Les troubles de comportements à l’école: une question … · 2013-08-27 · PLAN DE LA PRÉSENTATION 1. État de la situation 2. L’influence de la société sur la situation

L U C I E D E B L O I S , P R O F E S S E U R E T I T U L A I R E

U N I V E R S I T É L A V A L

M A R I E - P I E R R E D E N C U F F , P h . D .

U N I V E R S I T É A I X - E N - P R O V E N C E - M A R S E I L L E

LES TROUBLES DE COMPORTEMENT À

L’ÉCOLE:

UNE QUESTION DE COMPORTEMENTS

UNIQUEMENT?

PLAN DE LA PRÉSENTATION

1. État de la situation

2. L’influence de la société sur la situation

d’enseignement

3. Contrat pédagogique/contrat didactique

4. Quand? Comment?

5. Que retenir pour intervenir?

1. ÉTAT DE LA SITUATION

L’INTERVENTION AUPRÈS D’UN ÉLÈVE AYANT DES TROUBLES DE COMPORTEMENT CONDUIT SOUVENT À PRIVILÉGIER:

• une adaptation de son environnement physique • Par exemple, une diminution de la quantité de matériel mis à sa disposition

ou un aménagement de son environnement immédiat (bureaux espacés).

• une adaptation de son environnement social• Par exemple, l’attribution de récompenses pour certains comportements

attendus.

Une analyse des particularités de la tâche d’enseignement nous conduit à la question

Peut-on faire autre chose?

QUELS FACTEURS SUSCITENT UNE RÉACTION D’ÉVITEMENT OU DE

FRUSTRATION?

• Sur quels contenus travaillait l’élève au

moment où son comportement est devenu

inacceptable?

Interpréter sa désorganisation comme la

manifestation de ses attentes.


DES EXEMPLES

Faisait-il une soustraction avec

emprunt dans laquelle un zéro

inhabituel dans les nombres

apparaissait ?

• Calculer 259 – 48 ne correspond pas

aux mêmes procédures que calculer

209 – 48.


QUAND INTERPRÉTER AUTREMENT ?

1. Lorsque la répétition d’une procédure

«automatique» ne suffit plus parce que le sens est

perdu. Une adaptation, nécessaire, est impossible

• source de frustrations se traduisant par un trouble de

comportement

2. Lorsque l’élève éprouve des difficultés d’apprentissage

• Chaque tâche est différente et chaque différence entre ces

tâches devient une source potentielle de frustrations

• Plus l’écart est grand


QUAND INTERPRÉTER AUTREMENT ?

3. Lorsqu’un élève s’attend à devoir utiliser une

connaissance et qu’il est confronté à l’échec de son

fonctionnement

• Déstabilisé, il peut réagir en se désorganisant plutôt

qu’en exprimant sa surprise ou son étonnement


LORSQU’IL Y A RUPTURE DE CONTRAT DIDACTIQUE

Cela signifie que les conditions sont en place pour un

apprentissage

• La connaissance sollicitée ou habituelle ne fonctionne plus.

• Un conflit cognitif qu’il n’est pas en mesure d’assumer

seul émerge.

• Un lexique des comportements apparaît : lever les

yeux au ciel, souffler, parler avec son copain, se lever,

faire tomber ses affaires volontairement, etc.


COMMENT S’ÉTABLISSENT LES RÈGLES ET LES HABITUDES DES ÉLÈVES?

Une situation d’enseignement est souvent basée sur des

régularités de comportements pour favoriser la mobilisation

des connaissances par l’élève

Ces comportements connus et répétés quotidiennement

renforcent une forme de sécurité (Giddens, A., 1987)

Une fois en classe, mes élèves consacrent toujours 15

minutes à la lecture, ce qui permet d'instaurer un climat

propice à l'étude[…]Ensuite, nous chantons une chanson à

partir de laquelle nous ferons des exercices de grammaire

et de vocabulaire. (Le Devoir, le 15/08/2009, Une journée

au primaire…)

2. L’influence de la société sur la situation d’enseignement

DES REGLES?

Les comportements des élèves et des enseignants

utilisons sont organisés et montrent un aspect

régulier.

Cette régularité exprime l’application de règles

apprises ou comprises, obligatoires ou préférées et

partagées par tous.

Enseignants et élèves s’adaptent au cadre scolaire

en appliquant des règles


DES RÈGLES SOCIALES

[Le préscolaire]« Ça ressemble un peu à l'école, parce qu'il y a

un horaire à suivre et une routine dans la journée, explique

Mireille Chénard, enseignante en maternelle classe d'accueil

à l'école Sainte-Bernadette-Soubirous et membre de l'Alliance

des professeures et professeurs de Montréal. Il y a

évidemment des périodes de jeu libre où les enfants peuvent

socialiser et s'amuser entre eux, mais il y a aussi des

apprentissages à faire. (Le Devoir, 3-10-2009 Au préscolaire et

à cinq ans….)


RÉPARTITION DES RÈGLES


Critères (?) préciser

Comportements liés aux

pratiques professionnelles

Comportements lors des

interactions d’apprentissage

Convenances

Coutumes

Conventions

Interdit (Tabou)

S

O

C

I

É

T

É

ÉCOLESOCIÉTÉ

Routines

Principe

Lois

Règlements

Dencuff, Marie-Pierre (2010) p.364

SITU

ATIO

N d

’AP

PR

EN

TISSA

GE

DOMAINE D’APPLICATION DES REGLES

Le langage :

S’ajuster à son répondant

Mots, signes, inférences, etc.

Les règles sociales :

S’adapter au contexte

Règlements scolaire, mobilier, etc.

Les conventions établies dans la classe :

S’intégrer dans le groupe

Les savoirs:

Apprendre des notions sur un temps long donnent l’impression de contradictions


1E CONCLUSION

Si les objectifs d’apprentissage sont explicites

à la conscience de l’enseignant, les autres

règles sociales sont aussi présentes, placées

«en creux» durant toute son intervention.

Par exemple: la plupart des enseignants

savent que parmi les groupes

d’adolescents, « les écarts à la discipline

doivent être tus. »


DES DISPOSITIONS EXPLICITEMENT EXPOSÉES EN CLASSE

•Ex: « Quand le professeur enseigne l’élève ne fait pas de bruit. »

•C’est le contrat pédagogique qui permet de comprendre la motivation de l’élève à répondre :

aux attentes sociales (parents; institution scolaire)

à la confiance qu’il accorde à son enseignant

au rôle qu’il se donne devant ses camarades

•Le rôle de l’élève est en jeu

3. Des règles et des habitudes générant des contrats

DES EXEMPLES DE CONTRAT PÉDAGOGIQUE

1. Pour avoir de bonnes relations avec ses pairs, un élève doit être de connivence avec les goûts et les modes de vie communs.

2. On ne porte pas atteinte à l’intégrité physique des élèves

3. Un élève ne s’endort pas à l’école

4. On ne doit pas se battre dans la cours de récréation


DES EXEMPLES DE CONTRAT PÉDAGOGIQUE

Le 1er février, un homme de trente ans, dont les fenêtres donnent sur la

cour de l'école, voyant son enfant de six ans se chamailler avec un

autre élève , était sorti de chez lui et avait pris à partie un enseignant.

Une heure plus tard, il était revenu à l'école et s'en était pris au

directeur, le plaquant au sol. (Le Monde du 2 mars 2000, p. 13)

Quelle influence sur le contrat pédagogique?


Un contrat pédagogique utilisé comme dispositif d’enseignement-apprentissage:

• vise au bon déroulement des relations en classe en

précisant les règles entre l’enseignant et ses élèves, telles

que ses attentes à l’égard de leurs comportements, les

consignes, les savoirs déjà vus, etc.

Des affiches précisant « les règles de vie » de la classe

ou les méthodes de travail proposées sont

accessibles.


LE CONTRAT PÉDAGOGIQUE

Parce que les comportements réguliers rendent des

situations saillantes et leur donnent du sens , l’élève

s’attend de manière plus ou moins consciente à ce

que la situation d’apprentissage lui permette

d’orienter et de situer son activité


LE CONTRAT PÉDAGOGIQUE

DES DISPOSITIONS IMPLICITEMENT EXPOSÉES EN CLASSE

Un élève considère la transformation des nombres décimaux en fractions comme étant une division par deux ou encore une approximation de cette division compte tenu des exemples présentés par l’enseignant

• C’est le contrat didactique qui permet de comprendre :

les attentes de l’élève envers l’enseignant

les attentes de l’enseignant envers l’élève

au rôle qu’il se donne devant la tâche

• Le rôle d’apprenti est en jeu


QUELQUES EXEMPLES DE CONTRAT DIDACTIQUE

• La longueur habituelle d’une équation

• L’espace plus grand ou plus petit laissé pour inscrire une réponse sur sa feuille

• La présence de problèmes dont la solution est un nombre décimal plutôt qu’un nombre entier

• L’aide reçue habituellement

• Les paroles d’introduction d’une enseignante interprétées comme des consignes pour réaliser la tâche.


QUELQUES EXEMPLES DE CONTRAT DIDACTIQUE

Dans ses productions, l’élève répond aux attentes des enseignants .

• Certains des élèves du secondaire s’attendent à devoir déjouer des « petites attrapes » dans les problèmes proposés en classe.

• D’autres n’arrivent pas à sélectionner les informations pertinentes d’un problème, et ce, malgré une méthode de travail de type « j’écris ce que je sais, ce que je cherche et je fais un plan ». Ils sont trop préoccupés à sélectionner les informations en fonction de leurs habitudes.


LE CONTRAT DIDACTIQUE

• Le contrat didactique permet de porter une

attention particulière au « discours intérieur »

de l’élève qui se désorganise.

• Ce discours fait intervenir les habitudes et

les règles qui se sont développées durant

l’ensemble de sa scolarité.

«Pour répondre aux attentes de l’enseignant,

l’élève cherche et organise ce qu’il sait. »


2e CONCLUSION

• Si le contrat pédagogique expose des règles

souvent explicites, le contrat didactique repose sur

des règles non dites (implicites)

• Lors d’une situation d’enseignement, les élèves

doivent appliquer les règles du contrat

pédagogique

• Lors d’une situation d’apprentissage, les

enseignants doivent décrypter le contrat

didactique


L’APPORT DE CETTE INTERPRÉTATION

En intervenant de manière à cerner les

attentes des élèves, l’enseignant ajoute à

son éventail d’interventions des adaptations

de nature cognitive

Ex: L’enseignant utilise le savoir comme

tremplin de l’échange plutôt que le

comportement


L’APPORT DE CETTE INTERPRÉTATION

De cette manière, il devient possible de

contourner la confrontation entre les deux

partenaires et de diriger l’attention sur la

tâche à réaliser.

Ex: L’élève se concentre sur les relations

entre les personnages d’un problème pour résoudre le problème


3e CONCLUSION

Puisque les habitudes et les règles développées par les élèves peuvent conduire à ne pas reconnaître les notions en jeu et à se désorganiser, l’identification des spécificités de la tâche permettrait de poser des hypothèses à l’égard de ses habitudes afin de dénouer l’impasse dans laquelle il se trouve.

C’est ici que le rôle de l’enseignant est déterminant

• Une sensibilité à ce contrat implicite permet d’interpréter les échanges de la classe de mathématiques

• En interprétant la réaction de l’élève comme une rupture par rapport à ses attentes, l’intervention poursuit l’apprentissage cognitif plutôt que l’apprentissage social.


COMPRENDRE LE CONTRAT DIDACTIQUE

1. Comment cerner le contrat didactique?

2. Comment influencent-elles leurs réactions

d’évitement ou leurs manifestations de frustration ?

4- Quand? Comment?

Je sais que tu penses tu sais que je pense…

COMMENT CERNER LE CONTRAT DIDACTIQUE?

La situation d’enseignement pose le processus de

communication sur une réciprocité des attentes

…que je vais

t’apprendre à

savoir-faire et

que tu me

montreras ce que

tu sais faire. »

…que je vais te

montrer ce que je

sais faire pour

savoir que je sais. »

4- Quand? Comment?

LES ATTENTES À L’ÉGARD DES TÂCHES PROPOSÉES EN CLASSE

• Les attentes des élèves

• En raison de leurs habitudes et des règles qu’ils ont façonnées, les élèves risquent de manifester frustration ou

évitement

• Les attentes de l’enseignant

• En raison de sa concentration sur la matière qui a été

présentée, l’enseignant risque de ne pas comprendre la

réaction de l’élève

4- Quand? Comment?


Les échanges mènent à :

attentes de l’élève attentes de l’enseignant

…rupture de

contrat

didactique

…confrontation

entre les personnes

(troubles de

comportement)

4- Quand? Comment?


La situation d’enseignement pose le processus de

communication sur une réciprocité des attentes

Rupture de contrat didactique Confrontation

Fait référence

aux règles de

l’apprentissage

Font référence aux

règles sociales de

l’élève

4- Quand? Comment?

4e CONCLUSION

En considérant les réactions de l’élève qui se

désorganise comme les conséquences

d’une rupture du contrat didactique…

… l’intervention de l’enseignant, qui vise

habituellement une adaptation de

l’environnement physique ou social

s’enrichit d’adaptations cognitives.

4. Quand et comment?

TROIS CATÉGORIES D’INFORMATIONS

a) L’information qui fait l’objet de la tâcheLe discours sur l’apprentissage et les consignes pour réaliser la tâche

b) Les ressources de communication de l’enseignant (ses mots, le ton de sa voix, ses gestes, etc.)

« Oui, ah! C’est ça! »

c) Les indices donnés par l’élève (ou le groupe) en rétro information, sur le traitement qu’il fait de l’information qui fait l’objet de la tâche

Les productions des élèves et le langage non-verbal

5. Que retenir pour intervenir

Les règles élaborées par les élèves sont le plus

souvent implicites et laissent parfois surgir le

désarroi

L’enseignant adapte son intervention au

niveau accessible à l’élève.

5. Que retenir pour intervenir PARMI LES CATÉGORIES

D’INFORMATIONS

INTERPRÉTER

Une élève du 2e cycle du secondaire, demandant sans cesse des explications à son enseignant, contribuait à lui faire croire qu’il se répétait alors que pour elle, il ne s’agissait pas de la même question.

•Interprété avec la notion de « rupture du contrat didactique » • la première explication offerte à un point de rupture modifie la

compréhension de l’élève qui poursuit son cheminement.

• Le travail qu’elle effectue pour réaliser l’exercice la mène éventuellement à une nouvelle incompréhension, créant ainsi une autre rupture qui exige une explication additionnelle.

•Du point de vue de l’enseignant, il s’agit de la même explication, mais pas du point de vue de l’élève qui se situe ailleurs dans son cheminement, le point de rupture à partir duquel la question est reformulée n’étant pas le même.(DeBlois, 2008)


UTILISER CERTAINS OUTILS NON-VERBAUX

Parmi les outils dont disposent les enseignants, les yeux qui grandissent , le ton de la voix qui

augmente ou qui diminue, des sourcils qui se

lèvent, de la bouche qui se tord, etc… sont autant

d’indices pour compléter le message exposé sur le

savoir…

Mais aussi autant d’indices pouvant être générés

par les élèves qui ne comprennent plus…


COMMENT INTERVENIR?

• Transformer l’expression non verbale en expression

verbale

• Écouter l’explication de l’élève et sa façon de concevoir la

situation

• Cerner comment cette tâche est différente de celles déjà

traitées.

• Demander à l’élève de reformuler des explications

• pour s’assurer de comprendre son point de vue.

• Pour évaluer l’écart entre les représentations que l’élève se fait

de la tâche et celles qui sont exigées.

• Pour se donner un peu de temps pour se projeter dans la

poursuite de l’intervention.


COMMENT INTERVENIR?

• Déterminer le domaine de validité d’une

connaissance de manière à élaborer un nouvel

apprentissage

Confronter les représentations de l’élève avec les nouvelles

représente un état de déséquilibre important

• Que faisait cet élève lorsqu’il manifesta une

réaction d’évitement ?

• Raconte-moi ce que tu as essayé »

• Raconte-moi ce que tu pensais… »


COMMENT INTERVENIR

• Renforcer un discours sur les savoirs dans différents

contextes :

• Ce qui valorise certains attributs de manière inférentielle,

• Exemple: permettre aux élèves de connaître nos gestes non

verbaux comme « Lorsque je lève le sourcil, attention, je dis

quelque chose d’important! »

• Ce qui confronte ses savoirs aux connaissances

• Exemple : la moyenne n’est pas une approximation mais une

valeur qui équilibre les données d’une distribution

• Ce qui engage le processus de mobilisation

• Exemple: poser une question au début du cours aux élèves qui

se rapporte aux connaissances qu’ils ont déjà


CONCLUSION

• Certains élèves se désorganisent car leurs

apprentissages se désorganisent

• Certains apprentissages sociaux favorisent les

apprentissage cognitifs

• Ex. Comment réagir devant l’imprévu

• La communication analysée par des informations

verbales et non verbales apporte de nouveaux

indices pour interpréter


CONCLUSION

• Le passage des rôles d’enfant à élève puis à

apprenti a des exigences

• Certains apprentissages sociaux sont nécessaires pour

s’adapter à reconnaître l'apport des différences

• Certains enfants connaissent pas les codes spécifiques à

différentes situations

• Les apprentissages cognitifs exigent de remettre en

question ce qui est connu.


CONCLUSION


ENFANT

ELEVE

Elève-apprenti ?

Ou apprenti-élève?

Ou Enfant-élève?

A l’école, les enfants doivent jouer plusieurs rôles

RÉFÉRENCES

• Beaulac, S., DeBlois, L. (2007). Accompagner l'élève dans l'évolution

de sa compréhension de la démarche algébrique. Dans Difficultés

d'enseignement et d'apprentissage des mathématiques. Hommage à Gisèle Lemoyne. Collection Synthèse. Édition Bande Didactique. 167-

195.

• DeBlois, L. (2008) Un autre joueur dans la classe de mathématique : le

contrat didactique. L’élève en grande difficulté : Contextes

d’interventions favorables. Editeurs : Julie Myre Bisaillon et Nadia

Rousseau. Collection Éducation. Recherche. Presses de l’Université du

Québec. Québec. 193-211.

• DeBlois, L. (2010). Peut-on lire les troubles de comportement

autrement? Bulletin du CRIRES. Nouvelles CSQ.

• Dencuff, Marie-Pierre (2010). L’Éducation dans la presse: la

représentation de l’institution et de ses pratiques. Thèse de doctorat.

Université Aix-Marseille .

Documents

Les troubles de comportements à l’école: une question … · 2013-08-27 · PLAN DE LA PRÉSENTATION 1. État de la situation 2. L’influence de la société sur la situation