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Khadija Les femmes de l’islam 1 MAREK HALTER Roman Robert Laffont

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9:HSMCMB=VW]XUZ: € TTC FRANCE 2014 - IV

www.laffont.fr

KhadijaLes femmes de l’islam 1

MAREK

HALTER

RomanRobert Laffont

Veuve, belle et riche, Khadija doit se remarier pour maintenir sa place dans la société très masculine de La Mecque. Contre toute attente, elle choisit un homme pauvre et illettré, Muhammad ibn ‘Abdallâh. En dix ans de bonheur, elle impose Muhammad auprès des puissants clans de La Mecque et forme avec lui un couple exceptionnel, modèle de sagesse et de modération. Mais une série de tragédies s’abat sur le pays. La peste, les inondations et la mort endeuillent la famille. Face à ces coups du destin, Khadija fait preuve d’un courage et d’une force inouïs. La paix revenue, Muhammad s’isole dans le désert où, un jour, l’ange Gabriel lui transmet les paroles du Dieu Unique. Muhammad croit devenir fou, il a peur. Khadija, elle, pressent qu’il s’agit là d’un grand événement. Se dressant contre tous pour défendre la parole nouvelle de son bien-aimé, elle pose les fondements sur lesquels Muhammad ibn ‘Abdallâh bâtira l’une des plus remarquables aventures religieuses du monde.

Marek Halter rend hommage au rôle prépondérant que les femmes ont joué à l’origine de l’islam. Œcuméniste, profondément attaché à la paix au Moyen-Orient, il lance aussi un pressant message de réconciliation en ces temps troublés par la résurgence des confl its religieux.

Parue aux Éditions Robert Laffont, la trilogie La Bible au féminin – Sarah (2003), Tsippora (2004), Lilah (2005) – suivie de Marie (2006), s’est vendue à près de 800 000 exemplaires en France et a été traduite dans plus de vingt langues.

Pour la première fois,

un grand roman emporte le lecteur

dans l’aventure extraordinaire

de la troisième religion monothéiste.

MAR

EK H

ALTE

RKh

adija

1

La naissance de l’islam, c’est d’abord l’histoire d’une femme, Khadija. La première épouse du prophète, celle qui l’aimait quand il n’était qu’un jeune caravanier, celle qui avant tous lui a dit : « Moi, je crois. »

9:HSMCMB=VXX]YW:21,50 € TTC FRANCE 2014 - IV

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Robert Laffont

En couverture : À la recherche d’un campement, Caravanes de nomades et chameaux dans le désert. Peinture de Jean Joseph Bellel, 19e siècle, détail. Musée Fabre, Montpellier. © Photo Josse / LeemagePhoto d’auteur : © Maurice Rougemont / Opale

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DU MEME AUTEUR

LE FOU ET LES ROISPrix Aujourd’hui 1976(Albin Michel, 1976)

MAISavec Edgar Morin

(Oswald-Néo, 1979)LA VIE INCERTAINE DE MARCO MAHLER

(Albin Michel, 1979)LA MEMOIRE D’ABRAHAM

Prix du Livre Inter 1984(Robert Laffont, 1983)

JERUSALEMphotos Frédéric Brenner

(Denoël, 1986)LES FILS D’ABRAHAM

(Robert Laffont, 1989)JERUSALEM, LA POESIE DU PARADOXE,

photos Ralph Lombard(L. & A., 1990)

UN HOMME, UN CRI(Robert Laffont, 1991)

LA MEMOIRE INQUIETE(Robert Laffont, 1993)

LES FOUS DE LA PAIXavec Eric Laurent

(Plon/Laffont, 1994)LA FORCE DU BIEN

(Robert Laffont, 1995)Grand prix du livre de Toulon pour l’ensemble de l’œuvre (1995)

LE MESSIE(Robert Laffont, 1996)

LES MYSTERES DE JERUSALEMPrix Océanes 2000

(Robert Laffont, 1999)LE JUDAISME RACONTE A MES FILLEULS

(Robert Laffont, 1999)LE VENT DES KHAZARS

(Robert Laffont, 2001)SARAH – La Bible au féminin*

(Robert Laffont, 2003)TSIPPORA – La Bible au féminin**

(Robert Laffont, 2003)LILAH – La Bible au féminin***

(Robert Laffont, 2004)BETHSABEE OU L’ELOGE DE L’ADULTERE

(Pocket, inédit, 2005)

(voir suite en fin de volume)

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MAREK HALTER

KHADIJALES FEMMES DE L’ISLAM *

roman

ROBERT LAFFONT

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Editions Robert Laffont, S.A., Paris, 2014ISBN 978-2-221-13384-2

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Le jeune époux

Abu Nurbel possédait trop d’expérience pour ne pasconnaître le double sens de ses paroles et la gêne qui en décou-lerait. Afin de briser l’embarras naissant, il salua aussitôt Khadijaen lui souhaitant au nom de tous une longue et belle nuit. Enun geste que tout le monde comprit, il saisit la main d’Abu Talibet l’entraîna vers la porte bleue. Chacun le suivit. Muhammadne savait que faire de lui-même. Dans son dos les invités s’éloi-gnaient, emportant le murmure de ce qui, dès l’aube, ferait larumeur de Mekka.

D’une voix que ni Ashemou, ni Barrira, ni Abdonaï nereconnurent, Khadija dit :

— Je te remercie de la douceur de ton présent, neveud’Abu Talib. La parole d’Abu Nurbel est juste. Si l’on ne songequ’aux affaires.

— Saïda...Il ne trouva aucun mot de plus à ajouter.Là-bas, à la porte, ils disparaissaient les uns après les autres.Khadija passa sa langue sur ses lèvres sèches, pressa la

petite bourse de sukar sous sa poitrine. Le chatoiement de satunique lança quelques éclats dans la pénombre.

— Moi, je n’ai qu’une manière de dire ma pensée. Vaselon ton cœur, Muhammad ibn ‘Abdallâh. Tu peux boire dece sukar dans du lait de chamelle avec moi ce soir. Ou tu peuxsuivre ton oncle. Quoi que tu choisisses, demain tu seras celuien qui la veuve bint Khowaylid a placé sa confiance.

Ces mots pétrifièrent Muhammad, comme s’il peinait à lescomprendre. Le brouhaha des voix résonnait dans la ruelle der-rière les murs. A présent, tous les invités avaient franchi la portebleue, grande ouverte sur l’obscurité. La torche brandie, unesclave attendait.

Barrira entraîna Ashemou dans l’ombre de l’appentis de lacuisine et enjoignit aux servantes de s’éloigner de leur maî-tresse.

Muhammad murmura :— Saïda, je n’ai pas de mots pour conter ce qui vient en

moi. Et je ne suis...

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Khadija

— Je sais qui tu es, l’interrompit Khadija. Je le sais plusque toi. Mais toi, tu ne connais que saïda bint Khowaylid. Cellequi boira le lait de chamelle avec toi, si ton désir le veut, t’estétrangère.

— Oui.Muhammad souligna ce mot d’une inclinaison de la tête.

Une lueur de la lampe voisine passa sur ses yeux. Khadija en futébranlée. Elle comprit que Kawla avait dit vrai. L’homme qu’elleavait devant elle ne savait pas mentir.

Elle se mit à trembler si fort qu’elle recula, s’appuya autronc du tamaris avant de se laisser glisser sur le tabouret.Muhammad s’approcha vivement. Elle le retint d’une main, sansle regarder.

— Maintenant, tu dois choisir, Muhammad. En hommelibre et qui ne doit rien ni à moi ni à ton oncle Abu Talib.

Il lui sembla que Muhammad mettait un temps infini àrépondre. Mais peut-être cela ne dura-t-il pas plus que le vold’un papillon ?

Il s’installa sur le tabouret en face d’elle.— Quand je suis près de toi, saïda, je sens ta force se lier

à la mienne. Elle me soutient et me pousse à être l’hommequ’Al’lat veut que je devienne. Loin de Mekka, cette force, jel’ai sentie aussi. Je suis parti sur la route du pays de Sham aveccette pensée en tête : « La saïda m’a engagé. Elle m’a vu et, aupremier geste, elle m’a accordé sa confiance. » Voilà, ce que jepensais. Je croyais faire les choses par devoir envers toi. Maishier, quand tu m’as accueilli dans cette cour, quand je me suisassis ici, sous ce tamaris, et que tu as porté les yeux sur moi...

Il se tut, laissant son geste exprimer ce qui ne pouvaitl’être.

Khadija ne brisa pas le silence. Elle inclina seulement lefront. Plus tard, elle raconta que, durant ce court silence, elleavait enfin perdu ses craintes. Elle avait compris qu’ils allaients’unir, son bien-aimé Muhammad le pauvre et elle, dans lafélicité de l’amour. Et pour toujours.

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Le jeune époux

Quand elle put mieux respirer et être certaine que sa voixne tremblerait pas, Khadija ordonna qu’on ferme la porte prin-cipale. Puis elle ne put se retenir de rire un peu nerveusementen demandant à Muhammad si le sukar devait se verser dans lelait avant de chauffer ou après. Il dit :

— Les Perses le versent dans le lait chaud. Mais je connaisbien des manières de le goûter.

Il souriait, se mordant les lèvres, lui aussi dans la joie.Ils s’apaisèrent le temps qu’on apporte deux gobelets brû-

lants de lait. Khadija lui tendit la bourse de sukar.— C’est à toi de verser.Au lieu de prendre la bourse, Muhammad se leva.— Le lait est trop chaud pour être bu ici.Debout, il hésita à peine avant de tendre la main. Khadija

trembla à nouveau. La crainte lui serrait le ventre autant que ledésir. Elle chuchota :

— Celui qui passe le seuil de la chambre d’une veuve nepeut être que son époux.

— J’ai choisi.— Sous la tunique, celle que tu veux connaître n’a plus le

corps des filles qui vont avec les caravanes.— Les filles qui vont avec les caravanes ne seront pas mes

épouses, Khadija bint Khowaylid. Si tu me permets de t’ap-peler ainsi.

Tapies dans l’ombre, Barrira et Ashemou les virent quitterle halo de lumière. La servante devant eux portait la lampeet le plateau avec les gobelets de lait brûlant. Quand ils furentdevant la chambre de Khadija, ils laissèrent la servante ypénétrer et y déposer le plateau avant de ressortir. Barriragémit. Elle venait seulement de découvrir qu’ils se tenaient parla main. Puis Muhammad referma doucement la porte der-rière eux.

Barrira s’assit et pleura, inondée de bonheur, s’accrochantaux poignets d’Ashemou qui séchait ses larmes et serrait sa

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La révélation

Six jours plus tard, Waraqà fut le premier surpris de lamanière dont Muhammad se confia à son épouse.

C’était le milieu de l’après-midi, au plus chaud de lajournée. Chacun sommeillait dans l’ombre. Un peu plus tôt,Khadija avait été réveillée par la douleur d’Al Qasim. La lameétait allée loin. Elle avait dû s’agenouiller pour la supporter sanshurler, les poings noués sur son ventre.

Comme chaque fois, cela disparut aussi brutalement quec’était venu. Khadija se releva, marcha jusqu’à une jarre. Elle ytrempa un linge pour s’en mouiller le front et la nuque. Sesmains tremblaient encore. Elle resta un peu, s’appuyant aurebord de la jarre pour mieux respirer. Elle avait les paupièrescloses quand elle entendit le battant de la porte bleue frapperbruyamment contre le mur. Elle releva le visage. Le manteauflottant derrière lui, la bouche béante et les yeux écarquillés,son époux courait vers elle à travers la cour. Elle cria :

— Muhammad ?Il bondit dans sa chambre, poussant des plaintes aiguës

qu’elle comprit à peine.— Sauve-moi ! Sauve-moi !Hurlant encore, il se jeta derrière la couche tandis qu’elle

appelait de nouveau :— Muhammad ! Muhammad !— Ahiii ! Sauve-moi !

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Khadija

Il arracha de ses deux mains les couvertures et s’y roula enboule comme un animal pétrifié. Khadija s’approcha de lui, ledécouvrit et tenta de l’enlacer.

— Qu’y a-t-il, Muhammad ! Que t’arrive-t-il, mon époux ?Il leva son visage déformé vers elle, la bouche tremblante.— Un démon ! Un démon ! Il m’a pris !Il ruisselait de sueur. Khadija se releva pour aller chercher

le linge sur le rebord de la jarre. Muhammad lui enserra lesjambes.

— Reste ! Reste, ne pars pas !— Je veux...— Reste !Il lui agrippa les mollets de toutes ses forces. Toujours

roulé en boule sur le sol, il cachait à présent son visage sous satunique en balbutiant :

— Il m’a pris ! Il m’a pris !Khadija s’assit sur le bord de la couche. Elle posa les mains

sur les épaules de son époux et le redressa un peu afin qu’ilpuisse presser son visage contre son ventre.

— Là, là, dit-elle, calme-toi.Des mots de mère. Elle s’en rendit compte. Des mots qui

firent couler en elle une paix étrange. Elle sentit la respirationet le cœur de Muhammad s’apaiser. Il frissonnait. Elle le serraencore plus contre son ventre que la douleur d’Al Qasim avaittranché un instant plus tôt. Comme elle se sentait bien,pourtant ! Elle eut envie de rire. Son époux pris par un démon ?Quelle idée folle ! Elle embrassa la tempe de Muhammad, baisasa bouche brûlante.

— Raconte-moi, murmura-t-elle.— Dans la grotte. Il s’est mis à faire nuit. La nuit en plein

jour. Je me suis relevé. J’ai pensé tout de suite : Voilà l’œuvred’un démon ! Et il est venu derrière moi. Il m’a attrapé auxépaules et m’a secoué. Secoué, secoué comme on secoue lesoliviers pour la récolte ! Je ne le voyais pas. Mais sa force ! Pasune force d’humain. Il a dit : « Récite ! » Sa voix a résonné dansla grotte. « Récite ! » Et moi : « Quoi ? Quoi ? Que veux-tu que

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Au soir d’une vie

je récite ? » Et lui : « Récite ! » Et il me prend encore, il metourmente encore ! « Récite ! Récite ! » Et moi : « Mais quoi ? Oseigneur ! Je ne sais rien ! Que pourrais-je savoir ? » Alors il meserre plus fort encore. Je pense : Je vais mourir ! Un démonm’emporte ! Mais lui, il me tient. Devant moi brillent des lettrespareilles à celles des rouleaux de mémoire. Il dit : « Lis ! » Jegémis : « Je ne sais pas lire, Seigneur ! » Il répète en mesecouant : « Lis ! » Et moi j’entends les mots à lire : « Au nomde Ton Seigneur qui a créé ! Il a créé l’homme de sangcoagulé ! » Lui, il me secoue encore : « Lis ! Lis ! Par Ton Sei-gneur très Généreux. Qui m’enseigna au moyen du calame. Ilenseigna à l’homme ce qu’il ne savait pas ! » O, Khadija,protège-moi, je deviens fou ! Le démon m’a fait parler de ceque je ne sais pas ! Khadija ! Je t’en supplie, protège-moi !

Pour apaiser Muhammad, il fallut du temps. Des caresses.Du temps encore. Quand les tremblements de son époux ces-sèrent enfin, quand elle put lui fermer les yeux pour un peu derepos, Khadija courut prévenir le hanif.

— Cousin Waraqà, Muhammad est de retour. Il dit qu’il aété pris par le démon. Mais le démon, je ne le sens nulle parten lui.

Cette fois, le cousin Waraqà se dressa pour l’écouter.Bouillant d’impatience.

— Qu’a-t-il dit ? Quel démon ?De son mieux, Khadija répéta chacun des mots de son

époux. Quand elle se tut, on eût cru que le hanif avait oubliésa mauvaise jambe tant il sautillait d’excitation.

— Saint ! Saint ! s’écria-t-il en prenant presque la mêmevoix que Muhammad. Par celui qui détient mon âme, Khadija,c’est le suprême Nâmus qui est venu à lui ! Celui qui est venu àMoïse ! Khadija, ton époux est notre Très Grand Prophète. Nele laisse pas faiblir !

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Le prophète

Cette nuit-là, tout changea.Quand Khadija revint auprès de son époux, elle le trouva

tremblant, étendu sur sa couche. A son approche, il se redressabrusquement, manquant d’éteindre la flamme de la lampe.

— Que dit le hanif ? Il a senti les démons lui aussi ?Khadija l’enlaça et le couvrit de baisers, de caresses.— Waraqà dit : « Saint ! Saint ! » Il crie de joie. Il dit que

la Loi divine est descendue sur toi, mon époux. Il dit :« Muhammad ibn ‘Abdallâh est notre prophète comme Musâ aété le prophète des Juifs. Qu’il tienne bon ! Qu’il soit plein decourage. Ce ne sont pas les démons qu’il doit redouter, ce sontceux de notre peuple sourds aux paroles que prononcera sabouche. »

Malgré les rires de joie et les mots de Khadija, Muhammaddemanda une fois encore, le front noué de rides :

— Je ne suis donc pas fou ? Les impurs ne me tordent pasla tête ?

Khadija répondit en lui baisant les mains et le front :— Non. Waraqà dit : « C’est Djibril qui est venu battre des

ailes près de ton époux et souffler l’haleine divine sur sanuque. »

— Peut-être, mais qui me croira ?— Moi. Moi, je te crois.

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Veuve, belle et riche, Khadija doit se remarier pour maintenir sa place dans la société très masculine de La Mecque. Contre toute attente, elle choisit un homme pauvre et illettré, Muhammad ibn ‘Abdallâh. En dix ans de bonheur, elle impose Muhammad auprès des puissants clans de La Mecque et forme avec lui un couple exceptionnel, modèle de sagesse et de modération. Mais une série de tragédies s’abat sur le pays. La peste, les inondations et la mort endeuillent la famille. Face à ces coups du destin, Khadija fait preuve d’un courage et d’une force inouïs. La paix revenue, Muhammad s’isole dans le désert où, un jour, l’ange Gabriel lui transmet les paroles du Dieu Unique. Muhammad croit devenir fou, il a peur. Khadija, elle, pressent qu’il s’agit là d’un grand événement. Se dressant contre tous pour défendre la parole nouvelle de son bien-aimé, elle pose les fondements sur lesquels Muhammad ibn ‘Abdallâh bâtira l’une des plus remarquables aventures religieuses du monde.

Marek Halter rend hommage au rôle prépondérant que les femmes ont joué à l’origine de l’islam. Œcuméniste, profondément attaché à la paix au Moyen-Orient, il lance aussi un pressant message de réconciliation en ces temps troublés par la résurgence des confl its religieux.

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Pour la première fois,

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La naissance de l’islam, c’est d’abord l’histoire d’une femme, Khadija. La première épouse du prophète, celle qui l’aimait quand il n’était qu’un jeune caravanier, celle qui avant tous lui a dit : « Moi, je crois. »

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En couverture : À la recherche d’un campement, Caravanes de nomades et chameaux dans le désert. Peinture de Jean Joseph Bellel, 19e siècle, détail. Musée Fabre, Montpellier. © Photo Josse / LeemagePhoto d’auteur : © Maurice Rougemont / Opale