6
Les totalitarismes Elkins, Aux écoutes, 28/10/1939. http://www.caricaturesetcaricature.com/article-aux-ecoutes-du-monde-le-journal-d-echos-illustre-le-plus-durable-du-xxe-siecle-80722863.html Journées Collège Nouveaux programmes de Troisième Les régimes soviétique et nazi (Rappel : le régime fasciste est vu en lycée)

Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

  • Upload
    others

  • View
    3

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Les totalitarismes

Elkins, Aux écoutes, 28/10/1939.

http://www.caricaturesetcaricature.com/article-aux-ecoutes-du-monde-le-journal-d-echos-illustre-le-plus-durable-du-xxe-siecle-80722863.html

Journées Collège

Nouveaux

programmes de

Troisième

Les régimes

soviétique et nazi

(Rappel : le régime

fasciste est vu en

lycée)

Page 2: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Retour sur un concept

L’adjectif « totalitaire », utilisé pour la première fois en 1924 par le libéral italien Giovanni Amendola pour dénoncer l’emprise du fascisme, a été repris à son compte par Giovanni Gentile, théoricien du régime et par Mussolini lui-même. Les nazis ont, quant à eux, parlé d’ « État total ». C’est au moment du pacte germano-soviétique que s’affirme vraiment le mot de « totalitarisme ». Ce concept a été développé ensuite par Hannah Arendt (Les origines du totalitarisme 1951), puis par des politologues américains, qui ont dégagé des critères précis (idéologie globalisante, parti unique, police secrète faisant régner la terreur, monopole de l’information et des armes, économie dirigée). Leur pensée a été relayée en France par Raymond Aron.

Pour aller plus loin :-On pourra lire avec profit la fiche eduscol Programme de première faisant une utile synthèse sur ce thèmehttp://media.eduscol.education.fr/file/lycee/70/6/LyceeGT_Ressources_Hist_1_06_GuerresRegTotalitair_184706.pdf- « totalitarisme » dans Nicolas Offenstadt, Historiographie II, sous la direction de C. Delacroix, F. Dosse, P. Garcia, N. Offenstadt , Folio Gallimard, 2010.- Bernard Bruneteau, L’Âge totalitaire, Idées reçues sur le totalitarisme, Le Cavalier Bleu, 2011-Henry Rousso (dir.), Stalinisme et nazisme. Histoire et mémoire comparées, Paris/Bruxelles, IHTP-CNRS/Complexe, coll. « Histoire du temps présent » 1999 (Consultable à cette adresse : http://books.google.fr/books?id=SzUUNUTAn1MC&pg=PA369&lpg=PA369&dq=henry+rousso+nazisme&source=bl&ots=RqveRF5IL2&sig=HZfcPawoXh3bmnpZ5IW2FpH4PkA&hl=fr&sa=X&ei=Q18MT-ipDpO0hAeJ0_itBA&ved=0CEYQ6AEwBg#v=onepage&q=henry%20rousso%20nazisme&f=false

Page 3: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Objet de polémiques…Polémique car longtemps objets de forts enjeux idéologiques

Polémique en raison d’une approche comparative :En témoigne en France dans les années 90 les sorties des livres de François Furet Le passé d’une illusion (1995) et du Livre noir du communisme (1997) sous la direction de Stéphane Courtois.

Polémique de certains renouvellements historiographiques : le rôle de Lénine, figure longtemps « intouchable », dans la mise en place du totalitarisme soviétique par exemple.

Polémique en raison de travaux sur la genèse des totalitarismes :La théorie émise par l’Allemand Ernst Nolte qui fait du fascisme et du nazisme des réactions au bolchevisme a déclenché en RFA une polémique très médiatisée en 1986-1987, l’ « Historikerstreit ». Nolte est soupçonné dès lors dès les années 80 de vouloir banaliser le passé nazi en faisant de Hitler une « réaction » à un bolchevisme érigé en un modèle totalitaire et génocidaire original et expliquant la radicalisation de l’antisémitisme d’Hitler à la participation de nombreux juifs aux révolutions bolcheviques.

Page 4: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Une comparaison Nazisme/Communisme ?

Le débat est apparu lors de la sortie du Livre noir du communisme en 1997 où dans son introduction Stéphane Courtois comparaît les crimes communistes aux crimes nazis : « la mort de faim d’un enfant de koulak ukrainien délibérément acculé à la famine par le régime stalinien » vaut « la mort de faim d’un enfant juif du ghetto de Varsovie acculé à la faim par le régime nazi ». A rapidement été contesté le fait que l’on puisse comparer deux régimes aux idéologies aussi différentes (« le nazisme était par essence monstrueux, le communisme a abouti à des résultats monstrueux »)Pour Bernard Bruneteau, il faut dépasser la question des idéologies respectives de chaque régime : « différents par leurs références explicites, le bolchevisme comme le nazisme ont des structures intellectuelles proches en proposant l’un et l’autre une « vision ordonnée et folle du monde » (Philippe Bénéton), celle des lois de l’histoire ou de la nature, fondée sur un projet de type millénariste (l’avènement d’une humanité nouvelle) établi au nom d’une catégorie élue et mythifiée (prolétariat, race aryenne). De là en sort une division du monde selon le couple ami/ennemi à laquelle tout est subordonné. De là surtout l’affirmation d’un principe commun selon lequel l’histoire et le monde ne sont qu’un affrontement de volontés. De là enfin le primat de la violence. » page 153-154.

Page 5: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Une continuité Lénine/Staline ?L’idée selon laquelle ce serait le seul Staline qui aurait rendu l’URSS totalitaire est issu d’une longue histoire remontant dès Trotski (parlant de révolution trahie pour Staline et utilisant le mot totalitaire) poursuivie par Hannah Arendt (parlant de dictature révolutionnaire où tout est encore possible pour Lénine) jusqu’au Rapport du XXe congrès (1956) diabolisant Staline et l’historiographie dite « révisionniste » des années 70-80 estimant que Lénine aurait combattu les processus aboutissant à la période stalinienne.

Une des polémiques de 2010 : Georges Frêche et ses statues des Grands

hommes du XXe siècle dont Lénine.

« Concernant le choix de Lénine, Georges Frêche assure qu'il n'était "pas un

dictateur sanglant. (...) C'est l'homme qui a changé la face du monde au XXe siècle

(...). Chez Lénine, il y a deux moments lumineux : la révolution d'octobre, ça, c'est

Lénine qui la personnifie, même s'il n'était pas seul. Et puis il y a la décolonisation : car

1917 a changé la face du monde. Sans 1917, il n'y aurait pas eu la décolonisation de

l'Afrique, de l'Inde, de la Chine et, de façon générale, du monde dit en voie de

développement". »

http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/08/18/les-statues-polemiques-de-

georges-freche-a-montpellier_1400264_823448.html

Toutefois Bernard Bruneteau constate que « la thèse de la continuité de la « dictature » de Lénine au régime « totalitaire » de Staline convoque de forts arguments » dont on peut synthétiser les principaux éléments.

Page 6: Les totalitarismes - histoire-geo.ac-amiens.fr

Une continuité Lénine/Staline ?B. Bruneteau rappelle la radicalisation précoce de la pensée de Lénine au contact de la violence politique et sociale de la Russie tsariste et la « brutalisation » de cette pensée au moment de la Première Guerre l’amenant à constater que «tant dans la conception du parti que dans le rôle de la violence de masse, il y a chez le Lénine de 1917 des éléments de totalitarisme latent en attente d’une conjoncture favorable » (page 69) donnée par la Révolution et la guerre civile.

De nouvelles bases documentaires permettent de distinguer 3 étapes :- Hiver 17 : introduction de la notion d’ « ennemi du peuple » et naissance de la Tcheka- Printemps 18 : mise en place d’une dictature (avant le début de la guerre civile donc) : mise hors la loi de tous les partis, noyautage des soviets, suppression de la liberté de presse, réquisition forcée dans les campagnes…- septembre 18 : terreur légale : méthode de la prise d’otages de classe, exécutions de masse et enfermement en camps de concentration

Enfin, pour Bruneteau, l’argument selon lequel cette violence s’exerce en temps de guerre, à la différence de Staline, ne tient pas car découlant d’une autre logique, « celle qui transforme la politique en hygiène sociale en rendant des catégories entières coupables d’une malfaisance naturelle ». Le mot d’ordre léniniste est « d’épurer la terre russe de tous les insectes nuisibles ».Bruneteau conclue : « Si aux ennemis déclarés (gardes blancs, socialistes révolutionnaires…) et aux ennemis « objectifs » (koulaks, cosaques, bourgeois éléments « socialement étrangers », nous ajoutons les ennemis camouflés (déviationnistes à l’intérieur du parti) ainsi que tous les pseudo-amis (les « révolutionnaires de la phrase »), la base politique du régime fondée par Lénine se réduit dans la vision obsidionale de son leader à sa seule personne. ».