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Hors-série 2020 Chroniques de la crise sanitaire Chapitre 3 MESSAGERIES10 Le magazine des étudiants internationaux de l'Ecole Suisse à Paris

MESSAGERIES10 · 2020. 10. 18. · Hors-série 2020 Chroniques de la crise sanitaire Chapitre 3 En sortie culturelle à Paris : Urs, Mattia, Claudio et Alexis. Photo : Alfons Gelleweiler

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Page 1: MESSAGERIES10 · 2020. 10. 18. · Hors-série 2020 Chroniques de la crise sanitaire Chapitre 3 En sortie culturelle à Paris : Urs, Mattia, Claudio et Alexis. Photo : Alfons Gelleweiler

Hors-série 2020

Chroniques de la crise sanitaire

Chapitre 3

En sortie culturelle à Paris :Urs, Mattia, Claudio et Alexis.

Photo : Alfons Gelleweiler

N°1 - Décembre 2019

M E S S A G E R I E S 1 0L e m a g a z i n e d e s é t u d i a n t s i n t e r n a t i o n a u x d e l ' E c o l e S u i s s e à P a r i s

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Et voici la suite de vos créations ! Nous partirons cette fois au Japon, en Suisse, en Allemagne, dans le sud de la France, et en République dominicaine. Dans ce chapitre, vous pourrez découvrir, grâce aux réflexions de Yoko à Osaka, le monstre Amabié et l’épidémie de « korori ». Mais aussi les bonnes résolutions ainsi que les expérimentations culinaires d’Irina à Düsseldorf, le quotidien sans inquiétudes particulières de Jan à Zürich, les aventures de Fifi à Montpellier, qui nous dévoile ses techniques pour ne pas déprimer, et le couvre-feu en vigueur à St-Domingue, auquel Laura s’est apparemment assez bien adaptée.. Avec quelques belles photos en prime !

Bonne lecture et à la semaine prochaine pour le chapitre 4 !

Thierry

PS : Pour celles et ceux qui auraient loupé nos 2 premiers chapitres, vous pouvez les trouver ici :

Messageries10-Hors-serie 2020-Chapitre 2

Messageries10-Hors-serie 2020-Chapitre 1

Et vous pouvez toujours nous envoyer vos nouveaux textes….

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De République dominicaine Je suis Laura Lovatón, dominicaine, chanceuse de vivre sur une île des Caraïbes où le temps est agréable et chaud la plupart du temps.

mon quartier. J’habite dans un appartement au 10ème étage.

Vue depuis mon balcon

unique, il s’appelle Camilo.

Je travaille comme professeur mais aussi comme coordinatrice de langues à l’université UNAPEC. Le 15 mars on a été convoqués à une réunion avec les autorités et le recteur de l’université pour nous informer que le mercredi 18 mars, on allait commencer à travailler en ligne depuis notre maison. Au début, tout le monde était surpris et je me suis demandé comment tout cela allait se passer : pour les cours, la coordination avec les professeurs, surtout qu’il y a encore des professeurs qui ne sont pas très doués avec la technologie : leur demander de faire des cours virtuels c’est compliqué,

mais grâce à leur volonté et esprit de collaboration ils ont réussi à le faire. Normalement, on travaille et on a des femmes de ménage qui viennent à la maison, le concierge de l’immeuble, mais tout cela a été arrêté pendant le confinement, chaque propriétaire doit nettoyer chaque entrée de son étage pour conserver l’hygiène et les personnes qui viennent de l’extérieur ne peuvent pas entrer dans l’immeuble.

gants pour sortir. Au supermarché, les personnes gardent leurs distances et il ne faut pas entrer à plus de 10 personnes à la fois. Ni les transports publics ni le métro ne fonctionnent en ce moment.

-feu de 17 heures à 6 heures du matin chaque jour. Les pompiers font retentir la sirène chaque après-midi pour annoncer que tout le monde doit rentrer chez soi.

Les horaires pour les supermarchés, banques et pharmacies sont réduits. Et les commerces sont évidemment fermés. Les écoles et les universités travaillent en ligne. Pour moi qui suis habituée à sortir tous les jours, c’est une vie de prisonnier domiciliaire. En même temps, j’en profite pour faire un peu de sport et pour faire du rangement chez moi. Je fais la cuisine et le point positif, c’est d’être en famille

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et plus de temps à la maison. Pour la famille plus proche on s’appelle par WhatsApp et pour mes ami(e)s, c'est la même chose.

Laura L, le 14 avril

Du sud de la France “Fifi, j’ai acheté le billet de retour pour les États-Unis aujourd’hui. Je suis désolé de prendre cette décision si vite et de ne pas te voir une dernière fois avant mon départ, je pars demain.” J’étais muette quand j’ai reçu le message. On avait seulement deux mois de souvenirs ensemble. “L’Amour et les fleurs ne durent qu’un printemps”, de Pierre de Ronsard. Je ne peux pas être plus d’accord. Le 16. Mars, je suis allée en classe comme d’habitude et tout le monde était très tranquille, il s’est assis à côté de moi comme toujours, le professeur a joué la vidéo pour nous faire pratiquer les pronoms compléments. Il n’y avait personne qui portait le masque, ni personne qui avait prévu que ce jour-là était la dernière fois qu’on était dans la classe ensemble. Pourtant, ma vie a changé juste après le discours du président Macron le soir du lundi 16

mars. Le confinement a commencé le 17 mars ! Je me suis ruée au supermarché, c’était fou! Les étagères et les frigos étaient presque vides, je me suis aperçu qu’on était en guerre, la guerre du virus, des ressources, des produits alimentaires, et du papier toilette ! Les jours suivants, j’ai reçu des messages de ma famille et de mes amies qui m’ont demandé de rentrer à Taïwan. J’ai dit “non” sans trop réfléchir, parce que je ne voulais pas partir à cause de ma peur, je voulais partir quand il serait temps et quand je serais prête. Donc, j’étais dans le confinement à Montpellier pendant cinquante-cinq jours. Heureusement, il faisait beau et je me levais avec le soleil tous les jours. Les deux premières semaines, j’ai mangé, dormi, regardé les films et j’ai révisé, du coup j’ai grossi ! C’était déjà triste de me faire larguer pendant le confinement, ça aurait été encore plus triste s’il n’y avait plus personne qui allait glisser son doigt vers la droite pour mes photos sur Tinder après le confinement ! J’ai décidé de changer. J’ai commencé à courir dans la petite forêt où il y a une rivière et un grand château, je découvrais la ville à mes pieds petit à petit, toute seule. Je faisais beaucoup de sport, aussi je buvais du thé au citron avec du gingembre sans sucre le matin pour avoir le teint frais. Je rêvais d’être canon après le confinement, j’y pensais tous les jours, c’était la source d’énergie qui m’a soutenue !

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Rester chez soi longtemps pourrait vous rendre émotif et déprimé, il faut faire quelque chose qui rend positif. J’ai une colocataire qui parle français et arabe ; au début elle chantait des chansons françaises et arabes, un jour, elle a commencé à chanter des chansons de Charlie Puth en anglais, c’était très cool d’avoir de l’énergie comme ça ! Et l’autre jour, je suis passée dans la cuisine et j’ai vu une de mes colocataires qui portait une jolie robe et des boucles d’oreilles rouges, elle avait l’air élégante. Tout à coup, elle s’est accroupie et a commencé à peler les pommes de terre. Nous nous sommes regardées et avons ri, nous avons compris que nous n’avions pas sacrifié notre vie ou notre beauté ! J’ai vraiment eu de la chance d’avoir des colocataires si sympathiques et nous avons appris à mieux nous connaître pendant ce confinement. La crise et le confinement bouleversent nos projets et nos vies, mais nous pourrions voir le verre à moitié plein : cette période nous a donné du temps comme jamais nous n’avions eu auparavant, pour prendre soin de nous physiquement et spirituellement. C’est aussi l’occasion pour nous de réfléchir à nos vies d’avant et de planifier notre avenir. “Ça fait longtemps, comment ça va, Fifi ?” “Tout va bien, merci.” Je lui ai répondu. Je l’ai reçu aujourd’hui, le jour du déconfinement, j’étais calme et mon cœur n’est plus brisé. C'est d'abord l'amour qui te fait oublier le temps, après c'est le temps qui te fait oublier

l'amour. Je ne peux pas être plus d’accord.

Fifi, Montpellier, le 12 mai

De Suisse Je suis vraiment heureux d'apprendre que vous allez bien : vous les deux rois de la langue française :-) Je peux m'imaginer que c'est un grand choc pour l'école, c'est la crise, comme pour tous les aspects de la vie sociale et économique. Horrible !!! Je pense que le confinement en France est super dur, en Suisse on est plus libres (heureusement !!!) Je suis toujours un peu étonné que le peuple français accepte tout ça. Normalement on discute, on débat, on fait des manifs etc. etc. etc. Et maintenant on reste très disciplinés je crois. Respect !!! C'est intéressant comment les différents pays gèrent cette pandémie d'une manière complètement différente. Je crois que les systèmes fédéraux fonctionnent mieux que les pays au pouvoir très centralisé (comme la France). Mais peut-être avez-vous une autre opinion ? Moi je vais bien, j'ai pas du tout peur pour cette maladie et je sors régulièrement. Je lis tous les jours un peu, un roman policier français pour rester (un peu) en forme ! J'espère vous voir. Paris nous manque, à ma copine et à moi, (nous avons dû annuler notre voyage à Paris) :-(

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Nous faisons souvent, à deux, des petites excursions à Bienne, une ville bilingue. J'espère que je n'ai pas fait trop de fautes ici... Et....comment vont les "filles russes"??? Un grand merci, bonne santé (STOP SMOKING GUYS!) et au revoir à vous, donnez les salutations à Corinne et au chef, s'il vous plait

Jan, Zürich, le 23 avril Du Japon À Osaka, au Japon, le 20 mai. Il fait beau et il fait 23 degrés. C’est le 7 avril que l’autorité japonaise a déclaré l’état d’urgence à cause de la pandémie de covid-19. Actuellement, on compte 16,394 cas dans cet archipel ; 773 personnes en sont décédées. Depuis lors on vit sous le confinement. Mais il s’agit en effet d’une « recommandation » et il n’y a aucune sanction. Ainsi, dans la rue, on voit des gens sortir, se promener ou faire du jogging, des enfants jouer dans les parcs. En s’armant d’un masque. Certains en font à la main, pour ajouter un petit accent chic à sa tenue. Un autre « must », c’est Amabié, un monstre folklorique apparu en 1846. Dans un document officiel, un fonctionnaire d’antan a enregistré ses

propos, ainsi que son image : « lors des désastres, dessinez mon image, ce sera un talisman ». Presque tous les grands magasins et les centres commerciaux sont fermés, sauf le rayon alimentaire. Le centre-ville ressemble maintenant un peu au monde de la science-fiction. J’essaye d’imaginer un futur proche où la pandémie ne se terminerait jamais : on se retirerait chez soi toute sa vie, l’éducation, le travail, le divertissement, tout se ferait par internet… J’habite dans un vieux quartier calme et historique. Il y a beaucoup de petits magasins locaux et indépendants, dont la plupart sont ouverts. Les restaurants ont commencé les services « à emporter », mais à part cela, apparemment, rien n’a changé. Dans une épicerie traditionnelle, une vieille dame achète un poireau en bavardant, comme d’habitude. Au 19e siècle, une autre épidémie, « korori », c’est-à-dire le choléra, a ravagé le Japon. Dans les journaux de l’époque, on pouvait lire des recommandations* partout : « se laver les mains », « aérer la maison », « tout stériliser après une sortie » …, encore aujourd’hui, il paraît que les mesures préventives n’ont guère progressé. Les pierres de ces maisons anciennes devraient encore en garder la mémoire. La saison des cerisiers passée, maintenant les azalées sont en fleurs. A présent, un des magasins les plus occupés, c’est le fleuriste, dit-on : on admirerait la nature pour se consoler. Sur les réseaux sociaux, certains se

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solidarisent, d’autres échangent de vives injures. Le chômage et les faillites ne cessent qu’augmenter, pourtant le taux de suicide de ces derniers mois a visiblement diminué. Et le ciel bleu de mai est beau, tout indifférent à la catastrophe des humains. Il n’y a jamais une seule réalité.* En travaillant à distance tous les jours toute seule dans mon appartement, quelquefois je ne distingue plus le jour de la nuit, et dans une répétition éternelle de quiétude étrange, je contemple les étoiles et écoute le bruissement des feuillages, la tête vide. Cela me rappelle que je suis un animal. Et je vis. Demain, Osaka va se déconfiner. Mais le poids de tout ce qui est invisible va augmenter de plus en plus. Le monde va-t-il définitivement se transformer ? On ne le sait pas. Mais le désir de communication, un de nos instincts les plus primitifs, ne va pas trop changer. Ainsi j’apprends le français, j’écris et je continuerai d’écrire…

Yoko H, le 20 mai

D’Allemagne Bonjour à tous, je m’appelle Irina et je suis une ancienne étudiante de l’Ecole Suisse Internationale à Paris. Je viens de Russie et j’habite à Duisburg, en Allemagne en ce moment. Les cinq semaines où j’ai appris le français, ont été inoubliables et je me réjouis énormément de participer à la vie de l’Ecole à nouveau !

Sans aucun doute, la quarantaine avec son « confinement » ont affecté la vie sociale de tous les gens de la planète. En tant que musicienne indépendante, je me suis sentie très frustrée mais j’ai essayé de rester forte et de se fixer quelques buts. En quelques lignes je voudrais vous faire part de quelle façon j’ai organisé mon quotidien pendant la mise en quarantaine. Mes objectifs principaux :

- Apprendre tous les airs du « Messie » de Haendel*

* tout le monde connait son fameux « Alléluia » :)

- Faire du Yoga - Lire 5 livres

- Apprendre la cuisine française !

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Je suis chanteuse lyrique et c’est très important de rester en forme. Pour cela, j’essaye de prendre des cours de chant 2 fois par semaine. Grâce à « Face Time » cela marche très bien et c’est aussi très agréable car on peut s’arranger d’une manière plus spontanée pour organiser une leçon.

En plus, je trouve yoga super pour les chanteurs, car cette pratique est basée sur la respiration, comme le chant. Avec les technologies d’aujourd’hui, je peux faire du yoga à la maison.

Et… j’essaye de lire—que ce soit entre les promenades, le ménage, les cours ou avant de me coucher—j’essaye de le faire car c’est le moment parfait pour rattraper un peu la lecture pour laquelle je ne trouvais pas beaucoup de temps dans mon rythme de vie, d’habitude trépidant. Je suis sûre que la plupart d’entre nous fera diverses découvertes pendant la mise en quarantaine – cela peut être une nouvelle langue, une nouvelle passion artistique comme la musique ou la peinture… ou tout simplement un autre regard sur la vie. Et alors, les nouvelles les plus fraîches :

j’ai un livre « Grands classiques » de la cuisine française et j’ai décidé de tenter le coup ! Mon premier essai, et ma première réussite à la fois, était « Le bœuf bourguignon ». Maintenant, j’ai envie de découvrir d’autres classiques de la cuisine française, peut-être plus compliqués et plus raffinés, et aussi, gagner plus d’autonomie en apprenant à faire de différents types de la pâte moi-même, par exemple. J’ai hâte de découvrir toute ses gourmandises !

En ce moment, j’arrive à faire tous mon programme et ne m’ennuie pas. Mais qui sait, pour combien de temps les restrictions actuelles seront maintenues. En tout cas, restons optimistes ! En vous souhaitant tout le meilleur en ce moment difficile, prenez soin de vous,

Irina, Duisbourg, le 10 avril