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L’auteur qui dit « je » se pousse au premier plan et intervien de façon à garder sur ces récits une sorte de contrôle psychologique et morale. vec lui! il am"ne toute une suite de personnages! hommes et femmes! dans la #ouche de qui il place et ses contes et ses ré$e%ions sur les contes. &.'() *arguerite adopte avec +occace la division en journées! asse, souple pour permettre de varier les récits! asse, précise pour les contenir dans de certaines limites. -rop d’histoires peut /tre 0 mais pas d’histoires incroya#les! histoires de #rigands étant de toutes les plus croya#les. Les devisant une fois réunis à 1arrance par les #ons soins de narratrice! il faut s’occuper d’eu%. Les sauver de l’ennui. Le faire passer le temps. 2t nous atteignons ici la derni"re des vraisem#lances créées par *. de 3avarre. *ais ce n’est plus de la vraisem#lance. 4’est de la vérité psychologique52lle sai que pour faire un jeu de société plaisant! il faut des hommes des femmes. 1ur le th"me de la princesse mariée contre son gré! sur celui de l’hériti"re contrainte par son 6oi d’épouser un homme qu’elle n’aime pas et renoncer à un homme qu’elle aime 7 *arguerite n’avait que trop de souvenirs à e%ploiter. 8l faut voir aussi que la 6enaissance se mit avec passion à l’étude des « cas » individuels 7 des /tres humains saisis dan leur personnalité! et non plus dans leur généralité. &lus ou moins disons qu’ils avaient dans l’idée d’ouvrir sur l temps ce que nous appellerions une enqu/te psychologique et morale. 9e poser! et de discuter! des cas de conscience actuel 3on point entre docteurs 7 mais entre gens du monde. :ens du monde! hommes et femmes ; entre eu% l’amour! la grande a<aire de toujours. 1i le soi venu! elle aimait déposer son lourd manteau de princesse! a#diquer ses soucis de diplomate et de gouvernante! se prosterner au% pieds du créateur et gouter dans la pai% de

Lucien Febvre - Amour Sacré, Amour Profane

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Lauteur qui dit je se pousse au premier plan et intervient de faon garder sur ces rcits une sorte de contrle psychologique et morale. Avec lui, il amne toute une suite de personnages, hommes et femmes, dans la bouche de qui il place et ses contes et ses rflexions sur les contes. P.237Marguerite adopte avec Boccace la division en journes, assez souple pour permettre de varier les rcits, assez prcise pour les contenir dans de certaines limites. Trop dhistoires peut-tre; mais pas dhistoires incroyables, les histoires de brigands tant de toutes les plus croyables. Les devisant une fois runis Sarrance par les bons soins de la narratrice, il faut soccuper deux. Les sauver de lennui. Leur faire passer le temps. Et nous atteignons ici la dernire des vraisemblances cres par M. de Navarre. Mais ce nest plus de la vraisemblance. Cest de la vrit psychologiqueElle sait que pour faire un jeu de socit plaisant, il faut des hommes et des femmes. Sur le thme de la princesse marie contre son gr, sur celui de lhritire contrainte par son Roi dpouser un homme quelle naime pas et renoncer un homme quelle aime Marguerite navait que trop de souvenirs exploiter. Il faut voir aussi que la Renaissance se mit avec passion ltude des cas individuels des tres humains saisis dans leur personnalit, et non plus dans leur gnralit. Plus ou moins disons quils avaient dans lide douvrir sur leur temps ce que nous appellerions une enqute psychologique et morale. De poser, et de discuter, des cas de conscience actuels. Non point entre docteurs mais entre gens du monde.Gens du monde, hommes et femmes: entre eux lamour, la grande affaire de toujours. Si le soi venu, elle aimait dposer son lourd manteau de princesse, abdiquer ses soucis de diplomate et de gouvernante, se prosterner aux pieds du crateur et gouter dans la paix de loratoire les joies du pur amour tout la journe elle regardait, observait, calculait les ractions des hommes et des femmes. Le piment du plaisir damour: lantiquit qui na point chant le renoncement volontaire de lamant lamante mais la sparation cruelle, par le destin ou par la mort, dHro et de Landre unis dans la possession.M. ne voit pas les hommes travers les livres et les textes, les Grecs et les Romains, les moralistes catholiques ou les thologiens protestants. Elle promne sur le monde tel quil lui apparat un regard clair, dsabus, honnte et scrupuleux. Ni indulgence aveugle, ni svrit fanatique. On comprend non moins ce qui, de prime abord, choque si vivement tant de modernes lecteurs de lHeptamron: cette surprenante mixture damour profane et de dvotion exalte quau seuil de chaque journe la vieille dame Oysille prpare, dune main savante, pour ses devisants. P.282Car toute journe de contes, de ces contes dont un amour souvent illgitime, la tromperie, la violence, ladultre et cet excs pareils font toute la substance toute journe souvre non seulement par une messe lintention des conteurs, chacun deux attirant, en toute srnit la bndiction de Dieu sur le rcit gaulois quil doit fournir le soir, pour payer son cot. 282Dans lH. M. ne dogmatise jamais thologiquement. Pas plus quelle ne disserte et ntale son savoir. Dans la Xme nouvelle, les revirements de situation sont choquants: Le brusque revirement dun soupirant longtemps respectueux, qui, tout coup, se rue au viol comme un forcen. Et les singuliers rapports de lamour et du mariage, dont tmoigne tout au long un rcit qui nous arrte. Pour conclure souvent les histoires du meurtre, nous avons des discussions placides, bonasse, un peu niaise, sur les maux que cause lamour: ce petit dieu, explique dune voix nigaude le tendre vque de Sez, ce petit dieu qui prend son plaisir tourmenter autant les princes que les pauvres, et les forts que les faibles. Se taire. Dissimuler. Refouler. Ces hommes ne peuvent. Le silence et le secret les touffent littralement. Il leur faut un appui humain, un conseil: la parole, la confidence, la confession si lon veut. Ces hommes qui, chaque matin, suivent avec recueillement les pieux exercices quoi les convie dame Oysille; ces dvots qui nauraient garde de manquer la messe ou les vpres ce sont les mmes qui, sans sourciller, reprsentent le viol comme une ncessit quoi les contraint la sotte obstination (heureusement assez rare) de quelques femmes ttues et bornes qui ne veulent rien comprendre, ni rien savoir.