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LUTTER CONTRE VARROA DE MANIÈRE RAISONNEE Présentation orale faite par le docteur vétérinaire Valérie BRETON, animatrice de la Section apicole régionale de GDS aquitaine ([email protected]) Pau le 19 mars 2016 IL EST RAPPELE QUE LA DECLARATION DES RUCHES ET RUCHERS EST OBLIGATOIRE DES LA PREMIERE RUCHE ET QUE CETTE DECLARATION AURA LIEU EN 2016, ENTRE LE 1 er SEPTEMBRE 2016 ET LE 31 DECEMBRE 2016 POUR TOUS LES APICULTEURS. Après quelques éléments sur la biologie de Varroa destructor permettant de comprendre les bases de la lutte contre le Varroa (données bibliographiques), nous évoquerons les différents traitements et la surveillance des colonies d’abeilles par comptages de varroas. Compte tenu du temps limité, nous ne traiterons pas des méthodes biotechniques permettant de limiter la croissance de la population de varroas au sein de la colonie d’abeilles.

Lutter contre le varroa de manière raisonnée

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Page 1: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

LUTTER CONTRE VARROA DE MANIÈRE RAISONNEE Présentation orale faite par le docteur vétérinaire Valérie BRETON, animatrice de la Section apicole

régionale de GDS aquitaine ([email protected])

Pau le 19 mars 2016

IL EST RAPPELE QUE LA DECLARATION DES RUCHES ET RUCHERS EST OBLIGATOIRE DES LA PREMIERE

RUCHE ET QUE CETTE DECLARATION AURA LIEU EN 2016, ENTRE LE 1er SEPTEMBRE 2016 ET LE 31

DECEMBRE 2016 POUR TOUS LES APICULTEURS.

Après quelques éléments sur la biologie de Varroa destructor permettant de comprendre les bases de la

lutte contre le Varroa (données bibliographiques), nous évoquerons les différents traitements et la

surveillance des colonies d’abeilles par comptages de varroas. Compte tenu du temps limité, nous ne

traiterons pas des méthodes biotechniques permettant de limiter la croissance de la population de

varroas au sein de la colonie d’abeilles.

Page 2: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

1) REPRODUCTION DE VARROA DESTRUCTOR ET DYNAMIQUE DE SA POPULATION AU COURS D’UNE ANNEE DANS UNE COLONIE D’ABEILLES : phase phorétique et phase de

reproduction

1/Le parasite Varroa destructor

C’est un acarien parasite d’Apis cerana (Asie), arrivé en France en 1982.

Il est présent dans toutes les colonies en France sauf sur l’île d’Ouessant.

Il se multiplie dans le couvain operculé, se nourrit des protéines de l’hémolymphe des nymphes et des

jeunes abeilles.

C’est un vecteur et hôte de nombreux virus : DWV, SBV, ABPV, CBPV, BQCV, KBV...

Son cycle de développement est étroitement corrélé à celui de l’abeille.

Sa morphologie lui permet une adaptation parfaite au parasitisme : corps aplati lui permettant de se

déplacer dans l’alvéole d’abeille et de s’immerger dans la gelée nutritive, 8 pattes terminées par une

ventouse favorables à la vie phorétique, cuticule (+ poils) de composition similaire à celle de l’abeille et

évoluant comme celle de l’abeille.

Varroa destructor est considéré comme un fléau sanitaire majeur en apiculture, à l’origine de

l’effondrement de beaucoup de colonies.

2/ Le stade varroa phorétique

Ce stade caractérise la vie du varroa en dehors du couvain. Il ne concerne que les femelles varroas

(fondatrice mère et ses descendantes), les mâles meurent dans l’alvéole de couvain dans laquelle ils sont

nés. Le stade phorétique se déroule sur les jeunes abeilles adultes : les varroas survivent en ponctionnant

l’hémolymphe riche en protéines des jeunes abeilles. C’est une phase transitoire mais obligatoire pour

acquérir la maturité sexuelle. Les abeilles opposent une résistance à ce parasitisme grâce au

comportement d’épouillage (efficacité variable).

La phase de phorésie permet l’infestation de nouvelles alvéoles dans la même colonie, l’infestation de

nouvelles colonies : lors de la dérive, du pillage… Les ré infestations de colonies sont très importantes en

automne. Ce stade est celui sur lequel tous les médicaments sont actifs.

Rq : Varroa ne peut vivre plus de 6 à 8 jours en dehors d’une colonie d’abeilles.

Phorésie et couvain hivernal : les varroas survivent plusieurs semaines ou mois l’hiver en l’absence de

couvain, sur les abeilles adultes. En France, l’absence de couvain hivernal ne dure pas plus de 1 à 2 mois

dans les zones froides. En Aquitaine, la période sans couvain est courte ou inexistante (entre 20 novembre

et fin décembre). Cependant en automne et hiver, il y a moins de couvain et moins de multi-infestations

des cellules par les varroas, la reproduction des varroas est très ralentie.

Page 3: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

3/ Biologie et reproduction des varroas

a/ La reproduction des varroas :

- se déroule dans le couvain operculé (couvain d’ouvrières et de faux-bourdons)

- les varroas sont attirés par l’odeur des nourrices (abeilles de moins de 14 jours) : le parasitisme

est très important sur les cadres de couvain

- des substances émises par les larves L5 (kairomones) attireraient les varroas et déclencheraient

aussi l’operculation par les ouvrières

- le couvain d’abeilles operculé est un milieu idéal pour la reproduction des varroas : température

et humidité optimales pour eux, nourriture abondante

- l’attractivité du couvain mâle est 8,3 fois plus importante en moyenne que le couvain

d’ouvrières.

Dans une même alvéole, une ou plusieurs femelles varroas peuvent pondre. Chaque femelle varroa aura

dans sa vie 2 à 3 cycles de reproduction et pondra 18 à 30 œufs. Chaque femelle varroa produira 2 à 6

femelles varroas fertiles. L’espérance de vie d’une femelle varroa adulte est de 2,5 à 3 mois pendant

l’été. En été, 60 à 80-90% des varroas sont dans le couvain operculé.

Développement de varroa dans du couvain d’ouvrières

Développement de varroa dans du couvain de faux-bourdons

Page 4: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Le premier œuf est pondu 60 à 70 heures après l’operculation et est un œuf de mâle, les œufs suivants

sont pondus environ toutes les 30 heures et sont des œufs de femelles. Le seul varroa mâle ne sortira

jamais de l’alvéole : il y féconde ses sœurs et demi-sœurs et les jeunes femelles issues des autres

fondatrices. Il meurt au moment de l’émergence de la jeune abeille du fait des modifications de

l’atmosphère de l’alvéole (température et surtout hygrométrie) liées à la désoperculation. Selon leur

stade de développement, les jeunes varroas femelles nées dans l’alvéole sortiront de l’alvéole au moment

de la désoperculation ou mourront si elles n’ont pas terminé leur développement. La différence de durée

d’operculation du couvain mâle (environ 15 jours par opposition à environ 12 jours dans le couvain

d’ouvrières) permet à un plus grand nombre de jeunes femelles varroas de se développer.

La (ou les) femelle (s) fondatrice perfore(nt) la cuticule de la nymphe d’abeille en un point (appelé site de

nourrissement) de la nymphe d’abeille : ce site permet aux varroas (fondatrice(s) et descendance) de se

nourrir d’hémolymphe dans l’alvéole operculée. Les varroas laissent des dépôts fécaux sur la paroi de

l’alvéole permettant de diagnostiquer leur présence, ainsi que des exuvies (enveloppes cuticulaires

résultant des nymphoses).

L’accouplement du (des) varroa(s) mâle(s) avec ses sœurs et mère(s) dans l’alvéole en cas de mono-

infestation, favorise la consanguinité. Cela permet d’éliminer les mutations défavorables. Par contre,

cette consanguinité sélectionne rapidement les mutations favorables à l’acarien comme la résistance à

une molécule chimique. Cette consanguinité est compensée par les multi-infestations d’alvéoles avec

présence de plusieurs mâles.

Ce bilan reproductif semble très positif mais est à moduler du fait des nombreuses pertes au sein de la

colonie :

Des varroas phorétiques sont éliminés par épouillage

Des varroas n’arrivent pas à maturité : la maturité est fonction de la durée d’operculation de l’alvéole

Beaucoup de varroas sont infertiles

Lors de multi-infestation d’une alvéole, on a moins de descendants femelles par fondatrice

30% des varroas n’ont pas de descendant viable

La reproduction est moins efficace l’hiver.

Page 5: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

b/ Action des varroas sur les abeilles parasitées : les varroas se nourrissant de l’hémolymphe de la jeune abeille en développement, ont une action

spoliatrice sur les nymphes parasitées :

Diminution du poids de la jeune abeille à l’émergence (non compensée ensuite)

Ponction de protéines dans l’hémolymphe (baisse de 30 à 50%): notamment des protéines à rôle

immunitaire, des protéines cuticulaires…

Réduction de 25% du tissu adipeux (corps gras) de la jeune abeille

Diminution de la taille des glandes hypo pharyngiennes (participant à l’élaboration des gelées

nourricières) d’environ 15%

Malformations: abdomen plus court, ailes atrophiées

Baisse de la capacité d’apprentissage chez les abeilles ayant été parasitées : comportement de

vol, orientation, retour à la ruche

Phénomène de dérive plus important chez ces abeilles

Chez les mâles : diminution du nombre de spermatozoïdes et raccourcissement de la durée de vol

Les varroas sont des vecteurs de virus à travers les lésions de la cuticule. Le système immunitaire

des abeilles est affaibli par l’infestation liée aux varroas et la synergie (varroa + virus) diminue le

seuil de tolérance aux varroas des colonies : on observe des effondrements de colonies à des

seuils d’infestation très bas.

c/ Action sur la colonie : Dynamique de la population de varroas dans une colonie

La population de varroas dans une colonie d’abeilles est fonction de l’infestation initiale et de tout ce qui

favorise les ré infestations (pillage, dérive, transhumance).

La population de varroas est fonction de la quantité de couvain.

La population de varroas est fonction du nombre de jours de couvain dans l’année (allongement de la

période avec couvain liée au réchauffement climatique).

En fin d’été : il y a beaucoup de varroas du fait de l’augmentation de la population de varroas pendant

toute la belle saison, peu de couvain (diminution physiologique des surfaces de couvain), et disparition du

couvain mâle (qui concentrait beaucoup de varroas reproductifs).

Modélisation de la progression des populations d’abeilles et de varroas (d’après Noireterre 2011) :

En fin d’été, une période critique apparaît liée à la forte population de varroas associée à une diminution

de la quantité d’abeilles adultes et des surfaces de couvain. Si l’on n’intervient pas, un déséquilibre

apparaît et la colonie peut manifester des symptômes de varroose. Ce déséquilibre apparaît d’autant plus

tôt que les niveaux d’infestation par les varroas dans la colonie auront été élevés en début de saison

apicole (printemps) ou que la colonie aura subi des ré infestations importantes.

Page 6: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

REINFESTATIONS: Modélisation de l’évolution du nombre de V. destructor au sein d’une colonie d’abeilles

suite à l’invasion de nouveaux parasites (The Food and Environment Research Agency, UK, 2010).

Page 7: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Lors de ré infestations, l’apport de nouveaux acariens (0, 100 ou 250 acariens sur le graphique ci-dessus)

favorise une croissance plus rapide de la population de varroas qui aura alors des effets délétères plus tôt

en saison sur la colonie d’abeilles.

d/Conséquences de la croissance de la population de varroas pour la colonie : On voit apparaître des signes de varroose : adultes aux ailes déformées, varroas sur les abeilles, couvain

en mosaïque, élimination de nymphes mortes, colonie moins dynamique.

En automne, vont naître des abeilles d’hiver extérieurement normales mais affaiblies, à durée de vie

écourtée, plus fragiles (système immunitaire ---).

Ces abeilles se perdent lors des vols d’orientation et ne vivront pas assez longtemps pour assurer le

redémarrage de la colonie au printemps.

Couvain d’ouvrières parasité par V. destructor (The Food and Environment Research Agency, UK, 2010). Couvain en mosaïque, alvéoles de nymphes ouvertes, alvéoles vides.

Page 8: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

On a alors un risque d’effondrement d’une colonie : lors d’infestation faible ou modérée par les varroas,

les symptômes cliniques sont frustres. Un taux de 2 varroas pour 100 abeilles entraîne une baisse

significative de la production en miel.

On observe une sensibilité aux autres agents pathogènes.

L’effondrement est favorisé par les stress subis par la colonie (transhumances, pesticides…).

La mort de la colonie survient la plupart du temps pendant l’hiver : peu ou pas d’abeilles dans la colonie,

réserves abondantes

Le diagnostic se fait d’après le fort pourcentage d’adultes (si présents) infestés et de cellules infestées

(>20%). Si la colonie est vide, on observe parfois une population réduite d’ouvrières mortes sur le cadre,

avec la reine, et des réserves en miel et pollen correctes

Effondrement de colonie en

fin d’hiver :

La ruche est vide, le

couvain en mosaïque,

grignoté et mort, les

abeilles émergentes

mortes, parfois petites et

mal formées, la ruche

contient des provisions.

Page 9: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Colonie après effondrement : colonie vide, couvain rare, petit, mort, abeilles et reine mortes sur le cadre ;

sous les opercules, abeilles petites, ailes déformées…

Les infestations et ré infestations jouent un rôle important dans la contamination des varroas : la

transmission des parasites s’effectue par dérive (ouvrières, faux-bourdons) et pillage des colonies plus

faibles. Les pillardes rapportent des varroas dans leur ruche d’origine. Dans les lieux de grandes

Page 10: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

concentrations de ruchers (attention aux zones de transhumance), les ré infestations sont parfois

considérables et souvent oubliées. L’essaimage permet aussi la propagation des varroas entre colonies

distantes.

e/ Ce qui peut freiner la reproduction des varroas

L’absence de couvain naturellement: arrêt de ponte en hiver ou essaimage, la sécheresse

L’absence de couvain artificiellement : arrêt de ponte provoqué par encagement des reines (puis

traitement)

Une forte miellée entraînant un blocage de ponte (diminution du couvain)

Les interventions biotechniques en saison permettant d’alléger la pression parasitaire

(découpage de couvain mâle, constitution de nuclei, encagement de reines et blocage de ponte)

Page 11: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Les traitements contre Varroa Un composé ((Z)-8-heptadécène) ayant la capacité de réduire la reproduction du varroa. C’est une piste

de recherche actuellement

La sélection de lignées d’abeilles résistantes : suite aux observations d’Apis cerana et de souches d’Apis

mellifera : souches Primorsky, souches africanisées… tolérantes aux varroas (c’est-à-dire capables de

coexister avec les varroas en l’absence de traitements, ou même résistantes (c’est-à-dire capables de

s’opposer à la croissance de la population de varroas en l’absence de traitements), on a cherché à savoir

d’où provenaient ces capacités.

Le comportement de tolérance et/ou de résistance est lié à un taux d’essaimage important (un essaim

signifie 15 à 20% de varroas en moins avec un ralentissement de la reproduction des varroas tant qu’il n’y

a pas de couvain operculé, une bonne aptitude à l’épouillage (fonction de la race d’abeilles et de la

température extérieure), un comportement hygiénique plus développé (caractère influencé par des

facteurs environnementaux).

Le comportement hygiénique vis-à-vis du varroa est moins efficace chez l’abeille mellifère que chez Apis

cerana ou que chez les abeilles africanisées.

La détection du parasite serait liée à des signaux émis par la nymphe blessée lors des repas du parasite

(souches VSH). Des chercheurs ont observé certaines souches baptisées SMR chez lesquelles on avait un

arrêt de la reproduction du parasite lors du retrait des acariens reproducteurs des alvéoles infestées et un

fort taux d’acariens non reproductifs.

Le comportement est fonction du niveau d’infestation : efficace si l’infestation est faible, et de

l’environnement! Et il fait intervenir des gènes impliqués dans l’olfaction.

A ce jour, des apiculteurs et notamment J. Kefuss (Bond Tests, combinaison des 3 critères, économiques,

hygiéniques et résistance aux varroas) en France, ont essayé de sélectionner de manière empirique en se

basant sur les critères économiques (sélection de lignées ayant une bonne valeur économique avec une

bonne production de miel), des critères liés au comportement hygiénique (sélection de lignées

hygiéniques par le test du couvain congelé) et la sélection de lignées faiblement infestées par Varroa

destructor (comptages de varroas) pour produire des mâles qui fécondent les reines de l’année suivante…

Voies de lutte et de recherche actuelles :

Eradication régionale coordonnée : APICULTEURS = ACTEURS

Amélioration des médicaments actuels, nouveaux médicaments

Contrôle biologique de Varroa : phéromones, pathogènes, prédateurs… Nécessité de mieux

connaître la biologie de Varroa destructor

Sélection GENETIQUE (et non empirique), à partir des gènes concernés dans la tolérance au

Varroa. Prise en compte de la fécondation des reines par plusieurs mâles.

Interactions varroas/virus : sélectionner des abeilles résistantes aux infections virales….

Page 12: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

2) LES TRAITEMENTS CONTRE LE VARROA

1/ Qu’est-ce qu’on attend d’un traitement?

Les seuls traitements chimiques autorisés en apiculture sont les traitements contre Varroa destructor : ce

sont des médicaments avec une Autorisation de Mise sur le Marché (A.M.M), un temps d’attente et une

L.M. R.

Le temps d’attente est le délai entre la dernière administration du médicament considéré dans les

conditions normales d’emploi, à l’espèce – abeilles - pour laquelle il a obtenu l’A.M.M., pour la maladie

concernée – la varroose - et la « récolte » des produits de la ruche afin de garantir que ces produits ne

contiennent pas de résidus en quantités supérieures aux Limites Maximales établies (= L.M.R.).

Une Limite Maximale de Résidus (L.M.R.) est définie ainsi : c’est la concentration maximale de résidus

(substance active et métabolites) résultant de l’utilisation normale du médicament pour une espèce

donnée et une pathologie donnée, concentration reconnue comme admissible dans un aliment sans qu’il

en résulte un risque pour la santé du consommateur.

Le médicament doit être efficace vis-à-vis des varroas, sans danger pour les abeilles et le manipulateur,

laisser peu de résidus dans la ruche ou les produits de la ruche et ne pas présenter de phénomène de

résistance.

2/ Les médicaments avec A.M.M en France.

Après avoir utilisé des traitements à base de tau-fluvalinate (Apistan ND) et de coumaphos (interdit

aujourd’hui en France) dans les années 80 en France puis à base d’amitraze (Apivar ND, Apitraze ND

depuis septembre 2015) à partir de 1995, l’apparition de résistances au tau-fluvalinate et de résidus dans

les cires, a conduit certains apiculteurs à se tourner vers des molécules avec une image plus « naturelle »

et de nouveaux produits à base de thymol et d’acides sont apparus ( thymol : Apiguard ND, Thymovar ND,

Apilife Var ND (avec en plus menthol, eucalyptol et camphre), MAQS ND à base d’acide formique, Api-

Bioxal ND à base d’acide oxalique).

Page 13: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Critères d’évaluation de l’efficacité des médicaments : ces médicaments sont régulièrement évalués par

des tests de mesure d’efficacité, notamment les tests conduits chaque année par la FNOSAD. Dans ces

tests sont pris en compte les critères suivants :

- Le pourcentage d’efficacité du médicament: il doit être supérieur à 90% pour un acaricide

composé de molécules naturelles (molécules que l’on retrouve dans des substances

naturelles comme le thymol et les acides formique et oxalique) et supérieur à 95% pour un

acaricide de synthèse (amitraze ou tau-fluvalinate) (référence : guidelines européennes)

- Le pourcentage de colonies gardant plus de 50 varroas résiduels, 50 varroas étant une

donnée consensuelle permettant une bonne reprise d’activité après hivernage et une

croissance de la population de varroas raisonnable en saison.

- La cinétique de chute de la population de varroas (rapidité d’action de l’acaricide)

- La survie post-hivernale de la colonie.

Page 14: Lutter contre le varroa de manière raisonnée
Page 15: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Les tests FNOSAD conduits en fin d’été et automne 2014 sur 291 colonies ont montré que l’infestation

moyenne de ces colonies était de 2329 varroas par colonie. 20% des colonies ont entre 2000 et 4000

varroas, 15% des colonies ont plus de 4000 varroas.

Les médicaments testés étaient Apivar ND, Apistan ND, Apilife Var ND et MAQS ND.

De nombreuses colonies (variables selon le médicament utilisé) ont plus de 50 varroas résiduels après le

traitement et le traitement a une efficacité inférieure à 95% pour beaucoup de colonies.

La rapidité d’action du médicament est variable (on prend en compte pour ce calcul le nombre de jours

nécessaires pour passer sous le seuil de 1000 varroas résiduels) : de très rapide avec le MAQS ND (2 jours)

à lente avec l’Apivar ND (29 jours). Mais il faut alors considérer que les médicaments agissant sur une

durée plus longue vont limiter davantage les ré infestations après traitement.

Particularités des traitements avec le thymol (Apiguard ND, Thymovar ND, Apilife Var ND):

- Utilisables en apiculture biologique

- Utilisables selon un gradient de température extérieure allant de 15 à 30°C

- Nécessitent 3 à 4 interventions de l’apiculteur

- Efficacité moyenne, nécessité d’un traitement complémentaire (souvent l’hiver avec un

médicament à base d’acide oxalique)

- Effets secondaires : arrêt de ponte et/ou évacuation partielle de couvain donc nécessité

d’une période de ressources et d’accumulation de réserves à la fin du traitement

- Surconsommation de 1 à 2 kg de miel

Particularités des traitements à l’acide formique (MAQS ND) :

- Autorisé en apiculture biologique.

- Seul médicament ayant une action sur les varroas phorétiques et ceux dans le couvain

operculé.

- Attention aux températures au niveau du toit de la ruche les 3 premiers jours (10 à 29,5°C).

- Médicament agissant très rapidement

- Prévoir une hausse vide pour que la colonie ait plus d’espace, importance de la ventilation

(bien lire la notice d’emploi du médicament).

- Pas d’accumulation dans les cires ni de résistance prouvée.

- Efficacité moyenne donc prévoir un traitement complémentaire (souvent en hiver avec un

produit à base d’acide oxalique).

Ce médicament peut avoir des effets sur le couvain et les reines si la température est supérieure à 30°C

donc il est indispensable de vérifier la ponte une semaine après la fin du traitement.

Traitement avec l’acide oxalique (Api-Bioxal ND)

- Application par dégouttement ou sublimation (avec systèmes Varrox ou Sublimox) par une

température extérieure d’au moins 5°C. Eviter l’application par sublimation en été.

- Bonne efficacité en l’absence de couvain, moyenne si présence de couvain.

- Pas d’accumulation dans les cires, pas de résistance prouvée.

- 1 application par an est insuffisante. Si on multiplie les passages, la mortalité d’abeilles

double et le retard est conservé au printemps.

- Caramélisation possible avec l’appareil Sublimox (les buses du Sublimox se bouchent car Api-

Bioxal contient du glucose qui caramélise lorsque l’appareil Sublimox monte en température

pour assurer la sublimation de l’acide oxalique). Pour la sublimation, il est recommandé

Page 16: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

d’utiliser Api-Bioxal ND avec l’appareil Varrox. En cas de caramélisation, déclarer les cas en

pharmacovigilance (GDSA ou Sections apicoles).

Pourquoi observe-t-on un manque d’efficacité de certains médicaments ?

Certaines molécules manquent d’efficacité du fait de l’apparition de résistances, d’un non respect du

mode d’emploi (quantité de médicament, durée du traitement, persistance des molécules actives en

faible quantité sous forme de lanières dans les colonies lorsque les apiculteurs n’enlèvent pas ces lanières

après les traitements, déplacement de la grappe d’abeilles qui n’est plus en contact avec le produit ,

ruches à deux corps et quantité de produit insuffisante…), de l’abondance du couvain operculé (seul le

MAQS ND agit au niveau des varroas du couvain operculé), des conditions météorologiques (le froid en

diminuant l’activité des abeilles va aussi limiter la diffusion du produit de traitement)…

L’utilisation de produits interdits (hors A.M.M., préparations artisanales personnelles ou achetées souvent

trop faiblement actives) est fréquente.

Les apiculteurs font souvent un seul traitement par an sans contrôle des niveaux d’infestation.

Il en résulte encore beaucoup trop d’acariens vivants dans les colonies, une croissance de la population de

varroas au-delà des seuils dangereux pour la colonie et des ré infestations par le voisinage parfois

considérables dans des ruchers qui ont pourtant été traités efficacement.

Remarque : le Taktic est un médicament à base d’amitraze souvent utilisé par les apiculteurs pour traiter

leurs colonies d’abeilles. Ce produit n’a pas d’A.M.M abeilles, il n’a pas été soumis à une étude de résidus

dans les produits de la ruche (attention à l’image du miel produit naturel) et du fait de l’ajout d’excipients

favorisant son évaporation, peut présenter un certain danger pour l’apiculteur lors d’une utilisation dans

les ruches. Son efficacité sur les varroas phorétiques sera fugace.

3/ Traiter en surveillant l’infestation : les comptages de varroas dans les

colonies Les comptages permettant d’estimer la population de varroas à un moment donné. Le calcul exact du

nombre de varroas présents dans une colonie est difficile. Plusieurs méthodes existent, intéressantes

pour une comparaison entre colonies au sein d’un rucher ou entre plusieurs ruchers. Les comptages

permettent d’adapter sa stratégie de lutte contre Varroa : anticiper ou différer un traitement, utiliser des

méthodes biotechniques, traiter au plus juste. Ils permettent d’évaluer l’efficacité d’un traitement, de

convaincre l’apiculteur de la nécessité de surveiller Varroa, de sélectionner des abeilles hygiéniques,

« résistantes » à Varroa.

Ils sont aussi utilisés pour engranger des données régionales permettant de connaître la pression exercée

par Varroa destructor en fonction des pratiques apicoles et notamment de la transhumance (avec les

risques de ré infestations liés aux concentrations de colonies dans certaines zones favorables à des

miellées particulières).

Les méthodes de comptages sont fiables si l’infestation par les varroas est moyenne ou élevée ; les

méthodes sont imprécises si la colonie a moins de 3000 cellules de couvain, ou quand le taux

d’infestation du couvain est inférieur à 2% ou quand la colonie s’effondre (baisse de la quantité de

couvain).

Page 17: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Les comptages peuvent se faire sur les abeilles adultes, sur les alvéoles de couvain operculé ou par un

dénombrement des mortalités naturelles des varroas, sur langes graissés. Le dénombrement des

mortalités naturelles sur langes graissés semble plus intéressant en début de saison apicole et au

printemps, les comptages sur abeilles adultes seront favorisés en fin d’été et automne.

Quelle que soit la méthode utilisée, l’essentiel est de surveiller l’infestation.

Comptages sur abeilles adultes

On prélève 300 abeilles adultes (sans la reine) (volume de 100 ml ou 45 g) dans un récipient grillagé avec

un tamis de maille de 2,5 mm.

On ajoute 2 cuillères à café de sucre glace (15 g), on mélange délicatement mais entièrement les abeilles

et le sucre.

On secoue (comme avec une salière) le tout au-dessus d’un bol blanc avec un fond d’eau pour pouvoir

voir et compter les varroas phorétiques (ou dans un sac pour compter les varroas plus tard). Les varroas

passent à travers le tamis. Les abeilles qui sont restées dans le bocal grillagé sont relâchées, vivantes, dans

leur ruche d’origine. On compte le nombre de varroas qui sont tombés et on calcule le nombre de varroas

infestant 100 abeilles. On a alors le pourcentage d’infestation des jeunes abeilles adultes.

Pour un résultat fiable, il faut échantillonner au moins 8 colonies sur un rucher de 20, la moitié des

colonies sur un rucher de 10, toutes s’il y a moins de 5 colonies. Il est préférable de faire ce comptage

deux fois à une semaine d’intervalle dans les colonies avant d’en tirer des conclusions.

D’autres méthodes de comptages sur les abeilles adultes existent : on peut prélever 300 abeilles adultes,

les congeler pour les tuer puis rincer les abeilles mortes avec une solution d’alcool à 70° ou de Teepol

pour détacher les varroas.

On trouve dans certains magasins de matériel apicole des dispositifs permettant de réaliser ces

comptages (testeurs varroas) : on prélève 200 abeilles environ sans la reine, on utilise du CO2 pour

endormir les abeilles et cela favorise le détachement des varroas phorétiques du corps des abeilles. On

compte alors les varroas et on calcule le nombre de varroas pour 100 abeilles.

Page 18: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

Comptage sur le couvain operculé

On peut aussi faire une estimation des niveaux d’infestation à partir du couvain operculé. Il faut pour cela

désoperculer 200 alvéoles de couvain d’ouvrières ou 200 alvéoles de couvain de faux-bourdons. On

compte le nombre d’alvéoles infestées et on établit un pourcentage (nombre d’alvéoles infestées sur 100

alvéoles au total). Sur le couvain d’ouvrières, on doit avoir moins de 10% d’alvéoles infestées sinon la

colonie est en danger et doit être traitée rapidement. Sur le couvain de faux-bourdons, on tolère jusqu’à

50% d’alvéoles infestées. Au-delà, il faut traiter.

Comptages sur langes graissés

On dénombre tous les trois jours et pendant environ 2 semaines, les varroas qui tombent sur un lange

graissé placé sous un plancher grillagé. On établit alors une moyenne journalière de chutes de varroas,

moyenne qui doit être inférieure à 1 en début de saison apicole puis qui peut augmenter au cours de la

saison.

Page 19: Lutter contre le varroa de manière raisonnée
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Le seuil économiquement tolérable dans le tableau ci-dessus, correspond à une moyenne quotidienne de

mortalités naturelles de varroas acceptable pour la colonie et qui lui permet de vivre et de produire sans

traitement contre les varroas avant la fin de l’été.

Protocoles de lutte contre Varroa

- Surveillance des taux d’infestation et de l’efficacité des traitements

- Objectif : moins de 50 varroas résiduels pour passer l’hiver soit moins de 1 chute naturelle de

varroas par jour (langes graissés)

- Si ce seuil n’est pas atteint : faire un traitement complémentaire en hiver ou mettre en place

des méthodes biotechniques au printemps suivant ou faire un nouveau traitement

- Planifier les traitements longs à l’avance pour pouvoir faire un traitement complémentaire si

besoin

- Avantages des médicaments agissant sur le long terme : efficacité et limite des ré infestations

automnales

Page 21: Lutter contre le varroa de manière raisonnée

3) LES METHODES BIOTECHNIQUES. Cette partie n’a pas été traitée à Pau, faute de temps.

Nous rappelons que les principales méthodes utilisées pour contrôler la pression parasitaire exercée par

Varroa destructor sont : le découpage de couvain mâle, la formation de nuclei et le blocage de ponte

artificiel de la reine par encagement suivi d’un traitement, à l’acide oxalique le plus souvent.

Sur le site de GDS Aquitaine (gdsaquitaine.fr), vous trouverez des fiches de synthèse concernant ces

méthodes.

Le registre d’élevage (ou cahier d’élevage), partie sanitaire

Il est OBLIGATOIRE

Il permet de planifier les interventions pendant toute la saison apicole

Il doit être conservé 5 ans après la dernière notification.

Doivent être consignés dedans :

Les déclarations relatives aux ruchers (numéros API, NUMAGRIT/NUMAGRIN, SIRET, récépissé de

déclaration annuelle de ruches et ruchers) et les certificats sanitaires et de provenance délivrés au

détenteur en cas d’achats d’abeilles.

L'enregistrement des traitements effectués sur les ruchers : nature des médicaments (nom commercial

ou à défaut substances actives) ; ruchers concernés par le traitement, de la quantité administrée par

ruche, ces mentions pouvant être remplacées par une référence à l'ordonnance relative au traitement

administré si l'ordonnance comporte ces indications.

La date de début ou période de traitement.

Les résultats d'analyse obtenus en vue d'établir un diagnostic ou d'apprécier la situation sanitaire des

abeilles, comptes rendus de visite ou bilans sanitaires établis par tout intervenant sanitaire reconnu, les

ordonnances, ainsi que les prescriptions des agents spécialisés en pathologie apicole.

Remerciements :

A l’Union européenne et à FranceAgriMer

A la DGAl

A la DRAAF Aquitaine

pour le financement de cette formation.