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Master 2 SMEA-ESS Stratégie et Management des Entreprises Associatives de l’ESS Titre Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ? Mémoire présenté et soutenu par Jean-Luc GADIOUX Directeur de mémoire : Jean-Luc RAYMOND Chargé de cours Universités CELSA Paris Sorbonne, Paris Est - Marne-La-Vallée Promo 2011-2012 Octobre 2012

Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

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Ce mémoire a pour thème les médias sociaux en ligne et leurs interactions possibles avec les associations. Il s’inscrit dans un contexte où les responsables associatifs, relayés par certains médias, évoquent une crise du bénévolat, et où émergent des mobilisations citoyennes facilitées par l’engagement à travers les médias sociaux en ligne. Dans la première partie de ce mémoire, nous définissons ce qui caractérise l’engagement associatif. Puis nous étudions les risques de substitution de l’engagement militant traditionnel par les médias sociaux en ligne, et les opportunités que peuvent représenter ces derniers pour le monde associatif. Dans un deuxième temps, appuyés par la théorie de Marck Granovetter, « la force des liens faibles », nous nous efforçons de montrer en quoi les médias sociaux peuvent être des outils de renforcement d’un réseau militant et comment ceux-ci peuvent permettre d'élargir la diffusion du projet politique des associations. Enfin, est posée la question de l'adéquation du ou des médias sociaux issus de l’économie marchande avec les valeurs de l'Education Populaire, et des liens éventuels avec le mouvement du Logiciels Libres.

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Master 2 SMEA-ESS

Stratégie et Management des Entreprises Associatives de l’ESS

Titre

Associations et médias sociaux :

Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Mémoire présenté et soutenu par

Jean-Luc GADIOUX

Directeur de mémoire :

Jean-Luc RAYMOND

Chargé de cours Universités

CELSA Paris Sorbonne, Paris Est - Marne-La-Vallée

Promo 2011-2012

Octobre 2012

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« Les opinions exprimées dans ce mémoire sont celles de l’auteur et ne sauraient en aucun cas engager le

directeur de mémoire ou l’Université Paris-Est Marne-la-Vallée »

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PREAMBULE

Dans le contexte de mon activité salariale, et compte tenu de mes intérêts pour le mouvement

de l’Education populaire, ce mémoire représente pour moi un support à visée pédagogique. Il

apporte un sens supplémentaire à ma démarche professionnelle et représente une opportunité

de nourrir ma réflexion dans ce domaine.

Parcours de vie de l’auteur du mémoire

L'aspect collectif a toujours joué un rôle important dans ma vie. Je suis le cadet d’une famille

de sept enfants, j'ai joué au rugby, j'ai passé mes vacances d'enfant et d'adolescent en

collectivité dans les centres de loisirs et de vacances. Dans ma vie professionnelle, j'ai été

impliqué dans le travail en équipe dans chaque fonction que j’ai pu occuper. Ma carrière

commence par une succession de postes de cuisinier au sein de brigades en restauration

traditionnelle. J'ai effectué mon service militaire en tant que Marin Pompier. J'ai ensuite

dirigé des équipes de restauration et des structures de tourisme social.

Je suis actuellement responsable du service vie associative de la Fédération de la Ligue de

l’Enseignement de la Dordogne. Une de mes principales missions est d’accompagner les

bénévoles dans la mise en œuvre de leur projet collectif associatif.

Je peux donc affirmer que le lien social fait sens pour moi, et c’est naturellement que je me

suis intéressé au phénomène des réseaux sociaux numériques.

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REMERCIEMENTS

Je souhaite ici adresser mes remerciements les plus sincères aux personnes qui m'ont apporté

leur aide et qui ont contribué à l'élaboration de ce travail ainsi qu’à la réussite de cette

formation.

Je tiens à remercier sincèrement Jean-Luc Raymond, Chargé de cours à l’Universités CELSA

Paris Sorbonne, Paris Est - Marne-La-Vallée, qui, en tant que Directeur de mémoire, s'est

toujours montré à l'écoute et disponible tout au long de la réalisation de ce mémoire, ainsi que

pour l'inspiration, l'aide et le temps qu'il a bien voulu me consacrer.

J'exprime ma plus grande gratitude aux chercheurs et personnalités, Laurence Allard,

Dominique Cardon, Bastien Sibille, et François Meynier, qui ont accepté de répondre à mes

questions avec une grande compréhension et générosité.

Mes remerciements s’adressent également à mes amis et collègues, Claire Largarde, Delphine

Martin, Jean-Luc Sanvicens et Gilles Le Page, qui ont gentiment pris sur leur temps pour

relire mon mémoire, et à tous ceux qui, par leurs réflexions et leur aide ponctuelle, ont

participé à la réalisation de cette tâche.

Je tiens à exprimer ma reconnaissance à mon employeur, représenté par Renée Simon,

présidente de la Ligue de l’enseignement de la Dordogne, et Jean-Luc Sanvicens, secrétaire

général de la fédération, pour m’avoir permis de suivre cette formation dans les meilleurs

conditions, ainsi qu’à mes collègues qui ont su s’adapter et combler mes absences régulières

lors de ces deux années.

Je n'oublie pas mon épouse Lydie et ma fille Blandine, qui m'ont toujours soutenu et

encouragé au cours de cette formation et de la réalisation de ce mémoire.

Enfin, même si je ne le connais pas personnellement, je souhaite ici remercier Monsieur

Michel Beaud, pour son livre « L’art de la thèse, comment préparer et rédiger un mémoire de

master, une thèse de doctorat ou tout autre travail universitaire à l’ère du net »1, qui m’a

beaucoup aidé dans la structuration de ma recherche et la méthodologie de travail.

Merci à toutes et à tous.

1 Michel BEAUD.- L’art de la thèse, comment préparer et rédiger un mémoire de master, une thèse de doctorat

ou tout autre travail universitaire à l’ère du net.- Edition La Découverte, Paris, 2006. 202 pages.

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TABLE DES MATIERES

PREAMBULE ............................................................................................................................ 3

REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 4

INTRODUCTION ...................................................................................................................... 7

1. LES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE, NOUVELLES FORMES D’ASSOCIATIONS ?

.......................................................................................................................................... 11

1.1. Peut-on caractériser l’engagement associatif traditionnel ? ...................................... 11

1.1.1. Eléments historiques et contextuels ................................................................... 11

1.1.2. Les raisons d’agir ............................................................................................... 12

1.1.3. Les évolutions de l’engagement ......................................................................... 16

1.1.4. Eléments de synthèse ......................................................................................... 18

1.2. Les mobilisations sur les médias sociaux en ligne : nouvelle forme d’engagement ? ..

................................................................................................................................... 19

1.2.1. L’exemple du « Bad Buzz » des supermarchés CORA...................................... 20

1.2.2. L'impact des médias sociaux pendant le printemps arabe .................................. 21

1.2.3. Un compte Twitter fermé grâce à la mobilisation sur Internet........................... 22

1.2.4. Le mouvement des « Indignés » ......................................................................... 23

1.3. Medias sociaux en ligne : risque ou opportunité pour le monde associatif ? ............ 24

1.3.1. Médias sociaux : risque de substitutions ? ......................................................... 24

1.3.2. Médias sociaux en ligne : une opportunité à saisir ? .......................................... 27

2. LES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE, OUTILS AU SERVICE DU MONDE

ASSOCIATIF ? ........................................................................................................................ 31

2.1. Les médias sociaux comme support du fait associatif ? ............................................ 31

2.1.1. La notion de capital social appliquée à une association. .................................... 31

2.1.2. Les médias sociaux numériques : la force des liens faibles ............................... 33

2.2. L’exemple du compte Twitter du centre de ressources départemental de la vie

associative de la Ligue de l’enseignement de la Dordogne. ................................................ 36

2.2.1. Objet de l’étude et données statistiques ............................................................. 37

2.2.2. Méthodologie ..................................................................................................... 38

2.2.3. Eléments d’analyse ............................................................................................. 41

2.2.4. Twitter comme outil de veille ............................................................................ 43

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2.3. Impact des médias sociaux en ligne sur la fréquentation des sites Internet .............. 43

2.3.1. L’exemple du site Internet de la Ligue 24 .......................................................... 46

2.3.2. Le référencement devient « social » ................................................................... 47

3. QUELS OUTILS POUR QUEL PROJET ? .................................................................... 49

3.1. Existe-t-il un risque pour les associations à utiliser un outil commercial de type

Facebook ? Est-ce compatible avec les valeurs de l’Economie Sociale et Solidaire ? ........ 49

3.2. Associations et logiciels libres : des valeurs à partager ? .......................................... 51

3.3. Oxwall, Elgg, Diaspora, des alternatives à Facebook ? ............................................. 53

3.3.1. Le projet Diaspora .............................................................................................. 54

3.4. La Ligue de l’enseignement doit-elle disposer de son propre média social EN

LIGNE ? ............................................................................................................................... 58

CONCLUSION ........................................................................................................................ 62

conditions de réussite et perspectives ................................................................................... 64

BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 67

SITES INTERNET VISITES ................................................................................................... 72

COMPTES TWITTER SUIVIS ............................................................................................... 73

TABLE DES TABLEAUX ET GRAPHIQUES ...................................................................... 74

TABLE DES ANNEXES ......................................................................................................... 75

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INTRODUCTION

La Fédération Française du bénévolat et de la Vie associative, dans un article publié sur son

site Internet en date du 17 novembre 20112, évoque une crise du bénévolat en ces termes :

« Le désintéressement solidaire est en passe de voler en éclat. Il est inutile de faire l'autruche,

la crise du bénévolat n'est pas un vain mot. Les associations peinent à recruter de nouveaux

bénévoles et surtout, à conserver ceux qui jusqu'à présent, donnaient du temps et de l'énergie

pour les autres. »

Paradoxalement, la Conférence Permanente des Coordinations Associatives (CPCA), dans un

document3, publié en mars 2012, indique que « le bénévolat est en plein essor et les Français

de plus en plus nombreux à souhaiter s’engager : sa croissance en volume4 est de l’ordre de 4

% par an », complétant cette analyse par quelques chiffres clé : 1,3 millions d'associations, 16

millions de bénévoles, soit plus de 32% de la population adulte, 23 millions de Français

adhérents d'une association.

Par ailleurs, en parallèle, Isabelle Compiègne, dans son livre « La société numérique en

question(s) », parlant « des nouveaux dispositifs de communication et leur diversification » et

du phénomène de « connexion continue », dit « qu’elle entraine un morcèlement de l'activité

et une dispersion des engagements avec le danger que cela nuise finalement à la profondeur

de l'investissement dans la relation. »

Un exemple tiré d’une enquête réalisée par Harris Interactive5 sur Facebook illustre

l’engouement des français pour de ces nouveaux dispositifs de communication :

La France compte plus de 16 millions de « fans » actifs sur Facebook.

Fin 2011, 80% des utilisateurs de Facebook sont membres d’au moins une page fan, qu’il

s’agisse de la page Facebook d’une marque, d’une entreprise, d’une association, d’un

2 http://www.benevolat.org/news/193-pour-stopper-la-crise-du-benevolat-un-projet-de-loi-enfin.html

3 CPCA. Intitulé « Repère sur les associations en France », le document propose une photographie de la

dynamique associative française. Mars 2012. http://associations.laligue.org/media/transfer/doc/p_o_t_o_2.pdf

4 Mesuré à partir du nombre annuel d’heures de travail bénévole dans les associations

5 Enquête réalisée en ligne par l’institut Harris Interactive en novembre et décembre 2011. Echantillon total de

3 000 individus représentatifs de la population des internautes français âgés de 15 ans et plus, à partir de l’access

panel Harris Interactive. http://www.harrisinteractive.fr/news/2012/09012012.asp

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personnage public… Et 80% de ces fans sont « actifs » au sens où ils suivent les publications

des pages dont ils sont membres.

Parmi les catégories de pages Facebook les plus plébiscitées par les « fans » français, on

retrouve en 3ème

position, celles d’organismes et d’associations à but non lucratif.

Facebook, Twitter, LinkedIn, Google+… Les réseaux sociaux numériques sont de plus en

plus fréquentés. Depuis cinq ans, ils connaissent un développement sans précédent auprès de

publics très divers.

L’année 2010 a été marquée, selon une étude de l’IFOP (Observatoire des réseaux sociaux)6,

par une expansion importante de ces sites de socialisation, dont se sont emparées les grandes

marques commerciales, qui bouleversent les modes de communication de notre société. Ils

représentent toutefois certains risques pour leurs utilisateurs. Les « sociaux-internautes »

rendent publiques des informations sur eux-mêmes ou leurs amis (contacts personnels ou

professionnels, photos, convictions religieuses, préférences sexuelles). Ces informations

peuvent être par la suite utilisées à des fins malveillantes ou discriminatoires.

L’année 2011 voit émerger des mouvements de mobilisation citoyenne dans lesquels les

réseaux sociaux numériques jouent un rôle important, notamment “en créant de nouveaux

liens de solidarité et de sociabilité entre ceux qui informent et ceux qui reçoivent

l'information pour contourner la censure et informer en continu et en direct des évènements”

7 : le "printemps arabe" en a été le révélateur.

Plus près de nous, la mobilisation d’une fraction de la population espagnole, se désignant eux-

mêmes « les indignés », sur les places des villes, ainsi que celle de comités de citoyens en

Italie, coordonnés par le Forum Italien des Mouvements pour l'Eau Publique, afin qu'ils

participent aux référendums populaires, l'illustre également.

Avec les médias sociaux, les modalités traditionnelles de mobilisation prennent "un coup de

vieux" : le syndicalisme, le multipartisme, les manifestations, voire la représentation par

6 IFOP : Observatoire des réseaux sociaux : http://www.slideshare.net/azizhaddad/ifop-observatoire-rseaux-

sociaux-janvier-2010

7 Rita Chemaly. Les réseaux numériques au service des intifadas arabes . Table ronde du 20 avril 2011, Institut

des sciences politiques, université Saint Joseph : http://ritachemaly.files.wordpress.com/2011/04/table-ronde-isp-

intifadas-arabes-et-ntic-par-rita-chemaly.pdf

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l'élection... S’ils ne se substituent pas à ces modalités traditionnelles, les médias sociaux

jouent le rôle de catalyseurs pour des mobilisations et des actions collectives. Par la gratuité,

la rapidité et la facilité de leurs services, ils aident à organiser des actions collectives. Les

"flash-mobs"8, l'agora des "chats"

9 et des "tweets"

10, constituent de « nouvelles » modalités de

communication : des nouveaux espaces d'expression et de mobilisation peu ou pas régulés.

Ces premiers éléments contextuels identifiés, ces questions peuvent être posées : les

mobilisations sur les médias sociaux en ligne11

, peuvent-elles venir se substituer, mêmes

partiellement, aux formes d’engagements associatifs plus traditionnelles ? Ou peuvent-elles

être complémentaires, voire venir renforcer la mobilisation associative ?

Si les médias sociaux en ligne peuvent être des outils au service du fait associatif, l’utilisation

de médias de type Facebook, dont le modèle économique est capitaliste, est-elle en cohérence

avec les valeurs de l’Economie Sociale et Solidaire et de l’Education populaire ?

Ce mémoire de fin d’études de Master « Stratégie et Management des Entreprises

Associatives de l’Economie Sociale et Solidaire » a pour thème les médias sociaux en ligne et

leurs interactions possibles avec les réseaux sociaux physiques et plus particulièrement les

associations.

Pour répondre aux questions préalablement posées, nous définirons dans un premier temps ce

qui caractérise l’engagement associatif. Puis nous étudierons les possibilités de substitution de

l’engagement militant traditionnel par les médias sociaux.

Dans un deuxième temps, nous nous efforcerons de montrer en quoi les médias sociaux

peuvent être des outils de renforcement de son propre réseau militant et comment ceux-ci

peuvent permettre d'élargir la diffusion du projet politique d'un

8 Un "flash-mob", ou encore mobilisation éclair, est le rassemblement d’un groupe de personnes dans un lieu

public pour y effectuer des actions convenues d’avance, avant de se disperser rapidement. Le rassemblement

étant généralement organisé au moyen d’Internet, les participants ne se connaissent pas pour la plupart.

9 Chat : ce terme correspond à la possibilité de discuter en ligne sur internet en temps réel avec une ou plusieurs

personnes. Contrairement au logiciel de messagerie, le chat permet à l'interlocuteur de prendre instantanément

connaissance du contenu du message au moment même où ce dernier est écrit. www.cnil.fr/index.php

10

Tweet : message limités à 140 caractères diffusé sur le logiciel de microblogging Twitter.

11

Les médias sociaux en ligne désignent un ensemble de services permettant de développer des conversations et

des interactions sociales sur internet ou en situation de mobilité.

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mouvement d'Éducation Populaire auprès d'associations ou de militants plus éloignés. Il

s'agira ici de vérifier si la théorie de Marck Granovetter12

sur "La force des liens faibles" peut

être appliquée aux médias sociaux.

Dans un troisième temps, sera posée la question de l'adéquation du ou des médias sociaux

choisis avec les valeurs de l'Education Populaire. Il s’agira, dans cette partie, de s’interroger

sur les médias sociaux les plus adaptés aux valeurs de l'Éducation Populaire, au risque de se

priver de l’audience des médias que sont les entreprises et marques Facebook, Twitter,

Google +, et des liens éventuels entre le monde du Logiciels Libres et celui de l’Education

Populaire.

Le travail effectué dans ce document s’appuie sur des interviews de chercheurs et de

personnalités dont les travaux sont connexes à la thématique de ce mémoire. Il prend

également appui sur des enquêtes réalisées par des organismes extérieurs sur l’engagement

associatif et sur les médias sociaux. Enfin, une partie sera consacrée à l’étude et l’analyse

d’un compte Twitter associatif et sur l’impact des médias sur la fréquentation de sites Internet

associatifs.

Pour réaliser ce mémoire, nous mobiliserons principalement les champs disciplinaires des

sciences de l’information et de la communication et de la sociologie, notamment la sociologie

des réseaux.

12 Mark Granovetter, né en 1943, est professeur de sociologie à l'Université Stanford. C'est l'un des principaux

acteurs du renouveau de la sociologie économique.

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1. LES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE,

NOUVELLES FORMES D’ASSOCIATIONS ?

Afin d’évaluer le risque de substitution, même partiel, de l’engagement associatif traditionnel

par l’engagement sur les médias sociaux, nous allons, dans une première partie de ce chapitre,

tenter de clarifier ce qui caractérise l’engagement associatif bénévole traditionnel.

Puis, nous nous intéresserons aux nouvelles modalités d’engagement pouvant être mises en

œuvre à travers les médias sociaux.

Enfin, nous nous interrogerons sur les risques et sur les opportunités que peuvent représenter

les médias sociaux pour le monde associatif.

1.1. PEUT-ON CARACTERISER L’ENGAGEMENT ASSOCIATIF TRADITIONNEL ?

1.1.1. Eléments historiques et contextuels

En France, la notion d’engagement a été fortement liée à l’action partisane et au militantisme

politique. On a longtemps considéré que l’engagement « noble », l’engagement par excellence

était l’engagement politique, suivi de l’engagement syndical. Les autres formes d’engagement

(associatif et/ou bénévole) étaient souvent dévalorisées. Ce n’est que récemment que les

chercheurs (notamment les sociologues) ont inclus l’engagement bénévole et associatif dans

l’étude des formes de participation au débat public.13

Les crises qui ont affecté, depuis une trentaine d'années un modèle militant construit dans

l'action politique et syndicale, essentiellement marqué à gauche, ont retenti sur l'engagement

associatif. Celui-ci a, dans certains cas, connu une évolution parallèle, le militant laissant

progressivement la place à l’usager, dans une logique de consommation d’activité et non

d’engagement militant sur des valeurs partagées. Dans d'autres, il s'est affirmé comme une

modalité substitutive de l'engagement politique.

Selon le discours dominant relayé par les médias, le bénévolat serait en crise, notamment au

niveau de la jeunesse. C'est aussi le sens commun et la perception des intéressés eux-mêmes.

13 L'engagement contemporain : Les raisons d'agir et le sens des mutations

Note de problématique élaborée par Catherine LENZI, sociologue, chercheuse associée au laboratoire

Printemps/CNRS, responsable du pôle enseignement supérieur, recherche et international à l’IREIS Rhône-Alpes

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Lors d’une intervention aux Journées d’Etudes des Responsables Fédéraux (JERF) de la

Ligue de l’Enseignement en février 2012, Viviane Tchernonog (chargée de recherche au

CNRS), nous dit :

« Il n’y a pas de crise du bénévolat. Le travail bénévole connaît, au contraire, un rythme de

croissance tout à fait considérable. Les différents travaux qui sont conduits auprès des

associations permettent de conclure que le bénévolat est en plein essor.

Les dernières données nous permettent d’affirmer aujourd’hui que 32 % des français âgés de

plus de 18 ans ont une activité bénévole, ce qui nous fait à peu près 16 millions de bénévoles.

Pour autant, le travail bénévole connaît un certain nombre de difficultés, notamment dans le

renouvellement de ses responsables, qui explique les discours tenus sur la crise du

bénévolat. »

Ces quelques éléments historiques et contextuels, nous conduisent à nous intéresser aux

modalités qui poussent les individus à s’engager dans une association.

1.1.2. Les raisons d’agir

Au travers du lien d’association, l’individu s’inscrit dans le collectif par une relation

volontaire, libre et pour un temps donné. Il développe des relations informelles, multiples,

basées sur la multiplication des expériences. C’est une sorte de mise en réseau perpétuelle

dans laquelle la relation prime sur le cadre dans lequel elle s’exerce. En agissant ainsi,

l’individu s’affranchit de ses appartenances (familiales, sociales, professionnelles) pour

devenir un « individu pluriel », résultat d’expériences forgées tout au long de cette

socialisation élargie. Il s’inscrit en fait dans un lien d’association et ce dans le sens où ses

relations aux autres sont volontaires, libres et conçues dans un rapport égalitaire.14

Ce lien d’association est présent dans notre vie de tous les jours, par les relations que nous

nouons entre nous, « groupements de fait, groupements informels ». Ainsi le fait associatif est

visible bien au-delà du phénomène de l’association déclarée, contractualisée : l’association de

fait est aussi une réalité du lien social. Association de fait et association déclarée ne sont pas à

opposer, l’une et l’autre s’inscrivent avant tout dans une approche renouvelée du lien social

par le lien d’association.

14 SUE Roger. - Renouer le lien social. Liberté, égalité, association.- Éditions Odile Jacob. - 2001

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 13

Dans son intervention lors des Journées d’Etudes des Responsables Fédéraux (JERF) de la

Ligue de l’enseignement (février 2012), Catherine Lenzi15

, nous propose de rendre lisibles les

raisons qui motivent et orientent les conduites des individus qui, si elles ne sont pas forcément

liées à la thèse utilitariste, ne sont pas pour autant des « actes gratuits », c’est-à-dire non

motivés.

Pour Catherine Lenzi, le sens de l’acte d’engagement renvoie moins à la notion d’intérêt – au

sens d’un calcul stratégique et rationnel – qu’à celle d’illusio, théorisée par Pierre Bourdieu :

« L’illusio, c’est le fait d’être pris au jeu, d’être pris par le jeu, de croire que le jeu en vaut la

chandelle, ou, pour dire les choses simplement, que ça vaut la peine de jouer. »16

Bénédicte Havard-Duclos et Sandrine Nicourd, à partir d’une analyse des processus

d’engagement observés dans des associations de solidarité, ont montré que l’intensité des

engagements dépendait de la façon dont les organisations répondent aux attentes des militants

sur quatre registres : « l’utilité sociale, le sens de l’engagement pour la trajectoire

personnelle, le plaisir apporté par une sociabilité et un statut satisfaisant, la légitimité de

l’engagement au regard des normes sociales dominantes »17

.

Un rapport de recherche, "Intérêts d'être bénévole"18

, vient compléter l’analyse de Bénédicte

Havard-Duclos et Sandrine Nicourd.

L’objectif essentiel de cette recherche concerne moins le bénévolat en tant que tel, que

l’analyse des incidences positives, ou éventuellement négatives, pour le sujet de la pratique

d’une activité bénévole régulière au sein d'une association. Cette recherche a été réalisée

auprès de cinquante huit bénévoles à partir d’entretiens non directifs sur leur parcours

initiatique de formation et de construction de savoirs, à partir d’un échantillon raisonné.

L’analyse des entretiens est réalisée avec le logiciel d’analyse de données textuelles Alceste

dont la méthodologie vise à découvrir l’information essentielle contenue dans un texte.

Les résultats de cette recherche, illustrés par le schéma suivant (Figure 1), montrent ceci :

15 Catherine LENZI : Sociologue, chercheur associé au laboratoire Printemps/CNRS Université de Versailles

Saint-Quentin-en-Yvelines

16

Pierre BOURDIEU, « Un acte désintéressé est-il possible ? », Raisons pratiques, Paris, Seuil, 1994, p. 151

17

Bénédicte HAVARD DUCLOS, Sandrine NICOURD.- Pourquoi s'engager ? : Bénévoles et militants dans les

associations de solidarité.- PAYOT, 2005, 224 p. Page 194

18

Recherche réalisée en 2010 par le laboratoire Cerlis/CNRS de l'Université Paris Descartes sur commande du

Crédit Mutuel et de la Fonda. http://www.cnrs.fr/inshs/recherche/docs-vie-labos/interet-etre-benevole.pdf

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 14

Classe 1 : Animer, assurer des responsabilités et acquérir des compétences

Pour 19% des bénévoles interrogés, l’engagement dans une association est souvent en

concordance avec une finalité professionnelle. Le fait de s’appuyer sur les ressources de

l’institution associative, de prendre des responsabilités sont des moyens d’acquérir une

reconnaissance sociale. Le bénévolat permet d’enrichir ses expériences, de développer des

aptitudes, d’acquérir des compétences. Il pousse à prendre des responsabilités et des

initiatives. Ces discours mettent l'accent et valorisent tout particulièrement le réinvestissement

professionnel et la reconnaissance sociale, voire une perspective d’emploi ou une promotion.

Classe 2 : Projet de développement personnel

Pour 15% des bénévoles interrogés, l’engagement bénévole est un moyen d’utiliser des

missions associatives non seulement pour acquérir des compétences selon un projet personnel,

voire un tremplin vers l’emploi, mais aussi pour s'épanouir tout en occupant son temps libre.

Chez les plus jeunes, on s’investit pleinement dans des missions jugées intéressantes et utiles

si le projet permet de développer des compétences et laisse une grande part aux initiatives

individuelles. C’est un engagement bénévole dont l’utilité est positive pour la société mais

tout autant pour l’individu lui-même. La satisfaction personnelle vient en partie du don à

l'autre. Altruisme teinté d'individualisme donc, où se côtoient motivations pour l’autre et

motivations pour soi.

Classe 3 : Contraintes et environnement familial

Pour 29% des bénévoles interrogés, il apparaît nettement qu’une des motivations principales

déclarées est l'aspiration à rencontrer des personnes, établir des contacts et rendre service.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 15

Mais en même temps cet engagement est contraignant, surtout pour l’environnement familial

qui en supporte les conséquences. Milieu familial qui est pourtant souvent à l'origine de ces

engagements selon différentes traditions.

Classe 4 : Individu et liens sociaux

Pour 37% des bénévoles interrogés, le désir de se faire des amis et la recherche

d’épanouissement est assez prégnant, c’est aussi une façon de lutter contre le risque de repli

sur soi. Souhaiter rencontrer des personnes ayant les mêmes préoccupations, se faire des amis,

partager des moments conviviaux et festifs à l’issue des moments forts vécus ensemble sont

aussi des motifs de satisfaction garants d’un engagement durable.

Une deuxième analyse des contenus des entretiens vient renforcer et compléter les items

d'informations significatifs déjà repérés et quantifiés par le logiciel Alceste. Trois grands

thèmes majeurs et transversaux à pratiquement tous les discours qui recoupent en partie et

affinent l'analyse précédente, se détachent :

Le plaisir de se réaliser : L’engagement bénévole apparaît d’abord comme lié à un

loisir particulier par lequel nous pouvons tout à la fois nous connaître et « nous

produire ». Il correspond à un projet d’activité où le plaisir est synonyme de réalisation

de soi. En un sens, on est passé d’un engagement militant à une logique

d’épanouissement personnel, ou en tout cas à une inversion des motivations.

Acquérir des compétences : S’il est difficile de considérer l’engagement bénévole

comme un «travail» au sens d’une activité contractuelle, subordonnée et rémunérée,

tous les bénévoles interrogés affirment en retirer des avantages par l’acquisition de

nouvelles compétences. Ces compétences pouvant précisément faire l’objet d’un

transfert dans le monde du travail. Par sa posture, le bénévole acquiert

progressivement plus de confiance en soi et une capacité à se distancier. L’expérience

bénévole facilite les acquis de compétences empathiques comme la capacité de mieux

comprendre les autres, de motiver les gens rencontrés.

Affiliation & lien social : Le besoin d’appartenance à un groupe, d’échange et de

reconnaissance est très fort, surtout quand nous nous sentons isolé. Le désir de se faire

des amis est assez prégnant. A la différence du lien social qui se construit directement

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dans le rapport aux autres, la reliance est la représentation de son engagement à travers

le groupe, le collectif, l’association. Nous nous lions individuellement et nous sommes

relié par le collectif, par le sentiment d’une appartenance commune. C’est aussi un

moyen de sortir des contraintes familiales et professionnelles tout en permettant de

rencontrer d’autres personnes et d’apprendre autre chose.

Si les raisons de s’investir dans le bénévolat associatif se traduisent principalement par le

plaisir de se réaliser, par l’acquisition de nouvelles compétences susceptibles d’être

transposées dans la vie professionnelle et par le désir de lien social, cet engagement associatif

subit-il des mutations ? Des évolutions ?

1.1.3. Les évolutions de l’engagement

Si on entend derrière le terme engagement, l’engagement partisan ou politique, il ne fait donc

pas l’ombre d’un doute que les individus aujourd’hui ne se reconnaissent plus dans ces modes

de participation collective qu’ils perçoivent comme sacrificielle et en désaccord profond avec

les valeurs individuelles et d’autonomie qui les animent. Ce n'est donc pas anodin si les

acteurs associatifs se définissent davantage comme des individus "engagés" et affranchis des

logiques d'appareil, que comme des militants, terme associé au petit soldat de la cause.

Suivant cette même logique, les individus engagés dans une action collective et plus

généralement les bénévoles associatifs, se définissent souvent comme apolitiques ou non

partisans, quand bien même tout dans leur pratique, témoigne du contraire.19

« Au militant dévoué et fidèle, fonctionnant à l’appartenance identitaire et à l’engagement

illimité, aurait succédé un militant plus autonome à l’égard des organisations, mobilisé sur

des objectifs concrets, modestes et spécialisés mais utiles, sur des durées limitées. L’action

deviendrait plus importante que l’affiliation, dans un idéal tout autant libéral que

libertaire »20

.

19 Catherine LENZI.- L'engagement contemporain : Les raisons d'agir et le sens des mutations. Intervention lors

des JERF de la Ligue de l’enseignement (février 2012).

20

HAVARD-DUCLOS et NICOURD, 2005, p. 171

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 17

Si l’on en croit les discours de Catherine Lenzi et de Bénédicte Havard-Duclos et Sandrine

Nicourd, il semblerait que l’engagement militant, basé sur l’appartenance identitaire liée au

projet politique de l’association, évoluerait vers une forme plus limitée dans le temps sur des

objectifs plus précis. C’est en cela qu’il existe une profonde différence entre les « nouveaux

bénévoles » et le modèle militant traditionnel. Alors que ce qui fonde une association, ce qui

doit être l’objet du ralliement des adhérents est une finalité partagée, ce qui motive

aujourd’hui les « nouveaux bénévoles » réside davantage dans l’action qu’ils conduiront eux-

mêmes. La recherche d’un épanouissement individuel et la volonté de garder son autonomie

dans l’association prendraient le pas sur un engagement permanent.

Certains sociologues ont développé une thèse sur une mutation des formes de l’engagement.

Jacques Ion explique, par exemple, qu’elle oppose un militantisme « total » du passé à un

militantisme « distancié » du temps présent21

. Le premier se caractériserait par un

investissement intense dans la cause, à laquelle une large part de la vie familiale et des loisirs

serait sacrifiée : réunions plusieurs soirs par semaine, distributions de tracts et vente du

journal le dimanche, auxquels s’ajouteraient cotisations élevées, docilité à l’égard de la

hiérarchie et fort attachement identitaire au mouvement (parti, syndicat…). Le second se

singulariserait, à l’opposé, par les fluctuations de l’engagement, conçu comme « à la carte » :

chacun choisirait ses propres rythmes, degrés et modalités de participation au groupe, et se

méfierait des structures bureaucratiques hiérarchisées perçues comme menaçantes pour son

autonomie et sa liberté. De même, ces nouveaux militants n’hésiteraient pas à passer d’une

cause à une autre au gré de leurs envies et disponibilités (de la défense d’un site menacé à

celle des sans-papiers, par exemple).

Viviane Tchernonog (JERF, février 2012), constate que le profil des bénévoles a changé

depuis une dizaine d’années22

. Ils sont devenus beaucoup plus exigeants. Ils sont nombreux à

souhaiter maîtriser leurs parcours de bénévoles, à vouloir diversifier les expériences. Ils

préfèrent souvent certains secteurs d’activités.

Les jeunes préfèrent faire du bénévolat dans la culture ou l’humanitaire et d’autres secteurs

sont délaissés. Les nouveaux bénévoles veulent avoir une prise sur le projet de l’association.

21 Jacques ION. - La fin des militants ? - Paris, L’Atelier, 1997.

22

Viviane TCHERNONOG. - Les grandes tendances de l’évolution des associations. - Article extrait de juris

associations n° 384 du 15 septembre 2008. Reproduit avec l’autorisation des éditions Juris associations.

https://www.associatheque.fr/fr/fichiers/etudes/tendances-evolution-asso-2008.pdf

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Ils ne veulent pas être de simples exécutants. Ils aspirent aussi à pouvoir infléchir un certain

nombre d’actions de l’association.

1.1.4. Eléments de synthèse

Le tableau ci-dessous (Tableau 2) tend à synthétiser ce qui caractérise l’engagement associatif

et ses évolutions.

Tableau 2 : Raisons d’agir et évolutions de l’engagement associatif

Les raisons de l’engagement

associatif :

- Le désir de lien social : se faire des amis,

rencontrer de nouvelles personnes, hors du cercle

professionnel et familial, partager des moments

conviviaux. Le besoin d’appartenance à un groupe.

- Le plaisir de se réaliser : épanouissement

personnel, s'épanouir tout en occupant son temps

libre, motivations altruistes et motivations plus

personnelles.

- Acquérir des compétences : prise de

responsabilités comme acquisition de

reconnaissance sociale, réinvestissement

professionnel, voire perspective d’emploi ou

promotion. Acquisition de compétences

empathiques.

Les contraintes de

l’engagement :

- Engagement contraignant, surtout pour

l’environnement familial qui en supporte les

conséquences.

Les évolutions de

l’engagement :

- Plus limité dans le temps.

- Sur des projets d’actions plus précis.

- Sur des rythmes plus souples, choisis par le

bénévole.

- Méfiance envers les structures bureaucratiques

hiérarchisées.

- Impliqué dans le projet global de l’association Vs

simple exécutant.

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Par ailleurs, Isabelle Compiègne, dans son livre « La société numérique en question(s) »23

,

parlant « des nouveaux dispositifs de communication et leur diversification » et du phénomène

de « connexion continue », dit « qu’elle entraine un morcèlement de l'activité et une

dispersion des engagements avec le danger que cela nuise finalement à la profondeur de

l'investissement dans la relation. »

L’engagement sur les médias sociaux peut-il venir se substituer à l’engagement associatif

traditionnel ? Internet est-il en train de réinventer une culture de l’engagement militant ?

1.2. LES MOBILISATIONS SUR LES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE : NOUVELLE FORME

D’ENGAGEMENT ?

De 1995 à 2001, l'Internet militant prend véritablement forme avec les listes de diffusion sur

le web24

. Internet donne la possibilité à ceux qui n'appartiennent pas ou ne veulent pas

appartenir à des organisations syndicales ou associatives de donner une ampleur à leurs

revendications. Cette période de développement de technologies façonne de nouveaux

comportements engagés permettant à de nombreux individus de se dégager des organisations.

On parle de micro-mobilisations, non pour témoigner de leur faible diffusion, mais pour

signaler qu'elles peuvent se déployer à partir de l'action d'un homme.

Les mobilisations ne sont plus l’apanage des mouvements syndicaux ou associatifs, une

somme d’individus peut désormais, à partir du témoignage en ligne d’un seul membre,

mobiliser autour d’une revendication, d’un fait ou de la défense d’une cause.

Manuel Castells25

évoque par ailleurs que « les réseaux en ligne, quand ils se stabilisent,

peuvent engendrer de véritables communautés : des communautés certes virtuelles,

différentes en cela des communautés physiques, mais pas nécessairement moins fortes ou

moins efficaces pour maintenir un contact ou mobiliser. »

23 Isabelle COMPIEGNE.- La société numérique en question(s).-Auxerre, Siences Humaines Éditions 2011.-

127p.

24

Une enquête menée auprès de cyberactivistes montre comment Internet est devenue un véritable laboratoire

politique. Scripts, blogs, forums, listes de discussions reformulent sans cesse les cadres du débat public. Article

paru le site scienceshumaines.com inspiré du livre « Devenir Média » (Olivier Blondeau en collaboration avec

Laurence Allard) - http://www.scienceshumaines.com/quand-internet-reinvente-le-politique_fr_21841.html 25

Manuel CASTELLS.- La Galaxie Internet.- Paris : Fayard, 2001.– 365 p

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1.2.1. L’exemple du « Bad Buzz26

» des supermarchés CORA

L’exemple de la caissière des supermarchés CORA illustre bien le pouvoir de mobilisation

des médias sociaux.

C’est un article publié sur l’Express.fr qui déclenche « la machine » le 26 octobre 2011.

L’histoire de cette caissière des supermarchés Cora, « Menacée de licenciement pour un ticket

de caisse ramassé », provoque des réactions en chaîne et une vague de commentaires violents

sur les médias sociaux.

La page Facebook de Cora a été prise d’assaut par les internautes qui ont multiplié les

invectives et des commentaires furieux. Même chose sur Twitter où Cora entre très vite dans

les sujets tendances du moment. De son côté, l’enseigne Cora tente une modération sur ces

médias sans jamais parvenir à endiguer la vague contestataire. Trop tard, l’incendie de la crise

est déclaré ! Et les grands médias en font aussitôt leur miel à tel point que les stations de radio

France Inter et Europe 1 ouvrent leur antenne à la caissière incriminée, et les indignés

s’apaisent à peine le lendemain, quand l’enseigne publie son mea culpa sur Facebook.

La direction, après avoir fait savoir dans l'après-midi être en relation avec l'hypermarché de

Mondelange, a annoncé sa décision dans la soirée sur sa page Facebook. Elle annonce « ne

pas poursuivre la procédure engagée à l'encontre d'une salariée du magasin. »

Cora ajoute : « Nous avons conscience de l'émotion suscitée par les informations parues

depuis ce matin. »

Le statut a été commenté plus de 500 fois. Si la décision est évidemment une bonne nouvelle

pour la salariée, les internautes estiment que la réaction de Cora est bien faible, et demandent,

pêle-mêle, « des excuses publiques », un « boycott » ou encore la « démission de la

direction ».

La mobilisation sur les médias sociaux a gagné, la salariée est réintégrée, et Cora s’en tire

avec une e-réputation négative dans les annales de Google.

Cette mobilisation éclair n’est pas un cas isolé, et reflète le pouvoir fédérateur de l’Internet,

pourvoyeur de nouveaux outils pour défendre, plaider, dénoncer, aider, critiquer, et agir,

autant d’actions qui étaient jusque là mises en œuvre par des organisations associatives,

politiques ou syndicales. Mais cette mobilisation n’est-elle pas ponctuelle ? A-t-elle permis de

26 Un bad buzz est un phénomène de "bouche à oreille" négatif qui se déroule généralement essentiellement sur

Internet.

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faire avancer réellement la cause des conditions de travail des caissières de supermarchés ?

Impacte-t-elle les ressources humaines de l’entreprise ?

1.2.2. L'impact des médias sociaux pendant le printemps arabe

L’année 2011 voit également émerger des mouvements de mobilisation citoyenne dans

lesquels les réseaux sociaux numériques jouent un rôle important, notamment “en créant de

nouveaux liens de solidarité et de sociabilité entre ceux qui informent et ceux qui reçoivent

l'information pour contourner la censure et informer en continu et en direct des

évènements 27

» : le « Printemps Arabe »28

en a été le révélateur.

Rita Chemaly, lors d’une table ronde autour des Intifadas Arabes, organisée par l’Institut des

Sciences Politiques, à l’Université Saint Joseph de Beyrouth, le mercredi 20 avril 2011, nous

éclaire sur le rôle des médias sociaux lors du « Printemps Arabe ».

Ce rôle, dit-elle, s'est centré autour de trois pôles :

- Diffuser l'information et les messages de soutien aux populations révoltées, mais

aussi et surtout couvrir le mouvement de rue et alerter, notamment via Twitter

(exemple de Samer Karam qui mettait à jour une liste des disparus et utilisait Twitter

pour alerter l’opinion sur le sort des « activistes » et opposants arrêtés, torturés ou

kidnappés).

- Contester avec des pétitions et articles qui expriment le ras-le-bol des citoyens, et de

ceux qui les soutiennent, donnant aussi la parole, sur la sphère publique numérique, à

la diaspora des pays concernés et aux dissidents.

27 Rita CHEMALY, diplômée en sciences administratives et politiques de l'Institut des Sciences Politiques de

l'Université Saint Joseph de Beyrouth. Les réseaux numériques au service des intifadas arabes . Table ronde du

20 avril 2011, Institut des sciences politiques, université Saint Joseph :

http://ritachemaly.files.wordpress.com/2011/04/table-ronde-isp-intifadas-arabes-et-ntic-par-rita-chemaly.pdf

28

Le « Printemps arabe » est un ensemble de contestations populaires, d'ampleur et d'intensité très variables, qui

se produisent dans de nombreux pays du monde arabe à partir de décembre 2010.

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- Se mobiliser en se regroupant dans des groupes de façon affinitaire par la création de

groupes sur Facebook et de Hashtags29

(#) sur Twitter qui regroupent et catégorisent

les flux d'informations, et rassemblent autour d'initiatives communes.

Un des enseignements que nous pouvons tirer de cette analyse est que les médias sociaux ont

été des catalyseurs pour des mobilisations et des actions collectives communes, qu’ils ont été

des outils cruciaux lors des Intifadas arabes, mais qu’il ne faut pas oublier, comme le rappelle

justement Rita Chemaly en conclusion de son intervention, « que la grande part de la

mobilisation et de l'action politique effective, a eu lieu dans la rue et dans les manifestations

de quartiers ».

1.2.3. Un compte Twitter fermé grâce à la mobilisation sur Internet

Plus récemment, un compte Twitter pédo-pornographique a été suspendu le 9 août dernier par

le site de micro-blogging, grâce à la mobilisation massive d’utilisateurs.

Le compte « @many501611 » a été trouvé et fermé après que des utilisateurs du réseau social

ont commencé à le dénoncer. La mobilisation des internautes utilisant Twitter ayant

rapidement pris de l’ampleur, le compte pédo-pornographique a été signalé à la plateforme

officielle du ministère de l’Intérieur chargée de ce type de dossier.

Depuis sa création en janvier 2009, le service qui emploie conjointement policiers et

gendarmes tous rattachés à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, a déjà à son actif

plusieurs dizaines de milliers de signalements par des individus. En revanche, c’était la

première fois qu’un signalement était réalisé sur le réseau social en France.

Cet exemple prouve le pouvoir de mobilisation offert à des citoyens par les médias sociaux

pour des actions rapides et ponctuelles. En effet, l’action des utilisateurs de Twitter,

découvrant grâce à ce média un acte délictuel, a pu faire stopper cette diffusion à caractère

pédo-pornographique. Pour autant, il semble peu probable que la majorité des internautes

ayant participé à cette mobilisation s’engage dans une action à plus long terme pour la lutte

29 Derrière ce mot barbare se cache un symbole trop souvent oublié du clavier : le #. Twitter remet ce symbole

sur le devant de la scène en lui donnant un rôle capital, celui d’annoncer un sujet ou un mot-clé. Un hashtag est

ainsi un mot-clé précédé d’un #. Il permet d’ajouter une information complémentaire à un tweet, qui va

permettre de regrouper les messages autour d’un même thème, d’un même lieu ou encore d’un même

évènement, facilitant ainsi sa diffusion. Définition issue du livre d’Emilie OGEZ et Jean-Noël CHAINTREUIL :

Twitter. Edition Diateno, 2012.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 23

contre la pédo-pornographie. Ce que permettent les médias sociaux de type Facebook ou

Twitter, c’est la diffusion rapide auprès d’un nombre massif d’individus d’une information

(même erronée d'ailleurs...) qui peut impliquer ceux-ci le temps d’un « clic ».

Selon Alban Martin30

, cofondateur du Social Media Club et maître de conférences associé au

Celsa Paris IV Sorbonne, c’est une « forme hybride de l’engagement », qui serait née grâce à

Internet et aux réseaux sociaux, « plus superficielle, et souvent décevante quand il s’agit de

passer au concret ». Ce dernier attribue cette volatilité à l’outil lui-même : on peut soutenir

une cause sur Facebook en un clic, sur une page qui accroche le chaland avec des airs de

pétition : « C’est un problème d’émotion. Sur le coup de l’émotion, on peut cliquer vite sans

réfléchir ».

1.2.4. Le mouvement des « Indignés »

Si les mobilisations virtuelles ne sont pas nécessairement synonymes d’engagement réel et

pérenne dans le temps, nous aurions tort de négliger ce pouvoir de mobilisation.

Il ya encore quelques années, les mobilisations de citoyens, signifiant leurs désaccords par des

manifestations de rues, étaient initiées par des collectifs formels. En 2006, par exemple, Les

syndicats et coordinations d'étudiants et de lycéens, ainsi que les partis de gauche, manifestent

contre le gouvernement Dominique de Villepin et demandent le retrait des Contrats Première

Embauche et Nouvelle Embauche (CPE & CNE). Cette mobilisation rassemblait, le mardi 28

mars 2006, environ 1 055 000 manifestants, selon la police, plus de trois millions selon FO et

la CGT31

.

Aujourd’hui, les modalités de mobilisation semblent, dans certains cas, s’être inversées.

L’engagement, sur Internet, d’individus, non structurés en collectifs formels, inspire des

actions collectives d’envergures. Dans le cas du mouvement des « indignés », inspiré par le

petit ouvrage de Stéphane Hessel, « Indignez-vous ! », qui de Madrid à Athènes exprime sa

colère, l’appel sur Internet s’est traduit en un engagement concret, physique de la part des

30Alban MARTIN. - Mobilisation numérique : « une forme hybride de l'engagement ». -

www.terrafemina.com/culture/culture-web/articles/9254-mobilisation-numerique-l-une-forme-hybride-de-

lengagement-r.html

31

Lemonde.fr, article paru le 27 mars 2006 : http://www.lemonde.fr/international/article/2006/03/27/la-

mobilisation-contre-le-cpe-atteint-une-ampleur-inegalee_755248_3210.html

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internautes. Descentes dans les rues, marches organisées, campements de fortune, autant

d’actions symboliques et pacifiques pour manifester leur ras-le-bol.

C’est également ce que nous rappelle Christophe Aguiton, lors du colloque « Refaire Société :

Comment s’engager aujourd’hui ?»32

: « Aujourd’hui, pour s’engager, on commence par agir.

On publie un dessin de chat sur Facebook, comme l’a fait Willis from Tunis33

. On lance une

pétition. On rencontre d’autres personnes. On construit peu à peu plus de sens. Avant, on

considérait qu’il fallait d’abord être organisé avant d’être convaincu. On était militant avant

de faire des manifs. Aujourd’hui, c’est la manif qui est le lieu de rencontre ».

Ces mobilisations, facilitées par les médias sociaux, ne constituent-elles pas une nouvelle

forme d'engagement, moins structurée, plus spontanée dans son expression ? L’engagement

associatif traditionnel risque-t-il de disparaître au profit de l'engagement sur les médias

sociaux ? Les associations ne devraient-elle pas, au contraire, profiter de cette opportunité

pour diffuser plus largement leur projet politique ?

1.3. MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE : RISQUE OU OPPORTUNITE POUR LE MONDE

ASSOCIATIF ?

Si ces nouvelles formes de mobilisation présentent effectivement quelques risques pour

l’engagement traditionnel, elles représentent également des opportunités auxquelles le monde

associatif devrait s’intéresser.

1.3.1. Médias sociaux : risque de substitutions ?

S’il existe un risque pour les associations, notre avis est qu'il réside dans la nature même des

modalités d’engagement sur les médias sociaux. En effet, l’engagement traditionnel associatif

reposait sur des structures hiérarchisées et pérennes qui portaient la parole collective des

militants. Internet s’est construit différemment, avec pour ADN l’expression de l’individu en

tant que personne. Dans les mobilisations contemporaines comme le mouvement « Occupy

32 Compte rendu du colloque « Refaire Société : Comment s’engager aujourd’hui ? » :

http://internetactu.blog.lemonde.fr/2012/01/03/refaire-societe-comment-s%E2%80%99engager-

aujourd%E2%80%99hui/

33

Page Facebook WillisFromTunis : http://www.facebook.com/pages/WillisFromTunis/145189922203845

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 25

Wall Street34

» ou celui des « Indignés », c’est d’abord la personne qui s'exprime et s'engage.

En cela, certains mouvements associatifs peuvent être réticents à développer une stratégie de

présence sur Internet et sur les médias sociaux, de peur de ne plus maîtriser un discours

construit par le collectif. Toutefois, pour Nathalie Boucher-Petrovic35

, « ces technologies

offrent des opportunités d’élargissement des lieux d’échange, de débat et d’interaction ;

autrement dit de l’espace public ».

Ce risque nous semble toutefois limité. Notre avis est que la parole collective a davantage de

chance d’aboutir, et d’être prise en compte par les pouvoirs publics, si elle est portée par un

collectif structuré et formel, passant par des formes associatives, syndicales ou politiques.

Ainsi, pour Dominique Cardon36, « il est inutile d’opposer les mobilisations en ligne et les

mobilisations traditionnelles, passant par les formes associatives. En fait, les premières sont

souvent très poreuses et beaucoup de ceux qui sont les plus actifs dans les mobilisations en

ligne ont souvent une socialisation militante et politique préalable.37

»

Un des risques identifiés par les responsables associatifs croisés dans notre quotidien

professionnel, est un risque de « virtualisation » des échanges allant à l’encontre même des

raisons de l’engagement associatif, à savoir le désir de lien social (se faire des amis,

rencontrer de nouvelles personnes, partager des moments conviviaux) comme nous l’avons

montré précédemment. A cela, Valérie Peugeot38

, répond « Contrairement à une crainte

couramment répandue lors des premiers développements d’Internet, et pourtant démentie dès

ce moment-là, les technologies de l’information ne se substituent pas aux échanges humains,

relationnels, mais au contraire les amplifient, les démultiplient, ou leur font emprunter de

nouvelles voies. La préparation d’une décision collective peut être grandement facilitée par

34 Occupy Wall Street (en français : « Occupons Wall Street/New York » ) est un mouvement de contestation

pacifique, initié en 2011, dénonçant les abus du capitalisme financier.

35

Education populaire et TIC : mise en perspective et enjeux - Communication de Nathalie Boucher-Petrovic,

aux Roumics le 15 juin 2006 à Lille

36

Dominique CARDON, sociologue et Chercheur associé au Centre d’étude des mouvements sociaux de l’École

des Hautes Études en Sciences sociales.

37

Voir interview complète en annexe.

38

Valérie PEUGEOT, chercheuse à l'Orange Labs, présidente de l'association VECAM.- Réseaux humains,

réseaux électroniques. - Paris, Éditions Charles Léopold Mayer, 2001.

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les outils à distance ; la construction finale d’une pensée collective et les prises de position et

de décisions importantes demanderont toujours le face à face. »

Un autre risque que nous pouvons identifier de l’utilisation faite des médias sociaux est que

ces nouveaux outils placent parfois au même niveau des causes très nobles, des débats de

société sérieux, et des requêtes très superficielles. Des millions de personnes peuvent se

mobiliser pour élire le candidat de Koh-Lanta ou la Danette du mois, et cliquer ensuite sur une

pétition à caractère politique ou humanitaire. Pour pallier cet écueil et être visibles et lisibles

sur ces médias numériques, les militants associatifs devront se convertir au « marketing

agressif du web 2.039

», ce qui suppose une montée en compétences qui peut passer par une

stratégie de recrutement de bénévoles ou de professionnels, issus d’une tranche de la

population plus jeune et souvent plus aguerris à ces nouveaux outils.

François Meynier40, chargé de mission Technologies de l’Information et de la Communication

à la Ligue de l’enseignement de la Dordogne, en charge d’une mission déléguée « Société

Numérique » auprès de la Ligue de l’enseignement nationale, nous explique que « les

mobilisations numériques ne pourront jamais se substituer totalement aux formes

traditionnelles d’engagements qui passent par les actions de terrain, utilisées comme autant

de vecteurs pour faire passer pratiques, idées et valeurs. Cependant, elles sont un

complément intéressant lorsque l’on veut communiquer sur ces actions. Les formes

traditionnelles d’engagements associatifs ne peuvent donc faire l’impasse sur ces nouveaux

moyens de communication au risque de perdre de l’audience face à des alternatives

d’engagement plus axées sur de la consommation. »

Même si l’engagement sur les médias sociaux présente des risques pour les organisations

associatives traditionnelles, elles doivent s'interroger sur le risque qu’il y aurait pour le monde

associatif à ne pas être présent sur les médias sociaux, et plus globalement sur le Web 2.0.

Le risque pour un mouvement associatif d’être absent des médias sociaux est de notre point de

vue de plusieurs ordres :

- Que d'autres parlent à sa place sur des sujets qui font pourtant sa raison d’être.

- Que d'autres parlent de lui à sa place.

39 Considéré comme l'évolution naturelle du web actuel, le web 2.0 est un concept d'utilisation d'internet qui a

pour but de valoriser l'utilisateur et ses relations avec les autres.

40

Voir interview en annexe

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 27

- Que d'autres offrent lieux de parole et de partage à sa place.

- Que d'autres fédèrent son public naturel à sa place.

S’il existe bien un risque « d’émiettement de l’engagement que ce soit sous sa forme politique

ou sous sa forme associative, qui lui est dangereux pour la pérennité des structures

associatives», comme nous le rappelle Bastien Sibille, fondateur de l’entreprise solidaire de

logiciels libres TALCOD et secrétaire général de l’Association Internationale des Logiciels

Libres (AI2L), dans une interview qu’il nous accordait le 18 juillet 201241

, les associations ne

devraient-elle pas saisir « ces nouvelles opportunités de s’exprimer dans les outils et médias

numériques qui semblent correspondre aux démarches actives et collaboratives propres à

l'éducation populaire »42

?

Il ne s'agirait donc pas de s’exclure des évolutions technologiques et des médias sociaux en

ligne, mais de profiter des opportunités offertes, d'y participer, voire même d’être moteur dans

le domaine de l’appropriation citoyenne des outils et médias numériques.

1.3.2. Médias sociaux en ligne : une opportunité à saisir ?

Si les médias sociaux représentent un risque pour l’engagement associatif traditionnel, en

favorisant un émiettement pouvant correspondre aux évolutions repérées de cet engagement

(Plus limité dans le temps ; Sur des projets d’actions plus précis ; Sur des rythmes plus

souples, choisis par le bénévole ; Méfiance envers les structures bureaucratiques

hiérarchisées), ils offrent également à une association une belle opportunité de communiquer.

Il est toutefois nécessaire que l'association connaisse bien les spécificités des modes de

mobilisation sur les réseaux sociaux. Ceux-ci passent d’abord par des contenus partageables

autour desquels il est possible d’interagir. Les vidéos, les infographies, les « images toutes

faites », qu'on partage, qu'on « like »43

, qu'on « retwitte »44

... sont des matériaux pour

41 Voir interview complète en annexe

42 Nathalie Boucher-Petrovic, « La société de l’information « appropriée » par l’éducation populaire : une

tradition en question », tic&société [En ligne], Vol. 2, n° 2 | 2008, mis en ligne le 07 mai 2009. URL :

http://ticetsociete.revues.org/528

43 Liker : cliquer sur une information publiée sur Facebook pour dire qu'on l'aime.

44 Le retweet est une pratique courante sur Twitter. C’est le tweet d’une personne, republié par un autre

utilisateur qui le trouve suffisamment intéressant pour le faire découvrir à ses abonnés. Définition issue du livre

d’Emilie OGEZ et Jean-Noël CHAINTREUIL : Twitter. Edition Diateno, 2012.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 28

mobiliser autour d’un projet dans le cadre d’une logique de dissémination des contenus par les

publics visés.

Le cas de la campagne Kony 2012 est un cas extrême mais il est porteur d'enseignements. Il

s'agit d'une vidéo controversée mettant en scène Joseph Kony et utilisant la dramatisation,

l’émotion et la simplification pour stigmatiser un pays - l’Ouganda - alors même que Kony ne

s'y cache plus, et ce depuis 2006.

Cette vidéo a été visionnée par des millions de personnes. Une très grande majorité de ceux

qui ont partagé et fait circuler cette vidéo n’auraient jamais eu connaissance des exactions

commises et du cas des enfants soldats si les modalités de l’interaction par contenus en

vigueur sur les médias sociaux n’avaient pas été déployées à une échelle jamais atteinte

jusqu’à là sur un sujet « sérieux ».

Cette forme de militantisme a sa place dans les associations et les actions qu’elles proposent :

c’est le « besoin » d’une organisation qui est au cœur de la logique d’engagement. En cela, les

réseaux sociaux numériques ne se substituent pas aux associations traditionnelles mais leur

sont complémentaires. C’est ce que nous dit Laurence Allard45

, dans l’interview qu’elle nous

accordait : « les mobilisations sur les médias sociaux sont avant tout complémentaires aux

mobilisations associatives traditionnelles. »

Certains partis politiques ont d’ailleurs bien compris ce pouvoir de communication lors de la

dernière campagne présidentielle. La plupart proposaient à leurs militants des kits de présence

sur les médias sociaux. Le Parti Communiste Français, par exemple, consacrait un chapitre

entier de son « Guide du militant »46

sur l’utilisation d’Internet pendant la campagne : règles

pour mettre en place un mailing, conseils pour bien utiliser Facebook et Twitter, intérêt et

mode d'utilisation des Hastags (#PCF, #placeaupeuple, #FDG, #Melenchon2012).

Pour François Meynier, ces médias ne sont pas seulement une opportunité : ils deviendront

dans le futur un des principaux moyens de communication des associations (en plus des

moyens de communication traditionnels, électroniques ou classiques).

45

Laurence ALLARD, maître de conférences en Sciences de la Communication, Chercheur à l’IRCAV-

Paris/Enseignante à l’Université Lille 3. Voir interview complète en annexe

46

Guide du militant du Parti Communiste Français : http://www.pcf.fr/sites/default/files/guide_militant_2.pdf

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 29

Des associations ont choisi avec succès d’investir dans les médias sociaux, le cas des Restos

du cœur est de ce point de vue intéressant.

Pour chaque partage Facebook ou hashtag #restos2012, un repas était offert aux bénéficiaires

des Restos.

Danone et Carrefour se sont associés au Restos du cœur pour réaliser cette opération. Ces

deux firmes promettent alors de distribuer 1 repas par partage Facebook (dans la limite de

5000 partages), 1 repas par hashtag #restos2012 (dans la limite de 10 000 hashtags), 10 repas

pour un billet de blog (dans la limite de 2000 billets) et 15 repas pour un dessin (dans la limite

de 150 dessins).

Bien sur, on l’aura compris, c’est une opération de communication pour Danone et Carrefour

mais c’est aussi un gros coup de communication pour les Restos du cœur.

Le bilan de cette opération est positif : l’objectif des 5000 partages sur Facebook a été

complètement atteint (en 2 heures seulement !), en voyant plus de 70 000 partages accomplis

en 1 jour. Par ailleurs l’objectif des 10 000 tweets a été également atteint en 1 jour lui aussi.

A ce jour le nombre d’images et d’articles partagés n’est pas comptabilisable, mais les Restos

du cœur affirment que le lancement de cette opération est une vraie réussite puisque que plus

de 15 000 repas ont été distribués.

D’autre part, en développant de nouvelles formes de participation bénévole, aux côtés des

intervenants ponctuels ou réguliers avec une fonction précise (animation, trésorerie, accueil,

représentation …), les associations pourront également profiter de ces technologies pour

développer des missions bénévoles adaptées aux contraintes de certaines des personnes qui

hésitent à s’engager. Par exemple, du « bénévolat à distance » pour s’occuper, de sa Bretagne

ou de Paris, de la communication de la fête d’été à Périgueux pour aider des organisateurs

déjà investis sur place. Cette solution permettrait également à des personnes isolées ou en

situation de handicap d’être bénévoles à hauteur de leurs moyens et envies, et, plus largement,

de travailler en temps non contraint. Ceci pourrait inciter à s’engager des gens ayant le

sentiment d'être « surbookés ». Car un des freins au bénévolat est le manque de temps ou

supposé.

Bien utilisées, les technologies de l'information permettent de tirer la participation des

citoyens vers le haut, d'offrir des occasions de concrétisation à une citoyenneté plus active.

Les échanges sur Internet peuvent aussi orienter l'initiative, permettre de trouver l'autre ou les

autres qui ont la même approche, les mêmes ressentis, les mêmes convictions, de créer des

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 30

communautés d'intérêt puis d'action, et ainsi de construire le lien entre dispositions

individuelles et actions collectives. N’est-ce pas là une des missions des mouvements

d’Education Populaire ?

Ces technologies permettent à des formes d’engagement émiettées de s’exprimer, mais elles

permettent également de les agréger, de leur donner une temporalité.

La théorie de Bastien Sibille, est que l’on va vers des formes faibles d’engagement. Cela ne

veut pas dire qu’elles sont meilleures ou pires, elles sont simplement de nature différente.

Ces nouvelles formes d’engagement sont plus ténues, et il semble donc important que le

monde associatif soit en capacité de produire des technologies qui soient capables de capter

ces formes d’engagement.

Si nous sommes convaincus que les technologies numériques, et notamment les réseaux

sociaux numériques, présentent une opportunité de promouvoir le fait associatif, et mobiliser

une base militante renouvelée et d’offrir à des personnes motivées l'occasion et les moyens de

participer, qu’en est-il vraiment ? Peut-on mesurer l’impact de ces médias sur la

dissémination du projet associatif ? Existe-t-il un intérêt à développer ces formes de

mobilisations dites « faibles » ?

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 31

2. LES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE,

OUTILS AU SERVICE DU MONDE ASSOCIATIF ?

Dans ce chapitre, nous allons tenter de montrer en quoi les médias sociaux peuvent être des

outils utiles aux associations pour la diffusion de leur projet associatif. Pour ce faire, nous

nous intéresserons, dans un premier temps, à la notion de capital social, puis à la théorie de

« la force des liens faibles », développée par Mark Granovetter47

, pour ensuite essayer de

vérifier cette théorie à travers l’étude d’un compte Twitter d’une association. Enfin nous nous

interrogerons sur l’impact des médias sociaux sur la fréquentation d’un site Internet associatif.

2.1. LES MEDIAS SOCIAUX COMME SUPPORT DU FAIT ASSOCIATIF ?

2.1.1. La notion de capital social appliquée à une association.

Pierre Bourdieu48

(1980) définit le capital social comme “la somme des ressources actuelles

ou virtuelles, qui reviennent à un individu ou à un groupe du fait qu’il possède un réseau

durable de relations, de connaissances et reconnaissances mutuelles plus ou moins

institutionnalisées, c’est-à-dire la somme des capitaux et des pouvoirs qu’un tel réseau

permet de mobiliser”.

Que cela veut-il dire ? Simplement que, pour l’individu, ses relations avec d’autres individus

constituent autant de ressources qu’il peut mobiliser à l’occasion pour obtenir un avantage

quelconque dans sa vie sociale.

Appliquée à une personne morale que constitue une association, cela pourrait vouloir dire que

le capital social d’une association serait constitué de la somme des ressources actuelles (ses

propres adhérents) ou virtuelles (adhérents ou sympathisants potentiels) qu’elle possède et

qu’elle pourrait mobiliser à l’occasion pour obtenir un avantage quelconque dans sa vie

associative.

47 Mark GRANOVETTER, « The strength of weak ties », American Journal of Sociology, 1973

48

Pierre BOURDIEU.– Le capital social.- Actes de la Recherche en sciences sociales N° 31, 1980.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 32

Selon Robert D. Putman49

, ce concept renvoie également à un bien collectif, une composante

essentielle de toute société et de tout groupe humain constitué comme tel, ce qui en « colle »

ensemble les différents éléments, pour reprendre une expression fréquemment utilisée par

Robert D. Putnam lui-même (« social glue »). C'est donc la ressource mobilisée pour tisser un

lien social.

N’est-ce pas là une des missions principales des associations ? Ainsi, pour Jean-Pierre

Worms, sociologue engagé et président de la FONDA50

, le monde associatif se situe comme

un facteur incontournable du capital social de notre pays.

On pourrait donc définir le capital social d’une association comme l’ensemble des ressources

qu’elle peut obtenir au travers de ses relations sociales. Ce capital existe toujours de façon

potentielle : il faut le mobiliser à un moment donné pour le rendre efficace. Mais avant cela, il

faut l’avoir accumulé, ce qui s’apparente à un investissement : tisser et entretenir des liens

avec d’autres personnes a un coût en termes de temps et d’énergie. C’est pour cette raison que

l’on parle de capital.

Cette notion de capital social est, de notre point de vue, importante dans tout projet associatif

dont la légitimité dépend, avant tout bien sûr de l’action menée sur le terrain, mais également

de sa capacité à communiquer sur cette action. En cela, le développement du capital social

d’une association est une donnée essentielle pour pouvoir être en capacité de le mobiliser,

bien sûr pour mener à bien son action, mais également pour être des relais de communication.

Pour Pierre Bourdieu, l’existence d’un réseau de liaisons n’est pas un donné naturel, ni même

un «donné social», constitué une fois pour toutes et pour toujours par un acte social

d’institution, mais le produit du travail d’instauration et d’entretien qui est nécessaire pour

produire et reproduire des liaisons durables et utiles, propres à procurer des profits matériels

ou symboliques.

Autrement dit, le réseau de liaisons est le produit de stratégies d’investissement social

consciemment ou inconsciemment orientées vers l’institution ou la reproduction de relations

sociales directement utilisables, à court ou à long terme.

49 Robert David PUTNAM, est un politologue américain, professeur à l'université d’Harvard. Il s'est rendu

célèbre par ses écrits sur l'engagement civique, la société civile et le capital social.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Putnam

50

La Fonda est une association reconnue d’utilité publique. Dès sa création, elle réunit des personnes autour

d’un objet commun : valoriser et renforcer la contribution essentielle des associations à l’intérêt général et à la

vitalité démocratique de notre pays.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 33

Et les réseaux sociaux numériques dans tout ça ?

On présente généralement, et un peu rapidement sûrement, la notion de capital social en

disant que celui-ci est constitué par le carnet d’adresse de l’individu. Cette présentation est

probablement de moins en moins parlante à des générations pour qui le concept même de

« carnet » peut sembler « hors du temps » … Aussi, vaudrait-il mieux dire que le capital

social est constitué de l’ensemble du répertoire de votre téléphone portable, de vos contacts

sur Twitter ou de vos amis sur Facebook (ou de toute autre technologie permettant d’agréger

des contacts).

Vous l’aurez sans doute compris : Facebook, comme l’ensemble des autres sites de réseaux du

même type, constitue une objectivation du capital social. Et le fait d’être présent sur ces

médias sociaux en ligne est un moyen comme un autre d’entretenir, voire éventuellement

d’étendre, son capital social.

Oui, mais, diront certains, nous pouvons difficilement classer l’intégralité des personnes que

nous mettons dans nos réseaux comme des relations proches.

Comment alors penser que ce réseau puisse apporter quoi que ce soit d’important à une

association ? Des individus éloignés et avec qui nous entretenons que des relations

épisodiques peuvent-ils sérieusement être considérés comme des éléments importants du

capital social ?

C’est là que la théorie de « la force des liens faibles » de Mark Granovetter est intéressante.

2.1.2. Les médias sociaux numériques : la force des liens faibles

Nous pensons que les liens qui unissent des groupes sociaux plus distants et plus hétérogènes,

comme cela est souvent le cas sur les réseaux sociaux numériques, permettent une meilleure

diffusion de l’information. Cela peut s’expliquer de la façon suivante. Dans le cadre des

réseaux constitués d’individus composant un cercle restreint (famille, collègues, amis …),

pour diffuser une information chacun s’adressera à ses proches et amis. Comme ceux ayant

des liens forts ont souvent les mêmes groupes d’amis, certains auront reçu l’information

plusieurs fois, mais le nombre d’individus qui aura accès à cette information ainsi que la

portée de cette dernière, seront limités. Pour cette raison, les associations auraient avantage à

diffuser leur information sur les médias sociaux en ligne, et c’est ce que nous tenterons de

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 34

montrer plus loin, ceux-ci composant potentiellement un réseau plus élargi que le cercle de

l’association elle-même.

Mark Granovetter démontre que ce sont les relations de type « connaissances », les liens

« faibles » (connaissances, personnes que l’on voit peu, de façon irrégulière, et avec qui on

partage peu) qui sont susceptibles d’apporter le plus à l’individu, comparativement aux

relations de type « ami », les liens « forts » (connaissances avec lesquelles les contacts sont

fréquents).

Il a expliqué cette situation, a priori paradoxale, par l’existence d’obligations vis-à-vis des

proches avec lesquels des liens très forts sont entretenus. Lorsqu’un individu à la recherche

d’un emploi sollicite ses proches, ces derniers se mobilisent aussitôt pour l’aider. Appartenant

aux mêmes réseaux que lui et comptant sur les mêmes schémas de contacts, ils ne sont pas les

mieux placés pour lui présenter les meilleures offres. Ce sont les liens faibles, ceux reliant des

individus qui évoluent dans des sphères différentes et conduisant, par là même, à des réseaux

plus larges et hétérogènes, qui s’avèrent les plus efficaces. Les individus comptant sur ces

liens faibles accèdent à des sources d’information plus variées et moins redondantes. Mark

Granovetter a tiré de cette situation sa célèbre formule : « la force des liens faibles ».

Les recherches de Mark Granovetter portaient sur des individus en recherche d’emploi. Cette

théorie peut-elle se vérifier pour d’autres types de relations ?

Cette théorie des liens faibles peut être facilement transposable à une autre entité sociale que

l’individu, à savoir, l’association. Dans ce contexte, les liens forts constitueraient les

donateurs réguliers, les membres de l’association, les bénévoles. Les liens faibles quant à eux

pourraient se créer et se favoriser grâce à l’utilisation des réseaux sociaux numériques, tel que

Facebook par exemple, et aux nombreuses interactions qu’il permet. Pour Manuel Castels51

,

non seulement les médias sociaux numériques sont efficaces pour maintenir et même

développer des liens faibles, mais il semble aussi jouer un rôle positif pour le maintien des

liens forts à distance.

Par ailleurs, certains sociologues (C. Aguiton, D. Cardon) ont mis en évidence la genèse de

formes collectives originales, les coopérations faibles, par opposition aux coopérations fortes.

Ces dernières correspondent à des modes de sociabilité courants présupposant une adhésion à

51 Manuel Castells.- La Galaxie Internet.- Paris : Fayard, 2001.– 365 p

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des finalités et des idéaux communs comme pour les coopérations associatives ou les

mobilisations politiques. Le modèle de coopération faible serait lui relié aux usages du Web

2.0.

Inversant les séquences que régissent les coopérations traditionnelles (d'abord le partage de

valeurs, puis l'instauration de mécanisme de coordination, et enfin la mise en commun des

ressources), ces coopérations faibles et en ligne auraient un potentiel de coordination

supérieur et sur des thématiques inattendues.52

L’exemple de l’encyclopédie collaborative en ligne Wikipédia où tout internaute est invité à

participer selon ses centres d’intérêt, ses compétences et ses connaissances, est très

représentatif de ce mode de coopération faible. Chaque visiteur du site peut ainsi créer ou

modifier un article selon une procédure aisée, facilitée en cela par le choix d’une plateforme

WIKI53

. Une fois sauvegardée, la nouvelle version est éditée et peu donc profiter à tous.

Résultant d’une coordination et d’une coopération entre des milliers de participants,

rectifiable par chacun, Wikipédia est donc une encyclopédie évolutive basée sur la

coopération.

Alors, bien sûr, le statut de Wikipédia comme la première référence sur le web et la première

source de connaissance dans le monde est un sujet de controverses. L’audience grandissante

de Wikipédia a conduit un grand nombre de personnes à formuler des avis critiques sur la

fiabilité des informations présentées dans cette encyclopédie. Ces critiques peuvent être

entendues, et sont parfois légitimes, mais l’expérience que nous révèle Michel Serres54

est de

ce point de vue intéressante : « Wikipédia est un modèle de démocratie intellectuelle, où il y a

certes des erreurs mais somme toute pas davantage que dans de nombreuses encyclopédies de

papier publiées sous les parrainages les plus autorisés. Il y a quelques années, avec un

groupe de collègues, nous avons inventé un personnage musicien que nous avons affublé

52 Isabelle COMPIEGNE.- La société numérique en question(s).-Auxerre, Siences Humaines Éditions 2011.-

127p.

53

Un Wiki est un système d'édition interactif permettant à plusieurs personnes de rédiger un document collectif

sur Internet.

54

Michel SERRES : Philosophe et historien des sciences, Michel Serres a consacré de nombreux essais aux

conditions de l’invention et de la transmission des connaissances.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 36

d’une biographie, d’œuvres, etc., pour voir combien de temps une telle supercherie pouvait

durer : et bien en quelques mois de corrections, il n’en restait rien. »55

Mais pour Dominique Cardon56

, ce n’est qu’en de rares occasions que ces « coopérations

faibles », au terme d’un long travail de consolidation et de renforcement des liens entre les

participants, font apparaître des normes et des valeurs que les acteurs endosseront comme

attributs identitaires en s’engageant explicitement dans la prise en charge de tâches

collectives. Alors les coopérations «faibles» de l’Internet pourront effectivement devenir

«fortes» et se doter de ressources et d’instruments d’action, à la manière des collectifs du

monde réel.

Notre conviction est donc que si les formes de coopérations qui se développent sur les médias

sociaux ont peu de chance de contribuer fortement au renouvellement d’une base militante

forte, se traduisant par un engagement associatif et bénévole, les réseaux sociaux numériques

peuvent être des outils intéressants pour communiquer sur son action auprès d’un public qui

ne fait pas nécessairement partie du cercle habituelle de l’association. En cela, ils permettent

aux associations de mieux communiquer sur leur projet politique et donc potentiellement de

mobiliser autour de celui-ci.

Mais qu’en est-il vraiment de ce pouvoir de diffusion par l’intermédiaire des médias sociaux ?

Peut-on vérifier si les liens faibles sont les meilleurs relais de l’information diffusée sur les

médias sociaux ?

2.2. L’EXEMPLE DU COMPTE TWITTER DU CENTRE DE RESSOURCES DEPARTEMENTAL DE

LA VIE ASSOCIATIVE DE LA LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT DE LA DORDOGNE.

Avant d’en venir à l’étude du compte Twitter de ce centre de ressources, il nous semble

nécessaire de préciser les missions de celui-ci.

La Ligue de l’enseignement de la Dordogne est une fédération d’associations (360

associations affiliées en 2012, représentant prés de 19000 adhérents) œuvrant notamment pour

55 Michel SERRES.- La forme classique de la transmission du savoir est périmée.- Article paru dans "Les idées

en mouvement", mensuel de la Ligue de l'enseignement, N°200 - Juin/juillet 2012, page3.

http://www.laligue.org/wp-content/uploads/2012/06/IEM-200-BR-3.pdf

56

Dominique CARDON. - Vertus démocratiques de l’Internet.- Site Internet : la vie des idées :

http://www.laviedesidees.fr/Vertus-democratiques-de-l-Internet.htm .

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la promotion et le développement de l’engagement bénévole et associatif. Pour mettre en

œuvre cette mission, la fédération a mis en place un centre de ressources physique dans les

locaux de son siège social à Périgueux (24). La mise en place de ce centre de ressources se

traduit par la mise à disposition de documentations relatives au fonctionnement associatif, et

par la divulgation de conseils et d’accompagnements individualisés auprès des responsables

associatifs et porteurs de projets sur le territoire départemental.

Malgré une expertise de 80 ans dans l’accompagnement des associations de son département,

et malgré le fait que la fédération ait misé depuis plusieurs années sur le développement de

son secteur Vie Associative, notamment en moyens humains, celle-ci souffre d’un manque de

visibilité sur ce champ par un grand nombre d’associations.

La fédération décide alors en 2010 d’étoffer son offre de services aux associations. Cela se

traduit par la création d’un centre de ressources et de développement de la vie associative en

ligne : www.24.assoligue.org.

Une page Facebook (www.facebook.com/crdva24), un compte Twitter (@crdva24) ainsi

qu’un compte Google+ (https://plus.google.com/u/0/108159360629547191710/posts) sont

associés à cet outil en ligne et sont autant de canaux d’informations différents permettant

d’accéder au centre de ressources en ligne.

2.2.1. Objet de l’étude et données statistiques

L’objet de l’étude du compte Twitter de ce centre de ressources était de visualiser le réseau

que représentait un tel média et de mettre en évidence le pouvoir de diffusion de l’information

de ce réseau social numérique.

Cette étude, réalisée sur une période d’un an (d’avril 2011 à avril 2012), est inspirée de la

théorie des graphes appuyée par des « matrices d’adjacences »57

.

Au moment de la réalisation de ce travail, le compte Twitter « @crdva24 » comptait 51

abonnés (80 abonnées en septembre 2012) et était lui-même abonné à 74 comptes.

Ce compte Twitter permet de diffuser l’information mise en ligne sur le site Internet du centre

de ressources et de retransmettre, par l’intermédiaire de « retweets », des informations

relatives à la vie associative auprès de ses abonnés.

57 Mercklé Pierre (2011), Sociologie des réseaux sociaux, Paris, La Découverte, coll. « Repères », troisième

édition, 128 p. pages 22 à 28.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 38

2.2.2. Méthodologie

Dans un premier temps, nous avons identifié les interconnexions entre chaque abonné du

compte @crdva24. Nous avons listé les abonnés au compte @crdva24 et pour chacun nous

avons regardé s’il était connecté à un autre abonné du compte @crdva24. Ce travail a été

retranscrit dans une matrice (figure 3).

Dans un deuxième temps, nous avons étudié quelles étaient les personnes qui avaient

« retweeté » les informations du compte @crdva24 et auprès de combien de personnes

(correspondant au nombre d’abonnés à leur propre compte). Il est intéressant de noter que des

personnes ont retweeté les informations du compte @crdva24 sans y être abonné, mais nous y

reviendrons dans les éléments d’analyse.

Lors de ce travail, nous avons qualifié les abonnés relevant de liens « forts » (abonnés connus

du gestionnaire du compte avec lesquelles les relations sont régulières) et les abonnés relevant

de liens « faibles » (abonnés inconnus du gestionnaire du compte, sans relations régulières

autres que par l’intermédiaire de Twitter).

Voir tableau en annexe : « @crdva 24 : Etude retweets & mentions - Liens forts / Liens

faibles ».

Ce deuxième travail nous a permis de réaliser un graphe illustrant ces interconnexions

(figure 4). Pour des raisons de lisibilité, nous n’avons pas donné de direction aux liens entre

les abonnés, cette information pouvant être trouvée dans la matrice des interconnexions.

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Figure 4 : graphe des interconnexions des abonnés au compte @crdva24

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 41

2.2.3. Eléments d’analyse

Pierre Merckle58

nous dit, à propos de la théorie des graphes, que « son apport

méthodologique est double : d'une part les graphes donnent une représentation graphique des

réseaux de relations, qui facilite leur visualisation .. ; d'autre part, la théorie des graphes

développe un corpus extrêmement riche de concepts formels permettant de mesurer un certain

nombre de propriété des relations entre éléments. »

La première remarque que nous inspire ce graphe est qu’il met effectivement bien en évidence

la complexité d’un réseau de relations comme celui d’un compte Twitter comportant

seulement 51 abonnés, mais également la multitude d’interconnexions entre les abonnés d’un

même compte.

Il est intéressant de noter que 21 personnes non abonnés au compte @crdva24 ont diffusé

l’information par l’intermédiaire d’un ou plusieurs retweets ou mentions (Tableau 5). Cela

peut être dû à plusieurs raisons : soit les personnes ont obtenu l’information grâce aux

hashtags intégrés aux tweets (par exemple : #associations #dordogne), soit par l’intermédiaire

d’un retweet réalisé par un compte auquel ils sont abonnés.

Tableau 5 : Synthèse étude retweets & mentions - Liens forts /

Liens faibles

Liens

forts

Liens

faibles Abonnés

Non

abonnés totaux

Totaux 10 62 51 21 72

Nbre de personne ayant

diffusé l'Info par 1 RT ou 1

mention. 13 21 34

Nbre de retweets ou

mentions 5 68 49 24 73

Nbre d'abonnés ayant reçu

l'information 729 28405 9849 19285 29134

% 3% 97% 34% 66%

Sur les 51 abonnés au compte @crdva24, seuls 7 relèvent de liens « forts » pour 44 de liens

« faibles ». Cette donnée montre bien l’intérêt d’un tel média pour maintenir et développer

des liens faibles d’une organisation.

58 Pierre MERCKLE : Maître de conférences en sociologie à l'ENS de Lyon

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 42

Sur les 73 retweets ou mentions réalisées, 97% l’ont été par des liens « faibles » ce qui

semblerait s’inscrire dans la théorie selon laquelle les liens « faibles » auraient un meilleur

pouvoir de diffusion que les liens « forts ». En étudiant plus précisément le profil des

personnes ayant diffusé l’information, on note que celles-ci appartiennent en grande majorité

à un champ d’activité proche de celui du centre de ressources (accompagnement de la vie

associative, militant de l’éducation populaire …).

L’autre information importante que nous apprend cette étude est que, sur une période d’un an,

29 134 personnes ont reçu une information issue du compte @crdva24 alors que la fédération

ne compte elle-même que 19 000 adhérents. Cela confirme bien les dires de Nathalie

Boucher-Petrovic59

: « Les actions issues de l’éducation populaire sont très peu médiatisées,

elles n’ont en effet rien de spectaculaire, il s’agit souvent d’un travail de fourmi, d’une

attention à la personne, aux groupes, à la singularité de chacun, de pratiques expérimentales

toujours questionnantes … on comprend aisément pourquoi cela n’intéresse pas les médias de

masse, et justement tout l’intérêt des réseaux numériques et des Technologies de

l’Information et de la Communication pour informer et communiquer sur ces espaces

d’expérimentation singuliers. »

Seules trois associations affiliées à la fédération sont abonnées au compte Twitter du centre de

ressources départemental. Si nous pouvons nous questionner sur l’intérêt de proposer des

informations sur le développement et le fonctionnement de la vie associative à des personnes

ne faisant pas partie du réseau de la fédération, voire hors du département de la Dordogne,

alors même que l’action de la fédération se limite au territoire départemental, notre conviction

est que cette dissémination de l’information participe au repérage de la Ligue de

l’enseignement sur cette mission.

Si, comme nous l’avons vu, Twitter peut s’avérer être un outil puissant de diffusion de

l’information, il peut également avoir une autre utilisation pour les responsables associatifs ou

pour les personnes chargées d’accompagner le développement de la vie associative sur un

territoire donné.

59 Nathalie BOUCHER-PETROVIC.- Éducation populaire et TIC : mise en perspective et enjeux.-

Communication aux Roumics le 15 juin 2006 à Lille.- URL : http://www.generationcyb.net/Education-

populaire-et-TIC-mise-en,0823

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 43

2.2.4. Twitter comme outil de veille

Si un des intérêts d’un média comme Twitter est de diffuer sa propre information, Twitter

peut également s’avérer très intéressant pour se maintenir informé sur une ou plusieurs

thématiques qui nous intéressent, que ce soit à des fins personnelles ou professionnelles. En

effet, à la différence de Facebook dont l’objectif est de favoriser les relations entre les

membres, Twitter a plus pour vocation à faciliter le partage d’informations.

Sous réserve donc de sélectionner les bons comptes à suivre en fonction de ses centres

d’intérêts, Twitter peut être un outil de veille puissant. Et sa force réside dans la communauté

d'utilisateurs, appelée parfois « Twittos », qui – chacun dans leur spécialité – fournissent une

information sourcée et triée. Toutefois, ce qui fait la force de Twitter, comme celle des autres

outils de veille sur Internet, est aussi sa limite : la subjectivité. Il faudra donc opérer un filtre

stratégique afin de disposer de la meilleure information. Autrement dit : Twitter comme outil

de veille est un début et non une fin. Il n'épargne pas une relecture stratégique des

informations ainsi accumulées.

Aussi, pour un responsable associatif, il peut être intéressant de faire de Twitter un outil de

veille permettant de se tenir informé de l’évolution de la vie associative, de l’actualité de son

secteur géographique, ou encore des pratiques des associations œuvrant dans le même champ

d’activité.

Un des intérêts à associer des médias sociaux (Twitter, page Facebook, compte Google +) au

centre de ressources en ligne de la Ligue de l’enseignement de la Dordogne était de diffuser

l’information mise en ligne sur le site. Qu’en est-il vraiment ? La diffusion de l’information

sur les médias sociaux a-t-elle réellement un impact sur la fréquentation du site Internet ?

2.3. IMPACT DES MEDIAS SOCIAUX EN LIGNE SUR LA FREQUENTATION DES SITES

INTERNET

Si les associations ont bien compris l’intérêt de mettre à disposition de leur public un site

Internet pour communiquer sur leur projet associatif, faut-il encore que ce site Internet ait une

fréquentation satisfaisante pour pouvoir en faire un réel outil de communication.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 44

Les réseaux sociaux (Facebook et dans une moindre mesure Twitter) « boostent » la

fréquentation des sites d'information en ligne. C'est ce que confirme une étude d'AT

Internet60, site spécialisé dans la mesure d’audience et de performance des sites web et

mobiles.

Plus précisément, AT Internet révèle que, sur une période de trois mois, 28% des visites d’un

site web d’actualité français proviennent en moyenne de Facebook et 5,2% de Twitter.

« S'il demeure loin des moteurs de recherche comme Google, qui pèse pour certains sites

d'information entre un tiers et la moitié des visites, Facebook ne cesse d'étendre son

influence » constatent « Les Echos »61

. L'étude, réalisée sur 12 sites Web français d'actualité

audités par AT Internet, confirme à la fois la percée de Facebook dans les habitudes des

internautes français, et le rôle du réseau social comme l'une des portes d'entrée du Web.

Peut-on vérifier cette influence sur un site Internet associatif comme le centre de ressources

en ligne de la Ligue 24 ou sur son site d’information plus généraliste www.laligue24.org ?

Voulant vérifier l’impact de la diffusion de l’information sur la fréquentation du centre de

ressources en ligne, un article a été publié sur les réseaux sociaux associés (Twitter, page

Facebook, Google+) le 21 septembre 2011 (Figures 6 & 7). Le choix a été fait de

communiquer sur des indicateurs de performance signifiants du site internet. Ainsi, nous

pouvons vérifier que l’envoi de cette information sur les réseaux sociaux génère un pic de

fréquentation le jour qui suit la publication (Figure 8).

60 Sites médias : la part des visites venant du site Facebook a doublé en moins d’un an :

http://www.atinternet.fr/Documents/sites-medias-la-part-des-visites-venant-du-site-facebook-a-double-en-moins-

dun-an/ 61

lesechos.fr : Les réseaux sociaux, source de trafic pour les médias. -

http://archives.lesechos.fr/archives/2012/LesEchos/21133-133-ECH.htm

Figure 6 : Tweet du 21 septembre 2011 sur le compte @crdva24

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 45

Figure 7 : Article sur la page Facebook du centre de ressources

Si comme nous le voyons, la diffusion de l’information sur les médias sociaux a un impact

certain sur la fréquentation du site Internet, il ne faut pas négliger l’importance de l’envoi

d’une lettre d’informations électronique. Une analyse des flux de fréquentation met en avant

l’intérêt de cette lettre puisque le nombre de visites progresse de façon significative après

chaque envoi (Figure 9). Cette information est envoyée chaque mois et informe les

utilisateurs des articles mis en ligne le mois précédent et des manifestations à venir.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 46

2.3.1. L’exemple du site Internet de la Ligue 24

Contrairement au centre de ressources en ligne, qui est un outil technique à disposition des

responsables associatifs, le site Internet de la Ligue 24 est quant à lui un site d’information

plus généraliste sur les activités de la fédération et plus « politique » sur les prises de position

de la Ligue de l’enseignement. L’influence des médias sociaux se vérifie-t-elle également sur

ce site Internet ?

Une analyse réalisée grâce à l’application Google Analytics sur trois mois (de mai à juillet

2012) montre que sur les 3 028 visites effectuées durant cette période, 151 (soit 5%) viennent

des médias sociaux : pour 59% de Facebook et 41% de Twitter (Figure 10).

Figure 10 : analyse sur 3 mois de l’influence des médias sociaux sur le site laligue24.org

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 47

Certes, les nombres ne sont pas aussi significatifs que pour les sites d’information français,

mais se passer de ces médias reviendrait potentiellement à se priver de 5% de la fréquentation

du site. D’autre part, à l’instar des sites d’information français, 50% des visites sont issues des

moteurs de recherche (dont près de 92% de Google)62

.

Autre donnée intéressante qui peut nous inciter à diffuser l’information publiée sur les sites

Internet est que, depuis quelques mois, les réseaux sociaux jouent un rôle important sur le

référencement d’un site Internet par Google.

2.3.2. Le référencement devient « social »

D'une part les réseaux sociaux en ligne explosent et prennent une place essentielle dans la vie

numérique. D'autre part, la génération « Y » n'accède plus au web via Google, mais via les

réseaux sociaux.

Avec l’arrivée de Google Panda63

, Google a modifié ses algorithmes pour prendre en compte

les sites dont le contenu est de bonne qualité. Ainsi, pour savoir si une page d’un site est

intéressante pour les internautes, Google utilise plusieurs critères :

Le nombre de fois où la page est relayée sur le média social Google +.

Le nombre de partages d’une page sur Facebook.

Et le nombre de tweets intégrant un lien vers cette page sur twitter.

Ainsi, plus une page d’un site est partagée sur les médias sociaux plus elle va être lue et plus

elle sera correctement référencée par Google.

Notre conviction est donc bien que les technologies numériques, et notamment les réseaux

sociaux numériques, peuvent présenter une opportunité de promouvoir le fait associatif par

leur capacité à disséminer l’information. Ils sont également intéressants pour maintenir et

développer un réseau de sympathisants autour du projet associatif.

62 Etude de Médiamétrie-eStat sur la fréquentation des sites Internet français en avril 2012.

http://www.mediametrie.fr/internet/communiques/telecharger.php?f=55743cc0393b1cb4b8b37d09ae48d097

63

Google Panda : Nom de code interne chez Google d’une évolution majeure de son algorithme mise en place au

printemps 2011, du nom d'un ingénieur ayant participé à son élaboration.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 48

Cependant n’y-t-il pas un risque idéologiques à utiliser des outils de l’économie capitaliste

allant en cela à l’encontre des valeurs défendues par les organisations du monde associatif et

plus largement de l’Economie Sociale et Solidaire ? Les associations ne peuvent-elles pas

perdre des militants parce que ceux-ci estiment qu’utilisant Facebook, ils renforcent des

dynamiques contre lesquelles ils luttent ? Existe-t-il des alternatives à ces outils ?

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 49

3. QUELS OUTILS POUR QUEL PROJET ?

La question de l’utilisation, ou non, des outils et méthodes issus de l’économie marchande est

une question récurrente qui traverse régulièrement les associations et plus globalement les

organisations de l’Economie Sociale et Solidaire. Développons-nous une économie

alternative à l’économie de marché ? Ou sommes-nous dans l’économie de marché et

essayons-nous de la modifier ?

Le modèle économique de Facebook repose sur le Chiffre d'Affaires généré par de la publicité

ciblée grâce aux informations personnelles collectées auprès des utilisateurs. Ceci va à

l’encontre des valeurs défendues par les associations. La question de l’utilisation par le monde

associatif d’un média social de type Facebook peut donc être posée.

3.1. EXISTE-T-IL UN RISQUE POUR LES ASSOCIATIONS A UTILISER UN OUTIL COMMERCIAL

DE TYPE FACEBOOK ? EST-CE COMPATIBLE AVEC LES VALEURS DE L’ECONOMIE SOCIALE

ET SOLIDAIRE ?

Contrairement à l’économie marchande dont le but est la recherche de profit et l’accumulation

de capitaux, l’économie sociale, dont les associations sont une des composantes au côté des

mutuelles, des fondations et des coopératives, place l’homme au centre de ses préoccupations

et actions. En cela, le risque idéologique d’utiliser des outils de l’économie marchande

pouvant aller à l’encontre de ses valeurs existe en partie mais, comme nous le rappelle

Dominique Cardon64

, « un usage tactique des médias sociaux à succès n’empêchent pas de les

critiquer et d’être attentif aux conditions de leur développement et à l’usage qu’ils font des

données. Il me semble qu’il serait dommage de s’en priver. » .

Se priver de l’audience de ces médias sociaux (Facebook, Twitter …) serait de notre point de

vue contre-productif, étant donné que 77% des internautes français sont inscrits sur au moins

un réseau social et 60% d’entre eux s’y rendent au moins une fois par jour65

. Il semble donc

inutile de les diaboliser : autant les utiliser ne serait-ce que pour en faire une critique

constructive.

64 Voir interview en annexe

65

Source médiamétrie : http://www.mediametrie.fr/comportements/communiques/plus-de-3-internautes-sur-4-

sont-inscrits-sur-un-reseau-social.php?id=698

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Par ailleurs, pour Bastien Sibille66, se priver de la capacité d’action générée par ces

technologies et de leur qualité, juste pour une question idéologique, ne semble pas suffisant.

Le capitalisme informationnel, financier … produit des outils de type Google ou Facebook.

Les associations peuvent saisir l'opportunité d’utiliser leur puissance pour leurs propres

objectifs qui sont plutôt orientés contre le modèle économique développé par Facebook ou

Google. Le monde associatif peut profiter de ces opportunités et en faire un « usage

tactique », « L’adversaire vous met à disposition des armes, ce serait dommage de ne pas en

profiter ». Selon lui, le risque est ailleurs et il est double :

1. Le premier risque réside dans la perte des données. Lorsque l’on veut sortir d’un

média social, ou si celui-ci disparait, nous ne sommes pas sûrs de pouvoir récupérer

nos données, ou alors en partie, cette partie étant variable selon les interfaces.

2. Le deuxième risque réside dans la difficulté à réutiliser ces données dans un autre

contexte. Si Facebook s’effondre, l’accès aux interfaces de ce média sera impossible et

nous perdrons donc une large partie de notre investissement. Cet investissement est de

type cognitif, c'est un investissement d’acquisition des savoir-faire liés à l’interface

elle-même, et il sera perdu.

Pour Laurence Allard67

, le capitalisme du partage consiste à faire produire et diffuser les

contenus par les usagers en en retirant seul les bénéfices, et il est contradictoire avec les

principes de l’économie sociale et solidaire. La logique sociale qui demeure, c'est celle de la

participation, de la contribution ; elle est à l’œuvre sur ces mêmes réseaux sociaux et elle est

au fondement de cette économie. Il y a là une contradiction qui peut être résolue en déployant

volontairement une tactique activiste d’instrumentation du caractère massivement socialisé de

Facebook, par exemple, en l’utilisant comme tremplin vers d’autres sites et dispositifs issus

du mouvement du logiciel libre et dont le code source68

est plus ouvert.

66 Voir interview en annexe

67

Voir interview en annexe

68

Le code source est un texte qui représente les instructions qui doivent être exécutées par un microprocesseur.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Code_source

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 51

Ainsi, le mouvement des logiciels libres ne représente-t-il pas le pendant technique des

valeurs de partage et de coopération chères à l’Economie Sociale et Solidaire, au monde

associatif et plus particulièrement à l’éducation populaire ?

3.2. ASSOCIATIONS ET LOGICIELS LIBRES : DES VALEURS A PARTAGER ?

Le mouvement du logiciel libre est probablement le plus vaste mouvement d’émancipation et

de partage de la connaissance qui se soit développé via Internet. Il réunit à ce jour des

centaines de millions de contributeurs du monde entier. Il partage de nombreuses valeurs avec

le monde associatif et plus particulièrement celui se revendiquant de l’Education Populaire.69

Un logiciel libre est un logiciel garantissant un certain nombre de libertés fondamentales à ses

utilisateurs : la liberté de l'utiliser pour quelque usage que ce soit, la liberté d'étudier son

fonctionnement et de l'adapter à ses besoins, la liberté d'en redistribuer des copies et enfin la

liberté de l'améliorer et de rendre publiques les améliorations de telle sorte que la

communauté toute entière en bénéficie. Dans ce but, le logiciel libre est diffusé avec son code

source (un ensemble de procédures, telles une recette) nécessaires aux utilisateurs pour

exercer leurs libertés, comme celle de modifier le logiciel.

Le fondement même du logiciel libre repose sur un esprit de coopération, de partage du

savoir, pour enrichir et faire progresser le logiciel. Le logiciel libre permet ainsi une réelle

appropriation citoyenne de l'informatique et de ses outils, rend les utilisateurs autonomes,

indépendants et les éloigne des impasses technologiques... Alors qu'aucun éditeur propriétaire

n'en a l'intérêt.

Ainsi, le logiciel libre devrait se poser comme une réponse naturelle pour le monde associatif

lors de ses choix informatiques. Pourtant, de nombreuses associations hésitent encore à

franchir le pas, par méconnaissance principalement.

Le monde du logiciel libre et le monde associatif ont de nombreuses valeurs communes

(partage, volontariat, bénévolat, passion) et notamment une certaine éthique du partage de la

connaissance. Faire le choix du logiciel libre apparaît évident à long terme avec la volonté de

69 APRIL.- Guide Libre Association.- Version 1.0 du 1er juin 2012, Site Web : www.april.org.

http://guide.libreassociation.info

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 52

concilier les besoins du présent sans compromettre le futur. En effet, au-delà de la liberté et de

l'éthique du partage de la connaissance, le logiciel libre offre de multiples intérêts.

Pouvant être copiés légalement par tous, ils sont très souvent téléchargeables gratuitement sur

Internet. Cette gratuité en toute légalité permet de réduire les coûts d'accès à l'informatique, à

la fois pour l'association dans le cadre de la mise en œuvre de solutions informatiques mais

également pour ses membres. En effet, les membres de l'association ne seront pas dans

l’obligation d'avoir recours à la copie illégale pour bénéficier des logiciels utilisés par

l'association.

De même, un stagiaire ou des personnes en formation pourront repartir avec un cédérom

contenant tous les logiciels libres utilisés pour les installer chez eux.

La liberté de copier permet également une homogénéité des outils à moindre coût pour les

différents intervenants (salariés, bénévoles, partenaires...).

Par ailleurs, selon Nathalie Boucher-Petrovic70

« le libre rassemble des particularités qui font

écho aux démarches et aux finalités de l'éducation populaire : créer, être libre, partager, être

en capacité d'agir sur l'existant (machine, contenu), se libérer et s'émanciper d'inégalités, de

domination… ».

Si l'éducation populaire est par nature difficilement définissable, ses acteurs portent

globalement des valeurs liées à l'humanisme, à la démocratie, à la citoyenneté, mais il s'agit

d'un champ hétérogène (plusieurs courants historiques, plusieurs visions, plusieurs champs

d'action).

En termes de démarches, au delà des valeurs fédératrices, l'éducation populaire se caractérise

en grande partie par des démarches, des méthodes et des pratiques collaboratives et de co-

construction du savoir.

Le mouvement du logiciel libre correspond en partie à ces démarches ; notamment sur les

cinq points suivants :

la collaboration / coopération / coproduction (faire ensemble, co-construction,

partage)

l'échange / travail en réseau (collectif, associatif, réseau)

70 Nathalie BOUCHER-PETROVIC.- Philosophie du logiciel libre et démarches d’éducation populaire.-

Communication aux 7es rencontres mondiales du logiciel libre à Vandoeuvre-lès-Nancy, 7 juillet 2006.

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l'ouverture / compatibilité / transparence (liberté, ouverture, émancipation)

l'action / création / production (citoyen actif, critique, expérimentation)

la mutualisation / la transversalité

La Fédération des centres sociaux, les CEMEA71

et la Ligue de l’enseignement ont fait de la

question des logiciels libres un enjeu politique. En 2006, la Ligue de l’enseignement a ainsi

adhéré à l’April, estimant que le logiciel libre est une « manière de faire société ». Dans le

même temps, l’association April a créé un poste de vice-président « en charge de l’Education

Populaire » pour marquer sa volonté de travailler avec ce secteur. Certains acteurs du logiciel

libre ont d’ailleurs demandé un agrément « jeunesse et éducation populaire ». Il existe donc

bien un enjeu pour le monde du logiciel libre à se rapprocher des milieux de l’éducation

populaire, tout comme ces derniers semblent trouver des outils répondant à leurs besoins et

une philosophie proche de leurs préoccupations dans les milieux du logiciel libre (Boucher-

Petrovic, 2006).

En résumé, les logiciels libres offrent de multiples avantages aux associations : éthique du

partage de la connaissance ; réduction du coût d’accès à l’informatique ; copie en toute

légalité des logiciels et donc solution naturelle à la contrefaçon ; adaptation de logiciels aux

besoins, en toute indépendance ; pérennité des données ; protection de la vie privée.

On a évoqué précédemment l’intérêt que pouvait représenter l’utilisation des médias sociaux

par les associations et la proximité en termes de valeurs entre le monde du logiciel libre et le

monde associatif. Ainsi, existe-t-il des alternatives issues du mouvement du logiciel libre aux

médias sociaux de type Facebook ? Le monde associatif, notamment par l’intermédiaire des

grandes fédérations, doit-il développer des outils technologiques alternatifs au risque de se

priver de l’audience des médias sociaux les plus fréquentés ?

3.3. OXWALL, ELGG, DIASPORA, DES ALTERNATIVES A FACEBOOK ?

Que ce soit pour un usage privé, dans le cadre d’une association ou pour des groupes plus

informels, l’offre Open Source72

pour les réseaux sociaux disponible aujourd’hui peut

71 CEMEA : Centres d'Entrainement aux Méthodes d'Education Active. http://www.cemea.asso.fr/

72

Open Source : licence de logiciel qui autorise la modification et la redistribution gratuite.

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constituer dans certains cas une alternative viable. Avec les fonctionnalités de partage, de

création de profils personnalisés, d’échange de contenus et de documents, il est désormais

possible de se construire son propre réseau social. L’intérêt de ces outils réside dans la

structure décentralisée et sécurisée de ces derniers permettant de préserver la vie privée des

participants et de faire communiquer différentes instances du logiciel installées sur différents

serveurs à travers le territoire. L’exemple de Diaspora est en cela intéressant.

3.3.1. Le projet Diaspora

Le 24 avril 2010, quatre étudiants, Max Salzberg, Dan Grippi, Raphael Sofaer et Ilya

Zhitomirskiy, alors étudiants à l’Université de New York, dévoilent leur intention de créer

une plateforme qui permettra à chacun de profiter de la sociabilité du Web sans abandonner la

protection de sa vie privée, ni voir ses données personnelles être transmises au plus offrant.

Lancée en version alpha quelques mois plus tard, la plateforme de Diaspora propose les outils

nécessaires pour héberger un réseau communautaire. Celle-ci reprend plusieurs

fonctionnalités classiques de Facebook mais entend s'appuyer sur un système décentralisé,

gage d'une meilleure sécurité. Diaspora pourra donc être installé sur le serveur d'une

personne, ou sur celui de son hébergeur, mais l'équipe propose également d'accueillir les

membres sur des serveurs préconfigurés avec des mises à jour automatiques.

Le projet s’inscrit dans une dynamique Open Source : il s’agit d’un logiciel libre distribué

sous licence AGPL73

.

Diaspora accorde une grande importance à la protection des données personnelles et de la vie

privée et ceci avec une transparence et une facilité de prise en main ergonomique dans les

options de paramétrage et de confidentialité choisis par l’utilisateur. Diaspora se définit en 3

points-clés74

:

73

La licence AGPL ou GNU Affero General Public License est une licence libre dérivée de la Licence publique

générale GNU avec une partie supplémentaire couvrant les logiciels utilisés sur le réseau. Elle a été écrite par

Affero pour autoriser les droits garantis par la GPL à couvrir les interactions avec des produits propriétaires à

travers un réseau comme Internet, ce que la GPL ne fait pas.

74

Sources : Article « Diaspora : guide du logiciel/réseau social pour les débutants » publié par Jean-Luc

RAYMOND sur le site netpublic.fr le 12 novembre 2011. http://www.netpublic.fr/2011/11/diaspora-guide-du-

logiciel-reseau-social-pour-les-debutants/

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Le choix : Diaspora laisse à l’utilisateur la possibilité de trier ces connexions dans des

groupes appelés aspects. Spécifiques à Diaspora, les aspects garantissent que les

publications ne sont partagées qu’avec les personnes avec qui l’utilisateur souhaite les

partager.

La propriété : l’utilisateur reste propriétaire de ses images, et il n’est pas obligé de

renoncer à cela juste pour les partager (contrairement à Facebook qui devient

propriétaire d’une image dès lors qu’elle est publiée sur sa plateforme). Il conserve la

propriété de tout ce qu’il partage sur Diaspora, ce qui donne le contrôle total de la

manière dont cela est distribué.

La simplicité : intrinsèquement privé, Diaspora ne contraint pas l’utilisateur à se frayer

un chemin à travers des pages de configuration et d’options uniquement pour

maintenir son profil sécurisé.

La décentralisation d’un réseau de type Diaspora, laissant la possibilité à chacun d’installer la

plateforme sur son propre serveur permettant ainsi d’en sauvegarder les données, limite donc

les risques auxquels Bastien Sibille nous sensibilisait, à savoir : la difficulté à réutiliser les

données et la perte de ces mêmes données en cas de rupture du service.

Il est également intéressant de noter que la structure d’un réseau comme la Ligue de

l’enseignement (Figure 11) est plus proche de la structure d’un média social décentralisé de

type Diaspora (Figure 12) que de celle de Facebook (Figure 13). En effet, la Ligue de

l’enseignement est composée de 102 fédérations départementales juridiquement autonomes

sans lien hiérarchique avec la structure confédérale si ce n’est à travers des liens statutaires et

par la signature de conventions. Chaque fédération ayant la liberté de développer ses propres

projets en lien avec son territoire départemental, et en cohérence avec les orientations

idéologique et politique du mouvement.

Cependant Diaspora, présenté ici à titre d’exemple, a connu son coup de projecteur il y a

quelques mois sans pour autant réussir à fédérer les internautes. Ce projet aura d’autant plus

de mal à se faire connaître que les alternatives à Facebook se multiplient depuis peu.

Oxwall par exemple qui se présente comme un logiciel communautaire open-source

permettant la création de son propre réseau social mais aussi comme plateforme collaborative

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 56

ou de gestion projet. Ou encore Elgg : au-delà d’un réseau social numérique, Elgg se distingue

par ses fonctionnalités de partage de fichiers, de microblogging de type Twitter.

Figure 12 : Schéma structurel réseau Diaspora

Figure 11 : Schéma structurel réseau Ligue de l’enseignement

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 57

Selon Nathalie Boucher-Petrovic75

, « à bien des égards, les milieux de l’éducation populaire

se sont montrés pionniers dans l’utilisation des outils et médias. Au-delà de leur utilisation

comme support éducatif, ils ont expérimenté différentes formes d’éducation aux médias et

parfois conçu eux-mêmes des contenus et des médias. Enfin, certaines fédérations d’éducation

populaire ont pris en charge depuis fort longtemps la question de l’information et de la

communication comme objet de travail. »

Ainsi, une confédération comme la Ligue de l’enseignement, fort d’un réseau composé de

26 500 associations affiliées à ses 102 fédérations départementales, représentant 1,6 millions

d’adhérents, ne devrait-elle pas développer son propre média social plus proche des valeurs

qu’elle porte ?

75 Nathalie Boucher-Petrovic, « La société de l’information « appropriée » par l’éducation populaire : une

tradition en question », tic&société [En ligne], Vol. 2, n° 2 | 2008, mis en ligne le 07 mai 2009, Consulté le 14

mai 2012. URL : http://ticetsociete.revues.org/528

Figure 13 : Schéma structurel réseau Facebook

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 58

3.4. LA LIGUE DE L’ENSEIGNEMENT DOIT-ELLE DISPOSER DE SON PROPRE MEDIA

SOCIAL EN LIGNE ?

Alors que les associations sont de plus en plus présentes sur les médias sociaux « classiques »

(Facebook, Twitter, etc.), l’avenir les verra-t-elles créer leurs propres communautés

d’échanges ?

A l’échelle d’un territoire, ce type de plateformes peut en effet servir à diffuser de

l’information en temps réel et à faire participer d’une autre manière les habitants et les

responsables associatifs sur des thématiques spécifiques (évènements, Agenda 21 associatif,

etc.). Il peut également permettre de dynamiser la vie associative locale et les échanges entre

les acteurs tout au long de l’année.

Les exemples de La ruche de Rennes (http://beta.ruche.org ) et de celle de Brest (www.ruche-

brest.net ) sont deux exemples de ce point de vue intéressants. Ces médias sociaux locaux,

animés et modérés par l'association BUG, pour La ruche de Rennes, et par le service Internet

et Expression Multimédia de la Ville de Brest, pour ce qui est de La ruche de Brest, ont pour

but de mettre en relation des habitants de chacune des deux villes et de leurs environs

respectifs, ainsi que les associations et collectifs locaux. Ils permettent également de créer des

groupes de discussion et de communiquer leurs événements en les localisant sur une carte. La

ruche de Rennes permet à chacun de créer un profil personnel « Abeille » et des profils

« Ruches » (associations ou collectifs), pour échanger, partager, communiquer sur leur

territoire.

Véritable alternative à des réseaux sociaux issus d'entreprises privées, La Ruche garantit la

préservation des données des habitants communiquées sur le site Internet et leur non

communication à des tiers publics ou privés.

Ces réseaux offrent à leurs utilisateurs la possibilité de créer des forums de discussions et

d’échanges de pratiques allant de groupes évoquant l’actualité du saxophone sur Brest, la

mise en place d’ateliers d’écriture, ou encore d’échanges sur la sophrologie.

Cette approche locale nous semble intéressante et tout à fait adaptée à un réseau comme celui

de la Ligue de l’enseignement dans la mesure où elle correspond bien à l’organisation même

de cette confédération, structurée avant tout sur des fédérations départementales dont une des

missions principales et historiques est de fédérer et de mettre en relation des associations

locales.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 59

Un autre intérêt majeur, illustré par les exemples précédents, réside dans la possibilité de

mettre en place des espaces thématiques d’échange de pratiques. Le réseau d’associations

affiliées aux fédérations départementales est d’approches très diversifiées allant de la

« simple » association sportive (cyclo, pétanque, sports motorisés …), à l’association de

défense d’une cause (protection de l’environnement …), au groupe de réflexion sur des sujets

de société, où encore à la troupe de théâtre du village. Cette diversité rend complexe la mise

en réseau de ces associations au niveau d’une fédération : ainsi des groupes d’échanges

thématiques, permis par ces technologies, pourraient faciliter la collaboration entre

associations œuvrant autour d’un même secteur d’activité.

Certains réseaux sociaux se sont d’ailleurs développés depuis plusieurs années autour

d’approche thématique avec comme objectif de mutualiser les expériences et de développer

une nouvelle forme de collaboration et d’intelligence collective76

.

L’exemple du réseau Tela Botanica (www.tela-botanica.org ), est de ce point de vue assez

exemplaire et illustre bien cette notion de collaboration autour d’une thématique qu’est la

botanique.

Tela Botanica est le réseau de la botanique francophone. Créé en juillet 2000, il a pour finalité

de regrouper l’ensemble des botanistes qui utilisent la langue française comme outil privilégié

de communication. Son objectif principal est de redonner une nouvelle dimension à cette

discipline en permettant notamment de monter des projets collectifs d’ampleur nationale et

internationale.

Tela Botanica compte aujourd’hui (septembre 2012) plus de 18 300 inscrits. Près de 90

projets collaboratifs en ligne sont en cours et les échanges se font au travers de listes de

discussions thématiques, de Wikis et d’espaces de partage de documents.

Pour construire leurs réflexion, les fondateurs se sont appuyés sur le document de Jean-

Michel Cornu, « Les réseaux coopératifs, nouvelles approches »77

, qui leur a permis de

confronter leur réflexion à leur pratique de terrain. Pour eux, « l’essentiel des principes

suggérés par Jean-Michel Cornu, appliqué dans le cadre du réseau, permet, semble-t-il,

d’expliquer en grande partie son succès. »

76 « L'intelligence collective est la capacité d'un groupe de personnes à collaborer pour formuler son propre

avenir et y parvenir en contexte complexe ». Jean François NOUBEL.- Intelligence collective, la révolution

invisible.- Novembre 2004.- 44P http://www.thetransitioner.org/wikifr/tiki-index.php?page=Intelligence%20Collective%20la%20r%C3%A9volution%20invisible

77

Jean-Michel CORNU.- les « réseaux coopératifs, nouvelles approches ».

http://www.cornu.eu.org/texts/cooperation

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 60

Le croisement de ces deux approches, territoriale et thématique, pourrait, nous semble-t-il,

correspondre aux attentes d’une confédération comme la Ligue de l’enseignement. Notre

conviction est que la mise en place d’un média social décentralisé permettrait de répondre à

plusieurs objectifs :

Offrir aux fédérations départementales, mais également aux associations locales, des

espaces de coopération, de réflexion, et de partage. Ces espaces sont difficiles à mettre

en place sur le terrain, que ce soit au niveau confédéral pour réunir les acteurs des

fédérations sur des temps de réflexions collectives, ou au niveau local avec les

responsables associatifs et leurs contraintes (implication professionnelle et bénévole,

pour certains dans plusieurs associations). Ainsi ces espaces dits « virtuels »

permettraient à chacun de produire du contenu de façon asynchrone sur des temps

choisis et non contraints. Ils permettraient également, à travers des groupes

thématiques, d’impliquer des associations locales repérées aux réflexions nationales,

ce qui est, dans l’organisation actuelle, difficilement réalisable.

Permettre à un mouvement d'Education Populaire, se définissant comme un

mouvement de citoyens portant le débat et agissant pour la transformation sociale, de

mettre au débat son projet politique et ses prises de position. Bien sûr, comme nous le

rappelle Véronique Kleck78

, parlant des élus politiques, il y a un risque à cela :

« Comment les élus peuvent-il susciter le dialogue avec les citoyens via les réseaux

numériques sans se trouver submergés par une demande qu'ils seraient dans

l'incapacité de traiter, créant ainsi de la frustration et de la défiance, là où il s'agissait

de rétablir le dialogue et la confiance. ». Il semble toutefois que cela pourrait

permettre à chaque composante associative d’un réseau comme celui de la Ligue de

l’enseignement de prendre part aux réflexions autours des valeurs du mouvement et

d’un projet politique partagé. Il est à noter que quelques expériences de ce type ont été

expérimentées ces derniers mois au sein de ce mouvement, notamment lors des

dernières élections présidentielles pour l’élaboration des « 50 propositions pour faire

78 Véronique KLECK.- Numérique & Cie, société en réseaux et gouvernance. - Éditions Charles Léopold

MAYER, 2006. - 238 p.

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 61

société79

» réalisées à l’issue d’une consultation en ligne de son réseau associatif et

militant.

Enfin, comme nous l’explique Bastien Sibille, cela pourrait permettre de faciliter la

gouvernance associative, de la rendre plus dynamique, moins chère, plus écologique et

mieux sécurisée. L’exemple de la suite TALA, développée par la société TALCOD,

est en cela intéressante. Elle offre des espaces et outils de gestions des ordres du jour,

de gestion des procès verbaux, de gestion des archives des Conseils d’Administration,

des Assemblées Générales, des convocations, de gestion de mandats, des outils de

votes … toutes ces tâches qui peuvent être, dans la vie des associations, chronophages.

Il ne s’agit pas de « virtualiser » totalement les instances décisionnaires que sont les

conseils d’administrations, les réunions de bureaux, et les assemblées générales …

mais de les rendre plus efficaces, les participants ayant pu échanger et travailler sur les

documents et projets en amont.

Toutefois, si la mise en place d’un tel projet nous semble intéressante pour un réseau comme

la Ligue de l’enseignement, il ne faut pas en sous-estimer la complexité technologique. La

réalisation de réseaux sociaux numériques, comme Diaspora par exemple, est assez simple à

petite échelle. Vous les téléchargez, vous les installez assez facilement, et cela fonctionne

bien. Lorsque le dispositif est mis en production auprès de plusieurs centaines, voire de

milliers d’utilisateurs, cela se complexifie. Les petits « bugs » qui ne posent pas trop de

problème à petite échelle, deviennent parfois très compliqués à gérer à grande échelle.

Pouvons-nous à la fois bénéficier de l’audience et des services des médias de type Facebook

ou Twitter et développer en parallèle son propre média social ? Ces dispositifs sont-ils adaptés

aux bénévoles associatifs des associations locales ? La question de la formation, de la

vulgarisation et de l’appropriation citoyenne de ces médias ne devraient-elle pas être plus

prise en compte par les mouvements d’Education Populaire ?

79 50 propositions pour faire société : http://www.laligue.org/wp-content/uploads/2012/06/50propositions.pdf

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 62

CONCLUSION

Alors que le discours dominant relayé par une partie médias, évoque un bénévolat en crise,

l’objet de ce mémoire était de nous interroger sur les risques de substitution de l’engagement

associatif traditionnel par l’engagement sur les médias sociaux, et sur les opportunités que

peuvent représenter pour le monde associatif cet engouement pour les réseaux sociaux

numériques. En effet, quelques évènements récents, le « Printemps Arabe », le mouvement

des indignés, l’affaire Cora … pouvaient nous laisser penser que ces nouvelles formes de

mobilisation, de prises de parole citoyenne non organisées, venaient concurrencer des formes

d’engagement plus formel, ou en tous cas les remettre en cause,.

La première partie de ce mémoire nous a permis de caractériser l’engagement associatif

traditionnel et d’identifier ses évolutions. Les conclusions d’une enquête réalisée auprès de 58

bénévoles associatifs nous indiquent que les motivations de l’engagement sont de plusieurs

ordres : le désir de lien social, le plaisir de se réaliser, l’envie d’acquérir de nouvelles

compétences. Mais cet engagement s’accompagne de contraintes quelquefois difficilement

conciliables avec une vie familiale et professionnelle et des évolutions se font sentir ces

dernières années. L’engagement bénévole tendrait à être plus limité dans le temps et se vivre

sur des rythmes choisis. Les bénévoles souhaitent être impliqués dans le projet global de

l’association et sur des projets d’actions précis, ils sont plus méfiants envers les associations

importantes dont la structure est très hiérarchisée.

La mobilisation sur les médias sociaux est quant à elle plus difficile à percevoir. Ces

technologies renforcent l’habitude de s’engager vite et sur du temps court. Il y a là une forme

d’émiettement de l’engagement, permise et induite par les réseaux sociaux numériques, qui

pourrait représenter un risque pour la pérennité des structures associatives. Cependant, cette

« forme hybride de l’engagement »80

, est souvent décevante quand il s’agit de s’engager à

plus long terme. Pour autant, il ne faut pas négliger le pouvoir mobilisateur d’Internet et les

associations devraient s’intéresser à ces technologies pour faire passer des messages et

diffuser leur projet associatif et politique auprès de nouvelles cibles. Ainsi, Pour Laurence

Allard, « les mobilisations sur les médias sociaux sont avant tout complémentaires aux

mobilisations associatives traditionnelles ».

80 Alban Martin, 2011

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 63

Dans la deuxième partie, nous avons pu montrer que les technologies de type Twitter ou

Facebook étaient des outils à fort pouvoir de diffusion, bien sûr auprès de sympathisants de la

cause associative, mais également auprès de publics plus éloignés. Ces médias permettraient

ainsi aux associations de développer leur capital social.

L’analyse, sur une période d’un an, du compte Twitter du centre de ressources départemental

de la vie associative de la Ligue de l’enseignement de la Dordogne a montré que plus de

29 000 personnes avaient reçu des informations par l’intermédiaire de Twitter et que cette

information était relayée à 97 % par des abonnés relevant de liens « faibles », confirmant ainsi

la théorie chère à Mark Granovetter : « La force des liens faibles ». L’impact des médias

sociaux en ligne sur le nombre des lecteurs d’un article publié sur un site Internet est

également intéressant. Une étude réalisée par AT Internet met en évidence que 28% des

visites d’un site web d’actualité français proviennent en moyenne de Facebook et 5,2% de

Twitter81

.

La troisième partie est consacrée quant à elle à la question l’apparente contradiction des

modèles économiques de médias de type Facebook avec les valeurs de l’Economie Sociale et

Solidaire, dont les associations sont une des composantes, et aux risques structurels et

idéologiques que représenteraient l’utilisation de ces outils. Si le risque idéologique à utiliser

des outils de l’économie marchande, allant à l’encontre des valeurs portées par le monde

associatif, existe en partie, il semble toutefois contre-productif de se priver de l’efficacité et

de l’audience de ceux-ci. Selon Bastien Sibille, le risque est ailleurs et il est double : risque de

perte de données en cas de disparition de ces technologies, et difficulté à réinvestir les

données récupérées dans un autre contexte.

Les médias sociaux issus du mouvement des logiciels libres représenteraient le pendant

technique des valeurs de partage et de coopération chères au monde associatif et plus

particulièrement à l’Education Populaire. Ainsi, les logiciels libres offrent de multiples

avantages aux associations : éthique du partage de la connaissance ; réduction du coût d’accès

à l’informatique ; copie en toute légalité des logiciels ; adaptation de logiciels aux besoins, en

toute indépendance ; pérennité des données ; protection de la vie privée.

81 Etude de Médiamétrie-eStat sur la fréquentation des sites Internet français en avril 2012.

http://www.mediametrie.fr/internet/communiques/telecharger.php?f=55743cc0393b1cb4b8b37d09ae48d097

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 64

A l’issue de ce travail, notre conviction est donc que le monde associatif auraient avantage à

profiter de l’engouement populaire pour les médias sociaux de type Facebook ou Twitter pour

diffuser leur projet associatif. Les associations ont l’opportunité d’utiliser ces technologies

comme tremplin vers d’autres sites, logiciel et réseaux numériques dont le code source est

ouvert et qui sont des espaces digitaux plus cohérents avec des projets associatifs.

Par ailleurs, notre avis est qu’une confédération comme la Ligue de l’enseignement pourrait,

aurait intérêt à mettre à disposition de son réseau associatif et militant une plateforme

numérique sociale permettant d’offrir aux fédérations départementales, mais également aux

associations locales, des espaces de coopération, de réflexion, et de partage. L’idée serait que

chaque fédération départementale dispose d’une instance de ce média social sur son propre

serveur, chaque instance du logiciel pouvant communiquer avec les autres, créant ainsi un

réseau numérique décentralisé correspondant à la structure du réseau associatif de la Ligue de

l’enseignement. Un tel outil permettrait également à un mouvement d'éducation populaire, se

définissant comme un mouvement de citoyens portant le débat et agissant pour la

transformation sociale, de faire vivre plus largement les échanges sur son projet politique et

ses prises de position.

En offrant des espaces de collaboration aux administrateurs et dirigeants des fédérations, mais

également d’archivage et de sécurisation des données, ce réseau numérique décentralisé

pourrait enfin faciliter la gouvernance associative, la rendre ainsi plus dynamique.

Si la mise en place d’un tel projet nous semble intéressante, il ne faut toutefois pas en sous-

estimer la complexité technologique. Quelles seraient donc les conditions de réussite d’un tel

projet ?

CONDITIONS DE REUSSITE ET PERSPECTIVES

La mise en place d’une plateforme numérique sociale d’une telle ampleur, permettant de

profiter de la sociabilité du Web et intégrant des espaces de partage d’informations et de

ressources et de travail collaboratif, est complexe et demande des compétences techniques

pointues. Raison pour laquelle, Bastien Sibille nous invite à associer à ce projet des

partenaires technologiques dont c’est le métier et qui maitrisent bien ces technologies.

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 65

Ensuite, la mise en place d’un dispositif technique n’induit pas qu’il sera utilisé d’office : son

« adoption » nécessite l’apprentissage de l’outil, le pilotage du changement et l’animation de

la communauté des utilisateurs de l’outil.

Pour garantir la réussite d’un tel projet, la question de la formation des acteurs, que ce soit au

niveau des fédérations départementales ou au niveau des acteurs locaux (responsables

associatifs, citoyens, élus locaux …), est essentielle pour une appropriation de ces

technologies par un plus grand nombre. Il ne s’agit pas de créer une nouvelle forme de

fracture numérique, après celle de l'inégalité d'accès (même si celle-ci n’est pas tout à fait

réglée). Dans son livre « Réseaux humains, réseaux électroniques »82

, Valérie Peugeot, insiste

sur ce point : « Au-delà d’un problème bien réel de connectivité, la capacité d’accéder aux

Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) suppose de pouvoir être formé

non pas tant aux outils eux-mêmes qu’aux nouvelles fonctions cognitives sollicitées par les

TIC : capacité à appréhender des contenus mouvants, à hiérarchiser des informations, à les

contextualiser, à appréhender une logique non cartésienne et fondée sur l’incertitude. »

Il y a là un véritable enjeu pour l’Education populaire de travailler sur l’appropriation

citoyenne des médias sociaux, que ce soit sur des technologies de type Facebook ou autre

Twitter, ou sur des plateformes libres mises en œuvre par le monde associatif. Un travail

d’éducation autour de la capacité à appréhender des contenus mouvant, à hiérarchiser des

informations, à les contextualiser, devra être mis en œuvre que ce soit par l’éducation

formelle ou par les mouvements d’Education Populaire. C’est à cette condition que la maitrise

des outils permettra à chacun de passer du statut de simple consommateur de l’information à

celui de citoyen critique et à celui d’acteur.

C’est par ailleurs un engagement que prend la Ligue de l’enseignement dans son manifeste

« Faire Société »83

publié en 2010 :

« Faire société », c’est aussi vivre ensemble les mutations inédites engendrées par les

technologies numériques, les sciences du vivant, la crise écologique et leurs conséquences.

82 Valérie PEUGEOT (COORD.).- Réseaux humains, réseaux électroniques. - Paris, Éditions Charles Léopold

Mayer, 2001.

83

Le Manifeste « Faire Société ! » : http://www.laligue.org/le-manifeste-faire-societe/

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Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 66

La place prépondérante des médias dans le fonctionnement de la démocratie oblige à faire

progresser la qualité de l’information … de mettre en œuvre une politique d’éducation

continue aux médias qui inclut le développement de l’esprit critique et la formation pour un

usage créatif et citoyen d’internet et des réseaux sociaux.

Pour toutes les raisons évoquées dans ce mémoire, notre conviction est qu’un mouvement

d’Education Populaire, par ailleurs plus importante confédération française d’associations,

devrait davantage investir ces technologies numériques, notamment par la mise en place de

son propre média social en ligne. Il serait de notre point de vue également important que ce

réseau promeuve et contribue au mouvement du Logiciel Libre comme étant le pendant

technologique des valeurs de partage et de coopération chères à l’Economie Sociale et

Solidaire et à l’Education Populaire.

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web/articles/9254-mobilisation-numerique-l-une-forme-hybride-de-lengagement-r.html

Lilian MATHIEU (Sociologue, CNRS). - Un "nouveau militantisme"? A propos de

quelques idées reçues.- http://www.contretemps.eu/fr/socio-flashs/nouveau-militantisme-

propos-quelques-idees-recues#.T-rdt5VHTic.twitter

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

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Pierre MERCKLE.- Sociologie des réseaux sociaux.- Paris, La Découverte, coll. « Repères

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Jean François NOUBEL.- Intelligence collective, la révolution invisible.- Novembre 2004.-

44P.

http://www.thetransitioner.org/wikifr/tiki-

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Valérie PEUGEOT (COORD.).- Réseaux humains, réseaux électroniques. - Paris,

Éditions Charles Léopold Mayer, 2001.

Romain PIGENEL (Conseiller politique et bloggeur sur Variae.com). - « Ce nouvel

espace public exige une éthique » : Sur la blogosphère et les réseaux sociaux.- Propos

recueillis par ROBERT (Richard). - (Dossier du mois site internet de la Ligue de

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Dossier réalisé par Hervé QUEILLE.- Bénévolat en pleine mutation.- Article publié le 16

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http://recherches-solidarites.org/media/uploads/benevolattelegramme.pdf

Bernard ROUDET.- « Entre responsabilisation et individualisation : les évolutions de

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http://id.erudit.org/iderudit/008866ar

Eric SCHERER.- Transferts de pouvoirs.- Article paru sur le site meta-media.fr le 13 mai

2012.- http://meta-media.fr/2012/05/13/transferts-de-pouvoirs /

Michel SERRES.- La forme classique de la transmission du savoir est périmée.- Article

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3.pdf

Roger SUE. - Renouer le lien social. Liberté, égalité, association.- Éditions Odile Jacob. -

2001

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Article extrait de juris associations n° 384 du 15 septembre 2008. Reproduit avec

l’autorisation des éditions Juris associations. -

https://www.associatheque.fr/fr/fichiers/etudes/tendances-evolution-asso-2008.pdf

Jean-Pierre WORMS.- Le capital associatif en France, hier et aujourd'hui.- Article publié

sur le site de la Fonda, décembre 2005. http://www.fonda.asso.fr/Le-capital-associatif-en-

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Khaled ZOUARI (Docteur en SIC, Enseignant Groupe de recherche IDIL). - Pratiques

et usages organisationnels des nouveaux médias dans les entreprises d’économie sociale et

solidaire. - 15ième Colloque National de la Recherche en IUT | CNRIUT 2009 - Lille - Les 8,

9 et 10 Juin 2009. - http://cnriut09.univ-lille1.fr/articles/Articles/Fulltext/61a.pdf

Numéro coordonné par STENGER (Thomas) et COUTANT (Alexandre). - Ces réseaux

numériques dits sociaux. – Paris : CNRS Editions, 2011. – 256 p. – Revue Hermès N° 59.

Article paru dans la revue AGORA débats jeunesse n°31(éditions L’Harmattan).- Nouvelles

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http://ressourcesjeunesse.fr/Nouvelles-formes-de-l-engagement.html

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 72

SITES INTERNET VISITES

NetPublic, accompagner l'accès de tous à Internet :

http://www.netpublic.fr

Social Planet, le réseau social de l'initiative sociale et solidaire en Europe :

http://www.social-planet.org

La Ligue de l'enseignement :

http://www.laligue.org

Tela Botanica, le réseau de la botanique francophone :

http://www.tela-botanica.org

Le Blog de Jean-Michel CORNU :

http://www.cornu.eu.org

Wikipédia, l'encyclopédie libre en ligne :

http://fr.wikipedia.org

Portail dédié à l’Education populaire sur Wikipedia créé par La Ligue de l’enseignement

et l’INJEP :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Portail:%C3%89ducation_populaire

Terrafemina : News & Réseaux, Portail d'informations féminin

http://www.terrafemina.com

Le Blog RunOrg : apports des nouvelles technologies pour les associations et leurs

responsables.

http://blog.runorg.com

Le blog de Jean-Luc Raymond :

http://blog.jeanlucraymond.net

TIC&Société, analyse des rapports entre les technologies de l’information et de la

communication (TIC) et la société :

http://ticetsociete.revues.org

La Ruche de Rennes, réseau social local réalisé, animé, modéré par l'association Bug :

http://beta.ruche.org

La Ruche de Brest, réseau social local brestois :

http://www.ruche-brest.net

Cultures Expressives, le Wiki de Laurence Allard :

http://culturesexpressives.fr

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 73

COMPTES TWITTER SUIVIS

pour faire de la veille d’informations sur le sujet du mémoire.

Laurence ALLARD : @laurenceallard

April : @aprilorg

Associathèque : @associatheque

Associations : @depuis1901

Citizenplace : @citizenplace

CPCA : @cpcafrance

Educpoptic : @educpoptic

EPM en Deux Sèvres : @epm79

L'ESS tjrs + net(te) : @esstjrsplusnet

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TALCOD : @TALCOD

Thot – Cursus : @thot

Villes Internet : @Villes_Internet

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 74

TABLE DES TABLEAUX ET GRAPHIQUES

Figure 1 : Intérêt d'être bénévoles Page 14

Tableau 2 : Raisons d’agir et évolutions de l’engagement associatif Page 18

Figure 3 : Matrice des interconnexions des abonnés au compte @crdva24 Page 39

Figure 4 : Graphe des interconnexions des abonnés au compte @crdva24 Page 40

Tableau 5 : Synthèse étude retweets & mentions - Liens forts / Liens faibles Page 41

Figure 6 : Tweet du 21 septembre 2011 sur le compte @crdva24 Page 44

Figure 7 : Article sur la page Facebook du centre de ressources Page 45

Figure 8 : Nbre de Pages Visitées Page 45

Figure 9 : Nbre de visites après l’envoi de la lettre de septembre 2011 Page 46

Figure 10 : Analyse de l’influence des médias sociaux sur le site laligue24.org Page 46

Figure 11 : Schéma structurel réseau Ligue de l’enseignement Page 56

Figure 12 : Schéma structurel réseau Diaspora Page 56

Figure 13 : Schéma structurel réseau Facebook Page 57

Page 75: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 75

TABLE DES ANNEXES

Annexe 1 : Interview de Bastien SIBILLE Page 76

Annexe 2 : Interview de Laurence ALLARD Page 82

Annexe 3 : Interview de Dominique CARDON Page 85

Annexe 4 : Interview de François MEYNIER Page 87

Annexe 5 : @crdva 24 - Etude retweets & mentions - Liens forts / Liens faibles Page 90

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 76

Propos de Bastien Sibille,

recueillis le mercredi 18 juillet 2012

par Jean-Luc GADIOUX

Question de J-Luc GADIOUX : Tout d’abord, puis-je vous demander de vous présenter ?

Bastien SIBILLES :

Aujourd’hui, je m’occupe principalement de deux structures. D’abord de TALCOD qui est

une entreprise solidaire que j’ai créée. TALCOD une entreprise de service en logiciels libres

notamment à destination des entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire et avec une

emphase sur les outils de gestion de la gouvernance des ces organisations parce que l’on a

estimé que la présence dans les structures d’une gouvernance saine est un gage de pérennité.

Nous avons des outils qui permettent d’améliorer la gestion des Conseils d’Administration,

des Assemblées Générales, des comités etc. … c’est un premier versant qui est le versant

économique de mon activité.

Le deuxième versant est plus de l’ordre de l’engagement. J’assure le secrétariat général de

l’Association Internationale du Logiciel Libre (AI2L), qui rassemble le crédit coopératif, la

MACIF, le groupe chèques déjeuner, et des partenaires québécois, à peu prés du même ordre

que ces trois structures, sur un projet original de création de logiciels libres pour l’économie

sociale. Je dis original, parce qu’il contribue au financement d’une chaire de recherche

industrielle mais universitaire au Québec pour la création et le développement des softs. Il est

également original, parce qu’il associe, au niveau international, des structures de l’économie

sociale, ce qui n’arrive finalement pas si fréquemment sur des projets opérationnels.

Je ne suis pas un informaticien, je suis plutôt sensible aux questions d’intérêt général puisque

je suis diplômé de Science-Po, qui s’est traduit au final par un doctorat en science politique au

Québec sur les questions de gouvernance et d’informatique.

JLG : Dans un contexte où la difficulté à mobiliser des bénévoles associatifs est

régulièrement mis en avant par les médias et par les responsables associatifs eux-mêmes, et

où des exemples récents montrent la capacité à mobiliser à travers les réseaux sociaux

Page 77: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 77

(l’exemple du printemps arabe en est une illustration), quelques questions sur les interactions

possibles entre les associations et les réseaux sociaux numériques peuvent se poser.

C’est donc le sujet que j’ai choisi de traiter dans mon mémoire de fin de Master II « Stratégie

et Management des Entreprises Associatives de l’Economie Sociale et Solidaire » :

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Pour alimenter ma réflexion, j’ai décidé de prendre l’avis d’experts du sujet traité et c’est la

raison pour laquelle je vous ai sollicité.

D’après vous, les mobilisations sur les médias sociaux peuvent-elles venir se substituer,

même partiellement, aux formes d’engagements associatifs plus traditionnelles ? Existe-t-il un

risque pour l’engagement associatif et militant traditionnel ?

BS : D’abord c’est une bonne question. Que ce soit parce qu’il y a des technologies de type

réseaux sociaux numériques ou que ce soit parce que on est dans une société de plus en plus

individualisée, il y a effectivement une sorte d’émiettement de l’engagement que ce soit sous

sa forme politique ou sous sa forme associative, et qui elle est dangereuse pour la pérennité

des structures associatives. Et du coup, des technologies de type Facebook vont bien avec

cette modification sociologique.

Je veux sortir, une fois pour toute, de l’alternative : est-ce que ce sont des caractéristiques

sociologiques qui engendrent des technologies, ou est-ce que ce sont les technologies qui ont

des impacts sur les critères sociologiques ? Je crois que ce sont de fausses questions. Je pense

que tout avance ensemble. Mais le fait est que des technologies de type Facebook renforcent

une habitude à s’engager vite et sur du temps court, voire très très court, en une seconde le

temps de « Liker » sur une initiative. Mais par contre on va pouvoir « Liker » plusieurs fois

dans la journée. C’est donc un morcèlement à mon avis, un raccourcissement de

l’engagement. Une forme de zapping de l’engagement. Ceci est un risque effectivement.

Il y a aussi des éléments qui favorisent l’engagement, dans ces mêmes technologies. Si ces

technologies permettent à ces formes d’engagement émiettées de s’exprimer, elles permettent

également de les agréger, de leur donner une temporalité.

Du coup, ma théorie est que l’on va vers des formes d’engagement faibles. Quand je dis

faibles, cela ne veut pas dire qu’elles sont mieux ou moins bien, je veux dire qu’elles sont de

natures différentes. Elles sont plus ténues, et il faut donc des technologies qui soient capables

de capter ces formes d’engagement.

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 78

Question JLG : Pensez-vous que l’utilisation des médias sociaux peut représenter une

opportunité pour les associations de diffuser leur projet politique et de mobiliser autour de

celui-ci ?

BS : Ma réponse est sans ambigüité oui, en tout cas ce serait dommage qu’elles ne le fassent

pas. On peut toujours se dire qu’on reste à côté de ces phénomènes, qu’on ne monte pas dans

le train. Mais si on n’y monte pas, on risque de se couper de ceux qui y sont montés. Je pense

plutôt que la bonne question, si vous me permettez, est : comment peut-on monter dans le

train dans de bonnes conditions ? Mais se dire, on ne va pas en profiter serait dommage,

sachant qu’en face, les autres, les multinationales, les états, les dictatures, eux en profitent. Si

les gens qui ont plutôt un impact positif sur la société se disent nous on ne va pas en profiter,

ce serait quand même un peu dommage.

Il faudrait plutôt lister les éléments de risque que prennent les associations à être sur ces

technologies et de voir comment on peut répondre à ces risques.

Ne pensez-vous pas que l’utilisation de médias sociaux de type Facebook, dont le modèle

économique est capitaliste, ne vient pas en contradiction avec les valeurs de l’Education

Populaire, et plus globalement de l’Economie Sociale et Solidaire ? Connaissez-vous des

solutions alternatives ? Doit-on, au nom des valeurs, se priver de l’audience que représente

ce type de média ?

BS : Ma réponse rejoint un peu la réponse précédente. Quels sont les risques et comment on y

répond ? Quels sont les vrais risques à utiliser des technologies capitalistes ? Quand je vous

parle de vrais risques, je ne vous parle pas de risques idéologiques, qui peut être une forme de

risques dans la mesure où les associations peuvent perdre des militants parce que ceux-ci

estiment qu’utilisant Facebook, ils renforcent des dynamiques contre lesquelles ils luttent. Ce

risque serait à estimer, j’ai un peu de mal à le faire aujourd’hui.

Un risque financier, il n’y en a pas vraiment. Généralement ce sont des dispositifs

économiques d’exploitation technologique dans lesquels les petits utilisateurs ne paient pas le

service.

Ce sur quoi j’attire votre attention, pour produire des technologies de cet ordre à TALCOD,

on sait le coût que représente l’utilisation technologique par les utilisateurs. D’avoir une

machine économique qui permet à 500 millions d’utilisateurs d’utiliser un outil d’aussi bonne

qualité que Facebook, gratuitement, c’est un exploit. Et Google, je ne vous en parle même

Page 79: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 79

pas, là c’est carrément magique. Cela est plutôt l’aspect positif. Des associations ont à leur

portée des outils gratuits d’excellente qualité.

Maintenant, le risque est double :

1) La perte des données. Quand on veut sortir du dispositif, ou si le dispositif meure, une

entreprise capitaliste peut toujours s’effondrer, je note tout de suite qu’une association

ou une coopérative peuvent aussi s’effondrer, que se passe-t-il dans ces cas là ? Vous

n’êtes pas sûr de pouvoir récupérer vos données, ou alors en partie, cette partie étant

variable selon les interfaces.

2) Vous ne pourrez pas réutiliser ces données dans un autre contexte. Si Facebook

s’effondre, vous n’aurez plus accès aux interfaces et donc une large partie de votre

investissement, qui est un investissement cognitif dans l’interface, d’acquisition des

savoir faire lié à l’interface, vous allez le perdre. C’est une problématique, vous ne

pouvez pas quitter Facebook sans perdre une partie de vos données. Le risque est là.

Questions JLG : Est-ce plus un choix idéologique ou politique que de préférer des Logiciels

Libres plutôt que des outils capitalistes de type Facebook ?

BS : Oui, c’est sûr, mais aujourd’hui ce sont plutôt les deux raisons que je vous ai données

avant qui m’amène à faire du Logiciel Libre. L’autonomie des acteurs est importante, pas

pour une question nécessairement idéologique mais pour une question de pérennité des

données. Sincèrement, se priver de la capacité d’action générée par ces technologies là et de

leur qualité, pour juste une question idéologique, ne me semble pas suffisant. Et j’aurais plutôt

tendance à dire l’inverse. C'est-à-dire, le capitalisme informationnel, financier … produit des

outils de type Google ou Facebook. Ces outils vous permettent, à la marge, d’utiliser leur

puissance pour vos propres objectifs qui sont plutôt orientés contre Facebook et Google. Je

crois qu’il faut profiter de cela. L’adversaire vous met à disposition des armes, ce serait

dommage de ne pas en profiter.

La question est donc plutôt, en utilisant cela, est-ce que je prends un risque pour mes données

et donc pour ma capacité d’action ? Si oui, dans quelle mesure ?

Ce sont des questions anciennes et récurrentes dans les organisations de l’Economie Sociale.

Est-ce que l’on sort de l’économie de marché ? Ou est-ce que l’on est dans l’économie de

marché et on essaie de la modifier ?

Page 80: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 80

Question JLG : Pouvez-vous nous en dire plus sur votre suite logicielle TALA, et notamment

sur ce qu’elle apporte à la gouvernance associative ?

BS : L’objectif de notre suite logicielle est de :

- un rendre plus facile la gouvernance associative,

- de la rendre plus dynamique, la rendre moins chère et plus écologique et la rendre

mieux sécurisée.

Quand je dis plus facile, dans les interfaces de TALA, on a des outils de gestions des ordres

du jours, des outils de gestion des procès verbaux, de gestion des archives des Conseils

d’Administration, des Assemblées Générales, des convocations, des membres, de passation de

pouvoir, de gestion de mandats … toutes ces choses sont finalement, dans la vie des

associations, des coopératives, des mutuelles, chronophages. Et donc on a là, à notre

disposition, des outils qui vous facilitent la vie.

Ensuite, notre but, et c’est peut être plus fondamentale, c’est de dynamiser les processus de

gouvernance. La grande question qui traverse les structures de l’économie sociale

aujourd’hui, est la suivante : on se distingue par des éléments statutaires qui organisent une

démocratie d’entreprise certes, mais quelle est la réalité de cette démocratie ? On a des statuts

qui disent que les sociétaires peuvent voter, par exemple dans les mutuelles où les clients sont

sociétaires et peuvent voter, mais combien viennent vraiment aux AG et votent ? Du coup, si

l’on a des outils qui permettent de dynamiser les processus de gouvernance, de faire en sorte

que les gens votent, qu’ils prennent connaissance des documents qui préparent les décisions

collectives, que la vie sociétariale est plus développée, là on réinsuffle un nouveau souffle aux

structures de l’ESS, on leur permet d’améliorer leur idéal type statutaire.

Le troisième point important pour nous est de réduire le coût de cette gouvernance et son

emprunte écologique. Cela est lié notamment aux outils de visioconférence, aux outils de

travail à distance … les gens vont moins se déplacer et vont se déplacer vraiment pour des

moments d’échanges qualitatifs. Il ne s’agit pas du tout de virtualiser totalement les Conseils

d’administration mais de les rendre plus efficaces.

Le dernier point est une question de sécurisation des procès et notamment par la création

d’archives pour lesquelles on a des sauvegardes. Il y a beaucoup d’associations dans

lesquelles c’est une personne qui, sur son disque dur, qui conserve les PV des cinq dernières

années. Et si le disque dur « crame », tout est perdu. Donc on essaie d’assurer des sauvegardes

qui sécurisent tout cela.

Page 81: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 81

Question JLG : Un réseau comme la Ligue de l’enseignement, qui compte près de 26000

associations représentant 1,6 millions d’adhérents, structuré en 102 fédérations

départementales, n’aurait-il pas, à votre avis, la capacité à développer un réseau social

interne, par exemple sur le modèle de diaspora, dont la structure est plus décentralisée que

celle de Facebook, étant ainsi plus proche de la structuration de la Ligue de l’enseignement

?

BS : Je pense que oui, bien sûr, mais il y a plusieurs choses auxquelles il faut être attentif.

D’abord, ce n’est pas parce que l’on met en place un dispositif technique que ce dispositif

technique est utilisé. La question de l’animation est donc cruciale.

Ensuite, il ne faut pas sous-estimer la complexité technologique d’un tel projet. Il y a une

sorte de leurre dans les logiciels libres. C'est-à-dire, des logiciels libres, comme Diaspora par

exemple, vous les téléchargez, vous les installez assez facilement, et puis cela fonctionne bien

en petit comité. Quand on met le dispositif en production auprès de plusieurs centaines, voire

de milliers d’utilisateurs, la partie change. Les petits « bugs » qui ne posent pas trop de

problème à petite échelle, deviennent parfois très compliqués à gérer à grande échelle. Et

donc, c’est la raison pour laquelle, je crois vraiment qu’il faut associer des partenaires

technologiques dont c’est le métier et qui maitrisent bien ces technologies.

C’est vraiment les deux points de vigilance sur lesquels j’attire votre attention :

1- Réfléchissez bien à votre animation, aux questions politiques, aux freins d’usages liés

à la structuration de l’organisation.

2- Ne vous lancez pas dans une aventure de cette dimension là tout seul, regardez s’il y a

des professionnels qui peuvent vous aider.

Page 82: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 82

Propos de Laurence ALLARD

Maître de conférences en Sciences de la Communication,

Chercheur à l’IRCAV-Paris/Enseignante à l’Université Lille 3.

http://culturexpressives.fr

recueillis le vendredi 27 juillet 2012

par Jean-Luc GADIOUX

Dans un contexte où la difficulté à mobiliser des bénévoles associatifs est régulièrement mis

en avant par les médias et par les responsables associatifs eux-mêmes, et où des exemples

récents montrent la capacité de mobiliser à travers les réseaux sociaux (l’exemple du

printemps arabe en est une illustration), quelques questions sur les interactions possibles

entre les associations et les réseaux sociaux numériques peuvent se poser.

C’est donc le sujet que j’ai choisi de traiter dans mon mémoire de fin de Master II « Stratégie

et Management des Entreprises Associatives de l’Economie Sociale et Solidaire ».

Pour alimenter ma réflexion, j’ai décidé de prendre l’avis d’experts du sujet traité et c’est la

raison pour laquelle je vous ai sollicité.

Question J-Luc GADIOUX : D’après vous, les mobilisations sur les médias sociaux peuvent-

elles venir se substituer, mêmes partiellement, aux formes d’engagements associatifs plus

traditionnelles ?

Réponse de Laurence ALLARD : D’une part, les mobilisations sur les médias sociaux sont

avant tout complémentaires, les mêmes publics et les mêmes causes. Le cas extrême de la

campagne Kony 2012 avec une vidéo controversée utilisant la dramatisation, l’émotion et la

simplification stigmatisant un pays - l’Ouganda - alors même que Joseph Kony ne se cache

plus dans ce pays à l’heure actuelle, montre que tous ceux qui ont fait circuler cette vidéo sous

différentes modalités n’auraient jamais eu connaissance de ces exactions voire même du cas

des enfants soldats si les modalités de l’interaction par contenus en vigueur sur les réseaux

sociaux n’avaient pas été déployées à une échelle jamais atteinte jusqu’à là sur un sujet

« sérieux. » puisque la vidéo a été visionnée à des centaines de millions de vues en quelques

jours. Ces formes de mobilisation qui passent d’abord par des activités sémiotiques pré-

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 83

définies –liker, partager, commenter, mettre en favori etc. –ont un caractère minimal certes

mais elles ont le mérite d’élargir les publics et les causes d’engagement.

D’autre part, il apparaît que l’engagement associatif n’est parfois pas tant à relier à une cause

en particulier qu’à une volonté de s’engager en tant que tel. Cette forme de militantisme

trouve sa place dans les associations et les actions qu’elles proposent car c’est un « besoin »

d’une organisation qui va être au cœur de la logique d’engagement. En cela, les réseaux

sociaux ne sont pas substituables non plus aux associations traditionnelles.

JLG : Pensez-vous que l’utilisation des médias sociaux peut représenter une opportunité pour

les associations de diffuser leur projet politique et de mobiliser autour de celui-ci ?

LA : Il faut bien connaître les spécificités des modes de mobilisation sur les réseaux sociaux,

qui passent par des contenus d’abord partageables autour desquels il est possible d’interagir

également mais pas obligatoirement. Les vidéos, les infographies, les « images toutes faîtes »,

qu’il s’agit de partager, de liker, de RT... représentent les matériaux militants les plus

adéquats pour mobiliser autour d’un projet dans le cadre de cette logique de dissémination par

les publics des contenus (qui n’a rien à voir avec une «pseudo viralité immanente »). Ne pas

oublier les boites mails qui demeurent les premiers réseaux sociaux en termes d’histoire et

surtout d’usage même sur l’internet mobile. Pour communiquer les pages Facebook et les

liens Twitter vers des sites avec des textes plus approfondis et des analyses sont également

nécessaires pour assurer la présence en ligne de l’association. Le principe est d’être présent

sur tous les dispositifs pratiqués : réseaux sociaux de photos, de vidéos, de géolocalisation, de

reblogging car l’activité en ligne de posts d’informations, de photos des actions etc. incite à la

mobilisation.

Internet et le mobile sont des technologies de communication et doivent être utilisés à cette fin

pour faire connaître et faire agir.

JLG : A votre avis, les outils numériques collaboratifs pourraient-ils aider à la mise en place

d’une gouvernance associative plus participative et démocratique ?

LA : L’idéal d’une gouvernance plus participative et démocratique pourrait être atteint si on

considère que les citoyens ont désormais entre leurs mains des outils d’expression, des

moyens de prises de vues et d’écriture dans une ampleur massive. C’est le rapport même à

l’écrit qui est dédramatisé avec les textos par exemple.

Page 84: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 84

Du côté des pouvoirs publics, il faudrait prendre garde à ne pas bâtir des cathédrales de l’e-

démocratie, des dispositifs intimidants mais plutôt à la manière de la gouvernance 2.0

d’Obama (avec toutes ses limites) en s’appuyant sur les pratiques numériques existantes

comme par exemple les types d’interactions par contenus sur les réseaux sociaux qui ont

inspiré des contest de vidéos pour le ministère de la santé.

Il y a aussi la nécessité de livrer des ressources aux citoyens de type données publiques

ouvertes pour que leur participation ne soit pas simplement de la figuration sans connaissance

fondée des problèmes d’un pays.

A bien y réfléchir les citoyens ont déjà appris à se gouverner, à s’organiser avec les outils

numériques qui sont les leurs depuis de nombreuses années sur Internet sans attendre que la

gouvernance 2.0 soit à la mode. Les pouvoirs publics sont d’une certaine façon en retard sur

ce terrain.

JLG : Ne pensez-vous pas que l’utilisation de médias sociaux de type Facebook, dont le

modèle économique est capitaliste, ne vient pas en contradiction avec les valeurs de

l’Education Populaire, et plus globalement de l’Economie Sociale et Solidaire ? Connaissez-

vous des solutions alternatives ? Doit-on, au nom des valeurs, se priver de l’audience que

représente ce type de média ?

LA : En effet, ce capitalisme du partage, ce crowdsourcing qui consiste à faire produire et

diffuser les contenus par les usagers en en retirant seuls les bénéfices est contradictoire avec

les principes de l’économie sociale et solidaire. Demeure la logique sociale de la participation,

de la contribution qui est à l’œuvre sur ces mêmes réseaux sociaux et qui est au fondement de

cette économie. Il y a là une contradiction qui peut être résolue en déployant volontairement

une tactique activiste d’instrumentation du caractère massivement socialisé de Facebook par

exemple en l’utilisant comme tremplin vers d’autres sites et dispositifs dont l’ouverture

informationnelle est plus grande en termes de code source et qui sont les terrains digitaux plus

cohérents dans des projets d’économie sociale et solidaire.

Page 85: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 85

Propos de Dominique CARDON,

Sociologue et Chercheur associé au Centre d’étude des

mouvements sociaux de l’École des Hautes Études en Sciences

sociales,

recueillis le mercredi 18 juillet 2012

par Jean-Luc GADIOUX

Dans un contexte où la difficulté à mobiliser des bénévoles associatifs est régulièrement mis

en avant par les médias et par les responsables associatifs eux-mêmes, et où des exemples

récents montrent la capacité de mobiliser à travers les réseaux sociaux (l’exemple du

printemps arabe en est une illustration), quelques questions sur les interactions possibles

entre les associations et les réseaux sociaux numériques peuvent se poser.

C’est donc le sujet que j’ai choisi de traiter dans mon mémoire de fin de Master II « Stratégie

et Management des Entreprises Associatives de l’Economie Sociale et Solidaire ».

Pour alimenter ma réflexion, j’ai décidé de prendre l’avis d’experts du sujet traité et c’est la

raison pour laquelle je vous ai sollicité.

Question J-Luc GADIOUX : D’après vous, les mobilisations sur les médias sociaux peuvent-

elles venir se substituer, même partiellement, aux formes d’engagements associatifs plus

traditionnelles ?

Réponse Dominique CARDON : Il est inutile d’opposer les mobilisations en ligne et les

mobilisations traditionnelles, passant par les formes associatives. En fait, les premières sont

souvent très poreuses et beaucoup de ceux qui sont les plus actifs dans les mobilisations en

ligne ont souvent une socialisation militante et politique préalable. Ceci étant, il existe aussi

une spécificité des formes de mobilisation en ligne, la spontanéité, les engagements « faibles

», la coordination lâche et l’absence de définition préalable du programme d’action, qui lui

donne un caractère très particulier ; que l’on retrouve notamment dans des nouvelles formes

d’action comme le mouvement des Indignés. De sorte que, en ligne ou hors ligne, ce qui est

Page 86: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 86

nouveau dans le domaine des formes de mobilisation, c’est l’organisation en réseau des

individus à l’écart des formes traditionnelles de l’affiliation associative (Indignés/Occupy,

Parti Pirate, Anonymous…)

JLG : Pensez-vous que l’utilisation des médias sociaux peut représenter une opportunité pour

les associations de diffuser leur projet politique et de mobiliser autour de celui-ci ?

DC : Oui bien sûr, mais cela suppose de « débureaucratiser » les structures associatives des

grandes fédérations et de faire un usage plus audacieux d’Internet (par exemple Greenpeace).

JLG : A votre avis, les outils numériques collaboratifs pourraient-ils aider à la mise en place

d’une gouvernance associative plus participative et démocratique ?

DC : Incontestablement et certaines associations en font de plus en plus usage. La question de

la transparence notamment.

JLG : Ne pensez-vous pas que l’utilisation de médias sociaux de type Facebook, dont le

modèle économique est capitaliste, ne vient pas en contradiction avec les valeurs de

l’Education Populaire, et plus globalement de l’Economie Sociale et Solidaire ? Connaissez-

vous des solutions alternatives ? Doit-on, au nom des valeurs, se priver de l’audience que

représente ce type de média ?

DC : A mon sens il faut encourager les alternatives à ces plateformes (diaspora, etc.) mais il

faut aussi être réaliste. Ces alternatives n’ont pas d’utilisateurs. Un usage tactique des médias

sociaux à succès n’empêchent pas de les critiquer et d’être attentif aux conditions de leur

développement et à l’usage qu’elles font des données. Il me semble qu’il serait dommage de

s’en priver.

Page 87: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 87

Propos de François MEYNIER,

chargé de mission Technologies de l’Information et de la

Communication à la Ligue de l’enseignement de la Dordogne,

mission déléguée « Société Numérique » auprès de la Ligue de

l’enseignement nationale.

recueillis le lundi 23 juillet 2012

par Jean-Luc GADIOUX

Dans un contexte où la difficulté à mobiliser des bénévoles associatifs est régulièrement mis

en avant par les médias et par les responsables associatifs eux-mêmes, et où des exemples

récents montrent la capacité de mobiliser à travers les réseaux sociaux (l’exemple du

printemps arabe en est une illustration), quelques questions sur les interactions possibles

entre les associations et les réseaux sociaux numériques peuvent se poser.

C’est donc le sujet que j’ai choisi de traiter dans mon mémoire de fin de Master II « Stratégie

et Management des Entreprises Associatives de l’Economie Sociale et Solidaire ».

Pour alimenter ma réflexion, j’ai décidé de prendre l’avis d’experts du sujet traité et c’est la

raison pour laquelle je vous ai sollicité.

Question de J-Luc GADIOUX : En quelques mots pouvez-vous vous présenter ?

Réponse de François MEYNIER : je suis actuellement chargé de mission Technologies de

l’Information et de la Communication à la Ligue de l’enseignement de la Dordogne, et j’ai

également une mission déléguée « Société Numérique » auprès de la Ligue de l’enseignement

nationale.

JLG : D’après vous, les mobilisations sur les médias sociaux peuvent-elles venir se

substituer, mêmes partiellement, aux formes d’engagements associatifs plus traditionnelles ?

FM : Elles ne pourront jamais se substituer totalement aux formes d’engagements

traditionnelles qui passent par les actions de terrain (comme par exemple les activités de

Page 88: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 88

loisirs), utilisées comme autant de vecteurs pour faire passer pratiques, idées et valeurs. Elles

sont par contre un complément incontournable voire même indispensable lorsque l’on veut

communiquer sur ces actions. Les formes d’engagements associatifs traditionnelles ne

peuvent donc faire l’impasse sur ces nouveaux moyens de communication au risque de perdre

de l’audience voire de disparaitre face à des alternatives d’engagement plus axées sur de la

consommation.

JLG : Pensez-vous que l’utilisation des médias sociaux peut représenter une opportunité pour

les associations de diffuser leur projet politique et de mobiliser autour de celui-ci ?

FM : Plus qu’une opportunité, ces médias deviendront dans le futur, je pense, un des

principaux moyens de communication (en plus des moyens de communication traditionnels,

électroniques ou classiques). On assiste de plus à plus à l’émergence de la notion de « hub

informatif », où des sites tels que les réseaux sociaux agrègent, compilent, filtrent et

présentent de manière très attractive et interactive une quantité énorme d’informations sur

mesure, ciblées et formatées pour le lecteur en fonction de ses affinités culturelles et sociales.

Elles en ont donc d’autant plus d’impact. L’interactivité immédiate et moins engageante de

cette nouvelle forme de communication permet d’entrer en contact de manière horizontale

avec le public.

JLG : A votre avis, les outils numériques collaboratifs pourraient-ils aider à la mise en place

d’une gouvernance associative plus participative et démocratique ?

FM : S’il est bien un domaine clef où ces outils peuvent amener un réel plus, c’est bien celui

de la gouvernance associative. Les outils collaboratifs tels que les wikis, les forums ou encore

les groupes Facebook en sont une bonne illustration. Ils ont toujours existé, mais grâce aux

évolutions technologiques, ils sont maintenant faciles d’accès. Pour citer un exemple, la

fédération départementale de la Ligue de l’enseignement de la Dordogne dans laquelle je

travaille les a récemment utilisés afin de construire son nouveau projet politique et ce aussi

bien au niveau de la phase d’élaboration participative (à l’aide d’un wiki), qu’au niveau de la

priorisation des idées (en utilisant un système de sondage en ligne).

JLG : Ne pensez-vous pas que l’utilisation de médias sociaux de type Facebook, dont le

modèle économique est capitaliste, ne vient pas en contradiction avec les valeurs de

Page 89: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 89

l’Education Populaire, et plus globalement de l’Economie Sociale et Solidaire ? Connaissez-

vous des solutions alternatives ? Doit-on, au nom des valeurs, se priver de l’audience que

représente ce type de média ?

FM : Le modèle économique de la plupart de ces outils (dont les principaux réseaux sociaux)

est bien sûr à l’opposé des valeurs de l’Economie Sociale et Solidaire. Dans certain cas et

dans certaines pratiques, il peut même être vu comme un «ennemi » (non-respect de la vie

privée, abus de position dominante, usages commerciaux déguisés…).

Se priver de leur audience serait malgré tout contre-productif, étant donné que 77% des

internautes français sont inscrits sur au moins un réseau social et 60% d’entre eux s’y rendent

au moins une fois par jour(*). Il est donc inutile de les diaboliser, autant les utiliser ne serait-

ce que pour en faire une critique constructive.

Je pense qu’il faut avant tout faire confiance en l’humain derrière son écran.

Il ne faut pas non plus oublier que d’autres outils -comme wikipedia pour le plus connu-,

partagent au contraire les mêmes valeurs que l’ESS, basés sur des systèmes de

fondation/coopérative et de démocratie participative.

Comme on l’a vu par le passé, les choses ne restent jamais figées dans le domaine des TIC, et

rien n’empêche de rêver à l’apparition un jour d’un « Facebook à but non lucratif » gouverné

par ses utilisateurs.

(*) source médiamétrie : http://www.mediametrie.fr/comportements/communiques/plus-de-3-

internautes-sur-4-sont-inscrits-sur-un-reseau-social.php?id=698

Page 90: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 90

@crdva 24 : Etude retweets & mentions - Liens forts / Liens faibles

ABONNES A @CRDVA24 Champ d'activité

Association

affiliée à la

Ligue 24

Liens

forts

Liens

faibles

Abonnement

réciproque

Mentions

ou

retweets

Auprès

de X

abonnés

Relayé

par X

abonné(s)

auprès

de X

abonnés

1 Acteur Solidaire @ACT_SOLIDAIRE 1 oui

2 Alain Duez @LE_PLAN_ESSE

Fondateur de l'âge de faire, mensuel

national dédié à l'écologie, la

citoyenneté et la solidarité. Le Plan

ESSE c’est agir ensemble pour une

économie juste. 1 oui 1 373

3

Alexis Geo INZONZI

@AlexisKZokin 1 non

4 AOL de Périgueux @AOLPx 1 1 oui

5 associathèque @associatheque

Toutes les informations et ressources

utiles à votre #association : guides,

modèles, statuts, gestion, actualité.

Rendez-nous visite ! Un site du Crédit

Mutuel 1 oui 2 361

6 Associations @depuis1901 1 oui

7 Benjamin Roux @benjaminroux

Travaille et réfléchis sur des sujets

comme les pratiques #collectives, la

dynamique des #groupes, les

#collectifs, les #savoirs, la culture des

précédents… 1 oui 1 459

8 Bergeracnews @Bergeracnews 1 oui

9 Blog Sudouest @BlogSudouest 1 oui

10

canoes roquegeoffre

@canoedordogne 1 non

11 CAP'CINEMA @capcinema 1 non

Page 91: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 91

12 citizenplace @citizenplace

Groupes, associations, communautés

outillez-vous ! CitizenPlace, la

boutique d'applications pour répondre

à tous vos besoins. 1 oui 8 417 1 930

13 Comm Asso @CommAsso

Sébastien de mon prénom. Spécialisé

dans la #communication des

#associations. Je vous file des pistes

sur http://www.comm-asso.com Faites

briller votre asso ! 1 oui 15 347

14 comparemalin @comparemalin 1 non

15 cub pcf @cub_pcf 1 non

16

Culturedesprécédents

@CDPrecedents 1 non

17 Dukhon Laloy @DukhonLaloy 1 non

18 Ele tric Cir us @EleKtricCirKus 1 non

19

Emmanuel HAUDEBOURG

@ManuHau

Militant de l'éducation populaire,

délégué culture, éducation, territoire à

la ligue de l'enseignement, fédération

d'Indre-et-Loire 1 non 2 81

20 Festivals @festivals_ Communication sur tous festivals 1 non 1 978

21 FOL de la Nièvre @FOL58 1 oui

22 GreenDock @Green_Dock 1 non

23 Guillem Boyer @GuillemSarlat 1 oui

24 Hotels-live.com @Hotelslive 1 non

25 I love éduc pop @iloveeducpop 1 oui

26 Jean-Christo LABAILS @jclabails 1 oui

27 J-J. Berthier @JJBerthier 1 non

Page 92: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 92

28 juliaugi @juliaugi

Je tweet et retweet un peu sur tout :

Information locale, Dordogne,

#Smartphone, #HTC, #Android,

#geek, #photo, vu sur le web ! Je

recense le #PerigordHardcore 1 oui 3 580

29 La cooperative @lacoop2607

Point d'appui à la vie associative en

drome ardèche, Accompagnateur de

projets collectifs, formations,

accueil… 1 oui 1 311 1 674

30 L'echo @Echoegomalo 1 non

31 Ligue 24 @Ligue_24 1 oui

32 Ligue 18 @Ligue_18 1 oui

33 ligueenseignement37 @ligue37 1 oui

34 Loi1901.com @Loi_1901

La Maison des Associations loi 1901

sur Internet depuis 1999 -

Loi1901.com - #Associationsloi1901 1 oui 10 653 3 2216

35 Mickael Huet @mickaelhuet 1 non

36 NetPublic @netpublic 1 oui

37 Objectif Aquitaine @ObjectifAqui

Objectif Aquitaine, premier magazine

régional d'informations en Aquitaine. 1 non 1 1095

38 paysagiste dordogne @ldel244 1 non

39 Périgordin @perigordin 1 non

40 PICVERT @PICVER45 1 non

41 Pierre Labrunie @pierrelabrunie 1 oui

42 quentin brackers @quentinbdh 1 non

Page 93: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 93

43

RIBARDIERE Matthias

@MattRiba

Animateur socioculturel, militant de

l'éducation populaire. Agent de

développement chargé de la jeunesse

à la ligue de l'enseignement 37. 1 oui 2 26

44

Roman Laventure

@romainlaventure 1 1 oui

45 RunOrg @RunOrg

Et si gérer une organisation devenait

simple ? Tout pour faciliter la vie des

responsables et simplifier la

communication entre leurs membres 1 oui 2 348

46 sahmy chiab @largo69 1 non

47 Sébastien Laborde @Slaborde33 1 non

48 Some Produkt @someprodukt 1 oui

49

SORTIES DORDOGNE

@sortiesdordogne 1 non

50

SportEmploiAnimation

@SportEmploiAnim 1 non

51 ZenOuPresque @Zenoupresque 1 non

TOTAUX 2 7 44 0 49 6029 5 3820

Page 94: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 94

NON ABONNES A @CRDVA24 Champ d'activité

Liens

forts

Liens

faibles

Abonnement

réciproque

Mentions

ou

retweets

Auprès

de X

abonnés

Relayé

par X

abonné(s)

auprès

de X

abonnés

52 Girard Bérengère @line_soft

Agence de communication Web

marketing 1 non 1 183

53 LA LETTRE @LALETTRE

Nous souhaitons que vous interveniez

afin que ces agissements s’arrêtent

sans délais et que ces comptes soient

supprimés. 1 non 2 322

54 Bouillaud @pbouillaud

Patrick Bouillaud ,Cloud Business

developpement 1 non 1 1477

55 Sue Laurent @saurent

militant et responsable associatif.

ligue de l'enseignement de la loire 1 non 1 7

56 INJEP @Injep

Institut national de la jeunesse et de

l'éducation populaire Observatoire de

la jeunesse et des politiques de

jeunesse 1 non 1 787

57 Ekolo geek @Ekologeek

Association d'Education à

l'Environnement 1 1 non 1 133

58 MASCL @MASCL

MA in Strategic Communication &

Leadership at Seton Hall. Leo Bottary

invites you to share your insights on

both topics and learn about our online

program. 1 non 2 863 2 488

59

I. GILLETTE-FAYE

@FederationGAMS

Sociologue, Directrice du GAMS,

depuis 1990. Page FB 1 non 1 1276

60 JEANSOLEIL77 @JEANSO ? 1 non 1 150

61 Gullibear @iamgullibear

A place for tiny and giant ideas where

people build projects together.

#launchingsoo 1 non 1 224

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Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 95

62 Le Marsu @Le_Marsu

Méchant bot qui répond aux messages

contenant ou pas. Compte non officiel

à but humoristique. 1 non 1 4870

63

Bertrand CHARLET

@BertrandCharlet Manager produits frais Super U 1 non 1 2456

64 Edouard @jcktt co-founder and sociology student. 1 non 1 300

65 Le Page Gilles @lepagegilles

Auto-entrepreneur, formateur conseil :

tourisme, etourisme, TIC, web2.0,

epedagogie, Moodle, management de

projets TIC 1 non 1 508

66 Sorties et Loisirs @sortiesloisirs

Guide loisirs dédié aux sorties,

activités manuelles, créatives et

sportives en famille ou entre amis 1 non 2 397

67 Pierre Betainger @vttvelo

fan de VTT et je vais partager avec

vous mes découvertes sur internet. 1 non 1 50

68 Michelle McManus @mus

I dig Zumba and I am working

towards a black belt in Tang Soo Do.

Lover of unicorns and funny cat pics.

I adore The Oatmeal. Single mom. 1 non 1 1333

69 Stéphane Caillaud @s_caillaud

Médiateur/Facilitateur Internet

(orienté PKM et KM) 1 non 1 347

70 @credit_agri_PG Crédit Agricole Charentes Périgord 1 1 823 3 1042

71 @kupaia ? 1 1 181 1 394

72 @fcuignet

conseiller d education populaire et de

jeunesse a epinal 1 1 674

TOTAUX 1 3 18 0 24 17361 6 1924

TOTAUX GENERAUX 3 10 62 0 73 23390 11 5744

Page 96: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Master Stratégie et Management des Entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire J-Luc GADIOUX

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ? Page 96

Synthèse étude retweets & mentions - Liens forts / Liens faibles

Liens

forts

Liens

faibles Abonnés

Non

abonnés totaux

Totaux

10 62 51 21 72

Nbre de personne ayant diffusé l'Info.

13 21 34

Nbre de retwittes ou mentions

5 68 49 24 73

Nbre d'abonnés ayant reçu l'information

729 28405 9849 19285 29134

%

3% 97% 34% 66%

Page 97: Mémoire Master II - Associations et médias sociaux : Relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Titre du mémoire :

Associations et médias sociaux : relation de complémentarité ou de substituabilité ?

Nom et Prénom de l’auteur : Jean-Luc GADIOUX

Année 2012

Mots-clés :

Médias Sociaux, Associations, Engagement, Logiciels Libres, Education Populaire

Résumé :

Ce mémoire a pour thème les médias sociaux en ligne et leurs interactions possibles avec les

associations. Il s’inscrit dans un contexte où les responsables associatifs, relayés par certains

médias, évoquent une crise du bénévolat, et où émergent des mobilisations citoyennes

facilitées par l’engagement à travers les médias sociaux en ligne. Dans la première partie de

ce mémoire, nous définissons ce qui caractérise l’engagement associatif. Puis nous étudions

les risques de substitution de l’engagement militant traditionnel par les médias sociaux en

ligne, et les opportunités que peuvent représenter ces derniers pour le monde associatif. Dans

un deuxième temps, appuyés par la théorie de Marck Granovetter, « la force des liens

faibles », nous nous efforçons de montrer en quoi les médias sociaux peuvent être des outils

de renforcement d’un réseau militant et comment ceux-ci peuvent permettre d'élargir la

diffusion du projet politique des associations. Enfin, est posée la question de l'adéquation du

ou des médias sociaux issus de l’économie marchande avec les valeurs de l'Education

Populaire, et des liens éventuels avec le mouvement du Logiciels Libres.

Key words :

Social networks, Associations, Commitment, Free software, Popular education

Abstract :

This research paper is concerned with the possibilities for interactions between online social

networks and associations (i.e. community – based groups). This issue is closely related to the

fact that the voluntary sector is going through a crisis, as voiced by association officials

through certain media, and that private citizens tend to organize themselves into groups via

their involvement in online social networks.

In the first part of this paper, we aim to study the main features of community-based groups’

commitment. We then move on to study the risks of substituting traditional activism with

online social media on the one hand, and the opportunities that online social media may offer

to community-based groups on the other hand.

In the second part, relying on Marck Granovetter's theory entitled "The strength of weak ties",

we aim to show how social networks may support and strengthen the activism of community-

based groups and how they may be used to widen the audience for community-based groups’

political proposals.

We finally raise the issue of whether the social media born from our market economy may

uphold the values of Popular Education, and of potential links with the Free Software

Movement.