la forme de prêts pour l’achat des intrants nécessaires aux

Page 120: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les systèmes de crédit dirigé pour

les activités agricolesn’ont pas été viables

et ont bénéficié surtout aux

exploitants les plus aisés

Il faut améliorer la viabilité des

marchés financiersruraux

L’accès au crédit est très apprécié

par les pauvres

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

100

cultures de plein champ. Les crédits ont été distribués parl’entremise du système bancaire d’État (banques commercialesnationales) ou, à tout du moins, ont été étroitement réglementés etlourdement subventionnés par les pouvoirs publics.

Cette modalité de financement de la production rurale estdevenue politisée et est extrêmement fragile. Il a été accordébeaucoup de prêts, mais les sommes les plus importantes n’ontatteint que les exploitants les plus aisés et les plus puissants. D’unemanière générale, les taux de remboursement ont été très faibles.Au Bangladesh, pour 1999 et 2000, les banques commercialesnationales ont signalé un taux de remboursement d’environ 20%(Mallorie, 2001). Les taux d’intérêt ont été maintenus par dessubventions à des niveaux inférieurs aux taux commerciaux, ce qui a rendu les prêts d’autant plus intéressants pour les riches et puissants. Les décisions concernant l’octroi des prêts onthabituellement été prises en fonction de l’influence politique desdemandeurs plutôt que sur la base de critères financiers. Lessubventions ont contribué à compromettre encore plus la viabilitédu système et ont simultanément entravé le développement ducrédit commercial. Pendant les années 90, chacun s’est accordé àreconnaître que les crédits dirigés devraient être écartés pourfaciliter le développement de ce que l’on appelle généralement les“marchés financiers ruraux”. Il a fallu pour cela réformer lespolitiques en vigueur afin d’éliminer la réglementation et lecontrôle exercés par les pouvoirs publics ainsi que les subventions.

Le tableau 3.1 fait apparaître les principales différences entre lecrédit dirigé et les marchés ruraux. L’objectif d’un marché financierrural est d’offrir aux communautés rurales une gamme de servicesfinanciers viables qui répondent à leurs besoins d’épargne,d’assurance et de crédit. Les pays se sont lancés sur cette voie à desdegrés divers mais ne se sont pas toujours montrés égalementdisposés à développer les marchés financiers ruraux.

Crédit et vulnérabilitéL’accès au crédit est souvent très apprécié par les éleveurs pauvres quiy ont souvent recours pour améliorer leurs moyens de subsistance.Pour les établissements de crédit, toutefois, la vulnérabilité despauvres pose un problème particulier. Souvent, les plus pauvres despauvres s’abstiennent de contracter des emprunts, craignant de nepouvoir les rembourser. C’est ce qu’illustre fort bien un exemple tiré

Page 121: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Le crédit suppose un risque élevé

101

de l’étude réalisée dans l’Orissa (Encadré 3.14). Cette crainte est trèsréelle car les pauvres n’ont pas de ressources sur lesquelles ils puissentfaire fond pour amortir un choc ou pour offrir une garantie. Lecrédit, pour apprécié qu’il puisse être, peut créer une dépendance etplonger les familles pauvres dans une situation d’endettement dont

Marchés ruraux

Réduire les risques et les coûts de transaction

Les ressources intermédiairessont plus efficaces

Les emprunteurs et lesdéposants sont des clients qui choisissent des produits

Petites subventions, maisseulement pour la mise enplace des institutions

Création d’institutionsindépendantes

Principalement dépôts àcaractère volontaire

Conçus à l’intention de la direction

Préoccupation majeure

Résultats des institutionsfinancières

Mallorie (2001).

Caractéristiques

Définition duproblème

Rôle des marchésfinanciers

Rôle attribué auxusagers

Subventions

Source des fonds

Systèmesd’informationconnexes

Viabilité

Critères d’évaluation

Crédit dirigé

Créer un marché qui fonctionne mieux

Promouvoir l’adoption denouvelles technologies

Stimuler la production

Mettre en œuvre les plans de l’État

Aider les pauvres (en définitive,cependant, la majeure partie ducrédit dirigé et subventionnéprofite aux riches)

Les emprunteurs sont desbénéficiaires sélectionnés parciblage

Subventionnement des prêts par le biais des taux d’intérêt et de la couverture des prêtsdéfaillants

Création d’une dépendance àl’égard des subventions

Gouvernement et donateurs

Conçus à l’intention des donateurs

Essentiellement ignorée

Impact du crédit sur lesbénéficiaires

Tableau 3.1: Principales caractéristiques de deux systèmes financiers

Page 122: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La fraude et lamauvaise gestion

peuventcompromettre les moyens de

subsistance despauvres

Transparence et obligation

redditionnelle sontdes caractéristiques

importantes

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

102

elles ne peuvent sortir. Il y a bien des exemples de systèmes de créditqui ont eu un impact négatif sur les familles. Du fait du risque demortalité des animaux, le crédit pour l’investissement dans l’élevageest plus aléatoire. Il est par conséquent essentiel que les créditsaccordés aux pauvres soient gérables et répondent aux besoinsspécifiques de chaque emprunteur. Simultanément, il faut incorporeraux systèmes de crédit des mécanismes de réduction des risques,comme des polices d’assurance sur les animaux et l’accès à desservices d’appui technique. Beaucoup d’éleveurs pauvres ont vucomment la fraude et la mauvaise gestion, au sein des établissementsde crédit, peuvent menacer leurs moyens de subsistance déjà fragiles(Mukherjee, Jahan et Akhter, 2002). Il faut les mettre à l’abri de telsproblèmes. Transparence et obligation redditionnelle sont parconséquent des caractéristiques importantes des systèmes financiersqui peuvent être utiles aux pauvres. Si l’on veut que les servicesfinanciers profitent aux pauvres, il est indispensable d’établir desdirectives régissant leurs prestations.

Un système d’épargne et de crédit adapté aux besoins des éleveurspauvres doit:

■ être aisément accessible;■ être facilement compris;■ être accessible aux femmes;■ offrir un libre choix parmi les investissements;■ être viable:

– percevoir des taux d’intérêt suffisants pour couvrirl’intégralité des coûts;

– recouvrer les prêts;■ fournir une gamme de services financiers à un niveau

approprié:– épargne;– prêts;– assurance;

■ être transparent et responsable devant les usagers; et■ être lié à des services d’appui technique appropriés.

À l’heure actuelle, les éleveurs pauvres peuvent obtenir des servicesfinanciers de différentes façons:

■ systèmes non structurés d’épargne et de crédit;■ prêts en nature d’animaux (systèmes d’échanges);

Page 123: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Emprunter de l’argent àdes voisins et à desproches est parfois laplus importante sourcede capital

Prêteurs d’argentprofessionnels

103

■ microcrédit: épargne et prêts en groupe par l’entremised’ONG; et

■ prêts bancaires par le biais de l’appartenance à uneorganisation de producteurs.

Pour les pauvres, le crédit non structuré constitue la principale source de capitalPartout dans le monde, pour la majorité des pauvres, les prêts aucrédit accordés sans formalités par des voisins, des proches, desprêteurs d’argent professionnels, des fournisseurs d’intrants, descommerçants et des mutuelles informelles d’épargne et de créditcomme les groupes d’auto-assistance constituent les principalessources de crédit. Lorsqu’une crise ou des besoins particulierssurgissent, les pauvres qui doivent emprunter se tournent vers dessources financières informelles.

Lorsque les besoins sont pressants, emprunter de l’argent à desvoisins et à des proches est souvent la première source de capitalet est pour la communauté une façon de faire face à la pauvreté etaux crises. Il ne faut pas sous-estimer l’utilité de tels arrangements,mais ceux-ci ont leurs limites. Premièrement, ils sont utiliséssurtout en cas d’urgence et rarement pour des investissementsproductifs. Deuxièmement, beaucoup de communautés ruralessont pauvres et leurs capacités financières sont, par conséquent,réduites.

Les pauvres ont recours aux prêteurs d’argent professionnelssurtout en cas d’urgence, mais aussi, parfois, pour obtenir l’argentnécessaire pour rembourser les prêts accordés par des institutionsdu secteur structuré. Les taux d’intérêt sont apparemment trèsélevés et il se peut que tel soit parfois le cas, mais il semble, de plusen plus, que les taux soient fort raisonnables compte tenu desrisques et des coûts de transaction. Les fournisseurs d’intrants et les commerçants peuvent également être dans l’immédiat unesource de crédit, spécialement s’il s’agit d’une vente d’intrants àtempérament. Cela est peut-être une des sources non structuréesde crédit les plus efficaces qui soit.

Les mutuelles informelles d’épargne et de crédit mentionnéesdans certains ouvrages sont sans doute plus généralisées et plusimportantes parmi les ruraux pauvres que les études ne ledonneraient à penser. Ces mutuelles sont notamment fondées surle principe d’une épargne commune et de la rotation de petits

Page 124: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les mutuellesinformelles d’épargne

et de crédit jouentprobablement un

rôle important pour beaucoup

de pauvres

“Passage du relais”

Il se pose des problèmes

de viabilité dus aumanque de

compétences de gestion et à des

débouchés limités

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

104

prêts prélevés sur des fonds communs. Elles perçoivent des tauxd’intérêt suffisants pour établir un fonds autorenouvelable. Lesprêts, habituellement très modestes, sont souvent utilisés pour desinvestissements dans l’élevage. Les mutuelles informelles de créditdoivent particulièrement veiller à assurer leur viabilité car elles ontrarement un capital suffisant pour résister à une crise provoquéepar exemple par des cas de fraude ou de nombreux prêtsdéfaillants. De plus, le niveau d’instruction de leurs membres estparfois si faible qu’ils peuvent ne pas savoir comment détecter lafraude et mettre leurs fonds à l’abri. Les groupes d’auto-assistancede l’Orissa en sont un exemple (Encadré 3.14).

Les prêts en nature sous forme d’animaux constituent une réaction auxdéfaillances des marchés financiersFaute de services financiers ruraux, il est apparu des programmesde crédit en nature, qui sont considérés comme des arrangementstemporaires tendant à faire face aux problèmes immédiats desagriculteurs pauvres confrontés à une situation telle qu’il n’y a pas d’autres solutions. Ces programmes ne sont cependant pasconsidérés comme une formule immédiate.

Certains programmes offrent des prêts en nature qui revêtentla forme de la fourniture contractuelle d’animaux reproducteursaux éleveurs pauvres. Normalement, les éleveurs sont censésrembourser les prêts accordés par le programme au moyen desfemelles que les reproducteurs ont mis bas. Cette pratique estparfois appelée le “passage du relais” car les jeunes animaux quiservent à rembourser les prêts sont distribués à de nouveauxéleveurs. Ce modèle a été encouragé surtout par HeiferInternational et d’autres ONG internationales. Il est utilisé dans lecontexte d’opérations très diverses, allant d’exploitationsd’élevage de génisses à des élevages de lapins ou de poulets. Unedistribution de lapins inspirée de ce modèle, par exemple, a donnéde forts bons résultats au Cameroun. Cette approche a étéinitialement lancée par un petit groupe d’éleveurs novateursappuyés par des services techniques et de gestion et 2 500 famillesen bénéficient actuellement (Lukefahr et Preston, 1999). La plusconnue des initiatives de ce type consiste en programmes de prêtsdans le cadre desquels il a été distribué aux éleveurs pauvres desfemelles productrices de lait, surtout des génisses, à charge pourles éleveurs de rembourser le prêt au moyen de la première

Page 125: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

105

Encadré 3.14: Groupes d’auto-assistance dans la régiond’intervention du programme de développement intégré de l’élevage à Koraput, dans l’Orissa

Étant donné le rôle critique que le crédit joue dans la vie quotidienne despauvres dans la région du projet, l’une des principales interventions a consistéà créer des groupes d’auto-assistance parmi les femmes et, à un moindredegré, parmi les hommes. Les groupes d’auto-assistance permettent d’obtenirun crédit grâce aux petites économies hebdomadaires de leurs membres et,plus récemment, à une subvention du programme de développement intégréde l’élevage. Les membres des groupes peuvent, grâce aux fonds accumulés,contracter des emprunts à un taux d’intérêt mensuel de 24%. Souvent, lesprêts sont utilisés pour des investissements dans l’élevage. Les membres desgroupes d’auto-assistance sont très pauvres, et ce nouveau mécanisme decrédit a permis aux femmes d’améliorer leur niveau de vie et leur conditionsociale et d’acquérir une plus grande confiance en soi.

Cependant, ne pouvant pas faire d’économies, les plus pauvres des pauvresrestent exclus de ce système. En outre, la fréquence et le montant des prêtsvarient, et certains membres des groupes tendent à emprunter plus souventdes sommes plus importantes. Dans plusieurs cas, ce sont les agents chargésd’assurer la liaison avec la communauté et les grands propriétaires terriens quiont contracté les prêts les plus substantiels.

Il ressort du profil des prêts accordés dans les villages étudiés que plus ilssont au-dessus du seuil de pauvreté et plus les membres des groupes ont deschances de voir leurs investissements couronnés de succès. Toutefois, bien qu’ilparaisse que les capitaux disponibles aient bénéficié surtout aux plus aisésd’entre eux, cela ne s’est pas nécessairement fait aux dépens des membres pluspauvres. Il est probablement plus proche de la vérité de dire que les membresles plus pauvres des groupes hésitent davantage à contracter des emprunts.

Il se pose néanmoins une question importante: Combien de temps celapourra-t-il continuer sans l’intervention d’un organe de supervision externe oud’un système plus formel de garanties? Il n’existe actuellement aucune règleselon laquelle il devrait exister une correspondance entre le montant apportépar un membre sous forme d’épargne et celui de l’emprunt qu’il peutcontracter. Le système semble fonctionner car la subvention accordée par leprogramme de développement intégré de l’élevage encourage beaucoup leremboursement des prêts. Le mécanisme n’a pas encore eu à résister au chocque supposeraient des emprunts défaillants mais, comme aucun mécanisme desauvegarde n’a été mis en place, sa viabilité est douteuse.

Étude de cas de l’Orissa.

Page 126: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Au Bangladesh, 8 millions de ménages

ruraux pauvres utilisent le système

des microcrédits des ONG

La viabilité financière est très bonne et

le taux deremboursement

dépasse 90%

Des enveloppes de services combinent

des prêts et des services techniques

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

106

génisse née, laquelle est alors donnée à un nouvel éleveur.Cependant, la viabilité de ces programmes a été problématique.Dans la plupart des cas, le taux de remboursement sous forme degénisses a été peu élevé. Les participants se heurtent à un doubleproblème qui tient aux faibles taux de fécondité et aux taux élevésde mortalité parmi les vaches et les génisses. Dans le cas duprogramme de développement des petites exploitations laitières àTanga, 20% seulement des éleveurs avaient, sept ans après le débutdu programme, remboursé leurs prêts sous forme de génisses(Afifi-Affat, 1998). Les problèmes de viabilité tiennent notammentau fait que les exploitants participants n’ont guère de compétencesde gestion et n’ont qu’un accès limité aux marchés pour pouvoirvendre leur lait dans les régions les plus isolées.

Ce système donne de meilleurs résultats lorsque les débouchéset un appui technique sont assurés et que la distribution estorganisée par un groupe solidement structuré qui garantit que lesbénéficiaires donneront effectivement le premier animal né à unautre membre du groupe.

Les systèmes de microcrédits mettent des capitaux à la disposition des ménages pauvresAu Bangladesh, il a été accordé beaucoup d’attention à lafourniture de microcrédits aux pauvres par l’entremise des ONG.Ce secteur a enregistré d’excellents résultats à cet égard. Onestime que 8 millions de ménages ruraux pauvres, dans ce pays,utilisent le système des microcrédits des ONG. Une très forteproportion des prêts est axée spécifiquement sur les femmespauvres sans terre, et l’on estime que 20% des prêts sont investisdans l’élevage (Mallorie, 2001). La viabilité financière de cessystèmes est excellente. Les taux de remboursement dépassentsouvent 90%. Comme dans le cas des crédits en nature, les prêts sont accordés à des groupes qui en sont responsablescollectivement, et le système repose sur la pression collective dugroupe. Certaines ONG s’occupent exclusivement de microprêts,tandis que d’autres fournissent une enveloppe comportant nonseulement un microcrédit mais aussi des services de formation etdes services techniques. Les services techniques sont parfoisnégligés dans ces enveloppes car les ONG tendent à mettrel’accent sur la fourniture de crédits et le recouvrement des prêts(Mukherjee, Jahan et Akhter, 2002; Lund et al., 2002). Il serait

Page 127: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Pour les prêts, la priorité est souvent accordée aux femmes

107

peut-être plus approprié de confier la partie du prêt destinée auxcontrats de services techniques à un agent sélectionné par lebénéficiaire du prêt, car cela pourrait améliorer les résultats etréduire la dépendance à l’égard de l’ONG qui fournit lesmicrocrédits.

Les prêts sont assez modestes et habituellement de courtedurée, et doivent être remboursés par versements hebdomadairesou bimensuels. Les taux d’intérêt perçus par les ONG varient,mais un taux forfaitaire de 15% est usuel. Selon les modalités dedistribution et de remboursement, le taux effectif d’intérêtreprésente habituellement de 30 à 45% par an. Beaucoup dessystèmes accordent une priorité élevée aux femmes car, parmi cesdernières, les taux de remboursement sont nettement plus élevésque pour les hommes. Il est appliqué des procédures de sélection,

Encadré 3.15: La réussite du système de microcrédits pour l’élevagede volaille au Bangladesh

Amena Begum, qui habite dans le village de Gagralasker, dans le Jinaigati, a

divorcé il y a deux ans et a traversé une période très difficile, ayant deux enfants

à charge mais aucune source de revenus. Ses frères l’ont accueillie mais elle

n’aimait pas vivre de la charité de ses frères et cherchait désespérément un

travail indépendant. C’est alors que l’ONG PROSHIKA s’est mise en rapport avec

elle, et celle-ci s’est associée au groupe de crédit du village. Elle a contracté un

prêt modique pour acheter des poussins d’un jour, construire un abri et acheter

du matériel, conservant le reste de l’argent pour couvrir les frais de l’exploitation

et les remboursements mensuels.

Grâce à son élevage de poussins, Amena a économisé un peu d’argent pour

faire face aux besoins de la famille. Elle compte qu’après avoir élevé neuf autres

couvées, elle pourra rembourser le prêt, y compris les intérêts, en une période

de deux ans. Elle pense pouvoir être tout à fait autonome à la fin de la troisième

année.

Amena dit que l’élevage de poussins lui permet de subvenir à ses besoins et

de payer l’éducation de ses enfants. Elle a utilisé une partie de l’argent qu’elle

a économisé pour acheter des volailles locales. Elle a également construit une

petite maison à toit en chaume sur le lopin de terre qu’elle a hérité de son père.

Amena est certaine du succès de son exploitation de poussins et compte bien

améliorer sa situation économique et sociale.Étude de cas au Bangladesh.

Page 128: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les plus pauvres ne peuvent pas

bénéficier des systèmes de microcrédits

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

108

spécialement dans le cas des systèmes qui comportent des servicesde formation ou des services techniques. Tel est généralement lecas des services spéciaux à l’élevage et les pauvres eux-mêmesn’interviennent aucunement dans la conception des enveloppes deservices ou les procédures de sélection.

Bien que ces systèmes de crédit aient remarquablement réussi à atteindre les familles pauvres, les indigents – c’est-à-dire latranche de 10 à 15% la plus pauvre de la population – ne peuventpas bénéficier des systèmes de microcrédits, notamment parce que beaucoup de ces familles craignent le risque qu’un empruntpeut représenter. D’autres essaient, mais abandonnent, ne pouvant rembourser les prêts. Certains des plus pauvres seplaignent de ce que le personnel des ONG soit peu affable et lesharcèle (Mukherjee, Jahan et Akhter, 2002). Les raisons pourlesquelles les intéressés cessent d’utiliser le système sont encoremal comprises, et il n’a pas encore été élaboré de stratégiesappropriées pour atteindre les groupes les plus pauvres.

Prêts bancaires par le biais de l’appartenance à desorganisations de producteursDans certains cas, des organisations de producteurs bien établisayant un capital solide, comme des immeubles ou du matériel,peuvent offrir une garantie pour leurs membres et les aider àobtenir des prêts bancaires pour qu’ils puissent investir dans desanimaux. Un exemple type est celui des coopératives laitières qui fournissent des prêts aux petits éleveurs qui en sont membreset qui utilisent les prêts pour investir dans des vaches laitières oudes bufflesses.

Cette possibilité montre à quel point les organisations deproducteurs peuvent être utiles en permettant aux petits éleveursd’obtenir des services qui auraient autrement été hors de portée.Toutefois, le succès de cette approche dépend de la propriétévéritable de l’organisation, de l’influence des producteurs et de latransparence des programmes de prêt. Il n’arrive que tropsouvent, en effet, que les coopératives ne soient pas véritablementdétenues par les producteurs et que les prêts ressemblent à descrédits dirigés. Un exemple d’échec est décrit dans l’étude réaliséedans l’Orissa (Encadré 3.16), lorsqu’un groupe de ménagesappartenant à une coopérative laitière féminine a reçu des prêtspour acheter des bufflesses.

Page 129: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

109

Cet exemple démontre de différentes façons ce qui peutadvenir lorsque les principes esquissés au début de cette section nesont pas respectés.

■ Les participantes ne pouvaient opter que pour des vaches oudes bufflesses croisées et ont choisi des bufflesses, considérantqu’il serait difficile d’élever les vaches.

Encadré 3.16: Prêts aux sociétés laitières féminines dans l’Orissa

La coopérative de producteurs de lait de Dhobapalli et le programmede développement de l’industrie laitière et de réduction de la pauvretéEn outre, 13 familles – toutes sans terre – ont reçu des prêts pour acheter des

vaches laitières. Pendant la première phase (janvier 2001), des prêts ont été

accordés à 11 familles par l’entremise du groupe et, en 2002, deux en ont reçu

à titre individuel. Les bénéficiaires étaient pour la plupart des familles

appartenant à une basse caste, et les prêts ont été enregistrés au nom de

l’homme de la famille.

La société laitière a été constituée aux noms des épouses des hommes

ayant officiellement reçu les prêts. La gestion de l’exploitation laitière a été

confiée à un comité composé d’hommes, y compris un qui n’avait pas reçu de

prêt mais qui était le mari de la secrétaire. Les femmes n’étaient pas informées

des opérations commerciales de l’entreprise laitière et savaient seulement que

celle-ci travaillait à perte. Pendant une dizaine de mois, tous les bénéfices

provenant de la vente du lait ont été consacrés à l’entretien des animaux et au

remboursement des prêts, ce qui ne laissait rien pour les participantes, et

quelques familles ont même dû demander des avances.

Vingt-deux bufflesses – deux par bénéficiaire – ont été achetées

collectivement pour l’ensemble du groupe. Jusqu’au démantèlement de celui-

ci, vers octobre 2001, il n’y avait pas de propriété individuelle des animaux et

les 11 anciens membres se sont divisés les bufflesses et les génisses en 11

unités et les ont distribuées parmi eux. Grâce à la deuxième série de prêts, il a

été acheté deux autres bufflesses pour chaque famille. Ces dernières

envisagent sérieusement, à l’heure actuelle, de vendre l’une des quatre

bufflesses pour rembourser les prêts car la vente du lait n’y suffit pas.

Quels ont été les principaux problèmes? La réponse est claire : le système

de gestion du groupe. Maintenant que ce système de gestion a été éliminé,

les principaux problèmes sont le prix élevé des aliments et l’absence de

fourrage vert.Étude de cas dans l’Orissa.

Page 130: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les pauvres doivent avoir

accès aux marchés pour accroître leur

production et sortir de l’ornière de

la pauvreté

Les femmes sont plus désavantagées

que les hommes

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

110

■ La gestion du groupe a été imposée à ses membres.■ La société laitière n’avait de coopérative que le nom, et

les femmes n’étaient pas associées à la gestion. ■ L’alimentation et le pacage des animaux ont posé de sérieux

problèmes et, parfois, les enfants ont dû abandonner l’écolepour les faire paître.

■ Les services consultatifs de gestion ont été très rares. Le faitque neuf des 18 veaux auxquels ont mis bas la premièresérie de bufflesses sont morts illustre la médiocre qualité des services.

Accès aux marchésL’accès aux marchés est pour les pauvres un besoin à long termeBien que leur nombre diminue progressivement, beaucoup deménages ruraux pauvres ne survivent que grâce à une productionde subsistance. Pour beaucoup de producteurs de subsistance, leproblème le plus important consiste à améliorer leur productivitéde manière à pouvoir garantir leur sécurité alimentaire. Ils ne sepréoccupent guère de la structure des marchés, ni de l’informationsur les débouchés. Toutefois, s’ils veulent pouvoir accroître leurproduction et sortir de l’ornière de la pauvreté, ils ont besoin demarchés. Plusieurs programmes de développement se sont soldéspar un échec du fait que les marchés soit n’étaient pas accessibles,soit étaient inexistants.

Les éleveurs ruraux ont peine à avoir accès aux marchésLes éleveurs pauvres vivent souvent dans des régions reculées oùl’infrastructure et les systèmes d’information sont très déficients, desorte que l’accès aux marchés est problématique. Les éleveurs nereçoivent aucune information sur les débouchés possibles et faireparvenir leurs produits jusqu’aux marchés coûte cher en raison deslongues distances à couvrir, du mauvais état des routes et del’âpreté de la concurrence. Les femmes sont plus désavantagéesque les hommes car elles sont moins mobiles et doivent égalements’occuper des tâches ménagères et des enfants, et il existe dansd’innombrables régions de solides obstacles culturels et religieuxqui empêchent les femmes de quitter le foyer et d’aller vendre leurproduction au marché.

Page 131: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Le marché mondial des produits de l’élevage est injuste pour les producteurs pauvres

Les marchésd’exportation sont hors de portée pour les pauvres et lesmarchés nationaux sont faussés

111

La faiblesse des prix a un effet très négatif sur les producteurs pauvresL’un des principaux résultats des difficultés d’accès aux marchés estla faiblesse des prix. La faiblesse des prix des produits d’élevage surles marchés a un effet négatif sur tous les éleveurs. Les grosproducteurs peuvent compenser la baisse des prix en rationalisantla production et en réduisant les coûts et ils ont habituellementl’avantage de pouvoir plus facilement réorienter leurs activités oumême influer sur les prix. L’impact négatif des difficultés d’accèsaux marchés et de la faiblesse des prix est habituellement bien plusmarqué pour les producteurs pauvres.

Développement et organisation des marchésLe développement du marché mondial encourage la production à grande échellePour les producteurs des pays en développement, il estgénéralement plus difficile d’avoir accès aux marchés mondiaux desproduits de l’élevage car ceux-ci sont caractérisés par des barrièrescommerciales, comme de rigoureuses mesures zoosanitaires, et pardes distorsions considérables du fait des subventions à la productionet à l’exportation versées par l’Union européenne et les États-Unis.Ces subventions dépriment les prix sur le marché mondial etencouragent les producteurs des pays développés à écouler de laviande et des produits laitiers de qualité inférieure sur les marchésdes pays en développement. Les éleveurs de ces pays se trouventpar conséquent évincés des marchés mondiaux. L’objectif desaccords conclus sous l’égide de l’Organisation mondiale ducommerce est précisément de faire en sorte que les marchésmondiaux de ces produits soient plus justes et plus équitables.Cependant, on n’a pas encore vu de résultats.

Pour la plupart des éleveurs pauvres, les marchés d’exportationsont hors de portée. D’importantes économies d’échelle sontindispensables pour pouvoir répondre aux rigoureuses normeszoosanitaires et autres normes de qualité appliquées par les paysmembres de l’Organisation de coopération et de développementéconomiques. Les éleveurs plus aisés peuvent se permettre lesinvestissements nécessaires, de sorte que les grandes exploitationstendent à s’orienter vers les marchés internationaux tandis que lespetites doivent se contenter de travailler uniquement pour laconsommation locale. Regrettablement, ces plus vastes marchés serétrécissent eux aussi du fait que le processus de mondialisation a

Page 132: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

La privatisation a créé plusieurs types de

débouchés aussi bienformels qu’informels

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

112

accru la place occupée par les importations aux cours plus faiblespratiqués sur le marché mondial, même sur les marchés des pays endéveloppement.

La libéralisation des marchés, dans les régions bien intégrées, a un impactpositif sur les pauvresDans beaucoup de pays en développement, l’infrastructure decommercialisation et les débouchés dépendent, depuis denombreuses années, d’organisations contrôlées par l’État, comme lesoffices paraétatiques de commercialisation du lait et de la viande. Untel système n’encourage guère une augmentation de la productionde l’élevage, mais garantit néanmoins un certain accès aux marchés.Cependant, les efforts entrepris dernièrement pour privatiserl’infrastructure de commercialisation ont eu un impact positif sur lesdébouchés qui s’offrent aux éleveurs dans les régions bien intégréesoù chacun peut facilement avoir accès aux marchés. On constatedans de telles régions une plus grande décentralisation et une plusgrande diversification des débouchés. Souvent, la privatisation aentraîné la création de plusieurs circuits de commercialisationformels et informels, et notamment:

■ des sociétés privées qui traitent et vendent les produits del’élevage sur les marchés d’exportation et les marchésnationaux;

■ des coopératives de producteurs qui, elles aussi, traitent etvendent les produits de l’élevage sur les marchésd’exportation et les marchés nationaux; et

■ la commercialisation directe de lait frais par les producteurssur les marchés locaux non structurés.

Le tableau 3.2 décrit le marché du lait aux alentours de Nairobi,au Kenya, après la libéralisation intervenue au milieu des années90. Les producteurs vendent principalement sur les marchés nonstructurés, à des particuliers et à des négociants privés.

Staal et al. (2001) ont également fait une étude des différencesrégionales. Là où il existe un excédent de lait qui doit être venduailleurs que sur les marchés locaux, les coopératives, les groupesd’auto-assistance et les entreprises privées de traitement sont lesprincipaux acheteurs. En revanche, là où la demande de lait est élevée,les producteurs vendent directement aux particuliers ou à descommerçants privés, dans la localité même. Dans ces dernières régions,

Page 133: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Les marchés nonstructurés sont plusfacilement accessiblesaux éleveurs pauvres

Les éleveurs obtiennentdes prix plus élevés surdes marchés diversifiés

113

les producteurs reçoivent pour leur lait des prix plus intéressants etn’ont pas, dans l’immédiat, besoin de trouver d’autres débouchés.

Les marchés formels sont souvent caractérisés par des normes de qualité plus rigoureuses qu’il peut être difficile pour leséleveurs pauvres de respecter. Les marchés non structurés sontgénéralement plus accessibles pour les éleveurs pauvres car ilsn’ont guère de contrôle de la qualité et peu de restrictions, et le laitest habituellement payé immédiatement et en espèces. Sur lesmarchés non structurés, c’est surtout du lait cru qui est vendu, etdes doutes ont été exprimés quant aux risques liés à la vente deproduits non pasteurisés. Dans la plupart des pays tropicaux,toutefois, le lait est presque toujours bouilli et peut donc êtreconsommé sans danger. Le lait cru rapporte plus aux producteurset est moins cher pour les consommateurs.

Généralement, les éleveurs obtiennent un prix plus élevé sur desmarchés diversifiés. En ce qui concerne le marché du lait au Kenya,nul ne conteste que la privatisation a donné naissance à plus dedébouchés et s’est traduite par une hausse des prix à la productiondans les régions bien intégrées (Owango et al., 1998). En Inde, lesprix sont habituellement beaucoup plus élevés sur les marchés non structurés, car l’État réglemente les prix perçus par lescoopératives, lesquels sont souvent fixés en ayant en vue l’intérêtdes consommateurs plutôt que celui des producteurs.

Le développement de l’accès aux marchés demeure problématiqueDans certains pays, la plupart des organismes paraétatiques decommercialisation qui ont été libéralisés presque du jour au

Tableau 3.2: Commercialisation du lait dans l’agglomération

de Nairobi, au Kenya

Acheteurs % de la production

Particuliers 43

Hôtels/magasins 11

Négociants 22

Coopératives et groupes d’auto-assistance 12

Établissements de traitement 6

Crèmeries coopérativess 6

Staal et al. (2001).

Page 134: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

Les pouvoirs publicsdoivent assumer la responsabilité dans les régions rurales reculées

En Inde, l’OperationFlood a eu un impact

significatif

Augmentation de laproduction de lait

Élévation des revenusAmélioration des

niveaux d’instruction

lendemain ont finalement dû fermer leurs portes, et les agriculteurset les éleveurs dans beaucoup de régions rurales ont été forcés de setourner vers la production de subsistance. Pour remédier à cettesituation, les pouvoirs publics doivent assumer une partie desresponsabilités en ce qui concerne le développement des marchés etla mise en place des mécanismes d’appui nécessaires pourencourager l’initiative du secteur privé. Un aspect extrêmementimportant est le développement de l’infrastructure dans desdomaines comme les systèmes de communication et les réseauxroutiers.

Le développement des marchés par le biais des coopératives deproducteurs peut bénéficier aux éleveurs pauvresLes organisations de producteurs peuvent être un outilindispensable pour renforcer la compétitivité des éleveurs pauvreset leur permettre d’avoir plus facilement accès aux marchésnouvellement libéralisés. Le programme de développement del’industrie laitière entrepris en Inde dans le cadre de l’OperationFlood montre comment un système coopératif axé sur les produitspeut considérablement réduire la pauvreté en garantissant desdébouchés stables pour les petits producteurs. L’Operation Flood aune grande envergure – elle couvre plusieurs États du pays – et sespoints forts et ses points faibles varient selon la localité. Une étudede l’impact de l’opération (Chandler et Kumar, 1998) réalisée par la Banque mondiale a montré que, d’une manière générale, lesrésultats ont été tout à fait impressionnants.

■ Les 6,3 millions de petits éleveurs qui approvisionnent enlait 55 000 sociétés coopératives témoignent del’augmentation spectaculaire de la production de lait.

■ Les membres des coopératives ont bénéficié de prix plusélevés, ainsi que de l’augmentation de la production et desrevenus.

■ Bien que l’impact global sur l’équité n’ait pas encore étémesuré, les résultats sont certainement positifs car 60% desparticipants sont des pauvres sans terre, et certains desindicateurs secondaires sont très favorables. L’appartenanceaux sociétés coopératives a eu un impact marqué surl’éducation, spécialement des filles, parmi les ménagesparticipants.

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

114

Page 135: Les services zootechniques et les pauvres - UNEP

CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

Prix plus rémunérateurs

Les petits producteursbénéficient d’un processusd’autonomisation

Les serviceszootechniques quidoivent être fournis de façon intensive aux petits exploitantspar du personnelspécialisé sontgénéralement trèsaffectés dans les régionstouchées par le VIH/sida

■ La nouvelle concurrence avec les secteurs privés et nonstructurés a accru les prix.

Bien que les résultats des coopératives aient varié et que certainessoient devenues des organismes presque paraétatiques du fait del’ingérence des pouvoirs publics, le programme montre clairementquelle peut être la contribution que les organisations deproducteurs peuvent apporter au développement des marchés. Lescoopératives laitières permettent aux petits exploitants de vendreensemble leur production et de pouvoir plus facilement négocier.Les petits exploitants peuvent participer à un processusd’autonomisation qui, autrement, aurait été pour eux hors deportée.

Le VIH/sida et les serviceszootechniques

Les services zootechniques peuvent jouer un rôle capital dans les efforts déployés pour atténuer l’impact du sida sur lescommunautés. Le chapitre 1 a indiqué quels sont les besoinsspécifiques que le développement de l’élevage peut aider à satisfairepour les familles affectées et quelles sont les possibilités qui s’offrentà cet égard. Les services zootechniques peuvent améliorer cespossibilités, mais la tâche à accomplir reste considérable car lesservices eux-mêmes ont été sérieusement affectés par l’épidémie.

Le VIH/sida affecte les services zootechniquesLes services zootechniques qui doivent être fournis de façonintensive aux petits exploitants par du personnel spécialisé sontgénéralement très affectés dans les régions touchées par leVIH/sida. Les prestataires de services manquent de personnelqualifié, ce qui compromet sérieusement l’efficacité des services. Lesétudes réalisées ont constaté que, dans les régions ébranlées par leVIH/sida, les agents de vulgarisation agricole passent 10% de leurtemps à assister à des enterrements (Mutangadura, Mukurazita etJackson, 1999; Engh et du Guerny, 2000). Les agents doiventprendre sur leur temps pour s’occuper de parents malades etcertains d’entre eux sont également infectés. En outre, il est

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Il faut renforcer le rôledes communautés

d’agriculteurs

L’appui aux mécanismes de survie

des communautés elles-mêmes

Sensibiliser lescommunautés

LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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difficile pour eux de rencontrer les agriculteurs. Dans certainescommunautés, il y a parfois jusqu’à 12 enterrements par mois. Ilfaut donc plus de temps aux agents de vulgarisation pour organiserun rendez-vous et se déplacer pour rencontrer des agriculteursdevant eux-mêmes s’occuper d’enterrements et de cérémoniesfunéraires. Il ressort d’une étude réalisée dans un districtsérieusement touché de l’Ouganda que le service de vulgarisationavait perdu de 20 à 50% du temps de travail de ses agents par suitede l’épidémie (Haslwimmer, 2001).

Dans toute analyse des stratégies qui peuvent être envisagées pourla prestation des services zootechniques, il importe par conséquent deprivilégier celles qui renforcent le rôle de la communautéd’agriculteurs dans le développement et la prestation des services.

Les services zootechniques ont un rôle à jouer dans les régions affectées par le sidaLes services zootechniques peuvent jouer un rôle important enappuyant les initiatives locales et les organisations à assisecommunautaire existantes. Il ne faut pas sous-estimer la capacitédes communautés de faire face et de réagir. En Afrique, différentescommunautés ont réussi, par leurs propres efforts, à mettre enplace des mécanismes qui leur permettent de faire face à l’impact del’épidémie, par exemple des associations de partage des animaux detrait et du travail. Les associations d’épargne et de prêt sont trèsrépandues aussi. Une étude des services vétérinaires en Ouganda a constaté que l’épidémie avait conduit les agriculteurs à se montrer plus disposés à s’organiser et à résoudre collectivementleurs problèmes (Mutangadura, Mukurazita et Jackson, 1999;Haslwimmer, 2001).

Les services zootechniques peuvent contribuer à freiner la propagation du VIH/sidaPour peu qu’ils aient reçu une formation appropriée, les agents de vulgarisation et les agents communautaires ont de bonnespossibilités de diffuser des informations sur le VIH/sida en mêmetemps que des informations concernant spécifiquement l’élevage.Comme ils entretiennent des contacts fréquents et étroits avec lescommunautés, ils ont la possibilité de sensibiliser ces dernières etd’encourager un changement des comportements et des pratiques àhaut risque.

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CHAPITRE 3: DES SERVICES ZOOTECHNIQUES AXÉS SUR LA PAUVRETÉ

L’accent doit être mis sur les ménagesaffectés par le sida, mais surtout sur les orphelins

Les services de l’élevage peuvent également contribuer à atténuerl’impact du sidaDans les régions affectées par l’épidémie, les programmes d’aideaux éleveurs et les prestataires de services doivent tenir compte del’impact du sida sur la pauvreté. Étant donné les besoins particuliersdes ménages affectés par le sida, il faut adopter une approche cibléepour s’attaquer à ce formidable défi. Le plus important est sansdoute de mettre un accent très marqué sur le développement desconnaissances des orphelins, en facilitant l’échange de savoirs et decompétences traditionnelles entre les anciens des villages et lesjeunes orphelins ou en organisant une formation plus structuréedes jeunes éleveurs.

Les services zootechniques peuvent contribuer à atténuerl’impact du sida grâce à:

■ un ciblage spécial des groupes vulnérables, en particulier desorphelins et des ménages dirigés par des femmes;

■ la promotion de l’élevage de petits animaux; ■ la facilitation de mécanismes de crédit, en particulier pour

l’octroi de petits prêts aux ménages pour qu’ils n’aient pas àvendre leurs animaux ou pour qu’ils puissent en acheterpour survivre;

■ la promotion de l’utilisation d’animaux de trait; et■ un appui aux organisations communautaires d’échange de

travail et d’animaux de trait, aux associations d’épargne et de prêt, etc.

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CHAPITRE 4

MESURES RECOMMANDÉES

La conclusion d’ensemble qui se dégage de cet examen est que ledéveloppement de l’élevage constitue une possibilité prometteuse de réduire lapauvreté dans beaucoup de pays en développement, mais que les programmeset les services élaborés à cette fin ne permettent pas aux éleveurs pauvres devéritablement tirer parti de cette possibilité. Il faut réformer les politiques etpratiques suivies jusqu’à présent pour qu’il puisse être fourni des serviceszootechniques répondant aux besoins des pauvres. À cette fin, plusieursmesures s’imposent, qui sont décrites dans le présent chapitre.

Recherche des rendements les plus élevés

L’une des premières priorités, et l’une des plus urgentes, est de mieux définir lesdomaines dans lesquels le développement de l’élevage peut contribuer le plusefficacement à réduire la pauvreté. Si, d’une manière générale, on sait, bien quede façon limitée, quelle est la répartition dans l’espace des éleveurs pauvres, teln’est pas le cas des régions géographiques et des systèmes de production quioffrent les plus grandes possibilités du point de vue de la réduction de lapauvreté. Comme les ressources sont limitées aux échelons aussi bien nationalqu’international, il importe au plus haut point quelles soient utilisées aussistratégiquement que possible là où elles peuvent avoir l’impact le plus marqué.Pour commencer, il faut affiner la cartographie de la pauvreté en y incorporant

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toutes les données recueillies lors des enquêtes sur les ménages de manière àaméliorer la base de connaissances. Il faut ensuite identifier, ce qui sera trèsdifficile, les régions offrant les meilleures possibilités du point de vue de laréduction de la pauvreté. Différents indicateurs du potentiel de développement,comme les caractéristiques physiques des régions, leur base de ressourcesnaturelles, leur infrastructure, les marchés potentiels, la présence d’unenvironnement économique propice et les politiques suivies par les pouvoirspublics en matière d’autonomisation rurale, devront être combinés auxinformations relatives à la répartition de la pauvreté dans l’espace afin d’obtenirdes cartes plus précises.

Renforcer l’inclusion

Le principal problème qui se dégage de cet examen et qui touche tous lessystèmes de production est l’exclusion des pauvres. La participation des usagersà l’ensemble du processus de planification et d’exécution des programmes etl’autonomisation qui en résultera sont essentielles si l’on veut que lesprogrammes soient raisonnablement durables et aient l’impact recherché sur lespauvres. Toutefois, comme on l’a vu dans le cas même des programmes les plusréussis de promotion de l’élevage tendant à réduire la pauvreté, comme leprogramme de promotion de l’élevage de volaille et de microfinancement auBangladesh, les secteurs les plus pauvres de la population en restentgénéralement en marge ou, lorsque tel n’est pas le cas, sont traités de façon trèscavalière par le personnel des projets. Cela est particulièrement sérieux lors desphases initiales de la conception et de la planification des activités du fait del’importance qu’elles revêtent pour le succès de celles-ci. L’inclusion des pauvresest importante aussi aux étapes de l’exécution et du suivi si l’on veut qu’ils aientpeu à peu accès à des services de qualité et soient traités équitablement par lesprestataires de services.

Il faut concevoir et mettre à l’essai de nouveaux types d’organisation pourtrouver des modalités plus inclusives de participation des pauvres. Dans une trèslarge mesure, si les pauvres ne sont pas associés aux discussions concernant laprestation de services axés sur leurs besoins, c’est parce que les éleveurs pauvressont presque totalement exclus du débat plus général concernant les politiquesdu secteur public, comme en témoigne par exemple le fait que les pauvres nesont presque pas du tout associés à l’élaboration de documents directifs commeles documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté ou les programmesconnexes.

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CHAPITRE 4: MESURES RECOMMANDÉES

Mettre l’accent sur les problèmes clés

Cet examen devrait semble-t-il susciter une étude des mesures qui pourraientêtre adoptées pour organiser et autonomiser les pauvres et encourager leurparticipation aux débats concernant la prestation des services. Certains despoints qui se dégagent de cet examen et qu’il conviendrait de prendre enconsidération sont récapitulés au tableau 4.1, mais on pourrait en ajouterd’autres. À cette fin, il faudrait renforcer les capacités de plaidoyer au niveau despays pour lancer un débat public. Plus spécifiquement, il conviendrait d’élaborerdes notes directives définissant les besoins des pauvres, notamment des éleveurspauvres, qui puissent aisément être intégrées au processus d’élaboration de laStratégie du FIDA pour la réduction de la pauvreté rurale ou aux discussionsmenées au sein d’autres instances délibérantes.

Indépendamment des questions transversales, il se pose des problèmespropres à chaque système de production et aux communautés qui les pratiquent.Le tableau 4.2 contient des exemples des problèmes auxquels risquent le plus dese heurter les éleveurs dans divers contextes. Si l’on veut s’y attaquer comme ilconvient, il importe de renforcer les organisations d’éleveurs pauvres etd’identifier quels sont les besoins prioritaires de ces derniers.

Ce document décrit plusieurs pratiques qui reflètent les nouvelles tendancesqui se dégagent des efforts de développement de l’élevage visant à réduire lapauvreté. Il est encore difficile d’évaluer l’impact de beaucoup de ces approchessur la réduction de la pauvreté, faute d’outils appropriés d’évaluation et de suivi.Il est rare que les projets décrits dans les ouvrages publiés aient comporté unecomposante tendant à définir et à mesurer leur impact sur l’équité. Ils n’ont pasprévu la collecte de données de référence ou l’utilisation de systèmes de suivi. Dece fait, il est difficile de tirer des enseignements de l’expérience, et il imported’élaborer des directives sur la façon d’établir et de mesurer des indicateurs desuivi de l’impact des activités sur la pauvreté. On pourrait, par exemple,s’inspirer des travaux déjà réalisés dans ce domaine dans le contexte duprogramme LID (1999).

Il faut s’employer à tirer plus d’enseignements des activités entreprises,qu’elles se soient soldées par un succès ou par un échec. En général, lesenseignements tirés des programmes de promotion de l’élevage ne sont paspartagés et ne vont pas plus loin que les institutions intéressées et, souvent,disparaissent dès que les programmes ou les projets sont achevés. Il n’existeaucun mécanisme formel de communication qui permette de diffuser lesinformations et les données d’expérience concernant les projets parmi lesinstitutions compétentes. En outre, les recommandations relatives aux pratiquesoptimales sont rares, ce qui rend extrêmement difficile l’élaboration d’un cadre

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LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Questions

Rôles des secteurs public et privéDans les pays en développement, beaucoup de systèmes de prestation de services sont assuréspar un secteur public qui se trouve impliqué dans des tâches trop nombreuses. Le secteur publicne parvient pas à atteindre les pauvres et, simultanément, entrave l’apparition de prestatairesprivés plus efficaces car il leur fait concurrence et fait à certains égards double emploi.

Déséquilibre entre hommes et femmes dans les services zootechniquesLes services zootechniques classiques sont fournis par des hommes et pour des hommes, tandisque l’élevage joue souvent un rôle capital dans les moyens de subsistance des femmes pauvres.Si l’on veut réduire la pauvreté, les femmes doivent être associées aux services zootechniques,aussi bien comme productrices que comme prestataires de services.

Ciblage des services zootechniques sur le VIH/sidaL’étude montre que les communautés affectées par le VIH/sida ont des besoins particuliers enmatière de technologies et de formation et que l’incidence de l’épidémie au sein d’unecommunauté doit influencer les stratégies de prestation de services.

Les services zootechniques font appel à des technologies inappropriéesIl faut mieux coordonner les efforts pour diffuser des technologies appropriées. Les domaineshabituellement les plus importants pour les pauvres (élevage de petits animaux, amélioration desespèces locales, vaccins pouvant être conservés à la température ambiante et produisant uneimmunité de longue durée, systèmes de production de fourrage à faible intensité de main-d’œuvre et d’intrants) sont négligés. Il ressort de l’expérience acquise jusqu’à présent que lestechnologies sont adoptées si les exploitants possèdent des ressources, une main-d’œuvre et descompétences adéquates et si les technologies peuvent améliorer leurs moyens de subsistance.

Les services zootechniques ne comportent pas de systèmes de génération de savoirs et d’apprentissageHabituellement, les services zootechniques ont été fondés sur des connaissances spécialiséesclassiques qui privilégient la santé animale et parfois la génétique mais n’offrent pas de possibilitésd’apprentissage, ni d’approche globale des systèmes de petit élevage.

Manque d’accès aux services financiersPresque partout, les éleveurs pauvres n’ont pas accès aux services financiers. Même lorsque de telsservices existent, il n’est habituellement pas tenu compte de l’impact que les mécanismes de créditpeuvent avoir sur la réduction de la pauvreté parmi les plus pauvres. Il reste difficile pour lespauvres de bénéficier de ces services.

Tableau 4.1: Recommandations concernant les questions transversales

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CHAPITRE 4: MESURES RECOMMANDÉES

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Recommandations

Lancer un débat de principe sur les rôles qui reviennent aux secteurs public et privé en matière deprestation de services aux pauvres et créer des partenariats publics/privés, le secteur publicdéléguant le pouvoir de décisions touchant la portée et le contenu des services considérés commedes biens publics. Il s’agira notamment de financer en tout ou en partie les services fournis, maisde préférence en les sous-traitant à des prestataires privés et en introduisant des systèmes de bonsou d’autres systèmes de subventions par concours à la recherche, à l’éducation, etc.

Association ciblée des femmes aussi bien comme productrices que comme prestataires de servicesafin de renforcer leurs capacités et leur condition sociale.

Renforcement du plaidoyer des groupes internationaux et nationaux de promotion de l’élevagede manière à encourager l’élaboration et la diffusion de technologies simples à faible intensité demain-d’œuvre dans le cadre des programmes en cours et des nouveaux projets, par le biais desystèmes communautaires de prestation de services. Pour commencer, il importe de renforcer lescompétences immédiatement nécessaires, en particulier parmi les jeunes (les orphelins).

Association des éleveurs pauvres à la génération et au transfert de technologies de sorte qu’ilspuissent acquérir plus d’expérience des méthodes d’élevage pouvant bénéficier aux pauvres.L’accent doit être mis sur le renforcement des connaissances, des compétences et des ressourcesque possèdent déjà les éleveurs pauvres.

Il faut mettre l’accent sur le développement des systèmes de génération de savoirs etd’apprentissage de manière à mettre les éleveurs mieux à même d’exiger ou de solliciter desinformations, une formation et des avis afin d’élargir la gamme des services consultatifs auxéleveurs.

Il faudrait entreprendre des recherches sur les services financiers répondant aux besoins despauvres. En particulier, il importe de mieux comprendre l’impact du crédit et de l’endettement surles éleveurs les plus pauvres et de trouver le moyen d’atteindre les indigents et de les aider àbénéficier des systèmes de microfinancement.

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LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Producteur

Pasteur

Petitesexploitationsmixtesagriculture/élevage

Citadin

Habitat

Milieu rural

Milieuxpériurbainet urbain

Milieu rural

Milieux ruraletpériurbain

Taudisurbains

Caractéristiqueprincipale

Manque d’accèsaux ressourcesnaturelles commela terre, l’eau et les animaux

Manque de main-d’œuvre

Manque d’accèsaux marchés

Effectifs nonviables destroupeaux

Exiguïté desexploitations

Métayage,manque deressources (travailet terre)

Sans terre

Sans terre

Questions prioritaires

Gestion des risques (alerteet réaction rapides)

Organisationscommunautaires

Développement desmarchés

Droits fonciers adaptés auxsystèmes d’élevage extensif

Intégration des systèmesd’élevage extensif et de lagestion des ressourcesnaturelles

Gestion environnementale,développement de systèmesintégrés d’agriculture etd’élevage

Renforcement desorganisations deproducteurs

Développement desmarchés

Intégration de l’élevage auxsystèmes agricoles pouraméliorer la durabilité

Organisationscommunautaires

Droits fonciers

Gestion environnementale

Organisationscommunautaires ouorganisations deproducteurs

Technologies de productionde fourrage

Réinstallation

Risques pour la santéhumaine

Autres moyens desubsistance

Espècesd’animaux

Bovins,caprins,ovins,camélidés,yaks

Caprins,ovins

Bovins,buffles,caprins, ovins,porcs, volaille

Bovins,volaille,porcs

Volaille,caprins,ovins,buffles,bovins, porcs

Tableau 4.2: Domaines d’intervention dans les divers systèmes de production

Adapté du tableau 1.2.

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CHAPITRE 4: MESURES RECOMMANDÉES

cohérent qui puisse guider la conception des projets et la prestation des servicesdans le secteur de l’élevage.

Si l’on veut que les programmes de développement de l’élevage axés sur lesbesoins des pauvres soient plus efficaces, il faudra:

■ élaborer des critères pour identifier les régions, les groupes et lessystèmes de production qui offrent le meilleur potentiel;

■ rassembler des informations sur l’impact des services zootechniques surla réduction de la pauvreté;

■ élaborer des mécanismes de suivi coordonné de l’impact des activités surles pauvres;

■ établir un cadre commun pour la conception et l’exécution des projets; et ■ rassembler et diffuser les enseignements tirés.

Il faut mettre au point des organisations de producteurs et des techniques deprestation de services nouvelles et novatrices qui puissent bénéficier aux pauvreset en même temps développer l’apprentissage. Il faudrait mettre en place unréseau mondial de parties prenantes, de décideurs et de praticiens quis’intéressent au secteur de l’élevage et aux autres secteurs pertinents afind’appuyer les efforts de mise en œuvre, de politiques et de pratiques de natureà fournir des services zootechniques aux pauvres. Le principal objectif devraitêtre de créer un cadre de coopération pour les parties prenantes pour que lesprogrammes de promotion de l’élevage puissent être utilisés comme un moyende réduire la pauvreté.

Les objectifs spécifiques devraient être les suivants:■ sensibiliser les décideurs à la nécessité d’orienter davantage vers les

pauvres les services zootechniques en encourageant une plus grandeparticipation des éleveurs pauvres à l’élaboration des politiques, enfaisant l’essai de nouvelles modalités de prestation de services et enmontrant que le développement de l’élevage réduit la pauvreté;

■ renforcer les liens de communication et améliorer le processus deconcertation, de planification et de mobilisation de ressources entre tous lesacteurs qui participent à la prestation de services zootechniques aux pauvres;

■ créer un cadre de coopération pour les parties prenantes pour qu’ellespuissent plus facilement tirer des enseignements de l’expérience acquiseet diffuser et promouvoir les pratiques optimales; et

■ fournir aux organismes de développement des avis et, à terme, un cadrecommun pour qu’ils puissent concevoir et fournir efficacement desservices zootechniques répondant aux besoins des éleveurs pauvres.

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LES SERVICES ZOOTECHNIQUES ET LES PAUVRES

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Une base de connaissances pour la coordinationLe réseau mondial jouerait ainsi un rôle de catalyseur afin de promouvoir leplaidoyer et l’innovation et constituerait en outre une base de connaissances quipermettrait d’échanger des données d’expérience sur les enseignements tirés de l’application expérimentale d’approches novatrices dans le cadre desprogrammes existants et des nouveaux projets pilotes à entreprendre dansdifférents systèmes de production.

Mise en œuvre des approches recommandéesIl faudrait, pour mettre en œuvre le réseau mondial, créer un fonds géré par unpetit secrétariat qui serait coiffé par un comité directeur. Le Fonds mondial deservices zootechniques pour les pauvres constituerait la principale source definancement du système d’apprentissage et de gestion des savoirs qui est proposéet coordonnerait les informations provenant d’une large gamme d’organismesde développement de l’élevage et de praticiens. Le secrétariat jouerait le rôle dedépositaire des connaissances provenant des spécialistes de l’élevage et desorganismes de développement dans leur ensemble. Les petites institutions ou lesinstitutions pauvres en ressources, les organisations de producteurs, les ONG etles gouvernements pourraient avoir accès aux informations clés et éviter ainsi leschevauchements d’efforts. Le secrétariat préparerait des propositions pilotesnovatrices de prestation de services aux pauvres et superviserait et suivraitl’impact des activités, lesquelles seraient néanmoins, dans la pratique, réaliséespar des institutions associées.

Le secrétariat serait ainsi un moyen novateur aussi bien de générer que dediffuser des connaissances nouvelles sur le développement de l’élevage et lapauvreté. Il tiendrait les décideurs informés, renforcerait les institutions,établirait un réseau d’experts spécialisés dans la gestion de l’information etappuierait les recherches novatrices sur les services zootechniques et les pauvres.

Le secrétariat serait supervisé par un comité directeur composé desorganismes contribuants, un représentant d’une organisation régionale oumondiale de producteurs et d’un petit nombre d’éminents scientifiques du Sudqui travaillent dans le domaine de la prestation de services zootechniques.

Le secrétariat serait doté d’un personnel restreint, et notamment d’uncoordonnateur du réseau, qui serait assisté en cas de besoin par des experts des technologies de l’information. Le réseau s’emploierait principalement àautonomiser les organisations de producteurs et les exploitants, et l’exécutiondes activités pourrait être confiée à une organisation internationale ou nationaled’agriculteurs dans le pays de l’un des donateurs.

Il faudrait pour commencer entreprendre une étude de faisabilité pourétablir un inventaire des autres initiatives menées dans ce domaine et

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CHAPITRE 4: MESURES RECOMMANDÉES

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déterminer où serait établi le Fonds mondial de services zootechniques pour lespauvres et quelles seraient ses attributions dans le contexte plus large des autresactivités menées dans ce domaine (comme le Mécanisme de la FAO pourl’élaboration de politiques de promotion de l’élevage en faveur des pauvres oula Livestock, Environment and Development Initiative) et, d’une façon plusgénérale, des activités rurales en faveur des pauvres (comme l’Initiative deNeuchâtel). Compte tenu de ces autres activités, il faudrait également définiravec précision la nature des activités que financerait le Fonds mondial ainsi queses modalités de gestion, et procéder à une première évaluation des possibilitésde financement.

S’il était créé, un tel fonds pour les pauvres pourrait beaucoup contribuer àl’amélioration des moyens de subsistance des 600 millions d’éleveurs pauvres età la réalisation des objectifs de développement du Millénaire.

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