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L’été de grand-papa Michel Lavoie Roman Extrait de la publication

L'été de grand-papa… · Que les vacances d’été arrivent ! Je n’en pouvais plus d’attendre. Ma dernière journée au primaire. Je me sentais fébrile à l’idée de quitter

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L’été de grand-papa

Michel Lavoie

RomanExtrait de la publication

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Du même auteur Aux Éditions L’InterligneUn amour de chat, collection « Cavales », 2001La maison infernale, collection « Cavales », 2007

Chez d’autres éditeurs Drôle d’héritage !, Montréal, Pierre Tisseyre, 1994 Arianne, mère porteuse, Montréal, Pierre Tisseyre, 1995Délices amères, Hull, Vents d’Ouest, 1996État d’alerte, Montréal, Pierre Tisseyre, 1996Les soirs de dérive, Montréal, Pierre Tisseyre, 1996 Vendredi, 18 heures..., Hull, Vents d’Ouest, 1996Le secret d’Anca, Hull, Vents d’Ouest, 1996Le rocher triangulaire, Vanier, CFORP, 1997La fille d’Arianne, Hull, Vents d’Ouest, 1997La lettre d’Anca, Hull, Vents d’Ouest, 1997Compte à rebours, Ottawa, Le Vermillon, 1998Les douze coups de minuit, Montréal/Paris, Balzac/Le Griot, 1998Le destin d’Arianne, Hull, Vents d’Ouest, 1998Le choix d’Anca, Hull, Vents d’Ouest, 199913, rue Cartier, Montréal/Paris, Balzac/Le Griot, 1999Le défi de Sophie Bonin-Jutras, Montréal, Québec-Amérique, 1999La Colombe blanche, Saint-Boniface, des Plaines, 1999On zoo avec le feu, Montréal, Soulières, 2000Projet gicleurs, Hull, Vents d’Ouest, 2000Écrire un roman jeunesse... au-delà du rêve, Ottawa, David, 2001Mystère, rue de Courcelles, Ottawa, Le Vermillon, 2002La rage dans une cage, Gatineau, Vents d’Ouest, 2002L’amour à la folie, Granby, de la Paix, 2002 Lettre à Frédéric, Gatineau, Vents d’Ouest, 2003Le journal d’Arianne, Gatineau, Vents d’Ouest, 2003Un soleil pour Alexandre, Granby, de la Paix, 2003 Le coffre magique, Gatineau, Vents d’Ouest, 2004Le retour d’Anca, Gatineau, Vents d’Ouest, 2005Des yeux de feu, Montréal, Pierre Tisseyre, 2005Entre ciel et terre, Gatineau, Vents d’Ouest, 2006Sous le carillon, Montréal, Pierre Tisseyre, 2006La cafetière de monsieur Latour, Gatineau, Vents d’Ouest, 2006Alerte au village !, Montréal, du Phoenix, 2007

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Michel Lavoie

L’été de grand-papa

Roman

Collection

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Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada

Lavoie, Michel, 1946- L’été de grand-papa / Michel Lavoie.

(Cavales )Pour les 9-11 ans.ISBN 978-2-923274-71-3

I. Titre. II. Collection : Cavales

PS8573.A87575E84 2010 jC843’.54 C2010-905354-0

Les Éditions L’Interligne261, chemin de Montréal, bureau 310

Ottawa (Ontario) K1L 8C7Tél. : 613-748-0850 / Téléc. : 613-748-0852

Adresse courriel : [email protected]

Distribution : Diffusion Prologue inc.

Papier ISBN : 978-2-923274-71-3PDF ISBN : 978-2-89699-040-5ePub ISBN : 978-2-89699-041-2

© Michel Lavoie et Les Éditions L’InterligneDépôt légal : troisième trimestre 2010

Bibliothèque nationale du CanadaTous droits réservés pour tous pays

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Prologue

Le 3 octobre, à 16 h 50, j’ai reçu un appel de mon fils, mon grand garçon de 25 ans. Il m’a annoncé une merveilleuse nouvelle : il sera papa pour la première fois. De toute évidence, cela signifie que je serai grand-papa.

Cette annonce a fait jaillir une joie intense. Elle m’a aussi projeté dans des souvenirs d’enfance, dont un événement particulier qui restera gravé dans ma mémoire jusqu’à la fin de mes jours. Encore aujourd’hui, je me demande si cet événement s’est réellement produit ou s’il n’a pas été le fruit de mon imagination fertile. Pourtant, chaque seconde de cette journée mémorable est ancrée dans ma mémoire. Quand je revois certaines images dans ma tête, je me dis que mon grand-père a voulu me dévoiler le vrai sens de la vie.

Dehors, le soleil amorce sa descente dans un ciel orangé. Je m’installe confortablement sur mon

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balcon, ferme les yeux et me laisse voguer vers des mers lointaines. Des lueurs illuminent mon cœur. Le visage de grand-papa s’y dessine à traits fins et colorés, me réchauffe l’intérieur.

Alors, je plonge peu à peu dans l’été de grand-papa...

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ChaPitre un

Coup de tonnerre

J’avais les deux yeux cimentés à la grosse horloge de la classe. J’aurais tant voulu escalader le mur comme Spiderman pour donner un bon élan aux aiguilles qui me semblaient si paresseuses. Vite ! Que les vacances d’été arrivent ! Je n’en pouvais plus d’attendre.

Ma dernière journée au primaire. Je me sentais fébrile à l’idée de quitter à tout jamais ma petite école. Je ne serais plus traité en bébé. Dans quelques heures à peine, Michel Langlois, 11 ans et des poussières, du gel orange dans les cheveux et des espadrilles à roulettes dans les pieds, serait officiellement un ado ! Wow ! De quoi dormir les yeux grands ouverts, le cœur en compote et le monde à mes pieds. D’accord, j’exagérais un peu, mais je ne voulais surtout pas diluer mon enthousiasme, parce que les vacances s’annonçaient comme les plus fabuleuses de ma courte existence.

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Incroyable ! J’allais être seul tout l’été !... Bon, disons presque seul, sous surveillance bien sûr, mais une garde à distance, virtuelle, fantomatique.

Le hasard était sûrement tombé en amour avec moi. Mon cher papa en or — il avait pris beaucoup de valeur sur le marché des parents — s’était vu confier une mission de la plus haute importance par son directeur. Il devait se rendre en Chine afin d’ouvrir une succursale de la compagnie. Maman, un peu déprimée de cette absence imprévue, a alors décidé de reporter ses vacances à l’hiver.

Il ne restait donc que ma grande sœur Marilou pour s’occuper de ma petite personne. Quel bonheur ! Tout un phénomène, celle-là. Une vraie turbine. Son moteur tourne à mille tours par seconde. Un portable collé sur l’oreille droite, le récepteur maison sur la gauche, elle parle, jacasse, converse, bavarde et pérore à longueur de journée, jusqu’à tard le soir. Bref, elle surfe sur une autre planète, n’a aucune idée de ce qui se passe autour d’elle et flotte entre ciel et terre. Qu’aurais-je pu demander de plus ? La gardienne idéale !

J’avais déjà planifié plein d’activités avec mes amis : des balades à bicyclette au centre-ville, de la bouffe santé au McDo, des baignades dans des lieux interdits et même le cinéma en plein après-midi. Des territoires défendus, donc plus agréables. En prime : aucun reproche ni punition. Le paradis sur terre !

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Le timbre sonore a retenti dans une divine musique. Politesse oblige, je me suis dépêché de saluer mon enseignant, puis je suis sorti de l’école comme une fusée. Il n’y avait pas une minute à perdre. Je devais aller peaufiner mes plans ultra-secrets puisque, dès le lendemain matin, la fête commençait.

Je marchais rapidement, porté sur un nuage d’espoir et propulsé par des vents favorables. Mon imagination illuminait dans mon esprit des dizaines d’images plus belles les unes que les autres. J’avais tellement de projets que je me demandais lequel choisir en premier. La solution s’est offerte d’elle-même, au moment où j’arrivais à la maison. J’allais tout simplement écrire sur des bouts de papier chacune de mes idées et les déposer dans un sac. Au petit matin, je n’aurais qu’à procéder à la pige. Peu importe ce qu’allait m’offrir le hasard, j’étais assuré de gagner le gros lot.

En entrant chez moi, j’ai aperçu Marilou, affaissée sur le sofa du salon, en pleine conversation téléphonique, bien entendu. Elle parlait aussi vite qu’une mitraillette expulse ses munitions. Je ne comprenais pas un traître mot de ce qu’elle disait. J’ai peur qu’un jour, elle oublie de respirer et tombe dans les pommes.

J’ai grimpé l’escalier deux marches à la fois pour me rendre à ma chambre. J’ai aussitôt fermé la porte. L’opération Merveilles d’été était

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enclenchée. J’ai sorti de mon sac d’école trois feuilles blanches que j’ai découpées. Avec mon crayon bleu fluo, j’ai inscrit sur 12 bouts de papier mes activités préférées. J’ai vidé le contenu de mon sac et j’y ai déposé mes trésors.

Cette effervescence m’a creusé l’appétit. Un bon gros morceau de gâteau au chocolat et un grand verre de lait s’annonçaient le remède idéal. En deux temps, trois mouvements, j’étais installé devant le téléviseur au sous-sol en train de me rassasier.

Concentré au max sur un film d’aventure, j’ai sursauté quand ma mère s’est pointée à mes côtés. Elle affichait un magnifique sourire. Son regard brillait d’un espoir à peine camouflé, signe avant-coureur d’une mauvaise nouvelle. Ma mère avait le don inné de me faire avaler des couleuvres. Elle y ajoutait une pincée de sucre pour en rendre le goût moins amer.

— Tu vas bien, mon toutou-chouette ?Un morceau de gâteau s’est coincé dans ma

gorge. J’ai dû le caler avec une bonne dose de lait. Je l’aime bien, ma mère, mais j’ai toujours l’impression qu’elle veut me garder sous son joug pour l’éternité. C’est peut-être sa façon à elle de rester jeune. Les adultes ont de ces stratégies bizarres.

— Maman ! Je ne suis plus un bébé ! Je m’en vais au secondaire en septembre. Je suis maintenant un ado !

Je n’étais pas certain, mais j’ai cru un instant que maman a ravalé sa salive, tout en épanchant une larme sur le bord de sa paupière. À mon tour, je me

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suis senti mal à l’aise. Qu’ils sont compliqués, les adultes ! Ils agissent parfois comme des adolescents. Pour me faire pardonner, je me suis lové dans ses bras. C’était si doux et si calme. Puis, je m’en suis détaché pour retourner à mon gâteau, question de passer à un autre sujet.

Avoir connu d’avance cet autre sujet, je me serais embourbé pendant des heures, voire des journées et même des mois, dans une longue discussion sur l’autorité parentale, le besoin d’indépendance des enfants et tous ces conflits familiaux dont les psychologues se régalent.

Soudain, les yeux de maman étaient en forme d’accent circonflexe, ses lèvres tremblotaient et ses joues rougissaient. Alarme ! Elle s’apprêtait à me lancer sa nouvelle torpille, un véritable coup de tonnerre. Pour éviter le pire, j’ai tenté le coup ultime, ma stratégie haut de gamme.

— Ah ! J’ai mal au cœur ! Trop de gâteau ! Une main sur la bouche, je venais pour me

lever. Ma mère n’est certes pas la personne la plus costaude que je connaisse, mais sa main sur mon épaule m’a cimenté sur le sofa.

— Jeune homme, ne joue pas la comédie. Je te connais comme si je t’avais tricoté serré.

Elle m’a fixé, puis a souri. — De fait, à bien y penser, c’est vrai que je t’ai

tricoté, mon petit amour.Elle m’avait totalement désarçonné. Comment

un petit garçon, même rendu à la frontière du

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secondaire, même en état de panique avancé, pourrait demeurer insensible devant une telle déclaration ? Il ne me restait plus qu’à abdiquer, sans trop le laisser paraître. Malgré mon repli, l’orgueil me squattait de partout.

— D’accord, maman. C’est quoi, la mauvaise nouvelle ?

Elle m’a offert alors son plus sublime théâtre. Quelle actrice ! Elle réussirait haut la main toutes ses performances. Comment est-il possible qu’aucun réalisateur de film ne l’ait encore découverte ? Je devrais être son agent. Je serais millionnaire.

Maman vedette s’est assise à mes côtés. Elle a d’abord repoussé une mèche rebelle de son front (le charme), a incliné légèrement la tête (une fausse humilité) et a souri tendrement (une complicité envahissante).

Voilà ! J’étais cuit ! Mou comme de la guimauve. Mon corps s’enfonçait dans le sofa et ma résistance s’effritait au rythme des secondes. Elle pourrait me convaincre qu’il neigeait en plein mois de juillet, que j’adorais l’école et que des martiens venaient passer leurs vacances chez nous.

— Michel, j’ai une nouvelle incroyable à t’annoncer.

Je m’en doutais bien, en effet. Un soupir ou deux, et elle a enchaîné, cette fois moins prudente, plus consciente de son pouvoir.

— En fait, deux nouvelles... de fait, une première nouvelle qui en entraîne une deuxième.

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Le tournis s’est emparé de moi. J’avais l’impression de culbuter dans un puits profond, ensuite de nager dans une rivière infectée de piranhas et, finalement, de m’élever dans le ciel pour me noyer dans un nuage de doutes. Wow ! Une balade gratuite dans un super gros manège à La Ronde !

Ma mère m’a ramené sur terre en me pinçant la peau d’un bras.

— Allô ! La Terre appelle la Lune ! Il y a quelqu’un ? Répondez s’il vous plaît.

Bien sûr, il y avait quelqu’un. Moi ! Mon moi qui se préparait, il y a quelques minutes à peine, à la pige d’une activité hallucinante ; mon moi qui, maintenant, vacillait au bord d’un volcan en éruption.

— Michel, imagine-toi que Marilou a obtenu une offre de travail à Toronto pour tout l’été ! Elle va pouvoir améliorer son anglais. C’est super, non ? Elle part dès demain.

Voilà pour la première nouvelle. Sur le coup, je me suis dit que Bell Canada allait connaître tout un répit. Puis, je me suis rendu compte que je n’avais plus de gardienne attitrée. Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour réfléchir à cette pensée, puisque maman m’assommait de sa deuxième nouvelle, un coup de marteau en plein front.

— Alors, ton père et moi, on a décidé de t’offrir un superbe cadeau. Noël en juillet ! N’est-ce pas formidable ?

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Disons que j’avais surtout chaud pour une fête de Noël. Quelques éclairs se pointaient à l’horizon et zébraient mon cerveau de larves de peur. C’est alors que maman a laissé éclater le coup de tonnerre.

— Mon cher petit Michel, tu vas aller passer tes vacances chez ton grand-papa !

Paf ! Mon cœur a sauté dans ma gorge, mes épaules ont frappé le sol et mes orteils se sont recroquevillés sur eux-mêmes. J’ai ouvert la bouche, mais aucun son ne voulait en sortir. Je l’ai fermée, j’ai pris une grande respiration, puis je l’ai rouverte, tel un poisson qui suffoquait. Mon cri a explosé en un hurlement à l’aide :

— Quoi ! Chez grand-papa au fond de la campagne ! À regarder les mouches voler, à sentir la merde de cochon, à survivre loin de toute civilisation ! Jamais ! J’aime cent fois mieux retourner à l’école.

Je ne savais plus si je devais pleurer, courir partout au sous-sol, sauter au plafond, menacer de faire une fugue jusqu’en Afrique ou tout ça à la fois.

Malgré ma crise, il fallait que je garde la tête froide pour trouver l’argument massue qui aurait pu convaincre maman de changer d’idée. Mais elle restait calme, en parfait contrôle de la situation. Elle me regardait, si sûre d’elle-même que je fondais peu à peu de résignation.

Il ne me restait qu’une arme, si faible, si innocente, si amplifiée.

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— Maman, je l’aime bien, grand-papa, mais tu le connais. Il perd chaque jour un morceau de sa mémoire. S’il fallait qu’il m’oublie dans sa maison et parte à l’aventure. Ou qu’il mette le feu à sa grange, alors que je suis couché dans le foin. Ou qu’il pense que je suis un étranger, un voleur, et qu’il me vise avec son arc.

Ma mère m’a souri.— Justement, mon petit bébé, tu seras pour

quelque temps un beau morceau de sa mémoire. Et tu exagères son état. Si j’avais le moindre doute sur sa capacité de prendre soin de toi, jamais je ne t’enverrais passer l’été chez lui.

J’avais perdu mon combat. Je me suis levé et j’ai couru jusqu’à ma chambre. J’ai ramassé mon sac et j’en ai sorti les bouts de papier. Je les ai déchirés un à un, des poèmes reniés par son auteur. Pris de rage, je les ai lancés dans les airs. Ils ont plané, puis sont tombés à ma droite, à ma gauche. L’un d’eux s’est posé sur mon genou. Je l’ai pris. Un mot, une blessure : le mot amis.

Ma rage est devenue douleur, et mes larmes ont commencé à couler...

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Les Éditions L’Interligne261, chemin de Montréal, bureau 310

Ottawa (Ontario) K1L 8C7Tél. : 613-748-0850 / Téléc. : 613-748-0852

Adresse courriel : [email protected]

Directrice de collection : Françoise Lepage

Œuvre de la couverture : Marion ArbonaGraphisme : Estelle de la Chevrotière

Correction des épreuves : Jacques CôtéDistribution : Diffusion Prologue inc.

Les Éditions L’Interligne bénéficient de l’appui financier du Conseil des Arts du Canada, de la Ville d’Ottawa, du Conseil des arts de l’Ontario et de la Fondation Trillium de l’Ontario. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

Les Éditions L’Interligne sont membres du Regroupement des éditeurs canadiens-français (RECF).

Ce livre est publié aux Éditions L’Interligne à Ottawa (Ontario), Canada. Il est composé en caractères Garamond, corps douze, et a été achevé d’imprimer sur les presses de Marquis imprimeur (Québec), 2010.

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L’été de grand-papaMichel Lavoie

L’été s’annonce bien pour Michel ! Ses parents partent en Chine et le laissent aux bons soins de sa grande sœur, toujours pendue au téléphone ou partie en vadrouille avec ses copines. Le jeune Michel entrera au secondaire cet automne, mais pour l’heure, il va profiter de la liberté des vacances pour faire absolument tout ce qui lui plaît !

Sauf qu’à la dernière minute, ses plans sont bouleversés : il ira finalement passer l’été tout seul à la ferme de grand-papa, perdue à la campagne ! Complètement dépité, Michel n’imagine pas encore à quel point cet été restera gravé dans sa mémoire…

Michel Lavoie est né à Hull en 1946. Il est papa de deux grands fils et grand-papa de deux petits-fils. Il a été enseignant pendant une trentaine d’années et, depuis 1994, il est auteur de romans jeunesse. À l’école secondaire Mont-Bleu, il a fondé les Éditions Mont-Bleu dans le but d’aider des jeunes à publier des livres de facture professionnelle. Animé par la passion de l’écriture, Michel Lavoie a publié 43 romans jeunesse chez plusieurs éditeurs.

CollectionAventure, 9 ans et plus

Illustration de la couverture : Marion Arbona Extrait de la publication